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cité de la musique François Gautier, président Brigitte Marger, directeur général

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cité de la musiqueFrançois Gautier, présidentBrigitte Marger, directeur général

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Cuba, mondialement célèbre pour ses rythmes de danse, reste très lar-gement méconnue quant à ses autres genres musicaux. En particulieren France. Cela tient sans doute à une certaine indifférence qui s’esttoujours manifestée dans notre pays pour les cultures de langue espa-gnole, et au fait que pendant les trente ans qui ont suivi la Révolution(1959-1989) l’isolement de Cuba par rapport à l’Europe occiden-tale a été quasi total.Pourtant, la créativité musicale n’y a pas subi de baisse qualitativejusqu’à aujourd’hui. Il est même des domaines où elle a connu undéveloppement spectaculaire. Cuba reste un extraordinaire viviermusical dont le rayonnement mondial, aussi important qu’il soit, euégard à la taille de l’île, n’est pourtant pas à la mesure de ses richesses.Depuis le XVIe siècle, ce minuscule confetti de l’empire colonial euro-péen a vécu une histoire musicale marquée par la capacité à assimi-ler très vite tous les apports extérieurs : on jouait du Haydn et duGossec à la Havane dès le milieu du XVIIIe siècle, des opéras italiensdès le début du XIXe ; le Sacre du printemps y est devenu une référencemajeure dès 1920 et les premiers orchestres de jazz cubain sont appa-rus en 1928 !Cette précocité, cette curiosité sans égal dans aucun pays du tiersmonde s’est toujours alliée à une capacité de mélanger les influencesles plus diverses pour faire naître des genres musicaux nouveaux,spécifiquement cubains. Et si le terme de « créolité » a un sens, c’estbien à Cuba qu’il le doit. Dans cette société pluri-ethnique, en dépitdu racisme de bien des colons blancs, une authentique culture métisseest née très tôt, au confluent des apports espagnols, français et afri-cains. La musique cubaine est en effet (avec sa cousine brésilienne)l’une des plus belles mulâtresses du Nouveau Monde. Depuis troissiècles, musiques savantes, musiques populaires et rituels religieuxn’ont cessé de s’interpénétrer et de se nourrir mutuellement. Et nom-breux sont aujourd’hui les musiciens qui savent passer, avec le plusgrand naturel, d’un genre à l’autre ; qui évoluent avec un égal bonheurdans des contextes très diversifiés.

Gérard Tourtrol

avec le soutien de la compagnie aérienne AOM et de FIP (Radio-France)

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jeudi 11 juin - 14h30 / amphithéâtre du musée

jeudi de la c i téDanses des Caraïbes : tradition et métissages

« le processus de créolisation »par Dominique Cyrille, ethnomusicologue« les danses cubaines »par Isabelle Leymarie, musicologue, pianiste« Katherine Dunham, pédagogue »par Christiane de Rougemont, professeur et directrice de l’école Free Dance Song« vers une danse afro-antillaise contemporaine »par Chantal Loïal, danseuse et chorégraphe de la compagnie de danseafro-antillaise Dife Kako

jeudi 11 juin - 20h / amphithéâtre du musée

cinéma au muséeArriba de la Bola (histoires du Carnaval de la Havane)film de Claude SantiagoFrance, 1996, 92mn, coul.

Arriba de la Bola évoque l’histoire du carnaval de la Havane au travers d’archives quivont du début du siècle à la révolution cubaine, ainsi que par des images tournéespar le réalisateur Claude Santiago en 1990, 1994 et 1996. Dans cette série de« tableaux » articulés autour des trois principaux groupes du carnaval de la ville, lefilm cherche, au-delà des clichés, à révéler la vision que les Cubains ont de leurpropre carnaval. Loin de n’être qu’une fête colorée et délirante, ce film met égale-ment en scène une mémoire collective, meurtrie par le souvenir de l’esclavage.

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vendredi 12 et samedi 13 juin - 18h rue musicale - parvis de la cité - place de la Fontaine-aux-lions

le carnaval des pet i ts t rot toirs

Christian Rollet, direction artistique

Elèves de CM1 et CM2 des écoles Victor Hugo et Eugène Varlin d’Aubervilliers (93)Huguette Dhalenne, Alain Bordaçarre, Laurent Huguet,Sylvie Bouissonnié, Joël Nauche, enseignantsAnne Quelen, coordination pédagogique (Education nationale)Brigitte Fouché, coordination pédagogique (CNR Aubervilliers / Educationnationale)

Baron Samedi :Michel Boiton, Michaël Boudoux, Fabien Kanou, Christian Rollet, percussions

Josselin Donatien, Laurent Erdos, Axel Lecourt, EmmanuelSeguin, musiciens, animateurs des ateliers de construction d’instru-ments et de pratique musicaleCatherine Laval, costumes

Jean-Cyrille Burdet, régie artistique

le carnaval de Sant iago

La Conga de Los Hoyos :Sebastián Herrera Zapata « Chan », jefe (chef)Felix Bandera Bles, chef des percussions, fondoRamon Camacho Basauno « Monguito », quintoLuis Mariano Garbey Coroneaux « Nene », fondo

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Felix Bandera Malet « Pupi », requintoJesus A. Milanes Duribes, redoblanteAmerico Estrada Rodriguez, fondoEnrique Merino Arango « Palilo », requintoRafael Quesada Rivera « Felo », fondoPorfirio Escalona Mineto « Maestro », campanaAbelardo Cobas, quintoJuan Cabado Laporte, redoblanteArelis Nariño Herrera, danseuse, « Reina de Plaza »Maritza Hernandez Diaz, danseuseTomas Hetchavarría Asanza, danseur, percussionVladimir Ibarra Paisan, corneta chinaNoel Perez, pendones (bannière), chœurLuis Fernandez Rodriguez, campanaLuis Alberto Beltran Carvajal, pilón

(durée du spectacle : 1 heure 45)

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musiques de Cuba

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Les Petits Trottoirs

Sur les trottoirs où il fait chaudDes enfants grattent allègrementDes bouts de bois, tendent des peauxEt les plus grands passent en souriant.

RefrainQu’est-ce qu’ils préparent si frébrilement ?Entre leurs mains il y a de l’espoir.C’est un travail de géant,Le carnaval des petits trottoirs.

Ils viennent du Nord, dans les montagnesIls viennent du Sud, dans les rizièresDe petits êtres des campagnes,Gamins des villes, gosses de frontières

Les voilà prêts, la marche commenceTous dans la rue fixent leur regardLe ciel résonne, la couleur danseEt les ti-bois parlent aux sabars

RefrainBrûlons toutes nos vieilles querellesPartons en rythme, faisons marcherC’qui émoustille nos p’tites cervellesLes pieds, les mains et l’amitié.

Quand c’est trop lourd, on prend un charUn son c’est fait pour voyagerCe qu’il emporte, c’est notre savoirDans toutes les langues il peut parler.

Mêm’ si on est tous différentsUne chose rassemble et c’est pratiqueLes hommes, les femmes, les continentsC’est leur amour de la musique.

Le rythme est comme une fuséeQui porte au loin tous nos émoisEt le partage de nos idéesTient à la chute d’un rideau d’soie.

Sur les trottoirs de la citéC’est pas le moment d’se dire adiosOn se mélange sans hésiterA la Conga de Los Hoyos.

C. R.

le carnaval des pet i ts t rot toirs

Le Carnaval des petits trottoirs réunit 104 enfants costumés qui uti-lisent des instruments fabriqués par leurs soins, mêlés à des instrumentstraditionnels de facture plus délicate. A l’exemple des grands dépla-cements de foule que l’on observe dans de nombreux pays (des dépla-cements qui amènent les gens de la campagne ou des quartierspériphériques vers le centre de la ville lors des réjouissances annuelles),ce spectacle consiste en un mouvement sonore illustré par la disper-sion des enfants (dans la rue musicale) puis par leur rassemblementautour d’un foyer (une scène centrale focalisant la « migration »), puispar le départ d’un défilé qui rejoint les musiciens de la Conga de LosHoyos à l’extérieur. La fête devient commune : la Conga de LosHoyos joue parmi les enfants son propre répertoire et le groupe BaronSamedi établit un trait d’union - parfois iconoclaste - entre les deux.

Christian Rollet

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le carnaval de Sant iago

A l’inverse du carnaval de La Havane qui n’est pour beaucoup d’ha-bitants de la ville qu’un joli spectacle observé de l’extérieur, celui deSantiago est une véritable explosion collective qui submerge toutela cité orientale pendant trois jours et trois nuits, à la fin du mois dejuillet. Dans tous les quartiers, le rhum coule à flots ; la foule chanteet danse en prenant part aux défilés des comparsas* et des congas*.L’histoire de ce carnaval remonte au XVIIe siècle, à l’époque où des pro-cessions religieuses avaient lieu le 25 juillet pour célébrer le jour dela Saint Jacques, patron de la ville. Les esclaves membres des cabildos*(issus des différentes « nations » africaines) y prenaient aussi part,mais à la fin du cortège, avec leurs « rois » et leurs « reines » parés devêtements somptueux.Tous chantaient et dansaient en portant desétendards ou en jouant des percussions. Au XIXe siècle, les quartiersdu Tivoli et de Los Hoyos ont commencé à se peupler de « nègres fran-çais », venus de Saint Domingue et amenant avec eux les rythmesirrésistibles du cinquillo. Ce sont également eux qui ont contribué àmener les luttes clandestines pour l’indépendance au sein de la sociétéd’entraide El Cocoyé.Dans le carnaval se différencient aujourd’hui les comparsas* qui por-tent des déguisements unis et dansent des chorégaphies de groupe ;les paseos* qui comportent un orchestre d’instruments à vent ; etenfin les congas* (groupes de percussionnistes jouant la musique dela comparsa*) qui n’attachent guère d’importance aux costumesquand ils jouent seuls, mais qui, avec la comparsa*, veulent emporter(en espagnol arrollar) la foule sur leur passage au rythme des per-cussions, des tambours de freins de camions martellés et des 5 notesde la corneta china, un hautbois chinois au son si puissant et nasillardqu’on peut l’entendre de l’autre bout du port. La population santia-guera a fait son choix depuis longtemps : elle vit le carnaval en défer-lant avec les héritiers du Cocoyé : La Conga de Los Hoyos.

G. T.

* termes expliqués dans le glossaire page 26

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vendredi 12 juin - 20h / salle des concerts

la rumba

avec notamment :Avísale a la vecina (texte et traduction p. 11)El transformadorTonada guaguancó para Celina GonzalezOyá y Abakuá(durée : 1 heure 30)

Clave y Guaguancó :Amado de Jesus Dedeu Fernandez, directeur musical, chant, percussionDamarys Driggs Rodriguez, Caridad Esther Paisún Garbey, MarioFacundo Rodriguez Pedroso, Amado Dedeu Garcia, Santiago GarzónRill, Lino Perez Wilson, Pascual Nelson Izquierdo Lopez, percus-sion, chant, dansePedro Francisco Almeida Berriel, Arturo Martinez Cabrera, Cristobal Larrinaga Cabrera, percussion, chantLeonardo Plaches Lara, percussion mineure, chant

entracte

le punto et la guaj i ra

avec notamment :Que viva Changó (texte et traduction p. 12)Yo soy el punto Cubano(durée : 1 heure)

Celina Gonzalez, Lazaro de Jesus Dominguez, chantJavier Francisco Dominguez Alonso, bongoFrancisco Bonifacio Dominguez, tumbadorasAndres S. Cruz Lazo, basseCarlos Perez Nolazco, trompetteJose Luis Trina Hernandez, piano

concert enregistré par France Musique

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la rumba

Ce genre musical, presque inconnu en dehors de Cuba, n’a rien àvoir avec la version édulcorée et commerciale du son* populariséeaux Etats-Unis et en Europe à partir des années 30 sous le mêmenom. La rumba* traditionnelle est d’abord une expression profane,collective et spontanée, des Noirs cubains appartenant aux milieuxdéfavorisés. Elle est à la fois chantée, jouée (seulement avec des per-cussions) et dansée. A tel point que le terme rumbear est devenusynonyme de « faire la fête » : à Cuba encore aujourd’hui, il suffitd’être entre amis et d’avoir du rhum pour qu’une rumba commenceavec des instruments de fortune. Née avant l’Abolition dans les bar-raquements des esclaves, la rumba* s’est développée à la fin du siècledernier avec la concentration des Africains dans les zones semi-ruralesproches des sucreries et avec leur urbanisation massive dans les quar-tiers pauvres de La Havane et Matanzas, au Nord-Ouest de l’île.Cette rumba* était pratiquée dans les callejones (les ruelles) et dans lessolares* (les cours des habitations collectives). Certains quartiers deLa Havane sont d’ailleurs devenus légendaires dans la mémoire popu-laire pour leurs fêtes et leurs rumberos : Cayo Hueso, Jesus Maria,Belen, Los Sitios, El Cerro et Pueblo Nuevo. Victime des préjugésracistes de la bourgeoisie cubaine, méprisée, considérée comme leproduit d’une sous-culture immorale et primitive, la rumba* s’estpourtant propagée de quartier en quartier, jusqu’à influer sur d’autresgenres de musique populaire (en particulier le son*) et voir ses rythmesrepris dans un format instrumental plus moderne par ArsenioRodriguez, Benny Moré et le groupe Irakere.A l’origine, on utilisait comme percussions des tiroirs de commodes,une paire de fourchettes ou des poëles à frire. Apparurent ensuiteles cajones* (caisses en bois de différentes tailles ayant servi pourimporter de la morue séchée), puis les cáscaras (petits troncs d’arbresévidés et battus avec deux baguettes qu’on appelle aussi catas). Maisles instruments principaux qui installent la polyrythmie de la rumbasont maintenant les tumbadoras* (appelées hors de Cuba congas*) : cestambours verticaux joués le plus souvent par trois musiciens. La plusgrave des tumbadoras*, appelée hembra (femelle) ou salidor, maintientle rythme de base. La seconde, appelée macho (mâle) ou tres dos, per-met un jeu plus libre. Quant à la plus aiguë, nommée quinto* ou repi-

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cador, elle improvise constamment. La stabilité rythmique de l’en-semble est assurée par les claves (deux morceaux de bois entrechoqués,en général, par le chanteur soliste) sur le patron de la rumba* (laclave* 1, 2, 3 - 1, 2).Le soliste commence chaque chant par des vocalises sur des syllabessans signification que l’on appelle diana et où se fait sentir, dans l’or-nementation, l’influence du flamenco. Accompagné par les percus-sions, il chante ensuite des paroles qui, dans la rumba* de la rue,sont souvent improvisées en fonction de la situation, généralementsous la forme de décimas. Il indique alors au chœur quelle phrasedoit être reprise en guise de refrain, en alternance avec les improvi-sations qu’il continue à développer. Mais il existe aussi tout un réper-toire de compositions fixes et de couplets traditionnels utilisés parles rumberos professionnels. Parmi les compositeurs les plus prestigieuxdu passé figurent Ignacio Pineiro, Chano Pozo, Calixto Callava etGonzalo Asencio alias Tio Tom.Il existe trois variantes principales de la rumba* qui se différencientsurtout par leur tempo et par les danses qui leur correspondent.Le Yambú*, né au XIXe siècle et tombé en désuétude, n’est plus pra-tiqué que par les groupes professionnels. Il est souvent accompagnépar les cajones*. C’est le style le plus lent. Il est dansé en couple et sachorégraphie sensuelle a laissé la place, avec le temps, à des mouve-ments par lesquels les danseurs raillent la maladresse des vieillards.Le Guaguancó est la forme de rumba* la plus répandue. Il composeune véritable chronique sociale de la vie des solares* : le chant évoqueles amours malheureux et les événements survenus dans le quartier.La danse, là aussi pratiquée en couple, y est plus vive : elle est fondéesur un jeu d’attirance et de rejet, d’approche et d’esquive entrel’homme et la femme. Le danseur cherche l’occasion de faire, avec lamain, la jambe ou le pelvis, un geste rapide qui symbolise la posses-sion sexuelle. Et la danseuse, pour l’esquiver, doit croiser les bras,se cacher derrière un pan de sa robe ou faire un mouvement deshanches qui la mette à l’abri.Quant à elle, la Columbia* est caractérisée par son tempo rapide etl’emploi d’expressions venues des langues africaines. Elle est dansée parun homme seul qui établit un dialogue rythmique avec les improvisa-tions du quinto*. Sa chorégraphie très acrobatique a subi l’influencedes danses de diablitos de la société secrète abakuá* issue de la nation

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carabalí. Très virtuoses, les danseurs de columbia* inventent chaquejour de nouvelles figures et n’ont rien à envier aux breakdancers.Les groupes de rumba* les plus novateurs ont également intégré àleur répertoire des chants en langue abakuá* et inclus, parmi leurs ins-truments de percussion, les tambours batá* de la religion yoruba*,donnant ainsi naissance au style batarumba.

la musique paysanne : le punto et la guaj i ra

Les guajiros, petits paysans cubains, sont les descendants des immi-grants espagnols venus, à partir du XVIe siècle, chercher une terre à cul-tiver. Ils provenaient des régions les plus pauvres de l’Espagne : lesAsturies, le Leon, l’Estramadure, l’Andalousie, et même les îlesCanaries.Très tôt à Cuba, des fêtes paysannes ont commencé à ras-sembler amis et voisins autour de repas, de jeux, de ventes d’artisa-nat mais aussi de chants et de danses. Ces fêtes qui se déroulaient dansune ambiance familiale, portaient différents noms en fonction de larégion de l’île : guateque, parranda ou changui*. S’y produisaient desgroupes musicaux formés entre parents et voisins où l’on dansait lezapateo andalou et les rumbitas (antécédents de la guajira* et du son*)depuis longtemps disparus.Aujourd’hui la musique campesina n’est plus strictement réservéeaux petits agriculteurs blancs. La population s’est métissée, de mêmeque les genres musicaux. Dans les guateques les goûts ont évolué :on différencie désormais les musiques jouées pour être écoutées (lepunto* et la guajira*) des musiques jouées pour être dansées (le son*et la guaracha).Le punto* est le type de chant le plus ancien. Il remonte à la fin duXVIIIe siècle et dénote une influence des Canaries et du Sud del’Espagne. Dans ses improvisations, le poeta y utilise des décimas, desgroupes de dix vers octosyllabes rimés. Mais il existe aussi des formesde duels rimés entre poètes qui doivent improviser des décimas sur unthème imposé. Ces joutes très populaires et parfois diffusées par laradio sont connues sous le nom de controversas.La forme d’expression mélodique du punto* est la tonada, un air aucaractère modal très marqué qui peut être suivant les cas majeur oumineur. Il existe deux formes principales de punto*.

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Dans le punto libre venu de la partie occidentale de l’île (la provincede Pinar del Rio), le chanteur ne soumet pas sa tonada à un temporégulier. L’accompagnement instrumental suit le rythme du texte.Dans le punto fijo (fixe) qui est originaire des régions centrale etorientale, le chanteur suit une métrique régulière soumise à l’ac-compagement instrumental. Celui-ci se développe à partir d’une for-mule mélodico-rythmique syncopée qui se répète constamment.Dans ces deux styles, le chant alterne avec des interludes au cours des-quels les instruments à cordes improvisent avec virtuosité. Les pre-miers ensembles de punto ne comportaient que le laud, une mandolined’origine espagnole à 6 doubles cordes, et le tres. Plus tard se sontadjoints la guitare ainsi que des percussions (claves*, maracas, güiro*,tumbadora* et bongo*).La guajira* développe la même thématique bucolique que le punto*.Elle célèbre le travail des paysans qui taillent le maquis, la machete àla main, et la beauté des paysages verdoyants dominés par les pal-miers royaux dans le calme du petit matin. Elle a pourtant une ori-gine toute différente : la guajira* est une forme de chanson créée audébut du siècle par des compositeurs érudits et citadins pour lesscènes des théatres. Mais elle a, par la suite, été assimilée par la popu-lation paysanne qui a transformé la guajira de salon en un genre pra-tiqué par des créateurs populaires. Initialement, elle faisait alterner lesrythmes de 3/4 et de 6/8, tout en comportant une première partieen majeur et une seconde en mineur. Elle a, depuis lors, subi l’in-fluence du son. L’exemple le plus célèbre de guajira-son n’est autre quela guajira guantanamera composée en décimas par Joseïto Fernandez.

G. T.

* termes expliqués dans le glossaire page 26

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Avísale a la vecina

Avísale a la vecinaque aquí estoy yoAvísaleAvísale - CoroAvísale a la vecinaque aquí estoy yoque venga para que escuchedulce cantardespues ne quiero que digaque di la rumba y no la invitéque venga paraque aprecie sonoridadde nuevo, de nuevo, de nuevoyo quiero oír este duoAvísale a la vecinaque aqui estoy yoque venga para queescuche dulce cantardespués no quiero que digaque di la rumba y no la invitéQue vengapara que aprecie sonoridadMi coro, mi coro, mi coroDonde andaba anocheque bien te busqué (bis)Recorri La Habanay no te encontréAndaba con mamitayá la rumba fui (bis)Me gusto su cantoy allí me quedéBembé iroco BembéIroco lo mio me llamaBembé iroco Bembéguaguancó coro millaréBembé iroco Bembépero avísale a mamaitaBembé iroco Bembédile que Clave y Guaguanco llegoBembé iroco Bembépero que rico suena mi cajónBembé iroco Bembérumbero mira mi guiro te llamaBembé iroco Bembé

Préviens la voisine

Préviens la voisineQue je suis làPréviens-laPréviens-laPréviens la voisineQue je suis làQu’elle vienne pour écouterCette douce chansonQu’elle ne dise pas aprèsQue j’ai fait une rumba et que je ne l’ai pasinvitéeQu’elle vienne pour apprécier lamusiqueEncore, encore, encoreJe veux écouter ce duoPréviens la voisineQue je suis làQu’elle vienne pour écoutercette douce chansonQu’elle ne dise pas aprèsQue j’ai fait une rumba et que je ne l’ai pasinvitéeQu’elle vienne pour apprécier lamusique(il appelle les chœurs)Où étais-tu hier soirJe t’ai cherchéJ’ai parcouru La Havaneet je ne t’ai pas trouvéJ’étais avec mamitaet à la rumba je suis alléj’ai aimé les chantset j’y suis restéBembé iroco BembéIroco lo mio me llamaBembé iroco Bembéguaguancó coro millaréBembé iroco Bembémais préviens mamaitaBembé iroco Bembédis lui que Clave y Guaguanco est làBembé iroco Bembéécoutes comment sonne mon « cajón »Bembé iroco Bembé« rumbero » mon guiro t’appelleBembé iroco Bembé

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Que viva Changó

Santa Barbara benditapara ti surge mi liraSanta Barbara benditapara ti surge mi liray con emoción se inspiraante tu imagen bonitaQue viva Changó (x3)Que viva Changó señoresCon voluntad infinitaarranco del corazónla melodiosa expressionpidiendo desde el cielonos envie tus consuelosy tu santa bendicionQue viva Changó (x3)Que viva Changó señoresVirgne venerada y puraSanta Barbara benditaVirgen venerada y puraSanta Barbara benditanuestra oracion favoritallevamos hasta tu alturaQue viva Changó (x3)Que viva Changó señoresCon alegría y ternuraquiero llevar mi trovadaalla en tu mansion sagradadonde lo bueno iluminajunto a tu copa divinay tu santissima espadaQue viva Changó (x3)Que viva Changó señoresEn nombre de mi nacióSanta Barbara te pidoEn nombre de mi naciónSanta Barbara te pidoQue rieges con tu fluidotu sagrda bendicionQue viva Changó (x3)Que viva Changó señoresYo tambien de corazónte daré mi murmuriocon orgullo y poderioharé que tu nombre subay en nombre de me Cubaeste saludo te envioQue viva Changó (x3)Que viva Changó señores

Celina Gonzalez et Rutilio Domiguez

Vive Chango

Santa Barbara bénitepour toi chante ma lyreSanta Barbara bénitepour toi chante ma lyreet s’inspire émuede ta belle imageVive Chango (x3)Vive Chango MessieursAvec une volonté éternelleJ’arrache de mon cœurCette expression mélodieusedemandant que du ciel,tu nous envoies ton réconfortet ta sainte bénédictionVive Chango (x3)Vive Chango MessieursVierge vénérée et pureSanta Barbara béniteVierge vénérée et pureSanta Barbara bénitenotre plus belle oraisonnous élevons à ta grandeurVive Chango (x3)Vive Chango MessieursAvec joie et tendresseje veux que mon poème arrivelà-haut dans ta demeure sacréeilluminée par le bienau côté de ta coupe divineet de ta sainte épéeVive Chango (x3)Vive Chango MessieursAu nom de ma nationSanta Barbara je te demandeAu nom de ma nationSanta Barbara je te demandeque tu nous donnesta sainte bénédictionVive Chango (x3)Vive Chango MessieursMoi de mon cœurje te donnerai ma prièreavec fierté et puissancej’élèverai ton nomet au nom de ma terreje te salueVive Chango (x3)Vive Chango Messieurs

traduction Jacques Mondoloni

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samedi 13 juin - 16h30dimanche 14 juin - 15h / amphithéâtre du musée

le bolero et le f i l in

avec notamment :20 años (texte et traduction p. 16)

Anais Abreu, chantPepesito Reyes, pianoFelipe Cabrera, basseAlberto Placencia, percussions

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le bolero

Le bolero* cubain est un genre chanté et dansé complétement différentde son homologue espagnol. Héritier de la chanson hispanique, il a étéfortement teinté par les romances françaises, les airs d’opéra et lachanson napolitaine. Mais, suite à un processus de « créolisation »,son rythme, proche de celui de la danza et de la habanera, est marquépar une mesure en 2/4 qui diffère de celle à 3/4 de la danse espagnole.Dans le bolero* traditionnel, les éléments hispaniques et afrocubainsapparaissent à égalité dans la ligne d’accompagnement de la guitareet dans la mélodie où les accents percussifs du cinquillo cubain impo-sent leur loi aux paroles. Ce style d’accompagnement, mélange dejeu rasgueado (en batterie) et de jeu punteado (pincé) est arrivé àCuba grâce à des contacts avec les sones mexicains du Yucatan dèsles années 1820. Quant au cinquillo (cellule rythmique de cinq notessyncopés), il vient d’Afrique via Saint Domingue.Le bolero* commence à être pratiqué, en solo et parfois en duo, par lestroubadours de Santiago dans les années 1880. Ils circulent dans larue et chantent leurs sérénades sous les balcons. Leur mouvementmusical est appelé la trova,après que le premier bolero* a été composépar José Pepe Sanchez, chanteur et guitariste autodidacte. Au débutdu siècle, plusieurs troubadours de l’Oriente s’établissent dans lacapitale et y popularisent ce style sentimental au rythme cadencé.Les voix et les guitares de Sindo Garay, Alberto Villalon et RosendoRuiz font, dès lors, résonner le bolero* dans les peñas* et les cafés deLa Havane. A la fin des années 20, il se mélange avec le son grâce auTrio Matamoros qui compose le premier bolero-son - Lagrimas negras -doté d’une seconde partie plus enjouée.Si le bolero* évoque en général les amours malheureux, l’abandonou encore la traitrise des femmes, il est pourtant dansé en coupleavec toute la volupté qu’autorise sa lenteur et l’enlacement sensuel descorps. Et son succès doit beaucoup à des paroles qui glorifient lapassion, exaltent jusqu’au délire le sentiment amoureux. Le bolero*entre ainsi dans le répertoire des charangas* et des conjuntos* de son.Apparaissent alors quelques perles encore présentes dans la mémoirede tous les Cubains : Dos gardenias d’Isolina Carrillo, Convergenciadont la mélodie tout autant que les paroles, chantées par MiguelitoCuni, sont d’une insolite beauté ; et aussi La vida es un sueño d’Arsenio

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Rodriguez, marqué au coin de la noirceur et d’un désespoir méta-physique. Dès l’avant-guerre, le bolero* court le risque de tomberdans le piège d’une production pléthorique aux textes lénifiants et auxharmonies très convenues.

le f i l in

Par réaction naît, à la fin des années 40, un mouvement musical,d’abord informel, qui cherche à privilégier une forme de chansonintimiste, plus riche harmoniquement et poétiquement. L’interprétationdu texte se veut plus personnelle et sentie : con filin (avec du feeling).Un petit groupe de très jeunes artistes commence à se réunir régu-lièrement, chez les uns ou les autres, dans les parcs et les cafés de LaHavane, pour créer et dire ses propres chansons. Beaucoup sont noirset bon nombre d’entre eux sont des guitaristes autodidactes, commeCesar Portillo de la Luz. Parmi les initiateurs de ce courant figurentaussi les guitaristes José Antonio Mendez et Nico Rojas, le joueur detres*, Nino Rivera, ainsi que les chanteuses Elena Burke et OmaraPortuondo. Ils reçoivent bientôt l’appui de quelques musiciens plusaguerris, en particulier de pianistes comme Frank Emilio, Bebo Valdeset Pedro Justiz « Peruchin » familiers avec le jazz.Dans le filin, le tempo est très lent ; l’harmonie prend le pas sur lamélodie et devient plus riche. Les compositeurs ont fréquemmentrecours à des modulations et à des accords dissonants (neuvièmes, trei-zièmes et quintes diminuées) proches de l’impressionnisme françaiset de la musique nord-américaine de l’époque.Parmi les chefs-d’œuvre du genre figurent Contigo en la distancia et Tú,mi delirio de Cesar Portillo de la Luz, ainsi que La gloria eres tú etNovia mía de José Antonio Mendez. Ce style aura une influence déci-sive sur les chanteurs Pablo Milanes et Silvio Rodriguez quand ilslanceront, à la fin des années 60, un nouveau courant : la nueva trova.

G. T.

* termes expliqués dans le glossaire page 26

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musiques de Cuba

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20 años

Qué te importa que te amési tú no me quieres yael amor que ya a pasadono se debe recordarFui la ilusión de tu vidaun día lejano yahoy representó el pasadono me puedo conformar.

Si las cosas que uno quierese pudieran alcanzartu me quisieras lo mismoque veinte años atrasCon que tristeza miramosun amor que se nos vaes un pedazo de almaque se arranca sin piedad

Maria Teresa Vera

20 ans

Que t’importe si je t’ai aimési toi tu ne m’aimes plus.L’amour passé,on doit l’oublier.Je fus l’illusion de ta vieun jour déjà lointain.Aujourd’hui je représente le passé,je ne peux m’y faire.

Si les rêves pouvaient se réaliser,tu me désirerais de la même façonque vingt ans en arrièreAvec quelle tristesse nous regardonsun amour qui nous échappec’est un morceau d’âmequi s’arrache sans pitié.

traduction Jacques Mondoloni

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samedi 13 juin - 20h / salle des concerts

Estampa de los Orishas(Image des Divinités)

Moyurba a Orumila (Moyugbacion) (texte et traduction p. 21)Canto al Olofín - Cantos acapella (Acara) - Eleggua - Yemayá -Oggún - Oshún - Shangó - Canata a Babalú Ayé

Lázaro Ros Callado, chant, direction musicaleFrancisco Valdes Velarde, chœursAlexander Martinez Arencibia, José Pablo Ocana, percussionsRogelio Ruiz Gonzalez, percussions, chœursMaria del Carmen Argudín Martinez, Lazaro Cantillo Ocanto, chantCecilia Mirta Ocanto Gonzalez, Lazaro Vladimir Enrique Silveira, danse

salsa

Candido Fabré, chantJuan Semanat Gallardo, chantJuan Cabrera Almeida, chant, güiro

Omar Pupo Sanchez, claviers, direction musicaleJorge Luis Gomez Navas, pianoLuis Hernandez Reyes, basseOscar Vasquez Lumbet, flûteLuis Amado Barosso Hierrezuelo, chant, violon IZuzell Maria Rodriguez, violon IIOrlando Antomarchi Hernandez, percussions, güiro, bongosRolando Salgado Palacio, congasBernardo Lopez Isaac, timbalesGabriel Fonsega Gonzalez, violon III

concert enregistré par France Musique

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la musique rel igieuse d’or igine afr icaine

Les esclaves, amenés de différentes régions d’Afrique et disperséssur les plantations, ont réussi à conserver ou à reconstruire certainesde leurs traditions religieuses. A l’époque coloniale, ils purent, sousla protection de l’église, créer des cabildos* confrèries et sociétésd’aide mutuelle formées autour d’un pôle ethnique ou nación. Parmices nations (Mandinga de Guinée, Mina du Ghana, Arara duDahomey, Carabali de la côte du Calabar, Congo du Zaïre etd’Angola...), l’une s’est distinguée par sa puissance numéraire et spi-rituelle : la nation Lucumi. Constituée des yoruba* du Nord-Ouest duNigeria actuel et de l’Est du Dahomey), elle a produit la Santeria* ouRegla de Ocha*, religion populaire la plus répandue aujourd’hui.La Santería est née d’une syncrétisation entre les saints (santos) catho-liques et les divinités (orishas*) du très riche panthéon yoruba*. Sesadeptes ont perpétué en cachette un culte lié à une cosmogonie et àdes rituels très complexes. Chaque sanctuaire (Ilé Ocha) est dirigépar un dignitaire (babalao) qui veille sur les objets sacrés du culte,pratique la divination, connait les plantes curatives et dirige les céré-monies qui mêlent étroitement prières (rezos), chants, musique etdanse. Les fidèles (santeros ou babaloches pour les hommes, santeras ouiyaloches pour les femmes) subissent une initiation et sont voués àun orisha* particulier qui peut les posséder pendant qu’ils chantentet dansent en son honneur, vêtus de ses couleurs et parés de collierset de bracelets qui lui sont dédiés. Sous l’effet de la transe, les fidèlesadoptent les traits de caractère de la divinité et peuvent même parleren son nom. Chaque sanctuaire est placé sous la protection d’un ori-sha* pour lequel une cérémonie est organisée tous les ans.Au cours de chaque rituel, les principaux orishas* sont invoqués tourà tour suivant un ordre fixe (oru). Pour chacun d’entre eux, il existeplusieurs chants spécifiques qui sont entonnés en langue yoruba parun soliste (akpwón*) auquel répond le choeur des adeptes. Ces chantsévoquent les récits mythiques (patakín) qui célèbrent les pouvoirssur la nature et les caractéristiques psychologiques de chaque ori-sha* dans ses relations amoureuses ou conflictuelles avec les autresdivinités. A chaque chant correspond un rythme particulier, battupar trois percussionistes spécialement initiés (Olubatá) sur les tam-bours sacrés yoruba*. Ces tambours à deux membranes en forme de

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sablier (batá) sont accordés pour reproduire les intonations de lalangue yoruba : ils « parlent » et produisent une polyrythmie com-plexe. Parmi les trois bata, c’est le plus grand et le plus grave appeléIya* (mère en yoruba) qui dirige le jeu (toque). Lui répondent l’itótele*de taille moyenne et le petit okónkolo*.Dans la cosmogonie yoruba*,Olofi est l’Être Suprême, le créateur del’univers. Orula est l’orisha* qui préside à la divination. Il est habillé envert et jaune, et correspond à saint François-d’Assise. Eleggua tient lesclés du destin : il ouvre et ferme les chemins.Vêtu de rouge et de noir,il est syncrétisé avec saint Antoine-de-Padoue. La déesse Yemaya règnesur la mer, source fondamentale de la vie. Habillée d’une robe bleueet blanche, elle a pour homologue catholique la Vierge de Regla, laville aux fortes traditions africaines située dans la baie de La Havane.Oggún est le dieu du fer. Violent et belliqueux il est vétu de vert etde noir. Il correspond à saint Pierre. Ochún est la déesse de l’amour,de la féminité et des rivières. Sensuelle et coquette, elle porte du jauneet se trouve syncrétisée avec la sainte patronne de Cuba, la Vierge dela Caridad del Cobre (Cobre est le village des mines de cuivre jaune).Changó est l’orisha* de la foudre, de la guerre et des tambours. Ildanse vêtu de rouge et de blanc, une hache à la main et a pour équi-valent sainte Barbe. Enfin, Babalú Ayé est le dieu invoqué pour gué-rir les maladies. Couvert de haillons comme un lépreux, il correspondà saint Lazare (ses couleurs sont le violet et le mauve).

le son

La région orientale de Cuba (Oriente) d’où provient Candido Fabré,possède des caractéristiques musicales très spécifiques. Distante dela capitale La Havane d’un millier de kilomètres, elle a toujours étémarquée par des particularismes très forts. Elle est aussi le creuset d’unriche métissage culturel où se sont mêlées influences espagnoles,françaises et africaines. Ses ports (Manzanillo à l’Ouest, Santiago auSud, et Guantanamo à l’Est) ont donné à la région une large ouver-ture sur la mer des Caraïbes et les pays riverains. Son climat, sondynamisme culturel, ainsi que le caractère chaleureux et exubérant deses habitants lui ont valu le surnom de Tierra caliente (terre chaude).Le son*, né en Oriente à la fin du siècle dernier, a joué un rôle fon-

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musiques de Cuba

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damental dans la formation d’une identité culturelle et d’uneconscience nationale cubaines. Il symbolise une façon de sentir etde vivre à travers laquelle se reconnaissent aujourd’hui tous lesCubains : une façon de vivre qui va bien au-delà de la musique, carle son* met en jeu des manières de parler, de bouger, de danser, d’ai-mer et de faire la fête. En un mot d’être ensemble.Le son* a exercé une influence extraordinairement puissante endehors de sa sphère d’origine. Après avoir envahi La Havane à par-tir des années 20, il a essaimé jusqu’à New York et a constitué la basede la salsa* dans les années 70. Ses premiers interprètes, venant descollines de l’Oriente, avaient déja inventé le tres*, une guitare à 3doubles cordes, les bongos*,une paire de petits tambours, et les mara-cas ; mêlant ainsi éléments européens (les cordes, l’harmonie) et élé-ments africains (la forme responsoriale du chant, la polyrythmie).D’abord structuré de façon très simple par un petit motif mélodiqueet un refrain bâtis sur le patron rythmique de la clave* (1, 2-1, 2, 3),le son* s’enrichit en atteignant la ville de Santiago. Il y intègre guitareet contrebasse, et acquiert un caractère narratif. La première sec-tion comporte désormais plusieurs couplets, alors que la seconde,le montuno* basé sur le refrain, fait alterner une improvisation vocale(ou instrumentale) et le chœur. Les bons chanteurs de son* (sone-ros) ont le don d’improviser sur n’importe quel thème de la vie quo-tidienne mais ils privilégient en général les relations amoureuses,l’érotisme (abordé au travers d’expressions à double sens), la sen-sualité des danseuses et aussi la cuisine.Une fois reconnu à La Havane, le son a encore élargi son instumen-tation. Il passe du format des sextetos à celui des septetos en s’adjoi-gnant une trompette. En 1940, le génial joueur de tres ArsenioRodriguez ajoute deux autres trompettes ainsi qu’un piano et une tum-badora*,pour donner à son conjunto* plus de puissance et de richesseharmonique. En 1955, Benny Moré, le plus grand sonero de l’histoirecubaine, lance sa banda gigante une grande formation basée sur lemodèle des orchestres de jazz. Depuis lors, même les charangas* - aupremier rang desquelles il faut citer la Orquesta Aragón - se sont misesà jouer et chanter du son*. Ce qui, de la part des musiciens cubains, estune façon de reconnaitre le dynamisme d’un genre qui a aussi biencontaminé le bolero* et la guajira*. Rien d’étonnant alors à ce que lessoneros d’aujourd’hui aillent, comme Candido Fabré, se frotter aumerengue dominicain et même à la cumbia colombienne.

G.T.

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MoyugbaciónMoyugbación (de ju iba ou juba : louer, révérer, respecter) consiste en une révérence solen-

nelle aux ancêtres de Lázaro Ros, initiés de la Regla de Ocha (culte rendu aux orishas), et qu’il

salue en les citant par leur nom mystique pour la plupart et par leur nom « civil » pour certains

autres. Nous citons quelques noms donnés par Lázaro Ros ainsi que leur traduction. En effet,

tous les noms propres de personnes en langue yoruba ont un sens commun.

A toutes les divinités célestes qui sont au dessus de nous, qui sont au pied de Olodumaré nous pro-

clamons notre respect ainsi qu’à la Terre et aux Cieux.

Obadimeji Roi deux fois couronné

Ogunfuncho Oggun nous donne sa protection

Echutolu Echu est le maître

Echú nike Echu nous a donné quelqu’un à chérir

Obajimi Le roi m’a réveillé

Babaejiogbe Père Ejiogné

Echubí Né par Echu

Ogundameji Ogunda

Ogunfunmito Oggun m’a rassasié

Obailu Roi du tambour

Iliuba Maître tambour du roi

Obadina Le roi a allumé le feu

Changodina Chango allume le feu

Ewingimi Les esprits m’ont réveillé

Olomidé La divinité de l’eau est arrivée

Oyadina Oya a allumé le feu

Echulade Echu a la couronne

Salut et respect à toutes les mères et à tous les pères de saints, à tous les anciens, fils d’Elegba (ou

Eleggua),qui sont au ciel,aux pieds de Olodumaré (le dieu suprême).Nous saluons la Terre et le Ciel.

L’assistance répond : Aché !!! (« que cette révérence soit bénie et acceptée !!! »)

Après vient un chant sur le toque Latopa pour Elegbá.

Ibara ago Mojuba Salutations Esu Esu je m’incline (bis)

Omode Kunru, ko ibarago Esu le petit enfant je m’incline

Ago mojuba Elegbá Echuloná Elegba Esu sur le chemin

traduction Christian Nicolas

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dimanche 14 juin - 16h30 / salle des concerts

du danzón au chachacha

avec notamment :La Negra Tomasa (voir p. 25)Angoa, El Niche, 8 de Junio (danzón)Muneca triste, Se llama Cuba (chachacha)Si te contará (bolero)Virgen de Regla (danzón)El Bodeguero (chachacha)Serenata (bolero)Escoba barrendera, El lapiz, Bilongo, El paralítico, La Ley (son)

Las Estrellas Cubanas :Antonio Sanchez « Musiquita », premier violonRicardo Cortés Garcia, second violonSantiago Linares Ortiz, troisième violon, chœurRené Orlando Beltran Borell, flûte, arrangements musicauxZenén Arrascaeta Ruíz, timbalesGuillermo Cabrera, chantErnesto Remigio Oviedo La Portilla, chantAntonio Luis Morales, chantGuillermo Isac Gonzelez Fonseca, bajo (basse)Francisco Perez Morel, tumbadorasEduardo Antonio Canas Oliva, piano

concert enregistré par France Musique

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du danzón au chachacha

Parmi les différents genres dansés de la musique populaire, trois stylesrelèvent de la même généalogie : le danzón*, le mambo et le chachacha*.Le danzón* nait en 1879 à Matanzas, avec la composition par le cor-netiste Miguel Failde de Las alturas de Simpson. Il s’inspire de lacontredanse d’abord apportée par les Anglais lors de leur occupa-tion de La Havane en 1762, puis par les planteurs français qui, fuyantla révolte des Noirs à Saint-Domingue, s’étaient installés dans l’Estde Cuba à la fin du XVIIIe siècle. La contredanse prend à Cuba uncaractère créole et, de danse de cour à figures, se transforme en dansede couples, devenant ainsi la danza marquée par son rythme de haba-nera (avec assimilation de quelques élements africains).Le danzón*,comme son précurseur la danza,est joué par un orchestreappelé tipica, composé de clarinettes, violons, cornet, trombone,ophicléide, contrebasse, timbales et güiro*. Il comporte une struc-ture nouvelle en forme de rondo : un paseo* répété après chacunedes autres parties, une section de clarinette, une de violon et une decuivres. En 1910, José Urfé avec sa composition El bombín de Barreto,dynamise le danzón* en lui ajoutant une partie finale plus syncopéesous l’influence du son oriental. A la même époque, les tipicas cèdentla place aux charangas* francesas, appelées ainsi parce que les Françaisfurent les premiers à introduire à Cuba le trio classique piano, violonet flûte. Ces charangas*,alors purement instrumentales (flûte, violons,piano, contrebasse, timbales et güiro*), vont régner sur les salles de balet les sociétés de danse blanches ou noires jusqu’aux années 40.Mais la concurrence du son* devient plus forte. A partir de 1929,Aniceto Diaz et la chanteuse Paulina Alvares imposent brièvement lamode du danzonete qui tente de mêler les deux genres. Beaucoup decharangas* incluent dès lors un chanteur. Mais la véritable révolu-tion dans le danzón* n’a lieu qu’avec la création en 1937 du groupeArcaño y sus Maravillas : à une formation qui comportera juqu’à 6violonistes (dont Felix Reina, Antonio Sanchez « Musiquita » etEnrique Jorrin), le flûtiste Antonio Arcano ajoute une tumbadora* etle violoncelle d’Orestes Lopez. Celui-ci compose en 1938 le danzón*« Mambo » et crée avec son frère le contrebassiste Israël « Cachao » unnouveau style : le ritmo nuevo. Ils développent la partie finale dudanzón* pour la rendre plus dansante. Les violons jouent pizzicato ;

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la contrebasse assure un tumbao* syncopé ; les percussions souli-gnent les temps forts et le piano accentue la syncope pendant quela flûte improvise. Dans la foulée des frères Lopez, d’autres musi-ciens se mettent à composer dans le même style : Felix Reina avecAngoa et El niche, Musiquita avec Atomo musical et Enrique Jorrinavec Doña Olga. C’est l’âge d’or du danzón* dont les phrases finalessous forme de riffs inspirent le pianiste et chef d’orchestre PerezPrado pour « inventer », en 1949 avec sa grande formation de cuivres,le mambo qui fera le tour du monde...Mais à Cuba un nouveau rythme est déjà en train de naître. EnriqueJorrin vient de composer un danzón* où l’on entend le chœur desmusiciens chanter : « Chachacha, chachacha es un baile sín igual » (lechachacha* est une danse sans rivale). Jorrin a remarqué les difficultésque rencontrent beaucoup de danseurs qui, avec le danzón*, doiventfaire des pas à contretemps sur des mélodies très syncopées. Il écritalors des mélodies moins syncopées, déplace l’accentuation ryth-mique du quatrième temps sur le premier et suit l’inspiration desdanseurs qui créent de nouveaux pas dans les salles de bal de LaHavane. Sur le parquet le bruit de leurs pieds fait « chachacha* »…En 1951, Enrique Jorrin compose La enganadora et l’enregistre avecla charanga* « America ». Le succès est immédiat. D’autres suivrontses traces : Rosendo Ruiz avec Rico vacilón pour le même orchestre ;le flûtiste Richard Egües avec El bodeguero pour la Orquesta Aragónavant que la mode soit relayée par toutes les charangas* de l’île.

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* termes expliqués dans le glossaire page 26

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La Negra Tomasa

Estoy tan enamoradode la negra Tomasaque cuando se va de casaque triste me pongo

Ay, Ay, AyEsa negra linda, que me echo bilongoEsa negra linda, que me echo bilongo

Na’ ma que me gusta la caféque ella me cuelaNa’ ma que me gusta la comidaque me cocina (bis)

Ay, Ay, AyEsa negra linda, que me echó bilongoEsa negra linda, que me echó bilongo

Montuno :Kikiribu mandingakikiribu mandinga

Rodriguez Fifé

La Negra Tomasa

Je suis si amoureuxde la « negra Tomasa »que, quand elle part de la maison,Cela me rend triste.

Ay, Ay, AyCette belle noire, qui m’a envoûtéCette belle noire, qui m’a envoûté.

Je n’aime que le caféqu’elle me prépare,Je n’aime que les repasQu’elle me cuisine (bis).

Ay, Ay, AyCette belle noire, qui m’a envoûtéCette belle noire, qui m’a envoûté

Montuno :Kikiribu mandingakikiribu mandinga

traduction Jacques Mondoloni

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glossaire

abakuáMusique issue des sociétés secrètesd’abakuás ou ñáñigos, qui com-mence à s’organiser à La Havaneet à Matanzas, à partir de 1836.Ces groupes étaient originaires dela région africaine de Calabar. Ladanse abakuá est exécutée parl’ireme ou diablito, un personnageprépondérant dans les rites et lesfêtes de ces groupes. Ils utilisentcomme instruments de musiqueles tambours.

akpwonSoliste de la musique religieused’origine africaine.

batáTrois tambours en forme de sablierà caractère religieux utilisés dansles cérémonies yoruba. Le pluspetit s’appelle okónkolo ou omelé, lemoyen itotele et le plus grand iyá.

boleroGenre populaire chanté d’inspira-tion sentimentale apparu dans laprovince d’Oriente à la fin du XIXe

siècle.

bongoPetit tambour double tenu sur lesgenoux, né dans la provinced’Oriente.

cabildoA Cuba, durant l’époque coloniale,association de Noirs souvent demême origine ethnique.

cajónCaisse de bois utilisée pour scan-der le yambú (existe aussi dans lamusique noire du Pérou).

chachachaRythme de danse inventé par levioloniste cubain Enrique Jorrin,populaire dans les années 50.

changüíVariante du son propre à la régionde Guantanamo à l’Est de Cuba.Par extension, fête paysanne de lamême région.

charangaType d’orchestre qui joue surtoutdes danzones et plus tard des cha-chachas et qui comprenait à l’rigineune flûte, un violon, un piano, unecontrebasse, des timbales et ungüiro ; plus tard on lui ajoute latumbadora, deux autres violons ettrois chanteurs.

claveRythme de base, articulé sur deuxmesures, de la musique cubaine.

clavesInstrument composé de deuxbouts de bois entrechoqués - l’un

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mâle, l’autre femelle - maintenantle rythme de la clave.

columbiaGenre de rumba rapide et acroba-tique, dansée en solo par leshommes.

comparsaGroupe carnavalesque de dan-seurs, de chanteurs et de musi-ciens.

congaTambour d’origine congo appelécouramment tumbadora à Cuba ;terme également employé pourdésigner un groupe, une danse etun rythme du carnaval cubain.

conjuntoEnsemble musical ; plus spécifi-quement type d’orchestre de sonapparu dans les années 40 et com-portant notamment un piano, uneconga et plusieurs trompettes.

danzónGenre musical et danse cubaineissue de la danza, popularisée parle cornettiste Miguel Failde à la findu XIXe siècle.

filinForme de chanson intimiste àl’harmonie et aux textes poétiquesraffinés.

guaguancóGenre de rumba de tempo modérédansé en couple au caractère éro-tique très marqué.

guajiraChanson paysanne.

güiroRacleur fait avec une gourde striéesur lequel on frotte une baguette.

itóteleTambour batá de dimensionmoyenne.

Iyá (mère en yoruba)Le plus gros des tambours batá. Ildirige le rythme.

montunoSection improvisée dans le son et lasalsa.

okónkoloLe plus petit des tambours batá.

orishaDivinité yoruba.

paseoGroupe carnavalesque comportantdes instruments à vent ; introduc-tion au tempo posé du danzón.

peñasDans tous les pays d’Amériquelatine, lieu de réunion régulière oùl’on chante entre amis.

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puntoGenre chanté d’origine paysanne,provenant d’Espagne.

quintoInstrument cubain d’origine afri-caine utilisé dans les formations demusique populaire. Plus petit quela tumbadora ou la conga. Est utilisédans les groupes de rumba et deconga comme instrument de per-cussion. Sonorité aigüe. Se porteparfois suspendu par une courroiepassée sur l’épaule.

rumbaEnsemble de chants et de dansesprofanes (d’origine africaine) pra-tiquées dans les milieux populairesau rythme des tambours.

salsaInterjection apparue à New York àla fin des années 60 : elle signifie« sauce » pour encourager unorchestre ; par extension, nom dela musique populaire d’originecubaine.

SanteríaCulte afro-cubain syncrétique, issudes religions catholique et yoruba.

solarImmeuble des quartiers populairesde La Havane avec des balconsdonnant sur une cour commune.

sonGenre de musique chantée et dan-sée né à la fin du XIXe siècle dansla province d’Oriente.

toqueNom donné aux rythmes de tam-bour dans la musique rituelle afro-cubaine.

tresSorte de guitare à trois doublescordes originaire de la provinced’Oriente.

trovaGenre de chansons traditionnellesparticulièrement populaire dans laProvince d’Oriente, à Cuba.

tumbadoraEquivalent de la conga.

tumbaoRythme de base exécuté par lacontrebasse ou la conga.

yambùGenre de rumba lente, scandé surdes caisses de bois (cajones).

yorubaPeuple africain vivant au Nord-Ouest du Nigeria et à l’Est duDahomey.

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biographies

Christian RolletNé en 1948, il suit desétudes de philosophieet de batterie (en auto-didacte). Il devientmusicien professionnelen 1968. De 1970 à1973, il participe àplusieurs spéctaclescomme musicien defosse ou de scène(Opéra de Lyon,TNPVilleurbanne, GoetheInstitut). A partir de1968, il devient le bat-teur du Workshop deLyon (plus de 700concerts enAllemagne, paysbaltes, USA,Canada…), puis celuide La Marmite infer-nale, du groupeE’Guijecri et de VollatTrois. Avec JeanMéreru et Guy Villerd,il crée le Palace d’Arfi,proposant des spec-tacles multifestifsmusicaux, culinaires etplastiques sur mesure(Coup de feu au palace,Brut de décoffrage, LesCinq sens du terme,Festin d’oreille). En

1989, il crée le groupeBaron Samedi aveclequel il mène denombreuses tournéeset ateliers pédago-giques.

Conga de Los Hoyos« Chan » de son vrainom SebastianHerrera Zapata estl’actuel chef de laConga de Los Hoyos.Il est né en 1920, sonpère a été aussi chef dela Conga et, selonChan, la traditionfamiliale, personne nel’apprend à personne,c’est « dans le sang ». Ilraconte que dès l’âgede trois ans, lorsqueson père « sortait » dela Conga, il le prenaitsur ses épaules et c’estainsi qu’il a connu sespremiers carnavals.Un peu plus tard, dèsqu’il eut l’âge de pou-voir porter un tam-bour, il dut apprendreà jouer du quinto,requinto, fondo, pilón,etc, tous ces tambourscaractéristiques descomparsas orientales. A18 ans, il fut remarqué

pour sa façon particu-lière de jouer duquinto, puis admis etreconnu par les« anciens » comme l’undes meilleurs joueursde quinto de la régionde Santiago de Cuba.Depuis, Chan n’ajamais quitté laConga, il déclare « LaConga, c’est ma vie ».La Conga est consti-tuée de musiciens« amateurs » dans lesens où ils ont tousune activité à part. Lesmusiciens (essentielle-ment du quartier)intègrent la Conga leplus souvent par tradi-tion familiale. Avant laRévolution, lesmembres de la Congase réunissaient dans larue, toujours au mêmeendroit qu’on appelaitle foco (cellule).Depuis la Révolution,le foco à « l’air libre »est devenu un localofficiel, genre de foyerculturel destiné auxrépétitions mais queles Hoyos considèrentdavantage comme une« deuxième maison ».Les Hoyos ont une

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« Conga infantil »appelée « Los suce-sores de Los Hoyos »(les successeurs desHoyos) qui elle aussis’entraîne toute l’an-née pour jouer et défi-ler pendant lecarnaval, et bien sûr,destinée à « prendre larelève ». Dès l’âge dedeux ans, on leurapprend à danser (lesfilles pour la plupart),vers 7-8 ans, le tam-bour (pour les gar-çons) et à la majorité,suivant leur capacité,ils intègrent la Congades adultes.«Tradition » est un desmots clé dans le voca-bulaire Hoyo - tradi-tion musicale,tradition carnava-lesque, mais aussi tra-dition dans la viequotidienne dans lesens où ils formentune sorte de micro-société, régie par deslois et une hiérarchiebien établie.

Clave yGuaguancó est un jeune groupeexpérimental réunis-

sant percussionnistes,chanteurs et danseurs.Fidèles interprètes desdifférentes compo-santes de la rumba(yambù, guaguancó etcolumbia), leurmusique est née dansles solares de la Cubacoloniale. Structuréautour des rigoureusesrecherches menées parson directeur musicalAmado Dedéu, leconjunto Clave yGuaguancó inclutdans son répertoirehabituel de rumba cer-tains toques rituels(tambours Batá) desanciennes sociétés afri-caines arrivées à Cubapendant l’esclavage.Ce groupe, qui gardetoute son authenticité(utilisation du cajón etdes instruments depercussion tradition-nels de la rumba), a suintégrer à sa musiquede nombreux apportsde la culture urbainecontemporaine. Legroupe est aujourd’huireconnu comme l’undes meilleursensembles de rumbadu pays.

Celina GonzalezSurnommée à Cuba« la Reina de la músicaguajira » (la Reine dela musique paysanne),Celina Gonzalez estissue d’une famille demusiciens de la pro-vince de Matanzas.Cependant, c’est àSantiago de Cubaqu’elle grandit dans laplus pure traditionpaysanne, celle desguateque (fête pay-sanne où l’on se réunitle dimanche pourjouer, boire et chan-ter). A l'exemple deson père et de sa mèrequi pratiquent le déci-mas (chant paysan endix vers sur un thèmedonné) Celina com-mence à composer et àimproviser. A quinzeans, lors d’unguateque, elle ren-contre ReutilioDominguez avec quielle se marie en 1947 ;de cette union naît leduo le plus célèbre desannées cinquanteCelina y Reutilio.Leurs succès leur vautde nombreuses tour-nées aux USA et dans

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toute l’AmériqueLatine. Après le décèsen 1971 de Reutilio,c’est leur fils LázaroDominguez qui assurela relève. Ensemble, ilsreprennent l’ancienrépertoire mais avecune orchestration dif-férente et de nouveauxarrangements. En1984, ils triomphent àCali (Colombie) c’estleur première tournéedepuis la Révolutionavant de parcourir lemonde où Celinadécouvre avec émer-veillement, quel quesoit le pays, des mil-liers de personnes quireprennent avec elleles refrains de seschansons.Témoignageémouvant d’un publicresté fidèle, après tantd’années de sépara-tion, à celle que l’onpeut considérercomme l’ambassadricede la musique guajira.A Cuba, CelinaGonzalez obtient plu-sieurs disques d’or etreçoit, à 5 reprises, leprix Girosol (prix del’artiste le plus popu-laire).

Anais AbreuOriginaire de la villede Camaguey, AnaisAbreu est sans aucundoute une des plusbelles voix du filin,reconnue pour songrand talent et untempérament hors ducommun. Issue del’Escuela Nacional deArte, Anais débute sacarrière profession-nelle dans le chœurNational de Cuba etparticipe, durant cesannées, à de nom-breux concours. En1989, sa carrièreprend un essor décisiflorsque le jury duConcurso Nacional dela cancion « AdolfoGuzman » lui décernele grand prix. Dès lors,elle partage la scèneavec des légendestelles que OmaraPortuondo, ElenaBurke, Ela Calvo etMiguelito Cuni, undes grands soneros dela musique cubaine.Artiste consacrée, sonpublic l’a surnommée« La Novia de Cuba »(la fiancée de Cuba).Elle est accompagnéepar l’une des figures

légendaire de la viemusicale cubaine desannées 50 : PepesitoReyes. Il fut entreautre le pianiste attitréde Joseïto Fernandez(Guatanamera).

José « Pepesito »ReyesLa musique cubainepossède en la per-sonne de José Reyesun des interprètes lesplus talentueux de cesiècle. Cet extraordi-naire pianiste, origi-naire de Santiago deCuba, plus connu sousle nom de « Pepesito »Reyes, fait partie deces musiciens quiimposent un sceau dis-tinctif à chacune deleurs interprétations.Véritable virtuosedominant aussi bien lamusique classique quele répertoire populaire,il est dès le début de sacarrière profession-nelle remarqué et solli-cité par les grandsorchestres et impressa-rios de la capitale où ilpart s’installer.Trèsvite il devient l’un despianistes phares de laHavane des années 50,

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au même titre que LiliMartinez, RubenGonzalez ou le grandPeruchín. Durant sonlong parcours musicalil joue dans desorchestres prestigieuxtels que « GloriaMatancera »,« Conjunto ArsenioRodriguez », « Fajardoy sus Estrellas »,« Pancho el Bravo »,« Orquesta Modelo »,« Ritmicos de Palma »,etc. Danzón, chacha-cha, mambo ou son-montuno n’ont aucunsecret pour cethomme d’une impres-sionnante capacitéd’improvisation et qui,à 80 ans, continue desusciter l’enthou-siasme du public, àCuba et à l’étranger.Pepesito tantôt seul,ou accompagné de sonorchestre « LasEstrellas de laCharanga », effectuede nombreuses tour-nées en Amérique duSud (Vénézuela,Brésil, Mexique...)ainsi qu’aux Etats-Unis et au Canada.Peu connu du grand

public en Europe maisapprécié par lespuristes, sa venue àParis est l’occasion dedécouvrir ce maestroqui demeure une réfé-rence incontournabledu génie musicalcubain.

Lázaro RosNé en 1925 à LaHavane, Lázaro Rosest indiscutablementle Akpwón (chanteursoliste en langueLucumi) le plusrenommé à Cuba. Dèsl’âge de treize ans, ils’initie aux chants et àla musique de la reli-gion yoruba qu’il n’acessé d’interpréterdepuis, dédiant parailleurs sa vie à larecherche sur les ori-gines et les diversitésdes chants qui accom-pagnent les rituels desdifférentes religionsafricaines conservées àCuba. En 1962 il estl’un des fondateurs duConjunto FolklóricoNacional de Cuba, ins-titution prestigieuseoù il enseigne le chant.Avec le ballet du

Conjunto il se produitcomme chanteur etdanseur, effectuantdes tournées triom-phales en Afrique,Europe, AmériqueLatine et USA. Artistepolyvalent, Lázaro Rosest également un créa-teur reconnu et célé-bré commedramaturge et compo-siteur. Il est l’auteurde deux œuvresmajeures Alafiá de Oyoet Arará, considéréescomme les plusimportantes du réper-toire théâtral folklo-rique cubain. Ouvert àtoutes les expériencesmusicales, il enregistreavec de jeunes musi-ciens, fusionnant lessonorités actuellesavec la traditionYoruba. En 1992, ilforme son propregroupe Olorùn (chant,danse et tamboursafro-cubains), aveclequel il se produitactuellement.

Candido FabréChanteur del’Orquesta Original deManzanillo, dans les

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années 80, CandidoFabré est l’auteur denombreux hits inter-nationaux, commeEnsalada Cubana ouencore Hombres sinmujeres. Sa capacitéd’improvisation luidonne la possibilitéd’exprimer tous lessentiments imagi-nables, de la souf-france déchirantejusqu’à la joie éclatée.En 1993, il crée sonpropre orchestreCandido Fabré y suBanda, qui, depuis, agagné une très grandepopularité dans lesrégions centrale etorientale de l’île. Ilreprend ainsi la tradi-tion des grandesCharangas des années50. La formation del’orchestre est compo-sée d’une rythmiqueclassique (clavier,basse, congas, güiro,bongos), du tres, et detrois violons et uneflûte. La douceurexemplaire et le swingde cet orchestre nedevraient pas tarder àconquérir les oreillesdu public européen.

Las EstrellasCubanas,qui se distingue parson répertoire riche etvarié (danzones, cha-cha-cha, boleros, gua-rachas, etc..), connaitdès sa formation un vifsuccès, à Cubacomme à l’étranger.Créé en 1959 par feuFelix Reina (à qui l’ondoit entre autre lescélèbres danzonesAngoa et El Niche etremplacé aujourd’huipar Antonio Sanchezdit Musiquita) cetorchestre, a su préser-ver son authenticitémalgré les renouvelle-ments de musiciens aufil des ans. En incluant« Musiquita », LasEstrellas Cubanass’enrichissent d’unefigure légendaire puis-qu’il a joué dans desorchestres aussi presti-gieux que Fajardo ysus Estellas, Arcaño ysus Maravillas et com-posé des œuvresmajeures telles queFelicidades, Por unCerro mejor, Yo sabia.Quarante ans plustard, c’est la même

fraîcheur et sincéritémusicale que nouspropose Las EstrellasCubanas.

techniquesalle des concertsJoël Simonrégie généraleJean-Marc Letangrégie plateauMarc Gomezrégie lumièresDidier Panierrégie son

amphithéâtreOlivier Fioravantirégie généraleEric Briaultrégie plateauGuillaume Ravetrégie lumièresGérard Policerégie son

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