GROUPEMENT D’INTÉRÊT ÉCONOMIQUE FONTEVRAUD · 2019. 3. 21. · Le groupement d’intérêt...
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Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 6 novembre 2018.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
ET SES RÉPONSES
GROUPEMENT D’INTÉRÊT
ÉCONOMIQUE FONTEVRAUD
(Département du Maine-et-Loire)
Exercices 2013 à 2016
GIE FONTEVRAUD
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE ............................................................................................................................... 3
RECOMMANDATIONS ........................................................................................................... 5
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 6
1 LES STATUTS ET LA GOUVERNANCE .......................................................................... 9
1.1 Le contrat constitutif et le règlement intérieur ................................................................ 9
1.1.1 Création ............................................................................................................................ 9
1.1.2 L’autorisation des collectivités territoriales actionnaires de la SOPRAF ......................... 9
1.1.3 Règlement intérieur du groupement ............................................................................... 10
1.2 L’objet du GIE .............................................................................................................. 11
1.2.1 Définition ........................................................................................................................ 11
1.2.2 Caractère non auxiliaire de l’objet .................................................................................. 11
1.2.3 Définition imprécise des droits et devoirs des membres ................................................ 12
1.3 La gouvernance du groupement .................................................................................... 13
1.3.1 L’administrateur unique .................................................................................................. 13
1.3.2 L’assemblée générale ...................................................................................................... 13
1.3.3 Les pouvoirs de l’administrateur .................................................................................... 15
1.3.4 Le contrôleur de gestion ................................................................................................. 16
1.3.5 Le commissaire aux comptes .......................................................................................... 16
1.4 Les mandats entre structures ......................................................................................... 17
2 LES CHARGES ET PRODUITS ........................................................................................ 18
2.1 La fiabilité des comptes ................................................................................................ 18
2.2 Les charges .................................................................................................................... 20
2.2.1 Vue d’ensemble .............................................................................................................. 20
2.2.2 Situation de M. X ............................................................................................................ 22
2.2.3 Situation de Mme Y ........................................................................................................ 23
2.3 Les produits ................................................................................................................... 24
2.3.1 Ressources établies par des clés...................................................................................... 24
2.3.2 Ressources hors clés ....................................................................................................... 28
2.4 Les soldes intermédiaires de gestion ............................................................................. 28
3 LES RESSOURCES HUMAINES ...................................................................................... 29
3.1 Les effectifs ................................................................................................................... 29
3.2 Les rémunérations et les primes .................................................................................... 30
3.3 La situation de Mme Z .................................................................................................. 31
4 LA SITUATION DE L’ANCIEN REPRÉSENTANT PERMANENT .............................. 33
4.1 Situation statutaire et rémunération .............................................................................. 33
4.2 Le départ de l’ancien représentant permanent .............................................................. 35
4.3 Le versement du solde de tout compte .......................................................................... 36
4.4 Les frais professionnels non justifiés ............................................................................ 37
4.5 Des achats sans utilité pour les structures de Fontevraud ............................................. 38
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
2
5 LA GESTION ADMINISTRATIVE................................................................................... 39
5.1 L’administration générale du groupement .................................................................... 39
5.2 L’achat public ............................................................................................................... 42
5.2.1 Rappel de la réglementation applicable .......................................................................... 42
5.2.2 Évaluation de la politique d’achat du GIE ...................................................................... 43
6 CONCLUSION ................................................................................................................... 43
ANNEXES ............................................................................................................................... 45
GIE FONTEVRAUD
3
SYNTHÈSE
L’abbaye de Fontevraud est un monument historique appartenant à l’État. La région
Pays de la Loire en assure la gestion par le biais de quatre structures juridiques dont la chambre
régionale des comptes examine actuellement les comptes et la gestion. Le présent rapport est la
deuxième publication de cette série de quatre contrôles.
Le groupement d’intérêt économique (GIE) Fontevraud, créé le 20 novembre 2013, a
vocation à mutualiser des services support au profit de ses trois adhérents : l’association Centre
Culturel de l’Ouest (CCO), la société publique régionale de l’abbaye de Fontevraud (SOPRAF)
et la société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Fontevraud Resort.
La chambre a constaté des dysfonctionnements majeurs dans cette structure, qui portent
principalement sur les aspects suivants :
- En contradiction avec l’article L. 251-1 du code du commerce, le GIE exerce au bénéfice
de ses membres des activités qui ne sont pas auxiliaires, ce qui pose la question même de
son existence légale ;
- L’administration mise en place au sein du GIE ne permet pas un contrôle effectif des
adhérents sur le fonctionnement du groupement ;
- Les charges de fonctionnement et de personnel sont insuffisamment suivies ;
- La perception des droits d’entrée sur le site, pour un montant de 2 M€ par an, est effectuée
irrégulièrement ;
- Des prêts irréguliers de personnel entre structures ont été effectués à deux reprises durant la
période sous revue ;
- Les quotes-parts des redevances versées par les adhérents sont à l’avantage de la SASU
Fontevraud Resort, c’est-à-dire l’hôtel-restaurant, et au désavantage de l’association CCO
et de la SOPRAF. Elles ne reflètent pas la réalité des services rendus par le GIE à ses
membres. Cette situation a pour conséquence de remettre en cause la fidélité des comptes
des adhérents et de méconnaître certaines obligations fiscales ;
- En 2016, un cadre a reçu plus de 90 000 € sans que le motif allégué ne soit justifié ;
- Des achats financés par les trois adhérents du GIE mais sans aucune utilité pour eux ont été
effectués au cours des exercices sous contrôle ;
- Des documents (des ordres de virement, un certificat de travail, des dépenses pour des
sommes supérieures à 300 000 €), ont été signés par des personnes n’ayant pas compétence
pour cela.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
4
Dès lors, il apparaît que l’ensemble des procédures administratives de base sont à
revoir : délégations de signature, procuration sur les comptes bancaires, procédures achat
public, procédures ressources et paye, suivi de la facturation et de la comptabilisation, régularité
des réunions des organes sociaux, contrôle interne.
Au vu de cette situation dégradée, la chambre recommande :
- un arbitrage à brève échéance quant à la pérennité de cette structure, ou, a minima, quant à
son périmètre ;
- au cas où un maintien serait décidé, une redéfinition de la finalité, des objectifs et de
l’administration de cette structure.
GIE FONTEVRAUD
5
RECOMMANDATIONS
Recommandation n° 1 : En application de l’article L. 251-1 du code du commerce, modifier
le périmètre du GIE pour s’assurer qu’il exerce uniquement des activités auxiliaires au bénéfice
de ses adhérents.
Recommandation n° 2 : Conformément aux articles 9 et 26 de la convention constitutive,
définir précisément les services rendus par le GIE à ses adhérents.
Recommandation n° 3 : Modifier la structure de direction pour assurer un contrôle effectif par
les adhérents.
Recommandation n° 4 : Dans l’hypothèse où ils restent utiles et conformément à l’article 2-1
de la convention constitutive, procéder à la régularisation de l’ensemble des mandats établis
entre structures.
Recommandation n° 5 : Établir des procurations régulières sur l’ensemble des comptes
bancaires utilisés.
Recommandation n° 6 : Supprimer les refacturations sans base juridique entre structures.
Recommandation n° 7 : Effectuer un inventaire physique complet et régulier des biens du GIE
et le réconcilier avec l’inventaire théorique.
Recommandation n° 8 : Réaliser un suivi resserré des dépenses d’électricité, d’eau, de
téléphonie, de maintenance informatique et d’intérim.
Recommandation n° 9 : Adopter une méthodologie de refacturation reflétant fidèlement les
charges imputables à chaque adhérent.
Recommandation n° 10 : Affecter le personnel travaillant exclusivement pour la SOPRAF à
la SOPRAF, celui travaillant pour Fontevraud Resort à Fontevraud Resort.
Recommandation n° 11 : Mettre en place des dispositifs de contrôle interne permettant de
bloquer tout achat non conforme à l’intérêt du GIE.
Recommandation n° 12 : Mettre en œuvre les recommandations formulées dans l’étude de
2015 visant à améliorer l’administration générale des structures de Fontevraud.
Recommandation n° 13 : Respecter les règles de la commande publique.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
6
INTRODUCTION
Éléments de contexte
Fondée au XIIème siècle, l’abbaye royale de Fontevraud est l’un des plus vastes
ensembles monastiques d’Europe. Au cours de la révolution française, cet ensemble devient
bien national, puis est transformé en 1804 par Napoléon Ier en établissement pénitentiaire. Le
site a pu accueillir jusqu’à 1 500 prisonniers dans les années 1940. Le centre de rétention a été
fermé en 1963 mais les derniers prisonniers (contribuant à l’entretien du site) ne quitteront
Fontevraud qu’en 1985.
En 1975, l’association Centre culturel de l’Ouest (CCO) est créée sous l’impulsion de
l’État afin d’assurer l’animation et la promotion de l’abbaye. Jusqu’à la fin des années 2000, le
Centre des monuments nationaux perçoit les droits d’entrée sur le site. La gestion est alors
conjointe avec le CCO.
En 2009, l’État et la région Pays de la Loire, estimant que ce mode de gestion était
insuffisant pour assurer le développement touristique, économique et culturel du site, ont
convenu de le modifier. Un schéma directeur des usages et vocations des espaces et des
bâtiments est arrêté. Plusieurs conventions sont alors signées organisant les rapports entre
l’État, la région, l’association CCO et une société publique locale, créée en 2010 et dont la
région est le principal actionnaire : la SOPRAF (société publique régionale de l’abbaye de
Fontevraud).
L’État reste toujours propriétaire du sol comme des bâtiments. Cependant, la région
s’est vue confier la gestion opérationnelle du site par une première convention pour les années
2009 à 2014 puis, par une seconde convention pour les années 2014 à 2032. Sur certaines parties
du site (dont l’hôtel), l’État octroie à la région des autorisations d’occupation temporaire (AOT)
d’une durée de 30 ans. Ces AOT permettent à la région de conduire des travaux sur ces espaces,
et d’y être dotée de pouvoirs de quasi-propriétaire.
En 2012-2013, la région a conduit des travaux majeurs pour restaurer l’ancien hôtel de
l’abbaye et créer une chaufferie pour un coût de l’ordre de 20 M€. Fin 2013, le conseil régional
a autorisé la société d’économie mixte régionale à créer une filiale dont elle est l’unique
actionnaire, la société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) « Fontevraud Resort »,
pour gérer l’hôtel et le restaurant.
Le nouveau cadre de la gestion du site étant fixé, l’association CCO se recentre
progressivement sur la stricte animation culturelle de l’abbaye alors que la SOPRAF monte
progressivement en charge. Cette société est d’abord chargée de conduire, pour la région, des
actions de promotion touristique, de communication, de développement culturel (par exemple
sur le monde souterrain saumurois) ou de développement numérique. Elle assure la gestion des
espaces sous AOT (et donc le suivi de travaux). En 2014, elle prend en charge tout le volet
touristique de l’abbaye : c’est désormais elle qui est en charge de la billetterie, de l’accueil des
touristes, de l’entretien du site, de la location d’espaces pour des séminaires.
Enfin, pour fournir à toutes ces structures des services support, il a été décidé, en 2013,
de créer un groupement d’intérêt économique (GIE), qui assure ces services au bénéfice de
l’association CCO, de la SOPRAF et de Fontevraud Resort.
GIE FONTEVRAUD
7
Au cours de l’année 2016, 130 personnes ont travaillé à l’abbaye pour les différentes
structures ci-dessus nommées (hors intérim et contrats avec des autoentreprises).
Enfin, le sol et les bâtiments appartenant toujours à l’État et le site étant reconnu
monument historique depuis le XIXème siècle, les gros travaux de restauration sont cofinancés
par l’État et la région et inscrits dans le contrat de plan État-Région. Ils sont effectués sous le
contrôle du conservateur des monuments historiques de Maine-et-Loire. Sur le contrat de plan
2008-2014, 8 M€ de travaux de restauration ont été payés (66 %, État, 33 % région). Sur le
contrat de plan 2015-2020, 4,8 M€ sont prévus (2,8 M€ apportés par l’État, 1,9 M€ financés
par la région, soit 60 % État, 40 % région).
Toutes les structures liées à la gestion de l’abbaye sont financées directement ou
indirectement par la région Pays de la Loire. À l’exclusion de la société d’économie mixte
régionale, elles sont examinées conjointement par la chambre régionale des comptes. Elles font
l’objet de rapports spécifiques.
Afin de visualiser le montage institutionnel, les services administratifs de l’abbaye ont
produit le schéma suivant.
Schéma d’organisation des différentes structures, selon les services administratifs
de l’abbaye (état en mai 2017)
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
8
Le groupement d’intérêt économique GIE Fontevraud
Le groupement d’intérêt économique (GIE) Fontevraud a été créé par contrat constitutif
daté du 20 novembre 2013.
Le GIE emploie 40 personnes au 31 décembre 2016. Cependant, en raison de la
saisonnalité de l’activité et de l’existence de contrats courts, c’est un peu plus d’une
cinquantaine de personnes qui peuvent travailler pour cette structure au cours d’une année. Son
budget est de l’ordre de 2 M€ par an (moyenne 2014-2016).
Les trois membres adhérents du GIE sont :
l’association Fontevraud Centre culturel de l’Ouest (CCO), créée en 1975 ;
la société publique régionale de l’abbaye de Fontevraud (SOPRAF), créée le
17 décembre 2010 ;
la société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Fontevraud Resort, créée le
19 avril 2013, filiale de la société d’économie mixte régionale (SEM régionale).
Pendant la période sous contrôle (2013-2016), l’administrateur du GIE est la personne
morale SOPRAF, qui a désigné pour représentant permanent M. David Martin
(20 novembre 2013 – 30 septembre 2016) puis M. Antoine Godbert (1er octobre 2016 au
31 décembre 2016).
Le contrôle des comptes et de la gestion du GIE Fontevraud a été inscrit au programme
de la chambre régionale des comptes Pays de la Loire par arrêté n° 2017-011 du 23 février 2017.
Le contrôle a été ouvert par lettre adressée le 13 mars 2017 à M. David Martin et
M. Antoine Godbert. Les entretiens de clôture ont été réalisés avec M. Godbert et M. Martin le
vendredi 30 mars 2018.
La chambre a établi ses observations provisoires le 15 mai 2018.
Un nouveau représentant permanent de la SOPRAF au sein du GIE a été désigné le
9 juin 2018 par le conseil d’administration de la SOPRAF en la personne de
M. Dominique Mariani. Le rapport d’observations provisoires a été notifié au nouveau
représentant le 27 juin 2018.
L’assemblée générale ordinaire du GIE Fontevraud s’est réunie le 27 septembre 2018 et
a décidé que la SASU Fontevraud Resort serait désormais administratrice du groupement. La
SASU Fontevraud Resort a désigné M. Dominique Mariani comme représentant permanent au
sein du GIE.
Les réponses aux observations provisoires ont été enregistrées au greffe de la chambre
entre le 11 juin 2018 et le 30 juillet 2018. À sa demande, M. Bruno Retailleau a été auditionné
par la chambre le 5 novembre 2018.
La chambre a établi ses observations définitives le 6 novembre 2018.
GIE FONTEVRAUD
9
1 LES STATUTS ET LA GOUVERNANCE
1.1 Le contrat constitutif et le règlement intérieur
1.1.1 Création
Le contrat constitutif du 20 novembre 2013 a pour particularité d’être signé trois fois
par la même personne : M. David Martin en sa qualité de secrétaire général de l’association
CCO, de directeur général délégué de la SOPRAF et de directeur général de la SASU
Fontevraud Resort.
Cette triple signature est atypique, mais régulière1. Ce sont les statuts des structures
concernées, ou bien des autorisations expresses des conseils d’administration qui donnent
pouvoir à M. David Martin d’adhérer au GIE ou d’en signer le contrat constitutif.
Le GIE est constitué sans apport et sans capital, chaque membre ayant une part d’intérêt.
1.1.2 L’autorisation des collectivités territoriales actionnaires de la SOPRAF
L’adhésion d’une société publique locale, comme la SOPRAF, à un GIE est possible.
Cependant, cette participation ne doit pas remettre en cause, dans la durée, la relation de
quasi-régie entre la société publique locale et ses collectivités actionnaires.
Pour ce faire, aucune collectivité ne doit être contrainte, malgré elle, à l’adhésion à un
groupement.
L’article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que la
prise de participation d’une société d’économie mixte locale dans une société commerciale doit
être autorisée expressément par les collectivités présentes au conseil d’administration. Cet
accord express requiert la présence de toutes les collectivités qui composent la société au conseil
d’administration2.
La prudence et la bonne gestion imposent d’adopter la même position lors de l’adhésion
à un GIE, en particulier lorsqu’il est constitué avec d’autres membres dont le statut n’est pas
public (ici association et société anonyme). Lors du conseil d’administration du 11 juillet 2013
qui a décidé de l’adhésion de la SOPRAF au GIE, deux actionnaires n’étaient pas représentés.
Il s’agit du département de Maine-et-Loire et du syndicat mixte Mission Val de Loire.
De plus, il n’existe pas de délibération préalable de la région Pays de la Loire, du
syndicat mixte Mission Val de Loire, du département de Maine-et-Loire et de la communauté
d’agglomération de Saumur autorisant l’adhésion au GIE.
1 Pour mémoire, depuis l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 qui a établi les nouvelles
dispositions de l’article 1161 du code civil, la nullité des « contrats avec soi-même » est érigée en principe, sauf
lorsque l’approbation régulière explicite en a été faite préalablement par les parties. 2 JOAN QE n° 82-271 du 13 décembre 2011 – circulaire n° COT/B/11/08052/C du 29 avril 2011.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
10
Par conséquent, ces collectivités ont été engagées sans donner leur accord dans une
structure juridique prévoyant une responsabilité solidaire et indéfinie entre l’ensemble de ses
membres.
En effet, lorsque le GIE emploie une cinquantaine de salariés, il engage les trois
structures adhérentes dans la poursuite de ces contrats de travail et le paiement des dettes
sociales en cas de difficulté d’un des membres du GIE. Dans l’hypothèse où l’un des adhérents
du GIE déciderait de sortir de cette structure, les deux autres devraient continuer à supporter
seuls ces charges.
Pour les collectivités actionnaires de la SOPRAF, cela constitue une dépense contrainte,
potentiellement significative, et dont n’ont pas été informées correctement leurs assemblées
délibérantes.
De son côté, le GIE aurait dû vérifier que l’ensemble des conditions requises à sa
constitution étaient réunies.
Par ailleurs, la SOPRAF bénéficie d’une délégation de service public de la région, qui
précise, en son article 2, les conditions d’une éventuelle subdélégation. Celle-ci suppose
l’accord du déléguant, qui n’a pas été obtenue préalablement à la constitution du groupement.
Ainsi, le fait que le GIE ne se soit pas assuré de la validité de la procédure lui ayant
permis de bénéficier d’une subdélégation, constitue un risque indirect réel, non seulement au
vu de l’article 2 de la délégation de service public, mais également au vu de la jurisprudence,
très régulièrement réaffirmée3.
1.1.3 Règlement intérieur du groupement
L’article 26 du contrat constitutif du GIE prévoit qu’« il peut être établi un règlement
intérieur réglant et précisant les droits et obligations dont bénéficient et qu’assument les
membres du groupement dans le cadre du contrat. »
Aucun règlement intérieur n’a été adopté lors de la constitution du groupement.
Au cours de l’instruction, un « règlement intérieur » a été produit. Il est daté du
20 septembre 2016, mais non signé par les adhérents. Un procès-verbal d’assemblée générale
du 30 septembre 2016 indique cependant que les adhérents valident le règlement intérieur.
Ce règlement fixe notamment les dates de versement des redevances. Par conséquent,
ce n’est que trois ans après la création du GIE que les adhérents ont accepté les dates de
versement des redevances.
Ce règlement intérieur donne tout pouvoir à l’administrateur d’augmenter librement le
niveau des redevances par la clause suivante : « dans le cas où ces sommes ne seraient pas
suffisantes pour assurer le bon fonctionnement du groupement, l’administrateur unique peut
3 CE, n° 155825 du 4 juin 1999 Sarl Maison Dulac - Conseil d'État, avis du 16 mai 2002, n° 366305. Les
dispositions de l’article 54 de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concessions
entérinent cette analyse selon laquelle l’autorité concédante dispose d’un droit de regard et d’information sur les
modalités éventuelles de subdélégation.
GIE FONTEVRAUD
11
appeler les sommes nécessaires et chacun des membres du groupement est tenu de répondre à
ces appels de fonds ».
Les pouvoirs conférés à l’administrateur par cette clause apparaissent exorbitants.
1.2 L’objet du GIE
1.2.1 Définition
En vertu du préambule du contrat constitutif, le GIE a pour objet de « mutualiser des
ressources humaines et matérielles avec pour objectif de rechercher la plus grande rationalité
d’allocation et de gestion des moyens dédiés au projet de Fontevraud. Le GIE est un outil au
service de ses membres fondateurs afin de leur permettre une plus grande efficience dans la
mise en œuvre du projet. Ainsi, le GIE n’intervient qu’à la demande et sous le contrôle de ses
membres qui ne lui délèguent donc en aucun cas leurs attributions et leurs responsabilités. »
L’article 2 du contrat constitutif définissant l’objet indique que « en vue de faciliter et
de développer l’activité économique de ses membres, le groupement a pour objet de mettre en
commun les moyens utiles et nécessaires à l’exercice de l’activité de chacun des membres,
notamment sur le plan des ressources humaines et matérielles. »
1.2.2 Caractère non auxiliaire de l’objet
L’article L. 251-1 du code du commerce prévoit :
« Deux ou plusieurs personnes physiques ou morales peuvent constituer entre elles un groupement
d'intérêt économique pour une durée déterminée.
Le but du groupement est de faciliter ou de développer l'activité économique de ses membres, d'améliorer
ou d'accroître les résultats de cette activité. Il n'est pas de réaliser des bénéfices pour lui-même.
Son activité doit se rattacher à l'activité économique de ses membres et ne peut avoir qu'un caractère
auxiliaire par rapport à celle-ci ».
Si la chambre constate que pour l’association CCO et la SASU Fontevraud Resort, les
activités portées par le GIE restent auxiliaires, ce n’est pas le cas pour la SOPRAF.
En effet, la SOPRAF comprend, au 31 décembre 2016, 7 salariés ; le GIE, 42. La
SOPRAF a pour mission de service public déléguée par la région, la gestion du site de
Fontevraud. L’accueil des touristes, l’entretien du bâti, le jardinage ne peuvent donc pas être
considérés comme de simples activités auxiliaires. Il s’agit du cœur de la mission de la
SOPRAF.
Ainsi, le GIE ne respecte pas l’article L. 251-1 du code du commerce et est, sous réserve
de l’appréciation du juge compétent, constitué irrégulièrement. Le non-respect de ces
dispositions du code du commerce pourrait conduire à une requalification du GIE en société
créée de fait.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
12
En parallèle, l’absence de cantonnement du GIE à des activités auxiliaires a pour effet
une situation de sous-délégation, par la SOPRAF, de ses missions opérationnelles à une
structure tierce.
Or, la région Pays de la Loire a délégué, sans mise en concurrence sous l’argument de
l’existence d’une « quasi-régie », à la SOPRAF, la gestion du site de Fontevraud par délégation
de service public (DSP) du 30 avril 2014.
La sous-délégation immédiate de l’essentiel des tâches opérationnelles de la DSP à un
GIE dont deux structures adhérentes sur trois sont privées rompt ainsi structurellement
l’argument de l’existence d’une quasi-régie.
Le maintien de cette situation au cours de la délégation de service public doit être
corrigée car la SOPRAF pourrait être considérée comme une société écran ayant permis la
désignation hors du champ de la concurrence du véritable opérateur en charge de l’opération
confiée à la société.
Enfin, la chambre rappelle qu’un GIE n’échappe à l’impôt sur les sociétés que lorsqu’il
est constitué et fonctionne dans les conditions prévues à l’article L. 251-1 à 251-23 du code du
commerce4.
Recommandation n° 1 : En application de l’article L. 251-1 du code du commerce,
modifier le périmètre du GIE pour s’assurer qu’il exerce uniquement des activités
auxiliaires au bénéfice de ses adhérents.
1.2.3 Définition imprécise des droits et devoirs des membres
L’article 9 du contrat constitutif prévoit que les membres « ont le droit de bénéficier des
services du groupement, le cas échéant dans les conditions fixées par le règlement intérieur, et
l’obligation de contribuer aux dépenses de fonctionnement du groupement, dans les conditions
fixées par le contrat, l’assemblée générale, le règlement intérieur ou l’administrateur ».
Aucune définition plus précise des « services du groupement », et donc des droits des
membres adhérents n’existe dans le contrat constitutif.
Sont fixés seulement les devoirs des membres, et en particulier, article 9, « les membres
du groupement sont tenus des dettes de celui-ci sur leur patrimoine propre. Ils sont solidaires,
sauf convention contraire avec le tiers contractant ».
Le contrat constitutif ne précise pas plus clairement ce que le GIE fait pour ses
adhérents. En particulier il n’indique pas quels services les membres du GIE peuvent attendre
en matière de comptabilité, de gestion des ressources humaines, de communication, d’achat,
etc.
4 Bulletin officiel des impôts BIC -CHAMP 70-20-50-20120912 du 12 septembre 2012.
GIE FONTEVRAUD
13
Les prestations effectivement réalisées ne sont présentées dans aucun document écrit.
Ainsi, la définition imprécise des droits et devoirs et l’absence de formalisation des
services rendus aux adhérents n’assurent pas une clarté suffisante dans les relations entre le GIE
et ses adhérents.
En réponse aux observations provisoires, la structure s’est engagée à encadrer davantage
la nature et le niveau des prestations rendues par le GIE à ses membres. En particulier, elle
présentera un budget prévisionnel du GIE intégrant la nature, le niveau et la clé de répartition
entre les membres de l’ensemble des prestations portées par le GIE aux organes délibérants des
adhérents.
Recommandation n° 2 : Conformément aux articles 9 et 26 de la convention
constitutive, définir précisément les services rendus par le GIE à ses adhérents.
1.3 La gouvernance du groupement
1.3.1 L’administrateur unique
Sous les exercices contrôlés, l’administrateur du groupement est la SOPRAF, personne
morale. Celle-ci a successivement désigné M. David Martin (2013-2016) puis
M. Antoine Godbert (du 1er octobre 2016 au 31 décembre 2016) comme représentants
permanents.
L’article 14-1 du contrat constitutif indique que le mandat de l’administrateur unique
est à durée indéterminée.
1.3.2 L’assemblée générale
Le GIE n’a pas de conseil d’administration. Seule l’assemblée générale permet aux
adhérents d’être représentés et d’effectuer un contrôle des actes de l’administrateur unique.
Le contrat constitutif du GIE prévoit que « l’assemblée générale ordinaire entend les
rapports de l’administrateur, du contrôleur de gestion et du contrôleur des comptes, discute,
approuve ou redresse les comptes, constate l’appréhension des résultats par chacun des
membres et fixe le montant des sommes qui doivent être reversées en compte courant, nomme
et révoque le contrôleur de gestion et le contrôleur des comptes, et délibère sur toutes
propositions de résolutions portées à l’ordre du jour et qui ne sont pas de la compétence de
l’assemblée générale extraordinaire. L’assemblée générale appelée à statuer sur les comptes
d’un exercice doit être réunie dans les neuf premiers mois de l’exercice suivant ».
Les statuts (article 17) prévoient que « l’assemblée générale se compose de tous les
membres du groupement. Les personnes morales y sont représentées par leurs représentants
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
14
légaux ou des mandataires spécialement désignés par ceux-ci. Un membre du groupement peut
donner pouvoir à un autre membre de le représenter à l’assemblée générale. »
Les représentants légaux des structures adhérentes sont :
- pour le CCO, du 23 novembre 2013 au 25 juin 2016 : M. Jacques Auxiette ;
- pour le CCO, du 25 juin 2016 au 31 décembre 2016 : M. Bruno Retailleau ;
- pour la SOPRAF, du 23 novembre 2013 au 6 juin 2016 : M. Jacques Auxiette ;
- pour la SOPRAF, du 6 juin 2016 au 17 décembre 2016 : M. Bruno Retailleau ;
- pour la SOPRAF, du 17 décembre 2016 au 31 décembre 2016 : M. Antoine Godbert ;
- pour la SASU Fontevraud Resort, du 19 avril 2013 au 19 septembre 2016 :
M. Denis Caille ;
- pour la SASU Fontevraud Resort, du 1er octobre 2016 au 31 décembre 2016 :
M. Dominique Mariani.
Les représentants légaux du CCO et de la SOPRAF n’ont jamais été présents lors des
assemblées générales, de 2014 à 2016.
Aucune décision de l’association CCO désignant M. David Martin comme mandataire
spécial pour la représenter au sein du GIE n’a pu être présentée à la chambre. Par conséquent,
M. David Martin n’avait pas mandat pour représenter l’association CCO à l’assemblée générale
du groupement sur l’ensemble de la période.
Aucun procès-verbal d’assemblée générale n’a pu être fourni pour 2014. L’absence
d’assemblée générale en 2014 est irrégulière. Il n’y a ni ordre du jour, ni procès-verbal, ni
convocation, ni feuille de présence.
La chambre dispose d’un procès-verbal d’assemblée générale du 30 septembre 2015.
Un ordre du jour a été produit. Des convocations, datées du 28 septembre 2015, soit deux jours
avant la réunion, ont été fournies. Il n’y a pas de feuille de présence. Les membres présents à
l’assemblée générale ne sont pas identifiables. Le PV indique qu’« il a été établi une feuille de
présence laquelle a été signée par les membres présents à cette réunion. La feuille de présence
permet de constater la présence des deux membres, totalisant deux parts ». Il n’est cependant
pas possible de déterminer qui était effectivement présent. Par conséquent, l’assemblée générale
est irrégulière, et les comptes de l’exercice 2014 n’ont pas été approuvés régulièrement.
Quand ils sont produits, les procès-verbaux sont systématiquement signés par une seule
personne, M. David Martin, et non contresignés en 2015 et 2016.
L’ensemble de ces constats conduit à douter de la réalité de la vie sociale du groupement
pour les années 2014, 2015 et 2016.
Il n’est pas de bonne gestion qu’une seule personne représente l’ensemble des structures
adhérentes. Cette situation conduit à concentrer tous les pouvoirs entre les mains d’un individu
et ainsi à ôter de facto aux adhérents tout rôle de décision et de contrôle sur la structure.
Ainsi, le fonctionnement institutionnel du GIE, au travers de son assemblée générale,
apparaît entaché de carences substantielles.
GIE FONTEVRAUD
15
1.3.3 Les pouvoirs de l’administrateur
Les pouvoirs octroyés par les statuts (article 14.2) à l’administrateur sont
particulièrement étendus : les limitations posées ne sont liées qu’à la seule tenue d’une
assemblée générale.
En particulier, en l’absence de règlement intérieur (jusqu’au 30 septembre 2016) et de
contrôle effectif par l’assemblée générale, l’administrateur (c’est-à-dire la SOPRAF,
représentée par son représentant permanent) avait tout pouvoir pour fixer librement le montant
des redevances à verser par les membres adhérents.
Pour l’exercice 2014, les structures membres ont adopté le niveau des versements bien
après la production par le commissaire aux comptes de leurs comptes certifiés (pour
l’association CCO, signature du commissaire aux comptes le 15 mai 2015 ; pour la SOPRAF,
signature du commissaire aux comptes le 15 septembre 2015). Cela est régulier mais a eu pour
effet de laisser à l’administrateur la liberté de fixer seul le niveau des versements.
Les clés de répartition décidées par l’assemblée générale du 30 septembre 2015 n’ont
pas été respectées lors de l’établissement des comptes annuels. Les comptes certifiés par le
commissaire aux comptes pour l’exercice 2015 utilisent une clé qui n’a été validée que par
l’assemblée générale du 30 septembre 2016. La clé effectivement utilisée pour l’exercice 2015
minimise la charge portée par la SASU Fontevraud Resort. Là encore, la pratique est régulière
mais a eu pour effet de laisser à l’administrateur la décision du niveau des versements. Au total,
le niveau et la date des versements effectués pour les exercices 2014 et 2015 ont été librement
fixés par le représentant permanent de l’administrateur.
Ce mode d’administration conduit une personne morale (la SOPRAF), représentée par
son représentant permanent (M. David Martin puis M. Antoine Godbert) à être dotée d’un
pouvoir de tirage non borné et non contrôlé sur les comptes d’une association et de deux sociétés
anonymes, sans que les organes sociaux de ces structures ne s’inquiètent de cette situation.
En particulier, sur l’ensemble de la période sous contrôle, les structures adhérentes ne
se sont jamais exprimées sur les effectifs du GIE et leur évolution. Les créations de postes
(nouveaux recrutements + fixation des rémunérations) ont été effectuées sans information ni a
priori ni a posteriori des structures adhérentes alors même qu’in fine elles sont l’unique source
de financement de ces postes.
L’administrateur a produit des rapports d’activité, non datés, non signés, pour 2014,
2015 et 2016. Ces rapports ne mentionnent pas la masse salariale ni l’évolution des effectifs.
Ils n’ont pas été transmis aux organes sociaux des structures adhérentes.
Ainsi, les pouvoirs donnés à l’administrateur sont exorbitants alors même qu’il existait
des options juridiques pour les encadrer. Outre l’absence de clarté et de transparence de ce type
de fonctionnement, qui devraient présider à la gestion de structures financées par des fonds
publics, ce pilotage ne garantit pas les intérêts de chacun des membres.
Recommandation n° 3 : Modifier la structure de direction pour assurer un contrôle
effectif par les adhérents.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
16
1.3.4 Le contrôleur de gestion
Le contrat constitutif prévoit la nomination d’une personne physique, contrôleur de
gestion du GIE. Il est élu par l’assemblée générale ordinaire du groupement.
Le contrôleur de gestion (au sens du contrat) est un subordonné de M. David Martin,
puis de M. Antoine Godbert. Cette situation de subordination du contrôleur de gestion n’est pas
irrégulière en soi, mais apparaît peu propice à l’exécution d’un véritable contrôle de gestion.
En réponse aux observations provisoires, la structure s’est engagée à modifier cette
organisation à l’automne 2018.
Le contrôleur de gestion doit produire un « rapport du contrôleur de gestion à
l’assemblée générale annuelle ». Ces rapports ont été produits pour 2014, 2015 et 2016 mais
ceux de 2014 et 2016 ne sont pas signés et aucun n’est daté.
1.3.5 Le commissaire aux comptes
Le contrat constitutif prévoit la nomination d’un contrôleur des comptes, sans obligation
de nommer un commissaire aux comptes. Cependant, l’article 30 du contrat constitutif indique
que la société KPMG Ouest est nommée commissaire aux comptes pour une durée de six
exercices.
L’article 16 du contrat constitutif détaille les missions du contrôleur des comptes.
Des rapports du commissaire aux comptes pour 2014, 2015 et 2016 ont été produits. Le
commissaire aux comptes n’a pas présenté ses rapports à l’assemblée générale, car il n’y était
pas présent. Les rapports ont cependant été mis à disposition des membres du GIE selon les
modalités prévues par le contrat constitutif.
Le commissaire aux comptes a certifié sans réserves les comptes 2015 alors que les actes
juridiques positifs à sa disposition organisaient des modalités de contributions des membres du
GIE différentes de celles effectivement comptabilisées (et régularisées a posteriori après
certification des comptes).
GIE FONTEVRAUD
17
1.4 Les mandats entre structures
Le personnel du GIE est chargé en pratique de percevoir les encaissements billetterie,
boutique, restauration, concerts pour l’association CCO, la SOPRAF et la SASU Fontevraud
Resort ainsi que d’émettre des factures pour ses adhérents.
Ces services dits « d’encaissement et de facturation » ne sont pas définis dans le contrat
constitutif. Ils se matérialisent :
- par l’utilisation du personnel GIE pour effectuer la perception effective des sommes
(en particulier, personnel de l’entrée) et, en comptabilité, l’enregistrement et les reversements ;
- par l’utilisation du personnel GIE pour produire les factures des différentes structures
adhérentes ;
- par la liquidation par le GIE de la TVA collectée et son reversement aux structures
adhérentes ;
- par la présence dans la comptabilité du GIE, de comptes de « passage » qui sont
régulièrement purgés par des versements périodiques à l’association CCO, SOPRAF,
Fontevraud Resort.
L’essentiel des sommes perçues par le GIE le sont pour le compte de la SOPRAF, en
particulier sur les derniers exercices. Elles correspondent aux droits d’entrée sur le site, soit
plus d’1,8 M€ sur les derniers exercices.
Pour le CCO, si on met de côté l’exercice 2014 et ses conséquences sur 2015, les
sommes correspondent au produit des concerts et autres animations. À l’exception de l’exercice
2014, les comptes 467 - Autres comptes débiteurs ou créditeurs - sont correctement soldés au
31 décembre. Enfin, les sommes perçues sous mandat pour Fontevraud Resort sont très faibles
pour les derniers exercices.
L’ensemble de ces opérations sont réalisées, depuis 2014, sans base juridique :
- du 23 novembre 2013 au 18 décembre 2014, il n’existe aucun mandat entre les
structures pour autoriser la perception de ces sommes ;
- le 18 décembre 2014, des mandats sont signés par M. David Martin au nom de toutes
les structures. Or, il n’était pas habilité à signer ces documents par le CCO, par la SOPRAF et
par le GIE. Les mandats sont donc viciés. Sous réserve de l’appréciation que pourrait en faire
l’administration fiscale, la liquidation de la TVA a ainsi été effectuée sans titre.
Par ailleurs, si la conclusion de mandats d’encaissement par l’association CCO et la
SASU Fontevraud Resort ne pose pas de problème juridique une fois signés par une personne
régulièrement habilitée, la délégation par la SOPRAF à un tiers de la perception des droits
d’entrée sur le site est irrégulière.
En effet, la SOPRAF bénéficie d’une délégation de service public de la région, qui
prévoit que le délégataire exerce notamment la mission suivante : « la perception des droits
d’entrée et de visite et de toute autre recette liée à l’exploitation du site ». L’article 2 du contrat
de DSP prévoit que le délégataire est tenu d’assurer personnellement l’exploitation du domaine
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
18
et l’exécution du service qui lui est délégué, à ses risques et périls, et se rémunère sur les usagers
de ce domaine.
Une éventuelle subdélégation, prévue à l’article 2.1, nécessite, outre diverses conditions
qui ne sont pas remplies en l’espèce, a minima l’accord express du délégant, du directeur
régional des affaires culturelles et du Préfet de région.
Ces autorisations n’ont jamais été ni demandées, ni accordées.
De plus, la perception des recettes du site est naturellement une activité non-accessoire
pour la SOPRAF.
Par conséquent, le GIE n’est aucunement autorisé à percevoir les droits d’entrée du
monument, recette d’un montant de l’ordre de 2 M€ annuel.
Enfin, concernant les mandats de facturation, la chambre rappelle que, contrairement à
ce qui a été réalisé en 2014, le mandat tacite n’est pas autorisé et que l’alinéa 410 du Bulletin
officiel des impôts TVA-Decla-30-20-10-20120912 recommande d’indiquer sur les factures
concernées une mention du type « facture établie par A au nom et pour le compte de B ». Cela
n’est pas effectif sur la période sous contrôle.
En réponse aux observations provisoires le GIE s’est engagé à régulariser les mandats
concernés.
Recommandation n° 4 : Dans l’hypothèse où ils restent utiles et conformément à
l’article 2-1 de la convention constitutive, procéder à la régularisation de l’ensemble des
mandats établis entre structures.
2 LES CHARGES ET PRODUITS
2.1 La fiabilité des comptes
Les comptes des exercices 2014, 2015, 2016 sont certifiés conformes par le commissaire
aux comptes.
L’article 21 du contrat constitutif prévoit que « il sera tenu une comptabilité régulière
des opérations du groupement. Le rapport sur les opérations de l’exercice, l’inventaire, le
compte d’exploitation générale et compte de résultats ainsi que le bilan sont soumis par
l’administrateur à l’approbation de l’assemblée générale ordinaire après avoir été soumis au
contrôleur de gestion et contrôleur aux comptes. »
GIE FONTEVRAUD
19
Absence d’inventaire
L’article R. 123-177 du code du commerce prévoit la tenue d’un inventaire.
La chambre dispose d’une liste des actifs du GIE au 31 décembre 2016. Celle-ci
comporte principalement le site internet, la charte graphique, des véhicules et des vêtements de
travail. Les services ne réalisent aucun inventaire annuel de leurs biens sur l’ensemble de la
période.
En l’absence d’inventaire physique annuel, on ne dispose pas de réconciliation entre
l’inventaire théorique et l’inventaire physique, pour aucun des exercices, en contradiction avec
l’article R. 123-177 du code du commerce et l’article 21 du contrat constitutif.
Aucun rapport sur l’inventaire n’a donc pu être présenté au contrôleur de gestion, au
contrôleur des comptes et enfin à l’assemblée générale contrairement à ce que prévoit le contrat
constitutif du GIE.
En réponse aux observations provisoires, le GIE a indiqué qu’un inventaire sera effectué
à l’automne 2018 et s’est engagé à effectuer ensuite une mise à jour annuelle.
Irrégularité des opérations sous mandat de perception
Comme indiqué précédemment, l’absence de mandat de perception pour 2014 et
l’irrégularité des conventions de mandat signées par la suite ont pour effet que toute la
perception de recettes pour le CCO et la SOPRAF et la SASU Fontevraud Resort sont effectuées
sans base juridique sur l’ensemble de la période sous contrôle.
Opérations sans base juridique
De même, les opérations de refacturation de rémunérations entre structures ont été
effectuées sans base juridique et portées en charge pour le GIE. C’est le cas pour les
rémunérations de trois employés.
Absence de procuration régulière sur le compte bancaire principal du GIE
Lors de l’instruction, il a été demandé l’ensemble des procurations sur les comptes
bancaires du GIE. Dans un premier temps, les documents fournis pour le compte de la Caisse
d’épargne n’étaient pas signés par la banque et comportaient de nombreux éléments faux ou
inexacts. Dans un deuxième temps, les services du GIE ont produit un document signé par la
banque, mais dont certaines mentions restaient fausses, inexactes ou incomplètes. Dans un
troisième temps, suite à un échange avec le commissaire aux comptes, celui-ci a transmis des
documents provenant de la banque, non concordants avec les éléments fournis par le GIE.
Le document du GIE indique « Nous soussignés SOPRAF » alors qu’il est
matériellement impossible pour une personne morale de signer. L’identité précise du signataire
n’est pas fournie, les informations précises requises par l’établissement bancaire au verso des
formulaires n’ayant pas été fournies.
Par conséquent, à partir du 6 octobre 2016, le représentant permanent de
l’administrateur unique (M. Antoine Godbert) ne dispose pas de procuration régulière sur le
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
20
compte principal du GIE alors qu’il signe l’essentiel des ordres de virement et des chèques pour
des montants atteignant parfois plusieurs centaines de milliers d’euros. Par ailleurs, le pouvoir
conféré à M. Bruno Retailleau sur ce même compte bancaire est irrégulier car il n’est pas le
représentant permanent de la SOPRAF.
En réponse aux observations provisoires, le GIE a affirmé avoir effectué les correctifs
nécessaires sans apporter la preuve matérielle de ce fait. Il a également indiqué que la banque
était responsable du pré-remplissage des formulaires concernés. À ce sujet, la chambre rappelle
qu’il est de la responsabilité des dirigeants de toute structure, publique ou privée, de ne pas
signer des documents comportant des informations inexactes.
La structure n’a pas été alertée par son commissaire aux comptes, qui aurait pu s’assurer
que les personnes ayant accès aux comptes étaient dûment habilitées à cet effet, par voie de
circularisation des documents entre la structure et les établissements bancaires, conformément
à une pratique habituelle5.
Recommandation n° 5 : Établir des procurations régulières sur l’ensemble des comptes
bancaires utilisés.
Recommandation n° 6 : Supprimer les refacturations sans base juridique entre
structures.
Recommandation n° 7 : Effectuer un inventaire physique complet et à échéance régulière
des biens du GIE et le réconcilier avec l’inventaire théorique
2.2 Les charges
2.2.1 Vue d’ensemble
Le GIE supporte un peu plus de 2 M€ par an de charges dont les ¾ sont des charges de
personnel. Ces charges de personnel correspondent à la rémunération d’une quarantaine de
personnes.
5 NEP-500 norme d’exercice professionnel relative au caractère probant des éléments collectes et
NEP-505 norme d’exercice professionnel relative aux demandes de confirmation des tiers.
GIE FONTEVRAUD
21
Charges mutualisées au sein du GIE 2014-2016 (en €)
Exercice Personnel Charges
diverses Total
2014 1 563 050 348 049 1 911 099
2015 1 488 061 841 255 2 329 316
2016 1 568 958 674 891 2 243 849
Source : Tableaux excel clés GIE, 2014-2016
Les charges de personnel sont globalement stables sur les trois exercices.
En revanche, les charges diverses varient significativement, entre 348 049 € et
841 255 €. Elles comprennent par exemple des frais d’électricité, d’eau, de maintenance
informatique, de fournitures diverses, de personnel extérieur, qui sont partagées entre les
membres.
Les charges d’eau sont passées de 20 757 € en 2013 à 35 946 € en 2016. S’il est naturel
que l’ouverture de l’hôtel ait eu un effet significatif sur la consommation en eau (+ 73 % entre
2013 et 2016), l’évolution forte de la facture d’eau entre 2015 et 2016 (+ 21 %) doit conduire à
un suivi attentif de ces charges. Sur ce point, en réponse aux observations provisoires, le GIE a
indiqué que la création d’un potager avait également eu un impact sur la consommation en eau.
Les dépenses d’électricité augmentent de + 37 % entre 2013 et 2016, ce qui s’explique
en partie par la mise en service de l’hôtel et du pôle énergétique.
Les charges annuelles de téléphone portées par le GIE sont de l’ordre de 25 000 € par
an. Elles ont augmenté de 9,7 % depuis 2014.
La maintenance informatique portée par le GIE atteint 60 000 € en année complète, soit
environ 1 500 € par an et par salarié du GIE.
La variation la plus significative concerne le recours au « personnel extérieur » :
Recours au personnel extérieur (en euros)
Exercice
Compte 621
(personnel
extérieur)
2015 256 311
2016 107 021
2017 95 578
Source : GIE, comptes annuels, compte 621
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
22
Il s’agit de recours à l’intérim, soit pour du ménage, soit pour de la manutention, mais
aussi la prise en charge d’une partie du salaire d’un cadre employé par la SASU Fontevraud
Resort et du salaire d’une gestionnaire de stock.
La chambre souligne la variation importante de ces différentes charges qui mériteraient
un suivi plus resserré. En réponse aux observations provisoires, le GIE s’est engagé à mettre en
place, sur le site de Fontevraud, un suivi analytique par structure.
Recommandation n° 8 : Réaliser un suivi resserré des dépenses d’électricité, d’eau, de
téléphonie, de maintenance informatique et d’intérim.
2.2.2 Situation de M. X…
M. X… a été employé du 8 janvier 2014 au 31 août 2017 par Fontevraud Resort en tant
que « directeur hospitalité ».
Son contrat à durée indéterminée indique que ses principales missions seront « la
direction, la gestion et le développement des activités hôtellerie, restauration et
commercialisation et d’assurer la cohésion et la coordination de toutes les équipes. Son rôle est
de représenter l’établissement auprès de la clientèle et des institutions locales. Il est garant de
la satisfaction des clients lors des séjours ».
Les rémunérations effectivement versées par la SASU Fontevraud Resort sont de l’ordre
de 6 200 € bruts par mois.
Rémunération de M. X…, 2014-2017
Exercice Brut sécurité
sociale, en euros
2014 64 335,01
2015 74 614,32
2016 74 929,32
2017 (8 mois sur 12) 57 834,04
Source : Fontevraud Resort, bulletins de salaire de M. X… (brut SS au 31 décembre)
Le GIE a pris en charge une partie des coûts salariaux chargés du directeur de l’hôtel en
2015-2016. Cette refacturation a été effectuée sans base juridique. Grace à ce mécanisme de
refacturation, la SASU Fontevraud Resort n’a eu à supporter, de 2014 à 2016, que 41 % des
GIE FONTEVRAUD
23
coûts salariaux du directeur de son hôtel, quand bien même la direction d’un hôtel de 50
chambres constitue un emploi à temps plein. Cette situation a donc conduit à reporter des
charges sur la SOPRAF et sur le CCO au bénéfice de Fontevraud Resort.
Cependant, dans l’hypothèse même où cette refacturation correspondrait à une activité
effectuée par M. X… pour le compte de la SOPRAF, la chambre constate :
- qu’en 2015 et 2016, Fontevraud Resort a fait supporter le paiement d’une partie de la
rémunération du directeur de son hôtel par les autres structures du GIE Fontevraud ;
- qu’il n’existe pas d’accord tripartite organisant ce prêt de main d’œuvre ;
- qu’il n’existe ni décision de l’assemblée générale de la SASU, ni décision de
l’assemblée générale du GIE pour autoriser cette mise à disposition ;
- qu’il n’existe pas de document prouvant l’accord du salarié pour ce qui est une
modification substantielle de son contrat de travail.
De tels prêts de main d’œuvre sont irréguliers, ils ne doivent pas être renouvelés.
2.2.3 Situation de Mme Y…
Mme Y… a été recrutée le 14 avril 2014 en CDI par Fontevraud Resort comme
économe. Elle quitte Fontevraud Resort le 31 décembre 2015 suite à une rupture
conventionnelle. Sa rémunération est fixée à un brut mensuel de 1 814 € par mois, soit une
rémunération brute annuelle de 21 768 € pour un plein temps (39 h par semaine).
Il n’existe aucun document mettant à disposition ce salarié des autres structures de
Fontevraud. De même aucun avenant au contrat de travail du salarié organisant cette mise à
disposition n’a été produit. En réponse aux observations provisoires, la salariée concernée a
confirmé n’avoir jamais travaillé, sur la période considérée, pour d’autres structures que la
SASU Fontevraud Resort.
Pourtant, dans le grand livre 2015 du GIE, apparaît en compte de charge, le versement,
le 31 décembre 2015 de 42 559,74 € à « FD Resort, salaire Mme Y…» (compte 621). Ce
versement par le GIE à Fontevraud Resort n’a aucun motif. Grâce aux clés de répartition entre
les trois structures, Fontevraud Resort n’a supporté que 64 % de cette somme, la SOPRAF ayant
pris en charge le reste. Ce mécanisme de refacturation a ainsi constitué un avantage financier
pour la SASU Fontevraud Resort.
Par conséquent, la prise en charge partagée de cette salariée a eu lieu sans son accord
explicite et sans accord tripartite, au profit de la structure Fontevraud Resort qui n’a supporté
que 27 238 € du salaire de son salarié. Cette prise en charge de rémunération a été organisée
sans que ne soit diffusée d’information aux membres du GIE en assemblée générale ni aux
organes sociaux de la SOPRAF, du CCO et de la SASU.
La chambre recommande de mettre fin aux prêts de main d’œuvre sans cadre juridique
entre structures.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
24
2.3 Les produits
2.3.1 Ressources établies par des clés
Les produits du GIE sont constitués par les versements de ses trois membres. Le niveau
de ces versements est fixé par un système de clés, dont certaines sont fixes, d’autres
proportionnelles à un indicateur d’activité.
Comme indiqué précédemment :
- le contrat constitutif ne précise pas les clés ;
- de novembre 2013 au 30 septembre 2015, le représentant permanent de l’administrateur a
décidé seul des clés et des dates de versement ;
- la première assemblée générale, le 30 septembre 2015, fixe des clés pour 2014 et 2015 ;
- la deuxième assemblée générale, le 30 septembre 2016, modifie rétrospectivement les clés
pour 2015 et fixe des clés pour 2016.
Les clés 2016 appliquées en 2016 sont les suivantes :
GIE FONTEVRAUD
25
L’analyse des clés permet d’affirmer que la part payée par Fontevraud Resort est, de
manière répétée, inférieure à la réalité, tant en charges de personnel qu’en charges matérielles.
Par conséquent, la SOPRAF et le CCO surpayent les services rendus par le GIE.
Par exemple, la SASU Fontevraud Resort ne participe pas du tout au financement de
l’entretien des espaces verts alors même qu’elle dispose d’une AOT sur près d’un hectare. Elle
ne participe pas au financement des postes « innovation » alors que, sur la période, des
dispositifs et programmes numériques sont déployés au sein de l’hôtel et du restaurant.
Sa prise en charge des frais d’administration ne s’élève qu’à 8,20 % des frais communs
en 2016. Si on rapproche le chiffre d’affaires de la SOPRAF (2,8 M€ en 2017) et celui de la
SASU (3,3 M€), on ne comprend pas pourquoi l’administration de ces entreprises prendrait
autant de temps pour la SOPRAF (85,8 %) et aussi peu de temps pour la SASU (8,20 %). Il en
va de même si on compare les effectifs des deux structures : six personnes pour la SOPRAF
(85,8 %), 42 pour la SASU (8,20 %). En réponse aux observations provisoires, le GIE a indiqué
que ce taux avait été fixé à 19,7 % en 2017.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
26
Concernant la commercialisation des produits, la clé choisie minimise la charge portée
par Fontevraud Resort en comptabilisant de manière équivalente l’obtention d’un séminaire à
12 000 € – qui nécessite une offre co-construite avec l’acheteur et donc du temps de travail - et
une simple visite guidée pour un groupe de 30 personnes.
Concernant la communication, seulement 10 % des charges du GIE sont portées par
Fontevraud Resort. Cela n’est pas réaliste au vu des efforts effectués pour faire connaître l’hôtel
et le restaurant en période de montée en charge.
Concernant la mission « diriger », Fontevraud Resort n’a pris en charge :
- que 5 % du coût sur la période 1er mai au 31 décembre 2014 ;
- que 20 % du coût du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.
Ces pourcentages apparaissent également peu réalistes.
Fontevraud Resort ne paye rien sur les exercices sous contrôle sur la mission
« accueillir ». Or, a minima, un agent d’accueil a été identifié comme travaillant effectivement
au sein de l’hôtel et du restaurant. Début 2018, suite aux remarques de la chambre, deux
personnes ont été transférées au sein de la SASU Fontevraud Resort pour prendre en compte
leur travail effectif pour l’hôtel restaurant.
Concernant les fluides, sur les 100 000 € d’électricité payés par le site pour l’année
2016, seuls 13 647 € ont été payés par Fontevraud Resort alors que le CCO en payait 5 719 €.
Il est étonnant qu’un hôtel de plus de 50 chambres ne consomme que deux fois plus d’électricité
qu’une équipe de six personnes en bureau.
De même sur les 35 946 € de factures d’eau, 4 888 € seulement ont été payés par
Fontevraud Resort en 2016 mais 2 048 € par le CCO. Il est également curieux qu’un hôtel de
plus de 50 chambres ne consomme que deux fois plus d’eau qu’une équipe de six personnes en
bureau.
Concernant le ménage et l’entretien du site, la chambre constate que l’association CCO
est lésée, en particulier par la prise en charge complète d’espaces que l’association n’utilise que
quelques jours par an. Ainsi, par exemple, le CCO prend en charge à 100 % l’entretien de la
chapelle St Benoit alors que son usage effectif du bâtiment est de 7,3 % du temps annuel. Au
contraire, la SOPRAF et la SASU qui utilisent régulièrement ce bien ne prennent pas en charge
son entretien.
Concernant l’entretien des bâtiments toujours, la part payée par Fontevraud Resort est
inférieure à son usage effectif des lieux : par exemple l’entretien des salles des séminaires n’est
pris en charge que par la SOPRAF, sans base juridique.
Enfin, toujours sur l’entretien, il n’est pas non plus matériellement possible que le CCO
occupe la moitié des bureaux administratifs de l’abbaye (215 m2 des 430 m2) au vu de la
configuration des lieux et dans la mesure où le CCO ne comptait que six salariés sur les
exercices considérés.
Ainsi, le dispositif de répartition des charges ne respecte pas correctement la réalité des
prestations effectuées pour les différents membres du GIE. Cette répartition a pour effet
d’augmenter les charges de l’association et de la SOPRAF et de diminuer d’autant celles de
Fontevraud Resort. Ainsi, les comptes et donc les résultats de chacune des structures sont
faussés.
GIE FONTEVRAUD
27
Au total, les montants versés par les différentes structures sont les suivants :
Redevances versées par le CCO, la SOPRAF et la SASU Fontevraud Resort
En montant (en €)
Exercice SOPRAF CCO SASU Fontevraud Resort
total
2014 1 373 520 402 424 135 155 1 911 099
2015 1 811 417 196 473 321 427 2 329 317
2016 1 779 574 213 620 250 654 2 243 848
En pourcentage
2014 71,87 21,06 7,07 100
2015 77,77 8,43 13,80 100
2016 79,31 9,52 11,17 100
Source : GIE, Tableau des clés 2014, 2015, 2016
La SOPRAF prend en charge entre 70 et 80 % des charges mutualisées, la SASU
Fontevraud Resort entre 7 et 11 %. Le CCO 9 % sur les derniers exercices.
Ainsi, lorsque, en 2014, en 2015 et en 2016, l’administrateur du GIE demande le
paiement, par la SOPRAF, des sommes ci-dessus mentionnées, entre 1,3 et 1,8 M€, il lui fait
payer plus que ce qu’elle aurait dû payer si le service que le GIE rend à ses adhérents était
correctement précisé et facturé. La situation est identique pour l’association CCO.
Il n’a été constaté aucune contestation des sommes versées au GIE dans les
procès-verbaux des conseils d’administration des différentes structures.
L’article 239 quater-I du code général des impôts indique : « Les groupements d'intérêt
économique constitués et fonctionnant dans les conditions prévues aux articles L. 251-1 à
L. 251-23 du code de commerce n'entrent pas dans le champ d'application du 1 de l’article 206
[donc de l’IS, ndlr], mais chacun de leurs membres est personnellement passible, pour la part
des bénéfices correspondant à ses droits dans le groupement, soit de l'impôt sur le revenu, soit
de l'impôt sur les sociétés s'il s'agit de personnes morales relevant de cet impôt. » Le Bulletin
officiel des impôts BIC-CHAMP-70-20-50-20120912 précise (paragraphe 30) : « Bien
évidemment, le groupement ne doit pas être un moyen de répartir librement des résultats en
fonction de la situation personnelle des membres. Le cas échéant, l’administration s’opposerait
à cette manœuvre en recourant, si besoin était, à la procédure de répression des abus de droit ».
En raison des agissements du GIE, un risque fiscal pèse donc sur chacun de ses trois
adhérents.
En réponse aux observations provisoires, le GIE a indiqué que depuis 2017 des
correctifs ont été apportés et « qu’un travail de refonte global des clés de répartition sera réalisé
pour l’exercice 2019 ». Entre 2016 et 2017, la redevance versée par Fontevraud Resort au GIE
a fortement augmenté, passant de 250 654 euros à 448 075 euros.
Recommandation n° 9 : Adopter une méthodologie de refacturation reflétant
fidèlement les charges imputables à chaque structure.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
28
2.3.2 Ressources hors clés
Outre les clés, un certain nombre de dépenses du GIE sont couvertes par une facturation
au réel auprès de chacun des trois membres. C’est le cas, en 2016 des dépenses de :
- « promotion touristique » : 22 863,92 € (SOPRAF)
- « promotion culturelle » : 48 093,44 € (CCO)
- « promotion des activités » : 11 124 € (SASU)
Ces dépenses, n’étant ni mutualisées, ni mutualisables, n’ont pas vocation à se trouver
dans les comptes du GIE, mais au contraire à être prises en charge directement par les structures
concernées.
C’est le cas également des dépenses d’intérim qui devraient être précisément et
directement affectées à chacune des structures.
2.4 Les soldes intermédiaires de gestion
Les soldes intermédiaires de gestion s’établissent ainsi :
Les soldes intermédiaires de gestion
SIG en € 2014 2015 2016
01 - produits de gestion 1 911 100 2 329 784 2 245 571
02 - charges de gestion -2 054 638 -2 368 030 -2 247 086
03 - produits financiers 565 462 188
04 - charges financières -45 -128 -547
05 -produits exceptionnels (CAF) 1 295 5 078 5 810
06 - charges exceptionnelles (CAF) -224 -1 867 -2 550
07 - transferts de charges 160 475 105 504 74 608
Total général 18 527 70 802 75 992
Source : CAC, comptes certifiés
Dans les comptes annuels, le niveau des créances et des dettes au 31 décembre est très
élevé, en particulier sur les exercices 2014 et 2015. Cela s’explique par la pratique de report sur
l’année suivante pour le versement, par les structures adhérentes, des quotes-parts de redevance.
La situation est atypique fin 2014, avec 2,8 M€ de créances et 3,1 M€ de dettes. Il faut
noter en particulier le niveau très élevé des « autres dettes » (2,2 M€) qui correspond à la
perception de droits d’entrée pour la SOPRAF, sans reversement à la SOPRAF avant le
31 décembre.
GIE FONTEVRAUD
29
La situation s’améliore progressivement, avec 440 000 € de créances et 586 000 € de
dettes au 31 décembre 2016.
Cependant, un GIE n’a vocation ni à assurer ni à bénéficier de la trésorerie de ses
adhérents à travers des versements ou correction tardifs de quote-part. Outre les risques
d’erreurs dans les nombreuses opérations de correction des versements, le principe même d’un
GIE est de mettre en commun des ressources, une année donnée, à solde nul en fin d’année, pas
de constituer une trésorerie pour ses adhérents.
Il conviendrait à l’avenir d’être vigilant sur ce point.
3 LES RESSOURCES HUMAINES
3.1 Les effectifs
Les effectifs portés par le GIE au 31 décembre sont de l’ordre de 40 personnes, pour
une base brute sécurité sociale de 1,1 M€. Cependant, au cours de l’année 2016, 53 personnes
ont été employées par le GIE. Cet écart s’explique par l’existence de contrats courts notamment
pendant l’été.
Répartition des effectifs
Mission Postes concernés
Entretenir et gérer les
bâtiments 7 agents techniques, 1 peintre
Entretenir et gérer les
espaces verts 4 jardiniers
Communiquer néant
Commercialiser 3 attachés commerciaux
Innover développer
1 chef de projet numérique, 1 graphiste, 1 directeur
innovation, 1 chargé de contenu et community manager,
1 graphiste
Accueillir 3 guides, 6 agents d’entretien, 6 agents d’accueil, 4 hôtes de
caisse, 2 responsables de service
Comptabiliser 2 comptables clients, 1 comptable fournisseur,
1 gestionnaire de caisse, 1 chargé de gestion
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
30
Mission Postes concernés
Administrer 1 secrétaire général, 1 responsable administratif et financier,
1 assistant
Gérer les ressources 1 chargé ressources humaines
Gérer les stocks 1 magasinier gestionnaire
Diriger 1 directeur général, 1 assistant du directeur
Source : Clés GIE 2016, dossier travail 7 mars 2017
Sur l’ensemble du personnel GIE en 2015, 44 personnes consacrent 75 % ou plus de
leur activité à une seule des sociétés membres du GIE, la SOPRAF.
Pour respecter le caractère auxiliaire du GIE, le personnel travaillant exclusivement
pour la SOPRAF devrait être salarié par cette société, le personnel travaillant exclusivement
pour Fontevraud Resort employé par Fontevraud Resort.
Certains contrats de travail prévoient un temps de travail annuel sans prévoir la
délivrance d’un planning mensuel ou hebdomadaire. Au contraire, d’autres contrats de travail
prévoient la fourniture au salarié d’un planning annuel dès le début de l’année, ce qui est trop
rigide en terme de gestion. Ces éléments pourraient être modifiés.
Enfin, la chambre rappelle que la mise à disposition d’un logement de fonction doit être
prévue dans le contrat du salarié bénéficiaire.
Recommandation n° 10 : Affecter le personnel travaillant exclusivement pour la
SOPRAF à la SOPRAF, celui travaillant pour Fontevraud Resort à Fontevraud Resort.
3.2 Les rémunérations et les primes
De 2014 à 2016, la somme des trois rémunérations les plus élevées est de l’ordre de
200 000 €, soit près 20 % de la base brute totale.
Concernant les primes versées, la chambre constate :
- l’existence d’une prime de Noël de l’ordre de 1 200 € versée à l’ensemble des salariés dont l’ancienneté est
supérieure à un an. Cette prime n’a pas de base juridique précise, l’engagement unilatéral du
18 décembre 2013 auquel les services du GIE se réfèrent ne fixant ni son montant ni ses modalités de
versement ;
- l’existence d’une « prime de dimanche » pour deux agents. Ce type de dispositif, dont la lourdeur en gestion
est certaine, pourrait être plus simplement intégré dans la rémunération principale des salariés concernés ;
GIE FONTEVRAUD
31
- le versement en 2016, de « compensation pour des heures supplémentaires effectuées en 2010-2014 ». Ce
versement est critiquable en terme de gestion : soit les heures ont été réalisées et la situation aurait dû être
régularisée beaucoup plus tôt ; soit les heures n’ont pas été réalisées et le versement est indu ;
- l’augmentation significative du volume total des primes versées en 2016 ;
- le versement de primes spécifiques à l’équipe commerciale dont le mécanisme pourrait être significativement
simplifié.
3.3 La situation de Mme Z…
Mme Z… a été engagée par la société publique régionale des Pays de la Loire, à compter
du 18 avril 2006 pour une durée indéterminée. Le 20 décembre 2013, par une convention de
transfert, elle est transférée au GIE avec effet au 1er janvier 2014, toujours en CDI comme
« conseiller en développement économique » puis « directeur développement et innovation »
avec les missions suivantes :
- piloter les dossiers relatifs aux missions « plateformes régionales d’innovation » (PRI) confiées par la
région ;
- piloter les projets numériques de l'abbaye, et plus globalement tous les projets relatifs au pôle développement
et innovation ;
- gérer les membres du pôle développement et innovation.
Le 20 décembre 2013, sa rémunération brute mensuelle est fixée à 3 161 euros. Moins
de trois mois après la signature de la convention de transfert, un avenant est signé, avec effet
rétroactif au 1er janvier 2014, pour revaloriser sa rémunération à 3 865,66 euros bruts mensuels.
En réponse aux observations provisoires, l’ancien représentant indique que cette augmentation
a eu lieu suite à un entretien d’évaluation sans apporter de preuve matérielle de ce fait6. Il
indique également que « la rémunération perçue après augmentation par (…) demeure
inférieure à celles perçues par ses collègues », ce qui est exact : Mme Z… était, en 2014 et
2015, la 9ème personne la mieux payée à Fontevraud.
Le 30 septembre 2015, cette salariée demande « un congé sans solde d’un an pour
convenance personnelle ». Une « convention de suspension du contrat de travail » est signée le
20 octobre 2015. Il est prévu qu’au terme de ce congé sans solde, la salariée a droit à sa
réintégration sur le même poste ou équivalent.
Or, le 8 juillet 2016, soit avant le terme de son congé sans solde, la salariée demande
une rupture conventionnelle de son contrat de travail.
En l’absence de tout motif économique justifiant le licenciement, la chambre s’étonne
de la volonté du GIE de licencier cette salariée pour motif personnel. En effet, dans la mesure
où elle ne travaillait pas dans la structure, elle ne pouvait pas commettre des actes ou avoir des
comportements justifiant que son employeur souhaite son départ pour motif personnel. La
volonté de départ ne pouvait provenir que de la salariée elle-même. En réponse aux observations
provisoires, l’ancien représentant comme la salariée ont confirmé que la volonté de départ
provenait de la salariée, qui s’était vu proposer une autre opportunité professionnelle.
6 Contrairement à ce que soutient l’ancien représentant permanent, cette pratique de la rétroactivité des
augmentations salariales n’était pas la règle et n’a concerné que trois agents dont le cas exposé.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
32
Dans ce contexte, une simple démission aurait pu être organisée, le recours à une
procédure de rupture conventionnelle étant contraire à l’intérêt social du GIE. Cette démission
aurait épargné au GIE le versement d’une indemnité de 7 710 €.
Par ailleurs, le calcul de l’indemnisation de la salariée dans le cadre de la rupture
conventionnelle se révèle erroné7. De plus, dans la mesure où son contrat de travail était
suspendu, les droits à congés payés de Mme Z… n’auraient pas dus être pris en compte dans le
calcul de l’indemnisation.
Concernant cette salariée, la chambre constate :
- que sa rémunération prévue le 20 décembre 2013 a été modifiée à la hausse trois mois
plus tard, avec effet rétroactif au 1er janvier 2014, pour atteindre 3 865,66 € brut mensuels, sans
qu’il ait pu être expliqué pourquoi l’administrateur n’avait pas déterminé la rémunération et le
poste occupé par cet agent au 1er janvier dès le 20 décembre ;
- que pendant le congé sans solde de la salariée, celle-ci n’a pas été remplacée. Par
conséquent, qu’il n’y avait pas, du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2016 de « directeur
développement et innovation »;
- que l’octroi d’un congé sans solde constitue un choix de mauvaise gestion pour le GIE,
qui se voyait au retour, dans l’obligation de rémunérer un cadre dont il n’avait en fait pas eu
l’utilité au cours des 12 derniers mois ;
- que les adhérents du groupement n’ont pas été informés de l’octroi de cet avantage
inhabituel ni d’ailleurs d’aucune arrivée ni départ de salarié au cours des exercices examinés ;
- que le choix de la procédure de rupture conventionnelle était également de mauvaise
gestion ; que le départ aurait pu prendre la forme d’une simple démission du salarié pour éviter
une charge indue aux adhérents du groupement ;
- que dans l’hypothèse même où le choix de la rupture conventionnelle était effectué,
tant l’indemnité compensatrice que les compensations congés payés et RTT auraient pu être
d’un niveau inférieur. Même si les ruptures conventionnelles sont assez fréquentes au sein du
groupement, la chambre relève que celle en cause présente un caractère spécifique et
inhabituel.
7 Dans la mesure où la salariée ne travaillait pas pour le GIE Fontevraud les trois derniers mois préalables
à sa rupture conventionnelle, sa rémunération était nulle. Le calcul de l’indemnité devait donc se baser, non sur
les trois derniers mois rémunérés (ce qui a été le cas, en prenant en compte des mois rémunérés de l’année
précédente), mais sur la moyenne brute des 12 derniers mois, à partir de la date de la rupture effective, soit
2 002 euros.
GIE FONTEVRAUD
33
4 LA SITUATION DE L’ANCIEN REPRÉSENTANT
PERMANENT
4.1 Situation statutaire et rémunération
M. David Martin est un administrateur territorial, ancien élève de l’Institut national des
études territoriales, qui a travaillé sur le site de Fontevraud de 2008 au 30 septembre 2016. À
partir du 1er janvier 2014, il est transféré au GIE pour exercer le mandat social d’administrateur
du GIE.
Cette convention de transfert est irrégulière car signée par une personne n’ayant pas
compétence à cette date pour ce faire8. Elle incite également à la confusion : elle mentionne un
« contrat à durée indéterminée » alors même que les caractéristiques principales d’un contrat
de travail (notamment lien de subordination, assujettissement à un régime de sécurité sociale
de salarié, distinction entre les fonctions d’administrateur et de salarié) n’étaient pas réunies.
Ce point a été confirmé lors de la phase contradictoire9.
Du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2016, M. David Martin cumule les fonctions de :
- secrétaire général du CCO (bénévole, sans contrat de travail ni mandat social) ;
- directeur général de la SASU Fontevraud Resort (mandat social, rompu par démission
du 2 août 2016 avec effet le 30 septembre 2016) ;
- directeur général délégué de la SOPRAF (mandat social de droit jusqu’au
17 décembre 2014, de fait du 18 décembre 2014 au 6 juin 2016, puis mandat social de droit
rompu par démission du 2 août 2016 avec effet le 30 septembre 2016) ;
- représentant permanent de la SOPRAF au sein du GIE. (habilité par le conseil
d’administration de la SOPRAF du 7 novembre 2013 et nommé par le contrat constitutif du
GIE du 20 novembre 2013).
En pratique, il dirigeait donc l’ensemble des structures de Fontevraud.
8 Le signataire n’était pas le représentant permanent désigné par la SOPRAF. Or une personne morale ne
peut désigner simultanément deux représentants permanents, en application de l’article L. 251-11 du code de
commerce applicable aux GIE. 9 Contrairement à ce qu’indique M. David Martin en réponse aux observations provisoires, le statut de
salarié n’était en rien une évidence et ne découle pas automatiquement de la réception d’un bulletin de salaire ou
du paiement de certaines charges. Par ailleurs, l’absence de contrat de travail a été reconnu par deux fois par écrit
par l’ancien représentant permanent de la SOPRAF.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
34
La rémunération qui lui a été versée, par le GIE, s’élève aux sommes suivantes :
Rémunération brute de l’ancien représentant permanent (en €)
Exercice Rémunération brute
2014 105 825
2015 105 600
2016 (jusqu’au 30 septembre 2016) 99 222
Source : DADS, 2014-2016, (hors frais de déplacement + véhicule de fonction Peugeot 5008 + téléphone mobile
de fonction + internet de fonction à domicile)
La rémunération des administrateurs d’un GIE est fixée par le contrat de groupement ou
plus commodément dans l’acte de désignation de l’administrateur. À défaut, le mandat est
gratuit par application de l’article 1986 du code civil qui prévoit : « le mandat est gratuit s’il
n’y a convention contraire ».
Or, la rémunération de M. David Martin n’est prévue ni dans le contrat constitutif du
groupement, ni dans l’acte de désignation de l’administrateur (procès-verbal du conseil
d’administration de la SOPRAF du 11 juillet 2013). Il n’existe aucune mention dans les
procès-verbaux d’assemblée générale du GIE de la volonté des adhérents de rémunérer ce
mandataire social.
En revanche, une lettre de M. Jacques Auxiette, datée du 16 décembre 2013, indique
que « en sa qualité de PDG de la SOPRAF, société administratrice du GIE Fontevraud », il fixe
la rémunération de M. David Martin selon les termes suivants :
- une rémunération brute annuelle ne pouvant excéder 105 000 € pour les années 2014,
2015, 2016 ;
- l’attribution d’un véhicule de fonction.
Cette décision est datée et signée, mais elle a été prise hors assemblée générale et n’a
pas donné lieu à une information auprès des conseils d’administration des adhérents du
groupement. En particulier, la SASU Fontevraud Resort, dont la présidence est alors détenue
par la SEM régionale n’a pas été correctement informée. De même les collectivités actionnaires
de la SOPRAF, qui prenait en charge 65 % de la rémunération concernée à travers la clé
dénommée « diriger », n’ont pas été convenablement informées.
Il s’agit d’un acte critiquable de l’administrateur personne morale, la SOPRAF, qui a
décidé seule d’un point qui aurait dû être arrêté conjointement par les membres du groupement.
Cette décision est également juridiquement irrégulière. Le 16 décembre 2013,
M. Jacques Auxiette n’avait aucun pouvoir pour engager une dépense du GIE10. Une société ne
pouvant jamais avoir deux représentants permanents (article L. 251-11 du code du commerce),
10 Le signataire n’était pas le représentant permanent désigné par la SOPRAF. Or une personne morale ne
peut désigner simultanément deux représentants permanents, en application de l’article L. 251-11 du code de
commerce applicable aux GIE.
GIE FONTEVRAUD
35
il n’était pas représentant permanent de la SOPRAF au sein du GIE car celle-ci avait déjà
désigné son représentant permanent en la personne de M. David Martin.
Par conséquent, cette rémunération a été versée pendant trois ans, sans base juridique
régulière.
En outre, il s’agit d’une décision à l’impact financier important (315 000 € brut au total,
hors véhicule de fonction) qui aurait dû faire l’objet d’une information adéquate des adhérents,
financeurs du groupement.
La mise à disposition d’un téléphone de fonction et le remboursement de l’abonnement
internet à domicile sont également irréguliers.
4.2 Le départ de l’ancien représentant permanent
Suite aux élections régionales de décembre 2015, le départ de M. David Martin a été
organisé par la nouvelle majorité courant 2016. Il a été effectif le 30 septembre 2016.
Un accord transactionnel a été signé le 18 juillet 2016 et validé le 2 août 2016 avec la
démission de M. David Martin de ses mandats sociaux de directeur général délégué de la
SOPRAF et de directeur général de la SASU. Cet accord prévoyait le versement d’une somme
de 70 000 € contre renonciation de M. David Martin à toute poursuite contre les structures de
Fontevraud.
S’agissant de la régularité des actes, M. Bruno Retailleau, quoique président de la
SOPRAF, et donc directement concerné, ne pouvait juridiquement engager le GIE car il n’était
pas lui-même désigné et autorisé par la SOPRAF ou par l’assemblée générale du GIE à cet
effet. Le virement bancaire correspondant de 70 000 € a également été signé le
17 septembre 2016 sans disposer d’une habilitation valide sur le compte concerné. En réponse
aux observations provisoires, M. Bruno Retailleau a fait valoir que M. David Martin ne pouvait
signer un accord transactionnel avec lui-même car il aurait été juge et partie, et qu’en qualité
de PDG de la SOPRAF il se considérait compétent pour signer cet accord, après consultation
d’un cabinet d’avocats. La chambre se doit d’écarter cette argumentation pour les raisons
énoncées plus haut.
Sur le contenu de l’acte, un accord transactionnel est un accord visant à résoudre un
contentieux sans passer devant le juge compétent. La chambre n’a cependant pas été en mesure
d’identifier quel était le contentieux préalable à cet accord transactionnel au vu des éléments
qui lui ont été communiqués.
Ainsi, l’accord indique que « M. David Martin a contesté les motifs ayant conduit
l’administrateur du GIE à le révoquer à brève échéance. En outre, il a indiqué que cette
révocation lui créait un préjudice sur le plan de la carrière professionnelle ainsi qu’un dommage
matériel important ».
Or, un mandataire social est par principe révocable ad nutum, c’est-à-dire sans délai,
sans indemnité et sans justification.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
36
De plus, « le préjudice en terme de carrière professionnelle » n’est pas identifiable.
D’une part, la qualité de mandataire implique par nature la possibilité d’une révocation, d’autre
part la personne concernée est haut fonctionnaire et avait vocation à retourner dans son
administration d’origine à l’issue de sa période de disponibilité. Le « dommage matériel
important » n’est pas non plus établi s’agissant d’un cadre supérieur de la fonction publique
territoriale en mesure de retrouver une affectation.
Dès lors, pour assurer le départ de ce mandataire social, les démarches suivantes auraient
pu être mises en œuvre :
- La SOPRAF pouvait simplement révoquer son représentant permanent : la révocation
du représentant permanent de la personne morale administrateur est libre et soumise aux mêmes
formalités de publicité que celles d'un administrateur en nom propre. Il appartient simplement
à la personne morale de notifier cette révocation à la société pour la bonne information de
celle-ci11. Elle l’avait désigné lors de son conseil d’administration du 11 juillet 2013. Elle aurait
pu le révoquer lors d’un autre conseil d’administration. Le représentant permanent aurait
également pu être révoqué par le président-directeur général de la SOPRAF.
- L’assemblée générale de la SOPRAF pouvait également révoquer son directeur général
délégué (par exemple le 25 juin 2016).
- Le conseil d’administration de la SEM pouvait révoquer le directeur général (mandat
social) de la SASU Fontevraud Resort.
Toutes ces procédures pouvaient être mises en place sans versement d’indemnités.
4.3 Le versement du solde de tout compte
Outre les 70 000 € de l’accord transactionnel, et alors même qu’il avait explicitement
reconnu, dans cet accord, « qu’il n’était pas lié par un contrat de travail » avec les quatre entités
juridiques de Fontevraud (les trois membres du groupement et le GIE), M. David Martin a
bénéficié, lors de son départ, des éléments suivants :
- une attestation Pôle emploi indiquant qu’il était employé du GIE ;
- un certificat de travail ;
- le versement de 20 021 € pour indemnité compensatrice de RTT et congés payés non
pris.
Un mandataire social n’avait aucune raison de disposer de ces documents et avantages
que seul un salarié, soumis au droit du travail, aurait pu obtenir régulièrement.
De plus, concernant le montant de l’indemnité compensatrice de RTT et congés payés
non pris, celui-ci a été calculé de manière très favorable, en considérant que M. David Martin
n’avait pris aucun jour de congés depuis le 1er juin 2015, soit un an et trois mois sans congés.
Il a été également considéré que son hypothétique « employeur » l’avait empêché de prendre
11 Rappr. C. civ., art. 2005 ; voir également Rép. min. no 12372, JO Sénat 13 février 1973.
GIE FONTEVRAUD
37
l’ensemble de ses RTT depuis le début de l’année 2016. Ces éléments ne sont nullement fondés
sur des preuves matérielles12.
Le versement a été effectué par virement en même temps que l’ensemble des payes de
septembre 2016. M. David Martin a reconnu avoir reçu ces documents ainsi que cette somme
en signant une attestation de solde de tout compte.
En réponse aux observations provisoires, M. Bruno Retailleau a indiqué que « le
versement de l’indemnité transactionnelle, selon les termes mêmes du protocole, intervenait
pour solde de tout compte et aucun versement complémentaire n’(avait) été porté à (sa)
connaissance avant l’intervention du contrôle exercé par la CRC Pays de la Loire. »
Par conséquent, M. David Martin a bénéficié de plus de 90 000 €, sans motif avéré,
payés par les trois structures adhérentes du GIE.
4.4 Les frais professionnels non justifiés
Le processus de remboursement des frais de déplacement et de restauration de
M. David Martin est insuffisamment maîtrisé sur l’ensemble de la période sous examen.
Au cours de l’instruction, il a été constaté que les frais de déplacement sont remboursés
sur justificatif (ticket ou facture). Cependant, la totalité de ces frais de déplacement ne sont
jamais motivés. On ignore dans quel but précis était effectué le déplacement et dans le cas de
frais de restauration qui sont les convives.
Cette pratique est systématique, sur l’ensemble des frais de déplacement de 2014 à 2016.
Il n’y a pas de contre-exemple d’une motivation effective jusqu’à fin septembre 2016. À partir
d’octobre 2016, les déjeuners sont justifiés, ce qui est une pratique de bonne gestion qui devrait
être systématique.
Par ailleurs, l’instruction a mis en évidence des remboursements de frais de déplacement
et de restauration qui peuvent apparaître contestables au vu de leurs caractéristiques soit en
raison de la présence d’enfants, soit en raison de l’achat de vin de qualité, soit en raison de leur
date (soirées ou week-end) et enfin en raison de leur montant (total de 2 208 €). La chambre
remarque que les tables retenues à Angers sont systématiquement situées à moins d’1,5 km du
domicile de l’ancien représentant permanent (annexe 1).
Au-delà de ces seuls exemples, la direction du GIE est invitée à examiner l’opportunité
de demander à son ancien représentant le remboursement de l’ensemble des sommes qui ne
paraitraient pas en l’état justifiées, comme cela a pu déjà être le cas pour d’autres dépenses
indues (voir infra).
12 En réponse aux observations provisoires, l’ancien représentant a indiqué avoir pris des jours de congés
et récupéré des jours fériés travaillés, ce qui n’invalide pas la position de la chambre.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
38
En réponse aux observations provisoires, M. David Martin soutient, sans l’étayer de
manière probante, le caractère professionnel des frais en cause. Il lui appartiendra de convaincre
le GIE si celui-ci entendait demander un remboursement.
4.5 Des achats sans utilité pour les structures de Fontevraud
Par lettre du 21 décembre 2016, la nouvelle direction de Fontevraud a signalé à
M. David Martin une série de dépenses, d’un montant total de 10 381,52 € comme « des achats
ne correspondant pas à des besoins de service ».
Les achats en cause portaient par exemple sur des fournitures de papeterie
(1 538,57 € TTC), un rameur (1 299 €), le nettoyage d’une voiture personnelle (1 900 € TTC),
un aspirateur (629 € TTC) et une carte d’abonnement SNCF d’un an (999 €).
L’ensemble de ces achats a été remboursé par M. David Martin, par chèque au GIE, daté
du 26 décembre 2016 et déposé le 5 janvier 2017 sur le compte du GIE. Certaines dépenses
ayant été faites avec des cartes bleues SOPRAF, un reversement du GIE à la SOPRAF de
6 511,98 € a donc été effectué13.
L’absence de contrôle interne et les déficiences dans les procédures d’engagement et de
paiement ont permis la réalisation de ces achats non destinés au service.
Recommandation n° 11 : Mettre en place des dispositifs de contrôle interne permettant
de bloquer tout achat non conforme à l’intérêt du GIE.
13 Plus d’un millier d’euros de livres ont été également été achetés au cours de l’été 2016. Ils sont
introuvables à Fontevraud en mai 2017 et ne correspondent pas à des besoins du service. Ils n’ont pas été
remboursés. En réponse aux observations provisoires, M. David Martin a indiqué que les livres correspondaient à
un don à un salarié qui a quitté la structure. Aucune pièce probante n’a été produite.
GIE FONTEVRAUD
39
5 LA GESTION ADMINISTRATIVE
5.1 L’administration générale du groupement
Au cours de l’instruction, la chambre a constaté :
- l’absence de tableaux de bord de performance ;
- l’absence de procès-verbaux de la réunion hebdomadaire de l’équipe de direction ;
- l’absence de commission des achats ;
- l’absence de circulation organisée des devis et factures ;
- l’absence de logiciel dédié permettant une sécurisation des données ressources
humaines ;
- des lacunes persistantes dans la construction budgétaire, ce qui a pour effet de faire
verser aux adhérents, au début de l’exercice suivant, des compléments de redevance d’un
montant parfois significatif ;
- une maîtrise insuffisante des circuits de signature.
L’instruction a également mis en évidence que trois documents (déclaration unique
d’embauche du 18 décembre 2013, attestation de travail du 30 septembre 2016 - attestation à
destination de Pôle emploi du 30 septembre 2016 au bénéfice de M. David Martin) ont été
signés par M. Sébastien Dave, secrétaire général du GIE à compter du 1er janvier 2014, dans un
cas alors qu’il n’avait pas qualité pour signer, dans deux autres alors que le nom du signataire
explicitement cité sur le document, M. Bruno Retailleau, était différent, sans délégation du
signataire allégué.
L’« attestation de travail » et l’« attestation d’employeur destinée à Pôle Emploi »
comportent des mentions dont le caractère inexact, au bénéfice potentiel de M. David Martin,
ne pouvait être ignoré de sa part ni de M. Sébastien Dave, signataire non habilité et par ailleurs
sous l’autorité hiérarchique du bénéficiaire.
Un cabinet de conseil a effectué en 2015 un audit de l’organisation du secrétariat général
et des services administratifs et financiers de l’abbaye. Son rapport final a été rendu le
7 décembre 2015.
Ce cabinet de conseil identifiait notamment les défaillances suivantes :
Principales déficiences identifiées en décembre 2015
- absence de référentiel client unique consolidant l’ensemble des bases existantes ;
- processus de modification des devis pas suffisamment cadré en l’absence de règles de gestion claires ;
- absence de règles de gestion claires sur le processus de réception des devis ;
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
40
Principales déficiences identifiées en décembre 2015
- manque de fluidité dans la transmission d’informations relatives au devis entre le service comptable et le service
commercial ;
- manque de fiabilité au niveau des relances et suivi des acomptes et du paiement des factures ;
- absence de séparation claire des tâches entre la comptabilité et la gestion des caisses et paiements ;
- suivi hebdomadaire manuel des impayés et des débiteurs et absence de règles de gestion claires ;
- absence de référentiel fournisseur ;
- pluralité des canaux de réception des factures fournisseurs (plus de 5 % des factures fournisseurs perdues) ;
- importante multiplicité des acteurs impliqués dans le processus de traitement d’une facture fournisseur ;
- pas d’automatisation de la comptabilisation des factures fournisseurs ;
- manque de fiabilité du logiciel de l’hôtel et problématiques rencontrées avec le logiciel de comptabilité ;
- absence de séparation claire des tâches entre la comptabilité et la gestion des caisses ;
- paiement par chèque des fournisseurs à 90 % ;
- écarts entre les chiffres d’affaire obtenus par la comptabilité, le service commercial et le secrétariat ;
- réalisation manuelle des statistiques nécessaires au contrôle de gestion ;
- aucun tableau de bord existant pour connaître de façon consolidée le chiffre d’affaire, la répartition analytique,
notamment sur l’hôtellerie ;
- multiplicité des acteurs impliqués dans la réalisation du budget par activité et par structure juridique, et complexité dans
son pilotage ;
- manque de visibilité et de fiabilité dans le suivi des investissements et des subventions ;
- manque de transparence concernant les modalités de refacturation entre les sociétés ;
- gestion aléatoire du recours à des intérimaires ;
- pluralité des acteurs impliqués dans la gestion de la paye ;
- qualité de la paye externalisée insuffisante (de nombreuses régularisations ont été passées l’année dernière) ;
- incohérence dans le modèle de gouvernance (les fonctions supports ne sont pas systématiquement intégrées dans le GIE
et inversement, le GIE intègre des activités SOPRAF)
- complexité et manque de fiabilité dans les reportings / budgets et leur gestion. »
Ce même rapport d’audit formulait les recommandations suivantes :
Principales recommandations formulées en décembre 2015
- revoir le processus de gestion des devis ;
- analyser et revoir le processus de gestion des acomptes afin de trouver un mode de fonctionnement efficient et partagé
de tous ;
- mettre en place une véritable stratégie de suivi et relance des clients ;
- revoir le processus d’application des conditions générales de vente ;
- développement d’une base de client unique intégrant les clients Sécutix (SOPRAF) et Winner (Fontevraud Resort) ;
- développer un outil de suivi des engagements (suivi des devis) ;
- revoir le processus de gestion des factures fournisseurs notamment la réception des factures, le contrôle et leur validation
afin de sécuriser et de réduire les délais de traitement ;
GIE FONTEVRAUD
41
Principales recommandations formulées en décembre 2015
- simplifier la gestion des factures fournisseurs en systématisant autant que possible le recours aux accords de marchés ;
- diminuer drastiquement les paiements par chèque en privilégiant les virements et prélèvements automatiques ;
- mettre en place une base de données fournisseurs ;
- bâtir une structure de contrôle interne performante pour sécuriser les processus des fonctions support en les dotant de
procédures et en formalisant les rôles et responsabilités des acteurs impliqués ;
- appliquer de façon rigoureuse le principe de séparation des tâches en commençant par la séparation entre comptabilité et
trésorerie ;
- piloter le contrôle interne de façon adaptée à la taille de l’organisation en définissant des responsables et en les dotant
des outils et indicateurs leur permettant de contrôler les processus prioritaires ;
- étudier la faisabilité de mettre en place un logiciel de gestion de trésorerie ;
- automatiser et simplifier le suivi des investissements, notamment par rapport aux subventions ;
- formaliser et rendre plus transparentes les règles régissant les relations entre les structure, notamment entre le GIE et les
autres sociétés ;
- mettre en adéquation la répartition des charges (et des équivalent temps plein) entre activités et structures juridiques ;
- définir et formaliser les modalités de calcul du chiffre d’affaires par activité (et par points de ventes) et par structure
juridique ;
- nettoyer la balance âgée en épurant les comptes clients et les comptes fournisseurs ;
- étudier la faisabilité de mettre en place un outil de reporting permettant de suivre de façon continue, fiable et intuitive
notamment au regard du budget ;
- mener une réflexion sur le remplacement de Winner ;
- passer d’une gestion administrative du personnel à une véritable gestion des ressources humaines construite sur une
stratégie adaptée (simplifier et sécuriser le processus de gestion de la paye, développer une stratégie RH) ;
- étudier les impacts afin d’anticiper autant que possible les besoins inhérents à la prise en charge par Fontevraud du
château de Saumur ;
- étudier la possibilité de renégocier avec la région Pays de la Loire la clause relative à l’engagement des dépenses à
hauteur de 60% pour obtention des subventions ;
- externaliser à un prestataire extérieur les opérations transactionnelles (en particulier paye et administration du
personnel) »
Plus de deux ans après leur formulation, ces recommandations n’ont, dans leur grande
majorité, pas perdu de leur pertinence ni été mises en œuvre.
En réponse aux observations provisoires, le GIE a indiqué que la mise en œuvre de ces
recommandations serait « au cœur de la feuille de route du GIE dans les prochains mois ».
Recommandation n° 12 : Mettre en œuvre les recommandations formulées dans
l’étude de 2015 visant à améliorer l’administration générale des structures de
Fontevraud.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
42
5.2 L’achat public
5.2.1 Rappel de la réglementation applicable
De 2012 à 2016 inclus, le CCO et la SOPRAF étaient des pouvoirs adjudicateurs au sens
de l’article 3 I 1° de l’ordonnance du 6 juin 2005. Le GIE est lui-même un pouvoir adjudicateur
puisque l’ordonnance du 6 juin 2005 qualifie de pouvoir adjudicateur les organismes de droit
privé dotés de la personnalité morale et constitués en vue de réaliser certaines activités en
commun par des pouvoirs adjudicateurs soumis à l’ordonnance de 2005.
Pour tout achat, les pouvoirs adjudicateurs doivent respecter les principes généraux de
la commande publique, que la procédure d’achat soit formalisée ou non :
- liberté d’accès à la commande publique ;
- égalité de traitement des candidats ;
- transparence de la procédure.
Jusqu’au 31 mars 2016, le GIE était donc soumis à des conditions de publicité et de mise
en concurrence précisées par le décret n° 2005-1742 modifié qui fixe notamment les seuils
applicables. Il en résulte, en application de l’article 10 du même décret, qu’au-dessous des seuils
de procédure formalisée, fixée à 207 000 € pour les prestations de service et à 5,1 M€ pour les
travaux, les marchés sont passés selon des modalités librement définies par le pouvoir
adjudicateur.
En dessous comme au-dessus de ces seuils, l’acheteur public doit respecter les principes
fondamentaux de la commande publique. Il lui est également demandé :
- de veiller à choisir une offre répondant de manière pertinente au besoin ;
- de respecter le principe de bonne utilisation des deniers publics ;
- et de ne pas contracter systématiquement avec un même prestataire lorsqu’il existe une
pluralité d’offres potentielles susceptibles de répondre au besoin.
Conformément à l’article 10 du décret n° 2005-1742, le GIE a établi une procédure
interne d’achat public par décision du 3 septembre 2013 pour assurer le respect de ces normes.
Celle-ci prévoit une mise en concurrence et une négociation attestée par la production d’une
fiche achat pour les achats d’un montant supérieur à 15 000 € ainsi que leur publication sur le
site internet de l’abbaye.
Depuis le 1er avril 2016, le GIE est soumis à l’ordonnance n° 2015-899 du
23 juillet 2015 relative aux marchés publics ainsi qu’au décret n° 2016-360 du 25 mars 2016
relatif aux marchés publics, autrement dit un régime unifié commun à l’ensemble des pouvoirs
adjudicateurs (article 10 de l’ordonnance), qui en particulier ne permet des marchés négociés
sans publicité, ni mise en concurrence préalable qu’en dessous du seuil de 25 000 € (8° du I de
l’article 30 du décret n° 2016-360).
GIE FONTEVRAUD
43
5.2.2 Évaluation de la politique d’achat du GIE
La chambre constate que le GIE ne dispose pas d’une stratégie formalisée d’achat.
De manière récurrente sur la période sous examen, il n’existe pas de définition écrite
préalable du besoin, ce qui interdit de s’assurer que l’offre y répond de manière pertinente.
Pour plusieurs achats du GIE et quel que soit le montant, la chambre constate l’absence
de procédure permettant d’assurer la liberté d’accès à la commande publique, l’égalité de
traitement des candidats et la transparence de la procédure.
À plusieurs reprises, la chambre a constaté que les preuves de publicité, de mise en
concurrence et d’analyse des offres n’étaient pas conservées correctement.
En réponse aux observations provisoires, le GIE s’est engagé à « optimiser la dépense »
et « définir et mettre en œuvre un référentiel de la commande publique ».
Recommandation n° 13 : Respecter les règles de la commande publique.
6 CONCLUSION
Selon le contrat constitutif du 20 novembre 2013, le GIE Fontevraud a pour objet de
« mutualiser des ressources humaines et matérielles avec pour objectif de rechercher la plus
grande rationalité d’allocation et de gestion des moyens dédiés au projet de Fontevraud. Le GIE
est un outil au service de ses membres fondateurs afin de leur permettre une plus grande
efficience dans la mise en œuvre du projet. Ainsi, le GIE n’intervient qu’à la demande et sous
le contrôle de ses membres qui ne lui délèguent donc en aucun cas leurs attributions et leurs
responsabilités. »
Sur le plan de la mutualisation des ressources humaines et matérielles, la chambre
constate que c’est la SOPRAF qui finance l’essentiel des postes du GIE. Lors de la création du
GIE début 2014, l’ensemble du personnel était issu de structures plus anciennes (SOPRAF et
CCO). La chambre n’a pas trouvé trace de suppressions de poste « doublons ». De même, il n’a
pas été possible d’identifier ni de chiffrer un gain financier lié à l’acquisition de biens et services
qui seraient partagés.
Sur le plan de l’administration, l’existence d’un GIE rend plus difficile pour les élus le
contrôle sur le fonctionnement ou la direction effective du site. Au contraire, le suivi et
l’évaluation du coût de chaque activité se voient complexifiés par l’existence du GIE.
Sur le plan juridique, l’existence du GIE dans son format actuel, constitue un risque
juridique pour l’ensemble des motifs indiqués ci-dessus.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
44
Sur le plan financier, alors que la SOPRAF et l’association CCO se voient verser des
subventions de collectivités territoriales, l’usage de ces subventions est effectué par une
structure juridique tierce, ce qui affaiblit la possibilité d’une maîtrise de la dépense et de l’usage
de la subvention. Le contrôle par les collectivités versantes est également problématique en
particulier dans la mesure où les clés sont construites de manière à faire porter par le CCO et la
SOPRAF une partie des charges de Fontevraud Resort.
Sur le plan comptable, l’existence d’un GIE impose des écritures de transfert de fonds
entre structures dont la sécurisation est insuffisante. Les reversements entre structures sont
nombreux et peu lisibles.
En résumé, après trois ans d’existence, le GIE n’a pas démontré son efficacité politique,
juridique, financière, économique. La chambre n’a pas constaté que le GIE a amélioré la
« rationalité d’allocation et de gestion des moyens dédiés au projet de Fontevraud ». Elle ne
constate pas non plus une plus « grande efficience dans la mise en œuvre du projet ».
En contradiction toujours avec le contrat constitutif, l’un de ses adhérents, la SOPRAF,
lui a délégué irrégulièrement ses attributions et ses responsabilités.
La chambre constate que ces objectifs tels que fixés le 20 novembre 2013 ne sont pas
atteints avec un GIE dans son format actuel. Elle rappelle que dans l’esprit même de ses
créateurs le GIE n’avait vocation qu’à assurer la transition vers une structure pérenne.
Elle recommande donc un arbitrage à brève échéance entre une modification
substantielle du périmètre du GIE et sa suppression stricte.
GIE FONTEVRAUD
45
ANNEXES
Annexe n° 1. Sélection de repas et nuitées d’hôtel non justifiés. ......................................................... 46
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
46
Annexe n° 1. Sélection de repas et nuitées d’hôtel non justifiés.
Struct. type Etablissement lieu date exercice montant TTC Descriptif
GIE repas Le dix-septième
Angers 17/05/2014 2015 120,80 € 2 personnes un samedi soir à Angers (39,5 € de vin), 1,3 km du domicile du représentant
GIE repas Punjab Angers 07/08/2014 2015 46,50 € 2 personnes, un jeudi soir à Angers, 950 m du domicile du représentant
GIE repas Joe Carpa Angers 19/09/2014 2015 95,30 € 2 personnes un vendredi soir à Angers (50 € de vin), 950 m du domicile du représentant
GIE repas Lieu Unique Nantes 27/08/2014 2015 113,60 € 6 couverts dont un menu enfant un mercredi à Nantes
GIE repas Casa Corneille Angers 03/10/2014 2015 103,00 € 2 personnes un vendredi soir à Angers (38 € de vin), 1,3 km du domicile du représentant
GIE repas Mandarin Oriental
Paris 08/05/2015 2016 563,00 € Pour 2 personnes le 08/05/2015, un vendredi soir à Paris, une bouteille de Pommard à 175 €
GIE repas Le Favre d'Anne
Angers 07/04/2016 2016 199,00 € 2 personnes (dont 60 euros de vin), un jeudi soir à Angers, 1 km du domicile du représentant
GIE voyage chine
Divers Chine Chine 01/06/2016 2016 649,10 € Frais sur place pour un voyage en Chine
GIE hôtel Crystal Hôtel 3*
Paris 06/07/2016 2016 156,60 € hôtel et petit déjeuner pour deux personnes, un mercredi soir à Paris
GIE hôtel Hôtel SOZO Nantes 08/07/2016 2016 161,50 € hôtel pour deux personnes, un jeudi soir à Nantes
Chambre régionale des comptes des Pays de la Loire
25 rue Paul Bellamy
BP 14119
44041 Nantes cedex 01
Adresse mél. [email protected]
Les publications de la chambre régionale des comptes
de Pays de la Loire
sont disponibles sur le site :
www.ccomptes.fr/Nos-activites/Chambres-regionales-des-comptes-CRC/Pays-de-la-Loire