DIRECTION DE LA PREVISION ET DES ETUDES ECONOMIQUES · l’élargissement de l’union douanière...
Transcript of DIRECTION DE LA PREVISION ET DES ETUDES ECONOMIQUES · l’élargissement de l’union douanière...
1
Un Peuple - Un But – Une Foi
MINISTERE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES
DIRECTION DE LA PREVISION ET DES
ETUDES ECONOMIQUES
Document d’Etude N°23
INCIDENCES ECONOMIQUES ET BUDGETAIRES DE L’APE
POUR LE SENEGAL
Une Analyse en Equilibre Général Calculable Dynamique
DPEE/DEPE @ Décembre 2012
2
INCIDENCES ECONOMIQUES ET BUDGETAIRES DE L’APE POUR LE SENEGAL :
Une Analyse en Equilibre Général Calculable Dynamique
Alsim FALL Kalidou THIAW1
Décembre 2012
Résumé
Cette étude se propose d’évaluer les implications économiques et budgétaires du volet commercial de l’Accord
de Partenariat Economique (APE) sur le Sénégal. L’analyse est réalisée à l’aide d’un modèle d’équilibre général
calculable (MEGC) dynamique et repose sur la dernière offre d’accès au marché de l’Afrique de l’Ouest
formulée par la CEDEAO à l’endroit de l’UE en novembre 2011. Les résultats des simulations indiquent que
l’APE devrait globalement conduire à une contraction de l’activité économique, ainsi qu’à une baisse de la
demande des facteurs de production (travail et capital) et du revenu des ménages. Sur le plan sectoriel, l’étude
trouve que la branche du raffinage de pétrole, les BTP, les services et le secteur primaire seraient les plus
exposés à un repli de leur activité. Le bien-être global devrait aussi se détériorer en raison de pertes fiscales
relativement importantes.
JEL Classification: Libre-échange, Commerce, Accords de Partenariat Economique, MEGC Mots clés: F10, F13, C68
Abstract
This study is aimed at assessing the economic and fiscal implications of the trade component of the Economic
Partnership Agreement (EPA), on Senegal. The analysis is performed by means of a dynamic Computable
General Equilibrium Model (CGEM) and relies on the last market access offer made by the ECOWAS to the EU
in november 2011. The simulation results show that the EPA should globally lead to a decrease in economic
activity, as well as a fall in demand for production factors (labor and capital) and households’ income. From a
sectoral standpoint, the study finds that the oil refining and construction and public works industries, services
and the primary sector would be most exposed to a decline in their activity. Global welfare should also
deteriorate due to relatively large public revenue losses.
JEL Classification: Free-trade, Trade, economic partnership, CGE models Key words: F10, F13, C68
1 Avec les contributions de Ngalgou KANE (Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie) et
d’Ousmane SAMBE (Cellule de Suivi de l’Intégration)
3
I. INTRODUCTION
Les relations commerciales entre les pays Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP) et l’Union
Européenne (UE), ont abouti, en juin 2000, à l’adoption de l’Accord de Cotonou. Cet Accord
établit le principe d’une transition du système de préférences non-réciproques vers les
Accords de Partenariat Economique (APE). L’échéance du 1er
janvier 2008 initialement
retenue pour la signature dudit Accord n’a pu être respectée en raison des désaccords qui
persistent dans les négociations. Depuis lors, la mise en application de l’APE, entre les parties
ouest-africaine et européenne, a été maintes fois reportée. Cependant, les négociations
actuelles pourraient porter sur un démantèlement tarifaire progressif de 70% des importations
en provenance de l’UE, sur une période de 25 ans, à compter de 20132.
Dans la présente étude, les conséquences de la signature de l’APE sur l’économie sénégalaise
sont évaluées sur la base de l’offre ouest africaine3, à l’aide d’un modèle d’équilibre général
calculable dynamique (MEGC) récursif. Le modèle tient compte de l’appartenance du
Sénégal à une union douanière qu’il partage avec les autres pays de l’Union Economique et
Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). En outre, la signature de l’APE est assujettie à
l’élargissement de l’union douanière aux autres pays membres la CEDEAO. Dès lors,
l’analyse des impacts commerciaux de l’APE doit tenir compte de l’appartenance du Sénégal
à cette zone d’intégration régionale.
Par ailleurs, la Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE) a réalisé en 2008
une étude portant sur l’évaluation des effets économiques et commerciaux de l’APE au
Sénégal (voir Fall et Thiaw, 2008). Cependant, la méthodologie retenue était fondée sur un
modèle d’équilibre partiel qui présentait plusieurs limites. En effet, en dehors de certains
aspects commerciaux et budgétaires, le modèle ne permettait pas de procéder à une analyse
détaillée des implications de l’APE sur le tissu économique, notamment les industries, les
facteurs de production, les prix, l’emploi, la consommation, l’investissement, etc. De plus, la
CEDEAO n’avait pas encore finalisé la liste des produits concernés par la libéralisation, ni le
schéma de démantèlement tarifaire.
2 En ce qui concerne les faits historiques, institutionnels et juridiques, se reférer à Fall et Thiaw (2008).
3 Il faut préciser qu’il s’agit de la dernière offre présentée par l’Afrique de l’Ouest bien qu’elle n’ait pas encore
été entérinée dans le cadre des négociations avec l’Union européenne. Cette offre consiste en une ouverture du
marché ouest africain à hauteur de 70% sur une période de 25 ans. Cependant, l’UE continue de demander une
ouverture à 80% sur une période de 15 ans.
4
Il faut préciser que le MEGC possède un certain nombre d’avantages par rapport aux modèles
d’équilibre partiel. L’analyse en équilibre général offre un cadre analytique plus détaillé
permettant notamment de rendre compte des changements de prix relatifs et des volumes
affectant la structure économique, aux niveaux sectoriel et institutionnel. Il s’ensuit une
recomposition de l’offre et de la demande de biens et services ainsi que des facteurs de
production. Dès lors, étant donné que le MEGC met l’accent sur la réallocation des ressources
entre les agents économiques, il constitue un instrument approprié à l’identification des agents
institutionnels (ménages, entreprises, Etat et Reste du monde) qui bénéficient ou qui perdent
des changements exogènes ou des politiques économiques.
La section suivante revient sur la littérature économique relative aux travaux sur les effets du
libre échange en mettant l’accent sur les études concernant les Accords de Partenariat
Economique entre l’UE et les pays ACP. La troisième section présente les faits stylisés lié au
commerce extérieur sénégalais vis-à-vis de l’UE. La quatrième section porte sur la
présentation du modèle d’équilibre général dynamique ainsi que les principales hypothèses
qui la sous-tendent. Les résultats découlant de cette méthodologie sont présentés et analysés
dans la cinquième section, et enfin, la sixième section est réservée à la conclusion.
5
II. REVUE DE LITTERATURE
La littérature théorique sur le commerce international et le libre-échange trouve son origine
dans la théorie orthodoxe du commerce qui s’appuie sur les travaux de Smith (1776) et surtout
de Ricardo (1817), auteur de la loi de l’avantage comparatif. Selon celle-ci, l’échange
commercial donne lieu à des gains nets de bien-être, pourvu que les pays concernés se
spécialisent dans la production de biens pour lesquels ils présentent la productivité la plus
forte (compte tenu de leurs dotations initiales en ressources) et échangent ces biens contre des
produits pour lesquels leur productivité est moindre. Cette théorie classique du commerce
international a ensuite été approfondie par des auteurs tels qu’Ohlin (1933) ou Samuelson
(1948).
Cependant, c’est au cours des années 50 et 60 que le débat autour des effets du libre-échange
a véritablement évolué, avec la première vague d’accords préférentiels que Bhagwati (1991) a
appelé le « Premier Régionalisme ». Ainsi, dès 1950, Viner mettait en évidence les effets
mitigés du libre-échange sur le bien-être, à travers les concepts de création et de détournement
de commerce. Avec le « Second Régionalisme » apparu au début des années 80, la croissance
du commerce international s’est accompagnée d’une plus grande ouverture commerciale des
économies et de la signature d’une multitude d’accords préférentiels régionaux, sous la forme
d’accords de libre-échange, d’unions douanières, de marchés communs ou de marchés
uniques4.
Si cette tendance s’est accentuée dans les années 90, notamment avec la création en 1995 de
l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), en remplacement de l’Accord Général sur le
Commerce et les Tarifs Douaniers (GATT), il n’en demeure pas moins que le débat sur les
effets du libre-échange est resté vivace. En effet, la décennie 90 a vu émerger une vague de
travaux vantant les mérites de l’ouverture et de la libéralisation commerciales (Dollar, 1992 ;
Sachs et Warner ,1995 ; Edwards, 1998 ; Krueger, 1998 ; Frankel et Romer, 1999) mais dont
les conclusions ont été largement contestées, aussi bien du point de vue théorique que
méthodologique, notamment concernant la croissance et la réduction de la pauvreté dans les
pays en développement (Rodriguez et Rodik, 2000 ; Stiglitz, 2006 ; Taylor et Von Arnim,
2006).
4 Selon Freund et Ornelas (2010), aujourd’hui, un membre moyen de l’OMC dispose d’accords commerciaux avec de plus de
15 pays.
6
Militant en faveur d’une plus grande ouverture au commerce à l’échelle internationale,
Krueger (1998) soutient ainsi que la plupart des pays en développement, à prédominance
agricole et exportateurs de matières premières, ont adopté des stratégies d’industrialisation par
substitution aux importations dans les années 70 et 80, or celles-ci conduisent
irrémédiablement à un ralentissement de leur activité économique, au fil du temps, en raison
de l’inefficacité du transfert des ressources vers les secteurs protégés. Dans ce contexte, toutes
choses égales par ailleurs, seules des politiques favorisant le secteur échangeable et la
libéralisation commerciale sont susceptibles d’y remédier.
Selon Romer (1994), le principal effet des restrictions commerciales dans une économie est
de réduire l’offre de biens intermédiaires et la négligence de cet effet conduit à une sous-
estimation multidimensionnelle de l’intensité avec laquelle la protection commerciale pénalise
la production. Rutherford et Tarr (2002) ont, par exemple, montré que le passage d’un tarif
douanier uniforme du taux de 20% à celui de 10% a pour effet d’augmenter le taux de
croissance de long-terme, le faisant passer de 2% à 2,6%, dans la première décennie suivant la
libéralisation et à 2,2% dans les cinq premières décennies. Cependant, il est généralement
admis que le calendrier, la séquence et le contexte sont essentiels dans la détermination de
l’impact de la libéralisation commerciale.
Par ailleurs, d’après les tenants de la nouvelle théorie du commerce international (Helpman et
Krugman 1986 ; Krugman, 1991), bien que le commerce puisse potentiellement entraîner un
certain nombre de « gains statiques », quoique non garantis et limités, il peut également
induire, des « gains dynamiques » liés à des externalités positives. Celles-ci peuvent provenir
des transferts de technologie, de l’investissement et des économies d’échelle, en particulier
lorsque le marché domestique est restreint. Cependant, ces effets dynamiques dépendent
lourdement de la structure économique du pays en question et du niveau de diversification de
sa production.
Les critiques de l’élan théorique des années 90 et du plaidoyer des institutions internationales
(FMI, Banque Mondiale, OMC, etc.) en faveur de la libéralisation commerciale, notamment
dans les pays en développement, ont surtout insisté sur le fait que la volonté d’ériger la
libéralisation commerciale comme un facteur essentiel au développement économique était en
porte-à-faux avec les faits empiriques. Rodrik (2001), Chang (2002,2005) et Reinert (2007)
mettent en avant des facteurs comme la qualité des politiques économiques, la capacité à
construire des institutions solides, la promotion des opportunités d’investissement.
7
Depuis la signature de l’Accord de Cotonou en juin 2000, de nombreuses publications ont été
réalisées sur les conséquences de l’institution de la réciprocité des préférences entre les pays
de l’UE et les pays ACP. D’un point de vue méthodologique, ces études se sont généralement
fondées sur des modèles d’équilibre partiel (Milner et al., 2005) et des modèles d’équilibre
général calculables (Pérez, 2006 ; Karingi et Perez, 2007). Elles ont globalement abouti à des
résultats mitigés quant aux objectifs proclamés des APE prévus entre l’UE et les pays ACP.
En effet, si les résultats obtenus mettent généralement en évidence un impact positif du
démantèlement tarifaire sur le bien-être des ménages, ils témoignent aussi, souvent, de
probables pertes importantes de recettes fiscales, en raison de la prééminence des effets de
détournement de commerce sur la création commerciale.
Karingi et al. (2005) procèdent à l’évaluation du volet commercial de l’APE entre les pays de
la COMESA5 et l’UE sur la base de trois scénarios, à savoir : la réciprocité des tarifs
préférentiels entre l’Afrique subsaharienne et l’UE, l’approfondissement de l’intégration
régionale sans réciprocité et le choix d’une zone de libre-échange. Dans un premier temps, ces
auteurs montrent à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable que le scénario d’une
réciprocité des préférences serait clairement défavorable aux pays de l’Afrique subsaharienne
car entraînant un impact négatif sur la croissance, les termes de l’échange, la balance
commerciale et le bien-être, contrairement aux deux autres scénarios. Ils utilisent ensuite un
modèle d’équilibre partiel qui les conduit à conclure que la suppression, par les pays de la
COMESA, des droits de douane sur les importations en provenance de l’UE n’irait pas dans le
sens du renforcement de l’intégration régionale. En effet, les pays de la COMESA seraient les
principales victimes des effets de détournement de commerce.
De nombreuses études se sont également intéressées à l’incidence de la signature de l’APE
sur les économies de l’Afrique de l’Ouest (Busse et al., 2004; Adjovi et al., 2006 ; Patel,
2007). Les résultats ont souvent abouti à la conclusion selon laquelle la signature de l’APE ne
présente pas d’intérêt particulier pour ces pays et qu’elle devrait plutôt se traduire par
d’importantes pertes de recettes fiscales.
Dans le cas spécifique du Sénégal, Berisha-Kraniqi et al. (2008) utilisent le modèle
d’équilibre général calculable « MIRAGE » et montrent que l’APE se traduirait par
d’importantes pertes de recettes douanières, principalement en raison de l’importance des
effets de détournement de commerce. Ces auteurs évaluaient les pertes de recettes douanières
5 Marché Commun de l’Afrique Orientale et Australe.
8
à 46% pour le Sénégal, contre 31% pour le Nigéria et 31% pour les autres pays de la
CEDEAO. Les simulations réalisées par Ndir et Diop (2007) à l’aide du modèle MIRAGE ont
aussi conduit à un impact négatif de l’APE sur l’économie sénégalaise. Leurs résultats
indiquent une dégradation de la balance commerciale s’accompagnant d’importantes pertes de
recettes fiscales et d’importants risques de désindustrialisation, en particulier pour les
industries agroalimentaire et légère.
Calipel et al. (2007) développent le modèle MOSSAÏA et se prononcent, quant à eux, en
faveur d’un engagement du Sénégal dans le processus de l’APE, en raison des effets positifs
qu’ils mettent en évidence sur le revenu des ménages et la redistribution. Cependant, ils
soulignent que cet engagement devrait être subordonné à la compensation des effets négatifs
relevés sur l’épargne publique et la croissance et identifient les trois leviers que sont : la
poursuite de la transition fiscale; l’apport d’un financement extérieur suffisant, orienté en
partie, et dès le début de la mise en application de l’accord vers une amélioration de la qualité;
et l’adoption d’un rythme de démantèlement tarifaire progressif.
9
III. FAITS STYLISES
Le Sénégal est un pays importateur net de biens et services, avec un déficit structurel de la
balance commerciale qui s’est établi à 21,8% en moyenne sur la période 2002-2011. Ce
déficit a atteint son niveau record (plus de 27% du PIB) sur la période 2007-2008, au plus fort
de la crise financière internationale durant laquelle les prix des matières premières ont connu
une hausse vertigineuse. Cette hausse s’est notamment traduite par le renchérissement des
importations en valeur qui ont atteint 43% du PIB en 2008 avant de revenir à leur niveau
structurel d’environ 36%, à la faveur de la détente observée sur les marchés internationaux en
2009.
GRAPHIQUE III.1 : Importations, Exportations et Solde Commercial (en %du PIB)
Source : DPEE, Calculs des Auteurs
Quant aux exportations, elles affichent une évolution en forme de V où l’année 2007
représente son plus bas niveau (12% du PIB). La crise des Industries Chimiques du Sénégal
(ICS) ainsi que la rupture des accords de pêche ont contribué à la dynamique de baisse des
exportations observée jusqu’en 2007. Cependant, l’amélioration de la situation des ICS,
combinée au démarrage de la production d’or, a entraîné une légère reprise des exportations à
partir de 2008.
-30%
-20%
-10%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Importations Exportations Solde commercial
10
III.1 Généralités sur le Commerce Extérieur avec L’UE
Dans la perspective de l’évaluation des effets de l’APE avec l’Union Européenne – objet
principal de la présente étude – il est important de situer la place de cette région dans la
structure du commerce extérieur sénégalais. Dès lors, le graphique III.2 donne un aperçu de la
répartition des importations sénégalaises selon leur provenance. Ainsi, sur la période 2007-
2011, l’UE a, à elle seule, compté en moyenne pour 41,4% des importations contre 5,7%,
9,3% et 43,6% pour l’UEMOA, la zone CEDEAO (hors UEMOA) et le RDM,
respectivement.
GRAPHIQUE III.2 : Structure des Importations en Valeur Selon l’Origine (2007-2011)
Source : ANSD
Par rapport au PIB, les importations en provenance de l’UE ont, en moyenne, représenté
15,6% depuis 2007, mais cette part a tendance à diminuer, comme le montre le graphique
III.3. Néanmoins, le niveau des importations vis-à-vis de l’UE demeure très au dessus des
exportations, donnant lieu à un déficit élevé.
En effet, le solde commercial vis-à-vis de l’Union Européenne reste largement déficitaire à
l’image du solde global (graphique III.4). Son évolution est également marquée par
l’émergence de la crise financière internationale et la hausse des prix des matières premières.
Ainsi, le déficit commercial s’est fortement creusé, à partir de 2006, atteignant environ 840
milliards de FCFA en 2008 et 825 milliards de FCFA en 2011, contre 496 milliards en 2005.
En ce qui concerne les exportations vers l’UE, elles sont restées relativement stables depuis le
début des années 2000, malgré une légère tendance à la baisse due essentiellement à la
raréfaction des ressources halieutiques et à la suspension des accords de pêche avec l’UE.
UE 41,4%
RDM 43,6%
11
GRAPHIQUE III.3 : Importations en Provenance de l’UE Rapportées au PIB
Source : ANSD, Calculs des Auteurs
GRAPHIQUE III.4 : Importations, Exportations et Solde Commercial vis-à-vis de l’Union Européenne
Source : ANSD, Calculs des Auteurs
En définitive, les relations commerciales du Sénégal avec l’UE restent très déséquilibrées, le
déficit commercial ayant presque doublé en moins d’une décennie. Dès lors, l’UE constituant
le premier fournisseur du Sénégal, la mise en place de l’APE renforcerait sa prépondérance
dans les échanges extérieurs sénégalais, limitant ainsi les stratégies de diversification des
partenaires commerciaux. Cependant, il convient d’aller au-delà de ce constat et de procéder à
une analyse a priori des effets budgétaires et sectoriels de la libéralisation des importations
issues de l’UE.
0%
5%
10%
15%
20%
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Importations UE (% PIB)
-1 000
-800
-600
-400
-200
0
200
400
600
800
1 000
1 200
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Importations UE Exportations UE Solde Commercial vs. UE
mill
iard
s d
e F
CF
A
12
III.2 Contribution fiscale des importations en provenance de l’UE
Les importations en provenance de l’UE constituent la première source de recettes douanières.
En moyenne sur la période 2007-2011, les droits de douane issus de l’UE ont représenté
45,6% du total des droits de douane. En d’autres termes, ce chiffre représente le manque à
gagner potentiel direct qui résulterait de la libéralisation complète et immédiate des produits
originaires de l’UE. Cependant, étant donné l’ordre de sensibilité des produits ainsi que le
schéma progressif de libéralisation préétablis lors des négociations avec la partie européenne,
le manque à gagner devrait être sensiblement amorti.
Il est important de noter que la contribution aux droits de douane des importations en
provenance des pays de l’UEMOA et des autres pays de la CEDEAO est presque nulle, ce qui
indique que le processus de démantèlement tarifaire, essentiel à l’intégration régionale, est en
voie de finalisation.
GRAPHIQUE III.5 : Droits de douane selon l’origine (2007-2011)
Source : DGD, Calculs des Auteurs
UE 45,6%
UEMOA 0,4%
CEDEAO Hors UEMOA
0,2%
RDM 53,8%
13
GRAPHIQUE III.6 : TVA selon l’origine (2007-2011)
Source : DGD, Calculs des Auteurs
Bien que n’étant pas directement concernée par l’APE, la TVA sur les importations devrait
certainement être affectée par la libéralisation commerciale dès lors que son assiette est
constituée de la valeur des importations comprenant les droits de douane. La TVA collectée
sur les importations d’origine européenne a en moyenne représenté 43,7% du montant de la
TVA issue des importations, entre 2007 et 2011.
III.3 Elaboration de la Liste des Produits Sensibles
La détermination de la liste des produits sensibles du Sénégal a été effectuée par les services
du Ministère du Commerce. Une première étape a consisté en l’élaboration de listes
préliminaires concernant les produits agricoles et agroalimentaires et les produits industriels.
Ces listes brutes ont ensuite été soumises à la vérification et à l’appréciation du secteur privé
afin de d’identifier les produits devant être considérés comme des intrants, et donc à exclure
de la liste nationale des produits sensibles. Pour ce faire, les produits importés ont été
désagrégés au niveau SH106.
A la suite de cette première étape, la liste nationale des produits sensibles du Sénégal a été
établie sur la base des recommandations de la CEDEAO en la matière. En effet, en 2007, la
CEDEAO a réalisé un guide méthodologique à l’attention des Etats membres, précisant les
étapes, les critères de sensibilité et les indicateurs proposés pour l’établissement de deux listes
6 La nomenclature « SH 10 » renvoie au système de désignation, de codification et de classement tarifaire à 10 chiffres
appliqué aux marchandises faisant l’objet d’échanges internationaux. Elle est plus détaillée que la nomenclature « SH 6 » qui sert de norme internationale.
UE 43,7%
RDM 41,2%
14
de produits sensibles concernant, d’une part, les produits agricoles et agroalimentaires et
d’autre part, les produits industriels. D’un point de vue pratique, la détermination des listes-
pays devait ainsi reposer sur un système de notation des produits définis selon la
nomenclature SH10. Ainsi, le degré de sensibilité de chaque produit ou ligne tarifaire SH10
devait être apprécié par le biais d’une note globale résultant de pondérations affectées à un
certain nombre de critères (résultant eux-mêmes d’une moyenne pondérée d’indicateurs)
retenus dans le cadre de la méthodologie.
Tableau III.1 : Catégorisation des produits importés de l’UE selon les critères de sensibilité retenus
Critères Affectation à une catégorie
Taux de pression fiscale supérieur à 35%
D : le produit est considéré stratégique ;
C : si le produit n’est pas considéré comme stratégique
Produit figurant dans la liste préliminaire du Comité National des Négociations Commerciales Internationales
D
Taux de pression fiscale inférieur à 27% et ratio importations UE/ importations totales supérieur à 50%
A ; sauf si : o le produit est considéré comme
stratégique (D)
Taux de pression fiscal inférieur à 27% et ratio importations UE/importations totales Inférieur à 50%
A ; sauf si : o le produit est considéré comme
stratégique (D) o les importations de l’UE sont nulles : (F)
Importations en provenance de l’UE nulles
D : si le produit est classé sensible par le Sénégal ;
C : si la pression fiscale est supérieure à 27% et si le produit n’est pas classé sensible ;
F : si la pression fiscale est inférieure à 27%.
Source : Ministère du Commerce
A l’issue de cette première étape, des classements des produits agricoles et agroalimentaires,
puis des produits industriels ont été obtenus. Par la suite, jugeant que certains aspects de la
sensibilité des produits à la libéralisation n’avaient pas été suffisamment pris en compte, le
Comité National des Négociations Commerciales Internationales (CNNCI) a retenu trois
critères supplémentaires afin de consolider les listes agricole et industrielle et de répartir les
produits selon les catégories définies par la CEDEAO. Ces trois critères sont :
15
Le niveau des taxes appliquées à un produit
Le CNNCI a considéré que l’ensemble des taxes appliquées à un produit d’importation
donnait une indication claire du fait qu’il devait être rangé parmi les intrants ou les
produits de consommation finale. Ainsi, un faible niveau de taxation traduit une volonté
de faciliter l’utilisation d’un produit à bas coût (cas des intrants), tandis qu’un niveau de
taxes élevé rend compte d’un souhait de faire contribuer le produit, de façon importante,
aux dépenses sociales (cas des biens de consommation) ;
L’inscription du produit sur la liste préliminaire des produits sensibles
communiquée à la Commission de l’UEMOA dans le cadre des travaux sur les
mesures de sauvegarde, sachant que ces produits sont systématiquement inclus dans
la liste des produits sensibles ;
La part des importations européennes dans l’ensemble des importations du produit.
Les importations en provenance de l’UE sont jugées d’autant plus importantes que le ratio
des importations issues de cette zone sur les importations totales est supérieur à 50%, pour
ce produit. Ainsi, un produit retenu comme intrant a d’autant plus de raisons de bénéficier
du démantèlement tarifaire qu’il est fortement importé de l’UE. Le raisonnement sous-
jacent est que les coûts de production s’en trouveraient réduits pour les industries de
transformation et que, non seulement, l’effet sur les producteurs sénégalais serait nul (du
fait de l’absence d’intrants substituables produits au Sénégal), mais il serait positif pour
les consommateurs (absence de produits de consommation finale substituables).
La liste nationale des produits sensibles du Sénégal a ainsi été consolidée sur la base de la
notation des produits des listes agricole et industrielle. Pour ce faire, le CNNCI a considéré
que les produits agricoles et industriels ayant respectivement obtenu des notes supérieures à
27,9 et à 20, selon la méthode de la CEDEAO, sont des produits stratégiques. Le tableau ci-
dessous résume la méthodologie de répartition des différents produits selon la catégorie de
sensibilité, en tenant compte des critères précédemment listés.
16
Tableau III.2 : Calendrier de Démantèlement Tarifaire en Taux de Taxes Applicables pour l’Offre d’Accès au Marché de l’Afrique de L’Ouest
Catégories A B C
Taux Taux Taux
Années 0% 5% 10% 20% 5% 10% 20% 5% 10% 20%
2013-2016 0 5 10 20 5 10 20 5 10 20
2016-2017 0 0 0 0 5 10 20 5 10 20
2018-2022 0 0 0 0 5 10 10 5 10 20
2023-2027 0 0 0 0 0 5 5 5 10 20
2028-2032 0 0 0 0 0 0 0 0 5 10
2033-2037 0 0 0 0 0 0 0 0 0 5
01.01.2038 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0
Source : Commission de la CEDEAO
A l’instar des autres pays de la CEDEAO, le Sénégal a ensuite transmis sa liste nationale à la
Commission de la CEDEAO, chargée de procéder à la consolidation des listes-pays en vue de
l’élaboration de la liste régionale des produits sensibles devant servir de base de référence
dans le cadre des négociations avec la partie européenne. Sur la base de la liste régionale ainsi
arrêtée, les pays de l’Afrique de l’Ouest ont formulé une offre d’accès à l’UE, consistant en la
libéralisation de 70% du marché de la région en volume et en lignes tarifaires, sur une période
de 25 ans7. Selon le dernier calendrier du démantèlement tarifaire disponible, la mise en
œuvre de l’APE devrait démarrer le 1er janvier 20138.
III.4 Analyse de la Sensibilité des Produits Importés de l’UE
En vertu de ce qui est évoqué dans la sous-section précédente, les produits en provenance de
l’UE sont classifiés sur la base de quatre catégories selon leur degré de sensibilité. Ainsi, un
produit importé est d’autant plus sensible qu’il est susceptible de porter préjudice à la
production locale, et peut entraîner des pertes conséquentes de recettes fiscales. Selon le degré
de sensibilité, soit la libéralisation du produit est retardée, soit le produit concerné est exclu de
la libéralisation.
7 La feuille de route des négociations avec l’UE prévoit aussi de traiter des questions telles que la priorité à donner au développement, la coopération sur les questions liées au commerce, l’approfondissement du processus d’intégration en Afrique de l’Ouest et l’amélioration de la compétitivité.
8 Voir tableau III.2
17
Comme le montre le graphique III.7, les produits les moins sensibles, regroupés au sein de la
catégorie A, ont représenté 32,2% des importations originaires de l’UE, sur la période 2007-
2011. Ces produits devraient être intégralement libéralisés à l’horizon 2017, si le calendrier
actuel est maintenu. Les produits des catégories B et C sont d’un degré de sensibilité
supérieur. Leurs parts respectives dans les importations se sont établies en moyenne à 17,7%
et 21,3%¨.
GRAPHIQUE III.7 : Structure des Importations en valeur, en provenance de l’UE, selon la catégorie de produits (2007-2011)
Source : DGD, CEDEAO, Calculs des Auteurs
GRAPHIQUE III.8: Structure des Droits de Douane sur les produits de l’UE, selon la catégorie de
produits (2007-2011)
Source : DGD, CEDEAO, Calculs des Auteurs
Catégorie A 32,2%
Catégorie B 17,7%
Catégorie C 21,3%
Catégorie D 28,9%
A 25,5%
B 9,0%
C 19,6%
D
45,9%
18
Considérés comme les plus sensibles dans le cadre des négociations, les produits de la
catégorie D sont totalement exclus de la libéralisation. Ces produits ont en moyenne
représenté 28,9% des importations provenant de l’UE.
Ainsi, l’objectif du schéma de libéralisation est d’amortir les effets de l’APE sur les
économies de la CEDEAO, en leur permettant de disposer d’un délai suffisant pour procéder
aux ajustements nécessaires. A cet effet, 71% des importations du Sénégal en provenance de
l’UE devraient être progressivement libéralisés sur une période de 25 ans, à compter de
l’année 2013, tandis que les 29% restants sont exclus de l’APE. En outre, 46% des droits de
douane sur les importations d’origine européenne devraient être épargnés par l’APE si l’on se
réfère à l’évolution du commerce extérieur lors des 5 dernières années. Cependant, ce chiffre
occulte les effets induits qui découleraient de l’APE. A titre d’illustration, une baisse des prix
à l’importation consécutive à l’APE pourrait augmenter le volume des importations au point
de relever le niveau des recettes douanières. De ce point de vue, le MEGC sera sans doute
plus approprié pour évaluer, de manière exhaustive, les effets de l’APE sur les agrégats
économiques.
Le graphique III.9 présente la composition des différentes catégories de libéralisation de
produits importés de l’UE, selon les branches du système de la comptabilité nationale.
L’examen de ce graphique permet de constater très clairement que les premiers produits
concernés par le démantèlement tarifaire sont essentiellement les produits de la branche
« Raffinage de pétrole » et ceux de la branche « Machines, Equipement et Matériel de
Transport ». En effet, ceux-ci représentent respectivement 71% et 19% des produits de la
catégorie A. Concernant les produits de la catégorie B, ils sont composés, à hauteur de 82%,
de produits de la branche « Machines, Equipement et Matériel de Transport », tandis que les
branches « Produits chimiques », « Métallurgie et Fonderie » et « Verre et Poterie »
représentent chacune 5% de ladite catégorie. Quant à la catégorie C, qui regroupe les produits
devant être libéralisés en dernier lieu, le graphique III.9 montre qu’elle est constituée pour
près de 2/3 par les produits des branches « Agriculture Vivrière » (29%), « Produits
Chimiques » (19%) et « Machines, Equipement et Matériel de Transport » (16%). S’y
ajoutent essentiellement les produits des branches « Métallurgie et Fonderie » et « Produits
Alimentaires non classés ailleurs » dont les contributions à la catégorie C sont respectivement
évaluées à 9% et 6%.
19
GRAPHIQUE III.9 : Distribution en branches des Catégories de produits importés de l’UE
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
Ag
ric.
viv.
Ag
ric.
ind
.E
lev.
& C
has
seS
ylv
& F
ore
st.
Pêc
he
Ext
ract
ives
Via
nd
e &
po
isso
nH
uile
ries
Gra
ins
Cér
éale
sS
ucr
eA
limen
ts (
nca
)B
ois
son
sT
abac
Co
ton
& T
exti
leC
uir
Bo
isP
apet
erie
Raf
fin
age
Pét
role
Ch
imiq
ues
Cao
utc
ho
uc
Ver
re &
po
teri
eM
étal
lurg
ieM
ach
, Eq
uip
. & M
at.T
ran
s.D
iver
sE
ner
gie
BT
PS
ervi
ces
0% 0% 0% 0% 0% 2%
0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 2%
71%
5% 0% 0% 0%
19%
0% 0% 0% 0%
Catégorie A
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
Ag
ric.
viv.
Ag
ric.
ind
.E
lev.
& C
has
seS
ylv
& F
ore
st.
Pêc
he
Ext
ract
ives
Via
nd
e &
po
isso
nH
uile
ries
Gra
ins
Cér
éale
sS
ucr
eA
limen
ts (
nca
)B
ois
son
sT
abac
Co
ton
& T
exti
leC
uir
Bo
isP
apet
erie
Raf
fin
age
Pét
role
Ch
imiq
ues
Cao
utc
ho
uc
Ver
re &
po
teri
eM
étal
lurg
ieM
ach
, Eq
uip
. & M
at.T
ran
s.D
iver
sE
ner
gie
BT
PS
ervi
ces
0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 5%
2% 5% 5%
82%
1% 0% 0% 0%
Catégorie B
20
GRAPHIQUE III.9 (suite) : Distribution en branches des Catégories de produits importés de l’UE
0%
5%
10%
15%
20%
25%
30%
Ag
ric.
viv.
Ag
ric.
ind
.E
lev.
& C
has
seS
ylv
& F
ore
st.
Pêc
he
Ext
ract
ives
Via
nd
e &
po
isso
nH
uile
ries
Gra
ins
Cér
éale
sS
ucr
eA
limen
ts (
nca
)B
ois
son
sT
abac
Co
ton
& T
exti
leC
uir
Bo
isP
apet
erie
Raf
fin
age
Pét
role
Ch
imiq
ues
Cao
utc
ho
uc
Ver
re &
po
teri
eM
étal
lurg
ieM
ach
, Eq
uip
. & M
at.T
ran
s.D
iver
sE
ner
gie
BT
PS
ervi
ces
29%
3%
0% 1% 0% 0% 0% 1%
3%
0% 0%
6%
2% 0%
1% 0% 1%
3%
0%
16%
3% 3%
9%
19%
1% 0% 0% 0%
Catégorie C
0%
5%
10%
15%
20%
25%
Ag
ric.
viv.
Ag
ric.
ind
.E
lev.
& C
has
seS
ylv
& F
ore
st.
Pêc
he
Ext
ract
ives
Via
nd
e &
po
isso
nH
uile
ries
Gra
ins
Cér
éale
sS
ucr
eA
limen
ts (
nca
)B
ois
son
sT
abac
Co
ton
& T
exti
leC
uir
Bo
isP
apet
erie
Raf
fin
age
Pét
role
Ch
imiq
ues
Cao
utc
ho
uc
Ver
re &
po
teri
eM
étal
lurg
ieM
ach
, Eq
uip
. & M
at.T
ran
s.D
iver
sE
ner
gie
BT
PS
ervi
ces
6%
0% 0% 0% 0% 0% 1%
2%
0% 1%
5%
21%
2%
0%
4%
1% 2%
5%
0%
23%
6%
3%
7%
11%
1% 0% 0% 0%
Catégorie D
21
GRAPHIQUE III.10 : Structure des branches en catégories de produits importés
Source : ANSD, CEDEAO, DGD, Calculs des Auteurs
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Ag
ric.
viv.
Ag
ric.
ind
.
Ele
v. &
Ch
asse
Syl
v &
Fo
rest
.
Pêc
he
Ext
ract
ives
Via
nd
e &
po
isso
n
Hu
ileri
es
Gra
ins
Cér
éale
s
Su
cre
Alim
ents
(n
ca)
Bo
isso
ns
Tab
ac
Co
ton
& T
exti
le
Cu
ir
Bo
is
Pap
eter
ie
Raf
fin
age
Pét
role
Ch
imiq
ues
Cao
utc
ho
uc
Ver
re &
po
teri
e
Mét
allu
rgie
Mac
h, E
qu
ip. &
Mat
.Tra
ns.
Div
ers
En
erg
ie
BT
P
Ser
vice
s
Catégorie A Catégorie B Catégorie C Catégorie D
22
Par ailleurs, le graphique III.10, qui décrit la structure des branches selon les catégories de
libéralisation qui les concerne, fait apparaître que les importations en provenance de l’UE
dans les branches « Raffinage de pétrole » et « Industries Extractives » sont celles qui feront
l’objet de la libéralisation la plus rapide. En effet, dans ces deux branches, le démantèlement
tarifaire atteindra respectivement 99,7% et 90,4% quatre ans après la mise en œuvre de l’APE.
En outre, près de 60% des droits de douane sur les importations de la branche « Elevage et
Chasse » seraient supprimés d’ici 2017.
De manière générale, l’analyse des cas de figure les plus remarquables permet de constater
que cinq branches connaitraient une suppression totale des droits de douane sur les
importations en provenance de l’UE, à savoir l’« Agriculture Industrielle », la branche
« Sylviculture et Foresterie », la « Pêche », les « Industries Extractives » et le « Raffinage de
pétrole ». Il convient aussi de relever que les branches « Cuir » et « Sucre » seraient
libéralisées à hauteur de 98% et 95%, respectivement. A contrario, les branches « Céréales »
et « Tabac » seraient totalement exclues du processus de démantèlement tarifaire sur les
produits importés de l’UE.
Un autre angle d’analyse permettant d’obtenir une meilleure appréciation a priori des enjeux
liés à l’APE réside dans la structure présentée dans le graphique III.11. En effet, ce graphique
décrit la composition des différentes catégories de libéralisation selon le type de produits,
c’est-à-dire selon que le produit importé de l’UE est destiné à la consommation finale, à la
consommation intermédiaire ou à l’investissement. De ce point de vue, le graphique montre
que la libéralisation des importations en provenance de l’UE concerne principalement les
biens de consommation intermédiaire qui constituent environ 67% des produits de la catégorie
A, et respectivement, 44% et 51% de ceux des catégories B et C. Les biens d’investissement
sont essentiellement présents dans les produits de la catégorie B à laquelle ils contribuent à
hauteur de 48%. Concernant les biens de consommation finale, ils sont pour l’essentiel rangés
dans les importations des catégories A et C dont ils constituent respectivement 22% et 38% du
total.
23
GRAPHIQUE III.11 : Structure des Importations en provenance de l’UE selon la catégorie et le type de produits
Note : « CONS » désigne les biens de consommation, « INV » les biens d’investissement sur la base de la Formation Brute de Capital Fixe (FBCF) et « CI » renvoie aux biens de consommation
intermédiaire.
Catégorie A
0%
20%
40%
60%
80%
CONS
INV
CI
22,3%
10,8%
66,9%
Catégorie B
0%
10%
20%
30%
40%
50%
CONS
INV
CI
7,8%
48,1%
44,2%
Catégorie C
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
CONS
INV
CI
37,6%
11,4%
51,0%
Catégorie D
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
CONS
INV
CI
41,7%
6,7%
51,6%
1
En conclusion, les données présentées dans cette section donnent de façon prosaïque les
premiers éléments d’analyse des principaux effets attendus de l’APE. Du point de vue d’un
pays ACP comme le Sénégal, la perception des agents économiques, y compris le
Gouvernement, quant aux perspectives de l’APE n’est pas des plus optimistes. En effet, la
principale crainte est que cette libéralisation soit une entrave à l’essor des industries locales et
occasionne, dans le même temps, des pertes importantes de recettes fiscales pour l’Etat. Ainsi,
il ressort de cette analyse descriptive que si de tels effets négatifs devaient avoir lieu, ils
seraient atténués par trois facteurs essentiels. En premier lieu, le délai de libéralisation semble
relativement étendu pour permettre un certain nombre d’ajustements. Ensuite, les mesures de
protection des produits sensibles permettent d’exclure de façon définitive près de 29% des
importations et 46% des droits de douane liés au commerce avec l’UE. Enfin, le processus de
libéralisation privilégie les biens de consommation intermédiaire et les biens
d’investissement, ce qui pourrait avoir un impact sur la réduction des coûts de production des
entreprises locales.
L’élaboration du MEGC dans ce qui suit, permettra sans doute d’avoir une appréciation plus
précise des effets de l’APE, sur la base d’hypothèses réalistes et pertinentes.
2
IV. METHODOLOGIE
Afin de mettre en évidence les effets de l’APE sur l’économie sénégalaise, la méthodologie
mise en œuvre dans le cadre de cette étude repose sur un modèle d’équilibre général
calculable (MEGC) dynamique. Ce type de modèle est particulièrement adapté à l’analyse de
l’impact, à moyen et long terme, des politiques commerciales dans la mesure où il permet de
rendre compte des ajustements macroéconomiques et interindustriels et des effets
d’accumulation, en s’appuyant sur la structure globale de l’économie et les comportements
microéconomiques des agents.
Le MEGC est composé de plusieurs blocs d’équations dont les plus remarquables sont en
rapport avec le Ménage Représentatif, la Production, la Demande Finale, le Gouvernement, le
Reste du Monde (RDM).
Les industries sont représentées par les branches qui sont classifiées suivant la structure
NOPEMAS utilisée par le Système de la Comptabilité Nationale. Chaque industrie j
(j=1,.., J) produit un seul bien noté i (i=1,.., I), d’où la correspondance entre les indices i et j.
Dans le cadre de ce modèle, les industries (et donc les biens produits) sont au nombre 289. Il
va sans dire que les produits importés et exportés sont libellés suivant la même nomenclature.
IV.1. Le Ménage Représentatif
Le ménage représentatif dispose d’un revenu formé par le salaire et le rendement du capital
versés par les industries. Il dispose également de fonds sous forme de transferts nets reçus du
Gouvernement et du RDM. Après avoir payé l’impôt sur le revenu, le ménage procède à trois
types d’arbitrages en cascade, représentés par des fonctions CES (constant elasticity of
substitution) et qui déterminent l’utilité qu’il tire de son revenu et de son loisir. Le premier
niveau d’arbitrage s’effectue entre les dépenses (consommation et investissement) et le loisir.
Un deuxième niveau d’arbitrage a lieu entre la consommation et l’investissement qui
constituent les dépenses du ménage. Enfin, le troisième niveau d’arbitrage s’opère entre les
différents biens de consommation.
9 En réalité, le système productif est composé de 42 branches, mais certaines branches ont été agrégées dans le
souci de conformer les données à la modélisation retenue.
3
Graphique IV.1 : Comportement du ménage représentatif
Ressources Disponibles
(salaire, revenu du capital, transferts nets reçus, temps disponible)
CES
Dépenses Loisir
CES
Investissement Consommation
CES
c1 c2 … ck……cn
Note : Les « ci » désignent la quantité en bien i consommée par le ménage.
Par ailleurs, l’offre de travail agrégée du ménage est endogène dans le sens qu’elle s’ajuste à
la demande de travail des entreprises et au taux de salaire (voir graphique IV.2).
Graphique IV.2 : Le marché du travail
Offre de travail Agrégée
CES
Offre L ind. 1 Offre L ind. 2 Offre L ind. j Offre L ind. J
= (w1) = (w2) = (wj) =(wJ)
Dde L ind. 1 Dde L ind. 2 Dde L ind. j Dde L ind. J
Note : Offre L ind. j signifie l’offre de travail adressée à l’industrie j ; Dde L ind. j signifie la demande de travail de l’industrie j. Enfin, wj représente le taux de salaire qui s’ajuste à l’équilibre.
4
Comme le montre le graphique ci-dessus, le ménage représentatif répartit l’offre de travail
agrégée selon le niveau de la demande de chaque industrie et du prix d’équilibre. Cette
spécification semble être plus conforme à la réalité, étant donné que les secteurs d’activité
n’ont pas la même intensité de main d’œuvre ni le même taux de salaire. Cette répartition
s’effectue à l’aide d’une fonction CET (Constant Elasticity of Transformation).
IV.2. La Demande Finale
La demande finale de chacun des biens i est formée par la somme de la demande domestique
et des importations de ce bien (voir graphique IV.3). Une fois constituée, la demande finale,
pour tout bien i, devient la somme de la consommation finale, de la consommation du
Gouvernement, de l’investissement et des consommations intermédiaires des industries,
suivant l’écriture traditionnelle de l’équation d’équilibre sur biens et services.
IV.3 Le processus de production
Il est supposé dans ce modèle qu’il existe une complémentarité entre la consommation
intermédiaire agrégée et la valeur ajoutée dans le schéma de production d’une industrie j
donnée. C’est ainsi que la production est une fonction leontief de la valeur ajoutée et de la
consommation intermédiaire agrégée. La valeur ajoutée est formée à travers une technologie
de substitution entre les facteurs travail et capital. La fonction Cobb-Douglas est choisie pour
représenter cette technologie. Quant à la consommation intermédiaire agrégée, elle formée par
les consommations intermédiaires en bien i (i=1,…I) selon une technologie leontief.
Il peut être constaté que la confrontation entre la demande de travail « Dde. L ind. j » de
l’industrie j et l’offre de travail fournie par le ménage assure le prix d’équilibre sur le marché
du travail (voir graphique IV.2). En outre, les graphiques IV.3 et IV.4 sont liés par les
consommations intermédiaires et l’équilibre entre l’offre et la demande finale domestique.
5
Graphique IV.3 : La demande finale d’un bien i
Importations du bien i Cons. bien i
+
G. bien i
CES DEMANDE FINALE DU BIEN i = +
Inv. bien i
+
Demande Domestique du bien i Σj CI bien ij
Note : Cons. bien i, G bien i, Inv. bien i et Σj CI bien ij signifient respectivement la consommation du ménage en bien i, la consommation du Gouvernement en bien i, la demande d’investissement en bien i et la consommation intermédiaire en bien i de toutes les industries j.
6
Graphique IV.4 : Le processus de production d’une industrie j
Demande de travail
Dde. L ind. j
CES VA j
Exportation bien. j
Demande de capital Dde. K ind. j
Leontief Prod. ind. J CET
CI bien 1 j
Leontief CI j
Offre domestique bienj
(XDSj)
(Pj)
=
Demande du bien domestique j
(XDDj)
CI bien 2 j
CI bien ij
CI bien I j
Note :La signification des variable du graphique est la suivante :Prod. Indj (production de l’industrie j), VAj (valeur ajoutée de l’industrie j), CIj
(demande de consommation intermédiaire agrégée de l’industrie j), CI bien ij (demande de consommation intermédiaire en bien i de l’industrie j.
7
IV.4. Le commerce extérieur
La modélisation du commerce extérieur constitue le point focal de l’étude dont l’objectif,
rappelons-le, est de mesurer l’impact sur le tissu économique sénégalais, du démantèlement
tarifaire sur les produits en provenance de l’Union Européenne.
Une façon appropriée de modéliser l’importation d’un bien i requiert un découpage de
l’environnement international en quatre zones économiques qui sont, l’UEMOA, la zone
CEDEAO hors UEMOA, l’Union Européenne (UE) et les autres pays du reste du monde
(RDM). Un attelage de fonctions CES tel que décrit dans le graphique IV.5 permet de
spécifier la formation d’un bien importé à partir de ces quatre zones d’origine. Cette
spécification permet de mesurer les effets de création et de détournement de commerce induits
par l’APE.
Graphique IV.5 : Les importations de bien i
IMPORTATION DU BIEN i (Mi)
CES
CEDEAO RDM
CES CES
UEMOA Hors UEMOA UE AUTRES
La création de commerce survient lorsque la baisse des droits de douane, induits par l’APE,
permet de remplacer les produits locaux par les importations en provenance de l’UE devenus
bon marché. D’une manière générale, la création commerciale a pour effet de substituer les
produits locaux moins compétitifs par les produits importés plus compétitifs, suite à la
8
réduction ou à la suppression des tarifs. Dans le contexte de l’intégration régionale, la gamme
des produits locaux couvre le Sénégal et les autres pays de l’union douanière.
Le détournement de commerce appliqué au cas de l’APE traduit l’éviction des produits des
pays du RDM (« Autres » dans le graphique IV.5) au profit des importations de l’UE moins
compétitives, mais bénéficiant de la suppression des tarifs douaniers.
De plus, partant du lien qui existe entre les importations et la demande finale (graphique
IV.3), le modèle permet de faire ressortir l’ensemble des effets de l’APE sur l’économie
domestique notamment le système productif, l’investissement, les finances publiques, et la
consommation et le bien-être du ménage.
Le même schéma est adopté pour spécifier l’exportation d’un bien i par zone de destination,
avec les fonctions d’arbitrage qui deviennent des fonctions CET (constant elasticity of
transformation).
IV.5. Le Gouvernement
L’Etat a pour rôle de prélever des impôts et taxes destinés à financer des dépenses courantes
en biens et services et à constituer l’épargne publique. Les recettes fiscales intérieures
résultent des taxes prélevées sur la production et les composantes de la demande finale, et des
impôts sur la rémunération du ménage et des entreprises, détenteurs des facteurs de
production (travail et capital). Quant aux recettes douanières, elles proviennent
essentiellement des importations et de quelques produits exportés. En outre, le Gouvernement
reçoit une partie de la rémunération du capital et des transferts nets de la part de l’étranger.
Graphique IV.6 : Comportement du Gouvernement
Ressources Disponibles
(recettes fiscales, revenus du capital et transferts nets reçus)
CES
Investissement Consommation Public Publique
9
Sur la base de ces différentes sources de revenus, le gouvernement procède à un arbitrage
entre l’investissement et la consommation publics, lequel arbitrage détermine son niveau
d’utilité.
IV.6. L’équilibre des marchés, hypothèses du modèle et mécanismes de bouclage
L’équilibre du modèle requiert l’ajustement des prix qui résultent de l’égalité entre l’offre et
la demande sur les marchés de produits et de facteurs. Le modèle comporte 58 équilibres dont
28 concernent les marchés de biens et services, 28 autres sont relatifs aux marchés du travail,
un marché du capital et enfin, l’équilibre de la balance commerciale qui détermine le taux de
change réel.
Dans le souci de renforcer le réalisme du modèle et de le rapprocher de la structure de
l’économie sénégalaise, deux hypothèses fondamentales y ont été retenues. La première
consiste à supposer que les exportations n’évoluent pas de façon élastique à la suppression
progressive des droits de douane sur les importations européennes. En effet, le raisonnement
sous-jacent est que l’augmentation de la capacité exportatrice des entreprises sénégalaises
repose sans doute beaucoup plus sur des contraintes structurelles (diversité et qualité de la
gamme des produits exportés, barrières non tarifaires, etc.) nécessitant des réformes
profondes, que sur de simples questions de compétitivité-prix. Dès lors, les exportations
totales évoluent de façon exogène, au rythme de la croissance équilibrée de l’économie.
La seconde hypothèse repose sur la fixité du solde global de la balance commerciale. En effet,
l’alternative consisterait à relâcher la contrainte sur le solde de la balance commerciale et à
fixer le taux de change ; mais, ceci signifierait que quelle que soit la dégradation de la balance
commerciale, elle serait systématiquement compensée par des apports de capitaux étrangers,
soit sous la forme d’investissements directs étrangers, soit sous la forme de financements
accordés à l’Etat ou au secteur privé. Or, un tel cas de figure paraît peu réaliste, ce qui
explique le choix porté sur l’exogénéité du solde global de la balance commerciale. Cette
exogénéité du solde global du commerce extérieur induit, de facto, la flexibilité du taux de
change réel qui, compte tenu de l’hypothèse précédente sur les exportations, devient la
variable qui s’ajuste pour assurer que l’évolution des importations soit en phase avec la
contrainte d’exogénéité du solde global de la balance commerciale.
10
IV.7. Résolution du modèle par le Système MPSGE
Du point de vue pratique, les simulations sur le modèle ici présenté ont été réalisées à l’aide
d’un nouvel outil de modélisation des MEGC, dénommé MPSGE (Mathematical
Programming System for General Equilibrium Analysis) et développé par l’économiste
américain Thomas Rutherford, de l’Université du Wisconsin (Etats-Unis). L’objectif de cet
outil est de fournir un léger programme de résolution et d’analyse des systèmes d’équations
non linéaires. Cette méthode de programmation a l’avantage d’offrir une représentation des
MEGC plus souple et plus compacte dans l’écriture.
En effet, l’utilisateur MPSGE n’a plus besoin de formuler une représentation algébrique des
fonctions de production et d’utilité. Il ne fournit plus que des quantités, des prix, des
élasticités, ainsi que des taux de référence, calibrés sur la base des données de la Matrice de
Comptabilité Sociale (MCS). S’appuyant sur ces informations, le programme MPSGE
construit les fonctions de production et d’utilité sous-jacentes. Après avoir déterminé la
solution du modèle, il renvoie les valeurs d’équilibre pour les variables définies dans la
structure du modèle et relatives aux branches d’activité, aux produits et aux consommateurs.
Le système MPSGE repose sur une formalisation du modèle sous la forme d’un problème de
complémentarité mixte. Le MEGC est transformé sur la base de l’approche duale de
l’équilibre général qui utilise les formes duales des comportements d’optimisation du
producteur et du consommateur.
Encadré : Approche duale (ou complémentaire) utilisée par la méthode MPSGE
Mathiesen (1985) a démontré que le modèle d’équilibre général économique d’Arrow et Debreu pouvait être
formulé et résolu comme un problème de complémentarité mixte. La reformulation du problème primal peut ainsi
reposer sur trois ensembles de variables dites centrales, à savoir : un vecteur des prix des biens et des facteurs
de production, un vecteur des quantités pour la production et la consommation et un vecteur de niveaux de
revenu pour les agents de l’économie. L’équilibre général nécessite alors la vérification des conditions que sont
la nullité des profits, l’équilibre des marchés et la condition d’équilibre des revenus. Par exemple, considérons
une économie à 2 biens X et Y dont la production requiert deux facteurs K et L.
11
Conditions de nullité des profits
Fonctions de coût (fonction duale de la fonction de production) unitaire des biens X et Y :
( ) ≥ et ( ) ≥
Fonction unitaire de dépense (fonction duale de la fonction de d’utilité), W :
( ) ≥
Conditions d’équilibre des marchés
Offre ≥ Demande pour X :
Offre ≥ Demande pour Y :
Offre ≥ Demande pour W :
Offre ≥ Demande pour L :
Offre ≥ Demande pour K:
Conditions d’équilibre des revenus
Equilibre du revenu :
Le modèle est ainsi retranscrit sous une forme algébrique, en utilisant une approche duale de
l’équilibre général et en ramenant le modèle à un système d’inégalités reposant sur les trois
conditions que sont : la nullité des profits, l’équilibre des marchés et le solde des revenus. En
effet, conformément à ces conditions, l’approche duale de l’équilibre général implique
respectivement que les coûts soient supérieurs ou égaux aux prix, que l’offre soit supérieure
ou égale à la demande sur les marchés et que les revenus des agents soient supérieurs ou
égaux à leurs dépenses10
.
10 Voir Encadré
12
V. RESULTATS
Les simulations effectuées à l’aide du MEGC dynamique récursif s’inscrivent dans la logique
du calendrier de démantèlement tarifaire retenu par la Commission de la CEDEAO et présenté
au tableau IV.2. Ainsi, la suppression progressive des droits de douane, tel que décrite par le
graphique IV.1, montre que les produits de la catégorie A devraient être entièrement
libéralisés au cours de l’année 2016. Ensuite, les produits de la catégorie B suivraient un
démantèlement en trois phases dont la plus accentuée devrait notamment survenir vers 2025.
Enfin, la libéralisation des produits de la catégorie C devrait être progressive à partir de 2030.
Graphique V.1 : Evolution des taux effectifs selon les catégories de produit
Note : Les taux effectifs ne sont pas de même ordre de grandeur, mais ils sont normalisés à 1 dans cette illustration pour une meilleure visibilité.
Sources : Calcul des auteurs
Les simulations ont permis d’évaluer les conséquences macroéconomiques, budgétaires et
sectorielles de la mise en œuvre de l’APE.
V.1. Les effets sur les prix
L’hypothèse de la constance de la balance commerciale dans le modèle est rendue possible
par la flexibilité du taux de change réel (TCR). Ainsi, toute dégradation de la balance
commerciale qu’aurait du provoquer l’APE entraine plutôt une dépréciation réelle dû taux
change, ce qui induit a priori une augmentation des prix des produits importés. Cependant,
l’effet de la baisse des droits de douane est plus fort que celui de la dépréciation du TCR
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
1,2
20
13
20
14
20
15
20
16
20
17
20
18
20
19
20
20
20
21
20
22
20
23
20
24
20
25
20
26
20
27
20
28
20
29
20
30
20
31
20
32
20
33
20
34
20
35
20
36
20
37
20
38
Catégorie A Catégorie B Catégorie C Global
13
provoquant du coup une diminution du prix à l’importation. En effet, les prix des produits
importés de l’UE affichent une variation à la baisse dont l’importance entraine la diminution
des prix à l’importation. Comme le montre le graphique V.2 qui décrit les variations
moyennes des prix importés sur toute la période de libéralisation, les diminutions les plus
remarquables concernent les branches « raffinage pétrole », « verres et poterie », « machines,
équipements et matériels de transport », « produits chimiques », « produits divers » et
« agriculture vivrière ».
Graphique V.2 : Variation moyenne des prix de produits importés (2013-2038)
En conséquence, le prix global des importations diminue de 1,1% en moyenne en raison
notamment des poids important des machines et équipements, et des produits pétroliers dans
la structure des importations totales, lesquels sont respectivement de 22% et 15%.
D’un point de vue dynamique le graphique V.3 montre que l’indice général des prix à
l’importation devrait enregistrer une baisse substantielle lors de la première phase de
libéralisation des produits de la catégorie A avant de baisser progressivement sous l’effet du
processus de démantèlement des tarifs sur les produits des catégories B et C.
-12%
-10%
-8%
-6%
-4%
-2%
0%
Ag
ric.
viv
.
Ag
ric.
ind
.
Ele
v. &
Ch
ass
e
Sylv
& F
ore
st.
Pê
che
Ex
tra
ctiv
es
Via
nd
e &
po
isso
n
Hu
ile
rie
s
Gra
ins
Cé
réa
les
Sucr
e
Ali
me
nts
(n
ca)
Bo
isso
ns
Ta
ba
c
Co
ton
& T
ext
ile
Cu
ir
Bo
is
Pa
pe
teri
e
Ra
ffin
age
Pé
tro
le
Ch
imiq
ue
s
Ca
ou
tch
ou
c
Ve
rre
& p
ote
rie
Mé
tall
urg
ie
Ma
ch, E
qu
ip. &
Ma
t.T
ran
s.
Div
ers
Prix Import Global Prix Import UE
14
Il convient de souligner que l’indice général des prix des biens produits localement baisse en
réaction à l’effet de substitution engendré par la baisse du prix global des importations. En
effet, la concurrence accrue des biens importés entraine un repli de la demande des produits
locaux correspondants et, partant, une baisse de leur prix.
Graphique V.3 : Impact sur quelques indices généraux de prix
Les résultats montrent également que le prix global de l’investissement baisse plus
rapidement que celui de la consommation. Cela s’explique aisément par la baisse du prix à
l’import du bien « machines, équipement et matériel de transport » dont le poids est le plus
important dans la structure des importations. De plus, ce bien représente le deuxième poste le
plus important de la demande d’investissement11
.
V.2. Les effets sur le commerce extérieur
Les simulations de l’APE montrent une augmentation croissante et régulière des importations
en provenance de l’UE. Cette hausse des importations devrait ainsi s’élever à 1,55% en 2016
et atteindre 2,67% en 2038, c’est-à-dire au bout du processus de libéralisation. Il faut
cependant noter que le démantèlement tarifaire en faveur des produits provenant de l’UE
s’effectuerait au détriment des autres partenaires commerciaux du Sénégal. Si ce
détournement de commerce devrait s’effectuer principalement en défaveur du « Reste du
Monde » en termes absolus, il apparaît clairement que ce sont les pays de la CEDEAO hors
UEMOA qui devraient en pâtir le plus d’un point de vue relatif. En effet, le recul des
11
Le premier poste le plus important de la demande d’investissement est le bien « Construction », mais il est considéré comme un bien non échangeable.
-2,5%
-2,0%
-1,5%
-1,0%
-0,5%
0,0% 20
13
20
15
20
17
20
19
20
21
20
23
20
25
20
27
20
29
20
31
20
33
20
35
20
37
Variation Prix Import
Variation Prix biens locaux
-2,0%
-1,5%
-1,0%
-0,5%
0,0% 20
13
20
15
20
17
20
19
20
21
20
23
20
25
20
27
20
29
20
31
20
33
20
35
20
37
Variation Prix Consommation
Variation Prix Investissement
15
importations en provenance du « Reste du Monde » se traduirait par une baisse annuelle
moyenne de 1,3% entre 2016 et 2024 avant que l’écart, par rapport à la situation de référence,
ne s’amplifie pour s’établir à 2,15% au bout de la période de démantèlement tarifaire. En
revanche, les résultats de la simulation indiquent que les importations des pays ouest-africains
(hors UEMOA) devraient chuter à partir de 2016 et leur baisse se stabiliserait autour de
3,48% l’année. Concernant les importations issues de la zone UEMOA, elles diminueraient
de 0,92% l’an entre 2016 et 2024 avant que cette tendance s’accélère et se situe à 1,44% en
2038.
Graphique V.4 : Evolution des importations selon les régions
Tableau V.1 : Variation moyenne des importations selon les régions
PERIODES
IMPORTATIONS EXPORTATIONS
UE RDM CEDEAO
(hors UEMOA)
UEMOA UE RDM CEDEAO
(hors UEMOA)
UEMOA
2013-2015 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00
2016-2029 1,67 -1,39 -3,53 -0,69 0,16 -0,68 0,17 -1,21
2030-2038 2,51 -2,04 -3,41 -1,24 0,06 -0,58 0,09 -1,07
-4%
-3%
-2%
-1%
0%
1%
2%
3%
20
13
20
14
20
15
20
16
20
17
20
18
20
19
20
20
20
21
20
22
20
23
20
24
20
25
20
26
20
27
20
28
20
29
20
30
20
31
20
32
20
33
20
34
20
35
20
36
20
37
20
38
UE CEDEAO (hors UEMOA) RDM UEMOA
16
Pour rappel, les importations totales ne s’écarteraient pas de leur trajectoire de long terme en
raison de la contrainte d’exogéneité de la balance commerciale.
L’incidence de l’APE sur l’économie sénégalaise dépend dans une large mesure de la
variation des importations par produits. De ce point de vue, les produits en provenance le
l’UE dont les prix ont enregistré les baisses les plus importantes, sont ceux dont les
importations connaitraient une hausse.
Graphique V.5 : Variation moyenne des Importations (2013-2038)
Globalement, la baisse des importations constatée sur certains produits s’explique tout
d’abord par la contrainte de rigidité qui existe au niveau des importations totales. Sous cette
contrainte, la hausse des importations de certains produits est compensée par le repli des
importations d’autres produits.
En outre, ce recul observé s’explique soit, par une baisse de la demande intérieure, soit par un
effet de détournement de commerce. Par exemple, l’augmentation des importations de pétrole
raffiné provoque une diminution de la demande du même produit adressée à l’industrie locale,
du fait de la concurrence. Ainsi, la production locale de l’industrie du pétrole raffiné diminue
entrainant à la baisse sa demande de consommations intermédiaires dont la composante la
plus importante se trouve être le produit « extractives ». Par conséquent, les importations de
-6%
-4%
-2%
0%
2%
4%
6%
8%
10%
Ag
ric.
viv
.
Ag
ric.
ind
.
Ele
v. &
Ch
ass
e
Sylv
& F
ore
st.
Pê
che
Ex
tra
ctiv
es
Via
nd
e &
po
isso
n
Hu
ile
rie
s
Gra
ins
Cé
réa
les
Sucr
e
Ali
me
nts
(n
ca)
Bo
isso
ns
Ta
ba
c
Co
ton
& T
ext
ile
Cu
ir
Bo
is
Pa
pe
teri
e
Ra
ffin
age
Pé
tro
le
Ch
imiq
ue
s
Ca
ou
tch
ou
c
Ve
rre
& p
ote
rie
Mé
tall
urg
ie
Ma
ch, E
qu
ip. &
Ma
t.T
ran
s.
Div
ers
Import UE Import GLOBAL
17
produits d’extraction s’en trouvent réduites. En d’autres termes, si les importations de pétrole
raffiné augmentent, celles du pétrole brut contenues dans les « extractives » baissent.
Un autre exemple qui mérite d’être souligné est la baisse globale du volume d’importation du
produit « machines, équipements et matériel de transport », malgré la baisse de son prix à
l’importation. L’explication tient au fait que ce produit est plus cher en Europe que dans les
autres régions partenaires du Sénégal. Ainsi, un changement de prix relatif en faveur de l’UE
renforce certes l’attrait du produit originaire de l’UE, mais son augmentation n’est pas
suffisante pour compenser la baisse des importations en provenance des autres pays
partenaires.
Du point de vue des exportations, l’observation des résultats de la simulation permet de
constater que la mise en œuvre de l’APE aurait comme principal effet commercial un
détournement du commerce entre le Sénégal et les pays de l’UEMOA. Ainsi, les exportations
sénégalaises à destination des pays de l’Union reculeraient, en moyenne, de 1% par an, à
partir de 2016. Un recul des exportations vers la zone « Reste du Monde » devrait également
être enregistré, avec une baisse annuelle qui se chiffrerait à 0,76% en 2016 et atteindrait
0,55% en 2038. A contrario, il s’avère que les ventes de produits aux pays de la CEDEAO
(hors UEMOA) et à l’UE évolueraient à la hausse.
En effet, les exportations vers la région ouest-africaine augmenteraient de 0,16%, entre 2016
et 2024, avant que cette dynamique s’estompe progressivement. Globalement les exportations
totales restent inchangées par rapport à leur dynamique de long terme dès lors qu’elles sont
supposées exogènes.
V.3. Les effets sur le système productif
L’entrée en vigueur de l’APE devrait se traduire par une baisse régulière du PIB, à partir de
2016 (-0,39%) et la perte annuelle passerait à 0,8% en 2038. Cette diminution du PIB entraine
une baisse de la demande des facteurs de production qui s’effectue essentiellement au
détriment de la demande de capital. La demande travail diminue au moment de la première
phase de libéralisation avant de retrouver son niveau tendanciel12
. Cependant, les résultats
n’écartent pas la possibilité de la recrudescence du chômage vers la fin de la période de
libéralisation coïncidant avec la suppression des tarifs sur les produits de la catégorie C.
12 Les variations de l’emploi par secteur sont disponibles et peuvent faire l’objet de publication sur demande.
18
Si les résultats de la simulation indiquent une baisse de la production au niveau
macroéconomique, les résultats sectoriels montrent très clairement que cette baisse ne serait
pas uniforme. Il apparait nettement que la plupart des branches de l’économie afficheraient un
recul de leur activité, sous l’effet de la concurrence accrue des produits importés de l’UE
devenus plus compétitifs. De ce point de vue, la branche de raffinage de pétrole devrait subir
la baisse de production la plus importante en termes relatifs (-4,26% par an). Elle serait suivie
par les branches agricoles, les BTP et les services. En revanche, les branches « Machines,
Equipement et Matériel de Transport », « Pêche », « Industries extractives », « Tabac »,
« Verre et Poterie », enregistreraient une hausse de leur production suite à la mise en œuvre
de l’APE.
Graphique V.6 : Impact sur la production et les facteurs de production
-1,00%
-0,80%
-0,60%
-0,40%
-0,20%
0,00%
0,20%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
Pib au prix du marché
-1,00%
-0,80%
-0,60%
-0,40%
-0,20%
0,00%
0,20%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
PIB au coût des facteurs
-1,2%
-1,0%
-0,8%
-0,6%
-0,4%
-0,2%
0,0%
0,2%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
Capital
-1,2%
-1,0%
-0,8%
-0,6%
-0,4%
-0,2%
0,0%
0,2%
0,4%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
Emploi
19
Le graphique V.8 décrit la relation entre les variations du PIB et celles des importations pour
les produits échangeables13
les plus affectés par l’APE. Il permet ainsi de constater que la
performance des industries locales dépend principalement du sens de variation des
importations et des effets de taille. Ainsi, on distingue deux groupes d’industries. Le premier
groupe, qui se situe au Nord-ouest du graphique, est constitué des produits dont l’activité
intérieure augmente tandis que leurs importations diminuent. Le second groupe (au Sud-est du
graphique) comprend les produits dont l’activité intérieure subit la concurrence des
importations, suite au démantèlement tarifaire.
Graphique V.7 : Ecarts de production moyens par produits
13
Il est supposé dans cette étude que tous les produits sont échangeables à l’exception des produits « énergie », « BTP » et « services ». Les services font l’objet d’importation et d’exportation mais ne sont pas concernés par l’APE. De plus leur partie non échangeable constitue l’essentiel de leur activité.
-6%
-4%
-2%
0%
2%
4%
6%
8%
10%
Ma
ch, E
qu
ip. &
…
Ra
ffina
ge P
étro
le
En
ergie
Ag
ric.viv
.
Ele
v. &
Ch
asse
BT
P
Sylv
& F
ore
st.
Pê
che
Serv
ices
Ag
ric.ind
.
Ex
tractiv
es
Via
nd
e &
po
isson
Div
ers
Ve
rre &
po
terie
Ta
ba
c
Hu
ilerie
s
Ch
imiq
ue
s
Ca
ou
tcho
uc
Cé
réa
les
Gra
ins
Pa
pe
terie
Bo
isson
s
Bo
is
Cu
ir
Alim
en
ts (nca
)
Mé
tallu
rgie
Sucre
Co
ton
& T
extile
20
Graphique V.8 : Réaction de l’activité intéreure à la libéralisation commerciale (2013-2038)
Pour illustrer les effets de taille sur la performance des industries locales, l’exemple du
produit « Machines, Equipement et Matériel de Transport » est édifiant. En effet, son activité
devrait enregistrer une hausse annuelle moyenne de 8,8% sur l’ensemble de la période de
libéralisation, alors que les importations ne devraient baisser que de 0,5% par an. Cela tient au
fait que le produit affiche la part la plus élevée dans les importations, tandis son poids dans la
production intérieure est faible. De manière générale, la taille de l’activité intérieure du
produit, relativement à ses importations, détermine l’intensité de sa réaction à la
libéralisation.
Cependant, il faut noter qu’il existe deux produits dont l’activité devrait diminuer malgré le
recul des importations. En l’occurrence, il s’agit des produits « agriculture industrielle » et
« viande et poisson ». L’explication est que les deux branches correspondantes sont
respectivement les principaux fournisseurs en consommations intermédiaires des branches
« huileries » et « services », lesquelles devraient être lésées par la survenue de l’APE.
En ce qui concerne les biens non échangeables, les effets de l’APE ne sont pas non plus
homogènes. Ainsi, l’activité de l’énergie est positivement affectée par la baisse substantielle
du coût du pétrole raffiné qui constitue sa principale consommation intermédiaire. L’activité
des BTP, dont l’essentiel de la production est destiné à l’investissement, subit une baisse à la
mesure du repli de la demande de capital (voir graphique V.5). Enfin, la diminution de
l’activité des services découle du fait qu’il s’agit d’une branche transversale ayant une
corrélation relativement importante avec les autres secteurs de l’économie.
Agric.viv. Agric.ind.
Elev. & Chasse
Sylv & Forest.
Pêche Extractives
Viande & poisson
Tabac
Raffinage Pétrole
Verre
& poterie
Mach, Equip. & Mat.Trans.
Divers
-10%
-8%
-6%
-4%
-2%
0%
2%
4%
6%
8%
10%
-5% -4% -3% -2% -1% 0% 1% 2% 3% 4% 5%
Variation des importations
Var
iati
on
du
PIB
21
V.4. Les effets sur la demande finale, le revenu et le bien être des ménages
L’investissement évoluerait à la baisse, avec des pertes qui se chiffreraient à 0,7% en 2016 et
à 1,1% en 2038. Cette diminution s’explique par le repli de la demande de capital dont l’effet
domine celui de la baisse du prix de l’investissement. Cependant, il apparaît que la
libéralisation commerciale devrait avoir pour conséquence une légère augmentation de la
consommation privée. Cette hausse, qui devrait s’établir, en moyenne, à 0,28% l’an, serait liée
à une baisse des prix à la consommation plus forte que la baisse du revenu des ménages. Ce
dernier subirait, en effet, une baisse, comme le montre le graphique V.9, qui en moyenne se
situerait à 0,7% par an. La variation négative du revenu est en mettre en relation avec la baisse
de la demande des facteurs de production, elle-même due à la contraction du PIB.
Graphique V.9 : Impact sur la consommation et l’investissement
Graphique V.10 : Impact sur le revenu et le bien-être des ménages
0,0%
0,1%
0,1%
0,2%
0,2%
0,3%
0,3%
0,4%
0,4%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
Consommation Privée
-1,2%
-1,0%
-0,8%
-0,6%
-0,4%
-0,2%
0,0%
0,2%
2013
2015
2017
2019
2021
2023
2025
2027
2029
2031
2033
2035
2037
Investissement
-1,2%
-1,0%
-0,8%
-0,6%
-0,4%
-0,2%
0,0%
0,2%
20
13
20
15
20
17
20
19
20
21
20
23
20
25
20
27
20
29
20
31
20
33
20
35
20
37
Revenu
-0,4%
-0,2%
0,0%
0,2%
0,4%
20
13
20
15
20
17
20
19
20
21
20
23
20
25
20
27
20
29
20
31
20
33
20
35
20
37
Bien-être
22
Enfin, la variation du bien-être du ménage, qui est le reflet des changements de revenu et du
système des prix à la consommation, évoluerait en dents de scie mais devrait rester
légèrement positive sur la période de mise en œuvre du processus de libéralisation. En
moyenne, le bien-être augmenterait de 0,1% par an. Ce résultat dénote d’un effet de
consommation du fait que la baisse du revenu est moins importante que celle du système des
prix à la consommation. Cependant, il convient de préciser qu’il ne s’agit là que du bien-être
des ménages, car le bien-être global de l’économie doit intégrer celui de l’Etat, à travers
l’évolution de ses recettes fiscales. Or, comme nous le verrons dans la sous section suivante,
les pertes de recettes fiscales l’emporteraient sur l’amélioration du bien-être des ménages.
V.5. Les conséquences budgétaires
Les résultats de la simulation, présentés dans le graphique V.11, suggèrent que, du point de
vue budgétaire, le démantèlement tarifaire sur les importations en provenance de l’UE devrait
avoir pour conséquence des moins-values de recettes pour l’Etat.
Graphique V.11 : Impact de l’APE sur les recettes publiques
-35%
-30%
-25%
-20%
-15%
-10%
-5%
0%
5%
2013
2016
2019
2022
2025
2028
2031
2034
2037
Recettes Douanières
-3,0%
-2,5%
-2,0%
-1,5%
-1,0%
-0,5%
0,0%
0,5%
2013
2016
2019
2022
2025
2028
2031
2034
2037
Recettes Indirectes Intérieures
-7%
-6%
-5%
-4%
-3%
-2%
-1%
0%
1%
2013
2016
2019
2022
2025
2028
2031
2034
2037
Recettes Fiscales
23
En effet, ces résultats indiquent qu’à partir de 2016, les pertes de recettes fiscales
consécutives à la mise en œuvre de l’APE s’élèveraient à 3,6%, par rapport à la situation de
référence et à 6% en 2038. De prime abord, cette perte est imputable à la baisse des recettes
douanières qui sont au cœur des enjeux liés à la libéralisation commerciale. L’APE induirait
ainsi une perte de droits de douane qui s’établirait à 20% en 2016, et qui s’aggraverait au
point d’atteindre 31% en 2038.
L’évolution négative des recettes publiques s’explique également par les moins-values
enregistrées sur les autres recettes indirectes qui subiraient une baisse ponctuelle de 1,52% au
début du démantèlement tarifaire. Ensuite, la baisse des recettes indirectes se situerait autour
de 2.6% à la fin du processus de libéralisation.
24
VI. CONCLUSION
La DPEE a déjà réalisé en 2008 une étude portant sur l’évaluation des effets économiques et
commerciaux de l’APE au Sénégal (voir Fall et Thiaw, 2008). Cette étude a fait ressortir des
résultats intéressants qui ont mis en relief les effets de création et de détournement de
commerce, mais également les conséquences sur le budget de l’Etat et le bien être global.
Cependant, la méthodologie retenue était fondée sur un modèle d’équilibre partiel qui
présentait plusieurs limites. En effet, le modèle ne permettait pas de procéder à une analyse
détaillée des implications de l’APE sur le tissu économique, notamment les industries et
secteurs, les facteurs de production, l’investissement, etc. Par ailleurs, ni la liste des produits
concernés par la libéralisation, ni le schéma et le calendrier de libéralisation n’étaient encore
disponible au moment de la finalisation de l’étude.
Ainsi, l’étude de 2008 peut être considérée comme une sorte de prospective qui donne des
indications sur le comportement à suivre de la part des décideurs dans les négociations avec
l’UE. A cet égard, l’une des principales recommandations était que, dans le processus de
libéralisation, les négociateurs devaient privilégier les biens d’équipement et de
consommation intermédiaire pour d’améliorer la productivité et la compétitivité des
entreprises, tout en améliorant le bien-être global.
D’ailleurs cette conclusion a été confortée par la Commission de la CEDEAO dans la
l’élaboration de la liste des produits sensibles et du schéma de libéralisation. En effet, les
catégories A et B regroupent essentiellement des biens d’investissement et des intrants
intermédiaires tandis que les biens de consommation finale figurent pour l’essentiel dans les
catégories C et D.
La présente étude repose sur ces éléments de la dernière offre d’accès au marché proposée par
la CEDEAO. A l’aide du MEGC dynamique, l’étude a permis d’établir un certain nombre de
résultats montrant que l’APE devrait globalement impliquer une légère contraction de
l’activité économique. La demande des facteurs de production (capital et travail) s’en
trouverait réduite de même que le revenu des ménages. La branche du raffinage de pétrole, les
BTP, les services et le secteur primaire seraient les plus exposés à un repli de leur activité.
25
En revanche, les prix de biens baisseraient suffisamment pour améliorer le pouvoir d’achat et
le bien-être des ménages. Toutefois, en raison des pertes relativement importantes de recettes
fiscales, le bien être global devrait légèrement se détériorer.
En définitive, les résultats semblent modérés par les mesures de sauvegarde adoptées dans le
cadre du schéma de libéralisation. En effet, l’étalement du processus de libéralisation sur 25
ans, la protection définitive de 29% des importations et de 46% des droits de douane liés au
commerce avec l’UE ainsi que la prééminence des biens d’investissement et de
consommation intermédiaire, constituent autant de facteurs d’amortissement des effets
négatifs de l’APE.
26
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Adjovi, E., A.F. Sossou et A. Missinhoun (2006), « Impact de l'Accord de Partenariat
Economique sur l'économie du Bénin : une analyse à l'aide d'un Modèle d'Equilibre Général
Calculable (MEGC) », MIMAP, Benin.
Berisha-Krasniqi, V., A. Bouet et S. Mevel, (2008), « Economic Partnership Agreements
between the European Union and African, Caribbean, and Pacific Countries: What is at Stake
for Senegal, IFPRI discussion papers 765, International Food Policy Research Institute
(IFPRI).
Bhagwati, J. (1991), « The World Trading System at Risk », Princeton: Princeton University
Press.
Busse, M., Bormann, A., et H.G. Grossman (2004), « The Impact of ACP/EU Economic Partnership
Agreements on ECOWAS Countries: An Empirical Analysis of the Trade and Budget Effects »,
Hamburg Institute of International Economics Report.
Calipel, S., G., Chambas, A.M. Geourjon et J.B. Le Hen (2007), « Etude de l'Accord de
partenariat économique entre l'Afrique de l'Ouest et la Communauté européenne : Impacts et
politiques d'accompagnement (cas du Sénégal) », Volume I, CERDI.
Chang, H. J. (2002), « Kicking Away the Ladder: Development Strategy in Historical
Perspective », London: Anthem Press.
Chang, H. J. (2005), « Why Developing Countries Need Tariffs? », Geneva: South Centre.
Dollar, D. (1992), « Outward Oriented Developing Countries Really do Grow More Rapidly:
Evidence from 95 LDCs (1976-85) », Economic Development and Cultural Change, April.
Edwards, S. (1998), « Openness, Productivity and Growth: What Do We Really Know? »,
Economic Journal, March.
Fall, A. et Thiaw, K. (2008), « Enjeux Economiques et Commerciaux de l’Accord de
Partenariat Economique pour le Sénégal », Document d’Etude n°08, Direction de la Prévision
et des Etudes Economiques, Ministère de l’Economie et des Finances, Senegal.
27
Frankel, J. A. et D. Romer (1999), « Does trade cause growth? », American Economic
Review, vol. 89 (3), June, pp. 379–99.
Freund, C. et E. Ornelas (2010), « Regional Trade Agreements », Policy Research Working
Paper 5314, The World Bank Development Research Group, Trade and Integration Team,
World Bank, Washington DC.
Helpman, E. et P.R. Krugman, (1986), « Market Structure and Foreign Trade, Increasing
Returns, Imperfect Competition, and the International Economy », Cambridge, MA: MIT
Press.
S. Karingi, R. Lang, Oulmane, N., Sadni-Jallab, M. Sadni-Jallab, M., Lang, R., Pérez, R. et
Ouédraogo, I. (2005), « Evaluation de l’impact de l’accord de partenariat économique entre
les pays de la COMESA et l’Union européenne », Centre Africain pour les Politiques
Commerciales, Commission Economique pour l’Afrique, No. 23, Addis-Ababa.
Krueger, A.O. (1998), « Why Trade Liberalisation is Good for Growth », The Economic
Journal, Vol. 108, N°450, Sept., 1513-1522.
Krugman P. (1991), « Increasing Returns and economic Geography », Journal of Political
Economy, 99, (3), 483-99.
Milner, C., O. Morrissey et A. McKay (2005), « Some Simple Analytics of the Trade and
Welfare Effects of Economic Partnership Agreements », Journal of African Economies,
Centre for the Study of African Economies (CSAE), vol. 14(3), pages 327-358, September.
Ndir, B. et S.M. Diop (2007), « Impact macroéconomique d’un Accord de partenariat
économique sur le Sénégal », Institut Sénégalais de Recherche Agricole, Vol. 6, N°3.
Ohlin, B. (1933), « Interregional and International Trade », Cambridge MA: Harvard
University Press.
Patel, M. (2007), « Economic Partnership Agreements between the EU and African Countries:
Potential Development Implications for Ghana », The Ethical Global Initiative, june.
Pacheco-López, P. et A.P. Thirlwall, (2006), « Trade Liberalisation, the Income Elasticity of
Demand for Imports and Growth in Latin America », Journal of Post Keynesian Economics,
Fall.
28
Perez, R. (2006), « Are the Economic Partnership Agreements a First-best Optimum for the
African Caribbean Pacific Countries? », Journal of World Trade, 40(6), 999-1019.
Perez, R et Karingi, S. N. (2007), « How to Balance the Outcomes of The Economic
Partnership Agreements for Sub-Saharan African Economies? », The World Economy, 30
(12), 1877-1899.
Reinert, E. (2007), « How Rich Countries Got Rich and Why Poor Countries Stay Poor »,
Constable & Robinson, London.
Ricardo, D. (1817), « On the Principles of Political Economy and Taxation », P. Sraffa, ed.,
Cambridge University Press, 1951.
Rodriguez, F. et D. Rodrik (2000), « Trade Policy and Economic Growth: A Skeptic’s Guide
to the Cross-National Evidence », in B. Bernanke and K. Rogoff (eds.), Macroeconomics
Annual 2000 (Cambridge MA: MIT Press).
Rodrik, D. (2001), « The Global Governance of Trade as if Development Really Mattered»,
United Nations Development Programme.
Romer, P. (1994), « New goods, Old Theory and the Welfare Cost of Trade Restrictions »,
Journal of Development Economics, vol. 43 (1), pp. 5–38.
Rutherford, T. F. et D.G. Tarr (2002). « Trade Liberalisation, Product Variety and Growth in
a Small Open Economy: A Quantitative Assessment », Journal of International Economics,
vol. 56 (2), pp. 247–72.
Sachs, J. et Warner, A. (1995), « Economic Reform and the Process of Global Integration »,
Brookings Papers on Economic Activity No.1.
Samelson, P. (1948), « International Trade and the Equalizations of Factor Prices », Economic
Journal, 58, pp. 163-84.
Smith, A. (1776), « An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations »,
London: Straham and Caddell.
Stiglitz, J. (2006), « Making Globalisation Work », New York: W.W. Norton and co.
Taylor, L. et R. von Arnim (2006), « Modelling the Impact of Trade Liberalisation: A
Critique of Computable General Equilibrium Models. Oxfam », Oxford.
29
Viner, J. (1950), « The Customs Union Issue », NY: Carnegie Endowment for International.