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THOMAS PAINE

LE SENS COMMUN

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Présentation de Jean-Pierre BoyerTraduction annotée de Bernard Vincent

THOMAS PAINE

LE SENS COMMUN

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Dépôt légal – 3e trimestre 1995Bibliothèque nationale du Québec

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AVANT-PROPOS

THOMAS PAINE est certainement l’un des plusgrands pamphlétaires politiques du XVIIIe siècle

des Lumières. Cet Anglais d’origine, dont le destin, àla fois extraordinaire et pathétique, se confond avecl’avènement de la démocratie moderne, est l’auteurde trois œuvres majeures qui connurent un succèssans précédent dans l’histoire de la littérature etnotamment des écrits politiques.

Le Sens commun (1776), Les Droits de l’Homme(1791-1792) et Le Siècle de la raison (1793-1794)constituent ses principaux textes pamphlétaires etcontiennent l’essentiel de sa pensée politique, singu-lièrement audacieuse et visionnaire pour l’époque.Cet ami de Franklin, Washington, Jefferson,Lafayette, Condorcet, Danton, Priestly et de plu-sieurs autres révolutionnaires de l’époque fut autantle pourfendeur intraitable de toutes les formes detyrannie que le défenseur acharné des idéaux démo-cratiques et des droits humains universels. Passé del’Angleterre à l’Amérique pour y faire triompher la

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cause de l’indépendance, retourné en Europe poursoutenir la révolution française et appuyer les effortsde ses compatriotes républicains, puis revenu auxÉtats-Unis pour y terminer sa vie dans la plus grandeincompréhension et la solitude, Thomas Paine n’enmérite pas moins, selon certains, le titre de « premierrévolutionnaire international » et de « citoyen del’univers ».

Son histoire exemplaire et ses écrits politiquescontinuent d’inspirer de nombreux humanistes etdémocrates à travers le monde et c’est dans le but deraviver son combat en faveur de la liberté, de l’éga-lité, de la justice sociale et de la dignité humaine quej’entreprends ici de partager le récit de sa vie et l’ac-tualité de son œuvre avec mes compatriotes québé-cois. Et le moment est d’autant plus propice queplusieurs d’entre eux militent déjà pour la cause d’unQuébec souverain et démocratique.

Pour mieux faire connaître ce compagnon deroute que devient ici Tom Paine, comme on l’appellefamilièrement, je procède au récit d’une premièretranche de sa vie, de 1737 à 1776, avant de présenterson premier texte pamphlétaire, Le Sens commun, quidemeure non seulement l’œuvre emblématique maisaussi un véritable catalyseur de l’indépendanceaméricaine.

Après l’œuvre de Paine, je termine le récit de savie, de 1776 à 1809, pour la compréhension de lasuite de son incroyable périple. En dernière partie dece livre, j’envisage aussi de boucler la boucle de cefascinant voyage dans le temps où se croisent les des-tins similaires de Tom Paine et de Fleury Mesplet, ce

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premier imprimeur et libraire montréalais qui fut leprincipal diffuseur des Lumières et des œuvres dePaine au Québec. Ce sera finalement l’occasion d’in-vestir le passé au profit de l’avenir, de manière à ceque la mémoire des ancêtres puisse stimuler l’ima-ginaire et raviver l’espoir des générations futures1.

1. Pour ma part, je tiens à remercier les professeurs BernardVincent et John Keane dont les écrits stimulants ont nourri mesrecherches sur Thomas Paine, ainsi que Edmund et Ruth Frowqui m’ont si généreusement accueilli et donné accès aux archivesdu Working Class Movement Library à Manchester. Je veuxremercier également mes compatriotes et amis Gaston Miron,Liane Flibotte, Danielle Lafontaine et Marcelle Cinq-Mars quim’ont encouragé et soutenu dans la préparation et la publicationde cet ouvrage.

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LA VIE DE THOMAS PAINE

AVANT LA PUBLICATION

DU SENS COMMUN

1737-1776

Né à Thetford dans le comté de Norfolk enAngleterre, le 29 janvier 1737, Thomas Paine

est issu d’une famille très modeste. Enfant unique deJoseph Pain, artisan-corsetier, et de Frances, sa mèreanglicane de tempérament austère, le jeune Thomasfréquente le Grammar School de Thetford jusqu’en1750. Ayant « un penchant naturel pour lessciences », il y excelle déjà en mathématiques mais esttenu à distance de l’enseignement du latin, unelangue estimée trop « papiste » par son père. Élevépar ce dernier selon les préceptes du quakerisme etde la morale humaniste propre à la Société des amis,Paine développe très tôt une profonde aversion pourla cruauté des punitions corporelles et de la peine demort, fréquentes à l’époque. On raconte même que lejeune Paine fut scandalisé par le récit biblique de la

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supposée indifférence de Dieu face à la mort de sonpropre fils, « alors que tout homme aurait été pendupour cela ».

Son profond scepticisme à l’égard des religionsdites révélées, qu’il conservera toute sa vie, l’amèneramême à consacrer son dernier grand pamphlet, LeSiècle de la raison, à une critique historique radicalede la Bible et des superstitions entretenues par leclergé. C’est que Paine, une fois converti au déismenaturaliste des adeptes de la science newtonienne deson temps, finit par affirmer : « Ma propre cons-cience est mon église et ma seule religion est de fairele bien ». Cela dit, il demeure très attaché aux valeursfondamentales du quakerisme, la philanthropie et leradicalisme moral, en rejetant toutefois l’austérité etle pacifisme neutraliste des Quakers.

Thomas Paine sera d’abord et avant tout l’en-nemi juré de toutes les formes de despotisme ou d’in-justice et le défenseur de la liberté et des droitshumains universels. Mais avant de voir comment saformation initiale et son cheminement personnel vontmarquer l’ensemble de son œuvre pamphlétaire, etnotamment Le Sens Commun, poursuivons le récitdes premières années de sa vie.

Après avoir travaillé pour son père, de 1750 à1757, comme apprenti corsetier, Paine, rêvant déjàde voyages et d’aventures, quitte son village et lemilieu familial pour s’engager sur un navire corsaire,The Terrible, sous les ordres du capitaine WilliamDeath. Après un bref retour au bercail, il s’embarqueà nouveau comme « privateer » sur le King of Prussia,commandé par le capitaine Mendez.

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À l’âge de vingt ans, il décide de s’installer àLondres où il travaille d’abord chez un corsetiernommé Morris. Toujours avide de connaissances,Paine commence déjà à s’intéresser à Newton, aurationalisme et à la philosophie des Lumières enassistant régulièrement aux conférences données, àLondres, par Benjamin Martin et James Ferguson.Cet intérêt marqué pour la science et la penséemoderne l’incitera d’ailleurs à développer, dans lafoulée de Locke et de Rousseau, sa « religion civile »et sa philosophie politique républicaine, mais àexplorer aussi les possibilités pratiques de la physiquenewtonienne en réalisant lui-même quelques inven-tions pour le moins originales. Paine sera en effet leconcepteur et le maître d’œuvre d’un pont en fer àarche unique et sans pilier d’une longueur de 400pieds, puis l’inventeur d’une chandelle sans fumée etd’un moteur propulsé à combustion de poudre.

Mais à la fin de 1758, Paine n’est encore qu’unsimple artisan-corsetier. Il décide alors de s’installer àson propre compte mais sans trop de succès, àDouvre, puis à Sandwich dans le Kent où il épouse,le 17 septembre 1759, Mary Lambert qui mourracependant un an plus tard. Voulant alors refaire sa vieet même réorienter sa « carrière » à l’instar et sur leconseil de son beau-père, Paine choisit de retournerà Thetford pour étudier et y exercer, dès juillet 1762,le métier de fonctionnaire auxiliaire de la Régie desdouanes. Ayant pour tâche d’inspecter et de perce-voir la taxe d’accise sur certaines marchandises, il estensuite muté, au début de 1763, à Grantham puis àAlford, en août 1764. Mais voilà que Paine est

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renvoyé de la Régie l’année suivante, pour avoirmanqué de vigilance dans l’exercice de ses fonctions.Il se voit donc forcé de reprendre son plat métier decorsetier. En 1766-1767, il est cependant embauchécomme surveillant dans une école de Londres puisde Kensington.

Insatisfait de son sort, il entreprend de s’amenderpar lettre de doléances auprès de la Régie qui fina-lement le réintègre dans ses fonctions en février1768, à Lewes dans le Sussex. Sitôt arrivé dans cenouveau milieu politiquement plus dynamique, Painefait la connaissance du militant quaker Samuel Olive,propriétaire d’une petite boutique de tabac, dontPaine d’ailleurs s’occupera jusqu’en 1774, tout enparticipant très activement aux soirées politiques etlittéraires à l’auberge White Hart de Lewes.

Toute cette période, avant que Paine décide fina-lement d’émigrer en Amérique, s’avère déterminantepour lui car c’est là qu’il commence à s’engager et àse former politiquement. C’est au « White HartEvening Club », où se rencontrent quotidiennementplusieurs petits commerçants et artisans politisés,que Thomas Paine commence à manifester sonvéritable talent de pamphlétaire. Il sera même élu parses compères « General of the Headstrong war » tantil s’avère déjà, selon son ami et futur biographeThomas Clio Rickman, « persévérant dans unebonne cause et obstiné dans une mauvaise ».

Après un second mariage avec Elizabeth, la fillede Samuel Olive, décédé entre temps, Paine fait unséjour à Londres en 1771 et s’intéresse de près aumouvement populaire « Wilkes and Liberty » qui

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agite la métropole au cours de 1772-1773. À la foismembre du Parlement et éditeur d’un petit journalsatirique, le North Briton, Wilkes s’en était pris auxpolitiques du gouvernement de Lord Bute et avaitapparemment insulté le roi. Or, son expulsion de laChambre des communes et sa condamnation à vingt-deux mois de prison pour libelle avaient déjà suscité,en février 1769, la formation d’une société dedéfense du Bill of rights qui réclamait, entre autres,une représentation accrue de la population et desélections annuelles au Parlement. Catalyseur invo-lontaire de ce mouvement de réformes parlemen-taires, car Wilkes n’était aucunement républicain, sacause met néanmoins en lumière la corruption gou-vernementale et suscite la mobilisation des petitscommerçants, des artisans et des classes laborieuses,totalement exclus alors du processus électoral etpolitique. À cette époque en effet, seulement 5 % dela population anglaise avait droit de vote aux élec-tions et plusieurs grandes villes ou même certainscomtés n’étaient nullement représentés au Parlement.

C’est dans ce contexte d’agitation populaire quePaine rédige un premier essai vindicatif, à lademande même de ses collègues de la Régie. Ainsiparaît, en 1772, The Case of the Officers of the Excise,véritable plaidoyer syndical avant la lettre, dénonçantles bas salaires et le dur travail des douaniers. Paines’avise aussi d’en adresser un exemplaire à tous lesmembres du Parlement pour qu’ils adoptent desmesures visant à « améliorer le statut des classes labo-rieuses ». Or, dans ce premier texte pamphlétaire, quipréfigure la montée du républicanisme artisan en

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Angleterre autant qu’en Amérique, Paine exprimedéjà clairement son parti pris en faveur des classesdéfavorisées. Il y écrit notamment :

Les gens aisés et riches penseront peut-être que jeprésente un portrait exagéré de la situation, mais s’ilspouvaient descendre dans les régions froides dubesoin, dans le cercle polaire de la pauvreté, ils cons-tateraient que leur opinion change avec le climat.

Ses prises de position et son agitation politiquelui valent toutefois d’être renvoyé définitivement de laRégie en 1774. Il est alors forcé de vendre la tabagietenue par son épouse et sa belle-mère puis, le 4 juin1774, il se sépare officiellement mais à l’amiable, desa femme qu’il n’avait épousée que par convenancesociale suite au décès de Samuel Olive. Mais lecongédiement de Thomas Paine par la Régie desdouanes aura bientôt une conséquence majeure,comme l’écrira plus tard le journaliste WilliamCobbett : « Il a coûté à l’Angleterre ses coloniesaméricaines ».

Car en ce même été de 1774, à Londres, Painefait la connaissance de Benjamin Franklin dont ilpartage déjà l’intérêt pour la science et vraisembla-blement les idées politiques. Or, constatant la situa-tion plus que précaire dans laquelle Paine se trouve àce moment, Franklin lui conseille de partir pourl’Amérique en lui donnant en plus une lettre derecommandation adressée à son gendre, RichardBache, et qui le présente comme « un jeune hommeingénieux et de grande valeur ». Car, ingénieux etaudacieux, Thomas Paine l’était déjà, au point derépliquer à la fameuse maxime de son mentor

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Franklin, « Là où la liberté existe, là est mon pays »,par cette phrase plus étonnante encore : « Là où laliberté n’existe pas, là est mon pays ». On ne sauraitdire s’il désignait par là son Angleterre natale ou sonprochain pays d’accueil, mais son propos correspondbien à sa mission de pamphlétaire et visionnaire con-sacrant sa vie à promouvoir, partout où il passera, lacause de la liberté, et qui aura, partout aussi, à enpayer le prix.

MMais pour l’instant, encouragé par cet appui

décisif de son nouvel ami Franklin, Thomas Paine,alors âgé de 37 ans, quitte l’Angleterre à destinationde l’Amérique. Il s’embarque à bord du LondonPacket le 30 octobre 1774 et se retrouve, au début dedécembre 1774, à Philadelphie, la capitale duNouveau Monde à cette époque. Son arrivée enAmérique va transformer radicalement sa propresituation et même bientôt le sort de tout le continent.

Ainsi, après avoir travaillé comme éducateurdans quelques familles notables de Philadephie,Paine se voit offrir, dès février 1775, le poste d’édi-teur puis de rédacteur en chef du PennsylvaniaMagazine que vient tout juste de fonder le libraire-imprimeur Robert Aitken. Le 8 mars suivant, ilpublie dans le Pennsylvania Journal un audacieuxtexte abolitionniste, intitulé « African Slavery in Ame-rica », qu’il signe d’ailleurs polémiquement Justiceand Humanity. Il gagne ainsi l’amitié du Dr BenjaminRush avec lequel il fonde, le 14 avril 1775, à la

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Taverne Soleil de Philadelphie, la première Sociétéanti-esclavagiste du continent. Tout en poursuivantson travail d’éditeur pour le compte de RobertAitken, il produit d’autres articles pour le Pennsylva-nia Journal où il met en valeur ses idées républicaineset formule déjà certaines critiques concernant ladiscrimination à l’égard des femmes.

Mais en raison des événements qui se bousculenttant en Europe que dans le Nouveau Monde, unautre sujet commence à retenir sérieusement sonattention. Celui des relations de plus en plus tenduesentre les colonies américaines et l’Empire britan-nique. Cette question sera d’ailleurs au centre de sonpremier pamphlet majeur, Le Sens commun, quePaine commence à rédiger, dans le plus grand secret,dès l’automne 1775.

Il faut rappeler ici que l’Angleterre, ruinée parses dépenses de guerre contre la France et l’Espagne,avait déjà imposé de nouvelles taxes qui affectaientde plus en plus l’économie générale et le commercejugé « illégal » entre les colonies américaines et lesAntilles françaises et espagnoles. Les colons améri-cains se voyaient donc frappés d’impôts et de taxesmultiples, au motif officiel « de subvenir, pour saMajesté, aux dépenses liées à la défense, à laprotection et à la sécurité des colonies ».

À ce chapitre, il y avait d’abord eu le Sugar Act(1764) qui imposait une taxe d’importation sur lamélasse antillaise, puis le fameux Stamp Act (1765)qui, en raison de sa portée plus générale, suscitabientôt la création de plusieurs sociétés de résistanceappelées, entre autres, les « Fils de la liberté ».

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Préconisant déjà le boycottage des marchandisesvenues de l’Angleterre, ces associations patriotiqueset populaires constituaient aussi des lieux privilégiésd’apprentissage de la liberté et de la démocratie (selfgovernment).

Mais le gouvernement anglais avait ensuite votéla loi Townshend (1767) qui taxait les matièrespremières essentielles aux colonies dont les actes derésistance furent d’ailleurs réprimés par les armeslors du Massacre de Boston en 1770. Il y avait euplus récemment encore le fameux Tea Act (1773),suivi du célèbre Boston Tea Party, lequel provoqua lacolère du roi et l’adoption subséquente des Lois ditesIntolérables (1774) qui déclenchèrent finalement lapremière vraie révolte des Américains. Le QuébecAct du 1er mai 1774 va ultimement faire déborder lacoupe, comme on le verra plus loin.

C’est alors que survient, le 19 avril 1775, labataille de Lexington qui marque le début officiel deshostilités et qui va d’ailleurs inciter le Congrès conti-nental, tout juste formé par les treize colonies, à leverune armée le 10 mai 1775, et à en confier le com-mandement à George Washington dès le 15 juinsuivant. L’Amérique révolutionnaire entrait doncdans une véritable guerre d’indépendance qui, bienau-delà de la fameuse Déclaration du 4 juillet 1776,ne se terminera qu’en 1783.

MCes événements-chocs de l’année 1775, qui

coïncident en fait avec l’arrivée de Thomas Paine en

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Amérique, le marquent profondément et vont déter-miner sa stratégie en tant que pamphlétaire politique.Ainsi, le drame de Lexington puis la Proclamation deGeorge III contre l’ultime Pétition du Rameaud’olivier, qui avait été présentée par le Congrès enjuillet 1775, deviennent pour lui des argumentsdécisifs tant pour contrer l’opinion encore majoritairedes tenants de la réconciliation avec l’Empire, quepour plaider radicalement en faveur de l’indépen-dance américaine.

Il faut souligner aussi qu’au moment où Paines’apprête à publier son audacieux pamphlet l’idéed’indépendance n’effleure pas encore l’esprit descolons américains. Paine en est d’ailleurs pleinementconscient puisqu’il confiera plus tard qu’« il étaitencore périlleux pour un homme à ce momentd’épouser en public la thèse de l’indépendance ». Enfait, seuls quelques intellectuels et militants radicauxentrevoyaient alors la possibilité de se séparer del’Angleterre ou étaient même convaincus de la néces-sité de l’indépendance américaine. Cependant, aucund’entre eux n’avait encore osé l’écrire et tous, saufSamuel et John Adams, hésitaient à s’en afficherpubliquement. Paine quant à lui, encouragé dans sonprojet d’écriture par son ami Franklin et soutenudans son option indépendantiste-républicaine par sesdeux premiers lecteurs critiques, Benjamin Rush etDavid Rittenhouse, n’hésitera pas à se déclarerouvertement en faveur de l’indépendance américaineet à en promouvoir radicalement la cause. Son pam-phlet s’avérera d’ailleurs tout à fait décisif pour lacréation des États-Unis d’Amérique.

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TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos 7

La vie de Thomas Paine avant la publicationdu Sens commun 1737-1776 11

Le Sens commun de Thomas Paine publiéle 10 janvier 1776 25

Thomas Paine, Le Sens communAdressé aux habitants de l’Amérique(Nouvelle édition, 1776) 47

La vie de Thomas Paine après la publicationdu Sens commun 1776-1809 139

Le Québec à l’heure de la révolutionaméricaine 155

Bibliographie 181

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COMPOSÉ EN PLANTIN CORPS 10,5SELON UNE MAQUETTE RÉALISÉE PAR JOSÉE LALANCETTE

ET ACHEVÉ D’IMPRIMER EN SEPTEMBRE 1995SUR LES PRESSES DE AGMV

À CAP-SAINT-IGNACE, QUÉBEC

POUR LE COMPTE DE DENIS VAUGEOIS

ÉDITEUR À L’ENSEIGNE DU SEPTENTRION

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