Dossier Jean Claude Duvalier - Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH)

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    Rseau National de Dfense des Droits Humains

    (RNDDH)

    Dossier Jean Claude DUVALIER :

    une Ordonnance de la Honte a t rendue par le Juge

    dInstruction

    3 fvrier 2012

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    Dossier Jean Claude DUVALIER : une Ordonnance de la Honte a t rendue par le Juge dInstruction 1

    I. INTRODUCTIONLe 16 janvier 2011, lex-prsident vie, Jean Claude DUVALIER est rentr en

    Hati aprs vingt-cinq (25) annes dexil.

    Au lendemain de son retour, nombre de victimes et de rescaps du rgimedictatorial instaur de 1971 1986, ont port plainte contre l'ancien dictateur. Les

    Chefs d'accusation mis charge l'encontre de ce dernier sont entre autres :

    excutions sommaires, disparitions forces, assassinats, meurtres, bastonnades,

    harclements, perscutions politiques, viols, vols, arrestations arbitraires, tortures,

    emprisonnements, dportations et enlvements. Dans la volont d'accompagner les

    victimes, de lutter contre l'impunit et de contribuer la manifestation de la vrit,

    des organisations de droits Humains ont remis aux autorits Hatiennes des

    documents retraant la priode de la Prsidence vie de Jean Claude DUVALIER.

    Le Parquet dePort-au-Prince a transfr le dossier au dcanat du Tribunal de

    Premire Instance de ladite juridiction pour enqute judiciaire. Choix a t fait du

    Juge Carvs JEAN pour linstruction du dossier.

    Dans le cadre de son instruction, le Magistrat a choisi dauditionner certaines

    victimes et de ne pas inviter dautres. Toutefois, linculp principal du dossier, Jean

    Claude DUVALIER a reu dans le cadre de cette enqute plusieurs invitations. A

    chaque fois, avec une nonchalance inqualifiable et un non respect ddaigneux de la

    justice du pays, lex-dictateur affirme ne pas pouvoir se dplacer pour des raisons de

    sant. Paralllement, invit un peu partout dans le pays, lex-dictateur qui se

    prsente dans ses discours comme une victime oblige par le pass de prendre lexil,

    participe toutes les activits mondaines et aux crmonies officielles. Mais, commeune horloge et avec une lchet sans pareil, il tombe toujours malade ds quil sagit

    de se rendre au Cabinet dinstruction pour rpondre des faits qui lui sont reprochs.

    Face la fureur des victimes du rgime de Jean Claude DUVALIER vis--vis du

    laxisme des autorits son gard, le Juge dInstruction Carvs JEAN prend une

    mesure restrictive de libert, assignant rsidence lex-dictateur. Cette mesure ne

    sera jamais respecte.

    Le 27 janvier 2012, aprs une anne de tergiversations, le Juge dInstruction

    Carvs JEAN, rend son ordonnance. Quen est-il ?

    II.ANALYSE DE LORDONNANCELe Juge dInstruction du Tribunal de Premire Instance de Port-au-Prince,

    Carvs JEAN, dans le cadre de lenqute ouverte contre Jean Claude DUVALIER,

    Michle B. DUVALIER, Simone O. DUVALIER, Prosper AVRIL, Samuel JEREMIE, Jean

    SAMBOUR, Auguste DOUYON, Jean Robert ESTIME, Ronald BENNETT ; Frantz

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    Dossier Jean Claude DUVALIER : une Ordonnance de la Honte a t rendue par le Juge dInstruction 2

    MERCERON ; Edouard BERROUET ; Colonel Franck ROMAIN (Ancien Chef de la Police

    de Duvalier et Ancien prfet de la Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION (Ex-Secrtaire

    particulier de Franois et Jean Claude Duvalier) ; Grard PROPHETE ; Milice MIDI (

    Ancien Chef Macoute) Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde

    prsidentielle) ; St Voyis PASCAL, Rony GILOT et consorts a rendu son ordonnance au

    dispositif suivant : PAR CES MOTIFS ; Ecartons le rquisitoire dfinitif duCommissaire du Gouvernement, nous, CARVES JEAN, Disons quil existe

    des indices graves et concordants tendant renvoyer le Nomm JEAN-

    CLAUDE DUVALIER au Tribunal Correctionnel pour tre jug pour le dlit

    de dtournements de fonds public et dclarons quil y a lieu suivre contre

    lui, le renvoyons en consquence au tribunal Correctionnel pour tre jug

    conformment aux dispositions des articles 117 et 118 du Code dInstruction

    Criminelle. Ordonnons enfin que toutes les pices du dossier ensemble de la

    prsente ordonnance soient transmises au Commissaire du Gouvernement

    pour les suites de droit.

    DONNE DE NOUS, CARVES JEAN, Juge dinstruction au tribunal de

    Premire Instance de Port-au-Prince, en son cabinet sis au Palais de

    Justice de cette ville. Ce jourdhui vingt sept janvier deux mille douze avec

    lassistance de notre greffier ROSE MYRTHA JUDITH NOEL.

    IL EST ORDONNE tous huissiers sur ce requis de mettre la prsente

    ordonnance excution ; aux officiers du ministre public prs les

    tribunaux Civils dy tenir la main tous commandants et aux officiers de la

    force publique dy prter main forte lorsquils en seront lgalement requis.

    EN FOI DE QUOI, la minute de la prsente ordonnance est signe duJuge et du greffier susdits .

    1. Sur le Caractre rducteur de lInstructionLinstruction est ouverte contre des inculps nommment cits dans le

    rquisitoire dinformer. Lenqute est conduite uniquement contre Jean-Claude

    DUVALIER. Les inculps nont pour la plupart, pas t convoqus encore moins

    interrogs par le Juge dInstruction. Le juge dinstruction ne sest mme pas donn

    la peine didentifier les inculps contre qui et en faveur de qui il devait instruire. Il

    sest content de dire et consorts. Or il sagit dune expression que le juge ne pouvait

    utiliser, dans une ordonnance, vu que la loi lui fait obligation danalyser la situationde chaque inculp.

    Si laction publique est teinte contre un inculp dcd au cours de linstruction,

    il est du devoir du magistrat instructeur de consacrer ce fait dans le cadre de son

    ordonnance. Or le juge signale quil a enqut contre des inculps tels Simone O.

    DUVALIER, Frantz MERCERON, Edouard BERROUET et Samuel JEREMIE dcds sans

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    prciser la situation de ces inculps. Les autres inculps cits par le rquisitoire

    dinformer ne bnficient ni dordonnance de non lieu ni dordonnance de renvoi. Ils

    sont tout simplement oublis par le magistrat instructeur.

    Quelle est, aujourdhui, la situation des inculps Michle B. DUVALIER, Simone

    O. DUVALIER, Prosper AVRIL, Samuel JEREMIE, Jean SAMBOUR, Auguste DOUYON,Jean Robert ESTIME, Ronald BENNETT ; Frantz MERCERON ; Edouard BERROUET ;

    Colonel Franck ROMAIN (Ancien Chef de la Police de Duvalier et Ancien prfet de la

    Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION (Ex-Secrtaire particulier de Franois et Jean

    Claude DUVALIER) ; Grard PROPHETE ; Milice MIDI ( Ancien Chef Macoute)

    Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde prsidentielle) ; St

    Voyis PASCAL et Rony GILOT pour lesquels lordonnance reste trangement muette.

    Le Juge na pas tent dinterroger plusieurs de ces inculps. Ainsi, il a

    dlibrment choisi de ne pas tendre son instruction jusqu certains

    dentre eux pour une raison connue de lui seul.

    2. Sur les faits de linstructionLe juge dInstruction prsente lexpos des faits sur lesquels il a instruit en onze

    (11) pages dans lesquelles il na fait que rsumer la journe du 18 janvier 2011 au

    cours de laquelle le Parquet dePort-au-Prince a procd linterpellation de Jean-

    Claude DUVALIER.

    Le juge na identifi ni les faits infractionnels sur lesquels il devait instruire, ni

    les prvenus contre qui il a instruit en violation de larticle 120 du Code

    dInstruction Criminelle. Il na pas, non plus, prsent les tmoignages des

    tmoins, les pices sur lesquelles il sest bas pour asseoir sa conviction en violationdes principes qui rgissent linstruction criminelle en Hati.

    Les infractions dharclement, de perscutions politiques, de viols, de vols,

    darrestations arbitraires, de tortures, dexcutions sommaires, demprisonnements,

    de dportations, dassassinats, de meurtres, denlvements, etc. nont mme pas t

    cites par le juge Carvs JEAN dans son expos des faits reprochs Jean-Claude

    DUVALIER et ses complices.

    Le Juge dInstruction a donc entendu les plaignants pour amuser la galerie

    et na fait aucun cas des tmoignages recueillis.

    Ce comportement rvoltant a dj t condamn par la Cour de Cassation de

    la Rpublique dans son arrt du 21 avril 1880 :

    Il a t jug : Si on ne trouve ni dans les dclarations des

    plaignants, ni dans les dpositions des tmoins, rien qui tablisse le vol

    avec effraction et que linculp en soit lauteur, cest tort que la Chambre

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    du Conseil, en faisant lhistorique des faits de la cause dans lordonnance,

    soit arrive les mettre la charge de linculp : ce qui se rsume dire

    que lordonnance ne comporte point des motifs en harmonie avec les

    dclarations des plaignants et celles des tmoins, et quelle a, par

    consquent, viol le principe qui veut que toute dcision comporte les motifs

    qui lont dicte . (Voir Arrt du 21 avril 1880 de la Cour de Cassation de laRpublique, in code dinstruction criminelle de Jean Vandal, note j, mise au bas de

    larticle 116, p. 71)

    Une ordonnance de non-lieu qui dclare le fait non punissable doit

    constater toutes les circonstances du fait imputable au prvenu ; (Voir

    Arrt du 11 juin 1906 de la Cour de Cassation de la Rpublique in code dinstruction

    criminelle de Jean Vandal, note u, mise au bas de larticle 112, p. 65)

    3. Sur la prescriptionLe RNDDH constate que dans le rquisitoire dfinitif du Commissaire Flix

    LEGER en date du 3 novembre 2011, lancien Commissaire du Gouvernement avait

    requis le Magistrat Instructeur de dire et dclarer que les faits de rpressions

    politiques, de tortures, de bastonnades, dassassinats politiques, de violations des

    droits humains sont prescrits au regard des articles 463, 464, et 465 du Code

    dInstruction Criminelle. Sans le dire, le Juge dInstruction a tenu compte de cette

    lecture errone de la loi. Pourtant, larticle 464 du Code dInstruction Criminelle est

    clair :

    Laction publique et laction civile rsultant dun crime de nature

    emporter la peine de mort ou des peines afflictives ou infamantes, seprescriront aprs dix annes rvolues, compter du jour o le crime aura

    t commis, si, dans cet intervalle, il na t fait aucun acte dinstruction ni

    de poursuite.

    Sil a t fait, dans cet intervalle, des actes dinstruction ou de

    poursuite non suivis du jugement, laction publique et laction civile ne

    prescriront quaprs dix annes rvolues, compter du jour du dernier acte,

    lgard mmes des personnes qui ne seraient pas impliques dans cet acte

    dinstruction ou de poursuite .

    Or, pour parler de prescription on doit remonter, non la date de laperptration du crime (priode 1971- 1986) comme le fait le Magistrat Instructeur,

    mais la date du dernier acte dinstruction ou de poursuite. Le Juge dInstruction a

    vis dans son uvre le dernier acte de poursuite contre Jean Claude DUVALIER au

    29 avril 2008. Le dlai de prescription au regard de larticle 464 du Code

    dInstruction Criminelle ne commence courir qu partir de cette date.

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    Le Juge dInstruction, dans lun des motifs de son uvre, a crit noir sur

    blanc ce qui suit : ATTENDU QUE les faits reprochs stant produit de

    1971, 1986 et quune procdure a t entame en 1986 jusqu 2008 sans

    interruption (Sic).

    Il est tout simplement illogique de parler aprs de prescription sans unemsinterprtation de la lettre de larticle 464 du Code dInstruction Criminelle. Que

    font le Commissaire Flix LEGER, le Juge Carvs JEAN et les partisans de limpunit

    du dernier alina de larticle 464 ? Comment comprennent-ils les expressions :

    Dans lintervalle ?Dernier acte dinstruction ?Dernier acte de poursuite ?

    La doctrine pourtant explique clairement ces notions. Cest ce quon appelle

    les actes interruptifs de prescription : les rquisitions du Commissaire du

    Gouvernement, les procs-verbaux de constat, les actes accomplis par le Juge

    dInstruction, la constitution de partie civile, les actes accomplis par les autorits

    trangres sont tous considrs comme des actes interruptifs de prescription. (VoirRoger Merle et Andr VITU, Trait de Droit Criminel, tome II, ditions Cujas, Paris, 1979,PP. 66-67) ;

    Aucun des partisans de DUVALIER ne peut tablir que le dernier acte

    dinstruction ou de poursuite engage contre DUVALIER en Hati ou ltranger

    remonterait plus de dix(10) ans.

    4. Sur les crimes contre lhumanit nullit de lordonnance du JugeCarvs JEAN pour dfaut de Motifs dnaturation des faits de la

    cause.

    Dans lun des motifs de lordonnance du Juge Carvs JEAN il est crit ce qui suit :

    Attendu que les faits de crime contre lhumanit nont jamais t viss

    contre linculp dans le rquisitoire dinformer du Parquet qui constitue la

    boussole du Juge dInstruction (Sic) ;

    Pourtant dans le rquisitoire dinformer du Parquet (pice 625/08) vise au No.

    61 de lordonnance du Juge dInstruction il est crit ce qui suit :

    Attendu quil rsulte contre les nomms :

    Jean Claude DUVALIER , Michle B. DUVALIER , Simone O. DUVALIER,

    Prosper AVRIL , Samuel JEREMIE , Jean SAMBOUR , Auguste DOUYON , Jean

    Robert ESTIME , Ronald BENNETT ; Frantz MERCERON ; Edouard BERROUET;

    Colonel Franck ROMAIN(Ancien de la Police de Duvalier et Ancien prfet de

    la Capitale) ; Dr Bernadin ROSARION(Ex-Secrtaire particulier de Franois

    et Jean Claude DUVALIER ) ; Grard PROPHETE; Milice MIDI ( Ancien Chef

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    Macoute) Christophe DARDOMPRE (Colonel et Commandant de la Garde

    prsidentielle) ; St Voyis PASCAL, Rony GILOTet consorts.

    Des prsomptions graves davoir, comme auteurs / complices, commis des :

    o Crimes contre lhumanito Crimes financierso Acte de corruption, forfaiture, concussion de fonctionnaires,

    dtournements de fonds, vols et association de malfaiteurs.

    Faits prvus et punis par les articles 240, 241, 242, 343, 247, 248, 279,

    280, 281, 289, 292, et 293 du Code Pnal ; 137 144 du code pnal ; 224 227

    du code pnal ; 324, 333 du code pnal ; 127, 128 du Code Pnal ; 135 du

    Code Pnal ; 147 du code pnal ;

    Vu les articles 35, 37, 42, 43, 51 et 57 du Code dInstruction Criminelle

    (CIC) ;

    Vu larticle 97 du dcret du 22 aot 1995, relatif lorganisation

    judiciaire.

    Requiert, quil plaise Monsieur le Doyen du Tribunal de Premire

    Instance de Port-au-Prince dsigner un Juge dInstruction pour informer

    par toutes les voies de droit.

    Fait au Parquet, le 29 Avril 2008

    Il est donc clair que le Juge Carvs JEAN a volontairement dnatur les faits

    de la cause dans lintrt des inculps Jean Claude DUVALIER et de ses complices. Il

    est de principe que toute dcision doit comporter les motifs qui lont dicte.

    Il a t jug :

    Les motifs sont des raisons de dcider du Juge ; celles quil donne

    pour justifier sa dcision. Parmi ces raisons, il sen trouve une qui est,

    capitale, dcisive, parce quelle suffit pour emporter elle seule la solutiondu litige ; elle constitue des lors le motif dterminant de la dcision, celui

    qui influence, cest--dire, qui dtermine le dispositif, lequel est lessence de

    la dcision, la dcision elle-mme. Un motif dterminant ne donne

    ouverture cassation que sil est erron. (Cass. 1re sect. 6 mai 1957. Dont vu

    Joseph Chmaly contre Ludovic Laventure, note #58 mise au bas de larticle 282 du

    Code de Procdure Civile, (CPC) annot par Luc D. Hector, p. 125)

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    La dnaturation des faits est une violation de larticle 282 du C.P.C.

    pour motif erron quivalant labsence de motif, surtout quand ces faits

    dnaturs ont servi de base au rejet de la demande. (Cass. 2me sect. 27

    mai 1975, Aff. Mme Borel Sambourg contre son pouse, note # 76 mise au

    bas de larticle 282 du Code de Procdure Civile (C.P.C.) annot par Luc D.

    Hector, p. 128) ;

    Le Juge Carvs JEAN en prtextant que le rquisitoire dinformer ne visait

    pas des crimes contre lhumanit ce qui est faux a dnatur les faits de la cause

    et rend son ordonnance nulle.

    De plus, mme si le rquisitoire dinformer navait pas vis les crimes contre

    lhumanit, le Juge dInstruction se devait dinstruire. Il est de principe que le Juge

    dInstruction est saisi des faits qui lui sont dfrs et non des titres de la poursuite.

    La formalit de la rquisition dinformer tant remplie, le Juge

    dInstruction est pleinement saisi du droit de prendre seul toutes mesures

    tendant une bonne et prompte administration de la justice.

    Il peut donc, sans avis pralable du ministre public et pour des

    raisons de connexit, ordonner, en vue de lconomie des frais et

    lacclration de linstruction, la jonction dune plainte en faux . (Cass.

    Arrt du 29 mars 1949, note No 6 mise au bas de larticle 36 du Code

    dInstruction Criminelle de Menan Pierre-Louis et Patrick Pierre-Louis, p. 36).

    La rflexion du Juge dInstruction sur les crimes contre lhumanit tmoigne

    des limites de nos Magistrats par rapport au droit international des droits delHomme. En effet, le Juge, la lumire de luvre quil a produite, semble ignorer

    les notions de "jus cogens"et de "erga omnes".

    Depuis le 28 mai 1951, dans son avis sur les rserves la convention pour la

    prvention et rpression du crime du gnocide, la Cour Internationale de

    Justice (CIJ) a reconnu lexistence de rgles fondamentales auxquelles les Etats ne

    peuvent droger : Les principes qui sont la base de la convention sont des

    principes reconnus par les nations civilises comme obligeant, mme en

    dehors de tout lien conventionnel dit la CIJ dans son avis. Cest ce quon

    appelle rgles de jus cogens , cest--dire des rgles fondamentales dorigine

    coutumire qui simposent lensemble de la communaut des Etats sansdistinction, quils soient partie ou non aux Traits des Droits de lHomme.

    Dun autre cot, la Cour Internationale de Justice (CIJ), dans un obiter

    dictum, de larrt du 5 fvrier 1970 relatif laffaire de la Barcelona Traction, a

    utilis la notion de Erga omnes en mettant laccent sur lintrt juridique que

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    possdent tous les Etats la protection de certains droits et le caractre erga

    omnes - qui simpose tous - des obligations correspondantes.

    Les crimes odieux commis en Hati sous le rgime de Jean Claude

    DUVALIER constituent des crimes contre lhumanit en raison de leur

    nombre, de leur ampleur et de leur caractre odieux et systmique.

    Hati ne peut donc, comme la crit le Juge Carvs JEAN dans son ordonnance,

    prtendre ne pas pouvoir poursuivre Jean Claude DUVALIER et ses complices pour

    des crimes contre lhumanit sous prtexte que la notion de crime contre lhumanit

    est inconnue dans son droit interne.

    5. Caractre fantaisiste, dmagogique de lordonnance du Juge CarvsJEAN violation des rgles fondamentales rgissant linstruction

    criminelle en Hati.

    Dans le cadre dune instruction criminelle, le juge doit entendre les plaignants,

    les inculps, les tmoins et doit analyser tous les documents utiles la

    manifestation de la vrit. Si ceci nest pas fait, il ny a pas dinstruction. Une

    jurisprudence constante de la Cour de Cassation va dans le sens de cette

    affirmation :

    En principe, lorsque linstruction dune affaire est dfre au Juge

    dinstruction, ce magistrat est astreint procder laudition de toutes les

    personnes mentionnes dans les pices essentielles ayant trait la

    prvention.

    Mais si, loin de sinformer conformment la loi, le Juge dInstruction

    sest born interroger linculp et entendre la partie plaignante, par

    cette manire de procder, il est impossible de juger sainement du mrite de

    la prvention.

    Il y a donc lieu dordonner un supplment dinformation . (Voir Art du 4

    septembre 1871, Not 2, art 58 C. inst. crim. L. Pradines ou note b in code

    dinstruction criminelle de Jean Vandal, p. 40)

    Or le Juge dInstruction Carvs JEAN na entendu aucun des inculps

    lexception de Jean-Claude DUVALIER. Aucune invitation, aucun ordre deconvocation, aucun mandat de comparution na t mis contre ces inculps

    nommment cits dans le rquisitoire du Ministre public. Pire le Juge dInstruction

    ignore parce quil ny a pas eu dinstruction que certains des inculps contre

    lesquels il avait obligation dinstruire taient, dans lintervalle, dcds. Il ny a

    mme pas une phrase concernant le cas de ces derniers.

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    Le Juge Carvs JEAN a accouch dune ordonnance quil convient dsormais

    dappeler lOrdonnance de la Honte. En effet, le Juge sest content de faire une

    mise en scne du plus mauvais got avec linculp Jean-Claude DUVALIER

    prtendument assign rsidence en multipliant des dclarations insenses la

    presse sans soccuper de son travail.

    De plus, le Juge a envoy linculp Jean Claude DUVALIER par devant le Tribunal

    correctionnel pour dtournement de fonds sans dterminer le montant des fonds

    dtourns ni les circonstances dans lesquelles ces fonds ont t dtourns. Il na pas

    non plus rvl avec la complicit de qui, lex-dictateur sanguinaire avait dtourn

    lesdits fonds. LOrdonnance de la Honte du Juge Carvs JEAN nest ni plus ni moins

    quune plaisanterie, un acte dmagogique, une insulte la mmoire des nombreuses

    victimes des DUVALIER.

    6. Quelles sont les possibilits pour contourner cette ordonnance ?Le Commissaire du Gouvernement prs du Tribunal de Premire Instance de

    Port-au-Prince, les plaignants peuvent exercer appel de lordonnance innommable

    du Juge Carvs JEAN. Mais le Code dInstruction Criminelle offre galement

    loccasion douvrir une nouvelle information sur la base de faits nouveaux, cest--

    dire tous les faits non analyss par le Juge dInstruction mais susceptibles de

    contribuer la manifestation de la vrit.

    Les articles 120 et 121 se lisent comme suit :

    Article 120.- sont considrs comme nouvelles charges, les dclarations

    des tmoins, pices et procs-verbaux qui, nayant pu tre soumis lexamende la Chambre du Conseil, sont cependant de nature, soit fortifier les

    preuves quelle aurait trouves trop faibles, soit donner aux faits de

    nouveaux dveloppements utiles la manifestation de la vrit.

    Article 121.- Lofficier de police ou le juge dinstruction qui aura recueilli

    les charges nouvelles, adressera, sans dlai, copie des pices au

    commissaire du Gouvernement, sur la rquisition duquel la Chambre du

    Conseil pourra nommer un juge devant lequel il sera procd au

    supplment dinformation.

    III. CONCLUSIONLordonnance rendue par le Juge dInstruction Carvs JEAN expose au grand jour

    les faiblesses du systme judiciaire hatien et son incapacit slever la hauteur

    des revendications de justice du peuple hatien.

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    Lordonnance du Juge Carvs JEAN sur les graves crimes perptrs sous le

    rgime des DUVALIER ne peut en rien contribuer la manifestation de la vrit et

    la justice. Cest une uvre grotesque, honteuse, insultante quil convient de

    rformer au plus vite. Le RNDDH rappelle quune ordonnance de clture est avant

    tout un rapport dinstruction qui fait la synthse des actes dinstruction poss par le

    Magistrat Instructeur, qui rsume les tmoignages recueillis, les plaintes dposes,les interrogatoires des inculps, qui analyse les documents dinstruction, les procs-

    verbaux et perquisitions. Aucun de ces lments na t retrouv dans luvre du

    Juge Carvs JEAN.

    Cette ordonnance de la honte constitue tout simplement un acte de dni de

    justice. Elle est de nature gravement affecter limage de la justice hatienne.

    Le RNDDH encourage les parties concernes explorer les voies traces par la

    Loi pour arriver la reformation de cette ordonnance inique.