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D’un pont à l’autre 1943-1961 Sergil Jumeau

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D’un pont à l’autre

1943-1961

Sergil Jumeau

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20.90 566793

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 270 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 20.90 ----------------------------------------------------------------------------

D’un pont à l’autre 1943-1961 Sergil Jumeau

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Du même auteur : Le Gladiateur du Colisée roman paru en 2012

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Remerciements

Mes enfants Olivier, Pascal et Christophe et mon épouse Odile m’ont encouragé à poursuivre cette introspection réalisée d’abord pour eux.

Anne, ma cousine, Alain Dannery, nouvelliste et Jean-Henri Maisonneuve, écrivain, poète et peintre se sont astreints à relire ce livre dans une période où leur charge de travail était très importante. Dominique Mouillé talentueux graphiste a collaboré à l’image de couverture.

Je les remercie tous pour leur soutien sans lequel j’aurais sans doute renoncé à ressusciter ces souvenirs assoupis.

Sergil

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Avant-propos

On ne s’étonnera pas du titre en sachant que ma vie d’adolescent passe par des ponts qui sont autant de points géographiques et de moments remarquables qui ont parsemé mon trajet.

Voici les ponts en cause : le pont du chemin de fer franchissant le canal entre Tours et Saint-Pierre-des-Corps, le pont d’Arcole, le pont de pierres, désormais pont Wilson, le pont de l’Huisne, le pont de Grammont et le Pont-du-Caïd. C’est pourquoi le récit se poursuit D’UN PONT A L’AUTRE.

Cette tranche de quinze années s’insère entre deux guerres : 1939/1945 contre l’Allemagne et 1954/1961 en Algérie où le FLN se révoltait contre la tutelle coloniale française sur le pays.

Même si le gouvernement ne voulut pas admettre qu’il s’agissait d’une guerre et préféra appeler par euphémisme Maintien de l’ordre les opérations militaires que nous développions, nous vivions

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véritablement une guerre, d’autant plus meurtrière qu’elle était sans front et se présentait, à la fois, dans toutes les directions… Ce mode de combat nous obligea à envoyer se battre des quantités de jeunes appelés mal préparés, tant à la guérilla urbaine qu’aux embuscades et au harcèlement perpétuel de petits groupes ennemis très mobiles.

Mon séjour algérien, je l’ai vécu au Pont-du-Caïd, en plein massif de l’Ouarsenis. Ce fut le pont final – et le point final – de mon adolescence.

Je compare cette période, état intermédiaire de la formation humaine, à la chrysalide du papillon. J’ai le sentiment que ces guerres ont joué un rôle majeur qui a façonné ma personnalité à bas bruit durant la traversée de ces quinze années.

Je conserve en mémoire les bons souvenirs et toutes les scories de ce temps-là. Ce parcours semé d’embûches guerrières rappelle celui des descentes de torrents en rafting, où le courant vous entraîne vers les rochers affleurant sous la vague. Ils sont prêts à éventrer l’esquif mais on les franchit au dernier moment, d’un coup de pagaie ajusté par un instinct de conservation exacerbé. Semblablement, mon évolution de chrysalide se poursuivait au travers de ces deux guerres vécues bout à bout.

Voici donc cette histoire personnelle modelée par l’autre, l’Histoire majuscule qui figure dans les manuels scolaires, celle qui demeure grandement responsable de toutes les histoires individuelles

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inscrites dans la période, souvent au-delà. La société nous forme et nous déforme au gré de

nos faiblesses, des circonstances vécues et de l’éducation reçue. Dans the struggle for life, la lutte pour la vie, qui nous préoccupe au quotidien, la société laisse un certain nombre d’humains sur le carreau, mais le poète le dit de façon plus sanglante en prétendant que : « La création est une grande roue qui ne peut tourner sans écraser quelqu’un… » Victor Hugo (Les Contemplations).

En ce qui me concerne, j’ai survécu… alors autant témoigner.

Le monde a tellement changé au cours de ces soixante dernières années que certaines de ces scènes peuvent ne pas paraître crédibles, rapportées à notre mode de vie actuel. Pourtant, ces images arrachées au passé sont bien réelles, même si certains contemporains peuvent estimer qu’elles sont nées dans une imagination trop fertile. Ne cherchons pas à convaincre ces incrédules, s’il en existe. Ils manquent de repères sur l’époque trop rapidement effacée des mémoires par le progrès technique.

Cette tranche de vie, je l’ai vécue en souriant souvent, en souffrant aussi, mais en puisant toujours au fond du cœur l’espérance nécessaire permettant de franchir les obstacles de quelques coups de pagaie bien ajustés, comme le rafteur attentif triomphe du torrent tumultueux.

Pourquoi n’ai-je jamais appelé mes semblables à l’aide dans les moments difficiles ? Vivant au gré des

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événements, des semblables, je n’en rencontrais pas sur mon parcours ! Ce n’est pas la preuve d’une force mais plutôt d’une opportunité qui ne s’offrait pas à moi sur le moment.

J’ai écrit ces souvenirs d’abord pour mes enfants, qui comme beaucoup d’autres, s’interrogent sur la jeunesse de leur père, puis, pour tous ceux qui, ayant vécu ce temps, s’en souviennent encore ; enfin pour ceux qui cherchent des traces concrètes, des témoignages, ayant constitué la toile de fond de la jeunesse de leurs propres parents.

Ils pourraient bien en trouver quelques-uns ici en suivant mon cheminement D’UN PONT A L’AUTRE.

Sergil

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Première partie

Préado

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– I –

Le vélo rouge sur lequel je virevoltais maintenant, prouvait à la cantonade que l’examen du certificat d’étude avait été couronné de succès. Il en était la récompense. Nous étions en 1948 et depuis la fin de la guerre j’enviais les copains qui recevaient le précieux trophée. Aujourd’hui, c’était mon tour, et, je savais que les cycles Peugeot étaient de ceux qui s’exhibaient avec une certaine fierté. Même maintenant encore j’ai tendance à privilégier cette marque à cause de ce souvenir d’enfance, comme si la marque était synonyme de qualité cinquante ans après…

En ce jour de gloire, Monsieur Lepreux, notre instituteur, se mêlait à la foule des parents et des élèves venus constater les résultats. Habituellement sévère et peu enclin aux privautés avec ses élèves, il distribuait, ce soir, force sourires, félicitations et poignées de main. Cette familiarité de circonstance nous grandissait et nous faisait basculer d’emblée

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dans le monde des adultes, un peu vite, peut-être. Pensez-donc, nous lui parlions presque d’égal à égal !…

C’est vrai qu’il était sévère Monsieur Lepreux, une vraie terreur pour les élèves peu travailleurs. Il avait été prisonnier en Allemagne, et ponctuait certaines de ces phrases de citations rapportées de sa captivité. Quand il parlait allemand, on pouvait s’attendre au pire. Il appelait l’élève en agitant son index d’un geste non équivoque en disant : « kommen sie hier mein Herr ! Venez ici Monsieur ! Si l’on était concerné, c’était pour recevoir une paire de claques bien appliquée, les deux mains frappant à la fois chaque côté du visage. Cela permettait à la tête de rester bien droite sous le choc, prête pour un doublement de la peine, le cas échéant.

Lorsqu’il avait deux cancres en ligne de mire, il prenait une poignée de cheveux à chacun et frottait la joue de l’un contre celle de l’autre en disant : « asinus asinum fricat », l’âne frotte l’âne, une phrase de circonstance… Cela déchaînait des rires nerveux dans la classe, des rires de soulagement de ne pas être concerné, au moins cette fois-ci. Les deux malheureux rougissaient comme des coquelicots regrettant amèrement d’être là. Je ne dirais pas que Monsieur Lepreux avait ses têtes de turcs, mais ses sujets de détente, il les trouvait dans le dernier quart du classement hebdomadaire. Me situant dans le peloton central, la chance de ne pas être inquiété m’a un peu souri. J’ai tout fait pour éviter de me trouver sous les

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feux de la rampe, mais je n’étais jamais certain par avance que je serais épargné. Il arrivait au maître de déborder de sa tranche favorite de souffre-douleurs pour puiser, au hasard, dans le reste de la classe…

Il avait coupé une baguette dans la partie effilée d’une queue de billard ; il l’appelait Rosalie. Je ne pense pas que ce nom ait un quelconque rapport avec la baïonnette des soldats de la première guerre mondiale bien que parfois, elle ait servi à frapper les élèves. Le plus souvent, il l’agitait à la manière d’un chef d’orchestre pour ponctuer ses explications au tableau. Habilement, il jonglait, avec des craies rouges jaunes et bleues dont il jouait successivement comme un peintre avec ses pinceaux pour distinguer les accords grammaticaux.

Dans la dictée recopiée sur le grand tableau occupant toute la largeur du mur dominant l’estrade, il frappait de la pointe de Rosalie, à l’endroit précis de l’accord du participe passé.

Il traquait l’épithète, coupait la phrase de traits verticaux, et saucissonnait les propositions. Puis, il courait à l’autre bout du tableau chercher la relative qu’il subordonnait à la principale d’un long trait de craie blanche. Ayant retrouvé le complément d’objet au delà du verbe, il marquait finalement le désaccord du féminin pluriel au grand étonnement de ceux qui avaient oublié la règle.

Puis, il se retournait vers les élèves, les bras en croix, les cheveux en bataille et la blouse grise poudrée de la poussière des effacements multiples, jetant

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adroitement sa poignée de craies dans la boite accrochée au tableau. Pour ceux qui faisaient encore des fautes après de telles envolées, l’avenir littéraire paraissait compromis.

S’épongeant le front et reprenant son souffle, il s’asseyait près d’un élève et désignait l’un d’entre nous pour commenter ce travail. Il m’est arrivé, deux ou trois fois, de monter sur l’estrade. J’aurais bien donné le chocolat de mon goûter pour être remplacé à ce poste car je ne me sentais pas très à l’aise devant tous ces regards goguenards où ne se mêlait aucune compassion sur laquelle s’appuyer !

Je craignais Rosalie car elle permettait à Mr. Lepreux d’exécuter quelques solos de tambour sur des crânes particulièrement durs et je n’étais jamais sûr de pouvoir éviter cette douloureuse rencontre.

Des actes pour lesquels, l’instituteur aurait dû s’expliquer avec les parents, quelques années plus tard, mais au moment présent, il n’y avait pas de recours de ce côté. Les élèves, souvenons-nous en, recevaient aussi des châtiments corporels à la maison pour les mauvaises appréciations de leur carnet scolaire ou les retenues du jeudi.

Quand il y avait une victime désignée pour monter sur l’estrade, on percevait le relâchement de la respiration de toutes les poitrines des élèves qui se débloquaient à l’unisson sous les bras croisés. Le danger, momentanément éloigné d’eux, la décontraction revenait et l’ambiance générale s’allégeait…

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Enfin, aujourd’hui, je pensai que tout cela était bel et bien fini. Fini de voir brandie la dangereuse baguette. J’étais reçu au certificat ; il fallait le faire savoir ! Ce résultat momentané suffisait à mon bonheur et mon vélo rouge continuait ses arabesques dans la poussière.

Quand je pense à l’impression ressentie lors de la réception de ce premier diplôme, je souris au souvenir de mon émoi devant la dimension du rouleau de papier.

Le parchemin avait la surface d’un quotidien ; le nom de l’élève était calligraphié en écriture ronde avec des enluminures artistiquement dessinées ; des images de statues trônaient aux quatre angles du document. J’ignore si ces représentations figuraient des vestales ou des cariatides mais à coup sûr des déesses personnifiant les qualités requises pour être un bon élève. Je me souviens que la gravure était bordée par des entrelacs de vrilles et de pampres de vigne. Cette verdure dessinait le cadre du diplôme. Pas moins de trois signatures étaient apposées au bas du document officiel. Plus tard, les diplômes sanctionnant des études supérieures, virent la surface du papier diminuer de façon inversement proportionnelle à la difficulté de l’examen. Il fallait de grandes images pour encourager les plus jeunes !

En tous les cas, ce premier objectif était atteint. L’importance de l’événement m’emplissait de fierté et me laissait entendre que ce diplôme n’était pas rien…

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Au-dessus de la porte d’entrée de la classe, on pouvait lire : Classe de fin d’études. Monsieur Lepreux disait souvent en agitant Rosalie : « Ici se termine votre formation ». A l’entendre, on aurait cru qu’il n’y avait plus aucun espoir pour les élèves qui sortaient de sa classe. L’impression que je ressentais n’était pas loin de donner un sérieux coup d’accélérateur à mes ambitions d’étude. Dans un sursaut d’orgueil je me réveillais d’une torpeur paresseuse qui depuis quatre ans présidait à mon activité scolaire. J’étais dans une classe de fin d’études. A croire que je ne m’en étais pas aperçu car je n’avais rien fait pour empêcher cet aboutissement qui me paraissait, maintenant, un cul-de-sac plutôt qu’un tremplin. Pour une fois je n’étais pas d’accord, car enfin, il allait bien vite monsieur Lepreux même si le mot FIN décoloré figurait sur le linteau de la porte d’entrée !

A ce moment, je n’avais pas du tout envie de finir d’apprendre.

Comme si cela pouvait exister ? Finir est un mot de mort, et moi, je voulais vivre,

sauf que je ne savais pas trop comment m’y prendre. J’avais parfaitement conscience que je savais peu de choses, peut-être un peu plus que Rabolliot et encore, dans le domaine de la chasse aux lapins il demeurait mon maître…

Analysant ce réveil-là aujourd’hui et la panique qui s’en était suivie je crois qu’une dualité était née inconsciemment dans mon esprit : ne pas admettre

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d’avoir terminé mes études et ne pas savoir comment réagir pour mettre en œuvre un changement d’attitude. Je ne faisais pas confiance à mes capacités. Juste un peu de bonne volonté ressortait de ce remue-méninges. Une chose était certaine : j’étais réveillé même si j’appréhendais mal la tâche immense que constituait l’acquisition d’un nouveau savoir sans revenir dans le circuit scolaire et sans l’appui d’un conseiller extérieur.

Je sentais que mes parents ne me seraient d’aucune utilité dans une orientation au-dessus du niveau de leur propre scolarité. Bien que le certificat d’études que je venais d’obtenir à treize ans et demi, ma mère l’avait obtenu à douze ans au prix d’un trajet de quatorze kilomètres aller-retour pour atteindre l’école et en revenir en toutes saisons. Je n’avais aucun projet mais une curiosité toute neuve. Elle ne s’était manifestée jusqu’alors que dans les jeux et venait de gagner tous les domaines du savoir en un clin d’œil à cause d’une phrase désabusée : Ici se termine votre formation !…

Même aujourd’hui, en 2013, je n’ai pas encore l’impression de l’avoir terminée ma formation ! Je pense maintenant, à l’instar de Socrate « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien, mais çà, au moins, je le sais… ! ». A défaut de science, j’aurais donc appris la modestie !

D’ailleurs, se contredisant sans vergogne, monsieur Lepreux, lui-même, entreprit de créer une année de cours complémentaires en dehors des

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horaires de classe. Cela s’adressait à ceux qui souhaitaient tenter des concours d’entrée aux écoles des grandes entreprises industrielles lorsqu’elles acceptaient d’aménager leur temps de travail pour inclure ces stagiaires d’un genre nouveau. Tout cela permettait aux élèves, de poursuivre des études et de revenir dans le circuit « étudiants ». C’était un repêchage plus encourageant que le seul mot fin sec et brutal qui avait été asséné aux élèves de toute la classe comme un blâme, ou du moins comme un constat d’incapacité à progresser. Mon orgueil blessé refusait ce classement définitif, et je voyais là un petit espoir de rebondissement, une réponse, un chemin imprécis que je n’aurais pas pensé emprunter sans ce déclic qui me mènerait, je ne savais où…

Ma mère qui ne manquait pas d’à-propos., comprenait l’utilité d’une formation plus poussée quoique encore modeste. En parlant à mon père, elle avait réussi à lui faire accepter de me laisser continuer une année de plus, estimant que cela m’aiderait à obtenir plus facilement un emploi. Bien qu’elle le convainquit facilement puisqu’il ne s’insurgea pas, je savais qu’il aurait préféré me voir actif hors de l’école.

Comment aurais-je pu poursuivre des études supérieures dans une famille qui ne connaissait pas autre chose que le travail manuel ?

Pour les enfants de cette société-là, apprendre un métier manuel, constituait le seul objectif professionnel possible.

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Dès lors, puisque la décision était prise d’ajouter cette opportunité à ma formation que restait-il à faire, d’autant que j’avais récemment souhaité davantage encore que cette prolongation d’une année ? Je n’avais plus qu’à retrouver Rosalie et monsieur Lepreux à la prochaine rentrée d’octobre avec mon compagnon de promotion, ce beau vélo rouge !

Je m’empressai de vérifier si les parents de mes copains avaient la même idée que ma mère. Hélas, les deux-tiers d’entre-eux quittèrent l’école pour entrer en apprentissage et je perdis de vue la plupart de mes amis, parmi lesquels un certain nombre de cancres. Ils allaient pouvoir continuer, sans moi, leurs facéties dans les centres d’apprentissages.

Plus j’y pense, et plus je me rends compte que le ghetto social des familles dans l’immédiat après-guerre était entièrement cloisonné. Mon cursus scolaire n’avait aucune chance de déboucher sur des études longues sans une aide extérieure pour me montrer un autre chemin que celui de la classe de fin d’études. Mes parents n’y suffisaient pas malgré leur volonté d’aider leurs enfants. Ils avaient eux-même, depuis leur prime jeunesse, accepté leur condition et la transmettait avec le souci de bien faire. Leur origine agricole était grandement responsable de la limite de leurs ambitions. On le comprendra si l’on se souvient du décalage existant entre les préoccupations rurales des villageois vivant en auto-suffisance au gré des saisons dans les années 40 et celles plus compétitives

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des jeunes citadins n’attendant rien de la terre hors les légumes et les fruits que proposaient les marchés de quartiers. Leurs incertitudes de jeunesse ne s’appuyaient pas sur l’observation de la nature, mais sur la compétition existant en ville qui aiguisait leur curiosité et les poussait à s’en sortir dans une sorte de strugle for life, de lutte pour la vie, déjà bien présente.

Personnellement, je ne vivais pas à la campagne, mais je recevais l’héritage des acquis familiaux. Oh je ne cherche pas d’excuse à ma paresse mais je pense qu’elle n’était pas seule en cause dans la limitation de mes ambitions. Néanmoins, mes parents avaient parfaitement conscience de la nécessité d’un enseignement où la crainte, sinon la contrainte, devait être omniprésente dans le temps scolaire. Elle permettait d’obtenir de meilleurs résultats que les recommandations, ou les objurgations parentales. La crainte d’un châtiment corporel incitait à fournir un travail de précaution pour l’éviter.

Il m’aura fallu subir une souffrance sentimentale inattendue, brutale et durable pour me pousser à sortir de ma condition formatée. Grâce à une aide extérieure imprévue je découvris qu’une autre orientation était possible, comme nous le verrons plus loin après l’épisode pharmaceutique.

Même si cette année complémentaire n’a pas suffi à développer chez moi le goût d’étudier, ma curiosité s’est fortement accentuée par la suite. Déjà, les bases de l’orthographe et du calcul enseignées d’une