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Historique du 4e Rgiment dInfanterie
Source : BDIC et Mmorial Genweb
Transcription intgrale Luc Schappacher 2014
HISTORIQUE
DU
46e Rgiment dinfanteRie
Plutt Mourir que Faillir
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Historique du 46e Rgiment dinfanterie
FORMATION
Le 46e
d'aujourdhui a 275 ans d'existence. Il est form sous le titre de : MAZARIN
FRANAIS, en 1644, au commencement du rgne de Louis XIV.
Il reoit le baptme du feu sur les bords du Rhin, en Alsace, et cest sur les Allemands quil
remporte sa premire victoire : Fribourg.
BRETAGNE CAMPAGNE DALSACE
En 1651, le rgiment prend le nom de BRETAGNE, quil conserve jusqu la Rvolution. Il
prend part toutes les campagnes de l'ancienne monarchie et son drapeau porte une fire
devise : Plutt la mort que la honte .
BRETAGNE est de cette immortelle campagne d'Alsace (1674- 1675), par laquelle le
glorieux de Turenne donna cette belle province la France.
Le souvenir de Turenne doit tre cher aux soldats du 46 et tous les soldats de France.
Noublions jamais la fire consigne quil donna ses troupes : Pas un homme de guerre en
France ne doit demeurer en repos tant qu'il y aura un Allemand en Alsace.
RGNES DE LOUIS XV ET LOUIS XVI
Sous le rgne de Louis XV, BRETAGNE combat en Bavire, en Autriche, en Provence contre
les Allemands, les Autrichiens et les Anglais.
Sous Louis XVI, alors que la France toujours gnreuse aide les colonies anglaises
conqurir leur indpendance, notre rgiment sempare de la forteresse de Port-Mahon dans
11e de Minorque. Il compte alors pour la premire fois dans ses rangs le soldat qui devait
illustrer pour toujours le 46 : LA TOUR DAUVERGNE.
Parmi les jeunes officiers, il a aussi DESAIX, alors sous-lieutenant.
GUERRES DE LA REPUBLIQUE ET DE L EMPIRE 1789-1815
La Rvolution clate.
En 1790, le rgiment de Bretagne change son vieux nom contre celui de 46 rgiment de
ligne, puis contre celui de 46 demi-brigade de bataille.
En 1793, la 46e demi-brigade est de nouveau sur la terre d'Alsace envahie ; lennemi est
toujours le mme : lAllemand. Un grand et noble chef, le gnral Hoche, conduit notre demi-
brigade la victoire.
Aprs une srie de glorieux combats dans les Vosges, sur les lignes de Wissembourg o
Desaix, devenu adjudant-gnral, est au premier rang, les Allemands sont de nouveau chasss
et lAlsace est de nouveau dlivre.
La 46e demi-brigade prend part la campagne dItalie (1794- 96). Elle combat contre les
Autrichiens et les Pimontais. En 1796, elle est sous les ordres du gnral Bonaparte, le futur
empereur Napolon 1er
. Mais trs prouve par la maladie, elle doit quitter larme dItalie.
On retrouve la 46e en Belgique en 1798. A Ostende, cinq de ses compagnies font chouer une
attaque des Anglais bien suprieurs en nombre. Le gouvernement du Directoire adresse ses
flicitations an colonel Forty, chef de la 46e, dans ces termes :
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Avant deffectuer leur descente, les Anglais vous avaient compts. Ils avaient cru
pouvoir se hasarder au nombre de trois mille contre trois cents que vous tiez. Ils avaient mal
calcul et leur lite devait mettre bas les armes devant celles de vos braves.
Lanne suivante, la 46e est larme du Danube, elle prend une part glorieuse la bataille de
Stokach, puis elle est dirige sur la Suisse, amenant dans les rangs de lArme dHelvtie le
glorieux La Tour dAuvergne.
Massna, qui commande l'arme, sauve la patrie menace par les Autrichiens et les Russes.
Dans les journes de Zurich, au bord du lac de ce nom, aux pieds des hautes montagnes
couvertes de neige, les grenadiers de la 46e, en tte desquels marche La Tour dAuvergne,
sillustrent une fois de plus (25 et 26 septembre 1799). Quelques jours aprs ils se retrouvent
en face des Russes, Dusingel, et leur prennent cinq drapeaux et deux canons.
La campagne de 1800, en Allemagne, est peut-tre la plus glorieuse pour la 46e demi-brigade.
A Engen, Moeskirch, elle enfonce les Autrichiens ; Hochsteed, ses hommes passent le
Danube sous les feux de lennemi ; mais, le 27 juin, le succs d'Oberhausen est chrement
pay. Forty, le chef de la 46e, est tu, et, peu aprs, La Tour dAuvergne, qui combattait au
premier rang, tombe perc dun coup de lance.
Sa mort est un deuil pour toute l'arme ; des honneurs spontans, que Bonaparte, devenu
premier consul, ratifie plus tard par dcret, sont dcerns au premier Grenadier de France,
tomb au Champ dhonneur.
Le cur du hros, port dans une urne dargent, devait tre constamment port par un fourrier
de la 46. Cette glorieuse relique allait tre le tmoin de nouveaux exploits de la 46e demi-
brigade. Au mois de dcembre 1800, elle prend une part active la belle victoire de
Hohenlinden.
En mme temps que Bonaparte devient lempereur Napolon 1er
, la 46e demi-brigade devient
le 46e rgiment dinfanterie (1804). Le rgiment fait partie du quatrime Corps d'Arme,
command par le marchal Soult.
En 1805, il quitte le camp de Boulogne, marche avec la Grande Arme contre les Autrichiens,
fait la campagne dUlm et entre Vienne, capitale de lAutriche. A la bataille dAusterlitz (2
dcembre 1805), le 46e reoit la rude mission de gravir les pentes du chteau de Bratzen,
centre de la position ennemie.
La lutte est acharne ; le 46 une fois arriv sur le plateau doit soutenir leffort de toute la
gauche russe. Il la culbute dans les tangs gels dont la glace a t brise coups de canon et
o se noient des centaines dennemis. La Grande Arme prend Austerlitz 23.000
prisonniers, 180 canons et 50 drapeaux. Lempereur adresse ses soldais une proclamation se
terminant ainsi :
Il vous suffira de dire : Jtais la bataille dAusterlitz, pour quon vous rponde
voil un brave.
Aprs les Autrichiens et, les Russes, le 46e se rencontre avec de nouveaux adversaires, les
Prussiens. Ceux-ci sont crass la bataille dIna (14 octobre 1806). Le 46e prend une
grande part la bataille puis poursuit l'arme prussienne, entre Lubeck et Berlin, la capitale
de la Prusse.
En 1807, le rgiment est en Pologne. Eylau, Knigsberg, sont autant de noms glorieux pour le
46. A Eylau, le 46 soutient une lutte acharne, il perd un grand nombre dofficiers et de
soldats.
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En 1809, il est en Autriche, il se distingue Essling, Aspern et Wagram o le lieutenant se
fait jour avec quelques hommes travers 2.000 cavaliers ennemis. Vers la mme poque et
pendant les annes 1810-1811, le rgiment est reprsent par deux de ses bataillons dans la
pnible campagne dEspagne et de Portugal. Ils prennent part aux combats dAstorga, Fenia,
Torres-Vedras, Fuentes et Onero. Aprs le chaud soleil d'Espagne, en 1812, ce sont les boues
et les neiges de la steppe russe. Pendant la campagne le 46 fait partie du IIIe Corps sous les
ordres du marchal Ney.
Les Russes barrent la route de Moscou leur capitale. Le 7 septembre 1812, sengage une des
batailles les plus sanglantes du sicle, la bataille de la Moskova. Le 46 y accomplit des
prodiges de valeur, triomphant par son nergie indomptable de l'obstination fanatique des
Russes. Jamais bataille na t plus dispute. 30.000 Franais, 60.000 Russes y ont pri.
Le rgiment subit des pertes considrables. Puis cest lentre Moscou, lincendie de la ville
et enfin la retraite dsastreuse sous les coups dun adversaire invincible, le Gnral HIVER.
En 1813, le rgiment prend part la bataille de Leipzig, quon a appele la Bataille des
Nations . Plus de 600.000 hommes y sont engags. Aprs la bataille leffectif du rgiment est
rduit un bataillon.
En 1814, pendant la campagne de France, le 46 dfend avec son nergie habituelle le sol de la
patrie contre linvasion : Brienne, la Rothire, Montereau, Bar-sur-Aube, il est au
premier rang. Pendant la campagne de 1815, le 46 est la bataille de Ligny et celle de
Waterloo. C'est dans ce sanglant combat qui marque la chute de lEmpire que simmortalise
un ancien officier du 46, Cambronne, commandant la Vieille Garde.
LES GUERRES CONTEMPORAINES (1815-1871)
Sous le rgne du roi Charles X, quand la France va secourir les Grecs opprims et les aider
conqurir leur indpendance, le 46 prend part la Campagne de More, et se trouve au sige
de Patras (1828).
En garnison Strasbourg en 1836, le 46 donne une preuve de son loyalisme en faisant
chouer une tentative de Louis-Napolon, neveu de l'empereur Napolon 1er
, pour renverser le
gouvernement.
Louis-Napolon devient lempereur Napolon III en 1851.
Notre rgiment crit une des plus belles pages de son histoire pendant la guerre de Crime
(1854-1855). Il est au sige de Sbastopol. Il prend part 6 combats et se fait citer 3 fois
lordre de lArme, il est de l'assaut final, Malakoff. Aprs une absence de 2 ans, il rentre en
France ayant perdu 75 officiers, 1.600 hommes blesss, tus au feu ou morts de maladie.
Pendant toute cette campagne, les soldats du 46e ont fait preuve de la plus farouche nergie
dans les combats, comme de la plus stoque rsignation au milieu des dangers de toutes sortes,
et des souffrances qui les avaient assaillis.
Le rgiment prend part la campagne dItalie en 1859. 11 est Solferino. Pendant la funeste
guerre de 1870, le 46 est oblig dabandonner cette Alsace o il est pour ainsi dire n, et quil
a aid deux fois arracher aux Allemands, il fait partie de la malheureuse arme de Chalons.
A Beaumont, en dpit dune magnifique rsistance, il est cras par des forces bien
suprieures.
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A Sedan (1er
septembre 1870), le 46 est fait prisonnier avec lEmpereur Napolon III et toute
lArme. Mais son drapeau ne tombe pas aux mains de lennemi. Le colonel le dchire en
plusieurs morceaux qui sont confis des officiers et des soldats. Un de ces fragments a t
retrouv et est conserv prcieusement la Salle dHonneur de la Caserne de Reuilly.
LA TROISIEME REPUBLIQUE
La Rpublique Franaise rpare les dsastres de l'Empire. LArme est rorganise. Le 14
juillet 1880, le rgiment reoit des mains du Prsident de la Rpublique un nouveau drapeau
la place de celui de 1870. Cest celui qui flotte aujourdhui dans nos rangs, portant en lettres
dor les quatre principales batailles o nos anciens sillustrrent : ZURICH AUSTERLITZ
LA MOSKOWA SEBASTOPOL. Cest ce drapeau, quen dcembre 1918, le gnral
Pell attachait la Croix de Guerre, rcompense des quatre dernires annes de lutte, au cours
desquelles le rgiment de la Tour dAuvergne a ajout dautres pages de gloire aux pages dj
si glorieuses de son histoire dans les sicles passs.
De 1881 1900, le 46 a son numro reprsent dans les expditions lointaines qui ont valu
la France son empire colonial.
Un bataillon du rgiment prend part la campagne de Tunisie, un dtachement participe
lexpdition de Madagascar.
Quelques annes scoulent dans le calme des garnisons. Puis tout coup, cest la terrible
anne 1914. Un homme va transformer le monde en un vaste incendie. Dirig par son Kaiser,
lAllemagne, aprs plus de cinquante ans de prparation intensive la guerre, va jeter la
face des peuples le dfi de son orgueil et de ses canons. Et pendant quatre annes ce sera la
guerre la plus pouvantable de tous les sicles. Le 46 va la vivre, avec toutes ses souffrances,
ses privations, ses fatigues, jusquau jour o ces quatre annes defforts seront couronnes par
la plus belle des victoires : lanantissement de lAllemagne vaincue.
LA MOBILISATION
AOUT 1911 Laffiche annonant la mobilisation gnrale, appose sur tous les murs, rend
les curs anxieux. Les derniers vnements disent assez que lAllemagne veut la guerre et
tous les Franais sentent se rveiller en eux le souffle le plus ardent patriotisme.
Fontainebleau et la caserne de Reuilly, o la mobilisation du 46 seffectue, prsentent une
animation des plus grandes. Par petits groupes, ceux qui, hier encore, travaillaient dans le
calme de la paix, arrivent au corps. Ils vont changer leurs effets civils contre luniforme du
soldat de France et, le fusil la main, se dresser de tout leur courage contre la horde
envahissante des Huns du XXe sicle.
Dans l'enthousiasme dlirant des premiers jours, des volontaires viennent grossir les rangs.
Lun deux est COLLIGNON, conseiller dEtat, ancien Secrtaire Gnral de la Prsidence de
la Rpublique, officier de la Lgion d'honneur. Il a 56 ans. Ce patriote barbe grise part
comme simple soldat au milieu des jeunes troupiers de 1914. Et le 46 Rgiment de LA
TOUR DAUVERGNE, o la mmoire du glorieux hros est sans cesse voque, joindra le
souvenir de Collignon a celui du Premier Grenadier de France.
Le 6 aot, le 1er
bataillon part de Fontainebleau. Le 7, les 2 et 3 partent de Paris. A la gare,
une foule les accompagne et les acclame. Tout le monde a confiance. Les trains sont couverts
de verdure et de fleurs. Lorsquils sbranlent, un seul cri jaillit de toutes les poitrines... Vive
la France ! . Sur les quais, noirs de monde, les accents de la Marseillaise montent, larges et
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puissants. Et les mres et les pouses, les yeux voils par les larmes, que la sparation fait
couler, sentent dans cet enthousiasme un courage nouveau et l'esprance ranimer leurs curs
douloureux.
Le colonel MALLETERRE commande le rgiment. Il a su, par ses conseils et son exemple,
dvelopper chez tous ses hommes les belles qualits natives qui font du Franais le premier
soldat du monde. Il conduira son unit au combat jusqu'au jour o, grivement bless, il devra
abandonner son commandement.
Les trains roulent vers lEst. Sur le passage, ce ne sont quacclamations. Le 46 va prendre sa
place dans la mle : officiers et soldats n'ont plus quune pense, accomplir leur devoir l-
bas, pour empcher les Allemands de souiller le sol de la patrie.
LA BATAILLE DES FRONTIERES ET LA RETRAITE DE 1914
Le 8 aot, le 46 dbarque Banoncourt, dans la Meuse, Il fait partie de la 10 division, du 5e
corps darme, affect la IIIe Arme commande par le gnral Ruffey. Cette arme est
oppose celle du Kronprinz et, grce la rsistance hroque dont Verdun sera le pivot, va
permettre lexcution de la manuvre qui se terminera par la victoire de la Marne.
Lordre d'un mouvement gnral d'offensive est donn. Le 46e
remonte la Wovre dans la
direction de la frontire belge. Le premier contact srieux na pas lieu encore. Seuls quelques
dtachements dclaireurs, qui devancent d'assez loin le gros des forces ennemies, sont
repousss. Un peloton de chasseurs, mis la disposition du rgiment, sabre Hermville un
groupe de uhlans suprieur en nombre et ne subit que des pertes lgres.
Mais nous voici aux environs de Longwy que le Kronprinz assige. Le gros des forces
allemandes est l. Les soldats de 1914 vont recevoir le baptme du feu. La premire bataille
va sengager, elle commence dans la soire du 21 aot, sur la ligne Cosne-Romain- Gorcy.
Le combat est trs dur. Lennemi a pu amener de lartillerie lourde et nous navons pour lui
rpondre que le feu de nos 75. Partout des mitrailleuses. Les Allemands en ont plac jusque
sur les toits des maisons de Romain. Le 22 au soir, lordre est donn de battre, en retraite. En
bon ordre nos troupes se replient, Mais derrire la IIIe arme franaise lennemi avance. Il faut
contenir ses avant-gardes pour ralentir sa marche. Des combats pied pied sont engags
Nors, Villers-sous-Mangiennes,Saint-Laurent-sur- Othain, Damvillers, et permettent
darrter son lan. Le 46 repasse la Meuse Sivry. La retraite continue. Pour se conformer au
mouvement gnral, il faut abandonner les belles positions qui dfendent le passage de la
rivire. Nous voici Monfaucon, Montblainville, l, un premier renfort de 1.200 hommes
arrive pour combler les vides causs par les premires batailles.
Dj au cours des premiers engagements, parmi les enfants de France, des hros se sont
rvls. Dans cette floraison de braves qui commencent surgir de la sanglante mle, citons,
le premier de, tous, le vieux Collignon dont la citation logieuse qui suit rappelle la belle
conduite sous les premiers obus dos canons ennemis.
Ordre de lArme : Soldat Collignon, Conseiller dEtat, officier de la Lgion d'Honneur. Sest
engag pour la dure de la guerre au 46, a pris part aux combats des 22 et 24 Aot. Plac la
garde du Drapeau a donn lexemple des plus belles vertus militaires. t surnomm par les
hommes Le Second La Tour d'Auvergne .
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BATAILLE DE FOSS
Parmi, les combats destins gner l'ennemi dans le passage de la Meuse, il en est un auquel
le 46 prit une part importante ; ce fut celui de Foss (30 et 31 aot 1914). Les Allemands
sont dans le bois, lEst du village. Ils cherchent en dboucher. Trois fois dun lan
superbe, le 46 charge la baonnette. Il bouscule les tirailleurs ennemis. Ceux-ci, voyant
limpossibilit darrter ce renouveau de Furia Francese , se couchent dans les bls et font
feu dans le dos de nos vaillants soldats. La lutte se poursuit dans les bois toute la nuit avec
acharnement : Franais et Allemands sont mlangs. C'est un succs pour nos armes, mais il
nous cote cher : 900 hommes sont hors de combat.
Il faut le lendemain reprendre la retraite. Sur les routes de la Meuse que brle le soleil daot,
le rgiment marche. Il reprend position dans la rgion de Cierge-Eclissefontaine. La 10 D.I. a
pour mission de protger le mouvement du IVe corps franais qui s'embarque Revigny, pour
aller rejoindre lArme Maunoury dans la rgion parisienne.
Un nouveau combat s'engage, brillant pour nos armes. L'ennemi recule et subit de lourdes
pertes, mais malgr ces succs, il faut toujours reprendre la marche vers le Sud. Le rgiment
longe cette fort dArgonne qui, plus tard, va devenir son champ de bataille durant de longs
mois. Il passe Varennes, Clermont-en-Argonne, Rarcourt, Froidos, et continue son
mouvement jusque dans la rgion de Revigny.
On est au 6 septembre. Maintenant cest l'arrt. Il faut protger Bar-le-Duc. Dans la plaine de
Revigny et sur les vertes collines du Barrois, une bataille va s'engager. C'est la bataille de
Brabant- le-Roi. Le Rgiment va y prendre une part intense. Le combat est terrible, nos pertes
sont lourdes. On doit supprimer un bataillon. Le gnral Roques, qui commandait la Division,
est tu en premire ligne. Des soldats du 46 ramnent son corps. Il faut reculer encore, cder
un peu de terrain. Le repli seffectue-jusque sur le plateau de Vassincourt.
LA MARNE ET LA POURSUITE
Nous voici au 7 septembre. Lordre du jour du gnral Joffre est arriv. Il faut se faire tuer sur
place plutt que de reculer d'un pas. Lenthousiasme rgne. Lesprance renat dans tous les
curs, aprs la longue retraite dmoralisante : Enfin on va attaquer ...
La bataille dcisive, la bataille de la Marne sengage.
Autour de Vassincourt, pendant quatre journes, le combat fait rage. Le village est perdu, puis
repris en une charge brillante, puis reperdu encore. Du rgiment, 6 700 hommes peine
restent Le colonel Malleterre a t grivement bless, le 8 septembre. Le commandant Darc,
au calme et au courage lgendaires, a pris le commandement.
Vassincourt restera pour tous ceux qui combattirent en rase campagne avec le 46 le combat le
plus mmorable du dbut de la guerre.
Des miracles dhrosme y furent accomplis, souvent pays dune mort glorieuse. On ne
pourrait citer tous ceux dont le sublime sacrifice aida la victoire. A cette poque de la guerre
le Livre dOr des citations ntait pas encore ouvert pour fixer jamais la gloire de tous ceux
qui furent des exemples de bravoure durant ces premires journes.
Retirs de la ligne de feu, les quelques lments chapps de la bataille sont rassembls
Chardogne le 11 septembre.
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A 11 heures du soir, ils se remettent en marche pour attaquer le village de Laimont, qui brle.
Laimont est enlev dans un assaut superbe.
Devant nous, comme sur tout le front, lennemi commence battre en retraite son tour.
Partout il recule, et malgr les fatigues endures, une force, une nergie nouvelle renaissent.
Tous les curs sont joyeux. Une grande victoire aurole nos drapeaux : la Marne, dont les
consquences sont terribles pour lAllemagne.
Dans les rgions traverses quelques jours auparavant, nos soldats repassent en vainqueurs.
La poursuite derrire un ennemi qui fuit ne laisse pas de repos. Quelques gars sont pris. On
change des coups de feu avec des tranards.
Voici lArgonne, ladversaire sest ressaisi. Il a pris position en des points reconnus davance
et organiss. Il contre-attaque nergiquement la ferme Srieux, Vauquois, Montblainville,
Cheppy, Montfaucon. Une lutte terrible sengage en pleine fort, la cote 263 et la cote 207;
nous devons cder du terrain jusque prs de Neuvilly.
Mais lennemi est puis. Des deux cts, des tranches se creusent. On se terre les uns en
face des autres. Les trous de tirailleurs o le soldat cherchait un abri vont se runir. Bientt ce
seront des lignes continues ; des positions vont sorganiser. Aux premiers jours doctobre, la
stabilisation est complte. Une nouvelle guerre commence aussi dure, aussi terrible, c'est la
guerre de tranches.
LARGONNE
A la fin du mois doctobre 1914, le rgiment se trouve en face de Vauquois. Ce village,
perch sur une colline abrupte, domine toute la campagne environnante. La position
commande la valle de lAire, depuis Varennes jusqu' Clermont. Du haut, de cet observatoire
merveilleux lennemi surveille toute la plaine de notre ct et a des vues jusqu la ligne de
chemin de fer Sainte-Menehould-Verdun.
Une premire attaque contre cette position formidable est dclenche. Un bataillon y prend
part. Parti des tranches de la Maize, 2.000 mtres de Vauquois, il arrive jusqu la
Cigalerie, une ferme au pied de la butte. De l, quelques mois plus tard, partiront les grandes
attaques, qui nous permettront de gagner la crte.
En novembre, la 10e D. I. va occuper un secteur dans la fort dArgonne, Cette fin de 1914 a
t, pour ceux qui ont vcu les journes et les froides nuits dhiver en premires lignes,
lpoque la plus pnible de la guerre. Dans cette fort touffue, coupe de ravins profonds, il
faut surveiller un ennemi invisible et cela dans des conditions matrielles pouvantables. Les
tranches existent peine. La plupart sont inondes et une boue paisse les rend difficilement
praticables.
Pas dabris et cest lhiver. Sous la pluie et la neige, par le froid, par le givre, nos soldats sont
toujours vigilants, subissant tout, supportant privations et fatigues.
Le ravitaillement est difficile. A travers les layons, les voitures sembourbent. Par les nuits
sans lune, sous le ciel couvert la marche vers les premires lignes est trs dure.
Le jour, cest le bombardement avec les premiers engins de tranches. Les projectiles aux
formes bizarres, bourrs de cheddite, explosent de toutes parts, mls au tir intermittent de
lartillerie. Et sitt que les premires ombres du soir stendent sur la fort, la fusillade
commence, incessante, jusqu'aux premires lueurs de l'aube.
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Il faut savoir ce que fait un ennemi quon ne peut voir travers les grands arbres. Des
patrouilles partent, cest au cours de ces randonnes sous bois que s'illustre le soldat
Collignon, toujours volontaire pour aller au danger.
On se tient sur ses gardes. En face, se trouve llite de lArme allemande que le Kronprinz
commande en personne. Et lon sait que celui-ci cherche atteindre la voie ferre de Verdun,
pour empcher le ravitaillement de notre forteresse.
Plusieurs attaques ennemies se dclenchent. Le 46 en ligne Bolante, repousse
victorieusement les vagues dassaut allemandes, le 20 dcembre 1914, malgr des pertes
sensibles.
Mais, le 8 janvier 1915, aprs un violent bombardement de nos lignes, lennemi russit
s'infiltrer, aux Meurissons, par un trou qui sest produit entre deux rgiments. Un dur combat
sengage. Dans les tranches, nos compagnies sont attaques la fois de front et dans le dos.
Cest une lutte corps corps acharne, terrible. Cerns de toutes parts, crass par le nombre,
nous devons cder. L'ennemi nira pas loin. Une compagnie est en rserve, sous les ordres du
lieutenant Courts. Avec le plus grand calme, dans cette situation presque dsespre, il
rassemble ses hommes, tablit une ligne de dfense avec sa compagnie et les lments du 46
qui ont russi schapper de la fournaise. Sous les ordres de ce chef, qui donne lexemple
tous, bravant le danger, la ligne rsiste et les assauts ennemis viennent se briser sous le feu de
nos mitrailleuses. Le combat dure depuis plusieurs heures, mais les Allemands ne gagnent
plus un mtre de terrain. Des renforts arrivent qui vont rtablir la situation.
Dans ce combat meurtrier o de tous cts les actes de bravoure se multiplient, citons, ct
du lieutenant Courts, fait chevalier de la Lgion dhonneur pour son admirable courage,
lhroque conduite du sergent Amiet, dont, la citation suivante et la mdaille militaire relatent
les hauts faits :
Le 7 janvier 1915, a pris le commandement dune section. Par son nergie et son courage,
il rsista lattaque allemande qui essayait de tourner sa gauche et lui fit prouver des pertes
normes. Comme quelques hommes, dmoraliss, par la violence de lattaque, essayaient de
reculer, debout sous les balles, il les ramena sur la ligne et repoussa toutes les tentatives de
lennemi.
Nos pertes ont t lourdes. Le commandant Darc, ce chef aim de tous, a trouv la mort dans
le combat. De nombreux officiers ont t tus, beaucoup d'hommes ont disparu.
Le colonel Roller, qui commandait le rgiment, a t bless, ainsi que le mdecin Gerbault
dont le dvouement et la bravoure faisaient ladmiration de tous.
Le 46, puis par un sjour aux tranches qui avait t long, et par leffort fourni pour enrayer
la formidable attaque allemande des Meurissons, va se reformer larrire.
LES ATTAQUES DE VAUQUOIS
Nous sommes en fvrier 1915. Depuis plus de quatre mois que le front est stabilis, les
positions se sont organises. Le systme des tranches a t adapt la dfense du terrain
qu'on occupe. Les premiers abris se sont creuss, dans lesquels les troupes en rserve se
reposent. Des rseaux de fil de fer protgent les premires lignes.
Aprs un repos dans la rgion de Saint-Andr, la 10e D. I. part pour attaquer Vauquois. De ce
village, situ sur une colline abrupte, entre la Meuse et la fort dArgonne, lennemi a fait une
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position formidable, il ne veut pas perdre cette sentinelle avance dans la valle de lAire,
do il peut surveiller tout le pays, de notre ct, jusqu' Clermont-en-Argonne.
A travers les maisons croules, il a construit tout un systme de tranches et de boyaux. Il se
terre dans les caves et dans ses abris solides, se croit invulnrable. Vauquois est pour les
Allemands une forteresse contre laquelle tous nos assauts doivent se briser.
Le 17 fvrier 1915, une premire attaque a lieu. Le 46 est en rserve dans la fort de Hesse.
Lattaque ne russit pas.
On va la recommencer les 28 fvrier et 1er
mars, cette fois avec succs. Au pied de cette butte
pic, le 46 est en ligne, sous le commandement du colonel Simon, ct du 89. Une forte
prparation dartillerie incendie la colline. El pour dfoncer les caves o lennemi se croit en
sret, les 270 de marine tirent, avec prcision. La route est ouverte nos troupes dassaut.
L'attaque va se dclencher. Il est 9 heures 15. La musique du rgiment, masse au pied de la
butte, dans le ravin o pleuvent les obus, entonne la charge. D'un lan superbe, nos soldats
gravissent la pente abrupte et le bruit des clatements se mle aux accents de la Marseillaise.
Des musiciens tombent, mortellement frapps. Sous la direction du sous-chef do musique
Laty, les survivants continuent leur hymne au milieu des clameurs de la bataille et du fracas
des explosions.
Nos premires vagues sont sur le plateau, et plusieurs fractions pntrent jusquau centre du
village. Mais l'ennemi se ressaisit : Vauquois est devenue l'objectif de toute l'artillerie quil a
masse, droite, dans le bois de Cheppv et, gauche, dans la fort dArgonne. Nos positions
sont prises en enfilade. Nous avons de la peine nous maintenir, car nos pertes sont lourdes.
Lennemi nous contre-attaque et nous refoule. Nous devons redescendre les pentes de la
colline. Il faut recommencer la prparation d'artillerie, rorganiser les troupes d'assaut
Le 1er
mars midi, l'attaque nouveau se dclenche. Toute la 10 D. I. y prend part. Le 46 est
encore en premire ligne. Malgr les perdes de la veille, malgr les rafales des mitrailleuses,
malgr lartillerie qui tire sans arrt, il escalade nouveau la colline.
Cette fois nos compagnies parviennent se maintenir jusquau centre du plateau. Les autres
rgiments de la D. I. atteignent aussi le village. Pendant trois jours, ce ne sont que combats
incessants. Lennemi contre-attaque. Il est repouss.
Sous les feux denfilade de Cheppy et de Boureuilles notre nouvelle disposition sorganise,
quelques mtres des Allemands.
Le 4 mars, le rgiment est relev par les coloniaux. Une violente contre-attaque a lieu au
moment mme de la relve. Elle est repousse.
Le 46 va au repos : nos pertes sont lourdes. Certaines compagnies ont perdu tous leurs chefs
de section. 1.000 hommes ont t tus ou blesss. Mais la plus grande partie de Vauquois est
nous ; lennemi est priv de son observatoire.
Comment relater tous les exploits qui furent accomplis durant ces violents combats ! Le
sergent-fourrier Bardet, slanant la tte de sa section, et sonnant lui-mme deux fois la
charge. Le sergent Lvque, entranant ses hommes en leur disant : Je marche en tte, jai
confiance en vous, suivez-moi ! et tombant peu aprs ; le lieutenant Borel, nabandonnant la
ligne quaprs avoir t deux fois bless ; le capitaine Lledos entranant ses hommes lassaut
malgr trois blessures ; le sous-lieutenant Casenave donnant tous lexemple du courage ; le
mdecin aide- major Vincent, le mdecin auxiliaire Fouchet pansant les blesss sous la
mitraille.
El que d'autres dont lhroque courage fut un des facteurs du succs de nos armes !
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Le 15 mars, alors que le 46 tient nouveau les tranches sur la butte, le 76 attaque et russit
progresser, malgr les feux terribles de ladversaire. Le rgiment subit la raction de
l'artillerie ennemie au milieu du chaos des maisons croules, dans des tranches peine
creuses que les obus bouleversent.
Ce jour-l, le soldat Collignon trouve la mort, en se prcipitant au secours d'un camarade
bless, auprs de la ferme de la Cigalerie. Cest une belle figure qui disparat. Cet homme de
devoir a toujours suivi le rgiment, encourageant ses camarades par lexemple et par la parole,
refusant les galons dofficier afin de rester prs du soldat quil aimait profondment.
Fin mars, une attaque allemande russit nous prendre une tranche grce lemploi de
liquides enflamms. Quelques lments d'un bataillon du 46 reprennent le terrain perdu, par
une vigoureuse contre-attaque la grenade.
Les 5 et 6 avril, une dernire tentative du 89 pour semparer de la totalit de la butte est
empche par le mauvais temps. Ce sera, fini, on va rester sur les positions conquises et des
mois vont se passer, o Franais et Allemands, quelques mtres les uns des autres, vont se
faire la guerre la plus terrible et la plus tenace, la guerre de mines et d'engins de tranches.
Sans que jamais aucune progression seffectue daucun ct, Vauquois va devenir un enfer et
les pertes seront cruelles.
LE SJOUR A VAUQUOIS
Le rgiment reste Vauquois de mars 1915 juillet 1916. Sur ce volcan en ruption
constante, o les engins de mort les plus formidables pleuvent de tous cts, les soldais du 46
doivent faire preuve dune tnacit exemplaire. Les relves sont dures ; de Parois,
dAubrville, de Vraincourt, le rgiment se dirige travers la fort de Hesse, vers la colline.
Le silence de la nuit est seulement coup par l'clatement des obus envoys par les Boches sur
les routes de ravitaillement.
On arrive aux Ailleux , et l, la lueur des fuses clairantes, la butte apparat sous son
aspect sinistre. Trois boyaux zigzagant sur son versant sud sont les seuls chemins conduisant
au sommet. Et pour les atteindre, il faut traverser dcouvert la rgion boise de la barricade,
o de temps autres les canons de Cheppy envoient des rafales. Puis le ravin de la Cigalerie,
ravin de mort, o quelques gabions, tous les jours dmolis, sont une protection inefficace. Le
Boche le sait, et, la nuit, comme tout le ravitaillement, toutes les relves sont obligs de passer
dcouvert, il balaye le ravin coups de canon.
Puis, cest la dure ascension de cette butte presque pic. Pendant que dans l'attente de la
relve, l-haut en premire ligne, la lutte de grenades continue, il faut, avec le moins de bruit
possible, rejoindre son poste de combat, quelques mtres de lennemi. Faire du bruit, rvler
un mouvement quelconque chez nous, cest dchaner un crapouillotage, transformer la butte
en un brasier ardent, et dans les troits boyaux, ce moment-l garnis de monde, cest semer
la mort.
Que de pertes ainsi, aprs l'attaque de mars, alors que dans les tranches, peine bauches,
tous les jours dtruites, nous restions sans abri, sous les crapouillots et sous le tir denfilade de
Cheppy et de Boureuilles.
Les premiers mois sont durs. Dans les premires lignes, nous sommes porte des grenades,
et des grenadiers franais et boches en changent tout l jour et toute la nuit.
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Nos grenadiers font des merveilles ; la citation de lun deux, le soldat Bousquet, dira avec
quelle ardeur ils soutenaient le combat contre lennemi :
Soldat Bousquet ; de service aux tranches et trs grivement atteint au ventre par un clat
de grenade. A nanmoins continu riposter coups de grenades jusqu ce que la rafale ft
termine. Alors seulement sest proccup de se faire panser, disant en partant : Tenez bon,
les amis, je reviens .
En arrire sont installs les crapouillots, mortiers de toutes sortes, lanant les engins de tous
calibres, depuis le projectile de 3,5, jusqu' la torpille de 58. Les Boches nous rpondent avec
des minen normes qui psent jusqu' 100 kg et font un bruit formidable en explosant.
Les premiers abris ne rsistent pas de tels engins ; combien se sont crouls en ensevelissant
les occupants !
Cest alors quon se met faire des sapes et la vie sous terre commence dans les nombreuses
galeries qui se creusent.
Les forces doccupation ont t diminues. Alors quaux premiers jours, les hommes taient
presque au coude coude dans les premires tranches, il ne reste plus que quelques veilleurs
dans les petits postes. Le gros des forces est dans des abris srs, prt se rendre en ligne si
lennemi attaque. Et alors quaux premires semaines dnormes pertes taient comptes dans
les rgiments qui ne restaient pourtant que quatre jours en ligne, il ny avait plus, la fin, que
des pertes lgres, parmi le 46 et le 31 qui se relvent mutuellement tous les douze jours
environ.
Raconter lhistoire de Vauquois, cest, faire lloge dun soldat qui restera lgendaire au 46 :
le crapouilloteur. Pendant que des centaines de projectiles pleuvent la fois, il est seul sur la
butte. Tout le monde se terrait dans les abris aux premiers clatements.
Lui- (cest son devoir et le mtier pour lequel il a t volontaire) doit rester auprs de ses
pres et, sitt la rafale ennemie apaise, rpondre par une rafale plus forte. Souvent ses
mortiers sont enterrs, il le change de place, guettant les projectiles ennemis qui circulent dans
l'espace, se gardant toujours, car il a acquis une grande habitude. Et au milieu des explosions,
dans le feu et la fume, il charge encore, rallume ses mches et ne sarrte quaprs avoir eu le
dernier mot.
Les bombardiers ont t admirables. Dirigs par les Rio, les Maus, officiers donnant
lexemple et tirant eux-mmes le crapouillot, ils ont jou avec la mort durant des journes
terribles, le sourire aux lvres, pour dfendre leurs camarades.
Dans les tranches bouleverses, ils taient, aprs le bombardement, la pelle la main, pour
remettre leurs batteries en place. Aussi sur la poitrine de tous ces braves, fiers de la tche
quils ont remplie, on voyait la croix de guerre orne de multiples toiles.
A cette guerre dengins de tranches et de grenades, une guerre plus terrible encore, plus
tratresse va se juxtaposer. Cest la guerre, de mines. Le 23 mai 1915, la premire mine
allemande explose, mettant prs de cent hommes hors de combat.
Alors, sur le front troit du plateau, les puits se creusent, senfoncent ne plus en plus,
cherchant aller sous les tranches de l'adversaire pour le faire sauter.
Les sapeurs, nuit et jour, travaillent, et comme lennemi creuse aussi de son ct, on cherche
passer au-dessous de sa galerie pour lui dmolir son travail.
Tous les jours des camouflets et des mines explosent.
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Dans les galeries, des sapeurs sont ensevelis. Dans les sapes, le gaz meurtrier fait son ouvrage
de mort. Cest alors un assaut de courage entre tous pour dlivrer les camarades. Parmi ceux
qui, au pril de leur vie, cherchent ravir la mort une proie certaine, le lieutenant Ducrot,
pntrant dans une sape envahie par les gaz, aprs une explosion, put retirer son capitaine et
quinze hommes vanouis.
Aprs lexplosion, cest le crapouillotage qui commence.
Le soir, ce sont des coutes au gophone pour savoir si lennemi nest pas au-dessous de
nos abris.
Cette vie sur Vauquois, dans l'anxit constante de la mort affreuse dans un abri profond o
une mine peut vous enterrer, demande une force morale trs grande. Aussi est-on heureux de
se dtendre un peu quand le rgiment va bivouaquer la Barricade, au Rendez-vous de
Chasse, ou se reposer en arrire, Aubrville ou Parois.
En juillet 1915, alors que le rgiment est Parois, une forte attaque ennemie se dclenche, en
Argonne, la Haute-Chevauche. Le Boche russit enlever nos premires lignes, grce
lemploi dobus gaz.
La division est envoye, pour rtablir la situation, travers les ravins o les gaz sjournent,
nayant comme protection que les premires lunettes et le premier tampon ; le 46 dirige vers
la cote 263, o il doit contre-attaquer. Deux bataillons sont engags et russissent arrter
leffort des troupes du Kronprinz. Celui-ci ne peut exploiter son succs de la veille.
Aprs un repos de quelques jours Clermont-en-Argonne, c'est encore Vauquois, ses
crapouillotages et ses mines.
Le ravitaillement devient difficile dans les derniers jours de fvrier, alors que vers l'Est la
grande attaque sur Verdun se dclenche. Les routes sont bombardes, les voies Decauville
sont coupes. Dans la fort de Hesse, les obus gaz tombent. Sur la droite, jusqu la Meuse,
cest une fournaise.
A quelques kilomtres, Avocourt, Malancourt, 304, Mort-Homme ne sont que des incendies.
Sur la butte il faut veiller. Les nerfs se tendent et les Allemands bombardent plus fort.
On ne peut voquer les nuits de veille sur Vauquois sans signaler, parmi tous ceux qui firent
preuve de courage durant les longues heures de quart, lacte de bravoure du caporal Durand,
de la 5 compagnie.
Cest une nuit dhiver. Durand est de quart avec son escouade. On veille. Tout coup, dans
les fils de fer, un lger bruit se fait entendre. Aucune patrouille de chez nous nest dehors. Ce
ne peut tre que lennemi. Aux crneaux, les fusils sarment, prts faire feu sur la premire
ombre. Durand ne bronche pas. Rsolument il enjambe le parapet et va vers le rseau de fil de
fer, son arme la main. Il aperoit deux hommes, ce sont des Boches. Seul, il se prcipite sur
ces ennemis qui, surpris, lchent leurs armes et se rendent au courageux caporal.
Ces deux prisonniers viennent point pour donner des renseignements au commandement
franais.
En mars, lactivit est plus intense. Une mine franaise explose et fait sauter les tranches
ennemies. Le 46 russit occuper la lvre sud de lentonnoir et install un petit poste auprs
de remplacement de lglise de Vauquois.
Mais, le 14 mai, lennemi prend sa revanche. Une mine charge de plus de 60 tonnes
dexplosifs fait sauter le saillant N.-O. de la Butte, nous ensevelissant le peloton qui
loccupait. Un violent bombardement suit aussitt. On croit, lattaque et des pertes nous
sont, infliges ; les Allemands nattaquent pas ; notre barrage les cloue sur place. Autour de ce
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cratre de prs de soixante mtres de diamtre, des petits postes s'organisent. Cette mine cote
120 hommes, presque tous tus.
Deux mois se passent encore sur Vauquois.
Sous le commandement des colonels Simon, Le Bouhelec et Jouinot, durant une anne et
demie, le 46 a occup ce secteur difficile, devant un ennemi qui avait ses premires lignes
quelques mtres. Sur cette butte qu'il a conquise, et o pendant des mois le mme combat
meurtrier sest droul sans interruption sous le feu des minenwerfers crachant leur
mitraille, le rgiment de LA TOUR DAUVERGNE a crit une belle page glorieuse.
Relev en juillet, le 46 est emmen dans la rgion de Saint-Dizier et au camp de Mailly afin
de se r entraner et de s'initier aux nouvelles mthodes dattaque.
LA BATAILLE DE LA SOMME
Aprs la priode dinstruction au camp de Mailly, le rgiment cantonne quelques jours dans la
rgion dAmiens, puis est amen au camp n 7 prs de Cerisy-Gailly.
Le VIIe C. A. a pris Bouchavesnes le 12 septembre. Le Ve C. A. le relve et reoit la mission
de dboucher du village et de stablir dans le bois de Saint-Pierre-Vaast
La 20 brigade est engage la premire. Le bataillon Se, du 46, est mis sa disposition et va
bivouaquer au ravin de lAiguille. Les deux autres bataillons occupent des tranches prises
aux Boches lors des premires batailles, tranches de Sivas et de Mossoul.
Dans la Somme, la lutte dartillerie est intense. Le moindre petit bois, le plus petit ravin, les
haies et les talus cachent des canons qui tirent sans arrt. Parfois mme, au milieu de la plaine,
compltement dmasques, des batteries sont en pleine action ; sur les routes improvises, en
plein jour, les lourds chariots d'artillerie viennent approvisionner leurs pices.
Depuis plus d'un mois que dure la bataille, les Boches ont en le temps d'accumuler en face de
nous, beaucoup de leurs pices lourdes. Comme nous ils tirent sans arrt, et les 150 et 210
tombent sur ce champ de bataille o la zone de feu est de plusieurs kilomtres. Tir
ininterrompu de nos canons, explosions dobus ennemis, brouhaha de lourdes voitures
cahotes, tout cela fait un effroyable vacarme dans la plaine aride.
Dans cet enfer, les bataillons attendent lheure o leur tour dattaquer viendra.
Huit journes et huit nuits, sans abris, sous le feu des pices lourdes ennemies, nos braves
soldats supportent l'action effroyablement dmoralisante des obus qui sment la mort.
Le mauvais temps aggrave la situation, une pluie fine tombe et le sol nest plus quune flaque
de boue.
Le 20 septembre, le bataillon du ravin de lAiguille reoit lordre de se porter au secours du
331, violemment attaqu dans Bouchavesnes.
Le commandant Se, en plein jour, russit lui faire traverser sans grosses pertes la crte en
avant du village, malgr le barrage ennemi.
Immdiatement engag, le 1er
bataillon du 46e aide repousser les assauts ennemis.
Quelques jours plus tard, les deux autres bataillons relvent le 331e et vont prendre part une
attaque gnrale, dirige sur le bois Saint-Pierre-Vaast et lEpine de Malassise.
Cest le 25 septembre. Sous les ordres des commandants Lledos et Sainneville, les 2 et 3
bataillons vont attaquer.
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Le barrage est trs dense. Lartillerie ennemie fortement renforce creuse des vides dans nos
lignes.
Au P. C. prs de lEglise de Bouchavesnes, on attend lheure de lassaut.
Devant nous, les Allemands, abandonnant leurs tranches repres, se sont tablis dans les
trous d'obus avec des mitrailleuses. Ces nids de mitrailleuses smeront la mort dans nos rangs.
Invisibles, le hasard seul peut les faire atteindre.
Il est lheure. Les vagues d'assaut partent. La fusillade ennemie commence crpiter. Des
chefs, des soldats tombent, des sections n'ont plus de grads. Mais les plus braves prennent le
commandement.
A la 10e compagnie, le caporal Vassal, restant seul grad dans une section, lentrane en avant,
avec une nergie superbe, et tombe frapp mort en s'criant : En avant ! En avant ! Je suis
heureux de mourir pour la France !
Dans une autre fraction, le clairon Christiaens entrane irrsistiblement tout un groupe en
montant sur le parapet et en criant : En avant, camarade !
Vaillamment on parvient gagner 300 mtres de terrain. Mais l on doit sarrter, au contact
de la premire ligne ennemie, sous les rafales de mitrailleuses de lEpine de Malassise.
Le lendemain, une nouvelle attaque nous permet de gagner encore un peu de terrain.
Ces deux jours dassaut hroques, dans des conditions difficiles, par des troupes qui depuis
deux semaines sont exposes au feu de lartillerie ennemie, nous cotent de fortes pertes.
Le commandant Lledos a t mortellement bless. De nombreux officiers ont t tus ou
blesss. Nous avons perdu plus de 1.500 hommes.
Mais le sacrifice du 46e na pas t inutile. L'ennemi ayant concentr sa rsistance sur
Bouchavesnes, la gauche des armes franaises et les armes britanniques ont pu achever la
conqute de Combles et de Rancourt.
Pendant ces actions, la 9e Cie du 46
e, sous le commandement du lieutenant Rio, s'est couverte
de gloire. Elle est cite lordre du 5e corps darme (n 30) avec le motif suivant :
Le 25 septembre 1916, brillamment commande par le sous-lieutenant Rio, sest porte
lattaque dune faon merveilleuse, sous les barrages dartillerie et les violents tirs de
mitrailleuse, a gagn 400 mtres et, malgr des pertes sensible, a repouss une contre-
attaque ennemie et conserv tout le terrain conquis.
Le rgiment, relev, prend quelques jours de repos dans la lgion Cerisy-Gailly, puis remonte
en secteur, le 11 octobre, devant le bois de Saint-Pierre-Vaast.
Pendant deux semaines, sous une pluie continuelle, dans une boue paisse, sous le tir
ininterrompu des canons ennemis, il assure la lourde tche dorganiser ce secteur boulevers
par les dernires attaques et de le dfendre contre un adversaire qui voudrait le reconqurir.
Sur les vallonnements de ce dsert aride qu'est le champ de bataille de la Somme, tout un
systme de tranches est creus. Des boyaux sont tablis vers larrire, et quand le rgiment
est relev, il est, reconnu quil a accompli leffort maximum quon peut exiger dune troupe.
Des camions lemportent loin de ces plaines grises, de ces ravins boueux o tant de braves
sont tombs, vers les riantes prairies de Normandie o un mois de repos lui permettra de se
reformer.
De la rgion de Forges-Gaillefontaine, le rgiment part passer les premiers jours de dcembre
Mailly-le-Camp ; puis, dans lAisne, Beaurieux, do il va prendre les tranches devant
Craonne et sur le plateau de Vauclre.
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LOFFENSIVE DAVRIL 1917
En dcembre 1916 et janvier 1917, le rgiment occupe le secteur de Blanc-Sablon, tenant un
front de trois kilomtres au pied de la hauteur de Craonne et sur le plateau de Vauclre. Le
sjour est calme. De notre ct on excute les travaux de prparation pour la grande offensive
davril.
Aprs un repos Lhery-Lagery, le 46e se trouve dans la rgion de Roncy-Vantelay. Un de ses
bataillons va occuper le futur secteur dattaque du rgiment, les deux autres travaillent aux
prparatifs pour la grande offensive davril.
Notre secteur dattaque est une grande plaine o se dessinent les tranches ennemies. Dans ce
terrain, au sous-sol crayeux, elles sont visibles la ligne blanche des terres rejetes.
Devant nous le systme ennemi de dfense est puissant, les tranches nombreuses, l'on peut
suivre au loin le trac des boyaux jusque dans les bois o lon peut circuler dcouvert.
gauche de notre secteur, la montagne de Craonne srige comme une menace perptuelle.
Son peron abrupt, la teinte sombre, aux flancs ravins par les tirs des canons, merge de la
plaine comme le dos norme dune bte de lApocalypse. Cest un observatoire do rien ne
peut chapper aux yeux des Allemands.
A droite, les mamelons du bois des Buttes, aux arbres hachs par les obus, sont, pour
lennemi, une sentinelle avance, et un observatoire plus dangereux encore, puisquil nous
domine trs courte distance.
Entre ces deux bastions, le rgiment doit progresser dans la plaine nue et marcageuse.
Les travaux de prparation sexcutent, de jour en jour plus pnibles. Lennemi sest aperu
du bouleversement de nos tranches et cherche paralyser nos prparatifs par de violentes
rafales dartillerie.
Le mauvais temps sen mle. Plusieurs jours durant, la neige a blanchi la plaine, les boyaux
sont remplis dune boue paisse dans laquelle on ne peut marcher que trs pniblement.
Souvent, dans la nuit noire, les hommes qui transportent le matriel ncessaire aux travaux
tombent dans les trous dobus remplis dune vase glace. Vaillamment toutes les difficults
sont surmontes, et tout est prt pour le milieu davril.
Le 14, une premire attaque sur le fortin de Rotterdam est dcide. Il faut reconnatre cet
ouvrage avanc de lennemi, loccuper si possible.
Un brave du rgiment, le lieutenant Rio, est dsign pour cette tche avec un peloton de la 9
Cie et des bombardiers. Rio est l, a ira : ces mots courent de lun lautre et les soixante
hommes qui vont sauter le parapet ont confiance.
A 2 heures du matin, divis en deux vagues, qui, lune droite, lautre gauche, vont cerner
le bastion ; sur un ordre du chef qui a franchi le parapet, la troupe s'avance. Les voici dans le
rseau de fil de fer. Les cisailles font leur ouvrage. Un passage est ouvert. Rio debout sur le
parapet de la tranche ennemie montre le chemin. Les hommes pntrent dans le bastion et le
combat la grenade sengage. Mais bientt les fuses clairantes montent dans le ciel, l'alerte
est donne, les mitrailleuses crpitent. Des blesss rlent dans les fils de fer. Il faut revenir.
Rio rentrera le dernier, donnant les ordres jusquau bout, admirable de sang-froid et de calme.
Il a pu recueillir pour le commandement des renseignements prcieux.
Dans la nuit du 15 au 16, les trois bataillons prennent leurs dispositifs de dpart, face la
Redoute de la Plaine, la Courtine, la Caponnire des Champs.
Cest le 16 avril. A 6 heures, le 46, command par le lieutenant- colonel Peyrotte, slance
lassaut des lignes ennemies derrire le barrage roulant que lartillerie excute. Des brches
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ont t faites dans les rseaux boches ; les compagnies, dans un ordre parfait, avancent sans se
laisser dsunir par les obus boches qui piquettent le terrain dattaque. Quelques mitrailleuses
tirent du bois des Buttes, que le 31e doit attaquer, et de la Ville au Bois.
Les tanks entrent en action. Leur noire carapace savance lentement travers la plaine, sous le
feu des canons ennemis. Des pices de 75, amenes au galop jusque sur le champ de bataille,
prennent position quelques centaines de mtres des Boches.
La premire ligne allemande est enleve aprs un sanglant combat la grenade. Toute sa
garnison est tue ou prisonnire. Et, tandis que les nettoyeurs dsigns terminent leur tche, la
progression continue, ininterrompue, vers la route 44. Successivement toutes les tranches,
constituant la premire position ennemie, sont enleves.
Mais derrire la route, protg par un norme rseau de fils de fer, lennemi a install des
mitrailleuses et nous attend, dcid rsister tout prix.
Derrire nous, les tanks, sous lavalanche des obus, ont t ventrs. Ils gisent maintenant
dans la plaine comme des btes mortes. Sur leur armature de fer, lartillerie ennemie
sacharne encore. De temps autre, un bidon dessence prend feu et une flamme rouge monte
dans lespace.
De la Ville au Bois, un feu violent nous prend dans le dos. La progression sarrte. Quelques
fractions, emportes par leur lan, ne russissent qu se faire tuer sur les fils de fer ennemis.
Les pertes sont lourdes, il faut stopper. On organise le terrain conquis quil faut conserver
tout prix, on bouche les boyaux avec des sacs terre. Derrire ces barrages, se posent des
grenadiers rsolus. On attend la contre-attaque.
Elle a lieu vers 8 heures. Dans les boyaux de Dantzig, de la Musette, des Champs, le combat
la grenade se droule, acharn. Ladversaire est brillamment repouss. Vers midi, il contre-
attaque une seconde fois, mais sans plus de succs. Laprs- midi, des groupes ennemis
descendant vers le bois de la Casemate et la Musette, sont arrts. Nos mitrailleuses, nos
fusils mitrailleurs veillent.
Dans la nuit, quelques rencontres de patrouilles nous permettent de faire des prisonniers.
Le 17 au matin, le rgiment est relev par le 331 et va se reformer dans le bois de
Beaumarais.
Sous le commandement du lieutenant-colonel Peyrotte, le 46 venait davoir un beau succs.
Malgr les difficults du terrain et le feu meurtrier de lartillerie et des mitrailleuses, il avait
enlev dans un lan magnifique la premire position ennemie et avait su sy maintenir malgr
la violence des contre-attaques.
Malheureusement nos pertes taient lourdes : 15 officiers et 800 hommes.
LE SECTEUR DE L'AISNE.
Aprs lattaque davril, le rgiment reste en rserve quelques jours dans le bois de
Beaumarais, puis revient relever le 331e
dans son secteur dattaque. Il continue lorganisation
des tranches vaillamment conquises, du 25 avril au 6 mai.
Avec un courage inlassable, le 46e travaille sous les bombardements ennemis, trs violents
surtout dans la rgion de la route 44.
Aprs quelques jours de repos Arcis-le-Ponsart, il relve le 82 dans le secteur de la Miette.
Ce sjour du 15 juin au 10 juillet est trs pnible. De fortes pertes sont infliges par le tir des
canons lourds et par les coups de main rpts de ladversaire. On ne peut pas construire des
abris solides, car leau est fleur de terre.
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Le soir mme de la relve, une attaque de Stosstrupp se dclenche sur nos lignes. Elle est
victorieusement repousse la grenade. Et durant tout le sjour, lennemi excute de
nombreuses tentatives, prcdes par de violents bombardements par grosses torpilles et obus
gaz. Nous avons des morts, des blesss, nos pertes, surtout, sont lourdes en officiers, mais
pas un homme ne reste aux mains de lennemi et le secteur de la Miette est intgralement
conserv.
Quelques jours de repos Hourges-Unchair, Vandeuil, et le rgiment va occuper le secteur de
Chevreux-Corbeny. Il travaille lorganisation de la position, trs difficile, surtout dans la
rgion marcageuse de Tirbach.
En octobre et en novembre, alors que le rgiment est en ligne, l'ennemi opre son repli sur
lAilette, la suite de la bataille de la Malmaison. Devant le 46, il abandonne la premire
ligne le 2 novembre.
Nos patrouilles sen aperoivent, immdiatement les compagnies savancent, s'emparent des
tranches que l'ennemi vient de quitter et quil tient encore sous un violent feu d'artillerie. La
position de lEnclume, quil ne voulait pas abandonner, lui est enleve dans une srie de
violents combats du 2 au 5 novembre.
Le terrain conquis est immdiatement organis. Les tranches sont retournes face aux
Boches, au contact immdiat de leurs premires lignes et dfendues avec acharnement contre
toutes les tentatives ennemies.
La citation du commandant dune des compagnies qui prirent lEnclume, le lieutenant Ruffiot,
dira avec quelle ardeur les soldats du 46, sous les ordres de leurs chefs, donnant lexemple,
slancent lassaut.
Lieutenant Ruffiot: Ordre C.A. Le 2 novembre, sest lanc la tte de sa compagnie vers
les tranches ennemies qui ont t enleves d'un seul bond. Sest multipli pour lorganisation
en prenant avec calme et sang-froid la disposition la plus judicieuse. Le 5 novembre, a atteint
son dernier objectif en dpit dun violent bombardement A fait preuve de la plus heureuse
initiative, dun mpris absolu du danger et dune activit qui ne sest pas dmentie un seul
instant.
En dcembre, le rgiment part au repos aux environs de Paris.
LA BATAILLE DE LOISE
Dans le calme de la banlieue parisienne, les soldats du 46 gotent le repos moral ncessaire
pour oublier les fatigues imposes par plus de trois annes de guerre. Lhiver se termine. Les
beaux jours semblent revenir. Mais, avec eux, lanxit s'accrot. On sent que lanne 1918 va
tre dcisive. Pour la lutte finale, de grands combats vont sengager. Lennemi va tenter une
dernire fois la chance des batailles, il va concentrer tout son effort sur une partie dun front
depuis trois ans inbranlable, il va chercher la perce. Le 5e C. A. attend prt, parer toute
ventualit.
Dans la nuit du 21 au 22 mars, c'est l'alerte. Le front britannique a t rompu.
Des camions automobiles emportent le 46 vers lOise. II est charg avec tout le 5 C A.,
suivant lordre de son chef, le gnral Pell, de protger le cur de la France en barrant aux
Allemands la route de Paris.
Le 46 dbarque Dives et Guy.
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Le dbarquement n'est pas encore termin quil doit se porter en toute hte sur Frniches et la
cote 50. Cest une marche pnible. On na pas de chevaux ; les mitrailleuses, les canons de 37
sont trans bras dhommes pendant vingt kilomtres, et le rgiment doit traverser les dbris
des troupes britanniques qui refluent en dsordre.
Dans la nuit, le 46e atteint ses positions de combat. Des patrouilles sont faites pour connatre
la situation de l'ennemi. Au cours de lune delles, l'adjudant Patte est bless par un groupe
dAllemands revtus de luniforme franais.
Nous sommes en rase campagne. Toutes les anciennes lignes fortifies sont, depuis plusieurs
jours, aux mains de lennemi. La perce est faite. Et, dans cette bataille qui est pour lui la
dernire esprance, lAllemand a concentr tout son effort.
Le 1er
bataillon, sons les ordres du commandant Lelandais, occupe Flavy-le-Meldeux. Cest
sur lui que la premire attaque se dclenche, le 24 mars aprs-midi. Elle est arrte et fixe
300 mtres de notre ligne.
Mais, le soir, le front du 4 RI. ayant cd notre droite, nous devons nous replier jusqu la
Belle-Etoile aprs un combat pied pied.
Dans la nuit un nouvel ordre de repli arrive. Le 2e bataillon protge le mouvement et couvre
ce repli.
Au matin du 25 mars, le rgiment est en position Bthancourt, cote 81. Lennemi attaque en
masses considrables. Malgr la vaillance du 1er
bataillon qui le dfend, le chteau de
Bthancourt, situ sur une hauteur, tombe. Une contre-attaque nous le rend. Mais les
Allemands attaquent encore. Avec un hrosme farouche, le 1er
bataillon rsiste. Ses
mitrailleuses sment la mort dans les vagues ennemies. Mais peu peu le nombre de
dfenseurs diminue et le flot des assaillants monte toujours.
Brave jusqu la tmrit, le commandant Lelandais est grivement bless. Le lieutenant
Casenave, un jeune saint-cyrien quune grave blessure, reue Vauquois, a mutil, et qui,
affect un tat-major, a demand revenir au rgiment, tombe mortellement frapp.
Casenave avait dit la veille : Ils auront peut-tre notre peau, mais nous aurons les leurs
auparavant. Ce jeune hros avait tenu parole. Debout sur la ligne de feu, il allait dune pice
lautre, dirigeant le tir de ses mitrailleuses qui semaient le dsarroi dans les rangs allemands,
y faisant des ravages normes. Mais tant de courage doit coter la vie au valeureux officier.
Casenave est frapp en pleine tte par une balle ennemie.
La lutte est ingale. Peu peu, les dfenseurs tombent. Il ny a plus d'officiers. Le flot ennemi
submerge les dbris du 1er
bataillon. Le chteau de Bthancourt est repris par les Boches.
Le 3me
bataillon, sous les ordres du commandant Sainneville, en position la cote 81, est
aussi dbord. Aprs une lutte acharne, il se replie sur Muirancourt en faisant payer cher aux
Allemands chaque mtre de terrain.
Avec les lments du rgiment qui restent, une nouvelle ligne est tablie : chteau de
Muirancourt, village de Muirancourt, Eperon de Rimbercourt. Les units sont mlanges,
mais avec une nergie farouche la nouvelle ligne rsiste pendant des heures.
Vers le soir, une violente attaque ennemie se dclenche. Le front est rompu. Mais, grce au
dvouement de quelques fractions isoles, en particulier du lieutenant Bres, avec les sapeurs
et quelques pionniers rgimentaires, le lieutenant-colonel peut enrayer un instant lavance
ennemie et marquer un temps darrt qui permet une rorganisation relative.
Le rgiment, aprs avoir vaillamment rsist sur le canal du Nord, va se regrouper dans la nuit
Lagny, sous la protection de dtachements anglais.
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Le lendemain, le 46, en rserve de D. I. Sceaucourt, et reform pendant la nuit, est engag
ds les premires heures du jour pour prolonger et renforcer le 144 qui est pass en premire
ligne.
Les Boches progressent sur la montagne de Lagny et occupent le bois de Porquricourt.
La situation devient trs grave. Vers midi, le 46, avec les lments encore disponibles, tente
sur le bois de Porquricourt une contre-attaque dsespre qui sarrte aux abords.
A 16 heures, toute la ligne de combat du 46e et du 144
e, prise dos par le feu des mitrailleuses
de la montagne de Lagny et violemment attaque, est rompue. Il faut tout prix couvrir le
Pimont o doit stayer notre nouvelle ligne de dfense.
Le lieutenant-colonel rassemble les restes de son rgiment dans une ancienne tranche boche
barrant la route Dives-Plmont. Et l, les quelques braves du 46e qui sont indemnes encore,
lectriss par lexemple de leur chef qui fait le coup de feu comme un simple tirailleur, en
premire ligne, parviennent arrter la marche des Allemands qui dbouchaient de Plessis-
Cacheleux.
A la nuit, lattaque ennemie est dfinitivement enraye.
Le lendemain 27, le lieutenant-colonel reoit lordre de dmasquer la position de Pimont
occupe par le 159 R. I. et va reformer le rgiment Mareuil-Lamotte.
Pendant ces quatre journes doprations, le 46, avec des moyens incomplets, a combattu nuit
et jour, sans arrt, ne cdant le terrain que pied pied un ennemi dix fois suprieur en
nombre. Ses pertes sont sensibles, mais celles infliges lennemi sont normes.
Lavance allemande a t considrablement ralentie. Laction personnelle des officiers de tous
grades a ajout une page particulirement glorieuse aux annales du rgiment.
El si la telle tnacit du 46, durant ces durs combats, est chrement paye, la belle citation
suivante lordre de la IIIe Arme, de son chef, le lieutenant-colonel Peyrotte, reconnat et
rcompense leffort de tous :
Au cours des combats rcents, par sa crnerie superbe et les dispositions judicieuses quil a
su prendre temps, a rempli jusquau bout la mission particulirement difficile qui lui a t
confie. En fin de combat, alors que son rgiment avait subi de lourdes pertes, a lectris le
courage de ses soldats, rests groups autour de lui, en prenant un fusil pour combattre avec
eux sur la ligne de tirailleurs.
EN ALSACE
En avril 1918, pour la premire fois depuis le commencement de la grande guerre, le 46e
dinfanterie se trouve en Alsace reconquise. Cest dans cette province quil y a prs de trois
sicles le Mazarin Franais recevait le baptme du feu, sur les bords du Rhin qui est
devenu notre frontire.
Pendant trois mois, tout en pansant ses blessures, le rgiment occupe diffrents secteurs,
travaille lorganisation des positions, excute et repousse des coups de main et, en mme
temps, a lhonneur d informer un rgiment amricain, le 128e, du Wisconsin, de la
pratique de la guerre.
Et nos soldats et ceux de la libre Amrique occupent ensemble les divers centres de rsistance
du secteur de Saint-Ulrich, dans une belle fraternit darmes.
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Pendant ce sjour, le 31e bataillon de tirailleurs sngalais est adjoint au rgiment quil ne
quittera plus jusqu la fin de la campagne.
Fin juin, le 46 est relev et, le 1er
juillet, est embarqu pour le Nord.
LES OFFENSIVES FINALES
a) En Champagne
Cest la mi-juillet. L'ennemi a pris Chteau-Thierry et travers la Marne. On attend sur le
front de Champagne une forte attaque ennemie.
Le 46e, aprs tre rest quelques jours dans la rgion de Beauvais est amen en Champagne, et
dbarque dans la rgion dAvize (Marne).
Ds son dbarquement, il est alert. La IVe Arme vient de subir le choc formidable des
armes ennemies. Sous les ordres du gnral Gouraud, les soldats de Champagne ont bris
llan des vagues boches, et cest pour lAllemagne une dfaite dont elle ne se relvera pas.
Le 46e bivouaque au mont Gibet. Le 20 juillet, il relve le 53
e dans le secteur de Courmelois ;
le 24, il attaque la position de la Voie romaine la hauteur de Prosnes.
Sous les ordres du commandant Courtes, le 1er
bataillon slance lassaut. Sur un front de
1.500 mtres et une profondeur de 1 kilomtre toutes les organisations ennemies sont
enleves. Les lots dans lesquels ladversaire rsiste encore tombent un un dans nos mains ;
30 prisonniers, 7 mitrailleuses lgres, un norme matriel restent entre nos mains. Lennemi
contre-attaque violemment plusieurs reprises, mais il est repouss.
La 2me
compagnie s'est particulirement distingue. Sous les ordres du lieutenant Brisart, elle
atteint ses objectifs dans un superbe lan. Attaque cinq fois par lennemi sur ses positions
nouvelles, elle a victorieusement repouss tous les assauts, ne perdant pas un pouce de terrain
conquis ; elle a reu cette belle citation lordre de la D. I. :
Sous le commandement de son chef, le lieutenant Brisart, sest porte magnifiquement
lassaut dune position fortifie quelle a enleve dun seul lan, capturant 31 prisonniers.
Anime de la volont farouche de maintenir ensuite sa conqute, a rsist superbement cinq
assauts successifs dun ennemi sans cesse renouvel, lobligeant abandonner la lutte et lui
infligeant de lourdes pertes.
Dans la nuit du 29 au 30, le rgiment est relev. Il va rejoindre le 5e C A. quil a quitt aprs
la bataille de lOise.
b) Sur la Vesle.
Dans la nuit du 30 au 31 juillet, le 46 relve les lments du 7e C. A. au sud de Romigny et de
Ville-en-Tardenois. Il y a quatre annes, lAllemagne nous dclarait la guerre. Ce quatrime
anniversaire va sonner pour elle, lugubre comme un glas. Son agonie commence. Sous les
coups rpts des soldats du Droit, l'orgueilleuse nation va voir ses annes chanceler et
demander grce.
Le 2 aot, lennemi bat en retraite, le 46 slance sa poursuite et, malgr la rsistance des
arrire-gardes, nos lments avancs atteignent la valle de lArdre.
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Le 3, malgr des feux violents, la progression continue ; on arrive la ferme dIrval et
Vandeuil.
Le matin du 4 aot, Jonchery-sur-Vesle est conquis, et nos soldats atteignent la rive sud de la
rivire.
Les passages de la Vesle sont dtruits. Sur des passerelles de fortune, la 6 compagnie,
commande par le capitaine Fonteny, russit franchir la rivire et sa valle marcageuse,
large dau moins un kilomtre.
Mais une violente contre-attaque nous oblige regagner la rive sud.
Plusieurs fois la traverse est tente, mais lennemi veut maintenir tout prix cette barrire
naturelle entre nos lignes et les siennes, et les quelques lments qui, avec une tnacit
hroque, cherchent prendre pied sur la rive nord doivent se replier.
Le 5 aot, une section de la 7 compagnie, commande par le lieutenant Danteny, accomplit
des prodiges de valeur en forant le passage de la rivire. Cette poigne dhommes s'lance
sur les mitrailleurs boches surpris et les force fuir. Mais bientt attaque par un adversaire
nombreux et qui, jugeant la faiblesse de l'effectif qui a pu traverser, croit pouvoir la saisir
comme une proie, la, section se replie sans laisser un prisonnier aux mains de lennemi.
Une citation lordre du Corps dArme rcompense la bravoure de la 2e section de la 7
compagnie :
La 2 section de la 7 compagnie du 46 dinfanterie, sous le commandement du lieutenant
Danteny, est parvenue, le 5 aot 1918, traverser la Vesle sons des feux violents et se
maintenir pendant quelque temps sur la rive nord malgr les contre-attaques dun ennemi
suprieur en nombre. Trs prouve, a eu son chef grivement bless sa tte.
La 9 compagnie qui dj, Bouchavesnes, stait couverte de gloire, commande
successivement par le lieutenant Ruffiot, les sous-lieutenants Lefaure et Bertrand, tente deux
fois de gagner la rive nord sans aucun moyen de passage quun arbre abattu par les obus, et
accomplit des miracles d'hrosme. Sur la Croix de Guerre de son fanion, dj gagne dans la
Somme, ltoile dOr du Corps dArme va sajouter pour cette belle citation lordre du
jour.
La 9e compagnie du 46
e rgiment dinfanterie, sous les ordres successifs du lieutenant
Ruffiot, du sous-lieutenant Lefaure et du sous-lieutenant Bertrand a, le 5 aot 1918, a deux
reprises diffrentes, forc le passage de la Vesle, sous de violents tirs dartillerie et de
mitrailleuses, lui ayant occasionn des pertes srieuses, pris et conserv pendant plusieurs
heures le contact de lennemi en position, lui faisant des prisonniers au cours de corps
corps acharns. Par sa vaillante action offensive, a fourni des renseignements prcis sur les
forces et les dispositions de lennemi.
Llan des hommes du 46e a t si vigoureux que lennemi dclare dans son communiqu
officiel du 6 : Les Franais se sont lancs hier lattaque, au nord de Jonchery, avec de
grandes forces.
Cette phrase des Allemands est un loge pour le rgiment, puisque le courage, le mordant, la
tnacit hroque de quelques lments ont donn durant toute une journe ladversaire
limpression dune grande attaque.
Ces oprations nergiques de nos lments avancs ont montr que les Allemands taient
dcids tenir la ligne de la Veste, et quils y avaient de grandes forces et non seulement des
arrire-gardes.
Le haut commandement donne lordre de suspendre les attaques et dorganiser le terrain.
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Pendant prs de deux mois, sur les pentes sud de la Vesle et Jonchery, o pas un de nos
mouvements ne peut chapper lennemi, les units du rgiment travaillent avec acharnement
lorganisation du terrain conquis, en vue de nouvelles attaques, sous les rafales continues de
lartillerie allemande. Le jour, toute circulation et tout travail sont impossibles. La nuit, ce
sont des concentrations normes dobus asphyxiants, et particulirement yprite, qui nous
causent dassez grosses pertes, surtout au 31 bataillon sngalais, qui est adjoint au rgiment.
c) La Suippes
Le repli allemand est imminent. Cest la fin septembre, lennemi ne peut plus rsister
longtemps aux attaques continuelles quil subit. Son front craque en maints endroits.
Sur la Vesle notre commandement dcide dattaquer.
Le 46 est en soutien dans le secteur de Jonchery.
Le 3 bataillon est mis la disposition du 89e qui va donner l'assaut.
Le 30 septembre, lheure fixe, le rgiment slance.
Notre 3e bataillon, marchant avec le 89
e, atteint la montagne du bois Gilbert, capturant 15
prisonniers, 15 mitrailleuses et un canon.
Dans la nuit du 1er
au 2 octobre, tout le rgiment passe en premire ligne, tenant tout le front
de la division et, le lendemain, enlve d'un lan superbe la crte dominant Hermonville
Quelques temps aprs, il atteint Hermonville, Cauroy et la route 44 ; le soir, nos avant-postes
sont 100 mtres au sud du canal de lAisne la Marne.
Derrire cette ligne de dfense, l'ennemi veut rsister. Les compagnies Pouret et Visconti
forcent le passage du canal et du ruisseau de Loivre et s'installent sur la rive nord.
Le 4, pour largir notre tte de pont, une attaque est dclenche. Les objectifs sont atteints et
trois contre-attaques repousses. Lennemi laisse entre nos mains 15 prisonniers et des
mitrailleuses.
Plusieurs jours de combat ont creus des vides dans nos rangs. Malgr les pertes et la fatigue,
le 46 pousse en avant avec nergie et, le 5, il atteint Bermricourt, Sainte-Marie-Ferme et la
route Merlet-Orainville, bordant la Suippes.
Dans la nuit, quelques reconnaissances passent sur la rive nord de la rivire.
Le lendemain matin, 6 octobre, trois compagnies parviennent franchir la Suippes par une
infiltration extrmement pnible sous le feu ennemi, avec un passage de fortune.
Dans laprs-midi, elles attaquent Bertricourt, soutenues par toute lartillerie de la division qui
a t mise la disposition du rgiment.
Au cours de cette attaque, un officier du 3e bataillon, le lieutenant Bertrand, se conduisit en
hros. Envoy en liaison par le chef de bataillon auprs de la 10 compagnie, il veut prendre
une part active la lutte. Il faut rduire pied pied les nids de rsistance qui arrtent la
marche dun peloton. Le lieutenant Bertrand saisit des ptards allemands et, suivi du caporal
Mentel, fonce, sur une mitrailleuse ennemie. Une telle audace en impose aux Allemands. Ils
fuient. Des servants restent. Le lieutenant les tue sur leur pice et sempare de la mitrailleuse.
Il veut renouveler son exploit, mais vis de tous cts par un ennemi qui sest ressaisi, il
tombe cribl de balles ainsi que le caporal Mentel.
Son sacrifice n'est pas vain. Bertricourt est conquis la tombe de la nuit par nos soldats. 85
prisonniers sont rests entre nos mains ainsi que quantit de mitrailleuses.
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Le lendemain, 7 octobre, ds laube, aprs une violente prparation dartillerie, les Allemands,
en forces considrables, attaquent le village. Le combat est acharn. Succombant sous le
nombre, nous sommes obligs dabandonner Bertricourt. Mais lennemi ne peut nous rejeter
de lautre ct de la Suippes, et nous conservons le passage de la rivire.
Le 8, une nouvelle attaque ennemie sur notre tte de pont dOrainville est repousse.
Le 46 est relev la nuit suivante.
Durant sept jours, avant-garde de la division, le rgiment de La Tour dAuvergne a
brillamment combattu. Lacharnement dans lattaque, lardeur et l'endurance dans la
poursuite, voil les qualits dont il a fait preuve dans ces offensives, comme il avait su
montrer, lors des durs combats de lOise, sa tnacit et son esprit de sacrifice.
La belle citation suivante, lordre de la Ve Arme, rcompense le 46 de tant defforts et de
dvouement,
Vaillant rgiment qui, depuis le dbut de la campagne, tant en Argonne qu Vauquois,
dans .la Somme, sur lOise, en Champagne et dans lAisne, a fait preuve d'une tnacit
farouche dans la dfensive et dune inlassable ardeur dans loffensive. Renforc par le 31
bataillon de tirailleurs sngalais, sous limpulsion nergique de son chef, le lieutenant-
colonel Peyrotte, vient, du 30 septembre au 8 octobre 1918, de soutenir pendant 7 nuits et 7
jours conscutifs, la poursuite acharne de lennemi, le forant reculer de plus de 6
kilomtres, le rejetant au nord de la Suippes, lui occasionnant de lourdes pertes et capturant
plus de 200 prisonniers et un nombre important de mitrailleuses. A repouss de puissantes
contre-attaques destines le refouler au sud de la rivire, se cramponnant au terrain
conquis. (Dcision du G. Q. G. n 38.318 du 23 novembre 1918.)
d) Passage de lAisne.
Aprs quelques jours de repos, le 46 est charg, le 12 octobre, de dboucher de la tte de pont
de Berry-au-Bac, conquise par la 9e division, et douvrir le passage de lAisne la 10
division, vers Guignicourt.
Le rgiment traverse la rivire et progresse vers Prouvais, en manuvrant. Lavance est
difficile, dcouvert sur ce terrain plat. Pourtant, dans la soire du 12, Prouvais et sa butte
sont enlevs.
Le 13, le village de la Malmaison est conquis son tour. Nous faisons des prisonniers et
prenons un matriel considrable.
Des soldats franais et italiens, capturs par lennemi au cours de ses offensives, qui
travaillaient en arrire des lignes, ont la grande joie de se voir dlivrs par leurs frres
darmes.
Le 14 et le 15, la rsistance de lennemi s'accentue; mais la marche en avant se poursuit
toujours. Nous enlevons le bois des Godfrains, puis la progression continue dans la zone
boise et une premire attaque sur le bois en T, en avant de la solide Hunding-Stellung, est
arrte par ladversaire.
Le 10, aprs une prparation dartillerie, lattaque est reprise, deux compagnies semparent du
bois en T, et le rgiment pousse ses avant-postes jusqu'au chemin la Selve-Nizy-le-Comte. Le
contact est pris avec la ligne Hunding.
Dans la nuit du 16 au 17, le rgiment est relev de la premire ligne. Pendant ces cinq
journes de combat, il a captur de nombreuses mitrailleuses et un matriel important.
Lentrain de tous a t admirable. Malgr le mauvais temps, les difficults de ravitaillement,
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le manque d'eau, car lennemi avait systmatiquement dtruit tous les puits, nos soldats, pleins
de courage, ont toujours pouss vers lavant avec nergie.
Ils savaient que de leurs efforts, que le succs couronnait, allait jaillir la grande victoire finale,
sur un ennemi dont lagonie commenait et dont lanantissement se rapprochait dheure en
heure.
e) La Hunding-Stellung
et la poursuite jusqu larmistice.
Du 17 au 21, le rgiment est au repos Prouvais et dans les bois voisins.
Dans la nuit du 21 au 25, il prend ses emplacements de dpart louest de Nizy-le-Comte. Il
va attaquer la tranche de la Banlieue , un lment de la solide Hunding-Stellung,
laquelle lennemi travaille depuis 1917 : deux tranches dune extrme solidit prcdes par
80 mtres de fil de fer.
Le 25, 8 heures, le 2e bataillon, sous les ordres du commandant Barrire, s'lance derrire le
barrage roulant. Il doit sarrter sous le feu des mitrailleuses de la Hunding et de lartillerie
ennemie. Nanmoins toutes les avances de la position ont t conquises, et notre ligne est
300 mtres de la tranche allemande. Le 46 a fait 42 prisonniers, appartenant deux
rgiments diffrents.
On organise le terrain conquis. Pendant la nuit, des patrouilles vont jusqu'au fils de fer
ennemis. Au cours de lune delles, des officiers franais et italiens, vads devant nos
positions, sont recueillis.
Le lendemain 26, une nouvelle attaque contre la Hunding a lieu. Mais les brches tout fait
insuffisantes faites par notre artillerie ne permettent pas de franchir le rseau allemand ; les
pertes sont svres.
Lorganisation du secteur commence en attendant un nouvel assaut. Des indices dun prochain
repli ennemi, ont t recueillis.
Le 5 novembre, le ler bataillon attaque la Hunding et sempare des lignes allemandes. Le
troisime bataillon le dpasse et, avant-garde de la division, atteint la ligne Haut-Moulin-
Ferme de Val-Roy. Le soir, nos lments avancs sont au nord de Waleppe.
Lennemi fuit.
Derrire lui, des rgiments de France, dans lenthousiasme de la victoire, le poursuivant sans
rpit. Sous la pluie, le 46e marche en avant.
Le 6, nous atteignons La Vaugirard, le Moulin-Rouge, la Hardoye, Wadimont. A la Hardoye,
Wadimont, la population civile qui, depuis quatre ans, attendait lheure de la dlivrance, fait
nos soldats un accueil chaleureux.
Le 7, le rgiment passe en rserve.
Le 8, il bivouaque au Signal de Marlemont. Le 9, il cantonne Aubigny-les-Pothes et
Logny-Bogny.
Cest l que le 11 il apprend la signature de larmistice.
Le jour mme, le gnral Pell, commandant le 5 corps darme, annonce aux vaillants
soldats les conditions essentielles de larmistice et les flicite de leur courage, que la victoire
vient de rcompenser.
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Pendant plus de quatre annes, marchant sur les traces des hros, que lhistoire a glorifis, La
Tour dAuvergne, Desaix, le 46e a tenu dans la Grande Guerre la place dhonneur qui lui
revenait de par son pass.
Il est rest fidle la tradition des grands soldats de lAn II : HONNEUR, DEVOIR,
SIMPLICITE.
A lassaut des lignes ennemies, comme dans la dfensive, il na jamais failli sa vieille
rputation et a toujours su dployer ses belles qualits militaires qui en ont fait, depuis prs de
trois sicles, un des plus glorieux rgiments de France.
Paris, le 30 juin 1919.
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CITATIONS OBTENUES PAR LE REGIMENT
ET DIVERSES FRACTIONS DU REGIMENT
PENDANT LA GRANDE GUERRE.
Citation de la 9e compagnie du 46
e R. I.
ORDRE DU 5e CORPS DARME N 30
Le gnral commandant le 5 corps darme cite lordre du Corps dArme, la 9me
compagnie du 46e rgiment dinfanterie :
Le 25 septembre 1916, brillamment commande par le sous-lieutenant Rio, sest porte
lattaque dune faon merveilleuse sous les barrages dartillerie et les violents tirs des
mitrailleuses, a gagn 400 mtres et, malgr des pertes sensibles, a repouss une contre-
attaque ennemie et conserv tout le terrain conquis.
Au Q. G., le 25 dcembre 1916.
Le gnral commandant le 5 C. A.,
DE BOISSOUDY.
Citation de la 2e compagnie du 46
e rgiment dinfanterie.
ORDRE DE LA DIVISION N 270
Le gnral commandant la 10 division cite lordre de la division la 2me
compagnie du
46me
rgiment dinfanterie :
Sous le commandement de son chef, le lieutenant Brisart, sest porte magnifiquement
lassaut dune position fortifie quelle a enleve dun seul lan, capturant 31 prisonniers et 7
mitrailleuses. Anime de la volont farouche de maintenir ensuite sa conqute, a rsist
superbement cinq assauts successifs dun ennemi sans cesse renouvel, lobligeant
abandonner la lutte et lui infligeant de lourdes pertes.
Le 7 aot 1918.
Le gnral commandant la 10 division,
FICHAT.
Citation de la 9e compagnie du 46
e rgiment dinfanterie
ORDRE DU 5 CORPS DARME N 84
Le gnral commandant le 5e Corps d Arme cite lordre du Corps d'Arme la 9
e
compagnie du 46e rgiment dinfanterie :
La 9e compagnie du 46
e R.I. sous les ordres successifs du lieutenant Ruffiot, du sous-
lieutenant Lefaure et du sous-lieutenant Bertrand, a, le 5 aot 1918, deux reprises
diffrentes, forc le passage de la Vesle sous de violents feux dartillerie et de mitrailleuses,
lui ayant occasionn des pertes srieuses, pris et conserv pendant plusieurs heures, le
contact de linfanterie ennemie en position, lui faisant des prisonniers, au cours de corps
corps acharns. Par sa vaillante action offensive, a fourni des renseignements prcis sur les
forces et les dispositions de lennemi.
Au Q. G., le 19 aot 1918.
Le gnral commandant le 5e C. A.,
PELLE.
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Citation de la 2e section de la 7
e compagnie du 46
e R. I.
ORDRE DU 5 CORPS DARMEE N 85
Le gnral commandant le 5e Corps dArme cite lordre du Corps dArme la 2
e section de
la 7e compagnie du 46
e R. I. :
La 2e section de la 7
e compagnie du 46
e R. I., sous le commandement du lieutenant
Dantheny, est parvenue, le 5 aot 1918, traverser la Vesle sous les feux violents, et se
maintenir pendant quelque temps sur, la rive nord, malgr les contre-attaques dun ennemi
suprieur en nombre. Trs prouve, a eu son chef grivement bless sa tte.
Au Q. G., le 22 aot 1918.
Le gnral commandant le 5e C. A.
PELLE.
Citation du 46e rgiment dinfanterie
ORDRE DE LA Ve ARME N 427
Le gnral commandant la Ve Anne cite l'ordre de lArme le 46
e rgiment dinfanterie :
Vaillant rgiment qui, depuis le dbut de la campagne, tant en Argonne qu Vauquois,
dans la Somme, sur lOise, en Champagne et dans lAisne, a fait preuve dune tnacit
farouche dans la dfensive, et dune inlassable ardeur dans l'offensive. Renforc par le 31e
bataillon de tirailleurs sngalais, sous limpulsion nergique de son chef, le lieutenant-
colonel Peyrotte, vient, du 30 septembre au 8 octobre 1918, de soutenir pendant sept nuits et
sept jours conscutifs, la poursuite acharne de lennemi, le forant reculer de plus de six
kilomtres, le rejetant au nord de la Suippes, lui occasionnant de lourdes pertes et capturant
plus de 200 prisonniers et un nombre important de mitrailleuses. A repouss de puissantes
contre-attaques destines le refouler au sud de la rivire, se cramponnant au terrain
conquis.
(Dcision du G. Q. G. N 38.318 du 23 novembre 1918.)
Q. G., le 28 novembre 1918.
Le gnral comma