Etude critique sur les procédés de recyclage des … · de leur fabrication et de leur...

14
PSIR – SEP (2016) Projet Scientifique d’Initiation à la Recherche (PSIR) Etude critique sur les procédés de recyclage des batteries rechargeables Lithium-ion et faisabilité J. Dubu, Y. Lesueur, Y. Petroff, V. Poinsot, E. Sallé, M. Crochet* Groupe esaip – 18 rue du 8 mai 1945, CS 80022 49180 St Barthélémy d’Anjou Cedex ARTICLE INFO ABSTRACT (200 words) Article history: Received 18 February 2016 Currently the Lithium-ion batteries know a huge development and are widely spread, mainly in the communications and vehicles systems. Today’s challenges are to reduce the extraction of natural resources and reuse those contained in spent batteries in the aim of reducing greenhouse gases and dependency between countries. The analysis of three processes was run to determine the main techniques involved in those processes. Some just allow industries to recover cathodes whereas others permit to recycle half of the component initially contained in the batteries. After the technical description, an acceptability and feasibility study was run to determine if those processes could be introduced in an eco-circular model and in what extent environment, society and economy are big issues of the development and feasibility of those technics. Following the results obtained for each method, we consider to research most efficient and cost effective materials or technologies which could replace the Li-ion technology in order to support the environment and sustainable development. But because of the fast improvement of technologies, it’s complicated to predict if Li-ion batteries have long term uses. Keywords: Li-ion Batteries Battery recycling Secondary raw material Sustainable 1. INTRODUCTION Depuis 1990, les équipements électroniques se sont multipliés, sont devenus de plus en plus petits et sont devenus portables (téléphones, ordinateurs, caméras, consoles de jeux, appareils photo, etc.). Il a donc fallu trouver des batteries qui répondent aux attentes des fabricants et des consommateurs. En une dizaine d’années les batteries lithium ont été choisies et ont connu un fort développement grâce à leur potentiel énergétique, leur procédé de fabrication et leur coût. La consommation mondiale de batteries au lithium étant devenue significative depuis maintenant une dizaine d’années, les problématiques des déchets issus de leur fabrication et de leur utilisation se posent. D’autant plus que la société, à la fois ceux qui la dirigent et ceux qui la composent, met la pression sur les producteurs de déchets pour que ces derniers aient une responsabilité accrue du devenir de leurs déchets et de leurs produits. Ce marché nécessite des procédés et des filières pour traiter ce type de déchet. *Contact : [email protected] Région Nombre de batteries consommées annuellement Europe 5 milliards (1) USA 3 milliards (1) Brésil 1 milliards (2) Tableau 1 Exemple de consommation de batteries dans certains pays. Le modèle économique linéaire actuel (concevoir, consommer, jeter) n’est plus acceptable pour l’Homme et son environnement. L’objectif et la tendance sont que le modèle économique tend à devenir circulaire en incluant des méthodes de collecte et de recyclage. Le recyclage incluant notamment la réutilisation des déchets en matières premières secondaires (MPS). Ces méthodes doivent s’inscrire dans une démarche de développement durable (vivable, viable et équitable du point de vue économique, écologique et social). De plus, les conjonctures économiques, politiques, environnementales et sociétales actuelles (raréfaction du lithium, répartition inégale des gisements, monopole des marchés, pollutions, scandales) amènent les industriels à rechercher des solutions alternatives ou durables à l’utilisation du lithium.

Transcript of Etude critique sur les procédés de recyclage des … · de leur fabrication et de leur...

PSIR – SEP (2016)

Projet Scientifique d’Initiation à la Recherche (PSIR)

Etude critique sur les procédés de recyclage des batteries rechargeables Lithium-ion et faisabilité

J. Dubu, Y. Lesueur, Y. Petroff, V. Poinsot, E. Sallé, M. Crochet*

Groupe esaip – 18 rue du 8 mai 1945, CS 80022 49180 St Barthélémy d’Anjou Cedex

ARTICLE INFO ABSTRACT (200 words) Article history: Received 18 February 2016

Currently the Lithium-ion batteries know a huge development and are widely spread, mainly in the communications and vehicles systems. Today’s challenges are to reduce the extraction of natural resources and reuse those contained in spent batteries in the aim of reducing greenhouse gases and dependency between countries.

The analysis of three processes was run to determine the main techniques involved in those processes. Some just allow industries to recover cathodes whereas others permit to recycle half of the component initially contained in the batteries.

After the technical description, an acceptability and feasibility study was run to determine if those processes could be introduced in an eco-circular model and in what extent environment, society and economy are big issues of the development and feasibility of those technics.

Following the results obtained for each method, we consider to research most efficient and cost effective materials or technologies which could replace the Li-ion technology in order to support the environment and sustainable development. But because of the fast improvement of technologies, it’s complicated to predict if Li-ion batteries have long term uses.

Keywords: Li-ion Batteries Battery recycling Secondary raw material Sustainable

1. INTRODUCTION

Depuis 1990, les équipements électroniques se sont multipliés, sont devenus de plus en plus petits et sont devenus portables (téléphones, ordinateurs, caméras, consoles de jeux, appareils photo, etc.). Il a donc fallu trouver des batteries qui répondent aux attentes des fabricants et des consommateurs. En une dizaine d’années les batteries lithium ont été choisies et ont connu un fort développement grâce à leur potentiel énergétique, leur procédé de fabrication et leur coût.

La consommation mondiale de batteries au lithium étant devenue significative depuis maintenant une dizaine d’années, les problématiques des déchets issus de leur fabrication et de leur utilisation se posent. D’autant plus que la société, à la fois ceux qui la dirigent et ceux qui la composent, met la pression sur les producteurs de déchets pour que ces derniers aient une responsabilité accrue du devenir de leurs déchets et de leurs produits. Ce marché nécessite des procédés et des filières pour traiter ce type de déchet.

*Contact : [email protected]

Région Nombre de batteries

consommées annuellement

Europe 5 milliards (1)

USA 3 milliards (1)

Brésil 1 milliards (2)

Tableau 1 Exemple de consommation de batteries dans certains pays.

Le modèle économique linéaire actuel (concevoir, consommer, jeter) n’est plus acceptable pour l’Homme et son environnement. L’objectif et la tendance sont que le modèle économique tend à devenir circulaire en incluant des méthodes de collecte et de recyclage. Le recyclage incluant notamment la réutilisation des déchets en matières premières secondaires (MPS). Ces méthodes doivent s’inscrire dans une démarche de développement durable (vivable, viable et équitable du point de vue économique, écologique et social).

De plus, les conjonctures économiques, politiques, environnementales et sociétales actuelles (raréfaction du lithium, répartition inégale des gisements, monopole des marchés, pollutions, scandales) amènent les industriels à rechercher des solutions alternatives ou durables à l’utilisation du lithium.

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 2

Nous proposerons dans cette étude de faire un état de l’art, à l’échelle mondiale, des techniques de recyclage des batteries lithium-ion en répondant à la problématique suivante :

« La technologie actuelle permet-elle d'utiliser de manière durable les batteries Lithium-Ion et leurs composants, en prenant en compte les besoins sociétaux et du marché ? »

Notre article s’articulera de la façon suivante :

Dans un premier temps nous présenterons succinctement les batteries lithium-ion, leur fonctionnement et leurs utilisations. Puis nous évoquerons les caractéristiques liées aux marchés du lithium et du graphite. Nous continuerons notre développement avec des méthodes de recyclage des éléments constitutifs des batteries Li-ion développées entre les années 2000 et 2012. Enfin nous discuterons les données obtenues afin de répondre à notre problématique et ainsi pouvoir ouvrir sur de nouveaux questionnements.

2. PRESENTATION DES BATTERIES

2.1. Les batteries lithium-ion actuelles : composants utilisés et fonctionnement

Les batteries lithium-ion sont basées sur l’échange

d’ions lithium Li+ entre l’électrode positive qui est

généralement un oxyde de métal de transition lithié

(dioxyde de cobalt ou manganèse) et l’électrode

négative en graphite ou silicium amorphe. Cet échange

est possible grâce à un électrolyte (sel LiPF6 dissous dans

un mélange de carbonate d’éthylène/propylène ou

tétrahydrofurane).

Les avantages d’une telle batterie sont la haute densité

d’énergie pour une faible masse, une faible

autodécharge et une sécurité accrue (par rapport au

lithium-métal.

A l’inverse, de nombreux inconvénients ont été

décelés. Pour éviter tout phénomène de corrosion des

électrodes et l’autodécharge, les éléments sont passivés

ce qui implique une augmentation de la résistance

interne. Cette même résistance augmente avec la

température et la durée de stockage. Les courants de

charges et de décharges admissibles sont faibles, à cela

s’ajoute de possibles courts-circuits par croissance

dendritique du lithium entre deux électrodes. Enfin en

cas de fuite, ces composants présentent des risques. Au

contact de l’air ou de l’eau, le lithium se transforme en

hydroxyde de lithium provoquant des inflammations ou

explosions. (3)

2.2. Etat de l’art des différentes applications des batteries Lithium-ion

La tendance du marché de la technologie lithium-ion

est en hausse. Elle remplace progressivement les

technologies précédentes (nickel-métal et nickel-

cadmium par exemple), principalement dans le domaine

de l’électronique.

On trouve ainsi des batteries lithium-ion dans des

domaines aussi divers que le médical, l’électronique,

l’automobile, l’aérospatial, militaire et le stockage

d’énergie.

Beaucoup de petits appareils utilisent une seule cellule

lithium-ion, dans l’électronique (casque Bluetooth,

baladeurs MP3, smartphones) et dans le biomédical

(capteurs pour la mesure du pouls cardiaque par

exemple). Cela a eu pour conséquence notamment un

développement important des smartphones de plus en

plus fins mais performants, dû à la capacité de stockage

d’énergie plus importante avec la technologie Li-ion. On

trouve également des batteries Li-ion dans des supports

plus volumineux qui emploient plusieurs cellules

(exemple six à douze cellules 18650 pour un notebook).

La taille des appareils commercialisés est cependant

limitée par les réglementations de transport

internationales dans le cadre du transport de matières

dangereuses (le lithium étant en effet source de danger

tel que l’inflammabilité).

La technologie Li-ion est ensuite employée dans le

domaine de l’automobile et assimilés, c’est-à-dire dans

les véhicules électriques (bus, voitures, scooters, vélos,

segway…). Les cellules Li-ion utilisées sont ici beaucoup

plus larges. Ainsi la Tesla Roadster emploie environ 6800

cellules 18650. Les véhicules hybrides tels que la Toyota

« Prius » ou la Ford « Escape » emploient pour l’instant

encore une technologie nickel-métal.

Dans le domaine aérospatial la technologie Li-ion

commence également à être utilisée. Ainsi le Boeing 787

Dreamliner emploie des batteries Li-ion pour les groupes

auxiliaires de puissance, les contrôles de vol

électroniques, les systèmes lumineux d’urgence par

exemple. On trouve également la technologie dans des

applications aéronautiques comme les satellites, les

sondes etc.

Enfin le dernier domaine d’application est le stockage

d’énergie, principalement pour les énergies

renouvelables dans le but de compenser les creux de

production. Ce domaine d’utilisation est encore récent

et en développement (4).

2.3. Les parties prenantes engagées

Les premières parties prenantes concernées sont les

entreprises productrices de batteries lithium. Les trois

principales sont Panasonic (20,5% de part de marché),

Samsung (19%) et LG (14,8%) (5). Du point de vue des

pays producteurs, la Chine est le principal (36,8%)

devant la Corée du Sud (33,8%) et le Japon (29,4%).

Ensuite viennent les utilisateurs des batteries lithium qui peuvent être des entreprises comme Tesla Motors. Les autres utilisateurs sont les consommateurs avec l’emploi des batteries lithium dans les smartphones ou les ordinateurs portables. Il incombe à ces utilisateurs de disposer des batteries de manière responsable afin de permettre la revalorisation et le recyclage de celles-ci.

Les Etats ont également un rôle dans le recyclage des batteries lithium car ce sont eux qui décident des voies de traitement des batteries usagées. Ainsi aux Etats-Unis l’ « U.S. Environmental Protection Agency » n’a pas défini de cadre particulier pour la récupération ou le traitement des batteries lithium ; il existe uniquement des recommandations. En France la législation donne un

3 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

cadre plus précis avec l’obligation de détruire ou revaloriser les batteries sous certaines exigences.

Les autres acteurs également très importants du recyclage des batteries lithium sont les laboratoires et chercheurs qui développent en permanence des moyens de plus en plus efficients pour recycler les batteries et en réutiliser les composants. Depuis le début des années 2000 de très nombreuses recherches ont été menées à ce sujet et ont permis la création de plusieurs méthodes de récupération.

Enfin, les autres acteurs majeurs sont les entreprises qui collectent et recyclent les batteries lithium. L’étude datant de 2009 (6), présente notamment les entreprises qui recyclent les batteries et leurs méthodes : AEA Technology, Recupyl et Toxco Inc utilisent le processus « hydro-metallurgical » ; Batrec, Mitsubishi Heavy industries et Umicore utilisent le processus « Pyrometallurgical » et OnTo technologies remet à neuf les batteries lithium usagées.

3. LE MARCHE

Un marché est un lieu théorique où se rencontrent l’offre et la demande.

3.1. Besoins du marché.

Le lithium et le graphite sont les composants

principaux des batteries lithium-ion.

3.1.1. Lithium Le lithium (7) est un élément chimique que l’on

retrouve à l’état naturel sous forme de métal mou et

sécable. Il a la particularité d’être le plus léger des

métaux et deux fois plus léger que l’eau. Il est le 32ème

élément le plus abondant et se trouve dans l’écorce

terrestre principalement en Bolivie, Chili et Chine. Les

gisements sont :

- Les saumures des salars qui sont des grands lacs

salés partiellement asséchés (60% des ressources

mondiales et 70% de la production mondiale) que

l’on trouve au Chili, en Chine, en Bolivie et en

Argentine.

- Les minéraux lithinifères concentrés dans les

roches (26% des ressources mondiales et 30% de

la production mondiale) que l’on trouve en

Australie, aux Etats-Unis, au Zimbabwe et en RDC.

Il y a aussi des gisements qui sont à l’étude comme la

jadarite (minéral contenant du lithium), les saumures

géothermales, les saumures de champs pétroliers et les

océans.

Selon l’utilisation finale, le lithium est utilisé sous

forme de minéraux, de carbonate (Li2CO3), d’oxyde (Li2O)

ou de lithium métallique (Li). Le lithium est utilisé dans

différents domaines :

- Verres et céramiques (30% des usages en 2011)

comme additif ;

- Piles et batteries rechargeables (22% des usages

en 2011) ;

- Graisses lubrifiantes (11% des usages en 2011)

comme épaississant.

- Traitement de l’air (4% en 2001) ;

- Coulée continue de l’acier (4% en 2011) ;

La demande en lithium va continuer à augmenter de

par la croissance constante de l’économie mondiale mais

surtout par le développement des nouvelles

technologies puisque les batteries au lithium permettent

de stocker beaucoup d’énergie pour un poids et une

taille très réduits.

La production étant concentrée à certains pays

(Bolivie, Chili, Chine, USA, Argentine), des tensions

peuvent rapidement naître si l’un des principaux pays

producteurs rencontre des problèmes diplomatiques,

sociaux ou politiques.

3.1.2. Graphite Le graphite (8) est l’un des trois allotropes naturels

communs du carbone. Le carbone constitue 0,02% de la

lithosphère sous forme de carbonates et de produits

carbonés.

Il se présente sous forme naturelle de carbone

amorphe (ex : noir de fumée), de diamant ou de

graphite. On peut aussi le synthétiser par graphitisation

à haute température de coke de pétrole. Les gisements

sont :

- Charbons et des schistes bitumeux que l’on

trouve au Mexique, Corée et Autriche.

- Graphite en paillettes dans des roches hôtes que

l’on trouve en Chine, au Canada, au Brésil et à

Madagascar.

L’extraction est principalement localisée en Chine

avec 80% de la production mondiale de graphite naturel.

Le graphite est utilisé pour ses propriétés d’excellent

conducteur de chaleur et d’électricité. Il est utilisé dans

différents domaines :

- Réfractaires pour aciéries (26% des usages en

2009) ;

- Énergies dont batteries (20% des usages en

2009) ;

- Garnitures de freins et embrayages (14% des

usages en 2009).

Pour les mêmes raisons que le lithium la demande en

graphite pour la fabrication de batteries va fortement

croître durant la prochaine décennie.

Le monopole de la Chine crée des tensions sur

l’approvisionnement et crée une forte augmentation des

prix depuis 2010. D’une part ses gisements deviennent

plus difficilement exploitables et la qualité de son

graphite diminue et d’une autre part, la Chine contrôle

l’approvisionnement pour sa consommation interne

pour la production d’acier. Il n’y a actuellement aucun

pays capable de compenser la production de graphite

par la Chine mais certains développent leur production

comme l’Inde, le Brésil et l’Australie.

4. RECYCLAGE DES BATTERIES ET DE LEURS COMPOSANTS

4.1. Procédés actuels et rendements

Il existe différentes méthodes de recyclage des

composants de batteries Li-ion, celles-ci ne traitent pas

toutes les mêmes composants, et ne permettent pas de

récupérer la même quantité de matières réutilisables.

Nous nous baserons sur les deux procédés suivants.

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 4

4.1.1. Projet RecLionBat Le projet RecLionBat (9) est un programme de

recyclage des batteries lithium-ion mené par la Société

Nouvelle d’Affinage des Métaux (S.N.A.M) et l’aide du

financement européen LIFE.

La réutilisation des batteries Lithium-ion est très intéressant, car elles peuvent remplacer d'autres types de batteries grâce à leur poids faible et leurs performances supérieures. Cependant il y a deux inconvénients majeurs pendant le recyclage des LIB (Lithium-ion battery) usagées : l'élimination des déchets dangereux et la prévention des explosions relatives au lithium métallique.

La technique de recyclage étudiée ici vise à préparer du dioxyde de cobalt et de lithium ou oxyde mixte de cobalt et de lithium (LiCoO2) provenant de LIB usagées, dans celles qui utilisent cet élément pour la cathode. Le procédé de recyclage implique un traitement mécanique et hydro-métallurgique ainsi qu'un procédé de citrate amorphe.

Les métaux représentent environ 50% en masse des

constituants d'une batterie, et notamment le lithium

(6%) et le cobalt (11%) (9).

Le lithium (voir partie 3 de cet article) et le cobalt sont

deux matériaux stratégiques, il est donc important de les

recycler. La production de cobalt est principalement

d'origine minière (Zambie, RDC, Russie, Canada,

Nouvelle Calédonie, Cuba, Maroc) et ses usages divers :

- batteries rechargeables (en hausse car le cobalt

est utilisé dans diverses cathodes mixtes des

batteries Li-ion) : 38 % ;

- superalliages (industrie de la défense et de

l’aérospatiale) : 20 % ;

- carbures cémentés et outils diamantés (travaux

publiques) : 10 % ;

- catalyseurs (industries chimiques et

pétrochimiques) : 9 % ;

- céramiques et émaux (pigments) : 8 % ;

- aimants permanents (enregistrements

magnétiques) : 5 % ;

- agent séchant et pneumatiques : 3 % ;

- autres (engrais, stérilisation, joaillerie...) : 7% (10).

La batterie étudiée se compose d’un circuit intégré,

d’un étui plastique et de plusieurs cellules, elle peut être

représentée de la façon suivante :

Fig. 1. Décomposition schématique d’une batterie de téléphone portable [(11)].

La cathode est constituée de LiCoO2, de carbone et d'un liant en aluminium. La composition chimique de la batterie est :

Component weight.%

LiCoO2 27,5 Steel/Ni 24,5 Cu/Al 14,5 Carbon 16 Electrolyte 3,5 Polymer 14

Tableau 2 Composition chimique d’une batterie Li-ion [(11)].

Les étapes du recyclage (schéma visible en Annexe 1)

se déroulent de la façon suivante.

D’abord la batterie est traitée thermiquement dans

une chaudière à 100-150°C pendant 1h. Elle est ensuite

désassemblée et les segments recueillis sont classés en

fonction de leurs tailles de 1 à 50 millimètres.

Ensuite un deuxième traitement thermique est

effectué, permettant de libérer les matériaux des

électrodes à l'aide de tamis vibrants. On obtient le

matériau de la cathode, le LiCoO2, en brûlant le carbone

et le liant (aluminium) à la température de 500 à 900°C

pendant 30 minutes à 2heures.

Pour résumer cette partie, les différentes étapes ont

été effectuées, dans le but de concentrer le matériau de

l'électrode active en poudre :

- Premier traitement thermique à 100-500°C

pendant 30 minutes

- Broyage à haute vitesse à 5-20 millimètres

- Second traitement thermique à 300-500°C

pendant 1heure

- Tamis vibrants

- Calcination à 700-900°C pendant 1 heure.

Le LiCoO2 est ensuite inséré dans une solution d'acide

nitrique, puis filtré dans un réacteur, lui-même placé

dans un bain contenant de l'eau à température

constante.

Le but de cette étape est de dissoudre le cobalt et le

lithium des matériaux de la cathode active. On arrive

facilement à extraire les deux métaux à un taux

d'environ 85% grâce à un agent réducteur (peroxyde

d'hydrogène), à 75°C et pendant 30 minutes. En

optimisant les conditions d'extraction, c'est à dire en

ajoutant 1 mole d'HNO3, 1,7% du volume, à 75°C et

pendant 1h, on peut obtenir un taux d'extraction proche

de 99% pour chacun des deux métaux.

La quatrième étape est la préparation de la poudre de

LiCoO2. On prépare un mélange de solution de lixiviation

sous forme de nitrate et d'acide citrique pour obtenir un

gel précurseur amorphe, à l'aide d'un évaporateur rotatif

à 65°C pendant 2 heures. La solution de lixiviation

contient justement des ions Li et Co avec un ratio

molaire d'environ 1 pour 1. Ce gel est ensuite placé dans

un creuset en acier inoxydable et calciné en poudre dans

l'air pendant 2 heures à 500-1000°C. Cette poudre

obtenue, synthétisée à partir de la solution de lixiviation,

permet de préparer une nouvelle cathode, en ajoutant à

5 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

la poudre du noir de carbone à 15% de la masse et 5% de

liant (aluminium).

Une fois testée (dans une cellule Téflon), on obtient

des résultats équivalents à 90% de la performance des

batteries produites en industrie, sur le premier cycle

(une charge et une décharge). En effet on observe 165

(charge) et 154 (décharge) mAh/g (milliampères par

gramme) en termes de capacité. Après 30 cycles, on

observe une baisse de capacité de moins de 10% par

rapport au premier cycle.

Fig. 2. Graphique de cycles de charge/décharge des batteries utilisant la poudre de LiCoO2 recyclée pour fabriquer la cathode (11).

4.1.2. Recyclage expérimental de batteries Cette méthode est un processus de recyclage de

batteries lithium-ion testée dans un laboratoire en 2001 (12). Cette méthode vise à récupérer les composants les plus importants des cellules de batteries afin de pouvoir réduire la consommation des matières premières rares.

Ce processus a été utilisé sur des cellules lithium-ion de batteries de taille standard 18650. Le logigramme de ce procédé est visible en Annexe 2.

La première étape consiste à trier les batteries pour récupérer celles adaptées au processus, il existe des machines permettant de le faire à l’échelle industrielle (13).

Après quoi on procède à l’ouverture et au broyage de l’enveloppe extérieure pour pouvoir atteindre les composants internes importants, à savoir le lithium et le cobalt. L’enveloppe composée essentiellement d’acier et de plastiques ne sera pas traitée lors de ce procédé.

Ensuite pour pouvoir séparer les différents composants on utilise un traitement à base de N-methylpyrrolidone. On plonge ainsi les composants dans un bain de cette solution puis on chauffe le tout à 100°C pendant une heure. Cela permet de récupérer le cuivre et l’aluminium sous leurs formes métalliques en filtrant la solution obtenue. Les deux métaux ainsi obtenus peuvent être directement revalorisés.

Ensuite pour séparer les différentes poudres restantes on décante la solution puis on rince à plusieurs reprises avec de l’eau le filtrat obtenu. Cela jusqu’à récupérer les différentes poudres de carbone et d’oxyde mixte de cobalt et de lithium. Le N-methylpyrrolidone récupéré peut être utilisé pour un nouveau processus.

Pour obtenir le cobalt, on traite les poudres obtenues avec une solution de 4 moles d’HCl, on chauffe le mélange à 80°C pendant une heure. Il faut un ratio de 10/1 entre l’acide et l’échantillon pour obtenir le meilleur taux de récupération de dioxyde de cobalt et de

lithium. Après filtration, la poudre de carbone peut être extraite. Le cobalt, le lithium se trouvent sous forme aqueuse.

On récupère ensuite le cobalt grâce à une précipitation sous forme d’hydroxyde de cobalt Co(OH)2 en ajoutant un volume équivalent de solution de quatre moles de NaOH. On filtre encore une fois la solution pour récupérer le précipité contenant le cobalt tout en le lavant avec une solution de NaOH pour obtenir le produit le plus pur possible. Le filtrat contient alors les ions Li

+. Il est possible de récupérer le lithium par

précipitation des ions lithium contenus dans la solution en ajoutant une solution de HCl pour obtenir du chlorure de lithium.

Afin de tester la qualité des produits récupérés grâce à ce processus on les utilise pour constituer une cathode comme on pourrait en trouver dans une batterie lithium-ion classique. Les résultats obtenus par ces tests sont les suivants.

Fig. 3. Cycles d'intercalation et de désintercallation d'une électrode recyclée [ (12)].

Les cycles d’intercallation et de désintercallation galvanostatiques ainsi obtenus montre la bonne capacité des matériaux récupérés pour produire de nouvelles batteries à partir des composants des batteries usagées.

Fig. 4. Diagramme de voltampérométrie d'une électrode recyclée [ (12)].

De même, le diagramme de voltampérométrie montre la bonne tenue de l’électrode soumises à des cycles répétés. Cette méthode est donc efficace pour récupérer les composants rares car leurs pertes sont minimes à partir du moment où les opérations de filtration sont effectuées avec soin. Ce processus pourrait donc être utilisé à un niveau industriel.

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 6

4.2. Adaptation à un niveau industriel

Ces méthodes de recyclage ont été testées et réalisées en laboratoire. Cependant, la quantité de batteries produites et utilisées entraine un grand nombre de batteries à recycler chaque année (5 milliards/an sur le marché Européen). Afin d’être efficace, le recyclage doit être effectué à une échelle industrielle. Il est donc nécessaire d’envisager la mise en place du recyclage à une plus grande échelle.

Ce défi a été relevé pour le cas du recyclage des piles lithium il y a moins de 20 ans (Il est obligatoire de trier ses piles usagées depuis 1999 (14)). Le schéma général de recyclage est visible en Annexe 3.

4.2.1. Comment l’industrie s’est-elle appropriée les méthodes de recyclage des piles ?

Un exemple de méthode de recyclage des piles : Récupération des métaux par précipitations sélectives (15).

La méthode étudiée traite un échantillon de 15 types de piles issues de divers fournisseurs.

Dans un premier temps, les piles sont lavées puis broyées. Lors de la phase de broyage, une forte chaleur est dégagée du fait des nombreux courts-circuits internes aux piles. Il semble nécessaire de refroidir l’échantillon à cette étape dans le cas d’une utilisation industrielle.

Dans un second temps, l’échantillon est solubilisé dans une solution de HNO3 à 2 mol/L et à 80°C pendant 2h. Après filtration on obtient un résidu solide (composé de fer de nickel et de cobalt) et un filtrat liquide.

Un traitement thermique (chauffé à 500°C pendant 2 heures) permet d’éliminer les composés organiques et le carbone du résidu solide. Les métaux ainsi récupérés peuvent être directement utilisés pour des applications métallurgiques.

La dernière étape consiste à atteindre un pH de 10, toujours à l’aide de NaOH afin de faire précipiter le manganèse sous forme de Mn(OH)3 que l’on récupère par filtration.

Le rendement de ce type de traitement est très bon : 100% du lithium et 95% de manganèse sont récupérés. 4.2.2. Les méthodes appliquées par l’industrie en France 2 Méthodes : Pyrométallurgie : Traitement thermique

permettant d’isoler certains métaux, en jouant notamment sur les températures de fusion ou sur des réactions d’oxydoréduction.

Hydrométallurgie : Après un prétraitement physique (broyage et séparation magnétique), les métaux sont ensuite traités chimiquement. Ils sont mis en solution puis séparés par divers procédés chimiques : précipitation, électrolyse, extraction liquide-liquide.

Les rendements communiqués sur le site internet COREPILE (16) varient entre 50 et 80%. Notamment le manganèse n’est pas valorisé par leurs méthodes de recyclage.

4.2.3. Synthèse Il semble que dans le cas des piles, les industries du

recyclage se sont en partie inspirées des essais scientifiques, notamment sur la partie hydrométallurgie.

En revanche, les adaptations nécessaires pour la viabilité économique d’une application industrielle ont fait baisser les rendements.

Nous pouvons donc raisonnablement supposer le même type de baisse de rendement lors de l’application industrielle des méthodes de recyclage des batteries Li-ion étudiées.

4.3. Développement d’un procédé prometteur

Comme il a été vu précédemment, chaque industrie a

développé sa propre technique de recyclage (Toxco,

Inmetco, Xstrata, Umicore VAL’EAS) utilisant des

procédés d’hydrométallurgie, de pyrométallurgie, de

prétraitement et de séparation mécanique ou chimique.

Le but du développement de ce projet était de créer un

procédé le plus efficient possible afin de l’adapter au

niveau industriel.

Le projet (17) 01RW0404 « Recovery of raw materials

from Li-ion batteries », financé par le Ministère Fédéral

Allemand de l’Education et de la Recherche, a été

développé en coopération avec les partenaires

industriels ACCUREC Recycling Gmbh et UVR-FIA Gmbh.

Ce procédé utilise un prétraitement mécanique combiné

à des processus hydro et pyrométallurgiques dans le but

d’effectuer un recyclage efficace de tous les matériaux

de la batterie.

La caractéristique importante de ce procédé intervient

dans les dernières phases de traitement avec

notamment l’utilisation d’un fourneau à arc électrique

pour minimiser les pertes de cobalt.

Pour commencer, la phase de prétraitement permet

de désassembler les batteries et de mettre à nu la cellule

composant la batterie. Une fraction contenant du

plastique et des composés électroniques contenant du

cuivre sont extraits, ces composés sont valorisables en

MPS.

Ensuite, vient une étape de pyrolyse de la cellule dans

un four à résistance chauffé au maximum à 250°C. Cette

phase permet de désactiver les cellules en toute sécurité

et de faire évaporer les électrolytes qui sont des

composés organiques volatiles (COV). Ces derniers sont

placés dans un évaporateur sous vide afin de pouvoir les

traiter ou les réutiliser pour d’autres fonctions. Il est

possible de récupérer le carbonate d’éthyl-méthyl (71%

de masse) et le carbonate d’éthylène (10% de masse)

pour les réutiliser dans des électrolytes. Les autres

fractions contiennent des coproduits obtenus lors de la

décomposition et par conséquent sont inutilisables.

Dans la troisième phase, les cellules sont écrasées dans

un broyeur puis un désintégrateur. Les éléments

obtenus sont classifiés grâce à des mécanismes de

plateaux vibrants, un séparateur magnétique dans un

tambour et un séparateur à air dans classifficateur

zigzag. Les fractions d’aluminium, de fer et de nickel

7 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

(matériaux de l’électrode) peuvent alors être extraites.

La fraction de fer-nickel est refondue dans un four de

fusion à induction sous vide pour obtenir deux fractions

pures. D’autre part, la fraction de feuilles d’électrode

contenant une composition non homogène en

aluminium et cuivre, une dissolution dans de l’eau régale

(mélange d’acide chlorhydrique et d’acide nitrique

concentrés (2 à 4 volumes d’HCl pour 1 d’HNO3).

Ensuite, la fraction la plus intéressante à valoriser

(contenant les oxydes decobalt et de lithium et le

graphite) est agglomérée en pastilles en utilisant des

agents liants. Ces pastilles (30 % de Co en masse, 3% de

lithium en masse, 30% de graphite en masse) sont

introduites dans un four à céramique à 800°C pour

réduire de moitié la teneur en graphite (carbo-

réduction). Ces pastilles sont ensuite introduites dans le

fourneau à arc électrique pour obtenir des alliages à

base de cobalt.

Enfin les roches et les poussières obtenues lors du

traitement utilisant le fourneau à arc électrique sont

traitées par un procédé hydrométallurgique. Les solides

sont lixiviés à l’acide sulfurique pour augmenter le

rendement de récupération de lithium. En fin de

procédé, du carbonate de lithium à 99,0% de masse peut

être généré.

5. DISCUSSION

Dans cette partie, nous évoquerons l’acceptabilité des

procédés de recyclage déjà existants et nous

développerons les résultats tirés de l’étude d’un

nouveau procédé de revalorisations des déchets de

batteries qui est en cours de lancement. Puis nous

verrons deux technologies alternatives prometteuses qui

pourraient être utilisées pour remplacer les batteries

lithium-ion dans les années à venir.

5.1. Procédés de recyclage

5.1.1. Economie Circulaire et acceptabilité des procédés D’après l’Article 1 de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975

relative à l’élimination des déchets et à la récupération

des matériaux :

« Est considéré comme déchet : tout résidu issu d’un

processus de production, de transformation ou

d’utilisation, toute substance, matériau, produit, ou plus

généralement tout bien meuble abandonné ou que son

détenteur destine à l’abandon ».

Actuellement, l’économie est basée sur un modèle

linéaire utilisant un stock de matière première infini et

suivant le schéma « extraction de ressources naturelles,

fabrication du produit, élimination du déchet ». Le but

premier est de créer un modèle circulaire où le déchet

deviendrait une ressource et par la suite réussir à

découpler la croissance économique de la

consommation en matières premières d’origine naturelle

(concevoir plus et mieux avec moins de ressources).

L’économie circulaire est basée sur 3 axes majeurs :

- L’offre et les acteurs économiques,

- La demande et le comportement des citoyens

- La gestion des déchets

Un procédé acceptable au sens de l’économie

circulaire prend en compte les 3 axes précédents. Il doit

de plus permettre une réduction de la production de

déchets à la source (extraction, fabrication, transport,

distribution) en réutilisant les déchets sous forme de

matières premières secondaires. Cette vision vient de la

fondation Ellen MacArthur à travers le principe du Cradle

to Cradle : il consiste en un système de deux cycles

fermés ; un cycle technique et un cycle biologique. La

matière est empruntée au cycle biologique pour être

utilisée dans le cycle technique et rendue au cycle

biologique une fois le produit en fin de vie (18).

Pour ce faire, le service ou produit en question doit

être éco-conçu ; c’est-à-dire pensé pour favoriser la

réutilisation de tout ou une partie de celui-ci dans la

conception d’un nouveau produit. Cette réutilisation

permet de limiter l’extraction des ressources, la

consommation d’énergie et les émissions de GES (Gaz à

Effet de Serre).

Au point de vue environnemental et sanitaire, les

processus de collecte, recyclage, traitement et

valorisation de la matière doivent être écologiquement

viable et socialement vivable. Ils ne peuvent avoir un

impact important (émissions de particules nocives,

pollutions des sols, air, eau).

Ensuite, le procédé de recyclage doit être viable et

équitable. Il doit posséder un coût inférieur ou égal à

l’achat de la matière première non recyclée.

5.1.2. Projet RecLionBat La mise en place d’une unité RecLionBat apporte de

multiples caractéristiques et bénéfices s’inscrivant dans

le développement durable (9).

Premièrement, du point de vue environnemental, elle

permet l’économie de ressources naturelles d’origines

minières (cobalt, nickel, fer, aluminium, cuivre, etc.). En

effet, le procédé de revalorisation permet de réutiliser

85% du cobalt et 85% du lithium initialement présents

de la cathode en reformant une poudre de LiCoO2 qui

servira par la suite à recréer une électrode ayant une

capacité de plus de 90% comparée à celles produites

industriellement. En améliorant les conditions initiales, il

est possible d’augmenter le rendement du recyclage du

lithium et du cobalt jusqu’à 99% mais l’amélioration de

ces conditions a un coût non négligeable. En d’autres

termes, le procédé permet de réduire les volumes de

déchets ultimes mis en centres d’enfouissement

technique (CET) et de réutiliser des matériaux fossiles

(améliorations envisageables pour cette partie). Ce

projet est aussi un moyen d’accompagner la politique

européenne (mise en application de la directive 20060 :

66/CVE).

Une unité RecLionBat soustrait la mise en décharge de

1000 tonnes d’accumulateurs et 550 à 600 tonnes de

métaux sont réutilisés en tant que MPS, permettant ainsi

de préserver les ressources naturelles tout en réduisant

les émissions de GES.

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 8

A l’échelle industrielle, la SNAM envisage que les

ventes de matériaux recyclés pourront couvrir les frais

de traitement et que les collectivités n’auront pas un

budget à allouer pour le traitement de ses

accumulateurs Li-ion ce qui rend le projet

économiquement viable.

Puis au point de vue social, une installation de ce type

peut générer la création de 7 à 10 emplois permanents.

5.1.3. Projet de recyclage étudié à l’échelle d’un laboratoire

Ce projet mené à l’échelle d’un laboratoire, présente

des caractéristiques intéressantes vis à vis des processus

de recyclage des matières.

Tout comme le projet RecLionBat, il a pour but la

revalorisation de la matière en extrayant le cobalt, le

lithium, l’aluminium, le cuivre et la poudre de carbone

constituant la batterie. L’étude ne permet pas d’obtenir

les rendements réalisés. Du point de vue

environnemental, ce projet vise à réduire la quantité de

déchets ultimes, une diminution de l’extraction des

ressources naturelles et donc de réduire les émissions de

GES. Economiquement parlant, la viabilité du procédé

dépend des cours du lithium (prix au kg extrêmement

fluctuant), de l’aluminium (1,35€/kg), du cuivre (4,22 à

5,01€/kg) et surtout du cobalt qui sont restés élevés ces

dernières années malgré une baisse des prix durant

l’année 2015 autour de 26€/kg pour le cobalt. Les prix

indiqués (excepté pour le cobalt) sont ceux constatés

chez les grands industriels de la transformation des

métaux tels que KME le 15/02/2016. Il est donc

important de garder à l’esprit que la chute du cours des

métaux constitutifs des batteries est l’enjeu majeur pour

que ce domaine perdure dans le temps et que le

traitement soit économiquement viable.

En théorie, le traitement d’une grande quantité de

batteries devrait alors pouvoir générer des revenus

couvrant les frais de traitement des collectivités.

Comme le procédé précédent il permet de générer des

emplois au sein des collectivités.

5.1.3. Projet « Recovery of raw materials from Li-ion batteries »

Ce procédé comme les précédents fait intervenir les

mêmes caractéristiques environnementales,

économiques et sociales.

Contrairement aux deux autres procédés, celui-ci traite

tous les composants de la batterie. L’enveloppe et les

parties électroniques sont envoyées dans une autre

entreprise permettant de les recycler. Les fractions de

fer et nickel, d’aluminium, les alliages de cobalt et les

carbonate de lithium sont extraits puis recyclés par

ACCUREC Recycling (partenaire du projet).

Fig. 5. Pourcentage des fractions recyclées ou non dans les batteries démantelées [(17)].

Ce procédé est le plus abouti en termes de

recyclabilité des matériaux. Comme le montre le schéma

ci-dessus, 49,08% de la masse d’une batterie peut être

recyclée et utilisée directement selon les méthodes de

calculs inscrits dans la Directive Européenne sur les

batteries.

Le condensat électrolytique est considéré comme non

réutilisable car la récupération d’un électrolyte

parfaitement pur n’a pas encore été achevée. Dans les

années à venir il sera possible d’éliminer les produits de

décompositions contenus dans l’électrolyte et donc de le

réutiliser pour de nouvelles batteries.

Les 34,51% contiennent l’enveloppe de la batterie, et

tous les composés perdus par renversement lors des

chocs de l’arc électrique.

A titre de comparaison, la société Umicore’s VAL’EAS a

quant à elle développé un procédé comparable en

indiquant que celui-ci permettait de recycler environ

70% de la masse d’une batterie. Or les méthodes de

calculs utilisées ne sont pas conformes à la Directive

Européenne sur les batteries et incluent la masse de

plastique (20%) et de graphite (15%) recyclés ce qui nous

ramène à un recyclage de 35% de la masse de la

batterie.

Pour conclure sur ce procédé, il s’inscrit aussi dans

l’économie circulaire car il permet une réutilisation des

matériaux pour fabriquer de nouvelles batteries ou

d’autres produits. Il a un enjeu environnemental

important car il permet l’une des meilleures valorisations

des matériaux jusqu’à aujourd’hui. Il est encore possible

de l’améliorer en permettant le recyclage de

l’électrolyte.

Comme dans toute problématique, l’enjeu

économique surpasse une nouvelle fois les enjeux

environnementaux et sociaux.

Une évaluation économique a montré que ce procédé

dépendait essentiellement du cours du cobalt et qu’il

était économiquement viable à la seule condition que le

cobalt soit revendu à un minimum de 20€/kg pour 1000

tonnes de batteries traitées.

9 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

De plus, ce procédé doit faire face à la conjoncture

actuelle du marché. Les industriels tendent à remplacer

leurs électrodes à base de LiCoO2 par des électrodes

utilisant des composés bon marché (LiFePO4, LiMn2O4,

LiSix). La substitution du cobalt va modifier la rentabilité

des procédés de recyclage.

Outre les enjeux résidant dans la réutilisation des

matières constituant les batteries Li-ion, nous pouvons

nous demander s’il ne serait pas envisageable

d’effectuer un changement radical de technologie, basé

sur des matériaux abondants et des enjeux

environnementaux et sociétaux moins contraignants.

5.2. Nouvelles technologies alternatives

5.2.1. Batteries en graphène obtenues par impression 3D Le graphène est un nano-matériaux. Il se présente sous

la forme d’une monocouche d’atomes de carbone

organisés en maille ondulée hexagonale.

Fig. 6. Structure du graphène d’après Jannik Meyer [ (19)].

Le graphène est un constituant du graphite. On peut

donc extraire les couches de graphène de ce dernier. On

peut aussi synthétiser du graphène par le biais de

plusieurs méthodes et substrats. La synthèse est

toutefois très couteuse.

Il dispose de caractéristiques uniques. Sa structure est

très stable, 200 fois plus résistant que l’acier, il conduit la

chaleur 10 fois plus vite que le cuivre et transporte une

densité de courant électrique 1000 fois supérieure au fil

de cuivre. Une autre propriété du graphène est que sa

température n’augmente pas lorsqu’il est traversé par

un courant, il a une résistance électrique très faible.

Ce matériau permet donc de concevoir des

conducteurs petits, résistants et efficaces. Mais son prix

de revient est encore trop élevé pour espérer l’utiliser en

substitution des matières premières actuelles. Il faut

donc trouver un moyen de production industriel pour

espérer atteindre un coût de revient acceptable pour les

industriels.

Actuellement il existe plusieurs voies d’utilisation du

graphène qui sont explorées. Parmi elles, l’impression

3D. Une entreprise américaine, Graphene 3D (20), a

réussi à ajouter une matière thermoplastique (polymère)

au graphène sans altérer ses capacités. Ainsi on peut

mouler un fil utilisable par les imprimantes 3D.

L’entreprise a utilisé cet alliage pour imprimer des

batteries. Pour le moment, il faut imprimer les éléments

des batteries séparément mais l’objectif est d’imprimer

les batteries d’un seul bloc.

Il y a de nombreux avantages à cette utilisation. Le

premier est qu’il y a peu de déchets issus de la

fabrication. Le deuxième est que la fabrication peut être

décentralisée au niveau des possesseurs d’imprimantes

3D (petits détaillants, particulier, etc.) grâce à une

distribution contrôlée des plans. Le troisième est que le

graphène est un élément abondant. Et enfin, le recyclage

de l’alliage polymère et graphène est possible.

5.2.2. Batteries Na-ion Le sodium (Na) est un métal appartenant à la famille

des alcalins. Il ne se trouve pas sous forme de corps pur

dans la nature mais sous forme de composés (par

exemple, dans le sel).

Le sodium est un excellent conducteur électrique et

calorifique, il est d’ailleurs utilisé comme fluide

caloporteur réfrigérant. Il est aussi utilisé pour la

fabrication des esters, la fabrication d’additif

automobile, purifier les métaux fondus, ou renforcer des

alliages métalliques.

Inspirés par la technologie des batteries lithium-ion les

chercheurs ont développé une batterie sodium-ion (21).

Ses capacités de stockage sont similaires mais sa durée

de vie est nettement supérieure avec plus de 2000 cycles

de charge et de décharge. Plus massives que les

batteries lithium-ion, leur utilisation serait plutôt

destinée aux véhicules électriques, au stockage

domestique et industriel de l’électricité.

Le principal avantage est que contrairement au

lithium, le sodium se trouve sur l’ensemble du globe, il

est facilement extractible et est abondant puisque qu’il

compose 2,8% de la croûte terrestre et on en retrouve

dans les océans. On peut donc avoir une extraction et

une conception au plus proche des consommateurs.

Cependant, le recyclage du sodium est délicat car si on

souhaite l’éliminer il est nécessaire d’utiliser une

réaction chimique présentant un risque d’explosion.

5.3. Existe-t’il une réelle prise en compte des enjeux soulevés?

Les batteries au lithium répondent aux exigences

présentent mais la recherche et le développement de

batterie se fait principalement dans un intérêt

économique. En effet le but est de trouver un type de

batterie permettant de répondre à des exigences plus

importantes (capacité de stockage, taille, durée de vie,

temps de charge, dégagement de chaleur) pour pouvoir

commercialiser des produits disposant de ces avantages.

Il y a aussi l’approvisionnement qui est pris en compte

puisque plus une matière est rare et/ou difficile à

extraire plus elle sera chère. Il est donc dans l’intérêt des

industriels de trouver une batterie constituée de

matériaux abondant et faciles à extraire.

En prenant en compte ces intérêts économiques, on

rejoint des intérêts environnementaux avec la durabilité

des batteries et des ressources utilisées, ainsi que des

intérêts sociaux avec l’utilisation de matières premières

abondantes et donc mieux réparties géographiquement.

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 10

6. CONCLUSION

Le développement des batteries lithium-ion s’est

accompagné d’une évolution des produits, et d’un

développement du taux et des méthodes de recyclage

qui impliquent les producteurs et les utilisateurs.

Les batteries Li-ion possède des avantages intéressants

comme leurs performances, leurs coûts et leurs poids.

Cela influence leur fort essor sur le marché jusqu’à la

quasi exclusivité par exemple pour les applications

électroniques (ordinateurs portables). Les batteries Li-

ion se heurtent à de nombreuses problématiques ; que

ce soit au point de vue de l’inégale géolocalisation des

minerais les composant, au point de vue de l’impact

environnemental qu’elles possèdent ou encore de la

dangerosité lié au risque incendie du lithium.

L’économie devient circulaire pour transformer le

déchet en matière première secondaire, réutiliser les

déchets et réduire au maximum la quantité de déchets

ultimes.

C’est pourquoi le développement d’une économie

circulaire autour de ces matériaux a été initiée il y a

quelques années et qu’une multitude de procédés de

recyclages ont été développés dans le but de pouvoir

revaloriser au mieux les composants ayant un coût et un

impact environnemental important lors de leur

extraction et/ou production. Ces procédés traitent de

tout ou partie des composants d’une batterie, et chacun

possède ses avantages et ses défauts, mais il est

important de constater que le procédé le plus efficient

est contrôlé par sa faisabilité économique. De plus ces

procédés complexes ne permettent pas de traiter un

grand tonnage de batteries par année.

Des chercheurs et des industriels ont aussi trouvé des

solutions alternatives qui offrent des qualités égales voir

supérieures à celles des batteries lithium-ion dans

certaines domaines, comme les batteries au graphène.

Les batteries lithium-ion restent toutefois la meilleure

alternative pour certaines utilisations du point de vue

technique et économique. C’est pourquoi il est

important de mettre en place des filières de recyclage

durables pour que cette technologie soit durable. La

technique de recyclage « Recovery of raw materials from

Li-ion batteries » permettent de recycler 50% de la

masse totale de la batterie et donc si elle est appliquée à

grande échelle rendrait l’économie des batteries lithium-

ion circulaire.

Il est donc intéressant de se pencher sur les avancées

technologiques qui pourraient être la solution au

remplacement des batteries lithium-ion.

11 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

ANNEXES

Annexe1. Les étapes de recyclage du projet RecLionBat [(11)].

Annexe 2 Logigramme du processus de recyclage des batteries usagées suivant le deuxième procédé développé en laboratoire [ (12)].

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 12

Annexe 3. Schéma général du processus industriel de recyclage des piles usagées [(14)].

13 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)

Annexe 4. Schéma du recyclage alternative des batteries développé dans le projet 01RW0404 « Recovery of raw materials from Li-ion batteries » [(17)].

J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 14

REFERENCES

[1] A.M. Bernardes, D.C.R. Espinosa, J.A.S. Tenorio. Recycling of batteries: a review of current processes and technologies. J. Power Sources 130. 2004.

[2] A.L. Salgado, A.M.O. Veloso, D.D. Pereira, G.S. Gontijo, A. Salum, M.B.Mansur. Recovery of zinc and manganese from spent alkaline batteries by liquid–liquid extraction with Cyanex 272. J. Power Sources 115. 2003.

[3] Principe de fonctionnement des batteries au lithium. Salvato-Vallverdu, Germain. Pau : Université de Pau et des pays de l'Adour, 2011.

[4] Mikolajczak, Celina, et al., et al. Lithium-ion Batteries Hazard and Use Assessment. Quincy, Massachussetts : One Battery March Park, 2011.

[5] SNE Research. [En ligne] [Citation : 04 12 2015.] http://www.sneresearch.com/eng/info/press.php.

[6] Vadenbo, Carl O. Prospective Environmental Assessment of Lithi. 2009.

[7] G., Labbé J.F. et Daw. Panorama 2011 du marché du lithium. Rapport public. Orléans : BRGM, 2012. http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61340-FR.pdf. RP-61340-FR.

[8] Barthélémy F., Labbé J.F. et Picot J.C. Panorama 2011 du marché du graphite naturel. Orléans : BRGM, 2012. http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61339-FR.pdf. RP-61339-FR.

[9] Société Nouvelle d'Affinage des Métaux. Projet RecLionBat Recyclage des batteries Lithium-Ion. Viviez : s.n., 2005. LIFE05 ENV/F/00080.

[10] Audion, A.-S., Hocquard, C. et Labbé, J.-F. Panorama 2013 du marché du cobalt. Orléans : BRGM, 2014. BRGM/RP-63626-FR .

[11] Kyoung Lee, Churl et Rhee, Kang-In. Preparation of LiCoO2 from spent lithium-ion batteries. Daejeon : Recycling Research Center, Korea Institute of Geoscience and Mineral Resources, 2002.

[12] M Contestabile, S Panero, B Scrosati. A laboratory-scale lithium-ion battery recycling process. Journal of Power Sources. 2001, Vol. 92.

[13] Spent Battery Shorting: The Future. Wiaux, J.P. Hamburg : s.n., 1998.

[14] Décret n°99-374. Légifrance. 12 mai 1999. [15] CASTILLO, S., ANSART, F., LABERTY-ROBERT, C., et al.

Advances in the recovering of spent lithium battery compounds. 2002. pp. p. 247-254. Vol. vol. 112.

[16] COREPILE. COREPILE. Corepile.fr. [En ligne] [Citation : 10 02 2016.] http://www.corepile.fr/.

[17] T. Georgi-Maschler, B. Friedrich, R. Weyhe, H. Heegn, M. Rutz. Development of a recycling process for Li-ion batteries. s.l. : Journal of Power Sources, 2012. pp. p. 173-182.

[18] FOUNDATION, ELLEN MACARTHUR. ellenmacarthurfoundation.org. ELLEN MACARTHUR FOUNDATION. [En ligne] [Citation : 15 02 2016.] http://www.ellenmacarthurfoundation.org/circular-economy/interactive-diagram.

[19] brgm. Panorama 2011 du marché du graphite naturel. Orléans : s.n., 2012. BRGM/RP-61339-FR.

[20] Inc., Graphene 3 D Lab. Graphene 3 D Lab Inc. [En ligne] [Citation : 14 02 2016.] http://www.graphene3dlab.com/s/home.asp.

[21] CNRS. CNRS LE JOURNAL. [En ligne] 27 11 2015. [Citation : 14 02 2016.] https://lejournal.cnrs.fr/articles/batterie-sodium-ion-une-revolution-en-marche.