Institutions et politiques publiques de soutien du système d'innovation de Tunisie. État des lieux

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INSTITUTIONS ET POLITIQUES PUBLIQUES DE SOUTIEN DU SYSTÈME D'INNOVATION DE TUNISIE. ÉTAT DES LIEUX Samia Haddad De Boeck Supérieur | Innovations 2010/3 - n° 33 pages 137 à 156 ISSN 1267-4982 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-innovations-2010-3-page-137.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Haddad Samia, « Institutions et politiques publiques de soutien du système d'innovation de Tunisie. État des lieux », Innovations, 2010/3 n° 33, p. 137-156. DOI : 10.3917/inno.033.0137 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 12/01/2014 06h39. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 12/01/2014 06h39. © De Boeck Supérieur

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INSTITUTIONS ET POLITIQUES PUBLIQUES DE SOUTIEN DUSYSTÈME D'INNOVATION DE TUNISIE. ÉTAT DES LIEUX Samia Haddad De Boeck Supérieur | Innovations 2010/3 - n° 33pages 137 à 156

ISSN 1267-4982

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Haddad Samia, « Institutions et politiques publiques de soutien du système d'innovation de Tunisie. État des lieux »,

Innovations, 2010/3 n° 33, p. 137-156. DOI : 10.3917/inno.033.0137

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INSTITUTIONS ET POLITIQUESPUBLIQUES DE SOUTIEN

DU SYSTÈME D’INNOVATIONDE TUNISIE. ÉTAT DES LIEUX

Samia HADDADFaculté des Sciences Économiques et de Gestion de Nabeul, Tunisie

Réseau de Recherche sur l’Innovation (RRI)[email protected]

L’innovation constitue un processus interactif entre chercheurs, entre-prises et pouvoirs publics résultant de l’accumulation de pratiques et combi-naisons de connaissances créées ou acquises par l’entreprise. Elle est égalementun phénomène social en ce qu’elle est portée et largement conditionnée parles politiques publiques. L’intervention des pouvoirs publics est donc néces-saire pour soutenir une politique systématique de promotion et de développe-ment du progrès technique dans le cadre d’un Système National d’Innovation(SNI). Cela permettra de suppléer à la défaillance du marché pour permettre(I) l’acquisition d’éléments d’innovation et de technologies adaptées, adap-tables et susceptibles de servir la productivité d’une manière durable, (II) ladiffusion de ces derniers au sein du système de production à travers la facili-tation et la mise en place de réseaux et d’interactions entre les entreprises, et(III) l’amorçage d’un processus graduel de développement de l’innovationtechnologique.

Dans son rapport de 1994, l’OCDE définit le SNI comme étant « un sys-tème interactif d’entreprises privées et publiques (grandes ou petites), d’universitéset d’organismes gouvernementaux en interaction axés sur la production scientifiqueet technologique sur un territoire national. L’interaction de ces unités peut êtred’ordre technique, commercial, juridique, social et financier, du moment que le butde celle-ci soit de développer, de protéger, de financer ou de réglementer de nouvel-les activités de science et de technologie » (OCDE, 1994, p. 3). Partant de cettedéfinition, le SNI peut être perçu comme un ensemble d’acteurs et d’entités,dont les entreprises ou d’autres organisations et institutions, qui interagis-sent dans la génération, l’utilisation et la diffusion de nouvelles connaissan-ces dans un processus de production (Amable et al., 1997). L’interaction

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entre les différents acteurs (institutions, organisations, entreprises) peut êtrede nature diverse (technique, commerciale, financière, humaine), mais visedans tous les cas les activités d’innovation dans le but de réaliser des objectifsà retombées économiques (accroissement de la productivité) et sociales(emplois qualifiés et accroissement du pouvoir d’achat). Le SNI constituedonc une composante du système économique global, fondé sur des relationsde collaboration concrètes et d’actions en cohérence avec les autres sous-sys-tèmes du pays particulièrement ceux traitant des questions économiques,éducatives et de formation.

Durant les deux dernières décennies, l’État tunisien a inscrit la recherchescientifique comme facteur essentiel de soutien et d’accompagnement de sesstratégies de développement. Cette politique contribue à la consolidationd’un SNI, de façon qu’elle puisse avoir une influence positive sur le dévelop-pement économique et social national. Dans ce contexte, la question derecherche qu’on peut se poser et qui constitue la problématique de notrepapier est la suivante : Comment les décideurs politiques tunisiens inter-viennent-ils dans le développement d’un SNI ?

L’objet du présent article est de montrer que la participation des pouvoirspolitiques tunisiens à la mise en place et au développement d’un systèmenational d’innovation sera insuffisante dans la mesure où les interactionsentre les différents acteurs de ce système sont limitées.

La méthodologie adoptée s’appuie d’une part, sur un soubassement con-ceptuel de l’aspect global de l’approche systémique de l’innovation et sur destravaux empiriques 1 menés auprès des institutions publiques de soutien àl’innovation en Tunisie, d’autre part. Tout d’abord, elle se voue à analyser leschéma national du système d’innovation en Tunisie à travers l’étude du rôlede chacun de ses acteurs (institutionnels et financiers). Ensuite, elle exposeles goulots d’étranglements entravant le processus de construction d’un sys-tème d’innovation performant en Tunisie. Enfin, elle tente de montrer queles insuffisances en termes d’innovation en Tunisie sont spécifiques d’unmanque d’articulation et de synergie entre les différents acteurs et institu-tions participantes au système d’innovation.

À cet effet, ce travail de recherche propose un développement en troisparties : une première partie sera consacrée à une analyse approfondie dessoubassements théoriques de l’aspect global de l’approche systémique del’innovation. Une deuxième partie exposera les principales mesures mises enœuvre par l’État tunisien permettant la consolidation d’un SNI. Enfin, la troi-

1. Ces travaux empiriques - conduits au début de l’année 2009 (du janvier au mars) - ont donnélieu à des enquêtes auprès des principaux acteurs (institutionnels et financiers) du système natio-nal d’innovation en Tunisie.

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sième partie tente d’analyser les faiblesses du système tunisien d’innovationtout en mettant l’accent sur les interrelations entre ses différents acteurs.

LE SYSTÈME NATIONAL D’INNOVATION : FONDEMENTS CONCEPTUELS

Le point de départ des travaux portant sur les systèmes d’innovation (SI) estapparu lors de la considération de l’innovation non plus comme un processusindividuel indépendant, mais comme un processus d’interactions entre diffé-rents réseaux d’institutions et d’organisations. Ainsi, un système d’innova-tion regroupe un ensemble d’acteurs et d’institutions qui interagissent pourpermettre l’utilisation et la création de connaissances. Plus précisément, nousadoptons la définition suivante : “A system of innovation can be thought of asconsisting of a set of actors or entities such as firms, other organisations and insti-tutions that interact in the generation, use and diffusion of new – and economicallyuseful knowledge in the production process” (Fischer, 2000, p. 200).

Aujourd’hui, on considère que le processus d’innovation est caractérisépar des interactions et des effets en retour. Contrairement à l’approche néo-classique qui définissait l’innovation comme le résultat d’un processusséquentiel et technocratique et correspondait à un acte purement techniquebasé sur la production d’un nouveau produit (Owen-Smith et al., 2002), lanouvelle conception de l’innovation promeut une vision qui insère le chan-gement technique dans des mutations plus globales. En effet, l’innovationest un processus constitué d’interactions entre les acteurs et leur environne-ment (réglementations, organisations et institutions). Elle est aussi un pro-cessus social entre différents acteurs à l’intérieur d’un environnement donné(Asheim, Isasken, 2002). Ces interactions font évoluer les transferts de con-naissance et par conséquent, conditionnent les possibilités d’innovation.

L’idée d’un système national d’innovation est la plus récente étape decette évolution vers un concept plus complexe et englobant. En effet, l’unedes premières références à l’expression SNI, apparaît en 1987, lorsque Free-man analyse le développement économique japonais depuis la secondeguerre mondiale. L’auteur introduit l’expression justement pour déplacer laperspective d’analyse d’individus entrepreneurs et d’organisations vers l’étuded’un réseau d’institutions. Il définit ainsi les SNI comme : « les réseaux d’ins-titutions établis dans les secteurs publics et privés dont les activités et les interac-tions initient, importent, modifient et diffusent les nouvelles technologies. Cesinstitutions sont non seulement celles qui sont responsables directement des activitésde recherche et développement, mais aussi la façon dont les ressources disponiblessont gérées et organisées, à la fois au niveau de l’entreprise et au niveau national »

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(Freeman, 1987, p. 3). Le système d’innovation est alors devenu le berceaude la capacité innovante d’un pays. Ce qui a détourné l’attention des moyensdont il dispose pour créer un système institutionnel pour la porter sur la poli-tique de création de ce système. En 1992, le concept de SNI est revigoré parLundvall (1992), qui ajoute la dimension de l’apprentissage à la capacitéinnovante d’un pays. Différemment des connaissances produites dans le sys-tème universitaire, on considère que la capacité d’innover ne peut êtreatteinte par des efforts isolés en science et en recherche et développement etqu’il leur faut donc être connectés au processus de production, de distribu-tion et de consommation, pour qu’ils se transforment effectivement en inno-vation (Nilsson, 2003).

Par ailleurs, selon Lundvall (1992, 2002), le concept SNI se trouve fré-quemment partagé en deux approches : une approche restreinte et uneapproche large. La conception étroite se limite aux domaines de la science,la recherche, la technologie et dans certains cas l’éducation. Dans ce cas, leSNI représente un système intégré d’agents économiques et institutionnels(instituts et centres de recherche, universités, entreprises) générant directe-ment la production d’innovation. La définition retenue par l’OCDE (1997,p. 7) résulte typiquement d’une approche étroite : « L’approche par les systè-mes nationaux d’innovation souligne que les flux de technologie et d’informationentre les entreprises, les institutions et les gens qui y travaillent, sont les facteurs clésdu processus d’innovation. Le développement technologique et l’innovation sont lerésultat d’un arrangement complexe de relations établies entre les acteurs du sys-tème, incluant aussi bien les entreprises, les universités et les instituts publics derecherche ». De son côté, Tlili (2009, pp. 1033-1034) révèle que « le SNI, danssa version la plus simple, met en relation trois sphères complémentaires : une sphèrede la formation scientifique et technique (SFST), une sphère de la recherche et déve-loppement (SRD) et une sphère industrielle (SI) ». Il ajoute aussi qu’« entre cestrois sphères, circulent des flux technologiques et scientifiques comprenant desinformations, des brevets, des personnes, des produits et des procédés qui complè-tent les relations purement financières entre institutions publiques et privées »(idem, p. 1034).

La conception large s’étend à toutes les structures économiques et insti-tutionnelles qui affectent le système de production. Dans ce contexte, le pas-sage à la conception étendue se fait par une logique de proximité desdifférents domaines à considérer (la science, la technique, l’éducation supé-rieure, la firme,…) qui laisse la porte ouverte à des interprétations plus oumoins extensives du système. Ainsi, « la définition large du SNI inclut, en yindexant les composantes du SNI « étroit », toutes les institutions politiques, socia-les, économiques et culturelles affectant l’apprentissage, la recherche et les activités

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d’exploration (système financier, politiques monétaires, organisation interne des fir-mes, système éducatif pré-universitaire, etc.) » (Casadella et al., 2006, p. 66).

Le concept SNI est donc né de la nécessité de comprendre l’innovationpar un raisonnement moins linéaire que celui qui prédominait depuis laseconde guerre mondiale, selon lequel l’impulsion donnée à la science debase conduisait au développement d’échelle dans de grands laboratoires et,donc, à l’innovation (Feinson, 2003). De sa part, Sarewitz (2003) caractérisele SNI comme un système complexe et intégré des acteurs macroéconomi-ques, permettant de relier les nouvelles connaissances et l’innovation avecla capacité du système économique productif. Cette perspective fournit tantune alternative qu’un complément à l’analyse macroéconomique tradition-nelle de développement. Il convient de souligner que, pour un systèmenational d’innovation, le composant essentiel ne tient pas à ses élémentsindividuels, mais à sa dynamique d’interaction. De sa part, Uzunidis (2004)révèle qu’« un système national d’innovation décrit les relations entre institutions,privées et publiques – scientifiques, technologiques, industrielles, commerciales,financières, politiques – (entreprises, laboratoires de recherche et d’ingénierie,administrations…). Ces relations sont constituées le plus souvent des flux finan-ciers et informationnels et des mouvements de personnes ».

L’OCDE (2005) considère encore que, parmi les nombreux facteurs quiinfluent le comportement des acteurs individuels faisant partie de la dynami-que d’innovation, on compte la variété de politiques gouvernementales quitouche chacun d’entre eux. En effet, l’État occupe une place essentielle dansle développement du SNI. Les décideurs politiques définissent des politiquesscientifiques et technologiques au moins en partenariat avec les autresniveaux de gouvernance, mais également, comme le soulignent Oughton etal. (2002), ils contribuent (ou non) à l’instauration d’un climat de confianceentre les différents acteurs. L’État joue aussi le rôle de régulateur et de coor-dinateur entre les différents acteurs du système. Dans le cadre des program-mes technologiques, l’État n’est autre que l’animateur de la recherche et dela promotion de l’innovation. Dans le cadre de l’incitation à l’innovation,l’État se doit non seulement de financer et d’aider les établissements derecherche publique mais aussi les entreprises par l’incitation à développerdes activités intégrées de R&D. Enfin, l’État contribue à la régulation desstructures de financement des innovations.

Dans le cas des pays en développement 2, l’approche SNI valorise les pro-cessus d’innovation dans les secteurs de faibles et moyennes technologies(Johnson, Lundvall, 2003). Dans le même ordre d’idées, Djeflat (2009)

2. Voir notamment les travaux de Djeflat, 2009 ; Tlili, 2009 ; Djeflat, 2008 ; Casadella et al.,2006 ; Djeflat, 2004, 2003 ; Johnson, Lundvall, 2003 ; Viotti, 2000, Gu, 1999...

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révèle que « tandis que les innovations dans les secteurs high-tech sont sophisti-quées et fondées sur la science et l’innovation radicale, le SNI du Sud est le refletde perspectives routinières d’apprentissage au sein de petites structures traditionnel-les, où les connexions informelles et collectives entre acteurs est mise en évidenceet où les techniques d’apprentissage par la pratique, l’usage et l’interactiondominent » (Djeflat, 2009, p. 9). Certes, le SNI constitue un instrument per-tinent pour analyser le développement économique des pays industrialisés.Néanmoins, « la structure théorique et conceptuelle du SNI semble inappropriéepour traiter des processus de changement technique dans les économies endéveloppement » (Viotti, 2000 cité par Djeflat, 2009, p. 2). De ce fait, « si lesSNI des pays développés se trouvent à un stade avancé, les S.N.I des pays endéveloppement se situent plutôt dans une phase primitive » (Gu, 1999 cité parDjeflat, 2009, p. 2). Dans le cas des pays du Maghreb (l’Algérie, le Maroc etla Tunisie), des études (voir Djeflat, 2003, 2004, 2008, 2009) menées autourdes SNI ont mis en évidence toutes les difficultés rencontrées par cetteapproche.

Aussi, depuis les années quatre-vingt-dix, les pays du Maghreb se sontlancés dans la construction des SNI « qui puisse leur permettre d’opérer un véri-table décollage de l’innovation » Djeflat (2009, p. 11). Selon l’auteur, la démar-che de construction des SNI dans ces pays s’appuie souvent sur « la mise enplace d’une ossature institutionnelle composée de ministères et d’agences spéciali-sées » (Djeflat, 2009, p. 11). En optant la même optique, la Tunisie s’estengagée dans la consolidation et le développement de son propre SNI. Cedernier s’appuie sur un important dispositif combinant des mesures législati-ves, institutionnelles, financières susceptibles d’instaurer un système d’inno-vation performant.

PRÉSENTATION DU SYSTÈME NATIONAL D’INNOVATION DE LA TUNISIE

Face aux transformations des pratiques sociales, politiques et économiquesobservées tout au long des dernières années, l’État tunisien a été forcé deremettre en question ses appareils institutionnels et ses structures organisa-tionnelles et financières en place. L’objectif de son intervention se traduitpar le renforcement des interactions avec le monde de la recherche et celuide l’industrie afin de promouvoir l’innovation et contribuer à la consolida-tion d’un système national d’innovation, qui est un ingrédient indispensabledu développement économique de la nation. Dès lors, la vitesse et la profon-deur des changements donnent une idée de l’intensification de l’effort con-senti par les décideurs politiques tunisiens au développement de nouvelles

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connaissances scientifiques et technologiques, outils moteurs du processusinnovant et du développement compétitif des pays (Mowery, Sampat, 2005).

Chercheurs, activités de R&D et développement des compétences

Uzunidis (2003) montre que le rôle de l’État dans la formation et l’organisa-tion d’une offre scientifique et technique à des fins privées d’innovation estindispensable. Dans ce contexte, l’État tunisien s’est lancé, depuis les annéesquatre-vingt-dix, dans la restructuration du système national de recherchescientifique et la contribution à la formation des compétences. En termes derecherche, la politique tunisienne est orientée aussi bien vers la recherchepublique que vers la recherche privée, même si cette dernière reste très rare.La recherche publique est développée dans les établissements supérieursd’enseignement et de recherche et dans les départements de R&D au sein decertaines entreprises publiques.

Cette politique de restructuration du système national de recherche adonné lieu à la création de laboratoires et unités de recherche au niveau desétablissements publics de recherche (établissements non universitaires) etdes établissements d’enseignement supérieur et de recherche (établissementsuniversitaires). En 2007, on compte dans les universités publiques3, 638 uni-tés de recherche et 139 laboratoires, toute discipline confondue. Par ailleurs,la recherche publique non universitaire compte 22 établissements publics derecherche, parmi lesquels 11 sont financés par le programme de recherchesur contrat (PRC), d’autres sont financés par des programmes de recherchefédérés 4.

Parallèlement, le nombre des chercheurs tunisiens s’est sensiblementamélioré : en 2007, on compte près de 27 529 chercheurs dont 15 833 dansles établissements d’enseignement supérieur et de recherche, intégrés dansles laboratoires et les unités de recherche présentes sur le territoire national,et 11 696 chercheurs tunisiens à l’étranger. Aussi, pendant la période 1998-2007, le nombre de chercheurs pour 1 000 habitants a doublé, passant de2,14 en 1998 à 4,92 en 2007 (source : MRSTDC 5, 2008).

3. Il est à noter que les universités privées ne contiennent pas d’unités de recherche ni de labo-ratoires.4. 11 projets de recherche intégrant 55 équipes de recherche et mobilisant 3 800 000 DT(2 533 000 euros).5. MRSTDC : Ministère de la Recherche Scientifique, de la Technologie et du Développementdes Compétences.

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En outre, la maîtrise du savoir et de la technologie est devenue un facteuressentiel du développement économique et social. Dans ce cadre, l’État tuni-sien s’est lancé dans l’investissement dans le savoir à travers le développementdes écoles doctorales et l’encouragement des formations post-doctorales. Ceteffort a permis de créer, en 2008, un réseau de 37 écoles doctorales, répartiesdans 107 spécialités et 237 autres pour les mastères (MRSTDC, 2008). Assu-rément, les écoles doctorales forment le cadre optimal pour la formation descompétences, selon les besoins économiques du pays, en vue d’un meilleurdéveloppement. Elles ont pour mission d’insérer la formation doctorale dansle contexte socio-économique et d’associer les professionnels dans les orien-tations scientifiques et technologiques des programmes. Elles sont aussiinvesties d’une mission d’insertion professionnelle des diplômés, notammentpar la création d’entreprises basées sur les résultats de la recherche. L’Étatespère atteindre, en 2009, un niveau de 11 % de nouveaux diplômés ensciences et technologie. De ce fait, les efforts consentis par les décideurs poli-tiques visent non seulement une meilleure qualité de l’enseignement dansles universités tunisiennes à l’échelle internationale6 mais aussi un dévelop-pement renforcé des compétences capables de relever les défis imposés parles mutations internationales et la consolidation de l’esprit d’initiative, decréativité et d’innovation.

Des ressources institutionnelles et législatives

Ce n’est qu’au cours du 10e plan (2002-2006) que les actions de l’État tuni-sien, en termes de promotion de la recherche scientifique et du développe-ment de l’innovation se sont montrées plus prononcées. En effet, dans lecadre de la valorisation de la recherche scientifique, de l’innovation techno-logique et du développement des compétences, l’État tunisien a créé des ins-titutions chargées de l’exécution de la politique du gouvernement dans lesecteur de la recherche scientifique et de l’innovation technologique. Dansce contexte, des dispositifs institutionnels ont été instaurés afin de faciliterl’articulation entre les activités de recherche, les besoins des entreprises etles exigences du marché, d’un côté et promouvoir la valorisation des con-naissances scientifiques, de l’autre côté (Tableau 1)

6. Cf. World Economic Forum, “The global Information technology report towards an equitableinformation society”, 2002-2003, p. 303.

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Tableau 1 – Panorama des acteurs institutionnels

Par ailleurs, l’État a mis en place un dispositif législatif, incitant les cher-cheurs à la création de projets innovants afin de mettre en valeur leurs idéesinnovantes et leur commercialisation sur le marché. Conscients de l’impor-tance de la mobilité des hommes en tant que vecteur de transfert technolo-gique, les décideurs politiques tunisiens ont instauré un cadre légalencourageant la mobilité des chercheurs entre les centres de recherche et lesentreprises de production afin de renforcer la recherche appliquée. Égale-ment, et afin de diffuser la culture des brevets auprès des chercheurs, l’État amis en application le décret n°2001-2750 du 26 novembre 2001, fixant lescritères et modalités de partage des produits d’exploitation des brevetsd’invention ou de découverte revenant au chercheur auteur d’une inventionou d’une découverte. Cette incitation consiste à former et sensibiliser leschercheurs quant à l’importance de la protection des résultats de leursrecherches avant de les publier ainsi que de l’exploitation industrielle deleurs inventions par la création d’entreprises innovantes.

Des ressources infrastructurelles nécessaires au développement de l’innovation

Pour favoriser la transférabilité du savoir scientifique et la valorisation desrésultats de la recherche, l’État tunisien s’est orienté vers la création destechnopoles. Il s’agit d’implanter et de faire inter-activer les institutions derecherche et de formation spécialisées dans un secteur porteur d’une part, etles entreprises économiques, d’autre part. L’objectif est de créer un pôled’excellence spécialisé, dans un espace de proximité territoriale et relation-nelle, où chercheurs, enseignants, chefs d’entreprises et financeurs doiventcoopérer étroitement afin de trouver des solutions adéquates aux attentes

Structures institutionnelles Missions

Ministère de la Recherche Scientifique, de la Technologie et du Développement des Compé-tences (MRSTDC)

Organiser et évaluer le système national de recherche

Agence de Promotion de la Recherche, de l’Innovation et la Création d’Entreprises (APRICE)

- Articuler les activités de recherche, les besoins des entreprises et les exigences du marché- Améliorer les capacités industrielles de l’éco-nomie et le potentiel technologique des entre-prises

Observatoire National des Sciences et de la Technologie (ONST)

- Assurer la veille scientifique et technologique en collaboration avec les compétences tuni-siennes à l’intérieur et à l’extérieur du pays

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des marchés et de favoriser la réalisation des ambitions de croissance et déve-loppement. Le premier technopôle opérationnel, depuis 1999, est le ParcTechnologique des communications El-Ghazala. Au cours du 10e Plan dedéveloppement (2002-2006), six nouveaux technopôles sont en cours deconstruction 7.

Des ressources financières pour l’investissement en R&D

Depuis une dizaine d’années, l’État a déployé un effort considérable en ter-mes de mobilisation de moyens financiers et d’incitations à l’investissementdans la R&D. Avant 1996, la recherche scientifique était financée pour laplupart par la coopération internationale, vu qu’aucune ligne budgétairen’était prévue à cet effet. Depuis 2000, le financement de la recherche estassuré presque totalement par des ressources étatiques. En effet, les dépensesintérieures de R&D (DIRD) rapportées au PIB (DIRD/PIB) 8 sont passées de0,45 % du PIB en 2000 à 1,20 % du PIB en 2008 avec la perspective d’attein-dre 1,25 % du PIB en 2009 (Source : MRSTDC, 2008). À partir de l’année2000, la part des fonds publics dans les dépenses intérieures de R&D (DIRD)a enregistré une baisse considérable. Cette baisse se traduit par l’accroisse-ment de la contribution des entreprises privées dans le financement de laR&D, qui est passée de 5,5 % en 2000 à 17,5 % en 2008 (Source : MRS-TDC, 2008). Nonobstant, la R&D tunisienne est en majeure partie financéepar le secteur public ; la participation des entreprises privées demeure encoreassez faible. Ainsi, pour inciter les entreprises privées à s’impliquer ouverte-ment dans le développement de la recherche industrielle et de l’innovation,une panoplie d’instruments financiers ont été mise en place par l’État pourencourager la valorisation des résultats de la recherche et renforcer les parte-nariats entre les structures de recherche et le tissu socio-économique (entre-prises, centres techniques, etc.).

Des mécanismes financiers spécifiques à l’innovation technologique

Les établissements financiers publics et privés ont un rôle essentiel à jouerdans le système national d’innovation. Ils redéfinissent leur politique de

7. Il s’agit de : la Technopole de Borj Cédria (énergies renouvelables, eau, environnement et bio-technologie végétale) ; la Technopole Sidi Thabet (biotechnologie et industrie pharmaceuti-que) ; la Technopole de Sousse (mécanique, électronique, nanotechnologie) ; la Technopole deSfax (informatique et multimédia) ; la Technopole de Monastir (textile et habillement) et laTechnopole de Bizerte (industrie agroalimentaire).8. Le ratio DIRD/PIB est un ratio utilisé par l’OCDE (2002) pour apprécier l’effort financier con-senti par un pays en faveur du secteur de la recherche scientifique et technique.

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financement et établissent des stratégies de financement à risque en impli-quant des intermédiaires financiers spécialisés dans le financement del’innovation. À cet effet, Cooke (2001) souligne que les intermédiairesfinanciers constituent une autre catégorie majeure d’acteurs présents dansles systèmes nationaux d’innovation. Dans le contexte tunisien, on retrouvedes structures publiques de financement de l’innovation mais aussi des orga-nismes de financement privés, telles que les sociétés d’investissement à capi-tal risque et les banques d’affaires (Tableau 2).

L’application du concept SNI dans le cas tunisien reste encore insuffi-sante par le fait que les interactions entre ses principales composantes sont,dans la plupart des cas, limitées. En effet, les interactions entre les différentsacteurs du système d’innovation (organismes publics de recherche, universi-tés et entreprises) demeurent souvent peu nombreuses voire inappropriées.L’isolation des acteurs économiques apparaît aussi comme une raison pri-mordiale de la difficulté à construire des capacités technologiques nationa-les. Ceci se traduit par la présence des goulots d’étranglement et auxproblèmes systémiques et structurels rendant les acteurs du SNI, en Tunisie,faiblement intégrés les uns aux autres. Dans ce cadre, nous proposons d’iden-tifier et d’analyser les principales lacunes affectant la performance du sys-tème tunisien de recherche scientifique et de l’innovation technologique.

LES GOULOTS D’ÉTRANGLEMENTS INHÉRENTS À L’INNOVATION TECHNOLOGIQUE EN TUNISIE

Inéluctablement, la valorisation des résultats de la recherche, constitue uneétape essentielle de la mise en œuvre d’une action de R&D. Elle représentel’aboutissement logique des efforts entrepris par les équipes de recherche ettémoigne de leur engagement pour répondre véritablement aux prioritésnationales en matière de développement économique et social. Néanmoins,en Tunisie, les chercheurs se heurtent à de nombreux écueils s’opposantainsi à la valorisation de leurs capacités de production scientifique et leurtraduction en un processus d’innovation aboutissant à des procédés/produitsou encore des services innovants.

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Tableau 2 – Panorama des institutions financières

Origine du financement

Nature du financement

MontantsConditions

d’attributionInformations demandées

Les projets Valorisation des Résultats de la Recherche (VRR)

- Une contribution financière du système productif à hauteur de 10 % du coût total du projet :Participation de : 40 000 à 125 000 €

- Le projet VRR doit s’inscrire dans le cadre des priorités nationales de recherche,- Avoir un parte-naire industriel,- Projet d’une durée maximale de 3 ans,

- Une équipe en charge du projet,- Un planning des actions et des ques-tions qui sont rap-port avec les publications scienti-fiques et la pro-priété intellectuelle

Programme National de Recherche Inno-vation (PNRI)

- L’entreprise impli-quée dans le projet contribue à son financement à hau-teur de 20 % du coût total

- Permettre la con-solidation de la coo-pération entre le secteur de la recherche et le tissu industriel

- Plan d’affaires- Liste des dépen-ses qui seront financées

PIRD : Prime d’Investissement dans la R&D

- Prime plafonnée à la moitié des dépen-ses engagées pour la R&D- Montant maxi-mum par projet de R&D : 90 000 €

- Avoir des études originales nécessai-res au développe-ment de nouveaux produits ou procé-dés,

- Plan d’affaires- Liste des dépen-ses qui seront financées

Financement Public

- Acquérir d’équipe-ments scientifiques de laboratoire nécessaires à la conduite de projets de R&D.

RITI : Régime d’Incitation à l’Innovation dans les Technologies de l’Information

- Participation pla-fonnée à 49 % du capital du projet- Ticket maximum de l’ordre de 70 000 € par projet

- Avoir un projet innovant autour des TIC,- Justifier les dépen-ses (projets d’exten-sion/Projets nouveaux)

- Plan d’affaires- Liste des dépen-ses prévisionnelles qui seront finan-cées

FITI : Fonds d’Incitation à l’Innovation dans les Technologies de l’Information

- Financement des projets dont les coûts d’investisse-ment ne dépassent pas les 125 000 €

- Un projet inno-vant et/ou projet d’extension

- Examen du plan d’affaires- Due diligence

Les fonds d’amorçage nationaux (Cas du fonds d’amor-çage IKDAM-Ges-tion)

- Prise de participa-tion minoritaire au capital- Ticket d’entrée : 10 000 €

- Plafond de 20 000 €

- Entreprise inno-vante à fort poten-tiel de croissance

- Programme annuel détermi-nant le nombre de projet à réaliser par essaimage

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Des obstacles matériels et relationnels

De leur côté, les chercheurs tunisiens, même s’ils sont actifs, et contribuentau développement de nouveaux produits, procédés, etc., ils ne le sont paspour autant lorsqu’il s’agit de dépôt de brevet. La politique de brevetn’encourage pas le chercheur ni à déposer des brevets, ni à les exploiter 10.

Les fonds d’essai-mage(Cas du Fonds Commun de Pla-cement à Risque géré par la société « SAGES »)

- Prise de participa-tion minoritaire au capital (à raison de 30 %)- Octroi d’une prime d’étude = 70 % du coût d’investisse-ment plafonnée à 10 000 €

- Prime au titre des investissements immatériels= 50 % de leur coût

- Entreprise qui a procédé à la signa-ture de la charte d’essaimage

- Prévisionnel finan-cier- Absence de due diligence

Banque de Finan-cement des PME (BF-PME)

- Ticket maximum de l’ordre de 15 000 à 20 000 € par investisseur- Ticket d’entrée : 10 000 €

- Entreprise en création- Dette qui accom-pagne un finance-ment par le capital risque

- Examen des prévi-sions financières

Financement Privé

Banque Tunisienne de Solidarité (BTS)

- Crédit maximal octroyé allant de 25 000 à 50 000 €

- Entreprise en création- Dettes sans garanties exigées en contrepartie

- Examen des prévi-sions financières

Les Sociétés d’Investissement à Capital Risque (SICARs)

- Participation d’au moins 30 % de leurs ressources

- Un projet inno-vant et/ou projet d’extension

- Examen du plan d’affaires- Due diligence 9

9. « Le terme anglo-saxon de due diligence signifie simplement que l’investisseur doit faire certainesvérifications sur l’équipe dirigeante, compléter son étude du secteur, et vérifier ce qui est écrit dans lebusiness plan » (Mougenot, 2002, p. 175).10. L’Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle (INNORPI) est un éta-blissement public chargé « d’entreprendre toutes actions concernant la normalisation, la qualitédes produits et services, la métrologie et la protection de la propriété industrielle ». Les brevetsdéposés sont soumis à un délai de priorité de douze mois entre la date de dépôt et le titre définitifde propriété. Ce délai de priorité devant permettre la contestation de l’invention étant donnéque le système est basé sur le principe du first-to-file conformément à la règle adoptée par la majo-rité des pays de l’OCDE.

Origine du financement

Nature du financement

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En effet, le cadre légal n’est pas très incitatif pour pousser les chercheurs dansle sens de la propriété intellectuelle et de la commercialisation des brevetsou de l’octroi de licences.

L’autre volet de la valorisation, à savoir les prestations intellectuelles ettechniques, est pratiqué de façon personnelle par les chercheurs et autresenseignants universitaires par l’intermédiaire de cabinet de consulting et desbureaux d’études. Les revenus de cette activité ne sont pas comptabilisés dansles structures de recherche et encore moins au niveau des universités. C’est cequi explique le nombre négligeable des brevets déposés par les structures publi-ques de recherche. Les données du MRSTDC (2006) montrent que plus dedeux tiers des dépôts de brevets sont d’origine étrangère, dont près de 90 %sont des dépôts de personnes morales. En plus, les dépôts de Tunisiens rési-dents représentent moins de 15 % dont plus de 80 % sont des dépôts de per-sonnes physiques (MRSTDC, 2006). Ce nombre très faible de brevetsd’invention d’origine tunisienne ne reflète pas en conséquence le nombre detravaux de recherche entrepris et les potentialités d’innovation existantes enTunisie. De tels constats révèlent « non seulement le manque de dynamisme quicaractérise la recherche à caractère appliqué en Tunisie mais aussi l’insuffisance del’effort entrepris aussi bien par les entreprises privées que par l’ensemble des structu-res de recherches nationales en matière d’innovation » (Tlili, 2009, p. 1045).

Aussi, la « timidité » de la valorisation commerciale s’explique essentiel-lement par l’absence de structures étatiques ou privées, spécialisées danscette fonction fondamentale. En effet, l’insuffisance de l’effort entrepris pardes institutions en relation avec le monde industriel (Agence de Promotionde l’Industrie, centres techniques, établissements et centres de recherches,etc.) en matière de gestion et de diffusion de l’information creuse davantagele fossé entre le monde de la recherche et celui de l’industrie. Ceci se rajouteà la lenteur et la lourdeur des procédures administratives (démarche admi-nistrative de création d’entreprises, service des douanes, etc.) mais aussi àl’incertitude sur les perspectives de réussite d’un projet novateur.

Des obstacles informationnels entre la recherche et l’industrie

Incontestablement, les relations de coopération entre les universités et lesentreprises tunisiennes restent encore timides. Comme le précise Tlili(2009, pp. 1041-1042), « le partenariat université-entreprise demeure le défautmajeur du SNI tunisien. L’existence de plusieurs goulots d’étranglements empêchesouvent les démarches de concrétisation de projets réels de coopération en matièrede recherche et d’innovation ». Ainsi, la principale forme de collaboration desindustriels avec l’université se limite uniquement à la réalisation de projets

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de fin d’études proposés par l’entreprise. En effet, les enseignants-universitai-res jugent que leurs projets ne peuvent pas être exploités par des industrielspour les deux raisons suivantes. D’une part, les industriels ne valorisent pasles projets réalisés par les universitaires et donc, ne sont pas prêts à les payerà leur vraie valeur (pour les exploiter). D’autre part, le projet comporte, enplus du savoir scientifique, un savoir-faire technologique innovateur souventcoûteux et dont la rentabilité n’est pas immédiate. Ce qui ne correspond pasnécessairement aux exigences des entreprises ou que celles-ci ne peuventmaîtriser facilement.

Aussi, les entreprises ne sont pas toutes informées des possibilités definancement de projets en R&D. De ce fait, la mauvaise allocation desfonds 11, conjuguée avec la lenteur et la lourdeur des procédures pour leurdéblocage, dissuadent les entreprises averties de bénéficier de certaines primes.Ce qui explique le faible potentiel d’innovation dans l’industrie tunisienne quiest ainsi reflété dans la balance commerciale. À titre d’illustration, les expor-tations des produits de haute technologie par rapport à l’ensemble des expor-tations sont faibles avec un taux égal à 4 %, très insuffisant par rapport auxautres pays (34 % et 31 % respectivement pour l’Irlande et les Pays-Bas) 12.

Malgré la contribution de l’industrie à la richesse nationale, les caracté-ristiques actuelles de l’industrie tunisienne à savoir : sa forte concentrationdans les activités à forte intensité de main-d’œuvre et le faible effort deR&D, d’une part et l’accroissement de la concurrence étrangère d’autre part,appellent à l’adoption d’une nouvelle politique industrielle orientée vers lessecteurs à forte valeur ajoutée et fondée sur la recherche et l’innovation.

Une dynamique technopolitaine dans le développement de l’innovation encore « embryonnaire »

Dès son indépendance, la Tunisie a placé sa politique sur le développementindustriel, axée sur l’attraction et l’implantation de capitaux étrangers, sur-tout fournisseurs d’emplois, de revenus et de progrès technologique, aumoyen d’une spécialisation dans les activités de sous-traitance internatio-nale. Certes, on ne peut nier les avantages des Investissements DirectsEtrangers (IDE). Ces derniers participent fortement dans le développementde l’économie nation notamment à travers la construction d’une armatureindustrielle et dans la satisfaction aux exigences de l’emploi. Cependant, les

11. La dépendance technologique des entreprises tunisiennes les poussent souvent à financerl’acquisition des technologies étrangères au lieu qu’elles se lancent dans le financement des pro-jets d’innovation et de développements technologiques de long terme.12. Rapport mondial sur le développement humain, 2005.

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productions, ainsi « délocalisées », ne permettent pas d’assurer un véritabletransfert de connaissances et de savoir dans l’innovation technologique. Dece fait, le comportement de dépendance et d’achat de technologie prime surceux de la créativité, de maîtrise, d’appropriation et d’innovation.

Dans ce contexte, afin de stimuler et développer les capacités technolo-giques tunisiennes d’une part, et réactiver la coopération entre les institutsde recherche, les universités et les entreprises privées d’autre part, les déci-deurs politiques se sont lancés, ces dernières années, dans la création destechnopoles. Le développement de ces parcs technologiques et scientifiques« s’inscrit dans le cadre d’une stratégie nationale visant la capture de nouvelles tech-niques, et l’acquisition de compétences dans les secteurs à forte valeur ajoutée baséssur l’intelligence créative et la haute technologie » (Haddad et al., 2007, p. 1).Dans ces circonstances, « la finalité des ‘clusters’, en Tunisie, ne consiste plus àpromouvoir en priorité un processus d’innovation, basé sur la production de con-naissances académiques (telles qu’ils se rencontrent aux États-Unis ou même enFrance), mais bien à créer les conditions d’implantation d’industries dans des sec-teurs d’activité ciblés » (Haddad, Poncet, 2008, p. 100).

Quoique, il est largement prématuré d’évaluer le rôle de ces parcs d’acti-vité dans la catalyse des processus d’innovations technologiques. Cet aspectne pourra réellement être envisagé que d’ici quelques années. De ce fait,l’expérience tunisienne en matière de valorisation des connaissances scien-tifiques, issues des institutions publiques de recherche, en innovations tech-nologiques, au sein des technopoles, reste encore embryonnaire.

Des obstacles financiers

Les chercheurs jugent que l’évaluation des dossiers de candidatures (auniveau du Ministère de l’Industrie) à la création d’entreprises n’est pas fiabledu fait qu’elle est assurée par des universitaires qui ne sont pas proches dumonde industriel. En outre, le système bancaire demeure réticent à prendredes risques en finançant des projets innovants, pour les raisons suivantes :une insuffisance de fonds propres ; une absence de garanties personnelles ;un défaut de capacités d’expertises (surtout pour les projets innovants) etenfin, un positionnement stratégique des banques, en particulier dans desactivités de détails, à rentabilité immédiate.

Fonctionnant selon une logique de banquier, les SICARs tunisiennesexigent des garanties très importantes (cautions, gages, évaluation des capa-cités de remboursement, etc.) qui font le plus souvent défaut aux chercheurs-créateurs. Par conséquent, la quasi-absence de « véritable » réseau de finan-cement des projets de recherche innovants, plus précisément d’un marchéfinancier de capital risque, constitue un handicap majeur à court et moyen

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terme. Également, le recours au financement extérieur constitue un pro-blème car il suppose une meilleure structuration du financement intérieur etdes innovations en matière de produits bancaires.

CONCLUSION

Incontestablement, depuis le début des années 1990, la Tunisie s’est engagéedans la mise en place d’un SNI qui s’appuie sur un ensemble des institutionsnationales dont leurs dispositifs incitatifs et leurs compétences contribuentau renforcement de l’apprentissage technologique du pays. Toutefois, malgréles efforts considérables déployés par les institutions gouvernementales tuni-siennes en faveur du développement de la recherche scientifique à caractèreappliqué, le SNI demeure encore assez peu cohérent et structuré.

Tout d’abord, le nombre très faible de chercheurs-créateurs d’entreprisesinnovantes. En effet, le nombre de création d’entreprises dans les secteursinnovants est très limité, il ne dépasse pas les 15 entreprises par an, en 2008(CSCE-API, 2008) 13. Ceci s’explique par le rôle manqué des pépinièresd’entreprises, comme principales structures d’incubation. D’une part, cesstructures institutionnelles ont été créées dans le cadre de conventions leplus souvent triparties : institution universitaire, agence de promotion del’industrie et rectorat. De telles conventions, à caractère public, ont poureffet de retarder et d’alourdir les procédures administratives. D’autre part, ladémarche adoptée par les pépinières est le plus souvent passive, se conten-tant d’étudier les dossiers qui leur sont soumis.

Ensuite, la politique de brevet n’encourage pas le chercheur ni à déposerdes brevets, ni à les exploiter. En fait, l’application des lois relatives àl’exploitation de la recherche scientifique par les chercheurs tunisiens etl’accompagnement des structures qu’ils appartiennent restent toujours endeçà de leurs aspirations et leurs attentes, en particulier en comparaison avecd’autres pays. C’est ce qui explique, d’ailleurs, le nombre réduit des brevetsdéposés par les structures publiques de recherche.

En outre, le cloisonnement entre les institutions de recherche et le sys-tème productif reste encore trop large. Dans ce contexte, la valorisation desrésultats de recherche reste insuffisante en l’absence d’un partenariat entre lesentreprises et les établissements de recherche. Ceci s’explique par la présenced’une asymétrie d’information entre les différentes institutions du systèmed’innovation (entreprises, universités, laboratoires de R&D). En effet, les

13. Source : Centre de Soutien à la Création des Entreprises (CSCE). Agence de Promotion del’Investissement (API), 2008. D’après le site de l’API visité en décembre 2008. www.tunisiein-dustrie.nat.tn

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entreprises qui acceptent de coopérer avec les universités - en participant aufinancement des programmes de recherche - doivent être transparentes surleurs états financiers. Devant une telle situation, elles refusent l’idée de toutdévoiler à des institutions scientifiques rattachées à des structures de l’État.En outre, des conflits d’intérêts autour du mode de financement adopté oude l’appropriation des résultats de la recherche peuvent surgir entre l’univer-sité et l’entreprise. De telles difficultés conduisent à de faibles flux d’informa-tions et de connaissances entre le milieu scientifique et le milieu industriel.Ainsi, les académiciens scientifiques tunisiens restent souvent très éloignésdes systèmes de production. Dès lors, la collaboration entre l’université etl’industrie devrait être renforcée. Les entreprises sont appelées à s’impliquerdavantage dans le processus de la R&D par l’intermédiaire du financementde certains projets de recherche qui sont liés à leurs activités.

Par ailleurs, la « timidité » de la valorisation commerciale des connais-sances scientifiques se traduit notamment par l’absence d’institutions publi-ques ou privées, spécialisées dans cette fonction fondamentale. En effet,l’insuffisance de l’effort entrepris par des institutions en relation avec lemonde industriel, telles que les centres techniques, en matière de gestion etde diffusion de l’information accentue davantage le cloisonnement entre lemonde de la recherche et celui de l’industrie. Aussi, la question en termes demobilisation des capitaux nécessaire pour le financement des projets inno-vants se pose. En effet, vu les risques que représente le financement des jeu-nes entreprises spécialisées dans des activités innovantes, il sera difficile pourles chercheurs de recourir aux fonds traditionnels. Les institutions bancairesne sont généralement pas disposées à investir dans des projets à risques etpréfèrent intervenir lorsque l’entreprise commence à dégager des profits. Lerecours de certains chercheurs tunisiens à la BTS était une issue de secours ;sauf que les montants attribués par cette institution bancaire ne dépassentpas les 25 000 euros, très limités par rapport à leurs ambitions. Aussi,l’absence d’implication des institutions financières non monétaires, notam-ment les sociétés de capital-risque, dans la structure de financement des pro-jets lancés par les chercheurs tunisiens, dénote encore une fois le démarragemodeste jusque-là du phénomène de la valorisation de la recherche scienti-fique notamment par la création d’entreprises innovantes.

Enfin, l’intérêt accru des décideurs politiques à la création des institu-tions ad-hoc telles que les technopoles, comme un moyen privilégié pour lavalorisation économique des connaissances, ne semble pas toujours aller depair avec les recherches scientifiques. À titre d’illustration, les travaux derecherche, développés dans le domaine des biotechnologies appliquées à lasanté humaine, se limitent souvent à la recherche fondamentale et ne sem-blent être transformés en innovations industrielles.

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