Edition du lundi 9 decembre 2013

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LES ANNONCES DE LA SEINE J OURNAL OFFICIEL DʼANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE Lundi 9 décembre 2013 - Numéro 70 - 1,15 Euro - 94 e année L es plus hautes autorités françaises et étrangères du monde du droit ont assisté vendredi dernier, au théâtre du Châtelet, à la Rentrée Solennelle du Barreau de Paris et de la Conférence du Stage. Alexandre Vermynck et Constance Debré, respectivement, Premier et Deuxième Secrétaires de la Conférence du Stage 2013, ont eu le privilège de se livrer à la traditionnelle joute oratoire devant cette prestigieuse assemblée en faisant successivement les éloges de Jacques Vergès et de François Mitterrand. En raison du décès de Nelson Mandela, la Garde des Sceaux Christiane Taubira n’a pas pu honorer de sa présence cette manifestation annuelle incontournable du Barreau de Paris, elle a été remplacée par sa Directrice de Cabinet Christine Mauguë. Rappelant l’ambition portée par la Ministre de la Justice de « garantir une justice de qualité disponible pour tous selon ses besoins », Christine Mauguë a notamment évoqué la réforme de la procédure pénale : des réponses doivent être rapidement apportées aux questions soulevées par Jean-Louis Nadal, Président de la « Commission de modernisation de la vie publique », relatives à la crise de confiance des parquets afin que soient rapidement améliorées l’efficacité et l’indépendance du Ministère public à la Française. Après la remise des prix et les remarquables interventions du Jeune Barreau parisien, Christiane Féral-Schuhl a dressé le bilan de ses actions à la tête du Barreau de Paris, son mandat s’achevant dans quelques jours ; c’est en effet Pierre-Olivier Sur et son Vice-Bâtonnier Laurent Martinet qui la remplaceront le 1 er  janvier 2014. S’agissant de la place de l’avocat dans la société civile de demain, Madame Christiane Féral-Schuhl a brillamment plaidé : être avocat aujourd’hui, c’est s’engager pour le citoyen, c’est se battre pour le respect des droits de la Défense et des Libertés publiques, c’est être détenteur d’un secret professionnel protégé, c’est être un acteur du numérique, c’est ne jamais oublier la dimension humaine, c’est appartenir à une profession unie, c’est enfin être un avocat européen. La conclusion de son intervention s’est inscrite dans un rêve : celui de relever « ensemble et unis » tous les défis auxquels seront confrontés les avocats demain. Jean-René Tancrède Barreau de Paris Scéance Solennelle de Rentrée - 6 décembre 2013 Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35 Constance Debré, Christiane Féral-Schuhl et Alexandre Vermynck RENTRÉE SOLENNELLE Barreau de Paris - Rêver d’être un avocat rayonnant par Christiane Féral-Schuhl .................................................. 2 - Jacques Vergès par Alexandre Vermynck ........................................................ 6 - François Mitterrand par Constance Debré ............................................................ 9 - L’Association Pierre Claver, une école pour les demandeurs d’asile par Guillaume Vitrich ........................................................... 14 AGENDA Colloque Droit et Démocratie Le désamour des Français pour leur justice ..................... 14 VIE DU DROIT Signature de la convention « Télérecours » Cour administrative d’appel, Tribunal administratif et Ordre des Avocats de Paris .................................................. 15 ANNONCES LÉGALES ............................................ 16 DÉCORATION Jean-Luc Forget Chevalier de la Légion d’honneur ......................................... 23

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  • LES ANNONCES DE LA SEINE

    JOURNAL OFFICIEL DANNONCES LGALES - INFORMATIONS GNRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

    FONDATEUR EN 1919 : REN TANCRDE - DIRECTEUR : JEAN-REN TANCRDE

    Lundi 9 dcembre 2013 - Numro 70 - 1,15 Euro - 94e anne

    Les plus hautes autorits franaises et trangres du monde du droit ont assist vendredi dernier, au thtre du Chtelet, la Rentre Solennelle du Barreau de Paris et de la Confrence du Stage.Alexandre Vermynck et Constance Debr, respectivement, Premier et Deuxime Secrtaires de la Confrence du Stage 2013, ont eu le privilge de se livrer la traditionnelle joute oratoire devant cette prestigieuse assemble en faisant successivement les loges de Jacques Vergs et de Franois Mitterrand.En raison du dcs de Nelson Mandela, la Garde des Sceaux Christiane Taubira na pas pu honorer de sa prsence cette manifestation annuelle incontournable du Barreau de Paris, elle a t remplace par sa Directrice de Cabinet Christine Maugu. Rappelant lambition porte par la Ministre de la Justice de garantir une justice de qualit disponible pour tous selon ses besoins, Christine Maugu a notamment voqu la rforme de la procdure pnale: des rponses doivent tre rapidement apportes aux questions souleves par Jean-Louis Nadal, Prsident de la Commission de modernisation de la vie publique, relatives la crise

    de confi ance des parquets afi n que soient rapidement amliores leffi cacit et lindpendance du Ministre public la Franaise.Aprs la remise des prix et les remarquables interventions du Jeune Barreau parisien, Christiane Fral-Schuhl a dress le bilan de ses actions la tte du Barreau de Paris, son mandat sachevant dans quelques jours ; cest en eff et Pierre-Olivier Sur et son Vice-Btonnier Laurent Martinet qui la remplaceront le 1erjanvier 2014.Sagissant de la place de lavocat dans la socit civile de demain, Madame Christiane Fral-Schuhl a brillamment plaid : tre avocat aujourdhui, cest sengager pour le citoyen, cest se battre pour le respect des droits de la Dfense et des Liberts publiques, cest tre dtenteur dun secret professionnel protg, cest tre un acteur du numrique, cest ne jamais oublier la dimension humaine, cest appartenir une profession unie, cest enfi n tre un avocat europen.La conclusion de son intervention sest inscrite dans un rve: celui de relever ensemble et unis tous les dfi s auxquels seront confronts les avocats demain. Jean-Ren Tancrde

    Barreau de ParisScance Solennelle de Rentre - 6 dcembre 2013

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    Constance Debr, Christiane Fral-Schuhl et Alexandre Vermynck

    RENTRE SOLENNELLE Barreau de Paris - Rver dtre un avocat rayonnant par Christiane Fral-Schuhl .................................................. 2 - Jacques Vergs par Alexandre Vermynck ........................................................ 6 - Franois Mitterrand par Constance Debr ............................................................ 9 - LAssociation Pierre Claver, une cole pour les demandeurs dasile par Guillaume Vitrich ........................................................... 14

    AGENDA Colloque Droit et Dmocratie Le dsamour des Franais pour leur justice ..................... 14

    VIE DU DROIT Signature de la convention Tlrecours Cour administrative dappel, Tribunal administratif et Ordre des Avocats de Paris .................................................. 15

    ANNONCES LGALES ............................................ 16DCORATION Jean-Luc Forget Chevalier de la Lgion dhonneur ......................................... 23

  • 2 Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70

    Rentre solennelle

    Rver dtre un avocat rayonnantpar Christiane Fral-Schuhl

    Depuis toujours, la parole de lavocat est notre arme. Nous, avocats, ici et dans le monde entier, luttons inlassablement contre les dictatures, contre les violences, contre la haine raciale, contre toutes les discriminations... pour mettre un terme cette folie des hommes qui les conduit emprisonner, torturer, assassiner celles et ceux qui ont pour seul tort dtre diff rents, celui dappartenir une tribu, une ethnie, davoir une autre couleur de peau ou une autre religion.Sachez, Madame la Garde des Sceaux, que vous trouverez toujours les avocats vos cts pour sopposer toutes les drives extrmistes qui menacent, ici et ailleurs.Partout dans le monde, nous accompagnons de nos voix celles de nos confrres de Turquie, Tunisie, Liban, Syrie, Gorgie, Armnie et tant dautres pays.Je voudrais, en cet instant, que nous ayons une pense particulire pour ces femmes avocates qui, souvent au pril de leur vie, portent la dfense des droits de lhomme. Certaines sont venues tmoigner Paris le 8 mars 2013: Valdenia Paulino du Brsil, Alba Cruz du Mexique, Christina Swarns des tats-Unis, Karinna Moskalenko de Russie, Shirin Ebadi dIran.Je pense aussi nos confrres emprisonns en ce moment: Gao Zhisheng en Chine, Abdol-Fattah Soltani en Iran, Vadim Kuramshim au Kazakhstan... Je viens de remettre celui-ci le prix Ludovic Trarieux.Je pense aussi nos confrres, ici, Paris qui donnent de leur temps pour accompagner, dfendre, conseiller gratuitement ceux qui en ont besoin.- Le Bus de la solidarit sillonne Paris la rencontre des plus dmunis: 36 000consultations en 10ans ;- Le succs de la semaine de lAvocat dans la Cit, organise en partenariat avec la Mairie de Paris, avec plus de 8 500 consultations off ertes en octobre2012 et octobre2013;- Le Fonds de dotation Barreau de Paris Solidarit pour soutenir et mettre en lumire les actions pro bono de nos cabinets.Alors que nous savons faire entendre notre voix en France comme dans le monde entier, pourquoi,

    Madame la Garde des Sceaux, les pouvoirs publics ne nous entendent-ils pas?Nous sommes:- vilipends quand nous faisons du conseil fi scal,- suspects quand nous sommes parlementaires, - carts des actions collectives,- contests dans les fondements conomiques de notre activit lorsque, pour ne citer que cet exemple, la loi a voulu transfrer aux notaires le monopole de la cession des parts de socits civiles immobilires, - et plus gnralement, souponns de tout ce que nous faisons, accuss de tout ce que nous ne faisons pas.Notre rapport au pouvoir est fond sur lgalit et non sur la subordination. Nous nous honorons de notre indpendance qui est apparemment, pour le pouvoir politique, un problme.Nous nous flicitons dtre des acteurs conomiques indpendants, forts dune conscience professionnelle qui ne nous fait jamais perdre de vue les notions dthique et de dontologie. Notre socit, pour fonctionner dmocratiquement, a besoin dune profession reconnue et considre et non place en permanence sous une pe de Damocls politique.Nous sommes fi ers dtre les garants du droit des citoyens dfendre leurs intrts personnels.Etre avocat aujourdhui, cest sengager pour le citoyen. Cest mettre sa disposition la jurisprudence:- sur le site internet du Barreau de Paris, - sur le site internet de Lgifrance sur lequel le Barreau de Paris apparatra bientt offi ciellement comme contributeur.Un accord historique grce Monsieur le Secrtaire Gnral du Gouvernement que je tiens remercier chaleureusement pour cette belle avance.Etre avocat aujourdhui, cest sengager pour le citoyen. Pour lui, nous avons rdig le Manifeste des avocats parisiens pour les justiciables.Pour exiger le Droit au droit,Comme il existe un droit la sant ou un droit lducation.Pour exiger un droit accessible tous. Pour dnoncer le dsengagement de ltat dans le fi nancement de lAide Juridictionnelle.Est-il normal que la France consacre la justice moiti moins de moyens que lAllemagne?

    LES ANNONCES DE LA SEINESige social :

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARISR.C.S. PARIS B 339 349 888

    Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr

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    Etablissements secondaires :l 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Tlphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Tlphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Tlphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Tlphone : 01 45 97 42 05

    Directeur de la publication et de la rdaction :Jean-Ren Tancrde

    Comit de rdaction :

    Thierry Bernard, Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri Briard, Avocat au Conseil dEtatAgns Bricard, Prsidente de la Fdration des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrg des Universits de droitAndr Damien, Membre de lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des Droits de lHomme des Avocats Europens, ancien Btonnier de BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate la Cour, ancien Btonnier de ParisBrigitte Gizardin, Magistrat honoraireRgis de Gouttes, Premier avocat gnral honoraire la Cour de cassation Chlo Grenadou, Juriste dentrepriseSerge Guinchard, Professeur de Droit lUniversit Paris II Panthon-AssasFranoise Kamara, Conseiller la premire chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat gnral honoraire la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat la Cour, Matre de confrence H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit lUniversit Paris II Panthon-AssasChristian Lefebvre, Prsident Honoraire de la Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou, Prsident dHonneur du Conseil National des Compagnies dExperts de JusticeNolle Lenoir, Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasJean-Franois Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGrard Pluyette, Conseiller doyen la premire chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de lUNAPLYves Repiquet, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisRen Ricol, Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

    Publicit :Lgale et judiciaire : Didier ChotardCommerciale : Frdric Bonaventura

    Commission paritaire : n 0718 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage : 13 297 exemplairesPriodicit : bi-hebdomadaireImpression : M.I.P.3, rue de lAtlas - 75019 PARIS

    Copyright 2013Les manuscrits non insrs ne sont pas rendus. Sauf dans les cas o elle est autorise expressment par la loi et les conventions internationales, toute re-production, totale ou partielle du prsent numro est interdite et constitue-rait une contrefaon sanctionne par les articles 425 et suivants du Code Pnal.

    Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur offi ciel pour la priode du 1er janvier au 31 dcembre 2013, par arrts de Messieurs les Prfets : de Paris, du 27 dcembre 2012 ; des Yvelines, du 31 dcembre 2012 ; des Hauts-de-Seine, du 31 dcembre 2012 ; de la Seine-Saint-Denis, du 27 dcembre 2012 ; du Val-de-Marne, du 27 dcembre 2012 ; de toutes annonces judiciaires et lgales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure Pnale et de Commerce et les Lois spciales pour la publicit et la validit des actes de procdure ou des contrats et des dcisions de justice pour les dpartements de Paris, des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine.N.B. : Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des annonces lgales.

    -Tarifs hors taxes des publicits la ligneA) Lgales :Paris : 5,48 Seine-Saint-Denis : 5,48 Yvelines : 5,23 Hauts-de-Seine : 5,48 Val-de-Marne : 5,48 B) Avis divers : 9,75 C) Avis fi nanciers : 10,85 D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,82 Hauts-de-Seine : 3,82 Seine-Saint Denis : 3,82 Yvelines : 5,23 Val-de-Marne : 3,82 - Vente au numro : 1,15 - Abonnement annuel : 15 simple 35 avec supplments culturels 95 avec supplments judiciaires et culturels

    COMPOSITION DES ANNONCES LGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES

    Surfaces consacres aux titres, sous-titres, fi lets, paragraphes, alinas

    Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de lannonce sera compose en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi 4,5 mm. Les blancs dinterlignes sparant les lignes de titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi 3,40 mm. Les blancs dinterlignes sparant les diffrentes lignes du sous-titre seront quivalents 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est spare de la prcdente et de la suivante par un fi let 1/4 gras. Lespace blanc compris entre le fi let et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ entre la dernire ligne de lannonce et le fi let sparatif. Lensemble du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des fi lets maigres centrs. Le blanc plac avant et aprs le fi let sera gal une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinas : le blanc sparatif ncessaire afi n de marquer le dbut dun paragraphe o dun alina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces dfi nitions typographiques ont t calcules pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans lventualit o lditeur retiendrait un corps suprieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

    2012

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    Ne faut-il plus compter que sur laltruisme des avocats?Altruisme, parce que depuis trop dannes nous compensons la carence de ltat en matire daccs au droit.Est-il normal quen France un avocat qui dfend les justiciables les plus dmunis soit indemnis par ltat un tarif horaire infrieur au SMIC?Il faut des moyens dcents pour que les plus dmunis aient accs une dfense digne.Nous ne demandons pas laumne.Nous nacceptons pas cette insulte faite tous les justiciables.ll est temps que ce scandale en forme dinjustice cesse et, je suis certaine, Madame la Garde des Sceaux, que non seulement vous mentendez, mais que vous mcoutez, que vous agirez.Est-il normal de payer 0 % de TVA sur les honoraires dun mdecin et bientt 20% sur ceux dun avocat? Est-il normal quen France le droit ne soit pas enseign lcole aux futurs citoyens et que les avocats bnvoles dInitiaDroit assument seuls cette charge?Exigeons la confiance dans la loi.Est-il normal que le lgislateur continue empiler les lois sans aucun contrle?Que les lois fi scales puissent tre rtroactives?Que la France soit le pays le plus souvent condamn par la Cour Europenne des Droits de lHomme pour les dlais anormalement longs des contentieux devant nos juridictions nationales? Est-il normal quen France, on laisse prosprer sur le web et ailleurs de faux experts en droit qui vivent de lignorance des justiciables? Etre avocat, cest aussi tre ct du citoyen consommateur qui doit pouvoir avoir la garantie dune profession comptente, indpendante, avec une dontologie forte.Au Barreau de Paris, nous avons engag plus de 350actions contre les braconniers du droit.

    Mais il faut aller plus loin, nous avons besoin de vous.Tous ensemble, nous ferons en sorte que le droit reste au cur du pacte de confiance entre le citoyen et ltat.Etre avocat aujourdhui, cest se battre encore et toujours pour le respect des droits de la dfense et des liberts publiques.Comment tolrer que lavocat soit encore aujourdhui interdit daccs au dossier de son client en garde vue? Comment admettre que le justiciable ne puisse bnficier de lassistance dun avocat lors de la perquisition dont il fait lobjet?Comment accepter que la prsomption dinnocence soit en recul permanent?Comment admettre que le droit pnal soit de plus en plus contamin par une multitude de prsomptions de culpabilit limage de la prsomption de fraude de la matire fi scale?O est passe la grande rforme de lindpendance et de la modernisation du Parquet?Madame la Garde des Sceaux, entendez que le Parquet ne doit plus rester sur son estrade et quil faut remettre sur un mme niveau la place de lAvocat et la place du Procureur. Ce qui a t rendu possible au Palais de Justice de Fort de France doit tre possible dans le futur Palais de Justice de Paris. Ce serait l un signe fort, Madame la Garde des Sceaux.Etre avocat aujourdhui, cest tre dtenteur dun secret professionnel protg. Le secret professionnel nest pas un privilge de lavocat, mais une garantie pour le citoyen.Comment admettre que la perquisition chez lavocat soit entreprise de manire systmatique alors que nos cabinets sont les gardiens naturels des secrets des citoyens?Les attaques contre notre secret professionnel sont de plus en plus frquentes, de plus en plus prcises, profondment injustes.

    Ces attaques branlent la confi ance du justiciable en nos institutions, en notre Justice, en votre Justice. Elles fi ssurent la confi dentialit, dstabilisent nos valeurs, bradent nos liberts. Madame la Garde des Sceaux, je vous en conjure, il faut conforter, renforcer, protger ce secret sans lequel il ny a plus de socits dmocratiques.Ctait pourtant une promesse de Monsieur Franois Hollande alors quil tait candidat. Il y a maintenant urgence. Renforcer le secret des avocats, cest aussi renforcer le respect de la vie prive qui doit toujours primer sur le droit la transparence.Ce qui est nuisible la socit nest pas quun avocat puisse changer avec son client en toute confi dentialit.Ce qui est dangereux pour la dmocratie, cest quil ne puisse plus le faire.Etre avocat aujourdhui, cest aussi tre un acteur du numrique. Le RPVA est une solution indite qui place en France le Barreau de Paris en tte de la dmatrialisation des changes avec la Justice, sans sacrifi er le secret professionnel.Avec le RPVA, nous gagnons en temps, en qualit et en effi cacit. Avec lui, nous pouvons dialoguer en toute scurit avec toutes les juridictions. Pour permettre lavocat de dlguer, avec le mme niveau de scurit, au sein de son cabinet, dautres associs ou collaborateurs, jai fait dvelopper Avocl.Avocl est dj oprationnel pour tous les services lectroniques du Barreau de Paris. Il ne manque plus que laccs e-barreau pour pouvoir lutiliser avec le RPVA.Madame la Garde des Sceaux, il ne tient qu vous de permettre aux 25000avocats de Paris de travailler lre numrique. Nous vous apportons une solution qui ne vous cotera rien.

    Rentre solennelle

    Dominique Baudis, Jean-Marc Sauv, Jean-Louis Debr, George Pau-Langevin, Vincent Lamanda, Jean-Claude Marin et Jacques Degrandi

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    Alors, Madame la Garde des Sceaux, je vous en prie, signez les arrts techniques qui sont sur votre bureau.Lavocat du numrique, cest aussi celui qui utilise les technologies pour dvelopper son cabinet: sites internet, blogs, rseaux sociaux...Le numrique off re de formidables opportunits, de nouveaux moyens permettant toutes les structures, quelle que soit leur taille, de bnfi cier dune plus belle visibilit, un outil leur permettant de crer une identit numrique et de mieux se positionner en France et ltranger.Cela suppose une dontologie du numrique. A nous de dcliner ces rgles dsormais confrontes de nouvelles manires dexercer.Le Barreau de Paris a pris linitiative ddicter un vade-mecum de la dontologie du numrique. Il est dsormais la disposition de tous.Lavocat du numrique doit faire face lmergence dautres acteurs non-avocats qui noff rent pas les garanties de notre dontologie: - des sites de rfrencement, - des compagnies dassurance de protection juridique, - des sites dappels doff res de march publics... Tous ces acteurs au fil des annes sont venus sintercaler entre nous et les justiciables.Si nous ne ragissons pas, nous risquons de devenir des sous-traitants bas prix et perdre notre indpendance dontologique et conomique.Alors, il nous faut tre offensifs, remettre en question nos modes dexercice tout en prservant nos principes essentiels. Rveillons-nous. Pourquoi ne pas dvelopper nous-mmes nos propres plateformes de sites internet, nos propres sites de rfrencements, nos propres logiciels, nos propres outils de dmatrialisation? Faisons en sorte que ces nouveaux acteurs ne soient plus nos donneurs dordre qui dictent la loi de loff re et de la demande, qui pauprisent notre profession sans off rir de garanties aux justiciables.Faisons en sorte quils deviennent nos partenaires.Nous y gagnerons, pour une justice plus forte, une justice en laquelle le justiciable a dfi nitivement confi ance. Etre avocat aujourdhui, cest aussi ne jamais oublier la dimension humaine. Si la rvolution numrique a pris toute sa place dans les prtoires, si les nouvelles technologies ont envahi les cabinets des magistrats et des avocats, la comprhension de la personne, le rapport humain sont essentiels laccomplissement de nos missions

    communes.Le dialogue magistrat/ avocat ne doit pas se rduire une seule et unique audience de plaidoirie. Cest donc lheure aujourdhui dattirer votre attention, Madame la Garde des Sceaux, sur les risques de dshumanisation de la Justice du 21mesicle que vous tes en train de dessiner, de dcider. Il est indispensable que vous acceptiez de rintroduire davantage dcoute et de dialogue entre lavocat et le magistrat. Alors, tous ensemble, nous tous dans cette salle, je vous invite rsister la tentation de dsincarner la Justice. Ne laissons pas entrer cette mauvaise Justice qui nous rduit un traitement par entres de codes et identifi ants. Cest en coutant quon juge mieux,Cest en coutant que lon trouve des solutions,Cest en coutant que lon ne se trompe pas,Cest en coutant que lon fait uvre de justice. Cest vrai pour le justiciable. Cest vrai pour lavocat. Cest vrai pour le magistrat. De mme, Madame la Garde des Sceaux, ne cdez pas la tentation de djudiciariser certaines procdures pour des contingences conomiques.Il y a des domaines o loffice du juge est indispensable.Nous ne pouvons pas accepter une prcarisation du justiciable qui pourrait se voir priv dun juge dans le domaine le plus sensible qui le concerne: le divorce.Seul le juge, par son indpendance, protge le conjoint le plus faible. Cest lui qui garantit limpartialit, labsence de conflits dintrts et lquilibre des engagements.Le divorce, mme par consentement mutuel, et le rglement de ses consquences ne doit pas tre une simple formalit administrative.Cela est dautant moins justifi quavocats et magistrats sont promoteurs des modes alternatifs de rglement des confl its familiaux. Au Barreau de Paris, lanne 2013 aura t lanne de la Mdiation.Si vous souhaitez dcharger les magistrats des contentieux familiaux, il nappartient qu vous de gnraliser la mdiation familiale, le droit collaboratif et la procdure participative.Le Barreau de Paris sera toujours vos cts pour apporter tout notre soutien de telles initiatives.Etre avocat aujourdhui, cest prparer lavenir des avocats de demain. Nous exerons un mtier exigeant qui ncessite

    plusieurs annes dtudes et de formation.Pendant mes deux annes de btonnat, 3500avocats auront rejoint le Barreau de Paris. Pour les jeunes avocats, nous avons dploy des actions qui traduisent notre engagement:- La Charte des bonnes pratiques de la collaboration, signe par plus de 115cabinets, soit 2500collaborateurs concerns; - La lutte contre les ingalits professionnelles, avec limmunit de deux mois pour les collaboratrices au retour de leur cong maternit et la cration de la commission lgalit professionnelle ;- La garantie Perte de Collaboration, souscrite par 1600 collaborateurs ; une belle performance! - Le Barreau entrepreneurial, pour les accompagner dans leurs projets professionnels, le dveloppement de leurs carrires... - Les trois coles du Barreau de Paris cres pour eux: lcole du Barreau entrepreneurial, lcole de la mdiation, lcole du Barreau numrique, En 2014, 1 950 lves avocats feront leur entre lEcole. A cette cadence, le Barreau de Paris comptera 35000avocats en 2020.La rfl exion sur laccueil de nos jeunes confrres est lie la place du droit dans notre socit. Cest de notre avenir et de lintrt du justiciable dont il sagit. Jai eu cur, pendant ces deux annes, daller la rencontre des tudiants, des professeurs de droit, des Instituts dEtudes Judiciaires, des avocats du Jeune Barreau, dans un objectif dchanges et de rfl exions. Jai pris linitiative de faire adopter par notre Conseil de lOrdre un rapport proposant un tat des lieux et des axes de rformes de laccs notre profession. Il est dsormais la disposition de tous.Lenthousiasme de la profession tmoigne de son importance et de son urgence.Cest aussi notre responsabilit collective. Etre avocat aujourdhui, cest appartenir une profession unie. 161barreaux regardent aujourdhui dans la mme direction. Ils vous regardent, Monsieur le prsident du Conseil National des Barreaux. Vous prsidez une institution que la profession a souhait et je sais que vous entendez mener une rfl exion sur une rforme en profondeur de son fonctionnement, de sa gouvernance afi n que le CNB soit ressenti par la profession comme plus effi cace et plus reprsentatif. Nous avons russi, Monsieur le Prsident de la Confrence des Btonniers, rassembler moyens, nergies et dialogues.Cest avec vous - et je vous en remercie - que nous avons pu mettre en uvre des solutions indites, et cratives, au plan national, comme: - la centrale de rfrencement PraeferentiaCorefrance qui rassemble aujourdhui 39Barreaux, soit 49000avocats; et - AvosActes, qui permet enfi n la conservation de lacte davocat sous forme papier ou numrise. Les Ordres sont dsormais en marche pour mutualiser les services quils rendent aux avocats.Le clivage Paris / Province nexiste pas.Le clivage petits et grands barreaux nexiste pas. Il y a une profession qui doit sunir, dans lintrt de tous les avocats de France rassembls dans les 161barreaux.Monsieur le Prsident du Conseil National des Barreaux, je sais que cest galement votre souhait. Je forme le vu que vous russissiez ce dfi : avancer vers notre union nationale. Nous rassembler, nous

    Rentre solennelle

    Nicolas Pottier, Laurent Martinet et Pierre-Olivier SurPh

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    fdrer, mettre en lumire les contributions de chacun au profit de tous:Il sagit de:- coordonner au bnfice de toute la profession chacune des initiatives qui mergent des barreaux;- couter les Ordres qui connaissent les questions urgentes qui ncessitent rformes et plans daction.Si vous relevez ce dfi, qui passera par une ncessaire rnovation de linstitution que vous prsidez, ce sera alors notre fiert tous. Nous unir dans notre diversit, cest le dfi que vous devez relever, Monsieur le Prsident.Lorsque la profession se rassemble, elle sait gagner.Etre avocat aujourdhui, cest enfin tre un avocat europen. Je me tourne vers vous, jeunes confrres, cest votre avenir. Ne vous laissez pas gagner par la morosit, parce que, mme si lEurope politique trbuche encore, si lEurope financire est gravement malade, si lEurope conomique se construit lentement, si lEurope de la Culture se cherche, lEurope du droit se porte bien. Le temps est venu de construire lEurope des avocats. Une Europe o lavocat parisien pourra exercer les activits dj ouvertes ses voisins

    de Londres, Madrid, Berlin, et tous les autres... Un primtre enfin harmonis, incluant lavocat en entreprise, bien plus large que celui qui nous restreint actuellement!Dans cette Europe o 90% de la rglementation conomique se rdige Bruxelles, il nous faut avoir le rflexe europen. Cest avec cette conviction que nous avons cr un programme de formation lEcole. Dans cette Europe, 70 % des contentieux europens impliquant la France chappent aux avocats franais. Nous pouvons plaider en franais et dposer des critures en franais devant la Cour Europenne de Justice! A nous dinvestir ce nouveau champ de comptence!Oui, le Barreau de Paris participe activement la construction de lEurope et a ses propres revendications.Le procureur europen ? Nous exigeons le respect des droits fondamentaux du justiciable.La carte numrique europenne? Nous devons ladopter pour quelle devienne commune tous les avocats europens.Le Sige de la division centrale des brevets europens?

    Nous nous sommes battus pour que Paris soit la ville qui laccueille. Et cest une belle victoire! Des actions ont t menes avec la Dlgation des Barreaux de France que je tiens ici, publiquement, remercier pour la qualit de son travail. Madame la Garde des Sceaux, Il y a 100ans, jour pour jour, le 6dcembre 1913, le Btonnier Henri Robert ouvrait cette sance solennelle en voquant les sujets du moment: lagrandissement du Palais de justice, le secret professionnel ou laccueil et lavenir des jeunes avocats...De lavenir, il disait simplement: nous lignorons.Aurait-il imagin, cent ans plus tard, jour pour jour, aujourdhui, que toutes ces questions seraient poses, ces simples et terribles questions seraient encore dactualit?Madame la Ministre, vous lavez compris, je rve de voir cet avocat franais, europen et international, organis autour dordres rayonnants visibles de toute lEurope, dune Justice qui serve dexemple tous les autres pays, cet avocat gnreux et loquent, fier de sa justice, fier de son mtier...Je rve que ce rve nen soit plus un, que nous puissions relever tous ces dfis, ensemble, unis. Nous le pouvons, nous le devons...Je suis sre que grce vous, avec vous, il en sera ainsi.

    Rentre solennelle

    Peu dhommes ont, comme lui, connu un tel destin.Parce quil tait avocat, il croyait que toutes les vies sont gales entre elles.Son combat a t une lutte opinitre, obstine, sans concession, jusqu la privation

    de libert, jusqu la souffrance, jusqu lhumiliation.Il a su vaincre la perscution.Il a su tre un artisan de la paix.Il a restitu son peuple sa dignit et ses liberts.Il a redonn son peuple lespoir de la justice.

    Il a su montrer que le pardon quil a lui-mme donn son gelier est le signe visible de la rconciliation laquelle chacun de nous est appel.Il a t le premier avocat se voir dcerner le prestigieux prix Ludovic Trarieux pour son action

    en faveur des droits de lhomme et la dfense des liberts.Il est et il restera un exemple pour nous tous.En mon nom personnel,Au nom des avocats de mon Barreau,Au nom de tous les avocats

    du monde qui nous font lhonneur dtre prsents en cette Rentre solennelle,Je mincline avec une profonde tristesse et un immense respect devant sa mmoire.

    Christiane Fral-Schuhl

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    Hommage du Barreau de Paris Nelson Mandela

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    Rentre solennelle

    Jacques Vergspar Alexandre Vermynck

    Quelque part, prs de nous, il est l...Car, nen dplaise aux athes, sil ne sest jamais dparti de son sourire... sil a choisi de se rapprocher de lglise, au dernier moment, comme un colier rvise son examen...la veille!...Cest quil croyait en la vie aprs la mort!Quelque part, donc, prs de nous, il est l, qui se rcrie, sinsurge, se rvolte! Comment ? Moi ! Subir un loge ! ?...Triste ncrologie! Plutt me rincarner en notaire, de rserve chez les paras, en Algrie, dans les annes 50!Oui, mesdames, messieurs les hauts magistrats, mesdames, messieurs les btonniers, mes chers confrres...vous le savez... Jacques Vergs naimait pas que lon parle de lui...Il prfrait...le faire lui-mme! Tout en pudeurs et sobrits! Loin de cette croyance rpandue chez nous, les avocats, selon laquelle le charisme consisterait affi cher une confi ance en soi en totale disproportion avec nos qualits relles...Jacques Vergs, lui, cultivait un gotisme pnitent!Pri de donner son sentiment sur le documentaire lavocat de la terreur dont il tait le sujet, ne rpondit-il pas: Cest un trs bon fi lm, mais... cest cause de moi!Saimer soi-mme, cest lassurance dune longue histoire damour1...Voyez vous-mme: Nous sommes en mai 1987, au procs Barbie, et, 67ans, Jacques Vergs est toujours pris de Jacques Vergs! Seul face trente-neuf confrres, trente-neuf zigs, selon sa formule, il en dduit avec rigueur que chacun dentre eux ne reprsente quun 1/39me de son intelligence! Il faut lire Jacques Vergs mis en scne par Jacques Vergs : Jai serr sur mon cur les lpreux sans lvres et sans yeux!. Nous voici contemplant le chef duvre Jacques Napolon

    Vergs et les pestifrs de Jaff a!Il faut imaginer un dner en sa compagnie...Son ternel sourire satisfait ...Devant lequel linterlocuteur demeure hallucin, comme Alice au pays des merveilles devant le sourire en lvitation du Chat de Chester, quand le chat lui-mme sest volatilis et que seul son sourire [narquois] demeure suspendu entre les branches dun arbre2!Il faut visualiser le dsarroi de ce mme interlocuteur qui, aprs avoir entendu Jacques Vergs discourir de Jacques Vergs plusieurs heures durant, sans russir en placer une, se dit en dsespoir de cause: Jeanne Darc, qui avait des voix, devait tre heureuse...Moi je voudrais juste pouvoir entendre la mienne!3...Il faut se remmorer son spectacle au thtre de la Madeleine : la premire hagiographie autobiographique au monde!Dans ces conditions, un loge est-il bien ncessaire?Un dithyrambe?Devant un parterre de hauts magistrats qui plus est! Lui qui proclamait que les bons juges, cest comme les hros dans la presse du cur, a nexiste pas !. Tout en ne manquant jamais de vous rappeler en dbut daudience: jexige que vous traitiez avec moi de puissance, puissance....Un loge, lorsquil aurait souhait un procs?! Un procs, pour accder la postrit comme dautres grands hommes avant lui...Un procs qui, donc, lui aurait permis de se prsenter aux anges, ou aux damns, en leur glissant, goguenard : Socrate? Jsus? Mes prdcesseurs!.Oui, Vergs partageait cette qualit franaise. Cette posture mgalomane tombe en dsutude. Il incarnait, dune saillie lautre, ce trait en vogue chez nos intellectuels du sicle pass, et toujours chez Bernard-Henri Lvy. Ce contentement de soi du temps o notre pays rayonnait!...Jai le culte de moi-mme! Jacques Vergs saimait et cest heureux, car... Il faut saimer

    soi-mme pour aimer les autres! Il faut saimer soi-mme pour aimer son client! A plus forte raison, il faut saimer soi-mme pour fi nir par pouser sa cliente...Jacques Vergs, arriv dans la force de lge, ne parlait plus que de lui et a aussi, cest heureux, car, habituellement, cest linverse qui se produit...Ce sont les jeunes loups qui ne parlent que deux-mmes. Du moins, jusqu ce que la vie ne les contraigne faire le deuil de leurs ambitions. Alors, seulement, ils commencent parler des autres... beaucoup... et en des termes assez amers... Vous lavez compris, Jacques Vergs, lui, na jamais abandonn ses ambitions.Alors oui, un loge!Un loge teint dironie et avec une odeur dirrvrence...Parce que la Confrence, disait-il, cest de la sdition dans des bas de soies.Un loge parce que si lui saimait, les autres, souvent, beaucoup moins... Allez!... Nous sommes entre nous...On ne va pas se mentir...Il tait dtest par beaucoup! Son succs gnait, ses provocations agaaient, sa faon dtre avait une proprit urticante!Alors il tait moqu, caricatur... On tournait en drision, comme je lai fait, sa mgalomanie. Mais...un mgalomane nest-il pas seulement un homme qui a mieux russi que moi? On lui reprochait davoir perdu la plupart de ses procs. Mais... cest l la marque dun grand avocat! Oui, un grand avocat est un avocat qui perd ses procs car, contrairement au bon avocat, le grand na pas besoin de succs judiciaires pour que son talent soit reconnu4.On transformait cet amoureux de la culture franaise en un adversaire de la Rpublique. Ses combats pour les peuples en un combat contre lHexagone...Allant jusqu prtendre que sa haine de la France trouverait sa source dans sa btardise originelle5.A ses dtracteurs, il aurait sans doute rpondu mes ennemis doivent avoir peur que je les mange, prouvant ainsi le cannibalisme de mes origines!...Oui, de son exprience de la diff rence, Jacques Vergs savait que les gens auront toujours beaucoup plus de sympathie pour un vietnamien avec un chapeau pointu, un sourire sournois et en train de yodler la tonkinoise, plutt que pour un mtis opinitre et qui, plus que tous les autres aux yeux du peuple, incarnera la fi gure de lavocat.Malheureusement pour ceux-l, Jacques Vergs ntait pas loncle Tom de lIndochine!Il prfrait lpret la douceur, le combat au renoncement, la rupture la connivence...Et ctait parti pour des provocations foisons! Des rodomontades riges en stratgie judiciaires ! Des bravades au service de la dfense!Rappelez-vous, 1987... La France tremble de se juger travers le boucher de Lyon, cependant que Jacques Vergs multiplie les saillies mdiatiques! Agac, son btonnier lui fait observer qu tout oser, il ne lui reste plus qu prendre la pose dans son bain! Imaginez donc la tte de ce mme btonnier lorsquil dcouvre, quelques jours plus tard, en une de Paris Match, un Jacques Vergs barbotant avec satisfaction dans sa baignoire, un cigare et de la mousse de bain pour seule pudeur... Le procd est toujours le mme!Chaque fois, un coupable est off ert nos yeux aveugls dimpartialit et de dgot. Chaque

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    fois, comme une clipse, Vergs sinterpose... se fait, magie des perspectives, plus visible que son client... tout en poursuivant son mouvement giratoire... jusqu ce que la foule, dupe, saperoive quelle contemple cet accus quelle ne voulait pas voir, et non plus son avocat.Oui, Vergs savait jouer de lopinion et des mouvements de foule, lui qui naimait rien tant que penser contre elle. Avec cette fantaisie dlicieuse propre aux esprits excentriques, pour qui penser diffremment est une hygine de vie...Mais, prenez gare! Loriginalit est un ogre, qui la nourrit laffame ! Au commencement, on est original par dandysme, par posture... Mais penser diffremment, lon sisole... et de cet isolement loriginalit sort renforce ! On en devient marginal par conviction! Solitaire, par got des mauvaises frquentations... Constatez par vous-mme! Comparez ces deux trajectoires peine diffrentes... Au procs des poseurs de bombe, toujours, laudience avait t longuement interrompue car les avocats de la dfense avaient disparu. A leur retour, le Prsident de chambre les somme dexpliquer leur absence! Roland Dumas, dabord, baragouine un empchement professionnel....Avant que Jacques Vergs, dans une salle pleine de militaires qui le honnissent, ne choisisse de rpondre : Monsieur le Prsident, pardonnez-moi, jtais entre les mains de ma masseuse.Pour le moment, cest vrai, la diffrence entre les deux est tnue...Mais quelques annes plus tard, les deux comparses se retrouvent! 1990, Roland Dumas, lancien dfenseur du rseau Jeanson, lancien dfenseur de lanticolonialisme, se dclare favorable une intervention franaise en Irak...Jacques Vergs, souhaitant sans doute exprimer une dception lgitime, lui rpond par la publication dune tribune intitule, sobrement: Roland, tu nes quune grosse merde!Il y dans cette formule... bien y rflchir....quelque chose...dassez dfinitif! On sent comme une volont de ne pas laisser une part trop importante au doute!Il y a, dans cette insulte, une vritable rvolte. Dont on imagine quelle aurait pu tre exprime avec plus de retenue...Mais Roland Dumas, connaissant lhomme, choisit de rpondre avec intelligence: Oh, dites Jacques quil exagre!Oui, Roland Dumas savait que, devant la sensiblerie, la mivrerie, la circonspection, la pondration, son ami choisirait loutrance ! Loutrance comme le symbole de sa rsolution! Loutrance comme lincarnation dune conviction... Dune conviction qui dure...Forge par le retranchement dedans soi, par la solitude... Une solitude consentie... Une solitude dsire par ceux qui savent quil est plus facile daimer son lointain que son prochain! Une solitude entendue comme linstrument douloureux mais indispensable pour ne pas se corrompre au contact des autres, de leurs compromissions, bassesses et faiblesses! Une solitude pour conserver intact sa capacit de rvolte! Une solitude recherche par ceux qui veulent un destin plutt quun bonheur!Souvenez-vous, Thomas Mann... Vivre ou crer, il faut choisir!. On ne peut tre tout la fois jouisseur et dmiurge!

    Jacques Vergs, lui, a fait son choix: il sera un avocat avant dtre un homme... Seul, parmi des communistes franais qui le rprouvent!Seul, au milieu des Pieds-Noirs qui le conspuent!Seul, face un Ben Bella qui souhaiterait le museler!Seul, vapor pendant prs de neuf annes...Seul, face 39 avocats au procs Barbie!Seul, face lopinion publique au Cambodge!Seul, face loccident en Lybie et en Cte dIvoire!Seul et pourtant de si bonne compagnie... Quel gchis... Quelle souffrance dtre seul...Il faut avoir le got du malheur, des monologues muets, des soliloques autistiques!Le solitaire est drain la tristesse comme le veau labattoir! Mais sa solitude lui permet de se demeurer fidle... De continuer de croire en ses illusions... De conserver ces yeux rieurs cercls de lunettes...Ces yeux brillants despiglerie qui rendent le regard de Jacques Vergs si factieux et si douloureux pour ceux qui se sont compromis...La solitude permet aux grands hommes de ne pas oublier leur combat en chemin! Elle faonne ces quelques mortels qui, pour reprendre le mot du Baron dHolbach, ont [cette] raideur dans lesprit, [ce] dfaut de souplesse dans lchine, [ce] manque de flexibilit dans la nuque du cou, [bref, cette] organisation malheureuse [qui] les empche de se perfectionner dans lart de ramper.Et, comprenez-moi bien...jentends ce qui il y a de paradoxal faire lloge de la solitude entour de 2000 personnes! Mais...tre seul au milieu de tous nest pas moins douloureux... et surtout, qui davantage que nous a le devoir de prserver ses illusions?Grce sa solitude, Vergs entretenait ses chimres... Ainsi, lorsque Carlos confia un juge dinstruction quil se considrait moins dangereux que Vergs, ce-dernier sut rinterprter en sa faveur cette petite pique en rpondant : Ecoutez... Je pense que Carlos a voulu me rendre un hommage! Et oui!Il fallait que Jacques Vergs soit un rveur solitaire pour dfendre des combats qui, pour la plupart, et contrairement ce qui se dit, sont si vidents quils en deviendraient presque mivres... Et si le caractre polmique de Jacques Vergs ntait quun mythe?Parce que son univers, bien y regarder, cest un film berc des odeurs de cuirs des souks du Maghreb o les algriens, toujours si gais, si souriants, avec leurs bonnes ptisseries orientales, leur sens de lhospitalit et leurs accoutrements tranges, pourraient vouloir vivre chez eux sans nous... Oh!...Un film de science-fiction o pauvres et riches seraient gaux devant la justice! O lon pourrait dire loccident, librement, quil na pas craindre un excs de repentance puisquil na pas encore vritablement commenc se repentir... Un western o les pays pauvres et les pays riches amlioreraient leur vivre ensemble qui, pour le moment, laisse assez peu de place au dialogue social et pluriel... Mon Dieu!Oui, Jacques Vergs tait un rveur, dont les combats ne paraissent, la rflexion, pas si absurdes!...

    Alors, retenez-le, cet enseignement! Je vous y exhorte, de toute ma candeur...Allez rechercher aux confins de votre solitude votre me denfant...Laissez-vous bercer par vos rves davant vos renonciations! Enivrez-vous de vos illusions...et alors, vous verrez la vrit plus belle!Enivrez-vous de vos illusions, et alors, vous raliserez que...derrire Jacques Vergs...Derrire cet loge...Derrire ce pupitre...Sous cette robe... Se cache...un vritable prodige de lloquence!Oui, mon tour de me clbrer ! De rgler mon pas sur celui de mon an ! De devenir lui, curieuse transsubstantiation, pour le comprendre, comme lui le faisait avec ses clients!De Djamila Bouhired Magdalena Kopp, ces clientes dont il fut si proche...Jacques Vergs outrepassait ce conseil trop prudent de notre dontologie. Il franchissait le foss, la distance, qui le sparaient de son client...Il devenait les personnes quil dfendait!Le mot est dit !... nous avons invit un anthropophage notre table! Jacques Vergs, le sens de labsolu, y compris dans lempathie!Car comment, interrogeait-il, comment comprendre un criminel sans avoir soi-mme, ft-ce une seule fois en imagination, got aux racines de lhumaine condition.Et oui! Nul ne peut tre assur de son identit et chacun occupe sans doute la place dun autre6Aprs ce travail dempathie, comment tre sr que le criminel, cest mon client plutt que moi?...Comment massurer que je ne suis pas en train de prononcer mon discours dans le rfectoire de Fleury-Mrogis?!Regardez-vous...Etes-vous vraiment ceux que vous prtendez tre? Jacques Vergs lui, en doutait...Il y avait, dans sa pratique, quelque chose de la recherche du drglement des sens! Il voulait apprendre au contact de ses clients...Il savait que Je, est un autre... Surtout aprs une aprs-midi avec Klaus Barbie!Alors il partait pour un voyage, mille voyages... Du ct de lamour de Djamila Bouhired pour son pays, lAlgrie... Ou plutt de la souffrance dun jardinier marocain accus dun crime quil jure navoir pas commis... Quand ce ntait pas en compagnie de la folie dun cambodgien sanguinaire, de la lchet ordinaire dun collabo, ou bien des passions dune foule danonymes... Jacques Vergs rvait de devenir ce serpent amazonien mythologique pos sur son bureau, dont chaque caille tait constitue des yeux de tous ceux que le reptile avait symboliquement dvors... Jai plus de souvenirs que si javais mille ans, aimait-il rciter! Jai plus de personnalits que si javais dfendu mille clients! Je porte en moi tous les traits de lhumaine condition, aurait-il aim oser... Cest si ennuyeux de rester soi-mme toute une vie... Alors Jacques Vergs cannibalisait ses clients pour se payer mille vies!Et au bout dune dfense inconditionnelle... Sans se proccuper des critiques, des attaques... Lui pouvait dire: Klaus Barbie, cest moi! Carlos, cest moi! Plus avantageux, Marlon Brando, cest moi aussi... Ce crateur ne se satisfaisait pas que de

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    Rentre solennelle

    lui-mme, alors il a os ce dont nous ne faisons que rver : cesser dtre lui pendant prs de 9annes! Cesser dtre soi, voil des grandes vacances... Oui, tout peut arriver... Jacques Vergs aussi pouvait tre fatigu dtre Jacques Vergs. Fatigu sans doute galement dtre un avocat... Et cest cela, je crois, qui le distingue dun autre monument de notre profession.Robert Badinter a crit que: les grands avocats sont ceux qui portent en eux langoisse dtre accuss.... Cest beau... Mais je pense que a ne peut pas suffi re un homme comme Vergs. Pour lui, langoisse dtre accus est, comme la piti, trop douce, parce quen se mettant la place de celui qui souff re, on sent pourtant le plaisir de ne pas souff rir comme lui7!Jacques Vergs veut aller plus loin! Par-del lempathie! Par-del la compassion! Par-del, peut-tre, la mission dvolue lavocat? Jacques Vergs, avec courage, veut souffrir pour son client, accepter les crachats comme dautres les honneurs, compter les menaces de mort comme le cowboy les entailles sur son colt!Il y a chez Jacques Vergs la volont un peu enfantine de devenir un hros romantique...Qui, comme la Nina de Tchekhov, dirait son client: si vous avez jamais besoin de ma vie, venez et prenez l... Il y a chez lui quelque chose dabsolu...Dextrme! Ce quelque chose qui fait dire ses dtracteurs, en substance : Jacques Vergs, un mauvais modle pour ceux qui sont avocats, mais quel modle pour les extrmistes qui ne le sont pas!.Ceux-l, nont qu moiti tort... Cest vrai quil y a une part dextrmisme chez Jacques Vergs. A tout le moins, une conviction. Cette conviction que jai aborde il y a quelques instants et dont il est temps maintenant que je vous parle... Cette conviction:- mise en relief par sa mgalomanie feinte, - conforte par son got de la solitude, - rvle par son sens de lempathie.

    Cette conviction qui, demble, semble tre lanticolonialisme...son Algrie, avec ses parfums de sueur sous le son circulaire de la ggne...Mais au-del de a... sa conviction, ctait de dfendre le droit des gens tre ce quils sont. Tout simplement... Lui, laristocrate qui imposait aux autres une distance pour prserver son indpendance, a toujours dfendu le droit des gens choisir pour eux-mmes... Avec courage, ou peut-tre lchet, il a abandonn un poste important au sein de la jeunesse communiste, sa scurit fi nancire, sa tranquillit et jusqu sa famille parce quil savait que la moindre ingrence dans la vie dun autre peut avoir un eff et dsastreux!Et cest cette petite anecdote de Cocteau:Un jour, un jardinier accoure vers le prince perse pour lequel il travaille et lui dit:- Jai crois la mort ce matin, et elle ma fait un geste de menace!Le prince, arrogant, sur ce son fait, lui rpond: - Je sais ce que tu dois faire...Prends mes meilleurs chevaux et fuis, loin, jusqu Ispahan!Plus tard, le mme jour, le Prince croise la mort son tour et lui demande:- Est-il vrai que vous avez fait un geste de menace mon jardinier ce matin?La mort lui rpond alors: - Ce ntait pas un geste de menace, mais de surprise, car je le voyais loin dIspahan alors que jesprais le retrouver l-bas ce soir...8 Oui, chers confrres, voil pourquoi en apparence, un sage sait toujours tout sauf ce que lon veut savoir!Car bien fous ceux qui intercdent dans la vie des autres... Bien sots, ceux qui sautorisent dcider pour autrui... Bien fat, ceux qui croient que leur regard se confond avec la vrit! Bien vains, ces adeptes de lautorotisme qui prennent les autres pour des marionnettes et se ferment leurs richesses!Du procs des poseurs de bombe son intervention auprs de Gbagbo en Cte dIvoire, Jacques Vergs, lui, na jamais cess de poser les mmes questions:

    - au nom de quoi un pays pourrait-il dcider du destin dun autre pays?- au nom de quoi un homme pourrait-il dcider du destin dun autre homme?- au nom de quoi pourrait-on imposer aux autres nos propres valeurs?Alors...un relativisme mou pour un avocat qui ne ltait pas?Non, mais le parcours singulier dun homme qui, loin dtre un cosmopolite, un citoyen du monde, respectait toutes les diff rences... Lui, regardait la France et lOccident comme un homme qui aime, sans refuser de voir leurs dfauts...de leur dire en face leur imprialisme, autrefois territorial, dsormais culturel... Aujourdhui, il se serait sans doute pench sur le cas des jeunes franais tents par un islam radical...Se mettant leur place, il se serait dit: Ntais-je pas comme eux, dans ma jeunesse? Leur attirance pour lislam ne tient-elle pas, comme jadis mon attrait pour le communisme, de la recherche dun idal? Du rejet, provisoire peut tre, dune culture occidentale qui ne sied pas lenvie dabsolu de leur jeunesse?Ensuite, il aurait peut-tre tent dalerter lopinion. Souhaitant quau lieu de jeter linfaillibilit prsume de nos valeurs au visage du prvenu, nous rflchissions avec lui aux raisons qui lont conduit nous rejeter... Je crois quil aurait agi comme cela car cette conviction na jamais cess de lhabiter. Une conviction qui lui a pourtant valu tant de remontrances...jusque dans nos rangs, jusqu nous, ses propres confrres... Pourquoi? Faut-il y dceler une forme denvie?Allez, le miroir nest pourtant pas responsable de la laideur de celui qui sy regarde9... Et cest vrai que, la rfl exion, que dcouvre-t-on de nous en le regardant lui?Que, contrairement lui, nous changeons de combats comme de clients ! Que nous nous flattons de savoir dmontrer en quelques minutes linverse de ce que nous avions plaid pendant des heures!Serions-nous, chers confrres, des hommes sans conviction?Non... notre serment dindpendance ne nous prive pas de nos convictions!Je vous ai rejoints, nous vous avons rejoints, parce notre profession compte des hommes comme lui!Parce que nous savons faire autre chose que nous indigner mollement au gr des moments!Parce que si nos vies, nos plaidoiries sont absurdes, nont pas de sens... Et bien tant mieux! Car elles auront le sens que nous leur donnerons!Le sens de nos engagements!Fermes et Constants!Parce quil ne tient qu nous dtre des crateurs!Des crateurs dune uvre de dfense cohrente!Pour que, comme lui, et quoi quon en dise, Nous retournant, au soir de notre vie... Nous nayons pas regretter les combats dont nous naurions pas jouis.

    1. Oscar Wilde, Aphorismes.2. Philippe Muray, le sourire visage humain.3. Jacques Prvert, les enfants du paradis.4. Mes remerciements mon confrre Olivier Schnerb pour mavoir appris cette dfi nition du grand avocat.5. Terme employ par Jean Edern Hallier, le salaud lumineux, conversations avec Jean-Louis Remilleux.6. Lon Bloy, journal.7. Jean-Jacques Rousseau, Emile ou De lducation.8. Cette anecdote a t modifi e et donne au Prince, dans cette version retravaille, un rle quil navait pas dans la version dorigine.9. Aphorisme utilis par Michel Onfray lors de sa prsentation de son ouvrage Crpuscule dune idole, laffabulation freudienne.Ph

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    Prix Btonnier Maurice Allehaut, Albert Laval, Charles Lachaud et Jean-Louis Foy et Prix Jean-Christophe Maymat remis Alexandre Vermynck, 1er Secrtaire de la Confrence, par Christiane Fral-Schuhl et Jean-Ren Farthouat

  • Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70 9

    Rentre solennelle

    Franois Mitterrandpar Constance Debr

    Moi, je complote contre moi-mme.Mon ct rebelle et mon ct souverain sopposent sculairement.Nous nous distinguons par les habitudes, la dmarche, lhabillement.A lun, le noir, lambigit, la lenteur,A lautre, les couleurs, la profusion, llan.Comme rebelle,Jtudie le plan du palais, Jachte les serviteurs qui ont accs aux chambres du souverain, Jexprimente poignard et poisons il ignore la faon dont est mort son chien.Comme souverain, Jai plac un espion sur les talons du rebelle, Je porte une cotte de maille,Je mhabitue aux poisons. Chaque nuit, je change de chambre, Chaque semaine, je tue mes valets. Comme rebelle,Je bats le pays et jencourage la haine, Je sussure des discours subversifs loreille sans dfense du pauvre et de loutrag.Je dessine des armoiries mensongres, je promets des titres, des hommes aussi incultes quingnus. Dans les grottes, jaccumule des armes, jentraine les paysans au tir. Dans les montagnes, jtablis des campements, je cueille des herbes malfi ques. Je connais tous les itinraires nocturnes,Et je scrute, dans les constellations et la lune, la date de la rvolte.Comme souverain, Je hrisse la campagne de gibets, Je brle des villages, Je torture des femmes,Jenlve des enfants.Aux agits, je concde la gloire des hommes, Je les envoie mourir, En des lieux inaccessibles, inutiles et inexistants. Jai mis des espions dans les campagnes,Des forteresses dans les montagnes.Jai lch des serpents, jai rendu les animaux froces, Jai sem la peste.Jai dplac les constellations, jai multipli les clipses, jai supprim la lune.Madame le Garde des Sceaux,Madame le Btonnier,Mesdames et Messieurs les Btonnier,Mesdames et Messieurs les Hauts Magistrats,Mes chers confrres,Mesdames et Messieurs,Monsieur le Prsident du Conseil constitutionnel surtout,La question cest la souverainet,La dualit quelle suppose,Le choix quelle commande.Le choix, cest--dire la foi,La fi dlit,Aux ides,Aux autres,Mais dabord soi.Ca a commenc comme aAu dbut, ce ntait presque rienUn lger froid, une brise humide, qui sait. Ou peut-tre les embruns fluviaux du quai de Montebello dont lodeur amre vous rappelle que vous ntes pas dici. Oui, Jarnac cest lailleurs,

    On ne trahit pas sa terre,Elle ne ment pas, elle, nest-ce pas Franois?Oui, au dbut, ce ntait presque rien. Mais les causes sont peu de choses laulne des consquences, Les intentions fragiles la lueur des actes,Ne crois-tu pas, Franois? Tu ten souviens au moins? Ctait le 10 mai 81Ce jour-l, tu avais le peuple derrire toi,Le peuple, sa raison, ses ambitions,Le peuple, de Boulogne-Billancourt ou de Saint-Germain-des-Prs,Son got du bonheur, sa soif de revanche, ses impatiences. Tu avais le peuple sans doute, Mais nous, le peuple, on sen fout.Chez les Debr, cest lEtat, Cest les recueils Lebon, lAcadmie des Inscriptions,La paix dAmboise,Cest la querelle des investitures, Vendmiaire, Villers-Cotterts,Le peuple cest le rel,Cest le vrai dans tous ses mensonges,lEtat cest lemblme, le signe,Cest lide dans toutes ses illusions.Oui, chez nous cest lEtat,Ses commis et ses promises,Ses fonctionnaires et ses aptres,Ses ministres et ses femmes,Alors, on fait des lois, des lois, et puis des loisEt quand il ny a plus de lois pour croire, on fait des constitutions.On grave dans le marbre, on rige et on fi ge.Alors, ce soir, mon sang moblige,Alors ce soir, laissez-moi concder ma raceLaissez-moi constituer pour la France:Oui, Franois, lEtat, cest toiEt si cest le peuple qui ta donn lEtat, toi aussi le peuple, tu ten fous!Tout commence toujours par un blasphme.Dabord il faut dconstruire, dabord il faut dtruire.

    LEtat, Franois, il fallait ten venger.Il tavait fait trop attendre pour que tu le prennes dun bloc. Il fallait bien quil paye, au prix du remord, sa trop longue hsitation.Sa souverainet avait la forme de tes ennemis. Elle avait encore le got de ton rival. Alors, tu las dshabille.Un bloc par ci, cest lEurope. Un bloc par l, la dcentralisation. Tu prsidais, toi.Quavais-tu besoin des lois? Leur posie, au got dalexandrins, cest notre histoire, nest-ce pas Jean-Louis? Et aussi donnais-tu, ainsi, le pouvoir, ou ses illusions, aux ambitions rgionales, Le pouvoir, et toutes ses occasions, aux prvarications provinciales.A son bicentenaire, la grande Rvolution sachve. La France Jacobine nest plus. Te voil veng pour de bon du grand Gnral et de son petit Colbert.Lautre rvolution, celle des tables rases et des poings levs, celle des pauvres que tu as fait rver, elle expire elle aussi.Babeuf et Blanqui peuvent continuer de mourir tranquilles. Leurs noms seff acent, et sils existent encore, ce nest plus quau Flore, le temps dun paradoxe, dun frisson minuscule, pour des marxistes dun soir, vestes de velours noir et souliers Berlutti. LEtat est mort,Et les rvolutions aussi,LEtat est mort, vive lEtat!Car cest toi, Franois!Et cette question que sans cesse il te pose:Voulez-vous dominer le monde?Cest la question du Vautrin Rubempr.Voulez-vous dominer le monde?Si oui, cest un pacte quil faut signer. Et cest oui, bien sr.Car il ny a pas dautre rponse possible,Au pouvoir, lamour ou limpossibleVous hassiez Mitterrand de ne croire jamais en rien.

    Constance Debr

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    Vous vous trompiez. Oui, il na rien dit quil nait contredit, il na rien fait quil nait dfait. Oui, Mitterrand cest du sable qui glisse entre les doigts. Un marais qui englue tout, les promesses et les illusions, et les tres profusion. Oui, Franois, tu tes moqu du monde.De tes ennemis, de tes amis, du bon peuple, des pauvres, des grands-bourgeois, des instituteurs, des ouvriers et des paysans.Mais mritaient-ils autre chose?Mritaient-ils autre chose tous ces papas la morale, corsets dune vertu pas toujours si pure, et draps dans leur dignit de sous-prfecture?Mritaient-ils autre chose tous ces imbciles, ces nafs, ces lches, qui sen remettaient toi pour changer leur vie? Ces pauvres, qui rvaient de guillotine et de bchers?Ces riches, dans lentre soi sinistre de leur mdiocrit?Ces intellectuels si dociles? Ces courtisans?Ah Solutr! Son ascension et tes aptres! Quelle pentecte quand lEsprit Saint ctait toi! Tout cela nest quune farce, bien-sr, Ce quil faut, cest nattendre rien de lautre, et bien en profi ter. Les mlancoliques saffl igent de la vanit du Sicle, on le sait bien, nous, chez les Debr.Jai vu pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes aux paules troites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leurs semblables, et pervertir les mes par tout moyen. En voyant ses spectacles, jai voulu rire comme les autres ; mais cela, trange imitation, tait impossible.Jai pris un canif dont la lame avait un tranchant acr, et me suis fendu les chairs aux endroits o se runissent les lvres. Un instant je crus mon but atteint. Je regardais dans un miroir ma bouche meurtrie par ma propre volont! Ctait une erreur! Le sang qui coulait avec abondance des deux blessures empchait dailleurs de distinguer si ctait le rire des autres. Mais aprs quelques instants de comparaison, je vis bien que mon rire ne ressemblait pas celui des humains, cest--dire que je ne riais pas.Les mlancoliques saffligent, et Maldoror sa manire, qui, incapable de rire comme il faudrait en eff et, rpondra la cruaut par la cruaut.Non, il ny a pas dinnocents. Il ny a pas de victimes.Pas plus Brgovoy que Grossouvre.Ils sont morts tout seuls, ces deux-l, et tu ny es pour rien, ils ont cru que tu pouvais les sauver, ils ont cru, les imbciles, quand il faut ne rien croire.La vrit de lEtat est l, au bord dun canal, Nemours, ou derrire les doubles portes capitonnes de lElyse, Tu ny es pour rien, cest lEtat qui les a tus.Oui, Franois, gouverner cest trahir, gouverner cest mentir.Mais le mensonge nest pas une faute, la trahison nest pas un crime.Vous hassiez Mitterrand de ne croire jamais en rien. Vous vous trompiez. Vous hassiez Mitterrand de trahir. Vous vous trompiezCar qui trahit-on? Et pourquoi?Mitterrand na jamais trahi que ce que lEtat lui

    commandait de trahir.Il a suivi le vent.Le vent, qui va de droite gauche, puis de gauche droite.Le vent, qui donne la vertu tous les visages.Vous rclamez des principes, mais la France nen a pas. Elle fl otte la France, au gr des Rvolutions, des Restaurations, entre Jacobins et Girondins, elle fl otte entre Gaullistes et Ptainistes, entre le peuple et la nation, entre sa paresse et son allant, sa btise et son esprit, ses lchets et son panache. Elle fl otte, la France.Alors pour la sduire longtemps, il faut fl otter avec elle.Lidal? Mais lEtat nen a pas.Il soccupe de lui-mme. Il est tout sa tche dtre. Lidal est un mot de campagne, un mensonge de conqute. Le peuple nexiste plus, las des barricades, il veut, lui aussi, partir en week end et sacheter des choses.La nation nexiste plus, sans ennemis elle sennuie, elle sannule. Il ny a plus rien trahir. Mais revenons en arrire, quand trahir tait possible,Oui, je parle de la guerre,Tu ny chapperas pas,Tu lentends ce mot, quils chuchotent tous?Francisque! oui, cest a!Elle ta bien encombre, celle-l, nest-ce pas Franois!Ptain en quarante, De Gaulle en 43!Ce que je crois, moi, cest que cest parce que tu tais lEtat, dj, Que tu as suivi, alors, celui qui se disait Franais.Et ce que je crois, moi, cest que cest parce que tu tais lEtat, dj,Que tu as rejoint la Rsistance, quand elle devenait la France.Tu tais lgitimiste, Franois, en somme.Comme tant de magistrats.Mesdames et Messieurs,Mes chers amis,Vous hassiez Mitterrand de ne pas croire pour toujours. Croyant que toujours est plus solide que maintenant.

    Ne voyant pas la fuite que toujours organiseSystme de Ponzi,Martingale de baltringues, Promesses de bourgeois,Contrats de curs,Tandis que toujours sorganise, le prsent se dfausse, se dbine, Triste Faust, et pauvre Marguerite Personne nest pour toujoursIl faut tre l et maintenantFaire exister linstantComme toi, Franois. Comme lEtat, chaque fois plus tout fait le mme, pas tout fait un autre. Oui, Franois, lEtat, cest toi.LEtat gouverne, il juge, il excute. LEtat ne faiblit pas. LEtat tranche. Et ne tremble jamais.Etre lEtat, cest tre cruel temps. Alors toi, Franois, qui mania la langue comme dautres la ggne, je te le dis, ta vie fut un chef duvre. Rappelle-toi Iveton. Il sappelait Fernand. Fernand Iveton tait n Clos-Salembier, dans la banlieue dAlger.Il tait europen, communiste et ouvrier.Il avait trente ans en 56 et venait dentrer au FLN.Iveton avait dpos une bombe dans une usine sans ouvriers, une bombe qui na jamais explos. Il a t arrt, tortur, jug 14 jours plus tard. Et condamn mort. Sans instruction et presque sans avocat.Et cest grce toi Franois.Cette justice dexception, ctait ton uvre, tu tais Garde des Sceaux, tu ten souviens ? Les pouvoirs spciaux ctait toi.Le 11 fvrier 1957, 5h10 du matin, Fernand Iveton tait guillotin.Il avait demand la grce bien sr, mais le prsident - Cotty qui sen souvient? - sur ton conseil lui avait refuse.Cotty, sur ton conseil, a refus la grce, comme dhabitude, comme ces trente-sept fois en quinze mois o tu as vot la mort.Tu ten souviens Franois, de cela?Iveton navait tu personne.

    Rentre solennelle

    Prix Fernand Labori, Francis Foy et Ernest Cartier, Prix du Btonnier Louis-Edmond Pettiti remis Constance Debr, 2me Secrtaire de la Confrence, par Jean-Louis Debr et Laurent Pettiti

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    Avis dfavorable au recours.Tu tais avocat, Franois,Mais surtout tu tais lEtat.Cest le secret du pouvoir, aussi,Ce sang-froid l, cette cruaut. LEtat ne tremble pas,Et tu nas pas trembl.As-tu eu raison ou tort? Question de journalistes! Question de moralistes! Juger, toujours! Et hier avec les vertus daujourdhui. Mais tu nas pas trembl, ni dans la cruaut, ni dans la charit, pour abolir, plus tard, cette peine, dont tu connaissais le prix car lEtat a un prix,Sa pourpre est tche de sang, cest cela son secret.Et sans pourpre, il disparait.Car lEtat, pour tre, doit dabord paratre,Il est une crmonie, une prsance, un privilge,Chez les Debr on le sait bien,Nest-ce pas, Jean-Louis?Alors pour toi, Franois, ce sera la Garde et le tapis rouge, quelle que soit lheure, Roissy,Ce sera tes grands travaux, la Pyramide, ta Bibliothque,Les titres des hommes sont leur dernire vrit. Ministres, ambassadeurs, prfets, lgions dhonneur,La sommet de la pyramide, ctait toi Franois.Le Protocole est un Pater Noster, une prire, un sacrement, Enlever le rite, et la foi seffondre, et les dieux senfuient,Enlever les ors, et la Rpublique seffile.Lapparat cest lessence, Tu le savais, toi, Franois,Que, sans lui, le pouvoir ne serait plus quun droit,Tu le savais, Franois,Que sans lui, la mort pouvait gagner trop vite,Que ce qui pouvait encore sauver la France, quand elle navait plus dallant, ctait son allure et les marques de son rang,Que ce qui pouvait encore retarder lheure, et le Commandeur, ctait moins Gub-ler que la Garde, et ses leurres.Il ne faut jamais consentir au rel tel quel, le diable est l, il faut le cravater.Le pouvoir comme la vie est une hallucination, quil faut fastueusement dcorer.Stablir dans la pompe pour reculer la tombe, ou pour mieux y consentir peut-tre, car lEtat est une messe.Pendant quatorze ans, Franois, le pouvoir ta sauv, pendant quatorze ans, tu as sauv le pouvoir.Tu as su quil ne devait rien cder.Robert, je ne leur ferai pas cadeau dune minute, disais-tu Badinter.

    A dautres, le quinquennat ! Le coup dEtat permanent, pour russir, doit durer longtemps.Jaime aussi, Franois, ton juste usage de la grammaire, ta si jolie syntaxe du pouvoir.Ainsi, quand tu disais lElyse ncoute rien! Les coutes! Allons, Mesdames et Messieurs les Hauts Magistrats, allons mes chers confrres, laissez votre air chiffonn. O est le crime? Vous vous plaignez dun peu de curiosit? Dun prsident qui ne se suffisait pas, et qui coutaient les autres, les esprits fins et les jolies femmes?Les femmes justement...Fidle,Mais surtout aux traditions, et celle-l comme aux autres,Tu les aimais, dit-on.Et cette expression suggre, dabord, quelles taimaient aussi, Franois.A la mort, lennui, toujours la mme rponse, la conqute, le frisson!Vite, vite, avant le Commandeur, avant que la mort nous rattrape, attraper lautre, laimer ou le tuer, cest gal. Ce quil nous faut, cest quil se passe quelque chose, que lautre, un instant, sapproche si prs de moi que je ne le vois plus, que je le touche seulement.Cest presque convenu, au fond, tellement cest attendu. Quel roi na pas aim les femmes ? Comme si les valets les aimaient moins. Elles, il est vrai, leur trouvent souvent moins de charme. Cependant je minterroge. Ces femmes, pour toi, furent-elles vraiment? Furent-elles autre chose quun taciturne enchevtrement, de visages, de corps, dessiner, effacer sans cesse? Peut-on aimer lautre quand on est roi et quils ne sont plus, tous, que des courtisans, et elles, des courtisanes? O est la conqute alors quand il ny a plus qu ramasser? Quelle gloire cela, et quel frisson? Un autre, alors, peut-tre, celui du spectacle de leur veulerie. Et je veux bien croire, aussi, quil en vaille la peine.Quel roi na pas aim les femmes? Un Gnral, peut-tre, qui, lui, aimait la France comme une pudique matresse.La France..., mais toi aussi tu las aime. Nas-tu pas baptis ta fille du nom dun grand ministre?Mazarin lItalien avait bien servi son roi, il mritait bien cet honneur un peu trouble, et ce plaisir-l.

    Et a, Franois, cest un coup, je tavoue, rendre tous les Debr jaloux.Ah! si moi aussi javais port, en plus du nom, un prnom de ministre... Les femmes et les enfants dabord! Que reste-t-il bord?Mais tes amis, ceux qui ne sont pas morts. Ceux-l, tu leur as t fidle. Comme tes chiens, comme Baltique ton enterrement, au pied de Charasse, devant lglise.Oui, tes amis, Franois! On ta reproch tes amis, comme le reste, ceux en tout cas qui navaient pas le cachet de vertu quaurait aim le Sicle.Bousquet sentait la mort, le mal, il avait planifi, sur ordre mais planifi quand mme, la rafle du Vel dHiv. Ctait ton ami, tu le recevais lElyse. Pelat sentait largent, largent mal gagn, largent diniti. On dit quil aurait fait, grce toi, quelques bonnes affaires. La belle affaire! Qutait lopinion du Monde contre la tienne?Les aimais-tu malgr leurs fautes? Ou les aimais-tu pour elles aussi? Oui, pour elles, peut-tre aussi, pour le plaisir de ressentir que la souverainet lemporte sur la morale, que Je veux crase je dois. LEtat, cest toi, Franois, mais la France?Car il faut parler de la France, enfin. On ny chappera pas,Nest-ce pas Jean-Louis?Ceux qui te contestent, te contestent ce lien-l. Ils disent ou sous-entendent, que tu nes pas la France, que tu ne las incarne que par circonstance. Cest cela qui sous-tend leur colre.Chez les Debr, on le sait bien,Nest-ce pas, Jean-Louis?La France pour eux est divise en deux. Ils croient au bien, au mal. A lintangible, lirrductible, lirrmdiable. Pntrs dabsolu, ils rvent dun rel qui ne doive pas, dillusions sans revers, sans fissures. Ils croient quil faut choisir son camp, et mourir plutt que reculer. Ce sont des dArtagnan, fracassants, et malheureux souvent, comme Cyrano. Je dis ils, je me force un peu, jessaye de les quitter. Je sais quils ont tort, parfois mme davoir trop raison. Leur France est impeccable, cest celle des grandes victoires, des grands traits, cest une large fresque, qui va de Roncevaux au chemin des Dames, de Racine Gricault. Cest une ide, qui traverse les sicles, une forme pure, un mythe.

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    Alain Hollande, Jean-Ren Farthouat, Bernard Vatier, Francis Teitgen, Paul-Albert Iweins, Jean-Marie Burguburu, Yves Repiquet, Christian Charrire-Bournazel et Jean Castelain

  • 12 Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70

    Prix aux Laurats de la Confrence du Stage 2013

    Rentre solennelle

    Ils ont raison bien sr, la France est une ide, sinon elle ne serait rien, sinon elle naurait jamais t. Ils ont raison et ils ont tort! Car cette foi, qui a fait la France est aussi une folie. Croire la ralit dun pays, son esprit, son essence! Et de rage, craser tout ce qui ne lui ressemblerait pas!Ils sont tragiques et romantiques. Je les aime pour cela. Mais les tragdies fi nissent mal. Alors je veux les quitter. Alors avec toi, Franois, je messaye au romanesque. Mais revenons la France. Tu as t de tous les camps, disent-ils, et cela ne se peut pas. Ou pire, tu nas t daucun, et on na pas le droit. Mais ta France toi nest pas celle-l. La tienne est une vrit feuillete, aux frontires mouchetes, cest un ciel de printemps en Charente, aux nuages fi lants.Le bien et le mal, sans doute, qui ny croit pas? Tu nes pas cynique, Franois, mais ces mots-l, tu les murmures plus bas. Le bien, le mal sont trop fragiles, pour quon les mette en rang et quon sonne le clairon. Ta France, cest celle des livres, de ces romans qui ne se rsument pas, dont on ne dit rien en racontant la fi n. Cest celle de nos paysages, de nos campagnes qui font baisser la voix. Cest celle de nos morts aussi. La terre et les morts bien sr, comment nont-ils pas vu que tu tais barrsien? Tu avais le got des cimetires, tu rendais visite nos morts. Ta France nest pas une ide, ta France est telle quelle est. Le meilleur et le pire, en somme. Ce pire, Franois, tu lacceptes, cest la part du feu, cest la part du diable. Cest ta rmission des pchs. La France, cest aussi la Saint Barthlmy, le Duc dEnghien, les massacres de Septembre, Vichy et lAlgrie! Oui, cest a aussi la France! Ce sont tous nos Austerlitz, et tous nos Waterloo.Alors oui, Franois, la France aussi ctait toi. Et cette France-l, cest aussi la mienne.Laisse-moi te regarder encore, avant que tu ne teff aces.Jignore au fond si tout cela ttait gal. Tout cela, je veux dire les questions du sicle qui les ont tous tellement agits. Si tu y croyais, ou non. Ce que je sais en revanche cest que la rponse cette question est parfaitement indiff rente. Je me demande mme si je ne prfrerais pas que tu ny aies jamais cru, tant lengagement, comme ils disent, avec ce quil comporte de rpugnante indignation, me gne, et souvent me dgoute.Je choisis donc lhypothse de tes ennemis, je pose que tu ne croyais en rien, et que cest cela mais tes ennemis ne le voient mme pas! qui ta permis de conduire la France dun sicle lautre. Qui dautre mieux que toi, Franois, qui savais leur inconstance, pouvais accompagner la France vers la fi n des certitudes? Qui dautre mieux que toi, pouvait nous mener, lgrement, vers ce temps gris daujourdhui, ce temps calme et plat, sans idologies ni guerre, sans combat et ni rve?Qui dautre mieux que toi, qui faisais se taire jusquaux impatiences de ta propre mort, pouvais nous mener vers ce monde sans orage ni horizon, en nous disant rien nest grave?Alors, comment te juger, Franois?On est un peu raide, cest vrai, quand on crit des lois.

    Chez les Debr, on le sait bien,Nest-ce pas, Jean-Louis?Peut-tre est-il temps, pour moi aussi, de trahir, De manquer mon sang, pour mieux lui appartenir.Peut-tre, ou peut-tre pas. Dailleurs si je suis une Debr, mon pre sappelle Franois.Nest-ce pas Jean-Louis?Te juger? Je ncris pas de lois, moi, et je naime pas juger. Tu vois, Franois, je suis comme toi. Je ne crois quaux illusions, seul tangible, seule vrit.Je ne te juge pas, mais je vois. Que tu as t la France, et lEtat.Dans leur juste vrit,Dans leur grandeur et leur mdiocrit.Franois, ten souviens tu?Tu avais 20 ans,Tu rpondais, alors, ces questionnaires qui, depuis Proust, taient la mode. Tu disais Pascal, Lyautey, Baudelaire.Et la question de la couleur, tu rpondais le gris, videmment.Ce gris est un gris dortolans, De plaisir interdit,Cest le gris de lentre-deux,Secret, constant,Cest le gris des promesses,Cest le gris de livresse, Celle du pouvoir, ouiDe ce qui nous chappe toujours,Ou bien seulement encore,De cet instant davant, de cet instant parfait, o, dans le gris du soir, on est l, juste au bord.Franois, cest toi que je madresse. Cest au roi que je parle, ornement de nos veilles, honneur du sage sans honneur. Au roi, et au mort.Je cherche la langue des dfunts.Je suppose que les morts sont une chose mixte et agite partie tyrans, partie tyranniss, complices et opposants, mi comploteurs mi violents.Mais voil, il me semble que dj une allusion flotte dans lair, une hilarit prudente et clandestine, un parler fait dnigmes.Tu nes pas mort, Franois, tu es bien l encore.Cest du roi que je parle, ornement de nos veilles, honneur du sage sans honneur.Mais on ny comprend rien! Ce parler dnigmes est une nigme en eff et. Que disent tous ces mots de passe. Et qui sadressent-ils?Mitterrand? Une imposture?Sans doute, et comme chacun.Comme vous, qui jugez du haut dun pouvoir qui nest pas le vtre,Comme nous qui dfendons, avec une charit dhypocrite, et nos robes prtextes au pch dorgueil,Comme moi ce soir, et ce moi de convention, ce moi familial un peu creux, un peu vulgaire et si facile vendre.Mais que serions-nous sans nos impostures, quun petit tas de chair et dos?Que resterait-il de nos audaces, de nos dsirs, de nos victoires, mme, si nous ne voulions pas, dsesprment, tre plus, tre autre, que ce que nous sommes dj?Que resterait-il de lautre aussi, sans limposture de sa sduction, sans limposture de nos lans?Alors oui, limposture! Seule rponse, seule vrit.La vie est un pari, nest-ce pas?

    Prix Jacques Raulet, Lon Gambetta Fondation Maurice Blum et Edouard Foy, Prix du Barreau de Qubec remis Nicolas Pottier, 3me Secrtaire de la Confrence, par Jean-Marc Sauv et Nathalie Vaillant

    Prix Maurice Bernard et Louis Helbronner, Prix Europe remis Victor Zagury, 6me Secrtaire de la Confrence, par Jean-Claude Marin et Nick Fluck

    Prix Csar Campinchi remis Paul Fortin, 1er Secrtaire de la Promotion 2014, par Christian Charrire-Bournazel

    Prix de la Rentre de la Confrence remis Grgoire Etrillard, ancien 1er Secrtaire de la Confrence, par Pierre-Olivier Sur

  • Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70 13

    Prix aux Laurats de la Confrence du Stage 2013

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    Prix aux Laurats de la Confrence du Stage 2013

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    Prix Jacques Raulet, Lon Gambetta Fondation Maurice Blum et Edouard Foy, Prix du Barreau de Qubec remis Nicolas Pottier, 3me Secrtaire de la Confrence, par Jean-Marc Sauv et Nathalie Vaillant

    Prix Horace Helbronner et Jean Mirat, Prix Pierre-Antoine Berryer remis Thomas Klotz, 4me Secrtaire de la Confrence, par Dominique Baudis et Jean-Yves Le BorgnePrix Marc Leroy-Beaulieu et Lo Levantal, Prix du Barreau du Qubec remis Florian Lastelle, 5me Secrtaire de la Confrence, Vincent Lamanda et Johane Brodeur

    Prix Maurice Bernard et Louis Helbronner, Prix Europe remis Victor Zagury, 6me Secrtaire de la Confrence, par Jean-Claude Marin et Nick Fluck

    Prix Pilavoine dHardiviller, Hector Bezanon et Gaston Monnerville, Prix du Barreau du Mali remis Marie-Pompi Cullin, 7me Secrtaire de la Confrence, par Patrick Frydman et Issiaka Keita

    Prix Jean-Paul Thry, Henri Jevain et Lon Netter, Prix Albert Salles remis Guillaume Vitrich, 8me Secrtaire de la Confrence, par Jacques Degrandi et Yves Repiquet

    Prix Csar Campinchi remis Paul Fortin, 1er Secrtaire de la Promotion 2014, par Christian Charrire-Bournazel

    Prix de la Rentre de la Confrence remis Grgoire Etrillard, ancien 1er Secrtaire de la Confrence, par Pierre-Olivier Sur

    Prix Btonnier Paul Arrighi, Lonard Pjoine, Georges Sbriglia et Jean-Louis Tixier-Vignancour, Prix de la Petite Confrence remis Antoine Vey, 9me Secrtaire de la Confrence, par Franois Falletti, substitu par Michel Lernout, et Elisabeth Menesguen

    Prix Maxime Hussenot, Lon Maurice Nordmann et Lonce Richard, Prix de lAssociation amicale des Secrtaires et anciens Secrtaires de la Confrence et Prix du Secrtaire du Conseil remis Xavier Nogueras, 11me Secrtaire de la Confrence, par Franois Molins, Franois Gibault et Kami Haeri

    Prix Btonnier Georges Chresteil, Aliette Carr-Lvantal et Jacques Sabatier et Prix du Barreau de Montral remis Rmi Lorrain, 10me Secrtaire de la Confrence, par Chantal Arens et Luc Deshaies

    Prix Premier Prsident Pierre Drai remis Jean-Claude Kross, ancien avocat, ancien Avocat Gnral la Cour dAssises de Paris, par Rmi Pierre Drai

  • 14 Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70

    Rentre solennelle

    LAssociation Pierre Claver, une cole pour les demandeurs dasilepar Guillaume Vitrich

    Elle a 13 ans et elle pense que lasile est rserv aux fous. Il a 30 ans et il sait que pour vivre il faudra traverser les continents, 6 mois durant. Il a pay pour cela : quelques billets un afghan, dautres un iranien, beaucoup dautres un kurde qui le laissera deux semaines en gele, et puis les quelques restant pour une modeste embarcation, ballote vers la Grce. A 13 ans elle ne connait pas le mot excision mais a lintuition de la souffrance.Ils ignorent tant de choses : la langue franaise, les captiens et les mrovingiens, Hugo et Barbey dAurevilly, les nabis et le fauvisme, la Dclaration des Droits de lHomme et la Constitution, le Conseil dEtat et la notion de groupe social. Ils ne savent pas non plus quen dautres temps Hannah Arendt et Tolsto les ont prcds. Sa rpublique lui est islamique, la sienne est bien franaise, depuis peu.Du fond de son Asie centrale il nen connait que des photos, des clichs.Au fond de son Afrique quatoriale, on aurait voulu quelle rejoigne la cohorte des mutiles.Ils ignorent tout mais savent lessentiel ; il tient en un mot galvaud : libert.Celle dchapper la tyrannie du sacr. Oh cela ne sera pas facile, lun et lautre nont jamais rien demand. Ce nest pas comme cela quils ont t levs.Pourtant, il leur faudra bien demander, justifier, attendre aussi. Demander tant et encore que leurs interlocuteurs aveugles oublieront lhomme derrire le demandeur.Pauvres aveugles, insensibles au miroir du rfugi, ils ne voient pas quils les renvoie notre universelle condition dexil. Ils ont sous leurs yeux cills, celui qui est nous.A 13 et 30 ans ils seront demandeurs dasile, comme tant dautres avant.Et la France naura pas le choix.Digne hritire de son histoire et fire de son droit.Comme les princes et les monarques de lAncien Rgime devant les perscuts.Comme la lettre de notre premire constitution trop vite terrorise :Le peuple franais donne lasile aux trangers bannis de leur patrie pour la cause de la libert.Pour elle, pour lui, sera oublie la schizophrnie des annes 30, et la pratique enfin salignera sur les discours.On se souviendra de lesprit national, des conventions

    et des loiset lattente pourra commencer.18 mois tre un dossier automatis plutt quun tre faonn par son pass.18 mois dternit. Le temps dune rvolution.360 degrs dintrospection pour deux dracins.Dracins ?Ils savaient tant et pourtant ici ils ignorent tout.Si trangers quils finissent par le devenir eux-mmes.Et,sans prvenir, quelquun sest approch, quelques mots sont changs et deux sont glisss comme un remde. Deux mots trangers qui deviendraient si familiers.Pierre Claver. Quelle ironie pour ceux qui ne sont encore que des dossiers, de recevoir un nom et un prnom.Le nom dun saint pour une cole. Saint Pierre Claver, dfenseur des droits de lhomme.Deux mots qui rsonnent encore dans leurs ttes et que bientt ils feront rsonner de leurs bouches.Deux mots qui cachent tant dhommes et de femmes ; qui dissimulent un dvouement inou se tapissant dans lobscurit choisie de la discrtion.Une cole porte par tant de personnalits et ne de la volont dun couple : Ayyam et Franois Sureau.Oh je les sais bien trop pudiques et discrets pour quils me laissent citer leurs noms sans insister immdiatement sur lengagement de tous les autres bnvoles : enseignants, ducateurs, interprtes, avocats ou juristes. A 30 ans il ne sait pas encore ce quil doit Stanislas Mangin et lengagement personnel de quelques-uns, trop

    occups sauver la vie des uns pour mettre la leur en avant.Il nimagine pas les heures vcues crispes que dpenseront sans compter leurs avocats la Cour Nationale du Droit dAsile.Il nest pas donn tout le monde de reconnatre les anonymes. En entrant tous les deux Pierre Claver, ils retournent lcole et retrouvent une famille.Un lieu rare o lon cultive lesprit et adopte une famille.Cest peut tre a lesprit de famille Claver.Une famille qui vous adopte et sassure, par laction discrte de ses avocats, que la France fera de mme.Elle le fera dautant mieux que la rue de Bourgogne lve chaque jour leur franais ;On le parle, le chante, lcrit et le publie dans la revue de lcole. On le met au service des leons de culture gnrale, de dessin et de thtre.Et les lves qui fuyaient les combats se dcouvrent arms pour leur nouvelle vie.Quils puisent le temps de lattente ou dcouvrent la srnit davoir t reconnus, tous sengagent avec une assiduit sans faille.Leur course folle travers les pays et le temps se prolongent le samedi matin dans les foules de celui quils appellent Monsieur Franois.Ce nest plus une cole, cest un lieu de vie.Ici, on se croise sans jamais se toiser, on se lie damiti sans jamais se renier. Car lon sait do lon vient et dj un peu mieux o lon va.A 13 et 30 ans ils en savent dj plus.Ils dcouvrent chaque jour des bnvoles qui redfinissent devant eux lide dengagement personnel.Le bonheur de ces engags est simple, ils ont appris mesurer la fiert, elle se lit dans les regards.Elle se dessine lorsquune tte, jadis baisse, se relve.Ils y puisent la force daccepter les checs et les dparts forcs. Le temps passe et il fait tourner la roue de la vie comme leau celle des moulins, dj Syed et Sali quittent lcole Pierre Claver.Sur leurs lvres, Hugo et les captiens, dans leurs yeux, des toiles fauves, une vision de la France qui nest plus impressionniste et dans leurs poches souvent un emploi.Plusieurs reviendront lcole, sans retomber en enfance ; enseignants bienveillants de lautre ct du tableau noir.Et tout le monde sait que la russite dune institution se mesure au nombre danciens qui reviennent lanimer.Cher Franois, Cher Mohammed, le succs est assur mais tant de combats restent livrer.Que la distinction que nous vous remettons continue de vous donner la force de les mener. 2013-851

    Guillaume Vitrich

    Le dsamour des Franais pour leur justiceMardi 17 dcembre 2013 - 18 heures - Auditorium du Conseil National des Barreaux

    Colloque Droit et Dmocratie

    Sinscrire de prfrence par mail : [email protected] - 2 heures valides pour la formation continue obligatoire des avocats

    Agenda

    Les franais et leur justice : relation damour / haine

    Antoire GaraponSecrtaire gnral

    de lInstitut des hautes tudes sur la Justice

    Peut-on sauver la justice ? Aux origines du dsamour

    Denis SalasMagistrat - Secrtaire gnral

    de lAssociation Franaise pour lHistoire de la Justice

    La justice franaise au regard des autres justices dEurope

    Jean-Paul Jean Avocat gnral la Cour de Cassation,

    Prsident du groupe dexperts valuation de la CEPEJ (Conseil de lEurope)

    Lincomprhension et lhostilit vis--vis de la dfense

    Matre EolasAvocat au Barreau de Paris,

    Blogueur

    Introduction Jacques Ribs Prsident de Droit et Dmocratie

    Conclusion Robert Badinter Ancien Garde des Sceaux et ancien Prsident du Conseil constitutionnel

    2013-852

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  • Les Annonces de la Seine - lundi 9 dcembre 2013 - numro 70 15

    Vie du droit

    Au mme titre que les juridictions judiciaires (civiles et pnales), la juridiction administrative sengage rsolument dans la voie de la dmatrialisation.Le dcret n2012-1437 du 21 dcembre 2012 relatif la communication lectronique devant le Conseil dEtat, les Cours administratives dappel et les tribunaux administratifs consacre dans le Code de Justice Administrative, dont il modifi e un certain nombre de dispositions, la possibilit de la dmatrialisation des changes entre les parties par lintermdiaire dune nouvelle plateforme lectronique de communication dnomme Tlrecours.Cest dans ce cadre que le 27 novembre Paris a t signe entre la Cour administrative dappel de Paris, reprsente par son Prsident Patrick Fry