Hypertension artã©rielle essentielle

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A u cours de ces dernières années, les connaissances sur l’hypertension artérielle et son traitement ont considérablement évolué. La récente méta-analyse des données individuelles d’un million d’adultes ayant participé à 61 études prospectives a établi précisément la valeur pronostique de la pression artérielle : pour chaque augmenta- tion de la pression systolique de 10 mmHg ou de la pression dias- tolique de 5 mmHg, le risque de mortalité cérébrovasculaire aug- mente de 40 % et le risque de mor- talité par maladies coronaires de 30 %. Cette augmentation du risque est linéaire sans évidence de seuil inférieur, au moins jusqu’à 115/75 mmHg. Depuis 1980, les essais démon- trant les bénéfices du traitement de l’hypertension artérielle ayant inclus des patients sur des seuils diastoliques de plus en plus bas, les seuils de définition de l’hypertension artérielle par la mesu- re conventionnelle (sphygmomanomètre à mercure en consultation) ont progressivement baissé passant de 160/100 mmHg à 140/90 mmHg, quel que soit l’âge. Parallèlement, pour les mêmes raisons, les cibles tension- nelles à atteindre ont également évolué, 140/90 mmHg chez les hypertendus tout venant, jusqu’à 130/80 mmHg chez les diabétiques et les insuffisants rénaux. Plusieurs études épidémiologiques ont montré que la définition du niveau tensionnel basal, la définition du pronostic cardiovasculaire, la définition du contrôle tension- nel sous traitement étaient mieux assurées par la mesure ambulatoire de pression artérielle ou par l’au- tomesure tensionnelle à domicile laissant penser que ces tech- niques devaient être généralisées, même si les recommandations ne les ont pas encore intégrées. Surtout, la prise en charge de l’hypertension artérielle a dépassé le seul problème de la pression artérielle en s’orientant vers la pré- vention des accidents cardiovascu- laires par la correction de l’ensem- ble des facteurs de risque et non de la seule hypertension artérielle. L’exacte définition du pronostic cardiovasculaire et les décisions de traitement, qu’il s’agisse du traitement antihypertenseur, du traitement hypolipé- miant ou des anti-agrégeants plaquettaires ne reposent plus sur le seul niveau tensionnel mais sur le niveau de risque cardiovasculaire absolu. Les sujets ayant déjà eu un accident cardiovasculaire (prévention secondaire) ou LA REVUE DU PRATICIEN / 2004 : 54 599 Hypertension artérielle Sa prise en charge dépasse le problème de la seule pression artérielle Guillaume Bobrie* * Unité d’hypertension artérielle, Hôpital européen Georges Pompidou, 75908 Paris Cedex 15. Mél : [email protected]

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Au cours de ces dernières années, les connaissancessur l’hypertension artérielle et son traitement ontconsidérablement évolué. La récente méta-analyse

des données individuelles d’un million d’adultes ayantparticipé à 61 études prospectives a établi précisément lavaleur pronostique de la pressionartérielle : pour chaque augmenta-tion de la pression systolique de10 mmHg ou de la pression dias-tolique de 5 mmHg, le risque demortalité cérébrovasculaire aug-mente de 40 % et le risque de mor-talité par maladies coronaires de30 %. Cette augmentation durisque est linéaire sans évidence deseuil inférieur, au moins jusqu’à115/75 mmHg.

Depuis 1980, les essais démon-trant les bénéfices du traitementde l’hypertension artérielle ayantinclus des patients sur des seuilsdiastoliques de plus en plus bas, lesseuils de définition de l’hypertension artérielle par la mesu-re conventionnelle (sphygmomanomètre à mercure enconsultation) ont progressivement baissé passant de160/100 mmHg à 140/90 mmHg, quel que soit l’âge.Parallèlement, pour les mêmes raisons, les cibles tension-nelles à atteindre ont également évolué, 140/90 mmHg

chez les hypertendus tout venant, jusqu’à 130/80 mmHgchez les diabétiques et les insuffisants rénaux.

Plusieurs études épidémiologiques ont montré que ladéfinition du niveau tensionnel basal, la définition dupronostic cardiovasculaire, la définition du contrôle tension-

nel sous traitement étaient mieuxassurées par la mesure ambulatoirede pression artérielle ou par l’au-tomesure tensionnelle à domicilelaissant penser que ces tech-niques devaient être généralisées,même si les recommandations neles ont pas encore intégrées.

Surtout, la prise en charge del’hypertension artérielle a dépasséle seul problème de la pressionartérielle en s’orientant vers la pré-vention des accidents cardiovascu-laires par la correction de l’ensem-ble des facteurs de risque et non de la seule hypertension artérielle.L’exacte définition du pronostic

cardiovasculaire et les décisions de traitement, qu’il s’agissedu traitement antihypertenseur, du traitement hypolipé-miant ou des anti-agrégeants plaquettaires ne reposentplus sur le seul niveau tensionnel mais sur le niveau derisque cardiovasculaire absolu. Les sujets ayant déjà euun accident cardiovasculaire (prévention secondaire) ou

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Hypertension artérielleSa prise en charge dépasse le problème de la seule pression artérielle

Guillaume Bobrie*

* Unité d’hypertension artérielle, Hôpital européen Georges Pompidou, 75908 Paris Cedex 15. Mél : [email protected]

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un diabète ou une atteinte rénale ont un risque cardio-vasculaire important et il n’y a plus aucun doute quant aubénéfice du traitement maximal associant un traitementantihypertenseur, un traitement hypolipémiant et un trai-tement anti-agrégeant plaquettaire. L’étude HOPE a mon-tré que l’adjonction, au traitement de base, d’un inhibi-teur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine chez detels sujets apportait un réel bénéfice de prévention car-diovasculaire, même chez les sujets ayant une pressionartérielle normale. L’étude HPS a montré que l’utilisationd’un traitement hypolipémiant chez de tels sujets appor-tait également un bénéfice de prévention même chez lessujets ayant un taux de LDL-cholestérol normal. Dans cescirconstances, l’interrogatoire ou quelques examens sim-ples suffisent à déterminer la notion de risque importantet il faut savoir prescrire, presque indépendamment desniveaux des différents facteurs de risque, l’ensemble destraitements indispensables à la prévention globale.

Plus grand est le risque cardiovasculaire, plus grandest le bénéfice des traitements. À l’opposé, les patientsayant un seul facteur de risque, a fortiori pour une élé-vation faible à modérée, ne tireront pas grand bénéficedu traitement de l’élévation du facteur de risque.L’évaluation plus fine du risque cardiovasculaire est doncindispensable chez les sujets n’ayant pas à l’évidence unrisque cardiovasculaire absolu élevé du fait de l’absenced’antécédents cardiovasculaires ou de diabète. Pour déter-miner le risque, on utilisait jusqu’à présent dans les recom-mandations : l’âge, le sexe, le niveau tensionnel, l’exis-tence ou non d’une dyslipidémie, d’un tabagisme, d’uneobésité, d’antécédents familiaux précoces, d’une hyper-trophie ventriculaire gauche électrique, d’une atteinterénale (micro-albuminurie, insuffisance rénale). Destableaux simples d’évaluation du risque absolu sont pro-posés dans les recommandations nationales ou interna-tionales. Ces dernières années, on a amélioré la défini-tion du risque cardiovasculaire en utilisant deux typesd’outils : d’une part des méthodes de calcul de risquedécrites dans l’article de Th. Hannedouche, et d’autrepart des techniques complémentaires, décrites dans lesautres articles ou encadrés, de meilleure définition del’atteinte des organes-cibles profitant des progrès tech-nologiques (définition de l’hypertrophie ventriculaire parl’échographie cardiaque, recherche de plaques athéroma-teuses et de modifications de l’épaisseur intima-médiapar l’écho-doppler, vitesse de l’onde de pouls). Il ne s’agitabsolument pas de préconiser la multiplication des exa-mens complémentaires chez les hypertendus, mais demieux définir le risque cardiovasculaire de façon à orienternos efforts de prise en charge et d’optimisation du trai-tement vers les sujets qui en ont réellement besoin. End’autres termes, ne pas traiter ceux qui ne tireront pasbénéfice du traitement, et à l’inverse intensifier les trai-tements de prévention cardiovasculaire chez ceux dont le risque est élevé. Si certaines de ces techniques sont

encore du domaine de la recherche, leur descriptiondans cette revue doit nous aider à réfléchir au concept età l’utilisation du risque cardiovasculaire absolu, à sonoptimisation, à ses limites…

L’autre nouveauté assez récente réside dans ladémonstration tant attendue de l’équivalence des diffé-rents traitements antihypertenseurs prescrits en premièreintention. Même s’il nous a passionnés, le combat desmodernes contre les anciens est dépassé… Il faut dépas-ser le stade du raisonnement du choix du premier traite-ment antihypertenseur. Il faut garder en tête qu’une bi-voire une trithérapie est nécessaire chez 50 à 70 % deshypertendus. Il reste donc à définir quelles sont lesmeilleures stratégies d’associations thérapeutiques anti-hypertensives. Il reste aussi à démontrer quels sont lesbénéfices des associations des traitements antihyperten-seurs et hypolipémiants.

Après toutes ces descriptions techniques modernes etsouvent séduisantes nous aidant à mieux prévenir lesmaladies cardiovasculaires, n’oublions surtout pasquelques sujets non abordés dans cette revue : la néces-sité de trouver comment enfin améliorer l’observance,comment enfin aider les tabagiques à interrompre leurintoxication, les gros à maigrir, les laissés-pour-compte àaccéder au système de soins… ■

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On admet actuellement qu’un patient adulte esthypertendu quand sa pression artérielle systolique(PAS) ou sa pression artérielle diastolique (PAD)

ont atteint ou dépassé à plusieurs reprises les chiffresrespectifs de 140 et 90 mmHg.

On considère d’autre part que la pression artériellen’est vraiment normale qu’en dessous de 130/85 mmHgvoire 120/80 mmHg (tableau 1). 1, 2

L’hypertension artérielle (HTA) est le plus souvent décou-verte fortuitement lors d’un examen systématique ; plus rare-ment devant des manifestations fonctionnelles diverses ou àl’occasion d’un accident cardio- ou cérébrovasculaire grave,comme cela peut encore se voir : accident vasculaire cérébral,œdème aigu du poumon, dissection aortique…

DIAGNOSTIQUER L’HYPERTENSIONARTÉRIELLE

Outre la mesure classique de la pression artérielle (v. encadré page 604), d’autres méthodes de mesure ten-sionnelle ont été développées .

La mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) 3

consiste à mesurer la pression artérielle du patient au

moins toutes les 30 minutes (ou mieux tous les quartsd’heure) pendant 24 heures dans son environnementhabituel, grâce à un moniteur validé, avec là encore, unbrassard adapté. Pour une meilleure interprétation des

603

Prise en charge initiale de l’hypertension artérielle

Huit millions de Français ont une hypertension artérielle, le plus souvent légère à modérée. C’est l’évaluation du risquecardiovasculaire absolu, et non plus le seul niveau tensionnel, qui détermine la décision de débuter ou non un traitementmédicamenteux dont l’objectif est d’atteindre une pression artérielleinférieure à 140/90 mmHg (mais inférieure à 130/80 chez le diabétique et l’insuffisant rénal).

Daniel HERPIN*

* Service de cardiologie, CHU hôpital Jean Bernard-La Milétrie, 86021 Poitiers Cedex ; Mél : [email protected]

Systolique Diastoliquemm Hg mm Hg

Classification « manométrique » de l’hypertension artérielle

Quand la PAS et la PAD occupent des lignesdifférentes, on retient le grade le plus élevé. D’après réf n°1.Tableau 1

Optimale < 120 et < 80Normale 120 à 129 et 80 à 84

Normale haute 130 à 139 et (ou) 85 à 89Grade 1 = 140 à 159 et (ou) 90 à 99

HTA légèreGrade 2 = 160 à 179 et (ou) 100 à 109

HTA modéréeGrade 3 = � 180 et (ou) � 110

HTA sévèreHTA systolique � 140 et < 90

isolée

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chiffres recueillis, on demande au patient de tenir un jour-nal de ses activités.

Avec cette méthode de mesure, la limite supérieure dela normale est fixée à 125/80 mmHg pour la moyenne des24 heures. 1 La pression nocturne doit être inférieure d’aumoins 10 % à la pression diurne : les limites supérieuresproposées par le Joint National Committee 7th (JNC 7) sont :120/75 et 135/85 respectivement. 2 Un patient dont lachute de pression artérielle nocturne est inférieure à 10 %est appelé non-dipper : à niveau tensionnel égal, son pro-nostic cardiovasculaire est moins bon que celui d’unhypertendu dipper. 3

La MAPA est recommandée : 1 quand la pression arté-rielle est particulièrement variable d’une consultation àl’autre ; quand le retentissement viscéral reste très modéréen présence de chiffres tensionnels élevés en consultation(recherche d’une « HTA blouse blanche ») ; quand l’HTArésiste à un traitement bien conduit.

L’automesure tensionnelle à domicile 4 consiste à deman-der au patient de mesurer lui-même sa pression artérielleavec un appareil validé. Une éducation doit lui être don-née au préalable. On recommande de réaliser 3 mesuresmatin et soir pendant 5 à 7 jours, dont on calcule lamoyenne, et d’imprimer les résultats. Les mesures multi-ples et intempestives doivent être déconseillées.

Avec cette méthode de mesure, la limite supérieure dela normale (moyenne des mesures) est fixée à 135/85mmHg. 1, 2, 4

Cette méthode est moins lourde et moins coûteuse quela précédente, elle est la préférée des patients, mais nedonne pas d’information sur la pression artérielle d’acti-vité ni sur la pression artérielle nocturne.

Le diagnostic d’HTA étant ainsi établi, on s’attache àpréciser : son ancienneté, son allure évolutive, perma-nente ou fluctuante (« labile »), stable ou d’évolutionrapide ; et surtout, son retentissement viscéral.

ÉVALUER LA GRAVITÉ DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE

Apprécier le retentissement viscéral

Retentissement neurologique

On doit rechercher à l’examen ou dans les antécédents,des arguments cliniques en faveur d’un accident isché-mique cérébral durable ou transitoire, d’une hémorragiecérébrale ou méningée, plus exceptionnellement d’uneencéphalopathie hypertensive ; une imagerie par tomoden-sitométrie cérébrale ou une imagerie par résonance magné-tique est demandée quand le contexte clinique le justifie.

Retentissement ophtalmologique

Le fond d’œil n’est aujourd’hui recommandé que pourles HTA sévères. On décrit 4 stades à la rétinopathiehypertensive.

– Stade I : artères rigides et brillantes. – Stade II : signe du croisement.– Stade III : hémorragies et/ou exsudats.– Stade IV : œdème papillaire.Les stades III et IV définissent l’HTA maligne.

Retentissement cardiaque

Des signes d’insuffisance et (ou) d’hypertrophie ventricu-laire sont recherchés :

– cliniquement, dyspnée d’effort ou de décubitus, anté-cédent d’œdème pulmonaire, crépitants aux bases pulmo-naires, bruit de galop, souffle d’insuffisance mitrale ;

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE P R I S E E N C H A R G E I N I T I A L E

Mesure de la pression artérielle

La moyenne de plusieurs mesures obtenues sur une périodeprolongée (au moins 1 mois, s’il n’y a pas de contexte d’ur-gence) correspond au niveau tensionnel de référence du

patient.Les conditions de mesure de la pression artérielle doivent

être particulièrement rigoureuses :• avec un manomètre étalonné ;• en vérifiant que le ménisque, l’aiguille ou l’écran indiquent 0

quand le brassard est dégonflé ;• après 5 minutes de repos au moins dans une pièce normale-

ment chauffée ;• à distance d’un effort, de la prise de café et de tabac ;• vessie vide ;• en position couchée ou assise (la noter) ; les jambes non

croisées ;• placer le brassard dans le plan du cœur ;• le bras doit être soutenu et dénudé ;• placer la tête du stéthoscope sur l’artère humérale, non sous

le brassard ;• la taille du brassard doit être adaptée à la taille du bras ; la

longueur de la vessie gonflable doit dépasser les 2 tiers de lacirconférence du bras et sa hauteur couvrir les 2 tiers de lalongueur du bras ; on utilise donc un brassard « obèse » ou« enfant » si la circonférence du bras est respectivement au-delà ou en deçà des limites indiquées sur le brassard ;

• la 1re mesure de la pression artérielle est seulement palpa-toire et sert au repérage de la pression systolique ;

• la 2e mesure est auscultatoire ; la déflation doit être lente (2 mmHg par seconde ou par battement) ; l’apparition desbruits (phase I de Korotkof) correspond à la systolique ; ladisparition des bruits (phase V) correspond à la diastolique ;quand les bruits sont perçus jusqu’à 0, la diastolique estappréciée au moment de l’atténuation des bruits (phase IV) ;

• les résultats sont exprimés par la moyenne de 2 mesureseffectuées à 1 à 2 minutes d’intervalle ;

• la mesure doit être faite aux 2 bras lors de la 1re visite ;• une mesure en position debout doit être également effec-

tuée (recherche d’hypotension artérielle orthostatique).

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– sur l’électrocardiogramme (ECG) afin de détecterune hypertrophie auriculaire gauche (durée de l’onde P >110ms ; onde P diphasique en V1) et une hypertrophieventriculaire gauche (index de Sokolow [SV1 + RV5 ouRV6] > 38 mm1 ; index de Lewis [(RD1 + SD3) – (SD1 +RD3)] > 17 mm ; index de Cornell [RVL + SV3]) > 24mm chez l’homme, > 20 mm chez la femme) ;

– sur le cliché thoracique, par la mesure de l’index car-diothoracique (pathologique si supérieur à 0,50) ;

– par l’échodoppler cardiaque, susceptible de montrertrès précocement : une hypertrophie concentrique du ven-tricule gauche (hypertrophie ventriculaire gauche si l’indexde masse du ventricule gauche est supérieur à 125 g/m2

chez l’homme et à 110 g/m2 chez la femme ; concentrique sile rapport paroi/rayon est supérieur à 0,45) ; une dilatationde l’oreillette gauche ; des anomalies de la relaxation et dela fonction systolique du ventricule gauche.

On recherche également des arguments en faveur d’uneinsuffisance coronaire : douleur constrictive d’effort ou derepos, blockpnée d’effort, anomalie de la repolarisationsur le tracé ECG de base, voire séquelles de nécrose myo-cardique, antécédents de revascularisation myocardique.Dans certains cas, une épreuve d’effort ou une scintigra-phie myocardique d’effort, voire une coronarographiedoivent être réalisées.

Retentissement vasculaire

Il s’apprécie par :– la recherche d’une claudication intermittente des

membres inférieurs ou d’un angor intestinal ;– la recherche d’antécédents vasculaires périphériques

(pontage aorto-fémoral, dissection aortique…) ;– la palpation systématique de tous les pouls artériels ;– la palpation prudente de l’abdomen à la recherche

d’un anévrisme aortique ;– l’auscultation des carotides, vertébrales, sous-claviè-

res, fémorales ;– l’échodoppler des artères à destinée cérébrale, des

membres inférieurs et de l’aorte qui permet de dépisterdes lésions infracliniques, plaques athéromateuses et aug-mentation de l’épaisseur intima-média ;

– la mesure de la compliance des gros vaisseaux qui peutêtre évaluée par la simple mesure de la pression différen-tielle (ou pression pulsée, considérée comme pathologiqueau dessus de 60 mmHg), ou par la mesure de la vitesse del’onde de pouls, qui nécessite un appareillage spécifique (v. encadré P. Boutouyrie, page 618).

Retentissement rénal

Son évaluation impose :– le dosage de la créatinine plasmatique ; elle est consi-

dérée comme : légèrement augmentée à partir de 13 mg/L(115 µmol/L) chez l’homme et de 12 mg/L (107 µmol/L)chez la femme ; pathologique à partir de 15 mg/L (133µmol/L) chez l’homme et de 14 mg/L (124 µmol/L) chez

la femme ;1 ce dosage permet surtout d’estimer la clairancede la créatinine, selon la formule de Cockcroft-Gault (R =1,23 chez l’homme et 1,04 chez la femme) :

on parle d’insuffisance rénale débutante en dessous de90 mL/min, d’ insuffisance rénale modérée en dessous de60 mL/min, d’insuffisance rénale sévère en dessous de30 mL/min et d’ insuffisance rénale terminale en dessous de10mL/min ;

– de rechercher une protéinurie et une hématurie surbandelette, avec dosage pondéral de la protéinurie si labandelette est positive (significative d’une atteinte rénalesi supérieure à 300 mg/j) ;

– et quand la bandelette est négative, de rechercherune micro-albuminurie, surtout chez le diabétique (signi-ficative à partir de 30 mg/24 h ou 20 mg/L).

Certains auteurs recommandent le dosage systéma-tique de l’uricémie, sachant qu’une élévation au-dessus de70 mg/L (416 µmol/L) en l’absence de traitement est assezbien corrélée à la présence d’une néphro-angiosclérose.

Évaluer le risque cardiovasculaire absoluEnfin, les facteurs de risque associés à l’HTA doivent

être soigneusement répertoriés :– âge et sexe ; l’âge est un facteur de risque supplé-

mentaire, chez l’homme à partir de 55 ans, chez la femmeà partir de 65 ans ;

– tabagisme (à chiffrer en paquets-années) ;– hyperlipidémie ; cholestérol total supérieur à 2,5 g/L

(6,5 mmol/L), ou LDL supérieur 1,55 g/L (4,0 mmol/L),ou HDL inférieur à 0,4 g/L (1,0 mmol/L) chez l’homme,inférieur à 0,48 g/L (1,2 mmol/L) chez la femme ;

– surpoids, apprécié non plus par le rapport poids/taille2 supérieur à 25 mais par le périmètre abdominal

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L On considère que la pression artérielle n’est vraiment normalequ’en dessous de 130/85 mmHg. Toutefois, le risquecardiovasculaire lié à la pression artérielle est linéaire, sansseuil identifiable.

L Les méthodes de mesure alternatives comme la MAPA etl’automesure tensionnelle s’avèrent très contributives dans denombreuses circonstances.

L Le fond d’œil est désormais considéré comme inutile tant quel’HTA reste légère ou modérée.

L Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil estfréquemment associé à l’HTA.

L L’objectif tensionnel à atteindre chez les sujets à hautrisque (diabétiques, insuffisants rénaux) est une pressionartérielle inférieure à 130/80 mmHg.

C E Q U I E S T N O U V E A U

clairance créatinine (mL/min) = (140-âge) x poids x Rcréatinine (µmol/L)

;

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(pathologique à partir de 102 cm chez l’homme, 88 cmchez la femme) ;

– antécédents familiaux d’accident cardiaque et (ou)cérébrovasculaire précoce (avant 55 ans chez un hommeet 65 ans chez une femme) ;

– plus récemment, l’intérêt de doser la protéine C-réac-tive a été souligné (significative si supérieure à 10 mg/L)– surtout quand l’HTA s’intègre dans le cadre d’un syn-drome métabolique ;

– et surtout présence d’un diabète, défini par une gly-cémie à jeun supérieure à 1,26 g/L (7 mmol/L) à 2 repri-ses, ou une glycémie post-prandiale supérieure à 1,98 g/L(11,0 mmol/L).

L’inventaire précis de ces éléments joints à ceux éva-luant le retentissement viscéral entre dans l’évaluation durisque cardiovasculaire absolu (tableau 2). 1

Le risque cardiovasculaire absolu du patient hyper-tendu peut alors être apprécié à l’aide du tableau 3. 1 C’estlui qui guidera la prise en charge thérapeutique.

L’ENQUÊTE ÉTIOLOGIQUE

Il faut distinguer 2 étapes dans l’enquête étiologique : lapremière, systématique, est avant tout clinique et ne com-porte que quelques éléments paracliniques essentiels ; laseconde, plus lourde, n’est mise en œuvre que si la premièrea révélé un élément d’orientation vers une cause possible.

Quel bilan sytématique ?

L’interrogatoire recherche la présence de facteurs exogè-nes ou endogènes favorisant la survenue ou l’aggravationd’une HTA : contraception orale, consommation de réglisseet produits apparentés, consommation excessive d’alcool,alimentation riche en sel (ingesta à évaluer par la natriurèsedes 24 h [1 g de NaCl = 17 mmol de sodium]) ou aucontraire pauvre en potassium et magnésium, surpoids,syndrome dépressif, sédentarité, antécédents familiauxd’HTA, certains médicaments (anorexigènes, antidépres-seurs tricycliques, inhibiteurs de la mono-amine-oxydase[IMAO], corticoïdes, anti-inflammatoires non stéroïdiens,β2-mimétiques, ciclosporine, érythropoïétine, certainscollyres et décongestionnants nasaux [phénylpropanola-mine]), prise de toxiques (cocaïne, amphétamines…).

Il précise d’éventuels antécédents uronéphrologiques :douleurs lombaires (à irradiation descendante, de coliques néphré-tiques, ou ascendante, permictionnelles évoquant un reflux), pollakiurie, dysurie, brûlures mictionnelles, infections urinaires récidivantes ou non, bactériologiquement authentifiées, notionancienne d’une protéinurie ou d’une hématurie, antécédents tuberculeux ou streptococcique, notion d’un traitement par desmédicaments néphrotoxiques, antécédents de traumatisme lom-baire, d’intervention lombo-abdominale,antécédents goutteux.

On recherche enfin des manifestations fonctionnelles dela série médullosurrénale : HTA paroxystique, céphalées,sueurs, palpitations…

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE P R I S E E N C H A R G E I N I T I A L E

PAS : pression artérielle systolique ; PAD : pression artérielle diastolique ; AVC : accident vasculaire cérébral ; CRP :protéine C- réactive.Tableau 2

FACTEURS DE RISQUES CARDIOVASCULAIRES RETENTISSEMENT VISCÉRAL PATHOLOGIE CLINIQUE ASSOCIÉE

Éléments à prendre en compte pour l’évaluation du risque cardiovasculaire absolu

❚ Niveaux de la pression artériellesystolique et de la pression artériellediastolique (grades 1 à 3)

❚ Sexe masculin > 55 ans

❚ Sexe féminin > 65 ans

❚ Tabac

❚ Dyslipémie

❚ Obésité abdominale

❚ Antécédents cardiovasculaires familiauxprécoces

❚ Diabète ++++

❚ Éventuellement augmentation de la CRP

❚ Hypertrophie ventriculaire gauche(ECG, écho, radiographie)

❚ Atteinte rénale légère– augmentation légère de la créatinine– micro-albuminurie

❚ Plaques athéromateuses carotidiennes,iliaques, fémorales, aortiques (radiogra-phie, échographie) ou épaisseur intima-média > 0,9 mm

❚ Cérébrovasculaire :– AVC ischémique– hémorragie cérébrale– accident ischémique transitoire

❚ Cardiaque :– infarctus du myocarde– angor– revascularisation coronaire– insuffisance cardiaque

❚ Atteinte rénale patente :– néphropathie diabétique– augmentation significative de la

créatinine – protéinurie > 300 mg/j

❚ Maladie vasculaire périphérique

❚ Rétinopathie III - IV

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L’examen clinique du patient comprend : à l’inspection,la recherche d’une cicatrice opératoire, d’élémentsmorphologiques et (ou) cutanés évocateurs d’une patho-logie endocrine ; la palpation des pouls fémoraux, desespaces intercostaux, la recherche d’un gros rein uni- oubilatéral, éventuellement douloureux à la percussion ; lapercussion du pelvis à la recherche d’un globe vésical ;l’auscultation du cœur à la recherche d’un souffle diasto-lique d’insuffisance aortique ou d’un souffle systoliqueirradiant dans le dos, évocateur d’une coarctation, et celledes aires de projection des artères rénales à la recherched’un souffle systolo-diastolique évocateur d’une sténoseartérielle rénale ; les touchers pelviens à la recherche d’unadénome prostatique, d’un fibrome utérin ou de touteautre formation tumorale du petit bassin.

Bilan biologique minimal

Les prélèvements doivent se faire sans garrot, en régimenormosodé à distance de toute prise médicamenteuse sus-ceptible de modifier l’équilibre hydro-électrolytique.

Le bilan biologique à visée étiologique se limite à undosage sérique de la créatinine et du potassium et une recher-che sur bandelette réactive de protéinurie et d’hématurie.

En pratique, ce bilan biologique à visée étiologique estbien sûr réalisé conjointement avec le bilan destiné à éva-luer le retentissement viscéral et celui prévu pour recenserles facteurs de risque. L’ensemble de ces examens estcontenu dans l’encadré ci-contre.

Le plus souvent (dans plus de 95 % des cas), au termede cette première approche, le praticien ne retrouveaucun signe d’orientation étiologique d’ordre clinique oubiologique ; il est alors inutile de prévoir de plus amplesinvestigations à visée étiologique.

Une cause est rarement trouvéeParfois le bilan initial révèle une anomalie qui, à elle

seule, amène à poursuivre les investigations.

En pratique, une cause (tableau 4) n’est retrouvée quedans 5 % des cas.

Le ou les signes d’orientation peuvent être les suivants :– abolition des pouls fémoraux qui doit faire évoquer

une coarctation aortique ;– anomalies du bilan rénal et (ou) antécédents uroné-

phrologiques qui font évoquer, selon le contexte, une HTArénovasculaire ou une néphropathie parenchymateuse ;

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 607

FdR : facteur de risque.Tableau 3

PRESSION ARTÉRIELLE

Autres FdR PAS 120 - 129 PAS 130 - 139 PAS 140 - 159 PAS 160 - 179 PAS > 180ou PAD 80 - 84 ou PAD 85 - 89 ou PAD 90 - 99 ou PAD 100-109 ou PAD > 110

Mesure du risque cardiovasculaire absolu

Pas d’autres FdR non majoré non majoré faible modéré élevé

1 à 2 FdR faible faible modéré modéré très élevé� 3 FdR

ou atteintes organes modéré élevé élevé élevé très élevécibles ou diabète

Pathologieclinique associée élevé très élevé très élevé très élevé très élevé

Signification du risque ajouté à 10 ans : faible < 15 % ; modéré : 15 - 20 % ; élevé : 20 - 30 % - très élevé � 30 %

Bilan paraclinique minimal

Le bilan paraclinique minimal à réaliser lors du bilan initiald’un hypertendu se compose des examens suivants (selonles recommandations de l’ESH 2003) : 1

• à titre systématique (les examens en couleur sont ceux qu’aégalement retenus l’Anaés 2 en 1997 et 2000) : – glycémie à jeun ;– cholestérol total, HDL-cholestérol et triglycérides à jeun ;– créatinine plasmatique ;– kaliémie sans garrot ;– uricémie ;– hémoglobine, hématocrite ;– bandelette urinaire ;– ECG ;

• éventuellement :- protéine C-réactive ;– échodoppler cardiaque et vasculaire périphérique ;– recherche de micro-albuminurie (systématique chez le

diabétique) ;– dosage pondéral de protéinurie (si la bandelette urinaire

est positive) ;– fond d’œil en cas d’HTA sévère.

1. Guidelines Committee: 2003 ESH-ESC guidelines for the management ofessential hypertension. J Hypertens 2003 ; 21 : 1011-53.

2. Anaés. Prise en charge des patients adultes atteints d’hypertension arté-rielle essentielle (avril 2000) . www.anaes.fr

Page 8: Hypertension artã©rielle essentielle

– hypokaliémie par fuite urinaire qui peut être en rap-port avec : 1. un hyperaldostéronisme secondaire (rénineet aldostérone élevées), qui reconnaît quatre grandes cau-ses génératrices d’HTA (l’HTA rénovasculaire, les néphro-pathies parenchymateuses, les tumeurs de l’appareil juxta-glomérulaire, l’HTA essentielle d’évolution accélérée,

auxquelles il faut ajouter la déplétion sodée et le traite-ment diurétique) ; 2. un hyperaldostéronisme primaire(rénine basse et hypostimulable, aldostérone élevée, rap-port aldostérone/rénine supérieur à 23), qui se présentesous deux formes différentes, l’adénome de Conn [cura-ble chirurgicalement] et l’hyperplasie bilatérale des surré-nales, qui relève d’un traitement par antialdostérones ;

– d’autres éléments peuvent orienter vers des étiolo-gies plus rares : phéochromocytome, syndrome de Cus-hing, pathologies thyroïdiennes et parathyroïdiennes…

– enfin, le syndrome d’apnée obstructive du sommeilest considéré depuis peu comme une « étiologie » possiblede l’HTA, et comme un facteur de résistance au traitementmédicamenteux (v. ci-contre).

DÉCISION THÉRAPEUTIQUE : 3 ÉVENTUALITÉS

La prise en charge thérapeutique se fait en fonction duniveau tensionnel et du niveau de risque cardiovasculaireabsolu.

Le schéma proposé par l’European School of Haemato-logy, ESH 2003, est le suivant. 1

La pression artérielle est « normale haute »(PAS à 130-139 ou PAD à 85-89)

Un traitement non pharmacologique doit être systéma-tiquement proposé.

Pour diminuer la pression artérielle : réduire le surpoidspar un régime approprié ; diminuer la ration sodée à 5 à 6 g de NaCl/j ; limiter les apports en alcool à 20 à 30 g/jchez l’homme, 10 à 20 g/j chez la femme.

Pour corriger les autres facteurs de risque cardiovasculaire :faire cesser ou réduire l’intoxication tabagique ; inciter àreprendre une activité physique aérobique d’au moins 30 à45 minutes, 3 à 4 fois/semaine ; augmenter la consommationde fruits et légumes, réduire les apports en graisses saturées.

Un traitement pharmacologique ne doit être prescritque si le risque cardiovasculaire est élevé ou très élevé (à cause de facteurs de risque associés ou d’une atteintedes organes-cibles). Si le risque est modéré, on s’en tient àune surveillance régulière des chiffres tensionnels. S’il estfaible, aucune intervention spécifique n’est recommandée.

L’HTA est légère à modérée (PAS à 140-179 ou PAD à 90-109)

Comme précédemment, le traitement non pharmaco-logique est systématiquement proposé.

En cas de risque élevé ou très élevé, un traitement pharma-cologique est rapidement mis en route.

En cas de risque modéré, la pression artérielle et les autresfacteurs de risque sont surveillés et ce n’est que si la PASreste supérieure à 140 ou la PAD à 90 au 3e mois de sur-veillance, qu’un traitement pharmacologique est prescrit ;dans le cas contraire, on poursuit la surveillance.

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4608

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE P R I S E E N C H A R G E I N I T I A L E

Le syndrome d’apnée obstructivedu sommeil : une cause possible

d’hypertension artérielle

Le syndrome d’apnées-hypopnées du sommeil (SAHS) sedéfinit habituellement par un index d’apnées-hypopnées(IAH) supérieur ou égal à 10 par heure.1

Ce syndrome comporte deux pathologies différentes : • le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS), lié

à la fermeture inspiratoire, passive, du pharynx, responsa-ble de désaturations nocturnes itératives et de micro-éveils à l’origine d’une déstructuration du sommeil ;

• et le syndrome d’apnées centrales du sommeil, déterminépar l’arrêt des commandes inspiratoires centrales, sanscollapsus pharyngé associé.

Le syndrome d’apnées-hypopnées du sommeil est à distin-guer du syndrome de résistance des voies aériennes supé-rieures, caractérisé par la présence de micro-éveils en l’ab-sence d’apnées et de désaturations lors de l’enregistrementpolysomnographique.Des données épidémiologiques récentes ont montré que 30à 50 % des patients affectés d’un syndrome d’apnées obs-tructives du sommeil étaient hypertendus, mais aussi queprès de 30 % des hypertendus présenteraient un syndromed’apnées obstructives du sommeil jusque-là ignoré. Le risqued’accident vasculaire cérébral et le risque coronaire sontégalement augmentés chez les patients apnéiques, aveccependant une relation causale moins bien établie qu’entresyndrome d’apnées obstructives du sommeil et HTA.Il convient donc de savoir demander un enregistrementpolygraphique nocturne chez tout patient hypertendu diffi-cile à équilibrer, et ce d’autant plus qu’il a des signes d’orien-tation, tels qu’un surpoids, des ronflements nocturnes etune somnolence diurne.La pression positive continue, CPAP des Anglo-Saxons(continuous positive airway pressure), est le traitement deréférence du syndrome d’apnées obstructives du sommeil.Ce traitement permet souvent de faciliter le retour des chif-fres tensionnels vers la normale. Il n’y a cependant pas depreuve que l’appareillage permet de diminuer la morbi-mor-talité cardiovasculaire des hypertendus atteints de syn-drome d’apnées obstructives du sommeil.

1. Nieto FJ, Young TB, Lind BK et al. Association of sleep-disorderedbreathing, sleep apnea, and hypertension in a large community-basedstudy. JAMA 2000 ; 283 : 1829-36.

Page 9: Hypertension artã©rielle essentielle

En cas de risque faible, la période d’observation sans trai-tement pharmacologique peut éventuellement se poursui-vre 12 mois.

L’HTA est sévère (PAS � 180 ou PAD � 110 mmHg)

Le traitement pharmacologique est mis en route immé-diatement, associé aux mesures non pharmacologiques et àla prise en charge énergique des facteurs de risque associés.

LES PRINCIPES DU TRAITEMENTMÉDICAMENTEUX

Quand la décision de traiter est prise, l’une quelconquedes 6 classes pharmacologiques disponibles sur le marché

(diurétiques, β-bloquants, inhibiteurs de l’enzyme deconversion de l’angiotensine [IEC], inhibiteurs calciques,antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II, et à unmoindre degré α-bloquants) peut être prescrite, toujoursen monothérapie. Le recours à une classe particulière peutêtre guidé par les caractéristiques du patient et du produit.

L’intérêt d’une prescription complémentaire d’aspirine àpetite dose (75 mg/j) a été démontré par l’étude HOT (réduc-tion supplémentaire du risque cérébral et coronaire) ; ce béné-fice est plus particulièrement marqué chez les hypertendus àhaut risque cardiovasculaire ou dont la créatinine est supé-rieure à 115 µmol. Mais cette prescription ne peut s’envisagerque si la pression artérielle est parfaitement contrôlée.

L’objectif à atteindre est une pression artérielle infé-rieure à 140 et 90 mmHg.

Mais les essais d’intervention ayant montré qu’unbénéfice supplémentaire en termes de morbi-mortalitéétait obtenu, notamment chez les patients à risque élevé,quand la pression artérielle était davantage réduite, l’ESH(de même que le JNC 7) propose un objectif tensionnelinférieur ou égal à 130 et 80 mmHg chez les patients àhaut risque cardiovasculaire, notamment les diabétiques.

Ce n’est qu’en cas d’échec au bout de 2 à 3 mois de lamonothérapie choisie, que se discute un aménagementthérapeutique : augmentation de la dose, changement declasse ou adjonction d’un médicament synergique.

Les bithérapies les plus fréquemment proposées sont les suivantes :– β-bloquants + diurétiques thiazidiques ;– IEC + diurétiques thiazidiques ;– antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II +

diurétiques thiazidiques ;– β-bloquants + inhibiteurs calciques (sauf vérapamil

ou diltiazem) ;

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 609

Principales causes de l’HTA❚ Syndrome d’apnée du sommeil

❚ Toxicité médicamenteuse (anti-inflammatoires non stéroïdiens, cocaïne,amphétamines, sympathomimétiques, contraceptifs oraux, ciclosporine,tacrolimus, érythropoïétine, acide glycyrrhizinique…)

❚ Affections rénales chroniques

❚ Hyperaldostéronisme primaire

❚ HTA rénovasculaire

❚ Syndrome de Cushing

❚ Phéochromocytome

❚ Coarctation de l’aorte

❚ Affections de la thyroïde ou de la parathyroïde

D’après réf. 2.Tableau 4

PARAMÈTRES PÉRIODICITÉ DE LA SURVEILLANCE PÉRIODICITÉ DE LA SURVEILLANCEDANS LE CAS D’UNE HTA DANS LES SITUATIONS PARTICULIÈRES

CONTRÔLÉE NON COMPLIQUÉE

❚ Pression artérielle 3 à 6 mois Plus souvent si l’objectif tensionnel n’est pas atteint

❚ Interrogatoire et examen cardiovasculaire 12 mois Plus souvent en cas de symptôme cardiovasculaire

❚ Bandelettes urinaires (protéinurie) 12 mois

❚ Créatininémie 1 à 2 ans Avant et peu après l’instauration d’un traitement diurétique ou inhibiteur du système rénine-angiotensine (avec une mesure de kaliémie)

❚ Glycémie 3 ans, si initialement normale Plus souvent en cas d’intolérance au glucose, de diabète, de modification du poids ou du mode de vie

❚ Cholestérolémie totale et HDL, 3 ans, si initialement normaux Plus souvent si les lipides sont initialement anormaux, triglycéridémie en cas de traitement hypolipidémiant, de modification du poids

ou du mode de vie

❚ Électrocardiogramme En cas de présence de signe d’appel à l’interrogatoire ou à l’examen

Paramètres et périodicité de la surveillance du patient hypertendu (Anaés 2000)

Tableau 5

Page 10: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4610

ENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE P R I S E E N C H A R G E I N I T I A L E

L’hypertension artérielle du sujet âgéest extrêmement fréquente (40 %des sujets de plus de 65 ans sont

hypertendus).Elle se caractérise par les point suivants :• elle prédomine sur la PAS, car elle est

presque toujours en rapport avec unealtération de la compliance des grosvaisseaux (qui elle-même génère unabaissement de la diastolique, d’où uneaugmentation de la différentielle, oupression pulsée – marqueur de risqueindépendant) ;

• elle s’accompagne d’une variabilité ten-sionnelle à court et moyen terme extrê-mement marquée ;

• la chute tensionnelle post-prandiale estplus nettement accentuée que chez l’a-dulte jeune ;

• elle est souvent associée à une hypoten-sion orthostatique ;

• elle survient sur un terrain à risque,malade polymédicamenté et souventpoly-artériel ;

Le bénéfice du traitement antihyperten-seur chez le sujet hypertendu âgé estaujourd’hui parfaitement établi, notammenten termes de protection cérébrale. Ladémonstration en a été apportée par demultiples essais randomisés, conduits surde larges populations : MRC trial, EWPHE,SHEP, STOP, SYST-EUR, HOT, STOP2, etc.Mais dans toutes ces études, l’âge despatients inclus dépassait très rarement leseuil des 80 ans.

Certaines publications ont évoqué chez lesujet âgé la possibilité d’une relation inverseentre le niveau de pression artérielle et lamortalité cardiovasculaire ou globale. Maisrécemment, François Gueyffier et al., 1 engroupant les données de 4 essais conduits endouble aveugle (SHEP, SHEP-pilot, STOP etSYST-EUR) et de 2 essais ouverts (Coope etCASTEL), ont pu montrer que le traitementantihypertenseur permettait de réduire de34 % le risque d’ accident vasculaire cérébralaprès 80 ans ; le bénéfice est égalementsignificatif vis-à-vis des accidents cardiovas-

culaires graves (– 22 %) et de la survenued’une insuffisance cardiaque (– 39 %). Il n’y a,en revanche, pas de bénéfice démontré entermes de mortalité globale, voire même unetendance à la surmortalité si on ne considèreque les essais en double aveugle.

Au total, il faut aujourd’hui considérerqu’il n’y a pas d’âge au-dessus duquel unpatient hypertendu n’aurait plus aucunbénéfice significatif à attendre d’un traite-ment antihypertenseur.

En termes de chiffres tensionnels, l’objec-tif à atteindre doit rester « raisonnable » :l’Anaés 2 a proposé de ramener la PAS auxalentours de 150 mmHg.

Une bithérapie est nécessaire dans plusde 70 % des cas.

1. Gueyffier F, Bulpitt C, Boissel JP et al.Antihypertensive drugs in very old people: asubgroup meta-analysis of randomised controlledtrials. INDANA Group. Lancet 1999 ; 353 : 793-6.

2. ANAES. Prise en charge des patients adultesatteints d’hypertension artérielle essentielle (avril2000) . www.anaes.fr

Quand demander l’avis du spécialiste ?

La prise en charge de l’HTA est, dans latrès grande majorité des cas, dudomaine du médecin généraliste.

Dans certains cas néanmoins, il est sou-haitable voire indispensable de confier lepatient à un spécialiste, ou même de l’hospi-taliser.

L’hospitalisation en urgence doit se fairedans les circonstances suivantes, cor-respondant à des urgences vraies (hyper-tensive emergency des auteurs anglo-saxons) :

• œdème aigu du poumon, syndromecoronaire aigu ou suspicion de dissec-tion aortique : hospitalisation en unitéde soins cardiologiques intensifs ;

• accident vasculaire cérébral ou accidentaigu transitoire, syndrome méningé :hospitalisation en neurologie ;

• éclampsie : hospitalisation en gynéco-obstétrique ;

• HTA maligne (œdème papillaire au fondd’œil, ou céphalées avec soif intense,amaigrissement récent) : hospitalisationen néphrologie, cardiologie ou médecineinterne selon le contexte local.

La simple poussée tensionnelle sansretentissement viscéral ni signes de gravité(hypertensive urgency) peut être gérée enambulatoire.

En dehors de l’urgence vraie, l’avis du spé-cialiste est sollicité dans les cas suivants :

• anomalies cardiovasculaires à l’interro-gatoire (dyspnée, douleur thoracique,palpitations, malaises, claudicationintermittente) ou à l’examen clinique(souffle cardiaque ou vasculaire, râles destase pulmonaire…) ou à l’ECG (si lemédecin généraliste ne fait pas d’ECGlui-même, une consultation auprès ducardiologue doit être demandée de prin-cipe lors du bilan initial) ;

• anomalies du bilan rénal (élévation de lacréatinine, protéinurie, hématurie…) :une consultation doit être demandéeauprès du néphrologue, précédée éven-tuellement d’une échographie rénale ;

• mise en évidence d’un signe d’orienta-tion vers une possible cause rénale ousurrénale, hypokaliémie notamment : unbilan étiologique adapté au signe d’ap-pel doit alors être organisé dans unestructure spécialisée ;

• suspicion d’un « effet blouse blanche » :une MAPA ou éventuellement une auto-mesure tensionnelle doit être program-mée, examens pouvant bien sûr êtreréalisés par le généraliste s’il a le maté-riel à sa disposition ;

• persistance de chiffres tensionnels éle-vés malgré le traitement, au bout de 6mois.

Même après 80 ans il y a un bénéfice à traiter l’HTA

Page 11: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 611

– IEC + inhibiteurs calciques ;– β-bloquants + α-bloquants ;– éventuellement inhibiteurs calciques + diurétiques

thiazidiques.La trithérapie ne s’envisage qu’en cas d’échec d’une bithéra-

pie à pleine dose prescrite pendant encore 1 à 3 mois.Les modalités de la surveillance, telles qu’elles sont

recommandées par l’Anaés, 5 sont résumées dans letableau 5.

CONCLUSION

Les preuves de l’efficacité du traitement antihyperten-seur en termes de morbidité et de mortalité cardiovascu-laires sont aujourd’hui solidement établies, dans toutesles formes d’HTA et sur tous les terrains, y compris lespatients de plus de 80 ans.

Encore faut-il pour cela se donner les moyens d’attein-dre les objectifs tensionnels proposés, ce qui veut dire : 1. choisir préférentiellement des médicaments susceptiblesd’être réellement pris, donc bien tolérés et faciles à manier ; 2. savoir associer, plusieurs médicaments d’action complé-mentaire dès que la monothérapie s’avère insuffisante. B

L’auteur ne déclare aucun conflit d’intérêt.

L L’HTA est définie par une pression artérielle systolique oudiastolique égale ou supérieure à 140 et 90 mmHg,respectivement.

L La méthode de mesure de référence est la mesure clinique aucabinet du médecin. Des méthodes complémentaires demesure de pression artérielle (automesure à domicile etmesure ambulatoire) sont souvent nécessaires.

L L’HTA n’est qu’un des éléments d’évaluation du risque cardio-vasculaire absolu: les facteurs de risque associés doivent êtreévalués dès la première consultation, de même que leretentissement sur les organes-cibles de l’HTA : cœur,cerveau, rein, gros vaisseaux.

L Les décisions de mise en route du traitement médicamenteuxet ses objectifs ne reposent plus sur le seul niveau tensionnelmais sur le niveau de risque cardiovasculaire absolu.

L Le bilan complémentaire initial de l’hypertendu comporte auminimum : glycémie à jeun, cholestérol total, HDL-cholestérolet triglycérides à jeun, créatinine plasmatique, kaliémie sansgarrot, uricémie, hémoglobine, hématocrite, bandeletteurinaire, ECG.

L L’HTA est le plus souvent légère à modérée. Elle estessentielle dans 95 % des cas.

L L’objectif tensionnel à atteindre est en règle générale unepression artérielle inférieure à 140/90 mmHg.

L La monothérapie ne permet d’atteindre l’objectif que dans 50 % des cas. Il faut savoir associer les classesthérapeutiques entre elles.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U ESUMMARY Initial management of arterialhypertensionSystemic arterial hypertension is currently defined by a systolic BPor a diastolic BP higher than 140/90 mmHg. There are about 8million hypertensives in France. The diagnosis of arterialhypertension can be made in some cases using ambulatory BPrecording or home self BP measurement. The associated riskfactors have to be identified, as well as target organs damage(heart, brain, kidney, great vessels). Arterial hypertension is mostoften mild or moderate. A specific etiology is found in less than 5%of the patients. The goal of therapy is usually a clinic BP lower than140/90 mmHg (130/80 in patients with diabetes or renal failure).Monotherapy results in a well-controlled BP in 50% of the cases,only. Then, hypertensive patients should be often given 2 or 3drugs.

Rev Prat 2004 ; 54 : 603-11

RESUMÉ La prise en charge initiale de l’hypertension artérielleL’hypertension artérielle (HTA), définie par une pression artériellesystolique ou diastolique égale ou supérieure à 140 et 90 mmHgrespectivement, concerne environ 8 millions de Français. Sondiagnostic peut être facilité dans certains cas par le recours à lamesure ambulatoire de la pression artérielle et à l’automesure. Lesfacteurs de risque associés doivent être évalués dès la premièreconsultation, de même que le retentissement sur les organes-ciblesde l’HTA : cœur, cerveau, rein, gros vaisseaux. L’HTA est le plussouvent légère à modérée. Une étiologie n’est retrouvée que dansmoins de 5 % des cas. L’objectif tensionnel à atteindre est en règlegénérale une pression artérielle inférieure à 140/90 mmHg (mais130/80 chez les diabétiques et les insuffisants rénaux). Lamonothérapie ne permet d’atteindre l’objectif que dans 50 % descas. Le recours à une bi- ou trithérapie est donc souventnécessaire.

1. Guidelines Committee : 2003 ESH-ESC guidelines for themanagement of essentialhypertension. J Hypertens 2003 ; 21 : 1011-53.

2. Chobanian AV, Bakris GL, BlackHR et al. The 7th report of the JNCon prevention, detection,evaluation, and treatment of highblood pressure. JAMA 2003 ; 289 :2560-72.

3. Recommendations of BritishHypertension Society. Use andinterpretation of ambulatory BPmonitoring. BMJ 2000 ; 320 : 1128-34.

4. Proceedings from the 1st

International ConsensusConference on Self-Blood PressureMeasurement. Blood PressureMonitoring 2000 ; 5 : 91-149.

5. ANAES. Prise en charge des patientsadultes atteints d’hypertensionartérielle essentielle (avril 2000).www.anaes.fr

R É F É R E N C E S

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L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4612

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E R L A P R E S S I O N A R T É R I E L L E

Faut-il encore mesurer la pression artérielle en milieu médical ?

La variabilité de la pression artérielle, multi-factorielle, sous la dépendance de nombreuxstimulus neurosensoriels ou exogènes, a été

quantifiée précisément depuis près de 40 ans. 1, 2

Entre deux mesures de deux pressions arté-rielles à deux consultations différentes, lapression artérielle peut varier « naturellement »de 35 mmHg pour la systolique et 17 mmHgpour la diastolique ! Cette constatation a d’im-portantes conséquences dans la définition duniveau tensionnel basal d’un individu. Lesauteurs de ces premiers travaux ont montréqu’en multipliant le nombre de mesures oumieux le nombre de consultations, on dimi-nuait la variabilité, et ainsi on précisait mieuxle niveau tensionnel basal. Mais la variabilitétensionnelle a aussi des conséquences dansl’appréciation de l’efficacité d’un antihyper-tenseur. En effet, la réduction tensionnellediastolique attendue de la mise en route d’untraitement antihypertenseur, habituellementde 5 à 10 mmHg au grand maximum, est trèsinférieure à la variabilité individuelle de la pres-sion artérielle diastolique (8,9 à 11,5 mmHg)et à la reproductibilité de la méthode (17 à 23 mmHg).

IL FAUT MULTIPLIER LES MESURESTENSIONNELLES POUR APPRÉCIERL’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT

Les précautions de définition du niveautensionnel basal ont été bien comprisesdepuis de nombreuses années et clairementprécisées dans les recommandations natio-nales ou internationales de prise en chargede l’hypertension artérielle lors du diagnosticqui conseillent de multiplier les mesures àplusieurs consultations réparties sur 3 à 6 mois.En revanche, on a oublié de tirer les consé-quences de la variabilité dans l’appréciationde l’efficacité des traitements anti-hyperten-seurs. Trop souvent, nous nous contentonsd’un trop faible nombre de mesures de pressionartérielle pour affirmer que le traitementprescrit à la consultation précédente est oun’est pas efficace !

Au cours de ces 15 dernières années,grâce essentiellement à la multiplicationaisée des mesures tensionnelles par lamesure ambulatoire ou l’automesure à

domicile mais aussi à la standardisation deleur méthodologie, on a montré que leniveau tensionnel basal était mieux définipar ces méthodes complémentaires demesure de la pression artérielle que par laméthode conventionnelle en milieu médical.On a aussi montré que l’atteinte des organes-cibles était mieux corrélée au niveau ten-sionnel défini par ces méthodes qu’à celuimesuré en consultation médicale. Malgréces preuves, les recommandations interna-tionales ou nationales n’ont pas encoreinclus la systématisation de ces méthodescomplémentaires de mesure de la pressionartérielle dans la prise en charge initiale oule suivi des hypertendus. Le motif principalde l’absence de généralisation de cesméthodes était que nous ne disposions pasd’études épidémiologiques suffisantes etnotamment pas d’études de pronostic car-diovasculaire sous traitement. En effet, jus-qu’à présent, tous les essais d’interventiondémontrant le bénéfice du traitement del’hypertension artérielle ont utilisé laméthode conventionnelle de mesure depression artérielle (sphygmomanomètre àmercure en milieu médical).

Les résultats de deux études importantesdevraient modifier les prochaines recom-mandations. Il s’agit d’études épidémiolo-giques de suivi de cohortes étudiant le pro-nostic cardiovasculaire d’hypertendustraités. Après avoir comptabilisé les acci-dents cardiovasculaires advenus au coursdu suivi, les auteurs ont établi la relationentre le niveau tensionnel défini à l’inclusionet le risque de survenue de ces accidents. À l’inclusion, le niveau tensionnel basal soustraitement a été mesuré par méthodeconventionnelle en milieu médical dans lesdeux études, par mesure ambulatoire pourl’une3 et par automesure à domicile pourl’autre.4 Les médecins traitants des patientsn’ont pas reçu de consignes de prise encharge autres que de suivre les recomman-dations habituelles en termes de traitementet de cibles tensionnelles à atteindre. Il n’y apas eu de consignes particulières concer-nant les classes d’antihypertenseurs. Lesrésultats de ces 2 études prospectives sont

superposables : 1. les techniques complé-mentaires de mesure de la pression arté-rielle définissent mieux le pronostic cardio-vasculaire sous traitement que ne le fait lamesure conventionnelle en milieu médical ;2. ces études confirment, si besoin était, le bonpronostic de « l’hypertension de consultation »ou «hypertension blouse blanche»; le pronosticde ces hypertendus traités ayant des chiffrestensionnels élevés au cabinet médical alorsque leur pression artérielle est normale endehors du cabinet médical (en ambulatoire ouà domicile) est comparable à celui des patientsdont la pression artérielle apparaît contrôléeparles 2 méthodes ; 3. ces 2 études ont découvertégalement que près de 10 % des hypertendustraités ont une « hypertension masquée »,c’est-à-dire une pression artérielle appa-remment contrôlée par le traitement lors dela mesure faite au cabinet médical, mais unehypertension artérielle non contrôlée enmesure ambulatoire ou à domicile ; ceshypertendus non contrôlés par leur traite-ment dans leur vie courante ont un mauvaispronostic cardiovasculaire, superposable àcelui des patients dont la pression artériellen’apparaissait pas contrôlée tant en milieumédical que par la méthode complémentaire.Ces 2 études confirment, sur le pronostic cardio-vasculaire, les données préalables montrantque ces patients avec « hypertension masquée »avaient une atteinte des organes-cibles plusimportante que ceux ayant une hypertensioncontrôlée.

L’AUTOMESURE TENSIONNELLEDOIT SE GÉNÉRALISER

L’ensemble des données accumulées depuis30 ans montre que la mesure tensionnelleconventionnelle en milieu médical a de sérieuseslimites. Dans 20 à 30 % des cas, elle diagnostiqueà tort une hypertension artérielle (« hyperten-sion blouse blanche») et chez les patients traités,nous laisse croire que les traitements ne sont pasefficaces. À l’inverse, dans 10 à 20 % des cas, ellenous laisse croire que les patients sont normotendus(«hypertension masquée») ou sont contrôlés parle traitement antihypertenseur. Il est temps de rem-placer la mesure conventionnelle en milieu médi-cal par des méthodes complémentaires. Celles-ci

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doivent être généralisées. Nous disposons d’ap-pareils d’automesure validés (www.anaes.fr) queles patients savent utiliser 5 et préfèrent à touteautre méthode. 6 Il nous appartient de mettre enplace les méthodes garantissant la qualité de cettegénéralisation (www.automesure.com).Il faut aussiêtre précis dans les seuils définissant l’hyperten-sion artérielle et son contrôle. Les niveaux ten-sionnels ne sont pas équivalents. Au 140/90mmHg de la méthode conven-tionnelle en milieumédical, correspond 135/85 mmHg pour lamoyenne diurne de la mesure ambulatoire 7 etpour la moyenne de l’automesure. 8 Lorsque lescibles tensionnelles à atteindre sous traitementsont à tort considérées comme équivalentes, lamesure ambulatoire 9 et l’automesure 10 n’appor-tent rien ; il est même possible qu’elles soientdélétères, aboutissant à un allègement intem-pestif du traitement et à un contrôle tensionnelmoins bon! La généralisation de ces méthodes abien évidemment un coût. En dirigeant les soinset l’adaptation des traitements vers ceux qui en

ont réellement besoin, il n’est pas certain que celasoit un surcoût!

Guillaume BobrieUnité d’hypertension artérielleHôpital européen

Georges Pompidou75908 Paris Cedex 15.

Mél : [email protected]

1. Armitage P, Rose GA. The variability of measurementsof casual blood pressure. I. A laboratory study. Clin Sci1966 ; 30 : 325-35.

2. Armitage P, Fox W, Rose GA, Tinker CM. The variabilityof measurements of casual blood pressure. II. Surveyexperience. Clin Sci 1966 ; 30 : 337-44.

3. Clement DL, De Buyzere ML, De Bacquer Da et al.Office versus Ambulatory Pressure StudyInvestigators. Prognostic value of ambulatoryblood-pressure recordings in patients with treatedhypertension. N Engl J Med 2003 ; 348 : 2407-15.

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MORCEAU CHOISI

Le sphygmomanomètre de Potain (voir la couverture de ce numéro) est le premier instrument vraiment maniable au litdu patient pour mesurer la valeur de la pression artérielle systolique. Mais la mesure est encore imprécise. Riva–Rocciimagine alors d’adjoindre en 1896 un brassard gonflable à l’appareil : c’est la naissance de notre tensiomètre actuel. La Presse médicale préconisant encore en 1899, l’utilisation de l’appareil de Potain, Riva-Rocci lui écrit en novembre1899 pour signaler son invention.

�« Dans le n° 33 de la Presse médicale, M. Millian insiste sur l’importancetrès grande que peut avoir en clinique la mensuration de la pressionartérielle, et il donne même quelques symptômes cliniques indirectsfournis par l’inspection et la palpation du cœur et du pouls ; mais avecraison l’auteur fait aussi remarquer le peu qu’il faut attendre de sesmoyens et de ses causes d’erreur. M. Millian recommande donc avecraison le sphygmomanomètre de Potain, comme l’instrument le plus apteà mesurer cliniquement la pression artérielle. Ce sphygmomanomètre estle frère jumeau de celui de Basch. J’ai moi-même commencé mes étudesavec cet appareil, qui est très ingénieux. Mais, comme les observateursl’ont souvent remarqué, il est soumis trop souvent à des causes d’erreurset ses données ont une valeur absolument individuelle […]. En cherchant

à améliorer l’instrument du professeur Potain, j’ai été amené à imaginerune nouvelle disposition instrumentale […] (NDLR : L’invention dubrassard au bras qui permet d’interrompre le flux sanguin huméral ) quime paraît simple, facile à appliquer et qui fournit des données exactes,toujours constantes, quel que soit l’observateur. J’ai présenté, dès 1896,mon nouveau sphygmomanomètre au Congrès italien de médecineinterne, et mes fabricants m’ont dit l’avoir fourni aussi à l’étranger,surtout en Allemagne, en Angleterre et en Amérique. Voyant d’aprèsl’article de M. Millian qu’on ne l’avait pas remarqué en France, j’en donneune description sommaire, et j’espère que mes honorables confrèresfrançais auxquels on doit presque toute l’étude de la tension artérielleaprès l’avoir essayé, voudront bien me donner leur avis. »

Riva–Rocci, 1896 : l’invention du brassard

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Le mot « risque » est dérivé du latin resecare, « ce quicoupe », et de là « écueil », rocher escarpé, puis risqueencouru par une marchandise en mer. Ce mot dési-

gne actuellement un danger, un inconvénient plus oumoins prévisible.

En médecine cardiovasculaire, on distingue habituelle-ment le risque absolu et le risque relatif. Le risque absolu(RA) est la probabilité (habituellement exprimée enpourcentage) d’avoir un accident sur une période detemps donné. Il s’agit d’un concept statistique de groupeet donc difficile à extrapoler à un individu donné.

Le risque relatif (RR) est un chiffre sans dimension quireprésente le facteur multiplicateur en langage épidémio-logique. Ainsi, un facteur de risque peut augmenter oudiminuer le risque de maladie. Lorsque le risque relatif est

égal à 1, il n’y a pas de relation entre ce facteur de risque etla maladie. Un risque relatif compris entre 0 et 1 signifieque le facteur est protecteur, ce qui peut être par exemplele cas d’une intervention médicale. Un risque relatif supé-rieur à 1 signifie que le risque de maladie est augmentépar le facteur de risque.

Une intervention thérapeutique peut modifier le risqueinitial, à la fois relatif et absolu. C’est la réduction durisque absolu (RRA) qui est importante en clinique, etnon pas seulement la réduction du risque relatif (RRR)souvent utilisée pour présenter les résultats des essais cli-niques. Une intervention avec une réduction importantedu risque relatif n’apporte que peu de bénéfice clinique sile risque absolu initial est faible.

Le bénéfice d’une intervention peut être exprimé sous

615

Pourquoi et commentmesurer le risquecardiovasculaire ?

Le calcul du risque cardiovasculaire global d’un individu, à l’aide de tables facilement accessibles, permet d’évaluer le bénéfice d’une intervention thérapeutique en prenant en compte l’ensemble des facteurs de risque. Les résultats de l’étude HPS montrent ainsiun bénéfice à prescrire une statine, chez des patients à très hautrisque cardiovasculaire, quelles que soient les valeurs plasmatiques du cholestérol ou du LDL-cholestérol.

Thierry Krummel, Thomas Dervaux, Laura Parvès-Braun, Thierry Hannedouche*

* Service de néphrologie, hôpitaux universitaires de Strasbourg, hôpital civil, 67091 Strasbourg Cedex.

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la forme du nombre de sujets à traiter (NST) pour éviterun événement pendant une période d’observation don-née. Le nombre de sujets à traiter se calcule comme l’in-verse de la réduction du risque absolu (NST = 1/RRA). 1, 2

Par exemple un traitement par statine réduit de 40 % lerisque relatif de récidive d’infarctus dans une population à haut risque (RRR), soit une réduction de 10 % durisque absolu à 5 ans (RRA). Cela signifie qu’il faut traiter10 patients (100/10) pendant 5 ans pour éviter une réci-dive d’infarctus (NST 10 à 5 ans).

L’avantage de ce mode d’expression est qu’il prend en

compte à la fois le niveau de risque initial et l’amplitude del’effet lié à l’intervention. Par ailleurs, ce mode d’expres-sion est plus facilement comparable d’une étude à l’autre,à condition que le calcul soit fait sur le même intervalle detemps, et il est plus facilement perceptible par le praticien.

PEUT-ON ESTIMER LE RISQUE ?

L’appréciation du risque cardiovasculaire d’un individusur la base de ses seuls chiffres tensionnels est très subjec-tive. Cet individu est classé normo- ou hypertendu selon

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E D U R I S Q U E C A R D I O VA S C U L A I R E

La mesure de l’épaisseur intima-média prédit le risque cardiovasculaire avant même l’apparition des plaques

L’évaluation du risque cardiovasculairefait partie intégrante de la prise encharge de l’hypertension artérielle.

En particulier, la détection d’une atteintedes organes-cibles guide la décision de trai-ter et les objectifs à atteindre. 1 Dans cecadre, l’existence de lésions athéromateu-ses asymptomatiques peut être mise en évi-dence dans les grosses artères par échogra-phie bidimensionnelle à haute résolution.

PRINCIPE

Les artères accessibles sont les carotidesdans la région cervicale, les fémorales au plide l’aine, et l’aorte dans sa portion abdomi-nale. L’image obtenue en coupe longitudi-nale consiste en 3 structures parallèles ren-contrées successivement par les ultrasons :

la paroi superficielle, la lumière vasculaire, laparoi profonde (fig. 1). Les deux tuniquesinternes de la paroi, l’intima et la média, sontrepérables sous forme d’un liseré échogène,généralement mieux visible à la paroi pro-fonde. Malgré les progrès techniques, il estimpossible à l’heure actuelle de distinguerces structures l’une de l’autre, c’est pour-quoi on parle de « complexe intima-média ».Grâce à des logiciels de reconnaissance deniveaux de gris, l’épaisseur de ce complexepeut être mesurée, dans les fémorales et lescarotides, avec une précision remarquable(à 0,02 mm près) et une très bonne repro-ductibilité.2 Dans la population générale, l’é-paisseur intima-média carotidienne a unedistribution log-gaussienne, elle augmenteavec l’âge, et est plus importante à gauche

qu’à droite et chez l’homme que chez lafemme. Aussi, une abaque de normalitédoit-elle tenir compte de tous ces paramè-tres. Une plaque se définit comme une saillieéchogénique mesurant plus de 50 % de l’é-paisseur de la paroi saine adjacente (fig. 2).Cette mesure semi-quantitative (présenceou absence de plaque dans un segmentartériel donné), est très sensible et très spé-cifique, relativement reproductible mais peuprécise. Des méthodes informatiquessophistiquées permettent de mesurer lasurface des plaques, leur volume et leuréchogénicité, c’est-à-dire leur caractère« brillant » (hyperéchogène) ou « sombre »(hypo-échogène).

La présence de plaque est toujourssynonyme d’athérosclérose, et traduit unretentissement artériel directement visi-ble de l’hypertension et des facteurs derisque associés. L’augmentation de l’é-paisseur intima-média, quant à elle, estmoins univoque 2 et peut rendre comptesoit d’un épaississement intimal d’origineathéromateuse, soit, et c’est générale-ment le cas dans l’hypertension artérielle,d’un épaississement médial, sous ladépendance d’une hypertrophie muscu-laire lisse.

VALEUR PRONOSTIQUE

Si l’ensemble de l’arbre artériel précé-demment défini peut être exploré, ce sontsurtout la morphologie et les dimensions

Paroi superficielle

Lumière

Complexe intima-média

Paroi profonde

Artère carotide primitive normale.Figure 1

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que ses chiffres tensionnels sont inférieurs ou égaux à140/90 mmHg et son risque est alors considéré commenormal ou élevé. Le risque réel de cet individu n’estcependant probablement pas très différent selon que leschiffres tensionnels sont à 141/91 ou à 139/89 mmHg.Cette approche monofactorielle et dichotomique durisque (ciblée sur un seul facteur de risque) est inadé-quate, car les études épidémiologiques montrent que lerisque vasculaire associé à l’hypertension artérielle estcontinu et proportionnel aux valeurs tensionnelles et aug-mente dès les valeurs dites normales hautes. 3

Par ailleurs, le risque cardiovasculaire de cet individudépend non seulement des chiffres tensionnels, maisaussi de la présence ou non d’autres facteurs de risquecomme par exemple le tabac, l’hypercholestérolémie, lediabète.4, 5 L’évaluation du risque « global » de cet individudoit donc prendre en compte l’ensemble des facteurs derisque auxquels il est exposé (approche multifactorielle).

En pratique clinique, la quantification par le praticiendu risque global d’un individu est assez approximativeparce qu’il est très difficile d’intégrer le poids de l’ensem-ble des facteurs de risque et de leurs interactions.

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carotidiennes qui constituent un puissantprédicteur de morbidité et de mortalité car-diovasculaires.

Une étude prospective finlandaise estimeen effet que le risque d’infarctus du myocardeà 10 ans est multiplié par 2 en cas d’épaissis-sement, par 4 en présence de plaque et par 7s’il existe une sténose. Parmi les caractéris-tiques ultrasoniques d’une plaque, l’échogéni-cité est corrélée avec sa composition et sché-matiquement, la plaque hyperéchogène estde nature fibreuse et peu vulnérable, alorsque la plaque hypo-échogène (fig. 2), à fortecomposante lipidique et inflammatoire, estplus susceptible de se rompre. Cette appro-che fait l’objet d’intenses recherches ; elle estencore peu répandue. Mais c’est incontesta-blement la mesure de l’épaisseur intima-média qui a acquis ses lettres de noblessepour prédire le risque cardiovasculaire à unstade très précoce, avant même l’apparitionde plaques.2 Des dizaines d’études transver-sales ont montré des corrélations de l’épais-seur intima-média avec tous les facteurs derisque, traditionnels ou plus récents, et plu-sieurs travaux prospectifs sur 3 à 10 ans ontretrouvé des associations entre augmenta-tion de l’épaisseur intima-média et l’incidencedes complications cardiovasculaires, avec desrisques relatifs allant de 1,4 à 5,5.2

INTÉRÊT PRATIQUE

Il faut distinguer deux applications : larecherche et la clinique.

En recherche, la mesure de l’épaisseurintima-média permet d’étudier l’histoirenaturelle de l’athérosclérose, le remodelageartériel in vivo 3 et l’effet des médicamentssur la paroi. Ainsi est-elle utilisée commemarqueur de substitution dans plusieursessais cliniques. À ce titre, elle peut êtreconsidérée comme un marqueur intermé-diaire dans les études avec les statines, dansla mesure où ces dernières ralentissent laprogression de l’épaisseur intima-média touten réduisant la morbidité et la mortalité. Ceparallélisme n’est pas retrouvé avec les anti-hypertenseurs, mais l’étude SECURE (brasde l’étude HOPE) a quand même montré,chez des sujets à haut risque, les effets béné-fiques du ramipril à la fois sur la paroi caroti-dienne et sur le risque cardiaque et cérébral.

En pratique clinique, l’échographie caro-tide répond à tous les critères de qualité d’untest de dépistage : simplicité, faible coût,innocuité, précision, reproductibilité et hautevaleur prédictive. À ce titre, les recommanda-tions américaines et européennes indiquentque la détection d’une athérosclérose chez

un sujet de plus de 45 ans à risque intermé-diaire permet de le reclasser dans la catégo-rie à haut risque et de le traiter comme tel.4, 5

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Gilles ChironiCentre de médecine préventive cardiovasculaire

Hôpital Broussais75679 Paris Cedex 14.

Mél : [email protected]

Plaque athéromateuse hypo-échogène du bulbe carotidien chez un patientasymptomatique.Figure 2

Bifurcation(bulbe)

Carotideinterne

Coupe longitudinale Coupe transversale

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E D U R I S Q U E C A R D I O VA S C U L A I R E

Un nouveau marqueur du risque vasculaire : la vitesse de propagationde l’onde de pouls

Les artères de compliance ont un rôlephysiologique essentiel. En effet, lacontraction cardiaque ne dure qu’un

tiers du cycle, alors que l’écoulement san-guin est continu (flux diastolique). Lors dela systole, les artères élastiques se défor-ment (étirement). L’énergie potentielleconférée au sang (pression), est stockéesous forme élastique. Lors de la diastole,les artères reviennent à leur dimensioninitiale, restituant l’énergie stockée pen-dant la systole, en contribuant à la circula-tion. Chez le sujet sain et jeune, la capacitéde stockage élastique est comparable auvolume d’éjection. L’onde de pression sepropage du cœur vers la périphérie, avecune vitesse finie, proportionnelle à la rigi-dité (fig. 1). En mesurant l’onde de pressionsimultanément sur la carotide commune etsur la fémorale, il est possible de mesurerle temps de propagation. Connaissant ladistance, on peut l’exprimer sous forme devitesse de l’onde de pouls (VOP). L’ordre degrandeur est de 5 à 15 m/s, 10 fois plusrapide que la vitesse du sang.

La mesure de la VOP est aidée par desméthodes automatiques (Complior). Le plussouvent, elle est faite entre la carotide com-mune et la fémorale. Elle reflète la rigiditédu segment artériel compris entre les deuxsites, principalement l’aorte (fig. 1).

Nous avons récemment démontré que larigidité aortique (VOP carotido-fémorale)permettait de prédire le risque cardiovascu-laire chez l’hypertendu, aussi bien la morta-lité globale que la mortalité cardiovascu-laire, les infarctus du myocarde, lesaccidents vasculaires cérébraux fatals, au-delà des autres facteurs derisque, et au-delà de la pres-sion pulsée humérale (fig. 2).L’apport de la VOP pour laprédiction du risque cardio-vasculaire est particuliè-rement importante dans lespopulations considérées àrisque faible ou moyen (risquerelatif d’infarctus du myocardefatal ou non de 5,90 ; inter-valle de confiance à 95 % :2,22 à 15,68) pour les patientsles plus rigides. Il est pourtantdésormais possible de direque la rigidité artérielle consti-tue à part entière une atteintede l’organe-cible « artère », aumême titre que l’épaisseurintima-média, la présence de plaques d’athé-rome ou la dysfonction endothéliale.

Les possibilités thérapeutiques pouraméliorer la rigidité artérielle restent large-ment discutées. Ce n’est que récemmentque des médicaments spécifiquement desti-nés à améliorer la rigidité artérielle ont étédéveloppés.

Les mesures de rigidité sont utilisées enroutine dans les unités spécialisées. Ellesnous aident à la décision thérapeutiquelorsque le risque évalué à partir des facteursde risque cardiovasculaire classiques nepermet pas de prendre de décision (valeurslimites pour la pression artérielle, cholesté-rol). Dans ces cas, une valeur de rigidité éle-vée signe le retentissement infracliniquedes facteurs de risque, et justifie une atti-tude plus interventionniste. Nous utilisonsaussi ces techniques pour mieux compren-dre l’origine de complications cardiovascu-laires chez des patients considérés à faible

risque. Enfin, elles restent des outils derecherche très efficaces. L’utilisation par lepraticien dans son exercice quotidien estconditionnée par : 1. des appareils simples,fiables, peu coûteux ; 2. des conclusions pra-tiques et intelligibles : 3. une prise en chargepar la collectivité. Pour les points 1 et 2, le

travail en partenariat avec les industrielsavance à très grand pas, et nous aurons àcourt terme des appareils répondant à cecahier des charges. Pour le point 3, celapasse par une démonstration que l’identifi-cation des patients à risque permet demieux les prendre en charge, et de diminuerles coûts liés aux pathologies prévenues.Les essais cliniques pouvant le démontrerne font que débuter.

Pierre BoutouyrieService de pharmacologie, Hôpital européen

Georges Pompidou, 75908 Paris Cedex 15.Mél : [email protected]

20

15

10

0

1 23

12

35

% é

vén

emen

ts

Tertiles de PWV

Tertilesde FRS

Principe de mesure et signification de la vitesse de l’onde depouls (VOP). DIST : distensibilité ; V : volume ; p : pression

Figure 1

Valeur prédictive de la VOP(PWV) pour la cardiopathie isché-mique.

Figure 2

Risque relatif d’infarctus du myocarde selon les tertiles de rigidité artérielle (PWV) et du score de Framingham (FRS)

1 045 hypertendus ; suivi moyen : 6 ans

L

Vitesse de l'onde de poulscarotido-fémorale

∆t

PWV = ∆L ∆t

dP p

V dV

1 DIST= �

VOP (PWV) =rigidité artérielle

Page 18: Hypertension artã©rielle essentielle

Une étude canadienne a ainsi montré que les médecins(même les plus aguerris) surestimaient systématiquementet souvent de façon considérable (d’un facteur de 2 à 7) lerisque clinique de leurs patients par rapport au risque cal-culé par un modèle mathématique informatisé. 6

Il est donc préférable de recourir à une quantificationplus objective et plus reproductible du risque à l’aide d’équations basées sur un modèle statistique. Si le modèlede prédiction est bon et si tous les facteurs de risque sontpris en compte, le risque global estimé est proche durisque absolu observé.

Quels sont les modèles de risqueactuellement disponibles ?

La plupart des équations de risque actuellement pro-posées sont basées sur le modèle de Framingham tiréd’une étude observationnelle de cohorte réalisée auxÉtats-Unis (Massachusetts) chez 5 345 hommes et fem-mes de 30 à 74 ans suivis pendant 12 ans dans les années1970.4, 5

Ces équations permettent de calculer séparément lerisque coronaire et le risque d’accident vasculaire cérébralà un horizon de 5 ou 10 ans. 7

Le modèle de prédiction de Framingham prend encompte 7 variables indépendantes : âge, sexe, pressionartérielle systolique – et pas diastolique ! –, rapport HDL-cholestérol sur cholestérol total, tabac, diabète et hyper-trophie ventriculaire gauche définie sur des critères pure-ment électrocardiographiques (ECG). L’hypertrophieventriculaire gauche électrique ainsi définie a un fort pou-voir prédicteur d’événement cardiovasculaire mais,comme elle est relativement rare dans la population, laprédiction est assortie d’un intervalle de confiance trèslarge. Pour cette raison, un nouveau modèle a été intro-duit ne prenant plus en compte l’hypertrophie ventricu-laire gauche électrique.

Le modèle de Framingham est considéré comme lemieux « validé » parce qu’il offre de bonnes performances,c’est-à-dire qu’il permet une bonne discrimination despatients selon qu’ils auront ou non un événement cardio-vasculaire, et parce qu’il a été largement évalué dans denombreuses populations.

Plus récemment, un modèle européen appelé SCORE(Systematic Coronary Risk Evaluation) a été proposé. 8 Cemodèle est dérivé de l’étude de plus de 200 000 individusprovenant de 11 pays européens (dont la France) et suivispendant 13 ans. Les résultats sont exprimés sous la formede tables de couleur qui indiquent le risque de mortalitécardiovasculaire totale à 10 ans chez des individus âgés de40 à 65 ans en fonction du cholestérol total, de la pressionartérielle systolique, du tabagisme, mais pas du sexe ou dudiabète.

Quelles sont les limitations de ces équationsde risque ?

Les limites sont tout d’abord de nature épidémiologique. Les équations de Framingham ont été calculées dans

une population d’origine anglo-américaine dont les carac-téristiques ne sont pas forcément directement extrapola-bles ailleurs, par exemple en France. Ces caractéristiquesont de plus varié au fil du temps en raison de la diminu-tion de la mortalité cardiovasculaire dans les pays indus-trialisés.

Cependant, même si le niveau de risque absolu d’unindividu ou d’un groupe est différent d’un pays à l’autre,un facteur de risque donné a le même effet multiplicateursur le risque absolu global. Par exemple, le risque coro-naire absolu d’un Nord-Américain est environ le doublede celui d’un Français de même âge et ayant les mêmesfacteurs de risque. Cependant, le risque coronaire est pro-portionnellement augmenté de 50 % en cas de diabètechez ces deux individus, malgré leur niveau de risqueinitial différent. L’excès de risque attribuable aux diffé-rents facteurs de risque est relativement identique et doncextrapolable d’une population à l’autre 9 (portabilité dumodèle). Il en est de même pour la réduction du risqueattendu par une intervention thérapeutique (v. infra).

En revanche, les équations de risque de SCORE ontété calibrées pour le risque prévalent dans des régionsgéographiques européennes bien déterminées et tiennentcompte des facteurs génétiques et environnementauxlocaux. La France est ainsi classée dans les zones à « fai-ble » risque cardiovasculaire avec l’Espagne et l’Italie,alors que le risque augmente graduellement en remontantvers le nord de l’Europe pour être maximal en Finlande eten Russie.

Une autre limitation des équations de prédiction derisque tient dans la connaissance encore incomplète desfacteurs de risque. Les variables prises en compte dans leséquations sont en nombre limité et parfois de définitionimprécise.

En revanche, ces équations ignorent de nombreux facteurscomme les antécédents familiaux, l’obésité et sa répartition.Ces équations ne prennent pas non plus en compte les nou-veaux facteurs de risque biologique, comme par exemple laprotéine C-réactive (CRP), les facteurs thrombogéniques,

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L Le modèle SCORE estime le risque de mortalitécardiovasculaire totale calibré pour les populationseuropéennes. La France fait partie des populationseuropéennes ayant le plus faible risque cardiovasculaire.

L Le concept de décision d’intervention thérapeutique fondéesur le risque global trouve sa validation dans des étudesrécentes comme Heart Prevention Study.

C E Q U I E S T N O U V E A U

Page 19: Hypertension artã©rielle essentielle

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E D U R I S Q U E C A R D I O VA S C U L A I R E

Pourquoi, comment et quand rechercher une hypertrophie ventriculaire gauche chez l’hypertendu ?

P lusieurs études de cohortes ont montréque l’hypertrophie ventriculaire gauche

(HVG), détectée initialement par l’électro-cardiogramme (ECG) puis par l’échographie,est chez l’hypertendu un facteur de risquecardiovasculaire puissant et indépendantdes autres facteurs de risque.1 L’échocardio-graphie permet de diagnostiquer une hyper-trophie ventriculaire gauche avec une sensi-bilité et une spécificité très supérieures àcelles de l’ECG. Notons toutefois que, alorsque l’indice de Sokolow-Lyon est très utiliséen France pour détecter l’hypertrophie (SV1+ RV5 > 35 mm), on devrait lui préférer l’in-dice de Cornell (RVL + SV3 > 20 mm chez lafemme et > 24 mm chez l’homme) notable-ment plus sensible, en particulier chez l’obèse.2

La mesure de la masse ventriculaire gau-che par échocardiographie a été validéeanatomiquement. Elle peut donc contribuerà prédire le risque de l’hypertendu et éva-luer les effets cardiaques des traitements.La mesure des paramètres permettant uncalcul de masse (épaisseur du septum inter-ventriculaire, diamètre de la cavité ventricu-laire et épaisseur de la paroi postérieure duventricule) s’effectue à partir d’un cliché ditTM (temps-mouvement, unidimensionnel)du ventricule gauche recueilli en appliquantla sonde d’échographie dans la région

parasternale gauche (v. figure). Ce recueiln’est pas toujours possible, mais par d’autres voies complémentaires il permet engénéral d’effectuer cette mesure chez plusde 8 patients sur 10.

La mesure du ventricule gauche est peureproductible (coefficient de variation de 10à 15 %), en partie de façon incontournable,mais aussi du fait de certains écueils (écho-graphiste insuffisamment formé, tendanceà vouloir absolument prendre une mesurealors que les conditions techniques sontinsuffisantes, biais de mesure induit par laconnaissance des chiffres tensionnels dupatient). Cette reproductibilité médiocreexplique que, même si la régression de l’hy-pertrophie ventriculaire gauche sous traite-ment améliore le pronostic (études de popu-lations), un suivi échographique dont le butserait de détecter une éventuelle régressionde l’hypertrophie est à proscrire.

La conclusion de l’échographie ne doitpas être seulement « présence ou absenced’hypertrophie ventriculaire gauche ». Lecompte rendu doit préciser la géométrie duventricule gauche : remodelage concen-trique (absence d’hypertrophie, mais géo-métrie anormale dont la valeur pronostiquepéjorative a été démontrée), hypertrophieconcentrique ou excentrique… L’échogra-phie doit aussi préciser si la fonction ventri-culaire gauche est normale (fonction systo-lique dont les implications pronostiquessont également validées et niveau des pres-sions de remplissage du ventricule gauche),et rendre une analyse cardiaque complète…L’échographie ne fait toutefois pas partie dubilan systématique de l’hypertendu. Le coûtde l’examen, l’insuffisance d’études compa-rant une stratégie de prise en charge inté-grant ou non les résultats de l’échographieet plusieurs difficultés techniques expli-quent cette réserve. La réalisation d’uneseule échographie cardiaque dans la vied’un hypertendu, contrairement à un suivi,

se justifie le plus souvent. Une échographieest utile chez l’hypertendu dans les cas sui-vants : 3 hypertension artérielle sévère (ouhaut risque cardiovasculaire) ; hypertensionartérielle avec risque cardiovasculaire fai-ble, où l’étude de la géométrie du ventriculegauche pourrait permettre de guider la thé-rapeutique (en particulier la décision de nepas traiter par médicaments) ; 4 hyperten-sion artérielle légère avec chiffres tension-nels ambulatoires élevés (automesure oumesure ambulatoire de la pression arté-rielle) ; hypertension artérielle résistante ;absence d’hypertrophie ventriculaire gau-che à l’ECG alors que le niveau tensionnel lelaisserait présager ; hypertrophie ventricu-laire gauche connue ou dysfonction ventri-culaire gauche connue.

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Éric Abergel

Hôpital européen Georges Pompidou, 75015 Paris

et Institut Cœur Effort Santé, 75005 Paris

Mél : [email protected]

Cliché TM (temps-mouvement)du ventricule gauche chez un patientayant une hypertrophie ventriculairegauche.

Figure

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l’homocystéine, ou des indicateurs d’atteinte précliniquedes organes-cibles, comme par exemple l’épaisseurintima-média, la rigidité artérielle ou la micro-albuminu-rie (v. encadrés p 622). Certains facteurs continus sontpris en compte de façon purement qualitative, par exem-ple le tabagisme, l’hypertrophie ventriculaire gauche ou lediabète.

Enfin, une limitation conceptuelle des équations deprédiction de risque doit être rappelée. Les équationsn’indiquent qu’un risque moyen pour un groupe de sujetsayant les mêmes caractéristiques que l’individu concerné.La prédiction individuelle n’existe pas, et on devrait plu-tôt parler de prédiction individualisée. 10

UTILITÉ PRATIQUE DE L’ESTIMATION DU RISQUE

L’intérêt principal de la quantification du risque estl’aide à la décision thérapeutique.

Risques et bénéficesÀ partir du moment où l’on est capable d’estimer assez

précisément le risque cardiovasculaire global d’un indi-vidu ou d’un groupe d’individus ayant des caractéris-tiques comparables, il devient alors possible d’estimer lebénéfice d’une intervention. Ainsi, en connaissant laréduction du risque relatif engendrée par un type d’inter-vention thérapeutique, il est possible de calculer la réduc-tion du risque absolu attendue chez cet individu, comptetenu de son profil de risque, et d’en déduire le nombre desujets à traiter pour éviter un événement pendant unepériode donnée.

La réduction prévisible du risque relatif est connuepour 2 grands types d’interventions, le traitement anti-hypertenseur et le traitement hypocholestérolémiant, àpartir de méta-analyses faites sur des études regroupantd’énormes cohortes. Ces analyses ont permis de vérifierque l’amplitude de la réduction du risque relatif étaitassez constante quel que soit le niveau de risque absoluinitial, et extrapolable à de nombreux sous-groupescomme l’âge, le sexe, le diabète, etc. (modèle d’effet).

Sur cette base on considère que le traitement anti-hypertenseur diminue de 35 % le risque d’accident vascu-laire cérébral et de 15 % celui d’accident coronaire aigu. 3

À titre d’exemple, on peut prévoir que dans une popu-lation à haut risque cardiovasculaire, par exemple 20 % à5 ans, le traitement antihypertenseur permet de réduire lerisque absolu d’accident vasculaire cérébral de – 7 % à 5 ans, ce qui correspond à 14 sujets à traiter pendant 5 anspour éviter un accident vasculaire cérébral (100/7).

Risque « idéal » et excès de risque

Les équations de prédiction de risque accordent (à juste titre) un rôle très important à l’âge dans le risquede survenue d’un événement cardiovasculaire. Une

approche thérapeutique fondée sur la notion d’un seuilunique aurait donc pour conséquence principale d’aug-menter l’indication des mesures thérapeutiques chez lessujets âgés et de les réduire chez les sujets jeunes. 11

Afin de tempérer l’influence de l’âge, mais aussi celledu sexe, sur le calcul du risque, ont été introduites lesnotions de « risque absolu idéal » et « d’excès de risque ».Le risque absolu idéal est le risque d’une personne demême âge et de même sexe dont les caractéristiques« idéales » seraient les suivantes : pression artérielle systo-lique 120 mmHg ; cholestérol total 5,17 mmol/L (2 g/L) ;HDL-cholestérol 1,19 mmol/L (0,46 g/L) ; non-fumeur ;non-diabétique ; sans hypertrophie ventriculaire gauche.

L’excès de risque est la différence entre le risque absoludu sujet et le risque idéal. Ce mode d’expression tempèrel’influence de l’âge, mais il occulte le fait que le bénéfice(réduction du risque) absolu d’une intervention est pro-portionnel au risque absolu et pas à l’excès de risque.

Intervention fondée sur le risque principal

La prise en compte du risque global et notamment durisque principal peut modifier l’attitude thérapeutique vis-à-vis d’une intervention. Prenons, à titre d’exemple, unpatient ayant déjà fait un infarctus du myocarde et restanthypertendu, alors que son taux de cholestérol est normalhaut. L’approche thérapeutique suivant le mode de rai-sonnement classique serait de lui prescrire un traitementantihypertenseur. Cependant, chez ce patient essentielle-ment menacé de récidive d’infarctus et de mort subitecoronaire, le bénéfice attendu du traitement antihyper-tenseur sur le risque de récidive n’est « que » de – 15 %.En revanche, l’administration d’une statine alors mêmeque le taux de cholestérol est normal, permet de réduireson risque coronaire de – 40 %. Cet individu devrait doncbénéficier davantage d’une statine que d’un traitementantihypertenseur. 12 Une telle intervention thérapeutiquen’aurait pas été prise en compte sur les critères classiquesde prise en charge, mais elle apparaît légitime en cas deprise en compte du risque global.

Risque et recommandations

Les dernières recommandations 2003 conjointes de laSociété européenne d’hypertension artérielle et la Sociétéeuropéenne de cardiologie, 13 de la Société britanniqued’HTA, 14 de la Société néo-zélandaise d’HTA, 15 ainsi quel’ANAÉS en France (recommandations 2000)16 proposentde prendre en compte l’évaluation du risque cardiovascu-laire global pour la décision thérapeutique.

S’il est relativement consensuel de baser les décisionsd’intervention sur l’estimation du risque global, en revan-che les seuils de risque à partir desquels les différentesformes d’intervention sont justifiées sont encore trèscontroversés.

Les enjeux sont ici non seulement médicaux, mais ilssont aussi socio-économiques.

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E D U R I S Q U E C A R D I O VA S C U L A I R E

À titre d’exemple, en Grande-Bretagne, proposer uneintervention sur un seuil de risque de 30 % à 10 ans concer-nerait 8,2 % de la population dont 4,8 % d’individus enprévention secondaire après un événement coronaire.Diminuer ce seuil de risque à 15 % à 10 ans pour déclen-cher une intervention thérapeutique concernerait 25 % dela population, dont 50 % des sujets de plus de 50 ans.

À l’ évidence, un tel choix retentirait considérablementsur l’organisation du système de santé avec des consé-quences financières non négligeables. 17

Quelles preuves avons-nous de la validité du concept d’intervention fondée sur le niveau de risque ?

Le concept d’intervention fondée sur le niveau derisque est maintenant validé par quelques études d’inter-vention récentes comme les études HOPE et EUROPApour le traitement antihypertenseur et les études PRO-SPER et surtout Heart Prevention Study (HPS) pour letraitement hypocholestérolémiant. 18

La micro-albuminurie multiplie par 4 la mortalité cardiovasculaire

L’ existence d’une micro-albuminuriechez un sujet diabétique et (ou)hypertendu, et même dans la popu-

lation générale, permet d’identifier précoce-ment les patients à risque accru de morbi-mortalité rénale et cardiovasculaire.

MICRO-ALBUMINURIE ET RISQUE RÉNAL

La micro-albuminurie est hautement pré-dictive du développement d’une néphropa-thie avérée tant dans le diabète de type 1que de type 2, ou chez les patients hyper-tendus. Dans l’étude HOPE, les patientsayant une micro-albuminurie lors de leurentrée dans l’étude ont eu un risque 14 foisplus important de développer une néphro-pathie, que les patients initialement normo-albuminuriques. Le taux annuel de progres-sion de la micro- vers la macro-albuminurieest chez le diabétique d’environ 4,5 %. Unefois détectée et en l’absence de toute inter-vention spécifique, la micro-albuminurieprogresse en 5 à 10 ans vers une protéinurieavérée chez 22 à 50 % des patients. Ledébit de filtration glomérulaire baisse d’en-viron 10 mL par an à partir de l’apparitiond’une micro-albuminurie. C’est donc unexcellent marqueur précoce du risque rénalet de la nécessité d’une intervention théra-peutique active.

MICRO-ALBUMINURIE ET RISQUE VASCULAIRE

La micro-albuminurie est très fréquem-ment associée à d’autres facteurs de risque

de décès prématuré, aussi bien chez lespatients normotendus qu’hypertendus : obé-sité, âge avancé, sexe masculin, insulino-résistance, hyperuricémie, élévation du LDL-cholestérol et des triglycérides. Étroitementcorrélée au développement de l’athéro-sclérose, elle est le marqueur d’une dysfonc-tion endothéliale diffuse dont elle repré-sente l’expression rénale, mais qui affectel’ensemble des territoires vasculaires.

Chez les patients hypertendus, la préva-lence de la micro-albuminurie va de 7 à38 % selon les séries : ces patients ont unrisque cardiovasculaire significativementsupérieur à celui des patients normo-albu-minuriques, et ont souvent une absence debaisse tensionnelle nocturne (non-dipper).La micro-albuminurie est un facteur prédic-tif indépendant de pathologie coronaire,aussi bien chez les diabétiques que chez lesnon-diabétiques. Associée à l’hypertensionartérielle, elle confère un risque 4 fois plusélevé de pathologie ischémique coronaire.De récentes données sont en faveur d’unrôle prédictif de la micro-albuminurie vis-à-vis de l’insuffisance cardiaque congestive :dans l’étude HOPE, la micro-albuminuriemultiplie par 3 le risque relatif d’hospitalisa-tion pour insuffisance cardiaque, et par 3,7dans le sous-groupe de diabétiques.

L’hypertrophie ventriculaire gauche pré-dispose le patient à une pathologie car-diaque ischémique, des arythmies ventricu-laires, une insuffisance cardiaque ou encorela mort subite. Une corrélation entre lamicro-albuminurie et l’hypertrophie ventri-

culaire gauche a été observée chez despatients hypertendus non diabétiques, indé-pendamment des paramètres de pression. Ilest donc possible que la concordance entremicro-albuminurie et hypertrophie ventri-culaire gauche ne dépende pas seulementdes chiffres de pression artérielle, maisaussi du niveau d’activité des systèmesvaso-actifs locaux, notamment le systèmerénine-angiotensine.

CONCLUSION

Ainsi, dans la population générale, lamicro-albuminurie multiplie par 4 la morta-lité cardiovasculaire, même en tenantcompte de l’hypertension artérielle. Lestraitements réduisant la micro-albuminuriedes sujets diabétiques ont démontré l’effi-cacité qu’ils ont de diminuer le risque denéphropathie et d’insuffisance rénale. Ilreste à démontrer que de telles interven-tions sont également capables de diminuerle risque de néphropathie hypertensive et lerisque cardiovasculaire global chez lespatients non diabétiques.

Maurice LavilleService de néphrologie et hypertension artérielle,

hôpital Édouard Herriot, 69437 Lyon Cedex 03 et UMR-MA, Université Claude-Bernard Lyon 1.

Mél : [email protected]

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À titre d’exemple, HPS est une étude réalisée chezplus de 20 000 patients âgés de 40 à 80 ans, tous à trèshaut risque cardiovasculaire (supérieur à 40 % à 10 ans)sur la base soit d’antécédents coronaires (infarctus dumyocarde, pontage, angioplastie), soit d’antécédents vas-culaires (accident vasculaire cérébral, accident isché-mique transitoire, artériopathie des membres inférieurs,pontage ou angioplastie), soit d’un diabète (de type 1 oude type 2), soit encore sur l’association de plusieurs fac-teurs de risque (hypertension + homme + âge supérieurà 65 ans).

Les patients ont été placés soit sous placebo, soit soussimvastatine 40 mg/jour, quel que soit leur niveau decholestérol total ou LDL initial. Avec une baisse moyennedu LDL-cholestérol d’environ 0,37 g/L, les patients trai-tés par statine ont une réduction significative :

• de – 17 % de la mortalité cardiovasculaire (réduction durisque absolu 3 % ; nombre de sujets à traiter sur 10 ans : 33) ;

• de – 27 % des événements coronaires (réduction duRA 6,2 % ; NST sur 10 ans : 16) ;

• de – 25 % des accidents vasculaires cérébraux (réduc-tion du RA 2,8 % ; NST sur 10 ans : 36) ;

• de – 24 % des revascularisations (réduction du RA5,2 % : NST : 19 patients à 10 ans).

Ces bénéfices sont indépendants de la présence d’anté-cédents d’infarctus du myocarde, du sexe, de l’âge, de laconcentration initiale lipidique, mais aussi de la créatinineplasmatique, du tabagisme, du caractère normo- ou hyper-tendu, et enfin de la présence d’un traitement vasculo-protecteur préalable par aspirine, β-bloqueur ou inhibi-teur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC).L’intérêt de cette étude, outre son bénéfice clinique évi-dent, est de démontrer la validité du concept d’interven-tion thérapeutique basée sur le risque global plus que surle paramètre ou un des paramètres influant ce risque (cho-lestérol ou LDL-cholestérol par exemple).

Cependant, il faut reconnaître qu’il n’existe pas, à cejour, d’étude randomisée comparant directement 2 straté-gies d’intervention basées sur la prise en compte dichoto-

mique d’un risque monofactoriel ou sur l’évaluation durisque global.

COMMENT CALCULER LE RISQUECARDIOVASCULAIRE ABSOLU ?

La plupart des équations de risque sont basées sur lemodèle de Framingham et permettent de calculer séparé-ment le risque coronaire et le risque d’accident vasculairecérébral à un horizon de 5 ou 10 ans. 4, 5, 7

Ce calcul nécessite de connaître l’âge, le sexe, la pressionartérielle systolique, le rapport cholestérol total/HDL-cho-lestérol, la présence ou non de tabagisme, de diabète oud’hypertrophie ventriculaire gauche électrique.

De façon schématique, le risque coronaire d’un Françaisà facteurs de risque vasculaire équivalents est environ 50 % de celui prédit par Framingham, alors que le risqued’accident vasculaire cérébral est à peu près équivalent 9

(ajustement à la population française ou « recalibration »du modèle).

Sites Internet de calcul du risque cardiovasculaire absolu (sélection)

❚ En français> http://www.sfhta.org/

(liste des sites consacrés au risque cardiovasculaire)> http://www.cybermed.jussieu.fr> http://spc-10.univ-lyon1.fr/lir-cv/> http://www.nephrohus.org/

❚ En anglais> http://www.cebm.net/prognosis.asp

(logiciel PC gratuit téléchargeable)> http://www.chd-taskforce.com/> http://www.riskscore.org.uk/calculator.html> http://hin.nhlbi.nih.gov/atpiii/calculator.asp

Tableau 1

Normale Normale haute Grade 1 Grade 2 Grade 3Autres facteurs de risque PAS 120-129 PAS 130-139 PAS 140-159 PAS 160-179 PAS � 180 et histoire de la maladie ou PAD 80-84 ou PAD 85-89 ou PAD 90-99 ou PAD 100-109 ou PAD � 110

Stratification du risque pour quantifier le pronostic

Des mesures répétées de la pression artérielle doivent être faites pour permettre la stratification PAS : pression artérielle systolique ; PAD : pression artérielle diastolique.Tableau 2

Pas d’autre facteur de risque risque moyen risque moyen bas risque surajouté risque moyen surajouté haut risque surajouté

Un à deux facteurs de risque bas risque surajouté bas risque surajouté risque moyen surajouté risque moyen surajouté très haut risque surajouté

Trois ou plus facteurs de risque risque moyen surajouté haut risque surajouté haut risque surajouté haut risque surajouté très haut risque surajoutéou lésion d’un organe-cible ou diabète

Atteinte clinique associée haut risque surajouté très haut risque surajouté très haut risque surajouté très haut risque surajouté très haut risque surajouté

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE M E S U R E D U R I S Q U E C A R D I O VA S C U L A I R E

Le calcul instantané est disponible soit en ligne surl’Internet (v. tableau 1) [ sites référencés sur le site de laSociété française d’HTA, www.sfhta.org], soit dans descalculateurs de poche Palm (Stat-cholesterol, logiciel gra-tuit téléchargeable à http://www.statcoder.com).

D’autres systèmes basés sur les mêmes modèles pré-dictifs utilisent une représentation sous forme de tablescolorées. Ces tables, utilisées par exemple par la Sociétéd’hypertension artérielle néo-zélandaise, 14 le Centre d’Evidence Based Medicine à Oxford, 13 la Société euro-péenne de cardiologie et la Société européenne d’hyper-tension artérielle, 12 permettent d’évaluer le risque cardio-vasculaire par tranches de 2,5 à 5 % correspondant à uneéchelle colorée progressive (v. tableau 2). Ces tables fontégalement parfois figurer le bénéfice attendu d’une inter-vention (sous la forme du nombre de sujets à traiter).

Dans le modèle SCORE, des tables de couleurs sontdisponibles dans la publication originale et indiquent lerisque de mortalité cardiovasculaire totale calibré pour laFrance en fonction du cholestérol total, de la pression sys-tolique et du tabagisme mais pas du sexe et du diabète. 9

En France, l’ANAÉS15 a proposé en 2000 une approchetabulaire simplifiée classant les individus comme ayant unrisque « faible, moyen ou élevé » selon, d’une part leurniveau tensionnel, et d’autre part la présence de facteur(s)de risque et l’histoire de la maladie. Trois grades d’hyper-tension artérielle en fonction des valeurs systoliques oudiastoliques et trois groupes A, B et C selon le nombre defacteurs de risque associés ou d’atteinte des organes-cibles sont ainsi pris en compte (v. encadrés).

À noter que, dans ce modèle, des individus ayant uneatteinte d’un organe-cible comme par exemple une ma-

ladie cardiovasculaire ou rénale, ou encore un diabète,sont d’emblée considérés comme appartenant au groupeC, c’est-à-dire comme ayant un risque élevé quel que soitleur niveau tensionnel et devant donc faire l’objet d’uneprise en charge spécifique. De même, les individus ayantles valeurs les plus extrêmes de pression artérielle ou decholestérolémie sont d’emblée considérés à haut risque etjusticiables de mesures d’intervention « agressives ».

Une représentation analogue a été proposée parl’ESH/ESC en 2003 avec deux niveaux de pression arté-rielle « normal » et « normal haut ». 19 Un exemple de cettereprésentation tabulaire est donné dans le tableau 2.

CONCLUSION

Le concept de risque cardiovasculaire global est uneapproche novatrice mais perturbante de la prise en chargedes maladies cardiovasculaires.

Ce concept modifie notre perception du risque et plusencore de l’efficacité des interventions thérapeutiques. Leconcept d’intervention fondée sur le niveau de risque et lerisque principal est encore plus déroutant, mais il est deplus en plus solidement établi par les études thérapeu-tiques récentes. B

L’ auteur déclare n’ avoir aucun conflit d’intérêt.

L Le risque cardiovasculaire « global » d’un individu estmultifactoriel, il est difficile à établir en pratique clinique et peu reproductible.

L Le niveau de risque absolu peut être estimé à partird’équations (modèles mathématiques) issues des grandesenquêtes épidémiologiques.

L À facteurs de risque identiques, le niveau de risque absoluvarie selon les populations et les pays mais le poids de chaquefacteur de risque est relativement constant dans lesdifférentes populations si bien que les équations de prédictionpeuvent être raisonnablement extrapolées (après ajustement).

L L’intérêt principal de la quantification du risque est l’aide à ladécision thérapeutique en permettant d’estimer le bénéficed’une intervention.

L Le risque cardiovasculaire global peut être calculéinstantanément ainsi que l’estimation du bénéfice attenduexprimé sous la forme du nombre de sujets à traiter pouréviter un événement.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U E

SUMMARY Why and how to measure cardiovascularrisk?In cardiovascular medicine, the absolute risk is the observedincidence of events over a defined period of time. The relative riskis the multiplicative factor or risk factor. The cardiovascular globalrisk is multifactorial but is usually difficult to assess without apredictive model derived from large scale epidemiological studiessuch as Framingham cohort. The relative weight of discrete riskfactors is relatively constant in various populations so thatpredictive equations can be useful, after adjustment, even whenabsolute risk levels are different. The main interest to quantify therisk is to help the therapeutic decision by estimating the benefit ofan intervention. The cardiovascular risk can be calculated instantlyeither on the Internet or on palm computer or from colourful tablesavailable from medical press. These calculators can also give someestimate of the therapeutic benefit expressed as the number ofpatients needed to treat to prevent one event. This mode ofexpression takes into account both the initial absolute risk and themagnitude of the intervention effect. The therapeutic decisionbased on global risk (by opposition with single risk factor) is nowvalidated by recent trials such as Heart Prevention Study. Thisnovel approach is somewhat upsetting but is a truly pertinentalternative to our daily practice.

Rev Prat 2004 ; 54 : 615-25

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RESUMÉ Pourquoi et comment mesurer le risque cardiovasculaire ?En médecine cardiovasculaire, le risque peut être « absolu » ; c’est l’incidence observée des événements sur une période d’observation, ou « relatif » ;c’est le facteur multiplicateur ou facteur de risque. Le risque cardiovasculaire « global » d’un individu est multifactoriel et difficile à établir, en pratiqueclinique, sans l’aide d’équations de prédiction établies à partir de grandes enquêtes épidémiologiques comme l’étude de Framingham. Le poids dechaque facteur de risque est relativement constant dans les différentes populations, si bien que les équations de prédiction peuvent être utilisées,après ajustement, même lorsque les niveaux de risque absolu sont différents. L’intérêt principal de la quantification du risque est l’aide à la décisionthérapeutique en permettant notamment d’estimer le bénéfice d’une intervention. Le risque cardiovasculaire global peut être calculé instantanémentsoit sur l’Internet soit sur programme palm soit à partir de tables colorées disponibles dans la presse médicale spécialisée. Ces calculateurspermettent également l’estimation du bénéfice attendu exprimé sous la forme du nombre de sujets à traiter pour éviter un événement. L’avantage dece mode d’expression est qu’il prend en compte à la fois le niveau de risque initial et l’amplitude de l’effet lié à l’intervention. La décision d’interventionthérapeutique fondée sur le risque global (par opposition à une intervention, fondée sur un seul facteur de risque) trouve sa validation dans desétudes récentes comme HPS. Cette approche novatrice bouleverse nos habitudes, mais constitue une alternative pertinente à notre pratiquequotidienne.

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R É F É R E N C E S

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L’objectif du traitement de l’hypertension artérielle(HTA) est la prévention des complications cardio-vasculaires et rénales. Depuis l’essai historique de

Hamilton et al, 1 il y a 40 ans, un vaste corpus d’essaiscontrôlés, toujours en cours d’actualisation, a essayé derépondre aux questions suivantes : une réduction phar-macologique de la pression artérielle assure-t-elle la pré-vention des accidents vasculaires cérébraux et des acci-dents coronaires ? La prévention est-elle assurée pourtous les niveaux de gravité de l’HTA et dans les HTA sys-toliques isolées ? Le choix du médicament antihyperten-

seur influence-t-il l’efficacité de la prévention ? Les com-plications rénales de l’HTA sont-elles également préve-nues ? Quel est le niveau optimal de pression artérielle àatteindre ?

LE TRAITEMENT ANTIHYPERTENSEURASSURE UNE PRÉVENTION EFFICACE

Une réponse positive aux 2 premières questions a étéapportée avant la fin du XXe siècle. L’essai de Hamilton s’a-dressait à des hypertendus dont la pression artérielle

Apport des essaisthérapeutiques récents pour le traitement de l’hypertensionartérielle essentielle

Les essais concernant l’hypertension artérielle ont montrél’efficacité du traitement pour réduire les accidentscardiovasculaires et peu de différences entre les différentsmédicaments, avec toutefois un intérêt particulier pour les IEC pourprévenir l’insuffisance cardiaque et l’aggravation de l’insuffisancerénale. Le débat sur le choix du premier médicament est peut-êtredépassé par la nécessité de prescrire une polythérapie comportantun diurétique pour atteindre les objectifs tensionnels recommandés.

Patrick Rossignol, Sylvie Le Coz, Pierre-François Plouin*

* Unité d’hypertension artérielle, Hôpital européen Georges Pompidou, 75908 Paris Cedex 15. Mél : [email protected]

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initiale était en moyenne de 239/136 mmHg. 1 Dès 1990,la méta-analyse de 14 essais incluant 37 000 patients mon-trait que le traitement gardait sa valeur de préventiondans les HTA modérées et légères, dans les deux sexes,plus particulièrement dans l’HTA systolique pure et chezles sujets de 60 à 80 ans. 2 La réduction du risque absoluest plus modeste dans les HTA légères, à bas risque initial,que dans les HTA historiques de l’époque de Hamilton.Néanmoins la réduction du risque relatif (RR) liée au trai-tement actif est significative et importante. Le traitementpermet de prévenir les accidents vasculaires cérébraux(réduction du RR de 42 %) et les événements coronaires(réduction du RR de 14 %) ; il réduit la mortalité cardio-vasculaire d’ensemble (réduction du RR de 21 %). Laprévention cérébrovasculaire est plus efficace que la pré-vention coronaire, probablement parce que l’HTA est plusdirectement associée au risque d’accident vasculaire céré-bral qu’à celui d’infarctus mortels ou non, peut-être aussiparce que les médicaments utilisés avaient des effetsmétaboliques pouvant nuire à la prévention coronaire.

De fait, les résultats analysés en 1990 avaient été obte-nus pour l’essentiel avec les diurétiques et (ou) les β-blo-quants. 2 La diffusion de nouvelles classes thérapeutiques

– antagonistes des canaux calciques (ACC) et inhibiteursde l’enzyme de conversion de l’angiotensine I (IEC) – apermis de comparer les ACC et les IEC à leurs prédéces-seurs au cours de nouveaux essais. Une méta-analysepubliée en 2000 montrait que ces produits étaient claire-ment supérieurs au placebo en matière de prévention,mais elle ne trouvait pas de différence notable entre IECet ACC, ou entre ceux-ci et les diurétiques et les β-blo-quants. 3 On manquait toutefois de comparaison directe,face à face, au cours d’un même essai, de ces différentesclasses d’antihypertenseurs.

LA NATURE DU TRAITEMENT IMPORTE-T-ELLE POUR LA PRÉVENTION ?

Les essais contemporains (2000-2003) ont apporté uneplus grande puissance statistique et permis l’analyse de lavaleur de prévention d’une 5e classe d’antihypertenseurs,les antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II(ARAII). Ils n’ont pas permis de conclure que les antihyper-tenseurs diffèrent clairement par leur valeur de prévention.

Le début du siècle a été favorable à l’inhibition du sys-tème rénine angiotensine. L’essai LIFE a comparé le

L’hypertension artérielle résistante au traitement

L’Anaés définit l’HTA résistante au traite-ment par une pression artérielle systo-

lique ou diastolique atteignant ou dépassant140 ou 90 mmHg malgré un traitement tripledont un diurétique. La recommandation duJNC 7 est plus exigeante car elle la définitcomme une pression artérielle n’atteignantpas l’objectif malgré la trithérapie ; celaimplique qu’un diabétique n’ayant pas moinsde 130/80 mmHg, l’objectif des diabétiques,est résistant au traitement. Les recomman-dations proposent 3 étapes avant de recou-rir à une escalade thérapeutique (v. figure) :1. vérifier la bonne observance et la bonnecomposition du traitement en cours ; 2. véri-fier que l’objectif n’est pas atteint lors d’unemesure ambulatoire ou d’une automesure àdomicile (l’objectif est alors de 135/85 mmHgpour la moyenne diurne ou de 125/80 mmHgpour la moyenne des 24 h) ; 3. vérifier quel’HTA est essentielle, la découverte d’uneHTA curable pouvant permettre de sortir del’impasse. Cela fait, les options thérapeu-tiques sont une déplétion sodée renforcéepar l’emploi d’un diurétique de l’anse sous

contrôle de la créatininémie et de la kalié-mie, ou une quadrithérapie, typiquement parla combinaison d’un diurétique, d’un ACC,d’un β-bloquant et d’un IEC (ou inhibiteurAT1). Les recommandations proposent deconfier les patients concernés à un spécia-liste qui pourra optimiser la prescription,

vérifier la permanence de chiffres élevés,compléter l’enquête étiologique et poursui-vre, si nécessaire, l’escalade thérapeutique.Les cas réellement réfractaires peuvent rele-ver d’une combinaison de plusieurs diuré-tiques ou de la mise en place d’un traitementvasodilatateur direct par le minoxidil.

Résistanceà un traitement triple

Effets secondairesNon observance

Tt insuffisantAgent presseur

IRC

Tenir compte, informerAdapter le traitement

(diurétiques, natriurèse)Adresser au néphrologue

Faire une MAPA

PA 24 h> 125/80

Arrêter β-, diurétiques,IEC ou AAT1

Corriger l'hypokaliémie

Rapport aldo/réninemétanéphrines

Angio-scan ou IRM

HTAcurable ?

Majorer la déplétion sodée

ou quadrithérapie

Envisager un traitementétiologique

Oui Non

Oui

OuiNon

Non

Prise en charge d’une hypertension artérielle résistante au traitement. Tt :traitement ; PA : pression artérielle ; IRC : insuffisance rénale chronique ; MAPA :mesure ambulatoire de la pression artérielle ; β- : β-bloquant ; IEC : inhibiteurs del’enzyme de conversion de l’angiotensine I ; AAT1 : antagoniste de l’angiotensine 1

Figure

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L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4628

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE A P P O R T S D E S E S S A I S T H É R A P E U T I Q U E S R É C E N T S

losartan (Cozaar) à l’aténolol (Ténormine) chez deshypertendus ayant une hypertrophie ventriculaire gaucheà l’électrocardiogramme. 4 La réduction du RR du critèreprincipal de jugement – mort cardiovasculaire + infarctuset accident vasculaire cérébral non mortels – était de 13 %sous losartan par comparaison à l’aténolol, sans différencede pression artérielle entre les deux traitements. Contrai-rement à l’essai HOPE,5 il n’y avait pas de réduction signi-ficative de la mortalité toutes causes confondues, mais lebénéfice sur le critère principal de jugement était cettefois acquis par rapport à un comparateur actif.

L’essai PROGRESS a comparé une monothérapie parle perindopril (Coversyl) ou une bithérapie par perindo-pril + indapamide (Fludex) à leurs placebos respectifschez des patients hypertendus ou non ayant fait un pre-mier accident vasculaire cérébral. 6 La bithérapie activeétait associée à une réduction de pression artérielle de12/5 mmHg avec une réduction du RR de 43 % de nou-vel accident vasculaire cérébral par rapport au placebo. Enrevanche, la monothérapie active n’a pas modifié ce risquede récidive. Cet essai était le premier à montrer que le trai-tement antihypertenseur était efficace en préventionsecondaire après un accident vasculaire cérébral.

À cette époque – fin 2002 – beaucoup pensaient que lahiérarchie des valeurs entre diurétiques, ACC etIEC/ARAII allait basculer au profit de ces derniers. Onmanquait encore de comparaisons face à face suffisam-ment puissantes pour l’affirmer, mais on tablait sur unbénéfice lié à la neutralité métabolique et à l’effet deremodelage cardiovasculaire des IEC et des ARAII. Lesnombreux prescripteurs de ces médicaments attendaientune confirmation d’ALLHAT (Antihypertensive and Lipid-Lowering treatment to prevent Heart Attack Trial). 7, 8

Les résultats d’ALLHATCe vaste essai (initialement 42 424 patients répartis en

4 groupes parallèles) a été conçu par le National Heart,Lung, and Blood Institute pour comparer avec la puissanceet la méthodologie requises les effets d’un diurétique thia-zidique, la chlorthalidone (retirée du commerce enFrance !), d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion, lelisinopril (Zestril), d’une dihydropyridine, l’amlodipine(Amlor), et d’un α-bloquant, la doxazosine (non commer-cialisée en France). La population incluse était celle despersonnes de 55 ans et plus ayant une HTA systolique oudiastolique et au moins un facteur de risque supplémen-taire. En 2000, un excès de mortalité par insuffisance car-diaque a justifié l’arrêt du bras α-bloquant de l’essai pouréviter aux patients concernés une perte de chance. 7 Res-tait une comparaison à 3 bras totalisant 33 357 patientsdont le suivi moyen a été de 4,9 ans. 8 La population deALLHAT était typique des hypertendus traitésaméricains : âge moyen 67 ans, 53 % d’hommes, 32 %d’hypertendus d’origine africaine, 36 % de diabétiques,52 % de patients ayant un antécédent cardiovasculaire,

index de corpulence moyen de 28,8 kg/m2. Les médica-ments choisis, chlorthalidone, lisinopril et amlodipineétaient le traitement initial dans chaque groupe de rando-misation, traitement qu’on pouvait compléter si nécessairepar un β-bloquant ou un antihypertenseur central. En 3e

étape, on avait le choix entre l’hydralazine (non commer-cialisée en France) ou le recours à l’un des deux autresmédicaments de 1re étape. En conséquence, on a observéune « contamination » autorisée et logique des médica-ments de la randomisation initiale : 14,9 % des patientsdu groupe lisinopril et 11,6 % du groupe amlodipine ontreçu de la chlorthalidone.

Le critère principal de jugement était la morbi-morta-lité coronaire. Elle était identique dans les 3 groupes :1,91 % par an sous chlorthalidone, 1,90 % sous lisinoprilet 1,88 % sous amlodipine. Il en était de même pour lamortalité toutes causes confondues. En revanche, la com-paraison de plusieurs critères secondaires était défavora-ble aux nouveaux venus : par comparaison à la chlorthali-done, il y avait significativement plus d’insuffisancescardiaques sous amlodipine et sous lisinopril, et plus d’é-vénements cardiovasculaires et d’accidents vasculairescérébraux sous lisinopril. Les auteurs concluaient logi-quement que « les diurétiques de type thiazidique sontsupérieurs pour la prévention d’un ou plusieurs événe-ments cardiovasculaires majeurs et sont moins coûteux ».

Commentaires

Doit-on généraliser cette conclusion ? À ne pas com-mencer un traitement antihypertenseur par un diurétique,expose-t-on les hypertendus à une perte de chance ? Deuxarguments préviennent un recours général et obligatoireà un diurétique en 1re intention.

Le premier tient à la population de ALLHAT. L’âgemoyen de 67 ans ne permet pas d’extrapoler à une popula-tion plus jeune. D’autres caractéristiques documentées

L Il n’y a pas de différences importantes entre les différentesclasses d’antihypertenseurs en termes d’efficacité deprévention cardiovasculaire.

L Le choix du traitement antihypertenseur initial ne repose doncque sur les particularités de l’hypertendu (antécédents,comorbidités…).

L Le niveau tensionnel à atteindre sous traitement chez lesdiabétiques, les insuffisants rénaux et les sujets ayant déjàune atteinte cardiovasculaire est plus bas (130/80 mmHg) quechez l’hypertendu tout-venant.

L Une polythérapie antihypertensive est nécessaire chezbeaucoup d’hypertendus. Un diurétique est indispensable dèsle stade de la bithérapie.

C E Q U I E S T N O U V E A U

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(corpulence, proportion de personnes d’origine africaine)ou probables (apport sodé élevé) sont plus favorables auxdiurétiques qu’aux IEC et plus fréquentes aux États-Unisqu’en Europe. Notamment le surcroît d’accidents cardio-vasculaires sous IEC, particulièrement celui des accidentsvasculaires cérébraux, n’était présent que chez les patientsd’ascendance africaine. D’ailleurs, l’essai récent du secondAutralian National Blood Pressure Study group (ANBPS2) 9

a trouvé une petite différence en faveur de l’IEC (réduc-tion du RR de 11 % pour les événements cardiovasculai-res mortels on non) dans une comparaison entre énalapril(Renitec) et hydrochlorothiazide (Esidrex), cette foisdans une population d’origine caucasienne.

Le second argument tient à une différence dans l’effetsur la pression artérielle des traitements à l’étude dansALLHAT. La moyenne sur 5 ans de la pression artériellesystolique était significativement plus basse sous chlor-thalidone (134 mmHg) que sous lisinopril (136 mmHg),une différence qui explique en partie l’écart observé dansl’incidence des accidents vasculaires cérébraux. On peutarguer qu’un meilleur contrôle tensionnel sous 12,5 à 25 mg de chlorthalidone que sous 10 à 40 mg de lisinoprilest au crédit de la première option. Toutefois cette donnéeindique que la différence entre diurétique et IEC en ter-mes de prévention pouvait être hémodynamique et nonliée à un effet spécifique de ces molécules. De nombreux

patients de ALLHAT ont eu besoin d’une polythérapie,comme dans la majorité des essais et dans la pratique cli-nique. Ce besoin a fait le succès des combinaisons enmonoprise du type diurétique plus β-bloquant, diuré-tique plus IEC, diurétique plus ARAII, ou β-bloquant plusdihydropyridine. Dans ALLHAT, les participants dugroupe chlorthalidone avaient en 2e étape une combinai-son diurétique plus β-bloquant et ceux du groupe amlo-dipine une combinaison dihydropyridine plus β-blo-quant, deux combinaisons connues comme synergiques.En revanche, ceux du groupe lisinopril avaient la combi-naison non synergique d’inhibiteur de l’enzyme deconversion et de β-bloquant.

Dans ALLHAT, la supériorité de la chlorthalidone (sansIEC) sur le lisinopril (sans diurétique) reflète la supério-rité d’une stratégie d’association plutôt que la supérioritéd’une monothérapie initiale. On peut l’interpréter commele principe suivant : toute polythérapie chez un hyper-tendu de plus de 55 ans devrait contenir un diurétique,sauf contre-indication à cette classe thérapeutique. Lemême commentaire s’applique au paradoxe d’une plusgrande fréquence de l’insuffisance cardiaque sous lisino-pril que sous chlorthalidone, alors que l’effet favorable desIEC sur la survie des insuffisants cardiaques est bienconnu. Dans les essais sur l’insuffisance cardiaque, les IECétaient toujours ajoutés à un traitement diurétique, ce qui

Avant de prescrire un médicament anti-hypertenseur, il faut vérifier que l’HTA ne

peut pas être contrôlée par quelques pres-criptions de bon sens :

– éviter les excès d’apport sodé ; unrégime strictement sans sel est irréalistechez une personne active sans insuffisancecardiaque ; en revanche, il est utile de véri-fier par un ionogramme urinaire que lanatriurèse n’excède pas 100 à 150 mmol par24heures. Cet objectif est souvent atteint enévitant de resaler à table et en supprimantles aliments très salés (certaines eauxgazeuses, certains fromages et charcute-ries, les biscuits d’apéritif) ;

– réduire la consommation de boissonsalcoolisées à 1 ou 2 verres par jour ou moins ;

– si possible obtenir ou maintenir un poidsnormal (index de corpulence de 25 kg/m2 oumoins).

Ces mesures ont des avantages, en dehorsmême du contrôle tensionnel, et sont à main-

tenir si un médicament antihypertenseurreste finalement nécessaire. Certainspatients insistent pour recourir à des mesu-res non médicamenteuses, et il faut lesencourager dans ce sens, quitte à compléterplus tard par une médication dont les dosesnécessaires seront plus faibles. La réductionde pression artérielle obtenue par un traite-

ment non médicamenteux exclusif est dansl’ensemble modeste ou modérée. La méta-analyse des essais disponibles, souvent limi-tés par les effectifs et la durée, donne lesrésultats exposés dans le tableau : différencemoyenne (extrêmes) de pression artériellesystolique entre le groupe intervention et legroupe témoin en mmHg.

Traitements non médicamenteux de l’hypertension artérielle

Méta-analyse des essais disponibles : différence moyenne (extrêmes) de pression artérielle systolique

entre le groupe intervention et le groupe témoin en mmHg

Tableau

Réduction du poids chez les personnes en surpoids – 5,2 (– 8,3/– 2,0)

Réduction des boissons alcoolisées – 3,9 (– 5,0/– 2,8)

Réduction des apports sodés – 2,9 (– 5,8/0)

Contrôle du stress – 1,0 (– 2,3/+ 0,3)

Exercice physique – 0,8 (– 5,9/+ 4,2)

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE A P P O R T S D E S E S S A I S T H É R A P E U T I Q U E S R É C E N T S

n’était pas le cas dans ALLHAT où la bithérapie prévueétait une combinaison IEC plus β-bloquant.

Actualisation des méta-analyses Les méta-analystes, gens infatigables, ont complété leurs

bases de données en incorporant les résultats de LIFE,PROGRESS, ALLHAT et ANBPS2 dans une étude compa-rative des différents antihypertenseurs en termes de béné-fice de prévention. 10 Les 15 études analysées totalisaient 74 696 hypertendus. Par comparaison aux diurétiques etaux β-bloquants, les ACC et les IEC offraient une efficacitésimilaire pour la prévention des accidents vasculaires céré-braux fatals ou non, des infarctus fatals ou non, de la morta-lité cardiovasculaire et de la mortalité totale. La seule diffé-rence significative était une plus grande incidence del’insuffisance cardiaque sous ACC que sous diurétiques ouβ-bloquants (une augmentation du RR de 33 %).

La méta-analyse incorporait également les études quiavaient utilisé un ARAII et attribuait une série de bonspoints à cette classe, avec des réductions du RR de 21 %pour les accidents vasculaires cérébraux, de 16 % pour l’in-suffisance cardiaque et de 10 % pour tous les événementscardiovasculaires par rapport aux comparateurs. Toutefois,ces comparateurs étaient principalement les β-bloquants etle placebo : on ne dispose pas de comparaison solide desARAII avec les diurétiques, les IEC ou les ACC.

La même méta-analyse a examiné les études qui com-

paraient un contrôle strict à un contrôle moins strict de lapression artérielle. Dans ces études, l’écart moyen de pres-sion artérielle systolique/diastolique entre les deux grou-pes était modeste (4/3 mmHg). Cet écart suffisait cepen-dant à améliorer de façon consistante et significative laprévention des accidents vasculaires cérébraux (réduc-tion du RR de 23 %) et de l’ensemble des événementscardiovasculaires (réduction du RR de 15 %). Les impli-cations sont importantes, d’une part pour apprécier à leurjuste valeur les études où apparaît une différence de pres-sion artérielle entre les groupes testés (par exemple, PRO-GRESS, ALLHAT), et d’autre part pour guider nosefforts : l’optimisation du contrôle tensionnel est payante.

La protection cardiovasculaire des sujets àhaut risque hypertendus ou non

L’essai HOPE a comparé, en double insu, le placebo àun IEC le ramipril (Triatec), à la dose de 10 mg par jour,chez des patients – hypertendus ou non – à haut risquevasculaire. 11 HOPE montrait sous ramipril une réductiondu RR de 32 % pour les accidents vasculaires cérébraux,de 20 % pour les accidents coronaires, de 26 % pour lamortalité cardiovasculaire et de 16 % pour la mortalitétoutes causes confondues. Ces différences étaient large-ment significatives et ont permis d’attribuer au ramiprilune « amélioration majeure du service médical rendu »pour la prévention chez les sujets à haut risque vasculaire.La pression artérielle des patients traités par ramipril étaitcependant plus basse que celles des patients traités parplacebo (un écart de 3,3 mmHg pour la systolique), tousces patients pouvant recevoir ad libitum d’autres anti-hypertenseurs qu’un IEC. Le calcul estimait que cette dif-férence de pression artérielle ne pouvait rendre compteque d’une réduction du RR d’infarctus de 5 %, c’est à diredu quart de la réduction observée, 5 si bien qu’on a sug-géré que le ramipril – et peut-être les autres IEC – avaitune efficacité propre de prévention, indépendante de sonefficacité antihypertensive.

LA NÉPHROPROTECTION

Elle a fait l’objet d’excellentes études, généralementchez des hypertendus diabétiques et (ou) protéinuriques.Ces études, brièvement analysées dans un éditorial, 12 nepeuvent être développées ici, mais elles méritent mentionpour le choix du traitement initial de l’HTA. Elles mon-trent qu’on peut retarder la progression de l’insuffisancerénale chez les hypertendus ayant une insuffisance rénaledébutante et (ou) une protéinurie par l’inhibition du sys-tème rénine angiotensine. Cette inhibition peut utiliser lesIEC ou les ARAII (ces derniers ont été particulièrementbien étudiés chez les hypertendus diabétiques de type 2),et même, dans une étude préliminaire, la combinaison deces deux classes de médicaments. 13

INDICATIONS CLASSES THÉRAPEUTIQUES

Indications préférentielles des différentes classes d’antihypertenseurs

ACC : antagonistes des canaux calciques.IEC : inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine I.ARAII : antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II.

Tableau 1

❚ Sujet âgé avec HTA systolique isolée Diurétiques, ACC (dihydropyridines)

❚ NéphropathiesDiabète type 1 IECDiabète type 2 ARAIINon diabétique IEC

❚ CardiopathiesPost-infarctus IEC, β-bloquantAngor β-bloquantTachy-arythmie β-bloquantDysfonction ventriculaire gauche IECInsuffisance cardiaque congestive diurétiques (dont spironolactone),

β-bloquantHypertrophie ventriculaire gauche ARAII

❚ Maladie cérébrovasculaire IEC+diurétiques, diurétiques

❚ Migraine β-bloquant

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MISE À JOUR DES RECOMMANDATIONS

Les recommandations américaines (JNC 7), 14 euro-péennes (ESH-ESC), 15 et de l’Organisation mondiale dela santé (OMS)16 pour la prise en charge des hypertendusviennent d’être actualisées à la lumière des résultats ci-dessus. La dernière version des recommandations fran-çaises date de 2000 et sera actualisée en 2004 (v. http://www.anaes.fr). Le JNC 7 indique une nette pré-férence pour une première option diurétique : « Les diu-rétiques de type thiazidique doivent être utilisés pour letraitement médicamenteux des HTA non compliquées,soit isolément, soit en association avec les médicamentsdes autres classes ». L’OMS abonde dans ce sens : « Pour la

majorité des patients sans indication impérative pour uneautre classe thérapeutique, une faible dose de diurétiquesdevrait être le traitement de première intention ». L’ESH-ESC est plus ouverte à la diversité et plus sceptique surl’efficacité d’une monothérapie : « Les principales classesd’antihypertenseurs – diurétiques, β-bloquants, ACC, IECet ARAII – sont adaptées au traitement initial et d’entre-tien. La préoccupation concernant la classe thérapeutiqueà utiliser en premier est probablement dépassée par lanécessité de prescrire l’association de 2 médicaments ouplus pour atteindre l’objectif tensionnel ». Sans préjugerde la mise à jour prévue par l’Anaès (probablement intitu-lée : Méthodes d’évaluation du risque cardiovasculaire : placedes équations d’estimation du risque cardiovasculaire global),nous considérons que l’analyse de l’ESH-ESC est dansl’esprit des recommandations en vigueur en France, à celaprès que la rédaction de 2000 n’attribuait pas aux ARAIIle même niveau de preuve qu’aux 4 autres classes,puisque les essais de morbi-mortalité utilisant ces agentsn’étaient pas encore publiés.

CONCLUSION

Le XXIe siècle voit le retour à l’actualité des diurétiquesdans une affection qui touche près de 50 % des personnesaprès 55 ans. L’influence de la rétention sodée dans lagenèse de l’hypertension, du moins dans cette tranched’âge, explique l’utilité d’une composante diurétique danstoute polythérapie, en dehors de ses contre-indications.Les autres antihypertenseurs – β-bloquants, ACC, IEC etARAII – restent des prescriptions légitimes en secondeintention, ou en première intention chez des sujets plusjeunes, ou s’il existe une indication spécifique à ces agentsdu fait d’une comorbidité (atteinte rénale, angor, tachya-rythmie, migraine… : v. tableau 1), ou encore dans les casdes contre-indications aux diurétiques (allergie, goutte,hypokaliémie : v. tableau 2).

Classes thérapeutiques Contre-indications Classes thérapeutiques Précautions d’emploi

ACC : antagonistes des canaux calciques ; IEC : inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine I ; ARAII : anta-gonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II.Tableau 2

Contre-indications et précautions d’emploi des différentes classes d’antihypertenseurs

IEC, ARAII grossesse α-bloquant insuffisance cardiaquesténose artérielle rénale bilatérale

Hyperkaliémie

β-bloquant bloc atrioventriculaire (II-III) clonidine sevragebradycardie < 50/min

bronchopneumopathie obstructivesyndrome de Raynaud

Diurétiques goutte ACC insuffisance cardiaque

L Le traitement antihypertenseur utilisant les diurétiques, les β-bloquants, les antagonistes des canaux calciques, les IEC etles antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II, seulsou associés, réduit l’incidence des complications de l’HTA.

L Cette réduction est plus nette pour les accidents vasculairescérébraux que pour les accidents coronaires.

L Les différences dans l’efficacité de prévention de cesmédicaments sont mineures ; dans les essais qui lescomparaient entre eux, elles semblaient liées aux différencesdans la pression artérielle atteinte.

L Toutefois, les inhibiteurs du système rénine angiotensinesemblent particulièrement efficaces pour la prévention del’insuffisance cardiaque et de la progression de l’insuffisancerénale.

L L’objectif à atteindre est une pression artérielle inférieure à140/90 mmHg (130/80 chez les diabétiques).

L Ce résultat requiert généralement une polythérapie où doitfigurer un diurétique.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U E

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HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE A P P O R T S D E S E S S A I S T H É R A P E U T I Q U E S R É C E N T S

SUMMARY Influence of recent trials on essential arterial hypertension management.Following recent trials, U.S (JNC7), European (ESH/ESC) and world (WHO) guidelines concerning the management of arterial essential hypertensionhave recently been updated. They indicate that hypertension treatment may succeed in preventing complications such as stroke or myocardialinfarction. The therapeutic target is less than 140/90 mmHg (130/80 mmHg for diabetics). To reach this objective, a combination using a diuretic isrequired in almost all cases. Trials comparing the efficiency of “old drugs” such as diuretics or β-blockers with “new drugs” such as ACEI or ARAII, orCCB observed minor differences in terms of cardiovascular outcomes. However, ACEI and ARAII appeared to be of particular efficiency in preventingheart and kidney failures.

Rev Prat 2004 ; 54 : 626-32

RESUMÉ Apport des essais thérapeutiques récents pour le traitement de l’hypertension artérielle essentiellePrenant en compte les résultats d’essais récents, de nouvelles recommandations américaines (JNC7), européennes (ESH/ESC) et mondiales (OMS) surla prise en charge de l’hypertension artérielle essentielle viennent d’être publiées. Elles indiquent que le traitement antihypertenseur utilisant lesdiurétiques, les β-bloquants, les antagonistes des canaux calciques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine I et les antagonistes desrécepteurs AT1 de l’angiotensine II seuls ou associés réduit l’incidence des complications de l’hypertension artérielle. Cette réduction est plus nettepour les accidents vasculaires cérébraux que pour les accidents coronaires. Les différences dans l’efficacité de prévention de ces médicaments sontmineures ; dans les essais qui les comparaient entre eux, elles semblaient liées aux différences dans la pression artérielle atteinte. Toutefois lesinhibiteurs du système rénine angiotensine semblent particulièrement efficaces pour la prévention de l’insuffisance cardiaque et de la progression del’insuffisance rénale. L’objectif à atteindre est une pression artérielle inférieure à 140/90 mmHg (130/80 chez les diabétiques). Ce résultat requiertgénéralement une polythérapie où doit figurer un diurétique.

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R É F É R E N C E S

Page 32: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 633

O n compte actuellement en France environ 3 % dediabétiques connus dans la population adulte. Ce taux augmente avec l’âge et dépasse 10 % après

60 ans. La prévalence du diabète, en particulier du dia-bète de type 2, est en nette augmentation dans l’ensembledu monde et les prévisions sont même alarmistes.

ÉPIDÉMIOLOGIE DE L’ASSOCIATIONHYPERTENSION ARTÉRIELLE-DIABÈTE

L’hypertension artérielle (HTA) est plus fréquente chezles diabétiques que chez les non-diabétiques. Selon uneétude que nous avons menée avec R. Asmar, à partir desdonnées recueillies au cours de l’année 2000 dans des

centres d’examens de santé de l’Institut régional pour lasanté (IRSA) 1 et portant sur 61 294 sujets qui consul-taient pour un bilan systématique, il est possible d’estimerla prévalence du diabète chez les hypertendus, et inverse-ment la prévalence de l’HTA chez les diabétiques. Surl’ensemble de la population, 1 060 sujets ont été considé-rés comme diabétiques de type 2, soit parce que leur dia-bète était connu et éventuellement traité, soit parce qu’ilsavaient une glycémie à jeun supérieure ou égale à1,26 g/L (7 mmol/L) selon la nouvelle définition de l’Organisation mondiale pour la santé (OMS). Il fautnoter toutefois que le diagnostic de diabète a été établi surune seule détermination au lieu de deux dosages commele recommande l’OMS. En s’appuyant sur le rapport du

633

Particularités de l’hypertension artérielledu patient diabétique

Une glycémie à jeun doit être systématiquement pratiquée cheztout sujet hypertendu. La découverte d’un diabète renforce les objectifs thérapeutiques tensionnels qui doivent alors se situerau-dessous de 130/80 mmHg. Chez ces sujets, un contrôle optimalde la pression artérielle, de la glycémie et des troubles lipidiquesréduit de moitié les complications cardiovasculaires, après un reculde 8 ans.

Paul Valensi*

* Service d’endocrinologie-diabétologie-nutrition, hôpital Jean Verdier, AP-HP, Université Paris-Nord, 93143 Bondy CedexMél : [email protected]

Page 33: Hypertension artã©rielle essentielle

Joint National Committee (JNC 6, 1997) adoptant pourdéfinition de l’HTA des valeurs supérieures ou égales à140/90mmHg, le même seuil ayant été adopté par l’ANAÉS en 1999, 2 28 % des sujets étaient considéréshypertendus soit parce qu’ils répondaient à ce critère, soitparce qu’ils suivaient déjà un traitement antihypertenseur.

La prévalence de l’HTA était plus forte chez les diabé-tiques que chez les non-diabétiques (71 % contre 34 %pour les hommes, et 59 % contre 21 % pour les femmes).Après 70 ans, elle était encore plus élevée, mais augmen-tait moins chez les diabétiques que chez les non-diabé-tiques, la prévalence la plus forte étant observée parmi leshommes diabétiques de plus de 70 ans (89,3 %).

Quant à la prévalence du diabète de type 2 parmi leshypertendus, elle était globalement de 7,15 % chez leshommes et 4,46 % chez les femmes, taux nettement plusélevés que parmi les normotendus.

L’association diabète de type 2-HTA est donc unimportant problème de santé publique. L’ANAÉS a récem-ment émis une recommandation pour le dépistage du dia-bète de type 2 chez les sujets ayant une ou plusieurs com-posantes du syndrome métabolique. Ce diabète doit êtredépisté par le dosage de la glycémie à jeun, chez les per-sonnes âgées de plus de 45 ans ayant un facteur de risquede diabète parmi les suivants : HTA (supérieure ou égale à140/90 mmHg, ou traitement antihypertenseur en cours),surpoids (index de masse corporelle supérieur à 27 kg/m2), désordres lipidiques (triglycérides supérieursà 2 g/L ou HDL-cholestérol inférieur à 0,35 g/L, ou trai-tement hypolipémiant en cours) ou antécédent familial dediabète de type 2 ou antécédent personnel de diabètegestationnel ou de diabète induit. Cette dispositiondevrait permettre d’élargir le dépistage du diabète, et derendre plus précoces ce dépistage et la mise en œuvre desmesures thérapeutiques adéquates.

Nous avons également, sur ces données issues des cen-tres d’examens de santé de l’IRSA, caractérisé l’HTA selonle type : systolique pur si la pression artérielle systolique(PAS) était supérieure ou égale à140 mmHg ; diastoliquepur si la pression artérielle diastolique (PAD) était supé-

rieure ou égale 90 mmHg ; systolo-diastolique si les deuxcritères étaient réunis ; enfin, considéré l’HTA commecontrôlée chez les hypertendus traités si la PAS était infé-rieure à 140 et la PAD inférieure à 90 mmHg. Avant 60 ans, l’HTA était le plus souvent de type systolo-diasto-lique ou systolique chez les non-diabétiques, avec uneprévalence de l’HTA systolo-diastolique plus élevée chezles diabétiques que chez les non-diabétiques (50 %contre 35 %). Après 60 ans, il s’agissait le plus souventd’une HTA systolique : 57,7 % chez les diabétiques et54 % chez les non-diabétiques. L’HTA s’accompagnaitaussi de valeurs plus hautes de la pression pulsée (diffé-rence entre la pression systolique et la pression diasto-lique), qui témoignent d’une augmentation de la rigiditéartérielle.

En outre, chez les diabétiques, l’HTA s’accompagnaitd’un profil clinique et biologique de risque cardiovascu-laire et d’insulinorésistance plus sévère. En particulier, lesvaleurs de l’index de masse corporelle, du tour de taille,des triglycérides, des ALAT (alanine aminotransférase) etdes γ-GT (γ-glutamyl-transférase) étaient plus élevées, etcelles du HDL-cholestérol plus basses que chez les hyper-tendus non diabétiques. Enfin, il faut noter globalementparmi les hypertendus diabétiques la faible proportion deceux dont l’HTA était réellement contrôlée.

LES RISQUES ASSOCIÉS À L’HYPERTENSIONARTÉRIELLE CHEZ LES DIABÉTIQUES

Les diabétiques de type 2 sont très exposés aux com-plications cardiovasculaires et décèdent le plus souventde ces complications. L’HTA aggrave ce risque. Elle contri-bue également aux complications micro-angiopathiquesspécifiques du diabète et à leur aggravation.

L’étude MRFIT (Multiple Risk Factor Intervention Trial) 3

a permis de considérer le diabète comme un facteur derisque indépendant, ce risque étant aggravé par les désord-res lipidiques et par l’HTA souvent associés. L’analyse épi-démiologique de l’étude britannique de l’UKPDS (UnitedKingdom Prospective Diabetes Study), 4 qui avait porté surdes patients ayant un diabète de type 2 de découverterécente, a clairement mis en évidence la relation entre lesniveaux de la pression artérielle systolique et l’incidencedes complications microvasculaires, rétiniennes et rénales.Elle a aussi montré une relation avec l’incidence des acci-dents vasculaires cérébraux et une relation beaucoupmoins forte avec l’incidence des infarctus du myocarde.

EFFETS DU CONTRÔLE TENSIONNEL CHEZ LES DIABÉTIQUES

Plusieurs essais d’intervention ont bien montré l’effetbénéfique du contrôle tensionnel, aussi bien sur les com-plications cardiovasculaires que sur les complicationsmicro-angiopathiques.

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4634

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE PA R T I C U L A R I T É S DU PAT I E N T D I A B É T I Q U E

L Le seuil d’intervention fixé à 140/90 mmHg doit conduire en premier lieu aux mesures hygiéno-diététiques et secondairement au traitement médicamenteux.

L L’objectif thérapeutique se situe au-dessous de 130/80 mmHg,rendant la polythérapie souvent nécessaire.

L Le contrôle optimal à la fois de la glycémie, de la pressionartérielle et des désordres lipidiques permet chez lesdiabétiques de type 2 de réduire les complicationscardiovasculaires de plus de 50 % sur 8 ans de suivi.

C E Q U I E S T N O U V E A U

Page 34: Hypertension artã©rielle essentielle

L’étude UKPDS a comparé, chez des diabétiques detype 2 hypertendus, l’effet du contrôle « strict » de la pres-sion artérielle (au-dessous de 150/85 mmHg) à celui d’uncontrôle tensionnel moins rigoureux (au-dessous de180/105 mmHg). Sur la période de 8 ans de suivi, lesniveaux tensionnels moyens étaient respectivement de144/82 et 154/87 mmHg. Il a été possible d’évaluer que labaisse de 10 mmHg de PAS permettait de réduire la mor-talité de 32 %, l’apparition d’une insuffisance cardiaque de56 %, d’accidents vasculaires cérébraux de 44 % et l’inci-dence des complications microvasculaires de 37 %.4

L’étude HOT (Hypertension Optimal Treatment) avaitpour but de déterminer l’objectif tensionnel diastoliquepermettant d’éviter les complications cardiovasculaires. 5

Dans une population âgée en moyenne de 61,5 ans, unedihydropyridine, la félodipine, a été utilisée en premièreintention. Dans la sous-population des patients diabé-tiques, le taux d’événements cardiovasculaires a été réduitde 51 %, et la mortalité cardiovasculaire de 66 % dans legroupe dont la PAD était en moyenne de 81 mmHg, parrapport au groupe de contrôle moins strict (PAD moyenne= 85,2 mmHg). Cette étude a notamment montré qu’a-baisser la pression artérielle au-dessous de 140/80mmHg n’est pas préjudiciable.

QUELLES STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUESVIS-À-VIS DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE

CHEZ LES PATIENTS DIABÉTIQUES ?

Plusieurs essais attribuent une place de choix aux inhi-biteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine I(IEC) dans la prévention cardiovasculaire et la néphro-protection chez les diabétiques. Des essais récents sem-blent aller dans le même sens avec des antagonistes del’angiotensine II. Rappelons toutefois que dans l’essai del’UKPDS, l’aténolol et le captopril apportaient des bénéfi-ces comparables en termes de prévention des complica-tions macro- et microvasculaires.

Les IEC et les antagonistes de l’angiotensine II ont enoutre un avantage en ce qui concerne la tolérance métabo-lique, certaines données suggérant même qu’ils améliorentla sensibilité à l’insuline. L’étude HOPE et l’étude LIFE(Losartan Intervention For Endpoint reduction in hyperten-sion) 6 ont même montré que le traitement par le ramiprilou le losartan s’accompagnait d’une réduction significatived’apparition de nouveaux cas de diabète par comparaisonrespectivement au placebo ou à un β-bloquant. Les anti-hypertenseurs centraux et les inhibiteurs calciques sontneutres sur le plan métabolique. Quant aux β-bloquants etaux diurétiques, certaines données suggèrent des modifi-cations significatives mais modérées, dans le sens d’uneffet hyperlipémiant ou aggravant l’insulinorésistance.

Quoi qu’il en soit, des associations thérapeutiques anti-hypertensives sont très souvent nécessaires chez les dia-bétiques hypertendus, comme cela a bien été montré dans

l’étude UKPDS. Insistons sur le fait qu’une réduction dupoids modérée, de 5 à 10 %, chez les diabétiques de type2 souvent en surpoids, avec des mesures hygiéno-diété-tiques adéquates incluant en particulier la reprise d’uneactivité physique régulière (au minimum 30 min de mar-che par jour), une réduction des apports sodés à 5 ou 6 gpar jour, une réduction des apports en graisses saturées etun élargissement des graisses poly-insaturées notammenten oméga-3, contribue à réduire la pression artérielle et lerecours aux médicaments.

LA DÉMARCHE PLURIFACTORIELLE

La conjonction des facteurs de risque cardiovasculairechez les patients diabétiques conduit à proposer une priseen charge globale. Cette démarche a été récemment testéedans l’essai danois du STENO-2, dont l’objectif était d’é-valuer l’effet du contrôle optimisé de l’équilibre glycé-mique, des paramètres lipidiques et tensionnels, dans unepopulation de diabétiques de type 2 âgés en moyenne de55 ans, dont plusieurs avaient déjà eu des manifestationscardiovasculaires. 7 Des mesures hygiéno-diététiquesrigoureuses étaient mises en place et le recours à une plu-rithérapie était indispensable. En particulier, la moitié despatients durent prendre 2 ou 3 antihypertenseurs pouratteindre l’objectif tensionnel qui doit se situer au-des-sous de 130/80 mmHg. Le contrôle effectif à la fois glycé-mique, lipidique et tensionnel s’est soldé par une réduc-tion de plus de 50 % des complications cardiovasculairesen 8 ans de suivi moyen. Les objectifs doivent donc êtredéfinis avec les patients et les mesures hygiéno-diété-tiques explicitées. L’observance des traitements doit êtrerenforcée, en expliquant notamment aux patients que cesmesures thérapeutiques intensifiées ont fait la preuve deleur efficacité.

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 635

L Le diabète doit être dépisté par le dosage de la glycémie àjeun chez tout patient hypertendu.

L L’HTA contribue au risque cardiovasculaire, mais aussi aurisque microvasculaire chez les patients diabétiques.

L Ce risque augmente à partir du seuil de 120 mmHg pour la PAS.L Une réduction pondérale modérée de 5 à 10 % et la réduction

des apports sodés permettent de limiter la quantitéd’antihypertenseurs nécessaire.

L Les IEC et les antagonistes des récepteurs de type 1 del’angiotensine II ont fourni les preuves les plus importantes deleur efficacité en termes de néphroprotection.

L Après 60 ans, une étude menée avec un antagoniste calcique(l’étude Syst-Eur) 8 a mis en évidence le bénéfice significatifchez les hypertendus diabétiques en termes de protectioncardiovasculaire.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U E

Page 35: Hypertension artã©rielle essentielle

CONCLUSION

Le contrôle tensionnel strict doit être un objectif cons-tant chez les patients diabétiques. Il permet de réduiresignificativement les complications microvasculaires et lesaccidents vasculaires cérébraux.

Il s’inscrit dans une démarche plurifactorielle qui inclutégalement le contrôle glycémique et lipidique. Ses exigen-ces imposent souvent une plurithérapie, mais l’adhésiondes patients aux mesure hygiénodiététiques permet delimiter le recours aux médicaments. B

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4636

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE PA R T I C U L A R I T É S DU PAT I E N T D I A B É T I Q U E

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R É F É R E N C E S

SUMMARY Particularities of hypertension indiabetic patientThe prevalence of hypertension is very high in diabetic patients.Hypertension is associated with an increased risk of cardiovascularand microangiopathic complications. In diabetic patients thetherapeutic goal is to lower blood pressure below 130/80 mmHg.Improving lifestyle contributes to reducing body weight and bloodpressure and often permits to reduce the quantity ofantihypertensive drugs necessary to reach this goal.

Rev Prat 2004 ; 54 : 633-6

RESUMÉ Particularités de l’hypertension artérielledu patient diabétiqueL’hypertension artérielle est très fréquente chez les patientsdiabétiques. Elle aggrave le risque de complicationscardiovasculaires et de complications micro-angiopathiquesspécifiques du diabète. L’objectif thérapeutique se situe au-dessousde 130/80 mmHg. Des mesures hygiéno-diététiques doivent êtreencouragées chez tout patient diabétique. Elles contribuentsouvent à réduire la quantité de médicaments antihypertenseursnécessaire pour atteindre cet objectif.

MORCEAU CHOISI

Korotkoff, 1905 : la méthode auscultatoire

�« Sur la base de ses observations, le rapporteur (Korotkoff) est arrivé

à la conclusion qu’une artère totalement comprimée ne produit aucunbruit dans des conditions normales. Partant de ce principe, lerapporteur propose la méthode des bruits pour déterminer la pressionsanguine chez l’homme. Le brassard de Riva-Rocci est placé sur le tiersmoyen du bras ; la pression dans le brassard est rapidement augmentéejusqu’à l’arrêt complet de la circulation sous-jacente. Ensuite laissantchuter le mercure du manomètre, on utilise un stéthoscope pédiatriquepour ausculter l’artère immédiatement sous le brassard. Au début aucunbruit n’est perçu. Avec la descente du mercure dans le manomètre , à un certain niveau, les premiers bruits brefs apparaissent ; leur

apparition indique le passage d’une partie de l’onde de pouls sous le brassard. En conséquence, la valeur manométrique à laquelle les premiers bruits apparaissent correspond à la pression maximale ;avec la suite de la descente du mercure dans le manomètre, on perçoitles murmures de la pression systolique qui se transforment en bruits(secondaires). Finalement, tous les bruits disparaissent. Le moment de la disparition de bruits indique le libre passage de l’onde de pouls :autrement dit, lors de la disparition des bruits, la pression sanguineminimale dans l’artère a dépassé la pression du brassard. En conséquence, la valeur du manomètre à cet instant correspond à la pression sanguine minimale. »

Le fonctionnement des appareils utilisés à la fin du XIX e siècle pour mesurer la pression artérielle, repose sur la compressionde l’artère radiale ou humérale ne donnant que les valeurs de la pression systolique. Mais, en 1905, le Russe Korotkoffinvente la méthode auscultatoire qui va permettre la mesure indirecte de la pression diastolique. Il communique sadécouverte à l’Académie impériale de médecine de Russie :

Page 36: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 637

À LA PHASE AIGUË D’UN ACCIDENTVASCULAIRE CÉRÉBRAL

L’élévation de la pression artérielle (supérieure à160/75 mmHg) est présente chez 75 % des patients à laphase aiguë d’un accident vasculaire cérébral. Si les chiff-res reviennent spontanément à leurs valeurs antérieuresen quelques jours dans la majorité des cas, 40 % despatients restent toutefois hypertendus après une semaine.Les études d’observation apportent des données contra-dictoires sur l’influence de la pression artérielle sur le pro-nostic vital et fonctionnel après un accident vasculairecérébral. Une méta-analyse récente de ces études, 1 por-

tant sur plus de 10 000 patients, a montré qu’une éléva-tion de la pression artérielle (de définition variable selonles études) était associée de façon significative à une évo-lution clinique péjorative (décès ou taux combiné de mor-talité et de handicap) chez les patients ayant une hémorra-gie cérébrale et à un moindre degré un infarctus cérébral.

Ces données rejoignent les résultats de l’étude IST,2 oùune pression artérielle systolique (PAS) supérieure à140 mmHg était associée de façon indépendante à uneaugmentation du risque de décès précoce ou du critèremort ou dépendance chez 17 398 patients ayant un acci-dent vasculaire cérébral aigu. Les facteurs limitants desétudes d’observation sont l’absence de prise en compte

637

Hypertension artérielle au décours et à distance d’unaccident vasculaire cérébral

L’hypertension artérielle au cours d’un accident vasculaire cérébralest le plus souvent modérée et doit être généralement respectée.L’abaissement, toujours progressif, des valeurs tensionnelles n’estindiqué que si celles-ci sont très élevées, si une thrombolyseintraveineuse est décidée ou en cas d’hémorragie cérébrale. Enfin, le bénéfice d’un abaissement de la pression artérielle à distance d’unaccident vasculaire cérébral est maintenant démontré, même chezles sujets normotendus.

Caroline Arquizan*

* Service de neurologie, hôpital Sainte-Anne, 75014 Paris. Mél : [email protected]

Page 37: Hypertension artã©rielle essentielle

des éléments pronostiques majeurs (comme l’âge et sur-tout la gravité initiale de l’accident vasculaire), du délai demesure de la pression artérielle ou de l’existence d’un trai-tement antihypertenseur. Il est aussi intéressant de noterque le petit nombre d’études consacrées aux pressionsartérielles faibles suggère un effet délétère d’une baissede la pression artérielle à la phase aiguë. De ce fait, ces étu-des ne permettent ni de conclure à un lien causal de l’hy-pertension artérielle (HTA) sur l’évolution péjorative desaccidents vasculaires cérébraux ni de tirer de consé-quence thérapeutique directe. Les bénéfices théoriquesd’une baisse de la pression artérielle sont une réductionde la formation d’un œdème cérébral, une diminution durisque de récidive précoce ou de transformation hémorra-gique d’un infarctus cérébral et du risque d’expansiond’un hématome cérébral. Toutefois, le respect de l’éléva-tion de la pression artérielle est nécessaire au maintiend’un débit sanguin cérébral suffisant, en particulier dansla zone de pénombre, où les capacités d’autorégulationsont dépassées et où le débit sanguin cérébral dépenddirectement de la pression de perfusion et de la pressionartérielle systémique. Une réduction, même modérée, dela pression de perfusion pourrait entraîner une réductiondu débit en dessous du seuil de viabilité tissulaire ainsi que des lésions ischémiques définitives. Une étudethérapeutique multicentrique a évalué le rapport béné-fice/risque d’une baisse de la pression artérielle à la phaseaiguë d’un accident vasculaire cérébral par de la nimodi-pine par voie intraveineuse. 3 Dans le bras traité, lespatients avaient un pronostic défavorable, directementcorrélé à la baisse de la pression artérielle diastolique(PAD), suggérant que celle-ci pourrait induire une aggra-vation neurologique.

Actuellement, il n’existe pas de recommandation baséesur de grandes études contrôlées concernant la prise encharge de l’hypertension artérielle à la phase aiguë desaccidents vasculaires cérébraux. Il convient dans tous lescas de rechercher et de traiter les facteurs aggravantsd’une HTA (stress, rétention urinaire…) et de maintenirle traitement antihypertenseur préexistant. Si on neconnaît pas le seuil de pression artérielle où il pourraitêtre indiqué d’arrêter ce traitement, il paraît logique de le

suspendre en cas d’hypotension artérielle ou de problèmehémodynamique. L’attitude pratique vis-à-vis de l’intro-duction et des modalités d’administration d’un traitementantihypertenseur dépend de plusieurs facteurs. La pre-mière étape est de réaliser en urgence une imagerie céré-brale, pour distinguer un accident ischémique d’un acci-dent hémorragique. En cas d’infarctus cérébral, lesbénéfices théoriques d’un abaissement de la pressionartérielle semblant inférieurs au risque thérapeutiqued’une aggravation des lésions ischémiques, il existe unconsensus 4 pour respecter l’HTA modérée de la phaseaiguë, sauf si les chiffres de pression artérielle atteignentdes valeurs très élevées (supérieures à 220 mmHg pour laPAS et 120 mmHg pour la PAD). La pression artérielle esttoutefois abaissée pour un seuil moins élevé s’il existe uneencéphalopathie hypertensive ou une indication nonneurologique à son abaissement (dissection aortique,œdème aigu pulmonaire ou infarctus du myocarde).

Si une fibrinolyse intraveineuse est envisagée, les étu-des suggérant une augmentation du risque hémorragiquechez les patients ayant des chiffres élevés de pression arté-rielle, il existe un consensus d’experts qui est de la mainte-nir en dessous de 185/110 les 24 premières heures suivantcelui-ci. En cas d’hémorragie cérébrale, bien qu’il n’existepas de preuve formelle de l’aggravation de l’hématome pardes chiffres tensionnels élevés, il existe un accord profes-sionnel pour un abaissement à 185/110 mmHg.

Si l’introduction d’un traitement antihypertenseur estpréconisée, l’abaissement de la pression artérielle doittoujours être progressif, en surveillant en permanence l’état neurologique. Il est préférable d’utiliser la perfusionintraveineuse pour une meilleure adaptation. L’utilisationpréférentielle de l’urapidil, du labétalol ou de la nicardi-pine est recommandée, en évitant les doses de charge(accord professionnel). Bien qu’il n’existe pas d’étudepermettant de définir un objectif tensionnel précis à laphase aiguë, il paraît logique sur des arguments indirectsde fixer comme objectif des valeurs de pression artériellevoisines de 160/100 mmHg, jusqu’à ce que l’état neurolo-gique soit stabilisé ou amélioré. Il n’existe pas non plus dedonnées sur la pression artérielle optimale à atteindredans des sous-groupes étiologiques de patients (maladiedes petites artères, cardiopathie emboligène, sténoseathéroscléreuse…). Toutefois, les conditions hémodyna-miques (sténose artérielle serrée par exemple) doiventprobablement intervenir dans la décision de la cible opti-male de pression artérielle.

À DISTANCE D’UN ACCIDENT VASCULAIRE CÉRÉBRAL

Une fois passée la phase aiguë, qui correspond en pra-tique à la période d’instabilité hémodynamique et neurolo-gique du patient avec un risque d’aggravation secondaire,se pose la question du traitement de l’HTA au long cours.

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4638

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE A U D É C O U R S E T À D I S TA N C E D ’ U N A C C I D E N T VA S C U L A I R E C É R É B R A L

L En prévention secondaire, tout patient ayant un antécédentd’accident vasculaire cérébral ou d’accident ischémiquetransitoire dans les 5 ans devrait bénéficier, quel que soit leniveau de pression artérielle initiale, du traitement utilisédans l’étude PROGRESS (association perindopril-indapamide),sous réserve d’un problème hémodynamique, d’une contre-indication ou d’une mauvaise tolérance de ce traitement.

C E Q U I E S T N O U V E A U

Page 38: Hypertension artã©rielle essentielle

Si le bénéfice d’une réduction de la pression artérielle estclairement établi en prévention primaire des accidentsvasculaires cérébraux, il restait moins bien documenté enprévention secondaire (après la survenue d’un accidentvasculaire) jusqu’à ce que l’étude PROGRESS 5 vienneclairement le confirmer. Cette étude a porté sur 6 105patients ayant un antécédent d’accident vasculaire céré-bral (ischémique ou hémorragique) ou d’accident isché-mique transitoire dans les 5 années précédant l’inclusion.Les patients pouvaient être inclus quels que soient leurschiffres de pression artérielle, même si un traitement anti-hypertenseur était recommandé pour les patients hyper-tendus. Environ la moitié des patients inclus étaienthypertendus.

Le traitement à l’essai comportait du perindopril, asso-cié ou non à de l’indapamide, contre placebo(s). Pendantles quatre années de l’étude, le traitement s’est accompa-gné d’une diminution moyenne de 9 mmHg de la PAS etde 4 mmHg de la PAD. Cette réduction du niveau de pres-sion artérielle s’est accompagnée d’une diminution statis-tiquement significative de 28 % (intervalle de confiance[IC] à 95 % : 17 à 38) du risque de récidive d’accidentvasculaire cérébral, qui concernait aussi bien les sujets quiétaient hypertendus que ceux qui étaient normotendus àl’inclusion. Le bénéfice était particulièrement net chez lespatients ayant des antécédents d’hémorragie cérébrale. Lerisque d’événements vasculaires majeurs (accident vascu-laire cérébral non mortel, infarctus du myocarde et décèsvasculaire) était également réduit de 26 % (IC à 95 % : 16à 34). En termes de bénéfices absolus, il suffit de traiter14 patients par la bithérapie pendant 5 ans pour éviter unaccident vasculaire cérébral.

Malgré ces résultats spectaculaires, il persiste toutefoisquelques incertitudes cliniques, comme l’existence d’unseuil de pression artérielle initiale où il pourrait être dan-gereux de baisser la pression artérielle. L’étude PRO-GRESS5 a montré une très bonne tolérance du traitementchez les patients ayant des niveaux bas de pression arté-rielle, y compris les sujets âgés. Toutefois, en l’absence dedonnées dans certains cas particuliers, comme les patientsayant une sténose artérielle hémodynamique, il paraîtlogique d’être extrêmement prudent, voire d’éviter uneréduction de leur pression artérielle. Par ailleurs, aucuneétude ne permet de déterminer le niveau optimal de pres-sion artérielle à atteindre après un accident vasculairecérébral.

Il est difficile, à partir de cette seule étude de concluresur l’attribution du bénéfice. En effet, il faut souligner quel’association perindopril-indapamide a entraîné uneréduction tensionnelle de 12/5 mmHg et une réductiondu risque de récidive d’accident vasculaire cérébral de 43 % (IC à 95 % : 30 à 54) alors que la monothérapie parperindopril n’a entraîné qu’une réduction tensionnelle de5/3 mmHg et n’a pas de réduction significative du risquede récidive d’accident vasculaire cérébral. Il est vraisem-

blable que le bénéfice soit lié à la baisse tensionnelle plusqu’à une classe d’antihypertenseur. On ne peut cependantlaisser de côté l’absence de bénéfice sous inhibiteur del’enzyme de conversion prescrit en monothérapie et l’ap-port bénéfique des diurétiques.

Malgré ces incertitudes, l’étude PROGRESS a permisde franchir un cap dans la prévention secondaire des acci-dents vasculaires cérébraux et tout patient ayant un anté-cédent d’accident vasculaire cérébral ou d’accident isché-mique transitoire devrait bénéficier du traitement utilisédans cette étude, quel que soit son niveau de pressionartérielle initiale. Les patients hypertendus doivent bienentendu être traités jusqu’à l’obtention d’une pressionartérielle normale et tous les patients, y compris ceux quisont normotendus, devraient bénéficier au minimumd’une réduction de la pression artérielle du même ordrede grandeur que celui de l’étude PROGRESS, 5 soit uneréduction de la pression artérielle d’au minimum 9/4 mmHg, voire 12/5 mmHg. B

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 639

PHASE AIGUË DES ACCIDENTS VASCULAIRES CÉRÉBRAUX

L L’hypertension artérielle modérée est fréquente et doit êtrerespectée.

L Laisser le traitement antihypertenseur préexistant, sauf enprésence d’une hypotension artérielle ou d’une situationhémodynamique particulière (comme une sténose artérielleserrée).

L Indications à une baisse de la pression artérielle :• encéphalopathie hypertensive ou urgence hypertensive non

neurologique (dissection de l’aorte…) ;• accidents vasculaires cérébraux ischémiques : PAS > 220 et

(ou) PAD > 120 mmHg ;• si un traitement thrombolytique par voie intraveineuse est

envisagé : PAS > 180 et (ou) PAD > 110 mmHg ;• hémorragie cérébrale : PAS > 185 et (ou) PAD > 110 mmHg.

L L’objectif tensionnel est une pression artériellede 160/100 mmHg.

L L’abaissement de la pression artérielle doit être progressif, ensurveillant en permanence l’examen neurologique. Utiliser depréférence la voie intraveineuse.

PRÉVENTION SECONDAIRE

L Éliminer une contre-indication aux traitementsantihypertenseurs.

L Une fois passée la phase aiguë : perindopril 4 mg, 1/2 cp/jpendant 15 jours, puis 1 cp/j.

L Au début du 2e mois, en l’absence d’hypotension artériellesymptomatique : indapamide 1 cp/j.

L Sous traitement, surveiller régulièrement la créatininémie et la kaliémie.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U E

Page 39: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4640

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE A U D É C O U R S E T À D I S TA N C E D ’ U N A C C I D E N T VA S C U L A I R E C É R É B R A L

SUMMARY Hypertension in the acute phase and in the secondary prevention of strokeElevated blood pressure (BP) is frequent after acute stroke and almost 40 % of patients remain hypertensive over a period of about a week. There is no data fromcontrolled trials concerning management of hypertension in the acute phase of stroke. Theorical beneficial effects of acutely lowering BP seems lower that risk ofdeterioration of ischemic brain tissue. Current acute ischemic stroke guidelines suggest that unless systolic BP exceeds an cutoff of 220 mmHg or diastolic exceeds120 mmHg, it should be tolerated, except in planned thrombolytic therapy. In case of hemorragic stroke, the cutoff should be of 185/110 mmHg. Prudence suggeststhat BP should be lowered carefully. In secondary prevention of stroke, the Perindopril Protection Against Recurrent Stroke Study (PROGRESS) demonstrated thata blood pressure-lowering regimen, involving a angiotensin-converting enzyme inhibitor and a diuretic, reduced the risks of stroke of 28% and of other majorvascular events of 26% among individuals with a history of cerebrovascular disease. Every patient with a history of stroke should be treated with the association.

Rev Prat 2004 ; 54 : 637-40

RESUMÉ Hypertension artérielle au décours et à distance d’un accident vasculaire cérébralL’élévation de la pression artérielle (PA) est fréquente à la phase aiguë d’un accident vasculaire cérébral (AVC), et environ 40 % des patients restenthypertendus après une semaine. Actuellement, on ne dispose pas de grandes études contrôlées et donc de recommandations concernant la prise en chargede l’hypertension artérielle (HTA) à la phase aiguë. Les bénéfices théoriques d’un abaissement de la pression artérielle semblent toutefois inférieurs aurisque thérapeutique d’une aggravation des lésions ischémiques. Il existe donc un consensus pour respecter l’HTA modérée de la phase aiguë de l’infarctuscérébral, sauf si les chiffres de pression artérielle atteignent des valeurs très élevées (supérieures à 220 mmHg pour la PA systolique [PAS] et 120 mmHgpour la PA diastolique [PAD]) ou si un traitement thrombolytique intraveineux est envisagé. En cas d’hémorragie cérébrale, il existe un accord professionnelpour un abaissement à 185/110 mmHg. L’abaissement de la pression artérielle doit être progressif, jusqu’à des valeurs normales hautes, en surveillant enpermanence l’état neurologique. En prévention secondaire, l’étude PROGRESS a permis de démontrer que les patients traités par l’association perindopril etindapamide avaient une réduction significative de 28 % du risque de récidive d’accident vasculaire cérébral et de 26 % du risque d’autres événementsvasculaires majeurs. Il convient donc de traiter toute personne ayant un antécédent d’accident ischémique transitoire ou vasculaire cérébral dans les 5 anspar cette association, sauf en cas de contre-indication ou de situation hémodynamique précaire.

1. Wilmot M, Leonardi-Bee J, BathPMW. High blood pressure in acutestroke and subsequent outcome. Asystematic review. Hypertension2004 ; 43 : 18-24.

2. Leonardi-Bee J, Bath PMW,Phillips SJ, Sandercock PAG, forthe IST Collaborative Group.

Blood pressure and clinicaloutcome in the International StrokeTrial. Stroke 2002 ; 33 : 1315-20.

3. Wahlgren NG, Mac Mahon DG,DeKeysser J et al. IntravenousNimodipine West European StrokeTrial (INWEST) of nimodipine in thetreatment of acute ischemic stroke.

Cerebrovasc Dis 1994 ; 4 : 204-10. 4. Adams HP, Adams RJ, Brott T

et al. Guidelines for the earlymanagement of patients withischemic stroke: a scientificstatement from the Stroke councilof the American Stroke Association.Stroke 2003 ; 34 : 1056-83.

5. PROGRESS Collaborative Group.Randomized trial of a perindopril-based blood-pressure-loweringregimen among 6105 individualswith previous stroke or transientischaemic attack. Lancet 2001 ; 358 :1033-41.

R É F É R E N C E S

MORCEAU CHOISI

�En 1911, Fischer, directeur médical d’une compagnie d’assurances, adresseau Medical Directors Association une lettre qui fait date. Il y explique« qu’aucun médecin ne devrait exercer sans sphygmomanomètre. Ilpossède avec cet instrument une aide fiable dans sa démarchediagnostique. Le sphygmomanomètre est indispensable à l’examenmédical dans le cadre des assurances vie, et le temps où toutes lescompagnies en feront usage n’est plus loin ». […] Dès le début de 1907,Fischer mesure la systolique des proposants âgés de plus de 40 ans. Puisil recrute des médecins dans les villes de plus de 100 000 habitants, sibien que, en 1913, 85 % des proposants de sa compagnie ont bénéficiéd’une mesure tensionnelle. […] (NDLR : alors que cette mesure reste trèsmarginale à l’hôpital). La prééminence nord-américaine en épidémiologied’assurances s’explique avant tout par le poids quantitatif de l’assurance-vie dans ce pays : en 1920, le nombre d’assurés américains est trois fois

plus élevé que celui de l’ensemble des assurés du reste du monde ! En1941, ce sont quelque 9 000 médecins américains qui travaillent pour lecompte des assurances. Des années 1920 à l’aube de la Seconde Guerremondiale, les statistiques des compagnies d’assurances apportent ainsides renseignements précieux concernant la grande fréquence del’hypertension artérielle légère et modérée, et son impact délétère surl’avenir des individus. Il semble que Fischer soit le premier à lier pressionartérielle et mortalité. En 1910, il refuse d’assurer les individus ayant unesystolique supérieure ou égale à 142,43 alors que ses propres statistiquesne lui offrent qu’un recul de 2 ans et 9 mois. 1. Postel-Vinay N . Impressions artérielles : 100 ans d’hypertension

1896 – 1996. Paris : Maloine – Imothep, 1995.

Fischer, 1907 : les compagnies d’assurances traquentles « maladies obscures »À la recherche des « maladies obscures » susceptibles de transformer un contrat d’assurance–vie en unemauvaise affaire pour l’assureur, ces derniers vont s’intéresser de très près – bien avant les cliniciens - aulien qui semble unir des chiffres tensionnels élevés à une diminution de l’espérance de vie des assurés. 1

Page 40: Hypertension artã©rielle essentielle

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 641

L’hypertension artérielle (HTA) observée dans lesnéphropathies glomérulaires aiguës, notamment laglomérulonéphrite aiguë post-streptococcique, est

directement liée à un défaut d’excrétion rénale du sodiumresponsable d’une expansion volémique : l’activité du sys-tème rénine-angiotensine est alors freinée.

Dans les néphropathies chroniques, le défaut d’excré-tion sodée est également présent, il est d’autant plusimportant que l’insuffisance rénale est avancée, même enl’absence d’œdèmes. En revanche, il s’y associe une activa-tion du système rénine-angiotensine vraisemblablementsecondaire à des phénomènes d’ischémie rénale régionaledus à la fibrose interstitielle et vasculaire (fig. 1), quiexplique la persistance de l’HTA même après normalisa-tion volémique. 1 D’autres facteurs peuvent contribuer àl’HTA : hyperactivité du système sympathique, endothéline,

641

Particularités de l’hypertension artérielle du patient insuffisant rénal

Plus de 80 % des patients arrivant au stade de la dialyse sont hypertendus, alors que, par ailleurs, hypertension artérielle et protéinurie sont les principaux facteurs de progression del’insuffisance rénale chronique. Seul un traitement antihypertenseurénergique, utilisant en première intention un inhibiteur de l’enzymede conversion, avec un objectif de pression artérielle inférieure à 130/80 mmHg, peut ralentir cette évolution.

Maurice Laville*

* Service de néphrologie et hypertension artérielle, hôpital Édouard Herriot, 69437 Lyon Cedex 03 et UMR-MA, université Claude-Bernard Lyon 1. Mél : [email protected]

F

V F

IG

Biopsie rénale : fibrose interstitielle (F) et altérationsvasculaires (V), responsables d’une ischémie glomérulaire (IG).Figure 1

Page 41: Hypertension artã©rielle essentielle

résistance au facteur atrial natriurétique, défaut de produc-tion de monoxyde d’azote (NO), hyperparathyroïdie, poly-globulie des polykystoses rénales ou correction trop rapidede l’anémie par l’EPO (érythropoïétine) recombinante.

Chez le patient insuffisant rénal, l’HTA est associée à desanomalies vasculaires qui jouent un rôle important dansl’accroissement du risque : rigidité artérielle avec élévationde la pression artérielle systolique (PAS) et de la pressionpulsée ; absence d’abaissement nocturne (non-dippers).

PARTICULARITÉS CLINIQUES

Plus de 80 % des patients arrivant en dialyse sont hypertendus

L’HTA des néphropathies chroniques est une des pluscommunes des hypertensions secondaires. Sa fréquencedépend du type de néphropathie chronique, et augmentelinéairement avec la décroissance du débit de filtration glo-

mérulaire. 2 Elle obéit aussi à des facteurs génétiques (HTAfamiliale, sujets d’origine africaine) et environnementaux(surpoids). La prévalence moyenne de l’HTA dans les néphri-tes glomérulaires est d’au moins 40 % (20 % si la fonctionrénale est normale). Au stade d’insuffisance rénale sévère, laprévalence de l’HTA est supérieure ou égale à 80 %.

Au total, 80 à 85 % des patients sont hypertendus lors-qu’ils commencent le traitement par dialyse. En dehorsdes patients dont l’insuffisance rénale est découverte austade terminal, la plupart de ces patients reçoivent un trai-tement antihypertenseur, mais la proportion de patientsdont la pression artérielle est réellement normalisée resteinsuffisante, de l’ordre de 30 %, comme chez les hyper-tendus « tout-venant ». Or l’influence de la pression arté-rielle sur la progression de l’insuffisance rénale est telleque les valeurs-cibles doivent être plus basses que dans lapopulation hypertendue sans insuffisance rénale.

Une influence délétère sur la vitesse deprogression de l’insuffisance rénale chronique

L’effet de l’HTA sur la vitesse de progression de l’insuf-fisance rénale chronique a été précisé par différentes étu-des de cohortes, notamment en Europe, et par l’analysedes résultats des grands essais sur la progression de l’in-suffisance rénale chronique (fig. 2). 3

L’influence délétère de l’association à une protéinurieabondante, et l’interaction néfaste entre niveau tensionnelet protéinurie, ont été particulièrement bien mises enlumière par les résultats de l’essai MDRD, 4 initialementdestiné à évaluer l’effet d’une restriction protidique sur lavitesse de progression de l’insuffisance rénale (fig. 3).

La reconnaissance du rôle fondamental des anomaliesde l’hémodynamique glomérulaire, favorisées par l’HTA, aconduit à réaliser des essais cliniques dont les résultatsont profondément modifié la prise en charge de l’HTA enprésence d’une maladie rénale chronique (v. infra).

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4642

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE PA R T I C U L A R I T É S C H E Z L’ I N S U F F I S A N T R É N A L

Étude 1

Protéinurie initiale (g/jour)

Déc

rois

san

ce m

oyen

ne

du

DF

G(m

L/m

in/a

n)

Étude 2

4

0

8

12

4

n = 420

<1 <1 1- < 3 1- < 3 3 3

n = 104 n = 54 n = 136 n = 63 n = 32

0

8

12

Influences combinées du niveau tensionnel (� contrôle « strict » : pression artérielle [PA] 140/90 mmHg,moyenne 107 mmHg ; � contrôle « habituel » : PA 125/75 mmHg(PA moyenne 92 mmHg) et de la protéinurie (en g/24 h) sur la vitesse de décroissance du débit de filtration glomérulaire(DFG en mL/min perdus par année) dans 2 groupes de patientsavec insuffisance rénale chronique modérée (Étude 1 : N = 585 ;DFG : 38 mL/min) ou sévère (Étude 2 : N = 255 ; DFG : 18 mL/min).D’après la réf no 4.

Figure 3

L La progression de l’insuffisance rénale chronique n’est pasinéluctable : la reconnaissance des facteurs majeurs commel’hypertension artérielle et la protéinurie a permis de définirdes stratégies efficaces en prévention secondaire.

L Les causes d’insuffisance rénale terminale sont actuellementdominées par les néphropathies diabétiques et vasculaires,dont l’évolution est largement prévisible : la prise en chargeprécoce n’en est que plus nécessaire afin d’éviter l’évolutionvers la dialyse.

L L’insuffisance rénale chronique est un facteur majeur de risque cardiovasculaire. Mais aucun traitement, mêmeefficace sur la progression de l’insuffisance rénale chronique,n’a actuellement démontré d’effet spécifique de réduction du risque cardiovasculaire de ces patients.

C E Q U I E S T N O U V E A U

Relation entre la vitesse de décroissance du débit de filtration glomérulaire (DFG, en mL/min perdus par année)et le niveau de pression artérielle moyenne (MAP). La pertefonctionnelle peut atteindre 12 mL/min par an ou plus, chez lesdiabétiques dont l’HTA n’est pas contrôlée. D’après la réf no 3.

Figure 2

HTAnon traitée

r = 0,69 ; P � 0,05

MAP (mmHg)

DFG

(mL

/min

/an)

0

-2

-4

-6

-8

-10

-12

-14

95 98 101 104 107 110 113 116 119

130/85 140/90

Page 42: Hypertension artã©rielle essentielle

L’hypertension artérielle cause d’insuffisancerénale chronique

Parallèlement, l’épidémiologie croissante des insuffisan-ces rénales de cause vasculaire, particulièrement en Amé-rique du Nord, a conduit à reconnaître le risque rénal pro-pre de l’HTA essentielle et à en préciser les facteurs grâce àdes analyses ciblées des populations incluses dans lesgrands essais sur le traitement de l’HTA. Au niveau indivi-duel, le risque d’insuffisance rénale chronique terminaleassocié à l’HTA essentielle reste faible (1,4 % à 15 ans) saufchez les sujets d’origine africaine dont le risque est 2 à 7 fois plus élevé. Une élévation de 20 mmHg de la pres-sion artérielle diastolique (PAD) double le risque d’éléva-tion de la créatinine en 12 ans de suivi, 5 et le risque associéà la PAS est encore plus élevé. Ce risque est néanmoins trèsinférieur au risque coronaire ou cérébral. Mais l’effectifconsidérable de la population hypertendue contribue à enfaire un problème majeur de santé publique, 6 d’autant quele bénéfice apporté par les progrès dans la prise en chargede l’HTA ne se traduit actuellement au mieux que par unestabilisation de l’incidence des insuffisances rénales chro-niques attribuées à l’HTA (fig. 4). La micro-albuminurie,signe précoce d’une anomalie de la fonction glomérulaire,est un bon indice de dépistage de la néphropathie hyperten-sive, car elle est bien corrélée au niveau tensionnel, et au-delà au risque rénal et cardiovasculaire (v. encadré p 622).

PARTICULARITÉS THÉRAPEUTIQUES

Le traitement antihypertenseur ralentit la progression des néphropathies non diabétiques

L’interprétation des effets d’une intervention thérapeu-tique sur la progression de l’insuffisance rénale chroniquedoit tenir compte des principaux facteurs confondants

que sont la fonction rénale initiale, la vitesse de progres-sion de l’insuffisance rénale chronique avant traitement, leniveau de protéinurie, et les autres facteurs de progres-sion dont l’apport alimentaire en protéines, ainsi que de lacomparabilité des niveaux tensionnels sous traitement.

En tenant compte de ces différents biais, les essaiscontrôlés randomisés publiés entre 1992 et 1999 sur plu-sieurs centaines de patients insuffisants rénaux, ont glo-balement démontré les effets favorables des inhibiteursde l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC) sur laprotéinurie et sur la vitesse de progression de l’insuffi-sance rénale, par comparaison au traitement antihyperten-seur « conventionnel ». Ces effets sont parallèles à laréduction de la protéinurie, et supérieurs à ceux attendus

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 643

1,0

0,8

0,6

0,4

0,2

0,0

0 12 24 36 48

Suivi (mois)

D

p < 0.001

1,0

0,8

0,6

0,4

0,2

0,0

0 12 24 36 48

D

p < 0,001

Su

rvie

rén

ale

Dialyse Transplantation

Glomérulonéphrite

1990 1992 1994 19981996 1990 1992 1994 19981996

1,4

1,1

0,8

0,5

0,2

120

140

100

80

60

40

20

0

HypertensionDiabète

Polykystose rénale

1990 1992 1994 19981996 1990 1992 1994 19981996

Évolution del’incidence absolue(nouveaux patientspar million d’habitantset par an) desdifférentes causesd’insuffisance rénalechronique terminaleaux États-Unis entre1990 et 1998(United States RenalData System-AnnualReport, 2000).

Figure 4

Courbes actuarielles de survie sans progression de l’insuffisance rénale chronique (appréciée par le doublement de la créatinine) chez les patients traités(ligne en pointillés) ou non (ligne continue) par inhibiteur de l’enzyme de conversion, issues d’une méta-analyse sur données individuelles. D’après la réf n° 8.La survie rénale correspond à l’absence d’événements de type doublement de la créatinine ou début de dialyse.

Figure 5

Page 43: Hypertension artã©rielle essentielle

de la simple baisse de la pression artérielle. Deux méta-analyses ont confirmé ces effets, ainsi que le ralentisse-ment de la progression de l’insuffisance rénale et uneréduction de moitié du risque d’entrer en dialyse. 7

Chez les patients ayant une insuffisance rénale nonliée à un diabète, la méta-analyse la plus récente 8 aconfirmé le bénéfice de l’abaissement tensionnel obtenupar les IEC sur la progression de l’insuffisance rénale(fig. 5), avec en moyenne une PAS sous IEC inférieurede 5 mmHg à celle obtenue par les traitements sans IEC(139 contre 144 mmHg). L’essai AASK a montré que lesIEC sont plus efficaces que les β-bloquants et les anta-gonistes calciques sur la progression de l’insuffisancerénale chronique chez des Noirs américains atteints denéphro-angiosclérose, dont le risque rénal est particuliè-rement élevé (AASK 1). 9 Dans le même essai, l’obten-tion d’un niveau tensionnel inférieur à la normale n’a pasdémontré de bénéfices supplémentaires sur la progres-sion de l’insuffisance rénale (AASK 2). 10

Cependant, aucun de ces essais n’a démontré de réduc-tion du risque cardiovasculaire, ce qui peut être en partiedû à des effectifs ou à des durées de suivi insuffisants. Il n’y a en tout cas aucun argument en faveur d’un accrois-

sement du risque cardiovasculaire lorsque les chiffres ten-sionnels sont ramenés à leur niveau le plus bas.

Objectifs du traitement et recommandations

Chez les patients en insuffisance rénale chronique, lesrecommandations américaines du Joint National Comitee(JNC 7) 11 préconisent un traitement agressif de l’HTA pouratteindre une cible inférieure à 130/80 mmHg, ce qui néces-site souvent l’association de 3 antihypertenseurs ou plus. L’utilisation d’IEC ou d’antagonistes des récepteurs à l’angio-tensine II (ARA II) est recommandée. Un diurétique doitêtre systématiquement associé pour atteindre ces objectifs.Les experts européens 12 recommandent un traitement anti-hypertenseur énergique.

Chez le patient insuffisant rénal chronique, il faut doncs’efforcer d’obtenir une pression artérielle inférieure à130/80 mmHg, voire 125/75 mmHg lorsque la protéi-nurie est supérieure à 1 g/24 h, à l’aide d’un traitementcomportant le plus souvent possible un IEC.

Stratégies de traitement, précautions, et surveillance

Les IEC et les ARA II peuvent entraîner une élévation dela créatinine dès le début du traitement. Cette élévation, quireflète l’effet thérapeutique de ces médicaments sur l’hémo-dynamique glomérulaire, est considérée comme tolérablejusqu’à 20 % (35 % pour les experts américains 11) au-dessusdes valeurs initiales. Une élévation plus importante, ou l’ap-parition d’une hyperkaliémie, justifie une interruption detraitement afin de préciser le rôle de l’IEC et de rechercherdes facteurs favorisants : dose initiale trop élevée, déplétionsodée ou traitement diurétique excessif, prise concomitanted’anti-inflammatoires non stéroïdiens, et sténose de l’artèrerénale. L’existence d’altérations vasculaires rénales intra-parenchymateuses comme dans les néphropathies vasculai-res expose particulièrement à ce risque.

La survenue de tels incidents ne doit pas conduire à écarterdéfinitivement les IEC, étant donné le bénéfice attendu surla protéinurie et la progression de l’insuffisance rénale chro-nique. Il faut, après avoir éventuellement corrigé les facteurscités, reprendre le traitement à la dose minimale possible, etrechercher un abaissement progressif de la pression arté-rielle jusqu’aux valeurs-cibles sur 8 à 12 semaines.

La deuxième étape du traitement est l’adjonction d’un diu-rétique, thiazidique si la filtration glomérulaire est supérieureà 30 mL/min, diurétique de l’anse en dessous, en cherchanttoujours à éviter une déplétion sodée excessive. L’apport sodédoit être maintenu aux alentours de 4 à 6 g de sel par jour.

Le choix des antihypertenseurs de 3e voire de 4e inten-tion est guidé par les interactions pharmacologiques, lesindications extrarénales, et la tolérance : antagoniste cal-cique, de préférence d’action longue et non dihydropyridi-nique, β-bloquant, central ou vasodilatateur. De tels traite-ments, tri- ou quadrithérapie antihypertensive, ne sont pas

L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4644

HYPERTENSION ARTÉRIELLE ESSENTIELLE PA R T I C U L A R I T É S C H E Z L’ I N S U F F I S A N T R É N A L

L L’insuffisance rénale est une maladie chronique qui tendspontanément à s’aggraver sous l’effet de facteurs en partieindépendants de la néphropathie initiale.

L L’hypertension artérielle et la protéinurie sont les principauxfacteurs de progression de l’insuffisance rénale chronique : ce sont les meilleurs critères prédictifs d’efficacité du traitement néphroprotecteur.

L Les IEC ont démontré leur efficacité pour abaisser la pressionartérielle, réduire la protéinurie, et ralentir la progression del’insuffisance rénale chronique. Il s’agit donc de la classethérapeutique à utiliser en première intention.

L La cible tensionnelle à atteindre chez le patient insuffisantrénal chronique est inférieure à 130/80 mmHg, et inférieure à 125/75 mmHg si la protéinurie excède 1 g/24 h.

L L’hypertension artérielle de l’insuffisance rénale chronique est associée à une rétention sodée : on ne peut étiqueter une hypertension « résistante » sans traitement diurétique. Pour obtenir un contrôle tensionnel satisfaisant, une tri- voireune quadrithérapie sont souvent nécessaires.

L La baisse de la pression artérielle en début de traitements’accompagne souvent d’une élévation de la créatinine. Le traitement par IEC doit être débuté à la dose minimale afin de minimiser cet effet. Si l’élévation de la créatinine dépasse 20 %, ou en cas d’hyperkaliémie, il faut rechercher une causefavorisante, et en premier lieu une déplétion sodée ou unesténose artérielle rénale.

P O U R L A P R AT I Q U EP O U R L A P R AT I Q U E

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incompatibles avec une excellente tolérance au long cours,condition indispensable pour observer tout le bénéfice dela normalisation tensionnelle.

CONCLUSION

L’hypertension artérielle est si intimement associée àl’histoire naturelle des néphropathies chroniques, qu’ellen’a que récemment été reconnue comme un facteurmajeur de progression des insuffisances rénales et de l’ex-cès de risque cardiovasculaire des patients qui en sontatteints. En raison du rôle central de la rénine et de larétention sodée, les cibles tensionnelles efficaces ne peu-vent être aisément atteintes sans mettre en œuvre au mini-mum une bithérapie associant un antagoniste du systèmerénine-angiotensine et un diurétique, et chez le dialyséune normalisation attentive de la volémie. De gros effortssont encore nécessaires afin d’apporter à l’ensemble deces patients les bénéfices d’une normalisation tension-nelle dès les premiers stades de leur maladie rénale. B

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SUMMARY Hypertension in patients with chronicrenal diseaseHypertension belongs to the clinical picture of chronic renaldisease (CRD). Its frequency depends on the type of nephropathyand the stage of CRD. Whatever the primary renal disease, morethan 80 % of patients beginning dialysis do have hypertension.The pathophysiology of hypertension in those patients involves ahyperactivity of renin-angiotensin system, as well as a decrease ofsodium excretion capacity accompanying the decrease inglomerular filtration rate. Hypertension is the leading factor ofrenal disease progression as suggested by the relationshipbetween blood pressure and function decay, and demonstrated bythe results of antihypertensive intervention studies. Theinteraction between blood pressure and proteinuria is extremelydetrimental. Hypertension is an important factor of cardiovascularrisk excess observed in CRD patients, but the effect ofantihypertensive treatment on cardiovascular risk remains limitedin those patients, due to accumulation of other major risk factors.Finally, it is worth noting to mention the increasing place ofvascular nephropathy, especially due to essential hypertension,amongst the causes of end-stage renal disease, where it comparewith diabetic nephropathy accounting for 20% of incident patientsin France.

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1. Preston RA, Singer I, Epstein M.Renal parenchymal hypertension:current concepts of pathogenesisand management. Arch Intern Med1996 ; 156 : 602-11.

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6. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES).Prise en charge des patientsadultes atteints d’hypertensionartérielle essentielle.Recommandations cliniques etdonnées économiques. 2000.

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R É F É R E N C E S

RÉSUMÉParticularités de l’hypertension artérielle du patient insuffisant rénalL’hypertension artérielle fait partie du tableau clinique de l’insuffisance rénale chronique. Sa fréquence dépend du type de néphropathie et du stade del’insuffisance rénale chronique. Quelle que soit la néphropathie causale, plus de 80 % des patients arrivant en dialyse sont hypertendus. La genèse del’hypertension artérielle chez ces patients est étroitement liée à l’activité du système rénine-angiotensine, et au défaut d’excrétion sodée quiaccompagne la diminution du débit de filtration glomérulaire. L’hypertension artérielle est le principal facteur de progression de l’insuffisance rénalechronique, comme le suggèrent les relations entre niveau tensionnel et perte fonctionnelle, et comme l’ont démontré les résultats des essaisd’intervention antihypertensive. L’interaction entre niveau tensionnel et débit de protéinurie y joue un rôle particulièrement néfaste. L’hypertensionartérielle contribue largement à l’excès de risque cardiovasculaire observé chez le patient insuffisant rénal, même si la réduction du risque par letraitement antihypertenseur reste modeste, en raison des nombreux autres facteurs de risque présents chez ces patients. Enfin, il faut souligner la partcroissante des néphropathies vasculaires, notamment secondaires à l’hypertension artérielle essentielle, parmi les causes d’insuffisance rénalechronique terminale, où elles occupent une place comparable à celle de la néphropathie diabétique avec 20 % des nouveaux cas en France.

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L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4 647

Comment garder le contact avec l’actualité de l’hypertension artérielle dans les prochains mois? Une solution : interrogerrégulièrement la banque de données bibliographiques MEDLINE à l’aide des «bonnes» équations de recherche. Elles figurent

dans cette page. Elles sont également sur le site 33docpro.com à l’adresse http://minilien.com/?6b8L90IOPm et il suffit d’un clicde souris pour afficher les notices correspondantes.

L’hypertension artérielle dans MEDLINEpar Philippe Eveillard

Dans le thesaurus MeSH, le descripteur« hypertension » est un piège, car ilrecouvre aussi bien l’hypertension

artérielle (HTA) que l’hypertensionpulmonaire ou l’hypertension portale,deux de ses branches hiérarchiques deniveau inférieur. Par défaut, ces deuxdescripteurs sont impliqués dans touterequête effectuée avec le descripteur«hypertension».

NON-EXPLOSION OU OPÉRATEUR BOOLÉEN NOT

Toute requête effectuée avec ledescripteur «hypertension» est étendue(sauf précision contraire) à Hypertension,Malignant; Hypertension, Portal; Hypertension,Pulmonary ; Hypertension, Renal.

Dans une équation relative à l’hypertensionartérielle, il convient d’écarter l’hypertensionportale et l’hypertension pulmonaire.Pour cela il faut :

— soit ne pas exploser le descripteur(syntaxe mh:noexp), mais l’hypertensionartérielle d’origine rénale (ourénovasculaire) et l’hypertensionmaligne sont écartées ;

— soit recourir à l’opérateur booléenNOT pour spécifier l’élimination de

l’hypertension portale et del’hypertension pulmonaire, maisl’équation devient plus complexe.

L’équation correspondant à Prise encharge initiale de l’hypertension artérielleest un bon exemple de ce qui vient d’êtredit sur les modalités de formulationd’une équation de recherche sur l’HTA.

Cette prise en charge est à la foisdiagnostique et thérapeutique, etl’équation est de la forme:Hypertension/diagnosis [mh] ORHypertension/drug therapy [mh]

Dans la prise en compte de l’élimination

de l’hypertension portale et del’hypertension pulmonaire, le premier etle deuxième membre de l’équation sont«traités» différemment pour des raisonsde «qualificatif» (v. encadré).

Hypertension/diagnosis [mh] devient :Hypertension/diagnosis [mh] NOT(Hypertension, Portal [mh] OR Hypertension,Pulmonary [mh])

Hypertension/drug therapy [mh]devient : (Hypertension/drug therapy[mh:noexp] OR Hypertension, malignant/drug therapy [mh] OR Hypertension,Renal/drug therapy [mh])

L’équation complète est la suivante : Hypertension/diagnosis [mh] NOT

(Hypertension, Portal [mh] OR Hypertension,Pulmonary [mh]) OR (Hypertension/drugtherapy [mh:noexp] OR Hypertension,malignant/drug therapy [mh] ORHypertension, Renal/drug therapy [mh])

À noter :Le descripteurs reliés par l’opérateur

booléen OR sont mis entre parenthèsesselon le schéma:descripteur NOT (descripteur ORdescripteur) OR (descripteur OR

Les équationsL Hypertension/diagnosis [mh] NOT (Hypertension, Portal [mh] OR Hypertension, Pulmonary [mh])

OR (Hypertension/drug therapy [mh:noexp] OR Hypertension, malignant/drug therapy [mh] OR Hypertension, Renal/drug therapy [mh])

L Cardiovascular diseases [mh:noexp] AND risk assessment [mh] AND Framingham [tw]L (Hypertension/drug therapy [mh:noexp] OR Hypertension, malignant/drug therapy [mh]

OR Hypertension, Pulmonary/drug therapy [mh]) AND Randomized Controlled Trials [mh]L Hypertension/complications [mh] AND cerebrovascular accident [mh]L Hypertension [majr] NOT (Hypertension, Portal [mh] OR Hypertension, Pulmonary [mh])

AND Diabetes Mellitus [mh]L Hypertension [majr] NOT (Hypertension, Portal [mh] OR Hypertension, Pulmonary [mh])

AND Kidney Failure [mh]

Explosion et non-explosion du coupledescripteur/qualificatifComme cela a déjà été évoqué (Rev Prat 2004 ; 54 [14] : 1577), l’explosion ou la non-explosion du descripteur indépendamment de l’explosion ou de la non-explosion de son qualificatif relèvent de la formulation «avancée» des équations.L Dans l’exemple du couple hypertension/diagnosis, il convient d’éviter l’explosion «totale»

de hypertension tout en conservant celle de diagnosis (le diagnostic d’une hypertensionsecondaire pouvant être un diagnostic d’imagerie). Pour cela, l’équation est formulée commepour une explosion du couple descripteur/qualificatif, mais on écarte de la requête les branches nondésirables du descripteur (en l’occurrence Hypertension, Portal et Hypertension, Pulmonary).