Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

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Institut de Formation en Soins Infirmiers de Savoie

Présenté et soutenu par

Gérer ses émotions à travers l’intelligence

Repéré à http://papapositive.fr/25

Mémoire de fin d’études présenté en vue de la validation de l’UE 5.6 S6

« Analyse de la qualité et traitement des données s

Préparé sous la direction de

Promotion 2018

Présenté et soutenu par : Madame Georgia DELEAN

Gérer ses émotions à travers l’intelligence

émotionnelle

http://papapositive.fr/25-outils-methodes-gestion-emotions-enfants/

Mémoire de fin d’études présenté en vue de la validation de l’UE 5.6 S6

qualité et traitement des données scientifiques et

professionnelles »

Préparé sous la direction de : Madame Véronique GUEGA

Rendu le 7 mai

Madame Georgia DELEAN

Gérer ses émotions à travers l’intelligence

enfants/

Mémoire de fin d’études présenté en vue de la validation de l’UE 5.6 S6

cientifiques et

Madame Véronique GUEGAN

Rendu le 7 mai 2018

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NOTE AUX LECTEURS

Il s’agit d’un travail personnel et il ne peut faire l’objet d’une publication en tout ou partie sans l’accord de son auteur.

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« Rien ne nous est plus précieux que nos émotions. Ne les bradez pas et ne les étouffez pas non plus. Sans elles, nous ne sommes personne. »

Sophie BASSIGNAC

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I. Introduction .................................................................................................................... 1

1) Remerciements ........................................................................................................... 1

2) Présentation du thème et des motivations .................................................................. 1

a) Thème ..................................................................................................................... 1

b) Motivations ............................................................................................................. 2

3) Situation d’appel ......................................................................................................... 2

4) Présentation du questionnement initial ....................................................................... 4

5) Présentation du cadre contextuel et conceptuel .......................................................... 5

a) Définition de la relation soignant-soigné ................................................................ 5

b) Définition d’une émotion ........................................................................................ 6

c) Les émotions fondamentales ................................................................................... 6

d) Les mécanismes de défense .................................................................................... 7

II. Phase 1 : Enquête exploratoire ................................................................................... 8

1) Premier entretien libre ................................................................................................ 8

a) Démarche méthodologique ..................................................................................... 8

b) Synthèse de l’entretien ............................................................................................ 9

c) Analyse de l’entretien et synthèse conceptuelle ................................................... 10

2) Second entretien libre ............................................................................................... 12

a) Démarche méthodologique ................................................................................... 12

b) Synthèse de l’entretien .......................................................................................... 13

c) Analyse de l’entretien et synthèse conceptuelle ................................................... 14

3) Evolution de mon questionnement ........................................................................... 16

III. Phase 2 : Approfondissement de l’enquête............................................................... 17

1) Méthodologie de la phase d’approfondissement ...................................................... 17

2) Synthèse et analyse des entretiens ............................................................................ 18

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a) De la relation d’aide à la fatigue compassionnelle ............................................... 20

b) Le partage en équipe ............................................................................................. 21

c) L’expérience et le vécu ......................................................................................... 22

d) Prendre soin de soi ................................................................................................ 24

e) L’intelligence émotionnelle .................................................................................. 25

f) Le syndrome d’épuisement professionnel ............................................................ 27

g) La représentation institutionnelle .......................................................................... 29

3) Cheminement vers une question de recherche ......................................................... 30

4) Hypothèses ............................................................................................................... 31

IV. Conclusion ................................................................................................................ 32

Bibliographie ....................................................................................................................... 35

Annexes ............................................................................................................................... 40

1) Annexe n°1 : Guide d’entretien ................................................................................ 41

2) Annexe n°2 : Tableau comparatif des synthèses des entretiens ............................... 43

3) Annexe n°3 : Modèle de l’intelligence émotionnelle proposé par Daniel Goleman 53

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I. Introduction

1) Remerciements

La réalisation de ce travail de fin d’études est l’occasion pour moi de remercier toutes les

personnes m’ayant encouragée pendant ces trois années intenses de formation.

Tout d’abord, je tiens à remercier Madame Véronique Guegan, guidant de mémoire, pour

sa disponibilité, son écoute, ses précieux conseils et sa bienveillance à mon égard qui ont

contribués à l’élaboration de mon travail.

Je remercie les cinq infirmières qui m’ont accordé du temps lors des entretiens mais

également pour leur confiance, leur gentillesse, leurs conseils et leur disponibilité.

Je remercie plus particulièrement mon mari, mes enfants, mes beaux parents, ma maman,

ma sœur, mon frère et mes amis pour leurs encouragements et leur patience qu’ils m’ont

apportés lors de ces années d’étude. L’aboutissement de mon projet professionnel n’aurait

pas été réalisable sans leur soutien.

Je remercie mes amis de la promotion 2018 pour leur soutien, leur aide, leurs rires et leur

amitié.

Je remercie également toutes les personnes qui ont pris le temps de relire mon travail.

Et pour finir, je remercie l’ensemble de l’Institut de Formation de Savoie, et plus

particulièrement Monsieur François Coudou, pour les valeurs et les savoirs professionnels

inculqués au cours de ces trois années.

2) Présentation du thème et des motivations

a) Thème

Le travail de fin d’étude marque l’aboutissement de trois années d’étude en soins

infirmiers. Il nous permet d’appréhender le travail de recherche afin de nous pousser à la

réflexion et au questionnement permanent sur nos pratiques professionnelles. Lors de nos

trois années d’études, nous apprenons à avoir un regard critique sur nos pratiques. En effet,

la formation est alternée par des temps de théorie en Institut de Formation en Soins

Infirmiers et par des temps de pratique avec les différents stages. A chaque retour de stage,

nous rencontrons individuellement notre référent pédagogique afin de présenter des

analyses de situation. Ces analyses reprennent des situations pour lesquelles nous avons eu

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des interrogations, des difficultés ou des appréhensions sur nos pratiques professionnelles.

Le travail de fin d’étude permet de valoriser et d’affiner une expérience vécue en stage. De

ce fait, nous avons la liberté de pouvoir choisir le sujet que nous souhaitons développer

dans ce travail. Par conséquent, mon travail reprend une situation personnellement vécue

en stage pour laquelle subsistaient des interrogations. Malgré son analyse en retour de

stage, je ressentais encore le besoin d’explorer cette situation complexe pour moi. Le choix

de mon sujet s’est alors orienté vers la gestion et le partage des émotions du soignant lors

des soins.

b) Motivations

Chaque individu est animé et ressent des émotions dès la naissance. Elles peuvent être

agréables ou pénibles à vivre mais elles permettent de s’adapter aux situations. J’ai décidé

d’approfondir ce thème des émotions car il m’a beaucoup questionné lors de mes stages

dès la première année de formation. Dans le milieu soignant, nous sommes constamment

confrontés à nos affects et à ceux des patients. La dimension relationnelle représente, pour

ma part, une place primordiale dans le soin. Dans mes représentations, le soignant ne doit

pas exposer ses émotions au patient car « il doit les laisser aux vestiaires ». Aussi, quand je

parle de mes études à mon entourage, on m’a souvent dit qu’il fallait « que je me blinde »,

« que je me fabrique une carapace » pour ne pas être personnellement impactée. Les

émotions sont indissociables de la communication non verbale. Ainsi, lorsque nous

sommes émus, notre corps s’agite, les traits de notre visage changent. Par conséquent, que

ce soit dans le milieu personnel ou professionnel, nous sommes tous confrontés à

l’expression ou la répression de nos émotions. J’ai choisi d’exploiter ce thème car je sais

d’ores et déjà en tant qu’étudiante que je serai sans cesse animée par mes émotions dans

l’exercice de mon futur métier d’infirmière et je souhaite pouvoir les utiliser à bon escient.

Ce travail de fin d’étude va me permettre de faire évoluer mes représentations et de

transposer ces nouveaux savoirs dans mes futures pratiques professionnelles infirmières

afin de ne pas me sentir en difficulté lors de certaines situations.

3) Situation d’appel

Lors de mon stage de semestre 2 en service de chirurgie gynécologique, pelvienne et

mammaire, j’ai vécu une situation au cours de laquelle les émotions m’ont submergée. En

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effet, cette situation avait fait l’objet d’une analyse de situation de retour de stage. Je vais

vous la résumer : Je suis en stage dans le service depuis 3 semaines et je prends en charge

Madame B, 56 ans, qui est à J2 de sa mastectomie gauche suite à la découverte d’une

tumeur de 12 millimètres. Je dois lui refaire son pansement pour la première fois et lui

enlever les drains de redon. J’appréhende la réalisation de ce soin car c’est la première fois

que je vais le faire toute seule. Je demande à Madame B si cela ne lui pose pas de problème

que ce soit moi, étudiante, qui lui fasse le soin. Elle me répond qu’elle est ravie que je

puisse poursuivre son accompagnement dans le déroulement de ses soins car je m’occupe

d’elle depuis son arrivée deux jours plus tôt. Nous avons beaucoup discuté ensemble. Je

suis touchée par sa confiance envers moi. Je lui explique le déroulement du soin. Je lui

demande si elle a des questions et elle me répond que non. Je m’installe et je remarque que

Madame B a les yeux remplis de larmes. Je recule mon chariot et m’assoie sur le bord de

son lit. Je lui demande ce qu’il ne va pas. Elle me répond qu’elle a peur de regarder la plaie

car elle n’a plus son sein et que moralement c’est très difficile pour sa féminité. De plus,

elle a peur des résultats des tissus prélevés lors de l’intervention et de devoir subir de la

chimiothérapie et de perdre ses cheveux. J’essaye de la rassurer du mieux possible avec le

peu d’expérience que j’ai en lui disant qu’il est légitime d’avoir peur et qu’elle n’est pas

obligée de regarder la réfection du pansement. Je lui dis qu’il est humain de pleurer et que

si elle en ressent le besoin, il ne faut pas qu’elle se retienne et qu’en aucun cas je ne la

jugerai. Je lui propose également la psychologue du service. Nous restons un long moment

à nous regarder sans parler en nous tenant la main ce qui apaise Madame B et

indirectement moi également. Je me sens submergée par des émotions et des larmes me

coulent le long des joues. Je me sens ridicule, moi soignante qui pleure alors que je n’ai

pas vécu une telle intervention. Je n’ai pas d’autres choix de lui expliquer que je suis émue

par sa situation qui me ramène quelques années en arrière car ma maman a vécu la même

chose. Madame B a le même âge que ma maman et moi le même âge que sa fille. Cette

fois-ci, ce n’est plus moi qui rassure Madame B mais Madame B qui me console. Nous

reprenons toutes les deux nos esprits et je lui demande si elle est prête pour débuter le soin

et elle me répond oui. Le soin se déroule sereinement mais je ressens néanmoins le besoin

de prendre tout le temps nécessaire même si je vais prendre du retard sur mes autres soins.

Je termine mon soin en remerciant Madame B pour sa confiance et en m’excusant auprès

d’elle pour avoir pleuré à ses côtés. Elle me remercie également et me répond que ce sont

des choses qui arrivent et qu’on ne peut pas tout contrôler. Ce soin reste toujours dans un

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coin de ma tête car je n’explique pas ce qu’il s’est passé. De plus, je n’ai pas osé en parler

avec ma tutrice ou l’équipe.

Cette situation met en évidence la complexité de l’expression des émotions. Lors de ce

soin, je me suis rendue compte que mes émotions n’étaient pas celles habituellement

présentes lors d’un soin. J’ai ressenti beaucoup de compassion pour cette patiente. Mais

avec du recul, je n’arrive pas à savoir si j’ai été submergée par mes émotions à cause :

- Du fait que Madame B ait subie une mastectomie et qu’elle ait peur de perdre sa

féminité : cette intervention à 99% féminine peut m’arriver un jour et je m’identifie

et je me mets à la place de Madame B.

- Du fait que je transfère la situation actuelle de Madame B à celle que j’ai déjà

vécue 8 ans auparavant avec ma propre mère.

4) Présentation du questionnement initial

Cette situation m’a donc poussée à me poser les questions suivantes :

- Comment gérer ses émotions dans de telles situations pour ne pas faire

d’identification projective, pour ne pas faire transparaitre nos émotions ?

- Ai-je franchi la limite de la juste distance ? Suis-je tombée dans la l’intimité de

Madame B ?

- Madame B a eu une attitude rassurante et positive avec moi, comment se serait

déroulé le soin si Madame B avait jugé déplacé mon comportement ?

- Ai-je projeté mon appréhension sur Madame B ?

- Pourquoi ne suis-je pas parvenue à prendre sur moi c'est-à-dire à contenir mes

émotions ?

- Faut-il passer la main à une collègue si nous ne nous sentons pas capable de faire le

soin ou si nous pensons que nous pouvons porter préjudice au patient ?

- Est ce que mon manque d’expérience est responsable de la difficulté à gérer mes

émotions lors d’un soin ? Est ce que les professionnels expérimentés vivent ce

genre de situation ?

- Ai-je le droit de faire part de mes émotions, de mes ressentis, de prendre plus de

temps avec cette patiente au point de ne plus adopter une posture professionnelle ?

En effet, la posture professionnelle regroupe les savoirs professionnels, les

pratiques professionnelles et les attitudes relationnelles. C’est l'acquisition de

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nombreuses valeurs, associant savoir, savoir être et savoir faire. Par conséquent, je

me demande si le partage de mes émotions peut avoir des répercussions sur mon

savoir-être ?

- Comment se détacher de la situation tout en restant dans l’empathie ?

- En quoi les émotions ressenties peuvent influencer la relation soignant-soigné ?

- Aussi, l’article R4312-25 du Code de Santé Publique dit qu’il faut dispenser les

soins avec la même équité quels que soient les sentiments éprouvés. Devant cet

article, je me demande si je n’ai pas outrepassé le cadre professionnel ?

5) Présentation du cadre contextuel et conceptuel

Pour légitimer mon sujet et mieux le comprendre, il est important d’expliciter les concepts

des émotions et de la relation soignant-soigné. En effet, la notion de relation soignant-

soigné prend tout son sens dans ma situation d’appel et dans toute situation relative à un

soin. D’après la Haute Autorité de Santé, la communication est un élément clé dans la

construction de la relation soignant-soigné. De plus, les émotions peuvent être

communiquées verbalement ou comprises par la communication non verbale. Il est, pour

ma part, primordial pour un soignant d’envisager la relation soignant-soigné à l’aide d’une

communication adaptée afin de créer un climat de confiance avec le patient. Au niveau

législatif, l’arrêté du 31 juillet 2009 relatif au référentiel des compétences infirmier indique

au travers de la compétence 6 que l’infirmier diplômé d’Etat doit savoir communiquer et

conduire une relation dans un contexte de soins. Aussi, il précise que la communication et

la relation à l’autre dans un contexte de soins font parties du rôle propre de l’infirmier. Il

me parait nécessaire de rappeler que cette relation trouve ressource dans l’application du

rôle propre de l’infirmière comme l’énonce l’article L4311-1 du code de la Santé

Publique : « Est considérée comme exerçant la profession d’infirmière toute personne qui

donne habituellement des soins infirmiers sur prescription ou en application du rôle

propre qui lui est dévolu. ».(Code de la Santé Publique, 2015).

a) Définition de la relation soignant-soigné

D’après Christine Paillard, la relation soignant-soigné est « une activité d’échange

interpersonnel et interdépendant entre une personne soignée et un soignant, dans le cadre

d’une communication verbale, non verbale (posture, regard, geste, disponibilité). »

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(Paillard, 2015, p.328). Pour Alexandre Manoukian et Anne Massebeuf, c’est « la

rencontre entre deux personnes, c'est-à-dire deux caractères, deux psychologies

particulières et deux histoires. » (Manoukian et Massebeuf, 2014, p.9). Cette relation est

indispensable dans la prise en soin d’un patient. Nul ne peut-être pris en charge sans cette

relation qui est bénéfique tant pour le soignant que pour le soigné. Aussi l’article R4312-2

du code de la Santé Publique précise que : « l’infirmier ou l’infirmière exerce sa profession

dans le respect de la vie et de la personne humaine» (Code de la Santé Publique, 2015).

Cette notion de respect est essentiel et est un élément de base à la relation soignant-soigné.

b) Définition d’une émotion

Monique Formarier et Ljiljana Jovic utilisent dans leur ouvrage la définition du

dictionnaire Le Robert pour définir une émotion comme étant une « réaction affective

brusque et momentanée, agréable ou pénible, souvent accompagnée de manifestations

physiques ou de troubles physiologiques.» (Formarier et Jovic, 2012, p.165).

Cette définition met en évidence le caractère soudain de l’émotion empêchant l’individu de

la prévoir. Une émotion est un vécu, un éprouvé de l’ordre de l’intime, mais génère chez

la personne qui l’expérimente des réactions plus ou moins visibles. D’ailleurs, Daniel

Goleman précise que « le terme émotion se compose du verbe latin « motere », voulant

dire mouvoir, et du préfixe « é », qui indique un mouvement vers l’extérieur » (Goleman,

1995, p.21). Cette étymologie suggère bien une tendance à agir.

c) Les émotions fondamentales

Charles Darwin a avancé l’existence d’un nombre limité d’émotions, dites

« fondamentales » ou « primaires ».

Quels que soient la culture, le niveau de développement, la forme de la société,

chaque humain reconnaît sur un autre humain l’expression de ces quatre

émotions : la colère, la joie, la peur, la tristesse, auxquelles on ajoute parfois la

surprise et le dégoût. Chacune a ses propres composantes. Chaque émotion se

manifeste par une expression motrice spécifique, reconnaissable au-delà des

mots, partout dans le monde. (Prahin, 1999, p.14)

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Darwin a été le premier à affirmer que les hommes et même les animaux possédaient des

expressions comprises par tous pour exprimer certaines émotions de base. En effet, chaque

émotion est liée à des sensations physiques dans le corps.

- La peur est l’émotion qui nous prévient face à de possibles dangers, qui nous aide à

anticiper et à nous protéger d’une possible menace. Au niveau physique, la peur s’exprime

par : des maux d’estomac, une tension corporelle, une tachycardie, des sueurs froides et

une pression dans la poitrine.

- La colère est l’émotion qui nous aide à passer à l’action et à défendre nos droits

quand nous sentons qu’une injustice a été commise. On retrouve, parmi les symptômes

physiques les plus communs : une tension corporelle, une tachypnée, une tension dans la

mandibule, une hyperthermie, les sourcils froncés, les mâchoires et les poings serrés et par

un rougissement de la face.

- La joie nous aide à établir des liens pour pouvoir socialiser et partager notre

bonheur avec les autres. La joie a des symptômes physiques qui sont facilement

reconnaissables : grand sourire, rire, ouverture corporelle.

- La tristesse est une émotion qui nous aide à affronter les pertes et les deuils. Elle

nous fait réfléchir sur le passé et sur la façon dont les choses se sont passées. Au niveau

physique, elle s’exprime par des larmes, des sanglots, une pression dans la poitrine et une

respiration saccadée.

d) Les mécanismes de défense

Pour faire face à ses émotions ou à ses ressentis, une personne peut être amenée à mettre en

place des mécanismes de défense. Selon Freud, les mécanismes de défense sont des

opérations mentales involontaires et inconscientes qui contribuent à atténuer les tensions

internes et externes. Les mécanismes de défense ont une fonction adaptative afin de se

protéger d’un évènement générateur de souffrance ou d’angoisse. Selon Fréderic Stiefel,

« la rencontre avec le patient suscite des émotions chez le soignant. Parfois, ces émotions

sont agréables (…). Les émotions dites négatives provoquent en revanche de l’angoisse et

sont souvent réprimées. » (Stiefel, 2008, p.138). Ces mécanismes de défense sont donc des

moyens de protection. Au niveau soignant, ces mécanismes de défense peuvent interférer

la relation soignant-soigné car ils influencent inconsciemment le comportement du

soignant sur le patient. En effet, un soignant qui banalise ses émotions ou qui les évite peut

s’éloigner au fur et à mesure de la relation humaine qui est essentielle au métier

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d’infirmier. Il existe plusieurs mécanismes de défense que la psychologue Martine

Ruszniewski, a décrits de la façon suivante :

Le mensonge : Il permet de figer le temps en entravant toute possibilité de

dialogue. C’est le plus dommageable pour le patient.

La fuite en avant : Angoisse imminente du soignant. Le soignant se « libère » d’un

fardeau.

La rationalisation : C’est tenir un discours incompréhensible par le patient en

instaurant un dialogue sans échange.

L’évitement : La relation est privée de tout affect que le soignant estime ne pas

être de son ressort : rupture de communication.

L’esquive : Le soignant se sent démuni face à la souffrance du patient. Il reste en

décalage et change de sujet.

La banalisation : Le soignant se focalise sur la souffrance physique et non sur la

souffrance morale.

La dérision : Le soignant adopte une communication minimale. C’est un

comportement de fuite.

L’identification projective : C’est le fait d’attribuer à l’autre des traits de sa

personnalité, en lui prêtant ses sentiments, ses pensées ou émotions. Le soignant

pense savoir ce qui est bon pour le patient. (Ruszniewski, 2018)

II. Phase 1 : Enquête exploratoire

Au cours de la phase exploratoire, j’ai réalisé deux entretiens libres que j’ai enrichis avec

des recherches documentaires qui m’ont permis d’éclaircir mes questionnements de départ

en confrontant la théorie et la réalité du terrain.

1) Premier entretien libre

a) Démarche méthodologique

Afin de compléter mes recherches, j’ai choisi d’interroger lors d’un entretien libre une

infirmière diplômée depuis 10 ans. Je l’appellerai l’infirmière N°1 dans le compte rendu.

J’ai décidé avec l’autorisation de l’infirmière N°1 d’enregistrer notre entretien afin de ne

pas perdre d’informations lors de la retranscription et pour être totalement attentive à ce

qu’elle me racontait. Cet entretien s’est déroulé à mon domicile lors d’un jour de repos. Il a

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duré 20 minutes. L’infirmière N°1 a travaillé en réanimation néonatalogie, puis en

chirurgie gynécologique. J’ai voulu avoir son point de vue sur la gestion des émotions pour

savoir si elle pouvait avoir vécu des situations identiques dans un service similaire où j’ai

vécu ma situation et pour comprendre quelles solutions pouvaient être apportées aux

soignants. Je tiens à la remercier de m’avoir consacré du temps.

Pour commencer notre entretien, je lui ai demandé de m’expliquer comment elle gérait ses

émotions lors des soins, si elle avait déjà vécu des situations similaires à la mienne et, si

c’était le cas, ce qu’elle faisait pour gérer.

b) Synthèse de l’entretien

L’infirmière N°1 m’a expliqué que lorsqu’elle travaillait en réanimation néonatalogie elle

n’avait pas encore d’enfant et selon ses dires « heureusement pour elle ». Avec du recul,

elle reconnait qu’elle n’aurait pas pu gérer ses émotions. En effet, son fils a été en

réanimation néonatologie à la naissance. Elle dit : « je n’aurai jamais pu prendre en soin

des enfants après cela. Quand tu passes de l’autre côté et que tu sais ce que c’est, tu te

projettes sur chaque enfant et sur ses parents car tu sais ce qu’ils vivent car tu as vécu la

même chose. J’aurai pleuré avec chaque enfant. Il faut connaitre ses propres limites quand

tu fais ce métier ». Aussi, l’infirmière N°1, qui travaille maintenant en chirurgie

gynécologique, est actuellement enceinte de son deuxième enfant. Le début de grossesse

dans le service a été difficile à gérer émotionnellement. En effet, elle me raconte que :

« quand les patientes se présentent aux urgences gynécologiques pour des raisons de

fausses couches, tu t’identifies forcement à elles et tu te dis que ça pourrait être toi. Tu

relativises en te disant que tu es au travail, aux urgences gynécologiques, et que tu ne vois

que les pires choses. Il faut se détacher et prendre du recul même si l’idée te reste dans

l’esprit ». Elle me raconte que parfois quand elle est face à des patientes condamnées par le

cancer, il lui arrive de se trouver en difficulté pour la prise en soins. Dans ce cas, elle

décide de passer la main à ses collègues et si ce n’est pas possible, elle en discute

longuement avant avec l’équipe ou le médecin pour se sentir accompagnée. Elle m’a dit :

« malgré le fait qu’il ne faut pas mélanger le côté professionnel et personnel, il est humain

parfois de faire la confusion entre les deux. Nous ne pouvons pas rester insensibles à

certaines situations. Cependant, le soin peut être différent quand les émotions prennent le

dessus. Les émotions peuvent influencer dans le bon sens comme dans le mauvais sens : si

tu pleures, cela peut être mal perçu par le patient et si tu es trop distante pour te protéger

alors tu n’es plus dans l’empathie. Il faut trouver le juste milieu et la juste distance ».

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c) Analyse de l’entretien et synthèse conceptuelle

Après vous avoir présenté mon questionnement de départ accompagné de mes recherches

et du témoignage de l’infirmière N°1, j’ai pris conscience que ce n’était pas la mastectomie

en tant que telle qui m’avait mise mal à l’aise mais mon identification projective vis-à-vis

de Madame B. Je n’ai pas réussi à gérer mes émotions car j’ai identifié Madame B à ma

mère. Est ce que pour autant mon soin a mal été réalisé ? Aurai-je du passer la main ? En

discuter avec l’équipe ?

Grâce au témoignage de l’infirmière N°1, je constate que les émotions sont présentes dans

tous les soins mais avec une amplitude différente selon les cas. Peu importe les années

d’expérience, nous ne sommes pas insensibles à certaines situations et c’est ce qui fait

notre humanité et notre force. Nous ne sommes pas des « robots », nous ne pouvons pas

être de simples exécutants dépourvus d’émotions. Il faut tout simplement bien se connaitre,

connaitre ses limites, ses failles, prendre sur soi c'est-à-dire s’endurcir et accepter de passer

la main si on ne se sent pas en mesure de réaliser un soin. Cependant, il faut être vigilant

vis-à-vis du patient et rester dans sa position de professionnel pour ne pas interférer la

relation de confiance.

J’ai retenu cette citation de Walter HESBEEN qui m’inspire beaucoup : « on ne peut

prendre soin d’un homme ou d’une femme malade en tentant d’accueillir sa singularité

sans se sentir concerné par sa situation, sans se laisser toucher par ce qui arrive à cet

humain.» (Hesbeen, 2009, p.143).

Je suis désormais en mesure de reconnaitre que mon questionnement va plus loin que la

gestion des émotions : les émotions peuvent elles nuire à la qualité de la relation soignant

soigné ?

Après avoir échangé autour de mon thème avec mes collègues de promotion lors de la

première guidance collective, je me suis rendue compte que mon questionnement avait

évolué positivement. En effet, à la suite de mon premier entretien je me demandais si les

émotions pouvaient nuire à la qualité de la relation soignant/soigné ? Ce questionnement

était tourné sur le versant négatif des émotions. C’est alors qu’avec du recul et des lectures

sur ce sujet, je me suis rendue compte que mes représentations initiales sur la gestion des

émotions des soignants n’étaient pas généralisées à l’ensemble des soignants. J’ai réalisé

que je devais travailler sur mes représentations infirmières car pour moi, l’infirmière ne

devait pas exprimer ses émotions devant le patient, pas pour se protéger soi mais par souci

de bien faire pour le patient. Dans mes représentations, le soignant devait être à l’écoute

des émotions du patient mais il devait contenir les siennes. Au cours de la guidance, mes

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collègues ont été interpellés par mon témoignage. Pour eux, bien au contraire, l’expression

des émotions du soignant fait partie de la prise en charge du patient. Nous devons être

authentiques, réels pour pouvoir entrer en communication avec le patient. Les émotions

font partie de la communication non verbale, nous ne pouvons pas les cacher. Si ces

émotions ne sont ni exprimées, ni prises en compte, elles peuvent nous amener à des

sentiments négatifs, à d’importantes remises en question sur notre pratique et sur la qualité

de notre travail. « Certaines de nos émotions, positives, nous portent vers la sérénité et

l’ouverture aux autres, alors que d’autres, nous amènent à réagir négativement, nous font

souffrir, nous endurcissent et nous ferment » (Phaneuf, 2013, p.30). Pour établir une

relation de confiance soignant-soigné, les émotions sont importantes mais la

communication de celles-ci l’est tout autant. Selon moi, pouvoir s’exprimer sur ce que

nous ressentons est primordial pour établir une relation de confiance entre le patient et le

soignant. Cependant, il faut pouvoir s’exprimer en maîtrisant parfaitement ses émotions

pour ne pas porter préjudice à cette relation de confiance. La communication des émotions

permet d’avoir le même rôle dans la relation et d’être partenaires de soins. Il faut être sur le

même pied d’égalité et ne pas établir une relation asymétrique « soignant qui donne le

savoir et patient qui reçoit ».

Par conséquent, si je reprends ma situation d’appel avec Madame B avec cette nouvelle

vision sur mes représentations, j’arrive à comprendre pourquoi je me suis autant posée de

questions face à cette situation. Tout d’abord, vis-à-vis de l’équipe et de ma tutrice, je

pense que je n’ai pas osé en parler avec elles car j’avais un sentiment de honte, de

culpabilité, de peur d’avoir transgressé les règles. Dans mon statut d’étudiante en première

année, j’avais peur d’être jugée et que cela puisse porter préjudice au bon déroulement de

mon stage. ……………………………………………………………..

Dans notre profession, l’aspect normatif des émotions est objectivé à travers un

critère présent dans les feuilles d’évaluation de stage des étudiants en soins

infirmiers. Ce critère veut mesurer une capacité relationnelle, il est ainsi libellé :

« contrôle ses réactions affectives ». Ainsi, l’étudiant prend un risque à exprimer

une émotion avec authenticité qui peut amener à une sanction, telle que : « vous

contrôlez mal vos réactions affectives ! ». C’est un peu comme si l’étudiant pour

sa survie en formation devait de contrôler l’expression de ses émotions en

fonction d’un permis ou d’un interdit qu’il va découvrir à travers des remarques

Page 17: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

12

telles que : « vous êtes trop sensible », « il faut vous blinder » (Richard, 2008,

p.25).

Or, je prends aujourd’hui conscience avec beaucoup de recul de l’aide que cela aurait pu

m’apporter si j’avais partagé mes ressentis avec l’équipe. Je suis certaine qu’elle m’aurait

soutenue et confortée dans ma position. De plus, je constate que mon attitude soignante n’a

pas forcement été déplacée par rapport à Madame B car je n’ai pas été en opposition avec

mes valeurs infirmières et je suis restée authentique, vraie, empathique, juste et naturelle.

« Accepter de s’engager pleinement dans la relation, c’est accepter d’être touché

émotionnellement par l’autre, trouver un équilibre entre le trop investi et le trop distant »

(Richard, 2008, p.25). Je pensais avoir dépassé la juste distance et être entrée dans

l’intimité de Madame B. Pascal Prayez définit la juste distance comme « la capacité à être

au contact d’autrui malgré la différence des places » (Prayez, 2009, p.75). Les limites de

la juste distance sont mesurables physiquement avec le patient (distances publique, sociale,

personnelle et intime) mais difficilement définissables dans la tournure des propos. Ces

limites de la juste distance sont propres à chaque soignant et chaque patient. Tout dépend

du cadre de référence auquel nous nous rattachons. « On peut être alors tenté de défendre

l’idée d’une juste proximité contre celle admise d’une juste distance» (Bresch, 2007,

p.32).

Après avoir fait ces nouvelles recherches et suite à l’évolution des mes représentations, je

me pose alors de nouvelles questions :

- Les émotions peuvent-elles être positives pour le soin ? Que peuvent-elles apporter

à la relation (freins et/ou aides)? Peuvent-elles permettre au patient de se sentir

considéré autrement ?

- Quelles sont les représentations des soignants, des patients et de l’institution sur

l’expression des émotions des soignants?

- Quelle est la légitimité du soignant à exprimer ses émotions ?

2) Second entretien libre

a) Démarche méthodologique

Afin de compléter et d’éclaircir mon nouveau questionnement, j’ai décidé d’interroger une

seconde infirmière lors d’un entretien libre. J’ai utilisé la même méthode d’enregistrement

Page 18: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

13

que l’entretien numéro n°1 et il s’est déroulé dans le bureau médical du service à la fin de

poste de l’infirmière. Il a duré 45 minutes. J’ai choisi pour ce second entretien une

infirmière en service infectieux depuis 12 ans. Je l’appellerai l’infirmière N°2 durant le

compte rendu. J’ai décidé de l’interroger car elle est souvent confrontée à l’annonce de la

séropositivité de patients et par conséquent où la charge émotionnelle peut être lourde. Je

lui ai demandé de m’expliquer quelle place elle accordait à ses émotions dans le soin ? Si

c’était plutôt bénéfique pour elle de les exprimer ou si elle mettait plutôt des barrières dans

leur expression. Enfin, si elle pensait que les émotions pouvaient favoriser la relation de

confiance soignant/soigné.

b) Synthèse de l’entretien

Voici le compte rendu de notre entretien. Pour l’infirmière N°2, les émotions du soignant

ont une place importante et font parties intégrante du soin car nous ne pouvons pas les nier.

D’autant plus que ce n’est pas parce que nous avons un statut de soignant que cela doit

nous empêcher d’exprimer nos émotions. En tant que soignant, nous nous devons de ne pas

les cacher car nous sommes avant tout des êtres humains et elles permettent de favoriser la

relation de confiance puisque le patient verra le soignant autrement : le patient verra que

pour le soignant il n’est pas un simple numéro de chambre mais une personne à part

entière. De plus, il ne faut pas être trop distant car plus nous donnons au patient, plus nous

recevons de sa part. Cependant, il est primordial de faire abstraction de certaines émotions

(dégoût, colère, agacement, jugement) pour prendre en charge le patient le mieux possible,

avec la même équité, même si parfois ce n’est pas toujours possible au vu des situations.

Le plus important est de se connaitre, connaitre ses limites, ce que nous sommes capables

de recevoir et de donner pour savoir comment se comporter en conséquences. Il est

nécessaire quelquefois de prendre sur soi mais dans ce cas il ne faut rien garder pour soi et

en discuter avec l’équipe pour se détacher de la situation si celle-ci confronte

personnellement le soignant à son vécu. Il n’y a pas de honte à avoir car c’est bénéfique

pour l’avenir professionnel du soignant. Si le soignant garde tout pour lui, il peut vite se

retrouver en difficulté et être confronté à un épuisement moral. L’expérience

professionnelle amène à savoir ce que nous pouvons faire. Les émotions doivent être un

moteur au soin et non un frein. L’institution et l’école infirmière nous préconisent souvent

de ne pas trop s’attacher, ni de se dévoiler mais ces règles sont difficiles à mettre en

pratique. Les émotions sont un concept personnel, subjectif mais commun à tous les

soignants. Il n’y a pas de bonnes ou mauvaises conduites à avoir vis-à-vis de celles-ci. Le

Page 19: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

14

plus important réside dans le fait qu’il faut adopter la bonne attitude soignante c'est-à-dire

une attitude bienveillante, empathique et sans jugement.

c) Analyse de l’entretien et synthèse conceptuelle

A la suite de cet entretien, j’ai fait des recherches sur la légitimité des soignants à exprimer

leurs émotions car cette notion me posait déjà question avant le second entretien et

l’infirmière N°2 l’a également évoqué. En effet, l’institution et les normes sociales

encadrent la vie émotionnelle des soignants............................................................................

…………………………………………………………

La norme en vigueur exige la neutralité ou au mieux, le silence des affects. Nous

apprenons au cours de notre socialisation primaire puis professionnelle ce qu’il est

bon de ressentir et de montrer, et c’est par le « débordement » que les limites sont

alors mises en évidence : lorsque l’infirmière pleure « trop » à la suite d’un décès

ou, au contraire, lorsqu’elle ne montre pas suffisamment sa sensibilité, lorsqu’elle

se met en colère alors que les malades sont agressifs ou irrespectueux « parce

qu’ils souffrent » et qu’elle doit se montrer compréhensible à leur égard. Ainsi le

« silence » voile toute la vie émotionnelle des soignants. Un important travail de

gestion émotionnelle s’effectue à la fois pour respecter les normes en vigueur mais

surtout pour que le soin puisse se dérouler comme il se doit. (Mercadier, 2008,

p.19-20).

Aussi, à la suite de mon premier entretien avec l’infirmière N°1, j’avais conclu que nous ne

pouvions pas restés insensibles à certaines situations car c’est ce qui faisait notre force et

notre humanité. De plus, l’infirmière N°2 a expliqué qu’il fallait bien se connaitre,

connaitre ses limites et ses failles pour savoir comment se comporter en conséquence. Ce

concept est appelé l’intelligence émotionnelle. A la différence d’autres concepts plus

souvent étudiés en psychologie du travail et des organisations, l’intelligence émotionnelle

apparaît comme un concept relativement récent puisque la première utilisation officielle du

terme revient aux psychologues Peter Salovey et John Mayer dans les années 1990. Ils

définissent l’intelligence émotionnelle comme étant « La capacité à percevoir l’émotion, à

l’intégrer pour faciliter la pensée, à comprendre les émotions et à les maîtriser afin de

favoriser l’épanouissement personnel. » (Mayer et Salovey, 1997). Ils évoquent la

nécessité de comprendre nos émotions et celles des autres pour être plus efficace dans la

Page 20: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

15

vie relationnelle quotidienne : gestion des conflits et gestion du changement. Pour eux,

l’intelligence émotionnelle se situe à l’intersection des cognitions et des émotions. Leur

modèle comprend quatre processus mentaux :

- La perception et l’évaluation verbales et non verbales des émotions.

- La capacité d’intégration et d’assimilation des émotions pour faciliter et améliorer

les processus cognitifs et perceptuels.

- La connaissance du domaine des émotions : compréhension de leurs mécanismes,

de leurs causes et de leurs conséquences.

- La gestion de ses propres émotions et celles des autres.

Ce concept a depuis été repris par de nombreux auteurs. D’après Prahin, « Prendre la

responsabilité de ses émotions, c’est exprimer son autonomie et s’engager dans ses choix

envers soi-même et autrui. » (Prahin, 1999, p.16). Daniel Goleman, psychologue et

journaliste scientifique, s’est inspiré des travaux de Mayer et Salovey et a proposé un autre

modèle de l’intelligence émotionnelle adapté au contexte de la vie au travail. Il se décline

autour de 25 compétences qui s’articulent autour de 5 axes principaux :

- La conscience de soi et la capacité à comprendre ses émotions

- L’autorégulation ou la maîtrise de soi

- La motivation interne

- L’empathie

- Les aptitudes sociales

Pour Goleman, cette capacité générale fédère de nombreuses attitudes en constante

interférence : « confiance en soi, empathie, assertivité, congruence et auto-motivation.»

(Goleman cité dans Jean Therer, 2006, p.3).......................................................................,

………………………………………………

L’intelligence émotionnelle repose sur un ensemble de compétences qui nous

permet d’identifier nos émotions et celles des autres, de les exprimer correctement

et d’aider les autres à exprimer les leurs, de les comprendre, de les gérer et de

nous adapter à celles des autres. Elle nous permet d’utiliser nos émotions dans

différentes sphères. (Phaneuf, 2013, p.34).

Cependant, cette intelligence émotionnelle requiert la capacité de reconnaissance de ces

compétences. Si l’intelligence émotionnelle n’est pas connue ou reconnue par le soignant,

elle peut-être délétère. En effet, « la régulation émotionnelle recouvre l’ensemble des

Page 21: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

16

processus par lesquels l’individu va transformer son émotion » (Desseilles, 2013, p.41).

Elle s’acquiert grâce à l’expérience et à la connaissance de soi. Aussi, l’infirmière N°2

précise que si nous gardons tout pour nous, nous pouvons arriver à un épuisement moral.

Aussi, nous entendons de plus en plus parler de professionnels victimes d’épuisement

professionnel, équivalent français du terme anglais burn-out. Selon certaines études, 25 à

40% des soignants seraient épuisés. (Bonnet et Macrez, 2004, p.19 à 22). Ce syndrome

d’épuisement professionnel est défini comme un « épuisement physique, émotionnel et

mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes

sur le plan émotionnel » (HAS, 2017). Les travaux de Christina Maslach, psychologue

américaine spécialisée dans les domaines de l’épuisement et du stress au travail, ont permis

de concevoir que le syndrome d’épuisement professionnel est un processus de dégradation

du rapport subjectif au travail à travers trois dimensions: l’épuisement émotionnel, le

cynisme vis-à-vis du travail ou dépersonnalisation (déshumanisation, indifférence) et la

diminution de l’accomplissement personnel au travail. (INRS, 2017).

Il est important de préciser que dans ce travail, nous nous intéresserons seulement à cette

composante émotionnelle qui est à distinguer des deux autres composantes que sont la

dépersonnalisation et la diminution de l’accomplissement personnel au travail qui peuvent

être liées à des causes organisationnelles et non émotionnelles. L’épuisement émotionnel

est lié en partie à un investissement professionnel affectif trop important (Petit-Barat,

2017). Aussi, il se manifeste par l’incapacité à accueillir une émotion nouvelle par le

soignant qui ressent des sentiments de vide, d’impuissance, de perte de confiance en soi,

d’irritabilité, de pessimisme. (AFSOS, 2014).

Je peux dès à présent conclure, grâce au témoignage de l’infirmière N°2 accompagné de

mes recherches sur les concepts de l’intelligence émotionnelle et du syndrome

d’épuisement émotionnel, que savoir faire bon usage de ses émotions pourrait donc être

une clé pour diminuer le risque d’épuisement émotionnel.

3) Evolution de mon questionnement

Afin de conclure cette première partie exploratoire, je remarque que mon questionnement

initial sur la gestion des émotions est toujours présent dans ce travail mais qu’il s'est

désormais élargi à la suite de mes deux entretiens et de mes recherches. Je constate

l’évolution positive de mon questionnement et de mes représentations sur les émotions. Je

partais d’une vision négative de la gestion des émotions : il ne fallait pas les exprimer mais

les contenir. A présent, j’observe après analyse de toutes ces nouvelles données que les

Page 22: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

17

émotions sont un outil de soin autant pour le patient que pour le soignant et qu’elles

animent la relation soignant-soigné. Monica Leitao, précise dans son étude « que le fait

d’exprimer ses émotions est bénéfique pour tout le monde. En effet, exprimer ses émotions

peut diminuer considérablement les émotions négatives comme la tristesse ou la colère ou

au contraire, augmenter les émotions positives comme la bonne humeur, la joie ou

l’amour. » (Leitao, 2012, p.10). Tout cela va tendre à une meilleure entente entre le

soignant et le patient car chacun aura exprimé ses ressentis. Le soutien sera partagé car ils

se trouveront au même niveau et seront égaux dans la relation. La communication sera

meilleure et authentique. Reconnaître ses émotions est nécessaire afin de mieux les

maîtriser et de pouvoir s’en servir dans la relation de soin. Aussi, cette prise de conscience

sur ses émotions pourrait être un outil d’aide pour le soignant afin d’éviter un syndrome

d’épuisement émotionnel.

Aujourd’hui, je suis en mesure de poser deux nouvelles problématiques à mon travail :

- Quels sont les facteurs qui permettent la mise en œuvre de l’intelligence

émotionnelle par les soignants ?

- En quoi la mise en œuvre de l’intelligence émotionnelle par les soignants peut

limiter l’apparition d’un syndrome d’épuisement émotionnel?

III. Phase 2 : Approfondissement de l’enquête

1) Méthodologie de la phase d’approfondissement

Pour poursuivre l’enrichissement de mon travail et afin de pouvoir répondre à mes deux

nouvelles problématiques, j’ai effectué des entretiens auprès de trois infirmières. Les

professionnelles que j’ai rencontrées ont été choisies en amont suivant le service dans

lequel elles exercent :

- Le premier entretien est celui d’une infirmière de 45 ans, diplômée depuis 21 ans et

exerçant dans un service d’Urgences/SMUR (Structure Mobile d’Urgence et de

Réanimation) depuis 17 ans. Je l’appellerai l’infirmière N°3 au cours de l’analyse.

J’ai voulu connaitre son point de vue car dans sa fonction qu’elle occupe au

SMUR, elle est sur la première ligne de front dans la souffrance des patients et elle

fait partie des premières personnes à intervenir auprès du patient dans sa prise en

Page 23: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

18

charge. De plus, elle est exposée à des scènes violentes de type accident de la route,

suicide, individu brûlé….

- Le second entretien est celui d’une infirmière de 28 ans, diplômée depuis 7 ans et

exerçant en libéral depuis une année. Elle a travaillé auparavant en service de

neurologie. Je l’appellerai l’infirmière N°4 au cours de l’analyse. J’ai voulu

connaitre son point de vue car dans sa fonction qu’elle occupe en libéral, elle

intervient tous les jours au domicile des patients. Par conséquent, elle entre dans la

vie privée des patients et peut créer une relation dite « plus intime ».

- Le troisième entretien est celui d’une infirmière de 53 ans, diplômée depuis 31 ans

et exerçant dans un service de permanence d’accès aux soins de santé depuis 14

ans. Je l’appellerai l’infirmière N°5 au cours de l’analyse. J’ai voulu connaitre son

point de vue car dans sa fonction qu’elle occupe, elle intervient auprès de personnes

ayant des conditions de vie très précaires et un contexte de vie souvent très

dommageable (réfugiés ayant traversé la mer et plusieurs pays dans des conditions

extrêmes). De plus, dans cette relation soignant-soigné, la communication non-

verbale est très présente en lien avec la barrière de la langue.

Les dates des entretiens ont été fixées à l’avance en fonction des disponibilités de chacune.

Ils ont duré entre 25 et 35 minutes et se sont déroulés dans un bureau propice au calme et

en toute intimité. J’ai choisi d’enregistrer chaque entretien, avec l’accord des infirmières,

afin d’être complètement attentive à l’échange en évitant une prise de notes. J’ai choisi

d’utiliser des entretiens semi-directifs avec comme outil de travail un guide d’entretien

thématique (Annexe n°1) composé de 21 questions ouvertes afin d’apporter une nouvelle

direction à ma réflexion et pour pouvoir rebondir sur les explications données par les

infirmières. De plus, les émotions étant un sujet qui s’intéresse aux ressentis et donc à

l’intime des soignants, il me semblait plus pertinent d’utiliser des entretiens semi-directifs,

qui permettent aux infirmières de s’exprimer plus librement et afin d’obtenir des données

plus précises.

2) Synthèse et analyse des entretiens

Dans cette partie de mon travail, je vais reprendre de façon synthétique les éléments

pertinents qui sont apparus dans mes trois entretiens (Annexe n°2). Je vais les traiter

Page 24: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

19

chronologiquement suivant les grands thèmes et les différentes questions de mon guide

d’entretien et les analyser en m’appuyant sur des éléments de la littérature.

Pour débuter mes entretiens et pour annoncer mon thème à chacune des infirmières, je

leurs ai demandées de me donner une définition d’une émotion. Pour l’infirmière N°3,

c’est « un ressenti, une expression physique ou verbale par rapport à une situation

donnée ». Pour l’infirmière N°4, c’est « un sentiment négatif ou positif que l’on ressent

face à une situation ». Enfin, pour l’infirmière N°5, c’est « un état émotionnel que l’on

peut laisser ou ne pas laisser aller ». Ces trois définitions illustrent bien le caractère

spontané, agréable ou non et maitrisé ou non d’une émotion. Les trois infirmières sont en

adéquation avec la définition citée plus haut du dictionnaire Le Robert. Par conséquent,

mes trois entretiens débutent avec la même vision d’une émotion par les infirmières.

♦ Thème 1 : Les émotions au travail

Concernant les émotions au travail, j’ai voulu savoir si pour elles, il est important de

ressentir des émotions lors des soins. Pour l’infirmière N°3, ce ressenti fait partie

intégrante du soin car il s’inscrit dans la relation d’aide et dans la relation soignant-soigné.

Nous sommes des acteurs de soin et nous travaillons avec des êtres humains. C’est

marquer une forme de respect à cet être humain en ressentant des émotions. L’infirmière

N°5 souligne également ce caractère humain que nous donnent les émotions. Pour

l’infirmière N°4, ressentir des émotions prouve que nous faisons attention au patient. Elle

précise que même les émotions négatives sont importantes et qu’il serait inquiétant d’être

dépourvu d’émotion.

A la question « Quelles sont les émotions que vous rencontrez le plus ? », l’infirmière N°3

précise que sa fonction au SMUR l’amène à rencontrer plus d’émotions négatives que

positives car elle est confrontée à des situations particulières de type accidents de la route,

accidents traumatiques, décès de tout âge… De plus, la douleur morale est très présente.

Pour l’infirmière N°4 qui travaille en libéral, ce sont des sentiments de joie voire des rires

qui animent ses journées et parfois de la tristesse. Elle ressent très rarement de la colère et

précise qu’il faudrait vraiment atteindre ses limites pour qu’elle exprime ce sentiment.

L’infirmière N°5, quant à elle, rencontre principalement des émotions positives. Des

émotions telles que la joie et la gaité qu’elle qualifie de bénéfique pour elle et pour le

patient. Elle précise que si elle venait à être amenée à ressentir du mépris, elle ne serait

plus dans le respect de l’autre. Cependant, elle explique qu’il lui est arrivée de ressentir du

dégoût non pas à l’encontre d’un patient en lui-même mais plus par rapport à des odeurs

Page 25: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

20

qui peuvent l’incommoder. Par rapport à la tristesse, elle souligne qu’elle rencontre des

choses difficiles sur l’existence des patients mais qu’elle ne se permet pas d’être prise dans

cette émotion car elle estime qu’elle ne pourra plus être en capacité d’aider le patient dans

la relation d’aide.

a) De la relation d’aide à la fatigue compassionnelle

Nous constatons que la notion de relation d’aide est exprimée à plusieurs reprises par les

infirmières et elle est en lien avec l’expression des émotions.

C’est Carl Rogers, psychologue américain, qui a développé cette notion de relation

d’aide. Il la décrit comme « une relation thérapeutique au sein de laquelle l’aidant c'est-à-

dire le soignant est essentiellement tourné vers l’autre, le patient, vers son vécu, vers sa

souffrance » (Naoufal, 2014). Cette relation requiert de la part du professionnel des

attitudes spécifiques pour sa mise en place :

- La présence : la relation est d’abord une présence envers le patient, « être là ».

- L’écoute : elle est souvent synonyme de disponibilité dans le temps mais c’est

aussi être prêt à accueillir ce que dit le patient.

- L’acceptation : c’est un sentiment d’ouverture d’expérience au patient.

- Le respect : la relation repose sur la confiance et le respect.

- L’empathie : c’est un sentiment de compréhension du soignant.

- L’authenticité : c’est la capacité du soignant à demeurer lui-même.

- La congruence : c’est l’adéquation entre le comportement verbal et le non verbal.

Cette définition de la relation d’aide intensifie le caractère humain qui s’inscrit dans la

relation avec le patient. En effet, nous avions déjà vu précédemment à travers le

témoignage de l’infirmière N°1 qu’exprimer nos émotions permettait de nous rendre

humain et que si nous étions amenés à ne plus ressentir d’émotion nous pourrions être

assimilés à des automates. Cette humanité du soignant est reprit par les infirmières N°3 et

N°5. Margot Phaneuf décrit dans son travail que « l’infirmière demeure un être humain qui

vibre avec ce que vit le malade et l’émotion qu’elle manifeste devant de telles situations, ne

fait que montrer qu’elle le regarde avec les yeux du cœur. » (Phaneuf, 2012, p.10)

Cependant, à travers la réponse de l’infirmière N°5, nous constatons que parfois elle ne

s’autorise pas de ressentir de la tristesse par peur de ne pas être en mesure d’assurer son

rôle dans la relation d’aide. Cette forme de retenue me fait penser à une sorte de prévention

qu’elle met en place pour ne pas basculer dans la fatigue compassionnelle. Ce concept

désigne « le sentiment d’épuisement physique et émotionnel que les professionnels de la

Page 26: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

21

relation d’aide sont susceptibles de développer au contact de la souffrance des patients. »

(Zawieja, 2014, p.1). Ce nouveau concept est à nuancer de l’épuisement émotionnel. En

effet, l’épuisement émotionnel est lié à une surcharge d’émotions que le soignant garde en

lui alors que la fatigue compassionnelle est liée à la souffrance du patient qui tend à rendre

le soignant apathique voire jusqu’à un émoussement émotionnel.

Enfin, nous pouvons remarquer que les émotions exprimées par les professionnels ne sont

pas toutes à connotations positives. Il est important d’exprimer autant les émotions

positives que négatives pour être dans cette authenticité que demande la relation d’aide.

♦ Thème 2 : La gestion des émotions

J’ai exploré, par l’intermédiaire de quatre questions, la gestion émotions par les

infirmières. Pour commencer, je leurs ai demandées de m’expliquer ce qu’elles faisaient de

leurs émotions lors des soins. Pour l’ensemble des infirmières, il est question du partage

des émotions en équipe. En effet, pour l’infirmière N°4, en fonction des interventions, des

émotions négatives qu’elle rencontre et de l’équipe avec qui elle intervient (équipe de 3 au

SMUR : infirmier, médecin et ambulancier), elle a besoin de faire un débriefing avec son

équipe à postériori pour libérer ses émotions, pour ne pas qu’elles lui pèsent. Elle précise

qu’il faut exprimer ses émotions même si ce n’est pas toujours simple. Aussi, pour

l’infirmière N°5, elle explique qu’elle garde beaucoup ses émotions pour elle mais que si

elle ressent le besoin d’en parler, elle peut compter sur ses collègues du cabinet libéral.

Elle précise cependant qu’il est plus simple de partager ses émotions en équipe en

institution car il y a plus de personnes dans les services. Enfin, l’infirmière N°5 explique

qu’elle n’échange pas seulement avec son équipe du service mais avec les partenaires avec

qui elle travaille à l’extérieur (espace solidarité, assistante sociale). Selon elle, elle a besoin

d’un détachement pour pouvoir parler ouvertement de ses ressentis.

b) Le partage en équipe

A travers ces différentes réponses, nous pouvons constater l’importance du travail

d’équipe. Ce travail en équipe dans le domaine des soins est défini comme « un ensemble

de personnes travaillant ensemble. Elles sont liées par des interrelations. Elles ont

conscience d’une appartenance au groupe et poursuivent un but commun» (Phaneuf,

2012, p.2). Pour toutes les infirmières, le partage des émotions en équipe demeure le point

clé d’une bonne gestion de ses émotions. Ce partage permet de se libérer des émotions qui

n’auraient pas pu être exprimées lors d’un soin. Ce partage permet une cohésion d’équipe

Page 27: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

22

et de se sentir soutenu. Cependant, ce partage des émotions décrit par les trois infirmières

et soutenu par Margot Phaneuf dans son article peut être mal perçu par certaines équipes.

Dans certaines équipes, le stoïcisme est de mise : l’infirmière, pour être jugée

professionnelle, doit demeurer inébranlable avec une figure impavide, même

lorsqu’elle se sent très émue par la souffrance ou l’agonie d’un malade. C’est

comme si quelques larmes ou quelques mots de détresse alors exprimés devenaient

une faute. Les équipes où les soignantes ne peuvent exprimer ouvertement leur

compassion sont souvent des milieux durs que l’empathie ne peut habiter. Non

seulement l’extériorisation de l’émotion devrait être possible et autorisée et les

infirmières entre elles devraient pouvoir se comprendre et se donner du soutien

dans de telles situations. (Phaneuf, 2012, p.10)

Par conséquent, je me demande pourquoi certains soignants sont au clair dans la gestion et

l’expression de leurs émotions alors que pour d’autres il est question de préjugés et de

répression de leurs émotions.

Isabelle Filliozat souligne l’importance de la communication dans les équipes « Les non-

dits sont source de dysfonctionnements. Un climat de sécurité se construit sur la base du

non-jugement. Le jugement est un mécanisme de protection contre une émotion. C’est une

barrière que nous mettons entre nous et l’autre pour ne pas ressentir.» (Filliozat, 2001,

p.130).

J’ai également voulu savoir si elles pensaient que la gestion des émotions pouvait requérir

des qualités personnelles, si elle était innée et/ou si elle venait avec l’expérience. Pour

toutes, cette gestion est liée à la personne car nous sommes tous différents et il y a une part

de subjectivité dans nos réactions. Aussi, elles sont toutes d’accord sur le fait que la

gestion des émotions repose majoritairement sur le vécu personnel, l’âge, l’expérience,

l’éducation, la maturité professionnelle et personnelle. Pour elles, la principale qualité dans

la gestion des émotions est la connaissance de soi-même.

c) L’expérience et le vécu

A travers cette question, nous pouvons remarquer que les infirmières confirment que la

gestion des émotions n’est pas innée mais qu’elle le devient avec le temps. Goleman

affirme que les compétences émotionnelles ne sont pas des talents innés mais bien des

Page 28: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

23

capacités apprises qu’il faut développer et perfectionner afin de parvenir à un rendement

exceptionnel. En effet, nous apprenons tous les jours sur nous-mêmes et nous avons tous

une personnalité différente qui font que nos réactions face aux émotions ne peuvent pas

être similaires. Il n’y a pas de « recette-miracle » pour pouvoir gérer ses émotions mais

plutôt des compétences internes à assimiler pour mieux vivre ses émotions. Aussi,

l’expérience nous permet d’acquérir de la maturité dans la connaissance de nous-mêmes,

dans nos réactions, dans la capacité à reconnaitre et à anticiper des difficultés dans

certaines situations. C’est un apprentissage permanent qui nous permet d’acquérir une

forme d’adaptabilité aux situations. Aussi, notre caractère joue un rôle important dans la

gestion des émotions : un soignant timide, réservé ne réagira pas de la même façon qu’un

soignant expressif et ayant de l’assurance. Daniel Goleman a écrit dans son ouvrage « qu’il

existe un vieux mot pour représenter l’ensemble des compétences liées à l’intelligence

émotionnelle : le caractère ». (Goleman, 1995)

A la question « quelles seraient les difficultés à ne pas gérer vos émotions et quelles sont

les situations qui vous posent régulièrement des difficulté ? », l’infirmière N°3 me répond

que les émotions posent toujours des difficultés. Si elle devait les garder pour elle, elle ne

pourrait plus être infirmière. Des situations particulières vécues en SMUR peuvent la

pousser à se remettre en question sur ses pratiques professionnelles. Elle a vécu des

interventions trop lourdes émotionnellement pour pouvoir rentrer chez elle de suite. Elle

était trop impactée et ses émotions étaient perturbées. Il faut en parler mais nous

n’oublions pas, nous vivons avec et nous continuons d’avancer avec. C’est ce qui nous

permet de mûrir et de grandir. On grandit chaque jour quelque soit notre âge. Les décès

d’enfants resteront toujours compliqués et inattendus, les morts traumatiques également.

Pour l’infirmière N°4, la difficulté à ne pas pouvoir gérer ses émotions serait de ne pas

réussir un soin à cause du stress. Pour elle, ce serait compromettant étant donné qu’elle est

seule au domicile des patients et qu’elle ne peut compter que sur elle-même. Elle précise

que cela pourrait entraîner des répercussions sur la relation de confiance avec le patient.

Enfin, pour l’infirmière N°5, elle explique que quand elle est au travail, elle arrive à

contenir ses émotions car elle tient un rôle de professionnel et elle a un cadre. Cependant,

elle me raconte avec énormément d’émotions et les yeux pleins de larmes qu’elle est allée

à une formation sur le parcours du migrant dans un établissement à Lyon et il y avait un

récit sur le départ d’un migrant depuis son pays avec tout son parcours, son trajet, son

arrivée. Elle explique qu’elle n’a pas pu rester dans la salle de conférence tellement elle

Page 29: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

24

était bouleversée. Quand elle entendait ce récit, elle a fait le rapprochement ave ses patients

et ce qu’ils avaient pu vivre et cela l’a submergée d’émotions. Elle conclue elle-même

qu’inconsciemment elle n’évoque pas ce sujet avec eux lors des soins car c’est une manière

de se protéger et elle ne leurs permet pas de lui déverser les choses. Elle trouve incroyable

ce mécanisme de défense qu’elle met en place pour ne pas être touchée ni envahie par ce

qu’ils pourraient lui raconter. Elle s’appuie sur d’autres personnes ressources et préfère que

les patients racontent leur parcours au secours catholique ou au médecin.

Enfin, je leurs ai demandées si ces émotions pouvaient impacter leur vie privée et ce

qu’elles faisaient avant de rentrer chez elle. Pour l’infirmière N°3, elle explique qu’elle a

l’avantage d’avoir un temps de route avant de rentrer chez elle (25 minutes). Ce temps,

seule, permet de se vider la tête et d’arriver au domicile sereinement. Il y a déjà une prise

de recul avec l’émotion. Elle a besoin de faire le vide toute seule pour pouvoir en parler

ensuite différemment car elle ne sera plus sur l’émotion forte du moment. L’infirmière N°4

raconte qu’elle est beaucoup moins impactée que quand elle travaillait à l’hôpital car elle

ne vit pas les mêmes situations. A domicile, c’est plus du quotidien, les patients sont dans

un état qui leurs permet de rester chez eux. Avant, à l’hôpital, elle amenait ses émotions

chez elle. Elle repensait à ce qu’elle avait fait, pas fait ou pas dit. Elle précise qu’elle a

passé pas mal de nuits sans dormir mais que maintenant avec du recul elle ne le vit plus de

la même façon.

d) Prendre soin de soi

Ces deux questions illustrent la citation « il faut prendre soin de soi pour pouvoir prendre

en soin les autres». En effet, pour pouvoir prendre en soin des patients, le soignant doit

commencer par prendre soin de lui-même car c’est son bien être interne qui engendrera en

partie le bien être de l’autre. Les trois infirmières connaissent leurs limites et savent ce

qu’elles doivent faire en conséquence pour ne pas être impactées et pour ne pas souffrir.

En effet, plus le soignant prendra le temps d’extérioriser ses craintes et ses difficultés, plus

il sera disponible pour les patients. Nous revenons encore à la connaissance de soi : plus le

soignant se connaîtra, plus il sera en capacité d’aider et de prendre soin le patient. Thomas

d’Ansembourg a dit « Si je prends soin de l’autre en me négligeant moi-même, j’entretiens

la négligence et non pas le soin. »

De plus, à travers cette question, nous comprenons qu’il est important pour les infirmières

d’avoir un détachement et de « faire le vide » face à ces situations difficiles pour leurs

permettre de ne pas ramener ces émotions chez elle. Nous constatons aussi que

Page 30: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

25

l’expression des émotions « difficiles » ne se fait pas obligatoirement au moment où elles

sont vécues. Elles peuvent être analysées et exploitées plus tard en dehors de la situation

pour permettre de prendre du recul.

♦ Thème 3 : L’intelligence émotionnelle

J’ai voulu savoir si les trois infirmières avaient connaissance de l’intelligence émotionnelle

dans la gestion de leurs émotions. Après leurs avoir données une définition complète de

l’intelligence émotionnelle, je leurs ai demandées si elles connaissaient ce concept et si

elles pensaient l’utiliser dans la gestion de leurs émotions. Aucune des infirmières ne

connait ce concept. L’infirmière N°3 pense l’utiliser sans le connaitre au vue des critères

énoncés que sont la capacité de reconnaitre, comprendre et maitriser ses propres émotions

et à composer avec celles des autres personnes. L’infirmière N°4 a conscience de ce

qu’elle ressent et de ce qu’elle peut exprimer ou contrôler. Elle commence à avoir de

l’expérience et elle pense que c’est surtout cette expérience et ce recul qui lui font gérer ses

émotions car elle anticipe les réactions, les situations et elle cerne les patients. Enfin

l’infirmière N°5 pense qu’elle a encore une méconnaissance d’elle-même car nous

apprenons tous les jours sur nous. Cependant, chez les patients, elle perçoit pas mal de

choses dans le non verbal et dans leurs attitudes parce qu’elle ne parle pas la même langue

qu’eux. C’est réciproque, elle va être très attentive à eux et eux très attentifs à elle.

Par conséquent, je leurs ai demandées si selon elles, l’intelligence émotionnelle pouvait

faciliter la gestion des émotions. Pour toutes, c’est l’outil de la gestion des émotions.

L’infirmière N°5 précise même que c’est l’outil principal avec la connaissance de soi-

même. L’infirmière N°3 ajoute que se connaitre, maîtriser et contrôler ses émotions sont

des outils de gestion des émotions.

e) L’intelligence émotionnelle

Nous pouvons donc affirmer que l’intelligence émotionnelle est un concept encore

méconnu des soignants mais qu’une partie des compétences qu’elle requiert sont utilisées

par les soignants pour gérer leurs émotions Nous avons vu précédemment dans ce travail

que l’intelligence émotionnelle se décline autour de 25 compétences qui s’articulent autour

de 5 axes principaux. Avec le témoignage des trois infirmières, nous allons pouvoir définir

précisément ces axes et les attitudes soignantes correspondantes :

- La conscience de soi et la capacité à comprendre ses émotions:

c’est la capacité de reconnaître et de comprendre ses humeurs personnelles, ses

Page 31: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

26

émotions et ses motivations internes ainsi que leurs effets sur les patients. La

conscience de soi dépend de la capacité à surveiller son propre état émotionnel et à

identifier et à nommer correctement ses émotions.

- La maîtrise de soi : c’est la capacité de contrôler ou rediriger ses pulsions et ses

humeurs perturbatrices, à être dans le non jugement et réfléchir avant d’agir. C’est

agir avec respect envers le patient, lui porter de l’attention et lui donner un accueil

inconditionnel positif.

- La motivation interne : c’est la vision de ce qui est important dans la vie, le plaisir

d’accomplir une tâche, la curiosité d’apprendre. Le soignant ressent une envie

d’accomplissement, de l’optimisme et un engagement organisationnel. C’est

l’engagement du soignant dans la relation de soin avec le patient.

- L’empathie : c’est la capacité de comprendre la structure émotionnelle des

patients. Une habileté à traiter les personnes en fonction de leurs réactions

émotionnelles, la capacité à sentir ce qu’ils ressentent. C’est « se mettre à la place

du patient » tout en restant soi-même.

- Les aptitudes sociales : L’habileté dans la gestion des relations avec ses collègues

en équipe ainsi qu’une capacité à trouver des points communs et de construire des

liens. Cet item souligne le travail d’équipe déjà cité dans ce travail. (Annexe n°3)

Une citation d’Isabelle Filliozat résume très bien l’attitude à adopter face à une émotion :

« Une émotion surgit ? Respirez dedans, acceptez-la, laissez-la se développer, couler en

vous. » (Filliozat, 2001, p.102).

Aussi, nous constatons à travers la réponse de l’infirmière N°5 que les émotions sont

universelles et comprises par tous à travers le langage non verbal.

♦ Thème 4 : L’épuisement émotionnel

J’ai voulu approfondir, par l’intermédiaire de trois questions, leur vision sur l’épuisement

émotionnel. A la question « vous êtes-vous déjà senties ou vous sentez vous épuisées

émotionnellement et est-ce une réalité pour vous », les avis sont partagés. L’infirmière

N°4, la plus jeune des trois, n’a jamais ressenti cet épuisement mais elle précise qu’elle a

quitté l’hôpital pour une très bonne raison et constate que les soignants sont de plus en plus

épuisés. Pour l’infirmière N°5, cela peut lui arriver de se sentir épuisée émotionnellement.

Quant à l’infirmière N°3, elle explique que cela lui est déjà arrivé de se sentir vidée

Page 32: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

27

émotionnellement et elle pense que tous les soignants le ressentent tôt ou tard. C’est pour

elle une réalité que les soignants soient épuisés émotionnellement et/ou physiquement.

Quand je leurs demande quels sont pour elles les facteurs de cet épuisement, elles me

répondent que ce sont des facteurs de société et liés à l’institution : surcharge de travail,

non reconnaissance de leur travail par les supérieurs, trop de pression, pas d’aide envers les

soignants pour les aider à souffler.

Enfin, à la question « quelles sont les répercussions de l’épuisement émotionnel sur soi et

sur la prise en charge des patients ? », l’infirmière N°3 parle de burn-out, de négligence, de

déni dans certaine prise en charge, d’automatisation de nos soins. Elle va même jusqu’à

dire que les infirmiers ne seront plus carriéristes à l’avenir : ils changeront de métier en

cours de route car ils seront épuisés. Pour l’infirmière N°4, elle évoque un sentiment de

« ras le bol » et de non valorisation de leur travail. Enfin, pour l’infirmière N°5, elle pense

que le soignant peut se sentir inutile et ne pas être à même d’aider le patient dans la

relation d’aide.

f) Le syndrome d’épuisement professionnel

A travers cette question nous avons pu remarquer les répercussions négatives de

l’épuisement professionnel sur le soignant mais il est aussi question de répercussions sur le

patient. En effet, l’infirmière N°3 parle de négligence et d’automatisation des soins et

l’infirmière N°5 d’incapacité d’aider le patient dans la relation d’aide. Ces répercussions

ne sont pas négligeables et peuvent porter préjudice tant aux soignants qu’aux patients.

Nous constatons dans cette partie que les infirmières ont tendance à faire l’amalgame entre

l’épuisement émotionnel et l’épuisement professionnel ou burn-out. Rappelons que le

premier est exclusivement lié aux émotions et le second est la résultante de plusieurs

composantes dont l’épuisement émotionnel fait partie. En effet, le syndrome d’épuisement

professionnel a trois dimensions :

- un épuisement émotionnel : la dimension la plus centrale avec un sentiment d’être

totalement vidé de ses ressources.

- le cynisme vis-à-vis du travail : le soignant a une attitude négative, dure et

détachée envers son travail et ses collègues.

- la diminution de l’accomplissement personnel au travail : le soignant se sent

dévalorisé, inefficace et n’est plus à la hauteur dans ses fonctions.

Nous allons définir les manifestations cliniques et les principales causes de l’épuisement

professionnel afin de pouvoir être en mesure de repérer et de prévenir ce syndrome chez

Page 33: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

28

les soignants. Selon la Haute Autorité de Santé, ce syndrome peut se traduire par des

manifestations plus ou moins importantes, d’installation progressive et souvent insidieuse,

en rupture avec l’état antérieur :

- manifestations émotionnelles : fatigue intense et permanente, une peur mal

définie, humeur triste, manque d’entrain, hypersensibilité ou à l’inverse une

absence d’émotivité.

- manifestations physiques : troubles du sommeil, tensions musculaires, prise ou

perte soudaine de poids, migraines, vertiges, nausées.

- manifestations cognitives : diminution de la concentration, difficulté à réaliser

plusieurs tâches, fautes, oublis.

- manifestations comportementales : repli sur soi, isolement.

- manifestations motivationnelles : baisse de motivation, dépréciation de son

travail, désengagement professionnel. (Ministère du travail et de la Santé, 2015,

p.9-10)

Pouvoir agir sur les causes de ce syndrome pourrait être un moyen de prévention.

Cependant, les causes ne sont pas toutes dépendantes du soignant et peuvent être à

l’origine d’un dysfonctionnement de l’institution comme souligné par les différentes

infirmières. Nous pouvons distinguer des causes:

- organisationnelles : surcharge de travail, pression du temps, horaires longs, travail

monotone, rôles mal définis, insécurité, le manque de soutien social, dévalorisation

de la profession, non reconnaissance du travail par les supérieurs.

- inter-individuelles : stress, idéalisation de la profession, appropriation de la

souffrance des patients, la responsabilité du métier, le conflit entre vie familiale et

professionnelle.

♦ Thème 5 : L’institution

Enfin, pour terminer mes entretiens, j’ai posé une dernière question aux infirmières

concernant l’institution : « Pensez-vous que l’institution reconnait ce travail

émotionnel ? ». Pour les trois infirmières, l’institution ne reconnait pas du tout ce travail

émotionnel des soignants. Pour l’infirmière N°3, c’est un phénomène de société.

L’infirmière N°4 explique que quand elle était encore en institution l’année dernière, elle

n’avait pas de moment de parole dédié dans son planning. Face à certaines situations très

complexes, elle devait faire « des pieds et des mains » pour pouvoir parler avec les

médecins ou les cadres de santé. Elle précise que l’institution ne se préoccupe pas du tout

Page 34: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

29

des émotions des soignants. Enfin, l’infirmière N°5 précise que l’institution n’est pas

bienveillante avec ce que vit le soignant. Elle explique que c’est le relationnel qui prime

dans les soins et il n’y a pas de bienveillance et d’accompagnement dans ce que ressentent

les soignants.

g) La représentation institutionnelle

Nous remarquons dans ces différentes réponses que toutes les infirmières utilisent des

termes forts pour décrire l’institution et qu’elles tiennent un discours très pessimiste vis-à-

vis de la hiérarchie. Face à ces réponses, je pense qu’il est important de définir le terme de

bienveillance. Selon le dictionnaire Larousse, c’est « la motivation à respecter autrui et à

agir pour son bien». Si je reprends la réponse de l’infirmière N° 5 qui précise de

l’institution n’est pas bienveillante avec ce que vit le soignant, cela voudrait dire que

l’institution ne respecte pas le soignant et n’agit pas pour son bien ? Aussi, les trois

infirmières ont le même avis sur la non-reconnaissance de leur travail émotionnel par

l’institution. Catherine Mercadier explique très bien dans son ouvrage que le travail

émotionnel appartient à la face caché du travail infirmier (Mercadier, 2008). Par

conséquent, je me demande si l’institution a réellement conscience de ce travail émotionnel

soignant. Aussi, les soignants ont cette représentation de l’institution qui vise à faire la

distinction entre le corps soignant et le corps malade. Toujours selon Catherine Mercadier :

Pour conserver la maîtrise des émotions induites par le rapport au corps malade et

satisfaire les normes implicites édictées par la société et relayées par l’hôpital, les

soignants opèrent une séparation entre leur monde et celui des malades. Cette

séparation se perçoit au travers de différents éléments : lieux, vêtements et de

distribution des rôles avec les rites d’initiation, d’agrégation et de

séparation. (Mercadier, 2008, p.21)

Ces normes en vigueur mis en place au sein des établissements seraient perçues par les

soignants comme des barrières à la vie émotionnelle des soignants. Selon Formarier &

Jovic, dans la pratique professionnelle infirmière, les émotions ont une place très différente

selon les situations :..................................................................................................................

Page 35: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

30

Elles sont nécessaires : nous ne pouvons pas travailler sans elles, elles existent et

sont parfois importantes et nécessaires. Elles sont reconnues et régulées : nous

travaillons avec des êtres humains, donc il est normal de ressentir des émotions.

Elles peuvent être discutées, régulées, car il ne faut pas se laisser submerger. Elles

sont réprimandées : il ne faut pas se laisser dépasser par les émotions, pour être un

professionnel il faut lutter contre les émotions des autres. (Formarier et Jovic,

2009, cité dans Leitao, 2012, p. 13)

Cette dernière analyse sur l’institution « me laisse sur ma fin ». En effet, j’aimerai

comprendre pourquoi il existe cette barrière entre l’institution et le monde des soignants

car les propos soutenus par les trois infirmières me bouleversent. ....

..............................................

3) Cheminement vers une question de recherche

Ce travail de fin d’études a été un réel bouleversement pour moi au niveau de ma vie

émotionnelle tant au niveau professionnel que personnel. En effet, j’ai pu répondre à mes

deux problématiques citées précédemment grâce aux trois entretiens et à mes diverses

recherches. Désormais, j’ai pris conscience de la puissance des émotions et l’intérêt de

connaitre et d’utiliser l’intelligence émotionnelle dans la gestion de ses émotions. J’ai

compris que si les soignants ne reconnaissent pas leurs émotions ou les négligent, ils ne

sont pas à l’abri de basculer dans un épuisement émotionnel ou une fatigue

compassionnelle. Je tiens cependant à préciser que j’ai pu déceler une limite à mon travail.

En effet, la plupart des soignants ont tendance à confondre l’épuisement émotionnel avec

l’épuisement professionnel. Cet enrichissement progressif d’informations, tirées de la

littérature et des divers entretiens, m’a permis de faire mûrir une toute nouvelle réflexion

autour de l’institution. Aujourd’hui, je suis en mesure de reconnaitre que mon

questionnement a pris une autre direction et j’aimerai désormais comprendre :

Quelle place accorde l’institution au travail émotionnel des soignants et quels moyens

sont mis en place pour les aider à faire bon usage de leurs émotions ? ..............................

Page 36: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

31

4) Hypothèses

Face à cette nouvelle problématique, je peux émettre différentes hypothèses qu’il faudrait

légitimer sur le terrain. En effet, je pense que la prévention et l’accompagnement sont les

éléments essentiels à mettre en place afin d’aider les soignants à mieux vivre leurs

émotions. En effet, nous avons démontré qu’une des conséquences de la mauvaise gestion

des émotions était l’épuisement émotionnel qui pouvait conduire jusqu’à l’épuisement

professionnel ou burn-out. Cet épuisement peut avoir de lourdes répercussions tant pour le

soignant, que pour le patient dans sa prise en soin mais également pour l’institution qui

peut se retrouver face à des équipes épuisées voir en sous effectif. Mettre en place des

outils de prévention pourrait être bénéfique pour l’ensemble des intervenants. Cette

prévention pourrait passer par la formation, la communication et par le soutien

psychologique. Pour commencer, je pense qu’il est primordial de commencer à la source

en Institut de Formation en Soins Infirmiers mais également dans toutes autres formations

médicale et paramédicale en formant les étudiants et futurs professionnels à l’intelligence

émotionnelle et en quoi elle est bénéfique pour les soignants. Ensuite, sur le terrain auprès

des professionnels, il existe plusieurs interlocuteurs vers qui les soignants pourraient se

tourner pour trouver du soutien. Les cadres de santé au sein des services sont des

professionnels de proximité, qui connaissent parfaitement leur équipe et qui sont à même

de reconnaitre les signes annonciateurs d’un épuisement émotionnel. Ils pourraient mettre

en place des temps d’échange, de supervision et de partage de situations en équipe ou

individuellement. De plus, en cas de situations plus complexes, il pourrait diriger le

soignant vers le médecin ou le psychologue du service de Santé au Travail afin d’apporter

une aide plus ciblée au soignant en difficulté. Aussi, la mise en place de formation à la

reconnaissance d’outils de gestion des émotions pourrait permettre aux soignants de mieux

appréhender leur vie émotionnelle et de prendre conscience des répercussions possibles.

Enfin, la communication dans les équipes lors de temps dédiés sur leur planning peut

également être un outil de prévention afin que les soignants puissent échanger, exprimer

leurs ressentis, leurs difficultés, leurs appréhensions sans se sentir jugés mais au contraire

soutenus et écoutés.

Aussi, j’ai appris dernièrement la mise en place dans les semaines à venir au sein d’un

établissement de santé d’un groupe de travail sur la gestion des risques et plus

Page 37: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

32

particulièrement sur l’épuisement émotionnel des soignants. Ce projet souligne bien la

prise de conscience de l’institution sur le travail émotionnel des soignants.

L’intelligence émotionnelle permet l’humanisation des soins et doit être reconnue

et développée par les soignants dès la formation initiale. Savoir reconnaitre ses

émotions, les identifier et les gérer, ne pas être envahi par celles du patient sont

autant d’outils indispensables à une relation soignante de qualité. (Phaneuf, 2013,

p.35)

IV. Conclusion

Ce travail de fin d’études m’a permis d’appréhender la vie émotionnelle des soignants. En

effet, j’ai vécu une situation lors d’un stage qui m’a personnellement confrontée à un

débordement émotionnel. Depuis, j’étais obstinée à croire que le soignant ne devait pas

exprimer ses émotions au patient lors d’un soin. Aussi, on me disait souvent qu’il fallait

que je « me blinde » ou que je laisse « mes émotions au vestiaire » pour ne pas être

impactée personnellement. Ces situations ne me laissaient pas indifférentes et me

questionnaient beaucoup. De plus, dans le milieu soignant, nous sommes constamment

confrontés à nos affects et à ceux des patients. Par conséquent, j’ai voulu approfondir la

question suivante : « Comment le soignant doit-il gérer ses émotions face au patient ? ».

Afin de pouvoir explorer cette question, il a fallu que je fasse des recherches relatives à la

législation et sur les concepts de la relation soignant-soigné, des émotions et des

mécanismes de défense. J’ai ensuite interrogé deux infirmières afin de connaître leur point

de vue sur la gestion des émotions. Ces entretiens constructifs, associés à de nombreuses

références littéraires, m’ont permis de faire évoluer mes représentations positivement et ont

conduit mon cheminement vers de nouveaux concepts : l’intelligence émotionnelle et

l’épuisement émotionnel qui sont étroitement liés en cas de mésusage. En effet, j’ai

compris que les émotions étaient un réel outil de soin dans la relation soignant-soigné mais

qu’elles devaient être connues et reconnues par le soignant pour ne pas être victime d’une

surcharge émotionnelle qui pourrait le faire basculer dans l’épuisement émotionnel. Il est

également important de rappeler que l’épuisement émotionnel n’est qu’une composante de

l’épuisement professionnel et que les soignants victimes d’un burn-out rencontrent d’autres

Page 38: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

33

difficultés de type organisationnelle, pression, stress, surcharge de travail... Nous avons

également évoqué la fatigue compassionnelle qui peut survenir chez le soignant qui

n’arrive plus à être confronté à la souffrance des patients. Lors de ce travail, je me suis

rendue compte qu’analyser les émotions est un processus très complexe. Nous sommes en

effet tous différents et nous ressentons tous nos émotions en fonction de nos vies

respectives. Je me suis alors questionnée sur les facteurs qui permettaient la mise en œuvre

de l’intelligence émotionnelle par les soignants et comment la mise en œuvre de cette

intelligence par les soignants pouvait limiter l’apparition d’un syndrome d’épuisement

émotionnel. Afin d’enrichir mon travail, je me suis alors tournée vers trois nouvelles

infirmières avec qui je me suis entretenue lors d’entretiens semi-dirigés. J’ai alors

découvert que l’intelligence émotionnelle était une ressource méconnue des soignants mais

utilisée inconsciemment lors des soins. Il est important d’analyser ce que nous ressentons

afin de comprendre l’effet que l’émotion nous apporte. Comprendre ce qui se passe en

nous permet de diminuer à posteriori le risque de se sentir envahi négativement par les

émotions. En effet, la gestion des émotions s’acquiert avec l’expérience mais elle passe

principalement par une parfaite connaissance de soi, la connaissance de « l’autre », la

maitrise de ses émotions et de ses réactions. Les émotions décrites par les trois infirmières

ne sont pas forcement à connotations négatives et synonymes de tristesse car elles

expriment également de la joie et de la gaieté. Aussi, il est primordial que le soignant

prenne soin de lui pour pouvoir prendre soin du patient. J’ai également compris que

d’autres moyens peuvent être utilisés par les soignants pour vivre au mieux leurs émotions

comme le travail en équipe ou le soutien des pairs. Ce travail de fin d’études est un réel

enrichissement pour moi dans l’exercice de mon futur poste d’infirmière. Il m’a permis de

prendre conscience de l’impact des émotions dans la relation soignant-soigné et dans le

bien être du soignant et aussi de l’importance de se sentir en osmose avec soi-même. De

plus, il m’a apporté énormément d’assurance dans le changement de mes représentations.

J’espère qu’il pourra également apporter de l’aide à d’autres professionnels dans cette prise

de conscience sur la force des émotions et pourquoi pas dans le changement des

représentations de certains soignants sur leur vie émotionnelle. En effet, certains

professionnels se laissent influencer soit par leurs représentations soit par la vision que

l’institution souhaiterait qu’ils aient. Le cheminement de mon travail m’amène à présent à

réfléchir à un nouveau travail de recherche avec la problématique de départ suivante :

Quelle place accorde l’institution au travail émotionnel des soignants et quels moyens

sont mis en place pour les aider à faire bon usage de leurs émotions ?

Page 39: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

34

J’aimerai conclure ce travail avec une phrase d’Isabelle Filliozat « Personne ne gagne en

liberté à réprimer ses émotions » (Filliozat, 2001, p.292)......................................................

Page 40: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

35

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Citation de départ:

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Page 44: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

39

Image:

Image de la page de garde trouvée avec le moteur de recherche Google avec le mot clé

« émotions ». Repérée à http://papapositive.fr/25-outils-methodes-gestion-

emotions-enfants/

Image annexe n°3 trouvée avec le moteur de recherche Google avec le mot clé

« intelligence émotionnelle ». Repérée à https://www.intemotionnelle.com/quest-

ce-que-lintelligence-emotionnelle/ ;

Mémoire:

Leitao, M. (2012). Les émotions dans la relation entre le patient et l’infirmière dans les

soins à l’hôpital (Bachelor en Soins Infirmiers, Haute Ecole de Santé, Fribourg).

Repéré à https://doc.rero.ch/record/31587/files/LEITAO_Monica.pdf ;

Page 45: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

40

Annexes

Page 46: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

41

1) Annexe n°1 : Guide d’entretien

o Quel âge avez-vous ?

o Depuis quand exercez-vous ?

o Depuis quand exercez-vous dans ce service ?

o Pouvez-vous me donner une définition générale d’une émotion ?

- Les émotions au travail :

o Est-ce important pour vous de ressentir des émotions lors des soins ?

o Quelles sont celles que vous rencontrez le plus ?

- La gestion des émotions :

o Que faites-vous de vos émotions ?

o Pensez-vous que la gestion des émotions requiert des qualités

personnelles internes?

o Cette gestion est-elle innée ou vient-elle avec l’expérience ?

o Quelles seraient les difficultés à ne pas gérer vos émotions ?

o Quelles sont les situations qui vous posent régulièrement des difficultés

dans la gestion des émotions ?

o Que faites-vous avant de rentrer chez vous ?

o Cela impact -il votre vie privée ?

- L’intelligence émotionnelle : Un outil de gestion des émotions a été proposé par

deux psychologues dans les années 90. Il s’agit de l’intelligence émotionnelle qui

réfère la capacité de reconnaître, comprendre et maîtriser ses propres émotions et à

composer avec les émotions des autres personnes.

o Connaissez-vous ce concept ?

o Pensez-vous l’utiliser consciemment ou inconsciemment ?

o Selon vous, l’intelligence émotionnelle peut-elle faciliter la gestion de vos

émotions ?

- L’épuisement émotionnel :

o Vous êtes-vous déjà sentie ou vous sentez-vous épuisée émotionnellement ?

o Est-ce une réalité pour vous ?

Page 47: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

42

o Quels sont les facteurs de cet épuisement ?

o Quelles sont les répercussions sur soi et sur la prise en charge des patients ?

- L’institution :

o Pensez-vous que l’institution reconnait ce travail émotionnel ?

Page 48: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

43

2) Annexe n°2 : Tableau comparatif des synthèses des entretiens

Infirmière N°3 Infirmière N°4 Infirmière N°5

Quel âge avez-vous ? 45 ans 28 ans 53 ans

Depuis quand exercez-vous ? Janvier 1997 soit 21 ans Juillet 2010 soit 7 ans Depuis 1987 soit 31 ans

Depuis quand exercez-vous

dans ce service ?

Septembre 2000 soit 17 ans Depuis janvier 2017 soit 1 an

Je travaillé avant en neurologie

Depuis 2004 soit 14 ans

Pouvez-vous me donner une

définition générale d’une

émotion ?

C’est un ressenti, une expression

physique ou verbale d’un ressenti par

rapport à une situation donnée

C’est un sentiment que l’on ressent

face à une situation. Il peut être

positif comme négatif.

C’est un état émotionnel qu’on peut

laisser aller ou pas.

Les émotions au travail :

Est-ce important pour vous de

ressentir des émotions lors des

soins ?

Oui, car cela fait parti intégrante du

soin. C’est aussi le respect de l’être

humain. On a beau être des acteurs

de soin, on travaille avec des êtres

humains. Il est important dans la

relation d’aide et la relation soignant-

soigné d’avoir des émotions

Oui. Cela prouve que l’on fait

attention à l’autre. Si on ne ressentait

rien, ce serait inquiétant. Même si on

ressent une émotion négative, c’est

important.

Ah oui c’est ce qui nous rend

humain.

Quelles sont celles que vous

rencontrez le plus ?

La douleur surtout morale

(conditions particulières au SMUR :

Le plus souvent de la joie, des rires et

parfois c’est de la tristesse. Très

Les émotions que je rencontre le plus

sont des émotions positives en

Page 49: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

44

des décès, des accidents, des

traumatismes). On rencontre plus des

émotions négatives que positives.

rarement de la colère il faudrait

vraiment nous pousser dans nos

limites.

général dans le quotidien. Des

émotions bénéfiques pour moi et le

patient. Je n’irai pas jusqu’à de la

joie mais de la gaieté. Je n’ai jamais

ressenti du mépris sinon on ne serait

pas dans le respect de l’autre. Le

dégoût peut arriver parfois.

Honnêtement, parfois des odeurs

peuvent nous incommodées mais ce

n’est pas la personne en elle-même

qui donne du dégoût. Après, on voit

quand même des choses difficiles sur

l’existence des patients mais ça ne

peut pas me rendre triste car si je suis

trop prise dans l’émotion, j’estime

que je ne pourrai pas les aider, ne pas

être à ma place pour être aidante pour

eux.

La gestion des émotions

Que faites-vous de vos

émotions ?

On essaye de les gérer. En fonction

des interventions, des émotions

négatives que l’on rencontre et de

Même en étant en libéral, on peut en

discuter en équipe car nous sommes

5 donc on arrive à en parler. On se

Oulala alors ici à la PASS, chacun

garde ses émotions et ses ressentis.

On n’a pas de réunion, de

Page 50: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

45

l’équipe avec qui on intervient

(équipe de 3 au SMUR : infirmier,

médecin et ambulancier). On se fait

un débriefing ensemble à postériori

pour libérer nos émotions, pour ne

pas qu’elle nous pèse. Avec le patient

lui-même on a des attitudes.

L’empathie en fait partie, tenir une

main, épauler, rassurer. C’est l’être

humain qui parle et pas seulement le

soignant. Il faut exprimer ses

émotions même si ce n’est pas

toujours simple. On ne peut pas

toujours le faire tout de suite mais à

posteriori. Si je ne peux pas le faire

avec l’équipe, je le fais avec mon

époux (qui a un vécu dans le même

métier que moi).

connait très bien. On a eu le cas

dernièrement avec un patient pour

qui la prise en charge ne se passer

pas très bien. On a pris le temps de

discuter en équipe tous ensemble. Je

pense quand même que c’est plus

simple en institution car il y a plus de

personnes présentes pour en discuter

et pour échanger. Après, je sais que

je garde beaucoup pour moi et je vis

avec. Ce n’est pas facile tous les

jours et on ne peut pas pleurer tous

les jours.

supervision. Par rapport à ce qu’on

vit avec les patients, c’est plus avec

les partenaires extérieurs à la PASS

que l’on va échanger. (Espace

solidarité, assistantes sociales). Je

pense qu’il faut se détachement là

pour pouvoir en parler ouvertement.

J’ai plus facilement envie d’exprimer

mes émotions positives que les

négatives. J’ai plus tendance à

contrôler les négatives car je sais que

les patients sont très attentifs à mon

non-verbal. Pour exprimer ses

émotions, il faut bien choisir le

moment et le lieu.

Pensez-vous que la gestion des

émotions requiert des qualités

personnelles internes? Cette

gestion est-elle innée ou vient-

Notre vécu personnel, notre âge, il y

a plein de facteurs qui font qu’on ne

les vit pas de la même façon Je pense

que cela vient de l’éducation, de la

Tout le monde ne réagit pas de la

même façon face aux émotions donc

il y a déjà une part de subjectivité et

une part de personnalité. On est plus

C’est lié à la personne, à ce que nous

renvoi le patient en face de nous.

L’expérience peut aider mais

l’essentiel c’est la connaissance de

Page 51: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

46

elle avec l’expérience ?

société. La génération précédente

taisait ses émotions. Les gens étaient

plus pudiques. La société a bien

évolué. L’âge et le vécu font que la

gestion des émotions devient innée.

La maturité professionnelle et

personnelle, l’expérience aident.

ou moins sensible. Tu apprends à

gérer au fur et à mesure de

l’expérience, avec le temps. Pour

mon premier décès, j’étais

complètement larguée. Tu apprends à

gérer et à avoir un comportement

adapté : par exemple pour un décès

d’un patient tu as le droit d’être triste

mais il faut le replacer dans le

contexte. Ce n’est pas quelqu’un de

ta famille et tu dois rester en retrait

par rapport à la famille. Je ne me vois

pas pleurer avec la famille, ce serait

déplacé. Il faut garder cette distance

tout en ressentant des choses. Tu n’es

pas censé t’attacher à un patient et tu

dois avoir le même comportement

avec tous les patients mais il faut

avouer que quelquefois tu as

tellement d’atomes crochus avec un

patient que tu t’attaches forcement.

soi-même.

Page 52: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

47

Quelles seraient les difficultés à

ne pas gérer vos émotions ?

Quelles sont les situations qui

vous posent régulièrement des

difficultés dans la gestion des

émotions ?

Les émotions posent toujours des

difficultés. Si je les gardais pour moi,

je ne serai plus infirmière. Des

situations particulières vécues en

SMUR te font te remettre en

question. Les émotions te font te

remettre en question sur tes pratiques

professionnelles. Je ne remets pas en

cause les soins mais par rapport à

tout ce que l’on se « prend dans le

visage » au SMUR. J’ai vécu des

interventions très difficiles qui m’ont

empêchée de rentrer chez moi de

suite. Elles étaient trop lourdes

émotionnellement. J’étais trop

impactée et mes émotions étaient

perturbées. Il faut en parler mais on

n’oublie pas, on vit avec et on

continue d’avancer avec. Ce n’est

pas seulement dans la vie

professionnelle car dans la vie

personnelle c’est la même chose avec

par exemple le décès de nos proches.

De ne pas réussir à faire un soin si je

suis trop stressée par exemple. Dans

ma fonction je ne peux pas me

permettre de stresser car je suis toute

seule au domicile et je ne peux pas

appeler un collègue à la rescousse. Je

ne peux pas perdre mes moyens,

c’est embêtant. A domicile c’est une

relation sur du long terme donc tu ne

peux pas montrer de « faiblesse » ou

perdre la confiance du patient.

La majorité de nos patients arrivent

en retard. Cet agacement doit être

montré sinon les patients

reproduisent sans cesse et ce n’est

pas satisfaisant pour nous et pour

eux.

Quand je suis au travail, j’arrive à

contenir mes émotions car on tient un

rôle de professionnel et on a un

cadre. Cependant, je suis allée à une

formation sur le parcours du migrant

dans un établissement à Lyon et il y

avait un récit sur le départ d’un

migrant depuis son pays avec tout

son parcours, son trajet, son arrivée.

Tu vois ça m’émotionne encore

(Infirmière très bouleversée et en

larmes). Je n’ai pas pu rester dans la

salle de conférence tellement j’ai été

bouleversée. Du coup, je pense

qu’inconsciemment, je n’évoque pas

ce sujet avec eux pour me protéger.

Quand j’entendais ce récit, j’ai fait le

Page 53: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

48

C’est ce qui nous permet de mûrir et

de grandir. On grandit chaque jour

quelque soit notre âge. Les décès

d’enfants resteront toujours

compliqués et inattendus, les morts

traumatiques également. Ce n’est pas

seulement des situations difficiles

mais en ensemble de facteurs. Il faut

que personnellement je sois bien

dans ma tête ce jour là pour accueillir

ses nouvelles émotions.

rapprochement ave mes patients et ce

qu’ils avaient pu vivre et ça m’a

submergé d’émotions. C’est une

manière de me protéger et je ne leurs

permets pas de me déverser les

choses. Je préfère qu’ils racontent au

secours catholique ou au médecin. Je

laisse cette part là aux autres. C’est

incroyable ce mécanisme de défense

que je mets en place pour ne pas être

touchée ni envahie par ce qu’ils

pourraient me raconter. Je m’appuie

sur d’autres personnes ressource car

ça me dépasse. Je les soutiens

autrement dans la relation d’aide. La

connaissance de soi même aide dans

le contrôle des émotions négatives

qui pourrait entrainer un sentiment

plus profond. Le fait d’avoir trop

d’émotions négatives peut entraîner

un sentiment fort de tristesse. Quand

on vit trop de choses négatives, on

est touché dans sa personne et il nait

Page 54: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

49

un mal être profond et qui dure.

Que faites-vous avant de rentrer

chez vous ? Cela impact -il votre

vie privé ?

J’ai l’avantage d’avoir un temps de

route avant de rentrer chez moi (25

minutes). Ce temps, seul, permet de

se vider la tête et d’arriver au

domicile sereinement. Il y a déjà une

prise de recul. On a besoin de faire le

vide toute seule pour en parler

ensuite différemment car tu n’es plus

sur l’émotion forte du moment, tu es

apaisée.

Moins que quand j’étais à l’hôpital

car on n’a pas les mêmes situations.

A domicile, c’est plus du quotidien,

les patients sont dans un état qui

leurs permet de rester à domicile.

Avant, à l’hôpital, j’amenai mes

émotions chez moi. Je repensai à ce

que j’avais fait, pas fait ou pas dit.

J’ai pas mal passé de nuits sans

dormir mais maintenant je ne le vis

plus de la même façon. Je me

détache totalement car on passe un

moment T chez la personne. On n’est

pas tout le temps chez eux

Ca n’impacte pas du tout ma vie

privée.

Un outil de gestion des émotions a été proposé par deux psychologues dans les années 90. Il s’agit de l’intelligence émotionnelle qui

réfère la capacité de reconnaître, comprendre et maîtriser ses propres émotions et à composer avec les émotions des autres personnes.

Connaissez-vous ce concept ?

Pensez-vous l’utiliser

consciemment ou

inconsciemment ?

Je ne connais pas cet outil. Je pense

l’utiliser sans le connaitre au vue des

critères énoncés. Je n’ai pas la

formation par rapport à ça mais je

J’ai conscience de ce que je ressens

et de ce que je peux exprimer ou

contrôler. Maintenant, je pense que je

commence à avoir de l’expérience et

Je pense que j’ai encore une

méconnaissance de moi-même car on

apprend tous les jours sur soi.

Cependant, chez les patients, je

Page 55: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

50

suis curieuse de le connaitre. je pense que c’est surtout cette

expérience et ce recul qui me font

gérer mes émotions car j’anticipe les

réactions, les situations et je cerne les

patients.

perçois pas mal de choses dans le

non verbal et dans leurs attitudes

parce qu’on ne parle pas la même

langue. C’est réciproque, je vais être

très attentive à eux et eux très

attentifs à moi. Je pense du coup que

comme ils m’observent beaucoup, je

ne peux pas montrer mes émotions

négatives et je les contiens.

Selon vous, l’intelligence

émotionnelle peut-elle faciliter

la gestion de vos émotions ?

Oui bien sûr comme je l’ai expliqué

précédemment. Le fait de se

connaitre, de maîtriser et de contrôler

ses émotions sont des outils de

gestion.

Oui, elle fait partie de la gestion

puisque elle reconnait la maitrise de

ses émotions.

En fait, c’est l’outil principal de la

gestion des émotions avec la

connaissance de soi-même

L’épuisement émotionnel

Vous êtes-vous déjà sentie ou

vous sentez-vous épuisée

émotionnellement ?

Oui ça m’est déjà arrivé de me sentir

vidée émotionnellement et je pense

que tous les soignants le ressentent

tôt ou tard.

Non jamais Ca peut arriver.

Est-ce une réalité pour vous ?

Institutionnellement sur le CHMS

c’est une réalité que les soignants

soient épuisés émotionnellement et

Bien sur. J’ai quitté l’hôpital pour

une très bonne raison et quand je vois

comment ça évolue, je pense que ça

Page 56: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

51

physiquement. n’ira pas en s’arrangeant. Je ne

regrette pas mon choix.

Quels sont les facteurs de cet

épuisement ?

Ce sont des facteurs de société,

institutionnels. On nous en demande

toujours plus, trop de pression.

La surcharge de travail, la non

reconnaissance de notre travail par

les supérieurs.

Il faudrait des formations en dehors

des services pour pouvoir se

repositionner, souffler, pour aider les

soignants en sortant du contexte de

l’hôpital. Sortir les soignants de leur

contexte de travail pour les aider.

Quelles sont les répercussions

sur soi et sur la prise en charge

des patients ?

Le burn-out, la négligence, le déni

dans certaine prise en charge,

l’automatisation de nos soins. Les

infirmiers ne seront plus carriériste à

l’avenir. Ils changeront de métier en

cours de route car ils seront épuisés

moralement à cause d’une pression

qui vient de la haut (institution).

Un ras le bol et une non valorisation

de notre travail.

Le soignant peut se sentir inutile et

pas à même d’aider le patient dans la

relation d’aide.

L’institution

Pensez-vous que l’institution

reconnait ce travail

émotionnel ?

Pas du tout. C’est un phénomène de

société.

Non pas du tout, très clairement. On

n’a pas de moment de parole dédié

dans nos plannings. Face à certaines

situations très complexes, il fallait

pleurer pour pouvoir parler avec les

Non, je ne crois pas. L’institution

n’est pas bienveillante avec ce que

vit le soignant. C’est quand même le

relationnel qui prime dans nos soins

et il n’y a pas de bienveillance et

Page 57: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

52

médecins et les cadres. Du coup, on

se le faisait entre nous dans l’équipe

car on a vite compris qu’on ne serait

pas aidés à ce niveau là par les

supérieurs. Très clairement,

l’institution ne se préoccupe pas du

tout des émotions des soignants.

d’accompagnement dans ce que l’on

ressent. On ne s’intéresse pas trop à

nous.

Page 58: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

53

3) Annexe n°3 : Modèle de l’intelligence émotionnelle proposé par

Daniel Goleman

Image repérée à https://www.intemotionnelle.com/quest-ce-que-lintelligence-emotionnelle/

Page 59: Gérer ses émotions à travers l’intelligence émotionnelle

Résumé :

Ce travail de fin d’études

effet, chaque soignant est confronté dans l’exercice de ses fonctions à des situations qui

vont le bouleverser ou le toucher émotionnellement. Le soignant va ressentir d

émotions : joie, tristesse, peur,

au patient. Que doit-il faire de ses émotions

soigné et pour ne pas être impacté personnellement

soignant ou la non-maitrise de ses émotions peuvent être des

soignant-soigné. Les recherches bibliographiques effectuées

menés ont montré qu’il est primordial de

reconnaitre, identifier et maitriser ses émotions

relation de soin. Ce concept, appelé l’intelligence émotionnelle, est un outil de gestion

interne des émotions peu connu des soignants mais qui s’avère eff

vivre sereinement ses émotions et pour éviter d’être confronté à une surcharge

émotionnelle trop importante qui pourrait faire basculer le soignant dans un épuisement

émotionnel. Cependant, quelle place accorde

émotionnel soignant et quels sont les moyens mis en place pour aider les soignants à

vivre avec leurs émotions?

Mots clés :

Relation soignant-soigné, g

émotionnel, travail émotionnel

émotionnel, burn out.

Ce travail de fin d’études s’intéresse de près à la vie émotionnelle des soignants. En

effet, chaque soignant est confronté dans l’exercice de ses fonctions à des situations qui

vont le bouleverser ou le toucher émotionnellement. Le soignant va ressentir d

: joie, tristesse, peur, ou encore colère qu’il pourra difficilement cacher face

il faire de ses émotions pour ne pas nuire à la relation soignant

soigné et pour ne pas être impacté personnellement ? La neutralité émotionnelle du

maitrise de ses émotions peuvent être des obstacle

Les recherches bibliographiques effectuées ainsi que les entretiens

menés ont montré qu’il est primordial de bien se connaitre soi-même p

reconnaitre, identifier et maitriser ses émotions et ainsi concilier vie émotionnelle et

. Ce concept, appelé l’intelligence émotionnelle, est un outil de gestion

interne des émotions peu connu des soignants mais qui s’avère efficace à la fois pour

ses émotions et pour éviter d’être confronté à une surcharge

émotionnelle trop importante qui pourrait faire basculer le soignant dans un épuisement

quelle place accorde aujourd’hui l’institutio

et quels sont les moyens mis en place pour aider les soignants à

?

, gestion des émotions, intelligence émotionnelle

ravail émotionnel, outils de régulation des émotions

54

s’intéresse de près à la vie émotionnelle des soignants. En

effet, chaque soignant est confronté dans l’exercice de ses fonctions à des situations qui

vont le bouleverser ou le toucher émotionnellement. Le soignant va ressentir des

qu’il pourra difficilement cacher face

pour ne pas nuire à la relation soignant

émotionnelle du

obstacles à la relation

ainsi que les entretiens

ême pour pouvoir

concilier vie émotionnelle et

. Ce concept, appelé l’intelligence émotionnelle, est un outil de gestion

icace à la fois pour

ses émotions et pour éviter d’être confronté à une surcharge

émotionnelle trop importante qui pourrait faire basculer le soignant dans un épuisement

l’institution à ce travail

et quels sont les moyens mis en place pour aider les soignants à

ntelligence émotionnelle, impact

utils de régulation des émotions, épuisement