Droit Administratif Des Biens

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Bibliographie : Jacqueline MORAND-DEVILLER « Cour de droit administratif des biens » Michel DEGOFFE 2009 éditions SIREY Philippe TERNEYRE Code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) LITEC 2010 consultation autorisée pendant l’examen. Le droit administratif des biens consiste à étudier les moyens d’action de l’administration sur ses biens. Première partie consacrée à l’idée de propriété des personnes publiques et deuxième partie concernera les opérations immobilières des personnes publiques et les travaux publics. Partie 1 : La propriété des personnes publiques Les personnes publiques (état, établissements publics, collectivités territoriales et personnes sui generis) ont le droit de disposer d’un patrimoine, elles sont donc propriétaires d’un certain nombre de biens meubles et immeubles qui vont leur permettre d’accomplir leur mission. Depuis l’ordonnance du 21 avril 2006, l’accent est désormais mis sur la notion de propriété publique (avant on parlait de domaine public). La propriété publique recouvre à la fois les biens relevant du domaine public mais aussi les biens du domaine privé. Au XIX siècle les auteurs considéraient que les biens du domaine public n’appartenaient à personne. C’est au début du XXème siècle que Maurice HAURIOU a défendu l’idée de la propriété publique. Arrêt du C.E du 22 novembre 1901 ville de Saint Etienne où il admet une propriété publique. La consécration de cette idée intervient vraiment avec l’ordonnance de 2006. Page | 1

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Bibliographie   :

Jacqueline MORAND-DEVILLER « Cour de droit administratif des biens »Michel DEGOFFE 2009 éditions SIREYPhilippe TERNEYRECode général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) LITEC 2010 consultation autorisée pendant l’examen.

Le droit administratif des biens consiste à étudier les moyens d’action de l’administration sur ses biens. Première partie consacrée à l’idée de propriété des personnes publiques et deuxième partie concernera les opérations immobilières des personnes publiques et les travaux publics.

Partie 1 : La propriété des personnes publiques

Les personnes publiques (état, établissements publics, collectivités territoriales et personnes sui generis) ont le droit de disposer d’un patrimoine, elles sont donc propriétaires d’un certain nombre de biens meubles et immeubles qui vont leur permettre d’accomplir leur mission. Depuis l’ordonnance du 21 avril 2006, l’accent est désormais mis sur la notion de propriété publique (avant on parlait de domaine public). La propriété publique recouvre à la fois les biens relevant du domaine public mais aussi les biens du domaine privé. Au XIX siècle les auteurs considéraient que les biens du domaine public n’appartenaient à personne. C’est au début du XXème siècle que Maurice HAURIOU a défendu l’idée de la propriété publique. Arrêt du C.E du 22 novembre 1901 ville de Saint Etienne où il admet une propriété publique. La consécration de cette idée intervient vraiment avec l’ordonnance de 2006.

Titre 1 : Le domaine public

La propriété des personnes publiques a 2 composantes : le domaine public et le domaine privé.Cette distinction peut apparaitre quelque peu artificielle. Sous l’ancien régime, la distinction entre la personne du monarque (élément temporaire de l’Etat et de la Couronne) avait conduit la plupart des légistes à considérer que le roi n’était pas propriétaire des biens de la Couronne et qu’il n’en était qu’un administrateur. Le roi ne pouvait pas vendre ni aliéner les biens de la couronne. Cette règle de l’inaliénabilité des biens de la Couronne est formulée dès 1329. On va considérer que cette règle constitue une des lois fondamentales du royaume dont le respect s’impose aussi bien au roi qu’à ses sujets. Elle permettait d’éviter que le transfert de propriété devienne définitif et irrévocable. Cette règle a été confirmée par l’Edit de Moulins de 1566, par la suite et sous l’influence du ministre Colbert, un édit de 1667 est

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venu consacrer une deuxième règle : la règle de l’imprescriptibilité (le temps ne change rien à l’affaire). Formule de LOYSEL « Qui a mangé l’oie du roi cent ans après en rend la plume ».A la révolution Française, le domaine de la Couronne devient le domaine de la Nation , le principe de l’inaliénabilité est maintenu mais le législateur peut déroger à ce principe. Les révolutionnaires vont donc vendre les biens du domaine de la Nation. L’expression du domaine public apparait pour la 1ère fois dans le code civil de 1804 à l’art. 538, à l’époque cela concerne l’ensemble des biens qui ne sont pas susceptibles d’être la propriété des particuliers (chemins, routes, fleuves, ports…).Au XIXème siècle la règle de l’inaliénabilité a été réaffirmée : gestion lourde (on doit TOUT garder).Pour Victor PROUDHON il fallait limiter la notion de domaine public car elle était extrêmement contraignante, pour lui il y aurait un domaine public qui aurait besoin d’être protégé par les 2 règles (inaliénabilité et imprescriptibilité) et à coté il y aurait un domaine national qui ne nécessiterait pas une telle protection. Ces idées vont commencer à recevoir une certaine application grâce à des lois successives au cas par cas (loi de 1851 qui va rendre inaliénable les cours d’eaux).

En 1925 WALINE va donner une définition des critères du domaine public : selon lui, il s’agit de tout bien qui, soit à raison de sa configuration naturelle, soit à raison d’un aménagement spécial, est particulièrement adapté à la satisfaction d’un besoin public et ne saurait être remplacé par aucun autre dans ce rôle.

Chapitre 1 : la notion de domaine public

Historiquement, la définition du domaine public a été réalisée à la fois par la doctrine et par la JP. Interventions ponctuelles du législateur par exemple : le code de la voirie routière classe expressément dans le domaine public les autoroutes, routes nationales, départementales et voies communales ; l’ordonnance du 19 aout 2004 classe les immeubles à usage de bureaux de l’état et d’établissements publics, dans le domaine privé.

Section 1 : les critères du domaine public

Il y a deux critères principaux et un critère supplémentaire   : Pour faire parti du domaine public, le bien doit appartenir impérativement à une personne morale de droit public.

Le bien doit être affecté soit à l’usage du public, soit à un S.P.

Parfois le juge va utiliser la théorie de l’accessoire pour étendre le régime du domaine public à des biens qui ne remplissent pas les 2 premières conditions.

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La propriété d’une personne publique

1) Les biens du domaine public ne peuvent pas appartenir à des personnes privées

Les personnes de droit privé n’ont pas de domaine public, elles ont simplement un patrimoine. C.E 13 mai 1964 EBERSTRARCK une association de droit privé était propriétaire d’un cimetière israélite en vertu du droit local d’Alsace/Lorraine, le juge administratif a réaffirmé que cette association ne pouvait être propriétaire d’une partie du domaine public.CCA Bordeaux 16 janvier 2003 Une chapelle qui appartenait à une personne privée ne peut pas faire partie du domaine public communal même si la commune a subventionné la réfection de la chapelle.

Qu’en est-il de la propriété de biens affectés à un SP en cas de concession à une personne privée ?

Le JA distingue suivant ce qu’a prévu le cahier des charges. Lorsque les biens sont considérés comme des « biens de retour » cela signifie qu’ils ne cessent jamais d’appartenir à la personne publique concédante et donc le bien continu de faire parti du domaine public. Seuls les biens propres sont considérés comme faisant partie du patrimoine privé de la personne.

Qu’en est-il des biens acquis par une personne publique dans le cadre d’une copropriété ?

Le JA a considéré que la domanialité publique c'est-à-dire le régime juridique applicable au domaine public, est incompatible avec la copropriété C.E 11 février 1994 compagnie d’assurance la préservatrice foncière. Ce bien appartient à un ensemble régi par un règlement de copropriété dont l’application relève de décisions prises à la majorité par les copropriétaires. Le JA va considérer que sur ce type de biens, le régime du domaine public est intenable puisque la personne publique n’est pas forcément libre de ses décisions. Cette décision à des implications lourdes et gênantes et on va chercher à contourner la loi (propriété par surface, par étage).

2) Les différentes catégories de personnes publiques propriétaires d’un domaine public

Pendant très longtemps, seul l’état et les collectivités locales pouvaient être propriétaires d’un domaine public. Font parti du domaine public de l’état : le domaine maritime, fluvial, aérien, les routes nationales, les autoroutes…Font parti du domaine public départemental : les routes départementalesFont parti du domaine communal : les voies urbaines, les halles et les marchés, les cimetières ainsi que de nombreuses Eglises.

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Jusque 1984, le JA refusait cette possibilité d’avoir un domaine public aux établissements publics. Il autorisait des mises à disposition mais pas la propriété. C.C 2 avril 1963 admet qu’un établissement public puisse bénéficier d’un domaine public.Elle sera suivie par un arrêt du C.E 21 mars 1984 MANSUY le C.E va considérer qu’un établissement public y compris industriel et commercial peut disposer d’un domaine public.Cette JP a été confirmée par le code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) de 2006.

A) L’affectation à l’usage du public ou au service public

1) L’affectation à l’usage du public

On parle d’affectation à l’usage direct du public quand les particuliers peuvent utiliser le bien en question sans passer par l’intermédiaire d’un SP. Exemple : C.E 28 juin MARECAR le C.E établit le principe de la domanialité publique des biens affectés directement au public. « Considérant qu’il (le cimetière) est affecté à l’usage du public et qu’il doit être, des lors, compris parmi les dépendances du domaine public de la commune dont il s’agit ». Seule la loi pourra soustraire un tel bien (affecté à l’usage du public) du régime de la domanialité publique. EXCEPTION   : Ordonnance du 7 janvier 1959 : les chemins ruraux ne font pas partie du domaine public (des communes). Il y a donc aliénabilité potentielle si c’est dans le domaine privé.

A partir de l’arrêt du C.E du 22 avril 1960, BERTHIER, la haute juridiction exigera que les biens affectés à l’usage du public aient fait l’objet d’un aménagement spécial. C’était la possibilité d’intégrer des biens (qui ne correspondaient pas exactement aux critères) au domaine public (promenade publique qu’on voudrait protéger par exemple).Depuis le CG3P de 2006 le critère de l’aménagement spécial n’est plus exigé s’agissant des biens affectés à l’usage du public.

2) L’affectation à un SP

Est-ce que l’ensemble des biens affectés au SP font parti du D.P ?A partir de 1956 C.E 19 octobre 1956 Société le Béton dégage le critère de l’aménagement spécial pour essayer de restreindre le champ d’application du domaine public.

a) L’aménagement spécial Elle permet à certains biens de relever du domaine public : comme les monuments historiques C.E 11 mai 1959 DAUPHIN Ou encore C.E 17 mars 1967 RANCHON

a) L’aménagement indispensable à l’exécution du SP (Art. L.2111-1 du GC3P)

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C.E 28 decembre 2009 Sté BRASSERIE DU THEATRE

B) Le domaine public par accessoire

C)

1) La théorie de l’accessoire

Elle permet de rattacher un bien au domaine public pour autant qu’il appartienne à une personne publique. Utile lorsque le bien n’est pas affecté à un SP. Le juge va estimer qu’il faut un lien physique étroit entre le bien principal et le bien accessoire (gare ferroviaire avec son parking).

b) Un lien physique étroit entre le bien principal et le bien accessoire

C.E 13 juillet 1962 Dame LAURIAU

C.E 17 mars 1967 RANCHON les locaux situés sous l’hôtel de ville peuvent être soumis au domaine public car proximité géographique : logique du bon sens.

c) L’utilité du bien accessoire pour le bien principal

C.E 14 juin 1972 EIDEL le logement de fonction pour les gardiens du bois de Vincennes est utile au bien principal donc il est considéré comme un bien du domaine public.

2) La portée de la théorie de l’accessoire

d) La domanialité publique globale

Cette théorie renvoie à la domanialité publique globale C.E 5 février 1965 Sté lyonnaise des transports. Gare ferroviaire avec garage sous terrain qui servait de parking aux voyageurs. Il le considère comme un bien du domaine public. Depuis une vingtaine d’années la politique JPlle est plus restrictive. C.E 4 novembre 1987 Chambre de commerce et d’industrie de Bordeaux le C.E va considérer qu’on ne peut pas retenir une conception globale dans cet aspect et ici on se trouve sur du domaine privé.

e) La conception restrictive de la théorie de l’accessoire par le CG3P

La théorie de l’accessoire peut être appliquée s’il y a un lien physique étroit entre le bien accessoire et le bien principal mais aussi une utilité au bien principal. Critères cumulatifs.

Section 2 : la consistance du domaine public

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On distingue les biens meubles des biens immeubles

D) Le domaine public immobilier

E)

On distingue le domaine public naturel du domaine public artificiel.D.P naturel : Il contient les biens qui appartiennent à une personne publique et qui sont affectés à l’usage du public ou à un SP en raison de la survenance d’événements naturels. Le domaine public artificiel : regroupe des biens qui ont fait l’objet d’un aménagement spécial voulu par l’homme.

3) Le domaine public naturel

Il regroupe principalement le domaine public maritime naturel et le domaine fluvial naturel.

f) Le domaine public maritime naturel

Le CG3P distingue 6 catégories de biens relevant du DP maritime naturel (aujourd’hui il n’y en a plus que 5). Première catégorie : le rivage de la mer, le sol et le sous sol de la mer territoriale.L’ordonnance sur la Marine de 1681 précisait ainsi pour les rivages non méditerranéens : « Sera réputé bord et rivage de la mer tout ce qu’elle couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes et jusques où le plus grand flot de mars se peut s’étendre sur les grèves ». Ordonnance reprise par le CG3P en 2006 Art. L.2111-4 « Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu’elle recouvre et découvre jusqu’où les plus hautes mers peuvent s’étendre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ». Il peut y avoir quelques exceptions   : l’état peut autoriser une personne privée ou une autre personne publique à réaliser des travaux à la faveur d’une concession d’endigage, ces personnes peuvent donc devenir propriétaire d’une partie du nouveau rivage de la mer obtenue après les travaux d’endigage.Le CG3P manifeste une nette défaveur vis-à-vis des concessions d’endigage pour l’avenir. Depuis la loi du 28 novembre 1963, le sol et le sous sol de la mer territoriale font également parti du DP maritime et depuis une loi de 1971, la largeur de la mer territoriale a été portée à 12 miles marins.

Deuxième catégorie : le sol et le sous sol des étangs salésDepuis un arrêt de la CC de 1842 les étangs salés appartiennent au DP. Ils sont définis comme une baie communiquant avec la mer par une issue plus ou moins étroite et qui en est une prolongation et une partie intégrante formée des mêmes eaux et peuplé des mêmes poissons. Si un événement naturel met fin à la communication entre l’étang et la mer, l’étang redevient privé.

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Civ. 29 février 1968 SCI THEY de ROUSTAN « Le propriétaire qui avait été privé de ses droits par la perte de son immeuble sous le seul effet des forces de la nature se trouve réintégré dans sa propriété lorsque, de la même manière, l’obstacle qui l’en a privé a disparu ».

Troisième catégorie : Les lais et les relais de la merLes laies sont des terrains formés par des alluvions que la mer apporte sur le littoral et qui émergent au dessus du niveau atteint par le plus grand flot. Les relais de la mer sont constitués par les terrains que la mer laisse à découvert en se retirant et qui ne sont plus submergés par le plus grand flot. Autrefois ces laies et relais appartenaient au domaine privé, c’est une loi de 1963 qui les a incorporés au DP.

Quatrième catégorie : La zone de 50 pas dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de Mayotte et de la Réunion.Sous l’ancien régime la règle des 50 pas du roi permettait d’assurer la défense des iles coloniales (élever des fortifications…) cette bande de terrain appartenait au roi.Aujourd’hui et ce depuis 1986, cette zone des 50 pas fait partie du DP maritime pour des raisons de protection de l’environnement (éviter les pollutions maritimes).

Cinquième catégorie : Les terrains acquis par l’Etat en vue de la satisfaction des besoins d’intérêt public d’ordre maritime, balnéaire ou touristique. Par exemple : les ports naturels.

g) Le domaine public fluvial naturel

Jusque 2003 ce domaine appartenait obligatoirement à l’état mais depuis la loi du 30 juillet 2003, l’état peut transférer la propriété de certains biens relevant du DP fluvial aux collectivités territoriales qui en font la demande. Exemple : le domaine public fluvial de l’Ain. Les collectivités territoriales peuvent recourir à des expropriations vis-à-vis de personnes privées propriétaires. Il existe donc un DP fluvial de l’état et un DP fluvial des collectivités territoriales. La nécessité de protéger l’eau. L’ensemble des eaux stagnantes ou courantes relèvent du régime de la domanialité publique dans les îles.

4) Le domaine public artificiel

Il concerne l’ensemble des biens publics immobiliers qui ont été créés par l’intervention humaine, certains de ces biens sont affectés à l’usage direct du public et d’autres à un SP.

h) Les biens affectés à l’usage direct du public

Le domaine public routier : l’ensemble des voies de communications terrestres affectées à la circulation générale du public à l’exception des chemins ruraux et des voies ferrées.

Par extension : les parcs de stationnement aménagés spécialement comme dans l’arrêt du C.E du 11 octobre 1995 Tête. Ainsi que les ponts C.E 26 septembre 2001 Département de la Somme.

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Le domaine maritime artificiel : Les ports et leurs dépendances.

Le domaine fluvial artificiel : Les canaux, ports fluviaux et leurs dépendances

+ Font également partie du domaine public artificiel d’autres types de biens comme les Eglises, les cimetières, les promenades publiques, les palais.

i) Les biens affectés à un SP

Le domaine public ferroviaireL’Etat reste propriétaire des biens «  liés aux services de transport » que gère la SNCF.RFF est propriétaire « des biens constitutifs de l’infrastructure ferroviaire ». Ex : les voies ferrées, les installations de télécommunication. Depuis la loi du 13 février 1997 ce domaine public ferroviaire appartient à Réseau Ferré de France (EPIC) et la SNCF ne conserve que la gestion des biens liée à l’exploitation des services.

Le domaine public militaireLes casernes relèvent désormais du domaine privé.

Le domaine public aéronautique, aérien, hertzienEx : les aérodromes locaux et leurs dépendancesContrôle de l’état sur l’utilisation des voies aériennes. Sauf : Aéroports de Paris devenus qui relèvent d’une S.ALes fréquences radio électriques appartiennent au DP de l’Etat (affirmé par le CG3P).

F) Le domaine public mobilier

G)

La C.C en 1841 est la première à reconnaitre l’existence d’un DP mobilier, l’intérêt est de permettre à la C.C d’éviter qu’un bien qui avait appartenu à l’Etat et qui avait été volé ne bénéficie des prescriptions de droit commun. Dans l’affaire de la C.C du 17 juin 1896 Jean BONNIN contre Villes de Mâcon et de Lyon manuscrits de la cité de Dieu de Saint-Augustin. C.A Paris le 4 avril 2006 MERCIER Des fragments de la colonne Vendôme avaient été volés et sont réapparus en 2000 sur des marchés publics. Le juge a considéré qu’on était face à un fragment d’un bien public mobilier et donc retour au DP. Loi du 4 janvier 2002 relative aux Musées de France pose définitivement : « les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont, à ce titre, inaliénables ».Font également partie du domaine public mobilier tout ce qui a un rapport avec l’histoire, l’art, l’archéologie, la science, la technique. Exemple : Les archives publiques, collections des musées.

Chapitre 2 : la formation du domaine public

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Section 1 : l’entrée et la sortie d’un bien du domaine public

Art L.211-3 alinéa 1 du CG3P : « S’il n’en est disposé autrement par la loi, tout acte de classement ou d’incorporation d’un bien dans le domaine public n’a d’autre effet que de constater l’appartenance de ce bien au domaine public ». L’entrée d’un bien dans le domaine public ne se décrète pas mais se constate.Le JA va décider lors d’un litige si le bien fait partie du domaine public ou non.

H) L’incorporation dans le domaine public

I)

5) L’incorporation au domaine public naturel6)

C’est en principe automatique car cela dépend d’un événement naturel, aucun acte de classement n’est nécessaire (rivage de la mer). Ex : Les terres envahies par la mer intègrent automatiquement le domaine public sans indemnisation possible. La seule possibilité pour le propriétaire est d’obtenir une concession d’endigage. Le législateur a prévu des exceptions   : Pour tous les cours d’eaux et les lacs il faut un acte de classement en plus de la survenance d’événements naturels.C.E 18 juin 1976 Sieur MENARD et Dame PUJOL.

7) L’incorporation au domaine public artificiel

j) La primauté de l’affectation matérielle sur la décision de classement

Une décision de classement n’est ni nécessaire ni suffisante. En effet, la JA vérifie avant tout que les critères JPels soient satisfaits. C.E 9 mai 1958 DELORT, absence d’acte de classement mais incorporation du bien dans le DP. C.E 22 avril 1987 MICHAUD, c’était un bien classé dans le domaine privé qui est reclassé par le JA dans le domaine public : requalification possible.

k) L’acte juridique de classement : l’affectation formelle

L’autorité compétente : en principe, c’est l’organe délibérant de la personne publique propriétaire. Exemple : au sein d’une commune c’est le conseil municipal. L’organe délibérant va préciser la destination du bien. La plupart du temps, la décision de classement prend la forme d’un acte administratif unilatéral (décrets, arrêtés…).

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Parfois l’acte de classement va résulter d’un contrat passé entre une personne publique propriétaire et (par exemple) un concessionnaire de SP.

J) La sortie du domaine public

K)

Le JA se trouve plus formaliste pour la sortie d’un bien du domaine public. La JP considère qu’un bien doit être à la fois désaffecté et déclassé pour sortir du DP et incorporer le domaine privé de la personne publique.Exemple   : la privatisation de TF1 par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. C.E 20 juin 1930 MARROT, chemin qui relevait du DP d’une commune et qui avait fait l’objet d’un acte de classement mais ce chemin s’est transformé en ruisseau, le chemin était désaffecté mais la commune n’avait pas procédé au déclassement du chemin donc celui-ci appartient toujours au DP(C’est souvent une question d’assurance lors d’un litige). Une personne publique ne peut pas déclasser un bien qui continuerait à être affecté à l’usage du public ou à un SP. CAA Bordeaux 27 avril 2004 ASSOCIATION EGLISE SAINT ELOI. Pour un lieu de culte, il faut demander l’accord au ministre.

Section 2 : les mouvements d’affectation au sein du domaine public

Les changements dans l’affectation d’un bien sont très fréquents. Exemple   : l’ancienne piscine Art Déco de Roubaix a été aménagée en musée.

L) Les changements d’affectation volontaires

M)

8) La volonté de la personne publique propriétaire

1ère hypothèse : un changement voulu par la personne publique propriétaire.C.E 30 Octobre 1987 Commune de LEVALLOIS-PERRET, la commune a décidé d’affecter un immeuble aux services municipaux alors que jusque là, l’immeuble était utilisé par une association privée.

9) Les changements d’affectation décidés à l’amiable entre personnes publiques

l) Le transfert de propriété à l’amiable

m)L’état voudrait acquérir la propriété d’un bien d’une autre personne publique qui n’est pas consentante. L’état a-t-il le droit d’exproprier un bien qui appartient à une autre personne publique ?

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T.C 28 janvier 1899 Ville de PERIGUEUX, le tribunal admet la légalité d’une expropriation portant sur des biens départementaux et communaux. Mais malgré cet arrêt de principe qui aurait du faire JP, l’état ne l’a jamais emporté et ce principe ne fut plus jamais appliqué. C’est l’arrêt C.cass 20 décembre 1897 Chemin de fer d’Orléans, qui fait JP. Une personne publique ne peut pas exproprier une autre personne publique. L’expropriation est illégale en raison du principe d’inaliénabilité du DP. Le transfert de propriété ne peut avoir lieu que par la voie amiable : soit à titre onéreux (armée qui vend des anciennes casernes aux communes) soit à titre gratuit (la ville de paris a transféré gratuitement la propriété de terrains qui lui appartenaient au bénéfice de l’état pour la réalisation de la bibliothèque F. Mitterrand). Le législateur peut imposer à une collectivité publique la vente d’un de ses biens relevant de son DP moyennant une indemnisation.

n) Le transfert de gestion

On change l’affectation du bien mais il ne change pas de propriétaire. On va permettre à une autre personne publique de se servir du bien et de le gérer. Une personne publique peut donc décider d’un changement en faveur d’une autre personne publique, cette autre personne publique se voyant confier la gestion du bien. Cette possibilité a été confirmée par le CG3P : Art L 2123-3 du CG3P : «  Les personnes publiques peuvent opérer entre elles un transfert de gestion des immeubles dépendant de leur domaine public pour permettre à la personne publique bénéficiaire de gérer ces immeubles en fonction de leur affectation ». Si on veut récupérer le bien, il faudra indemniser la personne publique affectataire.C.E 20 février 1981 Association pour la protection du site du vieux Pornichet.

N) Les changements d’affectation autoritaires : les mutations domaniales

O)

10)La théorie JPelle des mutations domaniales

En principe une personne publique ne peut pas disposer de l’affectation d’un bien appartenant au DP ou à une autre personne publique. Il existe une exception : forgée par la JP en vertu de la théorie des mutations domaniales. Elle donne à l’état le pouvoir d’imposer un changement d’affectation mais non par un transfert de propriété d’un bien appartenant au DP d’une autre personne publique. Elle permet de contourner l’interdiction du recours à l’expropriation entre personnes publiques. C.E 16 juillet 1909 Ville de Paris et 13 mars 1925 Compagnie du chemin de fer d’Orléans. Ligne de chemin de fer qui se prolongeait jusque dans Paris, l’état avait changé autoritairement l’affectation de terrains appartenant à la ville de Paris pour permettre une ligne sous terraine. La ville de Paris restait propriétaire du terrain mais elle n’avait plus la jouissance de celui-ci. Cette théorie interdit aux collectivités territoriales concernées de demander une indemnisation car elles restent propriétaires du bien malgré qu’elles ne puissent plus en avoir l’usage. Le JA a dissocié la propriété et l’affectation du bien. Théorie consacrée par l’Art L.2123-4 du CG3P : «  Lorsqu’un motif d’intérêt général justifie de modifier l’affectation de dépendances du domaine public appartenant à une collectivité

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territoriale(…), l’Etat peut, pour la durée correspondant à la nouvelle affectation, procéder à cette modification en l’absence d’accord de cette personne publique ».

11) Une théorie en contradiction avec le principe de libre administration des collectivités territoriales.

La théorie des mutations domaniales repose sur une conception de l’unité du DP. L’état aurait un droit général qui lui permettrait de modifier les affectations. Elle place les collectivités territoriales dans une position d’infériorité vis-à-vis de l’Etat ce qui va à l’encontre de l’art. 72 de la Constitution. Depuis 2006 et le CG3P, désormais il est prévu une forme d’indemnisation lorsque le changement d’affectation occasionne à la personne dessaisie des dépenses ou des privations de revenus. La plupart du temps les personnes publiques mènent des accords à l’amiable.

C.E 3 Décembre 1993 Ville de Paris contre M. ParentC.E 23 juin 2004 Commune de PROVILLE

Section 3 : la délimitation du domaine public

Elle permet de déterminer les limites du DP par rapport aux propriétés privées riveraines. En droit privé, les propriétés sont délimitées par l’opération juridique du bornage (Art 646 du code civil). En droit administratif, l’opération est réalisée grâce à un acte administratif unilatéral. Les litiges relatifs à la délimitation du DP relèvent du JA (hormis lorsque le juge civil doit intervenir).

P) La délimitation du domaine public naturel

Q)

12)La nature de l’acte de délimitation

Pour les rivages de la mer la délimitation est fixée par décret en C.E, ces actes administratifs unilatéraux doivent être publiés et notifiés aux riverains. Les propriétaires riverains ont 10 ans pour intenter une action en revendication pour des terrains qu’ils pensent faire partie de leur patrimoine. Le projet de délimitation donne lieu à une enquête publique au cours de laquelle les riverains peuvent faire part de leurs observations. Cette décision n’est régulière que si elle coïncide avec les phénomènes naturels. La procédure de délimitation ne peut pas être effectuée à l’amiable (le bornage peut être fait à l’amiable).

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13)Les droits des riverains

Le juge doit tenir compte des titres de propriété qui pourraient faire échec à l’appartenance du bien au DP. Pb avec les titres de propriété datant d’avant 1566, et pendant la révolution, ils ne seront pas remis en cause. Le riverain a le droit d’exiger de l’administration qu’elle procède à la délimitation de sa propriété. L’administration ne peut pas lui refuser.Le riverain peut attaquer une délimitation irrégulière au moyen d’un REP.

R) La délimitation du domaine public artificiel

S)

La plupart du temps pour la délimitation du domaine public artificiel on passe par un acte administratif unilatéral, il existe toutefois une procédure particulière qui concerne la délimitation du DP routier : la procédure d’alignement. Cela concerne les voies terrestres ouvertes à la circulation à l’exception des voies ferrées.

14)La procédure d’alignement : plan d’alignement et alignement individuel

C’est une procédure ancienne en matière d’urbanisme, elle a été créée par l’édit de décembre 1607 d’Henri IV. Cette procédure très autoritaire a survécu à tous les régimes et a été confirmée par une loi de 1791 alors même qu’on venait d’affirmer le droit de propriété dans l’art 17 de la déclaration de 1789. Cette procédure a pour principal mérite d’être économe des deniers publics, elle n’a pas d’autre justification. On préfère sacrifier le droit de propriété pour permettre d’élargir les voies publiques à moindre frais en n’indemnisant pas correctement les propriétaires privés.

L’article L 112-2 du code de la voirie routière dispose désormais que « le sol des propriétés bâties à la date de publication du plan d’alignement est attribuée à la collectivité propriétaire de la voie dès la destruction du bâtiment ».

L’article L 112-6 précise qu’ « aucun travail confortatif ne peut être entrepris sur un bâtiment frappé d’alignement ».

Cette procédure permet d’éviter l’empiétement des propriétaires riverains, elle permet également à l’administration de modifier les limites existantes de ces propriétés sans passer par la procédure normale d’expropriation pour cause d’utilité publique.

La procédure d’alignement se décompose en 2 phases   :

- Etablissement d’un plan d’alignement : c’est un acte administratif unilatéral qui détermine la limite entre une ou plusieurs voies publiques et les propriétés riveraines.

Pour les lignes nationales : arrêt préfectoral pour la voirie communale : délibération municipale. Ces plans d’alignement font l’objet d’une enquête publique

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- L’alignement individuel : acte administratif unilatéral pris par l’administration sur la demande du propriétaire afin d’indiquer les limites de son bien par rapport à la voie publique. Cet alignement est un préalable à tout projet de travaux immobiliers sur des bâtiments situés en bordure de la voie publique.

15)Le caractère attributif du plan d’alignement

Le plan d’alignement constate les limites existantes mais parfois il peut aussi modifier les limites : transfert de propriété au profit du domaine public. Distinction suivant si le terrain est bâti ou non bâti. Lorsque le terrain incorporé dans le domaine public n’est pas bâti : le transfert de propriété a lieu immédiatement moyennant indemnisation des propriétaires concernés. Lorsqu’il est bâti, il n’y a pas transfert immédiat de propriété dans le domaine public : les constructions sont frappées d’une servitude de reculement qui interdit toute construction nouvelle et tous travaux confortatifs sur les bâtiments existants. Seuls sont possibles les travaux esthétiques (par exemple : ravalement de façade qui ne s’accompagne pas de travaux d’étanchéité).

16)Les limites de l’effet attributif du plan d’alignement

Un plan d’alignement ne peut servir qu’à déplacer la voie ou l’élargir quelque peu. L’élargissement doit être raisonnable sinon le juge l’annulera pour illégalité d’alignement. Les bâtiments qui ne sont pas touchés directement par l’alignement ne doivent pas être rendus inutilisables. C.E 16 novembre 1983 TRIBIER.

Titre 2 : le régime juridique des biens publics

Chapitre 1 : la domanialité publique

Le domaine public a un régime juridique caractéristique du droit administratif. Ce régime est particulier car le domaine public bénéficie d’une protection spécifique et son utilisation est régie par des règles particulières

Section 1 : le protection du domaine public

C.E 21 mars 2003 SIPPEREC, en vertu de l’art 17 de la déclaration de 1789, la protection du domaine public est un impératif d’ordre constitutionnel. Pour le C.E cela signifie que la protection doit être placée à un très haut niveau juridique, elle est assurée par la police de conservation du domaine public. C’est une procédure répressive spécifique dont le contentieux appartient pour partie au JA : contraventions de grande voirie et au J.J : contraventions de voirie routière. Cette police de conservation a pour objet la remise en état du domaine public s’il y a eu dégradation et également l’expulsion des occupants sans titre.

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�ऀT) Certaines règles du droit administratif permettent de préserver la consistance du DP

U)

Trois règles d’importance inégales s’appliquent au DP :

17)Règles d’inaliénabilité (1566) et d’imprescriptibilité (1667) du DP

Ces règles sont très anciennes. T.C 24 février 1992 COUACH, il prétendait détenir des titres de propriété antérieurs à 1566 et être propriétaires de parcelles situées sur le bassin d’Arcachon (DP maritime naturel) l’administration le considérait comme un occupant sans titre et lui infligeait régulièrement de contraventions de grande voirie. Le TC donne gain de cause à l’administration estimant que les titres de propriété de Mr COUACH ne sont pas probants «  aucune possession utile ne peut être opposée » à l’administration pour ce qui relève de son DP. Un usage long et répété ne peut pas se transformer en titre de propriété. Le CG3P a réaffirmé ces principes. Mais on peut relativiser leur portée : il suffit à l’autorité administrative compétente de procéder à la désaffectation du bien puis à son déclassement pour pouvoir vendre le bien en question. Pour ce qui est du DP naturel, le principe d’inaliénabilité est d’une très grande efficacité puisque la vente de ses biens n’est possible qu’après disparition des phénomènes naturels qui ont entrainé leur incorporation dans le DP. La vente n’est possible qu’en raison de la survenance d’un facteur que l’autorité administrative ne maitrise pas.

18)Principe d’insaisissabilité du DP

Ce principe constitue un principe général du droit. C.C 31 mars 1819 JOUSSELIN, interdit de saisir les biens publics ou privés des personnes publiques. Principe confirmé pour les biens des collectivités territoriales : C.C 16 décembre 1965 Commune d’Azay le rideau, ce principe s’applique également aux établissements publics : C.C 21 décembre 1987 BRGM « s’agissant de biens appartenant à des personnes publiques, même exerçant une activité industrielle et commerciale, le principe d’insaisissabilité de ces biens ne permet pas de recourir aux voies d’exécution de droit privé ». C’est un atout car l’EPIC peut accumuler des dettes et ne craindra pas de se faire saisir ses biens : continuité du service. Mais cela peut faire fuir certains partenaires qui n’ont pas envie de contracter avec un partenaire qui bénéficie de protections hors normes. Cette protection est garantie par un PGD, il interdit en pratique la saisie/vente sur les meubles, n’est pas d’avantage possible la saisie/attribution sur les créances. Ce principe a fait l’objet de certaines critiques : cela empêche les personnes publiques d’accéder à des taux d’intérêts plus favorables de la part des établissements bancaires.

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JP : C.E 18 novembre 2005 soc. Fermière de CAMPOLORO, le JA estime que le préfet peut se substituer à une collectivité défaillante et procéder à la vente de certains de ses biens lorsque ceux-ci ne sont pas indispensables au bon fonctionnement du S.P.

V) La protection de l’utilisation du DP

W)

19)Les servitudes établies en faveur du domaine public

Contraintes qui pèsent sur les propriétaires riverains   : droits réels de nature administrative qui grèvent les fonds voisins du domaine public (s’imposent aux propriétés riveraines) en imposant certaines obligations sur les propriétaires riverains. Les servitudes administratives bénéficie des règles d’inaliénabilité et l’imprescriptibilité et leur contentieux relève du J.A.

Il existe 3 types de servitudes   :

- Obligation de ne pas faire (servitudes in non faciendo)

Exemple : servitude de reculement avec l’interdiction des travaux confortatifs pour les bâtiments frappés d’alignement.

- Servitudes de laisser faire (in patiendo)

Exemple : servitude de halage (chemins au bord du canal par exemple).- Obligations de faire (in faciendo)

Exemple : servitude d’essartement (élagage des plantations d’arbres qui bordent un chemin au milieu d’une forêt c’est le propriétaire voisin qui doit s’occuper de cet entretien).

Ces servitudes ne donnent pas lieu à indemnisation C.E 14 mars 1986 commune de Gap-Ramette, le JA admet qu’une indemnisation peut être due lorsque le propriétaire parvient à prouver l’existence d’un préjudice spécial et anormal.

20)Les servitudes et les charges établies en faveur des propriétés riveraines

o) Les servitudes conventionnelles

Etablies à l’amiable contractuellement, difficilement admises par le JA. Seule exception : lorsqu’un bien avait fait l’objet d’une telle servitude avant l’incorporation de ce bien dans le DP. C.E 11 mai 1959 DAUPHIN, promenade publique qui avant était grevée d’une servitude de passage, la servitude de passage doit être supprimée mais elle donnera lieu à une indemnisation.Désormais elles sont admises par le CG3P avec pour seule condition de respecter l’affectation du bien.

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p) Les aisances de voirieq)

Le domaine public supporte quant à lui quelques charges au profit des immeubles riverains : ces aisances de voirie sont des droits qui bénéficient aux riverains en matière d’utilisation de la voie.

Le droit d’accès limité aux riverains des voies ordinaires

Elle permet aux riverains d’ouvrir des portes donnant sur la voie publique, d’accéder à la propriété en véhicule et de stationner sur la voie pour charger ou décharger.

C.E 29 avril 1963 RAPIN terrasse d’un café qui bloquait partiellement une entrée d’immeuble, la mairie n’a pas réagi à la demande des riverains et la commune a été condamnée pour ne pas avoir fait cesser l’atteinte à l’aisance de voirie.

Le droit de vue

Permet de disposer d’ouvertures et de fenêtres donnant sur la voie sans avoir à respecter le code civil qui interdit d’obtenir une vue sur la propriété de son voisin. Ce droit de vue peut être limité par la présence de certains ouvrages publics (poteaux EDF, bancs publics…). C.E 21 janvier 1976 Commune de MARGON, le JA prévoit une indemnisation pour le propriétaire riverain en raison d’un préjudice anormal et spécial. On avait placé un abri bus devant les fenêtres d’une maison le propriétaire a été indemnisé.

Le droit d’écoulement des eaux

Il permet d’utiliser le raccordement aux égouts destiné aux eaux usées pour les eaux pluviales et ménagères.

X) La police de la conservation du DP

Y)

L’infraction à cette police constitue une contravention de voirie, cette infraction est un « fait matériel pouvant compromettre la conservation du DP ou nuire à l’usage auquel il est légalement destiné » LAFERRIERE 1888.

21)La protection pénale du DP

r) Une police spécifique

C’est une P.A.S qui ne porte que sur les dépendances du DP alors que la P.A.G a pour but le maintien de l’ordre public, la police de conservation tend quant à elle à maintenir ou à rétablir l’intégrité matérielle des biens publics. S’agissant des autorités administratives compétentes :

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une même autorité peut être chargée de la PAG et de la police de conservation du DP. Mais ce n’est pas toujours le cas : à Paris le préfet de police est compétent en matière de PAG alors que c’est le maire qui est compétent en matière de police de conservation du DP.

s) Les contraventions de voirie

Les contraventions de voirie sont distinctes des contraventions de police car elles ne se prescrivent pas. Parmi les contraventions de voirie on distingue les contraventions de voirie routière des contraventions de grande voirie.

Les contraventions de voirie routière Depuis 1926, c’est le J.J qui est compétent. Elles concernent les atteintes portées aux voies publiques et à leurs dépendances ainsi que les entraves de toute nature apportées à l’usage auxquelles elles sont destinées par exemple il peut s’agir de la dégradation de la chaussée lors d’un accident. L’infraction peut également résulter d’un empiétement sur la voie publique : construction d’un ouvrage sans autorisation préalable. Dans la pratique, comme le JJ est compétent, on les distingue des contraventions de police seulement vis-à-vis des autorités compétentes et des prescriptions.

Les contraventions de grande voirieIl s’agit de l’ensemble des infractions à la police des infractions du DP autres que celles relatives au DP routier. Ces contraventions protègent les biens publics relevant du DP mais aussi les servitudes administratives. Elles relèvent de la compétence du JA et elles concernent principalement les domaines publics maritime, fluvial, ferroviaire et militaire. Exemples : une automobiliste qui cause une dégradation à un passage à niveau (DP ferroviaire) sera condamnée à une contravention de grande voirie. Pour une atteinte au DP maritime : CAA Paris 29 septembre 1995 Wong et autres, dégradation en enlevant des coraux. C.E 27 juillet 1984 Mme GALLI déversement d’eaux polluées dans le DP fluvial. C.E Gérard Philippe 1er avril 1960, cet acteur possédait une propriété en bordure du DP fluvial et avait construit une clôture sans respecter la servitude de marche pied. En principe, l’administration est obligée d’engager des poursuites s’agissant des infractions portées au DP sous peine d’engager la responsabilité de l’administration. 27 mai 1977 Sté DELFORGE, l’administration engage sa responsabilité car elle n’a pas mis fin à une grève des mariniers, la circulation sur le canal était rendue impossible. L’administration n’a pas l’opportunité des poursuites c'est-à-dire ce qui permet au procureur de la république de décider d’engager l’action publique ou de ne pas l’engager contre un délinquant. En pratique, l’administration ne poursuit pas toujours comme elle le devrait surtout si aucun tiers n’est victime d’un préjudice. Les poursuites nécessitent l’établissement d’un procès verbal soit par des officiers de police soit par des agents assermentés, ce PV devra être notifié au contrevenant dans un délai de 10 jours afin de pouvoir le citer à comparaitre devant le TA. La contravention de grande voirie comporte 3 types de sanctions différentes   : le remboursement des frais de PV, l’amende et la réparation. L’amende correspond au caractère pénal de l’infraction, si cette infraction au DP coïncide avec une infraction pénale punie, les 2 amendes vont pouvoir être cumulées. En matière de réparation, l’action domaniale est imprescriptible, par exemple une loi d’amnistie ne pourra

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supprimer que l’amende mais elle ne pourra pas supprimer le droit à réparation (frais de remise en état). La contravention de grande voirie se transmet aux héritiers, ils vont devoir payer la contravention même s’ils renoncent à l’héritage. Cette réparation correspond à la partie civile de la répression de l’infraction. Cette condamnation à réparer les dommages causés peut être prononcée sous peine d’astreintes (sommes à payer pour le retard).

22)La protection du DP contre les occupants sans titre

TA Grenoble 22 décembre 2003, des militants écologiques s’étaient installés dans les arbres, le TA a ordonné aux militants de partir sous peine d’une astreinte de 100 euros par personne par jour de retard. Face aux occupants sans titre, l’autorité administrative peut donc utiliser les contraventions de voirie ainsi que l’action tendant à l’expulsion de l’occupant sans titre. On dit qu’il y a occupation sans titre du DP lorsque l’occupant est dépourvu de toute autorisation d’occupation ou quand l’autorisation dont il se prévaut est irrégulière ou périmée. Dans ce cas, l’administration à l’obligation de faire cesser les atteintes au DP, possibilité d’obtenir l’expulsion de l’occupant sans titre, cette demande doit être présentée devant le JA, en cas d’urgence cette expulsion peut être prononcée par le juge de référé administratif pour autant qu’il n’y ait aucune contestation sérieuse sur le fond. S’agissant du DP routier et de ses dépendances, c’est le JJ qui est le seul compétent pour ordonner l’expulsion. Par exemple, TGI Paris 11 janvier 2002, au moment du passage à l’an 2000, un forain a été autorisé à installer une grande roue au bout des Champs Elysées pour participer aux festivités, une fois le délai passé, le forain à voulu rester sur les lieux, le TGI lui donne tort et ordonne l’expulsion de la grande roue avec une astreinte de 15 000 euros par jour de retard. C.E 15 novembre 2006 ministre des transports : lorsque les gens du voyage s’installent illégalement sur le DP, normalement seul le JA est compétent pour ordonner leur expulsion mais parfois il arrive que l’administration procède à des expulsions anticipées c'est-à-dire sans ordonnance d’expulsion, la voie de fait qui pourrait être invoquée par les expulsés n’est que très rarement retenue (que s’il y a violence) contre de telles pratiques. CAA Marseille 21 février 2005 Compagnie AXA France, deux ordonnances d’expulsion mais jamais exécutées, le préfet a mis feu à la paillotte.

Section 2 : l’utilisation du DP

Le DP peut faire l’objet d’utilisations collectives c’est son affectation, il peut aussi faire l’objet d’une utilisation privative à condition qu’elle reste compatible avec l’utilisation collective du bien. On parle d’utilisation collective lorsque le bien est utilisé par le public en général ou par une catégorie de personnes objectivement déterminée. Cela concerne notamment les voies publiques terrestres, les rivages de la mer, les cours d’eau mais aussi l’espace aérien. Trois principes sont applicables : liberté d’utilisation, l’égalité dans l’utilisation et la gratuité de l’utilisation.

Z) Les utilisations collectives du DP

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AA)

23)La liberté d’utilisation

Ce principe signifie que l’administration ne peut imposer que des limitations de police à cette liberté, ces limitations ne doivent pas dépasser ce qui est strictement nécessaire pour assurer une utilisation du DP conforme à son affectation. En effet, cette liberté d’utilisation se traduit par l’idée de libre circulation (liberté d’aller et venir) et de liberté de stationnement.

La libre circulation :

Cette liberté de circulation généralisée par le droit communautaire existait déjà en droit Français sous le terme de liberté d’aller et venir. Elle ne peut faire l’objet d’une interdiction générale et absolue. Elle peut être réglementée, mais les autorités de police doivent motiver leurs décisions par des circonstances de temps et de lieu et cette limitation doit être proportionnée au but à atteindre. CE 6 Février 1993 Association Club du Soleil. Le JA va annuler un arrêt municipal qui interdisait la circulation de tous les véhicules sur un chemin rural.

CAA Bordeaux 24 Avril 2004 Ville de Bordeaux. Le JA annule un arrêté municipal anti mendicité estimant que celui-ci s’applique sur un secteur trop étendu, à savoir le centre ville. La liberté d’aller et venir permet en effet à un mendiant de circuler en ville sans se faire arrêter. Il est possible en revanche d’interdire la mendicité en un lieu précis.

De plus en plus, le JA et le législateur admettent que des restrictions importantes soient opérées, notamment à l’encontre des automobilistes, pour favoriser les couloirs de bus (atteinte à la liberté de circulation des automobilistes), ou les zones piétonnes.

La loi sur l’air du 31 Décembre 1996 permet de limiter la circulation autoroutière en cas de pic de pollution atmosphérique.

Ce principe de libre circulation s’applique également sur les voies navigables. Voie Navigable de France peut restreindre la circulation sur le domaine navigable fluvial en cas de crues.

Sur les plages, elle s’applique également. S’agissant des plages enclavées, les propriétés riveraines subissent des servitudes de passage pour permettre aux piétons de s’y rendre.

La liberté de stationnement

Pendant très longtemps le stationnement était prohibé par le juge et le législateur qui considéraient qu’il constituait un embarras sur la voie publique. Mais avec le développement de l’automobile, celui-ci est apparu comme le corolaire de la libre circulation. La cour de cassation a formulé la 1ère, le principe de la liberté de stationnement dans un arrêt de 1957. Dès lors, une interdiction générale de stationnement serait illégale.

CE 2/12/1983 Ville de Lille Le JA a considéré comme illégale l’interdiction faite aux nomades sur la totalité du territoire de la commune de Lille. Cette prohibition concerne également le DP fluvial. Néanmoins l’utilisation collective privilégiée, n’interdit pas une réglementation.

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Le code de la route interdit le stationnement abusif c.à.d. le stationnement ininterrompu d’un véhicule pendant + de 7 jours (24h à Paris). Une réglementation s’applique aussi sur le domaine fluvial => délai de stationnement pour les péniches bateau.

24)L’égalité dans l’utilisation

Toute personne se trouvant dans une situation identique au regard du DP bénéficie d’un traitement identique.Cela permet par exemple de créer des couloirs de circulation ou de stationnements réservés, justifiés par la différence de situation entre les usagés du DP (ex : une loi de 1966 permet de réserver des emplacements pour des véhicules affectés à certains S.P [police])Parfois on peut également écarter le principe d’égalité de manière temporaire et dans des circonstances particulières (ex : en cas de compétition sportive, on peut imaginer de faciliter l’accès à certaines personnes impliqués dans la manifestation/ Visite d’un homme politique).

25)La Gratuité de l’utilisation

Sous l’Ancien Régime, le principe de gratuité n’avait absolument pas cours, la circulation été perpétuellement entravée par des péages à l’entrée des ponts, sur les routes…En 1806 sous Napoléon 1er, les péages sur les routes sont supprimés. Il va falloir attendre une loi de 1880 pour qu’ils soient supprimés sur les ponts.La gratuité est donc un principe récent reconnu dans une décision « Pont à péage » du conseil constitutionnel (1979). Le conseil constitutionnel s’est cependant gardé de lui donner une valeur constitutionnelle. Pour la plupart des auteurs, ce principe de gratuité a une portée assez limitée. Le système du péage a été réinstauré dans la 2nd moitié du XXème siècle pour financer la construction des autoroutes.Pour autant le Pont de Tancarville, lors de son inauguration a vu naitre un péage en toute illégalité car le droit positif était la loi de 1880. L’intervention du législateur a permis à plusieurs reprises de légaliser les procédures (en l’espèce > loi du 17 Mai 1951).La loi du 13 Aout 2004 permet désormais aux collectivités territoriales d’instaurer des péages pour la construction, l’exploitation et l’entretien d’ouvrages d’arts (ex : les ponts)Au niveau du stationnement gratuit, le C.E exige seulement que des possibilités de stationnement gratuit soient préservées au sein d’une commune mais il ne précise pas la proportion.

BB) Les utilisations privatives du DP

CC)

26)Un régime soumis à autorisations

Le CG3P dispose de manière très claire dans son article L 2122-1 : « nul ne peut sans disposer d’un titre l’y habilitant occuper une dépendance du DP d’une personne publique ou l’utiliser dans des limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous ». En matière d’utilisation privative du DP il n’y a donc ni libertés d’usage, ni gratuité et encore moins

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égalité. Il n’y a pas d’égalité car la permission est délivrée intuitu personae. En effet, l’autorisation doit être expresse et personnelle. Traditionnellement on distingue les utilisations fondées par un acte unilatéral de l’administration c'est-à-dire une permission de voirie, des utilisations fondées sur un contrat passé entre l’administration et les occupants : concessions de voirie.

t) Les permissions de voirie

Il faut distinguer les permissions de voirie strictement entendues : actes de gestion domaniale, des permis de stationnement.

Les permissions de voirie strictement entendues : occupation avec emprise au sol qui implique une pénétration dans le sol. Pour ce type de permission, c’est la personne publique propriétaire qui est compétente pour délivrer la permission de voirie. Exemple : pompes à essence.

Les permis de stationnement (actes de police) : elles permettent d’occuper le DP sans qu’il y ait fixation au sol (stations de taxi, stationnement de péniches sur le DP fluvial, terrasses de café…). C’est généralement le maire qui est compétent pour accorder des permissions de stationnement au sein de sa commune (exception : à Paris c’est le préfet de police qui est compétent). Ces permissions de voirie doivent être compatibles avec l’affectation domaniale principale c'est-à-dire la libre circulation du public. Par exemple l’installation d’une terrasse de café ne doit pas gêner la circulation des piétons. Le titulaire d’une autorisation d’occupation domaniale peut chercher à obtenir un permis de construire pour bâtir un ouvrage sur le DP. Lorsque la construction a une certaine importance, il lui faudra obtenir une concession de voirie pour pouvoir le faire. C.E 15 mais 1976 Epoux Leduc, construction d’une piscine sur une plage pour laquelle les époux avaient obtenus une permission de voirie. Dans cette affaire le C.E a annulé le permis de construire accordé, les époux ont du solliciter une concession de voirie. Mais C.E 2 mars 1983 Groupement agricole foncier Le Rocher de Métri, le C.E s’est contenté d’une simple permission de voirie d’une durée de 18 ans pour fonder la construction d’une centrale nucléaire (nécessité d’avoir une vision critique).

u) Les concessions de voirie

Depuis un décret loi de 1938, toutes les concessions de voirie ont un caractère administratif ce qui entraine la compétence du JA.

L’intérêt de la concession de voirie   : permet de reconnaitre des droits d’usage et de jouissance plus importants au bénéfice de l’occupant. Certaines concessions de voirie vont constituer des contrats domaniaux qui vont permettre simplement l’utilisation du DP mais parfois l’occupation du DP entraine une délégation de SP ou bien un véritable marché public et à ce moment là, le JA qualifiera ces contrats de convention domaniale de délégation de SP.

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Exemple : C.E 4 novembre 2005, Société Jean-Claude Decaux, il y a passation d’équipement public + concession de voirie.

Le cas des contrats d’occupation attributifs de droits réels : pendant très longtemps, le JA a interdit toute constitution de droit réel sur le DP, on ne pouvait pas constituer d’hypothèques, d’usufruit, de servitudes réelles, d’emphytéose ou de prévoir un bail à construction sur le DP. Le bail emphytéotique peut aller jusqu’à 99 ans, on considérait que le droit réel conférait à son titulaire les prérogatives et les obligations du propriétaire pour la durée de l’utilisation et cela était incompatible avec le régime de la domanialité publique. C.E 6 mai 1985 Association Eurolat et Crédit Foncier de France, un syndicat intercommunal avait confié à la société de créer et gérer une maison de retraite, pour ce faire l’association disposait d’un terrain loué par le syndicat au moyen d’un bail emphytéotique. Mais l’association pour monter le projet, avait du consentir une hypothèque sur le terrain et le bâtiment au bénéfice de crédit foncier de France, le JA est très net : incompatibilité de l’hypothèque et du bail emphytéotique avec le régime de la domanialité publique.

Deux lois sont intervenues pour infléchir cette JP Eurolat dans le but d’obtenir plus aisément des financements pour certaines opérations   :

- Loi du 5 janvier 1988 : le domaine public des collectivités territoriales : les collectivités vont pouvoir consentir un bail emphytéotique sur les biens immobiliers relevant du DP ou privé. Cette autorisation entraine la possibilité de constituer des hypothèques. Cela va permettre à la personne publique de faire réaliser un ouvrage sans avoir à le financer elle-même tout en sachant qu’à l’issue du bail emphytéotique, la propriété de ce bâtiment lui reviendra. Ce texte a permis de financer la construction de maisons de retraites, certains équipements sportifs ou encore des stations d’épuration. Cette constitution de droit réel a une limite : elle ne peut pas porter sur le DP routier. C.E 25 février 1994 SA Marignan immobilier, le preneur d’un bail emphytéotique portant sur un terrain appartenant à une commune avait réalisé un bâtiment, le bâtiment a pu être occupé par les services de la ville moyennant le versement d’un loyer.

- Loi du 25 juillet 1994 : elle concerne le DP de l’Etat, elle autorise la constitution de droits réels sur le DP artificiel de l’Etat et de ses établissements publics. Le titulaire du contrat devient en principe titulaire des prérogatives et des obligations du propriétaire pendant la durée de l’autorisation. En contre partie, les droits ne peuvent être cédés à un tiers sans avoir obtenu l’agrément de l’administration. Pour le domaine de l’Etat et au terme de la loi de 1994, la durée de cette autorisation ne peut pas excéder 70 ans. Malgré toutes les garanties accordées aux partenaires de l’administration, elle peut quand même retirer son autorisation soit pour faute du cocontractant (pas d’indemnisation automatique), soit lorsque c’est dans l’intérêt du domaine public (indemnisation totale du cocontractant). Cela à servi notamment pour la construction d’établissements pénitentiaires, établissements de santé....

27)Un régime soumis au principe de précarité

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v) L’octroi de l’autorisation

L’administration dispose de prérogatives importantes au moment de l’octroi de l’autorisation ou en cas de retrait de celle-ci. L’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire, elle peut refuser d’accorder une telle autorisation pour des motifs divers, ces motifs peuvent être des motifs de police, d’intérêt général. Le motif d’un refus d’autorisation peut être financier (choisir de ne pas accorder à un commerçant X une autorisation et l’accorder à un commerçant Y car il semble plus apte à assurer la gestion). L’autorité compétente est en principe l’autorité gestionnaire du DP (maire pour la commune…). Exemple : C.E 23 juin 1986 Thomas, Mr Thomas occupait des locaux au jardin des plantes au muséum d’histoire naturelle et il tenait une librairie dans ces locaux. Ce muséum avait décidé de ne pas renouveler son autorisation d’occupation du DP au motif que Mr Thomas avait refusé d’accepter une augmentation importante de sa redevance. Le JA a considéré que cet intérêt financier constituait un intérêt général justifiant la décision. Ces autorisations doivent être conciliables avec l’affectation principale du domaine : c’est le JA qui va vérifier s’il y a respect de l’affectation principale. C.E 23 juin 1995 Association défense Tuileries, le JA a considéré que l’installation d’une fête foraine dans le jardin des Tuileries était compatible avec son affectation principale. C.E 10 mai 1996 SARL La Roustane et Université de Provence, une librairie commerciale spécialisée dans les ouvrages universitaires s’était installé dans l’Université, le JA a accepté car l’affectation est compatible.

w) Le retrait de l’autorisation

En principe, l’autorisation peut prendre fin à tout moment quand bien même une durée aurait été fixée dans le titre d’occupation. La seule garantie de l’occupant est une éventuelle indemnisation. Y a-t-il indemnisation en cas de non renouvellement de l’autorisation ? Non, le JA va tout de même vérifier les motifs du non renouvellement. Exception : concessions funéraires droit au renouvellement. En cas d’abrogation de l’autorisation :

- Dans le cadre d’une concession de voirie  : indemnisation du partenaire de l’administration

- Dans le cadre d’une permission de voirie  : en principe il n’y a pas lieu à indemnisation sauf dans lorsque cette abrogation a été réalisée dans l’intérêt d’une autre dépendance domaniale. C.E 29 mars 1968, Ville de Bordeaux contre Société Menneret et Cie, permission de voirie pour travailler sur le port de Bordeaux, son autorisation a été abrogée avant son terme car la ville avait besoin d’utiliser une partie des locaux en question pour assembler du matériel pour construire un nouveau pont routier traversant la Garonne. Cette abrogation était intervenue à la fois dans l’intérêt de la voirie routière mais aussi du DP fluvial.

28)Le statut de l’occupant

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Cet occupant doit payer une redevance, les exceptions sont assez rares : C.E 11 février 1998 Ville de Paris, le C.E va considérer que les artistes peintre de la place du Tertre à Montmartre sont des petits marchands ne tenant pas boutique et qu’à ce titre ils n’ont pas à payer de redevance alors qu’ils occupent le DP. S’il y a litige entre l’occupant et la personne publique propriétaire, le JA sera compétent pour régler les problèmes liés aux redevances. Exception spécifique : C.A.A Paris 5 mars 1996 Commune de Gif sur Yvette, le JA a réaffirmé la compétence du J.J s’agissant des litiges relatifs aux droits des places dans les marchés. Le titulaire d’une concession de voirie sans constitution de droits réels bénéficie de certaines garanties notamment des indemnisations pour les dommages résultant de travaux publics réalisés sur la dépendance qu’il occupe sauf dans l’hypothèse ou ces travaux sont entrepris dans le seul intérêt de la dépendance en question. Arrêt du C.E 22 février 1967 Sté Sainrapt et Brice, on considère que l’exploitant d’un garage pouvait obtenir indemnisation du fait des travaux de création d’un collecteur d’égout parce que les travaux en question étaient accomplis dans un but de salubrité publique (et non pas de voirie publique). C.A.A Paris 25 janvier 1996 Commune de St Denis, une société concessionnaire d’un ouvrage situé sur la voie publique s’est vue refuser toute indemnisation au motif que la création d’un tramway sur la voirie communale participait à l’intérêt général de cette dépendance c'est-à-dire la libre circulation des voyageurs. S’agissant des bénéficiaires d’une concession de voirie assortie de la constitution de droits réels, le principe est l’indemnisation et il faut savoir qu’en la matière alors que la protection est maximale, la résiliation unilatérale par l’administration reste possible mais elle donnera lieu à indemnisation.

Chapitre 2 : la domanialité privée

Définition du domaine privé à titre introductif   : Art L 2211-1 du CG3P dispose que : « font partie du domaine privé les biens des personnes publiques qui ne relèvent pas du domaine public ». Le législateur est parfois intervenu pour prévoir certains types de biens relevant du domaine privé des personnes publiques, c’est le cas notamment pour les immeubles à usage de bureau exclusivement (ordonnance de 2004). C’est le cas également pour les chemins ruraux (ordonnance de 1959). Les bois et forêts relèvent de la domanialité privée mais avec un régime particulier. Parfois la JP elle-même peut introduire des exceptions : immeubles de logements construits par les offices HLM par exemple. Il existe également des sociétés HLM de nature privée. Ils sont déclarés comme faisant partie du domaine privé C.E 23 février 1979 Vildart. Le domaine privé des personnes publiques va compter également des biens mobiliers, les meubles et matériels des administrations, les actions et participations, les brevets d’invention, les marques, clientèle commerciale…

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Section 1 : le contentieux du domaine privé

DD) La compétence du J.J

EE)

Depuis la distinction entre D. public et D. privé, la compétence du J.J sur le domaine privé a été immédiatement admise.

Distinction entre les actes de droit privé et les actes administratifs unilatéraux : Les tribunaux judiciaires assimilent la gestion courante du D. privé à une gestion privée telle qu’elle aurait pu être accomplie par une personne privée. Le J.J se reconnait toujours compétent. Exemple : décision d’augmenter le loyer d’un logement relèvera de la compétence du J.J. De même lorsque l’administration octroie ou refuse une servitude de passage sur le D. privé, c’est le J.J qui tranchera. En revanche le J.A reste compétent en considérant que certaines décisions constituent de véritables actes administratifs unilatéraux susceptibles d’annulation (possibilité d’engager un REP) : règlements de police relatifs à la circulation sur les chemins ruraux, la décision d’acquérir ou de vendre un immeuble relève de la compétence du J.A.

Le contentieux contractuel Pendant très longtemps le J.J est resté compétent mais ça n’est plus le cas depuis l’arrêt du T.C 27 juillet 1962 Cauzatets, le JA se déclare compétent dès lors que les critères du contrat administratif sont remplis.

Le contentieux de la responsabilitéLe J.J est en principe compétent, mais il existe des exceptions : en cas de dommage de travaux publics réalisés sur le D. privé, le JA reste compétent.

FF)L’application du droit privé

GG)

Léon Duguit a pu parler d’ « échelle de domanialité ».

Jean-Marie Auby : «  Il y a finalement assez peu de différences entre la catégorie la moins exorbitante du domaine public et la catégorie la plus exorbitante de domaine privé ».

Les bois et forêts ne peuvent pas être aliénés sans que soit respecté une certaine procédure.

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Section 2 : le régime juridique des biens du domaine privé

HH) L’entrée et la sortie du domaine privé

II)

29)L’acquisition des biens du domaine privé

En la matière, les personnes publiques disposent de l’éventail des possibilités offertes par le droit privé comme par le droit administratif pour acquérir des biens immobiliers notamment. Par exemple : les personnes publiques peuvent acquérir des biens à titre onéreux soit pas acquisition amiable, par voie d’échange, à titre gratuit (donation, leg), par une dation en paiement. Le CG3P favorise les libéralités consenties. Les personnes publiques peuvent également recourir aux procédures exorbitantes du droit commun : expropriation pour cause d’utilité publique, préemption, procédure de nationalisation (acquérir une entreprise moyennant indemnisation des actionnaires).

30)L’aliénation des biens du domaine privé

Les biens du domaine privé sont en principe aliénables et prescriptibles mais des limites subsistent :

- Les aliénations à titre gratuit sont en principe interdites

C.C 25 juin 1986, affirme que les biens publics ne peuvent être cédés à des personnes privées à un prix inférieur à leur valeur. 25 septembre 2009 Commune de Courtenay, une commune ne peut pas vendre un bien 30% en dessous du prix estimé par France Domaine. Dans les années 80 s’était développée une pratique qui consistait à consentir des ventes de terrains à des prix symboliques, en la matière, le J.A se montre tolérant quand ces aliénations ont pour contre partie la réalisation d’un intérêt général. T.A Lyon 22 novembre 1988 Tête, une commune avait cédé à titre gratuit un immeuble à un établissement public dans le cadre d’un projet de construction de logement. C.E 3 novembre 1997 Commune de Fougerolles, le J.A a admis qu’une commune cède un terrain de 36 hectares à une entreprise pour 1 Franc symbolique moyennant l’engagement de créer 5 emplois dans un délai de 3 ans. Le CG3P a permis à l’Etat de céder des terrains à un prix modique afin de faciliter la réalisation pour partie de logements sociaux.

- Les aliénations forcées consécutives à une saisie sont interdites en principe

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C.E 27 novembre 1970 Bizière, l’Etat peut décider d’exproprier un bien relevant du domaine privé d’une collectivité territoriale.

- Certains biens du domaine privé ne peuvent être aliénés suivant la procédure ordinaire

Exemple : bois et forêts de plus de 150 hectares.

La procédure d’aliénation   :

France Domaine intervient pour mettre en vente les biens relevant du domaine privé de l’état, les ventes sont réalisées au profit du trésor. En général la vente des immeubles à lieu aux enchères.

JJ) La gestion du domaine privé

Les autorités gestionnaires L’administration gère son domaine privé comme un propriétaire privé, pour les biens de l’Etat la compétence revient aux ministres avec le service France Domaine comme service de gestion du domaine privé de l’Etat. Exceptions : certains organismes spécifiques peuvent avoir une compétence spécifique → O.N.F seule gestionnaire des bois et forêts appartenant à l’état et aux collectivités territoriales. S’agissant du domaine des collectivités territoriales, les décisions les plus importantes (achat, aliénation) relèvent de la compétence des assemblées délibérantes (Conseil municipal, régional…) la gestion courante quant à elle relève de l’exécutif. Le rôle de France Domaine a été accru, il exerce une sorte de fonction de notaire, c’est le véritable gestionnaire du parc mobilier étatique. Depuis 2007, chaque ministère paye un loyer à l’Etat en contre partie de la mise à disposition des locaux qui lui sont nécessaires, le but est donc de favoriser une meilleure gestion du patrimoine immobilier de l’Etat, lorsque l’administration renonce à utiliser certains locaux, le loyer est diminué et l’administration pourra utiliser la somme économisée pour d’autres dépenses.

Les règles applicables Les personnes publiques gèrent leur domaine privé librement dans le respect du droit commun, ainsi les contrats d’occupation du domaine privé sont régis par les règles du droit commun. Particularité : les baux emphytéotiques consentis par l’état peuvent concerner également le domaine privé. Le J.A sera compétent.

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Partie 2 : Les opérations immobilières des personnes publiques

Titre 1 : l’expropriation pour cause d’utilité publique

L’état a besoin d’acquérir certains biens, la plupart du temps ces acquisitions vont se faire à l’amiable. Parfois les personnes privées peuvent refuser de vendre leurs biens ou ils acceptent de le vendre mais à un tarif déraisonnable. Il faut donc dans ces hypothèses, recourir à un mode d’acquisition forcé : l’expropriation. Problème de cette procédure : permettre de remplir la mission d’intérêt général tout en respectant les droits des propriétaires privés.

Chapitre 1 : l’expropriation et droit de propriété

Section 1 : les sources du droit d’expropriation

KK) L’histoire de l’expropriation

Histoire ancienne, une procédure comparable existait déjà dans la Grèce antique dès le IIIème siècle avant J.C. Le droit romain lui aussi connait une procédure comparable, c’est grâce à elle que sont réalisées les voies romaines et les aqueducs construits par Rome. En France dès le 14ème siècle : pouvoir au Roi d’exproprier les terres, les châteaux, les ports… au nom de l’utilité publique. Jusqu’à la révolution Française ce pouvoir appartient à l’Etat, il appartient également aux municipalités ainsi qu’aux seigneurs en vertu de diverses coutumes. A la révolution, on consacre enfin le droit de propriété comme un droit naturel, inviolable et sacré. La grande garantie est que l’expropriation ne puisse plus intervenir sans que ne soit versé une juste et préalable indemnité. Art 17 de la déclaration de 1789 et redevenu constitutionnel depuis 1971.

LL) Les sources du droit positif

MM)

Article 17 de la DDHC : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constaté, l’exige évidemment et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».

L’article 545 du Code civil : «  nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité ».

Suite à ces textes, série de réformes législatives au cours du 19ème. Désormais le texte de référence c’est l’ordonnance du 23 octobre 1958. Cette ordonnance reprend une phase administrative et une phase judiciaire dans la procédure l’expropriation mais désormais ces 2 phases peuvent être engagées simultanément pour accélérer la procédure.

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Napoléon dans la fameuse note de Schönbrunn de 1809 : « J’en arrive à ce principe, c’est qu’aucun citoyen ne peut être exproprié que par un acte judiciaire ». C’est l’ordonnance de 1958 qui va confier enfin au J.J le soin de transférer la propriété et de fixer le montant de l’indemnisation due au propriétaire exproprié. De nos jours tous les textes relatifs à l’expropriation sont reliés dans un code (CG3P).

Article 1er du premier protocole additionnel à la CEDH : «  Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans des conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ». 

La CEDH dans un arrêt du 21 février 1997 Guillemin contre France, a condamné la France pour la durée excessive de certaines de ses procédures d’expropriation.

CEDH 22 avril 2002 Lallement, insuffisance de l’indemnisation proposée par la France.

Section 2 : la notion d’expropriation

Définition   : au terme de l’article L1112-2 du CG3P : «  Les personnes publiques peuvent acquérir des immeubles et des droits réels immobiliers par expropriation » cela ne concerne pas les biens meubles. L’expropriation est une procédure qui permet à une personne publique d’acquérir de manière forcée la propriété d’un bien immobilier moyennant le paiement d’une juste et préalable indemnité. L’expropriation n’est pas le seul mode d’expropriation forcée des biens : il y a aussi la confiscation des biens (sanction en droit douanier contre tout fait de contrebande, l’importation ou l’exportation sans déclaration, elle porte essentiellement sur les biens meubles et ne donnera lieu à aucune indemnisation). La réquisition : procédure qui permet à l’administration de contraindre un particulier à lui laisser l’usage de meubles ou d’immeubles moyennant une indemnisation. Le droit de préemption : permet à l’administration d’acquérir la propriété d’un bien au moment de son aliénation par préférence à tout autre acheteur. Les nationalisations : permet la cession forcée des biens meubles de cette entreprise et plus particulièrement de ses actions, une nationalisation doit être décidée par le législateur, elle implique pour les actionnaires de recevoir des obligations à la place de leurs actions.

NN) L’exercice du droit d’expropriation

OO)

31)Les protagonistes

x) L’Etat titulaire du droit d’exproprier

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Juridiquement, l’Etat reste le seul titulaire du pouvoir d’exproprier. Les lois de décentralisation n’y ont rien changé, les collectivités territoriales n’ont pas ce pouvoir. L’expropriation est toujours prononcée au nom de l’Etat et c’est le préfet qui joue un rôle majeur à tous les stades de la procédure. L’Etat peut décider d’exproprier pour son propre compte mais il peut aussi intervenir pour le compte d’autres personnes publiques. Dans cette seconde hypothèse, l’Etat va contrôler la légalité et l’opportunité du projet envisagé par la collectivité territoriale ou l’établissement public. A ce stade, le préfet peut donc décider de rejeter la demande de l’expropriant, il peut décider aussi d’ouvrir une enquête publique. Le préfet exerce donc une compétence discrétionnaire par exemple dans un arrêt du C.E du 7 mars 1979 Commune des Aubiers, le préfet avait considéré que les ressources de la commune étaient insuffisantes pour mener à bien le projet et avait refusé d’ouvrir une enquête publique et la procédure d’expropriation.

y) L’expropriant

C’est la personne qui prend l’initiative de mette en œuvre la procédure d’expropriation. Cette qualité d’expropriant est reconnue :

- L’Etat, il peut exproprier sur l’ensemble du territoire Français excepté sur les terrains des ambassades et délégations étrangères ainsi que sur les délégations ainsi que le D public des collectivités territoriales.

- Les collectivités territoriales : à l’intérieur de ses limites territoriales.

Question de l’intérêt local, en principe les collectivités territoriales ne peuvent recourir à l’expropriation que pour satisfaire un intérêt public local. Le C.E 1er avril 1977 Dame Grignard, le J.A a admis qu’une commune initie une demande d’expropriation pour implanter un bureau de poste alors que la Poste est un SP national et pas un SP local, il aurait pu s’opposer à la demande d’expropriation.

Que se passe t-il lorsqu’une commune ne trouve pas sur son propre territoire les terrains nécessaires à la réalisation de son projet d’intérêt général ? Exceptionnellement, le JA admet qu’une commune puisse initier une expropriation sur le domaine privé d’une autre commune sans avoir à rechercher son accord → C.E 6 mars 1981 Chèvre-Morte. Le C.E dans cette affaire a autorisé cette possibilité pour des ouvrages incontestables (nouvelles voies publiques, création d’un cimetière…).

- Les établissements publics : l’ordonnance de 1958 attribue la qualité d’expropriant à l’ensemble des EP nationaux et ce droit a été étendu aux établissements publics locaux, C.E 17 mars 1972 Levesque : « Toute personne morale de droit public peut exproprier ; les établissements publics le peuvent donc dans les limites de leur spécialité ».

- Les organismes privés : certains organismes privés peuvent se voir reconnaitre la qualité d’expropriant, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour reconnaitre la qualité d’expropriant à des personnes privées exécutant une mission d’intérêt général.

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Exemple : loi de 1906 qui a accordé cette qualité aux concessionnaires d’énergie électrique. La JP a eu l’occasion elle aussi de reconnaitre cette qualité à plusieurs organismes privés, ce fut le cas notamment dans un arrêt du C.E 17 janvier 1973 Ancelle, le J.A a considéré que les caisses régionales de sécurité sociale et plus largement les organismes privés chargés d’un SP ont la qualité d’expropriant.

z) Les bénéficiaires de l’expropriation

Toutes les personnes qui ont la qualité d’expropriant peuvent être bénéficiaires de l’expropriation, si l’expropriation a été mise en œuvre pour leur propre compte, ces personnes seront à la fois expropriantes et bénéficiaires mais l’expropriant n’agit pas toujours pour son propre compte, le bien acquis peut en effet transiter par le patrimoine de l’expropriant avant d’être rétrocédé à un bénéficiaire dont l’activité doit présenter un intérêt général. Le bénéficiaire peut être une personne publique ou une personne privée. C.E 20 décembre 1935 Sté des Etablissements Vézia, ces hypothèses ne sont pas les plus fréquentes. Depuis cette JP et ces derniers temps ces expropriations qui vont bénéficier à des organismes privés sont devenues un peu plus nombreuses. Aujourd’hui on a des expropriations réalisées par une collectivité territoriale, analysées par l’Etat et qui vont bénéficier au bout du compte à un lotisseur.

32)Le champ d’application de l’expropriation

Concerne essentiellement les biens immobiliers, exceptionnellement certains meubles peuvent faire l’objet d’une expropriation c’est le cas par exemple des biens culturels maritimes situés dans le domaine public (loi de 1989), les brevets d’invention intéressant la défense nationale peuvent faire l’objet d’expropriation (loi de 1968).

PP)La finalité de l’expropriation

QQ)

Originellement c’est une procédure exceptionnelle mais au cours du XXème siècle on a assisté à une banalisation de l’expropriation au mépris du caractère inviolable et sacré du droit de propriété privée.

33)De la nécessité publique à l’intérêt général

Cette notion va permettre d’étendre le champ d’application de l’expropriation, au XIXème siècle l’utilité publique correspond à 2 grands types d’opération : l’enrichissement du domaine public et la réalisation de travaux publics. Désormais pour être légal, le projet d’expropriation devra s’inscrire dans le cadre d’une mission de SP. Peu à peu le législateur va étendre les possibilités de recourir à l’expropriation au point d’admettre dès la fin du XIXème et dans le courant du XXème siècle qu’un simple intérêt général suffise. Par exemple un décret loi de 1935 va permettre de procéder à des expropriations pour loger des familles nombreuses… une loi de 1991 va permettre d’exproprier des biens immobiliers pour faciliter la lutte contre les pollutions (stations d’épuration, stockage de décrets…). De sont côté la JP a participé à ce mouvement d’extension de l’expropriation, ainsi dans un arrêt du C.E du 12 avril 1967 Sté Nouvelle des entreprises d’Hôtel, le JA admet la légalité d’une

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expropriation permettant la construction d’un hôtel de ville et à titre accessoire la construction d’un hôtel de luxe. Jusqu’aux années 70 tendance lourde à l’expropriation.

34)Le contrôle du juge

A partir de 1971, le C.E va intensifier son contrôle et introduire en droit français un contrôle de proportionnalité : théorie du bilan couts/avantages.

aa) L’arrêt Ville nouvelle Est

C.E 28 mai 1971 Ville nouvelle Est, le gouvernement français de cette époque avait initié un projet d’aménagement de l’est de la ville de Lille. Démolition de logements à peine construits pour aménager un campus universitaire, en l’espèce le C.E a rejeté la demande des 88 propriétaires concernés, il a considéré que l’opération était bien gouvernée par l’utilité publique mais il introduit dans ses considérants la théorie du bilan couts/avantages. « Une opération ne peut être déclarée d’utilité publique qui si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ». Cela va permettre au JA d’avoir plus d’opportunités de s’opposer s’il le souhaite à certains projets comportant des expropriations en faisant un contrôle de proportionnalité.

bb) Le prolongement de la JP Ville Nouvelle Est

Le juge va se poser 3 questions successives pour apprécier l’utilité publique d’un projet nécessitant une expropriation.

L’opération présente-t-elle une utilité publique en général ?

Est-il nécessaire pour cette opération de recourir à l’expropriation ? Autre moyens ? Par exemple dans un arrêt du C.E 3 avril 1987 Consorts Métayer, le JA a estimé que l’expropriant pouvait recourir à des terrains dont il était déjà propriétaire pour éviter l’expropriation.

Les avantages de l’opération l’emportent-ils sur les inconvénients ? Prise en compte de l’intérêt environnemental. C.E 28 mars 1997 Association contre le projet d’autoroute Transchalaisienne, le JA va annuler une déclaration d’utilité publique relative à un projet autoroutier entre Anne-Masse et Thonon-les-Bains au motif qu’il existe déjà des routes nationales et départementales pour assurer cette liaison et il estime que le coût élevé de l’opération n’est pas justifié par le flux d’automobilistes escompté. C.E 20 octobre 1972 Ste Marie de l’Assomption, le JA annule une déclaration d’utilité publique pour un projet autoroutier qui devait relier Marseille à Menton au motif que ce projet conduisait à la destruction de bâtiments appartenant à un hôpital psychiatrique. Le JA a considéré que l’intérêt général de santé publique l’emportait sur l’intérêt général de développer l’économie et le tourisme de cette zone géographique.

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Chapitre 2 : la procédure d’expropriation

Jusqu’en 1958 les autorités administratives et judiciaires intervenaient successivement dans la procédure d’expropriation, il y avait d’abord la phase administrative et ensuite la phase judiciaire + parfois une phase spéciale pour fixer l’indemnité.

En 1958, ordonnance qui permet de mener les 2 phases en même temps.

Section 1 : la phase administrative de l’expropriation

Elle se décompose en 5 étapes successives :

RR) La constitution du dossier d’enquête publique

SS)

Ce dossier va permettre d’informer le grand public des caractéristiques essentielles du projet. Pour que la procédure reste valable, le projet soumis ne doit pas présenter de différences substantielles avec celui retenu dans la déclaration d’utilité publique. C.E 2 juillet 2001 Commune de la cour neuve, le JA annule une déclaration d’utilité publique, le projet routier ayant été fortement modifié au cours de la phase administrative. Une 2x2 voies s’est transformée en 2x3 voies. Le dossier d’enquête publique doit contenir un certain nombre de documents obligatoires, il faudra une notice explicative précisant l’objet de l’opération et les raisons qui ont conduit à retenir ce projet, le périmètre des immeubles à exproprier, donner une estimation sommaire des acquisitions à réaliser…

Pour les projets de grande envergure, on exigera notamment une étude d’impact lorsque certains de ces travaux sont susceptibles de porter atteinte à l’environnement.

TT) L’enquête publique

UU)

Le préfet du département va décider d’ouvrir l’enquête publique après avoir apprécié la légalité et l’opportunité de l’expropriation. C’est la phase « démocratique » de l’expropriation, une enquête publique de droit commun qui concerne les expropriations ne portant pas atteinte à l’environnement cette enquête préalable vise à améliorer la participation du public, elle est menée par un commissaire enquêteur et par une commission d’enquête. Le public est informé de l’ouverture de l’enquête par voie de publicité dans la presse et par voie d’affichage. Cette enquête va permettre de recueillir pendant au moins 15 jours, les observations et les suggestions des personnes intéressées par le projet d’expropriation. A l’expiration du délai de l’enquête, le commissaire enquêteur va remettre des conclusions motivées au préfet assorties d’un avis favorable ou défavorable vis-à-vis de l’opération.

L’enquête publique démocratisée   : elle concerne des expropriations qui impliquent une atteinte à l’environnement. Prévue par la loi du 12 juillet 1983, cela concerne les projets les plus importants (relatifs à la voirie routière, voies ferrés, aérodromes, ports, centrales

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nucléaires notamment). Enquête publique plus lourde qui dure au minimum 1 mois et depuis 2002, lorsque le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête a rendu un avis défavorable et en cas de recours, le JA doit accorder un surcis à exécution de la décision attaquée. Des lors que l’un des moyens invoqué est de nature à justifier l’annulation.

Le débat public   : il concerne les grands projets d’aménagement, il a été instauré par la loi du 27 février 2002 et il permet de renforcer la concertation avec le public. La commission nationale du débat public (A.A.indépendante) va organiser une procédure de débat public et émettre des recommandations. Un tel débat avait été organisé dans le cadre de l’extension du port du havre.

VV) La déclaration d’utilité publique (DUP)

WW)

Le dossier qui contient l’avis du commissaire enquêteur est transmis à la préfecture, l’autorité va décider discrétionnairement sur des motifs de légalité et d’opportunité de poursuivre ou non la procédure d’expropriation. Cette déclaration suivant les hypothèses peut résulter d’un décret en C.E, d’un arrêté ministériel lorsque l’opération permet l’installation d’une administration centrale sinon habituellement la DUP résultera d’un arrêté préfectoral, le préfet compétent étant celui du lieu de situation de l’immeuble concerné par l’expropriation. En principe la DUP doit être signée dans un délai d’un an après la clôture de l’enquête si ce délai n’est pas respecté, l’enquête devient caduque et il faut tout reprendre. La DUP doit préciser le délai à l’expiration duquel l’expropriation devra être réalisée, en principe une expropriation doit être réalisée dans les 5 ans avec une possibilité de prolonger de 5 ans. La DUP produit des effets contraignants puisqu’il ne peut plus apporter d’amélioration à son logement à compter de celle-ci. Toute amélioration sera considérée comme une tentative frauduleuse destinée à faire augmenter le prix du bien.

Certaines garanties sont accordées aux propriétaires : En effet, 1 an après la publication de la déclaration d’utilité publique, le propriétaire peut mettre en demeure l’administration de procéder à l’acquisition du bien dans le délai de 2 ans à compter de sa demande. Droit de délaissement. Ce délai est prolongeable pour une année supplémentaire donc 4 ans en réalité (au lieu de 10 ans maximum).

Lorsque le bien exproprié n’a pas reçu dans les 5 ans la destination prévue, ou s’il a cessé de la recevoir, l’ancien propriétaire peut demander la rétrocession de son bien. En pratique c’est souvent compliqué pour l’ancien propriétaire il doit disposer des moyens nécessaires pour racheter le bien, parfois il a déjà été revendu ou un ouvrage public a été bâti.

XX) L’enquête parcellaire

YY)

Cette fois ci, il va s’agir de préciser les biens à exproprier, les propriétaires concernés… cette enquête est ouverte par arrêté préfectoral et quand c’est possible en même temps que l’enquête publique. Chaque propriétaire va recevoir une lettre recommandée lui notifiant le dépôt du dossier en mairie, ils vont pouvoir consigner leurs observations dans un registre

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et ils pourront faire part de leur refus ou contestation de l’utilité du projet. A l’issue de cette enquête un commissaire enquêteur va rendre un avis qui permettra au préfet de prendre ou de ne pas prendre l’arrêté de cessibilité.

ZZ) L’arrêté de cessibilité

AAA)

Cet arrêté décrit les propriétés à exproprier, précise l’identité des propriétaires de chaque parcelle. Il ne transfert pas la propriété du bien (J.J) il constate juste l’achèvement de la phase administrative, la cession amiable est à ce stade toujours possible. L’ensemble du dossier va être transmis au juge de l’expropriation dans les 6 mois suivant l’arrêté de cessibilité.

Section 2 : la phase judiciaire de l’expropriation

Le J.J intervient à 2 reprises : transfert de propriété et fixation du montant de l’indemnité.

BBB) Le transfert de propriété

CCC)

35)La procédure

cc) La compétence du juge de l’expropriation

Depuis 1958 il existe une juridiction spécialisée de l’expropriation, en première instance le juge d’expropriation est un magistrat du siège du T.G.I, en appel il revient à la chambre d’expropriation de la C.A.A de statuer mais uniquement en matière d’indemnisation. Au niveau du pourvoir en cassation c’est la 3ème chambre civile de la cour de cassation qui est compétente. En cassation depuis un décret de 2005 : l’assistance d’un avocat au conseil est devenue obligatoire afin de présenter un dossier très bien construit (pour éviter les demandes inutiles et peu fondées). Le juge de l’expropriation ne se prononce ni sur la légalité ni sur l’opportunité de l’opération d’expropriation en elle-même. Il va essentiellement vérifier que la procédure a été correctement accomplie et que l’ensemble des pièces sont bien présentes ; il constatera ensuite le transfert de propriété.

dd)

ee) L’ordonnance d’expropriation

Elle va intervenir à l’issue d’une procédure essentiellement écrite. Le juge de l’expropriation n’a pas à entendre les parties, il vérifie le caractère complet ou non du dossier transmis, il vérifie également les délais.

36)Les effets de l’ordonnance d’expropriation

Elle opère le transfert de propriété du patrimoine de l’exproprié vers celui de l’expropriant. A partir de cette ordonnance l’ancien propriétaire n’est plus qu’un possesseur à titre gratuit de l’immeuble exproprié. Tant qu’il n’a pas reçu son indemnisation, il n’a pas à verser d’indemnité d’occupation pour rester dans l’immeuble. L’indemnisation doit avoir lieu à

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compter de cette ordonnance d’expropriation. Une fois versée le propriétaire exproprié devra quitter les lieux dans un délai d’un mois. L’ordonnance d’expropriation fait disparaitre les droits personnels pesant sur le bien ainsi si le bien était loué, le locataire perd la protection de son contrat de bail. Il n’est plus qu’un occupant du DP.

DDD) La fixation de l’indemnité

EEE)

L’indemnité doit être juste et préalable (Déclaration de 1789), l’ordonnance de 58 précise quant a elle «  Les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain » causé par l’expropriation. Le juge de l’expropriation doit chercher à concilier l’intérêt public (ménager des deniers publics) et les intérêts privés.

37)La procédure

ff) La juridiction compétente

Le juge de l’expropriation en première instance va fixer l’indemnité principale ainsi que d’éventuelles indemnités accessoires, il est aidé par un commissaire du gouvernement (différent du ministère public) qui est un directeur des services fiscaux (fonctionnaire donc pas très impartial). La cour de cassation a longtemps défendu cette institution malgré toutes les critiques. La CEDH 24 avril 2003 « Le commissaire du gouvernement à la fois expert et partie, occupe une position dominante dans la procédure et exerce une influence sur l’appréciation du juge. Tout cela crée au détriment de l’exproprié un déséquilibre incompatible avec le principe de l’égalité des armes ». A la suite de cet arrêt, la cour de cassation s’est alignée, en 2005 le gouvernement a pris un décret pour remédier à cette situation, désormais le commissaire du gouvernement est soumis au principe du contradictoire (il doit notifier ses conclusions aux parties 8 jours avant la visite des lieux et il doit tenir informé les parties des éléments qui lui servent à évaluer le bien).

gg) Une procédure contradictoire

C’est une procédure à la fois écrite et contradictoire (permettre de faire part de ses observations à tout moment, ne pas être démuni et connaitre les pièces du dossier pour se défendre).

La notification des offres : l’expropriant recueille l’avis de France Domaine pour l’évaluation du bien et il va notifier son offre d’indemnisation au propriétaire par lettre recommandée. Le propriétaire à un mois pour faire connaitre sa réponse par lettre recommandée, il peut faire une contre proposition (accord à l’amiable), ou encore rejeter la proposition : ouverture de la phase contentieuse.

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La saisine du juge de l’expropriation : procédure écrite (mémoire écrit).

La visite des lieux : dans les 8 jours de sa saisine, le juge fixe une date de visite des lieux (obligatoire depuis 1958). Cette visite va permettre au juge d’avoir une meilleure perception de l’expropriation. En cas de difficulté particulière pour l’évaluation du bien, le juge peut nommer un expert (notaire) pour avoir une autre évaluation du bien.

L’audience publique : après la visite une audience publique à lieu au cours de laquelle le juge va entendre les parties et depuis 1968, le commissaire du gouvernement à perdu le privilège de parler en dernier.

Le jugement : le juge va rendre sa décision dans un délai de 8 jours minimum après la visite des lieux, il ne pourra pas accorder une indemnisation supérieure à celle demandée par le propriétaire exproprié mais ne pourra pas accorder moins que ce que l’administration a proposé.

Les recours éventuels : les parties peuvent interjeter appel dans les 15 jours de la notification du jugement et l’arrêt de la cour d’appel peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans les 2 mois de la notification de l’arrêt d’appel.

38)L’évaluation de l’indemnité

hh) La réparation du préjudice

Préjudice direct matériel et certain :- Direct : il découle directement de l’expropriation. Exemple : perte de loyer si

l’immeuble exproprié était loué. Ne sera pas indemnisé par exemple l’hypothèse d’une plus value immobilière (18% à payer sur le prix de vente) intervenue au moment de l’expropriation du bien, c’est considéré comme un préjudice indirect.

- Matériel : le préjudice moral ne sera pas pris en considération, c’est l’un des rares cas qui exclut le préjudice moral.

- Certain : on ne va pas indemniser un dommage éventuel. Préjudice dont la réalisation n’est pas aléatoire qui s’est déjà produit ou se produira dans le futur. Ne donnera pas lieu à indemnisation la perte de réaliser un projet immobilier envisagé. Pour que le préjudice soit considéré comme certain bien que futur, il faut que le projet soit déjà bien avancé, preuves de l’état d’avancement, réalisation plus que probable qui ne prête pas à débat. C.A Toulouse 26 mars 2001 affaire de la « Grotte Chauvet », découverte d’une grotte 50-50 entre le découvreur et le propriétaire. L’Etat a décidé d’exproprier la grotte pour protéger le site. L’administration a prétendu que le bien en question avait la valeur uniquement du terrain en surface en ne prenant pas en compte la présence de la grotte et

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comme elle n’était pas actuellement exploitée elle ne représentait pas un préjudice certain. La cour d’appel a été très injuste et a retenu le point de vue de l’administration avec une indemnisation de 31 000 francs. La cour de cassation a cassé le jugement et revoit l’affaire à la cour d’appel celle-ci a réévalué à 87,5 millions de francs.

Une réparation intégrale :Indemnisation du préjudice principal (valeur vénale du bien) des préjudices accessoires : l’indemnité de remploi qui va permettre à la personne expropriée de couvrir les frais qu’elle devra supporter pour l’achat d’un bien de même nature (frais de notaire, droits de mutation, frais liés à une hypothèque…). Indemnité de déménagement du locataire et du propriétaire.

ii) L’appréciation de la valeur des biens

La date d’évaluation des biens   : le législateur s’est montré plutôt protecteur : date de l’ordonnance d’expropriation (toute fin de la procédure, c’est le plus favorable pour le propriétaire exproprié : tendance à l’augmentation du prix des biens). Les améliorations ultérieures à cette ordonnance ne sont pas prises en compte, celles qui ont eu lieu après l’ouverture de l’enquête publique, en principe ne donnent pas lieu à indemnisation sauf dans le cas où le propriétaire parvient à prouver qu’elles étaient indispensables pour une jouissance normale des lieux. Les améliorations réalisées avant l’enquête publique donnent normalement lieu à indemnisation sauf si l’administration prouve qu’elles ont été effectuées dans une intention spéculative.

Les éléments d’évaluation et de comparaison   : Le juge va prendre en compte : les accords amiables qui auraient pu intervenir sur des biens de l’expropriant et d’autres expropriés. Lorsque le bien a fait l’objet d’une vente dans les 5 ans qui précèdent le juge ne pourra pas fixer une indemnité principale supérieure à l’évaluation retenue par France domaine. La CEDH s’est montrée assez hostile à cette idée de ne pas indemniser intégralement les propriétaires expropriés CEDH 2 juillet 2002 Motais de Narbonne contre France. Sous l’influence de la CEDH, la cour de cassation a fait évoluer quelque peu sa JP et désormais malgré le code de l’expropriation les propriétaires expropriés seront mieux indemnisés en cas de plus value C. Cass chambre civile 28 janvier 2009 Consorts LAURENT.

39)L’indemnisation

L’entrée en possession du bien exproprié ne peut pas intervenir avant le paiement de l’indemnité au propriétaire exproprié. Dès l’intervention du paiement la personne expropriée doit libérer les lieux dans un délai de 1 mois sous peine d’expulsion.

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Titre 2 : les travaux publics

Depuis la révolution Française ont s’est posé la question de savoir si les travaux réalisés par l’administration pouvaient avoir une nature privée ou publique.

Loi du 28 pluviôse an 8, son article 4 attribue aux conseils de préfecture (ancien TA) le soin de statuer sur « les réclamations des particuliers qui se plaindront des torts et des dommages procédant du fait des entrepreneurs et non du fait de l’administration ». Le C.E soutenu par les auteurs de l’époque a retenu une lecture intelligente du texte et a reconnu la compétence des conseils de préfecture dès 1820 pour l’ensemble du contentieux des travaux publics. Le contentieux des TP a été le 1er à être intégralement confié au JA. Ce contentieux a été l’occasion pour le JA de développer une responsabilité administrative spécifique à savoir la responsabilité pour dommages de TP alors qu’au 19ème l’action de l’administration bénéficiait d’un principe d’irresponsabilité.

Chapitre 1 : la notion de travail public

La loi du 28 pluviôse an 8 n’a pas donné de définition de la notion de TP, c’est donc au C.E et au Tribunal des conflits de progressivement élaborer cette définition. Jusqu’en 1955, le travail public peut être définit comme un travail immobilier réalisé dans un but d’intérêt général pour le compte d’une personne publique C.E 10 juin 1921 Commune de Monségur. Puis intervient un arrêt du T.C 28 mars 1955 Effimieff, le T.C admet que des TP peuvent également être effectués pour le compte d’une personne privée dan le cadre d’une mission de SP et sous le contrôle d’une personne publique.

Section 1 : les critères du Travail Public

La JP Commune de Monségur pose la définition traditionnelle tandis que la JP Effimieff ajoute une hypothèse nouvelle. Deux critères sont nécessaires pour que le régime des TP s’applique : un critère commun qui est celui du travail immobilier et un critère alternatif qui va varier selon si les travaux sont réalisés pour le compte d’une personne privée ou d’une personne publique.

FFF) Le critère commun : un travail immobilier

GGG)

Il va s’agir aussi bien des travaux préliminaires que des travaux immobiliers proprement dit ainsi que les travaux postérieurs à la construction comme les travaux de réparation et d’entretien. Seules les taches ménagères seront exclues de cette notion de travail immobilier. Le travail immobilier peut s’entendre de toute opération matérielle exécutée sur un bien

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immobilier (fixé au sol). Sont considérés par le juge comme immeuble par destination : les ascenseurs, les monte charge, les lustres et parfois les tableaux et ornements.

HHH) Le critère alternatif

III)

40)Un travail exécuté pour le compte d’une personne publique dans un but d’intérêt général (JP Monségur)

Cet arrêt constitue l’arrêt de principe, un enfant s’était blessé dans une église suite à l’effondrement d’un bénitier auquel il s’était suspendu. Les parents obtiennent la condamnation de la commune pour dommage de TP, jusqu’à la JP Monségur il fallait que le travail ait été accompli dans une mission de SP or depuis la loi de 1905 il n’existait plus de SP du culte et apriori les Eglises les constituaient plus des ouvrages publics et il n’y aurait pas du avoir dommage de TP. Le C.E va dissocier le TP de la notion d’ouvrage public et désormais l’utilité générale peut suffire pour que soit retenue la qualification de TP. Depuis cet arrêt le C.E exige que les TP soient exécutés pour le compte d’une personne publique et dans un but d’utilité générale.

jj) Un travail exécuté pour le compte d’une personne publique

Cette condition est remplie lorsque les travaux visent à construire un immeuble dont l’administration sera propriétaire ou lorsqu’il vise à réparer ou entretenir une propriété immobilière publique. Les TP peuvent être effectués par la personne publique elle-même grâce à son propre personnel (la régie), ils peuvent être effectués par un entrepreneur privé dès lors qu’ils sont entrepris pour le compte de la personne publique. Il faut prêter attention aux mouvements de privatisation, ainsi les travaux entrepris par France Télécom après son changement de statut ne présentent pas le caractère de TP, arrêt TC 6 avril 2009 M. PRAGNERE.

kk) Un but d’intérêt général

Depuis l’arrêt de 1921, l’opération de TP ne correspond plus nécessairement à l’exécution d’un SP, une simple finalité d’intérêt général peut suffire. Arrêt TC 26 juin 1973 ONF contre Béraud, un simple intérêt financier ne suffit pas et dans cette affaire les travaux avaient été entrepris pour permettre une meilleure exploitation des coupes de bois, but de rentabilité. En revanche un intérêt financier peut coexister avec un intérêt général, on retiendra la qualification de TP, TC 8 février 1965 Henri Martin contre Sauvadet, construction d’une route forestière qui va permettre une meilleure exploitation de la forêt mais également de relier 2 villages, but d’intérêt général.

41)Un travail exécuté par une personne publique dans le cadre d’une mission de SP pour le compte éventuellement d’une personne privée.

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TC 28 mars 1955 Effimieff, une loi de 1948 avait confié à des associations syndicales le soin de reconstruire des immeubles détruits pendant la 2ème G.M, cette loi avait donné aux associations le statut d’établissement public financé par des fonds privés (dommages de guerre alloués aux propriétaires victimes de destructions). Ces établissements publics avaient donc la charge d’effectuer des travaux pour le compte de leurs adhérents (les personnes privées victimes de dommages).

Un travail exécuté par une personne publique :

Il peut être exécuté par la personne elle-même ou sous son contrôle étroit. Une simple aide financière ou technique de la personne publique ne suffira pas, la personne publique doit être en charge de la maitrise d’œuvre.

Un travail réalisé dans le cadre d’une mission de SP :

On exige une mission de SP, hypothèse plus rigoureuse, un simple intérêt général ne suffit plus, critère plus restrictif. Exemple : C.E 20 avril 1956 consorts Grimouard, le Conseil a considéré que des travaux de reboisement faits par l’Etat sur des terrains privés constituent l’exécution même de la mission de SP de cette administration (ONF). Le JA par la suite à étendu cette nouvelle définition à des travaux effectués d’office sur des immeubles menaçant ruine C.E 12 avril 1957 MIMOUNI.

Section 2 : travail public et ouvrage public

Ces deux notions ont été pendant longtemps difficiles à distinguer, elles portent toutes deux sur des immeubles et elles impliquent une opération d’aménagement, fréquemment l’ouvrage public résulte de l’opération de TP. Certains ouvrages publics ont été acquis auprès de propriétaires privés (déjà bâtis pas d’opération de TP). On peut définir l’ouvrage public comme un bien immobilier qui résulte du travail de l’homme et se trouve affecté à l’intérêt général.

JJJ) Définition de l’ouvrage public

KKK)

Il porte sur un bien immobilier au sens du droit civil cela peut concerner les immeubles par destinations (ascenseurs…) ; il arrive que des éléments mobiles soient considérés comme des ouvrages publics en raison du lien qui les unit à une dépendance domaniale. C.E 15 février 1989 Dechaume, le JA a considéré qu’une cage de football posé au sol dans un stade municipal constituait un ouvrage public. Normalement c’est l’incorporation au sol qui permet de déterminer si un bien est immobilier ou mobilier. C.E 20 novembre 1959 Commune de Montaigut-en –Combraille, un toboggan est un ouvrage public s’il est fixé au sol. C.E 26 septembre 2001 Département du Bas Rhin, un banc posé au sol dans une cour de récréation n’est pas un bien immobilier. Le bien doit résulter d’un travail de l’homme, il ne doit pas être

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resté dans son état naturel. Un certain nombre de biens publics ne recevront donc pas la qualification d’ouvrages publics comme les couloirs aériens, une piste de ski qui n’a pas reçu d’aménagement particulier… une falaise qui aurait reçu des aménagements minimes serait considérée comme laissée à l’état naturel et donc ne sera pas considérée comme un ouvrage public : C.E 14 janvier 2005 Soltès.Un bien affecté à un intérêt général : le bien doit être affecté à un SP ou à l’usage direct du public : CE 1er octobre 1971 Nouvelle société foncière Cap Ferret, le JA dans cette affaire a considéré que les ouvrages mis en œuvre par les autorités Allemandes pendant l’occupation et appelés « Murs de l’Atlantique » ne pouvaient être qualifiés d’ouvrages affectés à la défense nationale et ils ne pouvaient donc être qualifiés d’ouvrages publics. Exceptionnellement le bien peut ne pas appartenir à une personne publique et pourra recevoir la qualification d’ouvrage public, c’est ce qui ressort d’un avis de l’assemblée du C.E du 29 avril 2010 M et Mme BELIGAUD, le C.E interprète la loi de privatisation d’EDF comme permettant de retenir la qualification d’ouvrage public pour les ouvrages producteurs d’électricité et appartenant à EDF (centrales nucléaires).

LLL) L’assouplissement du principe d’intangibilité de l’ouvrage public

42)L’adage « l’ouvrage public mal planté ne se détruit pas »

Cet adage résulte d’un arrêt du C.E du 7 juillet 1853 Robin de la Grimaudière, cela signifie qu’un ouvrage public qui aurait été bâti en contravention avec les règles et les limites de propriété ne peut pas être détruit. Les juridictions ne pouvaient pas adresser d’injonctions à l’administration cela permettait une politique du fait accompli et d’obtenir ainsi une cession forcée sans passer par la procédure d’expropriation. Le propriétaire était indemnisé (montant fixé par le juge de l’expropriation). Les propriétaires étaient privés de recours dans la phase administrative de l’expropriation. Les auteurs étaient très critiques vis-à-vis de cet adage, certains parlaient à son sujet d’expropriation indirecte.

43)L’abandon de la théorie de l’expropriation indirecte

Les juristes craignaient une condamnation de cet adage par la CEDH ce qui a obligé les cours suprêmes Françaises à réagir et à anticiper. C’est la cour de cassation qui a condamné la 1ère de la théorie de l’expropriation indirecte dans un arrêt d’assemblée plénière du 6 janvier 1994 Consorts Baudon de Mony contre EDF, un transfert de propriété non demandé par le propriétaire ne peut intervenir qu’à la suite d’une procédure régulière d’expropriation ; EDF avait édifié un barrage sur des terrains qui avaient été acquis plusieurs années auparavant, le problème est que le contrat de vente de ces terrains avait donné lieu à un procès et EDF avait construit son barrage sans attendre l’issue de ce procès. Annulation du contrat de vente sur les terrains sur lesquels le barrage avait été construit. La cour ce cassation estime que la procédure d’expropriation doit être régulière, elle n’admet plus qu’il y ait expropriation par simple constat du fait accompli, il faudra mener la procédure d’expropriation depuis le début pour qu’il y ait transfert de propriété. Dans l’attente il y aura occupation régulière de la propriété privée qui donnera lieu à indemnisation. La plupart du temps ces situations e règlent à l’amiable. L’abandon de la théorie de l’expropriation indirecte permet au JA quant à lui

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d’éventuellement prononcer la démolition d’un ouvrage public. Dans la pratique, le JA ne prononce pas volontiers la démolition d’un ouvrage public, il va essayer de rechercher si la régularisation n’est pas possible, il va opérer un bien couts/avantages pour évaluer l’intérêt de la démolition et les conséquences et à la suite il prononcera ou pas la démolition si celle-ci n’entraine pas une atteinte excessive à l’intérêt général. C.E 9 juin 2004 Commune de Peille, le JA ordonne la dépose d’une ligne électrique implantée en contravention avec la législation environnementale. Même dans les décisions les plus récentes, Le JA n’admet pas volontiers la démolition des ouvrages publics : C.E 13 février 2009 Communauté de communes de Saint-Malo, le JA refuse de prononcer la démolition d’une cale d’accès en mer. Cette cale avait été mal implantée mais le JA refuse de prononcer la démolition au nom de l’intérêt économique.

Chapitre 2 : l’exécution des travaux publics

L’exécution des TP s’appuie généralement sur des contrats passés entre l’administration et des entreprises de BTP. Le contrat le plus utilisé en matière de TP reste le marché public de travaux (ex marché de TP). Ces marchés sont soumis au code des marchés publics de 2006 qui a fait l’objet de nombreuses modifications. Le marché public de travaux se traduit par le paiement d’un prix par la personne publique à son cocontractant et par l’obligation de respecter les règles de publicité et de concurrence prévues par le code des marchés publics et par le droit communautaire. L’administration peut utiliser d’autres procédés parmi lesquels on retiendra :

- La régie : l’administration réalise elle même les travaux publics avec ses propres moyens en personnel et en matériel, elle va supporter sur son propre budget les risques financiers de son opération. Dans la pratique il va s’agir essentiellement des travaux urgents ou de faible importance qui seront effectués en régie (entretien de la voirie publique…).

- La permission de voirie : le permissionnaire à l’autorisation d’utiliser de manière privative le DP et en contre partie, il exécutera des travaux pour le compte de la personne publique et dans un but d’intérêt général. C.E 13 novembre 1958 Zagouatti, les bénéficiaires de la permission de voirie sont autorisés à dévier un ruisseau dans leur propre intérêt à condition de construire et d’entretenir un canal d’évacuation des eaux.

- La concession de travaux publics : Un contrat par lequel une personne publique appelée le concédant charge une personne publique ou privée : le concessionnaire, d’exécuter des travaux publics en vue de la construction ou de l’aménagement d’un ouvrage. Réalisation de ponts, canaux… créer de ouvrages importants. Au 19ème siècle la réalisation des grandes infrastructures, réseaux de distribution d’eau, de gaz, d’électricité… ont été opérés grâce à des concessions de TP. Ce procédé juridique a été utilisé également pour construire à l’extérieur de la France des canaux (Canal de Panama). La différence entre un marché public et une concession de TP c’est le mode de rémunération du cocontractant. Le concessionnaire est rémunéré au moyen de redevances perçues sur les usagers de l’ouvrage pendant une période donnée (30-50 environ) pour lui permettre d’amortir les risques financiers qu’il a pris au moment de l’aménagement de l’ouvrage. Le plus souvent ces concessions de TP sont associées à des

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concessions de SP, le concessionnaire est chargé de construire et d’entretenir l’ouvrage mais il va également exploiter le SP en vue duquel l’ouvrage a été édifié. Par exemple dans l’arrêt du C.E 4 mars 1910 THEROND, la ville de Montpellier a confié à M. Theron l’entretien de la fourrière municipale mais aussi la charge d’exécuter cette mission de SP (enlèvement des voitures).

- Les contrats de partenariat : ordonnance du 17 juin 2004, contrats administratifs par lesquels l’Etat ou un établissement public national et désormais depuis 2008 les collectivités territoriales, confient une mission globale de financement de construction et d’exploitation d’ouvrages ou d’équipements. Commune d’Auvers sur Oise a signé un contrat de partenariat de 6 ans pour que l’entreprise privée partenaire fasse les rénovations nécessaires, modernise, assure la maintenance… de l’éclairage public municipal, gestion des illuminations festives pour un montant de 2,3 millions d’euros. L’intérêt de ces contrats de partenariat est qu’il y a partage des risques entre la personne publique et la personne privée.

Section 1 : la notion de marché public de travaux

Contrat dans lequel une personne privée s’engage vis-à-vis d’une personne publique a exécuté pour le compte de cette dernière un travail public. Ces marchés publics de travaux font partie des marchés publics régis par le code des marchés publics (CMP). Ce sont des contrats administratifs (Loi 28 pluviôse an 8), ils relèvent de la compétence du JA. Les contrats passés entre l’administration et les partenaires ne contiennent pas toujours de qualifications précises. Il va revenir au JA de qualifier lui-même les contrats qui lui sont soumis à l’occasion d’un litige.

MMM) Les critères matériels

NNN)

L’objet d’un marché public de travaux doit être la réalisation d’un travail public, la JP admet cependant qu’un lien indirect avec les travaux puisse suffire, par exemple un contrat passé entre l’administration et un architecte pour lui confier la direction de l’exécution des travaux satisfera cette condition. Parfois la distinction entre un marché public de travaux et un marché public de fourniture peut être assez délicate.

La mode de rémunération de l’entrepreneur doit consister dans le versement d’un prix convenu à l’avance ou calculé suivant des modalités préalablement fixées. C’est ce critère qui permet de faire la différence entre un marché public de travaux et une concession de TP.

OOO) Le critère organique : la présence d’une personne publique

En droit administratif, le critère organique reste important. En matière de marché public de travaux, le JA continue d’exiger qu’au moins 1 des 2 contractants soit une personne publique

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et donc en principe un contrat passé par deux personnes privées ne pourra pas être qualifié de MPT.

Il existe 3 exceptions   prévues par le code des marchés publics   :

- La construction d’autoroutes et d’ouvrages similaires, arrêt T.C 8 juillet 1963 Sté Entreprise Peyrot, il a qualifié de MTP un contrat passé entre une société d’économie mixte et un entrepreneur pur la construction et l’exploitation d’une autoroute dans le Var. Le juge des conflits a retenu cette qualification en raison de l’objet et de la nature des travaux, selon le T.C, la construction des routes nationales et des autoroutes, appartiendrait naturellement à l’Etat.

- La théorie du mandat, C.E 30 janvier 1933 La Brossete et Fils, la JA estime que lorsqu’il y a mandat expresse accordé par une personne publique à l’une des 2 personnes privées contractantes, le contrat conclu par le mandataire peut être qualifié de MTP. C.E 30 mais 1975 Sté d’équipement de la région Montpelliéraine, le JA admet qu’un mandat tacite peut suffire. Il va s’intéresser à divers indices pour vérifier qu’une personne publique est mandante : financement public des travaux, direction des travaux ou au moins un contrôle effectué par des ingénieurs des ponts et chaussées…

- Dernière exception introduite par le droit communautaire par 2 directives du 31 mars 2004 qui ont été transposés en 2006 dans le code des marchés publics. En droit communautaire, le marché public suppose la présence dans le contrat d’un pouvoir adjudicateur, ce pouvoir peut être l’Etat, les collectivités territoriales ou encore des organismes de droit public soumis à l’influence des pouvoirs publics. En droit communautaire l’organisme de droit public peut être une personne publique ou une personne privée : association ou société d’économie mixte. Un marché public peut donc être signé par 2 personnes privées à condition que l’une soit un organisme de droit public soumis à l’influence des pouvoirs publics. Décision de la CJCE du 1er février 2001 Commission contre RF, pour la cour les organismes d’HLM sont des adjudicateurs qu’il s’agisse d’offices publics HLM ou de sociétés anonymes d’HLM.

Section 2 : la conclusion des MPT

PPP) Les cocontractants

Le maitre d’ouvrage c’est la personne publique pour le compte de laquelle les travaux sont entrepris, la personne publique doit avoir la responsabilité de la conception et de la réalisation des travaux. L’ouvrage lui appartiendra à l’achèvement des travaux et il aura été conçu en fonction des besoins propres de la personne publique.

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Le maitre d’œuvre : la personne (souvent privée) qui va réaliser les études techniques et diriger la réalisation des travaux : architectes, ingénieurs, bureaux d’études… c’est eux qui contrôlent la réalisation effective des travaux, ils vont réceptionner les travaux. Tout ce qui nécessite une expertise technique.

L’entrepreneur et le sous traitant : l’entreprise qui réalise effectivement les travaux, on peut avoir un groupement d’entreprises l’intérêt est que l’ensemble des entreprises sont solidairement responsables de la bonne exécution des travaux. Le sous traitant assure l’exécution d’une partie du contrat, en principe il doit être agréé par la personne publique sous peine de sanction, l’intérêt est que le sous traitant sera rémunéré directement par la personne publique. L’entrepreneur utilise souvent des sous traitant non agréés, s’il y a des problèmes de responsabilité, c’est moins favorable pour le sous traitant.

QQQ) Les modes de passation des marchés

Avant 2006, l’ancienne procédure d’adjudication la personne publique devait retenir le candidat le moins disant. En dessous de 4845 euros HT, la personne publique peut choisir librement son cocontractant. La procédure normale obligatoire pour les marchés d’un montant supérieur à 4 millions 845 mille euros HT est l’appel d’offre en dessous elle n’est pas obligatoire.

L’appel d’offres   : la personne publique va choisir l’offre la mieux disante, celle qui présente les meilleures garanties professionnelles, les qualités techniques les plus satisfaisante ou encore les meilleurs délais d’exécution. Il existe l’appel d’offre ouvert (tout candidat peut présenter son offre) et l’appel d’offre restreint (seuls sont autorisés à concourir les candidats retenus par la personne publique). Depuis 2009 la procédure de l’appel d’offre a été simplifiée, le candidat va remettre dans une enveloppe unique tous les documents qui lui sont demandés (situation fiscale de l’entreprise, capacité professionnelle et financière, réalisations antérieures, diplômes, manière dont elle envisage de réaliser le projet, prix réclamé par l’entrepreneur, l’acte d’engagement du candidat à l’appel d’offre). Le choix de la personne publique se fera par comparaison des dossiers de chacun des candidats avec une ouverture simultanée des enveloppes remises par les candidats. Parfois dans des gros projets, l’appel d’offre peut être précédé d’un concours qui va permettre d’établir un classement préférentiel des projets. Ces appels représentent environ 50% des marchés publics conclus par l’Etat.

Le marché négocié   : pour les montants inférieurs à 4 millions 845 mille euros, une publicité adaptée doit être réalisée (par exemple au-delà de 90 000 euros HT la publicité devra être assurée dans un journal d’annonce légale) en fonction du marché une publicité dans la presse spécialisée peut être conseillée. La personne publique va

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pouvoir négocier avec un ou plusieurs opérateurs. Dans certains cas cette procédure peut être utilisée pour des marchés publics pour un montant supérieur au seuil des 4 millions c’est le cas notamment lorsqu’un appel d’offre est resté infructueux, pour des opérations à caractère secret ou de très haute technicité.

La procédure adaptée   : pour des marchés inférieurs à 4 millions 845 mille euros et jamais eu delà. L’adjudicateur dispose d’une certaine marge de manœuvre s’agissant des modalités de publicité de l’opération. C.E 7 octobre 2005 Région Nord Pas de Calais, la région avait réalisé une publicité jugée insuffisante par le JA, elle s’était contentée de procéder à une publicité dans le journal local et sur son site internet, la région exigeait une compétence technique rare et qu’elle aurait du permettre à des entreprises hors du champ local d’accéder plus facilement à cette information, c'est-à-dire une publicité nationale.

Section 3 : les effets du marché public de travaux

RRR) Les droits et obligations des cocontractants

SSS)

44)Les droits et obligations de l’entrepreneur

45)

Les droits : Droit au paiement du prix, des indemnités en cas d’aggravation des charges du contrat. Il sera indemnisé notamment en cas de sujétions imprévues, en cas de force majeure, en application de la théorie du fait du prince.

Les obligations : le cocontractant a l’obligation d’exécuter ses engagements et il doit le faire personnellement. C’est avec lui que l’administration a conclu ce contrat en raison de ses compétences. Lorsque l’entrepreneur fait appel à un sous traitant, même agréé par la personne publique, il demeure responsable de l’exécution de l’ensemble du marché. L’entrepreneur doit respecter les modalités techniques du contrat ainsi que les délais d’exécution sous peine de sanctions (pénalités de retard). L’entrepreneur devra surtout supporter les modifications unilatérales décidées par l’administration, celles-ci ne donneront lieu à indemnisation qu’au-delà d’un certain seuil.

46) les droits et obligations de l’administration

Les prérogatives de l’administration : elle dispose d’un pouvoir général de direction cela lui permet d’adresser des ordres de service à l’entrepreneur, elle exerce également un pouvoir de contrôle soit par le biais de l’administration des ponts et chaussées soit par l’intermédiaire d’un maitre d’œuvre (architecte), elle va donc pouvoir surveiller le

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chantier, de participer au choix du personnel… L’administration peut modifier unilatéralement les dispositions contractuelles mais il ne peut pas concerner les clauses financières du marché. Elle a un pouvoir de sanction qui ne nécessite pas de recourir au juge, après une simple mise en demeure en cas de faute grave, elle peut décider la mise en régie du marché, cela dessaisit temporairement l’entrepreneur, l’administration peut confier les travaux à une autre entreprise aux risques et aux frais de l’entrepreneur initial défaillant.

L’administration peut même, en cas de faute grave, décider de la résolution du contrat, les dépenses supplémentaires induites par le changement de propriétaire seront à la charge de l’entrepreneur initial.

Les obligations de l’administration : si l’administration commet elle-même une faute grave par exemple une interruption injustifiée des travaux, l’administration s’expose à une condamnation par le JA qui pourra prononcer le versement d’une indemnité à l’entrepreneur qui compensera le manque à gagner de celui-ci.

TTT) La fin du marché public de travaux

A la fin des travaux, l’administration va prononcer la réception des travaux ce qui a pour effet de transférer la propriété de l’ouvrage à la personne publique. La réception peut être sans réserve, elle peut être assortie de réserve ce qui permet de constater les malfaçons. A partir de cette réception s’ouvre une garantie de parfait achèvement (6 mois pour les travaux d’entretien et 1 an pour les travaux de construction). Elle va contraindre l’entrepreneur à entretenir l’ouvrage, à exécuter les finitions, réparer les éventuelles malfaçons signalées. A l’issue de cette période, vont s’appliquer la garantie décennale (10 ans) elle concerne les désordres graves susceptibles d’affecter la solidité de l’ouvrage ou de le rendre impropre à sa destination par exemple des fissures importantes dur la façade, une non-conformité de l’ouvrage par rapport aux normes de sécurité… et la garantie biennale (2 ans) elle concerne les vices qui affectent les menues ouvrages, équipement non liés à la solidité de l’ouvrage : portes, éclairage…

Chapitre 3 : les dommages de TP

Section 1 : la répartition du contentieux entre le J.J et le J.A

En principe le J.A est compétent pour le contentieux des dommages de TP. En cas de dommages causés par le fonctionnement d’un ouvrage public, le JA sera en principe compétent par exemple : les odeurs désagréables d’une station d’épuration. Le J.J en effet peut se retrouver compétent dans 3 cas   :

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- Les dommages ont été causés par des véhicules participant à l’exécution de TP (loi de 1957 : tout engin susceptible de se mouvoir au moyen d’un dispositif propre)

- En cas d’emprise (implantation d’un ouvrage sans l’accord du propriétaire ou sans titre l’autorisant) et de voie de fait (acte manifestement insusceptible de se rattacher à l’exercice d’un pouvoir appartenant à l’administration), même en matière de TP le J.J redevient compétent. T.C 23 janvier 1978 Boisson, élagage des arbres d’une propriété privée sans autorisation, le T.C considéré qu’il n’y avait pas voie de fait car il n’y avait pas dépossession. T.C 4 novembre 1991 Beladjimi, destruction du véhicule mis en fourrière avant les délais légaux expirés. Dans ce cas il y a voie de fait.

- Les dommages causés aux usagers des SPIC,T.C 24 juin 1954 arrêt Guyomar, s’agissant des relations entre les SPIC et leurs usagers, le J.J est compétent « alors même que la cause du dommage résiderait dans un vice de conception, de construction, d’entretien ou de fonctionnement de l’ouvrage public ». Le candidat usager va être considéré comme un usager du SPIC et donc relèvera de la compétence du J.J T.C 17 octobre 1966 Veuve Canasse. L’usager clandestin bénéficie lui aussi de la compétence du J.J, T.C du 5 décembre 1983 Niddam.

Section 2 : la réparation de dommages de TP

On distingue les dommages permanents des dommages accidentels :

Les dommages permanents sont inhérents au fonctionnement ou à la nature d’un ouvrage public situé a proximité de la victime. Régime de RSF : très favorable à la victime.

Les dommages accidentels sont imprévus mais auraient pu être évités : un arbre abimé s’effondre sur des voitures stationnées sur le voie publique. RPF qui variera selon la situation de la victime.

UUU) La RSF en matière de dommages permanents

Il se prolonge sans pour autant être définitif, c’est celui qui gène les riverains d’un ouvrage public ou alors les riverains du lieu où sont réalisés des TP. Ils comprennent les troubles de jouissance, C.E 17 mai 1974 Malaterre, les riverains d’une école vétérinaire ont pu être indemnisé en raison du bruit produit par le chenil de cette école. C.E 22 juin 1983 Epoux Bonnet, en raison du bruit provoqué par l’autoroute voisine. Les dommages permanents comprennent également les atteintes au droit d’accès mais les allongements de parcours n’entrainent pas d’indemnisation. C’est un RSF et pour qu’elle s’applique la victime doit prouver qu’elle subit un préjudice anormal, spécial et grave. Le préjudice est spécial lorsqu’il concerne un nombre limité de victimes, le préjudice est grave et anormal lorsqu’il dépasse ce qui est normalement supportable. Les dommages corporels sont toujours considérés comme graves et anormaux même s’ils sont minimes. En cas de destruction d’un bien mobilier ou immobilier le préjudice sera considéré comme anormal mais en revanche ne sera jamais considéré comme G et A une modification de la circulation générale par ouverture d’une nouvelle voie publique.

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VVV) La RPF en matière de dommages accidentels

Tout dépend de la situation de la victime du dommage, plus la victime a un lien étroit avec l’ouvrage public ou le travail public, plus le régime de responsabilité est défavorable.

Le participant au TP   : c’est la victime la moins bien traitée (entrepreneur, salariés, architectes qui surveillent les travaux, les agents de l’administration…). La victime du dommage devra prouver la faute du maitre d’ouvrage vis-à-vis des participants. Le juge estime qu’il s’agit d’un professionnel qui est en mesure de prendre des précautions pour éviter des accidents. Le participant au TP a un intérêt à la réalisation de ce TP.

L’usager   victime d’un dommage à l’occasion de l’utilisation d’un ouvrage public  : c’est à l’administration d’apporter la preuve qu’il n’y a pas eu de sa part de défaut d’entretien. L’indemnisation de la victime sera due soit à un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public, soit à un vice de conception. L’absence de signalisation pour un ouvrage dangereux pour les lignes à haute tension = défaut d’entretien normal. L’administration pourra s’exonérer de toute responsabilité en cas de force majeure (extérieur aux partis, imprévisible, irrésistible), de faute de la victime. C.E 1977 Beauvieux, chute lors d’une course cycliste, responsabilité de l’administration pour moitié pour défaut d’entretien normal de la voirie et la faute de la victime aurait contribué pour moitié à la survenance de l’accident. Le cycliste aurait du connaitre cette particularité de la route.

Le tiers   : il ne retire aucun avantage du TP ou de l’ouvrage public, RSF avec nécessité de prouver un préjudice grave, anormal et spécial. L’administration ne peut s’exonérer qu’en prouvant la force majeure ou la faute de la victime C.A.A Nancy 11 février 1993 Renaudin.

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