FOCUS ROYAN LES ANNÉES 1950 · 2018-07-27 · INTRODUCTION Bombardée par les Alliés le 5 janvier...

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FOCUS ROYAN LES ANNÉES 1950 LE CENTRE RECONSTRUIT

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FOCUSROYANLES ANNÉES 1950

LE CENTRE RECONSTRUIT

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INTRODUCTION Bombardée par les Alliés le 5 janvier et le 14 avril 1945, la « poche de Royan », l’un des derniers bastions allemands en France, est finalement libérée le 18 avril. Pourtant, la station balnéaire d’avant-guerre a disparu : la ville est détruite à 85 %. Le ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (MRU) laisse une grande liberté aux architectes en chef chargés de rebâtir la ville, ce qui fait de Royan, au même titre que d’autres cités détruites de la Seconde Guerre mondiale (Le Havre, Dunkerque), un laboratoire de la recherche en urbanisme à partir de 1945.Le nouveau projet de ville de Royan est confié à Claude Ferret, qui est désigné urbaniste et architecte en chef. Il est accompagné du parisien Louis Simon et du pontois André Morisseau. En tant que Directeur de l’école d’architecture de Bordeaux, Claude Ferret s’entoure de nombre de ses élèves : Pierre Marmouget, Yves Salier, Adrien Courtois…

Royan doit être reconstruite à moindre coût car les travaux sont financés par les dommages de guerre, montants distribués par l’État et évalués selon les pertes matérielles. Avec ces moyens financiers limités, les architectes doivent imaginer un vrai programme balnéaire pour faire renaître la station royannaise. Devant l’ampleur des destructions, Claude Ferret repense la ville : les constructions sont aérées et de larges rues sont ouvertes pour répondre à l’utilisation grandissante de l’automobile. Il propose une composition urbaine qui colle à la topographie du lieu, organisée selon deux axes principaux : la courbe de la plage (le Front de mer) et le vallon naturel de l’ancienne rivière Font de Cherves (le boulevard Briand).

Photo couverture Le marché central, André Morisseau et Louis Simon, 1946-1956 © Ville de Royan, A. Valli

1. Vue aérienne de la reconstruction en cours, carte postale, 1957 © coll. Ville de Royan

2. Claude Ferret et Louis Simon, devant le Front de mer en construction © Fonds Ferret, Archives Bordeaux Métropole

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Au départ, Claude Ferret propose de rebâtir Royan suivant une architecture néo-classique héritée des années 1930, en la mêlant à des éléments « saintongeais ». Les premiers projets suivent donc le style d’avant-guerre, à l’image du boulevard Aristide Briand et du Front de mer. Pourtant, la reconstruction de Royan change après la parution, à l’automne 1947, du numéro spécial de la revue L’Architecture d’Aujourd’hui, consacré au Brésil. Claude Ferret et son équipe découvrent par ce biais l’architecture brésilienne contemporaine, notamment de nombreux exemples de la station balnéaire de Pampulha, conçue au début des années 1940 par Oscar Niemeyer. Les projets changent de cap et sont nettement influencés par cette version tropicale de l’architecture moderne, ce qui fait la spécificité du Royan des années 1950.

Claude Ferret, Louis Simon, Pierre Marmouget et Marc Quentin, entre autres, créent des constructions s’inscrivant dans le Mouvement moderne (plan libre, toit terrasse, pilotis, larges ouvertures) et qui font appel à la fantaisie brésilienne (utilisation de formes courbes, jeux d’ombres et de lumière et emploi de couleurs primaires).

Claude Ferret, dont la préoccupation est alors de « faire du moderne », offre à Royan une ville nouvelle, une station balnéaire réellement inscrite dans le style des années 1950, que ce soit avec ses ensembles collectifs et ses bâtiments publics ou avec ses nombreuses maisons individuelles et ses villas.

1. Casa do Baile, Pampulha, Oscar Niemeyer, 1943 © DR

2. Couverture L’Architecture d’Aujourd’hui, 1947

3. Église Saint-François-d’Assise, Pampulha, Oscar Niemeyer, 1943 © DR

4. Yacht Club, Pampulha, Oscar Niemeyer, 1942 © DR

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LES GALERIES BOTTON,« LA PROMENADE DU BÉTON »

Adresse : Promenade Botton / 1, boulevard de la GrandièreProjet : 1954. Achèvement : 1956Architectes : Henri-Pierre Maillard, Armand JourdainLes galeries sont construites sur la promenade Botton, conçue comme une zone commerciale et touristique. Cet espace est un lieu de transi-tion entre la ville et la plage. L’édifice en béton de forme serpentine abrite des commerces qui sont entourés d’une galerie. Les formes courbes dynamisent le lien entre les espaces ouverts et couverts, notamment avec le pro-menoir entouré de pins. Les Galeries Botton sont directement inspirées d’un pavillon de source thermale construit par Francisco Bolonha, présenté dans L’Architecture d’Au-jourd’hui de 1947. Elles témoignent ainsi de l’influence déterminante de l’architecture brésilienne sur les constructions royannaises.

L’AUDITORIUM,« L’HÉRITIER DU KIOSQUE À MUSIQUE »

Adresse : Promenade BottonProjet : 1960. Achèvement : 1961Architecte : Marcel CanellasL’auditorium fait également partie du pro-gramme de la promenade Botton. Il est constitué d’une coque en béton armé arron-die posée sur un soubassement de pierre. Cette coque protège une scène servant à accueillir des représentations, tandis que le soubassement abrite les vestiaires. Les couleurs bleue et jaune de la coque sont complétées par une mosaïque abstraite à l’arrière de l’édifice, côté plage. Construit à l’emplacement du champ de foire et du grand casino d’avant-guerre, cet auditorium participe à l’animation du lieu qui perdure dans les années 1950. Il attend aujourd’hui de retrouver sa fonction d’origine.

L’IMMEUBLE DES PONTS ET CHAUSSÉES,« L’INTRODUCTION DU BRISE-SOLEIL »

Adresse : 2, avenue de la Grande ConcheProjet : 1949. Achèvement : 1952Architecte : Yves SalierL’immeuble se compose d’un parallélépi-pède, prolongé par une rotonde qui évoque une proue de navire. À gauche, l’encadrement oblique de béton blanc abrite un escalier des-servant le premier étage. Les pilotis soutenant le bâtiment, le garde-corps du toit-terrasse, la géométrie des ferronneries et les brise-soleil horizontaux, dont c’est l’une des premières introductions en France, participent à inscrire l’immeuble des Ponts et Chaussées dans le « style 50 » royannais.

LA VILLA HÉLIANTHE,« L’ANIMATION DE LA FAÇADE »

Adresse : 38, boulevard de la GrandièreProjet : 1952. Achèvement : 1956Architecte : Yves SalierInscrit Monument Historique en 2002 Construite en arc de cercle suivant le tracé de la rue, la villa Hélianthe semble flotter grâce à sa structure porteuse de piliers soutenant des dalles de béton et le jeu de retrait et d’avancée des différents niveaux. L’escalier traversant la terrasse du premier étage, les longs balcons, les larges baies et les claustras animent par-ticulièrement la façade. La villa Hélianthe comporte toutes les caractéristiques de l’ar-chitecture balnéaire brésilienne, notamment l’utilisation de formes courbes et les jeux entre l’intérieur et l’extérieur. Elle fait d’ailleurs par-tie des villas des années 1950 inscrites au titre des Monuments Historiques.

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1. Galeries Botton, carte postale des années 1950 © coll. Ville de Royan

2. Auditorium, carte postale des années 1950 © coll. Ville de Royan

3. Mosaïque de l’auditorium © Ville de Royan, A. Valli

4. Immeuble des Ponts et Chaussées © Ville de Royan, A. Valli

5. Immeuble des Ponts et Chaussées, arrière © Ville de Royan, A. Valli

6. Villa Hélianthe © Ville de Royan, Ph. Souchard

7. Villa Hélianthe, détail de la façade © Ville de Royan, A. Valli

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LA GALERIE LOUIS SIMON,« LA ROTONDE DE BÉTON »

Adresse : Tache verte / Cours de l’EuropeProjet : 1953. Achèvement : 1964Architectes : Louis Simon,Pierre-Gabriel GrizetLabel Architecture contemporaine remarquableL’ancienne gare routière s’insère dans le pro-gramme de construction de la Tache verte, espace vert créant une liaison entre la gare et le centre-ville. L’édifice est une rotonde arti-culée autour d’un pilier central creux où des-cendent les eaux pluviales. Elle est prolongée par un auvent, soutenu par des piliers métal-liques, qui protégeait les quais. Louis Simon s’est inspiré de l’architecture brésilienne et notamment de la « Casa do Baile » construite par Oscar Niemeyer à Pampulha en 1943. Transformée en galerie d’exposition en 2000, elle a été rebaptisée en 2012 pour rendre hom-mage à Louis Simon, son architecte.

UNE MAISON DE VILLE,« UNE ARCHITECTURE DE DÉTAILS »

Adresse : 5, avenue des TilleulsProjet : 1953. Achèvement : 1958Architectes : Pierre Marmouget,Édouard PinetCette maison de ville a été réalisée par l’ar-chitecte Pierre Marmouget, qui exprime une véritable originalité dans ses constructions royannaises. La façade joue sur des effets de profondeur, avec le rez-de-chaussée en retrait et sa porte d’entrée abritée, qui contraste avec la fenêtre en saillie du premier étage. L’entrée est mise en valeur par trois brise-soleil bleus qui laissent pénétrer la lumière tout en protégeant des regards. Le premier étage se singularise par l’emploi de nombreux culs-de-bouteille, éga-lement soulignés de bleu. Le deuxième étage est le fruit d’une extension ultérieure, réalisée dans les années 2000, qui respecte et s’inspire du style initial de la maison.

LA MAISON « AR DE LU »,« UN PROJET MODERNE ET MODESTE »

Adresse : 13, rue de la TerrasseProjet : 1955. Achèvement : 1956Architecte : Marc QuentinLa maison de ville « Ar De Lu » est une œuvre de Marc Quentin, architecte royannais embléma-tique. Le bâtiment, construit selon le principe d’une boîte de béton blanc évidé, est couvert d’un toit-terrasse. Le cadre de la façade, légè-rement oblique, est souligné d’un enduit bleu pâle. La relation entre intérieur et extérieur est matérialisée par le large balcon et les baies à persiennes métalliques coulissantes, véritables éléments de modernité. Les mêmes dessins et couleurs de ferronneries sont décli-nés sur différents supports : les garde-corps et le portillon. Cette répétition des motifs, thème récurrent des villas royannaises, participe à l’unité de la façade.

LE BOULEVARD ARISTIDE BRIAND,« AVANT LE SOUFFLE BRÉSILIEN »

Projet : 1945. Achèvement : 1956Architectes : Claude Ferret, Louis Simon, André MorisseauLe boulevard Aristide Briand est la première opération de reconstruction de Royan et l’axe majeur du plan d’urbanisme. Cet ensemble permet de comprendre les premières inten-tions de Claude Ferret, qui proposait une reconstruction inscrite dans le style d’avant-guerre. Il suit une composition classique, avec un étage de commerces, deux étages d’habi-tation, dont un « noble » avec des balcons filants, un étage en attique et un toit de tuiles. L’ensemble est rythmé par des porches en pierre de taille, décorés de bas-reliefs d’inspi-ration Art Déco aux thématiques marines.

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1. Galerie Louis Simon et auvent © Ville de Royan, A. Valli

2. Façade de la maison, côté rue © Ville de Royan, A. Valli

3. Maison de ville, entrée © Ville de Royan, A. Valli

4. Villa « Ar De Lu », © Ville de Royan, A. Valli

5. Villa « Ar De Lu », portillon © Ville de Royan, A. Valli

6. Boulevard Briand et portique, carte postale des années 1950 © coll. Ville de Royan

7. Boulevard Briand, bas-reliefs d’un porche © Ville de Royan, A. Valli

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LE MARCHÉ COUVERT,« LA RENCONTRE DES ARCHITECTES ET DES INGÉNIEURS »

Adresse : place du marchéProjet : 1946. Achèvement : 1956Architectes : André Morisseau, Louis SimonIngénieurs : Bernard Laffaille, René SargerClassé Monument Historique en 2002 Le marché est une halle de forme circulaire, couverte par une voûte autoportante. Cette calotte sphérique ondulée est constituée d’un voile mince de béton d’une épaisseur de 10 cm. Les ondes de la voûte, qui reposent sur le sol en 13 points, donnent au marché une forme de coquillage. Ce sont les ingénieurs Bernard Laffaille et René Sarger qui apportent cette solu-tion technique au dessin effectué par les archi-tectes André Morisseau et Louis Simon. Vraie innovation et prouesse technique, la forme du marché inspire différentes constructions dans le monde, comme le cirque d’état à Bucarest. Repeint récemment, ce marché coloré rayonne à l’extrémité du boulevard Aristide Briand.

UNE VILLA RUE NOUAILLE-DEGORCES,« UN EXEMPLE À PRÉSERVER »

Adresse : 47, rue Docteur Nouaille- DegorcesAchèvement : 1955Architecte : inconnuCette villa comporte tous les éléments archi-tecturaux caractéristiques d’une maison des années 1950 à Royan. La façade est rythmée par des claustras, des brise-soleil horizontaux et verticaux, et un large auvent en porte-à-faux. D’autres détails remarquables sont à noter, comme les portillons de la clôture, les fenêtres en imposte ou le prolongement des brise-soleil en auvent, percé pour laisser passer un arbre. En empruntant la petite rue à l’arrière de la villa (Rue Margareth), l’architecture se dévoile côté jardin, laissant apparaître un superbe escalier hélicoïdal dans sa cage de verre.

LE CENTRE PROTESTANT,« LA SOBRIÉTÉ DE RIGUEUR »

Adresse : à l’angle des rue d’Aunis,Alsace-Lorraine et PelletanProjet : 1953. Achèvement : 1956Architectes : René Baraton, Jean Bauhain, Marc HébrardInscrit Monument Historique en 2002Le nouveau temple de Royan s’insère au sein d’un programme complet de « centre protes-tant » multifonctionnel, avec un diaconat, une salle des fêtes et des salles de réunion. Le temple est une simple nef rectangulaire couverte d’un toit à double pente dont la façade, très sobre, correspond à l’éthique protestante. L’originalité de cet ensemble se situe dans le traitement du parvis. Une galerie reposant sur des voiles de métal bleu et percée d’une trémie laissant pas-ser le clocher, entoure l’espace ouvert devant le temple. Elle permet l’unification de tous les bâtiments entre eux. Le parvis, en créant une zone transitoire entre l’espace public et l’espace cultuel, traite la relation entre intérieur et exté-rieur à la manière d’un édifice balnéaire.

L’ÉGLISE NOTRE-DAME,« LE GOTHIQUE MODERNE »

Adresse : 1, rue de FoncillonProjet : 1954. Achèvement : 1958Architecte : Guillaume GilletIngénieurs : Bernard Laffaille, René SargerMaître-verrier : Henri-Martin GranelFacteur d’orgue : Robert BoisseauClassée Monument Historique en 1988 / Orgue classé en 2006 au titre des objets mobiliersAprès l’abandon d’un projet d’inspiration bré-silienne, Guillaume Gillet, Grand Prix de Rome, se voit confier la construction de l’église, sym-bole de la renaissance de Royan, par le maire de l’époque, Max Brusset. Il doit alors relever le défi de construire l’église la plus grande et haute possible avec des crédits de dommages de guerre très limités. Sa rencontre avec Bernard Laffaille est déterminante. Guillaume Gillet décide alors d’utiliser les poteaux en « V Laffaille » pour l’ossature de l’édifice. Ces poteaux en V, construits en béton brut de décoffrage et venus de l’architecture indus-trielle, permettent à Guillaume Gillet d’élever la nef à environ 30 m de hauteur et le clocher à 56 m. La couverture est aussi une innovation technique, un voile mince de béton en forme de selle de cheval (ou paraboloïde hyperbolique). Guillaume Gillet dessine également le mobi-lier de l’église et les vitraux. Inauguré en 1958, l’édifice, fragilisé par les intempéries, est vite soumis à des problèmes d’infiltrations d’eau et d’éclatement du béton. Il fait l’objet d’un programme de restauration depuis 2013.

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1. Marché couvert vu du ciel © Artgrafik, Denis Bibbal

2. Auvent monumental du marché © Ville de Royan, A. Valli

3. Villa rue Nouaille-Degorces, façade sur rue © Ville de Royan, A. Valli

4. Villa rue Nouaille-Degorces, claustras, brise-soleil et auvent © Ville de Royan, A. Valli

5. Centre protestant, carte postale, vers 1956 © coll. Ville de Royan

6. Église Notre-Dame, vue du toit © Ville de Royan, A. Valli

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UNE MAISON DE VILLE,« LE STYLE 50 ROYANNAIS »

Adresse : 16, rue Docteur Paul MétadierProjet : 1954. Achèvement : 1956Architecte : Marc QuentinSur cette autre villa de Marc Quentin, on retrouve l’utilisation du toit-terrasse et des persiennes qui permettent de protéger les ouvertures du soleil, complétées ici de brise-soleil colorés de bleu. La cage d’escalier est matérialisée par des ouvertures horizon-tales en briques de verre, autre matériau de la modernité. Les pilotis du rez-de-chaussée dégagent l’espace au sol et allègent l’en-semble de la construction. Rue docteur Paul Métadier, l’originalité de la porte d’entrée en bois et verre est augmentée par l’auvent monumental en forme d’accent circonflexe inversé. Cette villa, qui s’inscrit pleinement dans l’architecture du Mouvement moderne, est agrémentée de détails caractéristiques du « style 50 » royannais.

L’IMMEUBLE TAUNAY,« UN AIR D’AUGUSTE PERRET »

Autre nom : résidence de FoncillonAdresse : 27, rue de FoncillonProjet : 1949. Achèvement : 1964Architecte : Louis SimonInscrit Monument Historique en 2004Cet immeuble d’habitation, construit pour l’entrepreneur local Robert Taunay, contraste avec les autres constructions royannaises. En effet, le bâtiment respecte la demande du com-manditaire qui souhaite bâtir un édifice « à la manière d’Auguste Perret » (grand architecte du XXe siècle, se rattachant au courant rationa-liste). La structure de la construction est donc visible, comme en témoigne l’escalier d’angle qui relie les deux blocs du bâtiment et laisse apparaître le dessin de ses marches. La façade est rythmée par des loggias et des balcons en béton, et par une corniche couronnant le toit-terrasse. L’entrée est précédée d’un auvent monumental, seul élément « royannais » de cet immeuble, par ailleurs remarquable.

LA VILLA « GRILLE-PAIN »,« LA FANTAISIE BALNÉAIRE »

Adresse : 52, rue de FoncillonProjet : 1953. Achèvement : 1956Architectes : Pierre Marmouget,Édouard PinetCette villa, œuvre de Pierre Marmouget, est un cube de béton blanc posé sur un soubas-sement de pierres de parement, au dessin horizontal. C’est la façade sur rue qui lui vaut son surnom de « grille-pain », en raison de la découpe de la façade, abritant la cage d’esca-lier, faite d’arcs bleus en béton et de briques de verre. La villa se compose de deux apparte-ments qui donnent sur un jardin, dont chaque terrasse est desservie par un escalier hélicoï-dal en béton, surmonté d’une galette ronde, du même bleu céruléen que la cage d’escalier.

LA RÉSIDENCE DES CONGRÈS, ÎLOT 52,« LA CITÉ RADIEUSE ROYANNAISE »

Adresse : avenue des CongrèsProjet : 1959. Achèvement : 1962Architecte : Louis SimonOn appelle aussi cette résidence « l’im-meuble-pont», qui doit ce nom au grand portique qui enjambe la route passant sous le bâtiment. Cette grande barre d’habitations est isolée de la rue par un soubassement et se détache du sol par de larges pilotis. La façade est dynamisée par de nombreuses ouvertures aux rythmes différents : grandes loggias, fenêtres, balcons. Cette architecture en « nid d’abeille » joue avec une alternance entre les pleins et les vides et avec des différences de hauteur entre les appartements en simplex et duplex. Cet immeuble, en apportant davan-tage de lumière dans les logements, répond aux nouvelles attentes des années 1950 en termes de confort et rappelle les « unités d’ha-bitation » de Le Corbusier.

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1. Maison de ville, façade © Ville de Royan, A. Valli

2. Maison de ville, porte d’entrée et auvent © Ville de Royan, A. Valli

3. Immeuble Taunay, façade © Ville de Royan, A. Valli

4. Immeuble Taunay, intérieur de la cage d’escalier © Ville de Royan

5. Villa grille-pain, façade © Ville de Royan, A. Valli

6. Villa grille-pain, escalier hélicoïdal © Ville de Royan, A. Valli

7. Résidence des congrès, façade © Ville de Royan, A. Valli

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LE PALAIS DES CONGRÈS,« L’ŒUVRE DE CLAUDE FERRET »

Adresse : 42, avenue des congrès Projet : 1954. Achèvement : 1957Architectes : Claude Ferret, Pierre Marmouget, Adrien Courtois, Jacques BruneauInscrit Monument Historique en 2011La municipalité royannaise souhaite recréer un lieu d’animation à l’emplacement de l’an-cien casino de Foncillon. Elle envisage au départ la construction d’une salle des fêtes, projet qui évolue pour devenir le premier Palais des Congrès conçu en France. Le bâti-ment est une innovation formelle : l’agence-ment des différents espaces et l’indépendance des circulations verticales créent une véritable promenade architecturale où l’on passe libre-ment de l’intérieur à l’extérieur. Soumis aux intempéries du fait de son emplacement, le Palais des Congrès rencontre des problèmes structurels et connaît donc de nombreuses modifications à partir des années 1970, qui dénaturent le projet initial de Claude Ferret. Un programme de restauration est prévu pour redonner au bâtiment ses principes originaux de transparence et de légèreté.

L’ÎLOT 106,« LA LÉGÈRETÉ DU BÉTON »

Adresse : rue GambettaProjet : 1956. Achèvement : 1961.Architecte : Roger MialetCet îlot est un ensemble de quatre blocs situés à l’arrière du Front de mer et séparés par des impasses piétonnes. Ces immeubles accueillent des commerces et des habitations. Utilisant le dénivelé du terrain, Roger Mialet installe les commerces rue Gambetta, et les jardins à l’opposé, avenue des Congrès. Les escaliers qui font la liaison avec les impasses assurent une continuité visuelle, recher-chée dans le plan d’urbanisme. Les quatre immeubles sont reliés au rez-de-chaussée par un fin portique en béton soutenu par des poteaux métalliques, protégeant la prome-nade en avant des commerces. Les façades sont rythmées par des terrasses, des balcons, des brise-soleil, des poteaux et des garde-corps en béton.

LE FRONT DE MER,« LA FAÇADE DE LA VILLE BALNÉAIRE »

Adresse : Front de merProjet : 1950. Achèvement : 1956Architectes : Claude Ferret, Louis Simon, André MorisseauL’ensemble du Front de mer, situé face à l’es-tuaire de la Gironde, est constitué de deux barres qui suivent la forme arrondie de la Grande Conche. L’arrière du bâtiment est ponc-tué de cours en forme de U où les façades sont rythmées par des claustras et des brise-soleil verticaux qui masquent les espaces de service. Leurs couleurs primaires vives (jaune, rouge et bleu) apportent une touche de gaieté et de fan-taisie à ces façades plus sobres. Les bâtiments abritent des commerces au rez-de-chaussée et différents appartements en simplex et duplex. Côté mer, les balcons filants rythmés par des panneaux métalliques en aluminium rouge « corsaire » accentuent la linéarité du Front de mer. Le projet initial de Louis Simon compor-tait un portique monumental entre les deux ailes du bâtiment qui permettait à chacun d’avoir « un balcon sur la mer », portique qui a été détruit dans les années 1980, au même moment que le casino de Claude Ferret.

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1. Palais des Congrès, panneaux de type Prouvé à l’arrière © Ville de Royan, A. Valli

2. Ilot 106 © Ville de Royan, A. Valli

3. Ilot 106, portique © Ville de Royan, A. Valli

4. Front de mer, façade mer © Ville de Royan, A. Valli

5.Front de mer, façade arrière © Ville de Royan, A. Valli1 2 4

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ENJEUX DU XXIE SIÈCLELa municipalité et les Royannais ont pris conscience de l’intérêt de l’architecture de la Reconstruction dans les années 1990, à la suite des destructions du portique du Front de mer et du casino de Claude Ferret. À partir de ce moment, certains monuments ont été protégés au titre des Monuments Historiques. Les bâtiments non protégés sont par la suite préservés grâce à la mise en place d’une ZPPAUP (Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager) en 1996. En 2011, Royan obtient le label Ville d’Art et d’Histoire, ce qui confirme l’intérêt de son patrimoine et la volonté de la municipalité de le mettre en valeur.

L’AVAP ET LA NÉCESSAIRE PROTECTION DU PATRIMOINELa protection et la restauration de l’archi-tecture de la Reconstruction (comme celle d’avant-guerre) est encadrée par le règlement du PLU (Plan Local d’Urbanisme) et de l’AVAP (Aire de Mise en Valeur de l’Architecture et du Patrimoine), qui remplace la ZPPAUP. La muni-cipalité de Royan a la volonté de protéger son patrimoine dans une démarche de développe-ment de la ville, au niveau économique et tou-ristique. L’AVAP instaure ainsi des obligations qui sont des incitations positives pour la pro-tection du patrimoine et permet une pédago-gie de l’architecture auprès des habitants. Cela permet notamment la préservation des détails des bâtiments : clôtures, portes, ferronneries, couleurs d’origine, etc. qui font la spécificité du patrimoine royannais.

L’ADAPTATION AU XXIe SIÈCLELa réglementation de l’AVAP permet l’enca-drement des transformations des édifices des années 1950. Ces bâtiments ne correspondent plus aux normes actuelles en termes d’écono-mie d’énergie, par exemple. À la pointe du confort dans les années 1950 grâce à leurs volumes et leur grande luminosité, ils doivent aujourd’hui être modifiés pour correspondre aux normes d’isolation thermique et pho-nique. Grâce à l’AVAP, ces modifications sont effectuées dans le respect des bâtiments d’origine.

UNE PATRIMONIALISATION INCOMPLÈTE ? L’intérêt de l’architecture de la Reconstruction à Royan n’est pas encore suffisamment connu par les Royannais qui, pour beaucoup, ne la considèrent pas comme faisant partie du patri-moine de la ville. L’architecture du XXe siècle, malmenée dans les années 1980 puis reconnue dans les années 2000, n’est pas encore identi-fiée par tous comme un patrimoine légitime. Les actions de médiation et de valorisation doivent permettre la légitimation complète de ce patrimoine de la Reconstruction.

Le service de l’Urbanisme de la Ville de Royan est à la disposition des propriétaires qui sou-haitent effectuer des travaux. Le CAUE (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environne-ment) et l’Architecte des Bâtiments de France assurent également des permanences pour recevoir et conseiller les pétitionnaires.

RenseignementsService de l’urbanisme15, avenue de Pontaillac05 46 39 56 74

1.Front de mer, portique des années 1950, carte postale © coll. Ville de Royan

2. Cartographie de l’AVAP, 2018

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PLAN DE SITUATION1 Les galeries Botton2 L’auditorium3 L’immeuble des Ponts et Chaussées4 La villa Hélianthe5 La Galerie Louis Simon 6 Une maison de ville7 La maison « Ar De Lu » 8 Le boulevard Aristide Briand 9 Le Marché couvert10 Une villa11 Le Centre protestant12 L’église Notre-Dame13 Une maison de ville14 L’immeuble Taunay15 La villa « Grille-pain »16 La Résidence des congrès, îlot 5217 Le Palais des Congrès 18 L’îlot 10619 Le Front de mer

LÉGENDE

Parcours pédestre

Parcours accessible (personnes à mobilité réduite, poussettes, etc.)

Zone non accessible aux personnes à mobilité réduite

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GLOSSAIREAuventPetit toit en saillie pour se protéger de la pluie.

Brise-soleilDispositif formé de lamelles de métal ou de béton, devant des parois vitrées de façon à les protéger du soleil.

ClaustraCloison ajourée, le plus souvent en béton.

LoggiaRenfoncement formant un balcon couvert.

Mouvement moderneCourant de l’architecture apparu dans la première moitié du XXe siècle et cherchant à rompre avec les traditions du XIXe siècle. Il se caractérise par des plans fonctionnels, des formes géo-métriques et l’emploi de matériaux nouveaux. Gropius, Le Corbusier, Mies Van der Rohe en sont des figures marquantes.

PilotisEnsemble de piliers dégagés et visibles au rez-de-chaussée pour surélever une construction (à l’origine hors de l’eau).

5 points pour une architecture moderne selon Le Corbusier, théorisés et publiés en 1927Les pilotis, le toit-terrasse, le plan libre, la fenêtre en bandeau et la façade libre.

POUR ALLER PLUS LOIN…BERTAUD DU CHAZAUD Vincent,Royan années 50, collection Je découvre, La Crèche, La Geste, 2018

DELORME Franck,L’église Notre-Dame de Royan, Guillaume Gillet et le gothique moderne, Bordeaux, Le Festin, 2012

LIAUDET David,Royan, l’image absolue, Cartes postales de la ville moderne, Bordeaux, Le Festin, 2014

PREAUT Antoine-Marie,Guide architectural Royan 1950, Vaux-sur-mer, Éditions Bonne Anse, 2006

RAGOT Gilles,Architecture du XXe siècle en Poitou-Charentes, Chauray, Éditions du Patrimoine & Médias / Archivecture, 2000

RAGOT Gilles (dir.),L’invention d’une ville, Royan années 50, Paris, Éditions du patrimoine, Centre des Monuments Nationaux, 2003

Palais des Congrès dans les années 1950, carte postale © coll. Ville de Royan

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Maquette studio Symbole d’après DES SIGNES studio Muchir Desclouds 2015

ImpressionImprimerie Rochelaise

Brochure conçue sous la direction de Charlotte de Charette, docteur en histoire de l’art et animatrice du patrimoine de Royan.

Textes Zoé Dupeu, stagiaire, et Charlotte de Charette.

Remerciements à Gilles Ragot, professeur à l’université Bordeaux-Montaigne, pour sa relecture attentive.

SERVICE CULTURE ET PATRIMOINE1, rue du PrintempsTél : 05 46 39 94 45Mail : animation.patrimoine@mairie-royan.frwww.ville-royan.frwww.vpah-nouvelle-aquitaine.org

Vue aérienne, perspective du Front de mer et du boulevard Aristide Briand © Ville de Royan

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Royan appartient au réseau national des Villes et Pays d’Art et d’Histoire

La Direction Générale des Patrimoines, au sein du ministère de la Culture et de la Communication, attribue l’appellation « Villes et Pays d’Art et d’Histoire » aux collectivités locales qui animent leur patrimoine. Elle garantit la compétence des animateurs du patrimoine et des guides-conférenciers, ainsi que la qualité de leurs actions. De l’architecture aux paysages, les villes et pays mettent en scène le patrimoine dans sa diversité. Aujourd’hui, un réseau de 190 villes et pays vous offre son savoir-faire sur toute la France.

À proximité

Saintes, Rochefort, Poitiers, Thouars, Cognac, le Pays Mellois, le Pays Montmorillonnais, le Pays de l’Angoumois, le Pays du Confolentais, le Pays de Parthenay, le Pays Châtelleraudais et le Pays de l’Ile de Ré bénéficient de l’appellation « Villes et Pays d’Art et d’Histoire ».

Le service Culture et Patrimoine

Le service Culture et Patrimoine a pour mission de mettre en œuvre la convention « Villes d’Art et d’Histoire » signée entre la Ville de Royan et le ministère de la Culture et de la Communication. Il organise de nombreuses actions pour permettre la découverte du patrimoine et de l’architecture de la ville par ses habitants, jeunes et adultes, et par ses visiteurs. Il est partenaire des établissements scolaires dans leurs projets pédagogiques sur le thème du patrimoine.

Laissez-vous conter Royan,

Ville d’Art et d’Histoire...

...en compagnie de guides-conférenciers agréés par le ministère de la Culture et de la Communication. Ils connaissent toutes les facettes de Royan et vous donnent les clefs de lecture pour comprendre un bâtiment, un paysage, le développement de la ville au fil de ses quartiers.

« L’ARCHITECTURE EST LE JEU SAVANT, CORRECT ET MAGNIFIQUE DES VOLUMES ASSEMBLÉS SOUS LA LUMIÈRE ».Le Corbusier, Vers une architecture, 1923.