Du paradoxe à une pratique renouvelée de l’évaluation

formative

Pascale TOSCANIDocteure en psychologie cognitiveSpécialité : neuropsychologieResponsable du GRENE.MONDE (Laboratoire de Neurosciences Educatives)Formatrice à l’ISFEC ST Martin - ToursChercheure associée au LIRDEFUniversité de Montpellier

Christian PHILIBERTMembre du GRENE.MONDE (Laboratoire de Neurosciences Educatives)Formateur

Objectifs de cette 2ème session

• Proposer des démarches en lien avec la période de confinementque nous traversons en partant du principe que c’est une situationfavorable à l’évaluation formative.

• 3 propositions qui visent à fournir :Des repères pour les enseignants qui ne sont plus face à un

groupe classe

Des stratégies pour les élèves qui doivent travailler « seul ».

Des pistes à retenir pour mettre en place une

évaluation formative, dans la situation actuelle

et notamment :

• 1 : la mise en œuvre d’une évaluation formative

• 3 : le feed-back apporté aux élèves

• 5 : les stratégies de métacognition

• 6 : l’auto-verbalisation et l’auto-questionnement des élèves

Les défis

Associer évaluation formative et compétences

« L’approche par compétences permet d’insister sur la transformation en profondeur

de l’organisation cognitive de l’élève, car il s’agit bien de voir comment le savoir est

approprié et opérationnalisé dans des contextes variés, et non pas seulement répété ou

restitué dans les mêmes conditions que son acquisition. » B. Rey

Associer évaluation formative et compétences

Le travail possible ne consisterait donc pas à se limiter à avancer dans les programmes, mais à permettre aux élèves de prendre conscience du fait :

◦ Qu’ils ont automatisé un certain nombre de procédures et de le vérifier par eux-mêmes.

◦ Qu’ils sont capables de choisir les bonnes procédures en fonction de ce qui est demandé

◦ Qu’ils savent les combiner.

La pensée humaine

HeuristiqueSpontanée, sans que l’on puisse la contrôler vraiment.

Efficace pour prendre des décisions rapides, mais dépendante de l’organisation socio-cognitive

(algorithmique).

Elle est dépendante de notre contexte social (donc de nos préjugés), et de notre formation cognitive.

RéfléchieQui nécessite de la distance, de la réflexion. Elle

nécessite une connaissance sur un sujet, sa remise en cause, le doute.

Elle est également dépendante de notre contexte social (donc de nos préjugés), et de notre formation

cognitive. Elle nécessite une interrogation de nos certitudes.

La pensée humaine

Heuristique(système 1)

Réfléchie(Système 2)

Ne pas priver les élèves de leur raisonnement heuristique, qui leur est

indispensable.Partir de leur raisonnement heuristique pour les amener à modifier leur pensée.

Leur faire comprendre l’origine de leurs biais cognitifs, leurs erreurs de

raisonnement, et surtout, leur faire comprendre que ces erreurs sont naturelles aux êtres humains. En

revanche, revoir ses certitudes est… un devoir !

métacognition

Heuristique (système 1)

Réfléchie(Système 2)

La relation entre les deux systèmes est ce

qui se joue dans l’apprentissage.

La pensée humaine

L’enjeu de l’école est de faire prendre conscience aux élèves de ce que suppose de

modifier ses heuristiques.

L’humain est capable de s’adapter de façon étonnante à des nouvelles situationsen fonction de besoins nouveaux, mais cette adaptation est aussi limitée à causede ses propres biais cognitifs, ou de ses propres rigidités cognitives.

Ignace Philippe Semmelweis, médecin obstétricien hongrois fit comprendre l’importance del'hygiène des mains avant tout acte médical.Il démontra l'utilité du lavage des mains après la dissection d'un cadavre, avant d'effectuerun accouchement. Il démontra également que le lavage des mains diminuait le nombre desdécès causés par la fièvre puerpérale des femmes après l'accouchement. Jusqu'alors lesmédecins accoucheurs essayaient en vain de comprendre d'où venaient les fièvres puerpéralesen faisant de nombreuses autopsies. Ce fut un coup terrible pour ceux qui furent finalementconvaincus par les idées de Semmelweis : il s'avérait qu'eux-mêmes transmettaientinvolontairement la maladie.

Source : Wikipédia

1ère proposition Une démarche en 5 points d’appui

Cette proposition vise à donnerdavantage de place à l’évaluationformative – tout en gardant la mainsur la démarche.

Pour les enseignants

L’étoile de l’évaluation

Temps

Dialogue

Erreur

Critères de réussite

Critère de réalisation

5 ingrédients pour une évaluation dialoguée réussie

Thème Développement

Le tempsDans la situation d’une évaluation à distance, l’essentiel ne consiste pas obligatoirement à avancer à marche forcée dans le programme mais à permettre aux élèves de se situer par rapport à leur apprentissage.

Le dialogueLe temps réservé à l’écoute de l’élève doit être prioritaire. Il s’agit d’entrer dans une démarche de métacognition gérée par l’enseignant au service de l’élève (voir diapo suivante). S’interroger sur sa difficulté.

L’erreurLa métacognition vise à détourner l’élève de l’obsession de la bonne réponse pour apprendre à s’interroger sur ce qui lui permet d’apprendre, de modifier ses connaissances et de franchir des difficultés.

Les critères de réussite

Ces critères correspondent à ce qui est attendu en termes de « produit fini ». Un peu comme les photos d’un livre de recette. Par exemple : Qu’est-ce qu’un commentaire de document réussi. Ce qui suppose de fournir aux élèves des exemples de ce qui est attendu.

Les critères de réalisation

Ces critères correspondent à ce que l’élève doit mettre en œuvre pour progresser. Il est intéressant de les élaborer à partir d’une production et de mettre les élèves en réseau pour faire des propositions.Exemple : partir d’une introduction déjà rédigée et demander ce qu’il faudrait « faire » pour l’améliorer et qu’elle se rapproche davantage des critères de réussite.

7 questions importantes pour favoriser la

métacognition

1 Qu’est-ce que je dois faire en premier ?2 Y a-t-il des choses que je ne comprends pas ?3 Est-ce que je peux expliquer ce que j’ai appris ?4 Est-ce que j’ai besoin d’aide supplémentaire ?5 Pourquoi ma réponse ne convient-elle pas ?6 Puis-je appliquer mes compréhensions dans différents contextes ?7 Comment pourrais-je faire mieux la prochaine fois ?

5 ingrédients pour une évaluation dialoguée réussie

Thème Développement

Le tempsDans la situation d’une évaluation à distance, l’essentiel ne consiste pas obligatoirement à avancer à marche forcéedans le programme, mais à permettre aux élèves de se situer par rapport à leur apprentissage.

Le dialogueLe temps réservé à l’écoute de l’élève doit être prioritaire. Il s’agit d’entrer dans une démarche de métacognition gérée par l’enseignant au service de l’élève (voir diapo suivante). S’interroger sur sa difficulté.

L’erreurLa métacognition vise à détourner l’élève de l’obsession de la bonne réponse pour apprendre à s’interroger sur ce qui lui permet d’apprendre, de modifier ses connaissances et de franchir des difficultés.

Les critères de réussite

Ces critères correspondent à ce qui est attendu en termes de « produit fini ». Un peu comme les photos d’un livre de recette. Par exemple : Qu’est-ce qu’un commentaire de document réussi. Ce qui suppose de fournir aux élèves des exemples de ce qui est attendu.

Les critères de réalisation

Ces critères correspondent à ce que l’élève doit mettre en œuvre pour progresser. Il est intéressant de les élaborer à partir d’une production et de mettre les élèves en réseau pour faire des propositions.Exemple : partir d’une introduction déjà rédigée et demander ce qu’il faudrait « faire » pour l’améliorer et qu’elle se rapproche davantage des critères de réussite.

2nde proposition

Apprendre à coopérer

avec le numérique

Cette deuxième proposition vise :

La qualité de l’enseignement à distance

Le développement de l’autonomie des élèves

à engager les élèves à progresser … sans avoirni la pression, ni l’obligation de l’évaluation

Pour les élèves

Appendre à distanceà quelles conditions ?

Apprendre à distance favorise les interactions sociales … mais ce n’est pas suffisant !

Envoyer des contenus …Oui, mais ce n’est pas suffisant !3 éléments restent dans l’ombre :• La motivation ?• La capacité d’apprentissage ?• La compréhension ?

D’après Françoise Docq – Université de Louvain

Rappel des 4 piliers de l’apprentissage

Stanislas Dehaene• L’attention• L’engagent actif• Le retour d’information• La répétition

L’engagement actif :• Manipuler les informations • Transformer les informations• Discuter

Ce qui se traduit concrètement par : Répondre à des questions : type Quizz Résumer le texte ou la vidéo et poster sur la

plateforme Synthétiser la vidéo, le document, le chapitre, etc.

sous forme de schéma ou de carte conceptuelle et poster

Donner des exemples ou créer des liens avec d’autres connaissances et poster.

Feedback collectif sur les productions• Pointer les erreurs récurrentes, les

manquements, etc.• Montrer des extraits anonymisés

avec copie d’écran et commentaires

Feedback par auto-évaluation• Fournir une grille d’évaluation critériée• Voir diapo suivante

1

2

3

4

5

6

Exemple de grille d’auto-évaluation

Consignes Critères Indicateurs d’auto-évaluation

Résumez en 15 lignes les idées essentielles exposées dans cette vidéo.

Complétude : toutes les idées essentielles sont présentes

• Idée n°1 est-elle présente dans mes notes : oui/non• Idée n°2 est-elle présente dans mes notes : oui/non• etc.

Résolvez le problème suivant en respectant chaque étape vue dans le chapitre.

Respect des étapesExactitude de la résolution.

• Ma solution comporte x étapes sur les 7 étapes attendues

Les 7 étapes doivent être listées par l’enseignant.

• J’ai suivi les étapes dans l’ordre adéquat : oui/non.

• Ma solution pour l’étape 1 est-elle correcte ? oui/non

L’enseignant présente un corrigé-type de la première étape de résolution.

• Idem pour les étapes suivantes

D’après Françoise Docq – Louvain Learning Lab

3ème proposition

Développer les raisonnements

par inférence

Cette troisième proposition vise à développer desmodalités de pensée moins utilisées habituellement.

Dans un système basé sur des programmesprogressifs l’acquisition de connaissances se faitprincipalement par accrétion*

Elèves et enseignants

* accroissement par apports ou agglomération à la surface.

Pour produire une inférence logique, le

lecteur met en relation ce que dit le texte

ou le document à un endroit et ce que le

texte ou le document dit à un autre

endroit.

Inférence logique

Pour produire une inférence pragmatique,

le lecteur met en relation ce que dit le

texte ou le document à un endroit avec

ses connaissances personnelles.

Inférence pragmatique

Ce n’est pas l’empilement de la connaissance qui construit la connaissance.

La connaissance est un intériorisation dusavoir, par chaque être humain, qui luidonnera la couleur de son identité au fur et àmesure de sa vie. Le sens de cetteintériorisation, si elle est consciente, devraitfavoriser la nécessaire prise de distance parrapport à ses propres biais cognitifs,culturels, ses paradigmes.C’est une des finalités de l’école.