Guide historique de la Vallée-aux-Loups

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L’ERMITAGE DE CHATEAUBRIAND GUIDE HISTORIQUE « Un lieu retiré d’où l’on puisse voir s’envoler les années... » Guide historique sans fond-4.indd 1 Guide historique sans fond-4.indd 1 22/12/09 7:33:59 22/12/09 7:33:59 REPRODUCTION INTERDITE Tous droits réservés

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L’ERMITAGE DE CHATEAUBRIAND

GUIDE HISTORIQUE

« Un lieu retiré d’où l’on puisse voir s’envoler les années... »

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« La Vallée-aux-Loups, de toutes les choses qui me sont échappées, écrit Chateaubriand dans les Mémoires d’outre-tombe, est la seule que je regrette ; il est écrit que rien ne me restera. » Le présent guide retrace l’histoire de ce lieu enchanteur, « étroit espace » qu’acheta l’auteur en 1807, mais dont la notoriété parvint pourtant jusqu’à la Vienne de Metternich.

Le séjour de plus de dix ans qu’y fi t Chateaubriand l’a marqué d’une empreinte que n’ont pas effacée, bien au contraire, les propriétaires ultérieurs du domaine. Le Conseil général des Hauts-de-Seine, qui l’ouvrit au public en 1987, pouvait-il vouloir autre chose qu’y perpétuer, par-delà les âges, la mémoire de celui dont l’œuvre demeure un sujet d’études, certes, mais avant tout la source de bon-heurs de lecture que rééditions et traductions font découvrir de plus en plus largement ? Celui, également, dont le parc mémoriel et littéraire dessiné par ses soins abrite aujourd’hui encore des arbres choisis et plantés par lui ?

Cette volonté de transmission ne pouvait donc se conce-voir que vivante. Non pas comme un hommage à une fi gure statufi ée dans un temps révolu, mais inscrite au contraire dans le mouvement profond d’une œuvre et d’une carrière aux facettes multiples.

Notre volonté, hier déjà, mais aujourd’hui davantage encore, est de faire de la Vallée-aux-Loups un lieu d’échan-ges et de rencontres, ouvert à des publics divers, enté sur cette Europe qui parlait alors français, dont les plus grands esprits lisaient et commentaient l’œuvre de Chateaubriand, une Europe dont Paris fut le centre brillant.

L’histoire de la Vallée-aux-Loups, en outre, ne s’est pas interrompue après le départ de Chateaubriand en 1817 : dès le XIXe siècle, mais particulièrement à l’époque du docteur Henry Le Savoureux, elle a connu une vie litté-raire, artistique et mondaine intense, dont on rencontrera dans les pages qui suivent quelques-unes des grandes fi gures. Cet héritage redouble celui de l’auteur des Mémoires d’outre-tombe : lieu de mémoire, cette maison d’écrivain est également appelée à être un lieu de création que je souhaite inscrit dans le présent.

Patrick Devedjian

Ministre auprès du Premier ministre,chargé de la mise en œuvre du plan de relance

Président du Conseil général des Hauts-de-Seine

Préface

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Chateaubriand : esquisse d’une vie

Saint-Malo, rue des Juifs, le 4 septembre 1768, alors qu’une tempête faisait rage : François-René de Chateaubriand se vit « infl iger la vie ». Il était le dernier né de dix enfants, dont six survécurent. Son père, armateur, consacra la fi n de sa vie à relever, par l’acquisition du château de Combourg, un nom qui avait été illustré lors de la bataille de la Massoure (1250).

C’est dans les bois du domaine familial que Chateaubriand naquit à la poésie, à l’invitation de sa sœur Lucile. Plutôt favorable aux patriotes mo-dérés, il fut écœuré par les premières violences de la Révolution.

Chateaubriandpar Delphine de Custine - peinture - vers 1804Coll. particulière

« Je me suis rencontré entre les deux siècles comme au confl uent de deux fl euves ; j’ai plongé dans leurs eaux troublées, m’éloignant à regret du vieux rivage où j’étais né, et nageant avec espérance vers la rive inconnue où vont aborder les générations nouvelles. » (Mémoires d’outre-tombe, Préface testamentaire).

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Avec l’appui du beau-père de son frère aîné Jean-Baptiste, Malesherbes, il entreprit en 1791 un voyage en Amérique, dont l’un des motifs fut la recherche de couleurs pour une épopée de l’homme sauvage dans laquelle il s’était engagé. Dans les forêts du Nouveau-Monde lui apparut une « Muse inconnue » qui marqua son œuvre d’une empreinte indé lébile, lui « dictant » un style où le mot lui-même devenait matière sonore.

Revenu en France à la nouvelle de l’arrestation du roi à Varennes, il rejoignit en 1792 l’armée des Princes. Blessé peu après, il se traîna jusqu’en Angleterre, pour un exil de sept années, durant lequel il apprit l’exécution de son frère, de sa belle-sœur et de Malesherbes (1794), et connut la misère. Il y publia en 1797 un ouvrage am-bitieux, l’Essai sur les Révolutions, qui débute par une double question : « Qui suis-je, et que viens-je apporter de nouveau aux hommes ? ». Dédié à tous les partis, l’Essai n’en contenta vraiment aucun et ne connut qu’une diffusion assez confi dentielle, mais il ouvrait une réfl exion sur le temps et l’histoire qui constitue un des traits majeurs de l’ensemble de l’œuvre de Chateaubriand.

Lorsqu’il regagna, en 1800, la France (sous un nom d’emprunt, avant d’obtenir sa radiation de la liste des émigrés), il avait entrepris le Génie du Christianisme, dont la parution en 1802 (avec l’épisode de René) vint à point nommé concourir à la célébration du Concordat. Le succès du livre, préparé par la publication, l’année précédente, d’Atala, lui ouvrit une nouvelle carrière : il fut nommé en 1803 secrétaire de légation à l’ambas-sade de France à Rome, mais il ne tarda pas à entrer en confl it avec le titulaire du poste, le cardinal Fesch, qui n’était autre que l’oncle de Bonaparte.

Rentré en France huit mois plus tard, il retrouva sa femme, Céleste, née Buisson de La Vigne, qu’il avait quittée quelques mois après un mariage arrangé par sa famille, en 1792, à son retour d’Amérique, et guère revue depuis.

L’exécution du duc d’Enghien (1804), l’éloignant de l’Empire, contribua à son retour à la littérature : il s’atta-cha à un roman, les Martyrs de Dioclétien. La recherche

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des couleurs pour cet ouvrage, une fois encore, fut l’un des motifs de son départ pour l’Orient, en juillet 1806 ; il parcourut alors la Grèce, se rendit à Constantinople puis à Jérusalem : moment décisif, pour un homme qu’avait longtemps enchanté la lecture de Rousseau, du dépassement de la nature pour l’histoire. Chateaubriand fi t également, durant son voyage, la constatation atterrée de ce dont on ne pouvait exclure que fût menacé l’avenir de la France, le despotisme, en l’occurrence.

Un article inséré le 4 juillet 1807 dans le Mercure de France, dont il était l’un des propriétaires et des ré-dacteurs, tira le bilan à son retour en France de cette double prise de conscience et froissa l’Empereur. Chateaubriand se retira avec sa femme à quelques lieues de Paris, à la Vallée-aux-Loups : c’était égale-ment la réalisation d’une aspiration à s’ensevelir dans une chaumière, loin du monde, exprimée à plusieurs reprises déjà.

Il y acheva ce qu’il a lui-même nommé sa « carrière littéraire », en transformant le roman des Martyrs de Dioclétien en une épopée, en rédigeant le récit des Aventures du dernier Abencérage, la relation de son Itinéraire de Paris à Jérusalem, et une tragédie en vers, Moïse. C’est là également qu’il entreprit d’ériger un monument à sa patrie, en commençant ses Études historiques ; c’est là, enfi n, qu’il commença son chef-d’œuvre, les Mémoires de ma vie, futurs Mémoires d’outre-tombe. Napoléon ne lui tint pas une rigueur extrême de son attitude : il s’étonna de ne pas le voir couronné par les Prix décennaux, puis aurait laissé en-tendre qu’il lui aurait plu qu’il fût membre de l’Institut ; Chateaubriand fut ainsi élu académicien en 1811, mais il refusa courageusement de faire à son discours de récep-tion les corrections qu’on lui suggérait et ne siégea que sous la Restauration, sans avoir jamais été reçu.

Un violent pamphlet contre « Buonaparte » le rendit à la vie publique en 1814 : il mit alors sa plume au service de la première Restauration et de son mot d’ordre d’Union et d’Oubli, en débutant une longue carrière de défenseur de la Charte et d’« instituteur » du parlementarisme. Durant les Cent-Jours, il suivit Louis XVIII à Gand.

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La seconde Restauration, marquée par un raidissement politique qu’illustre l’élection de la fameuse Chambre in -t rouvable, très majoritairement ultra-royaliste, et dont Chateaubriand partagea l’orientation générale, commença par lui être favorable : il fut en l’espace de quelques mois nommé ministre d’État et créé pair de France. La dissolution de cette Chambre, en 1816, le rejeta dans l’opposition. Privé de sa pension après la saisie de sa brochure De la Monarchie selon la Charte, il dut se résoudre à vendre la Vallée-aux-Loups (1817-1818). Il avait rencontré Juliette Récamier au printemps de 1817.

Ses interventions à la Chambre des pairs, ses brochures, les nombreux articles qu’il fournit au Conservateur, no-tamment, le révélèrent comme un politique de haut vol et un redoutable polémiste, en même temps qu’il était tenu par les « romantiques » royalistes (Hugo au premier chef) comme la fi gure même de la souveraineté du génie. Puissance d’opinion souvent jugée encombrante par ses « amis » politiques, il fut « éloigné » à deux repri-ses de France, au moment du retour des royalistes au ministère : l’ambassade de Berlin (1821), puis celle de Londres (1822), ne furent guère que des pis-aller. Chateaubriand, qui pourtant portait un soin extrême aux dépêches qu’il rédigeait, s’y ennuya.

Les événements d’Espagne, où les Cortès voulurent imposer au roi Ferdinand VII une constitution inspirée de la Constitution française de 1791, lui furent l’occasion d’accéder enfi n à un rôle à sa dimension : nommé minis-tre des Affaires étrangères, il défendit le principe de l’intervention qui rétablit en 1823 Ferdinand sur son trône après la victoire du Trocadéro. Las, ce « triomphe » ne lui fut pas compté : le 6 juin 1824, il était renvoyé du ministère « comme un voleur » – ce fut le commen-cement d’une virulente campagne d’opposition au ministère Villèle, menée dans le Journal des Débats.

L’accession au trône de Charles X déçut assez rapidement ses ambitions et il poursuivit, en parallèle à la publication de ses Œuvres complètes à partir de 1826, sa campagne contre le ministère jusqu’à la chute de Villèle, en 1827. Il ne fut pas pour autant rétabli dans le ministère qu’il sou-haitait, mais éloigné une fois de plus, à Rome, comme ambassadeur cette fois (1828). La nouvelle de la consti-tution du ministère Polignac le conduisit à démissionner.

Chateaubriand en costume de pair de Francepar Pierre-Louis Delaval - huile sur toile - 1828

« Pauvre et riche, puissant et faible, heureux et misérable, homme d’action, homme de pensée, j’ai mis ma main dans le siècle, mon intelligence au désert ; l’existence effective s’est montrée à moi au milieu des illusions, de même que la terre apparaît aux matelots parmi les nuages. Si ces faits répandus sur mes songes, comme le vernis qui préserve des peintures fragiles, ne disparaissent pas, ils indiqueront le lieu par où a passé ma vie. Dans chacune de mes trois carrières je m’étais proposé un but important : voyageur, j’ai aspiré à la découverte du monde polaire ; littérateur, j’ai essayé de rétablir le culte sur ses ruines ; homme d’État, je me suis efforcé de donner aux peuples le système de la monarchie pondérée, de replacer la France à son rang en Europe, de lui rendre la force que les traités de Vienne lui avaient fait perdre ; j’ai du moins aidé à conquérir celle de nos libertés qui les vaut toutes, la liberté de la presse. Dans l’ordre divin, religion et liberté ; dans l’ordre humain, honneur et gloire (qui sont la génération humaine de la religion et de la liberté) : voilà ce que j’ai désiré pour ma patrie. » (Mémoires d’outre-tombe, XLII, 17)

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Durant la révolution de Juillet, il ajoutait aux cris des étu-diants qui le portaient en triomphe, celui de « Vive le Roi ». Il fut l’un de ceux, peu nombreux, qui refusèrent de prêter serment à Louis-Philippe : il s’en expliqua ma-gnifi quement dans son ultime discours prononcé devant les pairs, accablant au passage Charles X de sa fi délité, avant de dresser contre le régime de Louis-Philippe une fl amboyante opposition, entamée dès 1831 par deux brochures virulentes et qui ne se démentit pas, lui valant même quelques jours de détention en 1832. Il revit le vieux roi en exil en 1833, en Bohême, où il se rendit en une vaine ambassade à la demande de la duchesse de Berry, mère du futur comte de Chambord (« Madame, votre fi ls est mon roi »), prince auprès duquel il se rendit en 1843 (à Londres) et en 1845 (à Venise). Aux Études historiques, publiées hâtivement en 1831, il ajouta un Essai sur la littérature anglaise et une traduction du Paradis perdu de Milton (1836) ; en 1838, avec le Congrès de Vérone, il revint longuement sur son « René en politi-que », « sa » guerre d’Espagne de 1823.

1830 avait marqué la fi n de sa « carrière politique », ainsi que la révision du projet des Mémoires d’outre-tombe – remaniés jusqu’en 1847 –, qui ne parurent qu’après sa mort. Enveloppant tous les sens qu’avait recouverts tra-ditionnellement le genre des mémoires, élevant cette synthèse au rang d’une épopée de son temps dont la fi gure centrale, homme des dualités et des confi ns, nage d’une rive à l’autre (mais à lui inconnue, retirée au-delà de tout horizon visible) de l’histoire, le chef-d’œuvre enregistre in fi ne le divorce, au moins momentané, de l’histoire et du temps : « je ne suis plus que le temps », écrivit-il en 1844 dans l’ultime ouvrage paru de son vivant, la Vie de Rancé.

Il s’éteignit à Paris le 4 juillet 1848, un an après son épouse, et fut enterré selon son vœu, seul, au large de Saint-Malo, sur l’îlot du Grand-Bé. Mme Récamier mourut le 11 mai 1849 ; les Mémoires d’outre-tombe avaient commencé de paraître en feuilleton dans La Presse le 21 octobre 1848.

Chateaubriandpar Antoine Étex -

huile sur toile - 1847

« En traçant ces derniers mots, ce 1er novembre 1841, ma

fenêtre qui donne à l’ouest sur les jardins des Missions

étrangères, est ouverte : il est six heures du matin ; j’aperçois

la lune pâle et élargie ; elle s’abaisse sur la fl èche des

Invalides à peine révélée par le premier rayon doré de

l’Orient ; on dirait que l’ancien monde fi nit, et que le nouveau

commence. Je vois les refl ets d’une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. Il ne me reste qu’à m’asseoir au bord

de ma fosse ; après quoi je descendrai hardiment,

le crucifi x à la main, dans l’éternité. » (Mémoires

d’outre-tombe, XLII, 18)

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Sceaux, Aulnay et Châtenay : destins croisésC’est sur la seigneurie d’Aulnay que se situe au XVIIe siècle le hameau d’Aulnay, incluant le lieu dit de la Vallée-aux-Loups, qui paraît avoir tiré son nom de la présence de loups. Ledit hameau dé-pend alors de Sceaux pour le temporel, et de Châte-nay – dont l’église est placée sous l’invocation de saint Germain l’Auxer-rois – pour le spirituel. La seigneurie d’Aulnay est acquise, le 16 juillet 1683, auprès de l’Abbaye ro-y ale de Sainte-Geneviève de Paris, par Jean-Baptiste Colbert (1619-1683), qui possède déjà la seign eu-rie de Sceaux, achetée le 11 avril 1670, où il avait transformé et agrandi le château édifi é en 1597. Situées à un niveau plus élevé que Sceaux, les terres d’Aulnay devaient permettre à Colbert d’a limenter, par captage des eaux, le parc de son château.

Jean-Baptiste Colbert par Nanteuil, d’après Champaigne - gravure

La Vallée-aux-Loups, de Colbert à Chateaubriand

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Après la mort de Colbert, son fi ls Jean-Baptiste (1651-1690), marquis de Seignelay, hérite de tous ses biens. Il achète en outre, le 20 janvier 1687, à l’Église cathédrale de Paris, la seigneurie de Châtenay, qui borde au sud la seigneurie d’Aulnay.

Neuf ans après le décès du marquis de Seignelay (3 no-vembre 1690), la « terre, seigneurie et baronnie de Sceaux [...] plus les terres et seigneuries de Châtillon, du Plessis-Picquet, de Châtenay et d’Aulnay, [...] consistant aussi en fermes, bâtimens, terres labourables, prez, vignes, cens et rentes, et droits de justice [...] et généralement toutes les autres appartenances et dépendances des-dites terres et seigneuries » (acte du 20 décembre 1699), sont vendues à Mgr Louis-Auguste de Bourbon, souverain de Dombes, duc du Maine et d’Aumale, comte d’Eu, fi ls légitimé de Louis XIV et de Mme de Montespan.

Veüe du chateau de seaux prise dans l’Eloignement en Face du côté de chatenaypar J. Rigaud - lithographie

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Trois jours après l’avoir achetée, le duc du Maine donne à Nicolas de Malézieu (1650-1727), qui fut son précepteur, la seigneurie de Châtenay. Malézieu, chancelier des Dombes, membre de l’Académie des Sciences (1699) et de l’Aca-démie française (1701), ami de Bossuet, y reçoit le duc et la duchesse du Maine avant leur installation à Sceaux et donne de somptueuses fêtes en leur honneur. Jouissant d’une perspective sur Sceaux et Berny, les convives goûtent les tables abondantes, les promenades dans les bois et prairies environnantes, les parties de chasse, les conversations et jeux du soir, ainsi que les spectacles variés (feux d’artifi ce, opéra, comédie-ballet, mascarades...).

Après la mort du duc (1736) et de la duchesse du Maine (1753), c’est leur second enfant, Louis-Auguste de Bourbon, prince de Dombes (1700-1755), qui hérite de leurs biens, puis son frère Louis-Charles (1701-1775), comte d’Eu, lieutenant géné-ral des armées du roi. À la mort de ce dernier, les propriétés passent à son cousin, Louis-Jean-Marie de Bourbon, duc de Penthièvre (1725-1793), qui possédait déjà de nombreux domaines et ne fi t que de courts séjours à Sceaux. Son souve-nir perdura néanmoins dans les communes avoisinantes du fait des abondants secours qu’il donna aux populations.

Détruit vers 1803, le château de Sceaux fut reconstruit au XIXe siècle par le duc de Trévise ; il abrite aujourd’hui le musée de l’Île-de-France.

Retour à la Vallée-aux-Loups

C’est à partir de 1752 que commence à se distinguer nette-ment la Vallée-aux-Loups de l’ensemble dont elle faisait partie jusque-là. Un an avant sa mort, la duchesse du Maine se dessaisit par bail à cens et rente de quelques terrains situés à la Vallée-aux-Loups au profi t de Jean Benoît, son fermier laboureur : celui-ci avait à charge d’achever la construction d’un mur délimitant sa propriété, mais ne put tenir cet engagement. Le 20 juillet 1776, la Vallée-aux-Loups est vendue aux enchères au sieur Basly, écuyer, conseiller du roi, avocat au Parlement et au Conseil, qui obtient de lever l’obligation faite au précédent propriétaire, et rachète la rente due au duc de Penthièvre. Le hameau d’Aulnay compte alors seulement six foyers.

En 1782, Basly donne en dot la propriété à sa fi lle, qui la vend un an plus tard à André-Arnoult Aclocque (1748-1802).

Pavillon du parc de Mr de Châteaubriand

(Vallée aux Loups)par Benard,

d’après Villain - lithographie

« [...] au fait je ne sais trop ce qui me plaît et ce que je veux.

J’ai cependant un grand plaisir, c’est de m’enfermer dans la vieille France, d’oublier

les nouvelles excepté vous et quelques personnes rares ; tant que je bouquine, cela

va bien, mais quand je cesse de lire et de griffonner,

malheur à moi. [...] » (lettre de Chateaubriand à

Mme de Duras, 26 juin 1813)

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Le premier bâtisseur de la Vallée-aux-LoupsLe 21 août 1783, précisément, ce brasseur parisien et s oldat de la garde nationale achète pour 7 500 livres un terrain planté de châtaigniers dans ce lieu-dit, afi n de se rapprocher de son oncle Jean-Baptiste Aclocque qui habite alors Châtenay.

Il s’agit d’un clos sans construction ceint d’un mur de pierre, où une serre en maçonnerie avait été antérieu-rement démolie. Le nouveau propriétaire fait édifi er en bordure de l’ancien chemin de l’Orme Mort une petite

maison constituée d’un rez-de-chaussée, d’un étage et d’un grenier, avec une cour dotée d’une terrasse.

Devant sa résidence, Aclo c -que plante un potager et un verger, et élève plusieurs dépendances : une basse-cour, une remise, une écurie, une étable, deux jardins, un enclos, ainsi qu’un pavillon. En mêlant diverses sources, il crée un ru, s’écoulant le long du verger.

Autour du pavillon en brique et pierre qu’il édifi e au fond du parc – au-jourd’hui dénommé Tour Velléda, du nom d’un per-sonnage des Martyrs – s’est nouée une légende, dont Mme de Chateaubriand s’est fait l’écho dans ses Cahiers : elle aurait été édi-fi ée en quelques jours pour accueillir Marie-Antoinette. Cette légende a trouvé son origine dans le royalisme d’Aclo cque qui, le 20 juin 1792, alors commandant d’une légion de la garde

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natio nale, avait sauvé Louis XVI lors de l’invasion des Tuileries en convainquant le Roi de se présenter devant la foule en arborant le bonnet rouge et la cocarde tricolore, et en buvant à la santé de la Nation.

Après la prise des Tuileries et la chute de la royauté (10 août 1792), Aclocque est obligé de s’enfuir à Sens, et fait vendre sa propriété par son épouse pour la somme de 35 000 livres (acte de vente du 10 février 1793). Neuf propriétaires se succèdent ensuite, préoccupés semble-t-il avant tout de spéculation, sans apporter d’altération ma-jeure à la propriété, qui est ainsi acquise par Chateaubriand en 1807 à peu près dans l’état où elle se trouvait en 1793.

*

De retour à Paris, en 1800, le brasseur emménage à Saint-André-des-Arts et dirige une entreprise de moutarde et de vinaigre appartenant à Maille. Les produits sont exportés dans toute l’Europe. Il meurt le 5 août 1802. Son fi ls aîné, Gabriel Aclocque, est nommé baron en 1814. Il achète en 1822, à Aulnay, une propriété séparée seulement d’une muraille de celle que son père possédait jadis. Il s’agit du domaine qui appartient actuellement à la famille Thévenin, rue Chateaubriand, en face de l’arboretum.

Intérieur de la Tour Velléda

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Dès 1803, Chateaubriand, las de « l’admiration stérile » qu’on lui porte, exprime le « vœu sincère et permanent de [s]on cœur » de goûter « au bonheur de la retraite et du repos », aspirant à « une chaumière et un coin de terre à labourer de [s]es mains » : il le réalise après la publication dans le Mercure de France, à son retour d’Orient, d’un article dans lequel, nouveau Tacite, il comparaît Napoléon, qui n’apprécia guère, à Néron et mettait en garde certains de ses amis royalistes contre la tentation d’un gouvernement absolu dont le spectacle du despotisme ottoman l’avait « bien guéri ».

Le 22 août 1807, François-René de Chateaubriand et son épouse Céleste achètent ainsi la Vallée-aux-Loups,

Chateaubriand à la Vallée-aux-Loups

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au hameau d’Aulnay, paroisse de Châtenay, sans que l’on sache ce qui les détermina à choisir ce lieu en parti-culier pour s’y installer. La transaction est réalisée pour un montant de 20 000 francs – somme couverte par un prêt hypothécaire consenti le 31 octobre 1807 par Mme Thiroux-Monregard, veuve Choiseul-Beaupré – devant Me Denis, notaire royal à Paris. À cette somme s’ajoutent 10 000 francs de mobilier et 3 000 francs de frais.

L’acte de vente décrit succinctement une maison « consis-tant au rez-de-chaussée en une cuisine, salle à manger, salon attenant, chambre de travail avec bûcher derrière, au premier étage en quatre chambres avec des cabinets ; deux grands greniers et un fruitier au-dessus dudit premier étage ; au dessous dudit bâtiment quatre caves, cour, ter rasse, basse cour, remise, écurie, étable, vacherie, laite-rie, grange, poulailler, douze lapinières, colombier, volailler avec des faisans, une vache laitière, une bourrique avec une charrette, un jardin potager avec sa maçonnerie bien entourée, puits dans ledit jardin, prairie, vigne, bois enveloppant un joli pavillon, canal empoissonné, bordé d’arbres des deux côtés, bois couvert de tilleul ».

Murs du parc Chateaubriand à Aulnaypar Jean-Jacques Champin - sépia

« Je ne peux, ma chère, te donner des nouvelles de l’insurgé. [...] J’ai su par des étrangers qu’il était fort tranquille et qu’il avait fait l’acquisition d’une jolie maison de campagne, avec de beaux jardins [...]. Je souhaite qu’il y soit heureux [...]. » (lettre de Marie-Anne de Marigny, sœur de l’auteur, à sa sœur Bénigne de Chateaubourg, 23 septembre 1807)

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Quant au parc, il représente « sept hectares et demi (15 arpents) de terrain environ » ; c’est Aclocque qui aurait fait rectifi er cette superfi cie, évaluée à quatorze arpents au moment de la vente par la duchesse du Maine.

D’octobre 1809 et jusqu’au 1er avril 1817 – c’est-à-dire trois jours avant la mise en loterie ! –, les Chateaubriand ont, en cinq achats successifs, agrandi leur domaine de plus de 80 ares ; le dernier achat couvre deux arpents « ou en viron », « anciennement en bois essence de chêne et châtaigniers », et atteint 4 000 francs payés comptant.

Au total, les dépenses liées à l’aménagement et à l’embel lis-sement du lieu furent bien lourdes pour Chateaubriand, ainsi que le craignait son ami Joseph Joubert dès septembre 1807, jetant de « hauts cris sur les difformités du lieu et sur l’énormité des dépenses où la nécessité de se plaire dans son chez lui va le jeter », ce que Chateaubriand confi rma, dans une lettre du 20 juin 1812 à Mme de Duras : « Le contrat de vente de la Vallée-aux-Loups n’est que de 20 000 francs quoiqu’elle m’en ait coûté 30 000. [...] J’ai mangé [...] depuis plus de 150 000 francs dans la Vallée, à la bâtir, à la planter, etc. »

En attendant de prendre possession de leur maison, qui nécessite réparations et aménagements, les Chateaubriand logent à l’Hôtel de Lavalette, rue des Saints-Pères, à Paris. À la fi n du mois d’octo-bre 1807, ils s’installent dans leur nouvelle mai-son « pleine d’ouvriers qui riaient, chantaient, cognaient, [...] chauffée de copeaux et éclairée par des bouts de chandelle ».

La grille « Colbert » du parc de la Maison de ChateaubriandGravure sur bois

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Un écrivain en sa demeure

La maison construite par Aclocque subit en effet plu-sieurs modifi cations. Au rez-de-chaussée, Chateaubriand installe un escalier de bateau à double branche : le Malouin de naissance se souvenait avoir traversé l’Atlantique.

Du côté du Bois de la Cave – où une allée mène de la grille d’entrée actuelle à la maison, allée à gauche de laquelle était alors situé le chemin vicinal de l’Orme Mort –, il fait peindre sur le mur le séparant du chemin des créneaux et des décors gothiques, et construit une porte ogivale encadrée par deux tourelles à la façon de l’entrée d’un château fort – n’avait-il pas passé sa jeunesse au château de Combourg ?

Grand escalier

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Contre la façade regardant le parc (l’entrée principale se fait alors au fond du parc, par la grille dite de Colbert), Chateaubriand fait édifi er un portique orné de cariatides de marbre blanc et de colonnes de marbre noir qui lui rappellent son voyage en Grèce.

À travers ces aménagements s’exprime une nostalgie qu’à deux reprises Chateaubriand développa à cette période, dans les Aventures du dernier Abencérage (rédigés en 1810) ainsi que dans son discours de réception à l’Institut en février 1811 : celle du temps des Valois, et plus parti-culièrement du règne de François Ier, qui vit selon lui se marier « l’honneur, la loyauté, la chevalerie des anciens temps, [...] à la politesse des siècles civilisés, les tourelles gothiques ornées des ordres de la Grèce [...] ».

Façade sud de la Maison : portique et cariatides« La Maison (qui n’était [...] qu’une Chaumière) a été refaite tout entière dans l’intérieur, et décorée extérieurement d’un portique de marbre supporté par des cariatides dont le torse est antique. On trouve dans l’intérieur, au rez-de-chaussée : un Vestibule avec un escalier à deux branches, et disposé pour y mettre des fl eurs ; une Cuisine, une Salle à manger, un Salon (qui n’est pas meublé) ; un Offi ce bâti par le propriétaire. [...] » (prospectus de la mise en loterie, 4 avril 1817)

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Dans la Tour Velléda, dans la partie haute du parc, Chateaubriand installe sa bibliothèque dans laquelle il se retire jusqu’à douze heures par jour pour travailler. Il y dépose des objets et fragments rapportés de son voyage autour de la Méditerranée : « [...] je suis rentré dans mes foyers avec une douzaine de pierres de Sparte, d’Athènes, d’Argos, de Corinthe, trois ou quatre petites têtes en terre cuite que je tiens de M. Fauvel, des cha-pelets, une bouteille d’eau du Jourdain, une autre de la mer Morte, quelques roseaux du Nil, un marbre de

La Tour Velléda« Pendant qu’on restaurait la principale demeure, retiré dans une chapelle étroite consacrée aujourd’hui sous le nom de Tour de Velléda, il resta deux hivers séparé du monde. On m’a dit qu’il commençait à six heures sa double journée de poète et de jardinier. Il quittait l’étude pour aller tenir de ses mains le jeune cèdre dans la place qu’il avait fait ouvrir ; et après avoir exactement, autour des racines, appuyé la terre avec son sabot de paysan, il revenait ranimer son âtre, et reprendre cette plume qui donnait la vie à Eudore et la grâce à Cymododée. » (Henri de Latouche, « Étude de paysage », Vallée aux Loups. Souvenirs et fantaisies)

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Carthage et un plâtre moulé de l’Alhambra », écrit-il dans l’Itinéraire de Paris à Jérusalem. Mme de Chastenay témoigne que, placés « dans un joli jardin, sauvage quoique arrangé, dans un petit pavillon où les chants de Cymodocée furent dictés avec tant de charme, où les mœurs agrestes des Gaules furent peintes avec tant d’énergie », ils « prêtaient à l’intérêt, et non au ridicule ». Dès 1810, les Chateaubriand prévoient d’installer une chapelle à l’étage du bâtiment. Ce projet n’aboutit que trois ans plus tard ; la première messe y fut célébrée le 26 juin 1813 – cet intervalle assez long fi t dire que Chateaubriand avait coutume d’y recevoir ses amies.

Chateaubriand jardinier

Si en 1807 Madame de Chateaubriand trouve la maison comparable à « une espèce de grange » et estime que parmi les arbres, seul un fort bel acacia mérite l’intérêt, elle concède toutefois que « [...] ce verger rempli de mouvements de terrain et environné de coteaux plantés était susceptible de devenir un fort joli jardin ». Céleste s’imagine quelque temps pouvoir disputer à son mari le titre de « jardinier par excellence », mais doit rapide-ment en rabattre devant l’alliance de son mari et de Benjamin, « le plus fripon des jardiniers ».

Les Cahiers de Mme de Chateaubriand rapportent en effet qu’elle souhaitait planter des arbres « en avant », afi n de former un « enfoncement » destiné à donner « de la grandeur au jardin ». Ce n’était rien d’autre que la mise en œuvre de l’un des principes fondamentaux du jardin anglais tel qu’on le concevait depuis la fi n du XVIIe siècle : comme dans une peinture de paysage, les groupes d’arbres placés en premier plan permettent d’accentuer la profondeur de l’espace.

Chateaubriand ne voulut rien céder sur cet article. Il s’af-franchit au contraire des modèles en vogue, jardin à la française ou jardin anglo-chinois si prisé au XVIIIe siècle, pour créer une œuvre personnelle, un parc littéraire (voir encadré p. 34) : les arbres qu’il choisit revêtent une autre valeur que celle de simples éléments d’un décor. L’écrivain se souvient de ses nombreux voyages ; il plante des essences provenant des pays qu’il a visités (cèdre du Liban et de Virginie, pin de Jérusalem, catalpa, cyprès chauve,

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Cèdre du Liban« Revenu de Montboissier, voici les dernières lignes que je trace dans mon ermitage [...]. Je ne verrai plus le magnolia qui promettait sa rose à la tombe de ma Floridienne, le pin de Jérusalem et le cèdre du Liban consacrés à la mémoire de Jérôme, le laurier de Grenade, le platane de la Grèce, le chêne de l’Armorique, au pied desquels je peignis Blanca, chantai Cymodocée, inventai Velléda. » (Mémoires d’outre-tombe, III, 8)

Catalpa

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hêtre pourpre, magnolia, laurier de Grenade), semblable en cela aux négociants et matelots de sa terre natale qui considéraient leurs arbres comme « quelque souvenir d’une autre rive et d’un autre soleil : c’est l’itinéraire et la carte du maître du lieu ».

Il fait « coup[er] une colline devant la Maison pour élargir les entrées, et adoucir la pente du chemin », trace les allées, et demande à ses nombreuses relations de contribuer au peuplement de son ermitage en essences diverses : ses amies Natalie de Noailles et Claire de Duras lui adressent des plants de leurs propriétés de Méréville et d’Ussé, le botaniste Humboldt s’entremet auprès d’Aimé Bonpland, jardinier de la Malmaison, pour lui obtenir quelques sujets des serres impériales. Chateaubriand se rend même person nellement à la Malmaison, au début de mai 1812, en frac, pour y recevoir des mains de Joséphine un magnolia à fl eurs pourpres qui, aux dires de son épouse, était « le seul qu’il y eût alors en France après celui qui lui restait à la Malmaison ». Enfi n, des acquisitions faites chez les pépiniéristes d’Île-de-France comme Cels, à la barrière du Maine, ou Noisette, faubourg Saint-Jacques, viennent compléter le peuplement du parc.

Maison de Mr de Châteaubriant dans la Vallée aux Loupspar Felipe Cardano, d’après Constant Bourgeois - gravure dans Alexandre de Laborde, Description des nouveaux jardins de la France et de ses anciens châteaux, Paris, 1808-1815

« Si jamais les Bourbons remon-tent sur le trône, je ne leur demanderai, en récompense de ma fi délité, que de me rendre assez riche pour joindre à mon héritage la lisière des bois qui l’environnent : l’ambition m’est venue ; je voudrais accroître ma promenade de quelques arpents : tout chevalier errant que je suis, j’ai les goûts sédentaires d’un moine : depuis que j’habite cette retraite, je ne crois pas avoir mis trois fois les pieds hors de mon enclos. Mes pins, mes sapins, mes mélèzes, mes cèdres tenant jamais ce qu’ils promettent, la Vallée-aux-Loups deviendra une véritable chartreuse. » (Mémoires d’outre-tombe, I, 1)

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Chateaubriand planta ainsi « des milliers d’arbres verts, à peine hauts d’un pied », qui ne devaient malheureu-sement jamais rendre à l’écrivain l’ombre paternelle qu’il ne cessa de leur prodiguer. « J’ai fait deux cents fois le tour de cette petite vallée que vous avez daigné visiter, écrit-il le 29 mars 1810 à Mme de Duras, et j’aime tant mes arbres [...] que je ne puis les perdre de vue un moment. Quel dommage que ce plaisir soit si cher ! Si j’étais riche, il est bien clair que mon rôle serait fi ni dans la vie, et que je deviendrais un gentleman farmer dans toute la force du mot ».

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Chateaubriand plantant un cèdrepar André Édouard Marty - encre

« Mes arbres, étant encore petits, ne recueillaient pas les bruits des vents de l’automne ; mais, au printemps, les brises qui haleinaient les fl eurs des prés voisins en gardaient le souffl e, qu’elles reversaient sur ma vallée. » (Mémoires d’outre-tombe, XVIII, 5)

La Maison de Chateaubriand

aujourd’hui« La Vallée aux Loups,

tout assombrie de ses forêts en feuilles, et toute résonnante

de ses rossignols, ressemblait à l’avenue d’un mystère. [...]

le Chateaubriand de la Vallée aux Loups a toujours été pour

moi le véritable Chateaubriand. L’un était un rôle, l’autre était

un homme. » (Lamartine, Cours familier de littérature,

entretien X, 1856)

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Si la Vallée-aux-Loups est pour Chateaubriand un « ermitage », une « thébaïde » ou encore une « chartreuse », le couple y reçoit toutefois de fréquentes visites. « La distance était trop petite, rapporte Mme de Chateaubriand, pour qu’on ne vînt pas nous voir souvent, et trop grande pour qu’on ne passât pas au moins la journée ». Les amis intimes, Clausel de Coussergues, Louis de Fontanes (nommé grand-maître de l’Université en 1808), Joseph Joubert et son épouse, Mmes de Vintimille, de Lévis, de Bérenger, mais aussi le chancelier Pasquier (préfet de police de 1810 à 1814), le journaliste Bertin l’aîné, l’abbé de Bonnevie, etc., se réunissent régulièrement autour de l’Enchanteur. Chaque 4 octobre, l’on célèbre à la Vallée-aux-Loups la Saint-François, fête de l’auteur et jour anniversaire de son entrée à Jérusalem (1806).

Céleste – délaissée par son époux qui écrit et « plante et déplante, tant qu’il peut » –, « suffoquée du besoin de mal parler du genre humain et surtout des gens qui reviennent de Barbarie assez barbares pour enfermer leur femme entre quatre montagnes », met toute son

La salle à manger (détail)

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ardeur à faire miroiter à ses hôtes espérés les délices « gargottés à merveille » par le cuisinier Ménil, dont le penchant affi rmé pour la boisson le contraint à n’exercer ses talents qu’après avoir sacrifi é à Bacchus. « Pour moi, écrit-elle à Joubert, je trouve qu’une appa-rition de vivants est toujours bonne [...] La Vallée est triste à mourir et ses habitants ennuyeux à périr. Que cela ne vous décourage pas ; tout changera de face à votre arrivée ». Elle fait là écho au vœu exprimé par Chateaubriand en 1803 au même Joubert : « Puissions-nous avant d’être trop vieux nous rassembler tous sous le même toit ! Quel bonheur alors dans notre radotage, quelle joie dans nos tristesses, quelle gaîté dans nos humeurs ! Je suis convaincu que nous fi nirons par là. [...] ».

Céleste de Chateaubriandpar Hippolyte-Benjamin Adam - huile sur toile - 1836

« Comme je ne suis point mélancolique et que j’ai passé l’âge où l’on aime à soupirer, je n’aime ni le vent ni la lune ; je ne me plais qu’à la pluie pour mon gazon, et au soleil pour me réjouir. » (lettre de Céleste de Chateaubriand à Clausel de Coussergues, Val-du-Loup, 27 juillet 1811)

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Une autre visiteuse, Madame de Boigne, tendre amie du chancelier Pasquier, mémorialiste fameuse, qui habita à Châtenay dans la maison présumée natale de Voltaire de 1812 à 1848 (où Juliette Récamier passa plusieurs étés), a laissé de Chateaubriand le portrait d’un « solitaire » heu-reux des visites imprévues : « Il faisait un cri de joie en nous voyant passer devant sa fenêtre [...] arrivant au-devant de nous avec la gaîté d’un écolier émancipé de classe ».

Chateaubriand rompt également sa solitude en se ren-dant régulièrement à Paris : le couple y séjourne durant l’hiver, et l’auteur s’y occupe de ses affaires de librairie, de ses tractations avec des séides de l’Empire puis, à partir de 1814, de politique. Les Chateaubriand font éga-

Chateaubriandpar Aubry-Lecomte, d’après Girodet-Trioson - lithographie

« On aurait dû s’apercevoir, il y a longtemps, que M. de Ch[ateaubriand] peut, avec un égal succès, être sobre ou être prodigue, qu’il emploie avec le même goût et la même noblesse le luxe et la simplicité ; que ce grand peintre n’a besoin pour charmer d’aucune couleur quand il ne veut que dessiner, et que, même lorsqu’il colore, il le fait avec épargne ou avec profusion, comme il lui plaît. [...] Ce beau génie excelle également et à peindre les objets comme il les voit, et à les voir comme il les aime, et à les juger tels qu’ils sont.

Ce sont là trois genres de mérite bien éminents et que possède au plus haut degré et à doses égales, quand il le veut, l’être aimable et un peu mêlé que nous nommons : Chateaubriand.

[...] C’est un enfant quand il est gai, un grand homme quand il est grave, un ange quand il aime, un gnome sombre et un peu noir lorsqu’il est de mauvaise humeur. Il résulte de toutes ces compositions l’homme du monde le plus aisé à vivre, à conserver, à louer, à gronder, à critiquer, à apaiser et à fâcher. [...] » (Joseph Joubert, lettre à Mme de Lévis, 22 octobre 1814)

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lement plu sieurs séjours à Méréville chez les Laborde (où Cha teaubriand ren-contra en 1805 Natalie de Noailles), à Verneuil chez les Tocque ville (le comte de Tocqueville, qui avait épousé une petite-fi lle de Malesherbes, était le beau-frère par alliance du frère de Chateaubriand, Jean-Baptiste, et le tuteur de ses enfants), au Mesnil chez les Rosanbo (le petit-fi ls de Malesherbes, vicomte de Rosanbo, et son épouse), à Chanday, à Montboissier, etc. Enfi n, les visites à ses « Madames », selon l’expression de son épouse, sont à l’écrivain d’autres occasions de s’é loigner d’Aulnay.

Le séjour de Chateaubriand à la Vallée-aux-Loups ne se résume pas de la sorte à la paisible retraite loin du monde dont peuvent donner l’impression les regrets sincères d’avoir dû quitter ce lieu exprimés par Chateaubriand dans les Mémoires d’outre-tombe et sa cor respondance. Homme des réalités et des chimères, homme du monde et « sauvage » à la fois, homo duplex, Chateaubriand demeura tiraillé entre les affaires du temps, la déception qu’il pouvait en éprouver, et une aspiration profonde à la solitude et à sa mélancolie.

Rayé de la liste des ministres d’État le 21 septembre 1816, privé de la pension afférente de 24 000 francs annuels, Chateaubriand, qui n’a toujours pas remboursé les emprunts faits pour sa propriété, a l’idée de propo-ser, au début du mois d’avril 1817, la Vallée-aux-Loups en loterie : quatre-vingt-dix billets de 1 000 francs chacun sont ainsi imprimés et, le 12 avril, le Journal des Débats de son ami Bertin, apporte son concours à la publicité de l’opération : « Nous pouvons parler, en connaissance de cause, de cette demeure charmante, de ces beaux arbres trop tôt ravis aux mains qui les ont plantés ; et

Lettre autographe signée de Chateaubriand à son neveu, 12 avril 1817Manuscrit

« Je vous envoie, mon cher neveu, quelques prospectus de la vente de ma petite maison de campagne auprès de Paris. Faites les circuler dans votre département : quoiqu’on n’y soit pas riche, quelques amateurs peuvent se laisser tenter. [...] »

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Vue de la Maison de Chateaubriandpar James Forbes - aquarelle - 28 juillet 1817Coll. Musée de l’Île-de-France (Sceaux)

« On racontait à Vienne, il y a deux ou trois lustres, que je vivais tout seul dans une certaine vallée appelée la Vallée-aux-Loups. Ma maison était bâtie dans une île : lorsqu’on voulait me voir, il fallait sonner du cor au bord opposé de la rivière. (La rivière à Châtenay !) Alors, je regardais par un trou : si la compagnie me plaisait (chose qui n’arrivait guère), je venais moi-même la chercher dans un petit bateau ; sinon, non. Le soir, je tirais mon canot à terre, et l’on n’entrait point dans mon île. Au fait, j’aurais dû vivre ainsi ; cette histoire de Vienne m’a toujours charmé : M. de Metternich ne l’a pas sans doute inventée ; il n’est pas assez mon ami pour cela. » (Mémoires d’outre-tombe, XXXVIII, 8)

nous félicitons d’avance la personne qui devra à la faveur du sort la propriété d’une campagne qui, comme celles de Tibur et d’Auteuil, sera à jamais illustrée par le nom et le souvenir de son premier créateur ». Le 24 avril, Pierre-Simon Ballanche, pourtant ami et imprimeur de Chateaubriand, déplore la publicité donnée par les journaux à cette vente : « [...] ce n’est pas sans un profond chagrin que j’ai vu l’annonce du Val-de-Loup en loterie. J’ai trouvé cela plus que triste, car je l’ai trouvé misérable. Sans doute son nom ajoute quelque chose à ce petit tertre de terre, mais est-ce à lui à agioter sur sa renommée ? ».

Las ! quelques billets seulement sont souscrits (quatre selon Chateaubriand, un peu moins de vingt d’après Mme de Montcalm). Chateaubriand n’a plus d’autre solution que de rembourser les souscripteurs (certains s’y refusent), et de vendre aux enchères sa bibliothèque : la session, qui

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Bureau de Montboissierattribué à Lemarchand fi ls - acajou et placage d’acajou

« Depuis la dernière date de ces Mémoires, Vallée-aux-Loups, janvier 1814, jusqu’à la date d’aujourd’hui, Montboissier, juillet 1817, trois ans et six mois se sont passés. [...] Hier au soir je me promenais seul [...] Je fus tiré de mes réfl exions par le ga z ouillement d’une grive perchée sur la plus haute branche d’un bouleau. À l’instant, ce son magique fi t reparaître à mes yeux le domaine paternel ; j’oubliai les catastrophes dont je venais d’être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j’entendis si souvent siffl er la grive. Quand je l’écoutais alors, j’étais triste de même qu’aujour-d’hui ; mais cette première tristesse était celle qui naît d’un désir vague de bonheur, lorsqu’on est sans expérience ; la tristesse que j’éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l’oiseau dans les bois de Combourg m’entretenait d’une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rap pelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité in sai sissable. Je n’ai plus rien à apprendre ; j’ai marché plus vite qu’un autre, et j’ai fait le tour de la vie. Les heures fuient et m’en traînent ; je n’ai pas même la certitude de pouvoir achever ces Mémoires. Dans combien de lieux ai-je déjà commencé à les écrire, et dans quel lieu les fi nirai-je ? » (Mémoires d’outre-tombe, II, 10)

concerne 398 ouvrages (1 772 volumes), est détaillée dans une « Notice de bons livres provenant de la Bibliothèque de M. de Ch*** », qui annonce en outre la vente, durant les vacations, de « beaucoup de Livres qui ne sont pas portés sur la Notice » ; l’adjudication dure quatre jours, du 28 avril au 1er mai. Une fois encore, le Journal des Débats y apporte son concours, en l’annonçant le 29 avril. Ce n’est qu’une étape avant la vente de la Vallée-aux-Loups aux enchères.

Durant les cinq mois qui suivent, les Chateaubriand se rendent de château en château : à Montboissier, à Montgraham chez M. et Mme de Pisieux, à Lonné chez Mme d’Orglandes (sa nièce par alliance), et à Voré chez les parents de celle-ci, M. et Mme d’Andlau. À la fi n du mois d’octobre, ils trouvent enfi n un appartement à Paris, rue du Bac.

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Un parc lieu de mémoire

Le parc de la Vallée-aux-Loups est avant tout, d’un terme galvaudé mais en l’occurrence parfaitement approprié, un lieu de mémoire. Chateaubriand n’escomptait pas seulement des arbres qu’il y a plantés qu’ils protègent ses vieux jours en lui ren-dant l’ombre qu’il leur donnait alors qu’ils étaient tout petits encore. Il les a choisis « des divers

climats » où il avait erré, pour lui rappeler ses voyages. Évocations vivantes des lieux qu’il avait parcourus, ils jouaient cependant un autre rôle ; le mémorialiste ajoute en effet qu’ils nourrissaient « au fond de son cœur d’autres illusions ». La formule fait allusion à tout ce que Chateaubriand mit de lui-même et de sa propre histoire dans les personnages qu’il rêva à leurs pieds, « fi ls de ses songes » ou « fi lles de ses chimères » : Eudore, Cymodocée, Velléda, Blanca, Aben Hamet... Mais on peut entrevoir d’un peu plus près encore la nature de son attachement pour ses arbres en songeant que l’aménagement du parc a été contemporain de la mise en œuvre des mémoires : ses arbres y ont été « plantés et grandis, pour ainsi dire, dans [s]es souvenirs », souvenirs au milieu desquels il s’était établi « comme dans une grande bibliothèque : je consultais celui-ci et puis celui-là... ». Les arbres concoururent à cet établissement ; ils furent eux aussi des livres de cette bibliothèque de la mémoire. Mais à une grande différence près. Chateaubriand a poursuivi l’évocation de l’écriture de ses mémoires par ces mots : « [...] ensuite je fermais le registre en soupirant, car je m’apercevais que la lumière, en y pénétrant, en détruisait le mystère. Éclairez les jours de la vie, ils ne seront plus ce qu’ils sont ». Douloureuse et paradoxale expérience d’une conscience qui fait disparaître ce qu’elle met au jour ; par contraste, les arbres, enracinés et croissant dans les réminiscences, loin de s’évanouir à la lumière, leur conféraient, leur res-tituaient une vie propre, les ouvraient à l’avenir depuis leur fond de mystère et d’illusions.

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Le parc de la Maison de Chateaubriand« J’étais dans des enchantements sans fi n ; sans être madame de Sévigné, j’allais, muni d’une paire de sabots, planter mes arbres dans la boue, passer et repasser dans les mêmes allées, voir et revoir tous les petits coins, me cacher partout où il y avait une broussaille, me représentant ce que serait mon parc dans l’avenir, car alors l’avenir ne manquait point. En cherchant à rouvrir aujourd’hui par ma mémoire, l’horizon qui

s’est fermé, je ne trouve plus le même, mais j’en rencontre d’autres. Je m’égare dans mes pensées évanouies ; les illusions sur lesquelles je tombe sont peut-être aussi belles que les premières ; seulement elles ne sont plus si jeunes ; ce que je voyais dans la splendeur du midi, je l’aperçois à la lueur du couchant. – Si je pouvais néanmoins cesser d’être harcelé par des songes ! » (Mémoires d’outre-tombe, XVIII, 5)

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Les Martyrs (1809)Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811)Les Aventures du dernier Abencérage (1826)Moïse (1831)« Je suis au fond un vrai sauvage et certainement, si j’étais libre, je vivrais dans la solitude la plus absolue. Toutes les fois qu’on a un goût dominant, on n’est propre qu’à cela. Je sens fort bien que je ne suis qu’une machine à livres. [...] » (lettre de Chateaubriand à Mme de Duras, juillet 1812)

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Les œuvres de la Vallée-aux-Loups

L’époque de la Vallée-aux-Loups se situe, si l’on se fi e au découpage proposé par Chateaubriand lui-même, à la charnière de deux « carrières » de l’auteur futur des Mémoires d’outre-tombe : celle de l’écrivain, commencée sous le Consulat et continuée sous l’Empire ; celle du politique, qui débuta avec la première Restauration, se poursuivit sous les Cent-Jours et sous la seconde Restauration, jusqu’à la Révolution de 1830.

Les événements qui bornent cette époque n’ont pas dé-pendu du choix de Chateaubriand : c’est contre son gré qu’il dut quitter sa « chaumière » en 1817 ; c’est aussi, jusqu’à un certain point, contre son gré qu’il s’y installa en 1807 : il souhaita fuir, après la publication d’un article retentissant dans le Mercure de France, la colère de l’Empereur.

À dire vrai, les Mémoires d’outre-tombe ont donné plus de relief à la colère de l’Empereur en 1807 qu’elle n’en eut véritablement ; à plusieurs reprises, déjà, Chateaubriand avait exprimé à des correspondants choisis sa volonté de se retirer d’un monde auquel il n’allait pas tarder à s’affi rmer complètement étranger. En outre, dès avant la publication du Génie du Christianisme, il avait fait état de sa résolution de « jeter là le métier d’homme de lettres, du moins pour longtemps », résolution renouvelée en diverses occasions, non seulement avant sa nomination à Rome, mais égale-ment après. On a parfois jugé que c’était dès lors affi rmer que sa vraie voie était la politique. Il faut cependant faire sa part à une profonde insatisfaction devant les Lettres et les milieux littéraires, devant des pratiques qui n’étaient plus appropriées aux temps nouveaux, marqués par la séparation

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abyssale entre l’avenir et le passé, pratiques qui ne tenaient pas compte de la situation des contemporains, « restes infortunés d’un grand naufrage » (Discours académique, mars 1811) : la littérature ne pouvait plus avoir pour seule ambition la distraction ou l’agrément ; le partage entre la littérature d’une part et la politique de l’autre était appelé à être de plus en plus poreux.

La « solitude » de la Vallée-aux-Loups se révéla ainsi propice à un recueillement, à une interrogation de soi et de l’histoire qui alla de pair avec une interrogation de la litté-rature, comme le refl ète la diversité des genres auxquels s’est alors attaché Chateaubriand : épopée, tragédie bibli-que, récit troubadour, récit de voyage, études historiques, mémoires.

*

À peine installé, de retour d’Orient, à la Vallée-aux-Loups, Chateaubriand entreprend de transformer en épopée le roman des Martyrs de Dioclétien : il en avait conçu l’idée lors de son premier séjour en Italie (1803-1804), et la re-cherche de couleurs pour cet ouvrage avait été l’un des motifs qui le menèrent en Orient. La réutilisation pour les Martyrs du matériau fourni par la première rédaction de ce roman conféra à l’épopée, publiée en 1809, un de ses

VellédaAnonyme - crayon noir sur vélin

« J’ai assis Velléda sur les grèves de l’Armorique, Cymodocée sous les portiques d’Athènes, Blanca dans les salles de l’Alhambra. Alexandre créait des villes partout où il courait : j’ai laissé des songes partout où j’ai traîné ma vie. » (Mémoires d’outre-tombe, VII, 8)

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caractères propres : le martyre d’un personnage obscur, mais dans lequel Chateaubriand avait mis beaucoup de lui (Eudore), y est le pivot de cet évé-nement déterminant pour l’Histoire que fut l’avène-ment du christianisme dans l’Empire ; en revanche, la fi n de l’ouvrage, par un jeu de transpositions entre le passé lointain et le passé récent de la France, laissait l’avenir de celle-ci en attente d’une proclama-tion ou d’une fondation – et laissait pendante aussi bien la question du sujet exigé par cette fondation. Les fameux « adieux à la muse » (à la muse du beau mensonge poétique) faits au terme du livre assignaient à l’Histoire la prise en charge de cette fondation.

C’est pourtant à une œuvre de fi ction que Chateaubriand se consacre ensuite (en 1810) : les Aventures du dernier Abencérage. Au-delà de la transposition en un récit « troubadour » de sa passion pour Natalie de Noailles et de leur rencontre de Grenade, à la fi n du périple oriental, ces Aventures reprennent le thème de l’opposition des religions déjà présent dans Atala, mais y superposent celui de l’histoire : ce qui sépare défi nitivement les amants, la chrétienne et le Maure, c’est ce qu’Aben Hamet doit à la mémoire des Abencérages, Blanca à celle des Bivars, les faisant ce qu’ils sont, les « derniers de leurs races » auxquelles, chacun de son côté, ils demeurent fi dèles.

Bianca et Aben Hamet dans les jardins de l’AlhambraAnonyme - plume et aquarelle

« C’est dans le Dernier des Abencérages que j’ai décrit l’Alhambra. L’Alhambra, le Généralife, le Monte-Santo se sont gravés dans ma tête comme ces paysages fantastiques que, souvent à l’aube du jour, on croit entrevoir dans un beau premier rayon de l’aurore. » (Mémoires d’outre-tombe, XVIII, 3)

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Chateaubriand s’attelle ensuite à la relation de son Voyage en Orient, présentée comme des mémoires d’une année de sa vie : moment décisif où l’écriture donne au voyage un sens qui, à en juger notamment par les différences entre ce que nous connaissons de son Journal de voyage et l’Itinéraire (publié en 1811), était sur le moment de-meuré latent. Chateaubriand s’installe dans l’histoire et y gagne en propre ce que, jusqu’à son séjour en Italie, il n’avait, essentiellement, pensé qu’à partir de l’œuvre de Rousseau et du thème du bon sauvage. La fi n de l’ouvrage répète les adieux à la muse au profi t de l’histoire et, une fois de plus, Chateaubriand se soustrait à l’engagement qu’il venait de prendre, pour écrire une nouvelle œuvre de fi ction, la tragédie de Moïse, son œuvre sans doute la moins connue. Ce n’est qu’après l’achèvement, au moins provisoire, de celle-ci (Chateaubriand ne cessa d’y tra-vailler jusqu’à sa publication en 1831), que les adieux à la muse furent enfi n suivis d’effet.

Itinéraire de Paris à Jérusalem, édition originale Paris, Le Normant, 1811

« Ici, j’ai écrit les Martyrs, les Abencerages, l’Itinéraire et Moïse ; que ferai-je maintenant dans les soirées de cet automne ? Ce 4 octobre 1811, anniversaire de ma fête et de mon entrée à Jérusalem, me tente à commencer l’histoire de ma vie. » (Mémoires d’outre-tombe, I, 1)

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En parallèle à une Histoire de France, il commence alors également la rédaction des Mémoires de ma vie. C’est en Italie, une fois encore, qu’il en avait formé un premier projet demeuré avorté : la perspective en était alors celle de la mise au tombeau de Pauline de Beaumont, à travers une sorte de confession édifi ante, conçue à la fois à partir du modèle rousseauiste et contre celui-ci. Les Mémoires d’outre-tombe proposent pour date de la reprise du projet l’année 1809, ce que semble confi rmer une indication portée par Chateaubriand sur l’un de ses manuscrits : « Mémoires de ma vie commencés en 1809 ». Mais c’est bien plutôt à sa correspondance qu’il faut se reporter pour la généalogie de cette première version du chef-d’œuvre : ses lettres à Mme de Duras lui assignent quant à elles pour date l’année 1812 – il est vrai cependant que la date réelle de rédaction du premier livre de ces mémoires ne préjuge pas d’un mûrissement du projet au cours des années précédentes. La perspective de l’ouvrage est en tout cas désormais différente : il s’agit,

Mémoires d’outre-tombe, édition originaleParis, Penaud, 1849-1850

« La plupart de mes sentiments sont demeurés au fond de mon âme, ou ne se sont montrés dans mes ouvrages que comme appliqués à des êtres imaginaires. Aujourd’hui que je regrette encore mes chimères sans les poursuivre, je veux remonter le penchant de mes belles années : ces Mémoires seront un temple de la mort élevé à la clarté de mes souvenirs. » (Mémoires d’outre-tombe, I, 1)

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loin d’un monde auquel il est « si parfaitement étranger », d’écrire pour rendre compte de lui à lui-même, d’expli-quer un « inexplicable cœur » dont il n’avait jusque-là laissé transparaître certains mouvements qu’à travers ses personnages de fi ction. Histoire et mémoire sont ados-sées l’une à l’autre : « Quand je me sentirai las de tracer les tristes vérités de l’histoire de l’homme, je me reposerai en écrivant l’histoire de mes songes ». Ces deux histoires sont conçues comme des découvertes : Chateaubriand écrit à sa correspondante privilégiée, Mme de Duras, qu’il est curieux de voir ce qui sortira de sa plume, mais égale-ment qu’il s’étonne de constater combien l’histoire de France est « tout à faire » ; la quête d’identité se joue sur ce double registre.

Ainsi, quand bien même le jour est loin encore où Chateaubriand va concevoir expressément l’inscription de son histoire propre dans l’Histoire et transformer ses mémoires en une « épopée de son temps », l’Histoire est-elle, dès l’époque de la Vallée-aux-Loups, intimement liée au projet d’écriture mémorielle, et vice-versa. Les détours par la fi ction, les reports successifs de la mise en œuvre des engagements des « adieux à la muse » répétés montrent qu’avant d’entreprendre aussi bien l’Histoire que les Mémoires, il a fallu à Chateaubriand d’une part poser une limite à la véracité, exprimer quelque chose qui ne trouverait pas place dans les Mémoires, en l’occur-rence sa passion pour Natalie de Noailles, et d’autre part formuler, à travers sa tragédie Moïse, une injonction à l’historien- juge qu’il voulait être de se conformer à la Loi, toute sévère fût-elle.

Avec la chute de l’Empire commença sa carrière politique, entamée par De Buonaparte et des Bourbons (avril 1814). Nommé ambassadeur en Suède, poste qu’il ne rejoignit pas, il publia le 27 novembre 1814 des Réfl exions politi-ques, défense de la Charte qu’apprécia Louis XVIII. Ayant suivi le roi à Gand, durant les Cent-Jours, il y fut nommé ministre de l’Intérieur par intérim : à la seconde Restauration, il fut en quelques mois nommé ministre d’État (juillet 1815), puis pair de France (août, alors que, Président du collège électoral du Loiret, il allait sans doute être élu député) et membre du Conseil privé (septembre). En re-vanche, indigné par la dissolution le 5 septembre 1816 de la Chambre introuvable d’inspiration très majoritairement

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ultra-royaliste, il ajouta à la brochure qu’il achevait alors, De la Monarchie selon la Charte, un Post-Scriptum qui lui valut la saisie de son ouvrage, la radiation de la liste des ministres d’État et la privation de sa pension. La vente de la Vallée-aux-Loups était inéluctable ; c’est à Montboissier, en juillet 1817, qu’il reprit alors l’écriture des Mémoires de ma vie, demeurée en suspens depuis 1814.

*

La carrière ouverte en 1814 n’éteignit pas la précédente, pas plus du reste que la politique n’avait été absente de la carrière littéraire. Réunissant chronologiquement l’une et l’autre, l’époque de la Vallée-aux-Loups est celle d’une quête d’identité, conduite dans un double registre indi-viduel et général, puis de la confrontation avec ce que Chateaubriand nomma « l’histoire vivante ». C’était un déplacement, et non pas une substitution d’un registre à l’autre : l’horizon nouvellement ouvert posait à nouveaux frais la question du sujet Chateaubriand dans l’histoire.

Brochures politiques de Chateaubriand (1814-1816)« Les ouvrages proprement dits Politiques, et qui touchent aux circonstances du jour, sont une sorte de relation des événements : l’histoire de la restauration est pour ainsi dire renfermée entre le petit écrit De Buonaparte et des Bourbons, et la brochure intitulée : Le Roi est mort, vive le Roi ! Le temps qui sépare ces deux écrits est rempli par les Réfl exions poli -tiques, le Rapport fait au Roi dans son conseil à Gand, La Monarchie selon la Charte, etc., etc.Ces ouvrages ont exercé sur les événements une infl uence qui n’a point été niée : Louis XVIII avait la bienveillante générosité de dire que la brochure De Buonaparte et des Bourbons lui avait valu une armée. On sait assez quelle tempête éleva contre moi La Monarchie selon la Charte. » (Préface aux ouvrages politiques)

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Affi che de la vente par adjudication du 21 juillet 1818« La Vallée-aux-Loups, de toutes les choses qui me sont échappées, est la seule que je regrette ; il est écrit que rien ne me restera. [...] Je défi e le sort de m’attacher à présent au moindre morceau de terre [...]. » (Mémoires d’outre-tombe, XVIII, 5)

« [...] ma Vallée-aux-Loups fut vendue, comme on vend les meubles des pauvres, sur la place du Châtelet. Je souffris beaucoup de cette vente [...]. » (Mémoires d’outre-tombe, XXV, 6)

Matthieu de Montmorency et Juliette RécamierAprès l’échec de la mise en loterie de la Vallée-aux-Loups, Chateaubriand trouve en Juliette Récamier, qu’il avait ren-contrée chez Mme de Staël le 28 mai 1817 – début d’une longue relation –, une aide précieuse, alliée à celle de Matthieu de Montmorency, leur ami commun, pour traver-ser les diffi cultés fi nancières qui avaient résulté de la sup-pression de sa pension. N’étant pas en mesure d’acheter la maison, elle décide de la louer pour en faire sa résidence : le bail du 18 mars 1818, consenti pour trois années, men-tionne « une maison de campagne, cour, basse cour, parc, pavillon, contenant une chapelle au rez-de-chaussée [sic] et

L’époque de Montmorency et des La Rochefoucauld

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un corps de bibliothèque au premier, le tout clos de murs [...] ladite maison connue sous le nom de la Vallée ou Val de Loup [...] ».

Lorsque Chateaubriand, acculé à vendre sa propriété, en rabat de ses prétentions, renonçant aux 90 000 francs escomptés, et se résout aux aléas d’une vente à la chan-delle, Matthieu de Montmorency mandate Me Henry Agasse pour porter enchère lors de l’adjudication du 21 juillet 1818, en la chambre des notaires de Paris, sous le ministère de Me Charles-Nicolas Denis.

Avant l’extinction de la bougie, Me Agasse couvre la mise à prix de 50 000 francs des cent francs minimum requis pour l’adjudication. Matthieu de Montmorency devient pro prié-taire de la Vallée-aux-Loups. Parmi les personnes auxquelles il demanda des fonds, Pierre-Simon Ballanche, ami de Chateaubriand et Juliette Récamier, lui prêta 12 500 francs.

Le procès-verbal d’adjudication mentionne alors « un parc de six hectares quatre vingt trois ares soixante dix sept centiares (vingt arpents) enclos de murs dont un potager

Le duc Matthieu de Montmorencypar Caminade - lithographie colorée

Homme politique réputé, Matthieu de Montmorency (1767-1826) fut créé pair de France par Louis XVIII en 1815 et fut ministre des Affaires étrangères en 1821-1822, poste auquel Chateaubriand lui succéda. Élu à l’Académie française en 1825, où il fut reçu par Chateaubriand, il fut nommé sous Charles X gouverneur du duc de Bordeaux, fonction à laquelle Chateaubriand aspira ultérieurement.

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composé de soixante huit ares trente huit centiares (deux arpents) ». La maison se compose « d’un rez-de-chaussée,

un vestibule avec un escalier à deux branches, une cuisine, une salle à

manger, un salon et un offi ce ; au premier étage, de deux

chambres à coucher, un petit salon séparé des

deux chambres par un vesti bule ; à

l’attique ou man-sardes, de deux chambres de gar çons, qua-tre chambres de domesti-que et de plu-sieurs cabinets dans les com-bles ; de plus d’une citerne,

une serre, une remi se, une écurie

pour quatre che-vaux, une étable, une

cour, basse cour et loge-ment de jardinier, et enfi n

d’un petit pavillon placé au milieu du parc, contenant une cha-

pelle au premier étage et l’établis sement d’une bibliothèque au rez-de-chaussée ».

De 1818 à 1826, Juliette Récamier fut conviée à séjour-ner chez Matthieu de Montmorency, et devint même l’hôtesse privilégiée de celui-ci : la banqueroute de son mari, en 1819, l’avait mise en diffi culté, et elle n’était plus en mesure d’honorer le bail de trois ans souscrit naguère. Toutefois, Matthieu de Montmorency ne sou-haitait pas que Chateaubriand l’y vînt visiter : « Je compte sur votre parfaite discrétion pour ne pas trop souvent recevoir l’ancien propriétaire », lui mandait-il, tout en invitant son ami l’abbé Genoude à joindre ses prières aux siennes pour fortifi er Juliette dans sa résolution.

Mme Récamier résidait à la Vallée-aux-Loups essentielle-ment l’été ; elle permettait ainsi à sa nièce Amélie Cyvoct,

Juliette Récamierpar Joseph Chinard - terre cuite

« En approchant de ma fi n, il me semble que tout ce que j’ai aimé, je l’ai aimé dans Madame Récamier, et qu’elle était la source cachée de mes affections. Mes souvenirs de divers âges, ceux de mes songes, comme ceux de mes réalités, se sont pétris, confondus pour faire un composé de charmes et de douces souffrances, dont elle est devenue la forme visible. » (Mémoires d’outre-tombe, appendice)

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de santé fragile, de profi ter du grand air. Elle y recopia avec cette dernière les trois premiers livres des Mémoires de ma vie de Chateaubriand, connus sous le titre de Manuscrit de 1826. Le 24 mars 1827, elle revint à la Vallée-aux-Loups pour commémorer le jour anniversaire de la mort de Matthieu de Montmorency.

AménagementsLe vicomte de Montmorency s’emploie, dès son installation, à agrandir la demeure d’une aile de style troubadour : le portail communiquant avec le Bois de la Cave (qui s’étend derrière la maison) est dessiné en ogive, et des baies gémi-nées couronnées de quadrilobes viennent orner la façade. Par ailleurs, une tourelle d’inspiration gothique est ajoutée à l’extrémité de l’édifi ce, réalisant le vœu de Chateaubriand d’agrandir sa maison : « Mon projet était d’ajouter une tour au bout de mon pavillon [...] ». Montmorency, en se laissant gagner par l’engouement pour l’art médiéval, faisait également écho au goût de l’ancien propriétaire.

Au même moment, sont érigées côte à côte dans le parc une orangerie ainsi qu’une chapelle de style Restauration, placée sous le patronage de la duchesse d’Angoulême, fi lle de Louis XVI.

L’épouse du vicomte, Pauline-Hortense d’Albert de Luynes, augmente en 1822 la superfi cie du do-maine de quatre hectares par l’acquisition du Bois de la Cave.

Montée de la Vallée-aux-Loupspar Jean-Jacques Champin - huile sur boisColl. particulière, en dépôt à la Maison de Chateaubriand

L’aile Montmorency

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L’Orangerie

La chapelle

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L’époque La RochefoucauldAprès le décès de son mari en 1826, cette dernière cède la maison à sa fi lle, Élisabeth, mariée à Sosthè-nes de La Rochefoucauld, duc de Doudeauville (1785-1864), qui fut aide de camp du comte d’Artois, député, surintendant des beaux-arts, s’illustrant en 1814 en présidant au déboulonnement de la statue de l’Empereur au sommet de la Colonne Vendôme, et que moquè-rent Henri de Latouche et Théophile Gautier, après bien d’autres, pour avoir allongé les robes des danseuses de l’Opéra et appliqué « de ses mains patriciennes un pudique emplâtre sur le milieu de toutes les statues ». Il n’est pas sans sel que Chateaubriand l’ait considéré en 1824 comme l’un des auteurs de sa disgrâce.

Suivant le vœu de Mme Matthieu de Montmorency et le don fait à la fabrique de Sceaux, deux messes basses hebdoma-daires, le vendredi et le dimanche, devaient être dites dans la chapelle par un prêtre de Sceaux, et ce à perpétuité, fréquence ramenée en 1913 à une messe le dimanche.

Le vicomte Sosthène de La Rochefoucauldattribué à François-Joseph Heim - huile sur boisParis, Musée du Louvre

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En 1841, la propriété échoit en indivision à ses deux fi ls, Stanislas (1822-1887) et Sosthènes, dit Sosthènes II (1825-1908), qui à la mort de leur grand-mère, en 1859, établis-sent un arrangement : Stanislas renonce à la maison, laquelle revient à son frère cadet. Celui-ci fut un personnage infl uent, ex-ambassadeur de France à Londres (comme le furent Matthieu de Montmorency puis Chateaubriand !), président du jockey-club, bailli de l’Ordre de Malte, et qui, député royaliste et conseiller général de la Sarthe (de 1871 à 1898), intervint dans les négociations entre le duc de Bordeaux (Henri V) et la maison d’Orléans.

Sosthènes II, riche et mondain, va transformer la Vallée-aux-Loups en un lieu de plaisir et de mondanités, y recevant beaucoup pendant les mois d’été. Ses nombreux hôtes séjournent à la Vallée, ce qui rend rapidement indispensable la construction, vers 1860, d’une nouvelle aile, symétrique à l’aile de Montmorency, afi n d’héberger les invités et leurs domestiques. Cette construction en forme de pavillon, com-prenant sous-sol, rez-de-chaussée et trois étages, le dernier sous comble, témoigne de l’intérêt que l’on portait au style gothique : balustrade en bois décorée de trilobes et quadri-lobes, lambrequins découpés sur le toit, arcatures moulurées soulignant portes et fenêtres, et enfi n association de briques et de pierres évoquant l’architecture normande de la fi n du Moyen Âge. L’ensemble n’en a pas moins un aspect massif.

D’importantes modifi cations accompagnent cette adjonc-tion : grâce à l’annexion à la propriété, en 1859, d’une section du chemin vicinal de l’Orme Mort, le mur de clôture construit par Chateaubriand face au bois peut être rasé, ce qui permet la construction, à l’arrière du corps central (l’ancienne maison de Chateaubriand), de deux bow-windows, surmontés de terrasses à balustrades qua-drilobées de pierre, rappelant celles de l’aile ouest. Les pièces, assombries par des plafonds bas, gagnent ainsi en clarté. Cette façade arrière est rhabillée de briques et reçoit un décor semblable à celui du pavillon. De ce côté, la maison a désormais un aspect néo-médiéval qui aurait peut-être agacé Chateaubriand qui, bien qu’ayant gran-dement œuvré à la réhabilitation du Moyen Âge dans le Génie du Christianisme, parle dans ses Mémoires de « la manie du Moyen-Âge qui nous hébète à présent ».

La maison, qualifi ée de « Maison de maître » dans l’acte de vente de 1895 (cf. infra), comprend désormais plusieurs

L’aile La Rochefoucauld

Placards d'inventaire de 1872 : « Chambre de maître N° 14 » et « Petit salon du N° 26 »

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salons et salles à manger, vingt-et-une chambres de maîtres, une salle de bain, dix-sept cabinets de toilette et treize chambres de domestiques.

De plus, à l’ouest du bois de la Cave, un bâtiment de communs en briques et couvert de tuiles, est édifi é, com-prenant une aile principale et deux retours, réunis par une cour pavée. Ils sont composés d’un étage et d’un sous-sol partiel. L’ensemble abrite deux écuries conte-nant ensemble dix-huit stalles et deux boxes, une étable pour huit vaches, une remise pour quatorze voitures et à l’étage, vingt-cinq chambres et le logement du jardinier-chef. À l’arrière, une citerne est alimentée par un puits avec pompe à vapeur. Enfi n, à l’entrée du domaine, est construite une petite maison de gardien qui existe toujours.

Le parc planté par Chateaubriand, parvenu à maturité, semble avoir été peu modifi é. En revanche, le duc agran-dit son domaine par vingt-trois achats de parcelles de bois, de prés et d’un potager, autour ou proches de l’ancienne propriété mais non réunies à elle, portant l’ensemble du domaine à une vingtaine d’hectares.

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Cinq jardiniers sont chargés d’entretenir le jardin fl euriste comprenant huit serres et des bâches, où croissent fl eurs et plantes destinées non seulement au parc de la Vallée, mais également aux jardins du somptueux hôtel parisien de la rue de Varenne, au cœur du Faubourg Saint-Germain, propriété de la famille depuis 1841, ex-hôtel de Boisgelin, aujourd’hui siège de l’ambassade d’Italie.

Dans le bois, une citerne et un ensemble de bassins sont alimentés par une concession des eaux de la Seine et tout un ensemble de conduites la distribue dans la maison, les communs et, grâce à des bouches d’arrosage, dans le parc et le jardin fl euriste.

Le domaine du duc Sosthènes II est à la fois parc d’agré-ment, exploitation forestière, jardin fl euriste de production et exploitation agricole. C’est donc là la propriété d’un aristocrate propriétaire-terrien moderne auquel la notion de rentabilité et d’effi cacité est familière. On est bien loin de la « thébaïde » de Chateaubriand... Pourtant, celui-ci n’était pas oublié : en 1872, la Grande-Rue d’Aulnay avait été rebaptisée rue Chateaubriand et le cinquantenaire de sa mort fut célébré à la Vallée-aux-Loups en 1898.

À cette date, la propriété avait été déjà vendue à Armand de La Rochefoucauld, duc de Bisaccia (1870-1963), se-cond fi ls de Sosthènes II. La vente avait eu lieu le 22 août 1895. Le prix de 250 000 francs convenu entre le père et

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le fi ls n’a apparemment pu être acquittée par ce dernier, et il semble que ce soit sa belle-mère, la princesse Constantin Radziwill, épouse séparée de corps et de biens du prince, grand mondain que Proust connaissait bien, qui ait payé sur sa dot l’intégralité de la somme.

Sosthènes II, en accord avec son fi ls, continua à venir pen-dant l’été à la Vallée-aux-Loups, jusqu’à sa mort en 1908. Armand, qui avait suivi la carrière politique de son père et comme lui était maire de Bonnétable, conseiller général de la Sarthe (mais pas député) et président du jockey-club (1919-1963), ne paraissait pas avoir le même respect de la mémoire de Chateaubriand, décourageant admirateurs et curieux ; des incertitudes pesèrent sur l’avenir de la propriété : elles furent levées par la vente du domaine en 1914 aux Docteurs Le Savoureux et Hugonin.

La Vallée-aux-Loups, vue du parc avec personnagesAnonyme - crayon noir avec rehauts de gouache - vers 1860

Plan d’assemblage de la propriété de la Vallée aux Loups et de ses dépendances appartenant à Mr le duc de Bisacciapar A. Troufi llot, géomètre à Sceaux - gravure colorée

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C’est le 21 juillet 1914 que le docteur Henry Le Savoureux (1881-1961), médecin aliéniste, acquiert avec son confrère César Hugonin (l’acte de vente est fait au bénéfi ce de la société Le Savoureux-Hugonin, mais ce dernier mourut bientôt au front) la propriété de Chateaubriand – qui compte alors vingt hectares –, ainsi que tout le mobilier meublant, dont la liste précise fi gure dans l’acte de vente. La propriété est acquise au prix de 400 000 francs, dont 60 000 pour les meubles, et doit être réglée en 25 annui-tés de 26 560 francs aux vendeurs (jusqu’en 1941) ; les droits des La Rochefoucauld sont préservés par une hypothèque de 340 000 francs sur la propriété. Par contrat, les docteurs doivent continuer à fournir aux La

Le Dr Henry Le Savoureuxpar Marie-Élizabeth Wrede - mine de plomb

L’œuvre du Dr Le Savoureux

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Rochefoucauld pour l’hôtel de la rue de Varenne, et ce pendant un an, de multiples plants de fl eurs et fl eurs coupées (plusieurs dizaines de milliers !).

Auteur d’une thèse sur le Spleen parue en 1913 chez Steinheil, le Dr Le Savoureux s’attache sa vie durant à une meilleure connaissance et compréhension des maladies de l’esprit. Il transforme la maison de Chateaubriand en maison de repos, qui compte une vingtaine de chambres.

Lettré cultivé, il applique en la transposant sa méthode analytique, appuyée sur une écoute attentive des patients, à son étude de l’auteur des Mémoires d’outre-tombe dont il habite la demeure. Il constitue à la Vallée-aux-Loups une collection (livres, dessins, gravures, sculptures, etc.) dédiée à la mémoire de l’écrivain ; il écrit en 1929 un Chateaubriand qu’il publie en 1930, l’année même où il fonde la Société Chateaubriand, réunissant autour de lui historiens, érudits et critiques, tous désireux de mieux connaître et compren-dre l’homme et son œuvre, et pour la plupart à l’origine d’importantes études sur Chateaubriand.

Rochefoucauld pour l’hôtel de la rue de Varenne, et ce

Acte de vente La Rochefoucauld / Le Savoureux-Hugonin21 juillet 1914

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À la Vallée-aux-Loups, le docteur et son épouse, Lydie Plekhanov (1881-1978), fi lle du fondateur du mouvement social-démocrate russe et elle-même médecin chirurgien, accueillent un salon littéraire où se côtoient écrivains et artistes : l’écrivain et critique d’art Félix Fénéon (né en 1861, mort à la Vallée-aux-Loups en 1944), Henri de Régnier, Julien Benda, Paul Valéry, Paul Léautaud (qui mourut à la Vallée-aux-Loups en 1956), Édouard Herriot, la poétesse Anna de Noailles, Jean Paulhan, la princesse Marthe Bibesco, le peintre Jean Fautrier, Antoine de Saint-Exupéry, et bien d’autres encore.

Lettre autographe signée du Dr Le Savoureux (avec en-tête médical à la Vallée-aux-Loups), 8 janvier 1925Manuscrit

« [...] Je réunis à la Vallée-aux-Loups, dans la demeure de Chateaubriand, tout ce qui intéresse ce grand homme, sa propriété, Aulnay et Châtenay, etc. Monsieur Lesenne me signale votre grande amabilité pour les chercheurs. Il m’assure que si vous possédez quelque document iconographique sur ce sujet qui m’intéresse, vous seriez assez aimable pour me le laisser voir. J’espère, en tous les cas, avoir le plaisir de vous faire les honneurs de ce beau domaine planté par Chateaubriand. [...] »

Lydie Le Savoureux à la Vallée-aux-Loups

Anonyme - encre

« Ce changement d’atmosphère qui s’est produit autour

de Chateaubriand depuis la naissance de notre Société,

ce passage du dédain ironique à l’intérêt, ou, tout au moins, à

l’attention, et du dénigrement à la sympathie, cette découverte,

en un écrivain réputé démodé et à courtes vues, de ressources

d’art toujours nouvelles et d’intuitions prophétiques, bref cette

véritable résurrection dont nous avons été les témoins,

aujourd’hui, avec le recul du temps, n’avons-nous pas le droit

d’affi rmer qu’Henry Le Savoureux en fut le principal artisan ? »

(Pierre Clarac, membre de l’Institut, Président (†) de la Société

Chateaubriand de 1962 à 1979).

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C’est également au docteur Le Savoureux que l’on doit le classement du site de la Vallée-aux-Loups (octobre 1939), au sujet duquel Paul Léautaud apporte ce témoignage dans son Journal littéraire : « Le Docteur Le Savoureux m’a ex-pliqué il y a quelque temps qu’il est fort question d’expro-prier une partie de la Vallée aux Loups pour l’établissement de je ne sais quelle ligne de tramway. Il cherche à parer à cette tuile en cherchant à faire classer la Vallée aux Loups comme lieu historique. Sa Société Chateaubriand, son Musée Chateau briand, ses dîners auxquels il convie toutes sortes de gens plus ou moins notoires, et je crois bien jusqu’à ses fonctions de conseiller municipal et ses générosités pour les écoles et patronages de l’endroit, tout cela doit être en-core en vue de la réussite qu’il désire » (22 janvier 1930). Après la cession de la propriété à la Fondation Rothschild (en décembre 1957, du vivant du docteur Le Savoureux), seront inscrits le 31 janvier 1964, à l’Inventaire supplémentaire des Monuments histo riques, le bâtiment central et l’aile Montmorency. Enfi n, le classement à l’inventaire des Monu-ments historiques du 24 janvier 1978 comprendra les façades et toitures, l’escalier intérieur, la Tour Velléda et le parc.

Façade sud de la Maison de Chateaubriandpar Paul de Pidoll - mine de plomb et encre de Chine - 17 juillet 1949

Dédicace du Dr Le Savoureux à Paul Léautaud« Il connaît fort bien Chateaubriand, il a fait de la Vallée aux Loups une maison délicieuse, parfaitement restaurée, et son Musée est plein de choses intéressantes, remarquables, rares. » (Paul Léautaud, Journal littéraire, 22 janvier 1930)

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S’il est peu aisé de collecter les témoignages sur la Vallée-aux-Loups à l’époque du docteur Le Savoureux, disséminés dans des écrits autobiographiques, des correspondances et des hommages posthumes, parfois encore inédits à ce jour, on peut considérer qu’il y a là une mine d’informations dont l’exploitation permettrait de retracer la vie de cette maison au XXe siècle.

Le docteur Le Savoureux et son épouse offrirent égale-ment l’asile à de nombreux résistants durant la Seconde guerre mondiale, parmi lesquels Jean Paulhan et le professeur Robert Debré, avec lequel Henry avait fait ses études de médecine. C’est de cette sombre époque que date la série des « Otages » (1943-1945) réalisée par le peintre Jean Fautrier tandis qu’il séjournait à la Vallée-aux-Loups, transposition picturale du trauma tisme

L’actuel Grand Salon, en 1984

L’actuel Salon politique, en 1984

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provoqué par les exécutions de résistants par les Allemands, dans le bois voisin, où a depuis été aménagé un mémorial.

« Il convient de rappeler ici le rôle joué par notre Président et qu’en

raison de son extrême modestie, nous sommes peu à connaître.

Il ne se contentait pas de répandre tracts, brochures clandestines,

il donnait l’exemple de la résistance, procurant des cartes d’identité,

ravitaillant des aviateurs cachés à Paris et surtout risquant sa vie en

hébergeant condamnés à mort, résistants, Israélites : " Il y aura

toujours un divan pour vous à la Vallée ", leur disait-il. Les Allemands

connaissaient ce qu’ils appelaient " ce repaire de gaullistes ".

Plusieurs fois menacé de servir d’otage, il n’en continua pas moins,

héroïquement, à recevoir à la Vallée tous ceux qui s’y réfugiaient :

il suffi t de dire qu’à la Libération treize personnes recherchées par

la Gestapo y étaient cachées ; chacune d’elles, découverte, lui

aurait valu la prison et même la déportation. » (Comtesse d’Andlau,

Vice-Présidente (†) de la Société Chateaubriand)

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Le livre d’or de la Vallée-aux-Loups (1925-1960)Dès 1925, les visiteurs se succèdent à la Vallée-aux-Loups : le livre d’or ouvert cette année-là, peu avant que paraissent les premiers articles de presse louant le musée constitué par le docteur, en porte le témoignage. L’un de ces articles énu-mère les qualités de ses hôtes et des premiers adhérents à la Société récemment fondée : « des bibliophiles, des littérateurs, des philosophes, des conservateurs de musée et même des médecins... » L’ami des surréalistes, Maurice Heine, en visite le 14 août 1926, le psychiatre photographe, Gaëtan Gatien Clérambault, ancien maître du docteur Le Savoureux, en octobre de l’année suivante, relèvent à la fois de la catégorie des médecins et de celle des écrivains.

Le passage de la photographe américaine Berenice Abbott, en 1927, explique sans doute la présence, dans les archives de la Maison, d’une série de photographies d’Eugène Atget qu’elle redécouvrit et de quelques clichés de Man Ray dont elle était alors la jeune assistante.

Les visites de l’homme de théâtre Georges Pitoëff, le 9 sep-tembre 1927, et de Marc Chagall, cinq ans plus tard en 1932, sont en revanche des réponses probables à l’invitation de Lydie Le Savoureux, laquelle ne renia jamais ses origines russes. Le premier lui était redevable de son introduction au sein de l’élite intellectuelle genevoise dans les premières années du XXe siècle.

Parmi d’autres gens de plume, Jean Prévost, Jules Supervielle, Saint-John Perse et le docteur J. C. Mardrus, apposent leur paraphe au livre d’or entre les deux guerres.

La Vallée-aux-Loupspar Eugène Atget - photographie

Le parc de la Vallée-aux-LoupsAnonyme - huile sur papier

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Ce dernier, traducteur des Mille et une nuits, fait suivre le sien d’un commentaire en arabe. Le chanoine Arthur Mugnier, surnommé « l’abbé mondain », est l’un des plus assidus, qu’il y vienne, dès 1926, en fervent lecteur de Chateaubriand ou en ami des Noailles, Valéry et Cocteau.

Les écrivains de la prestigieuse NRF, Marcel Arland et Jean Paulhan, qui avaient résidé tous les deux à Châtenay-Malabry, attirèrent à la Vallée-aux-Loups, parmi d’autres, le philoso-phe Bernard Groethuysen, André Malraux, Dominique Aury, Francis Ponge dont le premier article qu’il consacra à Fautrier, en 1944, s’intitulait « Fautrier à la Vallée aux Loups », Jean Grenier, installé dans le voisinage à Bourg-la-Reine, et enfi n Albert Camus à la fi n de la guerre, le 25 juillet 1945.

Après guerre, la maison-musée et son fondateur reçoivent encore des invités aussi divers que Wladimir Jankélévitch, les deux peintres Arpad Szenes et Elena Vieira da Silva, aussi bien que des comédiens. Le tout jeune Claude Brasseur, encore Claude Espinasse, vient avec sa mère la comédienne Odette Joyeux, en août 1955 ; leurs signatures fi gurent au milieu de celles des nombreux amateurs de tous pays venus en pèlerinage dans l’ancienne demeure de Chateaubriand.

Livre d’or et invitation de 1936

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Le 21 décembre 1957, la Maison de Chateaubriand est acquise en viager par la Fondation Rothschild. Après le décès du Dr Le Savoureux (1961), son épouse Lydie y demeure jusqu’à sa mort, en 1978.

Acquises par le Département de la Seine (1967), les pro-priétés de la Vallée-aux-Loups (près de 24 hectares et demi au total) sont remises le 1er janvier 1970 au Département des Hauts-de-Seine, qui y entreprend dès 1972 d’impor-tants travaux de restauration, de protection et d’extension. Aujourd’hui, le périmètre désormais désigné sous le nom de « La Vallée-aux-Loups Chateaubriand », qui inclut la Vallée-aux-Loups proprement dite, l’arboretum, le parc boisé et l’Île verte, compte plus de 60 hectares.

L’acquisition de la Vallée-aux-Loups par le Conseil général des Hauts-de-Seine a donné une nouvelle vie à ce lieu qui, de lieu privé, allait dorénavant devenir un lieu public. Après consultation d’un Comité, créé le 17 novembre 1982 et placé sous la présidence de M. Jean d’Ormesson, de l’Académie française, il a été décidé d’en orienter la restauration et l’animation dans la perspective « [...] que cette maison devienne non pas un musée, avec ce que le mot suggérait d’un petit peu fi gé, mais une demeure, la demeure “ Chateaubriand ” ».

Sur le domaine de Cha-teau briand (qui s’étend alors sur un peu plus de 14 hectares et demi), il est procédé en premier lieu à la res tauration de la façade principale, de la chapelle et de la serre attenante (l’actuelle Oran-gerie), ainsi qu’à la recons-truction de la clôture de la

La Vallée-aux-Loups des années 1960 à nos jours

La Maison vue d'une allée du parc

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propriété. À compter de 1984 sont entrepris la remise en état des inté -r ieurs et l’amé nage ment des pièces du musée et des lieux d’ac cueil du public, la création de la biblio thèque et du centre de recherche, la restau-ration de la Tour Velléda, l’amé na gement d’apparte-ments et l’enrichissement du parc en arbres exoti-ques, pins de Jérusalem, magnolias, etc. Les bâti-ments des communs, en trop mauvais état pour être conservés, menaçant ruine, sont détruits.

Classée au titre des Monuments historiques, la Maison de Chateau-briand est restaurée sous l’égide d’un architecte des Bâtiments de France. Les archives ne permettant pas un réaménagement à l’iden tique de la maison telle que la connurent Chateaubriand et les propriétaires suivants, le choix arrêté est celui de recréer une demeure romantique du XIXe siècle, où sont évoquées à travers les collections muséographiques la vie et l’œuvre de l’auteur des Mémoires d’outre-tombe, ainsi que la vie des salons littéraires de l’époque.

La Maison de Chateaubriand est inaugurée et ouverte aux visiteurs le 26 mai 1987.

En 2008, le Conseil général, dans le cadre d’une politique générale adoptée vis-à-vis de grandes associations dépar-tementales qu’il subventionnait à hauteur de la presque totalité de leur budget, a décidé l’internalisation de la Maison de Chateaubriand, effective depuis le 1er janvier 2009.

Le Président du Conseil général, M. Patrick Devedjian, lui a fi xé pour objectifs de devenir une véritable Maison d’écri-vain, vouée à l’auteur des Mémoires d’outre-tombe mais également et plus largement à la mémoire littéraire des

Cariatides

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XVIIIe et XIXe siècles, devenant un forum de rencontres euro-péennes de haute qualité, et l’une des références et des lieux d’identité du Département dans l’ordre de la tradition littéraire et artistique et dans celui de sa transmission.

Un Comité scientifi que international a été installé le 28 septembre 2009, présidé par M. Marc Fumaroli, de l’Académie française, et constitué de personnalités émi-nentes issues de grandes institutions nationales et inter-nationales, ainsi que de sociétés littéraires et historiques françaises et étrangères. Il est chargé d’une mission de conseil, d’assistance et d’évaluation pour l’élaboration du programme culturel de la Maison et apportera également son concours pour les acquisitions exceptionnelles venant enrichir ses collections. Le Comité fera bénéfi cier la Maison de Chateaubriand de sa notoriété, contribuant à son inscription dans le réseau des grands établissements internationaux et à son rayonnement comme à celui de la culture française au niveau national et international.

CollectionsLa Maison de Chateaubriand est dotée d’un centre de recherche rassemblant une bibliothèque consacrée à Chateaubriand et au romantisme, et un important fonds muséographique. L’ensemble de ses collections a pour origine le précieux fonds constitué par le Docteur Le Savoureux, légué pour partie à la Société Chateaubriand à la mort de Mme Le Savoureux et mis en dépôt par la Société Chateaubriand à la Maison de Chateaubriand.

La bibliothèque a été considérablement enrichie par le Conseil général des Hauts-de-Seine et compte au jourd’hui plus de 12 000 volumes : œuvres de Chateaubriand (éditions

Le Comité scientifi que

La bibliothèque

de la Maison

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originales et ultérieures), ouvrages sur Chateau briand, œuvres de contemporains, ouvrages généraux sur la période, etc. Le fonds muséographique rassemble, outre les pièces exposées dans la Maison, des peintures, gravures, manuscrits, sculptures, et objets d’art autour de Chateaubriand et de son époque. Parmi les manus-crits fi gurent des lettres autographes de Chateaubriand, poèmes et fragments autographes, mais aussi des lettres à lui adressées, des correspondances de ses amis et contemporains, etc.

Le centre de recherche est accessible à tous – cher-cheurs, auteurs, érudits et amateurs –, sur rendez-vous.

L’ensemble des collections peut également être consulté sur rendez-vous pour des recherches préparatoires à des expositions, conférences, illustrations d’ouvrages, etc.

Vie culturelle de la MaisonOutre les visites guidées de la Maison, le programme culturel se décline autour des grands axes suivants :

chaque année, remise du Prix Chateaubriand, récom- pensant une œuvre de recherche historique portant sur la période durant laquelle vécut Chateaubriand (XVIIIe-XIXe siècles), présentant d’évidentes qualités de style et accessible à un large public

expositions temporaires

spectacles musicaux et littéraires ayant trait à Chateau- briand, son œuvre, son époque, ses contemporains

concerts dans le parc

créations contemporaines

conférences et colloques sur Chateaubriand et plus largement les XVIIIe et XIXe siècles

rencontres-débats

participation aux grands événements nationaux : les Journées du Patrimoine, la Nuit des Musées, Lire en Fête, Rendez-vous aux jardins, etc.

manifestations exceptionnelles

découverte du parc entretenu par la Direction des parcs, jardins et paysages du Département (DPJP)

accueil de réunions de travail de sociétés littéraires ou historiques, etc.

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L’Association des Amis de la Maison de ChateaubriandCette association a été créée en 2009 pour regrouper les particuliers ou les personnes morales intéressés par les activités de la Maison de Chateaubriand et soucieux de l’enrichissement de ses collections. Elle fait suite au collège des adhérents indivi-duels de l’Association pour la Maison de Chateaubriand qui, jusqu’au 31 décembre 2008, assurait la gestion et l’animation de la Maison. Présidée par M. Édouard Lacroix, président du Conseil d’administration, elle est administrée aujourd’hui par M. Guy Berger, secrétaire général, et Mme Béatrice Clément Grandcourt, trésorière.

Son premier objectif est de soutenir l’action des responsables de la Maison de Chateaubriand. Elle se propose, en outre, d’orga-niser, à l’intention de ses membres, des soirées ou matinées culturelles à la Vallée-aux-Loups et des voyages d’agrément en des lieux rendus célèbres par Chateaubriand et le Romantisme européen.

Les demandes d’adhésion à cette association sont à adresser à Mme Béatrice Clément Grandcourt, 60 boulevard Suchet, 75016 Paris, accompagnées d’un chèque de 20 euros pour la cotisation annuelle (25 euros pour un couple).

La Société ChateaubriandLa Société Chateaubriand est une association fondée en 1930 à la Vallée-aux-Loups par le docteur Le Savoureux et quelques-uns de ses amis afi n de promouvoir les études et recherches sur Chateaubriand et son environnement familial, social, politique, littéraire et artistique. Elle œuvre à la publication des écrits de l’écrivain et notamment à celle de sa correspondance. Elle orga-nise chaque année une séance de travail, à l’occasion de son assemblée générale, un colloque d’une ou deux journées, un atelier des chercheurs spécialisés et deux sorties, l’une au printemps et l’autre à l’automne, pour faire visiter à ses membres des lieux ou des monuments ayant un lien avec des épisodes de la vie ou des œuvres de Chateaubriand. Le Bulletin annuel de la Société Chateaubriand est un instrument culturel irremplaçable. Tous les travaux de la Société y sont publiés, accompagnés de notices bibliographiques et de documents divers.

La Société Chateaubriand est présidée aujourd’hui par M. Guy Berger. Le bureau comprend également M. Jean-Claude Berchet, vice-président, M. Jean-Marie Roulin, secrétaire géné-ral, Mme Monique Leforestier, secrétaire générale adjointe, et M. Guillaume Hartog, trésorier.

Les demandes d’adhésion sont à adresser à M. Guillaume Hartog, 7 rue Jean Bologne, 75016 Paris, accompagnées d’un chèque de 40 euros pour la cotisation annuelle (20 euros pour les étudiants). Cette cotisation donne droit à l’envoi du Bulletin et à l’information sur toutes les activités à venir.

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Informations pratiques

NOUS CONTACTER

Maison de Chateaubriand87, rue Chateaubriand92290 Châtenay-MalabryTél. : 01 55 52 13 00 - Fax : 01 55 52 12 [email protected]

SITES WEB

www.maison-de-chateaubriand.frwww.vallee-culture.frwww.hauts-de-seine.net

JOURS ET HORAIRES D’OUVERTURE, À COMPTER DE JANVIER 2010 (*)

MaisonMars à octobre :

du mardi au samedi : 10h00-12h00 14h00-18h00

le dimanche : 11h00-18h00

Novembre à février : du mardi au dimanche : 14h00-17h00

Fermeture : tous les lundis du 1er au 15 janvier inclus le 1er mai le 1er novembre le 25 décembre

ParcMars : 10h00-18h00Avril à septembre : 10h00-19h00Octobre : 10h00-18h00Novembre à février : 10h00-17h00

Le parc est ouvert tous les jours, toute l’année, sauf fermeture décidée en cas d’intempéries.

VISITES (*)

Du mardi au samedi, les conférenciers du service des publics vous proposent des visites guidées de la maison (environ 40 mn) Mars à octobre : 11h – 14h30 – 15h30 –

16h30 Novembre à février : 14h15 – 15h15 – 16h15Ces horaires peuvent être décalés d’une dizaine de minutes en fonction de l’affl uence.

Les visites des dimanches et jours fériés sont libres ; toutefois les agents présents dans les salles se feront un plaisir de répondre à vos questions.

ACCUEIL DES GROUPES (*)

Les groupes sont reçus sur rendez-vous pré alable (réservation un mois à l’avance), de préférence les mardis et jeudis, les autres jours selon les possibilités d’accueil.

TARIFS (*)

Parc et Maison : plein tarif : 4,50 € tarif réduit : 3 €

Dimanches et jours fériés : 1,50 €

1er dimanche du mois : gratuit

Parc seul : gratuit

Groupes : les mardis et jeudis : 3 € (mini. 18 personnes, maxi. 80 personnes) les autres jours : 4,50 €

Scolaires (groupes) : 0,75 €

(*) Informations susceptibles de modifi cations.

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Par le pont de Sèvres :Prendre l’autoroute en direction de Bordeaux-Chartres, puis, près de Vélizy, la direction Créteil (A 86). Sortir à Châtenay-Malabry. Suivre l’avenue de la Division Leclerc sur environ un kilomètre. Au rond-point Salvadore Allende (stade), prendre à gauche. Le parcours est ensuite fl éché (sigle des Monuments historiques sur les panneaux de signalisation).

Par la porte d’Orléans :Prendre la RD920 (ex-RN20) (direction Antony), puis à Antony, l’A86 (direction Versailles) jusqu’à la sortie 28, Châtenay-

Malabry. Le parcours est ensuite fl éché (sigle des Monuments histo riques sur les panneaux de signalisation).

Par le RER :Ligne B, station Robinson (terminus), puis itinéraire piétonnier fl éché (environ 20-25 minutes à pied). Dernier train pour Paris : 0h13

Par le bus :RATP ligne 194, arrêt Marc SangnierRATP ligne 294, arrêt Marc SangnierPaladin ligne 11, arrêt « Arboretum – Maison de Chateaubriand » (au bas de la propriété)

ACCÈS

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Ouvrage réalisé sous la direction de M. Bernard Degout, directeur de la Maison de Chateaubriand

Ont participé à la rédaction : Alain Canat, Gisèle Caumont, Bernard Degout, Olivier Grinhard, Blandine Leclerc, Olivia Sanchez, Véronique Troublé

Numérisations : Stéphane Dumas

Recherche iconographique : Olivia Sanchez

Iconographie :

4 Collection particulière / 26 © Adagp, Paris 2010 / 32 Musée de l’Île-de-France (Sceaux) / 36(a), 43(a) Bibliothèque André-Desguine, Archives départementales des Hauts-de-Seine / 48 Collection particulière / 51 Paris, Musée du Louvre / 61A, 61B Archives départementales des Hauts-de-Seine (1609 W 36 et 1609 W 13)

8, 11, 25, 29, 31, 33, 36(c), 38, 43(b,c,d), 47, 54, 58BC, 65A, 65B, 66 Maison de Chateaubriand

12, 13, 15, 18, 19, 26, 30, 36(b), 39, 40, 41, 43(e), 44, 46, 52, 53B, 54-55, 56, 58A, 59, 60A, 60B, 62, 63, 64 Société Chateaubriand

Crédits photographiques :

Couverture : CG92 - Willy Labre

4 droits réservés / 8, 11, 20, 25, 29, 31, 38, 44, 47, 54, 54-55 Studio Sébert / 12, 13, 15, 18, 19, 26, 30, 32, 39, 46, 52, 53B, 56, 58BC, 59, 60A, 60B, 63 Maison de Chateaubriand / 16, 22, 24B, 28, 33, 36, 40, 41, 43, 48, 50A, 50B, 53A, 58A, 64, 66 CG92 - Olivier Ravoire / 21, 67A, 67B, 71 CG92 - Jean-Luc Dolmaire / 24A, 26-27, 49 CG92 - José Justo / 34-35, 65 CG92 - Willy Labre / 51 RMN - René-Gabriel Ojéda / 61A, 61B CG92 / 62 Eugène Atget

Reproduction interdite © Conseil général des Hauts-de-Seine / Maison de Chateaubriand

Dépôt légal : janvier 2010

ISBN 978-2-9519615-4-8

Conception et réalisation : Groupe des Imprimeries Morault - 01 53 35 95 15

Couverture : Conseil général des Hauts-de-Seine - Direction de la Communication

Citation de la 4ème de couverture : extrait d’une lettre de Chateaubriand à Mme de Duras, [1er février 1812] : « [...] À mon âge, il faut être dans un lieu retiré d’où l’on puisse voir s’envoler les années, et non pas dans un tourbillon où le temps s’enfuit sans que vous puissiez le regarder venir. [...] »

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