EXAMENS D'EPS ET CONTENUS...

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PRÉPARATIONS AUX CONCOURS - FORMATION CONTINUE - PRÉPA EXAMENS D'EPS ET CONTENUS D'ENSEIGNEMENT PAR L. FORESTIER Alors qu'est en cours la réforme des programmes et des examens d'EPS dont l'enjeu est important pour le devenir de la discipline, les propos qui suivent visent simplement à apporter quelques éléments à la réflexion actuelle. Partant de l'objet des épreuves d'examen : « certifier les acquis des élèves à l'issue d'un suivi disciplinaire », on peut s'inter- roger en effet sur l'existence d'une réelle cohérence entre la nature des épreuves et le suivi d'enseignement qu'elles sanction- nent. LES EPREUVES D'EPS AU BAC AVANT 1984 NATURE Les épreuves d'EPS au baccalauréat compor- taient : Une épreuve gymnique au sol comprenant huit séries de sept exercices numérotés par ordre de difficulté croissante parmi lesquels le candidat choisissait celui qui lui convenait, ainsi qu'un grimper de corde chronométré. Des épreuves d'athlétisme comprenant : - un saut en hauteur, - un lancer de poids, - une course de résistance (garçons seule- ment), - un lancer d'adresse (filles seulement). Une épreuve de natation. NOTATION L'emploi nouveau de la table « Letessier » modulait les notes selon l'âge et le sexe des candidats. L'EPS apportait deux points en plus et ne faisait pas l'objet d'un coefficient. COMMENTAIRES Ces épreuves présentaient, selon le législa- teur, une amélioration par rapport aux an- ciennes : « La création d'une épreuve de gymnastique au sol s'adaptant aux possibilités physiques de tous les candidats permet aux plus faibles d'exécuter les épreuves sans risque d'accidents même bénins ; ilfaut aussi laisser aux meilleurs la possibilité d'exprimer leur supériorité » (C 1416 EPS3 du 19/12/1959). « L'emploi de la nouvelle méthode de cotation ne comporta pas l'inconvénient d'une limitation des performances à un minimum et à un maximum qui incitait les plus faibles à dépasser leurs moyens et qui ne permettait pas de récom- penser les plus performants ». Après quelques années d'expérimentation, ces épreuves furent jugées réductrices par rapport aux possibilités qu'offrait la pratique des activités physiques et sportives préconi- sée par la programmation définie dans la circulaire du 19 octobre 1967, et par rapport à la mission éducative assignée à l'EPS : « L'EPS agit sur l'individu conçu dans sa tota- lité et contribue à la formation de sa personna- lité en l'aidant à s'épanouir (1) physiquement, intellectuellement et moralement ». La préparation aux épreuves d'examen n'oc- cupait généralement qu'un temps, situé le plus souvent en fin d'année. N'est-il pas possible de supposer que l'enseignant accor- dait, implicitement, plus d'importance à la mission de l'EPS qu'aux résultats obtenus aux épreuves retenues ? Et que le même enseignant, ayant assimilé les indications données par le tableau de la combinaison des EPS № 229 - MAI-JUIN 1991 27 Revue EP.S n°229 Mai-Juin 1991 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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PRÉPARATIONS AUX CONCOURS - FORMATION CONTINUE - PRÉPA

EXAMENS D'EPS ET CONTENUS D'ENSEIGNEMENT

PAR L. FORESTIER

Alors qu'est en cours la réforme des programmes et des examens d'EPS dont l'enjeu est important pour le devenir de la discipline, les propos qui suivent visent simplement à apporter quelques éléments à la réflexion actuelle. Partant de l'objet des épreuves d'examen : « certifier les acquis des élèves à l'issue d'un suivi disciplinaire », on peut s'inter­roger en effet sur l'existence d'une réelle cohérence entre la nature des épreuves et le suivi d'enseignement qu'elles sanction­nent.

LES EPREUVES D ' E P S AU BAC

AVANT 1984

NATURE

Les épreuves d'EPS au baccalauréat compor­taient : Une épreuve gymnique au sol comprenant huit séries de sept exercices numérotés par ordre de difficulté croissante parmi lesquels le candidat choisissait celui qui lui convenait, ainsi qu'un grimper de corde chronométré. Des épreuves d'athlétisme comprenant : - un saut en hauteur, - un lancer de poids, - une course de résistance (garçons seule­ment), - un lancer d'adresse (filles seulement). Une épreuve de natation.

NOTATION

L'emploi nouveau de la table « Letessier » modulait les notes selon l'âge et le sexe des candidats.

L'EPS apportait deux points en plus et ne faisait pas l'objet d'un coefficient.

COMMENTAIRES Ces épreuves présentaient, selon le législa­teur, une amélioration par rapport aux an­ciennes :

« La création d'une épreuve de gymnastique au sol s'adaptant aux possibilités physiques de tous les candidats permet aux plus faibles d'exécuter les épreuves sans risque d'accidents même bénins ; il faut aussi laisser aux meilleurs la possibilité d'exprimer leur supériorité » (C 1416 EPS3 du 19/12/1959).

« L'emploi de la nouvelle méthode de cotation ne comporta pas l'inconvénient d'une limitation des performances à un minimum et à un maximum qui incitait les plus faibles à dépasser leurs moyens et qui ne permettait pas de récom­penser les plus performants ».

Après quelques années d'expérimentation, ces épreuves furent jugées réductrices par rapport aux possibilités qu'offrait la pratique des activités physiques et sportives préconi­sée par la programmation définie dans la circulaire du 19 octobre 1967, et par rapport à la mission éducative assignée à l'EPS : « L'EPS agit sur l'individu conçu dans sa tota­lité et contribue à la formation de sa personna­lité en l'aidant à s'épanouir (1) physiquement, intellectuellement et moralement ».

La préparation aux épreuves d'examen n'oc­cupait généralement qu'un temps, situé le plus souvent en fin d'année. N'est-il pas possible de supposer que l'enseignant accor­dait, implicitement, plus d'importance à la mission de l'EPS qu'aux résultats obtenus aux épreuves retenues ? Et que le même enseignant, ayant assimilé les indications données par le tableau de la combinaison des

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PAR ATIONS AUX CONCOURS objectifs et des moyens considérait que l'effet général, ainsi que les effets particuliers de la pratique de plusieurs APS concouraient au développement des facteurs d'exécution ré­clamés par les épreuves ? Le nouveau barème prenait en compte l'âge des élèves, mais non la disparité des quantités de pratique. Enfin, il est à souligner que le candidat obtenait une « note EPS » qui en fait le situait dans ses capacités en natation, en athlétisme, en gymnastique. Ainsi, le jeune savoyard qui descendait à skis les pistes noires se voyait attribuer 3/20 en EPS !!! à partir d'épreuves qu'il effectuait pour la 3 e ou la 4e fois sur un stade récemment libéré d'un manteau de neige !

DEPUIS 1984

Les épreuves d'EPS aux différents examens (Brevet, CAP, Baccalauréat) offrent des points communs.

NATURE Les épreuves comprennent : Une épreuve obligatoire en athlétisme, nata­tion ou gymnastique. Des épreuves complémentaires choisies parmi sept domaines d'activités. 1) Activités de Pleine Nature, 2) Activités physiques duelles, 3) Activités gymniques, 4) Danse, activités d'expression, 5) Sports collectifs, 6) Athlétisme, 7) Natation.

NOTATION Le contrôle s'effectue en cours de formation et à des degrés d'importance divers : - en contrôle continu, - en contrôle ponctuel. Les critères d'évaluation à des degrés d'impor­tance divers portent sur : - la performance, - l'évaluation motrice complémentaire, - la connaissance des APS, - la participation et le progrès.

L'EPS fait l'objet de coefficients.

COMMENTAIRES Sur le plan de la notation, plusieurs remar­ques sont à faire : Les barèmes sont à nouveau uniques (pour les épreuves à barème national) et ne prennent pas en compte les âges, les morphologies, les contingences et les quantités de pratique. L'évaluation complémentaire (évaluation mo­trice, connaissance, participation et progrès) ne peut pas être considérée comme un ins­trument objectif ; elle ne précise pas la note de performance mais en modifie le poids dans la moyenne générale - « Lorsque la note de performance est élevée, l'évaluation com­plémentaire tire vers le bas. A l'inverse, celle-ci tire vers le haut lorsque la performance est faible» (5).

La seule appréciation de l'efficience motrice (son résultat dans la performance, son pro­cessus d'exécution dans l'évaluation motrice) focalise l'attention sur l'utilisation du corps-outil, sur l'exploitation des contingences temporelles matérielles d'exécution par rap-

Tableau de synthèse arrêté au 12 novembre 1986 - revu au 18 janvier 1988 Références 1. MEN. Collèges Programmes et Instructions 1985. Arrêté du 14/11/1985. 2. Circ. 84-295 du 10 août 1984 |B0 33 du 20/9/84) Bac. NS 84-287 du 9 août 1984 : épreuves facultatives (BO 34 du 27/9/84). 3. MEN/SEPS Le contrôle continu en LP : référentiel EPS : mai 1986. 4. Cir. 85-377 du 29 oct. 1985 (BO 39 du 7/11/85) CAP/BEP. 5. Lettre MEN/SEPS 4 DL/4 n o 1612 du 27/12/85 CAP. 6. Décrets 86-934 du 30/7/1986 et 86-935/36 (Coef. 1 et CA|. 7. N. de S. 87-331 du 19/10/87. Recommandations pédagogiques concernant l'évaluation des résultats scolaires en EPS au titre du Brevet.

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FORMATION CONTINUE - PRÉPARATIONS AUX CONCOURS - FORMAI

port aux seules exigences, aux caractéristi­ques, à la logique de l'activité. Pourtant, en première approche, c'est un satisfecit. « Les nouvelles épreuves » recueil­lent un constat quasi général positif : - un changement d'attitude de la grande majorité des élèves qui semblent plus moti­vés, - une mobilisation exceptionnelle des ensei­gnants se traduisant, dans des charges horai­res accrues, par des réflexions et projets aussi riches que variés (3).

La responsabilité dévolue aux enseignants dans les modalités de l'évaluation complé­mentaire a, de proche en proche, suscité une réflexion individuelle et collective au sein de chaque établissement, au sein des instances de la Formation Professionnelle Continue. Les innovations introduites dans l'évaluation ont facilité l'élaboration des projets pédago­giques.

REPERCUSSION SUR L'ENSEIGNEMENT

Pourtant, malgré ces points positifs, une étude approfondie des résultats obtenus aux épreuves et des modalités d'enseignement Justine la nécessité de la réforme annon­cée (4) au niveau du nombre, de la diversité, de la rationalité et du choix des pratiques, ainsi que de la manière d'enseigner.

CHOIX ET DIVERSITE DES PRATIQUES

Les exigences des épreuves dans le résultat d'excellence à obtenir (aussi bien dans la performance que dans le comment faire) ont peu à peu réduit la diversification des prati­

ques. Certains établissements n'offrant quel­quefois en choix que les épreuves à barème national (athlétisme, gymnastique, natation), c'est-à-dire les activités des épreuves de 1959. La proposition d'autres pratiques (différentes de celles imposées) n'est le plus souvent effectuée que dans un souci de diversification ou d'exploitation des contingences matériel­les locales, sans une réelle justification ra­tionnelle de formation. Cet effet réducteur aléatoire s'inscrit en op­position à l'orientation voulue par le législa­teur.

MANIERE D'ENSEIGNER

Depuis 1984, la préoccupation première s'est portée sur l'évaluation avec la nécessité de la définition de niveaux d'habileté et de celle des critères de réussite. L'examen comparatif des fiches (qui, de plus en plus, constitue le mode de communication privilégié du professeur à l'élève), en vue de la tâche à exécuter ou à évaluer, permet de constater une différence très réduite entre le descriptif technique de la tâche, l'énuméra-tion des critères de réussite, les principes d'action, les principes opérationnels ou les critères d'évaluation... autant de données mal cernées.

La pédagogie qui se veut différenciée, se traduit alors par un choix de l'élève sur le niveau d'habileté qui lui semble accessible et par un auto-didactisme !!! Pédagogie bien éloignée de celle attachée au nom de Louis Legrand pour qui « différen­cier c'est rendre par la méthode et la progres­sion, l'assimilation du programme commun d'Education ». Ceci en partant de la repré­

sentation de l'élève, de sa singularité à appré­hender un savoir-faire par le visuel, le rythme, l'imitation, le mode auto-adaptatif en fonction de l'évolution de l'aménagement du milieu... La démarche didactique, qu'André Giordan définit comme une approche nouvelle des questions éducatives, se révèle bien appau­vrie par les constantes d'une évaluation d'examen limitée à la seule efficacité motrice. « La définition des niveaux d'habileté par les enseignants est rarement l'occasion de mettre en place des situations ouvertes, dispositions nécessaires pour acquérir de nouveaux savoir-faire et pour s'adapter à des situations nouvel­les, le comment faire étant évalué par rapport à la conformité avec une forme définie »(5).

Les remarques précédentes mettent en évi­dence que la centration sur l'activité a pour conséquence : - une nette réticence à une appréciation de l'élève dans le seul résultat de son action et une volonté implicite de prise en compte des capacités globales de l'individu ; - une nette répercussion par le négatif ou le positif des contenus et modalités des exa­mens d'EPS sur la nature et la conduite des enseignements ; - une transformation progressive des maniè­res d'enseigner qui d'Education Physique et Sportive devient une Instruction Sportive de plus en plus programmée ; - une rupture entre les objectifs assignés à l'EPS et l'objet de l'évaluation qui la sanc­tionne.

ESSAI DE REFLEXION SUR UNE ARTICULATION ENTRE LES OBJECTIFS, LES CONTENUS D'ENSEIGNEMENT ET LES EPREUVES D'EXAMEN

Si la centration sur l'individu, sur l'élève, se substitue à une centration sur les activités, les compétences devant résulter de la poursuite d'objectifs durant le cursus scolaire, ne peu­vent qu'être très différentes pour l'adolescent à l'issue du collège et le pré-adulte ou l'adulte à l'issue du lycée. Les contenus d'enseigne­ment sont alors possibles à définir en fonc­tion des objectifs particuliers à poursuivre et des compétences à obtenir.

AU COLLEGE

LES OBJECTIFS « La notion d'objectifs contient les caractéristi­ques des élèves » ( 6 ) .

L'adolescent est dans une phase aiguë de croissance conjuguée à l'évolution puber-taire. De la pratique des APS est attendue, en priorité, une aide au développement somati-que, aussi bien que psycho-moteur, et de la personnalité. En corollaire, sont escomptées l'acquisition d'une aisance relationnelle et l'émergence de préférences personnelles pour des activités. Le développement est souhaité harmonieux et optimal.

LES EPREUVES D'EXAMEN Les épreuves d'examen se doivent de certifier le degré de maîtrise qui résulte d'un dévelop­pement global. En EPS l'individu étant ap­précié dans son rapport corporel aux contin-

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gences matérielles, temporelles, humaines qui constituent le monde où il évolue. Autrement dit, (et cela figure sous des appro­ches diverses dans les Instructions Officielles de 1959, 1967 et 1985), les compétences doi­vent être appréciées dans trois grands champs de la motricité humaine (qui se différencie de la dextérité manuelle fine) qui permettent, le plus complètement possible, à l'individu, de percevoir, d'agir, de s'exprimer par la média­tion du corps : la relation au milieu, la rela­tion à autrui, l'expression de soi. Les APS se révélant à partir de cette analyse comme l'ensemble d'activités le plus riche dans la diversité et sa facilité de pratique sociale et scolaire.

La relation au milieu

Le milieu peut être terrien, aquatique, aérien, avec ou sans engin, avec ou sans incertitude. Athlétisme, natation, activités de plein air, gymnastique...

La relation à autrui

Dans le rapport individuel ou collectif, d'op­position ou de coopération. Sports collectifs, sports de combat, activités duelles...

L'expression de soi

Elle passe par la médiation du corps (qui constitue un véritable langage autre que ex­pression et perception orales, écrites ou plas­tiques). Activités d'expression, danse, natation syn­chronisée... Cette énumération est à la base de la justifica­tion du choix des épreuves qui devraient être au nombre de trois et comprendre obligatoi­rement une activité relevant de chacun des trois grands champs. La nature de l'activité dépendant des contingences locales d'ensei­gnement, comme cela sera analysé plus loin.

LA NOTATION

La poursuite, depuis plusieurs années, au niveau national, sous l'égide de l'Inspection Générale, d'une réflexion sur l'évaluation, démontre la difficulté à concéder l'objectivité d'appréciation de la production motrice et l'appréhension de la singularité de l'élève. De l'étude des modalités utilisées jusqu'à ce jour, ressortent la nécessité et la tentative d'une prise en compte de l'hétérogénéité des candidats et de l'hétérogénéité des quantités d'enseignement des APS faisant l'objet de l'examen.

L'hétérogénéité des élèves L'âge Le paramètre des âges est le plus simple à appréhender. Au barème unique a avantage à se substituer un système proche de celui dit de la table Letessier (encore utilisé en UNSS) ou celui innové pour l'Agrégation interne. (Plus faciles à définir, pour les épreuves barèmées, qu'appréciées, ces outils d'évalua­tion, ou ces indications de construction d'ou­tils ne peuvent pas relever de l'enseignant de terrain. Ils ne peuvent être élaborés que par des commissions de réflexion spécialement constituées d'experts).

Les ressources Le paramètre le plus difficile à cerner est celui des ressources de l'élève : morphologi­

ques, énergétiques, psycho-motrices, émo­tionnelles... Sur ce point, il convient de revenir sur l'éva­luation motrice, introduite par l'institution dans les examens, dans le but de compenser l'excès de l'inné dans les performances et qui (voir plus haut) ne joue que très peu dans le sens voulu. En effet, l'évaluation motrice s'effectue à partir de critères de réussite qui définissent techniquement le geste ou la tâche à partir du modèle (5) d'un corps norme ou du cham­pion. Cette définition exclut pour l'élève « non normalisé » une gestion originale de ses ressources. Il est donc pénalisé deux fois : dans sa performance et dans le processus de production de cette performance. Alors que les handicapés, lors d'épreuves sportives, mettent en évidence qu'une carence peut être totalement ou en partie compensée. Deux questions subsidiaires en découlent : - De la référence à la norme ou à la reproduc­tion du geste du champion, s'instaure un inconvénient de ne situer l'élève que dans ses manques et de ne jamais l'apprécier dans son degré de réussite singulière. - Dans ce contexte, qu'advient-il de l'ambi­tion de l'EPS de doter l'individu de capacités d'innovation et d'adaptation, autorisant de nouvelles compétences en réponse au chan­gement et à l'évolution (de lui-même et du milieu) ? En fait, l'enseignant introduit véritablement ce paramètre des ressources dans les compo­santes Participation et Progrès. Si l'assiduité et l'investissement ne peuvent être considérés comme une certaine maîtrise de soi, il n'en demeure pas moins que cela relève de l'atti­tude et non d'une compétence de production. La fiabilité d'une certification pour une vie entière ne peut pas porter sur une attitude scolaire sans risquer, à terme, de discréditer l'épreuve d'EPS. Toutefois, ce paramètre des ressources étant objectivement peu maîtrisable, il reste sou­haitable de conserver une composante assi­duité/investissement, mais en définissant plus finement son objet et en lui laissant un rôle de bonus/malus avec un impact de quelques points sur la note objective réservée à la production motrice.

L'hétérogénéité des durées de l'enseignement suivi Il est évident qu'un élève d'une classe de troisième ayant bénéficié d'une séance heb­domadaire de natation durant toute sa scola­rité présente des capacités supérieures à l'élève n'ayant participé qu'à douze séances ou même deux ou trois cycles de six semaines depuis son entrée en sixième. Pour résoudre ce problème, des solutions sont à rechercher, entre autres : - le choix de l'activité, par l'élève, pour la certification, parmi deux ou trois pratiquées durant l'année dans le même champ d'activi­tés ; - le livret, indiquant la nature et la durée des pratiques, qui suivrait l'élève depuis son début de scolarité.

LES CONTENUS D'ENSEIGNEMENT Les objectifs étant définis à partir des carac­téristiques des élèves en amont, les contenus d'enseignement apparaissent comme la rela­tion logique aux compétences attendues dans les épreuves d'examen en aval de la scolarité.

Deux contraintes apparaissent : - celle de retenir au Collège une palette d'ac­tivités couvrant les trois champs de la motri­cité, et cela sur la scolarité, l'année scolaire voire le cycle, - celle de prendre en compte les contingences matérielles existantes, les ressources et les contraintes pédagogiques (élèves et ensei­gnants). Ce qui signifie que la liberté pédagogique des équipes enseignantes doit être clairement réaffirmée aussi bien que l'obligation d'un projet pédagogique couvrant la scolarité pour chaque génération d'élèves au sein de l'éta­blissement. Le respect de l'élève impose une cohérence et un suivi des enseignements (ce qui n'exclut pas une souplesse d'adaptation).

AU LYCEE

LES OBJECTIFS Le développement corporel étant quasi-achevé et la personnalité se révélant plus affirmée, est attendue de la pratique des APS, une compétence à choisir, à exercer avec bénéfice bio-mécanique, bio-énergétique, bio-informationnel, une activité : en résumé, à gérer sa vie corporelle. Ceci dans un but immédiat de favoriser l'effort d'étude et à plus long terme de faciliter l'insertion sociale, professionnelle et d'établir un dynamisme ainsi qu'un équilibre de vie durables.

LES EPREUVES D'EXAMEN La compétence à exercer une activité com­prend celle d'agir autant avec efficacité (la seule réellement certifiée dans les examens actuels) qu'avec sécurité et responsabilité ; celle de gérer sa vie corporelle concerne l'ac­quisition d'une compréhension et une appré­ciation du mouvement de l'être humain.

Les goûts étant bien affirmés, il est possible d'envisager à travers deux activités au choix du candidat (dans deux champs d'activités différents) une appréciation :

De l'efficacité motrice - A travers la performance (notée selon des modalités proposées pour le Collège).

De la sécurité et de la responsabilité - A travers la demande, ou de l'observation d'une utilisation de matériels, de parades, de relation à autrui : joueurs, arbitre... De la compréhension et d'une appréciation du mouvement humain - A partir de l'appréciation de la capacité à préparer le corps à l'effort (échauffement, comportement en cours d'activité). - Du contrôle de connaissances sur les carac­téristiques essentielles d'une activité et des exigences motrices qui en découlent (en sa­voir-faire pratique).

Exemples : - préparation citadine à la pratique du ski de vacances, - précautions à prendre pour un jogging après un long temps d'inactivité, - appui sur des acquis dans un sport collectif pour en aborder un nouveau.

LES CONTENUS D'ENSEIGNEMENT Comme au Collège, l'exploitation des contingences d'enseignement relève de la responsabilité de l'équipe enseignante. Le projet pédagogique spécifie pour chaque génération d'élèves, de la Seconde à la Ter-

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- FORMATION CONTINUE - PRÉPARATIONS AUX CONCOURS - FORMA

minale, le cursus permettant une pratique diversifiée et équilibrée, un choix, la forma­tion recherchée.

Les compétences attendues nécessitent l'ap­propriation d'une véritable culture corporelle qui engage professeur et élèves dans un dialogue permanent, dans une recherche constante de l'utilisation la meilleure des contingences de pratique. Cela pour l'obten­tion d'un bénéfice de fonctionnalité corpo­relle, certes facteur d'efficacité motrice, mais non dans le seul objet du résultat optimal d'exécution.

De même dans l'optique privilégiant la sécu­rité et la responsabilité, l'explicite se substitue à l'implicite pour cerner la prévention. Si l'accident peut se définir (6) comme une inadéquation entre les ressources de l'exécu­tant, la tâche à accomplir et les contingences d'exécution, le dialogue engage vers une invi­tation à repérer : - les contingences d'exécution : état, utilisa­tion du matériel, conditions climatiques, bruit,... - les ressources de l'exécutant : fatigue, en­traînement, facteurs d'exécution, hypoglycé­mie,... - la tâche à accomplir : opportunité, progres­sivité de l'effort, répétition,...

Enfin, à souligner comment éviter la mise en relation des facteurs qui provoquent l'acci­dent. Cette culture corporelle faisant l'objet d'une évaluation, l'enseignant accomplit une véri­table formation qui lui permet d'authentifier sa mission éducative et de transmettre l'en­semble de son savoir dans une pratique d'activités.

VERS UN RENOUVEAU DE L'INDISSOCIABILITE DE LA PEDAGOGIE ET DE LA DIDACTIQUE ET DE LA SPECIFICITE DE L'E.P.S.

De cet essai de réflexion sur la nature de l'épreuve d'examen et de ses conséquences sur le contenu d'enseignement se confirme que l'E.P.S., spécificité scolaire, est en re­cherche constante pour concilier l'éthique sportive, qui suit l'évolution, les modes de vie avec les exigences propres du système éduca­tif. Depuis 1967 la sportivisation grandissante de l'E.P.S. a fait de la technicité sportive un support d'enseignement, puis, de fait, un contenu d'enseignement, enfin, un objet de certification. L'enseignant, dépossédé peu à peu de sa

mission d'éducation pour un rôle de techni­cien-entraîneur, tente de situer son identité dans le système éducatif par le recours à la rationalité et à la scientificité didactiques.

Gilles Bui-Xuan dans « Pédagogie de l'E.P.S. et/ou Didactique des A.P.S. » (7) démontre que « l'entrée en didactique » rassure dans un premier temps, semble justifier l'interven­tion habituelle. Puis, très vite, le niveau tech­nique étant atteint, et s'il n'est pas dépassé, un enfermement s'effectue dans des modèles de référence, des constructions pré-établies d'où l'élève réel « d'ici et maintenant » est exclu.

Reprendre l'individu comme verre-filtrant des A.P.S. n'est pas exclure l'importance de l'activité, mais s'en servir au bénéfice de la formation individualisée au lieu de condi­tionner l'individu selon une définition des exigences de l'activité.

Une fausse querelle serait de faire croire à un renoncement de la recherche d'efficacité motrice au profit d'un retour à une gestualité non signifiante.

Ce serait une erreur de négliger la dimension sociale et affective de l'action sportive. Mais l'éducation commence quand cette efficacité est recherchée de façon constante dans une volonté de la pérenniser.

Le public et les jeunes d'ailleurs ne s'y trom­pent pas. Lorsque l'exploit est éphémère, sans lendemain, son auteur, fût-il champion, s'en-fonçant dans un renouvellement de déboires physiques révélateur d'une inaptitude à gérer son potentiel corporel, l'ironie s'exprime !

Enfin, la centration sur l'individu aurait l'avantage de replacer la démarche pédago­gique comme élément de base de la réflexion didactique.

La pédagogie étant définie par Gil Mons « comme l'ensemble des stratégies, procédu­res, procédés construits par l'enseignant et/ou l'équipe pédagogique pour fournir à l'élève les éléments conceptuels et/ou maté­riels jugés nécessaires à son processus d'ap­propriation d'objets culturels » (8). Des épreuves d'E.P.S. qui, en fin de cursus scolaire, certifieraient une culture corporelle, une connaissance du corps en mouvement, anticiperaient sur l'exigence de l'opinion qui s'amorce peu à peu. La Société cesse progres­sivement de voir dans le corps un outil, encore plus un outil normé, pour entrevoir une redéfinition de son statut dans une nou­velle fonctionnalité, dans l'expressivité, la créativité. L'E.P.S. se situerait dans sa spéci­ficité de formation scolaire qui est la corpo­réité. Lyliane Forestier

IPR/IA E.P.S. - Rouen PHOTOS : M. CHAVANNES

NOTES

(1) Epanouir: Faire ouvrir - épanouissement : entier développement. Larousse 2 volumes. (2) L'EPS ne donnait que 2 points supplémentaires. (3) Revue Hyper n° 143 bis, juin 1984. (4) Labiche (J.) : L'EPS, une discipline en constante évolution - Journées d'études des IPS/IA ; Octobre 1990 ; Sorbonne. (5) Klein (G.) : Niveaux d'habileté et images de la compétence en EPS - Revue EPS n° 225. (6) Forestier (L.) : Efficacité et sécurité dans l'exécu­tion des tâches motrices - CRDP ; Rouen. (7) Mons (G.) : Pédagogie différenciée - Revue STAPS - Didactique et méthodologie des APS. (8) Bui-Xuan (G.) : Pédagogie de l'EPS et/ou didacti­que des APS.

EPS № 229 - MAI-JUIN 1991 31

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