Guide "Sciences en balade" de Cenon

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Cenon Sciences en balade Un bois si près de la ville Que venaient faire des cyprès « sem- pervirens » sur cette colline, loin de leur territoire méditerranéen d’origine ? On ne sait pas très bien comment ils sont arri- vés là, mais on sait comment ils ont tenu : les coteaux de la rive droite sont exposés au sud, très calcaires, donc avec un sol relativement sec et qui reflète le soleil. Un écosystème très méditerranéen. Toujours est-il que l’arbre devint l’em- blème de la ville et de son vin, au point qu’à l’époque de la présence anglaise, les tonneaux partant outre-Manche devaient être ornés d’une branche de cyprès pour prouver leur provenance. Un tableau du XIX e siècle du musée des beaux-arts de Bordeaux le rappelle : « Paiement du tribut du Cypressat », par Edmond-Louis Dupain. Presque entièrement gelée lors du terrible hiver 1709, coupée à ras lors de la Révolution, la forêt de cyprès se limite désormais à sept individus. LE CYPRèS, UNE GRANDE FAMILLE Mais la réhabilitation du parc du Cypressat a donné des envies de renouer avec les origines et de lancer une collection de cyprès. Celui auquel on pense aussi- tôt, le « cupressus sempervirens », le cyprès des cimetières, n’est qu’une des 200 espèces qui composent la famille « cupressus ». L'aspect de ces arbres va de l’arbuste rampant à des individus qui atteignent presque la taille d’un cèdre. Leur zone de peuplement s’étend dans toutes les zones tempérées, de l’Amé- rique à l’Asie. La collection, réalisée avec l’aide du jardin botanique de Bordeaux, sera la seule en Europe. Si on voulait la faire tenir sur le territoire du parc, il faudrait supprimer les autres arbres. Le Cypressat ne constituera donc que le cœur de la collection qui sera répartie sur tout le territoire de la commune et au delà. éCOSYSTèMES VARIéS Le cyprès n’est pas la seule espèce inha- bituelle à pousser dans le parc. Sa forme en fer à cheval lui permet de varier ses expositions et les différentes natures de son sol autorisent une grande variété végétale. On trouve ainsi plusieurs zelko- vas, un arbre originaire du Caucase, introduit en France au XVIII e siècle mais essentiellement présent dans les zones de montagne. Il supporte en effet des températures allant jusqu’à – 23° C et on en trouve rarement en Aquitaine. Avec une trentaine de buis centenaires, on a ainsi un lot de raretés arbustives. Mais c’est le cyprès qui a l’antériorité et qui a donné son nom au lieu. Les cyprès, hôtes incongrus Catherine Sémidor est responsable scientifique du Grecau (Groupe de recherche en environnement, conception architecturale et urbaine) et professeur à l’École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux. La placette Saint-Romain, au bas du parc du Cypressat, offre un intéres- sant phénomène acoustique : dès qu’on passe le mur qui entoure le parc, on a l’impression sonore d’être comme à l’intérieur d’une maison. Comment expliquer cela ? Parce que le son se réfléchit sur les murs. Mais s’il y avait un toit, ce serait différent encore. On s’est servi là sans doute soit d’un mur, soit d’une col- line, comme dans les théâtres grecs et romains. Ou encore comme les écrans acoustiques le long des routes. Mais il est difficile de conclure quelque chose sans aller sur place : l’acoustique d’un lieu dépend de sa forme et de tous les éléments qui s’y trouvent. Il ne faut jamais tirer de généralités d’un cas particulier. Et en acoustique, il est très difficile de donner des règles générales. Tout de même, on peut constater en lon- geant le coteau que le son monte. Pas tout le temps, cela dépend des conditions climatiques. Cela dépend si l’air est plus chaud que le sol ou pas. Si c’est le sol qui est plus chaud, le son ne monte pas et donc le son varie au cours de la journée. Le vent, l’humidité de l’air entrent aussi en ligne de compte. Il faut comprendre que ce n’est pas l’air qui porte le son mais il se déforme sous son effet. C’est pour cela qu’il est égale- ment transmis par des solides dont les particules ne bougent pas. Le silence absolu ne se trouve que dans le vide. La perception du son dépend-elle aussi de celui qui l’entend ? C’est un domaine sensible : le bruit est un symptôme dont les gens se servent pour expliquer leur mal-être. Car il a un aspect social : il est provoqué par des activités. Le concept de pollution sonore remonte à une quarantaine d’an- nées alors qu’il y a toujours eu des acti- vités dans les villes. Mais comme on a les moyens techniques de produire plus de bruit, les gens y sont plus sensibles. Cependant, être totalement coupé du bruit n’est pas très confortable. C’est même une torture. La liqueur à l'ouvrage des moines il suffit de le réfrigérer, généralement grâce à un circuit d’eau extérieur, pour le condenser à nouveau et obtenir un nouveau liquide. Dans la distillation industrielle, les premières vapeurs sont les « têtes de distillation ». Puis vient le « cœur », la partie généralement conser- vée pour les meilleurs produits et enfin la « queue de distillation ». UN TOIT DES ATELIERS EIFFEL En 1909, l’entreprise Bussière change de locaux et s’installe dans ceux que l’on connaît maintenant : un bâtiment en pierre et brique où le nom de la liqueur s’étale sur la façade en un joli frontispice de carreaux de terre cuite, encadré de médaillons mar- qués « M » et «B » pour Marcel Bussière. Il est recouvert d’une charpente métallique issue des ateliers Gustave Eiffel qui ne réservait pas sa technique qu’aux grands ouvrages. Celle-ci consiste à assembler les éléments avec des boulons provi- soires, remplacés au fur et à mesure par des rivets métalliques posés à chaud. Ils se contractent en refroidissant, assurant un serrage optimal. Rachetée par un groupe néerlandais en 1962, la société de la Vieille Cure dispa- raît en 1987. Mais le bâtiment est toujours aussi pimpant et l’on peut voir, sur le côté de la grande entrée des matériaux, une petite cabane en béton. Elle abrite un escalier en colimaçon qui descend à la source utilisée pour fabriquer la liqueur. À défaut de la liqueur elle-même... Le son, sujet à toutes variations Installés au XIII e siècle dans un prieuré proche de l’église Saint-Romain, les reli- gieux de l’Ordre de la Merci développent sur place l’une de ces liqueurs dont les moines ont le secret, censée redonner du tonus aux malades et aux pèlerins de Saint-Jacques qui font étape ici. L’ordre sera dispersé à la Révolution mais le souvenir de leur breuvage aux cinquante plantes aromatiques résiste au chan- gement de régime. Et en 1865, Marcel Bussière, distillateur liquoriste, s’installe dans l’ancienne cure pour y fabriquer sa propre recette, librement inspirée de celle, perdue, des bons pères. Ce sera la « Liqueur de la Vieille Cure ». Le liquide est mis à macérer pendant au moins 24 heures dans des foudres de 10 000 litres avant d’être distillé. 3000 ANS DE DISTILLATION Le procédé de la distillation est classique et il remonte à l’Antiquité, conçu alors pour des huiles aromatiques et des par- fums. Il consiste à séparer les différents liquides qui composent le mélange en comptant sur leurs différentes tempé- ratures d’ébullition. Celui qui a la tempé- rature d’ébullition la plus basse (l’alcool) s’évapore en premier si l’on chauffe le mélange doucement : il part alors en vapeur et Cheminement dans le parc du Cypressat C’ est par l’histoire la plus ancienne de Cenon que commence ce parcours. L’emplacement de l’église Saint-Romain, qui jouit de l’une des plus belles vues sur la rive gauche, fut occupé au moins depuis l’époque romaine. La bâtisse présente la particularité de n’être pas située dans le centre de la commune ce qui lui a permis de garder son cimetière après le XIX e siècle, contrairement à la plupart des églises urbaines. Il n’y a que 200 mètres à faire pour rallier le parc du Cypressat, lui aussi intimement lié à l’histoire de Cenon. À toutes les époques, ce qui était autrefois un bois de cyprès surgit dans les mémoires : refuge d’ermites au Moyen-Âge lorsqu’il entourait un fort disparu, de brigands ensuite, il devint l’emblème de la commune. Lorsque l’on y entre aujourd’hui par l’allée largement ouverte bordée de jeunes cyprès, on a du mal à imaginer qu’il était au début de notre siècle un bois en friche, difficilement pénétrable. Le deuxième « château du Cypressat », belle demeure du XIX e , n’a pas laissé plus de traces que son prédécesseur. Le tour dans ce parc permet d’admirer ses variétés arbustives avant de rejoindre l’ancienne fabrique de la Vieille Cure, autre légende cenonnaise, trait d’union entre l’histoire médiévale des religieux locaux et l’industrie qui allait marquer le Cenon moderne. Vingt siècles d’histoire en deux heures de marche. L'itinéraire de la balade > VOIR PLAN DéTAILLé DU PARCOURS AU DOS éGLISE SAINT-ROMAIN PARC DU CYPRESSAT PLACETTE SAINT-ROMAIN GLORIETTE BELLEVUE VIEILLE CURE éMETTEUR RADIO CHÂTEAUX DE CAMPARIAN ET DUMUNE Le bas-Cenon et Bordeaux vus depuis le parc du Cypressat PLAN D’ACCèS AU PARCOURS Cenon Floirac Lormont rocade rive droite avenue Thiers bd de l’Entre 2 Mers quai de Brazza quai de Bacalan boulevard rue Lucien Faure sortie 27 sortie 26 pont de Pierre pont St-Jean pont d’Aquitaine église St-Romain sortie 24 côte de l’Empereur cours Victor-Hugo Infos pratiques Distance : 3 km Durée du parcours : 2 h COMMENT ACCéDER AU PARCOURS Départ : église Saint-Romain Voitures : parking au départ Bus : ligne 27, arrêt Saint-Romain MATéRIEL TECHNIQUE Une paire de jumelles De bonnes chaussures en cas de pluie Élément de clôture de la Vieille Cure un plan masse d’environ 1 200 arbres et un plan de gestion des individus remar- quables. Grâce à cette note de synthèse, on peut savoir à tout moment ce qu’il faut faire pour leur entretien. De fait, chaque action sur un arbre est notée et cela permettra de savoir d’ici dix ou vingt ans comment le boisement réagit. Car, lorsque le parc a été réaménagé, ce sont 20 000 mètres cubes de matériaux qui ont été bougés, modifiant les effets de l’eau, du vent et de l’ensoleillement et donc l’éco- système de beaucoup d’arbres. LA PLACETTE SAINT-ROMAIN Sortez du parc par le portail de cette place à l'acoustique surprenante. LA GLORIETTE Elle est follement romantique, cette glo- riette hexagonale coiffée de son toit en L'éGLISE SAINT-ROMAIN « Elle a un intérieur sans caractère et ses ouvertures ont le caractère des plus laids du XV e siècle » estimait rudement Léo Drouyn, arpenteur du patrimoine girondin au XIX e siècle. C’était sévère pour l’édifice, bâti entre le XII e et le XIV e siècle. Bénéficiant d’un des plus beaux sites de la rive droite, elle succède à une villa gallo-romaine et à une nécropole méro- vingienne. Mais c’est au XIX e qu’elle reçoit ses éléments les plus remarquables, sous la houlette de Gustave Alaux, archi- tecte ayant rénové plus de 60 églises en Gironde. Elle peut ainsi montrer une exceptionnelle décoration intérieure décorative et non narrative. De même, ses vitraux sont l’œuvre de Joseph Villiet qui jouissait à l’époque d’une renommée nationale et qui a exercé dans plus de 170 églises en France et en Angleterre. LE PARC DU CYPRESSAT La pastille métallique qui orne le tronc de la plupart des arbres du parc est leur carte d’identité. Avant les travaux, tous ont été géolocalisés, pris en photo et une fiche a été dressée sur chacun d’entre eux, détaillant notamment son état de santé, son espérance de vie et la manière dont il doit être traité. Ceci a permis d’établir zinc, en face de l’entrée Galliéni du parc. D’autant plus qu’elle fut vraisemblable- ment construite pour la duchesse de Berry, petite-nièce de Marie-Antoinette, afin d’agrémenter sa captivité à la cita- delle de Blaye. Elle y resta quelques mois en 1833 avant d’être expulsée vers Palerme. Il faut dire que Caroline de Bourbon-Sicile, nom de la duchesse, avait tenté de soulever la Vendée en 1832 pour pouvoir installer sur le trône son jeune fils, le duc de Bordeaux, sous le nom d’Henri V. Accessoirement, elle aurait pris la régence. Confrontée à une coalition républicains-orléanistes, sa tentative aventureuse fut plus une farce qu’un danger. C’est un certain Dussaut, admirateur transi de la belle duchesse, propriétaire du château du Cypressat, qui acheta (fort cher paraît-il) l’objet en 1844 pour le mettre dans son jardin. BELLEVUE Après avoir apprécié la vue sur le bas- Cenon et Bordeaux, engagez-vous sur le petit chemin à votre droite puis emprun- tez les escaliers. LA VIEILLE CURE L'éMETTEUR RADIO Les émetteurs qui hérissent la direction zonale des CRS, dont on longe les bâti- ments à notre droite en allant à la Vielle Cure, servent aux transmissions internes mais rappellent ceux de Radio Bordeaux Sud-Ouest. Celle-ci fut l’une des premières radios privées de France, installée au même endroit en 1935. Créée à Bordeaux en 1920 par Roger-Emmanuel Thomaron, vendeur de postes TSF qui cherchait à créer le besoin, elle fut d’abord baptisée Radio Sud-Ouest. Elle est alors confrontée à toutes les obstructions possibles de la part des PTT, responsables de l’émetteur d’État. Elle ne dut sa survie qu’à l’appui de notables locaux, dont le journal La Petite Gironde, l’agence Havas, le président du Conseil général... Pathé Cinéma et Radio Toulouse la rachètent en 1930 et installent un émetteur plus puissant à Cenon. Elle cesse ses activités en 1940 mais les Allemands utiliseront l’émetteur cenonnais pour relayer Radio Paris. Ils le détruiront en quittant Bordeaux. LES CHÂTEAUX DE CAMPARIAN ET DUMUNE Un peu en retrait du parcours, droit devant vous en longeant la direction des CRS après la Vieille Cure, le château de Camparian dresse sa silhouette mas- sive. Rappelant la fortune qu’apportait le vin à Cenon, il fut construit en 1860 et il est inscrit à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques. En 2003, un incendie détruisit en partie sa toiture et son deuxième étage, reconstruits par la suite. Plus discret, le château Dumune (rue Ulysse-Gayon) est davantage une grosse maison mais il abrita une partie de la jeunesse de Jacques Rivière. Marié à la sœur d’Alain Fournier (l’auteur du Grand Meaulnes) avec lequel il entretient une correspondance acharnée, il entre comme secrétaire de rédaction à la NRF (Nouvelle revue française), et en devient directeur en 1919 après l’avoir relancée. Directeur de publication de génie, il publie entre autres Proust, Mauriac, Giraudoux et Aragon. Il meurt à Paris en 1925, à l’âge de 49 ans. Les points forts de la balade Le clocher de l’église Saint-Romain Bellevue, entre ville et campagne La tête du verso est alignée sur ce bord Le pied du verso est aligné sur ce bord La tête du verso est alignée sur ce bord Le pied du verso est aligné sur ce bord livret_cenon_recto.indd 1 17/03/11 14:04

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Cenon

Sciences en balade

Un bois si près

de la ville

Que venaient faire des cyprès « sem-pervirens » sur cette colline, loin de leur territoire méditerranéen d’origine ? On ne sait pas très bien comment ils sont arri-vés là, mais on sait comment ils ont tenu : les coteaux de la rive droite sont exposés au sud, très calcaires, donc avec un sol relativement sec et qui reflète le soleil. Un écosystème très méditerranéen.

Toujours est-il que l’arbre devint l’em-blème de la ville et de son vin, au point qu’à l’époque de la présence anglaise, les tonneaux partant outre-Manche devaient être ornés d’une branche de cyprès pour prouver leur provenance. Un tableau du XIXe siècle du musée des beaux-arts de Bordeaux le rappelle : « Paiement du

tribut du Cypressat », par Edmond-Louis Dupain. Presque entièrement gelée lors du terrible hiver 1709, coupée à ras lors de la Révolution, la forêt de cyprès se limite désormais à sept individus.

lE cYprès, unE GrandE faMillEMais la réhabilitation du parc du Cypressat a donné des envies de renouer avec les origines et de lancer une collection de cyprès. Celui auquel on pense aussi-tôt, le « cupressus sempervirens », le cyprès des cimetières, n’est qu’une des 200 espèces qui composent la famille « cupressus ». L'aspect de ces arbres va de l’arbuste rampant à des individus qui atteignent presque la taille d’un cèdre. Leur zone de peuplement s’étend dans toutes les zones tempérées, de l’Amé-rique à l’Asie. La collection, réalisée avec l’aide du jardin botanique de Bordeaux, sera la seule en Europe. Si on voulait la faire tenir sur le territoire du parc, il faudrait supprimer les autres arbres. Le Cypressat ne constituera donc que le cœur de la collection qui sera répartie sur tout le territoire de la commune et au delà.

écosYstèMEs VariésLe cyprès n’est pas la seule espèce inha-bituelle à pousser dans le parc. Sa forme en fer à cheval lui permet de varier ses expositions et les différentes natures de son sol autorisent une grande variété végétale. On trouve ainsi plusieurs zelko-vas, un arbre originaire du Caucase, introduit en France au XVIIIe siècle mais essentiellement présent dans les zones de montagne. Il supporte en effet des températures allant jusqu’à – 23° C et on en trouve rarement en Aquitaine. Avec une trentaine de buis centenaires, on a ainsi un lot de raretés arbustives. Mais c’est le cyprès qui a l’antériorité et qui a donné son nom au lieu.

Les cyprès, hôtes incongrus

Catherine Sémidor est responsable scientifique du Grecau (Groupe de recherche en environnement, conception architecturale et urbaine) et professeur à

l’École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux.

La placette Saint-Romain, au bas du parc du Cypressat, offre un intéres-sant phénomène acoustique : dès qu’on passe le mur qui entoure le parc, on a l’impression sonore d’être comme à l’intérieur d’une maison. Comment expliquer cela ? Parce que le son se réfléchit sur les murs. Mais s’il y avait un toit, ce serait différent encore. On s’est servi là sans doute soit d’un mur, soit d’une col-line, comme dans les théâtres grecs et romains. Ou encore comme les écrans acoustiques le long des routes. Mais il est difficile de conclure quelque chose sans aller sur place : l’acoustique d’un lieu dépend de sa forme et de tous les éléments qui s’y trouvent. Il ne faut jamais tirer de généralités d’un cas particulier. Et en acoustique, il est très difficile de donner des règles générales.

Tout de même, on peut constater en lon-geant le coteau que le son monte. Pas tout le temps, cela dépend des conditions climatiques. Cela dépend si l’air est plus chaud que le sol ou pas. Si c’est le sol qui est plus chaud, le son ne monte pas et donc le son varie au cours de la journée. Le vent, l’humidité de l’air entrent aussi en ligne de compte. Il faut comprendre que ce n’est pas l’air qui porte le son mais il se déforme sous son effet. C’est pour cela qu’il est égale-ment transmis par des solides dont les particules ne bougent pas. Le silence absolu ne se trouve que dans le vide. La perception du son dépend-elle aussi de celui qui l’entend ? C’est un domaine sensible : le bruit est un symptôme dont les gens se servent pour expliquer leur mal-être. Car il a un aspect social : il est provoqué par des activités. Le concept de pollution sonore remonte à une quarantaine d’an-nées alors qu’il y a toujours eu des acti-vités dans les villes. Mais comme on a les moyens techniques de produire plus de bruit, les gens y sont plus sensibles. Cependant, être totalement coupé du bruit n’est pas très confortable. C’est même une torture.

La liqueur à l'ouvrage des moinesil suffit de le réfrigérer, généralement grâce à un circuit d’eau extérieur, pour le condenser à nouveau et obtenir un nouveau liquide. Dans la distillation industrielle, les premières vapeurs sont les « têtes de distillation ». Puis vient le « cœur », la partie généralement conser-vée pour les meilleurs produits et enfin la « queue de distillation ».

un toit dEs atEliErs EiffElEn 1909, l’entreprise Bussière change de locaux et s’installe dans ceux que l’on connaît maintenant : un bâtiment en pierre et brique où le nom de la liqueur s’étale sur la façade en un joli frontispice de carreaux de terre cuite, encadré de médaillons mar-qués « M » et «B » pour Marcel Bussière. Il est recouvert d’une charpente métallique issue des ateliers Gustave Eiffel qui ne réservait pas sa technique qu’aux grands ouvrages. Celle-ci consiste à assembler les éléments avec des boulons provi-soires, remplacés au fur et à mesure par des rivets métalliques posés à chaud. Ils se contractent en refroidissant, assurant un serrage optimal. Rachetée par un groupe néerlandais en 1962, la société de la Vieille Cure dispa-raît en 1987. Mais le bâtiment est toujours aussi pimpant et l’on peut voir, sur le côté de la grande entrée des matériaux, une petite cabane en béton. Elle abrite un escalier en colimaçon qui descend à la

source utilisée pour fabriquer la liqueur. À défaut de la liqueur

elle-même...

Le son, sujet à toutes variations

Installés au XIIIe siècle dans un prieuré proche de l’église Saint-Romain, les reli-gieux de l’Ordre de la Merci développent sur place l’une de ces liqueurs dont les moines ont le secret, censée redonner du tonus aux malades et aux pèlerins de Saint-Jacques qui font étape ici. L’ordre sera dispersé à la Révolution mais le souvenir de leur breuvage aux cinquante plantes aromatiques résiste au chan-gement de régime. Et en 1865, Marcel Bussière, distillateur liquoriste, s’installe dans l’ancienne cure pour y fabriquer sa propre recette, librement inspirée de celle, perdue, des bons pères. Ce sera la « Liqueur de la Vieille Cure ». Le liquide est mis à macérer pendant au moins 24 heures dans des foudres de 10 000 litres avant d’être distillé.

3000 ans dE distillationLe procédé de la distillation est classique et il remonte à l’Antiquité, conçu alors pour des huiles aromatiques et des par-fums. Il consiste à séparer les différents liquides qui composent le mélange en comptant sur leurs différentes tempé-ratures d’ébullition. Celui qui a la tempé-rature d’ébullition la plus basse (l’alcool) s’évapore en premier si l’on chauffe le mélange doucement : il part alors en vapeur et Cheminement dans

le parc du Cypressat

C’est par l’histoire la plus ancienne de Cenon que commence ce parcours. L’emplacement de l’église Saint-Romain, qui jouit de l’une des plus belles

vues sur la rive gauche, fut occupé au moins depuis l’époque romaine. La bâtisse présente la particularité de n’être pas située dans le centre de la commune ce qui lui a permis de garder son cimetière après le XIXe siècle, contrairement à la plupart des églises urbaines. Il n’y a que 200 mètres à faire pour rallier le parc du Cypressat, lui aussi intimement lié à l’histoire de Cenon. À toutes les époques, ce qui était autrefois un bois de cyprès surgit dans les mémoires : refuge d’ermites au Moyen-Âge lorsqu’il entourait un fort disparu, de brigands ensuite, il devint l’emblème de la commune. Lorsque l’on y entre aujourd’hui par l’allée largement ouverte bordée de jeunes cyprès, on a du mal à imaginer qu’il était au début de notre siècle un bois en friche, difficilement pénétrable. Le deuxième « château du Cypressat », belle demeure du XIXe, n’a pas laissé plus de traces que son prédécesseur. Le tour dans ce parc permet d’admirer ses variétés arbustives avant de rejoindre l’ancienne fabrique de la Vieille Cure, autre légende cenonnaise, trait d’union entre l’histoire médiévale des religieux locaux et l’industrie qui allait marquer le Cenon moderne. Vingt siècles d’histoire en deux heures de marche.

L'itinéraire de la balade> Voir plan détaillé du parcours au dos

❶ éGlisE saint-roMain❷ parc du cYprEssat❸ placEttE saint-roMain❹ GloriEttE❺ BEllEVuE❻ ViEillE curE❼ éMEttEur radio❽ cHÂtEaux dE caMparian

Et duMunELe bas-Cenon et Bordeaux vus depuis le parc du Cypressat

plan d’accès au parcours

Bordeaux rive gauche

Cenon

Floirac

Lormont

Bassens

roca

de ri

ve d

roite

avenue Thiers

bd de l’Entre 2 Mers

quai de Brazza quai de Bacalan

boulevard

rue Lucien Faure

sortie 27

sortie 26

pont de Pierre

pont St-Jean

pont d’Aquitaine

église St-Romain

sortie 24

côte de l’Empereur

cours Victor-Hugo•

Infos pratiques● Distance : 3 km● Durée du parcours : 2 h

coMMEnt accédEr au parcours● Départ : église Saint-Romain● Voitures : parking au départ● Bus : ligne 27, arrêt Saint-Romain

MatériEl tEcHniquE● Une paire de jumelles● De bonnes chaussures en cas de pluie

Élément de clôture de la Vieille Cure

un plan masse d’environ 1 200 arbres et un plan de gestion des individus remar-quables. Grâce à cette note de synthèse, on peut savoir à tout moment ce qu’il faut faire pour leur entretien. De fait, chaque action sur un arbre est notée et cela permettra de savoir d’ici dix ou vingt ans comment le boisement réagit. Car, lorsque le parc a été réaménagé, ce sont 20 000 mètres cubes de matériaux qui ont été bougés, modifiant les effets de l’eau, du vent et de l’ensoleillement et donc l’éco-système de beaucoup d’arbres.

❸ la placEttE saint-roMainSortez du parc par le portail de cette pla ce à l'acoustique surprenante.

❹ la GloriEttEElle est follement romantique, cette glo-riette hexagonale coiffée de son toit en

❶ l'éGlisE saint-roMain« Elle a un intérieur sans caractère et ses ouvertures ont le caractère des plus laids du XV

e siècle » estimait rudement

Léo Drouyn, arpenteur du patrimoine girondin au XIX

e siècle. C’était sévère pour

l’édifice, bâti entre le XIIe et le XIV

e siècle.

Bénéficiant d’un des plus beaux sites de la rive droite, elle succède à une villa gallo-romaine et à une nécropole méro-vingienne. Mais c’est au XIX

e qu’elle reçoit

ses éléments les plus remarquables, sous la houlette de Gustave Alaux, archi-tecte ayant rénové plus de 60 églises en Gironde. Elle peut ainsi montrer une exceptionnelle décoration intérieure décorative et non narrative. De même, ses vitraux sont l’œuvre de Joseph Villiet qui jouissait à l’époque d’une renommée nationale et qui a exercé dans plus de 170 églises en France et en Angleterre.

❷ lE parc du cYprEssatLa pastille métallique qui orne le tronc de la plupart des arbres du parc est leur carte d’identité. Avant les travaux, tous ont été géolocalisés, pris en photo et une fiche a été dressée sur chacun d’entre eux, détaillant notamment son état de santé, son espérance de vie et la manière dont il doit être traité. Ceci a permis d’établir

zinc, en face de l’entrée Galliéni du parc. D’autant plus qu’elle fut vraisemblable-ment construite pour la duchesse de Berry, petite-nièce de Marie-Antoinette, afin d’agrémenter sa captivité à la cita-delle de Blaye. Elle y resta quelques mois en 1833 avant d’être expulsée vers Palerme. Il faut dire que Caroline de Bourbon-Sicile, nom de la duchesse, avait tenté de soulever la Vendée en 1832 pour pouvoir installer sur le trône son jeune fils, le duc de Bordeaux, sous le nom d’Henri V. Accessoirement, elle aurait pris la régence. Confrontée à une coalition républicains-orléanistes, sa tentative aventureuse fut plus une farce qu’un danger. C’est un certain Dussaut, admirateur transi de la belle duchesse, propriétaire du château du Cypressat, qui acheta (fort cher paraît-il) l’objet en 1844 pour le mettre dans son jardin.

❺ BEllEVuEAprès avoir apprécié la vue sur le bas- Cenon et Bordeaux, engagez-vous sur le petit chemin à votre droite puis emprun-tez les escaliers.

❻ la ViEillE curE

❼ l'éMEttEur radioLes émetteurs qui hérissent la direction zonale des CRS, dont on longe les bâti-ments à notre droite en allant à la Vielle Cure, servent aux transmissions internes mais rappellent ceux de Radio Bordeaux Sud-Ouest. Celle-ci fut l’une des premières radios privées de France, installée au même endroit en 1935. Créée à Bordeaux en 1920 par Roger-Emmanuel Thomaron, vendeur de postes TSF qui cherchait à créer le besoin, elle fut d’abord baptisée Radio Sud-Ouest. Elle est alors confrontée à toutes les obstructions possibles de la part des PTT, responsables de l’émetteur d’État. Elle ne dut sa survie qu’à l’appui de

notables locaux, dont le journal La Petite Gironde, l’agence Havas, le président du Conseil général... Pathé Cinéma et Radio Toulouse la rachètent en 1930 et installent un émetteur plus puissant à Cenon. Elle cesse ses activités en 1940 mais les Allemands utiliseront l’émetteur cenonnais pour relayer Radio Paris. Ils le détruiront en quittant Bordeaux.

❽ lEs cHÂtEaux dE caMparian Et duMunE

Un peu en retrait du parcours, droit devant vous en longeant la direction des CRS après la Vieille Cure, le château de Camparian dresse sa silhouette mas-sive. Rappelant la fortune qu’apportait le vin à Cenon, il fut construit en 1860 et il est inscrit à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques. En 2003, un incendie détruisit en partie sa toiture et son deuxième étage, reconstruits par la suite. Plus discret, le château Dumune (rue Ulysse-Gayon) est davantage une grosse maison mais il abrita une partie de la jeunesse de Jacques Rivière. Marié à la sœur d’Alain Fournier (l’auteur du Grand Meaulnes) avec lequel il entretient une correspondance acharnée, il entre comme secrétaire de rédaction à la NRF (Nouvelle revue française), et en devient directeur en 1919 après l’avoir relancée. Directeur de publication de génie, il publie entre autres Proust, Mauriac, Giraudoux et Aragon. Il meurt à Paris en 1925, à l’âge de 49 ans.

Les points forts de la balade

Le clocher de l’église Saint-Romain

Bellevue, entre ville et campagne

La tête du verso est alignée sur ce bord

Le pied du verso est aligné sur ce bord

La tête du verso est alignée sur ce bord

Le pied du verso est aligné sur ce bord

livret_cenon_recto.indd 1 17/03/11 14:04

Page 2: Guide "Sciences en balade" de Cenon

L’itinéraire de la balade ❶ ÉGLISE SAINT-ROMAIN❷ PARC DU CYPRESSAT❸ PLACETTE SAINT-ROMAIN❹ GLORIETTE❺ BELLEVUE❻ VIEILLE CURE❼ ÉMETTEUR RADIO❽ CHÂTEAUx DE CAMPARIAN

ET DUMUNE

L’ARGILE VERTEEn contrebas du coteau apparaissent plusieurs amas d’argile verte. Elle n’est pas rare sur les collines de la rive droite mais ici, associée à un calcaire friable, elle provoque une instabilité des terrains qui a conduit à classer certaines parties du parc inaccessibles au public. Composée de roches silicatées désa-grégées, elle doit sa couleur à l’état du fer dans le sol. Cette argile est considérée comme efficace, en cataplasme, contre les douleurs articulaires ou en masque pour absorber les excès de sébum sur le visage et les cheveux.

Sciences en balade

Un bois si près

de la villeCenon

13, avenue Pierre-Curie – 33270 FloiracTél. et fax : 05 56 86 18 82

[email protected]

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le « cupressus sempervirens »Ce cyprès se dis-tingue par son ap-pareil reproducteur (une petite boule) et par ses rameaux qui n’ont pas d’ai-guilles mais des écailles.

les sourcesCenon compta jusqu’à treize sources sur son territoire dont trois dans le parc. La Hontine, à l’entrée Galliéni, fut souvent tarie après des sécheresses et elle l’est actuel-lement. La fontaine du Cypressat, ornée d’une alcôve en béton et briques, fut longtemps abondante et elle recèle toujours 50 cm d’eau en per-manence. Enfin, la grande source Bellefond, près de la côte Monrepos, débitait ses 160 000 litres par jour à la fin du XIXe siècle et alimentait La Bastide. Elle est désormais inaccessible.

la rocailleSur le chemin du cimetière, un ancien mur de rocaille témoigne de cet usage pittoresque du ciment apparu à la fin du XIXe siècle.

les belles demeuresBeaucoup de châteaux ont disparu mais ceux qui demeurent témoignent de la richesse viticole de Cenon qui, au début du XXe siècle, comptait encore 328 hectares de vignes. Dès le XVe siècle, la commune est réputée pour ses vins qui, rapi-dement, se distinguent en trois terroirs : celui des Queyries, sur l’actuel quartier de La Bastide, celui des palus, le long de la Garonne et celui des côtes. En 1973, un décret sur les AOC parle encore des « Premières côtes de Cenon » mais la dernière vigne sera arrachée en 1981, dans l’actuel quartier Cavaillès.

mars 2011 • Image fond : ORTHO HR IGN de La CUB (2008) • © IGN - Paris 2011 • Autorisation no 221110

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LE BAS-CENON (LES qUARTIERS POPULAIRES)

Cenon accola « La Bastide » à son nom de 1306 jusqu’au 1er janvier 1865 car ce quartier faisait partie de la commune. Mais Bordeaux, avide de développer son industrie, l’annexa à cette date. Cenon perdit alors environ 500 hectares (sur 1095) et surtout 85 % de sa population qui passa de 6 817 habitants en 1861 à 717 en 1865. Devenue une petite com-mune, Cenon fut privée par la même occasion de son accès à la Garonne, seule banlieue bor-delaise de la rive droite dans ce cas.

Réalisation Cap Sciences. Directeur de publication : Bernard Alaux. Responsable éditorial : Alexandre Marsat. Coordinatrice du projet : Alexia Sonnois. Rédaction : Jean-Luc Eluard. Photographies : Pierre Baudier. Graphisme : José Rodrigues. Impression : Imprimerie Pujol, Le Bouscat.

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