Démarche nationale de consensus pour un vocabulaire ...

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Démarche nationale de consensus pour un vocabulaire partagé de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité AVEC DOSSIER D’APPUI ET ANNEXES // MARS 2021 GOUVERNEMENT Commission nationale de lutte contre la maltraitance et de promotion de la bientraitance

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Démarche nationale de consensus pour un vocabulaire partagé de la maltraitance

des personnes en situation de vulnérabilitéAVEC DOSSIER D’APPUI ET ANNEXES // MARS 2021

GOUVERNEMENTCommission nationale de lutte

contre la maltraitance et de promotion de la bientraitance

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« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »Convention européenne des droits de l’homme, article 3

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La Commission nationale de lutte contre la maltraitance

et de promotion de la bientraitance tient à remercier

chaleureusement tous les membres des groupes de pilotage

et de cotation, constitutifs de la démarche de consensus,

ainsi que toutes les personnes ayant participé aux ateliers

de débat élargi et ayant contribué sous quelque forme

que ce soit à l’élaboration de ce vocabulaire partagé de la

maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité.

La Commission remercie également la Haute Autorité de

Santé pour son appui méthodologique tout au long de la

démarche de consensus.

Remerciements

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1. Préambule 4

1.1 Une démarche de consensus pour un vocabulaire partagé de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité 5

1.2 Dossier constitutif du vocabulaire partagé de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité 6

1.3 Les enjeux et objectifs d'un vocabulaire partagé de la maltraitance 7

Définition de la maltraitance 10

2. Lexique associé à la définition de la maltraitance 12

2.1 Personne en situation de vulnérabilité 13

2.2 Développement 13

2.3 Droits 13

2.4 Besoins fondamentaux 14

2.5 Santé 14

2.6 Relation de confiance 15

2.7 Relation de dépendance 15

2.8 Relation de soin ou d’accompagnement 15

2.9 Maltraitance institutionnelle 16

Table des matières

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3. Caractérisation des situations de maltraitance 18

3.1 Typologie 19

3.2 Lieu 20

3.3 Victime : personne en situation de vulnérabilité 20

3.4 Auteur 21

3.5 Échelle de responsabilité 21

3.6 Temporalité, durée 21

3.7 Actions correctives apportées à la situation 22

Annexe 1. Cadre et contexte de la démarche de consensus 24

Annexe 2. La démarche de consensus pour un vocabulaire partagé de la maltraitance : finalités et originalités 30

Annexe 3. La méthodologie utilisée 36

Annexe 4. Avis du Conseil de l’âge 40

Annexe 5. Contribution à la matière d’appui : une mise en dialogue 42

Annexe 6. Participants à la démarche de consensus 50

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1.Préambule

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La Commission nationale pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance est une instance de concertation participative conjointe au Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) et au Conseil national consultatif des personnes âgées (CNCPH), mise en place le 19 février 2018 par la ministre des Solidarités et de la Santé et la secrétaire d’État en charge des personnes handicapées.

La Commission a remis en janvier 2019 aux ministres, au HCFEA et au CNCPH une « note d’orientation pour une action globale d’appui à la bientraitance dans l’aide à l’autonomie » selon trois axes, comprendre – agir – prévenir et dans laquelle elle formule des recommandations en la matière. Dans la perspective d’une mise en œuvre opérationnelle de ces propositions, la Commission a défini son programme de travail pour l’année 2020 avec trois priorités :

1. Élaborer un vocabulaire partagé de la maltraitance pour les secteurs de l’enfance, de l’âge et du handicap ;

2. Renforcer la coordination des acteurs locaux pour l’identification, l’alerte et le traitement des situations de maltraitance ;

3. Valoriser des initiatives locales de promotion de la bientraitance.

Ainsi, la Commission a mené avec l’appui méthodologique de la Haute Autorité de Santé, une démarche de consensus conduite de novembre 2019 à décembre 2020 en associant toutes les parties prenantes à la politique publique de protection des personnes pour élaborer collectivement et en concertation une définition partagée de cette notion de maltraitance qui puisse servir de référence commune pour tous. Validée en janvier 2021, cette définition est complétée par des éléments qui permettent d’en tirer des bénéfices opérationnels (un lexique des termes utilisés, une caractérisation des situations de maltraitance, un dossier d’appui comprenant notamment les références scientifiques et littéraires, la méthode employée et ses enjeux).

Les principales nouveautés de cette matière sont : une démarche transversale pour un vocabulaire commun pour toutes les formes de vulnérabilité (celles des mineurs ou des majeurs) ; une approche qui inclut l’échelle institutionnelle au-delà des maltraitances interpersonnelles et individuelles ; une typologie qui intègre l’exposition à un environnement violent comme forme de maltraitance à part entière (dans la famille ou au sein d’une institution).

Le résultat de la démarche de consensus a été présenté et a reçu un accueil favorable au CNCPH. Il a été présenté au Conseil de l’âge du HCFEA le 09 mars 2021 et y a reçu un avis positif, assorti de commentaires des membres, annexés au dossier d’appui.

1.1 Une démarche de consensus pour un vocabulaire partagé de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité

La Commission nationale pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance a mis en œuvre de novembre 2019 à décembre 2020, une démarche de consensus visant à proposer un vocabulaire de la maltraitance qui soit partagé et compris

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de tous, et qui puisse servir de socle opérationnel à toutes les parties prenantes engagées dans le repérage, le traitement et la prévention de la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité.

Cette démarche repose sur deux partis pris :

1. L’importance d’ancrer les travaux dans les textes internationaux précurseurs émanant notamment de l’ONU, du Conseil de l’Europe et de l’OMS et dont la politique publique de prévention et de lutte contre la maltraitance en France est l’héritière ;

2. L’importance d’associer trois niveaux de savoirs également légitimes pour construire collectivement ce vocabulaire : celui des personnes en situation de vulnérabilité les plus directement concernées et exposées à la maltraitance (savoirs expérientiels), celui des chercheurs (savoirs scientifiques), celui des parties prenantes institutionnelles et professionnelles (savoirs tirés des pratiques).

1.2 Dossier constitutif du vocabulaire partagé de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité

Le vocabulaire partagé concernant les situations de maltraitance est constitué de trois corpus et d’un dossier d’appui en annexe, relatifs à la méthodologie de la démarche de consensus et à des références détaillées sur les phénomènes de maltraitance.

Le premier corpus présente la définition de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité. Celle-ci est délibérément brève mais nécessite que tous les termes utilisés soient clairs et compréhensibles pour tous.

C’est pourquoi le second corpus est un lexique précisant les principales notions utilisées : personnes en situation de vulnérabilité, développement, droits, besoins fondamentaux, santé, relation de confiance, relation de dépendance, relation de soin et d’accompagnement, et maltraitance institutionnelle.

Un troisième corpus, intitulé « caractérisation des situations de maltraitance », explicite la définition et vise à faciliter l’identification et l’analyse des différentes situations possibles. Cet ensemble comporte :

1. La typologie selon la nature de la maltraitance

2. Le lieu où se produit la situation de maltraitance

3. La personne qui subit la maltraitance

4. L'auteur de la situation de maltraitance

5. L'échelle de responsabilité

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6. La durée ou temporalité de la situation de maltraitance

7. Les mesures correctives

1.3 Les enjeux et objectifs d'un vocabulaire partagé de la maltraitance

À travers cette démarche inédite sur le plan international par son approche doublement transversale aux publics (enfants et adultes en situation de vulnérabilité) et aux lieux (au domicile, dans la sphère intrafamiliale, et au sein d’institutions), la Commission vise à réaffirmer :

1. Le droit pour tout citoyen en situation de vulnérabilité d’être protégé des négligences et des violences qu’il ne peut faire cesser ni prévenir par lui-même et tout particulièrement de celles qui émanent des personnes, services ou structures qui ont une responsabilité d’aide, d’accompagnement, de soin, de protection ou d’éducation envers lui.

2. Le devoir de notre société et de nos institutions envers celles et ceux qui se trouvent ponctuellement ou durablement vulnérabilisés par des facteurs liés à leur parcours de vie personnelle ou liés à leur environnement passé ou présent, de ne pas laisser les situations de maltraitance qu’ils rencontrent être ignorées faute d’un vocabulaire partagé et de travaux et références scientifiques pour en faciliter la prévention, le repérage, le signalement et les résolutions possibles.

C’est donc à la vitalité de la démocratie que ces travaux entendent contribuer, en apportant un éclairage sur le phénomène trop peu visible et peu considéré de la maltraitance des personnes en situation de vulnérabilité et en permettant une meilleure réponse du corps social. En cela, les instigateurs de ces travaux ont l’espoir d’apporter de nouvelles pistes pour que la citoyenneté de certains publics vulnérables soit pleinement respectée.

Un vocabulaire de la maltraitance appelé à évoluer

Ces travaux n’entendent pas établir une vision figée des phénomènes de maltraitance. Ils restituent les fruits de l’intelligence et de l’expérience collectives mobilisées sur le sujet à un instant particulier en s’inscrivant dans une continuité et une évolution permanente.

Par conséquent, quoiqu’inspiré de travaux déjà anciens, ce vocabulaire partagé de la maltraitance est révisable dans le temps et appelé à évoluer. En effet, il devra être régulièrement revisité pour suivre et d’adapter à l’évolution des opinions, de la culture, des valeurs, des futures recherches universitaires et expériences de terrain, de la législation en vigueur à laquelle se réfèrent les acteurs qui ont contribué à cette production mais aussi et surtout de toutes les évolutions sociétales en cours et à venir, du partage et du dialogue, nécessaires, de nos différentes perceptions.

À ce titre, une première révision sera proposée dans les 3 ans suivant son adoption en séance plénière de la Commission. Cette temporalité permettra de tenir compte des difficultés et remarques des acteurs concernés qui l’auront mis en pratique.

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Ce vocabulaire partagé se veut, malgré son caractère perfectible, une étape significative dans la politique publique de protection des personnes en situation de vulnérabilité et le signe résolu et durable que le corps social élève significativement son seuil d’intolérance et de non-acceptation des situations de maltraitance.

Un vocabulaire de la maltraitance conçu comme une aide au discerne-ment, sans faire l’économie de temps collectifs d’analyse et de résolution de chaque situation de maltraitance

Ce vocabulaire partagé est conçu comme une aide au discernement de toute personne impliquée dans la prévention et la lutte contre la maltraitance pour la prise de décision ordinaire, le signalement aux autorités administratives ou judiciaires ou la compréhension d’une situation de maltraitance qui perdure.

Néanmoins, il ne peut à lui seul répondre à toutes les questions opérationnelles et ne dispense en aucun cas des temps de discussion et de travail collectif pour l’analyse et la résolution des risques et situations de maltraitance.

Un vocabulaire de la maltraitance conçu comme une première étape pour impulser et approfondir la recherche universitaire sur les phénomènes de maltraitance

Ce vocabulaire ne remplace pas les investigations scientifiques. Un grand nombre de questions se posent encore aujourd’hui concernant les situations de maltraitance, leur prévalence, les lieux où elles se produisent, les personnes les plus touchées, les actions de prévention ou de traitement les plus efficaces, etc.

La Commission souhaite faire de ce vocabulaire une première étape pour donner une visibilité aux phénomènes de maltraitance et permettre d’impulser des travaux de recherche qui le compléteront et viendront approfondir toutes les complexités et interrogations qui subsistent en la matière.

Trois postulats préalables au vocabulaire : la vulnérabilité est une situation évolutive ; la maltraitance, un processus dynamique ; l’emploi du terme maltraitance ne minimise pas la gravité de la situation, ni ne légitime un traitement peu rigoureux

Au cours de ces travaux, les parties prenantes ont dû faire certains choix, explicités en annexe. Parmi ces choix deux sont précisés ici d’emblée :

Premièrement, la vulnérabilité est entendue non pas comme un état de fait irréversible mais une situation appelée à évoluer : elle relève donc dans bien des cas d’une éventualité et non d’une nature de la personne qu’elle concerne, elle peut être aussi ponctuelle et réversible. En effet, elle est soumise à des facteurs individuels mais aussi à des facteurs environnementaux et relationnels.

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Un environnement défavorable et/ou une relation déséquilibrée sont des facteurs de vulnérabilisation des personnes. C’est pourquoi, nous avons pris le parti de parler des personnes « en situation de vulnérabilité » et non de qualifier certains publics de « personnes vulnérables », comme cela est inscrit dans le code pénal.

Deuxièmement, la maltraitance est perçue comme un processus dynamique. Une situation de maltraitance peut être le fruit de différents mécanismes, revêtir des formes diverses (physiques, psychiques, etc.) qui se cumulent et/ou s’associent. Elle peut s’installer dans le temps, s’intensifier. Elle peut ne pas être vécue de la même manière selon les individus, etc. En outre, une maltraitance subie par une personne peut générer pour elle un facteur de vulnérabilisation, l’exposant à la répétition de maltraitances, parfois sous des formes diverses, ou créant les conditions qui conduisent la victime à devenir à son tour auteur de maltraitance.

Par ailleurs, le terme de maltraitance n’induit pas une minimisation de la gravité des situations, ni a fortiori ne justifie de ne pas donner aux faits le traitement qu’ils méritent, que ce traitement soit social, organisationnel, institutionnel, ou pénal.

Les corpus proposés ici sont à considérer comme des appuis à l’analyse collective et à l’action. Ils ne masquent en rien la complexité du sujet ni les obstacles fréquents rencontrés par les acteurs pour identifier la maltraitance, alerter lorsqu’ils la subissent ou en sont témoins, et y répondre en concertation avec toutes les parties prenantes concernées, y compris avec les personnes qui en sont victimes.

Issu d’une démarche de long terme, de la richesse des dialogues entre différents savoirs, ce vocabulaire partagé de la maltraitance entend également sensibiliser à la fois le public et les professionnels aux différents risques et situations possibles et ainsi, contribuer au développement d’un regard différent pour promouvoir une culture de la bientraitance.

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Définition de la maltraitance

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Il y a maltraitance d’une personne en situation de vulnérabilité (1) lorsqu’un geste, une parole, une action ou un défaut d’action, compromet ou porte atteinte à son développement (2), à ses droits (3), à ses besoins fondamentaux (4), et/ou à sa santé (5) et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance (6), de dépendance (7), de soin ou d’accompagnement (8).

Les situations de maltraitance peuvent être ponctuelles ou durables, intentionnelles ou non ; leur origine peut être individuelle, collective ou institutionnelle (9).

Les violences et les négligences peuvent revêtir des formes multiples et associées au sein de ces situations.

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2.Lexique associé à la définition

de la maltraitance

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2.1 Personne en situation de vulnérabilité

La vulnérabilité est liée à des facteurs individuels et/ou des facteurs environnementaux.

Eu égard à la maltraitance, une personne se sent ou est en situation de vulnérabilité lorsqu’elle se trouve en difficulté voire impossibilité de se défendre ou de faire cesser une maltraitance à son égard ou de faire valoir ses droits du fait de son âge (dans le cas d’un mineur), de son état de santé, d’une situation de handicap, d’un environnement inadapté ou violent, d’une situation de précarité ou d’une relation d’emprise.

Des facteurs individuels relatifs au genre, à l’orientation sexuelle, à la race, l’ethnie ou à la nationalité peuvent constituer un risque accru de vulnérabilité.

2.2 Développement

On entend par développement le processus de croissance continue d’un être humain qui le conduit à acquérir ou développer des capacités physiques, psychiques et socio-relationnelles.

Le développement d’une personne se poursuit tout au long de sa vie même s’il revêt des rythmes et des formes différentes. Ce développement peut être facilité ou au contraire empêché par l’environnement matériel, social et relationnel, dans lequel la personne se trouve, et a fortiori par la maltraitance qu’elle subit.

2.3 Droits

Dans la présente définition, on entend par droits :

} Pour les mineurs, ceux qui sont énoncés dans la convention internationale des droits de l’enfant de 1989 https://www.unicef.fr/dossier/convention-internationale-des-droits-delenfant

} Pour les personnes en situation de handicap, ceux qui figurent dans la convention rela-tive aux droits des personnes handicapées de l’ONU de 2007 https://www.un.org/development/desa/disabilities-fr/la-convention-en-bref-2/texteintegralde-laconvention-relative-aux-droits-des-personnes-handicapees-13.html

} Pour tous, les droits fondamentaux reconnus dans le droit français, transversaux à tous les publics https://www.vie-publique.fr/fiches/23865-libertes-et-droits-fondamentaux-de-quoisagit-il

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En droit français, il s’agit des droits et libertés garantis par le préambule de la Constitution, à savoir la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946 et la Charte de l’environnement de 2005. Ce sont :

} Les droits civils, politiques et individuels de tout être humain (« les droits de ») ; } Les droits sociaux comme celui à la santé (« les droits à ») ; } Les droits dits de 3ème génération comme celui de « vivre dans un environnement équi-libré et respectueux de la santé ».

S’ajoutent à ce corpus les droits affirmés dans les Conventions européennes (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 Novembre 1950) ou internationales (Déclaration universelle du 10 décembre 1948 ; Pacte relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ; Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels également du 16 décembre 1966).

2.4 Besoins fondamentaux

On entend par besoins fondamentaux :

} Pour les mineurs, le besoin de sécurité ; les besoins physiologiques et de santé ; le besoin de protection ; le besoin de sécurité affective et relationnelle ; le besoin d’expériences et d’exploration du monde ; le besoin d’un cadre de règles et de limites ; le besoin d’identité ; le besoin d’estime de soi et de valorisation de soi.https://solidaritessante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/familleenfance/article/rapport-demarche-de-consensus-sur-les-besoins-fondamentaux-de-l-enfanten/

} Pour tous (mineurs et majeurs), les besoins physiologiques, le besoin de sécurité, le be-soin d’appartenance, le besoin d’estime, le besoin de s’accomplir.http://semioscope.free.fr/article.php3?id_article=8

2.5 Santé

On entend par santé « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consistant pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. » (OMS, 1946)

La santé est aussi tributaire du pouvoir d’agir d’un individu ou d’une communauté sur sa santé et plus largement, sur sa vie et sur son destin. En outre, dans les années récentes, l’OMS a explicitement relié la santé à des déterminants sociaux, c’est-à-dire les circonstances dans lesquelles les individus naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent ainsi que les systèmes mis en place pour faire face à la maladie.https://www.who.int/social_determinants/fr/#:~:text=Les%20d%C3%A9terminants%20sociaux%20de%20la,faire%20face%20%C3%A0%20la%20maladie

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2.6 Relation de confiance

On entend par relation de confiance, la relation qui conduit une personne à accepter tacitement ce qu’énonce une autre personne comme étant a priori vrai (ou en tout cas sincère), et toute proposition émanant d’elle comme bénéfique et proposée a priori dans l’intérêt de la personne.

La relation de confiance peut intervenir dans tout type de relation, familiale, hiérarchique ou de coopération entre pairs, d’aide et d’accompagnement.

2.7 Relation de dépendance

On entend par dépendance une situation dans laquelle une personne a besoin d’une autre personne, d’un service ou d’une institution, pour répondre à ses besoins fondamentaux et réaliser pour et avec elle des actes de la vie quotidienne.

Pour illustration, le mineur est en relation de dépendance envers ses parents, avec ceux qui l’élèvent et les adultes en général. La personne âgée en perte d’autonomie peut l’être par exemple vis-à-vis de son conjoint, de ses enfants, d’un service d’aide à domicile.

La personne en situation de handicap peut l’être par exemple à l’égard de sa famille qui lui apporte de l’aide, d’un service de transport, d’un fournisseur de matériel qui lui est nécessaire pour vivre et/ou travailler.

2.8 Relation de soin ou d’accompagnement

Le soin ou l’accompagnement s’inscrit dans une relation qui amène un membre de la famille, un proche ou un professionnel à intervenir dans la vie d’une autre personne dans un but curatif (soigner au sens de cure), dans un but de maintien voire de développement de sa qualité de vie (soigner au sens de care) ou dans un but social et éducatif (se développer, apprendre, découvrir le monde et être en relation avec les autres).

Cette relation peut intervenir dans un environnement privé ou professionnel, dans le cadre d’un contrat d’emploi direct ou dans le cadre d’une relation bénévole, instituée ou non.

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2.9 Maltraitance institutionnelle

Lorsque des situations de maltraitance résultent, au moins en partie, de pratiques managériales, de l’organisation et/ou du mode de gestion d’une institution ou d’un organisme gestionnaire, voire de restrictions ou dysfonctionnements au niveau des autorités de tutelle sur un territoire, on parle de maltraitance institutionnelle.

La maltraitance institutionnelle peut trouver son origine notamment par :

} Une politique institutionnelle inadaptée formalisée ou non, par exemple des pratiques professionnelles ou des aménagements internes restreignant les libertés des personnes accompagnées de manière excessive au regard de leurs droits fondamentaux, sans que leur état ne le justifie ;

} Des pratiques managériales inadaptées ou défaillantes ;

} Une organisation conduisant à des situations de sous-effectif ou de sous-qualification récurrentes ou pérennes ;

} Une politique de formation insuffisante ou inadaptée ;

} Des insuffisances organisationnelles ;

} Une absence de régulation des violences ou négligences subies par les personnes en situation de vulnérabilité, malgré l’existence de signaux d’alerte ;

} Une absence d’organisation d’un circuit d’alerte et de traitement connu des personnes en situation de vulnérabilité, de leurs proches et des intervenants, ou par une absence de respect des obligations de signalement aux autorités administratives et judiciaires ;

} Des intimidations envers des familles ou des personnes accompagnées sous forme de menaces ou de représailles (exclusion, rétention abusive…) ;

} Un cadre de vie inadapté, des insuffisances en matière d’hygiène, de santé et/ou de sécurité ;

} Un déséquilibre flagrant entre l’importance accordée aux impératifs collectifs et insti-tutionnels au détriment du respect des libertés individuelles et de l’effectivité de per-sonnalisation de l’accompagnement.

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La maltraitance institutionnelle peut résulter des choix ou dysfonctionne-ments :

1. De responsables de services ou établissements

2. D’équipes chargées de la régulation des activités au sein des administrations de tutelle

3. Et plus largement, des décideurs politiques qui définissent les priorités stratégiques et les moyens dédiés.

Maltraitances institutionnelles et responsabilités individuelles ne sont pas exclusives les unes des autres. Il revient à ceux qui analysent au cas par cas les situations de distinguer et de chercher à répondre à la fois aux comportements, pratiques, voire délits ou crimes individuels, et aux dysfonctionnements ou manquements collectifs voire généralisés qui engagent les représentations d’une société toute entière, et donc nécessitent des actions à cette échelle du corps social.

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3.Caractérisation des situations

de maltraitance

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3.1 Typologie

La typologie consiste à classer les situations selon la nature des actes ou des omissions dont il est question.

a) Maltraitances physiques, notamment châtiments corporels, agressions physiques, gestes brutaux, enfermement (y compris au domicile), usage abusif ou injustifié de la contention, sur ou sous-médication, usage de traitements à mauvais escient, intervention médicale sans consentement éclairé…

b) Maltraitances sexuelles, notamment viols, agressions sexuelles, atteintes sexuelles, embrigadement dans la pornographie et la prostitution, attentats à la pudeur…

c) Maltraitances psychologiques, notamment insulte, intimidation, harcèlement, humiliation, menace de sanctions ou d’abandon, mise à l’écart, relégation des espaces de vie ou des activités familiaux dans la vie quotidienne (repas, loisirs, fêtes, vacances…), chantage affectif, recours à l’arbitraire, déni du statut d’adulte, infantilisation, usage d’un vocabulaire dégradant, indifférence, silence systématisé, contraintes ou limitations alimentaires injustifiées, imposition de règles d’utilisation de moyens de communication empêchant le maintien des liens sociaux et familiaux, privation d’équipements ou d’activités destinés à favoriser le développement et/ou les relations sociales de la personne, emprise mentale, déni du statut d’enfant et parentification (inversion des rôles entre l’adulte et l’enfant, attitude consistant à confier à un mineur des responsabilités inadaptées à son âge, notamment pour satisfaire aux besoins des adultes qui l’entourent), sous ou surprotection entravant l’exercice et le développement de l’autonomie…

d) Maltraitances matérielles et financières, notamment fraude, vol d’effets personnels, d’argent ou de biens, privation de gestion de ses ressources ou d’accès à ses comptes bancaires, confiscation de cadeaux, dégradation des biens d’une personne, racket…

e) Négligences, abandons, privations : notamment défaut, qui peut être répété, de soins, défaut d’adaptation de la prise en charge de la personne au regard de son diagnostic médical, absence de recherche d’un consentement éclairé pour toute décision qui concerne la personne (hors situation d’urgence), privation de nourriture, de boissons ou d’autres produits d’usage quotidien, obstruction ou restrictions abusives à l’égard des visites ou des contacts avec les proches, négligence éducative, négligence de l’hygiène personnelle, inaction conduisant à laisser la personne dans un état de dénuement ou d’isolement, absence de recherche de relai ou de continuité d’intervention suite à un départ ou une rupture de prise en charge, en particulier à domicile, entrave ou insuffisance des moyens mis en œuvre pour permettre l’exercice du droit de vote ou l’accès à une aide, à une prestation, entrave ou refus de reconnaître le droit à vivre librement sa sexualité (dans les limites de l’âge et de la faculté de compréhension)…

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f) Discriminations : notamment accès difficile, dégradé ou impossible aux droits, au logement, aux soins, à l’éducation, au travail, aux prestations sociales, à une information loyale et compréhensible… qui survient notamment sur le fondement d’une particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, de l’apparence physique, de l’âge, d'une situation de handicap, de l’état de santé, de la perte d'autonomie...

g) Exposition à un environnement violent : environnement familial ou institutionnel violent dans lequel la personne, mineure ou majeure, est soumise à des actes, comportements ou images violents, à des menaces de violence, à des violences entre pairs, sans un degré suffisant de régulation de la part des personnes en responsabilité au sein de cet environnement.

3.2 Lieu

Le lieu est un critère essentiel pour déterminer d’une part, si la situation a lieu dans un cadre familial ou privé, ou dans un cadre institutionnel ou public, et d’autre part, identifier où les risques sont les plus importants et, en conséquence, où les efforts de prévention doivent porter prioritairement.

a) Domicile de la victimeb) Domicile de l’auteurc) Établissement ou service social ou médico-sociald) Établissement de santé/Cabinets médicaux et paramédicauxe) Établissement scolairef) Lieux d’activités périscolaires, de loisirs ou sportivesg) Lieu de travailh) Lieu de détentioni) Lieu cultuelj) Moyen de transportk) Internet et réseaux sociauxl) Lieu publicm) Autre, à préciser

3.3 Victime : personne en situation de vulnérabilité

Cet élément permet d’établir quelles sont les situations de vulnérabilité qui exposent le plus à subir des maltraitances et en corollaire, à l’égard de quels publics les efforts de prévention doivent prioritairement s’organiser.

a) Personne mineureb) Personne en situation de handicapc) Personne âgée en perte d’autonomie ou en situation d’isolementd) Personne que son état de santé rend vulnérablee) Personne en situation de précarité socialef) Personne en situation de sujétion (sous emprise)g) Autre, à préciser

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3.4 Auteur

Cet élément permet d’identifier quelles sont les relations au sein desquelles se produisent les maltraitances, ainsi que d’identifier les responsables des dommages pour mieux gérer les suites des situations.

a) Parent (au sens large : personne de la famille)b) Concubin du parentc) Représentant légal d’une personne mineured) Personne en charge d’une mesure de protection juridique exercée auprès d’une

personne majeuree) Employeurf) Professionnel exerçant une mission d’accompagnement ou de soin à domicile ou en

établissement social, médico-social ou de santég) Professionnel en établissement scolaireh) Usagers au sein de la même institutioni) Bénévolej) Autre, à préciser

3.5 Échelle de responsabilité

Cet élément permet de différencier des actes ou négligences commis par une personne et qui n’engagent que sa seule responsabilité, d’actes ou négligences dont la responsabilité ne tient pas qu’à elle seule, voire, peuvent être attribués au service ou à la structure au sein de laquelle cette personne intervient.

Il importe de noter que les échelles individuelles ou collectives et l’échelle institutionnelle ne sont pas exclusives les unes des autres. Lorsque la responsabilité identifiée est individuelle en première analyse, un examen ultérieur approfondi peut révéler un caractère systémique du problème et donc mettre à jour également une responsabilité collective voire institutionnelle. À l’inverse, le fait que la responsabilité institutionnelle soit engagée n’exclut pas que la responsabilité d’une ou de plusieurs personnes soit également engagée.

a) Maltraitance individuelleb) Maltraitance collectivec) Maltraitance institutionnelle

3.6 Temporalité, durée

Les situations de maltraitance doivent être appréciées au regard de leur temporalité, quand ces informations sont disponibles. Selon qu’elles se sont manifestées ponctuellement ou durablement, la compréhension de leur mécanisme et l’appréciation des mesures correctives appropriées peuvent être différentes.

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

a) Date(s) des faitsb) Date(s) du ou des signalementsc) Antériorité (à quand remonte la première situation de maltraitance révélée)d) Récurrence (combien de fois ou à quelle fréquence éventuelle les situations se sont-

elles produites si elles ne surviennent pas pour la première fois)

3.7 Actions correctives apportées à la situation

Le but des actions correctives est d’abord de faire cesser les situations de maltraitance. Qu’elles relèvent de pratiques inappropriées involontaires, ou à plus forte raison d’actes volontaires, elles appellent des correctifs immédiats.

Les situations qui constituent des crimes ou des délits relèvent, dès qu’elles sont connues, d’un signalement à l’autorité judiciaire.

Quelle que soit leur nature, ces mesures sont plus efficaces quand elles sont articulées entre elles, soit simultanément (ex : action disciplinaire de sanction concomitante à une information aux autorités administratives et à un signalement à la justice), soit successivement, en fonction de l’évolution de la situation. L’absence de concertation entre les acteurs en charge des différentes réponses est bien l’un des plus grands défis pour ne pas reproduire voire amplifier la maltraitance initiale mais la résoudre durablement. Les mesures évoquées ici doivent être pensées non pas en silo mais dans une cohérence des niveaux et des parties prenantes.

Il importe également que les actions correctives envisagées soient, chaque fois que possible, prises en accord avec la personne victime de la maltraitance, en termes d’actions proprement dites mais également en termes de temporalité. En effet, décider d’actions correctives sans leur consentement pourrait être considéré comme une autre forme de maltraitance (absence de recherche d’un consentement éclairé pour une décision qui concerne la personne et prise de décision à sa place).

Ces mesures doivent aussi être pensées et organisées à court, moyen et long terme, pour participer non seulement de la lutte contre la maltraitance, mais aussi d’une politique de prévention à part entière, et en définitive, d’une promotion de la bientraitance.

Si les différents registres de réponses sont évoqués successivement, cela ne signifie pas que certains sont plus importants que d’autres : la liste proposée vise simplement à ne pas omettre une dimension importante du traitement approprié à chaque situation. Pour les identifier, les démarches de retours d’expérience sont particulièrement utiles.

a) Actions administratives (dont le recours au juge administratif)b) Mesures disciplinairesc) Mesures socialesd) Actions éducativese) Actions thérapeutiques et sanitairesf) Mesures organisationnellesg) Mesures judiciaires (civiles ou pénales)h) Autres actions correctives (préciser)

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Annexe 1.Cadre et contexte

de la démarche de consensus

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1. Les textes internationaux et nationaux de référence

À l’échelle internationale, les fondements de la politique de prévention et de lutte contre la maltraitance reposent sur un corpus de textes de référence dont notamment :

} La définition de la maltraitance établie par le Conseil de l’Europe en 1987 et 19921 ; } La Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE, UNICEF, 1989)2 ; } La définition de la maltraitance issue de la consultation sur la prévention de la maltrai-tance de l’enfance (OMS, 1999)3 ; } Le rapport mondial sur la violence et la santé (OMS, 2002)4 ; } Le rapport sur « La protection des adultes et enfants handicapés contre les abus » du 30 janvier 2002, Hilary Brown (Conseil de l’Europe)5 ; } Le guide sur la prévention de la maltraitance des enfants : intervenir et produire des données (OMS, IPSCAN, 2006)6. } Le Plan d’action international de Madrid sur le vieillissement (PAIMV, 2002) en applica-tion de la résolution 24/20 du Conseil des droits de l’homme7 ; } Le Groupe de travail à composition non limitée sur le vieillissement8 ; } Le rapport européen de prévention de maltraitance envers les personnes âgées (OMS, 2011)9 ; } La résolution A/RES/26/127 de l’ONU (2011) consacrant le 15 juin comme journée mon-diale à lutte contre la maltraitance des personnes âgées ; } Le rapport mondial sur le vieillissement et la santé (OMS, 2016)10 ; } La définition de la maltraitance exercée envers les personnes âgées (OMS, 2020).

1. Ministère des solidarités et de la santé, Conseil de L’Europe : https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/personnes-vulnerables/maltraitance-des-personnes-vulnerables/article/orientations-prioritaires-de-la-politique-nationale 2. Unicef, Convention des droits de l’enfant, 1989 : https://www.unicef.fr/sites/default/files/convention-des-droits-de-lenfant.pdf 3. Organisation Mondiale de la Santé, RAPPORT MONDIAL SUR LA VIOLENCE ET LA SANTÉ, CHAPITRE 3. La maltraitance des enfants et le manque de soins de la part des parents ou des tuteurs, 2002 : https://www.who.int/violence_injury_prevention/violence/world_report/en/chap3fr.pdf 4. Organisation Mondiale de la Santé et INTERNATIONAL SOCIETY FOR PREVENTION OF CHILD ABUSE AND NEGLECT. Guide sur la prévention de la maltraitance des enfants : intervenir et produire des données, 2006 : https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/43686/9789242594362_fre.pdf ?sequence=1 5. Conseil de l’Europe, Protection des adultes et des enfants handicapés contre les abus, 2002 : https://rm.coe.int/16805a297d 6. Organisation mondiale de la Santé. Rapport : consultation sur la prévention de la maltraitance de l’enfant, OMS, Genève, 29-31 mars 1999. OMS, Changements sociaux et santé mentale, Prévention de la violence et des traumatismes, 1999 (document non publié WHO/HSC/PVI/99.1)7. Le PAIMV a été adopté par la deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement en 2002. Le plan encourage les États à prendre des mesures pour faire face au vieillissement de la population afin de construire une société pour tous les âges et à intégrer le vieillissement dans les programmes nationaux et mondiaux de développement. Il contient également des recommandations d’action qui sont axées sur trois domaines prioritaires : (i) les personnes âgées et le développement ; (ii) promotion de la santé et du bien-être des personnes âgées ; et (iii) la création d’environnements porteurs et favorables. Ces domaines prioritaires sont subdivisés par thèmes, objectifs et actions spécifiques.8. Créé par l’Assemblée générale par sa résolution 65/182 le 21 décembre 2010. Le groupe de travail examinera le cadre international existant des droits de l’homme des personnes âgées et identifiera les lacunes éventuelles et la meilleure façon de les combler.9. Organisation Mondiale de la Santé, Rapport européen de prévention de maltraitance envers les personnes âgées, 2011 : https://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0010/144676/e95110.pdf 10. https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/elder-abuse

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Ces différents travaux ont connu une traduction progressive dans le droit français à travers des lois visant le renforcement de la protection des personnes. Outre l’article 40 du Code de procédure pénale qui introduit une obligation de signalement des crimes et délits dès janvier 1958, différentes lois plus récentes ont enrichi et conforté des dispositions relatives aux droits et à la protection des personnes, notamment :

} La loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale ; } La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du sys-tème de santé ; } La loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique ; } La loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie ; } La loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance11 et la loi n° 2016-297 du 14 mars 201612 relative à la protection de l’enfant également ; } La loi n° 2007-308 du 05 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des ma-jeurs ; } La loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillis-sement13.

Par ailleurs, quelques travaux et publications produits ces dernières années, apportent des éclairages complémentaires et des outils opérationnels. À titre d’exemple, nous pouvons retenir les guides pour la gestion des risques de maltraitance en établissement (2008)14 et pour les services d’aide à domicile (2009) ou encore les recommandations élaborées par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) en 200915 et 201216, et reprises dorénavant par la Haute Autorité de Santé comme un socle de référence aux démarches relatives à l’amélioration de la qualité dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS).

11. Loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000823100/ 12. Loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000032205234/ 13. Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000031700731/2020-10-27/ 14. https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/guides/article/gestion-des-risques-de-maltraitance15. Anesm, Haute Autorité de Santé. Mission du responsable de service et rôle de l’encadrement dans la prévention et le traitement de la maltraitance à domicile, 2009 : https://www.psppaca.fr/IMG/pdf/anesm__reco_maltraitance_a_domicile_2009.pdf 16. Anesm, Haute Autorité de Santé. Mission du responsable d’établissement et rôle de l’encadrement dans la préventions et le traitement de la maltraitance, 2012 : https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2018-03/anesm_synthese-maltraitanceetablissement.pdf

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Plus récemment, notons en particulier le rapport issu de la démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant (GIPED17, 2017)18, ou encore la « note d’orientation pour une action globale d’appui à la bientraitance dans l’aide à l’autonomie »19 (Commission pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance, 2019)20.

Les travaux de recherche relatifs à la maltraitance des adultes en situation de vulnérabilité sont toutefois encore peu nombreux, ce qui rend d’autant plus intéressant les relations privilégiées entretenues avec la politique conduite en la matière au Québec et les travaux de sa chaire de recherche sur la maltraitance envers les aînés (la seule au monde sur ce sujet).

2. La politique nationale de prévention et de lutte contre la maltraitance et de promotion de la bientraitance

L’État est le garant de la protection des personnes en situation de vulnérabilité et du respect de leurs droits fondamentaux.

Concernant la protection de l’enfance, la politique nationale s’est construite et renforcée à travers différentes réformes des années 1950 à aujourd’hui. Elle vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation.

Aujourd’hui, cette politique se renforce avec le lancement des travaux sur les 1000 premiers jours de la vie de l’enfant, l’annonce de la Stratégie nationale de Prévention et de Protection de l’Enfance et le plan de lutte contre les violences faites aux enfants qui constitue le troisième pilier du pacte pour l’enfance.

Concernant la prévention et la lutte contre la maltraitance des adultes en situation de vulnérabilité, la politique nationale s’est développée plus récemment, à partir des années 200021.

17. Groupement d’intérêt public d’enfance en danger (regroupant le numéro 119 et l’Observatoire national de la protection de l’enfance).18. Démarche conduite et rapport remis au ministère des solidarités et de la santé par Marie Paule Martin Blachais en collaboration avec la Direction générale de la cohésion sociale. Démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant en protection de l’enfance, 2017 : https://www.cnape.fr/documents/publication-du-rapport-de-la-demarche-de-consensus-sur-les-besoins-de-lenfant 19. https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/personnes-agees/article/note-d-orientation-pour-une-action-globale-d-appui-a-la-bientraitance-dans-l20. La « Commission permanente en charge des questions de bientraitance », prévue par l’article D.121-4 du code de l’action sociale et de la famille, a été installée le 19 mars 2018 sous le nom de « Commission pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance ». 21. https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/personnes-vulnerables/maltraitance-des-personnes-vulnerables/article/orientations-prioritaires-de-la-politique-nationale

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Des avancées en la matière ont été apportées par la loi d’adaptation de la société au vieillissement (2015) qui renforce la garantie des droits fondamentaux et introduit une obligation de signalement pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux de tout événement susceptible de compromettre la santé, la sécurité, le bien-être ou la qualité de la prise en charge des personnes. Cette disposition vise à relever le seuil de vigilance des professionnels du secteur et à identifier les situations ou risques de maltraitance commis envers les personnes vulnérables.

Enfin, différents travaux et réflexions en cours contribuent à renforcer le volet « protection des personnes » dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi Grand Âge et Autonomie. Un plan d’action pluriannuel de prévention et de lutte contre la maltraitance sera prochainement défini, avec différentes mesures opérationnelles en traduction d’une nouvelle étape dans la politique nationale conduite en la matière.

Ces deux politiques de protection des personnes mineures ou majeures, se trouvent à des degrés de maturité différents en ce qui concerne la mise en œuvre de leurs dispositifs et la coordination des acteurs concernés. Si des numéros d’écoute téléphonique existent pour l’enfance en danger (119, créé par la loi du 10 juillet 1989) et pour les adultes victimes de maltraitance (3977, créé en 2008), la protection de l’enfance est par ailleurs dotée d’observatoires départementaux et de cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP) qui n’ont pas d’existence juridique pour les majeurs en situation de vulnérabilité. Quelques-uns existent toutefois, sur les seules initiatives et volontés des acteurs locaux.

3. La commission nationale de lutte contre la maltraitance et de promotion de la bientraitance

La « Commission nationale de la lutte contre la maltraitance et de promotion de la bientraitance », prévue par l’article D.141-4 du code de l’action sociale et des familles (CASF) est une instance conjointe au Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) et au Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), mise en place en mars 2018 par la ministre des solidarités et de la santé et la secrétaire d’État en charge des personnes handicapées. La Commission a d’abord élaboré une note d’orientation22 pour « une action globale d’appui à la bientraitance dans l’aide à l’autonomie », remise aux ministres ainsi qu’aux instances plénières du HCFEA et du CNCPH en janvier 2019.

Structurée en trois parties « comprendre – agir – prévenir », cette note formule 28 propositions pour mieux identifier ces phénomènes encore peu reconnus faute de données précises et aisément comparables. La Commission énonce également dans cette note le premier jalon de son programme de travail 2019-2020, à savoir « la nécessité d’organiser un processus collectif et pluridisciplinaire de réflexion sur ce qu’est la maltraitance, les différentes manières de l’identifier, de la décrire, d’en analyser les composantes et d’en comprendre les interactions23 ».

22. HCFEA – CNCPH Commission pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance, Note d’orientation pour une action globale d’appui à la bientraitance dans l’aide à l’autonomie, 2019 : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/190124_-_rapport_-_lutte_contre_la_maltraitance.pdf, page 27 23. Note d’orientation, op. cit., Axe 1 « Comprendre », E. Une analyse à approfondir et à structurer.

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C’est de ce dernier point que découle la démarche de consensus dont le vocabulaire présenté ici est le fruit. Le vocabulaire proposé à l’issue de cette démarche, a pour singularité d’être transversal à deux niveaux : à tous les publics mineurs comme majeurs en situation de vulnérabilité d’une part; à la sphère privée intrafamiliale du domicile et à celle du collectif en établissement d’autre part. Pour les mineurs comme pour les majeurs en situation de vulnérabilité, les situations de maltraitance demeurent encore :

} Sous-estimées dans leur gravité et leurs conséquences,

} Sous-estimées dans les statistiques sur le sujet, dont la production même n’est pas suffisamment organisée,

} Sous-estimées dans ce qu’elles exigent de moyens de prévention et de traitement, à commencer par une concertation et une coordination organisées des parties pre-nantes sur les territoires et au plan national.

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Annexe 2. La démarche de consensus

pour un vocabulaire partagé de la maltraitance :

finalités et originalités

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La démarche de consensus a pour objectif d’élaborer une définition de la maltraitance qui soit claire, accessible à tous et consensuelle entre toutes les parties prenantes pour mieux la combattre et la prévenir mais aussi promouvoir une culture partagée de bientraitance.

Il s’agit, à partir de références qui font autorité en la matière, notamment au plan international, de mettre en cohérence les textes existants et de produire, en complément des outils et dispositifs déjà en place, un vocabulaire que chacun puisse s’approprier (citoyens, personnes en situation de vulnérabilité, proches, professionnels) pour identifier les risques et les situations de maltraitance et agir pour les faire cesser et, mieux encore, les prévenir.

1. La production d’un vocabulaire partagé sur la maltraitance répond à quatre objectifs principaux

1) Accroître la prise de conscience et la compréhension des citoyens notamment des personnes en situation de vulnérabilité et de leurs proches, des maltraitances qu’ils peuvent subir afin de pouvoir les identifier pour mieux alerter autour d’eux, les faire cesser, voire les prévenir.

Cet objectif vise à contribuer au renforcement du pouvoir d’agir des personnes les plus di-rectement concernées. À ce titre, cette démarche s’est attachée à donner une place réelle à des personnes représentantes des publics concernés. Ces personnes étaient membres du groupe de pilotage et du groupe de cotation et ont animé 2 des 9 ateliers du débat élargi (cf. III. La méthode utilisée). En outre, l’une des visioconférences organisées préa-lablement au débat élargi portait sur le recueil de leurs témoignages. Leur apport a été décisif à toutes les étapes de la démarche pour produire un vocabulaire qui entre en co-hérence avec le savoir expérientiel et le ressenti des personnes concernées.

2) Soutenir la réflexion multidisciplinaire indispensable pour comprendre et traiter une alerte.

Quelle que soit la clarté du vocabulaire proposé, il ne saurait en lui-même résoudre les difficultés d’analyse de toutes les situations de maltraitance qui font l’objet d’une alerte. Comme l’a montré l’expérience des CRIP ou celle des écoutants des numéros d’appel dédiés (119 et 3977), la diversité et la complexité de ces situations, toutes particulières, nécessitent pour être comprises et traitées correctement, des analyses multidisciplinaires. Ces dernières doivent être le fruit d’un dialogue entre les différents acteurs et personnes ressources concernés, qui peuvent ensemble déterminer la ou les meilleures pistes de résolution.

Le présent vocabulaire n’a nullement vocation à remplacer ces concertations opérationnelles mais vise à établir une base de référence commune à partir de laquelle travailler, pour que les analyses pluridisciplinaires se fondent sur une compréhension globale et partagée de chacune des situations dont il est question.

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

3) Légitimer les démarches d’alerte et aider au discernement nécessaire avant un signalement à une autorité administrative ou judiciaire.

Face à une situation de maltraitance, l’alerte ou le signalement aux services et aux autorités de régulation compétentes est indispensable. Pour autant, cette action est loin d’être une évidence pour les personnes qui en sont victimes ou témoins. En effet, les démarches d’alerte et de signalement se heurtent à des freins de différentes natures, tenant à la fois à la mécompréhension de la gravité de la situation, à la peur de représailles, à l’ignorance des voies d’aide et de recours, à la crainte d’être trop intrusif dans la vie d’autrui, etc. Le présent vocabulaire vise à renforcer la vigilance de chacune des parties prenantes et à les éclairer sur les situations qui nécessitent d’agir.

Toutefois, l’alerte n’est pas une fin en soi et ne suffit pas à elle seule, à faire cesser une situation de maltraitance. Selon la gravité et la temporalité des faits, des mesures proportionnées à la situation et suivies dans le temps doivent être mises en œuvre pour interrompre durablement la maltraitance et en prévenir la réitération. Il faut en outre veiller particulièrement à ce que, sauf situation de danger imminent, les actions apportées dans leur nature et leur temporalité, résultent de décisions prises dans l’intérêt supérieur de la personne et avec son consentement éclairé lorsqu’elle peut l’exprimer ou celui de la personne qui l’assiste et l’aide à le formuler. L’écoute de la personne victime de maltraitance est primordiale et son accord pour toute action qui la concerne doit être systématiquement recherché toutes les fois où le recueil de son consentement n’est pas rendu impossible du fait de son âge (enfant) ou de son état de santé.

Les réponses apportées à un signalement de situation de maltraitance peuvent porter sur des mesures d’ordre social, disciplinaire, organisationnel, thérapeutique, administratif, judiciaire. Lorsqu’un signalement a été fait à la justice, cela ne minimise en rien l’importance pour les autres parties prenantes de poursuivre la recherche de solutions : toutes les ressources utiles ont pleinement vocation à être mobilisées.

4) Sensibiliser et former toutes les parties prenantes à la prévention et à la lutte contre la maltraitance.

Il s’agit là d’un enjeu majeur pour permettre une large appropriation de ce vocabulaire commun afin qu’il se traduise de façon opérationnelle dans les pratiques et contribue à renforcer voire initier une vigilance collective.

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2. Les apports spécifiques de cette démarche pour les publics mineurs et majeurs

Pour cette démarche, trois partis-pris ont été retenus.

} Tirer parti des travaux relatifs à la protection des mineurs pour éclairer et enrichir la réflexion sur la protection contre la maltraitance des majeurs en situation de vulnéra-bilité. Autrement dit, il s’agit de bénéficier d’une expertise spécifique existante pour permettre une avancée pour tous ; } S’inspirer de tous les textes existants au plan international pour élaborer un texte de référence en France pour tous les acteurs qui côtoient, accompagnent et protègent les personnes en situation de vulnérabilité, qu’ils soient spécialistes du sujet ou non, afin de mieux identifier et faire cesser les situations de maltraitance, et d’en prévenir la survenue ou la réitération. Autrement dit, il s’agit de proposer le socle d’une pédagogie partagée en France, à partir des avancées internationales ; } Produire un vocabulaire commun qui, sans être immédiatement opposable et boule-verser les systèmes d’information ou les référentiels existants, a vocation à en nourrir les améliorations à court et moyen termes. Autrement dit, il s’agit de dresser un hori-zon commun qui fasse sens pour tous, et de laisser aux parties prenantes le soin d’éta-blir les modalités et le calendrier appropriés pour en respecter l’esprit et en définir les suites opérationnelles adéquates.

Aussi, si le présent vocabulaire apporte une définition et une caractérisation de la maltraitance transversales et communes à tous, il infléchit de manière différente les pratiques des acteurs qui œuvrent dans le champ de la protection de l’enfance et celles des acteurs qui interviennent auprès d’adultes en situation de vulnérabilité.

2.1 Dans le champ de la protection de l’enfance

Ce vocabulaire concerne tous les mineurs y compris ceux en situation de handicap. Il facilite ainsi la compréhension de la spécificité des mineurs en situation de handicap et de leur protection en installant un vocabulaire partagé pour tous les intervenants de l’éducation spécialisée, mais aussi pour ceux qui, à l’école ou dans le cadre d’activités de loisirs ou de sport, les rencontrent et les accompagnent.

Alors que la protection de l’enfance était historiquement centrée en priorité sur l’enfant maltraité au sein de son milieu familial, le présent vocabulaire définit de manière explicite les maltraitances institutionnelles et à ce titre permet de mieux mettre en lumière les situations où négligences et violences revêtent une dimension systémique que ce soit dans les structures sanitaires, sociales ou médico-sociales, le milieu scolaire et parascolaire ou encore les institutions religieuses.

Ainsi, loin d’effacer les avancées conceptuelles significatives qui existent au sein du champ de la protection de l’enfance, le présent vocabulaire vise à les compléter et à les enrichir, notamment pour prévenir de manière beaucoup plus explicite les violences et négligences que subissent les mineurs au sein des institutions indépendamment de la compétence et de la bonne volonté des personnes qui y exercent.

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

2.2 Dans le champ des adultes en situation de vulnérabilité

Ce travail permet une avancée conceptuelle et opérationnelle grâce notamment aux acquis et travaux relatifs au champ de l’enfance en danger. Il éclaire en particulier des notions encore insuffisamment explorées et documentées sur le plan scientifique pour ce public : la notion de développement de la personne tout au long de sa vie ; l’importance de la satisfaction des besoins relationnels et sociaux et de la sécurité relationnelle (en référence aux théories de l’attachement notamment) ; les conséquences largement sous-estimées de la négligence ; ou encore les impacts de l’exposition à un environnement familial ou institutionnel violent.

En introduisant la référence au développement, ce vocabulaire affirme une conviction : le développement ne se limite pas aux mineurs, il se poursuit tout au long de la vie. Même s’il ne s’agit pas d’affirmer que ces processus de développement sont identiques pour les mineurs et les adultes dans leurs modalités, leurs rythmes ou leur ampleur, tous font des expériences significatives qui tout au long de leur vie leur apprennent de nouvelles compétences et de nouveaux savoirs.

Sur ce dernier point, les réflexions et travaux se sont également appuyés sur quelques analyses concordantes :

} Les analyses de Erik Erikson24 selon lesquelles le développement humain s’accomplit durant toute l’existence, chaque étape étant accompagnée de l’acquisition d’une fa-culté qui prévaut sur un risque :

• L’espoir (confiance vs méfiance) • La volonté (autonomie vs honte et doute) • La conviction (initiative vs culpabilité) • La compétence (productivité vs sentiment d’infériorité) • La fidélité (identité vs identité diffuse) • Amour (intimité vs souci exclusif de soi) • Attention (générativité vs stagnation) • Sagesse (intégrité personnelle vs désespoir)

} Les écrits de Urie Bronfenbrenner25, qui a renouvelé les théories du développement hu-main par une approche d’ordre écologique : l’individu est selon lui en interaction avec plusieurs strates de son environnement rapproché (micro-environnement, méso-envi-ronnement et exo-environnement), le tout étant en interaction avec un environnement social plus large (macro-environnement). Pour U. Bronfenbrenner, l’environnement au sens large influence le développement de l’humain, qui est à la fois le produit partiel de l’environnement, et producteur partiel de son environnement (interaction réciproque entre l’humain et l’environnement).

24. Erik Erikson, Adolescence et crise : la quête de l’identité, édition originale 1968, traduction française Flammarion 197225. Urie Bronfenbrenner, The ecology of Human Development, 1970, Cambridge, Harvard University Press

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} La littérature récente de plus en plus significative concernant les savoirs expérientiels26 des personnes atteintes de maladie chroniques, en situation de handicap, ou touchées par des altérations cognitives, atteste de la richesse de la déclinaison de ces travaux.

En conséquence, il a été unanimement adopté l’idée qu’un geste ou une parole qui dénigre ou empêche cette possibilité de développement relève bien de la maltraitance, pour un adulte comme pour un mineur.

Enfin, les effets à long terme des maltraitances subies pendant l’enfance sont connus : un enfant maltraité voit son développement altéré de manière multiple, et a plus de risques de devenir un adulte en situation de vulnérabilité, ou d’être exposé à une réitération des violences et négligences.

En conclusion, disposer d’un vocabulaire commun relatif aux mineurs et aux adultes en situation de vulnérabilité présente l’avantage de cerner avec plus de précision la continuité tout au long de la vie de l’exposition au risque de maltraitance.

26. Voir pour une approche transversale de ces savoirs expérientiels et de leurs apports le site dédié au plaidoyer Associons nos savoirs : www.associons-nos-savoirs.fr

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Annexe 3.La méthodologie utilisée

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Pour parvenir à un vocabulaire partagé de la maltraitance, un processus rigoureux inspiré par la méthode du consensus formalisé de la HAS a été retenu27. Cette méthode vise à produire un accord entre une pluralité d’acteurs en mobilisant toutes les compétences et savoirs utiles pour élaborer un texte (une définition et une caractérisation des situations de maltraitance) de manière collective et concertée. Cette méthode se décline en plusieurs étapes :

1) Un groupe de pilotage : 22 personnes représentatives de toutes les parties prenantes

} Chargé de produire, à partir des textes de référence existants, une première proposi-tion de définition de la maltraitance et de la caractérisation de ses situations, destinée à être soumise à débats (décembre 2019 – janvier 2020). } Chargé d’élaborer, à partir des différents temps de cotation et d’échanges entre les experts et lors du débat élargi, une version intermédiaire soumise au second tour de cotation, puis une version finale, tenant compte de tous les ajustements nécessaires, soumise au dernier tour de cotation.

2) Un groupe de cotation : 41 experts – trois cotations successives

La cotation est l’élément central de la démarche. Elle consiste à ce que chaque expert vote, en ligne et individuellement, selon une échelle d’approbation (1 à 9), pour chaque élément du vocabulaire proposé. Ces votes, complétés le cas échéant de commentaires écrits, sont ensuite analysés afin de distinguer les termes faisant consensus et ceux révélant des désaccords.

Cette phase de cotation s’est déroulée en trois temps, permettant de soumette au vote des experts des ajustements apportés au fur et à mesure de l’évolution des réflexions et échanges :

} La première cotation (mars 2020), a été suivie d’une réunion avec l’ensemble des ex-perts (juin 2020), où chacun d’eux a exposé oralement ses arguments sur les points fai-sant dissensus. Ces échanges ont permis de lever des confusions, de mettre en lumière certains points faisant débat et de proposer collectivement des modifications. } La seconde cotation a été réalisée (juillet 2020), pour un nouveau vote des experts. } La troisième et dernière cotation (décembre 2020) a été organisée après la phase du débat élargi, pour un dernier vote sur la version finale du vocabulaire proposé.

3) L’organisation du débat élargi (130 personnes)

Après le second tour de cotation, ce débat (septembre 2020) avait vocation à approfondir la réflexion collective et à échanger notamment sur les points faisant controverse entre les experts. Ce débat s’est organisé autour de neuf ateliers, animés par les membres du groupe de pilotage, abordant chacun un des thèmes faisant controverse parmi les votes du groupe de cotation28.

27. Haute Autorité de Santé, Recommandations par consensus formalisé, 2010 : https://has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-11/guide_methodologique_cf_40_pages_2011-11-03_15-40-2_278.pdf 28. Les thématiques retenues pour les ateliers étaient : la maltraitance sous couvert de bienveillance (1) ; la transversalité de la définition de la maltraitance aux mineurs et aux majeurs (2) ; peut-on parler de maltraitance des familles et des proches ? (3) ; les suites apportées à une alerte (4) ; l’exposition à un environnement violent (5) ; la maltraitance institutionnelle (6) ; maltraitance et vulnérabilité (7) ; maltraitance et consentement (8) ; tester la définition de la maltraitance (9)

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DÉMARCHE N ATIONALE DE CONSENSUS POUR UN VOCABULAIRE PARTAGÉ DE LA MALTRAITANCE DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ

Afin d’accompagner leur réflexion, les parties prenantes du débat élargi ont été invitées : } À prendre connaissance de cinq analyses d’experts diffusées sous forme de capsules vidéos29 ; } À participer à cinq visio-conférences préalables au débat élargi qui constituaient des ateliers de travail préparatoires.

L’ensemble de ce processus s’est déroulé entre septembre 2019, date à laquelle la Commission en a validé le principe, et janvier 2021, date à laquelle elle a adopté le vocabulaire final ainsi élaboré. La situation de crise sanitaire a conduit à adopter des modalités de travail particulières : les réunions d’échange et les débats ont eu lieu majoritairement à distance par visioconférences.

Les atouts et particularités de cette démarche de consensus

} La recherche, à chacune des étapes, d’un équilibre de représentation entre toutes les parties prenantes des trois champs concernés, enfance – avancée en âge – situation de handicap et la contribution pour chacun de ces champs, des expertises, des expériences à l’élaboration du vocabulaire partagé de la maltraitance (représentants des personnes accompagnées, des acteurs publics de l’action sociale, sanitaire et judiciaire, des fédérations de professionnels des secteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires, des chercheurs, de l’action bénévole, des ordres professionnels, des syndicats représentatifs des salariés, des gestionnaires de structures).

} La présence, au sein du groupe de pilotage, de deux chercheures internationales reconnues pour leur expertise sur le sujet : Madame la Pr. Marie Beaulieu, titulaire de la chaire de recherche sur la maltraitance des aînés à l’université de Sherbrooke (Québec), Madame la Pr. Hilary Brown, experte au Conseil de l’Europe chargée en 2002 des travaux sur la protection des enfants et des adultes en situation de handicap contre les abus. Cette double expertise scientifique était complétée, pour le champ de la protection de l’enfance, par celle de Madame Fabienne Quiriau, déléguée générale de la Coordination nationale des associations de protection de l’enfance (CNAPE), sollicitée en tant que personnalité qualifiée. Ces expertises ont été précieuses pour ancrer la réflexion non seulement dans les réalités et pratiques en France, mais également pour les expériences, analyses et enseignements étrangers qu’elles ont apportés.

29. Ministère des Solidarités et de la Santé, Commission pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance, https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/personnes-vulnerables/maltraitance-des-personnes-vulnerables/article/commission-lutte-contre-maltraitance-et-promotion-bientraitance

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Malgré le caractère contraignant de la démarche, la mobilisation de toutes les parties prenantes a été constante et a permis une réelle progression de la réflexion. Le vocabulaire partagé de la maltraitance est ainsi le fruit d’une mobilisation et construction collectives, de débats ouverts et pluralistes, d’enrichissements réciproques et d’une méthode rigoureuse, de long terme visant à produire un réel consensus et une large adhésion.

Les difficultés rencontrées par les publics les plus vulnérables pendant la crise de la Covid-19 n’ont fait que renforcer la détermination de toutes les parties prenantes à voir la démarche aboutir et trouver sa concrétisation dans un renforcement de la politique publique de prévention et de lutte contre la maltraitance.

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Annexe 4.Avis du Conseil de l’âge

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CONSEIL DE L’ÂGE

Avis du Conseil de l’âge

Bientraitance - mars 2021

La Commission nationale pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance a mené, avec l’appui méthodologique de la Haute Autorité de Santé, une démarche de consensus pour élaborer une définition partagée de la maltraitance qui puisse servir de référence commune pour tous et communs à tous les publics vulnérables, enfants ou adultes.

Le résultat de la démarche de consensus a été présenté au Conseil de l’âge le 9 mars 2021 et y a reçu un avis positif, assorti de commentaires des membres qui seront annexés au dossier d’appui.

***

Commentaires des membres du Conseil de l’âge pour le dossier d’appui :

La prise en compte de la notion de « développement » des personnes y compris hors du champ de l’enfance est pertinente.

La démarche d’un vocabulaire commun à tous les âges et à différent secteurs convient également. Pour autant, le Conseil regrette qu’on utilise le terme de dépendance dans la définition retenue puisqu’il a préconisé l’emploi du terme « personne vulnérable » au lieu de personne dépendante. Si la Commission bientraitance doit conserver par la suite cette référence, alors il faudra préciser qu’il ne s’agit pas d’un état de dépendance mais de situations de « dépendance à une relation d’aide », concept qui peut concerner tous les âges de la vie.

Il importe d’aborder plus clairement la situation des aidants professionnels, auxiliaires de vie, aides-soignants qui sont exposés à des comportements violents des personnes dont ils doivent prendre soin, voire de maltraitances, sans qu’il s’agisse toujours d’une situation de maltraitance institutionnelle.

De même les situations de violence, ou de maltraitance, que vivent des aidants familiaux doivent être abordées.

Des réserves sont exprimées sur le terme de « responsabilité inadaptée » pour des mineurs prenant soin d’une personne vulnérable au sein d’une famille. Il nécessiterait un cadrage supplémentaire (description, âge auquel la responsabilité deviendrait adaptée, etc.) qui rend la définition malaisée. Enfin, une telle notion pourrait faire peser un risque de non-dit dans les familles, de peur des conséquences qu’on pourrait en tirer.

Il convient de prendre mieux en considération les locaux et équipements qui peuvent être des facteurs aggravants de la maltraitance (institutionnelle notamment) ou avoir un effet d’accompagnement de la prise en charge.

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Annexe 5.Contribution à la matière d’appui :

une mise en dialogue

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Tout au long de la démarche de consensus, l’objectif d’associer des savoirs académiques, professionnels et d’expériences a été important. Au cours de l’élaboration de ce vocabulaire, des bribes de récit ont alimenté la réflexion. Puis, un véritable récit d’expérience a surgi, venant interroger très directement la pertinence du vocabulaire proposé, tout en en constituant une appropriation pratique exemplaire. Ce récit est immédiatement apparu comme une matière d’appui indispensable à la compréhension de l’ensemble de la démarche. Nous souhaitons l’introduire ici, comme exemple d’appropriation de la démarche d’ensemble autant que comme invitation à mobiliser et partager nos savoirs issus de nos expériences personnelles autant que nos expertises professionnelles.

L’objectif d’un vocabulaire partagé n’est pas de prévenir ni de résoudre de manière mécanique les tensions inhérentes à la vie sociale et à la prise en considération des vulnérabilités. Il consiste beaucoup plus modestement à offrir un outil de dialogue pour identifier des situations problématiques, et transformer les nœuds relationnels et institutionnels qui les génèrent. Il vise à donner des repères pour interpréter l’expérience sans jamais en restituer toute la complexité. Le récit restitué ici comme matière d’appui témoigne de cet objectif en invitant le lecteur à prendre connaissance dans une situation dont l’interprétation ne peut pas être univoque, et dans laquelle les conflits notamment entre intervenants professionnels et personnes faisant l’objet de cette intervention, sont forts, entraînant de multiples risques de maltraitance.

Cette invitation au dialogue est non seulement inspirée par les grands textes internationaux déjà mentionnés dans le document, mais aussi par des savoirs en situation qui mêlent à la fois des valeurs et des désirs de sortir de sentiments d’impasse. Dans le récit que la démarche de consensus a suscité à Lisbeth Leduc, cette pluralité des savoirs s'enracine dans une revendication de justice qui n’empiète en rien sur l’importance de la sollicitude (du care comme disent les anglophones). Certes, il est difficile de trouver des points d’appui à cette exigence dans le cours de l’action. Mais bien souvent, de tels points d’appui émergent, grâce à une rencontre, grâce à un moment échappant aux tensions situationnelles. Dans le cas de Lisbeth Leduc, ce point d’appui a pris le visage du pédopsychiatre référent de l’hôpital mère-enfant au moment où Lisbeth et sa fille, alors âgée de quelques mois, allait le quitter :

« Lorsque je remplis un dossier de sortie je pense toujours à l’enfant qui à partir de ses 18 ans sera en droit de venir me voir pour me demander de consulter ce dossier dans lequel figurent des données sensibles le concernant et concernant ses parents ».

Ces paroles ont permis que les traces laissées dans le dossier de ce moment de vie si complexe soient choisies en commun accord, qu’une alliance se noue, qu’on pourrait dire thérapeutique à condition d’entendre aussi bien la portée médicale que sociale de ce terme.

Introduire ce récit d’expérience comme matière d’appui prenant de fait une fonction d’exemple permet aussi de souligner les exigences accompagnant la publicisation de savoirs d’usages et expérientiels. Cette occurrence concernant

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une situation de parentalité est emblématique du dilemme à l’œuvre : exposer son histoire, c’est exposer les différentes personnes qui y sont impliquées, et c’est prendre le risque de malmener autrui. Différentes questions s’ensuivent : comment respecter des personnes concernées par un récit, qui ne peuvent pas apporter leur consentement ? Dans notre cas, comment produire une expertise fondée sur le récit réflexif de soi, sur l’auto-étude, pour la mère identifiée « victime », qui n’expose pas excessivement son enfant en bas âge, mais aussi le père identifié « agresseur » qui n’a pas reçu selon ce témoignage de soins adaptés et qui n’a pas pu être sollicité ? Comment ne pas produire soi-même dans l’expression du savoir expérientiel sinon de la maltraitance, de la négligence susceptible d’aboutir à une forme de maltraitance symbolique ? Les règles issues du Règlement Général de Protection des Données (RGPD) n’apportent pas de solution suffisante à ce dilemme. Pour le résoudre, il a été fait le choix éclairé de l’usage d’un nom d’emprunt à un moment où ces considérations démontrent potentiellement la complexité de ce que l’on pourrait caractériser comme une hiérarchisation des vulnérabilités au sein de différentes qualités d’interdépendances à l’œuvre entre humains. En cela, la préoccupation est à proprement parler éthique, dans le sens où elle se soucie non seulement de préserver les personnes au présent, mais aussi dans l’avenir.

Ce choix s’ancre dans une approche qui appréhende la vulnérabilité comme constitutive de toutes les vies humaines. C’est dans cette perspective que cet extrait d’une contribution à la matière d’appui propose de réfléchir sur les vulnérabilités en tant que ce qu’elles ne sont pas réservées à certaines personnes ou catégories de personnes désignées comme étant plus faibles. Elle marque au contraire des interdépendances fortes entre les citoyens quel que soit leur statut (usagers de soins dans le champ du sanitaire, usagers de soins et d’accompagnement dans le champ médico-social, usagers d’accompagnement dans le champ social, professionnels, parent témoin ou enfant victime). Une chose est certaine en tant que pourvoyeur de care, la personne qui contribue ici ayant été souvent sujette à des abus plus ou moins graves a acquis par la qualité d’un professionnel soucieux d’éthique et de déontologie, la conscience que son expertise l’oblige précisément à « s’éteindre » en tant que présence sociale à soi dans l’intérêt supérieur de son enfant et dans la préservation des relations humaines qui sont ici en jeu.

Ce récit est un exemple d’appropriation de la démarche de consensus et il appelle les personnes qui se sentent ou sont concernées par la maltraitance à poursuivre cette appropriation dans les modalités qui leur conviendront. La commission nationale se tient à la disposition des personnes qui le souhaitent pour organiser avec elles des débats de proximité dans le format qui leur conviendra. Pour se manifester à cet effet, il suffit de contacter la présidence de la commission par l’intermédiaire du bureau de la Direction Générale de la Cohésion Sociale en charge de la lutte contre la maltraitance (contact : [email protected]).

Lisbeth Leduc, Benoît Eyraud, Noémie Nauleau

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(…) Enfin, pour ne pas tomber dans le piège du « seulement théorique », certaines réalités doivent pouvoir être dites. Pour ce faire, je me permets dans ce paragraphe de reproduire un échange entre Madame Alice Casagrande et Madame (…) que j’ai pu lire grâce à la retranscription. Notons que cet échange a eu lieu juste après mon intervention le (…) et je trouve ce passage particulièrement intéressant car il me permet tant en tant qu’auto-représentante (…) qu’en tant que victime ou usager de soins et experte d’usage de me placer sans honte c’est-à-dire en tant que semblable dans un mouvement dialectique pleinement citoyen avec l’ensemble des membres du CNCPH en apportant des exemples concrets de violences institutionnelles subies.

Madame (…) débute ainsi : « Je voudrais partager ces questionnements avec vous. Comment on peut mieux prendre en compte des phénomènes qui passent souvent sous les radars, qui sont les discontinuités dans des accompagnements des personnes, les délais trop longs de réévaluation d’un projet, d’une situation, qui ne sont pas à proprement parler des négligences ? Tout le monde doit concourir à la recherche de solutions adaptées, mais aussi évolutives, dynamiques, par rapport aux s ituations des personnes accompagnées. Comment est-ce que l’on peut prendre en charge et en compte ces phénomènes ? Et avez-vous posé cette réflexion dans le cadre de vos travaux ? ».

Alice Casagrande répond : « C’est vraiment notre feuille de route 2021, d’aller s’intéresser sur la base de cette définition, y compris grâce à vous, aux exemples qui marchent le mieux, aux endroits et manières de faire qui empêchent les « trous ». Sur la base de regards sur ces dispositifs qui marchent, de proposer une politique publique, où il y aurait une obligation de concertation sur ces sujets, avec quelques exemples ou propositions, mais qui deviennent une espèce de schéma opposable. On sait très bien qu’en fait, l’absence de coordination, de concertation, fait que chaque acteur peut se ranger derrière le fait que ce n’est pas sa responsabilité, et que ce n’est pas à lui de suivre la situation. Cela va être l’objet de notre travail cette année et les suivantes. »

Pour ce qui est de la question des violences institutionnelles, il semble intéressant en premier lieu de préciser qu’en ce qui me concerne, ces violences subies émanaient le plus souvent de professionnels qui eux-mêmes subissaient une forme de violence. Ainsi, de mon point de vue la violence symbolique devient institutionnelle dès lors qu’elle trouve sa genèse dans son environnement et chacun y participe plus en moins dans sa fonction. La violence/maltraitance symbolique en institution est souvent le symptôme d’une violence/maltraitance institutionnelle où chacun a sa part et où nul ne peut être tenu entièrement responsable. Elle est écosystémique et elle laisse le plus souvent la personne concernée dépourvue de recours et privée de sa capacité d’agir. Je me permets d’illustrer cette maltraitance institutionnelle par des exemples vécus (pour certains déjà évoqués) :

} Accompagnée par le Service d’accompagnement à la parentalité des personnes handicapées (SAPPH) depuis mon quatrième mois de grossesse, une Information Préoccupante a été envoyée à la Cellule de recueil des informations préoccupantes (CRIP) par un pédiatre et un pédopsychiatre sans concertation et hors consensus avec les partenaires en santé (le SAPPH qui était opposé à cette information préoccupante a estimé qu’il ne lui revenait pas de m’en informer et l’Hôpital mère enfant de l’Est parisien – HMEEP, où j’étais hospitalisée en pré-natal puis en post-natal n’en avait même pas été informé). Je n’ai eu confirmation pour ma part de cette information préoccupante en

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maternité (Assistance publique hôpitaux de Paris - APHP) au 5ème jour de vie de l’enfant que trois semaines après la naissance de ma fille, et ce uniquement parce que j’étais membre du Réseau de santé périnatal parisien (RSPP). J’ai pu immédiatement être conseillée et réagir. Il s’agissait à plusieurs égards d’une information préoccupante abusive puisque légalement les parents doivent être informés (l’enfant n’était pas en danger immédiat). Ce qui n’a pas été le cas. J’ai su rapidement prendre des dispositions et obtenir la levée de cette information préoccupante mais pour cela j’ai dû au préalable demander son aval à notre pédopsychiatre de l’HMEEP qui était très bien et qui aussi avait été choqué et furieux. J’ai appris plus tard les raisons de tout cela : un juge, ébranlé par un précédent (le cas d’un bébé secoué par une maman présentant un handicap psychique, enfant pour lequel un pronostic vital avait été engagé) aurait fermement repris la pédiatre responsable de la maternité parce qu’aucune information préoccupante n’avait été émise. Depuis les informations préoccupantes étaient automatisées dans cette maternité dans le cas où la mère est en situation de handicap psychique ou d’autisme. Si ces informations restent à vérifier, elles expliqueraient l’absence de concertation entre la maternité, le SAPPH qui était je le rappelle opposé à cette information préoccupante, et le HMEEP qui n’en avait même pas été informé malgré une réunion commune en amont. Tout ceci sur la base d’informations médicales et affectives que j’avais communiquées au SAPPH. Je me suis sentie trahie car j’avais tout mis en œuvre pour accueillir ma fille dans les meilleures conditions possibles en partenariat avec des professionnels de la petite enfance.

} Aux 18 mois de l’enfant, alors de retour à domicile, j’ai dû consentir à une seconde information préoccupante craignant le père de ma fille pour l’enfant et pour moi-même. Je n’avais d’autre alternative pour protéger mon enfant. Six mois après, l’assistante sociale qui avait instruit cette seconde information préoccupante dont la conclusion avait été en ma faveur m’avait appelée pour m’informer, tout en me demandant d’être discrète qu’un médecin en Protection maternelle et infantile (PMI) souhaitait relancer l’enquête. Face au refus des services sociaux de relancer cette enquête hors cadre légal, cette femme médecin m’avait un jour appelée. J’ai alors décidé de prendre rendez-vous avec la directrice de la crèche de ma fille qui elle s’est montrée soutenante sachant que l'enfant allait très bien. Sa réaction a été immédiate : «C’est quoi ce délire! ?». Elle m’avait alors suggéré de prendre immédiatement rendez-vous avec la femme médecin de sa crèche rattachée à une autre PMI pour mettre les deux professionnelles dos à dos. Comme je l’ai dit à la femme médecin qui avait initié la démarche : «comment osez-vous m’appeler hors cadre légal de l’information préoccupante, sans nécessité ni motif pour l’enfant pour me dire que ma fille est votre priorité! ? Je suis sa mère, j’ai autorité et droit parental sur mon enfant». L’information préoccupante interdit formellement ce type d’abus de pouvoir. Le médecin au-delà de rouvrir un dossier hors cadre légal sans motif ni nécessité (l’enfant est en crèche et se développe parfaitement) n’est pas en droit d’appeler plus encore sans se présenter car il n’est pas l’interlocuteur de la famille concernée et parce qu’il en va d’informations soumises au respect des données30. Qu’en aurait-il été si ma fille présentait un Trouble du spectre autistique (TSA) ? La chronicité

30. Le règlement général de protection des données (RGPD) doit en théorie être appliqué aux données de santé. De plus, l’accès au dossier médical partagé (DMP) qui est prévu pour être intégré à l’espace numérique de santé (ENS) et qui permet la continuité et la coordination des soins du patient doit être réservé aux professionnels de santé avec l’autorisation expresse du titulaire du dossier. Dans le cas spécifique des Informations préoccupantes, nous ignorons à ce stade ce qu'il en est en pratique.

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de ces évènements en un temps si court de vie de l’enfant peut laisser craindre que ce phénomène soit rentré dans les mœurs. Il s’agit clairement de discrimination et d’abus de pouvoir sur personne fragilisée. Ma priorité était et reste ma fille, elle va très bien mais aujourd’hui je n’écarte pas de saisir Le défenseur des droits pour qu’une enquête soit diligentée et pour m’assurer que l’information préoccupante ne court plus.

} La violence institutionnelle, c’est aussi la CAF de Paris qui exige un remboursement de mon AAH qui m’était pourtant due pendant des mois parce que je n’avais pas déclaré mon changement de situation familiale ou qui coupe mes allocations (ceci était arrivé précédemment). Dans la première occurrence, j’avais bien notifié qu’une demande d’Ordonnance de protection était en cours et qu’il m’avait été conseillé d’éviter que le père sache où nous étions. Tant que le père pouvait avoir accès au dossier (il conservait le numéro d’allocataire), il était risqué de faire cette démarche. Mon but était pourtant de protéger ma fille (c’est un devoir parental) de façon durable. L’AAH étant un minimum social lorsque l’on prive une mère de cette allocation, on ne peut en ignorer les conséquences. J’avais dû revenir au domicile conjugal avec enfant pour cette raison et c’est d'ailleurs pour cette raison que l'enquête suite à la seconde Information préoccupante avait été relancée (la proximité avec le père). Paradoxalement et malgré le contexte administratif, tout ceci semble induire l'idée d'une présomption d'incompétence chez la mère.

} Lorsque j'avais fui le domicile la première fois en 2018 estimant ma fille en danger, je suis partie sans un sou, je n’avais pas une couche, pas de lait. J’ai pris l’enfant, je suis partie. J’ai été dépannée d’un billet de train par une ancienne membre du SAPPH aujourd’hui à la retraite et j’ai d’ailleurs ce jour-là croisé, ironie du sort, Sophie Cluzel en compagnie de sa fille à la gare. Cette dame du SAPPH qui était extraordinaire, m’avait alors demandé d’être discrète car ceci était interdit. J’avais quelques semaines plus tard quitté le SAPPH pour avoir été humiliée en présence de ma fille ce jour-là tandis que j’étais allée demander un minimum pour subvenir au besoin de l’enfant le temps de me rendre en Haute-Savoie chez mes parents pour nous mettre à l’abri. J’ai ainsi renoncé à cet accompagnement auquel j’avais droit et dont nous avions besoin. Pour ce faire, il m’avait été conseillé d’écrire un courrier en recommandé avec AR afin de demander à rencontrer la nouvelle responsable du SAPPH pour m’assurer de ne pas inquiéter et dans la crainte d’une troisième information préoccupante. Dans ce courrier, je justifiais des raisons pour lesquelles je souhaitais quitter ce service.

} La psychiatre qui fournit un mois de médicaments de substitution aux opiacées (sans accompagnement psy ni psycho-trauma) au père de ma fille, ancien de l’ASE et qui refuse de s’impliquer dans l’exercice de sa parentalité n’a-t-elle sa part de responsabilité ? N’est-ce pas là un cas avéré de violence institutionnelle qu’un parcours de soin inadapté ? Ne suis-je pas à mon tour maltraitante lorsque je me trouve contrainte de porter plainte à l’encontre du père de ma propre fille dont je sais qu’il n’est pas correctement soigné et ce, afin de la protéger de façon durable tant de lui que de la menace d’un placement ?

} La violence institutionnelle, c’est aussi être écartée du dispositif Handipass hors consentement après s’être confiée à sa conseillère sur le fait d’évoluer dans un contexte de violences conjugales. J’ai un jour appris que je ne serais plus suivie par Handipass par courrier. Jamais n’avait été évoquée l’idée d’une telle décision mais il avait été estimé par ma conseillère que mes difficultés d’insertion professionnelle n’étaient pas dues à mon

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handicap. À terme, en raison de mon trouble de l’attention et ayant omis de déclarer quelques euros de chiffre d’affaires, les allocations chômage ont été interrompues sans ménagement et une dette de plus de 600 euros à Pôle-Emploi engendrée. J’avais bien indiqué que j’avais besoin d’un étayage car je dois mettre des alarmes pour toutes les choses du quotidien et il peut m’arriver de faire des erreurs (depuis une alerte a été instaurée sur le site de Pôle-Emploi, signe que beaucoup d’allocataires ont dû faire la même erreur, de plus un conseiller m’avait dit que je ne devais déclarer que le travail salarié). Je fais encore une fois un recours. Si je n’avais pas été écartée de Handipass, ceci ne serait pas arrivé. Ma Reconnaissance de la qualité de personne handicapée (RQTH) ayant été renouvelée il est inadmissible d'avoir été ainsi sanctionnée précisément en raison d'une déclassification abusive. Et d’ailleurs, pourquoi sanctionner de la sorte une femme qui subit des violences et lutte pour sa fille et pour elle-même ?

} Quatre mois et plus d’un an pour certains mois, sans attestations employeurs de l’HAS à fournir à Pôle Emploi dans ce contexte en tant qu’experte d’usage et expérientielle, c’est aussi une violence institutionnelle pour le moins surprenante de la part d’une telle autorité dont on est pourtant en droit d’attendre qu’elle soit exemplaire. Sans attestation employeur, les droits aux allocations ne peuvent pas être ouverts. Qui est préparé à un tel parcours ? Quelle mère peut faire face à de telles incohérences souvent pour des raisons protocolaires ou administratives en multipliant les recours ? Comment comprendre que les professionnels qui viennent en aide doivent se mettre en danger et prendre des risques vis à vis de leur hiérarchie ? Comment concevoir l’absence d’approche transdisciplinaire à l’endroit des questions de parentalité en situation médicosociale complexe ? Enfin, ne sommes-nous en droit de nous inquiéter pour une personne seule et dans l’incapacité de s’exprimer ? Je cite à nouveau les questionnements de Madame (…) : « Comment on peut mieux prendre en compte des phénomènes qui passent souvent sous les radars, qui sont les discontinuités dans des accompagnements des personnes, les délais trop longs de réévaluation d’un projet, d’une situation, qui ne sont pas à proprement parler des négligences ? Tout le monde doit concourir à la recherche de solutions adaptées, mais aussi évolutives, dynamiques, par rapport aux situations des personnes accompagnées. Comment est-ce que l’on peut prendre en charge et en compte ces phénomènes ? Et avez-vous posé cette réflexion dans le cadre de vos travaux ? »

Ces exemples simples ainsi que l’aveu de ces professionnels ont beaucoup de valeur à mes yeux car ils constituent certainement pour partie ce que nomme Madame (…) « les phénomènes qui passent sous les radars ». Si aujourd’hui, nous faisons l’impasse sur ces phénomènes, cela devient de l’omerta. Personnellement, c’est une responsabilité à laquelle en tant que représentante de (…) je ne peux que me soustraire.

Je suggère que nous autres auto-représentants lancions une enquête sur ces questions dans le respect du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Je pense notamment à une jeune femme en établissement qui m’avait fait parvenir son journal de bord en période de confinement qui regorgeait d’exemples de maltraitances symboliques et institutionnelles graves au regard du contexte sanitaire. Si d’autres personnes sont partantes au sein du CNCPH, je pense qu’il serait opportun de compléter et rééquilibrer ce questionnaire par une enquête auprès de professionnels.

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Conclusion

La définition soumise à la cotation avec laquelle il s’agira pour reprendre les termes employés par Madame Casagrande « d’aller s’intéresser, y compris grâce à [nous], si vous en avez, aux exemples qui marchent le mieux, de justement d’endroits et de manières de faire qui empêchent les trous » doit selon moi être améliorée. Parce que ce n’est pas connaître la/les maltraitance.s que de penser qu’elle.s ne vise.nt que les personnes vulnérabilisées, la dimension processuelle, protéiforme et dans certains cas structurelle des maltraitances doit être énoncée dans une phrase très courte qui consiste à ne plus isoler les victimes ni invisibiliser les victimes autrices « professionnelles » (ce que j'ai ajouté figure en bleu et j'ai mis entre crochets le «en situation de vulnérabilité» car il rentre en contradiction avec cet argumentaire et il doit selon moi impérativement être enlevé) : « Il y a maltraitance d’une personne [en situation de vulnérabilité] quand un geste, une parole, une action ou un défaut d’action, compromet ou porte atteinte à son développement, à ses droits , à ses besoins fondamentaux, et/ou à sa santé et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance, de dépendance, de soin ou d’accompagnement. Les situations de maltraitance peuvent être ponctuelles ou durables, intentionnelles ou non ; leur origine peut être individuelle, collective ou institutionnelle. La maltraitance peut être le fait d’un sujet lui-même maltraité, d’où l’importance d’une approche écosystémique de ces questions. Les violences et les négligences revêtent souvent des formes multiples et associées au sein de ces situations. »

Lisbeth Leduc

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Annexe 6.Participants à la démarche

de consensus

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Ont participé au groupe de pilotage de la démarche nationale de consensus, autour de l’équipe projet constituée par Alice Casagrande, Dominique Terrasson, Coline Boullard et Talitha Tschöke :

❱ Anne Lebec, chargée de mission auprès du Défenseur des droits

❱ Anne Marie Perrin, membre du CA de l’AD-PA

❱ Benoît Eyraud, chercheur à l’Université Lyon II

❱ Bruno Lachesnaie, adhérent de la FNAROPA

❱ Dieynaba N’Doye, DGCS, chargée de mission au bureau protection de l’enfance

❱ Nicolas Paugnat, responsable inspection et contrôle des établissements et services au Département des Deux-Sèvres

❱ Véronique Ghadi, directrice qualité de l’accompagnement social et médio-sociale à la HAS

❱ Émilie Carmoin, responsable du département gestion des signaux à l’ARS Île-de-France

❱ Fabienne Quiriau, directrice générale de la CNAPE

❱ Gabrielle Chouin, Conseillère principale d’éducation (CPE) et formatrice droits de l’enfant

❱ Fabrice Gzil, responsable du pôle réseaux et observatoire à l’Espace éthique d’Île-de-France

❱ Isabelle Tangre, médecin rattaché à la structure régionale d’appui à la qualité en Île-de-France

❱ Noémie Nauleau, membre de l’association Handidactique et élue au CNCPH

❱ Marie Beaulieu, chercheuse à l’Université de Sherbrooke, Québec

❱ Laurine Becker, avocate, cabinet de Navacelle

❱ Linda Aouar, avocate APH France Handicap

❱ Marc Lifchitz, vice-procureur de la République au Tribunal de Grande Instance de Pontoise

❱ Marina Besseau, cheffe du service Protection des mineurs en danger et des majeurs vulnérables au Département de la Sarthe

❱ Pierre Czernichow, Président de la Fédération 3977 et membre du HCFEA

❱ Hilary Brown, ancienne expert auprès du Conseil de l’Europe, Grande-Bretag

Ont participé aux trois étapes de cotation :

❱ Mina Blanchard, membre d’AMA-DIEM ❱ Olivier Bonaventur, directeur de Mutualité française 29-56

❱ Julie Boudier, vice-présidente chargée des fonctions de juge des enfants, TGI Rennes

❱ Aude Caria, directrice du Psychom ❱ Anne Caron-Déglise, magistrat à la Cour de Cassation et membre de la CNCDH

❱ Armelle Debru, agrégée de lettres classiques et enseignante à l’Espace éthique d’Île-de-France

❱ Anne Devreese, DGA Enfance et famille au département du Nord

❱ Mamedi Diarra, président de l’ADEPAPE 94

❱ Agnès Douvreleur, magistrat délégué à la politique associative et à l’accès au droit à la Cour d’appel de Paris

❱ Anne Dusart, conseillère technique au CREAI Bourgogne Franche Comté

❱ Corinne Faivre, chargée de la maison départementale de l’autonomie au Département des Vosges

❱ Sylvie Fritsch, infirmière chargée de l’inspection à l’ARS BFC

❱ Isabelle Garat, DGA solidarité humaine au département des Pyrénées atlantiques

❱ Robert Moulias, membre du Conseil Scientifique de la Fédération 3977

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❱ David Pioli, coordonnateur du pôle « droits des familles, parentalité et protection de l’enfance » de l’UNAF

❱ Loïc Ricour, chef du pôle droit des malades et dépendance au Défenseur des droits,

❱ Emmanuelle Chevalier, médecin référent à l’ARS PDL

❱ Chantal Gatignol, conseillère santé à la MIVILUDES

❱ Alain Gavillet, CDCA et CTS du Val d’Oise ❱ Isabelle Gillet, responsable de la plateforme d’écoute 3977

❱ Philippe Guillaumot, président du centre ALMA 64

❱ Rodolphe Costantino, avocat de l’association Enfance et partage

❱ Alain Koskas, président de la FIAPA ❱ Isabelle L’honen, coordinatrice du pôle ressource petite enfance et handicap Drôme

❱ Danièle Langloys, présidente France Autisme et du CNCPH

❱ Amélie Lassalle, psychomotricienne résidence sociale de Levallois

❱ Magalie Le Cunff, chargée à la Fondation santé service (HAD)

❱ Karine Lefeuvre, VP du CCNE et professeure à l’EHESP

❱ Céline Martin, membre de la FEDESAP et du HCFEA

❱ Marie Paul Martin Blachais, directrice du GIPED

❱ Federico Palermiti ❱ Florent Schnitzler ❱ Noémie Terrien, responsable Qualité santé (SRA)

❱ Isma Zalambani, conseillère socio-éducative à la direction des personnes âgées et personnes handicapées du département de la Seine-Saint-Denis

❱ Anne Bellanger, chargée de mission au bureau des usagers de l’offre de soin, DGOS

❱ Anne Marie Berthault, présidente du centre ALMA 22

❱ Alicia Jovin, chargée de mission, Pair accompagnement et Empowerment à la Croix Rouge

❱ Violaine Blain, directrice générale du GIP Enfance en danger

❱ Laurène Dervieu puis Céline Filippi, conseillère technique autonomie à l’UNIOPSS

Ont participé partiellement à la cotation : ❱ Samuel Hosotte / Philippe Payn, chef de division à la DGSP (Ministère de l’Intérieur)

❱ Frédérique Botella / Julie Ravenne, adjointe et chargée de mission à la sous-direction des missions de protection judiciaire et d’éducation (DPJJ)

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Ont participé au débat élargi du 23 Septembre 2021, aux côtés du groupe de pilotage et des experts en charge de la cotation :

ATELIER 1 La maltraitance sous couvert de bienveillance animé par Linda AOUAR et Anne LE BEC

❱ Fabienne QUIRIAU ❱ Bérangère DEJEAN ❱ Magali LEDUC SEGUIN ❱ Marie-Helene AUDIER ❱ Roselyne COPPENS ❱ Samantha DODARD ❱ Blandine PREVOST ❱ Karine LEFEUVRE

❱ Anne DUSART ❱ Philippe GUILLAUMOT ❱ Noémie TERRIEN ❱ Mina BLANCHARD ❱ Danièle LANGLOYS ❱ Isabelle GARAT ❱ Talitha Waleska TSCHÖKE

ATELIER 2 La transversalité de la définition aux mineurs et aux majeurs vulnérables animé par Marina BESSEAU et Dominique TERRASSON

❱ Véronique HAMMERER ❱ Alain DELGUTTE ❱ Sylvie LATTANZI ❱ Françoise FROMAGEAU ❱ Bertrand MAZABRAUD ❱ Marie Paule MARTIN-BLACHAIS ❱ Aude CARIA ❱ David PIOLI

❱ Olivier CHOMONO ❱ Aude BOURDEN ❱ Isabelle L’HONEN ❱ Jean BACOU ❱ Lionel DENIAU ❱ Florence BOURGES ❱ Imène TORKHANI

ATELIER 3 Peut-on parler de maltraitance des familles et des proches ? animé par Isabelle TANGRE et Véronique GHADI

❱ Isma Zalambani OSMANE ❱ Emmanuelle CHEVALLIER ❱ Maud WEISSLEIB ❱ Annie VIDAL ❱ Geneviève LAURENT ❱ Madame Catherine ROUXEL

❱ Dr. MEYVAERT ❱ Cyrielle CLAVERIE ❱ Madame MARTEL ❱ Michael CANOVAS ❱ Julie MICHEAU

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ATELIER4 Les suites apportées à une alerte animé par Nicolas PAUGNAT et Marc LIFCHITZ

❱ Pierre CZERNICHOW ❱ Olivier BONAVENTUR ❱ Anne DEVREESE ❱ Anne Caron-DEGLISE ❱ Eve GARDIEN ❱ Sandrine SCHWOB

❱ Jérôme PERRIN ❱ Virginie HUGUENOTTE ❱ Maya Vair-PIOVA ❱ Blandine BOULAY ❱ Alain GAVILLET ❱ Laura CANITROT

ATELIER 5 L’exposition à un environnement violent animé par Dieynaba N’DOYE et Alice CASAGRANDE

❱ Mamédi DIARRA ❱ Anne-Marie BERTHAULT ❱ Sylvie FRITSCH ❱ Pierrelune BETRANCOURT

❱ Hugo BERTILLOT ❱ Brigitte FOCH ❱ Marie GERARD ❱ Oriane DELIVRE

ATELIER 6 La maltraitance institutionnelle animé par Nicolas BRUN et Emilie CARMOIN

❱ Corinne FAIVRE ❱ Loïc RICOUR ❱ Monsieur GIRAUD ❱ Rozenn GUÉGUEN ❱ Sandrine COURTOIS

❱ Dr Claude RABATEL ❱ Sylvie BOUCARD ❱ Eric MARIE ❱ Maître Stéphane de NAVACELLE ❱ Marie LAMBERT-MUYARD

ATELIER 7 Maltraitance et vulnerabilité animé par Coline BOULLARD et Benoît EYRAUD

❱ Robert MOULIAS ❱ Federico PALERMITI ❱ Armelle DEBRU ❱ Chantal GATIGNOL ❱ Magali ASSOR

❱ Pierre-Olivier LEFEBVRE ❱ Christine SOVRANO ❱ Loïc ANDRIEN ❱ Valérie FRÉCHOU-ROMÉRO ❱ Rodolphe COSTANTINO

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ATELIER 8 Maltraitance et consentement animé par Noémie NAULEAU et Fabrice GZIL

❱ Anne BELANGER ❱ Marie PELAT ❱ Dr Marie-Pierre GLAVIANO-CECCALDI ❱ Maître Stéphane DAVID ❱ Jérôme BERTIN ❱ Grégory CAUMES

❱ Marie-Jeanne RICHARD ❱ Dr. MEYVAERT ❱ Bernard MEILE ❱ Philippe GUILLAUMOT ❱ Fabienne QUIRIAU

ATELIER 9 Tester la définition de la maltraitance animé par Gabrielle CHOUIN et Laurine BECKER

❱ Isabelle GILLET ❱ Magali LE CUNFF ❱ Amélie LASALLE ❱ Florent SCHNITZLER

❱ Agnes BROUSSE ❱ Monique CARLOTTI ❱ Stéphanie MILLOT ❱ SYLVIE DELCROIX

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