Insuffisance rénale aigue

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2015

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  • CHAPITRE 14

    Item 343

    INSUFFISANCE RNALE AIGU

    I. DFINITIONS

    Linsu sance rnale aigu (IRA) est d nie par la baisse brutale et importante de la ltration glomrulaire.

    Elle est habituellement rversible aprs traitement. La diurse peut tre conserve au cours de lIRA. Loligoanurie est d nie par une diurse infrieure 500 ml/24 heures ou 20 ml/heure. Les formules destimation du dbit de ltration glomrulaire ne sont pas applicables pour d nir

    lIRA, ni mme sa svrit. Seule, la valeur de la cratinine plasmatique est utilisable. Plusieurs d nitions ont t proposes, une des plus simples est la suivante :

    lvation dau moins 44,2 mol/l (5 mg/l) si la cratinine plasmatique (Scr) antrieure tait infrieure 221 mol/L ;

    lvation dau moins 20 % si la cratinine plasmatique antrieure tait suprieure 221 mol/L.

    UE 11. Urgences

    N 343. Insuf sance rnale aigu - Anurie

    OBJECTIFS

    Diagnostiquer une insuffisance rnale aigu (IRA) et une anurie Diagnostiquer une IRA fonctionnelle, obstructive et parenchymateuse Connatre les principales causes des IRA Argumenter les principes du traitement et la surveillance des IRA.

    Objectifs annexes :

    Connatre les diffrentes modalits thrapeutiques mettre en uvre pour traiter une insuf sance rnale aigu fonctionnelle (modalits et surveillance).

    Connatre les conditions dutilisation des mthodes de remplissage vasculaire (expansion vol-mique) et de lutilisation des diurtiques au cours de lIRA.

    Connatre les principales modalits de prvention des insuf sances rnales aigus, en particulier les IRA toxiques (PCI, mdicaments).

    Connatre les principes gnraux du traitement de linsuf sance rnale aigu et les indications de la dialyse.

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    A n de rendre homogne la d nition et les di rents stades des IRA, une classi- cation baptise RIFLE a t propose, elle est de plus en plus utilise. Les trois premiers stades R, I et F donnent la svrit et les deux derniers, L et E, le pronostic :

    R pour Risk ; I pour Injury ; F pour Failure ; L pour Loss of function ; E pour End-stage renal disease .

    Risk

    Fonction Rnale Diurse

    Augmentation de Scr x 1,5Diminution du DFG > 25 %

    Augmentation de Scr x 2,0Diminution du DFG > 50 %

    Augmentation de Scr x 3,0Diminution du DFG > 75 %

    Scr 355 mol/LAugmentation

    d'au moins 44 mol/L

    D < 0,5 ml/kg/h x 6 h

    D < 0,5 ml/kg/h x 12 h

    D < 0,3 ml/kg/h x 24 hAnurie sur 12h

    IRA svre > 4 semaines

    IR terminale > 3 moisEnd-stage renal disease

    Loss of function

    Failure

    Injury

    Ces di rents stades sont corrls au pronostic vital de lIRA en ranimation.

    II. PHYSIOPATHOLOGIE ET PRINCIPAUX TYPES DIRA

    A. Les dterminants de la ltration glomrulaire Le dbit de ltration glomrulaire (DFG) dpend de plusieurs paramtres physiques.

    Il est modlis par la formule :

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    DFG = PUF x Kf

    O : PUF = Gradient de pression transcapillaire glomrulaire (pression dultrafi ltration),

    Kf = coefficient de fi ltration.

    PUF dpend : de la di rence de pression hydrostatique entre le capillaire glomrulaire

    (Pcg, voisine de 45 mm Hg) et la chambre urinaire du glomrule (Pu, voisine de 10 mm Hg) ;

    et de la di rence de pression oncotique entre le capillaire glomrulaire (cg, denviron 25 mm Hg) et la chambre urinaire (u qui est nulle ltat normal).

    do PUF = (Pcg Pu) (cg u)

    Le dbit sanguin rnal napparat pas directement dans lquation du DFG, mais la pression hydrostatique du capillaire glomrulaire dpend du ux sanguin et de la di rence de rsistances entre les artrioles a rentes (RAF) et e rentes (REF) ( gure 1).

    Figure 1. Composantes de lhmodynamique glomrulaire

    B. Les mcanismes de linsuf sance rnale Ainsi la ltration glomrulaire baisse ou sannule quand :

    le dbit sanguin rnal diminue (hypovolmie, tat de choc) ; les REF diminuent (vasodilatation de lartriole e rente glomrulaire) ; les RAF augmentent (vasoconstriction pr-glomrulaire) ; ou encore si la Pu augmente (obstacle intratubulaire ou sur la voie excrtrice).

    Kf est un coe cient de ltration qui intgre la permabilit du capillaire glomrulaire et la surface de ltration. On ne connat pas de baisse primitive de la permabilit comme cause dIRA.

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    C. Principaux types dIRA

    1. LIRA obstructive, ou post-rnale

    Elle est due un obstacle sur la voie excrtrice ou une obstruction intratubulaire rnale.

    La Pu augmente et annule la pression de ltration quand elle est gale la pression du capillaire glomrulaire.

    En cas dobstacle sur la voie excrtrice, lIRA napparat que si lobstacle est bilatral ou sur un rein unique.

    Lobstacle peut tre incomplet, et nest donc pas toujours associ une anurie. Une polyurie hypotonique peut mme tre observe, par diabte insipide nphrognique.

    En e et, lhyperpression dans les voies urinaires : bloque la ltration glomrulaire ; entrane une redistribution du ux sanguin rnal ; et empche la constitution du gradient osmotique cortico-mdullaire ncessaire

    le et de lADH.

    2. LIRA fonctionnelle, ou pr-rnale

    Elle est lie une diminution du ux sanguin rnal et de la pression de perfusion. Le parenchyme rnal est intact, la baisse de la ltration glomrulaire est une cons-

    quence de lhypoperfusion rnale. Lhypoperfusion rnale stimule :

    la synthse et la scrtion de rnine par lappareil juxtaglomrulaire, et donc la formation dangiotensine II et la scrtion daldostrone ;

    le systme sympathique priphrique ; et la scrtion dADH.

    Les consquences rnales sont : dans les glomrules : vasoconstriction post-glomrulaire de lartriole e rente

    visant maintenir la pression de ltration malgr la chute du dbit sanguin rnal. Au-del dune certaine limite cependant, ladaptation nest plus possible et la pression de ltration chute. Linsu sance rnale fonctionnelle apparat alors ;

    dans les tubules : rabsorption tubulaire proximale, lie la baisse de pression hydrostatique

    dans les capillaires pritubulaires, rabsorption distale accrue de sodium sous le et de laldostrone, rabsorption deau sous le et de lADH.

    Lurine excrte est donc peu abondante (= oligurie), pauvre en sodium, riche en potassium, acide, et trs concentre en osmoles (particulirement en ure). La rab-sorption deau par le tubule collecteur saccompagne dune rabsorption passive dure, expliquant laugmentation plus importante de lure plasmatique que de la cratinine au cours des IRA fonctionnelles.

    Une forme particulire dIRA fonctionnelle est celle lie labsence de vasoconstric-tion de lartriole e rente sous le et des bloqueurs du systme rnine angiotensine (inhibiteurs de lenzyme de conversion, antagonistes du rcepteur de langiotensineII ou inhibiteur direct de la rnine). Dans ce cas, la Ref naugmente pas et la baisse de la pression de ltration est suivie dune chute de la ltration glomrulaire. Cela est surtout observ en cas de stnose de lartre rnale ou de lsions athromateuses sur les artrioles prglomrulaires (nphroangiosclrose), chez des sujets dshydrats. La prise danti-in ammatoires non strodiens, qui empchent la synthse de pros-taglandines vasodilatant lartriole a rente, peut jouer un rle aggravant.

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    3. Les IRA parenchymateuses

    Elles sont dues des lsions anatomiques des di rentes structures du rein : les plus frquentes sont les ncroses tubulaires aigus (NTA), mais lIRA peut aussi compliquer les nphropathies interstitielles, glomrulaires ou vasculaires aigus.

    Au cours des NTA, deux mcanismes sont le plus souvent en cause et souvent asso-cis : lun ischmique, lautre toxique.

    Cas des NTA ischmiques

    La baisse du ux sanguin rnal au cours des tats de choc est lorigine dune ischmie rnale, en particulier dans la zone externe de la mdullaire externe, lendroit o la PaO2 est spontanment basse (environ 40 mm Hg) et o les besoins nergtiques sont importants pour permettre les transports tubulaires.

    Lischmie aboutit des modi cations du mtabolisme intracellulaire des cellules pithliales tubulaires :

    activation de phospholipases et de protases ; production de radicaux libres drivs de loxygne ; activation des gnes impliqus dans lapoptose.

    La ncrose des cellules pithliales tubulaires est la principale lsion anatomique (vaisseaux, glomrules et interstitium restent normaux).

    Paradoxalement, le ux sanguin rnal est constamment et durablement diminu au cours des NTA constitues, et la ltration glomrulaire est e ondre, moins de 10 % de la valeur normale.

    Ces modi cations hmodynamiques, sans traduction anatomique, tmoignent dune vasoconstriction intrarnale pr et post-glomrulaire majeure et dune augmentation de la pression intratubulaire. La vasoconstriction est mdie par plusieurs agents :

    langiotensine II ; lendothline 1 ; les catcholamines ; le thromboxane A2 ; et un d cit en substances vasodilatatrices tels que la PGE2, et le NO.

    Lexcs de Na+ au niveau de la macula densa, li au dfaut de rabsorption tubulaire du Na+ par le tubule ischmique, pourrait activer le feed-back tubulo-glomrulaire, et expliquer la vasoconstriction prglomrulaire tant que dure la ncrose tubulaire aigu.

    Figure 2. Mcanismes des ncroses tubulaires ischmiques

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    Laugmentation de la pression intra-tubulaire, qui tend galement diminuer la ltration glomrulaire, rsulte de laccumulation intra-tubulaire de dbris cellulaires ncross et de cellules intactes desquames de la membrane basale tubulaire.

    Lanurie, qui accompagne les formes les plus svres de NTA, est due la baisse importante de la ltration glomrulaire, elle-mme lie la baisse de la pression dans le capillaire glomrulaire et laugmentation de la pression intra-tubulaire (PIT). Elle est aussi en partie explique par la rtro-di usion de lurine travers lpithlium ls.

    Les autres IRA parenchymateuses

    LIRA des autres formes datteintes rnales obit des mcanismes di rents : au cours des glomrulonphrites ou des microangiopathies thombotiques, la

    baisse du Kf semble jouer un rle prdominant, essentiellement par baisse de la surface de ltration ;

    au cours des nphrites interstitielles aigus, ldme interstitiel augmente la pression intrarnale diminuant ainsi le ux sanguin et la pression de ltration glomrulaire ;

    au cours de certaines nphropathies tubulaires cest lobstruction lie la prci-pitation intratubulaire de myoglobine (rhabdomyolyse), dhmoglobine (hmo-lyses massives), ou de chanes lgres dimmunoglobulines (mylomes) qui est lorigine de lIRA.

    Les IRA fonctionnelles et les IRA organiques sont de loin les plus frquentes. titre dexemple la rpartition des di rents types dIRA dans un service de ranimation est indique dans la gure 3.

    45

    21

    10

    1

    1,6

    13

    4,5

    NTA

    IRAF

    IRA Obstructive

    IRA Vasculaire

    NTIA

    IRA/IRC

    Autres

    Figure 3

    III. DIAGNOSTIC POSITIF DE LIRA

    Il repose sur un interrogatoire, un examen clinique complet, un bilan biologique sanguin et urinaire et certains examens morphologiques, selon le contexte tiologique.

    A. Le caractre aigu de linsuf sance rnale Linsu sance rnale est a rme devant une augmentation rapide de lure plasma-

    tique et de la cratininmie en quelques jours ou semaines.

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    Elle est aigu : si la fonction rnale tait normale auparavant ; si les reins sont de taille normale ou augmente ; labsence danmie et dhypocalcmie est aussi en faveur du caractre aigu rcent,

    mais leur prsence nlimine pas le diagnostic dIRA.

    B. Diagnostic diffrentiel entre IRA et insuf sance rnale chronique Schmatiquement, de nombreux points opposent ces 2 entits (tableau 1) mais il est

    parfois di cile de trancher, lorsque la fonction rnale antrieure nest pas connue notamment.

    Tableau 1 : Principaux signes distinctifs entre insuf sance rnale aigu et insuf sance rnale chronique

    Signes IRA IRC

    Anmie Habituellement absente Souvent prsente

    Hypocalcmie Absente Prsente

    Atrophie rnale bilatrale Le plus souvent absente Souvent prsente

    Pricardite Absente Possible

    Des aggravations aigus parfois rversibles peuvent survenir chez des patients ayant une IRC, par exemple aprs injection de produits de contraste iods ou lors de la prise danti-in ammatoires non strodiens.

    LIRA peut tre associe une anmie, en cas dhmolyse aigu ou de choc hmor-ragique eux-mmes lorigine de lIRA.

    Une hypocalcmie prcoce et parfois profonde peut tre prsente au cours des IRA secondaires une rhabdomyolyse.

    En revanche, des reins de taille normale ou augmente peuvent se voir dans certaines formes dIRC (diabte, mylome et amylose, polykystose). Seule latrophie rnale bilatrale permet da rmer le caractre chronique de lIRC.

    C. Diagnostic diffrentiel entre anurie et rtention aigu durine En cas danurie, la formation durine par les reins est arrte alors que lors dune

    rtention aigu durine, larrt de la diurse est li un dfaut de vidange vsicale. La recherche dun globe vsical doit tre systmatique chez tout malade oligo anu-

    rique +++.

    IV. LES INSUFFISANCES RNALES AIGUS OBSTRUCTIVES

    1. Prsentation clinique

    LIRA obstructive doit tre voque devant : des antcdents de lithiase de lappareil urinaire ; de cancers digestif ou utrin ; de tumeur prostatique ou vsicale.

    Le dbut peut tre marqu par une douleur lombaire uni ou bilatrale ou une hma-turie macroscopique avec caillots.

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    Il faut rechercher un globe vsical ; un blindage pelvien au toucher vaginal ou au toucher rectal.

    Les IRA obstructives sont a rmes sur la mise en vidence dune dilatation des cavits pyelocalicielles lchographie rnale. La taille des reins est normale. La dilatation est bilatrale, ou unilatrale sur un rein fonctionnellement ou anatomi-quement unique. Une simple hypotonie des cavits pylocalicielles, ou labsence de dilatation des cavits ne permet pas dexclure une origine obstructive lIRA, notam-ment quand lobstacle sest install brutalement et que le malade est oligo-anurique.

    LASP permet de reprer un ou plusieurs calculs radio-opaques La tomodensitomtrie rnale est utile :

    pour le diagnostic des IRA obstructives devant une suspicion din ltration rtro-pritonale tumorale ou breuse ;

    mais risque daggraver lIRA cause de la toxicit des produits de contraste iods. Si ncessaire, une uro-IRM aprs injection de gadolinium peut permettre de

    visualiser les voies excrtrices. LUIV nest plus pratique aujourdhui (risque de toxicit li aux produits de contraste

    iods).

    En pratique devant toute IRA, une chographie de lappareil urinaire doit tre ralise la recherche dune dilatation des cavits pylocalicielles et dun obstacle sur les voies urinaires

    2. Causes des IRA obstructives

    Les principales causes dIRA obstructives sont listes dans le tableau 2.

    Tableau 2 : Principales causes dIRA obstructives

    Lithiases urinaires

    Calcul unilatral sur rein fonctionnel unique ou lithiases bilatrales

    Pathologie tumorale

    Adnome de prostate

    Cancer de la prostate

    Cancer du col utrin

    Tumeur de vessie

    Cancer du rectum, de lovaire, de lutrus

    Mtastases rtropritonales (rare)

    Pathologie in ammatoire : brose ou liposclrose rtropritonale

    Chez le sujet jeune, les obstacles sont essentiellement dorigine lithiasique (lithiases oxalo-calciques radio-opaques le plus souvent). La migration calculeuse bilatrale simultane est rare. LIRA peut survenir en cas dobstruction sur un rein unique.

    Chez le sujet g, les causes tumorales (compression urtrale par envahissement mtastatique rtropritonal) sont frquentes et de mauvais pronostic.

    3. Traitement des IRA obstructives

    Le traitement initial repose sur la drivation des urines en urgence. Lurgence est majore sil existe une infection associe.

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    Si lobstacle est bas situ (vessie, urtre, prostate), la drivation est ralise par sondage vsical ou pose dun cathter sus-pubien.

    Si lobstacle est plus haut situ, deux techniques de drivation sont disponibles : la mise en place dune sonde urtrale (extriorise transvsicale, ou non extriorise type sonde en double J), et la nphrostomie percutane (ralise sous anesthsie locale aprs reprage chographique des cavits dilates).

    Aprs drivation des urines, on assiste le plus souvent la reprise dune diurse abondante (polyurie de la leve dobstacle), ncessitant des apports hydrosods abondants. Le risque est la dshydratation qui retarderait la gurison de lIRA. Une surveillance clinique et biologique quotidienne ou biquotidienne est indispensable. La fonction rnale redevient normale en quelques jours.

    V. LES INSUFFISANCES RNALES AIGUS FONCTIONNELLES

    A. Circonstances de survenue Les IRA fonctionnelles surviennent le plus souvent au cours des dshydratations

    extracellulaires importantes avec : hypotension artrielle ; tachycardie ; pli cutan ; perte de poids ; hmoconcentration (augmentation de lhmatocrite et des protides sanguins).

    Les IRA fonctionnelles peuvent aussi compliquer les hypovolmies e caces observs lors :

    de linsu sance cardiaque congestive ; des dcompensations dmato-ascitiques des cirrhoses ; du syndrome nphrotique.

    Les principales causes dIRA fonctionnelles sont listes dans le tableau 3.

    Tableau 3 : Principales causes dIRA fonctionnelles

    1) Dshydratation extracellulaire

    Pertes cutanes (sudation, brlure) ou digestives (vomissements, diarrhe, stules).

    Pertes rnales :

    traitement diurtique excessif ;

    polyurie osmotique du diabte dcompens et du syndrome de leve dobstacle ;

    nphrite interstitielle chronique ;

    insuf sance surrnale.

    2) Hypovolmie relle ou ef cace

    Syndrome nphrotique svre ;

    Cirrhose hpatique dcompense ;

    Insuf sance cardiaque congestive ;

    Hypotension artrielle des tats de choc dbutants cardiogniques, septiques, anaphylactiques, hmorragiques.

    3) IRA hmodynamiques (IEC, ARA2, AINS, anticalcineurines)

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    Leur point commun est la survenue dun bas dbit sanguin rnal. LIRA fonctionnelle est immdiatement rversible quand le ux sanguin rnal est restaur. En revanche si la diminution de la perfusion du rein persiste, une ischmie rnale sinstalle et des lsions de ncrose tubulaire peuvent sinstaller, lIRA devient alors organique.

    Les bloqueurs du systme rnine angiotensine (IEC, ARAII, Inhibiteurs directs de la rnine) ne sont pas nphrotoxiques mais en cas de dshydratation extracellulaire, ils favorisent lIRA et loligoanurie. Chez le sujet g ayant une nphro-angiosclrose, cette association peut induire un e ondrement de la pression de ltration glomrulaire et une IRA hmodynamique . Dans ce cas, la recherche de stnose de lartre rnale doit tre systmatique. La rcupration de lIRA est habituellement trs rapide en 24 48 heures larrt des bloqueurs du systme rnine-angiotensine-aldostrone. Aprs rhydratation, ces mdicaments peuvent tre rintroduits prudemment.

    B. Les signes distinctifs entre IRA fonctionnelle (IRA F) et IRA organique par ncrose tubulaire (NTA)

    Ils sont indiqus dans le tableau 4.

    Tableau 4 : Indices plasmatiques et urinaires permettantde distinguer IRA F et IRA organiques (NTA)

    Signes IRA F NTA

    Ure plasmatique augmente augmente

    Cratininmie normale ou peu augmente (< 300 mol/L) augmente

    Ure/Cratinine P (en mol/L) > 100 < 50

    Na+ U < 20 mmol//l (si pas de diurtiques) > 40 mmol/l

    FE Na+ < 1 % > 1-2 %

    FE ure (utile si diurtiques) < 35 % > 35-40 %

    Na+/K+ urinaire < 1 > 1

    U/P ure > 10 < 10

    U/P cratinine > 30 < 30

    U/P osmoles > 2 < 2

    FE Na+ : fraction dexcrtion du sodium = CNa/Ccr = (UNa/PNa)/(Ucr/Pcr) x 100

    FE ure : fraction dexcrtion de lure =Cure/Ccr (mme calcul)

    Pige : persistance de la natriurse,au cours des IRA F (rapport Na+/K+ urinaire >1), si la cause de lhypovolmie est due une perte rnale de sodium (diurtiques, hypoaldostronisme, nphrite interstitielle). Dans ce cas une FE ure basse (< 35 %) est un meilleur indicateur dune IRA F.

    C. Traitement de lIRA fonctionnelle

    1. Les IRA fonctionnelles par dshydratation extracellulaire et hypovolmie

    Le traitement des IRA fonctionnelles repose sur la restauration dune volmie e cace. En cas de pertes hydro-sodes, on saidera pour estimer la quantit de volume perdu :

    du poids ; de la pression veineuse centrale ; de lchographie cardiaque et de la veine cave.

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    On utilise le plus souvent du solut sal isotonique (9 ) par voie intraveineuse. Dans les IRA peu svres, une rhydratation orale (rgime sal et boissons abondantes) peut su re.

    La surveillance est base sur : la courbe de poids ; la frquence cardiaque ; la pression artrielle ; la reprise de la diurse ; lionogramme urinaire pour observer la disparition des signes dhyperaldost-

    ronisme secondaire.

    2. Cas des insuffisances rnales fonctionnelles avec syndrome dmateux

    LIRA du syndrome hpato-rnal est une situation grave, parfois irrversible. Lobjectif du traitement est de restaurer une volmie e cace en entranant une expansion volmique, par de lalbumine (en particulier en cas dhypoalbuminmie < 20 g/L), associe un vasoconstricteur, la glypressine. Les diurtiques doivent tre interrompus.

    Au cours du syndrome nphrotique, uniquement lorsque lhypoalbuminmie est profonde, la perfusion dalbumine et lutilisation de diurtiques par voie intraveineuse permettent la fois de corriger lhypovolmie e cace et de faire perdre les dmes.

    LIRA fonctionnelle secondaire linsu sance cardiaque peut tre corrige par le traitement de linsu sance cardiaque.

    VI. LES INSUFFISANCES RNALES AIGUS ORGANIQUES

    A. Diagnostic syndromique des IRA organiques Lanalyse syndromique est essentielle pour reconnatre le type datteinte rnale

    et doit prendre en compte les signes cliniques uro-nphrologiques et le syndrome urinaire (tableau 5).

    Tableau 5 : Diagnostic syndromique des insuf sances rnales aigus parenchymateuses

    Signes NTA NIA NGA NVA

    HTA non non oui oui

    dmes non non oui non

    Protinurie < 2 g/j < 2 g/j > 2 g/j variable

    Hmaturie micro non non oui non

    Hmaturie macro non possible possible possible

    Leucocyturie non oui non non

    Infection urinaire non possible non non

    NTA = ncrose tubulaire aigu

    NIA = nphrite interstitielle aigu

    NGA = nphropathie glomrulaire aigu

    NVA = nphropathie vasculaire aigu

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    Une fois le diagnostic syndromique tabli, la recherche de la cause peut tre envisage. Celle-ci repose sur lanalyse des signes cliniques extrarnaux associs, le contexte et les examens complmentaires.

    B. Procdures diagnostiques Lchographie rnale, est systmatiquement ralise au cours de toute IRA La ponction biopsie rnale (PBR), a des indications prcises au cours de lIRA :

    elle est ralise quand le tableau di re de celui dune ncrose tubulaire aigu et que sont voques une nphropathie glomrulaire, certaines atteintes vasculaires ou interstitielles ;

    devant un tableau de NTA, la PBR doit aussi tre faite prcocement lorsque les circonstances dapparition ne sont pas videntes, ou plus tardivement lorsque la fonction rnale ne samliore pas 3 4 semaines aprs lapparition de lIRA.

    Dans tous les cas, la PBR expose au risque dhmorragie, et les prcautions habituelles doivent tre prises :

    bon contrle de lhypertension artrielle ; absence de trouble de lhmostase ; reprage chographique des reins ; exprimentateur entran.

    C. Causes des IRA parenchymateusesLes principales causes dIRA parenchymateuses sont listes dans le tableau 6.

    1. Les ncroses tubulaires aigus

    Elles reprsentent environ 80 % de toutes les IRA organiques. Elles se voient essentiellement aprs un tat de choc et/ou la prise de mdicaments

    ou de produits nphrotoxiques. Au cours des NTA ischmiques (hypoperfusion rnale), le tableau est souvent domin

    par le choc, quelle que soit sa cause (hypovolmique, cardiognique, septique). Il y a le plus souvent une oligurie initiale ; les urines sont peu concentres (U/P ure < 5) et le rapport Na+/K+ urinaire est > 1.

    Au cours des NTA toxiques, le pro l urinaire est identique mais la diurse est le plus souvent conserve.

    Les formes les plus svres sont oligoanuriques, tandis que la majorit des NTA est diurse conserve.

    Aprs une phase dIRA de 1 3 semaines, la fonction rnale rcupre progressivement pour revenir ltat antrieur. La prvention est souvent possible et doit tre applique.

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  • 191Chapitre 14 Item 343

    Tableau 6 : Principales causes dIRA parenchymateuses

    Ncroses tubulaires aigus

    Ischmiques par choc Septique Hypovolmique Hmorragique Anaphylactique Cardiognique

    Toxicit tubulaire directe Aminosides Produits de contraste iods Anti-in ammatoires non strodiens Cisplatine Amphotricine B Cphalosporines (1re gnration) Ciclosporine A et tacrolimus

    Prcipitation intratubulaire Acyclovir, inhibiteurs des protases Mthotrexate Sulfamides, anti-rtroviraux Chanes lgres dimmunoglobulines (mylome) Myoglobine (rhabdomyolyse) Hmoglobine (hmolyse) Syndrome de lyse tumorale

    Nphrites interstitielles aigus

    Infectieuses Ascendantes (pylonphrites aigus) Hmatognes Leptospiroses, vres hmorragiques virales

    Immuno-allergiques Sulfamides Ampicilline, mthicilline Anti-in ammatoires non strodiens Fluoroquinolones

    Nphropathies glomrulaires aigus ou rapidement progressives

    Glomrulonphrite aigu post-infectieuse GNRP endo et extracapillaire (lupus, cryoglobulinmie, purpura rhumatode) Glomrulonphrite extracapillaire : polyangite granulomateuse (Wegener),

    polyangite microscopique, syndrome de Goodpasture

    Nphropathies vasculaires aigus

    Syndrome hmolytique et urmique Embolies de cristaux de cholestrol Thromboses et embolies des artres rnales

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  • 192 UE 11. Urgences

    Cas particulier de lIRA au cours des rhabdomyolyses

    Les rhabdomyolyses sont des affections lies une souffrance musculaire strie. Les principales causes sont reprsentes par les traumatismes physiques des muscles, soit par crasement soit par ischmie. Les autres causes sont lexercice physique intense, les crises convulsives tonico-cloniques svres, la consommation excessive dalcool, certaines intoxications mdicamenteuses et infections virales et bactriennes.

    Le diagnostic est relativement simple faire, il sagit dune IRA ayant un pro l organique secondaire une ncrose tubulaire aigu, survenant dans un contexte particulier, associ une rhabdomyolyse svre, avec lvation franche des CPK (au moins 10 fois la normale, souvent plus de 100 fois), de la myoglobine et de laldolase. Les patients sont souvent oliguriques et sur le plan biologique, outre llvation de lure et de la cratinine plasmatique, on observe une hyperkalimie parfois svre, une hyperphosphatmie prcoce, une lvation de lacide urique et une hypocalcmie prcoce et parfois svre lie aux dpts sur les bres musculaires lses de phosphate de calcium.

    Laltration de la fonction rnale est trs souvent favorise par une dpltion volmique elle-mme lie la squestration musculaire dun volume plasmatique parfois important et la rduction des apports hydriques notamment chez les personnes ges restes allonges sur un plan dur aprs une chute ou un AVC. Cette dpltion volmique active les systmes sympathiques et rnine angiotensine entranant une vasoconstriction des artrioles affrentes. La libration, par les cellules musculaires lses, de myoglobine et dautres fragments cellulaires va entraner une toxicit pithliale, notamment au niveau des cellules du tubule proximal, et la formation de cylindres dans les tubules distaux par prcipitation de la myoglobine avec la protine de Tamm-Horsfall, favorise par lacidit urinaire.

    Une prise en charge prcoce est indispensable pour prserver la diurse et favoriser la rcupration de la fonction rnale.

    2. Les nphrites interstitielles aigus

    Mode de prsentation : IRA organique ; le plus souvent diurse conserve, parfois anurique avec hmaturie (parfois macroscopique), leucocyturie ( osinophilurie dans les causes mdicamenteuses), protinurie (tubulaire) < 1 g/L ; des signes gnraux sont associs en fonction de la cause de la NIA +++ (tableau 6):

    Infectieuses, ascendantes (pylonphrites) ou hmatognes (avec septicmie et foyers septiques extrarnaux). Elles peuvent tre peu bruyantes, notamment chez la femme ge, alite. Elles peuvent linverse tre trs svres, avec choc septique, surtout sil existe un obstacle sur la voie excrtrice. La drivation des urines est alors une urgence. Le scanner montre habituellement des foyers typiques de pylonphrite ou des microabcs, voire un vritable abcs ou un phlegmon prinphrtique.

    Toxiques mdicamenteuses, souvent immuno-allergiques, et associes alors une hyper osinophilie, une osinophilurie (rare), une vre, un rash cutan ou une cytolyse hpatique.

    3. Les glomrulonphrites rapidement progressives

    Elles doivent tre reconnues prcocement car ce sont des urgences thrapeutiques. La PBR est urgente, et il faut pratiquer un bilan immunologique.

    Il sagit habituellement de glomrulonphrites ncrosantes et extracapillaires (vascu-larites), ou de glomrulonphrites prolifratives endo et extracapillaires dans le cadre du lupus, de cryoglobulinmie mixte, ou de purpura rhumatode. Associe des hmoptysies, et des hmorragies intra-alvolaires, il faut voquer un syndrome

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  • 193Chapitre 14 Item 343

    de Goodpasture (rechercher danticorps anti-membrane basale glomrulaire, Anti-GBM) ou une polyangite microscopique (recherche danticorps anticytoplasme des polynuclaires, ANCA).

    4. Les nphropathies vasculaires

    Lies latteinte des artres de petits calibres et des capillaires dans : le syndrome hmolytique et urmique (SHU) avec HTA, anmie hmolytique

    rgnrative de type mcanique (prsence de schizocytes), augmentation des LDH, baisse de lhaptoglobine, et thrombopnie sans signe de CIVD (cf. chapitre 18).

    la maladie des emboles de cristaux de cholestrol : lIRA est associe des signes cutans avec ncrose distale priunguale et livedo. Elle survient chez un sujet athromateux, aprs une artriographie ou une manuvre endovasculaire, ou lors dun traitement anticoagulant (cf. chapitre 18).

    Lies latteinte des artres de gros calibre : embolies, thromboses athromateuses, dissection des artres rnales peuvent

    aussi se compliquer dIRA ; douleur lombaire, hmaturie macroscopique et vre, augmentation des LDH

    sont vocatrices ; le diagnostic est con rm par lcho-doppler, un angio-scanner ou une angio-IRM.

    VII. COMPLICATIONS VOLUTIVES ET PRONOSTIC DES IRA

    A. Mortalit La mortalit de la monodfaillance rnale est de lordre de 10 %. Mais au cours de

    lIRA survenant en ranimation (et la plupart du temps conscutive un tat de choc), la mortalit est plus leve, en moyenne de 50 % toutes causes confondues.

    Elle est lie : la maladie causale : choc septique ou hmorragique, convulsions, insu sance

    respiratoire, grand traumatisme, pancratite ; au terrain sur lequel survient lIRA : ge du patient, maladies coronariennes sous

    jacentes, insu sance respiratoire, diabte, cancers ; aux complications secondaires de la ranimation et en particulier aux infections

    nosocomiales : septicmie sur cathter, pneumopathie, dnutrition.

    B. Principales complications Les complications mtaboliques propres lIRA :

    acidose mtabolique et hyperkalimie sont rapidement contrles par lhmodialyse ; hypervolmie et dme pulmonaire sont souvent la consquence dun remplissage

    vasculaire excessif et ncessitent parfois le recours lultra ltration ; risque de dnutrition par dfaut danabolisme et souvent hypercatabolisme azot.

    Les infections nosocomiales frquentes, ncessitent une prvention scrupuleuse. Les hmorragies digestives sont prvenues par les traitements anti-acide prophy-

    lactiques. Les complications cardiovasculaires : phlbite, embolie pulmonaire, infarctus du

    myocarde, accident vasculaire crbral sont favoriss par : lalitement ; les variations tensionnelles ; lhypoxmie.

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  • 194 UE 11. Urgences

    C. Les facteurs de pronostic Les facteurs du pronostic rnal sont :

    la fonction rnale antrieure ; le type de lIRA (les NTA gurissent sans squelles contrairement aux autres

    atteintes). Les facteurs du pronostic vital sont :

    lexistence dun choc septique initial ; le nombre de dfaillances viscrales associes lIRA ; les complications ; le terrain sur lequel survient lIRA.

    VIII. PRVENTION DE LIRA

    Compte tenu de la gravit de lIRA, la prvention est extrmement importante.

    A. Prvention de la NTA chez les sujets risque La prvention de la NTA simpose dans les cas suivants :

    patients prsentant une infection grave ; tat de choc ; suites de chirurgie lourde notamment cardiaque ou aortique avec clampage de

    laorte sus-rnale ; en particulier chez les sujets gs, diabtiques, athromateux, ayant dj une

    insu sance rnale chronique. Le traitement prventif repose sur le maintien dune volmie e cace et de la

    diurse. Les apports hydrosods seront adapts en fonction :

    de la courbe de poids ; de lapparition ddmes ; du bilan des entres et des sorties (diurse et natriurse, pertes digestives).

    On pourra saider de la pression veineuse centrale et des pressions artrielles pulmo-naires ainsi que de lchographie cardiaque trans-thoracique.

    Les soluts de remplissage utiliss sont principalement les cristallodes.

    B. Prvention de la tubulopathie liode Les sujets risque sont les patients :

    gs ; diabtiques ; insu sants rnaux ; insu sants cardiaques ; ou ayant un mylome.

    Si ladministration de produits de contraste iods (PCI) ne peut tre vite, il est indispensable den prvenir la toxicit :

    par larrt pralable des AINS et des diurtiques ; par une hydratation correcte soit per os (eau de Vichy), soit par perfusion de

    solut sal isotonique 9 g/L ou de bicarbonate de sodium isotonique 14 (1 ml/kg/h pendant les 12 h prcdant lexamen et les 12 heures suivantes) ;

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  • 195Chapitre 14 Item 343

    par lutilisation des PCI de faible osmolarit ou iso-osmolaires en limitant le volume de PCI administrs.La N-actyl cystine peros le jour prcdent et le jour de linjection diode est utilise par certains mais na pas fait la preuve de son e cacit.

    C. Prvention de la nphrotoxicit mdicamenteuse(aminosides, cisplatine, amphotricine B)

    La posologie journalire des aminosides doit tre adapte la fonction rnale. En cas de prescription prolonge (plus de 48 h), la dose journalire doit tre adapte

    aux taux rsiduels. La dshydratation et la prise de diurtiques aggravent le risque de nphrotoxicit.

    Les mmes prcautions dhydratationventuellement associe une hyperhydrata-tion (avec apport de solut sal iso ou hypotonique), doivent tre prises pour tous les mdicaments nphrotoxiques (Amphotricine B, Cisplatine).

    D. Prvention des IRA fonctionnelles mdicamenteuses Les IEC et les antagonistes des rcepteurs de langiotensine II :

    doivent tre prescrits avec prudence chez le sujet g et chez les patients risque vasculaire ;

    leur prescription est prcde de la recherche dun sou e abdominal et en cas de doute sur une stnose des artres rnales, un cho-doppler doit tre ralis.

    Les AINS sont contre-indiqus au cours de linsu sance rnale chronique.

    E. Prvention du syndrome de lyse Au cours des rhabdomyolyses ou des lyses tumorales importantes (spontanes ou

    aprs chimiothrapie des leucmies aigus, des lymphomes, des cancers anapla-siques petites cellules), la NTA doit tre prvenue par une hydratation massive avec diurse force.

    Lalcalinisation des urines : est recommande au cours des rhabdomyolyses pour limiter la prcipitation de

    myoglobine et de protine de Tamm-Horsfall ; mais vite au cours des syndromes de lyse tumorale car cela augmente le risque

    de prcipitation de cristaux de phosphate de calcium. Linjection prcoce duricase (Fasturtec) permet dviter lhyperuricmie des syndromes de lyse tumorale.

    IX. TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE DES IRA ORGANIQUES (EN DEHORS DE LTAT DE CHOC)

    1. Traitement prventif des complications

    De trs nombreux mdicaments sont limins par le rein. Il faut donc systmatique-ment adapter leur posologie.

    La prvention des hmorragies digestives repose sur les inhibiteurs de la pompe proton et les pansements gastriques (essentiellement le sucralfate).

    Un apport calorique et azot su sant est ncessaire pour viter la dnutrition (lie au catabolisme azot), et permet de diminuer le risque de certaines complications (hmorragie digestive, retard de cicatrisation, pisodes infectieux). Pour les patients sdats, on utilisera de prfrence la voie entrale. En pratique, les apports doivent tre de 20 40 cal/kg/j et 0,2 0,3 g/kg/j dazote.

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  • 196 UE 11. Urgences

    2. Traitement de lhyperkalimie

    Lhyperkalimie est une complication grave potentiellement mortelle. Elle est due principalement la baisse de scrtion tubulaire de potassium, et est

    plus frquente dans les formes anuriques. Elle est aggrave par le relargage du potassium intracellulaire dans la circulation

    (acidose mtabolique, rhabdomyolyse, hmolyse, syndrome de lyse tumoral) ou par la prise de certains mdicaments (anti-aldostrone, IEC, trimthoprime-sulfam-thoxazole).

    La kalimie doit tre dose systmatiquement et il faut faire un lectrocardiogramme la recherche de modi cations lectriques : ondes T amples pointues et symtriques, et surtout troubles de conduction. Le risque darrt cardio-circulatoire est alors majeur et le traitement de lhyperkalimie doit tre dbut immdiatement.

    Les principaux traitements de lhyperkalimie et leurs modes daction sont prsents dans le tableau 7. Il faut arrter les mdicaments hyperkalimiants et supprimer les apports potassiques.

    Tableau 7 : Traitements de lhyperkalimie

    Traitement Mode daction Dlai daction

    Kayexalate change 1 2 mmol de K+/g de rsine dans la lumire digestive.

    1 4 h

    Diurtiques de lanse Favorisent llimination urinaire du K+ 1 4 h

    Gluconate de Ca++ Antagoniste du K+, amliore la conduction quelques minutes

    Insuline et G10 % Fait entrer le K+ dans les cellules 30 min. 1 h

    Bicarbonates Fait entrer le K+ dans les cellules 0 min 1 h

    Dialyse puration du K+ ds les 15 premires minutes de dialyse

    3. Traitement de lacidose mtabolique

    Elle est frquente et le plus souvent modre au cours des IRA. Elle est lie laccumulation dacides faibles organiques et minraux et la diminution

    de llimination des protons H+. Laccumulation dacides faibles (non doss) explique laugmentation du trou anionique.

    Dans certains cas lacidose peut tre plus importante (tableau 8) :

    Tableau 8 : Causes dIRA avec acidose importante

    IRA toxiques : thylne glycol (acidose oxalique) Au cours des tats de choc septiques, cardiogniques ou mixtes (acidose lactique) Acidoctose diabtique avec IRA fonctionnelle Pertes digestives de bicarbonates (IRA fonctionnelle secondaire une diarrhe) IRA obstructive

    Dans la majorit des cas, il ny a pas lieu de traiter lacidose mtabolique la phase aigu.

    Lapport de bicarbonates est justi : lorsque lacidose mtabolique est associe une hyperkalimie menaante ; en cas de perte de bicarbonates (diarrhe) ;

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  • 197Chapitre 14 Item 343

    ou ventuellement en cas dapparition dune acidose mixte (puisement du patient qui narrive plus compenser en hyperventilant, en particulier au cours des acidoctoses diabtiques svres).

    Le recours linjection IV de solutions de bicarbonate de sodium isotonique (14 g) ou exceptionnellement molaire ou semi-molaire (84 g ou 42 g ) peut alors tre envisag.

    Lpuration extrarnale est indispensable si linjection de bicarbonates est impossible (surcharge hydrosode), au cours des tats de choc avec acidose lactique ou en cas dintoxication (thylne glycol, mthanol).

    Une confrence de consensus en ranimation et mdecine durgence a eu lieu le 10 juin 1999 sur le thme : Correction de lacidose mtabolique en ranimation , dont voici quelques conclusions :

    dune part, lacidose pourrait avoir un effet cytoprotecteur (pargne nergtique) ;

    dautre part, lalcalinisation prsente des risques : lapport de bicarbonate de sodium augmente la production de CO2 qui doit tre limin par le poumon. Lapport massif de bicarbonate de sodium est donc risqu chez un patient non ventil. Le Carbicarb (solution quimolaire de bicarbonate de sodium et de carbonate) permet de limiter la production de CO2 ;

    en n, lalcalinisation relance la glycolyse et la production de lactates par les cellules (aggravation de lacidose lactique, en particulier au cours des acidoses lactiques et des acidoctoses) ;

    en conclusion, il ny a pas lieu le plus souvent de corriger lacidose, sauf en cas de perte dions bicarbonates.

    4. Traitement de la surcharge hydro-sode

    Hyperhydratation extracellulaire : lhyperhydradation extracellulaire se traduit par une HTA et la prsence ddmes

    dclives, ventuellement associs des panchements sreux (plvres, pricarde). Elle peut se compliquer ddme aigu pulmonaire ;

    la surcharge hydrosode apparat surtout au cours des nphropathies glomru-laires et vasculaires aigus ;

    elle est plus rare au cours des tubulopathies, sauf en cas dexpansion volmique excessive ;

    le traitement est bas sur les diurtiques de lanse PO ou IV, ventuellement en continu. En labsence de rponse au traitement diurtique, ou en cas dOAP menaant, le recours lpuration extrarnale est ncessaire.

    Hyperhydradatation intracellulaire : une hyperhydratation intracellulaire (hyponatrmie) est frquente, souvent

    modre et sans consquence clinique ; cest une hyponatrmie de dilution par apport excessif deau alimentaire ou parfois

    iatrogne (apport inappropri de solut hypotoniques).

    5. Indications de la dialyse

    En dehors des indications urgentes dj discutes, la dialyse est indique en cas de persistance de linsu sance rnale pour en prvenir les complications. Lobjectif est une ure plasmatique infrieure 30 mmol/L pendant toute la priode dIRA. La premire sance de dialyse doit tre courte (2 heures) dautant plus que le taux dure est lev (60 mmol/L ou plus).

    Les principales mthodes disponibles sont lhmodialyse intermittente, lhmodia l-tration continue, et la dialyse pritonale qui est peu utilise chez ladulte en contexte aigu. Toutes ces mthodes, sauf la dialyse pritonale, ncessitent un traitement anticoagulant, soit base dhparine soit base de citrate, pour viter la coagulation du sang dans le circuit extra-corporel.

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  • POUR EN SAVOIR PLUS

    Annexe 1

    Techniques dpuration extrarnale

    Technique Principe

    Hmodialyse intermittente

    Le sang est dialys travers la membrane de dialyse semi-permable, contre un bain de dialyse qui circule contre-courant. Il est possible dultra ltrer leau (jusqu 4 ou 6 litres), le NaCl et les autres petites molcules. Les sances durent en moyenne 4 6 heures. Les dbits de dialysat et du sang du patient sont levs (plus dpuration sur une priode courte).

    Hmodia ltration continue

    Au principe de lhmodialyse en continue est ajout celui de lultra ltration en continue qui implique une compensation horaire pour viter une perte de poids trop importante tout en amliorant la qualit de lpuration. Les dbits sont plus lents quen hmodialyse conventionnelle, mais compenss par la dure.

    Dialyse pritonale Cette technique utilise le pritoine comme membrane de dialyse. Elle est trs peu utilise en France dans le cadre de lIRA.

    Circuit sanguin

    Accs vasculaireHparine

    Hmodiafiltre

    Dialysatfrais

    Rchauffeur

    Infusat

    Moniteur gravimtrique

    Pompes sang

    Dialysateffluent

    +Ultrafiltrat

    Figure. Technique dhmodia ltration continue veino-veineuse

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  • Annexe 2

    Les points forts retenir Devant toute IRA, il faut liminer un obstacle sur les voies excrtrices en pratiquant systmatiquement une chographie rnale, ainsi quune IRA fonctionnelle par lanam-nse, lexamen clinique et lionogramme urinaire.

    Il faut systmatiquement rechercher des complications qui sont des urgences thra-peutiques et doivent motiver lhospitalisation voire le transfert en ranimation. Ce sont principalement lhyperkalimie ( faire un ECG systmatiquement) et lOAP, surtout si le patient est anurique, ainsi que ltat de choc.

    Il faut connatre certaines rgles de prescription : rechercher une stnose de lartre rnale en cas dIRA survenant aprs prescrip-

    tion dIEC ou dARAII ; chez le patient diabtique ou insu sant rnal chronique, linjection diode doit

    tre motive et prcde dune hydratation su sante (par du solut sal) ; la prescription de mdicaments nphrotoxiques doit tre adapte lge, au poids,

    la fonction rnale et aux taux rsiduels (aminosides), en veillant maintenir une hydratation correcte du patient.

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  • Fiche ash

    I. ORIENTATION DIAGNOSTIQUE DEVANT UNE IRA (ARBRE DCISIONNEL)

    Orientation diagnostique devant une IRA

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  • II. DYSFONCTIONS RNALES CAUSES PAR DES MDICAMENTS

    q Mdicaments associs la survenue dune IRA pr-rnale : Inhibiteurs de lenzyme de conversion ; antagonistes des rcepteurs de langiotensine II ; anti-in ammatoires non-strodiens.

    q Mdicaments associs la survenue dune ncrose tubulaire aigu : AINS ; aminosides ; amphotricine B ; nombreuses chimiothrapies anti-cancreuses ; produits de contraste iods.

    q Mdicaments associs la survenue de nphrite interstitielle aigu : pnicillines ; cphalosporines ; rifampicine ; sulfamides ; AINS

    q Mdicaments associs la survenue dune obstruction dans les voies urinaires : acyclovir ; sulfadiazine ; mthotrexate ; indinavir.

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