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Formule d’Euler Dans le chapitre VII de son Introductio in analysin infinitorum (1748), Euler expose une méthode pour obtenir le développement de la fonction réelle exponentielle en série entière au voisinage de 0. Une approche moderne permet d’obtenir le résultat en intégrant par parties n-fois puis en majorant le reste intégral : e x ! 1 = e t dt = 0 x " 1 # f 1 ! $ e t dt = 0 x " !( x ! t ) f 1 "# $ % $ $ e t 0 x + ( x ! t ) # f 2 ! $ e t dt = 0 x " x ! 1 2 ( x ! t ) 2 f 2 "# $ % $ $ e t 0 x + 1 2 ( x ! t ) 2 # f 3 "# $ % $ $ e t dt 0 x " = x + x 2 2 ! 1 2 $ 3 ( x ! t ) 3 f 3 " # $$ % $$ $ e t 0 x + 1 2 $ 3 ( x ! t ) 3 # f 4 " # $ % $ $ e t dt = 0 x " x + x 2 2 + x 3 2 $ 3 ! 1 234 ( x ! t ) 4 f 4 " # $ % $ $ e t 0 x + 1 234 ( x ! t ) 4 # f 5 " # $ % $ $ e t dt = 0 x " = par récurrence... = x + x 2 2! + x 3 3! + x 4 4! + ... + x n n! + 1 n! (t ! x ) n $ e t dt 0 x " R n " # $$ % $$ Comme vu en classe lim n!" a n n! = 0 permet de démontrer alors que le reste intégral tend vers 0. D’où D’une manière tout à fait similaire l’on peut prouver que : sin( x ) = x ! x 3 3! + x 5 5! ! x 7 7! ± ... + ( !1) n x 2 n+1 (2n + 1)! + ... et cos( x ) = 1 ! x 2 2! + x 4 4! ! x 6 6! ± ... + ( !1) n x 2 n (2n)! + ... Euler n’hésite pas à franchir un pas audacieux en substituant à x (réel) une variable complexe i ! : e i ! = 1 + i ! " ! 2 2! " i ! 3 3! + ! 4 4! + i ! 5 5! ± ... = 1 " ! 2 2! + ! 4 4! " ! 6 6! ± ... # $ % & ' ( + i ! " ! 3 3! + ! 5 5! " ! 7 7! ± ... # $ % & ' ( = cos( ! ) + i sin( ! ) . Cas particulier en prenant ! = " on obtient : e i ! = cos(! ) + i sin(! ) = "1 ou e i ! + 1 = 0 , réunissant en une égalité quatre constantes célèbres : les éléments neutres additifs et multiplicatif, le rapport de la circonférence du cercle à son diamètre et l’unité imaginaire. AUTRE POSSIBILITE DE PSEUDO-PREUVE. Posons f ( x ) = cos( x ) + i sin( x ) e ix pour des x réels. La dérivée de f est ! f ( x ) = ( " sin( x ) + i cos( x ))e ix " i # (cos( x ) + i sin( x ))e ix ( e ix ) 2 = 0 . Par le corollaire de Lagrange f est donc une constante. Posons x = 0 et l’on voit que f(0)=1. D’où Théorème d’Euler (1748) : pour tout θ dans ! on a e i ! = cos( ! ) + i sin( ! ) Dans les deux cas ci-dessus la rigueur des preuves laisse un peu à désirer : dans le premier on manipule des séries infinies (commutativité, associativité) comme s’il n’y avait qu’un nombre fini de termes, sans trop se préoccuper de problèmes de convergence. Dans la deuxième, on emploie des règles de dérivation vraies pour des fonctions purement réelles, alors qu’ici la fonction ! ! " , de même en ce qui concerne l’utilisation de Lagrange. Malgré tout par la suite d’autres mathématiciens confirmeront le résultat ci-dessus, ce qui permet tout de même de fournir une autre écriture : Définition. Tout z !! , d’argument ! et de module r admet une écriture sous forme polaire exponentielle z = re i ! . De plus, re i ! = re i ! +2 i" , d’où exp( z ) = exp( z + 2ik! ) est 2iπ-périodique.

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Formule  d’Euler   Dans le chapitre VII de son Introductio in analysin infinitorum (1748), Euler expose une méthode pour obtenir le développement de la fonction réelle exponentielle en série entière au voisinage de 0. Une approche moderne permet d’obtenir le résultat en intégrant par parties n-fois puis en majorant le reste intégral :

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x

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(x ! t)4

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0

x

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= par récurrence... = x + x2

2!+ x3

3!+ x4

4!+ ...+ xn

n!+ 1

n!(t ! x)n $et dt

0

x

"Rn

" #$$ %$$

Comme vu en classe limn!"

an

n!= 0 permet de démontrer alors que le reste intégral tend vers 0. D’où

D’une manière tout à fait similaire l’on peut prouver que :

sin(x) = x ! x3

3!+ x5

5!! x7

7!± ...+ (!1)n x2n+1

(2n+1)!+ ... et cos(x) = 1! x2

2!+ x4

4!! x6

6!± ...+ (!1)n x2n

(2n)!+ ...

Euler n’hésite pas à franchir un pas audacieux en substituant à x (réel) une variable complexe i! :

ei! = 1+ i! " !

2

2!" i!

3

3!+ !

4

4!+ i!

5

5!± ...= 1" !

2

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7!± ...

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&'(= cos(! )+ isin(! ) .

Cas particulier en prenant ! = " on obtient : ei! = cos(! )+ isin(! ) = "1 ou ei! +1= 0 , réunissant en

une égalité quatre constantes célèbres : les éléments neutres additifs et multiplicatif, le rapport de la circonférence du cercle à son diamètre et l’unité imaginaire.

AUTRE POSSIBILITE DE PSEUDO-PREUVE. Posons f (x) = cos(x)+ isin(x)

eix pour des x réels.

La dérivée de f est !f (x) = ("sin(x)+ icos(x))eix " i #(cos(x)+ isin(x))eix

(eix )2 = 0 .

Par le corollaire de Lagrange f est donc une constante. Posons x = 0 et l’on voit que f(0)=1. D’où

Théorème d’Euler (1748) : pour tout θ dans ! on a ei! = cos(! )+ isin(! )

Dans les deux cas ci-dessus la rigueur des preuves laisse un peu à désirer : dans le premier on manipule des séries infinies (commutativité, associativité) comme s’il n’y avait qu’un nombre fini de termes, sans trop se préoccuper de problèmes de convergence. Dans la deuxième, on emploie des règles de dérivation vraies pour des fonctions purement réelles, alors qu’ici la fonction !!" , de même en ce qui concerne l’utilisation de Lagrange. Malgré tout par la suite d’autres mathématiciens confirmeront le résultat ci-dessus, ce qui permet tout de même de fournir une autre écriture :

Définition. Tout z !! , d’argument ! et de module r admet une écriture sous forme polaire exponentielle z = rei! . De plus, rei! = rei!+2i" , d’où exp(z) = exp(z + 2ik! ) est 2iπ-périodique.

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Sous cette forme certains calculs avec des nombres complexes deviennent triviaux :

Exemples. Résoudre z5 = 1 . Réponse rei!( )5

= r5e5!i = 1"e2k# i . D’où r = 1 et 5! = 2k" . Exercice. 1) a) Montrer que ei! = "1

b) Montrer que si z = ei! alors | z |= 1 pour tout ! "! .

b) Si z = r !ei" exprimer sous forme exponentielle son opposé, son inverse et son conjugué.

2) Convertir chaque écriture sous forme cartésienne, polaire trigonométrique et exponentielle :

a) z1 =

22

+ i 22

b) z2 = !1! i c) z3 = 3+ 4i d) z4 = i14

e) !5 = " / 6 et r5 = 20 f) !6 = "3# / 4 et r6 = 8 g) !7 = 10" / 12 et r7 = 42

h) z8 = e! i"

2 i) z9 = 2e23!

4i j) z10 = e

! i"2+ln(3)

3) Déterminer ii sachant que par définition ii = exp(i ln(i)) .

Indication. Déterminer tous les z tels que i = exp(z) .

Réponses.

Ex. 1. a) z = ei! = cos(! )+ isin(! ).D’où z = cos(! )" isin(! ) = cos("! )+ isin("! ) = e" i!

car sin est impaire et cos est pair. D’où z ! z = e0 = 1 et donc | z |= 1 = 1 .

b) En s’inspirant de l’exercice précédent on obtient : z = r !e" i# .

Par ailleurs, opp(z) = !z = (!r) "ei# = r "ei(#+$ ) , car ei! = "1. Et inv(z) = z!1 = 1

r"e! i#

Ex. 2. a) En se basant sur le correction de l’exercice de conversion analogue l’on a :

a) z1 = 1!(cos(" / 4)+ isin(" / 4)) = ei!"

4 b) z2 = 2 !(cos("3# / 4)+ isin("3# / 4)) = 2e"34# i

c) z3 = 5!(cos(0,927295...)+ isin(0,927295...)) = 5!ei!0,927295... d) z4 = 1!(cos(" )+ isin(" )) = ei"

e) z5 = 10 3 +10 ! i = 20 !ei!"

6 f) z6 = !2 + i(!2) = 8 "e! 34i#

g) z7 = (!21) 3 + 21" i = 42 "e56i#

h) z8 = e

! i"2 = cos

!"2

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&'(+ isin

!"2

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&'(= !1 i)

z9 = 2e

23!4

i= 2 cos

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&'(+ isin

"!4

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&'(= 2 " i 2

j) z10 = e

! i"2+ln(3)

= 3e! i"

2 = 3 cos ! "2

#$%

&'(+ isin ! "

2#$%

&'(

#$%

&'(= !3i

Ex 3. Comme i = e!2+2k!

"#$

%&'

i alors ii = ei ln( i) = e

!"2!2k"

, car la fonction exp est 2iπ périodique sur ! .