GUIDE Pour un meilleur usage des CHSCT G Brégier 2008

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GUIDEPour un meilleur usage des Comits dHygine, de Scurit et des Conditions de Travail (CHSCT)Mise jour Mars 2008

Grard Brgier

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Remerciements : Ce livre est lun des fruits dune rflexion commune pour une formation efficace des membres de CHSCT. Quelques centaines de reprsentants du personnel doivent donc tre remercis. Que Sophie ARMAND, Christine MARTINEZ, Vincent MARTY, Jean PUCCIA et Eric GARCIA trouvent ici une expression de mon amiti.

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SOMMAIRE DETAILLE

INTRODUCTION 1. LES ENJEUX DE LA PREVENTION

8 12 12 12 13 14 15 20 20 23 24 24 25 27 27 29 31 33 33 33 33 34 34 34 35 36 36 36 36 38 3

1.1. Les enjeux juridiques de la scurit du travail 1.1.1. Le poids des systmes normatifs 1.2. Les consquences judiciaires 1.2.1. La responsabilit civile 1.2.2. La responsabilit pnale 1.3. 1.4. 1.5. 2. 2.1. 2.2. 3. 3.1. 3.2. 3.3. 4. Les personnes pnalement responsables Les sanctions Les limites des systmes normatifs LES CONSEQUENCES FINANCIERES POUR LENTREPRISE Le cot direct Le cot indirect LANALYSE DE LACTIVITE DE TRAVAIL Dimension historique pour comprendre les enjeux actuels Les volutions tendancielles Lanalyse de lactivit de travail MISE EN PLACE DU CHSCT

4.1. Les lments du protocole daccord prlectoral 4.1.1. La notion dtablissement 4.1.2. Les effectifs requis 4.1.3. Les conditions matrielles de la dsignation 4.2. La dsignation des membres du CHSCT 4.2.1. La runion du collge dsignatif 4.3. 5. 5.1. Les reprsentants syndicaux au CHSCT LACTION DU CHSCT But et Objectifs

5.2. Notre mthodologie 5.2.1. Passer de la pense Magique la pense Stratgique 5.3. La fonction scurit

5.3.1. 5.3.2. 5.4.

Le document unique valuation des risques La circulaire N 6 DRT du 18/04/2002

38 38 39 44 44 45 48 48 48 50 50 53 55 56 59 59 59 59 60 60 61 61 65 69 75 94 95 98 99 99 100 101 104 105 106 106 106 107 107 107

Le but du CHSCT

5.5. Le CHSCT et lorganisation syndicale 5.5.1. Les tapes de laction revendicative 5.5.2. Le CHSCT : Missions et Moyens 6. LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LES INFORMATIONS

6.1. De quelles informations peut disposer le CHSCT ? 6.1.1. Stratgie pour le traitement des informations 6.1.2. Obligation de secret professionnel et confidentialit 6.1.3. La formation des membres de CHSCT 6.1.4. Les statistiques et la relation sant travail. 6.1.5. Utilisation des statistiques 6.1.6. Ce que sont rellement les indicateurs communs 7. LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LES TEXTES DE DROIT

7.1. Lire les textes de droit 7.1.1. Les sources du droit et la hirarchie des textes 7.1.2. La rglementation applicable dans une branche dactivit 7.1.3. Les apports jurisprudentiels 7.2. Lapport Europen 7.2.1. DISPOSITIONS GNRALES 7.2.2. QUIPEMENTS, SIGNALISATIONS ET CHARGES 7.2.3. PROTECTION DE GROUPES SPCIFIQUES DE TRAVAILLEURS 7.2.4. LIEUX DE TRAVAIL 7.2.5. AGENTS CHIMIQUES PHYSIQUES BIOLOGIQUES 7.3. Le Code du Travail 7.3.1. Extraits du Code du Travail 7.3.2. Les juridictions du travail 7.4. Le Code de la Scurit Sociale 7.4.1. Laccident du travail 7.4.2. Laccident de trajet 7.4.3. La maladie professionnelle 7.4.4. Le contentieux de la scurit sociale 7.5. Rglement intrieur du CHSCT

7.6. Le dlit dentrave 7.6.1. La personnalit civile du CHSCT. 7.6.2. En pratique 7.7. La protection contre le licenciement 7.7.1. Procdure particulire 7.7.2. Situations assimilables

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8. LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LES INTERVENTIONS SUR LE TERRAIN 8.1. 8.2. 8.3. Un quota modeste Les circonstances exceptionnelles Du temps hors quota

108 108 108 108 109 109 109 109 110 110 111 112 113 114 114 114 115 117 121 122 122 123 123 126 128 128 128 130 131 137 138 140 144 144 144 146 5

8.4. Les missions dinspection 8.4.1. Laudit scurit 8.4.2. La tourne syndicale 8.4.3. La visite 8.4.4. Linspection 8.5. Les missions denqutes 8.5.1. Modle de rapport n 1 8.5.2. Modle de rapport n 2 8.5.3. Modle de rapport n 3 8.6. La pratique efficace de lenqute 8.6.1. Le mcanisme de laccident du travail 8.6.2. Le triangle de laccident 8.6.3. La mthode 8.6.4. Les tapes de lenqute : 8.7. La procdure face un danger grave et imminent 8.7.1. Le droit des salaris 8.7.2. Le rle des membres du CHSCT 8.8. Le CHSCT et le dveloppement du travail prcaire 8.8.1. Le dcret du 20 fvrier 1992 9. 10. LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LA REUNION DU CHSCT LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LES DOCUMENTS

10.1. Le rapport crit faisant le bilan de la situation gnrale. 10.1.1. lvaluation des risques professionnels 10.1.2. Le rapport faisant le bilan de la situation 10.1.3. Le modle du rapport prvu l'article L. 4612-16 10.2. 10.3. 10.4. 11. 11.1. 11.2. 11.3. Le programme annuel de prvention des risques professionnels. Lordre du jour de la runion Le procs-verbal de la runion LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LE MEDECIN DU TRAVAIL Organisation des services de sant au travail Les missions du mdecin du travail Les documents du mdecin du travail

11.3.1. 11.3.2. 11.3.3. 11.3.4. 11.3.5. 11.3.6. 11.4. 11.5. 12. 12.1.

Modalits dapplication de la rglementation Le dossier mdical La fiche daptitude La fiche dentreprise Le rapport annuel dactivit Le plan dactivit Travailler avec le mdecin du travail Le mdecin inspecteur du travail

146 149 149 150 154 154 154 155 156 156

LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LE RECOURS A LEXPERT Pourquoi recourir lintervention dun expert ?

12.2. Limportance de lexpert pour la ngociation, la construction et la reconnaissance des structures syndicales 156 12.3. Le recours un expert par le CHSCT 157

12.4. Les cas de recours un expert par le CHSCT 158 12.4.1. La dmarche suivre pour la nomination dun expert agr en cas de projet important 159 12.4.2. La dmarche suivre pour la nomination dun expert agr en cas de risque grave ralis au sein de lentreprise 161 12.4.3. La dmarche suivre pour la nomination dun expert agr en cas de prsence dun risque grave 163 12.5. Les rapports de travail avec lexpert. 12.5.1. Le cahier des charges. 12.5.2. Le suivi du travail de lexpert. 13. LES OUTILS POUR UNE ACTION EFFICACE : LES AIDES EXTERIEURES 166 166 167 168 168 168 168 169 169 170 170 172 173 173 179 179 181 6

13.1. Linspection du travail 13.1.1. Gnralits 13.1.2. Les moyens de linspecteur du travail 13.1.3. Comment travailler avec linspecteur du travail ? 13.2. 13.3. 13.4. 14. 15. 15.1. Les services prvention des CRAM LINRS LANACT CONCLUSIONS ANNEXES Exemple de rglement intrieur de CHSCT

15.2. Modles de documents CHSCT 15.2.1. Exemple de protocole d'accord pralable la dsignation 15.2.2. Exemple de PV du Collge dsignatif au CHSCT

15.2.3. Exemple de recours au Tribunal d'Instance pour annulation de la dsignation de la dlgation des reprsentants du personnel au CHSCT 15.2.4. Exemple de lettre de dsignation d'un Reprsentant Syndical au CHSCT 15.2.5. Exemple d'ordre du jour d'une runion de CHSCT 15.2.6. Exemple de premire convocation d'un CHSCT 15.2.7. Grille pour l'laboration d'un ordre du jour d'une runion d'un CHSCT 15.2.8. Exemple de Procs-verbal d'une runion de CHSCT 15.2.9. Exemple de lettre de demande d'une runion supplmentaire d'urgence 15.2.10. Exemple de lettre de demande d'une runion supplmentaire ordinaire 15.2.11. Exemple de rponse une demande de justification de l'utilisation des heures de dlgation. 192 15.2.12. Exemple de consignation sur le registre spcial d'un Danger Grave et Imminent 15.2.13. Saisine de l'Inspecteur du travail d'une d'infraction constate 15.2.14. Modle d'attestation pour tmoigner en justice 15.2.15. Exemple de dcision suite constat d'un dlit d'entrave 15.2.16. Demande d'autorisation d'absence pour suivre la formation CHSCT 15.2.17. Dcision : mission denqute suite accident du travail. 15.2.18. Dcision : mission denqute Maladie professionnelle. 15.2.19. Dcision : mission denqute risque grave incidents rpts. 15.2.20. Dlibrations pour recourir l'assistance d'un expert agr risque grave 15.2.21. Dlibrations pour recourir l'assistance d'un expert agr projet important 15.3. 15.4. 15.5. 15.6.

182 183 184 185 186 188 190 191

193 194 195 196 197 198 199 200 201 202

Circulaire n 93-15 du 25 mars 1993 relative lapplication de la loi sur les CHSCT 203 Circulaire dapplication du dcret n92-158 du 20 fvrier 1992 CIRCULAIRE N 6 DRT du 18 avril 2002 225 244

Accord-cadre national interprofessionnel pour lamlioration des conditions de travail 266 279 279 280 280 280 280 281

15.7. Ressources et rfrences bibliographiques 15.7.1. Adresses utiles 15.7.2. Revues spcialises 15.7.3. Documentation - bibliographie 15.7.4. Lgislation 15.7.5. Documents INRS commander aux CRAM 15.7.6. LInternet

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IntroductionDans cet ouvrage, nous abordons le fonctionnement du CHSCT dun point de vue essentiellement pratique. Notre parti pris est de rpondre concrtement la question : Comment accrotre lefficacit de cette Institution Reprsentative du Personnel ? . Ce travail a dabord t conu pour tre remis aux membres du CHSCT au cours de la formation laquelle ils ont droit conformment larticle L.4614-14 de la nouvelle partie rglementaire du code du travail. Il est la synthse dun travail collectif men pendant plus de dix ans par lquipe intervenante et par de nombreux membres de CHSCT lors des actions de formation. La scurit au travail est une aspiration trs ancienne des travailleurs. En effet, quoi peut servir de revendiquer un bon salaire si lon doit se blesser ou mourir au travail ? Cette question de la scurit et de la sant au travail a donc toujours mobilis les salaris. Derrire la sant et la scurit au travail se cache en fait la question des conditions du travail. Il sagit dintervenir sur comment la force de travail va tre mise en uvre, utilise dans le cycle de production. En effet, lemployeur achte de la force de travail (ensemble de capacits physiques et mentales), mais peut-il en disposer comme bon lui semble ? Aujourdhui, la loi et la cour de cassation rpondent non : le salari doit pouvoir, en principe, quitter son travail dans le mme tat de sant et dintgrit physique dont il jouissait avant de le commencer. Le contraire est mme une faute grave de lemployeur. En France, il est donc interdit de tuer, de blesser ou de rendre malade les gens, mme dans une entreprise ! Dans le mme esprit, il peut apparatre comme normal que soit respecte la dignit humaine des salaris. Gnralement, les travailleurs revendiquent dans lentreprise, (considre aujourdhui comme un bien social et non comme une simple proprit prive), le respect de leur citoyennet, la prise en compte des problmes de harclement, de souffrance au travail : voil bien des terrains daction pour le CHSCT. Ce CHSCT, dont nous voulons amliorer le fonctionnement, ne surgit pas de nulle part. Cette institution reprsentative du personnel a une histoire. Nous ne reprendrons pas ici lensemble de ce parcours dans le dtail ; il est cependant utile de se rappeler quelques dates clefs. Quelques dates pour comprendre : Loi du 22 mars 1841 : Cette loi fait suite au rapport du Dr Villerm (1840), interdit le travail des enfants de moins de 8 ans dans les manufactures de plus de 20 salaris ; la loi fixe la dure maximale de travail 12 heures pour les enfants de 12 16 ans, et 8 heures pour ceux de 8 12 ans. Loi du 2 novembre 1892 : Loi qui fixe lorganisation de lInspection du Travail ; Loi du 9 avril 1892 : Un texte trs important. Il pose la reconnaissance de la responsabilit de lemployeur en matire daccident du travail ; Loi du 12 juin 1893 (codifie en 1912) : Avec ce texte cest lapparition des premires mesures de prvention obligatoires du Code du Travail ; Jusqu la fin du 19me sicle, le principe de la responsabilit civile rgit les rapports entre employeurs et salaris en matire daccident du travail (le salari doit apporter la preuve de la faute et du dommage) ; Loi du 9 avril 1898 : Une loi fondamentale, elle rend lemployeur automatiquement responsable des accidents du travail survenus dans son entreprise ; les entreprises doivent souscrire des contrats dassurance auprs de compagnies prives ; sa responsabilit donne lieu une indemnisation forfaitaire (ces dispositions sont tendues en 1918 aux maladies professionnelles) ; Dcret du 10 juillet 1913 : Il fixe les mesures dhygine, de scurit et de prvention des incendies dans les locaux de travail ; 8

1928 Recommandation OIT (organisation Internationale du Travail) : Prconise des comits paritaires de scurit Dcret du 4 aot 1941 : Institue des Comits de Scurit. Anctres des CHS et CHSCT : Prsence du chef dtablissement, du chef du service scurit, du mdecin, de dlgus du personnel (article 2) ; possibilit de faire appel la collaboration de toute personne qualifie (article 2) ; mission denqute et dinspection, sensibilisation au risque professionnel (article 3) ;principe de runion trimestrielle et la suite de tout accident qui aura entran ou aurait pu entraner des consquences graves (article 4) ; 1946 : les services de mdecine du travail deviennent obligatoires ; Loi du 30 octobre 1946 : Cette loi abroge la loi de 1898, et transfre aux caisses de Scurit Sociale la gestion du risque accident du travail (1945 : mise en place du rgime de Scurit Sociale) ; Dcret du 1er aot 1947 : Institue les Comits dHygine et de Scurit (CHS), dfinis comme des institutions techniques qui associent les travailleurs la tche de protection contre les risque professionnels ; 1973 : cration de lAgence Nationale pour lAmlioration des Conditions de Travail ; Loi du 6 dcembre 1976 : Ce texte introduit la notion de scurit intgre et renforce la notion dobligation de scurit ; Loi du 23 dcembre 1982 : La loi qui transforme le CHS (institutions techniques) et la commission damlioration des conditions de travail des C.E. en un Comit dHygine, de Scurit et des Conditions de Travail (CHSCT) devenu une vritable Institution Reprsentative du Personnel. Met en place des droits individuels pour les salaris, notamment le droit dalerte et de retrait, et le droit dexpression ; Directive Europenne du 12 juin 1989 concernant la mise en uvre de mesures visant promouvoir lamlioration de la scurit et de la sant des travailleurs au travail. Loi du 31 dcembre 1991 : Cette loi introduit lobligation, pour lemployeur, de mettre en place une politique globale de prvention, elle initie lobligation de rsultat en matire de sant et de scurit au travail. Elle introduit aussi une responsabilit du salari. Pour la clart de notre propos, nous avons adopt, comme les services de la Scurit Sociale, les dfinitions suivantes : ACCIDENT DU TRAVAIL (AT) Est considr comme accident du travail, quelle quen soit la cause, laccident survenu par le fait ou loccasion du travail, toute personne salarie ou travaillant, quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs dentreprise. MALADIE PROFESSIONNELLE Une maladie est dite professionnelle si elle est la consquence directe de lexposition dun travailleur un risque physique, chimique, biologique, ou rsulte des conditions dans lesquelles il exerce son activit professionnelle. ACCIDENT AVEC ARRET Accident ayant entran une interruption de travail dun jour complet en sus du jour au cours duquel laccident est survenu et ayant donn lieu une rparation sous forme dun premier paiement dindemnit journalire. CONSOLIDATION 9

Une lsion est dclare consolide quand, la suite de ltat transitoire que constitue la priode de soins, la lsion se fixe et prend un caractre permanent sinon dfinitif, tel quun traitement nest plus, en principe, ncessaire, si ce nest pour viter une aggravation, et quil est possible dapprcier un certain degr dincapacit permanente conscutive laccident, sous rserve de rechutes et de rvisions possibles. INDEMNITE EN CAPITAL Les accidents ayant entran une incapacit permanente infrieure 10% font lobjet dune indemnisation sous forme dune indemnit en capital dont la valeur est fonction du taux dincapacit permanente partielle, (cf. dcret n 86-1156 du 27 octobre 1986) ; le cot des incapacits permanentes est inscrit en statistique pour lanne au cours de laquelle lesdites indemnits en capital ont t verses.

RENTE Lorsque lincapacit permanente est gale ou suprieure 10%, la victime dun accident du travail a droit une rente gale au salaire annuel brut multipli par le taux de rente. Les capitaux reprsentatifs des rentes attribues sont pris en compte dans les rsultats de lanne de notification de la rente la victime.

ACCIDENT DU TRAVAIL MORTEL Lanne de prise en charge est celle au cours de laquelle le caractre professionnel de laccident ayant provoqu le dcs est reconnu. Les cas pris en compte dans les statistiques sont uniquement ceux pour lesquels la mort est intervenue avant consolidation, cest--dire avant fixation dun taux dincapacit permanente et liquidation dune rente ; les dcs survenant aprs consolidation napparaissent pas dans ces donnes. JOURNEES INDEMNISEES Le nombre de journes indemnises est le nombre de journes payes au titre de lexercice, quelles que soient les priodes indemnises et quelle que soit lanne de premier rglement. SOMME DES TAUX IP Somme des indemnits en capital des incapacits permanentes et des dcs. TAUX DE FREQUENCE Nombre daccidents du travail et de maladies professionnelles avec arrt pour 1 000 000 dheures travailles. INDICE DE FREQUENCE Nombre daccidents du travail et de maladies professionnelles avec arrt pour 1 000 salaris. TAUX DE GRAVITE Nombre de journes indemnises pour 1 000 heures travailles INDICE DE GRAVITE Cest la somme des taux dIndemnits en Capital, dIncapacit Permanente et des dcs (le taux de ces derniers tant compt pour une valeur de 100%) pour 1 000 000 dheures travailles. TAUX BRUT Montant des prestations (recours dduits) divis par la masse salariale. COUT MOYEN DUNE INCAPACITE TEMPORAIRE 10

Montant des prestations payes au titre de lincapacit temporaire, (montant des indemnits journalires + frais mdicaux + frais de pharmacie + frais dhospitalisation), recours contre les tiers responsables dduits, sur le nombre daccidents avec arrt. COUT MOYEN DUNE INCAPACITE PERMANENTE Montant des prestations payes au titre de lincapacit permanente, (montant des indemnits en capital + capitaux IP + capitaux dcs), recours contre les tiers responsables dduits, sur le nombre daccidents avec indemnit en capital, accidents avec rentes ou dcs.

CTN (COMITE TECHNIQUE NATIONAL). - CTN A : - CTN B : - CTN C : Industries de la mtallurgie Industries du btiment et des travaux publics Industries des transports, de l'eau, du gaz, de l'lectricit, du livre et de la communication Services, commerces et industries de l'alimentation Industries du bois, de l'ameublement, du papier carton, du textile, du vtement, des cuirs et peaux et des pierres et terres feu Industries de la chimie, du caoutchouc, de la plasturgie Commerce non alimentaire Activits de services I Activits de services II et travail temporaire

- CTN D : - CTN E :

- CTN F : - CTN G : - CTN H : - CTN I :

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1. Les enjeux de la prvention1.1. Les enjeux juridiques de la scurit du travail Le poids des systmes normatifsLes prescriptions lgislatives et rglementaires 1.1.1.1.

1.1.1.

Lampleur et la technicit de la rglementation en matire dhygine, de scurit, de sant et de conditions de travail montrent la volont du lgislateur de peser de tout son poids pour imposer la matrise des risques professionnels. La base du droit europen, en matire de scurit du travail, est constitue par la directive - cadre europenne du 12 juin 1989 (voir les autres directives au chapitre 8.2). En France, elle a t mise principalement en uvre par la loi du 31 dcembre 1991. Dans cette loi, nous trouvons trois objectifs gnraux (buts) : renforcer le principe de scurit intgre (dj introduit par la loi du 6 dcembre 1976) ; redfinir lobligation de prvention ; accrotre le rle des CHSCT. Le renforcement du principe de scurit intgre est vis dans les dispositions relatives la conception et lutilisation des quipements de travail et des moyens de protection, aux procdures de certification de conformit de ces quipements ainsi quaux mesures de contrle de cette conformit. Il concerne dautre part les informations relatives aux substances et aux prparations chimiques dangereuses faisant lobjet dune commercialisation. La redfinition de lobligation de prvention met jour le Code du Travail du point de vue des principes gnraux devant inspirer les politiques de prvention des risques professionnels conduites par les entreprises. Cette dmarche est fonde sur la connaissance des risques, leur valuation et ladaptation permanente des moyens de prvention mis en place, notamment pour tenir compte de lvolution des techniques, mais aussi sur la recherche de ladaptation du travail lhomme et pour la prise en compte des capacits propres aux travailleurs dans laffectation au poste de travail. La loi prcise les obligations des travailleurs dans la mise en uvre de ces politiques. Elle comporte par ailleurs des dispositions visant mieux informer ou former les salaris ou leurs reprsentants sur les risques prsents pour leur sant et leur scurit par lexercice de leur activit et sur les mesures prises pour y remdier.

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Laccroissement du rle des CHSCT est tabli par 4 sries de dispositions : les unes concernent la formation des reprsentants du personnel dans les comits ; dautres visent mieux adapter les moyens des comits leur mission ; une mesure spcifique concerne le secteur du btiment et des travaux publics et tend abaisser de 300 50 le seuil deffectifs permettant la cration des CHSCT dans ce secteur ; le Parlement enfin a largi les comptences des CHSCT aux questions touchant lenvironnement et confr lInspection du Travail une comptence nouvelle dans le secteur du btiment. Les principes poss par les textes sont prcis. Cependant, cest plus dun millier de lois, dcrets, circulaires et autres notes techniques auxquels il faudrait se rfrer pour cerner le prescrit normatif, lgislatif et rglementaire. 1.2. Les consquences judiciaires

Le chef dentreprise est responsable de la sant et de la scurit des salaris dans lentreprise . Cette petite phrase peut sembler vidente, elle ne lest pourtant pas. Dj, selon les circonstances, le chef dtablissement peut transfrer certaines de ses responsabilits. Le transfert de responsabilit sera constat par le juge si le pouvoir correspondant a t dlgu un ou plusieurs collaborateurs. Avoir le pouvoir, pour le juge, cest possder les comptences, lautorit et les moyens de bien faire. Il ny a donc pas de transfert de responsabilit possible, sans dlgation du pouvoir correspondant. Par principe, quelquun qui a le pouvoir dans une situation et qui commet une faute est responsable des consquences de sa faute. La responsabilit dcoule donc bien directement du pouvoir. Dans un article sur Les responsabilit civile et pnale du prpos (http://www.courdecassation.fr/article5862.html), Messieurs Roland KESSOUS avocat gnral la Cour de Cassation et Frdric DESPORTES, conseiller rfrendaire la Cour de Cassation expliquent notamment que : Dans le cadre du contrat de travail, le salari est soumis aux ordres et directives de l'employeur et ce titre se trouve dans un tat de subordination. C'est ce dernier qui organise son travail, dcide des biens et services mis sur le march, des mthodes instruments et rythmes de travail. C'est encore lui qui peut mettre fin au contrat de travail en cas de faute ou d'insuffisance professionnelle du salari. Cette analyse doit tre nuance lorsque les salaris disposent d'une dontologie professionnelle qui leur confre une indpendance dans l'exercice de leurs fonctions. Les nouvelles modalits du travail qui permettent aux salaris d'organiser librement leur travail, en dehors de l'entreprise, en fonction d'objectifs fixs par l'employeur, rendent moins visible le lien de subordination, mais dans tous les cas, les salaris ne travaillent pas pour eux-mmes et se trouvent dans un tat de dpendance conomique l'gard de l'employeur. Ces considrations sont importantes pour apprcier leur responsabilit, puisque les conditions de travail qui leur sont imposes peuvent tre dterminantes dans la commission du dommage qu'ils causent autrui ou dans leur comportement fautif . Une dfinition juridique de la responsabilit pourrait tre lobligation de rparer le prjudice rsultant soit de l'inexcution d'un contrat (responsabilit contractuelle), soit de la violation du devoir gnral de ne causer aucun dommage autrui par son fait personnel ou du fait des choses dont on a la garde, ou du fait des personnes dont on rpond (responsabilit du fait d'autrui) ; lorsque la responsabilit n'est pas contractuelle, elle est dite dlictuelle ou quasi-dlictuelle. (Source : lexique Dalloz).

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Il y a donc lieu de distinguer deux types de responsabilit, toutes deux galement consquences du pouvoir : la responsabilit civile et la responsabilit pnale. 1.2.1. La responsabilit civile

Le principe gnral de la responsabilit civile est expos par larticle 1382 du Code Civil : Tout fait quelconque de lhomme qui cause autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arriv le rparer. La responsabilit civile vise, pour lauteur dune faute, rparer le dommage caus la victime. La responsabilit civile repose donc sur les dispositions de larticle 1382 : celui qui commet une faute doit en rparer les consquences. En ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles, lindemnisation du prjudice subit par les salaris a t organise par la loi du 9 avril 1898 sur les accidents du travail. Les modifications ultrieures n'ont pas altr fondamentalement son principe, les lois du 30 octobre 1945 et du 30 octobre 1946 ont notamment confi l'indemnisation des salaris victimes la scurit sociale. La mission de rparation au titre civil des accidents du travail et des maladies professionnelles a ainsi t transfre des juridictions civiles la scurit sociale. Ce systme de rparation prsente trois caractristiques principales : D'une part, le salari est dispens de faire la preuve d'une faute de son employeur. En effet, tout accident survenu au temps et au lieu du travail est rput d'origine professionnelle, sauf la preuve dune cause entirement trangre au travail. Sont galement rputes d'origine professionnelle, les maladies inscrites des tableaux numrant les produits ou travaux susceptibles de les provoquer et les dlais de prise en charge, avec possibilit, sous certaines conditions, d'tablir l'origine professionnelle de maladies inscrites un tableau lorsque les conditions de travail ou les dlais de prise en charge sont diffrents, voire celles de maladies non inscrites un tableau. Ds lors que le caractre professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu, le salari peroit l'indemnisation prvue. D'autre part, le salari ne peroit qu'une indemnisation partielle, forfaitaire pour ce qui est de lincapacit permanente. En cas de dcs, certains ayants droit peroivent galement une rente s'ils remplissent les conditions fixes. Seule la faute inexcusable de l'employeur permet au salari ou ses ayants droit de percevoir une rente majore et l'indemnisation de certains chefs de prjudice personnel. Enfin, le versement de l'indemnisation est confi la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, qui rcupre frais mdicaux, indemnits journalires et rentes d'incapacit permanente sur les entreprises au moyen de cotisations, dont le montant est pour partie fonction des dpenses conscutives aux accidents et maladies professionnelles survenues dans chaque tablissement. En cas de faute inexcusable de l'employeur, la caisse concerne verse la ou les rentes majores, rcupres sous forme de cotisations supplmentaires, et les indemnits rparant les prjudices personnels, rcupres directement sur l'employeur coupable. Les dclarations d'accident du travail ou de maladies professionnelles sont adresses aux Caisses, qui reconnaissent le caractre professionnel de l'accident ou de la maladie. Larticle L452-1 du Code de la scurit sociale dtermine les consquences de la faute inexcusable sans pour autant en donner la dfinition. Celle-ci a t donne pour la premire fois en 1941 par la Cour de Cassation, puis a t complte par de nombreux arrts ultrieurs, qui ont permis de retenir plusieurs critres. Il devait sagir dune faute dune gravit exceptionnelle, drivant dun acte ou dune omission volontaire, de la conscience du danger que devait avoir son auteur, de labsence de toute cause justificative, sans que llment intentionnel ne soit requis. 14

A ces lments fondamentaux, devaient sajouter deux autres conditions : - la faute inexcusable commise dans lexercice du pouvoir de direction, - et la cause dterminante de laccident. Le 28 fvrier 2002, la Cour de Cassation a remis en cause cette dfinition et ces critres, et a adopt une nouvelle dfinition de la faute inexcusable loccasion de lexamen de plusieurs dossiers de maladies professionnelles (amiante). Dans ces dcisions, il tait nonc quen vertu du contrat de travail le liant son salari, lemployeur est tenu envers celui-ci dune obligation de scurit de rsultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractes par ce salari du fait des produits fabriqus ou utiliss par lentreprise . Le manquement cette obligation a le caractre de faute inexcusable au sens de larticle L452-1 du Code de la Scurit Sociale lorsque lemployeur aurait d avoir conscience du danger auquel tait expos le salari et na pas pris les mesures ncessaires pour len prserver. Ce durcissement au niveau de la responsabilit civile va de pair avec lvolution du traitement pnal de linscurit au travail. 1.2.2. La responsabilit pnale

Toute infraction pnale peut conduire deux actions, l'action publique, c'est dire l'action engage par la Socit pour conduire la rpression. La victime de l'infraction, ayant subi le prjudice, disposera aussi de l'action civile, sachant que certaines actions n'entranent aucun prjudice (par exemple, un automobiliste fait un excs de vitesse sans quil ny ait de victime). Pour ce qui est de la responsabilit pnale, elle se trouve donc mise en cause lorsquune personne, par sa faute, transgresse une des lois ou rglementations de la socit. La mise en cause de la responsabilit pnale peut, par exemple, donner lieu une amende ou une peine de prison.

Une juridiction pnale est un tribunal charg de juger les infractions : - les contraventions sont juges par les tribunaux de police ; - les dlits sont jugs par les tribunaux correctionnels ; - les crimes sont jugs par les cours d'assises.

Le systme judiciaire franais privilgie le point de vue de la victime, cest--dire que linfraction sera juge, non pas suivant la gravit de la faute, mais par rapport la gravit du prjudice caus. Pour ce qui concerne la sanction disciplinaire, elle devrait, nous semble-t-il, tre proportionnelle la faute. Par exemple, le mme excs de vitesse sera moins durement condamn, sil na eu aucune consquence quen cas de plusieurs victimes. En droit pnal, la responsabilit du dirigeant de lentreprise est notamment mise en jeu quand limprudence, la ngligence ou le manquement une obligation de scurit ou de prudence impose par un texte, se trouve lorigine dun accident du travail ayant entran la mort ou une atteinte lintgrit de la personne du salari.

Larticle 121-3 du Code pnal prcise que : Il n'y a point de crime ou de dlit sans intention de le commettre. 15

Toutefois, lorsque la loi le prvoit, il y a dlit en cas de mise en danger dlibre de la personne d'autrui. Il y a galement dlit, lorsque la loi le prvoit, en cas de faute d'imprudence, de ngligence ou de manquement une obligation de prudence ou de scurit prvue par la loi ou le rglement, s'il est tabli que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas chant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses comptences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prvu par l'alina qui prcde, les personnes physiques qui n'ont pas caus directement le dommage, mais qui ont cr ou contribu crer la situation qui a permis la ralisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'viter, sont responsables pnalement s'il est tabli qu'elles ont, soit viol de faon manifestement dlibre une obligation particulire de prudence ou de scurit prvue par la loi ou le rglement, soit commis une faute caractrise et qui exposait autrui un risque d'une particulire gravit qu'elles ne pouvaient ignorer. Il n'y a point de contravention en cas de force majeure .

Le Code Pnal prvoit, en fonction la gravit des consquences, une chelle de sanctions proportionnes : Article 221-6 Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prvues l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, ngligence ou manquement une obligation de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, la mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende. En cas de violation manifestement dlibre d'une obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, les peines encourues sont portes cinq ans d'emprisonnement et 75000 euros d'amende. Article 222-19 Le fait de causer autrui, dans les conditions et selon les distinctions prvues l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, ngligence ou manquement une obligation de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, une incapacit totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30000 euros d'amende. En cas de violation manifestement dlibre d'une obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, les peines encourues sont portes trois ans d'emprisonnement et 45000 euros d'amende. Article 222-20 Le fait de causer autrui, par la violation manifestement dlibre d'une obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, une incapacit totale de travail d'une dure infrieure ou gale trois mois, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. Article R.625-2 Hors les cas prvus par les articles 222-20 et 222-20-1, le fait de causer autrui, par maladresse, imprudence, inattention, ngligence ou manquement une obligation de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, dans les conditions et selon les distinctions prvues l'article 1213, une incapacit totale de travail d'une dure infrieure ou gale trois mois est puni de l'amende prvue pour les contraventions de la 5e classe. Article 223-1 Le fait d'exposer directement autrui un risque immdiat de mort ou de blessures de nature entraner une mutilation ou une infirmit permanente par la violation manifestement dlibre d'une 16

obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende.

Enfin, depuis quelques annes, nous assistons, paralllement la criminalisation, au durcissement des infractions en matire de violence routire, une criminalisation des infractions en matire de scurit au travail. Depuis la directive europenne du 12 juin 1989, nous passons dobligations de moyens, une obligation de rsultat.

Larticle L. 4121-1 du Code du travail, issu de cette directive, pose un principe et fournit une mthode, tout en obligeant sinterroger sur la sanction : Le chef d'tablissement prend les mesures ncessaires pour assurer la scurit et protger la sant physique et mentale de travailleurs... Ces mesures comprennent des actions de prvention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adapts. Il veille l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre l'amlioration des situations existantes . L'article L 4121-1 pose ainsi en des termes particulirement nets, que l'emploi de l'indicatif renforce le principe de l'obligation de scurit pesant sur le chef d'entreprise. Il n'est plus question d'viter simplement l'accident, mais bien d'assurer la prservation de la sant, au travail dans toutes ses composantes. Cette obligation de scurit est complte par l'obligation de faire voluer les moyens en fonction des situations rencontres par l'entreprise (nouveaux procds, nouveaux quipements et produits, nouvelles formes d'organisation du travail, transformations de la pyramide des ges de l'entreprise, transformation de la structure des emplois, etc). Le catalogue des mesures prendre est trs large, puisqu'il s'agit de mesures de prvention, d'information et de formation, mais aussi du choix d'une organisation et de moyens adapts. Pour parvenir au rsultat attendu, l'article L.4121-2 propose une vritable pdagogie de la prvention consistant viter le risque et limiter celui qui ne peut tre vit, privilgier les modes de protection collectifs sur les quipements individuels de protection, etc., l'ensemble tant command par une dmarche prcise d'valuation du risque. Lobligation de scurit de rsultat et la criminalisation des infractions relatives linscurit au travail ne va-t-elle pas avoir comme effet pervers de faire surgir sous des angles nouveaux le facteur humain, tel que nous lavons dj abord en dtail? Ces volutions au niveau pnal ont bien videmment des consquences dans les entreprises. Ainsi, les systmes de management de la scurit sont souvent plus tourns vers la possibilit dtablir quune action a t ralise plutt qu en valuer lefficacit. Les documents et listes cocher et signer se multiplient. A chaque fois, il va sagir pour lentreprise de dmontrer que le salari avait les connaissances, lautorit et les moyens de son action.

Larticle L.4122-1 du Code du travail, qui intgre dans notre droit national la directive cadre de juin 1989, vient lui aussi peser sur cette situation : Conformment aux instructions qui lui sont donnes par l'employeur, dans les conditions prvues au rglement intrieur pour les entreprises tenues d'en laborer un, il incombe chaque travailleur 17

de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilits, de sa sant et de sa scurit ainsi que de celles des autres personnes concernes par ses actes ou ses omissions au travail. Les instructions de l'employeur prcisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d'utilisation des quipements de travail, des moyens de protection, des substances et prparations dangereuses. Elles sont adaptes la nature des tches accomplir. Les dispositions du premier alina sont sans incidence sur le principe de la responsabilit de l'employeur..

Cet article a pu tre analys par certains comme une simple participation des travailleurs la politique de Prvention dcid et mene par lemployeur et par dautres, comme le pendant de lobligation de scurit de rsultat donne lemployeur.

Le dernier alina de cet article prcise bien que : Les dispositions du premier alina sont sans incidence sur le principe de la responsabilit de l'employeur .

Nous pouvons penser que cette restriction propos de la responsabilit du salari concerne essentiellement la responsabilit civile dont la gestion est, nous lavons vu, principalement attribue la branche Accident du Travail / Maladie Professionnelle de la Scurit Sociale. Le passage des obligations de moyens une obligation de rsultat de scurit et ces articles de loi (L.4121-1 et suivants et L.4122-1) ne sont donc pas sans consquence dans les situations de travail et dans lorganisation de la prvention. Dautant plus que la responsabilit pnale est alternative, distributive, et non pas cumulative. C'est--dire que deux personnes ne peuvent tre tenues responsable pnalement pour un mme dlit, sauf en cas dassociation de malfaiteurs. Lide recherche nest-elle pas au moins de laisser croire une co-responsabilit de lemployeur et du salari en cette matire ? Si cette coresponsabilit est admise, lobligation de garantir la sant et la scurit des travailleurs pesant sur lemployeur devra tre allge en proportion. Cela explique en partie pourquoi, par exemple, les gestionnaires de la scurit doivent maintenant justifier prcisment que tel salari a suivi, telle date, telle formation. Mme sils sont encore souvent incapables de dire quels sont les points qui ont t le mieux assimils et ceux qui nont t que partiellement intgrs, ni dans combien de temps la formation devra tre renouvele. Ce qui devient important aujourdhui, cest que la formation ait t suivie et que le salari ait sign dans ce sens. Le contenu de cette formation peut avoir t assimil, mmoris ou compltement oubli peu de temps aprs, ce nest pas lessentiel. Le point dorgue dans cette volution est atteint avec la gestion de la conduite des quipements mobiles de travail. L tout semble sorganiser dans lentreprise pour que le juge trouve en la personne du conducteur, un responsable dsign davance. Lobligation de scurit de rsultat serait alors en quelque sorte renverse et passerait dune obligation pesant sur le chef dtablissement, une obligation compltement dlgue au chauffeur. En effet, certains peuvent simaginer que lorsque le salari a suivi la formation requise , par exemple quil a obtenu un certificat daptitude la conduite en scurit ou une autre habilitation quivalente et en fonction de ses possibilits , et si linstruction gnrale lui est donn de ne pas commettre dimprudence, sa responsabilit dans le moindre accident pourrait donc tre mise en jeu, en minoration par rapport celle des responsables de lentreprise. 18

Dans la revue La semaine juridique social du 12 fvrier 2008, Caroline ANDRE (Docteur en droit priv, avocat, charge denseignement la facult de droit et lIUT de REINS, Professeur la Reims Management School), donne une publication sur le thme Lobligation salariale de scurit est-elle une obligation de scurit ? . Cette juriste nous explique : Enfin, la rfrence larticle L230-3 du Code du travail fait son apparition dans le contentieux pnal, notamment lorsque les chefs dentreprise contestent leur condamnation. Nanmoins, la Cour de Cassation rejette certains pourvois en prenant soin de reprendre la motivation des juges du fond selon laquelle il appartient au chef dentreprise de veiller personnellement et tout moment la stricte et constante application des dispositions rglementaires destines assurer la scurit de son personnel, de prvoir ventuellement de pallier les risques particuliers auxquels il expose ses salaris ; il ne peut tre exonr de sa responsabilit pnale que sil apporte la preuve que la victime a commis une faute imprvisible, cause unique et exclusive de laccident, ou sil est constat quil a dlgu de manire certaine et non ambigu la direction du chantier une personne investie par lui, pourvue de la comptence, de lautorit et des moyens ncessaires ses obligations : [] la faute du salari, la supposer commise, nest exonratoire que si elle est exclusive ; en effet, [] larticle L.230-4 prvoit que les dispositions de larticle prcdent naffectent pas le principe de la responsabilit des employeurs ou chefs dtablissement (Cass. Crim., 15 mai 2007, n 06-85.715 : Juris-Data n 2007-039611). De mme, si le salari a commis des fautes en relation avec laccident, il incombe la cour de rechercher si lemployeur na pas lui aussi commis une ou plusieurs fautes qui ont concouru la ralisation de laccident (Cass. Crim., 20 mars 2007, n 06-85.638). Certes, la responsabilit pnale obit ses propres principes, mais ces arrts tmoignent de lordre des rles de lemployeur et du salari en matire de scurit. Lemployeur demeure le principal dbiteur de la prvention des risques professionnels et lorsquun accident survient, les magistrats doivent commencer par vrifier sil a manqu son obligation de scurit. Ce nest quaprs que les juges peuvent rechercher si le salari (victime ou non) a eu un comportement fautif en relation avec laccident et si cette faute prsente les caractres pouvant exonrer lemployeur de sa responsabilit. Les infractions aux dispositions du Code du Travail et la survenance dun accident du travail peuvent donc donner lieu lapplication de sanctions prvues par le Code du Travail et par celui de la Scurit Sociale. Les principaux faits habituellement gnrateurs dune sanction pnale sont : Inobservation des obligations gnrales dhygine et de scurit Pour quune infraction soit valablement constitue dans ce cadre, il faut que le fait rprhensible rsulte la fois de la mconnaissance gnrale des rgles dhygine et de scurit, comme celles concernant les locaux et matriels de : les conditions dorganisation du travail, les conditions damnagement du poste de travail, ltat des surfaces de circulation, ltat de propret et dordre des lieux de travail, le stockage des matriels et produits de fabrication, le caractre appropri des matriels, outils et engins utiliss, leur contrle et leur entretien. Inobservation dobligations particulires certaines activits, secteurs ou organismes Est constitutif dinfraction le non-respect des textes concernant : les appareils de levage, les machines dangereuses, les produits et substances dangereux, les liquides inflammables, les installations lectriques, les objets pesant 1 000 kg ou plus, 19

les installations sanitaires, les repas et boissons, latteinte la constitution ou au fonctionnement rgulier du CHSCT. Manquements graves et rpts aux rgles dhygine et de scurit Des dispositions du Code du Travail prvoient quen cas daccident du travail survenu dans une entreprise o ont t relevs des manquements graves et rpts aux rgles dhygine et de scurit du travail, la juridiction saisie doit faire obligation lentreprise de prendre toutes les mesures pour rtablir des conditions normales dhygine et de scurit du travail. A cet effet, la juridiction enjoint lentreprise de prsenter dans un dlai quelle fixe un plan de ralisation de ces mesures. 1.3. Les personnes pnalement responsables

Le Chef dentreprise Le Code du Travail impute expressment la responsabilit des infractions en matire dhygine et de scurit celui qui, tant chef dtablissement, directeur, grant ou prpos , par sa faute personnelle enfreint les prescriptions en vigueur. Peuvent ainsi tre mis en cause : les dirigeants de socits anonymes conseil dadministration : les administrateurs individuellement et solidairement, le prsident du conseil dadministration, le reprsentant permanent, dans les socits anonymes directoire : les membres du directoire, les membres du conseil de surveillance, mais leur responsabilit est attnue, les dirigeants de SARL, les dirigeants de fait.

Le personnel dencadrement et de matrise Il est certain que, du fait de la responsabilit inhrente ses fonctions, le personnel dencadrement et de matrise pourra tre poursuivi. Le tribunal rpressif devra dterminer si, par le contenu de la fonction occupe, par les pouvoirs qui sont attribus cette fonction (pouvoir disciplinaire, pouvoir de commandement, indpendance financire), par lorganisation de lentreprise, le cadre ou lagent de matrise navait pas la possibilit de remdier linfraction existante. Fonction, autorit, salaire, responsabilit, tels sont donc les critres permettant de rechercher la responsabilit des cadres et agents de matrise. Il est noter quen matire dhygine et de scurit des salaris, la diffrence du dlit dimprudence de droit commun, une mme infraction ne peut tre retenue la fois contre le chef dentreprise et contre lun de ses prposs : la responsabilit est alternative et non cumulative. 1.4. Les sanctions

Linspecteur et le contrleur du Travail ont pour mission de veiller lapplication du droit du travail dans les entreprises. Les sections dInspection du Travail relvent ainsi en moyenne 537 000 infractions (observations, mises en demeure et infractions releves par procs-verbal) par an. La moiti (277 392) des infractions releves concernent la sant et la scurit au travail (mdecine du travail comprise).

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Le tableau suivant donne leur rpartition moyenne :Textes relatifs la sant et la scurit Nombre dinfractions constates en moyenne ayant fait lobjet de :

Procsverbaux 1. organisation de la prvention 1.1. principes gnraux Obligations de salubrit et de scurit 1.2. Formation et information des salaris 1.3. CHSCT 1.4. Droit de retrait et dalerte 1.5. Action du mdecin du travail en milieu de travail 2. Lieux de travail 2.1. Conception des btiments 2.2. Amnagement, hygine, hbergement, restauration, etc. 2.3. Ambiance des lieux de travail 2.4. Incendie 3. Prvention des risques communs 3.1. Risques chimiques 3.2. Manutention des charges 3.3. Risque lectrique

Rfrs

Mises en demeure

Observations

Mises en demeure du dir. dpart.

Arrts de travaux

329

7

547

10692

349

3999

79 2

7308 306 1648

126 263

1 3

3 1880

8778 27067

1

113 14

2 1

551 215

9630 9245

1

92 10 154

2

15 18

5400 2331 22156

1

984

21

Textes relatifs la sant et la scurit

Nombre dinfractions constates en moyenne ayant fait lobjet de : Procsverbaux Rfrs Mises en demeure 41 53 612 Observations Mises en demeure du dir. dpart. Arrts de travaux

3.4. Risques dus au bruit 3.5. Equipement de travail - conception 3.6. Equipement de travail - utilisation 4. Risques ou modes de travail particuliers 4.1. Risque cancrogne 4.2. Agents biologiques 4.3. Rayonnements ionisants 4.4. Amiante 4.5. Autres risques particuliers 4.6. Risques lis au travail prcaire 4.7. Risques lis la co-activit 5. oprations de construction - BTP Organisation de la prvention sur les chantiers Travailleurs indpendants Mesures de scurit sur les chantiers 6. Travail des femmes et des jeunes 7. Dispositions gnrales de scurit sociale 8. Mdecine du travail Organisation et fonctionnement Examens mdicaux Inaptitude et obligation de reclassement Etablissements hospitaliers Entreprises de travail temporaire Total

2 113 899

2326 3674 40170 3

11 2 3 139 24 4 164 1

6 2

761 457 188 6273 1091 386 4773 11

7

72

1

10826

151 1443 30 2 3 94 11 187 53483 3386 735

13 2464

83 438 3

17

3409 22888 837 89

5 4968 21 5244

203 264666 5 2488

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Nous pouvons constater la place importante occupe par lapplication des dispositions qui fondent les principes de base de la prvention, notamment des textes qui rgissent lamnagement des lieux et locaux de travail, les ambiances des locaux de travail, la prvention des risques lis lincendie, au bruit, llectricit et lutilisation des quipements de travail. 1.5. Les limites des systmes normatifs

Nous le voyons : Le poids du systme normatif est extrmement important (loi, rglement, circulaires, normes, ) ; larsenal rpressif a t renforc. Pourtant, sur le terrain, chaque jour des textes normatifs sont ngligs, ignors ou volontairement transgresss. Cest ainsi que 98 % des chefs dtablissement en France sont des dlinquants ou des contrevenants rcidivistes. Dans de nombreuses entreprises, laction la plus efficace pour amliorer concrtement les situations de travail est encore simplement de faire respecter la lgislation et la rglementation du travail. De gros progrs peuvent tre obtenus de cette manire, et les CHSCT ont tout intrt uvrer pour le respect des textes. Nous le verrons, le lgislateur leur a prcisment donn cette mission. La cration dune circonstance aggravante Manifestement plus significative encore du renforcement de la rpression, une circonstance aggravante propre, en cas de manquement dlibr une obligation de scurit ou de prudence impose par la loi ou les rglements, est cre. Supposant un manquement dlibr, cest--dire une inobservation consciente et volontaire de lobligation, elle pourra tre releve en pratique ds lors que sera tablie la connaissance de cette obligation. Lintervention pralable de lInspection du Travail (mise en demeure, observations...) ou mme dun reprsentant du personnel sur une situation de danger grave et imminent, par exemple, feront prsumer cette connaissance.

Ltablissement de la circonstance aggravante alourdira alors considrablement la rpression. Pour le dlit datteinte involontaire la vie cit plus haut, en cas de violation manifestement dlibre d'une obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement, les peines encourues sont portes cinq ans d'emprisonnement et 75000 euros d'amende. Autre illustration, les atteintes involontaires lintgrit de la personne quand elles entranent une incapacit totale de travail dune dure infrieure ou gale 3 mois, auparavant de nature contraventionnelle, deviennent un dlit en prsence de circonstances aggravantes (article 222-20). Dans cette mme logique encore, une contravention de 5me classe est cre pour tout manquement dlibr une obligation de scurit ou de prudence impose par la loi ou les rglements, ayant involontairement caus des blessures, sans incapacit (article R. 625-3). Le dlit de risques causs autrui Le nouveau Code Pnal institue larticle 223-1 un dlit de risques causs autrui au sein du chapitre consacr la mise en danger de la personne. Visant plus particulirement linscurit au travail, il dispose que le fait d'exposer directement autrui un risque immdiat de mort ou de blessures de nature entraner une mutilation ou une infirmit permanente par la violation manifestement dlibre d'une obligation particulire de scurit ou de prudence impose par la loi ou le rglement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. Prenant en considration limportance de la faute commise, le dlit sera constitu mme en labsence daccident corporel. Le lgislateur a nanmoins voulu en limiter soigneusement les contours par une accumulation de termes et de conditions restrictives quant ses lments constitutifs. 23

2. Les consquences financires pour lentrepriseBien sr, la vie, lintgrit physique, nont pas de prix. Cependant, linscurit au travail a un cot pour les entreprises et ce cot est norme... Le cot des accidents du travail est communment divis en deux parties : le cot direct et le cot indirect. Le cot direct correspond la cotisation daccident du travail et de maladie professionnelle, le cot indirect correspond toutes les autres dpenses directement ou indirectement lies aux accidents du travail. 2.1. Le cot direct

Le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est dtermin par tablissement. Le classement dans une catgorie de risque est effectu en fonction de lactivit exerce, selon une nomenclature des risques et des modalits fixes par arrt du ministre charg de la Scurit Sociale (par exemple : 28.5DE pour les travaux de montage, dmontage, entretien de matriels divers dans les usines). Le taux net de cotisation est constitu par le taux brut affect de trois majorations dtermines chaque anne par dcret : une majoration forfaitaire correspondant la couverture des accidents du trajet ; une majoration couvrant les frais de rducation professionnelle, les charges de gestion du Fonds national des accidents du travail ; une majoration couvrant les dpenses correspondant aux compensations interrgimes, les dpenses du fonds commun des accidents du travail, la valeur du risque, constitue par les dpenses inscrites au compte spcial. Le taux brut est calcul daprs le rapport de la valeur du risque propre ltablissement sur la masse totale des salaires pays au personnel, pour les trois dernires annes connues. Ne sont pas compris dans la valeur du risque les dpenses lies aux accidents du trajet et les frais de rducation professionnelle. La valeur du risque, telle que dfinie ci-dessus, comprend : 1 La totalit des prestations et indemnits, autres que les rentes, verses au cours de la priode triennale de rfrence ; les indemnits en capital sont affectes dun coefficient fix par arrt du ministre charg de la Scurit Sociale et du ministre charg du Budget (arrt du 16 octobre 1995 : coefficient = 1,1) ; sont exclues les indemnits en capital verses aprs rvision du taux dincapacit permanente des victimes ; 2 Les capitaux reprsentatifs des rentes notifies au cours de la priode triennale de rfrence aux victimes atteintes, la date de consolidation initiale de leur tat de sant, dune incapacit permanente affrente laccident ou la maladie concerns, lexception de lincapacit permanente reconnue aprs rechute (arrt du 16 octobre 1995 : ces capitaux, qui comprennent les frais dappareillage, sont valus forfaitairement 32 fois le montant annuel des rentes calcul la date de notification) ; 3 Les capitaux correspondant aux accidents et maladies mortelles dont le caractre professionnel a t reconnu au cours de la mme priode, que la victime ait ou non laiss des ayants droit (arrt du 16 octobre 1995 : ces capitaux, rserve faite ventuellement des prestations et indemnits dincapacit temporaire, sont valus forfaitairement 26 fois le montant du salaire annuel minimum dfini larticle L. 434-16 du Code de la Scurit Sociale en vigueur la date de reconnaissance du caractre professionnel du dcs). Le partage du cot du risque de lintrimaire Larticle 40 de la loi du 12 juillet 1990 prvoit que, pour tenir compte des risques particuliers encourus par les salaris mis disposition dutilisateurs par des entreprises de travail temporaire, le cot de 24

laccident et de la maladie professionnelle... est mise pour partie la charge de lentreprise utilisatrice... ; cette disposition reprend les termes de laccord interprofessionnel du 24 mars 1990 (article 18) qui prcise que ce partage du cot nest effectif que pour les cas ayant entran une incapacit permanente gale ou suprieure 10% ou un dcs. Les tarifs des cotisations dits taux collectifs sont applicables aux tablissements occupant habituellement moins de 10 salaris. Ils ne sont pas applicables aux tablissements appartenant une mme entreprise lorsque leffectif global de ladite entreprise est au moins gal dix salaris. Ils sont calculs par risque ou groupe de risques suivant les rgles de calcul indiques ci-dessus en fonction des rsultats statistiques des trois dernires annes connues. La Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles fixe chaque anne, aprs avis des CTN comptents, les taux bruts quelle adresse au plus tard le 30 novembre au ministre charg de la Scurit Sociale. Celui-ci tablit, par arrt, les taux nets en fonction de ces taux bruts et des majorations. Les taux nets de cotisation, dits taux rels, sont applicables aux entreprises qui ne comportent quun seul tablissement et dont leffectif habituel de salaris est au moins gal 200, ou chaque tablissement dune mme entreprise lorsque leffectif global habituel de ladite entreprise est au moins gal 200. Ils sont dtermins par les caisses rgionales dassurance maladie suivant les rgles indiques ci-dessus, en fonction de la valeur du risque et de la masse salariale de chaque tablissement (hors BTP). Les taux de cotisation, dits mixtes, sont applicables aux entreprises qui ne comportent quun tablissement et dont leffectif habituel de salaris est compris entre 10 et 199 ou chaque tablissement dune mme entreprise lorsque leffectif global habituel de salaris de cette entreprise est compris entre 10 et 199. Ils sont dtermins par les caisses rgionales dassurance maladie par laddition des deux lments suivants : 1 une fraction du taux collectif fix pour lactivit professionnelle dont relve ltablissement ; 2 une fraction du taux net rel qui serait attribu ltablissement si ce taux lui tait applicable. Les fractions de taux dfinies ci-dessus varient en fonction du nombre de salaris de lentreprise dans les proportions fixes par le tableau ci-aprs : Fraction Fraction du taux rel propre du taux collectif correspondant lactivit ltablissement de ltablissement (1) (2) (2) 10 199 E9/ 1- E9/ 191 191 (1) Lentreprise peut comporter plusieurs tablissements (2) E reprsente leffectif global habituel de salaris de lentreprise Nombre de salaris de lentreprise 2.2. Le cot indirect

Les cots indirects sont les dpenses ou le manque gagner incombant lentreprise du fait de la survenance daccidents, et non indemniss par les assurances. Par exemple : salaire du 1er jour de laccident la charge de lentreprise, indemnits complmentaires de salaire, verses par lentreprise pour complter les versements de la Scurit Sociale jusqu 100% du salaire de laccident, 25

temps pass par les autres salaris : salaris dans lenvironnement de laccident, matrise (dmarches), enquteurs, dommages matriels et frais de remise en ordre, pertes de production et de rendement (modification de lquipe), frais mdicaux de premiers soins, de transport, visite de reprise, frais administratifs et divers, etc... Bien sr, les cots indirects changent de valeur dune entreprise lautre ainsi que dun accident lautre. Cependant, le Bureau International du Travail et de nombreux experts saccordent dire que le principe fondamental : Cots Indirects = K x Cots Directs, est toujours vrifi. A des fins dvaluation dune valeur minimale du Cot Total, on attribue donc au coefficient K des valeurs moyennes rsultant de lexprience. La valeur de K la plus communment admise est : K= 4. Cest--dire que la partie la plus cache (les cots indirects) reprsente le quadruple de la partie visible (les cots directs). Ainsi, le cot direct moyen dun accident de travail avec arrt (cot moyen dune IT) est denviron 3 500,00 euros. Avec K = 3 (hypothse plus optimiste que celles habituellement retenues) : Le cot total dun accident avec arrt approche donc : 14 000,00 euros. Le cot moyen dun accident avec une indemnit en capital (cot moyen du capital dune Incapacit Permanente > 9 %) est denviron 10 000,00 euros. Le cot total dun accident de travail grave approche donc 40 000,00 euros. Par exemple : Une entreprise de maintenance industrielle de taille moyenne (85 salaris), avec une masse salariale de : 1 700 000 euros. Si ses rsultats de scurit se situent la moyenne, elle payera un Cot Direct de : 106 000 euros. Le Cot indirect de ses accidents du travail peut donc tre valu : 3 x CD = 318 000 euros. Le Cot total de ses accidents du travail peut donc tre valu : 424 000 euros. Les lments propres ltablissement doivent tre fournis aux reprsentants du personnel au CHSCT dans le rapport objet de larticle L. 4612-16 du code du travail. Au point 2.3 de lArrt du 12 dcembre 1985 : Taux et montant de la cotisation accidents du travail maladies professionnelles verse l'organisme de Scurit sociale comptent : Estimation du cot indirect de l'ensemble des accidents et maladies lies au travail dont ont t victimes les salaris de l'tablissement (avec l'indication de la mthode d'valuation retenue) Une gestion des accidents avec arrt (pratique par les grosses entreprises) peut permettre de rduire le Cot Direct, de faire baisser le Taux de Frquence Mais seul un progrs dans la matrise des risques fera baisser les Cots Directs et Indirects. Le CHSCT peut et doit jouer un rle dans ce sens... Nous vous proposons de relever aussi ce dfi !

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3. Lanalyse de lactivit de travailDepuis lintroduction des nouvelles technologies dans les entreprises, la prise en compte des conditions physiques du travail (clairage, temprature, poussires, niveau dintensit sonore, mauvaises postures, etc.) nest plus suffisante. Aujourdhui, les CHSCT doivent souvent prendre en compte des lments plus complexes tels que lorganisation du travail, la fatigue mentale, le stress, la rpartition des tches, le choix des quipements et des mthodes, les horaires de travail Pour ne pas subir les rapides transformations dans ces domaines nouveaux pour les CHSCT, il est ncessaire que les CHSCT soient capables danticiper les volutions. Pour cela, les CHSCT peuvent sappuyer sur un ensemble de moyens lgaux, dont le droit de recourir un expert Mais anticiper les volutions, cest aussi apprendre porter un autre regard sur le travail. Lapport de Sophie Armant (ergonome intervenante stages CHSCT) et de lA.P.S.T. (Analyse Pluridisciplinaire des Situations de Travail) la comprhension de cette question constitue un srieux avantage pour les CHSCT. Ce chapitre veut en donner une synthse. 3.1. Dimension historique pour comprendre les enjeux actuels

Pour anticiper des volutions, il est utile de faire un dtour historique sur les mutations qui traversent actuellement le champ du travail afin de situer les enjeux actuels Avant la rvolution industrielle, la question de la quantit ntait pas pose. Lide dominante tait alors : bel ouvrage perfection spcialisation. La rvolution industrielle permet un nouvel essor du capitalisme. Nat alors lide de produire le plus de marchandises possibles : cest la production de masse. Cette nouvelle forme de production ncessite une rationalisation de lactivit. Cest de cette ncessit que vient lide de rpartition du travail. On va orienter les travailleurs sur des segments de tches. Cette rpartition va entraner un miettement du travail : loprateur est dessaisi de la matrise globale du procs de production. Le capitalisme va donc sapproprier, pour la premire fois, la manire dorganiser le travail. Cest la naissance de lide de the one best way (la seule bonne faon de faire). Parmi les lments marquants de cette nouvelle phase du dveloppement du capitalisme, nous noterons : la volont de rationalisation du travail pour augmenter la productivit ; le dcoupage entre la conception et lexcution ; la sparation des salaris de la matrise du processus de production ; Le capitalisme sintresse aux conditions dans lesquelles sexerce lactivit pour limiter les moments improductifs. Au dbut du 20me sicle, lingnieur amricain Frederik Winslow Taylor (1856-1915) met en place, dans ce contexte, un modle dorganisation rationnelle du travail. Les fondements de lorganisation taylorienne sarticulent autour de la segmentation et de la parcellisation des tches. Ce modle repose sur une vision mcaniste du travail (rouages, introduction des premiers robots, Les temps modernes).

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Dans le modle de Taylor, le travail de lhomme est assimil celui de la machine. Cest lhomme qui doit sadapter Toute lactivit est dcompose en oprations lmentaires. Ce modle dorganisation du travail va se dvelopper, car il est efficace pour parvenir des gains significatifs de productivit. Nous pouvons retenir quatre lments qui sont constitutifs de lorganisation taylorienne du travail : la prdominance du travail immdiat ; le dcoupage entre la conception et lexcution ; la relation individuelle au travail ; la seule bonne manire de faire. La devise de ce systme pourrait tre : les contraintes sont poses, lhomme doit sy conformer Le Fordisme va perfectionner le Taylorisme avec lintroduction de la chane. Le Fordisme caractrise le systme mis en place la Ford Motor Company Detroit en 1913, sous la direction dHenry Ford. Le mode de production fordiste combine lorganisation taylorienne avec un accroissement de la mcanisation lintrieur de grandes socits divises en de nombreux services. La production est ralise sur des chanes dassemblage mobiles. Son principe est de rationaliser le travail et de le mcaniser autant que possible. Dans ce modle dorganisation du travail : nest considre comme productive que la force physique ; lactivit est considre (du point de vue des employeurs) comme geste rduit son expression la plus lmentaire ; il y a une rduction du champ dans lequel lhomme volue ; limprvu est limin. Dans lorganisation du travail de type taylorienne, qui sattache limiter les moments improductifs, toutes les dimensions de type rflexion, exprience, savoir-faire (les dimensions diffrentes de la force physique) sont nies. La prise en compte de ces dimensions constitue en effet un enjeu de pouvoir dans lentreprise. Nous parlons certes ici dun modle thorique qui na jamais exist concrtement, car lactivit comme stricte rptition nexiste pas. Lhomme adapte lui-mme son activit, il la singularise pour la rendre viable : il y a toujours appropriation individuelle de la situation de travail. Les ergonomes ont mis en lumire, dans les annes 70, le dcoupage qui a toujours exist entre le travail prescrit et le travail rel. Travail prescrit : Dimension de lactivit qui est prescrite par les modes opratoires, les consignes, les rgles, le rglement, la dfinition des tches excuter, le temps allou une tche Travail rel : Tout ce qui, dans le cadre de lactivit, ressort dun travail sur la prescription : lexprience, le savoir-faire, enfin tout ce que chacun met en jeu dans le cadre de son activit et qui fait que chaque activit est singulire. Cest lespace du singulier, des expriences concrtes, de la dimension historique Pendant des annes, les hommes vont travailler selon ce modle taylorien. Lexpansion conomique des 30 glorieuses et la production de masse ont permis docculter les dysfonctionnements de ce modle thorique. La seule bonne manire de faire nexiste pas dans la ralit. Cest partir de 1975, et de la crise, que la production de masse posera question.

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3.2.

Les volutions tendancielles

La dcennie 70 voit la fin de la croissance rgulire. On assiste alors : une baisse du pouvoir dachat ; une modification des pratiques de consommation due l'volution des mentalits, llvation du niveau de formation, etc un dplacement du centre de gravit de l'conomie vers un mode de fonctionnement plus concurrentiel. Dans les annes 80, pour rester comptitives devant ces pressions, les entreprises ont tendance intgrer les exigences du march, - diversit et qualit du produit ou du service, rapidit de rponse la demande, d'o ncessit de produire autrement. L'usage des nouvelles technologies, particulirement de la micro-informatique, favorise une rponse en temps rel, en flux tendus Le contexte dans lequel on travaille n'est plus stable, l'organisation du travail est de plus en plus complexe ; au plan de lactivit la succession des tches est remplace par la gestion en fonction de variables. A la suite de ces tentatives de rponses, les entreprises se trouvent dans les annes 90 face ce que l'on peut appeler une crise de la connaissance du travail. Cette crise nat, entre autres, de la remise en cause rcente de "la manire" de produire et des contraintes nouvelles de la production. Avec l'introduction des automatismes et de l'informatique, il est de plus en plus difficile de sen tenir prescrire : les oprations de travail s'vanouissent. Dans certains secteurs, travailler revient grer les alas et variables du systme de production. Ces nouvelles formes dactivit sont difficiles dfinir, contrler, il est difficile de leur attacher un temps : "la productivit classique du travail s'vanouit". On repre trois tendances lourdes de l'volution du travail qui correspondent un mouvement de dstructuration restructuration caractris par trois processus concomitants :

1) Une dfayolisation (Fayol) Le fayolisme sadressait aux dirigeants dentreprise, aux ingnieurs que les capitalistes mettaient la tte de leurs usines : ctait une thorie de lencadrement des entreprises. Pour Henri Fayol (Administration industrielle et gnrale 1916) : "Administrer, cest prvoir, organiser, commander, coordonner et contrler". Il est un pionnier de lorganigramme hirarchique pyramidal. Le contexte de tension comptitive accrue et de fluctuation permanente des marchs entrane les entreprises jouer "la flexibilit dynamique", c'est--dire rechercher une ractivit immdiate aux alas de l'environnement. L'organisation devient une variable d'adaptation. La matrise d'une complexit de plus en plus importante conduit une intgration de fonctions auparavant isoles, que seuls les objectifs gnraux runissaient in fine. Aujourd'hui, sur la tche prdtermine prvalent une attribution gnrale et des objectifs atteindre.

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2) Une dtaylorisation Sur la vision segmente prvaut la reprsentation dynamique des interdpendances et des interactions entre fonctions. Le principe de finalit est au centre des interactions, Au point de vue du travail effectif, la logique de prescription des tches se substitue une logique de mobilisation des comptences, c'est--dire l'activation cratrice d'un ensemble de savoirs et savoir-faire adapts la situation donne et au problme trait, prvu ou imprvu. En fait, la crise tendancielle du taylorisme se caractrise par : un dclin du travail immdiat ; une distanciation entre le travail de l'oprateur et le produit de son travail ; des cooprations envisages comme des ncessits ; La coopration a toujours exist au sein des collectifs ouvriers, mme nie, et mme dans les travaux les plus prescrits, les plus tayloriss. Ce qui change aujourd'hui, c'est que le travail en quipe est valoris par les directions (alors qu'auparavant il existait, mais tait ni comme source d'efficacit / on casse des collectifs de travail pour en recomposer d'autres sur des bases diffrentes). Avec le dveloppement de l'informatique, un modle de coordination bas sur les relations horizontales et le partage des informations saccrot tendanciellement. Il y a une prise de conscience, par les directions dentreprise, que la tche est toujours plus complique dans la ralit. 3) Une dbureaucratisation La mise en place d'organisations fonctionnelles et intgres s'accompagne d'un clatement des cloisonnements statutaires l'intrieur des catgories professionnelles et d'un raccourcissement de la ligne hirarchique. Le passage de nouvelles formes d'organisation du travail "autonomes et responsables" ncessite, du point de vue des directions, l'engagement de la subjectivit du salari. Les salaris se voient reconnatre un plus grand degr d'initiative (en 1991, 1 salari sur 2 rglerait luimme les incidents qui surviennent dans son travail (source : ANACT). Il est fait appel l'intelligence des salaris.

Cest lclatement de toute une dimension de l'activit humaine qui tait nie auparavant. Avec les annes 1980 apparaissent des groupes de progrs, et autres structures du mme type. Elles associent (!) les salaris la rflexion. Les annes 80-90 sont aussi porteuses du mythe de l'Usine sans Hommes, du "tout automatisation" (cf. le secteur de l'automobile, pionnier de l'automatisation, qui a maintenant fait machine arrire). Face la complexification du processus de production, le travail rel est positionn par les directions au rang des facteurs d'efficacit. Cette dimension n'est plus nie par les directions ; elle devient une condition pour que le travail se fasse bien. Nous l'avons abord, le travail concret, rel, a toujours constitu un enjeu. Durant la priode taylorienne, la dimension concrte du travail tait nie par le patronat - nie parce que, au-del de la tche prescrite, 30

la conscience existait que le travailleur mettait en jeu, dans le cadre de son activit de travail, toute une dimension du travail non reconnue (les savoir-faire) et par consquent non rmunre. Elle n'a peut-tre aussi trouv sa juste dimension chez les salaris qu' la fin des annes 80. Les mutations qui touchent actuellement la sphre du travail, notamment au travers de l'introduction des nouvelles technologies et de l'volution des manires de travailler, ont dplac cet enjeu. Aujourd'hui, au moment o l'entreprise s'est engage dans une phase nouvelle instaurant de nouveaux outils de production, c'est l'exprience et aux savoir-faire des salaris que l'on fait appel, conscients que les nouvelles technologies ne supplent pas l'homme et que c'est l'homme qui fera la diffrence. Cest pourtant dans les annes 90 que la prcarit des emplois et des statuts prend sa pleine ampleur. Les formes demploi rputes atypiques (contrats dure dtermine, travail temporaire, contrats aids) deviennent une norme. La flexibilit des ressources humaines (annualisation du temps de travail, modulation, temps partiel) est rige en rgle dorganisation. Du point de vue des conditions de travail, les tendances dcrites ont des effets contradictoires : d'une part, les progrs techniques ont permis d'apporter des amliorations certaines conditions de travail forte pnibilit, et dans certains secteurs, permis une baisse consquente des accidents du travail ; par contre, les contraintes nouvelles lies aux nouvelles formes d'organisation du travail ont, elles, des effets ngatifs sur les conditions de travail. Notamment : la pression temporelle retentit sur l'ensemble des conditions de travail ; laugmentation de lautonomie entrane un accroissement de la charge de travail ; laugmentation de la charge mentale augmente aussi le stress ; lurgence de la rponse la demande introduit la polyvalence ; les cadences augmentent en relation avec la diminution des effectifs. 3.3. Lanalyse de lactivit de travail

Cette approche, bien que succincte, veut faire merger la nature complexe du travail et par l mme parvenir mieux cerner ce qui fait du travail rel un enjeu d'importance, peut-tre aujourd'hui encore plus qu'hier. Le travail est difficile aborder. L'histoire est riche de renseignements qui clairent la reprsentation qu'en ont les hommes. L'approche judo-chrtienne renvoie l'image de la pnibilit : le travail vient de "labor", le labeur. La culture latine lui associe galement l'ide de torture (tripalare, tripalarium). Les aspects "positifs" sont passs sous silence. Lorsque le travail est objet de conversation par exemple, c'est souvent en tant que "problme". Ainsi il apparat que l'on ne sintresse au travail que dans son aspect ngatif. Le travail est un objet confus qui recouvre plusieurs ralits. De faon classique, cet objet est dcoup pour tre analys : cest une rsultante de l'approche scientifique. Le travail, objet dcoup, devient ralit mutile Quelques exemples pour illustrer la diffrence des points de vue : un conomiste aborde le travail du point de vue des rsultats ; le mdecin s'intresse aux conditions d'exercice ; le service des mthodes s'attache l'activit ; les directions observent, s'intressent au travail d'un "certain point de vue", les reprsentants du personnel d'un autre...

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Ces aspects sont diffrents, mais constamment lis. Dans certaines approches du travail, notamment l'approche scientifique, le dcoupage est pratiqu. On s'intressera alors lune des dimensions qui constituent le travail, en la dcontextualisant. Or, pour aborder la ralit concrte qu'est le travail, il y a aussi ncessit de recomposer cet objet qui est apprhend de manire diffrente par les directions dentreprise, les lus du personnel, les salaris La question du point de vue adopt pour apprhender l'activit et reconstruire un questionnement qui sorte du cadre normatif est centrale. Pour apprhender une situation de travail, il est indispensable davoir toujours en tte la ncessit d'une approche globale afin de ne pas isoler le questionnement de son contexte, ce qui nous conduit choisir d'adopter le point de vue de l'activit. Aujourd'hui encore, de nombreux projets de transformation sont conduits dans l'optique de l'adaptation des moyens humains aux caractristiques du systme de production : il y a ncessit se saisir de ces questions afin de limiter les erreurs. Comprendre le travail rel est lobjet de la prsentation de l'analyse ergonomique de l'activit. Il s'agit de permettre aux reprsentants du personnel dapprhender ces questions sous un angle plus large que celui du cadre normatif. Deux cueils viter : N'approcher que la dimension prescrite de l'activit, car cest une vision mutilante qui ne donne pas accs des lments pertinents pour l'analyse. Se borner une approche limite qui tablirait des liens directs entre conditions de travail et consquences sur la sant. Ces relations de cause effet sont souvent tablies, car explicites par des connaissances fondamentales. Dans une situation de travail donne, se limiter identifier les lments dont on connat les effets nfastes pour les corriger atteint vite des limites, car cest souvent inefficace ou non viable d'un point de vue conomique. Une telle approche ngligerait le fait que ces relations passent toujours par le biais de l'activit spcifique de l'oprateur. Souvent, dans l'entreprise, les problmes poss le sont dans le cadre d'un systme dterministe. Le risque, si l'on ne s'loigne pas de ce cadre, est d'occulter les problmes des oprateurs et de limiter les possibilits d'action. En raison de la prgnance du modle taylorien d'organisation du travail, le fonctionnement des entreprises volue sans une prise en compte suffisante du point de vue des salaris. Nous avons soulign que les oprateurs mettent en uvre des savoir-faire qui ne sont ni forcment formaliss, ni reconnus. Les oprateurs eux-mmes ignorent ou ngligent souvent leur existence. Par ailleurs, les salaris ont une perception de leur tat de sant, de leur fatigue. Dans certains cas, ils tablissent des liens entre cet tat de fait et la situation de travail. Mais parfois, les atteintes la sant sont attribues une faiblesse personnelle sans que la relation avec la situation de travail soit apparente. L'analyse de l'activit contribuera apporter un regard sur la situation de travail qui mette en relation Activit - Production - Sant. L'enjeu central est constitu par la transformation des reprsentations des problmes poss, de manire essayer non plus simplement d'apporter des rponses immdiates et matrielles un problme ponctuel, mais de privilgier une rflexion globale ouvrant la porte des possibilits de transformations plus larges dans une perspective long terme. Il conviendra de se rappeler ces lments pour aborder la mthode danalyse des situations de travail caractrises par la ralit dun accident de travail. 32

4. Mise en place du CHSCT4.1. Les lments du protocole daccord prlectoral Comme pour la dsignation des autres reprsentants du personnel, nous conseillons la ngociation dun protocole avec les organisations syndicales reprsentatives dans lentreprise. Le lgislateur na pas prvu cette ngociation, mais elle peut savrer utile pour toutes les parties. Il faudra cependant veiller ne pas empiter sur les prrogatives du collge dsignatif qui doit dfinir lui-mme les modalits pratiques des diffrents scrutins. 4.1.1. La notion dtablissement

La dtermination du caractre dentreprise et dtablissement ne relve pas du pouvoir unilatral de lemployeur. En effet, une entreprise peut tre compose de plusieurs tablissements. Lorsque cest le cas, le CHSCT est mis en place au niveau de ltablissement : le lgislateur a voulu, en raison du caractre spcifique des missions du CHSCT, quil fonctionne au plus prs des situations de travail des salaris. Le dcoupage de lentreprise en tablissements peut donc faire lobjet dun accord entre lemployeur et les organisations syndicales de lentreprise. Les critres prendre en compte sont le critre gographique et le degr dautonomie qui doit tre suffisant pour le traitement des questions dhygine, de scurit et de conditions de travail. Cest le Tribunal de Grande Instance qui est comptent pour la notion dtablissement distinct pour le CHSCT. 4.1.2.4.1.2.1.

Les effectifs requisCration

Le deuxime point qui peut faire lobjet du protocole prlectoral est la question des effectifs pris en compte. Le CHSCT doit tre constitu lorsque leffectif a atteint cinquante salaris pendant douze mois, conscutifs ou non au cours des trois annes prcdentes. Leffectif est calcul selon les modalits dfinies larticle L.1111-2 du code du travail. Si ltablissement occupe plus de cinq cents salaris, le C.E. peut dterminer, en accord avec lemployeur, le nombre de CHSCT et la structure de coordination qui doivent tre constitus eu gard la nature, la frquence et la gravit des risques, aux dimensions et la rpartition des locaux, au nombre des travailleurs occups dans ces locaux ou groupes de locaux ainsi quaux modes dorganisation du travail. Cet ventuel accord peut tre utilement intgr au protocole prlectoral (en spcifiant bien quil mane du CE).4.1.2.2. Composition de la dlgation du personnel

Lun des points clefs de laccord prlectoral, qui dcoule du calcul des effectifs pris en compte, est la composition de la dlgation du personnel et sa rpartition selon les catgories du personnel. Cette composition et cette rpartition sont fixes pour la dure du mandat. La lgislation fixe un nombre minimum pour les reprsentants du personnel : Trois dans les tablissements occupant jusqu' 199 salaris ; Quatre dans les tablissements occupant entre 200 et 499 salaris ; Six dans les tablissements occupant entre 500 et 1 499 salaris ; Neuf dans les tablissements occupant au moins 1 500 salaris. Parmi ces reprsentants, devront figurer :

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Un reprsentant du personnel de matrise ou des cadres dans les tablissements occupant jusqu' 499 salaris ; Deux reprsentants du personnel de matrise ou des cadres dans les tablissements occupant de 500 1 499 salaris ; Trois reprsentants du personnel de matrise ou des cadres dans les tablissements occupant au moins 1 500 salaris.

Larticle L.4611-7 du code du travail permet, par un accord, dlargir cette dlgation. Les ventuels reprsentants supplmentaires bnficient des mmes prrogatives et de la mme protection que les autres reprsentants du personnel au CHSCT. Une drogation pralable de linspecteur du travail est ncessaire pour modifier la rpartition des siges entre catgories professionnelles. 4.1.3. Les conditions matrielles de la dsignation

Le protocole daccord prlectoral pourra enfin utilement prciser : La date, lheure et le lieu de la premire runion du collge dsignatif ; La qualit des personnes convoquer (lensemble des lus titulaires et supplants au C.E., et lensemble des dlgus du personnel titulaires et supplants). A dfaut de protocole daccord prlectoral une notice dinformation technique pourra utilement tre diffuse par ltablissement. 4.2. La dsignation des membres du CHSCT La runion du collge dsignatif 4.2.1.

Les reprsentants du personnel au CHSCT sont dsigns pour deux ans par le collge dsignatif compos des lus du comit dtablissement et des dlgus du personnel. Le chef dtablissement ne participe pas la runion du collge dsignatif. Son rle est strictement limit la convocation de la runion. Les lus supplants sont convoqus, nous lavons vu dans les lments inscrire sur le protocole prlectoral. Cependant, ils ne participent llection que sils remplacent un titulaire absent, ou prenant part au vote au titre de lautre mandat en cas de cumul des mandats. La rgle est assez simple : chaque lu titulaire na le droit qu une voix. En cas de cumul de mandats, il choisit quel titre il participe au collge dsignatif.4.2.1.1. Dsignation dun secrtaire de runion

Le premier acte du collge dsignatif sera dlire son secrtaire de runion. En effet, le procs-verbal des travaux du collge doit tre remis lemployeur ds leur conclusion, lemployeur devant transmettre ce procs-verbal de runion linspection du travail dans un dlai de huit jours. Aprs avoir dress la liste des lecteurs, le collge va procder la dsignation si la majorit du collge est prsente. Aucune formalit ni conditions nont t dfinies par les textes pour le dpt des candidatures ou pour tre candidat, hormis le fait de travailler dans ltablissement.4.2.1.2. Modalit de la dsignation

Le rle du collge dsignatif en matire dorganisation des lections est dterminant. La cour de cassation a tabli que la dsignation doit tre faite par un collge unique. Lensemble du collge va donc participer la dsignation des reprsentants du personnel au CHSCT, quelle que soit la catgorie de personnel laquelle ils appartiennent. Cependant, mme si lensemble du collge doit voter, il est possible de procder par scrutins successifs, et donc des dsignations par catgorie de personnel. 34

Sil y a accord, les reprsentants peuvent tre dsigns par consensus (accord unanime de tous les membres composant le collge). A dfaut de consensus, le scrutin adopter est le scrutin de liste la reprsentation proportionnelle la plus forte moyenne un tour (comme pour les autres lections professionnelles).

Le secrtaire de runion dsign en dbut de runion fera lappel des prsents (titulaires et supplants) et des votants (titulaire ou supplants) il prendra note du droulement et des rsultats du scrutin, et proposera ladoption de son procs-verbal sitt la dsignation effectue. Il transmettra ce procs-verbal lemployeur ds lissue de la runion. Les contestations relatives la dlgation des reprsentants du personnel au comit sont de la comptence du tribunal d'instance qui est saisi par voie de simple dclaration au secrtariat-greffe. Cette dclaration n'est recevable que si elle est faite dans les quinze jours suivant la dsignation. Le tribunal d'instance statue en dernier ressort. La dcision peut tre dfre la Cour de cassation. 4.3. Les reprsentants syndicaux au CHSCT

Laccord national interprofessionnel (voir en annexe) du 17 mars 1975 sur lamlioration des conditions de travail (et ses avenants modificatifs du 16 octobre 1984 et du 20 octobre 1989) a t tendu par arrt ministriel du 12 janvier 1996. Il permet la participation au CHSCT, avec voix consultative, des reprsentants syndicaux dans tous les tablissements de plus de 300 salaris. En effet, cet accord a t tendu par Arrt du 12 janvier 1996 (J.O. N 19 du 23 janvier 1996 page 1130). Il prvoit dans son article 23 : "La coopration des travailleurs et de leurs reprsentants aux actions de prvention doit concerner la fois la prparation des interventions et leur mise en uvre. Les comits d'hygine, de scurit et des conditions de travail (C.H.S.C.T.) ont, cet gard, un rle primordial jouer, mme si les comits d'entreprise ou d'tablissement, les dlgus du personnel et les dlgus syndicaux doivent galement tre, selon les cas, informs ou consults. Les entreprises vises doivent assurer le meilleur fonctionnement d'ensemble des C.H.S.C.T. En outre, afin de permettre aux organisations syndicales de participer plus troitement aux actions de prvention, chaque organisation aura la facult, dans les tablissements occupant plus de 300 salaris, de dsigner, parmi le per