Etude du terrain sur les processus de ciblage au Mali

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1 RAPPORT PROVISOIRE ETUDE DU TERRAIN SUR LES PROCESSUS DE CIBLAGE DES MENAGES VULNERABLES PRATIQUES AU MALI Consultants : Bamako, Aout 2015 A. Malet

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RAPPORT PROVISOIRE

ETUDE DU TERRAIN SUR LES PROCESSUS DE CIBLAGE DES MENAGES VULNERABLES PRATIQUES AU MALI

Consultants : Bamako, Aout 2015

A. Malet

C. Kamaté

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SOMMAIRE

I. CONTEXTE ET JUSTIFICATION

II. METHODOLOGIE DE L’ETUDE

III. APPROCHES DE CIBLAGE

IV. APPROCHES DE CIBLAGE IDENTIFIEES SUR LE TERRAIN

V. SYNTHESE DES PRATIQUES DE CIBLAGE OBSERVEES

VI. DISCUSSION ET ANALYSE DES APPROCHES OBSERVEES

VII. MODE DE CIBLAGE ET SITUATION DU CONTEXTE DE MISE EN ŒUVRE

VIII. MODE DE CIBLAGE ET COUT DE REALISATION

IX. CRITERES DE CIBLAGE DES MENAGES PAUVRES OU VULNERABLES

X. REGISTRE UNIFIE

XI. CONCLUSIONS

XII. ANNEXES : EXEMPLES DE PRATIQUES DE CIBLAGE

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I. Contexte et justification :1-1-Contexte :

Ces dernières années, le Mali a connu une augmentation importante de la récurrence des chocs affectant particulièrement les populations pauvres et vulnérables, sous l’effet conjugué de la crise agro-climatique de 2011-2012 et de la crise politico-sécuritaire de 2012…. Selon l’évaluation de la sécurité alimentaire réalisé en 2013 par le SAP, le PAM et la FAO au Nord du Mali, ¾ des ménages étaient vulnérables à l’insécurité alimentaire sévère ou modéré ; et la malnutrition aiguë était de 12% à Gao et 12,4% à Tombouctou…

L’interaction des effets à court terme de ces chocs et leurs conséquences à long terme ont déclenché un intérêt pour la thématique de la résilience. Le lancement de l’initiative AGIR en 2014 marque la volonté du GRM et de ses partenaires de construire une véritable base de résilience dans le cadre du Plan National de Réponse (PNR). De nombreuses initiatives concrètes travaillent sur le sujet :

- Programme National de Filets Sociaux « Jigisèmèjiri » financé par la Banque Mondiale ;- Commissariat à la Sécurité Alimentaire ;- ONG membre du Cadre Commun Filets Sociaux au Nord du Mali financé par ECHO ;- Agences des nations Unies (PAM, UNICEF, FAO, OMS).

1-2- Justification de l’étude :

Au niveau de toutes les interventions, le ciblage des ménages, les plus pauvres et/ou vulnérables, reste un sujet de discussion récurrent car il est de notoriété qu’un bon ciblage des groupes bénéficiaires est une condition indispensable de l’atteinte des objectifs et des effets escomptés.

La multiplicité des programmes de court terme répondant aux situations de crise comme celle qui prévaut au Nord du Mali, a eu comme conséquence directe l’hétérogénéité des approches de ciblage souvent développées et mises en œuvre de façon dispersée et avec une faible coordination entre les acteurs. Voilà qui justifie l’initiative de conduire une étude sur les approches de ciblage utilisées dans les opérations de filets sociaux au Mali (transferts monétaires, distributions de vivres ou de matériels, argent/vivres contre actifs, formation contre travail, vivres contre formation….). L’étude devra faciliter l’établissement d’un cadre d’échanges pour la mise en place et le fonctionnement d’un registre unique de ciblage des programmes de filets sociaux au Mali. L’initiative est conduite par un comité de pilotage constitué de 11 structures nationales.

1-3- Objectifs de l’étude :

L’objectif global assigné à cette étude est de contribuer à la définition d’une stratégie nationale de filets sociaux au Mali en lien avec le processus de relecture de la Politique Nationale de Protection Sociale du Mali.

Les objectifs spécifiques qui constituent l’ossature de l’étude sont au nombre de trois :

- Répertorier et cartographier (procéder au zonage) les différentes approches de ciblage utilisées par les acteurs humanitaires et de développement au Mali au cours des années 2013 et 2014.

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- Capitaliser les pratiques des approches de ciblage répertoriées en 2013-2014 et définir des fiches techniques résultant de cette capitalisation, tout en dégageant les mécanismes les plus adaptés (aux différentes zones et interventions) pour atteindre les ménages les plus pauvres et vulnérables, en intégrant le principe de base « ne pas nuire et dans le respect des ménages bénéficiaires ».

- Contribuer à la définition d’un mécanisme de ciblage des ménages les plus pauvres utilisables dans le cadre de la mise en place d’un Registre unifié (par la définition des principes de base facilitant la comptabilisation des données collectées par les différents acteurs).

L’étude devra se focaliser sur le ciblage des interventions d’assistance alimentaire et de filets sociaux (transferts monétaires conditionnels et inconditionnels et transferts de vivres dans le cadre de la réponse à la crise alimentaire et sécuritaire).

II. Méthodologie de l’étude :

La démarche méthodologique est passée par les étapes suivantes :

Une rencontre d’échanges du consultant avec le point focal technique de l’étude, Une séance de travail à l’interne des consultants pour cadrer la mission ; La collecte et l’exploitation des documents disponibles sur les processus de ciblage des

acteurs de l’humanitaire ; Des rencontres d’échanges avec les structures du niveau central intervenant dans

l’humanitaire (CSA, Direction Nationale de la Protection Sociale, Direction Nationale du Développement Social, PAM, UNICEF, SAP, OCHA, OXFAM) ;

L’élaboration des guides d’entretien pour la collecte de données au niveau des différents acteurs : Services régionaux et locaux du développement social et de l’économie solidaire, Conseils communaux, Services techniques régionaux de l’agriculture et des productions et industries animales, structures d’exécution des interventions humanitaires, focus groupes de bénéficiaires et non-bénéficiaires de l’assistance ;

La définition de la stratégie d’échantillonnage ; Le briefing du comité de pilotage sur les tous premiers résultats.

En raison du caractère essentiellement qualitatif de l’étude (étude prospective), l’équipe de consultants a opté pour un échantillonnage raisonné basé sur des acteurs pratiquant les différentes approches de ciblage identifiées et sur l’existence d’une masse critique d’acteurs sur les sites. Ceci a conduit à mettre l’accent sur les régions de Mopti et de Gao, auxquelles ont été ajoutées les régions de Kayes, de Sikasso et de Ségou. Il faut dire que les investigations ont aussi concerné la commune IV du District de Bamako et la commune de Tioribougou dans le cercle de Kolokani, région de Koulikoro. Les acteurs enquêtés sont :

- 06 structures du Développement Social et de l’Economie Solidaire ;- O5 structures de l’Agriculture ;- 05 structures des Productions et Industries Animales ;- 06 communes dont 03 rurales et 03 urbaines ;- 03 focus groupes de bénéficiaires et de non bénéficiaires ;- Et 15 acteurs de l’humanitaire dont certaines à plusieurs reprises sur différents sites.

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L’ensemble de l’équipe de consultants a pris part aux investigations à Bamako tandis que les enquêtes de terrain ont été réalisées par les deux consultants nationaux.

III. APPROCHES DE CIBLAGE :

Les principales approches de ciblage répertoriées au Mali sont :

- Le ciblage géographique :

Ce ciblage est généralement effectué sur la base des données d’enquêtes et de suivi effectués par les structures nationales en charge de la production de statistiques sur les indices de pauvreté et de vulnérabilité sur l’ensemble du territoire national. Ces structures sont entre autres : l’Institut National de Statistiques (INSTAT), le Système d’Alerte Précoce (SAP) et le mécanisme du Cadre Harmonisé, l’Observatoire du Développement Humain Durable (ODHD).

Les documents ou rapports de référence produits dans ce cadre sont :

- L’indice de pauvreté communale,- La situation sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages ;- L’indice de développement humain durable ;

Ces données permettent généralement d’identifier les indices recherchés, de définir des taux de fréquence et ou d’incidence et enfin de procéder à un classement effectif des communes selon leur degré de pauvreté ou de vulnérabilité.

Ce classement selon le niveau de pauvreté et de vulnérabilité des communes ne couvre pas les ménages. Pour atteindre le niveau ménage, les intervenants ont recours à d’autres types d’outils ou d’approches.

- Le ciblage communautaire :

Le ciblage communautaire est un mode de ciblage ou les communautés sont responsabilisées pour l’établissement des critères appropriés de pauvreté et ou de vulnérabilité, pour la mise en œuvre effective du ciblage et pour l’élaboration de la liste des bénéficiaires potentiels de l’assistance dans leur communauté.

Dans cette approche, les intervenants mettent en place des espaces d’information et de renforcement de capacités des communautés, les amènent généralement à mettre en place des organes/comités de sélection, à organiser des assemblées générales de partage et de validation des propositions issues du processus d’identification/sélection des bénéficiaires.

Ce processus s’organise autour de plusieurs étapes organisées par les communautés/collectivités et appuyées par la structure intervenante.

- Le ciblage par catégorie :

Le ciblage par catégorie est un ciblage dans lequel les structures intervenantes définissent initialement la catégorie de population vulnérable qui est la cible de leurs interventions. Ce mode de ciblage s’adresse généralement et prioritairement à des individus dans une communauté et moins à des ménages pris globalement.

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- L’auto-ciblage :

Avec ce mode de ciblage, ce sont les individus eux-mêmes qui font les démarches pour être bénéficiaires de l’assistance.

Dans ce cas, la démarche consiste pour la personne désireuse d’être bénéficiaire d’une assistance prend contact avec la structure intervenante. Cette dernière se donne les moyens par des enquêtes ou des observations pour constater et vérifier l’existence ou non des critères indispensables pour la prise en compte de la personne demanderesse dans la liste des bénéficiaires de la dite assistance.

- Le ciblage par des enquêtes socioéconomiques :

Pour ce qui est du ciblage par le biais des enquêtes socioéconomiques, il peut se faire selon plusieurs modalités qui sont :

o le ciblage par les enquêtes socioéconomiques systématiques dans une zone donnée (approche HEA),

o le ciblage par des enquêtes sociales (cas des indigents et des démunis)o et le ciblage par des enquêtes socioéconomiques sur un échantillon représentatif ;

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IV. APPROCHES DE CIBLAGE IDENTIFIEES SUR LE TERRAIN :

Approches de ciblage Cible Nature de l’assistance Structure rencontrée Région d’interventionLe ciblage communautaire Ménages vulnérables Transfert monétaire (cash) Jigiseme jiri, world vision,

DRDS-ES, OXFAM, DRCKayes, Sikasso, Mopti, Gao, Tombouctou

Distribution alimentaire générale (DAG) CARE, DRDS-ES, World Vision, CARITAS MALI, Croix Rouge Malienne, ADG, DRC, CICR,PAM, CRADE, TAOUSSA, ONG GARI, ONG ACAS, ACTED

Kayes, Sikasso, Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou

Food assistance/ cash for work YA-G-TU, CICR Mopti, Gao, TombouctouAssistance non vivre UNHCR, World Vision, ONG

Al Farouk, Confessions Religieuses, AMA,

Mopti, Sikasso

Activités génératrices de revenus Amprode Sahel, YA-G-TU, Mopti,Le ciblage par catégorie Enfants de 0 à 23

mois, Enfants de 0 à 5ans, Enfants parrainés de 6 à 15 ans, Femmes enceintes et allaitantes, Personnes Déplacées intérieures, Indigents, Victimes des mines, victimes de VBG

Nutrition UNICEF, PAM, YAGTU, AMEDD, ACTED

Sikasso, Mopti

Prévention des risques sanitaires (malnutrition, complications pré et post-natales)

PAM, YAGTU, UNHCR, CICR, Handicap International, UNICEF, World Vision, SLDS-ES,

Sikasso, Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou

Activités Génératrices de Revenus Handicap International, CICR, AMPRODE SAHEL

Gao, Tombouctou,

Protection Handicap International, OXFAM

Mopti, Gao, Tombouctou

Cash transfert UNHCR, CRS, World Vision, CARE Mali, PADMO, CRM, DRDS-ES,

Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou

Assistance non vivre UNHCR Gao, TombouctouSoutien aux moyens de subsistance (éleveurs, maraichers, agriculteurs

UNHCR, CICR, CRADE, Save The Children, FAO, OXFAM, Save the children, ACAS,

Ségou, Gao, Tombouctou

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Enda Mali, DRC, Mercy Corps, VSF Belgique

Distribution alimentaire CARE, OXFAM, CICR, FAO, GREFFA, World Vision, CRS, CRM, PADMO

Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou

Assistance sanitaire CICR, CRM, Handicap International

Mopti, Gao, Tombouctou

L’auto-ciblage complété par les enquêtes socioéconomiques systématiques ou par sondage

Les personnes déplacées intérieures, les indigents,

Transfert monétaire DRDS-ES, et ses partenaires Ensemble des régionsDistribution alimentaireVoucher santé SLDS-ES, CT, Handicap

InternationalToutes régions

Le ciblage par une enquête socioéconomique systématique des ménages (HEA)

Les ménages vulnérables

Distribution alimentaire générale (DAG) World Vision, CARE MALI Mopti, Tombouctou

Le ciblage sur sollicitation complété par des enquêtes de base

Enfants parrainés Développement zonal (ADP) World Vision Sikasso

Le ciblage par enquêtes socioéconomiques

Les indigents et démunies

- Assistance santé,- Appareillage ;- Transfert monétaire

SLDS-ES Kayes, Sikasso, Mopti, Gao et Tombouctou

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V. SYNTHESE DES PRATIQUES DE CIBLAGE OBSERVEES :

Le constat qui s’est dégagé de la mission de collecte terrain est que toutes les approches de ciblage rencontrées utilisent comme base de départ le ciblage géographique pour déterminer leurs zones d’intervention. Cette approche est basée sur l’exploitation des données des enquêtes régulières (réalisées par le SAP, l’INSTAT, l’ODHD) et les rapports périodiques et officiels de ces structures.

Les données nationales issues de ces enquêtes sont généralement utilisées pour élaborer l’annuaire statistique et les indices de vulnérabilité au niveau national désagrégés pour les niveaux région, cercle et commune du pays.

L’approche géographique part de ces informations nationales pour déterminer de prime abord les zones d’intervention à privilégier.

Cependant, les informations nationales ne permettent pas de couvrir la question des autres niveaux d’intervention comme le niveau village et le niveau ménage.

Les approches de ciblage pratiquées par les structures rencontrées partent donc généralement de ce prérequis pour procéder à l’identification des villages et des ménages bénéficiaires.

Les approches utilisées dans ce cadre sont : le ciblage communautaire, le ciblage par catégorie, l’auto-ciblage, le ciblage basé sur des enquêtes socio-économiques plus élaborées les unes que les autres.

V.1 LE CIBLAGE COMMUNAUTAIRE :

Le ciblage communautaire est pratiqué par la majorité des intervenants dans l’assistance humanitaire et dans les filets sociaux au Mali.

Ce choix de méthode de ciblage, très usité par les acteurs de la DAG et des filets sociaux en vue de l’identification des ménages vulnérables, se fonde sur le postulat que les populations vivant ensemble dans un espace social organisé sont les mieux à-même d’apprécier leur propre situation et niveau de vulnérabilité et ceux de leurs co-villageois.

Cette approche met au centre du processus de ciblage les acteurs locaux des communautés d’intervention et aussi les Responsables des organes élus des Collectivités territoriales. Ce qui, en plus de limiter l’occurrence des contestations, permet une sélection des bénéficiaires sur la base d’une connaissance approfondie des réalités personnelles et individuelles.

La pratique de l’approche se fait globalement de la même façon par l’ensemble des intervenants, à quelques nuances près (accent sur telle ou telle étape, mode de vérification et de validation des listes proposées, etc.) que nous verrons par la suite.

Les étapes suivies au niveau d’une commune sont donc généralement les suivantes :

- Etape 1 : La prise de contact avec la Mairie de la commune retenue pour l’information sur l’activité et sur le processus de mise en œuvre. Pendant cette étape l’information est donnée sur le nombre total de bénéficiaires attribué à la commune et à chaque village. Les quotas de bénéficiaires par commune sont fonction des taux de pauvreté et de vulnérabilité définis

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pour chaque commune. Sur la base du quota communal, la répartition se fait entre les villages au prorata de leur chiffre de population, de leur poids démographique.

- Etape 2 : La mise en place d’un comité communal de supervision du processus. Ce comité est généralement composé d’environ 07 à 09 membres comprenant : le maire, un conseiller communal, la représentante des femmes, le représentant des jeunes, un représentant des services techniques et des personnes ressources identifiées sur la base de leur représentativité et de leur crédibilité.

- Etape 3 : La planification, l’organisation et la tenue, par la structure intervenant et les membres du Comité communal, d’assemblée générale d’information dans chacun des villages de la commune ;

- Etape 4 : La mise en place des comités villageois de sélection. Ces comités sont généralement composés de 05 à 09 membres comprenant : un représentant des autorités villageoises, un ou des représentants des femmes, des jeunes, des groupes cibles. Ces personnes sont sélectionnées sur la base de critères comme : la crédibilité, la disponibilité. Parallèlement à la mise en place des comités villageois de sélection, des comités de plaintes sont également mis en place dans certains cas ;

- Etape 5 : L’information et/ou la formation des membres des comités villageois sur le processus et les critères de sélection retenus. A cette étape, certains intervenants donnent la possibilité aux communautés d’interagir sur les critères retenus en vue de les adapter et de les améliorer. Les critères qui reviennent le plus souvent ont trait à l’accès à l’alimentation, à la santé, le niveau d’équipement du ménage, l’existence ou pas de personnes handicapées, aux veuves sans soutien, aux ménages en manque de main-d’œuvre, etc…. ;

- Etape 6 : L’élaboration par le comité villageois d’une liste provisoire de bénéficiaires pressentis conformément au quota attribué au village ;

- Etape 7 : La soumission de cette liste provisoire au chef de village et à ses conseillers pour avis dans certains cas;

- Etape 8 : L’organisation d’une assemblée générale de validation de la liste des bénéficiaires. Cette assemblée générale est souveraine pour établir la liste définitive des bénéficiaires du village. A cette assemblée de validation, seront présents des membres du comité communal et de la structure intervenante. La liste des bénéficiaires est passée en revue et la possibilité de contestation est reconnue à toutes les personnes présentes à l’AG. Dans certains cas, il n’y a pas de contestation du tout. Dans d’autres les contestations donnent lieu à des débats, voire à des inclusions/exclusions. Il convient de noter que les inclusions/exclusions sont plutôt rares. Il y a aussi des cas où les inclusions/exclusions interviennent plus tard, suite à l’analyse des plaintes et à leur gestion ;

- Etape 9 : Une fois validée au cours de cette AG ou suite à l’analyse des plaintes, la liste des bénéficiaires du village devient définitive. Cette étape met fin en principe au processus de sélection des bénéficiaires. Cependant, certaines structures ajoutent une dernière étape au processus c’est-à-dire une étape de vérification par une enquête sur un nombre limité de ménages tirés au hasard sur la liste des bénéficiaires. Cette étape supplémentaire n’a pas d’incidence sur la liste définitive retenue en AG de validation.

Les observations faites sur l’application de cette approche de ciblage par les structures sur le terrain seront abordées dans les développements ultérieurs.

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V.2 LE CIBLAGE PAR CATEGORIE :

Ce mode de ciblage est généralement pratiqué par les structures ayant des cibles spécifiques ou des actions dirigées.

Ces structures sont entre autres celles travaillant avec les groupes cibles spécifiques comme : les femmes, les enfants (par ex. WV, UNICEF, CARE à travers YAGTU, etc.), les personnes déplacées (ACTED, WV, CARE, etc.), les victimes de catastrophes naturelles ou de chocs spécifiques (majorité des acteurs humanitaires).

Les pratiquants de ce mode de ciblage ciblent généralement tous les éléments présentant les caractéristiques spécifiques à leur catégorie (par exemple : les enfants malnutris d’une fourchette d’âge donnée, les femmes enceintes ou allaitantes, les personnes déplacées intérieures, les indigents, etc.).

Le ciblage est fait ici sur la base de l’appartenance à la catégorie retenue. La constatation se fait soit par observation ou après une enquête spécifique. Dans certains cas on se contente de la liste établie par le SLDS-ES (cas des déplacés), ou par des enquêtes diligentées par le SLDS-ES à l’initiative de la commune (cas des indigents).

A titre d’illustration, le ciblage des Personnes déplacées (PDI) s’est fait à travers les deux cas de figure suivants :

Premier cas de figure : (Personne déplacée)

- Le SLDS-ES procède à l’enregistrement des personnes déplacées s’étant fait déclarées,- Le SLDS-ES procède à la mise en place d’une base de données- Les acteurs humanitaires font recours à cette base pour procéder à leur distribution.

Deuxième cas de figure : (Personne déplacée)

- Le SLDS-ES procède à l’enregistrement des personnes déplacées s’étant fait déclarées,- Le SLDS-ES procède à la mise en place d’une base de données- Les acteurs humanitaires prennent la base SLDS-ES et la soumettent à leur propre traitement

pour établir une liste de bénéficiaires.

V.3 L’AUTO-CIBLAGE :

L’auto-ciblage comme son nom l’indique est le mode de ciblage ou le futur bénéficiaire fait lui-même la démarche afin d’être retenu comme bénéficiaire d’une assistance. Ici, les critères de ciblage sont préalablement définis par la structure intervenante et le postulant estimant répondre à ces critères cherche à se faire identifier comme tel.

Dans de tel cas de figure, la structure peut se donner les moyens de vérifier systématiquement pour chaque postulant ou par sondage sur un échantillon l’existence des critères de sélection retenus.

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V.4 LE CIBLAGE PAR UNE ENQUETE SOCIOECONOMIQUE : V.4.1 Le ciblage par une enquête d’évaluation économique des ménages (HEA) :

Ce mode de ciblage se fait sur la base d’une enquête socioéconomique systématique des ménages sur une zone donnée afin d’établir les niveaux de vulnérabilité de chacun des ménages et de pouvoir les classifier.

Dans cette approche chaque ménage de la zone d’investigation est étudié.

Cette approche ne vise pas de prime abord à établir une liste de bénéficiaires mais plutôt à identifier et classifier les ménages en fonction de leur degré de vulnérabilité apprécié essentiellement à l’aune de critères économiques (revenu des ménages, actifs fonciers, actifs liés à l’élevage, niveau d’équipement, dépenses alimentaires, etc…).

Cette approche a été pratiquée à Tombouctou par Care. Elle vient d’être pratiquée à Ténenkou (dans la région de Mopti) par les deux structures que sont World Vision et CARE Mali.

Dans la pratique, l’approche HEA se met en place comme suit :

- La structure détermine une zone d’intervention,- Elle met en place un dispositif d’enquête ;- Elle procède à une enquête exhaustive auprès de tous les ménages de la zone en vue de

pouvoir les caractériser économiquement ;- Les données d’enquête sont saisies et traitées ;- Les ménages sont ensuite classés par degré de vulnérabilité ;- Et les ménages les plus vulnérables sont priorisés pour l’intervention

V.4.2 le ciblage à la demande de la communauté complétée par des enquêtes socioéconomiques :

Ce mode de ciblage implique qu’une communauté (village, commune ou cercle) fasse une démarche de sollicitation auprès d’une structure d’appui. Cette sollicitation ou demande peut être prise en compte par la structure d’appui et amener cette dernière à entamer des enquêtes socioéconomiques et d’opportunités pour décider ou non de son intervention dans la zone.

Les étapes pour un tel mode de ciblage se déroulent comme suit :

- le Maire ou l’un des ressortissants de la commune fait la démarche de sollicitation auprès de la structure d’intervention,

- cette dernière décide de donner une suite à cette requête,- elle définit préalablement des critères (en fonction de ses objectifs et de ses missions) et des

conditions (opportunités et risques) pour son intervention ;- elle prépare et met en œuvre une série d’enquêtes et ou de sondage pour vérifier ces

critères et conditions d’intervention ;- elle consulte les Autorités locales et les services techniques ;- elle traite toutes les informations recueillies et détermine sur cette base d’intervenir ou pas.-

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V.4.3 le ciblage par les enquêtes sociales :

Ce mode de ciblage est utilisé par les Services de développement Social et d’Economie solidaire pour l’identification des indigents, à la demande des communes.

Nombre d’autres formes d’enquêtes socio-économiques utilisées par des acteurs humanitaires rencontrés visent à vérifier /valider les résultats de ciblages communautaires.

Des exemples de pratique de ciblage par des structures d’exécution sur le terrain sont présentés en annexe.

VI. DISCUSSION ET ANALYSE DES PRATIQUES DE CIBLAGE :

Les différentes approches de ciblage identifiées sur le terrain ont toutes l’ambition d’atteindre la cible, à savoir les personnes ou ménages vulnérables ou pauvres, avec le moins d’erreurs de sélection possible. Mais aucune des pratiques de ciblage n’est suffisamment élaborée pour être exempte de toute forme d’insuffisance. Il y a toujours des failles.

VI.1LES PRATIQUES DE CIBLAGE COMMUNAUTAIRE :

Ces pratiques de ciblage tirent avantage de la connaissance que les communautés ont d’elles-mêmes. Dans les petites agglomérations où les gens entrent en interaction quotidienne, se connaissent tous entre eux, l’identification et la hiérarchisation des ménages les plus pauvres est relativement faible. Mais dès que les villages ont une certaine taille, cet avantage s’amenuise et l’identification devient plus difficile. Il faut aussi compter avec d’autres écueils comme la tendance à favoriser tel ménage ou tel autre dans le village, et les velléités des autorités communales à vouloir influencer l’établissement des listes. Dans des cas extrêmes (comme à Lakamané dans le cercle de Diéma) on note la tentative de substituer à la liste définitive établie au village une autre liste. C’est dire que des garde-fous sont nécessaires pour déjouer les manœuvres frauduleuses.

Dans cet esprit, quelques suggestions sont faites ci-bas en vue d’améliorer la mise en œuvre de cette approche communautaire comme :

- 1er point d’attention : Beaucoup de structures vont directement au niveau de la commune pour mettre en place l’organe de gestion communal. Il serait plus pertinent d’impliquer le niveau cercle dans le processus et ne pas commencer seulement au niveau communal,

- 2ème point : l’attribution des quotas en fonction de la taille de la population des villages alors que l’incidence de la pauvreté n’est pas en fonction de la taille de la population. Il serait donc plus judicieux de trouver un autre moyen plus équitable d’attribution des quotas. Par ex. la tenue d’un CLOCSAD (Comité Local d’Orientation, de Coordination et de Suivi des Actions de Développement) au niveau du cercle sur la question des niveaux de vulnérabilité, de pauvreté dans les communes du cercle devra contribuer à mieux orienter l’attribution des quotas ;

- 3ème point : Même si globalement les tâches de ce comité consistent à organiser et suivre le processus au niveau communal, une suggestion sur sa composition pourrait être la suivante : 01 membre du bureau communal, 01 membre du conseil communal (généralement pas de la majorité politique), 01 représentant des chefs de village, 01 représentant des jeunes, 02

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représentants des femmes, 02 représentants des ordres religieux et ou de culte et 01 représentant de la structure d’intervention. Le rôle de ce comité communal serait de diffuser l’information sur le processus, d’appuyer les villages dans la mise en place des comités villageois et de veiller à la très large diffusion des informations ;

- 4ème point : la composition des comités villageois de sélection peut être la suivante : 01 représentant du conseil villageois, 01 représentant des jeunes, 02 représentantes des femmes, 01 représentant par quartier/hameau ou secteur du village ;

- 5ème point : le comité de plainte doit être systématiquement mis en place en même temps que le comité de sélection. Ce comité de plainte devra être composé d’au moins 05 leaders communautaires crédibles – responsables de quartier/secteur, responsables religieux/cultes, avec au moins 40% de femmes et ou de jeunes- ;

- 6ème point : il serait peut être intéressant de prévoir la tenue de deux AG et une période de temps entre l’AG de présentation de la liste provisoire et celle de la validation. Cette période pourrait être mise à profit par le comité de plainte pour recevoir et traiter toutes les plaintes. En effet, dans certains milieux, la prise de parole en public n’est pas facile pour certaines personnes à fortiori la revendication en AG d’un statut du reste pas valorisant ; ceci implique que tous les intervenants considèrent les résultats de traitement de plaintes dans la finalisation de la liste des bénéficiaires.

- 7ème point : l’observation d’une période de temps entre l’AG de présentation de la liste et l’AG de validation devra aussi être mise à profit par la structure intervenante pour faire des vérifications aussi bien par rapport aux plaintes que par un sondage aléatoire sur la liste des bénéficiaires pressentis si une enquête socioéconomique préalable n’est pas diligentée avant cette étape.

L’approche communautaire est la plus facile à mettre en œuvre, la moins couteuse en temps et ressources financières et la plus efficace pour limiter les risques d’inclusion/exclusion. Elle pourra être mise en œuvre à plus grande échelle et permet de mettre les populations au centre de la prise de décisions.

VI.2LES ENQUETES SOCIOECONOMIQUES DE TYPE HEA :

Malgré que la méthode HEA ne soit pas systématiquement appliquée par les structures sur le terrain, il y a à remarquer que ces approches de ciblage font appel à tout un dispositif d’enquêteurs, de superviseurs, assorti de moyens logistiques dont le financement n’est pas à la portée de toutes les interventions. Aussi, elles sont très demandeuses en temps et en technicité pour leur application sur le terrain. Elles sont relativement maîtrisables lorsque la zone ciblée est petite, mais à l’échelle d’un pays ou d’une région, ses coûts deviennent prohibitifs. Avec ces enquêtes la confiance dans les résultats requiert qu’elles soient conduites et traitées de manière exemplaire. Et même si ces conditions sont réunies, le point de vue des concernés est nécessaire pour jouer le rôle de filtre et valider les résultats : une enquête ne permet pas de comprendre et de tenir compte de toutes les inductions liées à la culture, ni même d’assurer une lecture correcte des mécanismes de fonctionnement socio-économiques d’une entité sociale donnée. Le temps requis pour mener ce ciblage à terme le rend inapproprié pour les interventions d’urgence.

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VI.3LE CIBLAGE PAR CATEGORIE :

Ce mode de ciblage a ses avantages parce que appliqué sur des catégories déterminées et utilisant des variables faciles à identifier comme : enfants scolarisables, enfants malnutris, femmes enceintes, victime d’un explosif, d’une inondation, etc. Mais dès que la catégorie ciblée recouvre une certaine étendue et/ou diversité, le ciblage par catégorie commence à montrer quelques faiblesses. C’est le cas vécu avec la catégorie des PDIs et des réfugiés. Cette approche a montré ses limites dans de nombreux cas lorsqu’il s’agit d’apporter de l’aide aux personnes déplacées : des personnes se sont fait enregistrer à plusieurs reprises dans des localités différentes……. C’est dire qu’aucune approche de ciblage n’est parfaite.

Les deux approches de ciblage les plus utilisées par les acteurs rencontrés sont le ciblage communautaire et le ciblage par catégorie. Ils sont la plupart du temps associés à des enquêtes socio-économiques légères, systématiques ou par sondage pour vérifier le dégré de fiabilité (enquêtes de validation ou de vérification). Ces approches doivent leur succès à leur coût relativement faible et à leur manipulation facile.

Si certaines approches de ciblage font peu ou pas de place à la contestation en assemblée villageoise et à des inclusions/exclusions, toutes donnent lieu à des plaintes dont la prise en charge et la gestion diffèrent d’une approche à l’autre, et souvent dans la même approche selon les acteurs de mise en œuvre. Dans tous les cas de figure, la mise en place d’un dispositif de communication et d’échange avec les communautés est indispensable à toutes les étapes et pour toutes les approches.

Il convient de noter par ailleurs que les structures de mise en œuvre recourent le plus souvent à plus d’une approche : elles dépendent de plusieurs bailleurs intervenant dans des domaines différents (urgence, résilience, développement) et recommandant subséquemment des approches différentes. Et même lorsqu’un acteur pratique une approche donnée, elle est généralement complétée par des apports d’une autre approche.

Enfin les critères utilisés se recoupent fréquemment s’ils ne sont pas simplement superposables.

Il en résulte que l’harmonisation des approches (déjà en marche au niveau des acteurs du cadre commun) est un objectif réalisable à bien des égards.

En définitive, il serait plus judicieux et pratique pour les actions d’assistance humanitaire et de filets sociaux futures d’adopter une approche combinant l’approche communautaire avec quelques éléments d’enquêtes sociaux économiques de vérification.

VII. MODE DE CIBLAGE ET SITUATION DU CONTEXTE DE MISE EN ŒUVRE :

Le contexte de mise en œuvre décrit la situation d’une zone déterminée à un moment déterminé de son existence. Le contexte d’intervention comprend non seulement les facteurs humains, géographiques, climatiques, économiques, sociaux, culturels, politiques, sécuritaires, temporels, spatiaux mais aussi leur imbrication. Cette multiplicité de facteurs rend complexe toute analyse de contexte notamment pour des interventions comme l’assistance humanitaire et ou les filets sociaux.

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Cette complexité associée à une très faible hétérogénéité des conditions de vie des populations sans oublier l’existence d’intérêts divers, rend des fois ardues les différents processus de ciblage.

Le choix des modes de ciblage doit donc tenir compte des réalités du contexte de la zone d’intervention : contexte de conflit, de catastrophe naturelle, de déficit chronique ou cyclique, etc. Tous les modes de ciblage ne sont pas appropriés dans tous les contextes d’intervention.

Pour le cas spécifique du Mali, trois types de contexte sont observables :

- le premier, couvre les régions chroniquement déficitaires en production céréalière du pays. Ces régions sont entre autres : Gao, Tombouctou, Kidal, Kayes et quelques cercles des régions de Koulikoro et de Mopti. Les modes de ciblage à privilégier dans ces régions doit donner une large place à la mise en œuvre de méthode de ciblage permettant une analyse fine des situations des ménages et une meilleure planification/programmation des réponses des intervenants.

- le second couvre spécifiquement les régions de Gao, Kidal et Tombouctou et est caractérisé par une crise politico-sécuritaire qui a entrainé une relative fracture sociale et une déstructuration du tissu économique et de production. Dans un tel contexte, les modes de ciblage les plus appropriés sont ceux permettant une minoration des couts, des délais de mise en œuvre et surtout ceux qui peuvent favoriser dans leur mise en œuvre la valorisation des facteurs de cohésion sociale et de recours mutuel (vivre ensemble) entre les populations vivant sur un même terroir.

- Le troisième contexte couvre l’ensemble des régions du pays et concerne la survenue de déficits périodiques de production et ou de catastrophes naturelles. Le mode de ciblage ici peut faire une large place aux statistiques des services techniques et à l’approche communautaire.

Au-delà de ces considérations, il a été fait mention par certaines structures de l’ouverture de leur assistance à des bénéficiaires non initialement ciblés afin de réduire les facteurs de conflits ou de renforcer les capacités de résistance de certains ménages. Ces nouvelles cibles sont entre autres les familles/ménages d’accueil des PDIs, les populations restées sur place dans l’assistance aux réfugiés de retour, etc.

En d’autres termes, plusieurs facteurs et critères concourent à l’établissement des listes de bénéficiaires dans les zones d’intervention. La prise en compte de ces facteurs relève de l’appréciation et de l’initiative de chacune des structures intervenantes.

VIII. MODE DE CIBLAGE ET COÜT DE REALISATION :

La phase terrain n’a pas permis de procéder à une évaluation fine des coûts de réalisation des différentes approches de ciblage rencontrés sur le terrain.

Néanmoins quelques éléments de coûts ont été donnés par les différentes structures. Ces estimations de coûts conduisent à penser que les modes de ciblage par des enquêtes socioéconomiques (sommaire ou approfondie) sont très demandeuses en temps mais aussi en ressources humaines et financières.

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Ainsi, pour le processus de ciblage effectué par DRC dans deux communes de la région de Tombouctou, les couts investis ont été estimés à environ 20.000.000 FCFA pour un temps consacré d’au moins un (01) mois. A l’échelle de plusieurs communes, les moyens à mobiliser pourraient être hors de portée pour la plupart des intervenants.

A la question du rapport coûts/efficacité de l’approche appliquée, les réponses données ont été très critiques sur l’opportunité réelle d’un tel mode de ciblage à l’échelle d’une intervention sur une saison ou dans des situations d’urgence.

La réflexion doit donc se poursuivre sur ces aspects.

IX. CRITERES DE CIBLAGE DES MENAGES PAUVRES OU VULNERABLES :

La collecte terrain a constaté une très forte similarité entre les critères utilisés par les différents intervenants pour l’identification des ménages pauvres et ou vulnérables dans les programmes de distribution alimentaire et de filets sociaux. Ces similarités relevées ne signifient pas une réelle absence de différences. En effet, les structures intervenantes n’utilisent pas toutes l’ensemble des critères. Certaines attentions sont aussi mise en avant par certaines structures comme : les femmes veuves chefs de ménage, les familles nombreuses avec beaucoup d’enfants à charge, les handicapés physiques, les malades mentaux, etc. Les critères les plus fréquemment appliqués sont :

- Le critère de l’accès et de la fréquence alimentaire du ménage,- Le niveau de capital ;- Le niveau et la source des revenus du ménage ;- L’accès aux moyens de production et de travail (pour les ménages en zone agropastorale) ;- L’existence de cheptel (pour les ménages en zone pastorale) ;- Le statut du chef de famille (forte prise en compte des femmes veuves, seules chargées de

famille) ;- Le niveau d’accès aux services sociaux de base (santé, éducation, eau potable) ;- La taille du ménage,- Etc.

En plus de ces critères, certaines structures intègrent d’autres critères comme l’accessibilité géographique, l’existence d’un marché fonctionnel, l’existence de possibilités d’intégration fonctionnelle entre les ménages pauvres et « nantis » dans la zone, etc.

En somme, le constat a été fait, dans les discussions avec les bénéficiaires et non bénéficiaires rencontrés, que les critères utilisés par les structures intervenantes sont presque les mêmes que ceux utilisés par les communautés pour caractériser les ménages. Ces bénéficiaires ont cité par ordre d’importance :

- Le critère sur la fréquence alimentaire (avec un accent beaucoup plus sur la quantité et la fréquence que sur la qualité et la diversité),

- Le critère sur la santé du chef de ménage et des personnes à charge (avec un accent sur l’invalidité et l’incapacité temporaire ou définitive) ;

- Le critère sur la femme chef de ménage (avec un accent sur le nombre d’enfants à charge et le manque d’appui social) ;

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- Le critère sur les moyens de production (actifs humains et accès à l’équipement) ;- Le critère sur l’habitat.

Dans beaucoup de cas, et surtout avec les approches communautaire et scientifique, les structures d’appui se donnent le temps et les moyens d’entrer en discussion avec les communautés pour appréhender leur perception exacte du contenu des deux concepts que sont la pauvreté et la vulnérabilité. Cette disposition devra être encouragée et systématiquement appliquée avant toute opération de ciblage dans une zone déterminée.

Par contre, le ciblage par catégorie s’adresse quant à lui à l’individu, soit dans une catégorie : femme, enfant, PDIs, Réfugiés de retour, victimes d’un choc ou d’une catastrophe naturelle ou à un groupe spécifique : indigents. Ici les critères sont relatifs à la catégorie et en fonction des objectifs de la structure d’appui.

Il faut cependant rappeler quelques remarques relevées par des agents de terrain sur les critères de ciblage appliqués et relativement à des faits culturels. En effet, selon eux, certains critères utilisés comme indicateurs (ou signe) de richesse doivent être relativisés. Il s’agit de critères comme la possession d’un patrimoine foncier (champs) dans certaines zones et la possession de bétail dans d’autre.

Pour le patrimoine foncier, ces agents ont estimé que dans certains cas la possession de ces actifs ne signifie pas automatiquement la production de richesse parce que le champ peut être non productif et le bétail n’est pas forcément monnayable. Ils suggèrent donc qu’en présence de telle possession chez un ménage que des investigations soient entreprises pour mieux apprécier leur apport dans le revenu réel du ménage.

X. LE REGISTRE UNIFIE :

Sur la question du registre unifié, la majeure partie des structures rencontrées (à l’exception du CICR) a exprimé son adhésion au principe d’une base unifiée d’information sur les bénéficiaires. Les avantages perçus à cet égard sont entre autres :

- Une meilleure efficacité dans les actions,- Une diminution des doubles attributions,- Une meilleure économie et utilisation des ressources limitées disponibles ;- Une meilleure orientation et prise de décisions au niveau de l’Etat et de ses partenaires ;- Etc.

Cependant, quelques inquiétudes et ou préoccupations ont été soulevées par les parties rencontrées. Elles sont relatives à :

- La question de la gestion, du suivi et de la mise à jour du registre,- La question de la détermination consensuelle de la nature des informations à mettre dans le

registre unifié ;- La question de la confidentialité, de la protection des personnes,- La question de l’usage qui sera fait des informations recueillies et celle de l’accord préalable

des bénéficiaires concernés ;- Etc.

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De façon générale, les attentes exprimées par les structures/individus rencontrés sont très diverses sur les cibles à couvrir (bénéficiaires des secteurs non contributifs et/ou contributifs, bénéficiaires consécutifs à un choc ou à une catastrophe naturelle, etc.).

Sur la question de l’ancrage, les structures rencontrées ont envisagé plusieurs alternatives comme :

- La Primature pour des raisons de cohérence, de coordination entre les différents secteurs nationaux concernés par la gestion et pour une affirmation claire de la volonté politique,

- Le Ministère de la Solidarité et de l’Action humanitaire qui est considéré comme étant le Département mandaté au niveau national pour la prise en charge et la gestion de l’assistance humanitaire et de la solidarité au Mali ;

- L’Institut National de Statistiques pour des raisons liées à la gestion, à la mise à jour des informations et à son expérience et sa capacité institutionnelle dans la production et la gestion de statistiques nationales ;

- Le Projet Filets Sociaux parce que porteuse d’une initiative et disposant de moyens institutionnels mais avec la condition que l’Etat procède à une redéfinition institutionnelle afin de transformer le projet en une institution nationale.

De ces différents avis et questionnements, il est possible de retenir la faisabilité d’un registre unifié des bénéficiaires. Ce registre pour un départ devra couvrir essentiellement les bénéficiaires du secteur non contributif sur lesquels existent déjà une bonne base d’information et spécifiquement les bénéficiaires de filets sociaux. Cette proposition s’inscrit dans la perspective de la mise en place d’une politique et d’un système pertinent de protection sociale et donc intégrant les facteurs d’orientation politique, stratégique et de durabilité.

Les autres catégories de bénéficiaires actuels comme : les personnes déplacées, les réfugiés de retour, les victimes de catastrophes naturelles périodiques ne doivent pas être des cibles prioritaires d’un tel registre national pour la simple raison du caractère éphémère de leur situation. Néanmoins, il peut être envisagé d’avoir un registre à plusieurs volets dans l’optique d’une plus grande visibilité et inclusivité des interventions d’assistance humanitaire et sociale.

Pour la mise en place du registre unifié, beaucoup de partenaires se disent dans les dispositions de fournir une partie de leur base de données portant sur les informations non confidentielles.

Il s’agira donc de convenir du spectre des informations à fournir pour démarrer le registre qui pourra être élargie au fur et à mesure. Dans cet esprit, les rubriques à retenir pourront être :

- L’identité de la personne, son âge, sa résidence,- Le statut matrimonial ;- Le statut économique ;- Le type de vulnérabilité ;- Les services offerts ;- La période d’accès autorisée ;

Pour la mise en place et le fonctionnement d’un tel registre, une large place doit être accordée aux services déconcentrés du développement social et de l’économie solidaire et aux collectivités territoriales. Une large implication de ces derniers permet non seulement d’impulser la mise en

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place de stratégies locales de prise en charge et de suivi mais aussi une réelle responsabilisation sur la question contrairement à la situation actuelle.

XI. CONCLUSIONS :

L’étude sur les pratiques de ciblage appliquées par les acteurs humanitaires au Mali a abouti aux principaux constats suivants :

- Les pratiques de ciblage identifiées sont diverses ; ciblage communautaire, ciblage par catégorie, ciblage HEA, auto-ciblage, ciblage au moyen d’enquêtes socio-économiques.

- Les approches de ciblage les plus usitées sont le ciblage communautaire et le ciblage par catégorie.

- Les critères de ciblage des différents acteurs se recoupent, suggérant l’existence de passerelles pour l’harmonisation.

- Quelle que soit l’approche de ciblage utilisée, les plaintes justifiées ou non, sont toujours présentes.

L’idée d’un Registre Unifié des bénéficiaires est bien accueillie par l’ensemble des acteurs rencontrés, exception faite du CICR. Ses avantages sont perçus. Mais l’on a des appréhensions par rapport à sa mise en œuvre. Par rapport à l’ancrage institutionnel d’un tel registre, les avis divergent. Les options vont de la Primature au Ministère de la Solidarité et de l’Action Humanitaire en passant par l’INSTAT et le Programme de Filets Sociaux « Jigisèmèjiri ». En définitive le choix de l’ancrage est, selon la plupart des interlocuteurs, hautement politique.

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XII. Annexes : Exemple de pratiques de ciblage

1. Association Y A. G-TU de Bandiagara

2. Conseil Danois des Réfugiés (DRC) de Gao

3. Association pour le Développement Global (ADG) de Diéma

4. Croix Rouge Malienne de Mopti

5. Projet Filets Sociaux Jigisèmèjiri Diéma

6. Handicap International Gao

7. OXFAM Gao

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Annexe 1 : Association YAG-TU Bandiagara :

Créée en 1997, l’Association pour la Promotion Féminine (YAG-TU) exécute plusieurs projets dont :

- Le Programme Empowerment des femmes et des filles (financement NORAD-Care Norvège),- Le programme de résilience communautaire (world Food Programme) ;- Le projet WASH SH Plus de Nutrition et Hygiène (USAID) ;- Le Programme de transformation de l’échalote de Dandoli (cofinancement 9e FED) ;- Le Programme d’amélioration des conditions de vie des femmes de 14 communes

vulnérables du cercle de Bandiagara pour le maraîchage.

Entrée dans l’humanitaire depuis 2011 avec la sécheresse qui sévissait, YAG-TU évolue dans un cercle chroniquement déficitaire au plan alimentaire : les terres cultivables dans le cercle couvrent moins de 10% de la superficie totale. De là la nécessité de cibler les plus vulnérables au sein des communautés.

YAG-TU a été outillé par CARE pour identifier les plus vulnérables. Les différentes étapes du processus de ciblage sont les suivantes :

la tenue de l’assemblée générale d’information : c’est la porte d’entrée ; la mise en place d’un comité de gestion (entendre de ciblage) dans tous les villages.

Ce comité est composé de 9 à 11 membres appartenant aux différents segments de la communauté villageoise. Il compte toujours un nombre impair de membre et 40% de femmes. Les membres du comité travaillent sur une base de bénévolat ;

la conduite de l’enquête socio –économique dans chaque village pour identifier les ménages pauvres selon des critères de vulnérabilité qui sont : les veuves chefs de ménage sans soutien, les ménages avec beaucoup de bouches à nourrir, les ménages de vieilles personnes , les ménages sans bras valides, sans équipements, etc.… ;

la classification des ménages identifiés comme pauvres des plus pauvres au moins pauvres ;

l’établissement de la liste des ménages bénéficiaires dans les limites du quota accordé au village ;

la tenue de l’assemblée générale de validation de la liste sortie de l’enquête ; la mise en place d’une commission d’enregistrement des plaintes au moment de la

distribution ; les plaintes enregistrées sont transmises pour la suite à CARE (existence aussi d’un numéro vert).

Une deuxième expérience de ciblage à YAG-TU date de 2011-2012. Il est intervenu dans le cadre de l’assistance aux déplacés avec CARE sur financement du PAM. Les listes des ménages bénéficiaires ont été établies par des comités communaux et validés par le service local du développement social en rapport avec le préfet du cercle de Bandiagara. Les listes ont été transmises à CARE : tous les ménages identifiés ont été bénéficiaire. Une autre expérience avec le PAM a eu lieu en 2014. Elle est relative à son programme bilatéral de résilience communautaire entre le PAM et YAG-TU. Elle a consisté à accompagner les communautés pour les amener à se prémunir contre les catastrophes naturelles par des aménagements de petits barrages de retenue pour le maraîchage et à construire des pistes rurales de désenclavement. Là, les communes les plus vulnérables ont été identifiées et choisies sur la base des données fournies par les rapports d’activités des chefs sous-secteurs du

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service local de l’Agriculture. Les villageois ont été choisis sur les mêmes bases, avec les mêmes critères de déficit foncier et de faible production. Les avis des communes ont été pris et les PDESC ont été consultés. Les choix ont été soumis à la validation des services techniques du génie rural et des eaux et forêts.

YAG-TU affirme se concerter avec les autres ONG du cercle. « Toutes appliquent l’approche de ciblage CARE ».

Selon les interlocuteurs à YAG-TU « il est toujours possible d’améliorer une procédure de ciblage en tenant compte du contexte. La vulnérabilité est très fluctuante ; tel est vulnérable aujourd’hui ; il peut ne pas l’être dans 15 jours et vice-versa… A Bandiagara, il y a de grands vulnérables, mais Bandiagara a la réputation de non pauvre ». Peut-être en rapport avec l’activité touristique qui appartient au passé.

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Annexe 2 : Conseil Danois des Réfugiés (DRC) – Gao

Le conseil Danois des Réfugiés (DRC) intervient dans les communes d’Intilit (cercle de Gao) et de Gossi (cercle de Gourma Rharous) où il fait des distributions alimentaires à quelques 6384 bénéficiaires. Il intervient aussi dans les Filets Sociaux dans les communes de Bambara Maoudé, Haribona, Inadiatanfane et Ouidernen où des coupons à valeur monétaire sont donnés à 2 600 bénéficiaires.

L’approche de ciblage est selon le DRC, identique pour les Filets Sociaux et pour les distributions alimentaires.

Cette approche se déroule ainsi qu’il suit :

1- Les zones vulnérables sont identifiées sur la base des informations du SAP. Ces zones sont réparties entre les acteurs du cadre harmonisé pour éviter des chevauchements inutiles. Cependant la complémentarité d’actions est possible. Les enquêtes SAP sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle réalisés deux fois par an en Mars et Octobre permettent d’identifier les villages les plus vulnérables.

2- Une assemblée générale d’information sur le projet est organisée dans chaque village.3- Une définition consensuelle des concepts de pauvres , très pauvres , moins pauvres et riches

est faite : dans des focus groupes de femmes, de jeunes et de leaders, on procède à la caractérisation des ménages très pauvres, pauvres, moyens et riches ;

4- Un comité de ciblage de sept (7) membres est alors mis en place. Il procède à la conciliation des contenus des types de ménages au moyen de la triangulation, et à l’élaboration d’une liste provisoire de ménages bénéficiaires.

5- Une nouvelle assemblée générale est tenue pour valider la liste provisoire. Cette AG donne souvent lieu à des inclusions/exlcusions. Il arrive aussi que des communautés nanties non retenues sur la liste dénoncent le fait qu’elles soient « écartées ».

Les ménages bénéficiaires sont ainsi ciblés. Si les donations ne permettent pas d’atteindre tous les bénéficiaires, on va du plus pauvre des pauvres et on monte par degré jusqu’au dernier élément à prendre en compte.

Le processus dure à peu près un (1) mois. Le personnel utilisé compte une cinquantaine de personnes dont la moitié est constituée de prestataires. Il ya une journée d’orientation pour les enquêteurs. Le coût total est d’environ 20 millions de F CFA dont 8 millions pour les déplacements. Malgré toutes les précautions, il ya des plaintes. Ces plaintes sont centralisées au niveau des comités de plaintes mis en place au niveau des sites. Elles sont ensuite transmises à la section suivi-évaluation qui est le point focal des plaintes. Les plaintes mineures sont gérées facilement. Mais les plaintes plus complexes en provenance de groupes sociaux, de groupes politiques ou de groupes armées demandent des rencontres et des investigations avant de prendre une décision. Au moins un agent a perdu son poste par suite de plaintes. Il y a des menaces, voire des agressions physiques sur des agents. Il faut tout de même dire que les plaintes ont aidé à améliorer le travail et si elles sont bien traitées l’acceptation du projet et de son personnel dans les communautés s’en porte mieux. En 2015, suite à des échanges avec le conseil communal et une communauté impliquée ; il ya eu une certaine souplesse permettant une augmentation du nombre de bénéficiaires et donc des inclusions. Mais il convient de faire très attention avec les inclusions « parce qu’il ya de gros malins »…

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Par rapport au Registre Unifié, le DRC pense qu’il est possible avec les ONG nationales et même internationales, mais pas avec les Organisations Internationales qui sont hors cadre. Pour y parvenir, il faut aller par étape, et passer par une étape pilote avant d’aller à la généralisation. Il faut aussi se donner du temps, au moins 4 à 5 ans pour aboutir.

Par rapport à l’ancrage, le cadre commun a déjà transmis sa base au développement social. Cet ancrage est pertinent. Mais il faut veiller à une bonne utilisation du Registre ; « il ne faut pas l’utiliser pour réclamer des impôts ».

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Annexe 3 : ASSOCIATION POUR LE DEVELOPPEMENT GLOBAL (ADG) Diéma

L’association pour le développement global existe à Dièma depuis 1988. Ses domaines d’intervention à Dièma sont :

- la santé/nutrition avec le PAM (avec volet nutrition classique, volet cash/nutrition, volet sensibilisation/formation) ;

- les cantines scolaires avec le PAM ;- La résilience (création, réhabilitation d’actifs) ;- la sécurité alimentaire avec W H H ( ex Agro Action Allemande) comprenant plusieurs

volets : distribution gratuite de maïs, maraîchage, appui aux agriculteurs , volet coquelets, volet caprins, volet formation en déstockage, volets cash for Work et Food for work.

En plus de ces interventions, l’ADG a intervenu à Yélémané, Kayes et Diéma pour le compte du CSA, à Nioro et Diéma pour le compte de la FAO (reconstitution du cheptel).

En matière de ciblage, l’ADG travaille avec les approches des bailleurs. Mais il y a des réalités sur le terrain que les bailleurs ne perçoivent pas, d’où la nécessité pour l’ADG d’apporter des améliorations. Les interventions se passent dans les mêmes communes, avec les mêmes communautés. Il faut donc faire attention pour éviter les doublons.

Les approches de ciblage préconisées par les bailleurs sont des approches participatives d’où la nécessité d’aller aux communautés, dans les villages.

La zone d’intervention est choisie par le bailleur sur la base des données du SAP. Pour l’alimentaire, les villages sont choisis par le comité communal et le développement social. Pour le choix des ménages, c’est le comité villageois mis en place qui s’en occupe.

La porte d’entrée au village est une question fondamentale : « qu’est ce qu’un démuni chez vous ? » A partir de la réponse à cette question, on identifie les critères de vulnérabilité. Ces critères sont : le faible accès à l’alimentation, le non accès ou faible accès au foncier, l’insuffisance ou le manque de moyens de production (équipements et animaux de trait), l’insuffisance ou le manque de main-d’œuvre. Pour la résilience la personne choisie doit être « physiquement capable de participer aux activités »

Au niveau village, c’est le comité villageois qui procède au choix des bénéficiaires. Ce comité est composé du chef de village ou son représentant, des représentantes des femmes (30% des membres de comité), des représentants des jeunes et des leaders religieux et d’un représentant des bénéficiaires, tous choisis en assemblée villageoise.

L’ADG passe ensuite dans les ménages bénéficiaires potentiels pour la vérification sans se faire accompagner par un membre du comité. Suite à la vérification et à des échanges avec le comité, on procède à des corrections et à l’établissement de la liste définitive de ménages bénéficiaires.

Relativement au Registre Unifié, l’ADG trouve l’idée pertinente. « De tout temps on a tenté de mettre en place une plateforme de concertation et de coordination ». Un seul cadre de concertation existe pour les intervenants dans le domaine de la santé/nutrition. Le Registre Unifié est pertinent parce que « tous les intervenants ont le même centre d’intérêt : la communauté nationale ». Le

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registre met à l’abri des chevauchements entre les programmes et des doublons. Il est faisable mais à condition d’impliquer tous les acteurs présents dans l’humanitaire. « Il faut une gestion intelligente de l’espace d’intervention » L’ancrage institutionnel de ce Registre doit être le Développement Social, le Ministère de l’Action Humanitaire et de la Solidarité parce que « l’objectif du Registre est en adéquation avec les prérogatives du développement social ».

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Annexe 4 : CROIX ROUGE MALIENNE-Mopti

A Mopti, la Croix Rouge Malienne intervient dans le domaine de la résilience et du développement. L’urgence est une réponse aux catastrophes et à la crise au nord du pays. Le développement concerne les domaines de la santé, de la sécurité alimentaire, des moyens d’existence et du WASH.

Actuellement elle est sur deux projets dont l’un de résilience avec le CICR et l’autre de résilience er de développement avec la Croix Rouge Danoise.

Le premier projet concerne les déplacés et leurs familles d’accueil. Le deuxième concerne les cercles de Djenné et de Mopti (transfert cash non conditionnels et conditionnels) pour une cible de 3000 ménages. Le processus de ciblage passe par plusieurs phases. Pour le choix des communes, les informations sont collectées au niveau de chaque commune et des services techniques. Une mission d’échange est dépêchée au niveau de chaque commune retenue pour avoir la liste des villages les plus vulnérables. Un consultant est alors commis pour réaliser l’enquête de base au niveau de ces villages. Suite à cette étude, des comités communaux de la Croix Rouge sont mis en place pour établir la liste des 10 villages les plus vulnérables. Les critères de vulnérabilité sont complétés par les critères d’accessibilité des villages en toutes saisons et de taille de la population.

L’approche de ciblage des ménages bénéficiaires est participative : les volontaires de la Croix Rouge et la communauté travaillent ensemble :

Un comité de ciblage présidé par le chef de village est mis en place. Il compte trois (3) représentantes des femmes, un (1) représentant des jeunes et un (1) représentant par confession religieuse choisis sur la base du critère d’intégrité.

Les critères de ciblage sont communiqués aux communautés, avec au premier chef les membres du comité de ciblage. Ces critères sont : avoir une source principale de revenu dans le primaire, posséder entre 0 et 3 gros ruminants , entre 3 et 7 petits ruminants, ne pas avoir de soutien extérieur régulier prévisible, avoir peu de main d’œuvre (égal ou inférieur à 4 bras valides non compris les élèves, les enfants, les femmes au foyer, les retraités et les handicapés), être femme seule chef de ménage, veuve ou divorcée, avec moins de 4 bras valides, être un chef de ménage traînant une maladie chronique ou une infirmité.

Le comité de ciblage travaille avec cette batterie de critères pour dresser une liste provisoire de bénéficiaires.

L’équipe du projet et deux (2) volontaires villageois de la Croix Rouge procèdent à une enquête de vérification dans 5 à 10% des ménages de la liste provisoire.

Puis une assemblée villageoise de validation des résultats de ciblage est tenue et le projet travaille sur la base de la liste validée.

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Annexe 5 : PROJET FILETS SOCIAUX JIGISEME JIRI Diéma

1. DOMAINE D’INTERVENTION : Filets sociaux

2. APPROCHE DE CIBLAGE :- géographique pour le choix des Régions, des cercles et des communes- communautaire pour les ménages

3. LES ETAPES DU CIBLAGE TELLES QUE PRATIQUEES SUR LE TERRAIN

- étape 1 : Atelier de lancement du programme - étape 2 : Atelier d’information et de sensibilisation animé par l’UGTFS avec les Autorités

communales, les Organisations de la Société Civile et le Service de développement social,- étape 3 : Mise en place du comité communal et organisation d’activités de restitution au

niveau des villages animés par ce comité restreint avec l’appui des agents du projet et mise en place des comités villageois ;

- étape 4 : les représentants du comité communal, les agents du projet organisent une mission d’information et de sensibilisation des villages pour l’information sur les quotas attribués par village ;

- étape 5 : responsabilisation du comité villageois pour l’établissement d’une liste provisoire de bénéficiaires avec les critères mis à disposition par le projet et transmission de la liste provisoire au comité communal ;

- étape 6 : organisation d’une mission de restitution/validation de la liste proposée en assemblée villageoise (une mission du comité communal et du Service local de développement social retourne dans chaque village pour vérifier les listes proposées. Cette vérification se fait à travers une convocation des chefs de famille en assemblée de validation).

- étape 7 : enrôlement par l’INSTAT : recueil d’informations socioéconomiques sur les ménages retenus, établissement des pièces administratives, constitution de la base de données.

4. LES CRITERES DE CIBLAGE UTILISES :- l’accès a la nourriture,- l’accès aux soins de santé ;- l’accès à l’habitat ;- l’accès à l’éducation (frais scolaires)- la taille du ménage- le nombre de bétail- l’existence de soutiens à l’extérieur- le niveau d’équipements- l’existence d’activités secondaires/revenus

5. RESPONSABILITE DANS LA MISE EN ŒUVRE : Ce sont les comités villageois de sélection qui font la sélection et proposent une liste provisoire

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6. Processus de validation de la liste : La liste provisoire est lue en assemblée générale des villageois avec la présence du comité communal et de l’agent de programme.

7. Plaintes : Les contestations sont reçues avant la validation en assemblée générale et discutées. Les inclusions/exclusions peuvent survenir à ce niveau. Mais dès que la liste est validée par l’AG, aucune autre modification ne pourra intervenir. Des plaintes peuvent être formulées par la suite auprès de l’Agent de programme ou du comité communal. Ces derniers transmettent la plainte à l’UTGFS pour analyse et compilation.

8. Partenaires cités :- Le Service de Développement Social,- Le Centre de Santé de Référence,- L’éducation ;- L’ONG ADG

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Annexe 6 : HANDICAP INTERNATIONAL Gao

1. DOMAINES D’INTERVENTION :

Assistance aux victimes.

2. PROJETS EN COURS :

- Education aux risques des mines (ERM) dans tous les cercles de Gao et Tombouctou,- Assistance aux victimes des Mines (PAV) dans tous les cercles de Gao et Tombouctou;- Assistance aux victimes des violences basées sur le genre (VBG) Gao, Tombouctou, Mopti;- FORCE portant sur l’assistance sociale dans les communes de Intillit (Gao) et Gossi

(Tombouctou).

3. CIBLAGE :

Les cibles de HANDICAP INTERNATIONAL sont des victimes d’un choc physique ou psychologique et les handicapées dans leur zone d’intervention.

Chaque projet a ses cibles :

- ERM : enfants, femmes, leaders communautaires, enseignants, élus communaux, points focaux du projet sur chaque site,

- PAV : cible les zones dangereuses et les victimes telles que :o Victimes des restes d’explosifs de guerre,o Victimes de l’application de la charria ;o Personnes handicapées (physique ou visuel) dans le besoin.

- VBG : les cibles sont surtout les jeunes filles.

L’identification des bénéficiaires se fait à travers un réseau de partage d’informations et la mise en place d’un numéro vert.

4. Types de services offerts :

- Assistance appareillage,- Assistance kinésithérapie- Réinsertion socioéconomique : sur tous les sites des deux régions sauf Ménaka :

Process : détermination de trois niveaux de vulnérabilité et des coûts d’appui par niveau :o Niveau 1 : de 80.000 à 120.000 FCFAo Niveau 2 : de 120.000 à 150.000 FCFAo Niveau 3 : jusqu’à 175.000 FCFA

5. CRITERES DE CIBLAGE :- Etre une femme victime, ou un handicapé seule chargé de famille,- Victime ou personne ne pouvant pas se déplacer,- Victime vivant dans un habitat précaire ;

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- Victime ou personne handicapées sans activité génératrice de revenus.

6. PARTENAIRES :- ONG GREFFA- UNICEF- UNHCR- OXFAM- CICR- CENTRE D’APPAREILLAGE ET DE KINESITHERAPIE DE GAO

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Annexe 7 : OXFAM Gao

A Gao, OXFAM intervient dans la sécurité alimentaire et dans les filets sociaux. Le processus de ciblage utilise la méthode HEA. Les étapes sont comme suit :

1. A la base se trouve la cartographie Pays des zones de moyens d’existence financée par ECHO,2. Sur la base des zones de moyens d’existence, le profil de chaque zone est établi ; ceci

consiste à caractériser chaque zone sur une batterie de paramètres ;3. L’étape 3 consiste à classer les ménages par catégorie (très pauvres, pauvres, moyens et

nantis). Les critères à l’intérieur de chaque catégorie sont définis et l’étude se fait soit par OXFAM, soit par le SAP, soit par un consultant ;

4. Les résultats sont présentés aux différents acteurs (SAP, CICR, ONG) ;5. Suite à la validation des résultats, le programme est mis en place :

a) L’Autorité communale est informée de l’intervention à venir, de son envergure en termes de pourcentage de population ciblée,

b) Le même pourcentage est appliqué aux villages avec possibilité de réajustement après le monitoring ;

c) Puis intervient le ciblage communautaire avec la mise en place de comités de village pour obtenir la liste des ménages bénéficiaires par village. Le quota affecté au village peut se limiter aux ménages les plus pauvres ou s’étendre à des ménages pauvres si le quota n’est pas atteint.

Le processus de ciblage prend 04 à 05 jours par village avec deux enquêteurs. Mais si les zones de profils ne sont pas faites et qu’il faut les faire, cela demandera beaucoup plus de temps.

Quelle que soit la transparence dans le ciblage, « il y a toujours des plaintes » et il appartient au comité de plaintes de les enregistrer et les remonter. Quelques exemples :

- On dénonce l’assistance répétée à la même personne,- Ceux qui font le travail avec la structure ne comprennent pas qu’ils ne soient pas sur la liste ;- Il y a aussi des cas de réduction de nombre de ménages dans des villages après évaluation et

suite au constat que certains ménages sont sortis de la vulnérabilité ; ceci suscite des mécontentements ;

- Il y a des plaintes par rapport au montant donné qui est jugé faible ;- Avec les comités de ciblage et de plaintes, certains chefs traditionnels considèrent

qu’on « empiète sur leur autorité et qu’on vient créer des problèmes … ».