e Sarkozy H.S. · M 01093 - 2813 - F: 4,00 E 4 s N°2813 65e année Du 17 mars au 6 avril 2011...

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xxx 3:HIKLKJ=XUYUU\:?c@s@b@d@k; M 01093 - 2813 - F: 4,00 E 4 s N° 2813 65 e année Du 17 mars au 6 avril 2011 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois www.actionfrancaise.net « FÉDÉRER LES PEUPLES DE FRANCE » : « FÉDÉRER LES PEUPLES DE FRANCE » : ENTRETIEN ENTRETIEN AVEC VEC ARN ARNAUD GUY UD GUYOT-JEANNIN -JEANNIN p. 16 16 L’ACTION FRANÇAISE 2000 L'ESSENTIEL ÉCONOMIE Les agences de notation sur la sellette . . . . . . . . . . . . . . . . p. 2 POLITIQUE Institutions et territoire : Savoir région garder . . . . . . . . . p. 4 SOCIÉTÉ La France et la religion, de Clovis à Sarkozy . . . . . . . . . . p. 5 L'histoire fantasmée par Jacques Attali . . . . . . . . . . . . p. 6 MONDE Fatalisme immigrationniste dans l'Union européenne . . . . . . p. 7 Une Francophonie trop réservée sur la scène internationale . . . . p. 8 Un immense gâchis en Libye . . p. 9 ARTS & LETTRES Comment Dussollier convainc Arestrup de sauver Paris . . . . . p. 10 Chrétiens d'islam, au risque du martyre . . . . . . . . . p. 11 HISTOIRE Les frustrations de l'Unité italienne . . . . . . . . . . p. 12 IDÉES La monarchie, seule bonne réforme . . . . . . . . p. 13 À la rencontre de Georges Sorel . . . . . . . . . . . p. 13 POUR UN JEUNE FRANÇAIS Un regard réactionnaire sur la science-fiction . . . . . . . . p. 14 « « T OUT CE Q OUT CE Q UI EST N UI EST NA TION TION AL EST NÔTRE » AL EST NÔTRE » Pas même un machin PAR "MACHIN" le général de Gaulle dé- nonça en son temps l'ONU comme une chose protéiforme et tentaculaire, ineffi- cace quant au fond. Tout et n'importe quoi en somme. Du moins l'existence de l'ONU semble-t-elle incontestable, à dé- faut de projet bien défini. Tel n'est pas le sort de la "communauté internationale", sparadrap des journalistes de tout acabit. Formule qui transpire son époque où il n'est plus possible de dési- gner un chat pour ce qu'il est, à savoir un chat. De nos jours, un SDF ne saurait être un clochard, la précarité a effacé la mi- sère, et, pour l'Éducation nationale, le "référentiel bondissant" évoque avec une sémantique aseptisée le simple ballon, terme un peu rustique certes, un rien tri- vial, en somme réactionnaire. C'est dans le même esprit que nous adoptons ce vo- cabulaire abscon en évoquant la fameuse "communauté internationale". Mais de qui parle t-on vraiment ? Pendant fort long- temps, tout un chacun devinait la seule action des États-Unis derrière la ci-de- vante communauté. Les plus optimistes - les plus naïfs ? - affirmaient qu'il s'agis- sait de tous les États constitués. Les plus lucides ne comptaient que les membres du Conseil de Sécurité... Depuis quelque temps, la responsabilité de cette société anonyme et aux oui-dire toujours agissante, semble devenue bien complexe. En Afrique du Nord, le concert harmonieux de la communauté internatio- nale tombe dans la cacophonie la plus grotesque. La Russie et la Chine n'enten- dent pas clamer le discours politiquement conforme que lui inspire d'autres parte- naires. Fini le sentiment communauta- riste, la seule voix harmonieuse et jamais discordante du monde prétendument dé- mocratique. Au vrai, la communauté in- ternationale cache à peine quelques hauts responsables administratifs, soucieux de gérer les problèmes diplomatiques entre soi, persuadés d'être les seuls à pouvoir le faire, méprisant les peuples qu'ils appel- lent pourtant, mais pour la forme, à des élections de principe. Une façon très Gis- card de vous expliquer l'Europe comme une évidence, tout l'esprit de la commu- nauté internationale est là. Mais d'esprit, elle n'en a guère, ni de consistance car c'est un mirage qu'on agite sous les yeux passifs de millions de télé- spectateurs. Allez, vous serez bon pour ce scoop : la communauté internationale n'existe pas ! Marc Savina Sarkozy H.S. P P a a g g e 3 e 3

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4 s y N° 2813 y 65e année y Du 17 mars au 6 avril 2011 y Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois y www.actionfrancaise.net

« FÉDÉRER LES PEUPLES DE FRANCE » :« FÉDÉRER LES PEUPLES DE FRANCE » : ENTRETIEN ENTRETIEN AAVEC VEC ARNARNAAUD GUYUD GUYOOTT-JEANNIN -JEANNIN pp.. 1616

L’ACTION FRANÇAISE2 0 0 0

L'ESSENTIEL

3 ÉCONOMIE

Les agences de notation

sur la sellette . . . . . . . . . . . . . . . . p. 2

3 POLITIQUE

Institutions et territoire :

Savoir région garder . . . . . . . . . p. 4

3 SOCIÉTÉ

La France et la religion,

de Clovis à Sarkozy . . . . . . . . . . p. 5

L'histoire fantasmée

par Jacques Attali . . . . . . . . . . . . p. 6

3 MONDE

Fatalisme immigrationniste

dans l'Union européenne . . . . . . p. 7

Une Francophonie trop réservée

sur la scène internationale . . . . p. 8

Un immense gâchis en Libye . . p. 9

3 ARTS & LETTRES

Comment Dussollier convainc

Arestrup de sauver Paris . . . . . p. 10

Chrétiens d'islam,

au risque du martyre . . . . . . . . . p. 11

3 HISTOIRE

Les frustrations

de l'Unité italienne . . . . . . . . . . p. 12

3 IDÉES

La monarchie,

seule bonne réforme . . . . . . . . p. 13

À la rencontre

de Georges Sorel . . . . . . . . . . . p. 13

3 POUR UN JEUNE FRANÇAIS

Un regard réactionnaire

sur la science-fiction . . . . . . . . p. 14

« « TT O U T C E QO U T C E Q U I E S T NU I E S T N AA T I O NT I O N A L E S T N Ô T R E »A L E S T N Ô T R E »

Pas même un machinPAR "MACHIN" le général de Gaulle dé-nonça en son temps l'ONU comme unechose protéiforme et tentaculaire, ineffi-cace quant au fond. Tout et n'importequoi en somme. Du moins l'existence del'ONU semble-t-elle incontestable, à dé-faut de projet bien défini. Tel n'est pas le sort de la "communautéinternationale", sparadrap des journalistesde tout acabit. Formule qui transpire sonépoque où il n'est plus possible de dési-gner un chat pour ce qu'il est, à savoir unchat. De nos jours, un SDF ne saurait êtreun clochard, la précarité a effacé la mi-sère, et, pour l'Éducation nationale, le"référentiel bondissant" évoque avec unesémantique aseptisée le simple ballon,terme un peu rustique certes, un rien tri-

vial, en somme réactionnaire. C'est dansle même esprit que nous adoptons ce vo-cabulaire abscon en évoquant la fameuse"communauté internationale". Mais de quiparle t-on vraiment ? Pendant fort long-temps, tout un chacun devinait la seuleaction des États-Unis derrière la ci-de-vante communauté. Les plus optimistes -les plus naïfs ? - affirmaient qu'il s'agis-sait de tous les États constitués. Les pluslucides ne comptaient que les membresdu Conseil de Sécurité... Depuis quelque temps, la responsabilitéde cette société anonyme et aux oui-diretoujours agissante, semble devenue biencomplexe. En Afrique du Nord, le concertharmonieux de la communauté internatio-nale tombe dans la cacophonie la plusgrotesque. La Russie et la Chine n'enten-dent pas clamer le discours politiquementconforme que lui inspire d'autres parte-

naires. Fini le sentiment communauta-riste, la seule voix harmonieuse et jamaisdiscordante du monde prétendument dé-mocratique. Au vrai, la communauté in-ternationale cache à peine quelques hautsresponsables administratifs, soucieux degérer les problèmes diplomatiques entresoi, persuadés d'être les seuls à pouvoir lefaire, méprisant les peuples qu'ils appel-lent pourtant, mais pour la forme, à desélections de principe. Une façon très Gis-card de vous expliquer l'Europe commeune évidence, tout l'esprit de la commu-nauté internationale est là. Mais d'esprit, elle n'en a guère, ni deconsistance car c'est un mirage qu'on agitesous les yeux passifs de millions de télé-spectateurs. Allez, vous serez bon pour cescoop : la communauté internationalen'existe pas ! q

Marc Savina

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z 2 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011

Économie

Directeur de 1965 à 2007 : Pierre Pujo (?)

Directeur de la publication : M.G. Pujo

Rédacteur en chef : Michel Fromentoux

Rédacteur graphiste : Grégoire Dubost

Politique : Guillaume Chatizel,

Jean-Philippe Chauvin, Aristide Leucate,

François Marcilhac, Marc Savina

Société : Stéphane Blanchonnet,

Jean-Pierre Dickès, Michel Fromentoux,

Stéphane Piolenc

Économie & Social : Guy C. Menusier

Europe : Charles-Henri Brignac,

Grégoire Dubost, Guy C. Menusier

Monde : Philippe Maine, Pascal Nari

Arts & Lettres : Anne Bernet, Monique

Beaumont, Charles-Henri Brignac,

Louis Montarnal, Alain Waelkens

Histoire : Michel Fromentoux,

Yves Lenormand, René Pillorget,

Frédéric Winkler

Chroniques : Jean-Baptiste Morvan

Idées : Stéphane Blanchonnet,

Dimitri Julien, François Marcilhac

Abonnements, publicité, promotion : Monique Lainé

10 rue Croix-des-Petit10 rue Croix-des-Petits-Champs-Champs s

75001 Paris75001 Paris

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ISSN 1166-3286

L’ACTION FRANÇAISE 2000

Au service de l'Allemagne ?L'annonce d'une probablehausse des taux directeurs dela BCE suscite la controverse.

POINTANT, sans surprise, la re-prise de l'inflation, le présidentde la Banque centrale européenne(BCE), Jean-Claude Trichet, apréparé les esprits au possible re-lèvement de ses taux directeurs.La décision pourrait intervenirdès le 7 avril. Ce faisant, la BCEchercherait à prévenir les "effetsde second tour" : la hausse desprix des produits alimentaires et

de l'énergie pourrait nourrir lesrevendications salariales, aurisque d'alimenter une flambéeinflationniste. « Un scénario peu probable dansune zone euro où un actif sur dixest au chômage », commenteJean-Marc Vittori. Très critique,l'éditorialiste des Échos attribued'autres motifs à la BCE. Selon lui,« le durcissement de sa politiquepourrait refléter les tensions ausein de son Conseil, fragilisé parl'incertitude sur la succession Tri-chet. Il peut aussi être interprétécomme une injonction donnée auxgouvernants d'agir plus ferme-ment pour réduire les déficits pu-blics. Il peut enfin venir d'uneanalyse inspirée davantage du

contexte allemand que de la zoneeuro. L'Allemagne est en effet lepays où l'enclenchement de la spi-rale inflationniste est le moinsimprobable. La BCE agirait alorssous l'influence de sa voisine laBundesbank, distante d'à peinequatre kilomètres. »La Buba prendrait-elle sa re-vanche ? Au yeux de Charles Gave,un disciple du monétariste MiltonFriedman, Jean-Claude Trichet in-fligea un véritable camouflet àl'Allemagne en engageant la BCEdans le rachat d'obligations d'É-tat. « La bataille entre les euro-crates et la Bundesbank vient [...]de commencer », a-t-il annoncédans les colonnes d'Investir (Ins-titut Turgot, 10/03/2011). n

» EXPATRIATION

« Plus que jamais, les indus-triels français privilégientl'investissement et l'em-bauche dans les pays émer-gents », s'inquiète Odile Espo-sito, rédactrice en chef àLa Tribune (05/03/2011).« Rhodia tire déjà près de lamoitié de son chiffre d'af-faires de ces pays. [...] ChezLafarge, la proportion estplus forte encore, de 52 %.Schneider Electric vise les40 % cette année. Et Air Li-quide compte sur 33 % en2015, contre un peu moins de20 % aujourd'hui. PSA, lui, as-sure que 39 % de ses ventes(en volume) sont déjà réali-sées hors d'Europe. »

» RÉSISTANCE

Groupama se heurte aux auto-rités boursières italiennes.Afin d'entrer au capital dePremafin, l'assureur françaissera contraint de lancer uneoffre publique d'achat (OPA).Une procédure dont il croyaitpouvoir se dispenser en vertud'un accord avec la famille Li-gresti, actionnaire historiquede sa proie.

» BIG BROTHER

Un nouvelle ère va-t-elle s'ou-vrir pour la recherche enligne ? « Nous sommes entrain de construire une infra-structure [...] dont l'objectifest qu'elle nous permette decomprendre chaque aspect dela vie sociale, même les plusinfimes », assure Qi Lu, pré-sident de la Division OnlineServices de Microsoft(Les Échos, 01/03/2011). Celaafin de proposer aux inter-nautes des réponses « baséessur l'opinion de gens en quil'on a confiance ».

L'horizon semble loin de se dé-gager pour la Grèce. Le7 mars, Moody's a dégradé de

trois crans sa notation souveraine,suscitant la colère d'Athènes. Pa-ris est lui aussi monté au créneau :les agences « ne devraient pas no-ter des pays qui sont sous contratavec la Commission européenne,le FMI et la BCE », a déclaré Chris-tine Lagarde à l'antenne de FranceCulture (Les Échos, 11/03/2011).

Fourvoiement

Le ministre de l'Économie va-t-ilouvrir des discussions en consé-quence ? Le cas échéant, souhai-tons-lui bon courage : cela sup-poserait, vraisemblablement, deréviser la constitution américaine– dont le premier amendement ga-rantit la liberté d'expression –, àdéfaut d'empêcher la circulationdes informations de part et d'autrede l'Atlantique. Vaste programme,à l'aune duquel on mesure la dé-magogie du propos. Les respon-sables politiques sont coutumiersde ces fourvoiements volonta-ristes, grâce auxquels ils flattentpeut-être l'opinion, mais entre-tiennent aussi le fatalisme am-biant, en revendiquant paradoxa-lement leur impuissance.Les agences de notation ont certesprêté le flanc à la critique. Commele rappelle Jean-Pierre Jouyet,président de l'Autorité des mar-chés financiers (AMF), elles se sontmontrées « parfois dépassées parla complexité des produits qu'illeur était demandé de noter » –tels les CPDO (Constant Propor-tion Debt Obligation), élaborés àpartir des couvertures de dé-faillance (CDS), dont la valeur s'esteffondrée avec la crise en dépitdu "triple A" qui leur avait été at-tribué (Cahiers de l'évaluation,n° 5, février 2011). NorbertGaillard, consultant pour laBanque mondiale, pointe, quantà lui, l'erreur « d'avoir surnoté laGrèce et, dans une moindre me-sure, le Portugal et l'Espagne aucours des années 2000, c'est-à-

dire lors des premières annéesd'existence de la zone euro » –comme si la monnaie unique avaitdissipé tout risque de défaut depaiement. « Entre 1999 et 2003,Fitch et S&P ont relevé la note dela Grèce de trois et quatre cranssans qu'il y ait de véritables jus-tifications économiques ou fi-nancières. [...] Aujourd'hui, lesagences tentent de rattraper leurerreur, mais elles dégradent troptard et sont donc obligées de lefaire massivement. » Ce faisant,elles nourrissent la défiance desinvestisseurs à l'égard des Étatsemprunteurs, alimentant d'autantla crise des dettes souveraines –on parle d'une action « pro-cy-clique ». Cela dit, « même si des événe-ments ponctuels – dont il ne s'agitpas de minorer l'importance – re-lancent les débats publics sur

l'adéquation des niveaux de ra-ting, la seule mesure "réaliste"de la performance des agences –la capacité à trier les risques avecun succès statistique – plaide pour[elles], en tous cas celles qui ontun recul historique », affirmePierre Cailleteau, ancien respon-sables de la notation des Étatspour Moody's Investors Service. Enoutre, « comme le rappellent sou-vent les agences de notation, sielles étaient parfaitement pres-cientes, elles n'auraient que deuxtypes de ratings : fera défaut –ne fera pas défaut ».

Médiation nécessaire

Or, la médiation qu'elles opèrententre émetteurs et souscripteursd'un titre obligataire apparaît in-dispensable, ceux-ci n'étant dis-posés à prêter à ceux-là que s'ils

sont en mesure d'évaluer le risqueencouru. Reste que le marché dela notation se trouve concentréautour de trois agences. Les deuxprincipales, Moody's et Standard &Poor's, en détiendraient même80 %. « Dans la mesure où denombreux émetteurs exigent unedouble notation, ces agences seretrouvent parfois en situationde quasi-monopole », observeJean Tirole, membre du Conseild'analyse économique auprès duPremier ministre. Aussi l'AMF s'est-elle fixé pour objectif de « pro-mouvoir les solutions alternativesà l'évaluation de crédit par lesagences de notation, en respon-sabilisant les acteurs qui inves-tissent dans ces produits ». « Lesgrandes banques peuvent trèsbien [...] recourir à des modèlesde notation interne », remarqueJean-Pierre Jouyet. D'autres plai-dent en faveur d'une agence pu-blique, dont l'indépendance se-rait néanmoins garantie sous lahoulette de la Banque centraleeuropéenne ou du Fonds moné-taire international. On n'en estpas encore là.

Politique de gribouille

Dans l'immédiat, il appartient aurégulateur de réviser les règlesprudentielles dont on mesure au-jourd'hui la perversité. Si les po-litiques stigmatisent désormais lerôle des agences, ils ont aupara-vant contribué à les ériger en ac-teurs clefs du système financier.« Ces dernières sont devenues aucours du temps des "auxiliaires derégulation" et retirent de ce sta-tut des revenus considérables »,souligne Jean Tirole. « Les insti-tutions régulées (banques, com-pagnies d'assurance, [courtiers],fonds de pension) voient leurs exi-gences en capital diminuer sé-rieusement lorsqu'elles détien-nent des créances bien notées. »Cela en application des accordsde Bâle II. « Pour lutter contrel'effet pro-cyclique que les nota-tions peuvent avoir, il est effec-tivement très souhaitable deconduire une revue approfondiedes différents dispositifs régle-mentaires afin de les purger, au-tant que faire se peut, de réfé-rences aux notations externes »,reconnaît Jean-Pierre Jouyet.Preuve qu'à l'heure de la mondia-lisation, le "politique d'abord" n'estpas inopérant. n

Grégoire Dubost

o FINANCE

Feu sur Moody's and Co !Accusées de faire la pluie et le beau temps sur les marchés financiers, où elles influencent les taux d'emprunt, les agences de notation demeurentdans le collimateur des politiques. Mais les responsabilités sont partagées.

Les responsables politiques ont contribué à ériger les agences de notation en acteurs clefs du système financier.

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 3 z

Éditorial

Sarkozy hors service

Àl'heure où nous écrivons, l'actualité est en-core tournée vers le Japon et la Libye, quiviennent nous rappeler le caractère en partie

dérisoire de nos chamailleries politiciennes... Dansle cas de la Libye, il est évident que l'optimismedes bien-pensants - « l'espoir des imbéciles » disaitBernanos - est contredit par la détermination d'undictateur à faire la guerre à son propre peuple,surtout si celui-ci obéit à des logiques tribales 1

que notre vision "occidentale" - au sens où l'Occi-dent est ce monstre idéologique qui proclame safoi en la Démocratie - préfère occulter parcequ'elle est incapable de saisir, par-delà la gro-tesque lutte du Bien contre le Mal, le caractèretragique de l'histoire des peuples. La réalité, sousses aspects politiques et ethniques, reprend sesdroits, comme au Gabon, et les incantations démo-cratiques auxquelles nous sommes soumis depuisdeux mois apparaissent pour ce qu'elles sont : unediarrhée verbale incapable de peser sur l'histoire.

Préparer l'opinion publique à une intervention

Certes, la référence, faite par Obama, aux « atro-cités » commises dans les années quatre-vingt-dixdans les Balkans est on ne peut plus claire : prépa-rer, le cas échéant, l'opinion publique à une inter-vention... mais les États-Unis en refileraient lacharge à d'autres (l'Europe, en l'occurrence)... Oncomprend pourquoi Cameron et Sarkozy, dont lezèle prouve de nouveau que "notre" retour dans lecommandement intégré de l'OTAN n'était qu'unenormalisation, ont devancé les (timides) intentionsaméricaines, relayées pas la Ligue arabe, d'instau-rer une zone d'exclusion aérienne. Mais l'Europe,qui s'est contentée d'appeler au départ immédiatde Khadafi, qu'elle ne reconnaît plus comme « in-terlocuteur » et dont elle conteste désormais la« légitimité » – depuis quarante ans, Khadafi al'habitude – s'est montrée plus prudente que lesvassaux Cameron et Sarkozy, lequel a été le pre-mier à reconnaître le Conseil national de transitionlibyen. Du reste, dans le cadre de la réunion du G8lundi 14 mars, Hillary Clinton a laissé le Royaume-Uni et la France bien seuls...

Quant au Japon, catastrophes naturelles et respon-sabilités politiques semblent se conjuguer pourajouter au désastre humain et économique. Aprèsun tremblement de terre suivi d'un raz-de-marée,les inquiétudes sur les capacités technologiques à

garantir la totale sécurité des installations nu-cléaires occupent les esprits, comme si la naturevenait rappeler l'homme à plus de modestie. Telest du moins le discours écologiste depuis le débutdes événements, que les media français répercu-tent jusqu'à la nausée. Appeler dès le lendemaindu séisme ayant touché l'archipel nippon, avantmême de rien savoir de ses conséquences réelles,au démantèlement du parc nucléaire... français,qui n'est pas soumis aux mêmes risques sismiques,montre qu'à l'approche de 2012 tous les coups sontpermis. Qu'un sujet aussi important que le nu-cléaire, qui touche à notre développement écono-mique, à notre indépendance énergétique et ànotre mode de vie, puisse être l'objet de polé-miques strictement politiciennes, suffit à condam-ner le régime d'opinion dans lequel nous vivons.

Croyant peut-être bien faire, le ministre Besson n'afait qu'encourager cette dérive lorsque, le 14 marssur France Inter, il a récusé – à juste titre – touteidée de référendum sur la question nucléaire, maispour mieux en renvoyer l'idée... à l'élection prési-dentielle elle-même ! Peut-on imaginer que lapoursuite du nucléaire en France dépende des rap-ports de force existant au sein de la gauche entreles écologistes et les différents courants du Partisocialiste ou de la "gauche de la gauche" ? Qu'il ensoit de même, pour la "droite" et le centre, del'euthanasie, du mariage homosexuel ou du codede la nationalité ? Malheureusement, la dimensionpoliticienne de l'élection présidentielle voulue parle général de Gaulle n'est plus à démontrer. Ellen'a jamais permis la désignation d'un arbitre vrai-ment indépendant au service du Bien commun. Dès1965, les partis l'ont monopolisée. Depuis, l'Argenta fait le reste.

Sondages contrariants

Car l'UMP ne vaut pas mieux que la gauche, pani-quée qu'elle est par deux sondages plaçant MarineLe Pen en tête du premier tour – un troisième re-donnant à DSK "sa" place quasi officielle, mais éli-minant toujours Sarkozy du second tour... Si bienque le parti – encore – présidentiel ne sait plusquelle ligne adopter : la ligne semi-dure, qui, vou-lant labourer les terres du Front national, de-mande, avec Copé, la poursuite du débat prévu surl'islam ou, avec Chantal Brunel, bien vite désa-vouée par Fillon et... le même Copé, le rejet à lamer des migrants illégaux ? ou la ligne intégrale-

ment molle, qui a obtenu du gouvernement qu'ilrevienne sur la déchéance de nationalité des natu-ralisés de moins de dix ans tueurs de flics, mesurebâtarde promise par Sarkzoy l'été dernier à Gre-noble ? Ce recul, premier acte ministériel deClaude Guéant, a été exigé par le Nouveau Centreau nom de... l'égalité des assassins devant laConstitution ! Ce qui ne fait que confirmer ce quenous écrivions ici il y a quinze jours : Guéant n'apas été placé à l'Intérieur pour s'occuper de la sé-curité des Français mais pour préparer la présiden-tielle. Or l'Élysée craint par-dessus tout la présen-tation d'un candidat centriste. En clair, que Borloofasse à Sarkozy, en 2012, le coup de Chevènementà Jospin en 2002...

La vague bleu Marine

Aucune loi adoptée à la va-vite pour garantir la"sincérité" des sondages politiques, même accom-pagnée de la création d'une énième et coûteusehaute autorité évidemment "indépendante", nechangera rien à l'affaire. Ce que les sondages sontamenés de plus en plus à "révéler", en dépit detous les "redressements" possibles, ce n'est évi-demment pas un "instantané" de l'opinion pu-blique, mais un mouvement de fond, que l'électionseule chiffrera, et un fait politique. Le mouve-ment de fond, Guaino, le conseiller de Sarkozy, l'areconnu, le 13 mars au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI, c'est « la radicalisation de la société fran-çaise, qui est le reflet de ce qui se passe dansbien d'autres pays ». Oui, les peuples européens,chacun avec sa culture et son rythme politiques,se réveillent et la vague bleu Marine, qui ne se ré-duit pas à l'impact d'un sondage et que consolide-ront, ou pas, les deux tours des cantonales, sanspouvoir l'infirmer, car il s'agit d'élections locales,est l'expression française de ce réveil. Le fait,c'est que l'élite mondialisée – financière, écono-mique, médiatique –, qui gouverne réellement laFrance, a d'ores et déjà abandonné Sarkozy, en-gagé dans une spirale descendante, pour le prési-dent du FMI. Les deux hommes sont interchan-geables, du moins dans leur volonté d'asservir laFrance à la logique mondialiste. La Républiquereste bien le règne de l'étranger. q

François Marcilhac

1 Voir à ce propos les excellentes analyses de BernardLugan sur son blogue Afrique réelle.

z NOTRE SOUSCRIPTION POUR L'AF

VOUS l'avez remarqué depuis quelques se-maines, votre journal a fait peau neuve. Denouveaux rédacteurs, jeunes pour la plu-part, ayant la tête aussi bien faite que bienpleine, se font une joie d'écrire dans le jour-nal qui fut celui de Maurras, Daudet et Pujo.Et leur plume enjouée vous dit sans peurdes vérités, mêmes celles qui ne sont pasbonnes à dire. Et cela nous redonne de l'es-pérance !Vous vous habituez peut-être à l'air vif etnouveau qu'ils inculquent à nos pages, n'enoubliez pas pour autant que nous connais-

sons toujours les mêmes soucis financiers !Or il est urgent de revigorer la souscriptionpour l'AF à un moment où celle-ci devientindispensable à la France ! L'an prochain nous débarrassera probable-ment de M. Sarkozy et de la lamentableimage qu'il a donnée de la fonction prési-dentielle, mais il faudra alors aider les Fran-çais à se demander si ce n'est pas la répu-blique elle-même qui, en France, est la-mentable. Elle ne saurait en aucun casrépondre aux nécessités d'une politique dignede notre pays : coincée entre les échéances

électorales elle est condamnée à mener unepolitique à courte vue, sans ampleur, sansvues d'avenir. Nous sommes les seuls àprendre la liberté de dire toutes ces choses.Pour nous permettre de continuer, souscri-vez, sans tarder, à cet appel. n

Michel Fromentoux

3 Merci d'établir vos chèques à l'ordre deMme Geneviève Castelluccio et de les lui en-voyer à : L'Action Française 2000, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris.

L'espérance est d'Action française Liste n° 2Virements réguliers : Mlle Annie Paul,15,24 ; Jean-Pierre Lamy, 30 ;

Mlle Eliette Lopez, 3 ; Mlle Marie-AngeSanz, 3 ; Jean-Pierre Lopez, 4 ; Ni-colas Martin, 30 ; vente de livresd'occasion, 125 ; anonyme, 100 ;Mme Bellegarde, 20 ; Mme ChristianeLeclerc, 30 ; Mme M.M. Godefroy,22,87 ; Mme de Prittwitz, 45,73 ; Fabien Desmeaux, 20.

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z 4 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011

Politique

Dans son discours de clôturedu conseil national du Frontnational, Marine Le Pen s'est

prononcée pour la suppression desintercommunalités et des vingt-sept régions françaises (dont vingt-deux en France métropolitaine) !La méfiance de l'État central àl'égard de l'institution régionaleest un serpent de mer politique.

État versus régions

La présidente du Front national,s'interrogeant sur la pérennité« de cinq niveaux d'administra-tion : commune, intercommuna-lité, département, région, État »,suggère de transférer aux dépar-tements les compétences actuel-lement exercées par des inter-communalités onéreuses (environ4 million d'euros par ans d'aprèsla Cour des comptes) et prône uni-ment la suppression pure etsimple de l'inutile « région admi-nistrative [...] trop grande pourêtre l'échelon de proximité, troppetite pour jouer un vrai rôlestratégique ». Le républicanismede Marine Le Pen ne fait aucundoute, lorsqu'elle assume haut etfort l'héritage de la Révolutionfrançaise régicide qui a créél'échelon départemental (décretdu 26 février 1790 relatif à la di-vision de la France). Ceci étant, si, pour paraphraserLaurent Fabius en son temps,Mme Le Pen pose les bonnes ques-tions, il n'est pas certain, en re-vanche, qu'elle apporte les bonnesréponses. La cure d'amaigrisse-ment préconisée du "mille-feuilles"administratif est, certes, loua-blement inspirée par le souci deménager les deniers publics (déjàfortement sollicités ainsi qu'en at-teste le dernier Livre noir du gas-

pillage de l'argent public éditépar les Contribuables associés),mais s'inscrit dans une perspec-tive jacobiniste que n'auraient pasreniée Robespierre et ses séides,sans oublier le système napoléo-nien considéré comme l'acmé ducentralisme étatique. Si elle n'était habitée d'intentionsbassement électoralistes, peut-être souscririons-nous pleinementau judicieux "coup de balai" pro-posé par la leader du Front na-tional. En effet, face à ces om-nipotents et munificents poten-tats régionaux, à l'instar de feul'indétrônable Georges Frèche(Languedoc-Roussillon), des au-toritaires Alain Rousset (Aqui-taine), Ségolène Royal (Poitou-Charentes) ou Claude Gewerch(Picardie) avec leurs kyrielles deréalisations pharaoniques, nos ré-gions sont devenues des baron-nies budgétivores où la mégalo-manie le dispute férocement à unanti-étatisme partisan. La gauchea massivement investi ces féoda-lités, s'y cramponnant par le clien-télisme d'un électorat bobo (no-tamment celle des "associatifs" etautres travailleurs sociaux, lesautres, c'est-à-dire le plus grandnombre, se réfugiant dans l'abs-tention) copieusement arrosé parla manne publique.

Régionalisme

De même, que penser de la fausse« organisation décentralisée dela République » introduite dansla Constitution du 4 octobre 1958par le Premier ministre Raffarinen mars 2003, le terme de dé-centralisation étant utilisé commecache-sexe du vaste projet euro-péen d'État fédéral ethno-régio-naliste ? Alors que certaines ré-

gions comme l'Alsace gèrent di-rectement leurs fonds structurelsavec les instances européennes,sans passer par l'État français, laquestion d'une suppression, nonpas des régions, mais de cettedangereuse règle émancipatricese pose avec acuité. Pierre Hil-lard écrit très justement que « laFrance est une création politique.L'État a précédé la nation. À par-tir du moment où les régionss'émancipent politiquement, laFrance ne devient plus qu'une "ex-pression géographique" et celad'autant plus qu'il faut toujoursconserver à l'esprit que des textesgermano-européens ethno-lin-guistiques (charte des langues ré-gionales et convention-cadre pourla protection des minorités) s'ad-ditionneront à l'autonomie ré-gionale » (La Décomposition desnations européennes, F.-X. deGuibert, Paris, 2005).

Vicissitudes

Rejetée ad referendum en 1969,ressuscitée en 1972 sous l'impro-bable forme d'un établissementpublic, consacrée par la "loi De-ferre" du 2 mars 1982, la région,collectivité territoriale à part en-tière, aura connu bien des vicis-situdes depuis son avènementconceptuel au XIXe siècle avecl'Association normande (créée parle juriste Arcisse de Caumont, en1832) à base ethnique, ou encorela Fédération régionaliste fran-çaise du poète languedocien JeanCharles-Brun (1900), jusqu'au projet régionaliste (inspiré desnon-conformistes des annéestrente) du maréchal Pétain (quis'arrêta aux éphémères "préfetsrégionaux" institués par la loi du19 avril 1941).

Conformément au funeste desseinde Bruxelles, la réforme actuellede l'intercommunalité (notre ar-ticle dans L'AF 2000 n°2811), souscouvert d'un statu quo territorial,attend de savoir qui, du départe-ment ou de la région, va prendrele pas sur l'autre. Dans le prolon-gement de ce détricotage insti-tutionnel, initié avec le projet de"Grand Paris", des députés UMP,tels Jean-François Mancel ou Jérôme Bignon, ne cachent plusleur souhait de voir disparaîtrecertaines régions comme la Pi-cardie et rattacher ses départe-ments constitutifs aux régionsNord-Pas-de-Calais (Somme),Champagne-Ardenne (Aisne) et Ile-de-France (Oise). Marine Le Pen, comme les "iden-titaires" (que, par ailleurs, elledénigre) méconnaissent fonda-mentalement le mouvement dé-centralisateur français. Tandis quel'une se cramponne à un radica-lisme républicain ringardisé parune construction européenne quise moque des réalités nationales,les autres se pâment devant lemiroir aux alouettes européen quileur augure les lendemains chan-tant d'un ethno-régionalisme frus-tré par des siècles de centralismeétatique, dans l'attente extatiquede l'éruption juvénile de leur mi-cro-identité de pacotille.

Paneurope

Or, les buts de la construction eu-ropéenne sont plus étendus et nes'arrêtent pas aux petites jac-queries intellectuelles des ethno-nationalistes sub-étatiques, quiont tendance à prendre leurs dé-sirs folkloriques pour des réalitéspolitiques. Le fondateur de la Pa-neurope, le bourgeois cosmopo-lite Richard Coudhenove-Kalergi,dans son délire d'union euro-at-lantiste, appelait, en 1950, à lacréation d'une mystique « fédé-ration Charlemagne, par des loisqui prévoient un transfert desdroits de souveraineté au profitd'instances supranationales. [...]L'Union atlantique [par] une fé-dération à trois avec [l'Angleterre]comme pont entre l'Amérique etl'Europe. [...] Un nouvel empiremondial naîtrait dont la popula-tion serait plus grande que celledes États-Unis et dont le terri-toire, de la mer Baltique jusqu'au[Congo], ne serait dépassé entaille que par la [Russie] ». Auxfins ainsi exposées, la PaneuropeFrance dévoile ses moyens :« L'Union paneuropéenne recon-naît [...] le droit des groupes eth-niques » ou encore « ses peupleset entités ethniques ». On l'aura compris, les régions neseraient qu'un marchepied versl'État mondial. C'est tout le pro-blème de la décentralisation à lafrançaise limitée à des compé-tences administratives. Ne por-tant aucun projet politique, ellese trouve bien incapable de ga-rantir le maintien de l'État-na-tion, autant que d'opposer uncontre-modèle. Charles Maurras,dans L'Étang de Berre, montraitla voie à suivre : « C'est par na-tionalisme [intégral] qu'il fautêtre fédéraliste [ou décentrali-sateur]. » CQFD. n

Aristide [email protected]

o INSTITUTIONS

Savoir région garderÀ l'approche des dernières élections cantonales, les 20 et 27 mars prochains,Marine Le Pen jète un pavé dans la mare : elle propose la suppression des régions. Une fausse bonne idée ?

« Nos régions sont devenues des baronnies budgétivores où la mégalomanie le dispute férocement à un anti-étatisme partisan. »

Le français à VersaillesLa Coordination Défense deVersailles appelle à manifes-ter le 19 mars « pour lasauvegarde de la languefrançaise ». Nous publionsci-dessous de larges extraitsdu communiqué diffusé parson président, ArnaudUpinsky.

Considérant que la trahisonculturelle est une trahison dela langue. Bien que la Consti-tution (art. 2) fasse du fran-çais la langue de la Répu-blique, l'invasion de l'anglo-américain ne cesse de gagnerdu terrain. [...] À partir de2008, la consécration de JeffKoons Ier, de l'art new yorkais[...] et de la langue anglaise,portés au pinacle des GrandsAppartements Royaux, a faitdu saccage de l'image de Ver-sailles le symbole embléma-tique de la guerre culturellefaite à la langue française parl'anglo-américain. Le Versailles du Grand Sièclede Louis XIV est le symbole del'invention du français mo-derne, langue internationale(traité de Rastadt, 1714), del'abstraction, du droit, de ladiplomatie, des lumières, dela liberté, de l'universalité,de la prospérité et du rayon-nement de l'hégémonie fran-çaises en Europe et dans lemonde. Ce français modernedont la puissance et la stabi-lité ont permis à la Franced'atteindre un prestige jus-qu'alors inégalé dans tous lesdomaines, politique, artis-tique, économique, scienti-fique, littéraire et de faire dela France la première puis-sance artistique et intellec-tuelle au monde, jusqu'à lacréation du ministère de laCulture.Considérant que la sauve-garde de la langue francaiseest la clef de voûte des inté-rêts vitaux de la France,condition essentielle de saprospérité ; considérant quela mobilisation contre laguerre d'invasion faite aufrançais est un impératif ca-tégorique strictement apoli-tique s'imposant à tous indé-pendamment de toute allé-geance partisane...La Coordination Défense deVersailles et l'Union nationaledes écrivains de France(UNIEF), répondant ainsi àl'initiative du Collectif uni-taire républicain de résis-tance, d'initiative et d'éman-cipation linguistique (COUR-RIEL), se joindront à d'autresassociations de défense de lalangue française pour protes-ter contre l'envahissement denotre langue par l'anglo-amé-ricain [et] manifester le sa-medi 19 mars 2011, à14 heures, à Paris (1er), de-vant la fontaine Molière, àl'angle de la rue Molière et dela rue Richelieu (métro : Py-ramides ou Palais-Royal). q

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Société

Mille cinq cents ans sépa-rent ces deux chefs de l'É-tat, et il est effarant de

voir le 113e (après quatre-vingt-six rois, trois empereurs et vingt-trois présidents 1) s'apercevoirsoudainement que la France estchrétienne et venir faire part de sa découverte au Puy-en-Ve-lay, en se trompant d'ailleurs surl'histoire de cette ville puisqu'ila confondu le départ pour le croisade avec le départ des pè-lerins pour Saint-Jacques-de-Com-postelle.

Le baptême de la France

Ce soudain regain d'élan religieuxest d'autant plus loufoque queM. Sarkozy préside aux destinéesd'une nation qui a scandaleuse-ment oublié qu'elle est chré-tienne. Il s'accommode sans dif-ficulté d'une législation qui au-torise chaque année à tuer220 000 enfants dans le sein deleur mère pour convenances per-sonnelles, prolongeant ainsi lemeurtre des saints Innocents parle roi Hérode. Lui-même a ajoutéà cette apostasie vieille de qua-rante ans l'encouragement à tra-vailler le dimanche, pour "fairedu fric", oubliant que nul ne peutservir deux maîtres, Dieu etMammon. Quant au débat sur leslois bioéthiques, il a montré queles hommes et les femmes duparti du président se soucientcomme de leur première culottedes sages prescriptions de l'Égliseen matière de respect de la vienaissante. La vraie barbarie n'estpas du côté que l'on croit.Clovis, dont nous commémoronscette année le 1 500e anniversairede la mort, a façonné la nationpar un comportement bien diffé-rent, il s'est soumis à la réalitédes choses, il ne l'a pas utiliséepour discourir et pour ramasserdes suffrages. Il s'avéra très viteque lui seul avait une culture suf-fisamment marquée par la lati-nité, la force nécessaire et le gé-nie militaire pour réunir toute laGaule - cette terre de Gauleéprise de spiritualité, naguèreperle de l'empire romain, imbi-bée du sang des multiples mar-tyrs et que de grands évêques ai-daient, dans la débâcle de l'em-pire, à surmonter le drame desinvasions barbares, sauvant ainsil'acquis de la civilisation... Cepays, où saint Martin, au IVe siècle,avait déjà dessiné une ébauchedes structures paroissiales, étaitcomme une pièce en attente d'au-teur. Clovis, fils de Childéric, nes'enorgueillit pas d'être appelé àune telle mission par la volontéde Dieu, plus que par ses propresmérites, lesquels il savait ne te-nir que de Dieu seul. Très hum-blement il reçut le baptême (Noël496) : le baptistère est aux anti-podes de l'urne électorale. Ce jour-là, avec trois mille de ses

guerriers, le roi des Francs scellaun pacte avec Dieu, donc avec lasagesse éternelle, il exprima lavolonté, de lui-même et des élitesde la nation, d'y conformer pourtoujours leur vie personnelle etla vie de la cité. Ce pacte avecDieu fut aussi un pacte entre leroi et son peuple, car dès lors leroi "très chrétien", "lieutenant deDieu sur terre", était "l'oint du Sei-gneur", donc celui qui ne s'ap-partiendrait plus mais devrait sedonner, au besoin se sacrifier ,pour promouvoir et garder debonnes institutions et de bonneslois de nature à aider ses sujetsà accomplir dignement leurs finsdans ce monde et mériter la béa-titude éternelle.

Le pacte de Reims

La Gaule connaissait au temps deClovis le drame d'une immigra-tion-invasion : elle était occupéepar les Francs qui ne demandaientqu'à s'intégrer à l'instar de leurroi (se souvenir de la vierge consa-crée, franque par son père etgallo-romaine par sa mère, Ge-neviève, protectrice de Paris) maisoccupée aussi par les Burgondeset les Wisigoths que leur adhé-sion à l'hérésie de l'arianisme,sorte de monothéisme totalitaire,rendait inaptes à souder une vraiesociété et à s'intégrer dans laGaule chrétienne. Cette religion,ne reconnaissant pas le mystèredu Christ rédempteur, roi des na-

tions, ni le mystère de l'amourentre les personnes dont la Tri-nité est le plus évident exemple,ressemblait étrangement à l'islamqui devait naître quatre sièclesplus tard et se répandre agres-sivement depuis lors à chaque foisque le christianisme s'anémierait.Que fit alors Clovis ? Le contrairede ce qu'eût fait M. Sarkozy. II nese répandit pas en incantationssur la neutralité de l'État entreles diverses religions, ni sur l'éga-lité de celles-ci comme garantieégoïste de la paix civile. Le biencommun exigeait que l'arianismefût éradiqué : il entreprit doncd'amener à se convertir les hé-rétiques les moins fanatisés, lesBurgondes, parents de la bellereine Clotilde, puis il se porta à

Vouillé, contrée encore irradiéede la lumière de saint Hilaire, ré-cent évêque de Poitiers, à la ren-contre des intégristes Wisigothset les chassa outre-Pyrénées. Clovis, le jour de son baptême,en abandonnant ses colliers entreles mains de saint Remi, évêquede Reims, abandonnait toute pré-tention au pouvoir religieux. Ondit parfois que de là date la laï-cité de l'État et sa séparationd'avec l'Église. Clovis, lui, ne sé-parait pas l'âme du corps de la na-tion, mais il distinguait les do-maines, ne souhaitant, pas plusque plus tard le saint roi Louis IX,voir les évêques s'immiscer dansson action politique, mais toujoursrespectueux de l'enseignement del'Église dans les choses relevantde la foi et de la morale. M. Sar-kozy, lui, laisse écrire des lois quivont nettement à l'encontre del'enseignement de l'Église

La vocation française

Le président de la République nesemble pas comprendre ce quefut en 496 cette merveilleuse ren-contre d'un volonté divine inscritesur la terre de Gaule et de la vo-lonté politique de Clovis. Admi-rons le génie politique de saintRemi : dans un monde comme lenôtre, où tout était à rebâtir, ilne s'est pas contenté de prêcherl'œcuménisme avec les ariens hé-rétiques, il ne s'est pas demandési Clovis respectait les "Droits del'Homme". Il alla droit à l'essen-tiel, il fi un roi, car ce dont leshommes ont en tout temps leplus grand besoin, c'est d'être biengouvernés, conduits à se forgerdes mœurs dans la lumière de laVérité. Ainsi naquit la France, sibien que demander si la Franceest chrétienne, c'est demander sielle existe. Non chrétienne, ellene serait jamais née. La veille deNoël 496, saint Remi s'entenditdicter la mission de la France (se-lon le récit de Flodoard) : « Leroyaume des Francs est destinépar Dieu à défendre l'Église duChrist. Tant qu'il sera fidèle à savocation il sera victorieux. S'il s'ymontre infidèle il se verra châ-tié. Il durera malgré tout jusqu'àla fin des temps. » La prophé-tie est terrible : la France sar-kozienne est-elle réellement fi-dèle ?... n

Michel Fromentoux

1 D'après les comptes de Pascal Ar-noux : Histoire des rois de Franceet des chefs d'État, éditions du Ro-cher, 2001.

o RELIGION

De Clovis à Sarkozy...Le président de la République a beau évoquer l'héritage chrétien de la nation,il ne parvient pas à convaincre les catholiques les plus fervents, faute de rompre avec une laïcité combattue jadis par Clovis.

L'ACTION FRANÇAISE 2000

Bulletin à retourner avec un chèque à l'ordre de la PRIEP à :L'Action Française 2000 10 rue Croix-des-Petits-Champs 75001 PARISCCP Paris 1 248 85 A

3 Civilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Prénom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

3 Code postal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Commune . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Téléphone. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 Courriel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Premier abonnement (un an)o France . . . . . . . . . . . . .80 so Étranger . . . . . . . . . . .140 sAbonnement ordinaireo Un an . . . . . . . . . . . .125 so Six mois . . . . . . . . . . . .70 sAbonnement de soutien o Un an . . . . . . . . . . . .150 sÉtudiants, chômeurs, ecclésiastiques o Un an . . . . . . . . . . . . .70 sOutre-mer (un an)o DOM . . . . . . . . . . . . .135 so TOM . . . . . . . . . . . . .165 sÉtranger (un an)o Europe . . . . . . . . . . . .165 so Autres pays . . . . . . . . .178 s

BULLETIN D'ABONNEMENT

La hapelle Saint-Michel d'Aiguilhe, dont la première construction remonterait à 969

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Courrier des lecteursLES QUINZE premières lignesde la présentation d'Une jeu-nesse réactionnaire de Fran-çois Leger (L’Action Française2000 du 3 mars 2011) contien-nent un contresens. Bainvilleet Maurras ne couraient pasaprès les honneurs. Ce nesont pas eux qui ont briguéleur élection à l'Académiefrançaise, ce sont leurs amisacadémiciens, notamment Da-niel HaLévy et Henri Bordeauxqui y ont travaillé. Cetteélection a bénéficié à laFrance et aux idées roya-listes. Elle ne dut rien auxinstitutions républicaines.Nous connaissons la réactionde Léon Daudet apprenantl'élection de JacquesBainville : « C'est une des plusgrandes joies de ma "chienne"de vie ! » Quant à Maurrasqui enrichit notre langue fran-çaise, création de nos rois,par ses œuvres en prose ou envers, cette élection fut unejuste récompense.Il convient de renvoyer à l'ar-ticle Académie de l'Encyclope-dia Universalis : « Richelieus'efforce, en politique inté-rieure, d'instaurer le pouvoirabsolu, cependant qu'un fortnationalisme anime sa poli-tique étrangère [...] pourporter la France à la tête desnations civilisées, Richelieuaccorde sa protection à ungroupe de lettrés qui prendle nom d'Académie française."La principale fonction del'Académie, dit le décret defondation , sera de travailleravec tout le soin possible àdonner des règles certaines ànotre langue, à la rendre pluséloquente et capable de trai-ter les arts et les sciences." »C'est bien faire de l'Académieun instrument éminent de lapolitique monarchique. q

Jérôme Florenac

Page 6: e Sarkozy H.S. · M 01093 - 2813 - F: 4,00 E 4 s N°2813 65e année Du 17 mars au 6 avril 2011 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois « FÉDÉRER

Jacques Attali, sinistre tech-nocrate au pouvoir depuistrente ans, insignifiant esprit

qui dispute à Minc, Lévy (Bernard-Henri) et Schweitzer l'honneur deridiculiser à tout jamais le conceptd'intellectuel français, aussi mé-prisé du bas-peuple dont je m'en-orgueillis de faire partie qu'il estrévéré des puissants, a eu chezRuth Elkrief ce dernier trait quisigne sa définitive cacochymie :« La France n'est pas spéciale-ment chrétienne. »

Indécence

Comme je suis catholique, onm'accusera bien entendu d'être enla matière juge et partie, maisqu'on veuille noter cette remarqued'abord : si j'étais Irakien chrétienou juif ou zoroastrien, je croisbien qu'il ne me passerait jamaispar la tête d'affirmer l'œil cli-gnotant : « L'Irak n'est pas spé-cialement musulman. » On veutbien admettre que la Républiquefrançaise se soit bâtie pour par-tie contre le pouvoir de l'Église,avec qui elle avait des comptes àrégler. On veut bien qu'elle ait missur pied certaine laïcité qui visaità rendre l'État religieusementneutre. Mais le révisionnisme his-torique doit, par décence, res-pecter quelques limites. Il y a desbarrières que l'intelligence ne fran-chit pas, dès lors qu'elle a quelqueculture à quoi s'abreuver, dès lorsqu'elle dispose de quelque scienceà quoi se nourrir. Cela qui fait dé-faut à notre bon maître Attali quiva, paterne, son chemin de réin-vention et de reconstruction del'histoire de France. Le présidentde la commission pour la libéra-tion de la croissance française joueavec la vérité comme mes enfantsaux Lego un mercredi après-midid'hiver : il invente son roman na-tional selon ses humeurs, et il bâ-

tit sa tour en interchangeant lesévénements du passé, s'il veut etquand il veut. Car il poursuit,après son affirmative insolence,sous le regard crépitant d'admi-ration de dame Elkrief : « LaFrance a été juive avant d'êtrechrétienne, certaines régions deFrance ont été musulmanes avantd'être chrétiennes. » Si sa pre-mière proposition est fausse, ellel'est un peu moins que la seconde :il est permis de dire qu'il y eutdes Juifs en « France », c'est-à-dire en Gaule romaine avant qu'ily eut des chrétiens, pour la bonneraison que ceux-ci n'existaient pasentre 52 avant le rabbi crucifié et35 après lui (à la louche). De là àextrapoler que ces Juifs-là decette époque-là, sans doute assezpeu nombreux, aient durablementmarqué la physionomie de ce quideviendra la France, il y a uneaventure que seul Attali, éruditc o m m e u n M o m m s e n d uXXIe siècle, dépoussiéreur de par-chemins averti, féru d'inscriptionsantiques et archéologue confirmé,est en mesure de vivre. Nous nel'y suivrons pas.

Un passé islamique

Mais c'est quand notre benêtœcuménique franchit le secondpas que la conscience se révolte,à moins que ce soit la rate qui sedilate, ou la glande hesseliennequi s'indigne : certaines régionsde France auraient été islamiséesavant que le moindre chrétiend'importance y pose le pied. Onvoit à quoi l'énarco-normalien faitallusion, on conçoit quel paralo-gisme a pu sourdre de la brumeusecuisine qu'est ce crâne où ronfleà petits bouillons sans trêve sonintelligence : il y a eu une con-quête musulmane, venue d'Afriquedu Nord, aux alentours des VIIIe

et IXe siècles qui, dans sa lancée

ibérique, même arrêtée parCharles Martel (on ne sait pas s'ila existé celui-là, mais simplifions),a tenu longtemps quelques terri-toires qui avaient été gaulois puisromains, puis ostrogoths et wisi-goths puis francs avant que d'êtrefrançais un jour : la Narbonnaise,Orange, Arles, le Var, etc. Jacques Attali, qui a trop dechoses à savoir et à la fin c'estépuisant, c'est pas de sa faute s'iln'a pas pensé à acheter du painen rentrant, a juste oublié l'es-pace d'un instant qu'il s'était passéquelques trucs pendant six sièclesdans ces lieux, et que même s'iln'était pas né, et Mahomet nonplus, on avait déjà inventé lesévêques comme Hilaire d'Arles,les anachorètes comme saint Cé-saire et même saint Tropez pourle cas où Louis de Funès et Bri-gitte Bardot voudraient y faire untour dans 1 600 ans. On avait dé-niché l'idée des prêtres, desmoines et des moniales, c'estmême par Marseille qu'Honorat etJean Cassien introduisirent le mo-nachisme en occident ; on avaitconvoqué des conciles locaux etœcuméniques, fulminé contrecent hérésies dont même AlainJuppé ne parviendrait pas à re-tenir la simple liste, rassemblédes bibliothèques gigantesques etla pourpre de certains empereursavait bercé l'enfant christianismepour qu'il grandisse.

Racines nationales

À moins que Constantin quand ilvoulait aller de Rome à l'Ibérie aitsystématiquement fait un détourpar l'Helvétie pour éviter de tom-ber sur un minaret entre Marseilleet Sète. À moins que Marie-Ma-deleine n'ait pas été vénérée dansla Sainte-Baume au IVe siècle. Àmoins qu'Augustin le Berbère aitprojeté d'aller évangéliser la Pro-vence aux mains des mahométans.À moins que les Saintes-Marie-de-la-Mer aient été bâties par Viol-let-le-Duc au XIXe. À moins qu'iln'y ait pas eu de concile à Arlesen 314. À moins qu'il n'y ait ja-mais eu de cathédrale à Marseille,Avignon, Agde, Narbonne et Car-cassonne avant Bernard de Clair-vaux. Bref, si Attali nous dégotteles ruines de deux mosquées pourcelles de trois mille églises dansla région, je lui tire mon chapeau.Non, pauvre Jacques, le secret,je vais te le dire : c'est que laFrance était chrétienne avantqu'elle soit la France et c'est mêmeseulement comme ça qu'elle a pudevenir la France. C'est ça le se-cret de ses racines chrétiennes etce n'est pas parce que ton amiSarkozy qui n'est pas le mien varadotant ce refrain que je vaism'interdire de le penser et de lesavoir et de le démontrer. n

Jacques de Guillebon

z 6 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011

Société

Où il n'est pas dit que la criseéconomique et financière, dé-butée fin 2007 aux États-Unis,pour cause de titrisationstoxiques spéculatives, soitderrière nous, tandis que lacrise politique et sociale quisecoue le monde arabe nousréserve bien des surprises.

o Dans le dernier numéro d'Élé-ments (n° 138, janvier-mars2011) consacré à « la politiquede la misère », Alain de Be-noist, sous le pseudonyme deRobert de Herte, livre un édito-rial aussi pédagogique que syn-thétique sur l'argent et la no-tion philosophico-économiqued'échange qui la sous-tend né-cessairement. Il commence parciter opportunément Max We-ber qui écrivait en 1905 qu'« unhomme ne souhaite pas ''parnature'' gagner toujours plusd'argent : il veut simplementvivre comme il a l'habitude devivre et gagner autant qu'il luiest nécessaire pour cela ».René de La Tour du Pin eut desemblables propos en France.Voilà de quoi fournir un argu-mentaire solide pour enterrersans sépulture le superficielslogan sarkozyste, « travaillerplus, pour gagner plus ».De Benoist, s'appuyant sur Aris-tote qui avait déjà observé lecaractère « insatiable de la cu-pidité de l'humanité », préditle péril de l'argent : « l'argentpérira par l'argent, c'est-à-direpar l'hyperinflation, la failliteet le surendettement » et ex-plique finalement le cycle in-fernal et exponentiel du « dé-sir d'argent » éternellement in-satisfait, la quête « du mieux »se confondant avec celle « duplus », dans une sorte d'hubrisde l'avoir à propos de laquelle« les anciennes religions euro-péennes n'ont cessé de mettreen garde ». Le dossier de la re-vue s'attache à disséquer « lalogique du capitalisme [qui] afait que les riches sont de plusen plus riches, les pauvres deplus en plus pauvres, et lesclasses moyennes en voie depaupérisation [et donc de dis-parition] ».

o Dans le même ordre d'idée,la revue païenne ethno-fasci-sante, Réfléchir et Agir (n° 37,hiver 2011), dédie ses pagescentrales à un roboratif dossier« pour une économie enracinéeet solidaire ». À l'origine, « latragédie économique [...] estd'abord celle d'une déposses-sion du pouvoir régalien de l'É-tat [qui] date du 3 janvier1973, lorsque Georges Pompi-dou [...] prit la décision que laFrance serait désormais dansl'obligation d'emprunter [...]sur le marché privé, avec tauxd'intérêt afférents, mettantfin, là, au droit de prêt à tauxzéro jusqu'ici effectué par laBanque de France ». C'est bienvu et on ne mesure pas à quelpoint l'impuissance publique

ayant résulté de cette funestedécision allait conduire à laprivatisation progressive de lachose publique, la souveraineté"bodinienne" cédant le pas à lagouvernance entrepreneuriale.

o Outre-Méditerranée uneautre crise bat son plein,conséquence politique et so-ciale de la crise économiquesusdite. Circonscrite au mondearabo-musulman, elle peutnéanmoins s'étendre à l'Europe,et donner lieu à des émeutescomme celles qui secouèrent laGrèce, sous la coupe régléed'une austère politique de ri-gueur, en 2010. Monde et Vie(n° 839, février 2011) proposedes entretiens avec « des per-sonnalités de terrain », partantdu principe que « c'est en cô-toyant l'homme de la rue quel'on prend le climat d'une na-tion ». De la bouche de té-moins avisés, on apprend qu'il ya lieu de craindre que l'Algériene subisse le même sort queses pays-frères mais avec desconséquences redoutables pourla France et l'Europe acculés àune pression migratoire due « àun énorme effet d'attractionamplifié par les liens qui unis-sent la France et l'Algérie ».En Afrique subsaharienne, cen'est pas mieux. La corruptionextrême des gouvernantsconjuguée à l'exaspération depopulations jeunes, diplôméeset/ou désœuvrées ne sont pasl'apanage des États du Moyen-Orient ou du Maghreb. Les rapports secrets du Dépar-tement d'État américain diffu-sés par Wikileaks, sélectionnéset rassemblées dans un hors-sé-rie du Monde (février 2011),font apparaître qu'au Sénégal,si « le président Wade a finipar prendre des mesures pourréprimer la corruption, [lesAméricains pensent] qu'il va selivrer à un numéro d'équili-briste, mettant en œuvre cesmesures tout en laissant ceuxqui sont habitués à piocherdans les fonds publics continuerà le faire afin de préserverleur loyauté à son égard ». Or,ce serait « sous-estimer l'im-portance de cette questionpour les bailleurs de fonds et,de plus en plus, pour les électeurs ». Ce prurit révolutionnaireguette les autres pays fronta-liers du Sénégal, sauf que lesrévoltes de la faim seront exa-cerbées par des rancœurs eth-niques et religieuses. Ensomme, la fin d'un monde hé-rité des processus de décoloni-sations, à défaut de la fin dumonde, étudiée dans le derniernuméro du Choc du mois (n°41,février-mars 2011) qui em-brasse la somme de toutes lespeurs. Un numéro moins ef-frayant que la réalité.

Aristide Leucate

Au fil de la presse

o JACQUES ATTALI

L'histoire fantasmée« La France n'est pas spécialement chrétienne », a déclaré Jacques Attali,qui joue avec l'histoire comme un enfant aux Lego, et construit un romannational au gré de ses humeurs. Rappel de quelques vérités.

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 7 z

Monde

C'est un rapport assez hallu-cinant qui a été adopté parle Comité économique et

social européen (CESE) les 15 et16 septembre 2010 et publié auJournal officiel de l'Union euro-péenne du 15 février 2011, sur lethème du « rôle de l'immigrationlégale dans un contexte de défidémographique ». Le seul titredu document est édifiant !

Jargon technocratique

Cet « avis exploratoire » est ré-vélateur de l'état d'esprit desélites européennes ainsi que dela coupure entre elles et lespeuples d'Europe. On peut no-tamment y lire « qu'il est néces-saire d'adopter une approche ho-listique pour faire face au défidémographique, en agissant surde nombreux aspects écono-miques, sociaux et politiques ».On appréciera l'emploi du terme« holistique », à rattacher au pro-cédé technocratique de tournuresjargonneuses qui rend la com-préhension par le profane pluscomplexe. « Approche globale »eût été sans doute plus appropriési ce rapport avait été adresséaux principaux intéressés (lespeuples d'Europe.)Et de continuer : « L'immigrationlégale fait partie de la réponsede l'UE à cette situation démo-graphique. [...] En dépit dequelques différences nationales,l'UE et les États membres doiventdisposer d'une législation ouvertequi permette une immigrationpour raisons de travail au traversde canaux légaux et transparents,tant pour les travailleurs haute-ment qualifiés que pour les acti-vités moins qualifiées. Comptetenu du défi démographique, leCESE est d'avis qu'il faut modifierles directives en vigueur et éla-borer de nouveaux instrumentslégislatifs. » On en revient au rai-sonnement assez calamiteux et

faux selon lequel face au vieillis-sement de la population euro-péenne, la seule solution seraitl'augmentation de l'immigration.

Approche partielle

Peu importe, donc, que les immi-grés, qui arrivent déjà en nombresur notre continent, ne consti-tuent pas une « force d'appoint »ayant pour finalité de « rajeunir »la population, mais, au contraire,en forment une nouvelle qui s'ysubstituera. Les Européens ne sau-raient se définir uniquement entermes de retraités ou d'actifs :l'Europe est une civilisation, unemosaïque de cultures, une iden-tité, une spiritualité... Les immi-grés y arrivent en masses tellesque, loin de s'y intégrer, ils im-portent avec eux leur modèle devie et leur culture, bien éloignésdu modèle européen. Or, conce-

voir les Européens en simple forcede travail dont on peut palier levieillissement par une simple sub-stitution d'individus venus d'autrescontinents, c'est bien là une ap-proche purement matérialiste etéconomique des choses, uneconception abjecte de l'hommeréduit au simple état de "ressourcehumaine". Il existe d'autres solutions faceau déficit démocratique : poli-tique nataliste, mécanisation del'industrie, recul équitable del'âge de la retraite, rationalisa-tion et amélioration des forma-tions professionnelles... À croireque, pour les auteurs de ce rap-port, l'immigration en Europen'est pas source de déracinement,de crise identitaire profonde, d'in-sécurité, de frictions commu-nautaires... Deux récents son-dages, plaçant le candidat d'ex-trême droite, Marine Le Pen, en

tête du premier tour de l'élec-tion présidentielle de 2012, au-raient peut-être dû alerter lestechnocrates européens. Il n'enest rien puisque ce rapport, pre-nant les devants, évacue la ques-tion d'un simple revers : « L'in-tolérance, le racisme et la xé-nophobie contre les immigrantset les minorités prennent de l'am-pleur en Europe. Il faut que lesresponsables politiques, les diri-geants sociaux et les médias fas-sent preuve d'un sens élevé desresponsabilités et d'une grandepédagogie politique et socialepour prévenir ces attitudes. Ilfaut aussi que les institutions del'UE agissent de manière décidéeet que les organisations de la so-ciété civile soient très activesdans la lutte contre ces idéolo-gies et ces comportements. » Toutun programme dont la nature au-thentiquement orwellienne peutfaire frémir ! Non seulement lesinquiétudes, bien légitimes, descitoyens européens face à l'im-migration sont réduites à desimples manifestations « d'into-lérance » et de « racisme », maisce rapport appelle les politiqueset les institutions à un travail de« pédagogie », doux euphémismesignifiant "propagande", quand ilne s'agit pas d'un arsenal législa-tif répressif et liberticide.

Populisme

Un tel rapport ne peut que sus-citer l'indignation. Pas de surpriseainsi à constater jour après jource que Éric Zemmour appelait « lamontée tranquille des droites po-pulistes en Europe » dont l'His-toire nous a pourtant si souventmontré qu'elles n'apportaient au-cun remède aux maux qu'ellesprétendaient combattre. Elles s'in-carnent aujourd'hui dans l'imagi-naire de nombre de gens, commele dernier bastion. Un bastionplein de promesses vengeressesdes damnés du rêve européen quiaura tout raté. Un gâchis dontl'oligarchie républicaine est plei-nement complice... mais dont lecontrecoup – insécurité, terro-risme, repli communautaire, des-truction du tissu social, islamisa-tion – sera intégralement subi parles jeunes générations d'Européenset par leurs enfants. n

Stéphane Piolenc

o UNION EUROPÉENNE

Fatalisme immigrationnisteUn rapport du Comité économique et social européen vient de le confirmer : en réponse au vieillissement de la population, les élites en sont réduitesà promouvoir une immigration accrue.

La crise politique suit soncours. À une allure d'escargot.

L'ANCIEN Premier ministre Jean-Luc Deheane (démocrate-chré-tien) va jusqu'à déclarer en sub-stance : « Peu importe qu'elles'éternise encore durant cinqcents jours. Cela vaut mieux quedes élections ! » En foi de quoiWouter Beke (également démo-crate-chrétien) conclut un pre-mier tour de table. Le négocia-teur royal laissant peaufiner lecalcul du budget pour le gouver-nement en affaires courantes(sans le concours de la NVA), ne

reprendra ses consultations quela semaine prochaine. Pour pi-menter cette actualité aussi éta-lée qu'un étang aux eaux dor-mantes, relevons que Bart DeWever a porté plainte contre un

psychiatre – wallon – pour avoirdit qu'il souffrait du complexe de "l'enfant-roi". Il y a des ego avec lesquels on ne plai-sante pas. q Ch.-H.B.

Une pluie de remontrancess'est abattue sur les Étatsmembres de l'Union euro-péenne le 14 mars.

PARMI les communiqués diffusésce jour-là par Bruxelles, troisconcernaient la France. Destina-taire d'un avis "motivé", Paris estprié d'ouvrir à la concurrence lesmarchés publics portant surl'achat de certaines données géo-graphiques ; aujourd'hui, en ef-fet, services et établissementspublics de l'État sont tenus desolliciter l'Institut géographiquenational (IGN). Par ailleurs, fauted'avoir renouvelé les autorisa-

tions d'une soixantaines d'établis-sements à fort potentiel de pol-lution, la France se voit trainéedevant la Cour de justice del'Union européenne (CJUE). La-quelle sera également appelée àse prononcer sur la "taxe télé-com" ; introduite en 2009 pourcontribuer au financement del'audiovisuel public, celle-ci vio-lerait la législation européenne,selon laquelle un tel prélèvementdevrait être directement lié à lacouverture des coûts de la régle-mentation du secteur des télé-communications. n G.D.

FéminismeeuropéenAu programme : prime d'as-surance, quotas dans les en-treprises et lutte contre les"stéréotypes".

LE VERDICT est tombé le1er mars : « La prise encompte du sexe de l'assuré en tant que facteur derisques dans les contrats d'as-surance constitue une discri-mination. » En conséquence,« la règle des primes et desprestations unisexes s'appli-quera à compter du 21 dé-cembre 2012 », a annoncé laCour de Justice de l'Union européenne. Bien qu'il mette les assureursdans un relatif embarras, cetarrêt n'a pas tempéré la fré-nésie féministe qui gangrènel'Union européenne. Dès lelendemain, en effet, la com-mission des Droits de lafemme du Parlement euro-péen s'est prononcée en fa-veur de quotas afin d'imposerune représentation égalitairede chacun des sexes dans lesentreprises. (Il s'agit toutefoisd'un simple avis.) Quant au Conseil des mi-nistres, il a adopté le 7 marsun « nouveau pacte européenpour l'égalité entre leshommes et les femmes ».Une fois n'est pas coutume, iln'y est pas question de« genre », mais de « sexe ».Cela excepté, le document nerecèle aucune surprise, bienque l'on continue de s'interro-ger quant au projet de« mettre un terme à laconception stéréotypée desrôles de l'homme et de lafemme ». À cet effet, « leConseil demande instammentque des mesures soient prisesau niveau des états membreset, le cas échéant, au niveaude l'Union ». En toute lo-gique, s'ils tenaient leur enga-gement, les Vingt-Sept ne de-vraient-ils pas réprimanderles parents offrant des pou-pées à leurs filles et réser-vant les voitures auxgarçons ?Dans un communiqué publié le8 mars, à l'occasion de lajournée internationale de lafemme,l'Élysée s'est en toutcas gardé de verser dans detelles extrémités : « Rappe-lant que l'un des facteurs d'in-égalité professionnelle restela maternité et qu'une partiede celles qui interrompentleur activité professionnellele font par manque de modede garde adapté, le présidentde la République a indiquéque le rythme de créations desolutions de garde seraitpoursuivi, ainsi que leur di-versification notamment ens'appuyant sur les crèchesd'entreprises. » q

Grégoire Dubost

Eaux dormantesen Belgique

Remontranceseuropéennes

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z 8 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011

Monde

Après de nombreuses mani-festations qui ont solennisé,en 2010, son quarantième

anniversaire, l'OIF (Organisationinternationale de la francopho-nie) s'est enfin installée dans denouveaux locaux au mois de fé-vrier dernier. Les situations decrise, de révolte, voire de révo-lution dans plusieurs de ses paysmembres pourraient être une oc-casion de montrer l'efficacité deses structures et d'être plus pré-sente sur la scène internationale.

Lycées français

Jean-Pierre Raffarin, représen-tant personnel du président de laRépublique pour la francophonie,considère que les enjeux diplo-matiques de la Francophonie sontde trois ordres : le développe-ment de l'offre d'enseignementde la langue française, le respectde l'usage du français dans les or-ganisations internationales et ladéfense des valeurs de diversitéet de respect des "droits del'homme" que l'OIF s'est fixé-comme objectif. Sur le premier point il estime quel'enseignement du français dansle monde souffre d'un déclin del'offre : les budgets limités ne per-mettent pas assez de créationsde nouvelles écoles françaises.« La demande est très forte etsouvent insatisfaite : quand uneécole nouvelle s'ouvre son effec-

tif d'élèves est presque immé-diatement au complet. » De trèsnombreuses villes du monde, etpas seulement dans les paysmembres de la Francophonie, de-mandent l'ouverture de lycéesfrançais... L'OIF ne peut en la ma-tière qu'agir comme conseil enmatière de gestion des priorités ;les véritables décisions en ma-tière d'investissements en hommeset en équipements dépendent duministère de l'Éducation nationalefrançais et, dans une moindre me-sure, de celui des Affaires étran-gères, pour lesquels ce n'est ap-paremment pas une priorité.Le Secrétaire général de la Fran-cophonie, M. Abdou Diouf, préciseque si « les moyens financiers [del'OIF] sont limités 1, comme danstoutes les organisations, celle-cidispose de moyens humains, deréseaux, d'expertise qui lui don-nent une influence certaine dansses États membres et au-delà del'espace francophone ». Il souligneque la Francophonie, c'est non seu-lement l'OIF, mais aussi des opé-rateurs universitaires, des médias(TV5), des associations commel'Association internationale desmaires francophones...

Triomphe de l'anglais

Dans les grandes organisations in-ternationales, l'utilisation de lalangue française connaît un dé-clin régulier, au bénéfice de l'an-glais. Les exemples sont nombreuxde responsables francophones quin'utilisent pas le français dansleurs interventions et discours pu-blics, alors que jamais la Franceet les pays de la Francophonien'ont eu autant de responsablesdans des postes stratégiques d'or-ganisations internationales. C'estnotamment le cas de M. Domi-nique Strauss-Kahn, dans ses fonc-tions de directeur général du FMI(Fond monétaire international) :

la plupart de ses interventions sefont en anglais, et il réserve lefrançais aux journalistes franco-phones qui l'interrogent en aparté,privilégiant l'anglais pour lesconférences de presse ouvertesau monde entier. Plusieurs am-bassadeurs de France se sont aussifait remarquer en prononçant desdiscours en anglais devant des au-ditoires dont celui-ci n'était pasla langue maternelle. « Nous nepouvons pas accepter que le fran-çais recule dans les organisationsmultilatérales ou internatio-nales », affirme M. Raffarin.« Nous ne sommes pas dans uncombat contre l'anglais », ajouteM. Abdou Diouf ; chacun cultiveson jardin et, si l'anglais est plusimportant quantitativement, lefrançais conserve ses qualités deprécision et reste, avec l'anglais,la seule langue a être parlée surles cinq continents.

Langue politique

Le dernier enjeu, selon Jean-Pierre Raffarin, est politique,« car le français est une languepolitique ». L'OIF s'est donnécomme valeurs les "droits del'homme", pour répondre au be-soin d'unité des peuples de laFrancophonie, et la "diversité",pour préserver leurs cultures etleurs civilisations propres. Mais,dans ce domaine, les événementsrécents, en Afrique noire, enAfrique du Nord et au MoyenOrient imposent une prise de pa-role de l'OIF, prise de parole quisemble avoir manqué ou avoir étési discrète que rares sont les mé-dias qui s'en sont fait l'écho.Le monde francophone avait plussouvent, ces dernières années,été agité par des coups d'État mi-litaires que par des soulèvementspopulaires. Les structures de l'OIFsont donc, de ce fait, mieux pré-parées à intervenir dans des cas

de prise de pouvoir autoritaireque dans des événements qui s'ap-parentent à des révolutions ets'accompagnent d'une disparition,au moins partielle, des institu-tions. Le fonctionnement diplo-matique de l'OIF, ses modes d'ac-tion, extrêmement administratifs,ses délais d'intervention sont maladaptés à l'action rapide dans despays où on ne sait plus qui dé-tient le pouvoir. En Côte d'Ivoire, où les capacitésde médiation de l'OIF auraient pu,semble-t-il, permettre son inter-vention, la Francophonie sembles'être limitée à une mission d'in-formation et de surveillance duscrutin présidentiel des 31 oc-tobre et 28 novembre 2010, s'ar-rêtant au lendemain du secondtour. Depuis le 5 décembre, dated'un communiqué dans lequel l'OIFappelle à reconnaître comme éluM. A. Ouattara, on ne trouve plusmention d'aucune action ou in-tervention de l'OIF, alors quel'Union africaine et l'ONU se mon-trent très actives. Dans d'autrescas, comme en Guinée (fin 2008,début 2009) ou en Mauritanie(août 2008 à juillet 2009), l'OIFavait joué plus rapidement un rôlepolitique, prononcé des sanctionset entamé des médiations.

Égypte et Tunisie

En Égypte, M. Abdou Diouf a prisacte, le 12 février, du départd'Hosni Moubarak et a demandéaux autorités de transition d'ap-profondir le dialogue avec l'en-semble des acteurs politiques etde la société civile, rappelant lasolidarité de la communauté fran-cophone et sa disponibilité à ac-compagner les autorités... Maisdepuis cette date, rien ne sembleavoir concrètement avancé. En Tunisie, le 17 janvier, un com-muniqué de presse du secrétairegénéral de l'OIF avait aussi prisacte des efforts déployés pour lamise en place d'une transition dansle respect de l'ordre constitu-tionnel, déploré « avec une grandetristesse et beaucoup d'émotionles actes de répression ayantconduit à la mort de plusieurs di-zaines de personnes », et expriméla pleine disponibilité de la Fran-cophonie pour appuyer et ac-compagner la transition en cours.Début mars, une délégation del'OIF conduite par M. Hugo Saada,délégué à la Paix, à la Démocra-tie et aux Droits de l'homme, aété reçue par le ministre de laJustice et il semble qu'une co-opération va s'établir. Au moment de la journée de laFrancophonie, le 20 mars, cetteannée dédiée à la jeunesse, le bi-lan semble un peu mince. L'OIFs'accroche à rappeler ses principesde démocratie, sans tenir comptede la situation particulière de paysdont les peuples ont avant toutmanifesté un désir de liberté etune révolte contre la corruption.On serait en droit d'attendre uneaction un peu moins réservée. n

Arnaud Danloux-Dumesnils

1 89 millions d'euros en 2009, dontun premier tiers est consacré auxfrais de fonctionnement, et un se-cond aux subventions et actions enfaveur de la langue française et del'éducation.

o OIF

Une Francophonie réservéeÀ l'approche de la journée internationale de la francophonie, qui sera célébréele 20 mars, l'enseignement du français dans le monde paraît insuffisant,et l'implication diplomatique de l'Organisation bien timide.

JEAN-PIERRE LAMY

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Hommage au princeAlireza d'IranL'intense fourmillement del'actualité internationale nenous a pas permis de donneren son temps toute son im-portance à la tragique dispa-rition, à l'âge de quarante-quatre ans, à Boston, duprince Chahpour Alirezad'Iran, fils cadet SM la chahbanou.

LE MALHEUR frappant unenouvelle fois la famille impé-riale d'Iran n'a pas échappé aufidèle fondateur du Mémorialdes Rois, notre ami ChapourSadler, lequel s'est rendu à lacérémonie du souvenir le sa-medi 19 février, avec septcents royalistes iraniens etdes personnalités euro-péennes, notammnent fran-çaises, dont la princesse Ger-sende, duchesse d'Orléans, etla princesse Chantal deFrance, baronne de Sambucyde Sorgue.Nous empruntons ici de longspassages au compte rendu decette cérémonie par ChapourSadler : « Intégralement of-ficié en persan, cet hommagestrictement irano-iraniencommémorait un prince per-san érudit et polyglotte, à laculture encyclopédique, di-plômé des prestigieuses uni-versités de Princeton, Colum-bia et Harvard, passionné decivilisation antique iranienneet du zoroastrisme, de sur-croît philologue accompli,maîtrisant toutes les langueset textes anté-islamiques dela Perse antique. Un insup-portable exil si loin de lamère-patrie assiégée et bar-barisée, assombri dès 1980par la mort de son augustepère le chah-in-chah, restau-rateur de la Perse antique,et en 2001 de sa sœur laprincesse Leïla, prématuré-ment disparue à l'âge detrente et un ans, avait consi-dérablement affecté celui quiétait second en ligne de suc-cesssion au trône d'Iran. Enprésence de SAI le princeChahpour Gholam Reza Pal-havi, frère du défunt chah etdes membres de la dynastiePalhavi, SM la chabanoud'Iran, bien qu'accablée par lechagrin, prononça elle-mêmeavec une dignité exemplaire àla fin de la cérémonie l'élogefunèbre de son fils cadet, nonsans rappeler qu'elle se sen-tait dans cette terribleépreuve plus que jamais soli-daire de toutes les mères en-deuillées d'Iran, délivrant unmessage d'espoir en réaffir-mant la mystique que "tantque le soleil brillera la lu-mière l'emportera sur les té-nèbres" et que "l'Iran rede-viendra la Perse". » q

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 9 z

Monde

Nous avions, malheureuse-ment peut-être, raison. Ettous, ou presque tous les

commentateurs de la grandepresse et les experts, vrais ou au-toproclamés, se sont trompés. Lerégime du colonel Kadhafi, aussiexécrable soit-il, a tenu. Ce lundimatin, tout laisse à penser qu'ilsortira vainqueur du chaos san-glant, véritable guerre civile, pro-voqué par la "révolution libyenne".Tout au moins provisoirement, carles choses vont sans doute bougerdans ce pays à moyen terme. Lesforces dites loyalistes semblentavoir pratiquement réduit les in-surgés, sauf à Benghazi. À défautd'une intervention extérieure, lagrande cité de l'Est ne pourraguère tenir longtemps. Dimanchesoir, Tripoli a même demandé auxgrande compagnies pétrolières dereprendre les exportations du"brut". Coup médiatique, certes,mais signe d'un revirement de si-tuation.

Des milliers de victimes

La principale victime de cet épi-sode sanglant est, sans le moindredoute, le peuple libyen, avec desmilliers de victimes, d'un côtécomme de l'autre, et des milliardsde dégâts qu'il faudra longtempspour réparer. La Libye en porteraà jamais les stigmates. La pro-position du président Sarkozy pourune intervention militaire franco-britannique afin de soutenir une"résistance" aux contours impré-cis, a soulevé l'approbation en-thousiaste de BHL et sans doutede quelques dîneurs en ville,entre poire et fromage, avantqu'ils ne passent à un autre su-jet ! Était-elle possible ? Peut-être. Était-elle souhaitable ouproductive ? On peut en douter

sérieusement. Les conseillers duprésident, voire lui-même, igno-rent peut-être que, dans la mé-moire collective des peuplesarabes, ce tandem (franco-bri-tannique) rappelle les deux puis-sances impériales du XIXe siècle ;leur action aurait soulevé unevague d'indignation aux consé-quences politiques et écono-miques imprévisibles dont laFrance aurait été la principalevictime, puisque son président enaurait été à l'origine. Le régimedu "colonel fou" aurait été trans-formé en victime et de nom-breuses voix à travers le monden'auraient pas hésité à rappelerles relations "très spéciales" en-tretenues tant à Londres qu'à Pa-ris avec Tripoli et à s'étonner decette soudaine indignation. En

outre, sans mandat de l'ONU,donc décidée de manière unila-térale, elle aurait été totalementillégale, comme l'action anglo-américaine en Irak l'avait été dé-noncée, à juste titre, en sontemps, par la France et de nom-breuses autres puissances. C'estpeut-être, en ayant consciencede son impossibilité, que le pré-sident français en avait lancél'idée, pour des motifs de poli-tique intérieure et afin de désar-mer par avance la gauche caviar,il y a encore peu admiratrice deKadhafi et de son régime alorspro-soviétique, "révolutionnaire"et "progressiste". Mais, il n'est passûr que le pays réel, la Franceprofonde, aurait apprécié l'im-plication de son armée et de sesfils et filles dans un nouveau

conflit sanglant.Passons, car lemal est évité. Pour le moment.L'autre idée proposée ici ou là,on en a beaucoup parlé à Wa-shington avant de calmer pro-gressivement le jeu, était de créerune zone d'exclusion ou de sécu-rité aérienne au-dessus du terri-toire libyen afin d'empêcher l'avia-tion du colonel Kadhafi de frap-per les insurgés. Pour ce, il auraitfallu détruire au préalable – maisà quel prix ? – la défense anti-aé-rienne et les bases militaires li-byennes et neutraliser son avia-tion. En fait une intervention mi-litaire, par l'aviation et la marine,sans faire entrer les troupes enterritoire libyen. Encore faudra-t-il un mandat de l'ONU. Or, il està peu près sûr, à l'heure où nousécrivons que Moscou et Pékin s'y

opposeraient et que le Conseil desécurité ne pourrait pas donnerce mandat à l'OTAN ou à un groupede pays. Il y a peu de doute quele régime de Tripoli ne pouvaitignorer ces considérations. Sonoffensive violente et rapide pourréduire l'insurrection l'expliqueclairement. Si, d'ici quelquesjours, la situation "se normalise"au moins en apparence, et si le"conseil de transition" de Benghaziest contraint de se replier sur Pa-ris ou Londres, on voit difficile-ment comment ces supputationspourront continuer. On sera de-vant le fait accompli. C'est l'hy-pothèse qui a été émise par lechef des services de renseigne-ment américains devant un co-mité du Sénat des États-Unis. IIfaudra "faire avec" le régime li-byen actuel, avec ou sans le "co-lonel fou", pour un certain tempsau moins.

Faire avec Kadhafi...

Si dans les tout prochains jours lerégime de Tripoli ne se disloquepas, hypothèse au demeurant peuprobable, il faudra organiser detoute urgence un sauvetage dupeuple libyen, par l'envoi d'ob-servateurs "internationaux" – sur-tout arabes et africains, mais passeulement –, par une aide huma-nitaire rapide et efficace, et sur-tout empêcher la "purge" sanglantepromise par Kadhafi aux insurgés.Ça sera dans l'intérêt bien com-pris des Libyens, victimes de cesaffrontements sanglants, mais éga-lement dans l'intérêt de l'Europe,et de la France. Car, dans le cascontraire, les immigrants libyenss'ajouteront aux milliers de Tuni-siens et autres peuples du Sud dela Méditerranée, qui commencentà affluer vers le nord de cettemer. Lorsqu'ils seront non des mil-liers mais des dizaines de milliers,aucune puissance, aucun discoursferme, aucun coup de mentonélectoraliste ne pourra les rete-nir. Puisque la "riposte" militairen'a pu avoir lieu, malheureuse-ment ou heureusement, chacunjugera selon son opinion, il esttemps de passer à l'action diplo-matique et humanitaire urgenteet efficace. n

Pascal Nari

Tour d'horizon du monde arabeLa vague déclenchée en Tunisie, puis en Égypte – à Tunis avecl'encouragement, au Caire avec l'aidedes Américains – frappe tout le mondearabe et continue. Même là où les"apprentis sorciers" ne le souhaitaient pas.

AU YÉMEN, base arrière d'El-Qaïda où denombreux soldats américains sont sta-tionnés, les troubles continuent malgréune dure répression. Le président Abdal-lah Saleh a de nombreux partisans ainsique les forces de l'ordre avec lui et ré-siste. Ses adversaires ne désarment pas.On pourrait aller vers une sorte de guerrecivile. On comprend l'inquiétude des Oc-cidentaux, surtout de Washington. Dans l'archipel de Bahrein, la majoritéchi'ite, 70 % de la population, sans douteagitée par Téhéran, commence à récla-

mer le départ de la dynastie Khalifa etl'instauration de la république. La police,composée surtout de sunnites et d'arabesd'autres pays, continue à réagir avec vio-lence. Le sang coule. Mais la proximité del'Arabie séoudite, sanctuaire pétrolier, mo-dère les droits de l'homistes. On en parleaussi peu que possible. Cela ne va pas cal-mer la situation qui est explosive.

L'Arabie séoudite menacée

Même l'Arabie séoudite n'est pas à l'abri.Le roi Abdallah, quatre-vingt-six ans etmalade, rentré du Maroc où il se reposaitdepuis trois mois, a fait distribuer 36 mil-liards de dollars sous forme de diversesaides sociales et donné quelques promessesde réforme. Cela a apaisé les tensions,mais malgré la dureté de la police desfoyers d'agitation subsistent.Koweit, autre richissime pétro-monarchie,connaît aussi des troubles. On réclamedes réformes ; et surtout les étrangers,presque tous arabes et surtout palesti-niens, demandent un statut civil et... la

naturalisation, ce qui modifierait totale-ment la composition de la "populationélectorale" et la donne politique.Au Caire, l'armée et les structures de l'É-tat maintiennent un minimum d'ordre. La"révolution" a triomphé selon les Occi-dentaux, mais on se bat et on se tue entreses partisans et ses adversaires, parfoisdix tués par jour. Les Coptes sont atta-qués. Les Frères musulmans, dont AlainJuppé a rencontré les représentants, at-tendent leur heure, qui, malheureuse-ment, pourrait venir très tôt. Tout commeKhomeyni lorsqu'il était en France, les"Frères" ont tenu au ministre français unlangage "démocratique", le fameux Tahieh– mentir pour réussir – des islamistes. Celarassure quelques Occidentaux. Ils dé-chanteront bientôt. La situation écono-mique s'aggrave du fait de l'absence destouristes qui faisaient vivre six millionsde personnes, les vraies victimes de la ré-volution. Le calme est précaire.En Tunisie, même avec un nouveau Pre-mier ministre, rien ne va. Il faut à toutprix que les touristes reviennent. Or, sans

la stabilité ni la sécurité, qui commenceà être un lointain souvenir, pas de tou-ristes. Sans touristes, pas de travail. Ladémocratie ne fait pas vivre les gens. Cin-quante partis politiques vont participeraux futures élections. On devine qui ensera le principal bénéficiaire, El nahola,section tunisienne des Frères musulmans...Sans commentaire.

Espoir au maroc

Un peu moins de pessimisme quant au Ma-roc. Le roi a fait des propositions solideset équilibrées de réformes. L'opinion leura réservé un accueil très favorable. Lamonarchie y est un élément de stabilité.Certes, Mohamed VI n'est pas Hassan II,mais il a manœuvré avec intelligence. Onne pourrait que s'en réjouir.La crise palestinienne continue. Le Libanest loin d'être calme et en Algérie, croyons-nous, le feu est sous la cendre. Le mondearabe est agité, c'est le moins que l'onpuisse dire. Ce qui s'y passe ne devraitpas nous laisser indifférent. n P.N.

o RÉVOLUTION

Un immense gâchis en LibyeEn dépit de l'enthousiasme manifesté par les médias occidentaux lorsque se déclencha la révolte en Libye, le colonel Kadhafi tient bon. D'autant que les perspectives d'intervention militaire apparaissent peu réalistes... Explications.

Si dans les tout prochains jours le régime de Tripoli ne se disloque pas, hypothèse au demeurant peu probable, il faudra organiser de toute urgence

un sauvetage du peuple libyen.

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cause de Paris est lui-même unParisien. Quand il s'efforce deconvaincre, c'est en attirant vonCholtitz au balcon de l'hôtel Meu-rice, en lui montrant Paris, en luien parlant charnellement avecpassion. Il n'y a pas que le diplo-mate. Il y a surtout l'amoureux de"sa" ville.Face à lui, un aristocrate, soldatde métier et de tradition. Troisfois blessé pendant la GrandeGuerre, von Choltitz, lors de laSeconde Guerre mondiale, parti-cipe aux campagnes de Pologne,de Hollande et de Belgique. Il seraen Russie, où il n'hésite pas à ra-ser Sébastopol. Ce seront ensuiteStalingrad, l'Italie et la Norman-die. Et voici l'épilogue, Paris ! NielsArestrup, physiquement, morale-ment, incarne à tel point son per-sonnage qu'il le ressuscite. Il lefait agir, penser, vivre. Devant Dus-sollier-Nordling, il s'arme de l'hé-ritage d'une famille de soldats.

Chez les von Choltitz, on ne dis-cute pas les ordres. Peu à peu,cependant, le dialogue se noue.L'officier résiste, puis fléchit pasà pas, ce qui fait toute l'intensité.Pour justifier la destruction de Pa-ris, il y a celle des villes alle-mandes : Hambourg, Manheim,Berlin – il n'y a pas encore euDresde. Mais soudain, la digue serompt. Von Choltitz a vu Hitler ily a peu. Celui-ci n'est plus l'homme"fascinant" qu'il était. « De la baves'écoulait de ses lèvres. Et son re-gard, Nordling... Son regardn'avait plus rien d'humain... C'estcet homme-là qui, pour s'assurerla fidélité de ses généraux, lesmenaçait de faire tuer leur fa-mille s'ils "capitulaient". »

Une fissure dans la cuirasseSa famille,sa femme, ses enfants,voilà le défaut de sa cuirasse.Contre l'assurance que les siensseront, clandestinement, conduitsen Suisse pour échapper à la Ges-tapo, von Choltitz renonce à exé-cuter l'ordre d'Hitler. Muré dansdes certitudes qui s'écroulent sousla parole de Dusslolier-Nordling,Arestrup-von Choltitz convainc.Aussi remarquable que soit Dus-sollier, c'est peut-être Niels Ares-trup qui laisse l'impression la plusforte, plus plus durable. La dé-cision repose sur lui. Que le cou-peret s'abatte ou demeure sus-pendu. Nous connaissons l'his-toire, nous savons comment ellese termine. Il faut un art con-sommé pour nous faire douter dece qui sera. Arestrup y réussit.Dussollier l'y a conduit. À voir ab-solument. n

Charles-Henri Brignac

3 Jusqu'au 17 avril, du mardi au sa-medi à 21 heures ; représentationsupplémentaire à 8 heures le samedi.

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Arts & Lettres

S'il est une pièce à voir, c'estDiplomatie, au théâtre de laMadeleine, avec André Dus-

sollier et Niels Arestrup. Tout Pa-ris s'y presse. Et plus encore. Onvient de province pour ne pasmanquer un spectacle de cettequalité. On a raison.

Deux acteurs talentueux

Le scénario mêle la réalité à lafiction. Davantage : il les soudeà tel point qu'ils ne peuvent êtredissociés. Le 23 août 1944, Hitlerdonne l'ordre à Dietrich von Chol-titz de détruire Paris. Le docu-ment en provenance du grandquartier général du Führer a letranchant d'un verdict sans ap-pel : « Paris ne doit pas tomberaux mains de l'ennemi, ou l'en-nemi ne doit trouver qu'un champde ruines. » Gouverneur généralet chef des troupes allemandesdu Grand Paris, von Choltitz va-t-il obtempérer ? Un homme va lefaire fléchir et renoncer. Il s'ap-pelle Raoul Nordling et est consulgénéral de Suède à Paris. L'his-toire est-elle connue ? Pas tout àfait. Car, dans la réalité, aprèsavoir rencontré Nordling, c'estseul, dans le secret de sa con-science, que von Choltitz a prissa décision. Cyril Gely, l'auteur dela pièce, imagine un acte uniqueconstruit autour du dialogue entreles deux protagonistes. Ce faisant,il autorise à s'interroger sur sa vé-rité virtuelle. Les deux acteurs épousent leurpersonnage au point que les spec-tateurs les identifient à eux. Lejeu est fondé sur leur psycholo-gie respective. Nordling est unfranco-suédois. Sa mère était fran-çaise. Né à Paris, il a fait sesétudes à Janson de Sailly. Safemme était française. Juive,comme le veut le scénario ? Sabiographie ne le dit pas. Mais lediplomate suédois qui plaide la

o THÉÂTRE

Paris en sursisConfronté à la déroute de ses troupes, Hitler ordonne la destruction de Paris.André Dussollier s'entretient avec Niels Arestrup pou le convaincre d'épargnerla ville... Un dialogue intense, qui emporte toute l'attention du spectateur.

PARMI les locutions d'apparenceinoffensive et même indiscu-tables dans leur emploi quoti-die, il y a « il faut », « il nefaut pas » et « il faut bien ».« Il faut » est hautain, pé-remptoire et parfois grimaçant.« Il ne faut pas » est insoup-çonnable dans sa vertu impéra-tive ; c'est un garde-champêtredu temps jadis. Au contraire,« il faut bien » est presquecondescendant, doucereux,comme un peu honteux de satimidité ; et, comme diraitl'ami Polydore, cette expressiona quelque chose de « péteux ».Nous avons tous appris parcœur le propos de Philinte dansLe Misanthrope de Molière :« Mais quand on est du monde,il faut bien que l'on rendequelques dehors civils quel'usage demande. ». À monsens, Philinte bafouille noble-ment, et ce n'est pas sans rai-son. L'ami Polydore aime à pro-clamer : « Le bafouillage atoujours mauvaise con-science ! » Le style de Philinteappartient au genre des mon-danités balbutiantes, si l'on neveut pas dire « bafouillantes »,et Molière a écouté parler sonpersonnage avec une clair-voyance et une exactitude quel'on retrouverait en maintsautres dialogues de sonthéâtre.« Il faut bien », dit encorel'ami Polydore, « implique tou-jours une molle sympathiepour les délinquants et pourles imbéciles », parfois pourles deux en même temps. Lemisanthrope Alceste, en enten-dant proférer la formule, a en-vie de s'écrier : « Qui donc adit "il faut bien" ? Mahomet,Joseph Prudhomme, ou Mon-sieur Fenouillard ? » Cetaxiome commode et perfide af-fecte un air de certitude et

d'autorité, alors qu'il tend à je-ter le discrédit, voire l'interdit,sur tout recours au principed'autorité supérieure. Avec« bien » il révèle sa tendancecapitularde alors que le seul «il faut » pouvait faire croire àla conviction de l'orateur.Dans une optique assez voisinemais apparemment contraire,je joindrai à mon tableau dechasse linguistique l'interroga-tion autoritaire, rageuse etsans réplique : « De queldroit ? » La belette de la fablede La Fontaine use de ce« droit » brumeux pour embar-rasser l'infortuné lapin. Lesémules et compagnons de Ro-bespierre, tout comme les ac-tuels nostalgiques de Staline,le Petit Père des peuples, ex-cellent également à se récla-mer de droits aussi chimériquesque théoriquement imprescrip-tibles. On le regrette pourl'harmonieuse image de la ba-lance comme symbole du droit.Je tiens la balance pour un élé-ment essentiellement poétique,depuis le temps où, dans lasalle à manger d'un bon hôteld'une petite ville de l'Ouest,j'admirais une belle balance decuivre sur la cheminée : l'hôtels'appelait, et sans doute s'ap-pelle encore, hôtel du Tribunal.Après tout, la silhouette de labalance rappelle une croix etc'est, je crois, Maurras, quiproclamait que le vrai droitétait divin... Nous avons besoin de la fleurde lys consolatrice, cetteimage aimable et symétriquedans sa composition. Si nos so-ciétés françaises présentent undroit authentique et par consé-quent divin, le lys doit fleurirsur la conscience de nos droitset de nos devoirs. q

Jean-Baptiste Morvan

EXPOSITION

Jardins romantiquesIl y a déjà dans l'air un parfum de printemps.Mais si l'air paraît encore un peu frais, pour-quoi ne pas satisfaire vos envies de jardins envous rendant au charmant musée de la Vie ro-mantique, rue Chaptal à Paris ?

UNE BIEN JOLIE exposition vous y convie pour vousentraîner, au rythme de la flânerie, dans les alléesdu jardin des Lumières au parc romantique. Quevous aimiez ou non Jean-Jacques Rousseau, admi-rons le buste sculpté par Houdon. Même si ses Rê-veries d'un promeneur solitaire ne sont pas lesnôtres, n'en boudons pas pour autant les allées ver-doyantes d'Ermenonville. Le duc de Chartres, lui, cousin de Louis XVI, s'offritun jardin près du hameau de Monceau, initialementordonné "à la française". Il le fit transformer parLouis Carrogis, mieux connu sous le nom de Car-montelle. "Jardinier", mais peintre également, ce-lui-ci en offre une vue dans une huile sur toile. Un

moulin « hollandais », une vigne « italienne », une« tente tartare », un minaret et un « tombeau égyp-tien » disent l'intention de « réunir tous les tempset tous les lieux », ce qui manque un peu de sim-plicité... J'avoue préférer le parc de la Malmaisonoù Joséphine aimait s'entourer de roses qui firentla gloire de Redouté lorsqu'il les peignit.

Un grand cierge de fleurs

Au fil de la flânerie, relevons ce tableau de la reineHortense à Aix-les-Bains. Il est empreint de mé-lancolie. De celle ressentie par le modèle d'AntoineDuclaux pleurant la mort d'une amie emportée parles eaux tourbillonnantes de la cascade de Grésy.Gagnons, bien des années plus tard, le château deNeuilly, devenu la propriété de Louis-Philippe, quil'acheta alors qu'il était encore duc d'Orléans. An-toine Chazal a signé une huile sur toile où l'on ad-mire un yucca gloriosa en majesté. Sous un soleilfroid, le yucca fait figure d'un grand cierge de fleursblanches. Sa flamme florale illumine cette jolie ex-position consacrée à une nature modelée par leshommes. Des hommes de goût. n Ch-H.B.

Sur des locutions incertaines et perfidesUn soir de méchante humeur, j'ai rencontré des expressions du commun langage français qui m'ont paru douteuses, équivoques, et même chafouines, tartuffières et quasi-vénéneuses.

3 Musée de la Vie romantique, 16 rueChaptal, Paris 9e. Tous les jours, sauflundi et jours fériés, de 10 heures à18 heures. Tél. : 01 55 31 95 67.

la reine Hortense à Aix-les-Bainspar Antoine Duclaux

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 11 z

Arts & Lettres

La philosophie de l'histoire quiprévaut dans nos sociétés oc-cidentales, imprégnée du

dogme du progrès, du respect desdroits de l'homme, du modèle dé-mocratique et libéral, apparaît,s'agissant des minorités chré-tiennes en pays musulmans, bat-tue en brèche par la réalité ; l'in-tervention américaine en Irak, lesmouvements insurrectionnels, loind'améliorer le sort des chrétien-tés locales, ont marqué le débutd'un calvaire dont elles désespè-rent de voir le bout. Pour prendrela mesure du phénomène, il fautse référer à l'ouvrage de ClaudeLorieux, Chrétiens d'Orient enterres d'islam, paru en 2001,avant la tragédie du 11 Septembreet ce qui s'ensuivit. Constat ac-cablant.

Synthèse remarquable

Spécialiste du Proche-Orient, Lo-rieux avait eu de nombreuses oc-casions de visiter les Églises deTurquie, Irak, Syrie, Liban, Jor-danie, Israël, Palestine, Iran,Égypte, Soudan, et même les com-munautés réduites à la clandesti-nité de la péninsule arabique. Sil'on excepte le drame des chré-tiens de Khartoum, qui devraittrouver un dénouement heureuxdu fait de la partition du pays, lasituation, partout ailleurs, loin des'améliorer, n'a cessé de se dé-grader tandis que les mouvementsislamistes, favorisés par la chutedes dictatures laïques, prenaientde l'ampleur. Le cas irakien endonne l'exemplaire démonstrationpuisque des communautés, pro-tégées par Saddam Hussein, sesont, depuis la chute du régime,retrouvées exposées à la vindictede leurs concitoyens musulmans,acculées à la fuite ou à la mort.Par ces aspects liés à l'actualité,le travail de Lorieux a vieilli, maisreste, outre un instantané de l'étatdes chrétientés d'Orient avant2001 qui a pris valeur historique,l'une des plus claires et remar-quables synthèses tentées sur lepassé de ces communautés, leursespoirs, leurs rêves, leurs mal-heurs. Ce qui en fait un ouvragede référence indispensable.Récent, celui de Jean-Michel Ca-diot, Les Chrétiens d'Orient, nesaurait ni l'égaler, ni le rempla-cer. Certes, il fait le point sur centmillions de catholiques, ortho-doxes, nestoriens, coptes, maro-nites, syriaques, chaldéens, pro-testants, invraisemblablement regardés, tant par leurs com-patriotes que par la communautéinternationale, comme convertisà la foi de l'Europe, eux qui de-meurèrent fidèles à leur religionancestrale quand leurs voisins pas-saient à celle du conquérant arabeou turc. Certes, il y a là des pointsde vue intéressants. Hélas, toutcela apparaît embrouillé dans des

pages où se mêlent considérationshistoriques trop vastes, jugementsdésolés sur l'incapacité chrétienneà se fondre dans un œcuménismefraternel, et impuissance à cer-ner le sujet, de sorte que l'on nesait plus ni où ni quand com-mencent et finissent ces chré-tientés d'Orient.

Épuration ethnique

Si l'on se souvient des massacresd'Arméniens orchestrés, dès 1896,par Abdul Hamid, puis, en 1915,par les Jeunes Turcs désireux d'enfinir avec une communauté soup-çonnée de tendre la main aux Al-liés, l'épuration ethnique de la Ci-licie, en 1909, prise entre cesbains de sang, a sombré dans l'ou-bli. La réédition des reportagesde la journaliste arménienne Za-bel Essayan, Dans les ruines, re-met en pleine lumière ces mas-sacres d'Adana. Il demeure mal-aisé de comprendre les raisons dela sauvage flambée de violencequi tua trente mille Arméniens,souvent rescapés des tueries de1896 réfugiés dans la paisible Ci-licie. Arrivée sur les lieux deuxmois après ce déchaînementd'atrocités, Zabel Essayan, intel-lectuelle francophone pénétréed'idéologies des lumières, con-stata, ramenée brutalement à sesorigines, ce dont la barbarie hu-maine est capable. Son récit estun témoignage halluciné, incan-tatoire : tueries, tortures, enfantset adolescentes convertis deforce, abjurations de désespérésque l'apostasie ne sauva pas tou-jours, détresse des survivants, hé-roïsme d'hommes qui firent têteaux égorgeurs et réussirent par-fois à couvrir la fuite des leurs,

avant de succomber sous lenombre, ou d'être pendus pourrébellion... Tout cela embléma-tique de la tragédie arménienne,du cortège de souffrances d'unpeuple qui paya cher l'honneurd'avoir été le premier royaumechrétien du monde, mais d'unetelle force, d'une telle violenceque ce texte terrifiant devienthymne poignant à la mémoire detoutes les victimes de toutes lestueries d'une Histoire définitive-ment tragique.Aux massacres d'Arméniens suc-céda l'exode des Grecs, achevé en1955, de sorte qu'il ne demeuredans ce qui fut l'Empire byzantinqu'une poignée de chrétiens dis-persés, en but aux persécutionsd'un État décidé à éradiquer cequ'il considère comme des mino-rités allogènes potentiellementhostiles. Cette réalité, occultéeà l'heure où l'on cherche à nousconvaincre de l'intérêt d'une ad-hésion de la Turquie à la Commu-nauté européenne, contrebalancerêveries et sympathies engendréespar la lecture de Loti ou Farrère...Sébastien de Courtois connaîtcette attristante ambivalence etcherche à la comprendre à tra-vers un Périple en Turquie chré-tienne aux accents de requiem. Ily a cette haine qui ne désarmepas, absurde, sanglante, illustréepar l'assassinat annoncé d'un jour-naliste arménien coupable de rap-peler certains faits, dire certaineschoses, que les poursuites judi-ciaires n'avaient pas fait taire. Leschrétiens assassinés en Turquie nesont pas rares ; cela explique laprudence des autres. Ces expro-priations qui privent les Églises deleurs biens et favorisent leur dis-parition. Entre un présent in-

quiétant et un passé grandiosedont les traces deviennent indis-cernables dans un pays qui ne fa-vorise pas la restauration de mo-numents chrétiens, la promenade,documentée, passionnante, jamaishostile ni partisane, invite à seposer nombre de questions, d'unebrûlante actualité.

Voyage en Palestine

Qui s'est rendu à Bethléem voilàtrente ans se souvient de l'accueilchaleureux réservé aux pèlerinspar les Palestiniens chrétiens, ma-joritaires. Ils ne représentent plusaujourd'hui que 10 % d'une popu-lation arabe prise au piège de l'In-tifada et de l'occupation israé-lienne. Les autres ont eu le choixentre l'exil et la conversion à l'is-lam qui leur rendait une identitémalmenée de toutes parts. Telleest l'une des réalités de ces Chré-tiens en Terre Sainte dont les mé-dias ne parlent que pour moquerleurs divisions et leurs querellesautour du Saint Sépulcre. Le mé-rite de Catherine Dupeyron estd'aller plus loin, de soulignerqu'au-delà d'une diminution évi-dente de leur nombre, nous as-sistons à une redistribution descartes. Tandis que disparaissentles Églises orientales, surgissentdes mouvements évangélistes apo-calyptiques venus chercher dansla vallée de Josaphat les signesdes derniers temps... Tout celaéclaire un aspect intéressant d'unecertaine politique américaine auProche-Orient. Il n'y a pas de quoiêtre rassuré.Le triomphe mérité du film de Xa-vier Beauvois, Des hommes et desdieux, a popularisé la quête mys-tique et fraternelle du prieuré

trappiste Notre-Dame de l'Atlas.Donné envie, aussi, de mieuxconnaître ces moines qui avaientchoisi de rester dans une Algériedéchirée au risque d'en mourir.Force est cependant d'admettreque les ouvrages remis en venteà cette occasion se révèlent dé-cevants. Passion pour l'Algérie del'Américain John Kiser a servi deréférence durant le tournage.Cela s'admet si l'on considère lesoin mis à retracer le parcours,le quotidien, les motivations, lavie des sept frères martyrs. Cetterecherche est unique, énorme,précieuse. Mais Kiser est améri-cain. Il pense, analyse, commenteen Américain dont l'ignorance pro-fonde, quasi-invincible des façonsd'être et de l'histoire du reste dumonde n'entame pas l'arroganceet la prétentieuse bonne con-science. Peu importe qu'il ne sai-sisse rien à ce que furent les rap-ports franco-algériens. Il s'est faitsa vision des événements, anti-colonialiste et sereine. Il explique,péremptoire, que, face à un FLNbon et héroïque, l'armée françaiseet l'OAS ont multiplié les crimes,avant de pousser leurs compa-triotes à fuir le pays indépendantet fraternel qui allait naître. C'estodieux. Reste la possibilité de sau-ter les premiers chapitres. Si lecœur vous en dit.

L'Église en Algérie

Publié à l'origine sous le titre Uneespérance à perte de vie, le re-portage que Jean-Luc Barré consa-cra à l'été 1996 à l'état de l'Égliseen Algérie ressort sous le label Tib-hirine. Or, il n'est presque jamaisquestion des moines dans ce textequi met en évidence les désillu-sions de prêtres, religieux, pré-lats jadis acquis à la cause FLN,par idéalisme chrétien sincère,semble-t-il, pour qui le réveil futamer et sanglant. C'est finalementà un musulman, Kebir Ammi, quel'on doit le livre le plus fraternel,le plus consolant sur les relationsentre les deux fois et les deux cul-tures. Sur les pas de saint Augus-tin est un périple attachant, d'unbord à l'autre de la Méditerranée,à la recherche de l'enfant de Tha-gaste, avec les Confessions pourguide. Écrit dans une langue dé-licieuse, ce texte donne l'indicibleregret de ce qui aurait pu, de cequi aurait dû être... n

Anne Bernet

3 Claude Lorieux : Chrétiensd'Orient en terres d'islam, Perrin ,370 p., 21,19 s. 3 Jean-Michel Cadiot : Les Chré-tiens d'Orient, Salvator, 335 p.,22,50 s.3 Zabel Essayan : Dans les ruines,Phébus, 302 p., 23 s.3 Sébastien de Courtois : Péripleen Turquie chrétienne, Presses dela Renaissance, 270 p., 18,50 s.3 Catherine Dupeyron : Chrétiensen Terre Sainte, Albin Michel,285 p., 19 s.3 John Kiser : Passion pour l'Algé-rie, les moines de Tibhirine, Nou-velle Cité, 480 p., 24 s.3 Jean-Luc Barré : Tibhirine, uneespérance à perte de vie, Fayard,165 p., 12 s.3 Kebir Ammi : Sur les pas de saintAugustin, Presses de la Renaissance,155 p., 8 s.

o CHRÉTIENS D'ISLAM

Au risque du martyreDans un monde musulman déstabilisé, les chrétiens, assimilés à l'ennemi occidental, sont redevenus les cibles privilégiées du fanatisme haineux, comme le prouve l'actualité des derniers mois. Mais le phénomène est ancien, et récurrent.

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Histoire

MÉMOIRE

Le nain des JardinQuand le petit-fils d'un "collabo"vocifère contre sa famille.

PARCE QUE SON PAPY n'a pas fait de la ré-sistance, le nain des Jardin (Alexandre) engardait depuis longtemps un stigmate in-famant dont il a voulu se purifier dans unlavage de linge familial en public, intituléDes gens très bien. Attaquer son illustrefamille tout en surfant sur la notoriété dunom qu'il porte, c'est à coup sûr faire scan-dale sans grand risque, tout en affirmantsa supériorité morale sur les générationsprécédentes. Voici un jeune homme, au-teur de quelques bluettes qui ont été à la

mode, qui s'est grisé d'une célébrité depaille, qui en demeure assoiffé et ne saitplus comment faire encore parler de lui.Le voilà donc assassinant son père, PascalJardin, écrivain et scénariste de cinémaréputé, et son grand-père, Jean Jardin,dit le Nain Jaune, qui fut chef de cabinetde Pierre Laval à Vichy. Et pas même pourun bon mot, juste un mauvais livre. L'es-sentiel étant d'avoir les sunlights du pari-sianisme bobo-intello-gaucho braqués surlui encore un instant.D'où parle-t-il ce procureur arrogant ? Quelssont ses mérites pour s'ériger en juge in-transigeant des valeurs d'une société écar-telée à une époque où il n'était pas né ?On pense à l'apostrophe de François Mit-terrand à Georges-Marc Benhamou :« Jeune homme, vous ne savez pas de quoi

vous parlez. » Celui-là nous ferait croirequ'il aurait, lui, pris le maquis dès 1940. Ilhurle au fascisme pour qu'on sache de quelbois de résistant il se chauffe et ce n'estpas lui qui protesterait contre l'exclusionde Céline des célébrations nationales. Ledouloureux devoir de mémoire auquel ilprétend se livrer n'a qu'un but : gonfler unpeu plus son ego déjà hypertrophié.

Écouter Saint-Exupéry

À son intention ces lignes de Saint-Exupéry,tirées de Pilote de guerre : « Puisque jesuis d'eux, je ne renierai jamais les miens,quoi qu'ils fassent. Je ne prêcherai jamaiscontre eux devant autrui. S'il est possiblede prendre leur défense, je les défendrai.S'ils me couvrent de honte, j'enfermerai

cette honte dans mon cœur, et me tairai.Quoi que je pense alors sur eux, je ne ser-virai jamais de témoin à charge. Un marine va pas de maison en maison instruirelui-même ses voisins de ce que sa femmeest une gourgandine. Il ne sauvera pas ainsison honneur. Car sa femme est de sa mai-son. Il ne peut s'ennoblir contre elle. C'estune fois rentré chez lui qu'il a le droit d'ex-primer sa colère. Si j'accepte d'être humi-lié par ma maison, je puis agir sur ma mai-son. Elle est de moi comme je suis d'elle.Mais si je refuse l'humiliation, la maisonse démantibulera comme elle voudra etj'irai seul tout glorieux, mais plus vainqu'un mort. » n N.M.

3 Alexandre Jardin : Des gens très bien, édi-tions Grasset , 304 pages, 18 euros.

C'est dans un pays rien moinsqu'uni, traversé de secoussespolitiques et identitaires,

que le président de la RépubliqueGiorgio Napolitano devait donner,ce jeudi 17 mars, le coup d'envoides cérémonies commémorativesdu 150e anniversaire de l'Unité ita-lienne. Une unification réaliséeformellement en 1861 par Victor-Emmanuel II de Savoie, roi de Pié-mont-Sardaigne, avec le concours– décisif – de Cavour et de Gari-baldi, deux des principaux acteursdu Risorgimento.

En traînant les pieds

Des concerts, des expositions, desconférences sont prévus au moinsjusqu'au 2 juin, jour de la fête dela République et date anniversairedu référendum de 1946 qui abro-gea la monarchie ; les chefs d'É-tat ou de gouvernement de l'Unioneuropéenne, de la Russie, desÉtats-Unis et des grands paysd'émigration italienne sont conviésce jour-là à Rome à un "sommetde commémoration". Pourtant,faute de moyens et d'unanimité,les festivités ont failli être ré-duites à bien peu de chose. Sansl'opiniâtreté idéologique du pré-sident de la République, cettecommémoration n'aurait guèremobilisé que le milieu académiqueet quelques patriotes convaincus.Pour donner de l'ampleur à l'évé-nement, il aura fallu gratter lesfonds de tiroirs, amputer le bud-get de ministres rétifs, convaincrede la pertinence de la célébra-tion un président du Conseil ayantdes juges à ses trousses.Non sans provoquer la grogne desministres léguistes qui ont refuséde souscrire au décret gouverne-mental faisant de ce 17 mars unjour férié. Selon Umberto Bossiet ses amis de la Ligue du Nord,« c'est une pure folie pour un paysqui a le plus fort déficit publicen Europe ». Un souci partagé parle patronat, la Confindustria ;aussi, pour compenser cette« perte de productivité », le gou-vernement a-t-il décidé de faire

exceptionnellement du 4 no-vembre, fête des armées, un jourouvré. À ce genre de mégotage,on voit combien l'enthousiasmefait défaut. Quand ce n'est pasl'hostilité qui s'exprime, commedans les rangs de la Ligue du Nordoù le fédéralisme est plus que ja-mais le maître mot, avec un dis-cours parfois haineux à l'endroitdes populations méridionales.

Un goût de défaite

À l'autre bout de la Botte, juste-ment, le sentiment général, pourêtre plus nuancé, n'en est pasmoins empreint de réserves. Enparticulier chez les bourbonienset néo-bourboniens qui récusentce qu'ils appellent « la rhétoriquerisorgimentiste » et refusent évi-demment de cautionner un évé-nement, l'Unité italienne, qui apour eux un goût de défaite.L'équipée révolutionnaire de Ga-ribaldi en Sicile et dans le royaumede Naples, la répression sauvageexercée contre les paysans ré-fractaires, autant de violences quitaraudent les mémoires. Dernier

roi des Deux-Siciles, François IIavait peut-être raté le coche del'histoire en refusant auparavantl'alliance avec la Sardaigne, pré-conisée par une partie de sesconseillers, et le partage des Étatspontificaux. Quoi qu'il en soit, leroyaume des Bourbons-Sicile ade facto cessé d'exister quand, ennovembre 1860, Garibaldi fit sonentrée à Naples au côté de Vic-tor-Emmanuel II, auquel le "con-dottiere niçois" venait de faire al-légeance.Le domaine de Victor-Emmanuels'est singulièrement agrandi de-puis un an. Grâce à l'habileté di-plomatique de Cavour qui s'est as-suré les bonnes grâces de Napo-léon III, mais en payant le prixfort en vies humaines (dans lesbatailles de Magenta et de Solfé-rino, où les troupes franco-sardesdéfirent les Autrichiens). La Lom-bardie est désormais rattachée auroyaume de Haute-Italie ; suivrontles annexions des duchés deParme, Modène et Toscane, puisdes États pontificaux, à l'excep-tion de Rome alors sous la pro-tection de Napoléon III au nom de

la "catholicité de la France".Toutes ces conquêtes sont rati-fiées à d'écrasantes majorités pardes plébiscites. Sont égalementconsultées les populations de Niceet de la Savoie, territoires pié-montais qui sont cédées à laFrance en reconnaissance de sonsoutien à l'unification italienne.Comme l'admet l'historien PierreMilza dans son Histoire de l'Ita-lie, « nombre d'électeurs ont votésous l'emprise de classes aiséesacquises aux idées libérales ».Car le Risorgimento est un purproduit des Lumières et du jaco-binisme, dont les principes ontébranlé et finalement mis à basl'ordre restauré au congrès de-Vienne. D'ailleurs, Giuseppe Maz-zini, référence majeure del'époque, a toujours conspiré pourétablir un régime républicain. Etavant de se ranger par opportu-nisme sous la bannière des Sa-voie, Garibaldi ne jurait lui aussique par la république.

Fidélité monarchique

C'est dans ce contexte que le li-béral Cavour organisa des élec-tions générales en janvier 1861.Réuni à Turin le 17 mars de lamême année, le premier parle-ment de l'unification proclamaitVictor-Emmanuel II roi d'Italie« par la grâce de Dieu et la vo-lonté de la nation ». Pourtantmanquaient encore la Vénétie,toujours tenue par l'Autriche (jus-qu'en 1866), et Rome, qui ne de-viendra la capitale du royaumequ'en 1870 – une "loi de Garan-ties" réglant alors, en principe, lestatut du Saint-Siège.« L'Italie est faite », avait estiméle comte de Cavour peu avant demourir en juin 1861. Plus perspi-cace, son prédécesseur auprès deVictor-Emmanuel II, le marquisd'Azeglio, eut cette formule quifit florès : « L'Italie est faite, ilreste à faire les Italiens. » Unsiècle et demi plus tard, il n'estpas sûr que le projet soit abouti.Partie prenante de ce 150e anni-versaire, l'Alleanza monarchica ademandé aux Italiens de pavoiseravec le drapeau tricolore portanten son centre le blason de la mai-son de Savoie surmonté de la cou-ronne royale, en vigueur jusqu'en1946. Cette fidélité contrasteavec le présent effacement poli-tique de la famille de Savoie, quia raté son retour en Italie. Uneautre source de frustration. n

Guy C. Menusier

o ITALIE

Les frustrations de l'UnitéL'Italie commémore les 150 ans de son unité sans grand enthousiasme.Témoins, les difficultés de financement des cérémonies officielles.Retour sur le Risorgimento – un pur produit des Lumières.

Par tous les saints !Ce ravissant petit albumdresse le portraits d'unecentaine de saints et saintes,plus ou moins célèbres oupopulaires.

QUI FONDA l'ordre des Ursu-lines ? Connaissez-vous AlixLeclerc ? Pourquoi Fidèle deSigmaringen patronne-t-il leBarreau ? Comptiez-vous saintDéfendant, honoré en Pié-mont, parmi les martyrs de lalégion Thébaine ? Pourquoi in-voque-t-on Joseph de Cuper-tino afin de réussir ses exa-mens ? Comment saint Honorédevint-il le patron des boulan-gers et des pâtissiers ? Ils sont une centaine, saintset saintes plus ou moins cé-lèbres, plus ou moins popu-laires à se succéder dansl'ordre alphabétique au fil despages de ce ravissant petit al-bum, conçu à l'imitation desouvrages de piété duXIXe siècle, doré sur tranchesous couverture fleurie, illus-tré d'images pieuses an-ciennes. De brèves notices ré-sument, dans l'esprit de laTradition, leur vie, leurs mi-racles, leurs patronages, etdonnent envie de mieux lesconnaître. Defendente Genolini, signa-taire du deuxième tome decette série, c'est Alexamenos,le prêtre chroniqueur de l'ex-cellente émission Dieu merci !sur la chaîne Direct 8 : unegarantie de sérieux, d'intelli-gence, et de catholicisme, quifait de ce très joli livre un ca-deau idéal à l'approche despremières communions,confirmations et professionsde foi. q

Anne Bernet

3 Defendente Genolini : Le Pe-tit Livre des saints, tome II,Le Chêne, 192 p., 14,90 s.

Victor-Emmanuel II premier roi

d'Italie

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 13 z

Idées

Dans un article publié le2 mars sur Lemonde.fr, leporte-parole du Parti socia-

liste, Benoît Hamon, et le prési-dent du Conseil régional d'Île-de-France, Emmanuel Maurel, ap-pellent à la refonte des institutionsfrançaises. Selon eux, « la ques-tion de l'organisation des pouvoirset de la participation citoyenneaux décisions politiques sera po-sée avec force » lors de l'électionprésidentielle à venir ; nous pou-vons en douter, d'autant que cesdéclarations démontrent que l'ins-titution républicaine et démocra-tique reste l'horizon indépassablede la politique.

La Ve République a-t-ellechangé la gauche ?Les constats vont pourtant dansle bon sens : « Nul ne contesteaujourd'hui l'ampleur du malaisedémocratique qui frappe notrepays. » Mais l'article pèche parson incapacité à décerner les vé-ritables causes et par conséquentles solutions qu'il faudrait appor-ter à cette impasse institution-nelle. Parmi les causes citées, laplupart ne sont d'ailleurs en réa-lité que des conséquences de l'in-capacité démocratique à faire faceaux enjeux de notre époque, à sa-voir « la persistance du chômagede masse, l'insupportable explo-sion des inégalités, la mise à malde notre modèle social ».Le problème institutionnel est tou-tefois abordé par Emmanuel Mau-rel et Benoît Hamon : ils refusentla Ve République et réfutent lathèse selon laquelle ses institu-tions « auraient davantage changéla gauche que la gauche ne les achangées ». Point de revendica-tions quant au bien commun danscette prise de position, mais unerévolte contre « la nature de laVe République qui heurte lesconsciences de gauche »... sifrêles et si précieuses qu'il s'agitd'y adapter nos institutions et l'in-térêt du pays ! Que la gauche nese reconnaisse pas dans ces ins-titutions, soit. Mais qu'importe ?N'est-ce pas à la France et auxFrançais qu'il faut penser avanttoute considération partisane ?Les institutions ne peuvent chan-ger au gré des humeurs et des im-pressions des différents partis po-litiques : elles doivent être fortes,stables et indépendantes detoutes ces "consciences" indiffé-rentes au seul bien qui nous im-porte, celui de la nation. Emmanuel Maurel et Benoît Ha-mon s'opposent à l'idée d'un ré-gime présidentiel. Citant LéonBlum réagissant au discours deBayeux (prononcé par Charles deGaulle en 1946), pour qui la ré-publique gaulliste était un sys-tème dans lequel « le présidentne serait pas seulement le chefsymbolique de l'État, mais le chefeffectif du gouvernement et de

l'administration », ils remettenten cause l'élection du présidentau suffrage universel direct. Com-ment, sur ce dernier point, ne pasles approuver ?

Un trop faible arbitre

Malheureusement, les solutionsenvisagées ne sont pas les bonnes,puisque ces messieurs proposentun régime dans lequel le Premierministre conduit et détermine lapolitique du pays, où le présidentn'est plus qu'un arbitre doté de« pouvoirs limités et encadrés »,et dont le Parlement conservetoute sa prééminence puisque lePremier ministre serait « suscep-tible d'être renversé par lui ».En somme, un retour à... l'espritde la Ve République, de l'aveumême des signataires de cet ar-ticle, qui se réfèrent au texte ini-tial de la Constitution définissantla fonction arbitrale du président(article 5) et les pouvoirs du Pre-mier ministre (article 21), avec,en prime, un renforcement duParlement dans l'esprit des IIIe etIVe Républiques. Donc, rien debien nouveau sous le soleil ! Etc'est ce retour en arrière qu'ilsqualifient de « réforme radicalede nos institutions » !L'idée d'une concentration moindredes pouvoirs est séduisante, maisinsuffisante. C'est le système ré-publicain lui-même qu'il convientd'abolir pour mettre en place unevéritable politique de décentrali-sation et de démocratisation à tra-vers une application judicieuse duprincipe de subsidiarité : unhomme non éligible et par consé-

quent indépendant à la tête del'État, disposant des pouvoirs ré-galiens, les autres niveaux de res-ponsabilités étant confiés aux« maîtres normaux » dont parlaitCharles Maurras : « provinces,villes, pays, villages, métiers, as-sociations, corps, compagnies,communautés, Églises, écoles,foyers, sans oublier les personnes,citoyens et hommes privés. Toutdomaine que l'État s'est appropriéindûment doit être redistribuéentre tous, dans la hiérarchie dela puissance et des compétencesde chacun. » 1

Une telle répartition permettraitde distinguer ce qui relève de lareprésentation (consultatif) ou dugouvernement (décisionnaire), ga-ranti dans son indépendance vis-à-vis de l'opinion ou de tout partipolitique ou idéologique, tout enlaissant s'exprimer les différentesforces du pays, celles-ci recou-vrant enfin leurs compétences. Telserait l'immense bienfait de la mo-narchie traditionnelle, héréditaire,antiparlementaire et décentrali-sée, que nous n'avons cessé et quenous ne cessons et cesserons dedéfendre. Elle est le socle sur le-quel fonder une politique visantau seul bien commun, ou encore,comme le dit Maurras, « le moyenindispensable, l'instrument donton ne se passe pas ». n

Dimitri Julien

1 « Les individus agissants ne sontpas des individus. Ce sont des per-sonnes », dit encore Maurras dansla Revue (grise) d’Action françaisedu 15 février 1904.

o INSTITUTIONS

La seule bonne réforme :la monarchie !

L'INTRODUCTION à une écono-mie moderne (1903) expose enparticulier assez clairement cequi, pour Sorel, conditionne latransformation de la société in-dustrielle. Sur les pas deProudhon, il exprime l'intuitionque c'est l'innovation, l'esprittechnique et donc l'intelligencehumaine qui sont désormais aucœur du procès de production,et non plus la détention et lamise à disposition du capital.L'ouvrier, le technicien, l'ingé-nieur, l'apporteur d'innovation,l'artiste sont les composantesd'une nouvelle classe de pro-ducteurs à qui l'avenir appar-tient. La lutte des classes n'estplus simplement l'expressiond'une guerre entre dominantsbourgeois et dominés proléta-riens, ni la conséquence –comme le pensait certainsmarxistes orthodoxes – descontradictions du capitalisme.C'est un conflit entre la classemontante, celle qui est lamieux à même de faire fructi-fier la production - du point devue économique mais aussi deson utilité sociale -, et laclasse possédante, qui n'envi-sage la production que du strictpoint de vue du capital qu'elley a investi. On trouve ici, trèsnettement développés et ac-tualisés, les concepts proudho-niens d'aristocratie ouvrière etde producteurs libres.On y trouve également les pre-miers développements autourde l'idée de mythe révolution-naire. Sorel, toujours préoc-cupé du passage de l'idée àl'action, s'interroge sur lameilleure façon d'entrainer lesclasses productives vers le so-cialisme. Les théories les plussavantes, les modèles les plusséduisants n'ont que peu d'em-prise sur le mouvement social.Marx lui-même n'a-t-il pas crééde toutes pièces sa vision ca-tastrophiste de l'histoire –schéma simple, presque sim-pliste de l'avenir – pour ai-guillonner les esprits et provo-quer un ralliement massif auxthèses de la révolution ? Sorelfait sur ce point le parallèleavec ce que dit Vico de lavieille sagesse populaire : elleexprime souvent, par le conte,le mythe ou la tradition, desvérités qui ne s'imposerontscientifiquement que beaucoupplus tard, lorsque les conceptspour les comprendre auront ététrouvés. On sait que Sorel pro-posera quelques années plustard de faire de la grève géné-rale ce mythe capable demettre en mouvement lesclasses productives.Il y a enfin dans l'Introductionà une économie modernequelques belles pages sur l'Étatet la démocratie. On connaitles préventions de Sorel, rejoi-gnant là encore son maître

Proudhon, vis-à-vis de l'éta-tisme et du jacobinisme. À l'É-tat « idéaliste », volontariste,éducateur, qui intervient de fa-çon tatillonne et très souventinefficace dans le champ del'économie et de l'organisationsociale, Sorel préfère un Etat« fonctionnel », arbitre, indé-pendant, qui veille aux équi-libres sociaux et à ce que leprogrès ne connaisse pas d'obs-tacle. C'est aux syndicats deproducteurs, organisés pargroupes d'entreprises, branchesou filières, de prendre l'initia-tive en matière économique etde gérer les instruments de lasolidarité sociale. C'est aux ré-gions et aux communautés ter-ritoriales de veiller à ce que laproduction trouve les condi-tions favorables à son épa-nouissement sur l'ensemble duterritoire. Sorel manifeste icisa méfiance vis-à-vis de la dé-mocratie, d'une politisation del'État par les partis qui porteatteinte à la probité des fonc-tionnaires et favorise le népo-tisme. Des remarques quiconservent aujourd'hui leurpleine actualité.

Social-démocratie

Quant à la Décomposition dumarxisme, publiée en 1908, lamême année que les Ré-flexions sur la violence, ellemet en ordre l'ensemble descritiques adressées par Sorel,moins d'ailleurs à Marx lui-même dont il soutiendra jus-qu'au bout les intuitions,qu'aux épigones français et al-lemands de Marx. Plus datéeque l'ouvrage précédent, no-tamment parce qu'elle rentredans le détail des débats quiagitaient les milieux socialistesen ce début de siècle, la Dé-composition du marxisme a lemérite de présenter les argu-ments de Sorel contre ceux,Jaurès en tête, qui cherchaientà rallier le socialisme à la dé-mocratie bourgeoise et à letransformer en parti politique.« La démocratie peut tra-vailler efficacement à empê-cher le progrès du socialisme,en orientant la pensée ou-vrière vers un trade-unionismeprotégé par le gouverne-ment », dit Sorel. Il ne seraitsans doute pas autrement sur-pris de voir ce que les héritiersde Jaurès ont fait de l'idée so-cialiste en France, sous saforme social-démocrate commesous sa forme communiste. q

Henri ValoisLa Revue critique.fr

3 Georges Sorel : Introduction àl'économie moderne, L'Harmattan,385 p., 49 euros ; La Décomposi-tion du marxisme, L'Harmattan,67 p., 36 euros.

À la rencontre de SorelLes éditions L'Harmattan viennent de rééditerdeux ouvrages majeurs de Georges Sorel quenous ne saurions trop recommander à ceux denos lecteurs qui désirent se familiariser avecl'œuvre du grand philosophe social.

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Pour un jeune Français

Les militants que l'on rangedans le camp "réactionnaire"ont trop souvent délaissé la

science-fiction, généralementpour lui préférer les romans tra-ditionnels, livres historiques ouessais. Peut-être le mauvais pen-dant de l'attitude consistant às'inspirer du passé pour y trouverles réponses aux maux actuels. At-tention, cependant, à force d'ap-pliquer son attention sur le ré-troviseur, à ne pas oublier quec'est vers l'avant qu'il faut regar-der ! La science-fiction pourraitse placer comme l'un des genreslittéraires les plus politiques.Parce qu'elle permet, plus que toutautre, de se projeter au-delà d'uneépoque et d'anticiper les phéno-mènes les plus optimistes ou, àl'inverse, les plus apocalyptiques.

Big Brother

Laissons de coté certains phéno-mènes comme Star Wars, qui res-tent à la science-fiction ce queles fast food sont à la gastrono-mie, pour nous plonger dansl'étude d'œuvres bien plus sé-rieuses. Il serait inconvenant detraiter de la science-fiction sansévoquer l'œuvre magistrale deGeorges Orwell, 1984. Dans ce ro-man dystopique, le monde est di-visé en trois empires totalitaires :Océania (Amérique, Angleterre,Australie, Sud de l'Afrique), Eur-asia (Europe continentale et Rus-sie) et Estasia (Extrême-Orient).L'Océania, où se déroule l'histoire,est sous la botte de l'Angsoc (pour« socialisme anglais »), un partiunique extrêmement violent quia pour égérie l'image de Big Bro-ther (qui n'existe probablementpas), dont le visage s'affiche dansles rues et jusque dans les habi-tations. Une police traque les cou-pables de « crime de la pensée »,accusés ou simplement soupçon-nés d'avoir une opinion contraireà l'idéologie ou aux informationsproduites par le parti.Ce roman, écrit en 1948, trois ansaprès la chute du nazisme et enpleine gloire du stalinisme, relatel'histoire de Winston Smith, dontle métier consiste à revisiter lesarchives des journaux officiels duParti et à les modifier afin que lesinformations et prédictions qu'ilsdélivrent soient conformes à la si-tuation actuelle. Cela n'est passans nous faire penser aux men-songes et manipulations qui par-sèment l'histoire de la République,notamment s'agissant de l'histoirede France, de la monarchie, de laRévolution... La vidéosurveillanceomniprésente, constituant l'ar-mature de l'intrigue, annonçait lamontée actuelle du sécuritarismeet les menaces qui pèsent sur leslibertés. D'autres thèmes sont éga-lement traités de manière rigou-reuse, comme la torture psycho-logique à grande ou petite échelle

à laquelle recourt le gouverne-ment pour briser toute révolte po-tentielle, les manipulations du ré-gime qui génère sa propre pseudoopposition, ou encore l'instru-mentalisation de la guerre contreles autres blocs impériaux afin demaintenir la population dans uneterreur quasi-permanente.

État mondial

À ce chef d'œuvre décrivant unedictature post-communiste, Jean-Christophe Ruffin apporte uneforme de réponse dans le romanGlobalia, à l'ambiance certesmoins sombre, qui met en scèneune autre forme de totalitarisme,cette fois-ci dans le cadre d'unesociété libérale. Autant dans 1984l'avenir peut être comparé à « unebotte piétinant un visage hu-main », autant celui de Globaliaressemble davantage à une sortede mélasse démocratique étouf-fante qui inhibe toute tentativede révolte. Les nations ont étéabolies et il n'existe plus qu'unseul État mondial qui rassembleles deux tiers de la planète. Ceterritoire est recouvert par d'im-menses coupoles transparentes quiprotègent les habitants du mondeextérieur. La société décrite y estplus ou moins "parfaite" : chaquecitoyen dispose d'un revenu mini-mum, même s'il ne travaille pas ;les enfants sont de moins en moinsnombreux mais peu importe carles Globaliens bénéficient d'unejeunesse presque éternelle. Pourtant, lorsqu'un jeune hommeentend enfreindre certainesrègles, il se fait pourchasser parles forces de sécurité sur la basede fausses accusations. Quand unejeune fille cherche à retrouverson petit-ami, accusé à tort deterrorisme, le député avec qui

elle entre en contact lui répondque les hommes politiques n'ontaucun pouvoir. Quand un journa-liste souhaite enquêter sur cer-taines manipulations et men-songes du gouvernement, il se re-trouve rapidement en rupture deban et ruiné. En dehors des cou-poles, le "tiers-monde" est devenuune "non-zone". C'est-à-dire qu'il"n'existe pas" ; tout au plus lesGlobaliens savent-ils qu'il consti-tue un repère pour dangereux ter-roristes. Ce roman complèteagréablement 1984 : nous y trou-vons une société où le libéralisme,poussé à l'extrême, a conduit àl'instauration d'un univers où lesindividus, repliés sur leur égoïsmeet leur hédonisme et complète-ment coupés de leurs identités,ont livré leur sort à des oligarquesinconnus, lointains, qui eux-mêmes ne maîtrisent pas grand-chose face aux grands impératifséconomiques.

Régénération

Dans un autre registre, le filmEquilibrium de Kurt Wimmer, sortien 2002, traite d'un monde futu-riste faisant suite à une guerremondiale au sujet de laquelle onn'a que très peu d'informations.L'humanité a survécu dans unecité, Libria, où les émotions ontété bannies, accusées d'avoirconduit à l'holocauste nucléaire.Les habitants ont recours à un re-mède, le prozium capable d'ex-traire tout sentiment. Des forcesde police, dirigées par des guer-riers d'élite, les recteurs Gram-matons, sont chargées de traqueret d'incinérer les déviants qui suc-combent aux émotions, qu'ilssoient terroristes ou non. Le filmracnte l'histoire de John Preston,un recteur parmi les plus gradés

et les plus efficaces de son ordre,qui, un jour, brisera par accidentsa dose de prozium. Les émotionscommenceront alors à l'envahiret de là découlera pour lui uneremise en question brutale dumensonge dans lequel baigneson époque. On ne pourra pas s'empêcher dedéceler une forme d'antichristia-nisme latent dans ce film : le lea-der s'appelle « le père », le sym-bole de Libria est une croix deJerusalem, les recteurs Gramma-tons sont surnommés « les Ecclé-siastes »... Ces références sontquelque peu déplacées, tant lesvaleurs de l'Église sont à l'anti-thèse de celles portées par ce ré-gime totalitaire. On en fera doncabstraction pour se focaliser surun aspect du film qui intéresserabien plus le spectateur réaction-naire : la volonté du régime de"régénérer l'Homme". Les émo-tions étant une part fondamen-tale de la nature humaine, ils'agissait pour ce régime, qui lesaccusait d'être à la base des dé-sastres mondiaux, de les com-battre. Or, la nature humaine nesaurait être combattue que parle biais d'un totalitarisme violentet intrusif. C'est le cas dans cefilm et Libria nous évoque ainsil'Allemagne nazie, la Russie so-viétique... ou encore, les démo-craties libérales d'aujourd'hui etleur "totalitarisme doux".

Fabrication d'humains

Autre film, plus récent encore :The Island de Michael Bay, sortien 2005. En 2019, Lincoln 6-Echoet son amie Jordan 2-Delta sontdeux rescapés d'une pandémiemondiale qui a anéanti pratique-ment toute la population ter-rienne. Les survivants sont re-

groupés dans un immense centreconstruit au bord de rivages ro-cheux. La discipline ainsi que lesréglementations, tant sur le planalimentaire que relationnel, sontextrêmement strictes. Les survi-vants ne bénéficient de quasimentaucune intimité, des cameras desurveillance étant placées jusquedans leur chambre individuelle.Pourtant, ce système est globale-ment accepté par tous puisque alieu régulièrement la "loterie" dontles gagnants sont désignés de ma-nière totalement aléatoire pourrejoindre "l'Île", la dernière zonenon contaminée sur la planète.Des spots publicitaires s'affichentrégulièrement sur les écrans pourvanter la nature paradisiaque decette destination où tous ne rê-vent que de se rendre. Pourtant,peu à peu, le doute va s'immiscerdans l'esprit de Lincoln 6-Echo :pourquoi certaines zones du centreleurs sont-elles interdites ? Pour-quoi, si l'atmosphère est conta-minée, des survivants sont-ils ré-gulièrement retrouvés ? Et, sur-tout, pourquoi a-t-il un jour trouvéun papillon vivant venu de l'exté-rieur ? Son enquête discrète lemènera à découvrir la terrible réa-lité : l'Île n'existe pas, il n'y a ja-mais eu de contamination, les"survivants" sont en réalité lesclones de personnalités fortunées,créés afin de constituer une ré-serve d'organes. Le fait de gagnerà la "loterie" n'a ainsi qu'une seulesignification : la mort. S'en suivraune course-poursuite durant laquelle Lincoln 6-Echo et Jordan2-Delta, après s'être enfuis, seront traqués par des merce-naires engagés par la société les ayant créés.

Dérives de la science

Là encore, voilà un film qui consti-tue un fantastique avertissementsur les dérives actuelles du mondescientifique : entre recherchessur les cellules souches ou le clo-nage humain, un certain espritprométhéen tendrait à nous faireoublier combien la nature hu-maine est sacrée et que l'on nepeut faire, avec le patrimoine gé-nétique de l'homme, ce que l'onpeut faire avec des matériaux.Aujourd'hui où l'humanité des em-bryons est purement et simple-ment niée pour permettre les re-cherches sur les cellules souches,il ne serait pas aberrant de pen-ser que, dans les décennies voireles années à venir, certains, gui-dés par le même sentiment d'im-punité que procurent la "science"et le "progrès", en viennent àconsidérer également le clonecomme un "non-humain".À ce titre, la conclusion du filmThe Island, dans laquelle le cloneLincoln 6-Echo finit par jeter dansun gouffre le très arrogant scien-tifique qui l'a créé, est une allé-gorie pleine d'optimisme que l'onpourra retenir. Le scientifique seprenant ouvertement pour Dieu,et décidant de la vie et de la mortde "ses" créatures, est renvoyéviolemment à sa condition demortel par le clone, première vic-time de son ignominie. Ici, le "sou-viens-toi que tu n'es qu'un homme"prend presque des allures de châ-timent divin. n

Stéphane Piolenc

o LITTÉRATURE & CINÉMA

Regard sur la science-fictionÉclipsée par la culture classique, la science-fiction est souvent négligée, sinon méprisée, par les réactionnaires. Elle recèle pourtant moult échos à leurs préoccupations. La preuve par l'exemple, avec les romans 1984 et Globalia, puis en images avec Equilibrium et The Island.

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2813 – Du 17 mars au 6 avril 2011 15 z

Combat

Président du Comitédirecteur d'AF

Stéphane BlanchonnetSecrétaire général

Olivier PercevalSecrétaire général

adjointRomain Hellouin

TrésorierGiovanni Castelluccio

SecrétaireadministratifMarie-Suzanne

de Benque d'AgutFormationMarc Savina

ProvincesPhilippe Castelluccio

MilitantismeJean-Baptiste

de l'AviathResponsableopérationnel

François Bel-Ker

Centre royaliste d'Action française10 rue Croix-des-Petits-Champs 75001 PARIS

[email protected]

CERTES, nous ne pouvonsqu'être d'accord avec MarineLe Pen sur l'urgence de laquestion des flux migratoiresininterrompus depuis des dé-cennies : l'inaction de nos diri-geants est telle qu'elle dissi-mule mal une volonté d'exécu-ter les injonctions de l'OMC,relayées par Bruxelles, encontradiction de plus en plusmanifeste avec la volonté despeuples européens.

La République n'est pas la nationSelon les chiffres officiels,200 000 étrangers entrentchaque année en France et aumoins 100 000 reçoivent unecarte de séjour, sans compterle nombre de clandestins péné-trant chaque jour sur le terri-toire. Et ce n'est pas le "prin-temps arabe" qui fera baisserles statistiques ! Il est vrai quela suppression des frontièresnationales dans une logique li-bérale et consumériste, cumu-lée aux avantages sociaux dis-tribués si généreusement, faitde notre pays un pôle d'attrac-tion exceptionnel.La profession de foi républi-caine de Marine Le Pen, si ellea le mérite de la clarté, parti-cipe de notre divergence, dufait que la République, depuisla Révolution, n'a jamais cesséde vouloir « assimiler » lesFrançais. Il serait fastidieux defaire le récapitulatif des étapesassimilatrices du systèmelaïque et obligatoire qui s'enest pris violemment à tous lesparticularismes tant cultuels etculturels que sociaux et reli-gieux, jugés contraires aux va-leurs républicaines.La supercherie consistait àfaire passer un principe idéolo-gique, la République (cinq ver-sions en deux siècles), pourl'expression du bien commun,supérieur aux intérêts particu-liers. Maurras, qui était un mi-litant régionaliste, considéraitla Nation comme le cadre su-périeur, à l'intérieur duquelpouvaient librement se décli-ner les libertés et les particu-larismes tant qu'ils ne consti-tuaient pas une menace pourle bien commun. En retour laNation, fédérée par la monar-chie, devenait la protectricenaturelle de cette diversité. Aucontraire, la République fran-çaise – il ne s'agit que d'elle –n'est qu'un système idéolo-gique, un espace d'affronte-ment des élites cooptées, maiselle n'est pas la nation.L'idéologie du contrat social,postulant que l'individu est seulface à l'Etat, n'accepte enthéorie aucun groupe ni aucunecommunauté intermédiaires.

Aucune tête ne doit dépasser :telle fut la logique de la loiLe Chapelier. Il y aurait enquelque sorte un modèle géné-rique du Français, répondant àun portrait robot… qui n'existepas, sauf pour les idéologuesdu laïcisme, comme, du reste,pour les promoteurs du métis-sage obligatoire. Nous pensons au contrairequ'au-dessous d'un bien supé-rieur et collectif, qu'il convientde défendre ensemble, subsis-tent des particularismes légi-times. Si nous sommes opposésà l'érection de minarets enFrance, terre chrétienne, noussommes en revanche favorablesà ce que les musulmans vivantrégulièrement sur notre solpuissent prier dans des condi-tions dignes. Il convient égale-ment de les affranchir del'étranger, s'agissant notam-ment des investissements saou-diens. Le débat sur l'islam enFrance ne doit donc pas êtreescamoté mais, au contraire,abordé en profondeur, avecexigence mais sereinement.Le discours sur l'assimilation,défendu par le Front national,ne risque-t-il pas de conduire,si nous n'y prenons garde, àl'interdiction de toutes lesformes d'expression publiquedes religions, y compris chré-tiennes, puisque la loi de 1905est d'abord une manifestationde la violence d'Etat contre lechristianisme ?

Réagir contre l'anomie

Encore une fois, nous ne sous-estimons pas la question desflux migratoires qui restent unenjeu essentiel. Mais la pres-sion de l'islam n'est forte,avant tout, que de la faiblessede la France institutionnelle etéducative, acquise au modèleconsumériste, comme, dureste, de la discrétion de l'É-glise. Ne vaudrait-il pas mieuxprôner l'intégration, respec-tueux des attaches culturelleset cultuelles dans un strictcadre législatif ? Elle devraitpermettre, à terme, une"lente assimilation", dans lamesure évidemment où nos ins-titutions culturelles et natu-relles, après deux mille ans dematuration, seront encore suf-fisamment fortes et actives –mais nous pensons que MarineLe Pen, sur ce dernier point,sera d'accord avec nous.Ce qu'il faut retrouver, en ef-fet, c'est la notion de « tempslong », évoquée par FernandBraudel, l'empirisme organisa-teur consistant à redonner saplace, toute sa place, à l'His-toire des peuples. Nous ouvronsle débat. q

Olivier Perceval

PARIS - 18/03

Vers l'écologismeintégralConférence de Stéphane Blanchonnet, président du Comité directeur de l'Action française, le vendredi 18 mars à 19 h 30, dans nos bureaux, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, Paris 1er

(métro Palais-Royal, entrée libre).

» ANNONCES

o PARIS - Société artistique etlittéraire du 7e arrondissementde Paris (président Didier Béou-tis) - Jeudi 24 mars, à 18 heures,dans la salle des mariages de lamairie du 7e arrondissement, 116rue de Grenelle, conférence dePierre Salomon, agrégé d'espa-gnol, professeur de chaire supé-rieure honoraire, sur le sujet sui-vant : « Antoine de Saint-Exupéry,un moraliste pour le XXIe siècle». Merci de confirmer votre ve-nue en laissant un message au06 37 30 41 08 ou à [email protected]

o AQUITAINE - Réunion de clôturede l'année politique 2010-2011 surle thème : « L'Église, la France etles trois Ralliements - 1892, 1926,1965 », avec Philippe Prévost, doc-teur en histoire, auteur de nom-breux ouvrages d'histoire politiqueet religieuse dont L'Église et leRalliement : Histoire d'une crise1892-2000 (CEC, 2011). Bordeaux : déjeuner-débat ven-dredi 25 mars à 11 h 30 au res-taurant Le Xaintrailles, 114 bou-levard du maréchal Leclerc ; par-ticipation : 24 euros par personne.Toulouse : conférence samedi26 mars à 10 h 30 dans le centre-ville ; le lieu sera communiqué

aux personnes s'étant préalable-ment inscrites ; participation :5 euros par personne. Bayonne : conférence samedi 26mars à 18 h 30, quartier Saint-Léon ; le lieu sera communiquéaux personnes s'étant préalable-ment inscrites ; participation :5 euros par personne. Vente de livres et dédicaces.Prière de s'inscrire, avec son rè-glement, avant le 23 mars 2011,auprès de : CAEC, BP 80093, 33035Bordeaux cedex. Chèques à éta-blir à l'ordre de CAEC, CCP 15 50363 W Bor. Renseignements surle s i te In ternet ht tp://af -aquitaine.over-blog.com

Comprendrel'AfriqueNOUS ÉTIONS plus de soixante-dix, ce jeudi 10 mars, à être ve-nus écouter l'africaniste célèbre,Bernard Lugan, sur une questionon ne peut plus sensible : l'ethno-différentialisme en Afrique. Cetteconférence qui s'inscrivait dansnotre cycle relatif à l'immigrationdevait nous permettre de mieuxcomprendre ce qui se joue enAfrique, depuis la décolonisation.Bernard Lugan, brillant universi-taire et expert auprès du TPI surles questions africaines, n'est pasun inconnu pour notre mouvementoù il a joué un rôle important dansles années soixante,soixante dix.Nous n'avons donc pas été surprisde sa dénonciation de l'exporta-tion de la démocratie par les oc-cidentaux dans un continent dontles peuples demeurent enracinésdans des traditions ethno-cultu-rels. En revanche, mais cela restecohérent, certains de nos amis ontpu s'étonner d'entendre cet émi-nent spécialiste mettre en causele colonialisme à la Française.Cette forme de colonisation a eneffet donner naissance à des étatsAfricains aux contours impro-bables, totalement étrangers auxréalités ethniques et culturelles

issues de la construction dessiècles. Ce même fléau égalitairea frappé naguère notre propre na-tion au moment de l'avènementde la république laquelle, noncontente de saccager nos racinesculturelles jugées obscurantistes,est allée imposer le funeste mo-dèle à tout l'empire.Les affrontements au Ruanda, enCôte d'Ivoire , et dans de nom-breux états Africains ne sont quela conséquence de l'application

sans nuance ni réflexion de la dé-mocratie occidentale qui a bou-leversé des équilibres séculairesen posant le postulat: un hommeégale une voix, au lieu de consi-dérer les familles, les tribus et lesethnies comme bases constitutivesdes sociétés Africaines. Merci Ber-nard de cette lumineuse démons-tration qui a donné lieu à un dé-bat passionné et nous a permis defaire évoluer notre appréciationde la complexité africaine. n

ÉDITORIAL MILITANT

Marine Le Pen veut-elle renforcer la loi de 1905 ?Il semblerait que le Front national s'oriente radicalement vers le renforcement des lois laïques. Ce choix politique ne serait-il pas dangereux car liberticide et contraire à la vraie tradition française ?

SUR LA TOILE – 17/03

Un nouveau site pour l'AFLe jeudi 17 mars au matin, le site Internet de l'Action française fait peau neuve. Soyez au rendez-vous et faites-le savoir autour de vous : www.actionfrancaise.net

Page 16: e Sarkozy H.S. · M 01093 - 2813 - F: 4,00 E 4 s N°2813 65e année Du 17 mars au 6 avril 2011 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois « FÉDÉRER

Entretien

Édité par PRIEP S.A. au capital de 59 880 euros – 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Imprimerie RPN – 93150 Le Blanc-MesnilNuméro de commission paritaire 0415I86761 – Directeur de la publication : M.-G. Pujo

L'ACTION FRANÇAISE 2000 – Pen-sez-vous que la présence sur laterre de France de foules d'im-migrés, souvent de religioncontraire à nos traditions et ànos mœurs, soit un motif degrande inquiétude ?ARNAUD GUYOT-JEANNIN – Laprésence massive et exponentielled'immigrés extra-européens sur lesol français est un motif d'in-quiétude bien sûr. Seule une vo-lonté politique associée à un réa-lisme sociologique peut nous permettre de réfléchir sur l'al-ternative à cette immigration depeuplement aujourd'hui, et deremplacement demain. Il faut ren-voyer les immigrés clandestins etdélinquants, empêcher la venuede nouveaux immigrés et révisernotre politique nationale et fa-miliale (arrêt de la double natio-nalité, du regroupement familialet des naturalisations automa-tiques, changement du code dela nationalité etc.).

La République du fric...

Seulement, une fois, cette poli-tique mise en place, il resteratoujours plus de sept, huit, neuf,dix millions d'immigrés qui ferontdes enfants. Le problème devientmoins important, mais n'est pasréglé pour autant. Une majoritéd'immigrés ne repartiront paschez eux (où est-ce "chez eux"d'ailleurs ?) et ne pourront deve-nir français qu'en s'intégrant, sansnécessairement s'assimiler à la ré-publique du fric et des droits del'homme à produire et consom-mer. Le modèle assimilationnisterépublicain, type IIIe République,demeure non souhaitable et in-opérant. Les immigrés extra-eu-ropéens peuvent plutôt renoueravec leur identité spirituelle etethnoculturelle tout en respec-tant l'espace public. L'Autre est dangereux non en tantque réellement autre, mais entant que figure refoulée du Même.Notre identité n'est pas menacéepar celle de l'Autre, mais par lesystème marchand, consuméristeet publicitaire qui tend à les dé-truire toutes les deux. C'est la ré-pétition à l'identique qui créaitparadoxalement le relativisme, lenihilisme et l'anomie sociale. Lesimmigrés qui cassent, pillent etcréent des émeutes, sont très gé-néralement des individus déraci-nés, individualisés, arrachés à leuridentité culturelle. Face à cettesituation dramatique, toutes lesétudes statistiques prouvent queplus le taux religieux, commu-nautaire et familial est fort dansun quartier, plus l'insécurité, lemétissage et la décadence moralesont faibles. La communauté de-meure un vecteur de réenracine-ment pour tous ! Elle donne unenouvelle façon de vivre ensembleet une cohésion sociale forte.

Mais comment entrevoyez-vous les communautés dans la modernité ?Le drame actuel réside dans l'in-différenciation générale. Les villessont invivables parce que les gensne se parlent pas, n'aspirent qu'àconsommer, s'abandonnent dansce que Marc Augé appelle les "non-lieux" (galeries marchandes,centres commerciaux, fast food,métro...). Or, l'individu ne peuts'épanouir réellement qu'en s'in-tégrant à une communauté po-pulaire différenciée. Son "Moi" abesoin de l'"Autre". « Soi-mêmecomme un autre » dit Paul Ri-coeur. L'homme est un animal so-cial. Coupé de ses racines et detoute socialité, il meurt.

Retour au local

Il semble néanmoins que la mon-dialisation néo-libérale engendreparadoxalement un retour au lo-cal, au social et à l'environne-mental. Ces trois cadres peuventpermettre à l'homme de se réap-proprier son identité, sa dignitéet sa liberté de co-appartenir àla diversité du monde vivant. Lapost-modernité provoque lemeilleur et le pire. Elle clôt lecycle de la modernité et sesgrands récits pour se fondre dansle réel. Un réel authentique ouparodique selon les circonstances !La post-modernité ouvre des ho-rizons traditionnels à la périphé-rie et recoupe une hypermoder-nité caricaturale au centre. Nousretrouvons là la problématique dela communauté qui s'affirme, etsa contrefaçon, le communauta-risme qui enferme. Je suis pluspessimiste que Michel Maffesoli,

mais plus optimiste que Jean Ras-pail. Je m'efforce d'être à la foisréaliste et soucieux de la vérité.

Dans un entretien donné à Va-leurs Actuelles, le 10 février2011, Jean Raspail remarque :« On assiste à la proliférationdu communautarisme, à la jux-taposition de groupes revendi-quant leurs différences eth-niques, religieuses, culturelles,qui ne reconnaissent pas le "vou-loir vire ensemble" qui fait leciment d'une nation, comme lesoulignait Renan ». Cette consta-tation ne met-elle pas en reliefla question des communautésqui "constituaient" la France ca-pétienne ?« Les groupes revendiquant leursdifférences ethniques, religieuses,culturelles » en Bretagne, en Al-sace, au Pays Basque, en Corseetc. reconnaissent majoritaire-ment le "vouloir vivre ensemble"dans l'espace français. En re-vanche, il n'est pas sûr que la Ré-publique française les reconnaissecomme elle le devrait. D'où la né-cessité d'une autonomie fédéra-tive pour ces régions qui éviteraitl'écueil du centralisme jacobincomme celui du séparatisme ir-rédentiste. Sous l'Ancien Régime,les groupes auxquels Raspail faitréférence étaient même le fer-ment d'une nation et non son « ci-ment » justement. Quant aux immigrés enracinésdans leur communauté naturelled'appartenance, ils se conformentaux préceptes de la religion, dela morale et de la famille qui en-seignent d'agir le mieux possibleavec les autres, et donc de s'adap-ter aux lois françaises. Il y a un

devoir pour eux de respecter lepays dans lequel ils vivent sans sedépartir nécessairement de leuridentité qui donne un sens à leurexistence. Conditions d'harmoni-sation du champ relationnel ! Ceuxqui contreviennent aux lois doi-vent faire naturellement l'objetd'une sanction immédiate.

Cet effacement des commu-nautés, que Marine Le Pen, enbonne républicaine et dans l'es-prit de 1789, voudrait imposerà la France vous paraît-elle uneréponse au drame de l'immi-gration ?Bien sûr que non. C'est pour celaqu'hostile au communautarisme,je ne pousse pas des cris d'orfraiedevant la poussée de celui-ci. Lecommunautarisme n'existe quepar l'absence d'une réelle ex-pression des communautés. Danssa logique nationale-républicaine,Marine Le Pen réclame que « laRépublique ne reconnaisse aucunecommunauté » dans la Constitu-tion française. Récemment, elles'est même prononcée en faveurde la suppression des régions auprofit des départements. Elle n'apas une perception spirituelle etcharnelle de la France. Favorableà un "État fort" qui peut recou-vrir de multiples significations,elle ne comprend pas la néces-sité anthropologique du facteurcommunautaire pour les Françaisd'origine comme pour les immi-grés naturalisés français. Plus largement, je tiens à faireobserver que si la république ja-cobine et mondialisée de nosjours, n'est plus respectée, y com-pris par les Français de souche,c'est qu'elle n'est peut-être plus

respectable. Il ne faut pas s'éton-ner que, outre l'immigration, denombreux Français se sententétrangers dans leur propre pays.Pas étonnant dans ces conditionsque les Français n'aient pas be-soin des immigrés pour s'exclureentre eux. Le lien national et so-cial est déchiré. Hier, le "modèled'intégration républicain" a per-mis de laminer, en grande partie,les particularismes locaux. Au-jourd'hui, il tente d'éradiquerl'identité nationale des autoch-tones, mais aussi les identitéscommunautaires des allochtones.Des allochtones français pour laplupart ! Il s'agit toujours d'anéan-tir l'Autre dans l'Un et Indivisiblemoule de la République post-mo-derne. Liberté, marché, publi-cité ! Retrouver le sens de la com-munauté – qui n'est pas exclusivede la liberté et de l'universalité -s'avère indispensable.

Estimez-vous que l'on va vers unaffrontement interethnique ?Jean Raspail évoque la Recon-quista à la fin de sa préface duCamp des saints...Jean Raspail formule l'hypothèsede la Reconquista. Mais où sontles troupes combattantes et or-ganisées ? Si d'aventure, quelquescentaines d'individus s'engageaientdans ce combat fratricide, qui ensortiraient victorieux ? Il est évi-dent que l'issue finale serait si-milaire à celle du Camp des saints.Le système cosmopolite en sorti-rait gagnant et renforcé. La Francen'a rien à gagner à imaginer un telcas d'école. Il est, de toute façon,déraisonnable d'exalter les pul-sions convulsives entre individuset communautés différentes. Ilfaut mieux les réguler et les apai-ser. Réfléchir avant de réagir ! Laraison politique doit l'emportersur les passions nihilistes. C'est laseule voie pour commencer à trou-ver les bons remèdes à nos maux.Au lieu de taper sur les immigréset leurs conséquences, certainsmilitants politiques devraient plu-tôt remonter aux causes de l'im-migration. Celles-ci sont notam-ment contenues dans l'appel d'air,depuis les années soixante-dix,d'une main d'œuvre étrangère cor-véable à merci, par le capitalismemultinational. Et d'entrevoir unprojet de fédération des peuplesde France sans céder aux fan-tasmes juvéniles, au cynisme po-liticien et à toute nostalgie res-taurationniste. La communauté àéchelle humaine et ouverte surl'universel est l'antidote au turbo-capitalisme et au sans-papiérismeproduits par la planétisationhigh tech. n

Propos recueillis par Michel Fromentoux

o ARNAUD GUYOT-JEANNIN

« Federer les peuples de France »Journaliste au Spectacle du monde, Flash, etc., Arnaud Guyot-Jeannin dirige aussi Le Libre Journal

des enjeux actuels sur Radio Courtoisie. Catholique de tradition tout en étant proche des milieux de la Nouvelle Droite, il a accepté de répondre aux questions de L’Action Française 2000.

« Notre identité n'est pas menacée par celle de l'Autre, mais par le système marchand,

consumériste et publicitaire. »