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Deuxième partie Mars

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Deuxième partie

Mars

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Chapitre 1

Amos

Environ sept cent cinquante années s'écoulèrent après le grand cataclysme contemporain de

l'Exode, soit sept cents ans après les perturbations cosmiques du temps de Josué. Au cours de ces sept siècles, le monde redouta le retour du cataclysme à la fin de chaque période de Jubilé. C'est alors qu'à partir du milieu du VIIIe siècle avant notre ère, de nouveaux bouleversements se produisirent, à de brefs intervalles.

C'était l'époque des prophètes hébreux, dont on a conservé les écrits, des rois assyriens, dont on a découvert et déchiffré les Annales, des Pharaons égyptiens sous les dynasties libyenne et éthiopienne. Bref, les cataclysmes que nous nous proposons de décrire n'appartiennent plus à un passé obscur : cette période fait partie de l'histoire authentique des pays de la Méditerranée orientale; et c'est le VIIIe siècle qui vit naître, d'autre part, la nation grecque et le peuple romain.

Les prophètes de Judée possédaient une connaissance remarquable des mouvements célestes; ils observaient les mouvements des planètes et des comètes, et comme les astronomes assyriens et babyloniens, ils prévoyaient scientifiquement leurs altérations.

Au VIIIe siècle, sous Osias, roi de Jérusalem, se produisit un terrible cataclysme appelé Raash (commotion) 1. Avant ce « Raash », Amos, qui vivait au temps d'Osias, avait prédit un bouleversement cosmique. Et après le cataclysme, Isaïe, Joël, Osée et Michée, d'un commun accord, et avec beaucoup d'énergie, annoncèrent qu'une nouvelle rencontre était fatale entre la terre et quelque corps cosmique.

Amos fit sa prophétie deux ans avant le raash (I, I). Il annonça que le feu envoyé par le Seigneur dévorerait la Syrie, Edom, Moab, Ammon et la Philistie, et jusqu'aux pays très éloignés, « avec un ouragan, au jour de la tempête » (I, 14). Le pays d'Israël ne serait pas épargné : un grand tumulte secouerait les montagnes. « Les grandes demeures seront détruites (III, 15) « Il fera s'écrouler la grande maison, et réduira la petite en ruines 2. »

Amos avertit ceux qui attendaient impatiemment le jour du Seigneur: « Malheur à ceux qui souhaitent voir le Jour du Seigneur. Que vous sera-t-il ce Jour du Seigneur ? Ténèbres, et non lumière... Il ne sera point lumière, mais obscurité. » (V, 18-20).

Amos, le plus ancien des prophètes de Juda et d'Israël dont les prophéties aient été préservées par l'Ecriture 3, donne l'interprétation du concept de Jahwé, en cette période lointaine de l'histoire. Jahvé commande aux planètes : « Celui qui a créé Khima et Khésil 4, celui qui change l'Ombre de la Mort en aurore, et transforme le jour en nuit, celui qui appelle les eaux de la mer, et les répand sur la surface de la terre, son nom est le seigneur Jahvé : Il donne la force aux faibles contre les forts. » (V, 8-9).

Amos fit cette prophétie : « le sol se soulèvera tout entier, comme les flots, et il sera rejeté et englouti comme par l'inondation d'Egypte. Il arrivera en ce jour-là, dit le Seigneur Dieu, que je ferai coucher le soleil à midi, et que j'obscurcirai la terre en plein jour» (VIII, 8-9).

L'inondation d'Egypte citée par Amos peut faire allusion au cataclysme du temps du Passage de la mer Rouge, mais, plus probablement, à un événement contemporain de la génération à laquelle s'adressait Amos.

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Selon une inscription détériorée qui date du règne d'Osorkon II de la dynastie libyenne en Egypte, le douzième jour du premier mois de la seconde saison de la troisième année, « l'inondation envahit tout le pays... Le pays était en son pouvoir, comme la mer; aucune digue ne résistait devant sa fureur... Tous les peuples étaient comme des oiseaux... La tempête... suspendue sur eux... comme les cieux. Tous les temples de Thèbes étaient transformés en marécages 5». La date montre clairement qu'il ne s'agit pas d'une crue saisonnière du Nil, « Cette date du calendrier attribuée au maximum d'intensité de l'inondation ne correspond pas du tout à la saison où il la place 6. »

Un peu avant la catastrophe, Amos prophétisa qu'aucun lieu ne fournirait de refuge, pas même le mont Carmel, où abondent les grottes. « S'ils montent aux cieux, Je les en ferai descendre ; Q'ils se cachent au sommet du Carmel, J'irai les y chercher, et les en retirer. » (IX, 2-3).

La terre sera dissoute, et la mer gonflera, et se répandra sur les pays habités. « Le Seigneur, dieu des armées, touche la terre qui se dissout... Celui qui appelle les eaux marines et les répand sur la surface de la terre. » (IX, 5-6).

Amos fut persécuté, et mis à mort. Mais le cataclysme se produisit à son heure. Le roi Osias,

pris d'une frayeur anticipée, se rendit au temple, pour y brûler l'encens 7. Les prêtres s'opposèrent à cette usurpation de leurs fonctions : « Brusquement, la terre se mit à trembler si violemment qu'une grande brèche s'ouvrit dans le temple. Du côté Ouest de Jérusalem, la moitié d'une montagne fut arrachée et projetée à l'Est 8. » « Des séraphins de feu bondissaient dans l'air 9. »

Les tremblements de terre se produisent brusquement, et la population, qui n'en peut être prévenue, n'a pas le temps de s'enfuir. Or, avant le raash d'Osias, la population avait fui des villes, et s'était réfugiée dans les grottes et les crevasses des rochers. Bien des générations plus tard, dans la période postérieure à l'Exil, on rappelait encore comment « la population avait fui devant le raash, au temps d'Osias, roi de Juda 10 ».

L'année 747 avant J.-C.

Si la commotion de l'époque d'Osias se manifesta sur le globe entier, et fut provoquée par un agent extra-terrestre, elle dut perturber la rotation de la terre sur son axe, et sa révolution sur son orbite. Cette perturbation eût rendu inutilisable le calendrier de l'époque, donc nécessité sa refonte.

En 747 avant J.-C., un nouveau calendrier fut introduit dans le Moyen-Orient, et cette année marque « le début de l'ère de Nabonassar ». On soutient que quelque événement astronomique fut à l'origine du nouveau calendrier, mais on ne sait rien de la nature de cet événement. Le début de l'ère de Nabonassar, roi de Babylone par ailleurs obscur, était une date astronomique, qui fut employée jusqu'au second siècle de notre ère par Ptolémée, le grand mathématicien et astronome de l'école d'Alexandrie et par d'autres savants. Il servait de point de départ aux anciennes tables astronomiques.

« Ce n'était pas une époque politique ou religieuse... Avant elle on ne savait rien de certain sur le calcul du temps. C'est à partir de ce moment qu'on entreprit de dresser un tableau des éclipses, que Ptolémée utilisa 1.» Quel événement astronomique mit fin à la période précédente et inaugura la nouvelle ?

D'après les calculs rétrospectifs, il n'y a pas eu d'éclipses du soleil dans la région assyro-babylonienne entre les années 762 et 701 avant J.-C. 2, si du moins la terre a depuis lors ponctuellement accompli sa rotation et sa révolution, ce qu'on considère comme indiscutable.

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Osias régna approximativement entre 789 et 740 avant J.-C. 3. Atteint de la lèpre au cours des dernières années de son règne, immédiatement après le raash, il fut isolé comme les autres lépreux. Il semble bien que ce soit le bouleversement contemporain de ce roi qui sépara les deux ères, puisque le temps se calculait « à partir de la commotion du temps d'Osias 4 ».

Si cette conclusion est exacte, le bouleversement se produisit en 747. On a même calculé que la nouvelle ère commença le vingt-sixième jour de février; mais cette date doit être reconsidérée, car d'autres perturbations cosmiques eurent lieu au cours des décades qui suivirent l'année 747. Il est intéressant de signaler que les anciens habitants du Mexique célébraient la nouvelle année le jour qui correspond, dans le calendrier julien, à cette même date : « le premier jour de leur année était le 26 février 5 ».

Le moine byzantin Georgius Syncellus, autorité en matière de chronologie ancienne, faisait coïncider la quarante-huitième année d'Osias avec la première année de la première Olympiade 6. Mais, d'après des calculs récents, la première année de la première Olympiade était 776 7. Il est donc très probable que l'inauguration des Olympiades se trouva coïncider avec quelque événement cosmique.

L'ancien livre chinois de Shiking fait allusion à un phénomène céleste survenu au temps du roi Yen-Yang, en 776 : le soleil fut obscurci 8. Si l'événement de 776 fut de même nature que celui de 747, la prophétie d'Amos se fondait alors sur une expérience antérieure.

Isaïe

D'après les sources hébraïques 1, Isaïe commença ses prophéties aussitôt après la « commotion » d'Osias, peut-être le jour même. Le pays avait subi des destructions considérables. « Votre pays est dévasté, vos villes sont incendiées... Si le Seigneur des armées ne nous eût laissé un résidu, nous serions comme Sodome, nous ressemblerions à Gomorrhe » (I, 7, et suiv.). Les environs immédiats de Jérusalem étaient méconnaissables, la montagne à l'Ouest de la ville s'était scindée, et les villes étaient emplies de décombres et de corps mutilés. « Les montagnes tremblent; les cadavres... gisent dans les rues » (V, 25).

Tel était l'événement qui alluma l'ardeur prophétique d'Isaïe. Au cours de sa longue vie (« il connut les règnes d'Osias. de Joatham, d'Achaz et d'Hézéchias, rois de Juda »), il ne cessa de prédire le retour des catastrophes cosmiques. Isaïe possédait une remarquable connaissance des étoiles et, apparemment, il savait qu'à des intervalles réguliers, - tous les quinze ans - un cataclysme se produisait, provoqué, croyait-il, par le Messager de Dieu. « Sa colère ne s'apaise point, et sa main (signe 2) reste prête à s'abattre. Il élèvera une bannière pour appeler une nation lointaine. » (V, 25-26).

Isaïe évoquait l'image apocalyptique de la ruée des troupes ennemies. Quand il parlait de l'armée qui arriverait du bout du monde à l'appel du Seigneur, faisait-il allusion à un peuple de guerriers cruels et puissants, ou bien à une armée de projectiles lancés de très loin ? Les sabots de leurs chevaux seraient durs comme le silex, et les roues de leurs chars ressembleraient à l'ouragan. « Quand on regardera la terre, on ne verra que ténèbres et angoisse, et au ciel se répandront de sombres nuées.» (V, 30).

Ce ne sont pas les chevaux et les chars des Assyriens qui sont comparés au silex et à l'ouragan, mais bien le silex et l'ouragan qui sont comparés aux guerriers 3. Les ténèbres évoquées en conclusion du tableau révèlent à la fois les termes et l'objet de la comparaison.

Le cataclysme contemporain d'Ozias n'était qu'un prélude : le Jour de Courroux reviendra, et détruira les populations, « jusqu'à ce que les villes soient dévastées et sans habitants » (VI, II). Les grottes étaient partout considérées comme les meilleurs refuges : « Réfugiez-vous dans les creux des rochers, et dans les antres de la terre, sous le coup de la terreur du Seigneur, et sous l'éclat de sa Majesté, quand il se lèvera pour terrifier la terre.» (II, 19).

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Isaïe alla trouver le roi Achaz, et lui offrit un signe venant de la terre ou « de là-haut ». Achaz refusa : « je ne veux rien demander, je ne veux pas mettre le Seigneur à l'épreuve. (VII, 12).

Alors, Isaïe se tourna vers le peuple : « On regardera la terre, et on ne verra que détresses, obscurité, ténèbres angoissantes.» (VIII, 22). Néanmoins, déclare-t-il dans cette prophétie, les ténèbres seront moins opaques qu'au cours des deux catastrophes antérieures, et les désastres moins importants. Mais, peu après, il changea d'opinion, et se fit très pessimiste.

« Par le courroux du Seigneur, le pays est en feu, et le peuple deviendra la proie des flammes » (IX, 19). « De sa baguette, il soulèvera les eaux de la mer, comme au jour du Passage de la mer Rouge » (X, 26). « Le Seigneur mettra à sec le bras de mer d'Egypte; de son souffle ardent, il étendra la main sur le fleuve, il le divisera en sept bras que l'on pourra traverser à gué. » (XI, 15). Et la Palestine ne sera pas non plus épargnée Il lèvera la main... sur la colline de Jérusalem » (X, 32).

Ainsi, les troupes célestes commandées par le Seigneur déclarent la guerre aux nations de la terre. Et celles-ci attendaient dans l'angoisse le Jour du Jugement Dernier. « Ecoutez ce grondement sur les montagnes, comme le bruit d'une foule immense; écoutez le tumulte des royaumes, des nations assemblées : c'est le Seigneur des armées, qui passe en revue ses troupes pour la bataille. » (XIII, 4). Cette multitude « arrive de l'extrémité des cieux, le Seigneur et les instruments de son courroux, pour ravager toute la terre » (XIII, 5). Le monde sera plongé dans les ténèbres : « Ni les étoiles du ciel, ni les constellations brillantes, ne feront resplendir leur lumière » (XIII, 10).

La terre sera arrachée à son axe : les troupes célestes feront « chanceler les cieux, la terre ébranlée sera secouée par le courroux du Seigneur, Dieu des armées, au jour de son ardente fureur » (XIII, 13).

Les nations fuiront « au loin, comme sur les hauteurs la balle chassée par le vent, comme la poussière soulevée par la tempête » (XVII, 13).

Isaïe, pendant ses vigiles, observait le ciel, et aux « époques désignées », il attendait le « nuage de fumée », qui devait venir du Nord (XIV, 31).

« Vous qui habitez le monde... quand l'étendard se dressera les hauteurs, regardez : quand on sonnera de la trompe, écoutez » (XVIII, 3). Tous les habitants de la terre tournaient leur regard vers le ciel, et ils écoutaient les entrailles de la terre.

De Seir en Arabie, on envoya des messagers à Jérusalem, s'informer auprès d'Isaïe : « Guetteur, où en est la nuit ? ». De son poste de guet, Isaïe communiquait ses prédictions aux messagers (XXI, 5-11),

La tension nerveuse grandissait à l'approche de l' « heure assignée ». A la moindre rumeur, la population des villes montait sur les terrasses des maisons : « Qu'as-tu donc à monter en foule sur les terrasses ? » (XXII, I ).

Les tremblements de terre presque continuels avaient endommagé une grande partie de la ville de David, lézardé beaucoup de maisons (XXII, 9). Le prophète effrayait la population, en lui rappelant continuellement « le jour de déroute... de confusion, envoyé par le Seigneur, Dieu des armées » durant lequel, « les murs s'écroulent, et où l'on crie vers les montagnes » (XXII, 5). Mais beaucoup gardaient l'attitude de ceux qui, à la veille du Jugement Dernier, disent : « Mangeons et buvons; car demain, nous mourrons » (XXII, 13).

Joël, qui prophétisait en même temps, jetait le même cri d'alarme : « Je ferai paraître des prodiges dans le ciel et sur la terre, sang, feu, tourbillons de fumée; le soleil tournera en ténèbres, la lune en sang, à l'approche du grandiose et redoutable jour du Seigneur. » ( Joël, III, 35).

Michée, autre prophète « du temps de Joatham, d'Achaz, et d'Ezéchias, rois de Juda », proclamait que le jour était proche où « fondront les montagnes, se dissoudront les vallées,

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comme la cire au feu » (Michée, I, 4). « Des prodiges » se produiront, comme aux jours où Israël quitta l'Egypte : « A cette vue, les nations seront couvertes de honte en dépit de leur puissance... Leurs oreilles seront assourdies; déroutées, elles sortiront de leurs repaires ». (Michée, VII, I5-17).

Les prophéties de Joël, Michée et Amos annonçaient en des termes similaires l'arrivée d'un jour de ténèbres opaques, « d'un jour assombri par la nuit ». Les astronomes interprétèrent plus tard ces prophéties comme des allusions à une banale éclipse de soleil; mais ils exprimaient leur étonnement, car « de 763 à 586 av. J.-C., date de la destruction du premier temple, il n'y a pas eu d'éclipse totale du soleil, visible en Palestine 4 ». Ils admettaient une fois pour toutes que la terre suit strictement la même orbite, et que son axe n'effectue qu'un léger mouvement de rotation. Alors, se demandaient-ils, pourquoi les prophètes ont-ils parlé d'une éclipse qui n'a jamais existé ? Nous avons d'autres descriptions des cataclysmes que prédirent les prophètes, et qui sont loin de correspondre aux effets d'une simple éclipse de soleil.

Le Talmud 5, explique que le mot Shaog, employé par Amos et Joël, désigne un séisme qui fut ressenti du globe entier, alors qu'un tremblement de terre ordinaire n'a que des effets locaux. Ce grand ébranlement de la terre, dû aux perturbations de sa rotation, se traduisait d'autre part, pour ceux qui en furent témoins, par un « ébranlement du ciel », expression qu'on trouve dans les Prophètes, dans les textes babyloniens, et dans maint autre document.

Alors la prophétie s'accomplit : au milieu du fracas de la catastrophe, Isaïe éleva la voix :

« L'épouvante, la fosse et le filet (la poix) 6 vont te saisir, habitant de la terre... car les écluses s'ouvriront là-haut, et les fondements de la terre branleront. La terre est mise en pièces, elle craque et se fend, la terre est secouée, la terre chancelle » (Isaïe, XXIV, I7-20).

Le cataclysme se produisit au jour des funérailles du roi Achaz. Il y eut une « commotion », l'axe de la terre fut dévié ou bascula, et le coucher du soleil fut en avance de plusieurs heures.

Le Talmud, les Midrashim décrivent cette perturbation cosmique, et les pères de l'Eglise y ont fait allusion 7. Les documents et les témoignages oraux de nombreux peuples l'évoquent aussi. Il semble qu'un corps céleste frôla notre planète; sa direction, semble-t-il, était la même que celle de la terre, sur son côté obscur.

« Voici que le Seigneur dévaste la terre et la rend déserte, il en bouleverse la face et en disperse les habitants... les habitants de la terre sont consumés, un petit nombre d'hommes survit ». (Isaïe, XXIV, I-6.).

Les tyrans d'Argos

Dans « Ages in chaos », j'apporterai la preuve que les grands monuments de pierre brute de Mycènes et de Tirynthe dans la plaine d'Argolide, en Grèce, sont les ruines des palais des tyrans d'Argos : ils datent du VIIIe siècle avant notre ère, et les Grecs en conservèrent longtemps un vif souvenir. Si l'on situe au second millénaire les vestiges des palais de Mycènes et de Tirynthe, il en découle que l'on n'a encore rien retrouvé sur la plaine d'Argolide qui puisse être attribué aux tyrans d'Argos, et pourtant l'on sait qu'ils édifièrent d'immenses palais.

Thyeste et son frère Atrée furent deux de ces tyrans; comme ils vivaient au VIIIe siècle, ils ont dû être témoins du cataclysme cosmique du temps d'Isaïe. justement, la tradition grecque affirme qu'un cataclysme cosmique se produisit sous leur règne : le soleil modifia sa course, et le jour s'acheva avant l'heure accoutumée.

Archiloque écrivait que les hommes devraient être prêts à tout, et ne s'étonner de rien, depuis le jour où « Zeus, cachant l'éblouissante lumière, fit venir la nuit à midi; alors, les hommes connurent la peur 1 ».

Beaucoup d'auteurs classiques ont fait allusion à cet événement. Sénèque, par exemple : dans son drame Thyeste, le chœur demande au soleil : « Où donc, père de la terre et des cieux,

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devant lequel l'opaque nuit, avec toutes ses gloires, s'enfuit, où donc as-tu dirigé ta course, pour obscurcir le jour au milieu de l'Olympe ( midi ) ? Vesper, messager du crépuscule, ne convoque point encore les feux de la nuit; les roues de ton char, ayant atteint leur but occidental, ne libèrent point tes coursiers, leur tâche accomplie; la troisième trompette n'a point encore retenti, que le jour déjà se dissout dans la nuit; le laboureur, ses bœufs encore pleins de vigueur, demeure stupéfait à l'approche prématurée de l'heure de son souper. Qui t'a chassé de ta course céleste ? Typhœus (Typhon) a-t-il libéré son corps prisonnier, en rejetant de lui les énormes montagnes 2 ? »

Cette description nous rappelle celle des funérailles d'Achaz. Sénèque évoque la crainte du cataclysme qui s'empare des contemporains d'Atrée et de

Thyeste. Les hommes étaient paralysés de terreur, en présence de ce coucher de soleil intempestif. « Les ténèbres se lèvent, bien que la nuit ne soit pas prête encore. Nulle étoile ne paraît ; la lueur d'aucun feu céleste n'éclaire le firmament; nulle lune ne vient repousser l'épais linceul de la nuit... Tous nos cœurs tremblent, tremblent sans fin, tenaillés par la peur; toutes les choses vont-elles s'abîmer en une ruine fatale, et, une fois encore, les dieux et les hommes vont-ils être submergés par le chaos informe ? Les terres, et leur ceinture marine, et les étoiles errant au ciel constellé, la nature va-t-elle une fois encore, les détruire ? »

Les saisons vont-elles s'achever, et la lune être entraînée à jamais ? « Les étoiles ne marqueront plus de leurs signes la fin de l'été et la fin de l'hiver. Et la Lune, miroir des rayons de Phœbus, ne repoussera plus les terreurs de la nuit ».

Après la catastrophe survenue aux jours d'Atrée et de Thyeste, les astres coupèrent obliquement leur trajectoire primitive; les pôles furent déplacés; l'année eut une durée plus longue, et l'orbite de la terre s'élargit.

« Le Zodiaque qui se fraye un passage à travers les étoiles sacrées, et traverse obliquement les Zones - guide et enseigne des années au lent cours - tombera lui-même, et dans sa chute, verra les constellations abîmées dans l'espace ».

Sénèque décrit le changement de position de chaque constellation - le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion, le Capricorne, le Chariot (la Grande Ourse). « Et le Chariot, qui jamais ne s'était baigné dans la mer, sera plongé sous les vagues qui engloutissent tout ». Un commentateur s'étonna de cette description de la position de la Grande Ourse : « Il n'y avait aucune raison mythologique pour que le Chariot - autrement dit la Grande Ourse - ne se baignât pas dans l'Océan 3 ». Mais Sénèque a précisément fait cette étrange déclaration : la Grande Ourse - ou l'une de ses étoiles - ne s'est jamais couchée au-dessous de l'horizon, si bien que l'Etoile Polaire se trouvait parmi ses étoiles pendant l'époque qui s'acheva sous les tyrans d'Argos.

D'autre part, Sénèque déclare nettement que les pôles furent arrachés de leur place au cours de ce cataclysme. L'axe des pôles est maintenant orienté vers l'une des étoiles, l'étoile Polaire, qui appartient à la Petite Ourse.

En présence de ce cataclysme qui terrifiait l'humanité entière, Thyeste, appelant la mort du fond de son désespoir, vint à souhaiter l'anéantissement de l'univers, dans un chaos cosmique. Le tableau n'est pas une invention de Socrate; il était devenu familier aux hommes, car il ne faisait que représenter des événements antérieurs réels.

« 0 toi, maître supérieur des cieux, qui sièges en ta majesté sur le trône céleste, enveloppe l'univers entier dans de terribles nuages, déchaîne la guerre entre les vents, et fais rouler le puissant tonnerre dans toutes les régions du ciel : non de cette main qui frappe de ses foudres les moins brutales les habitations et les demeures innocentes, mais de cette main qui fait s'écrouler les triples masses des montagnes, ... déchaîne ces armes, et lance tes feux de toute ta violence ».

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Revenons à Isaïe

Les jours passaient après la mort d'Achaz, et la quatorzième année du règne d'Ezéchias approcha. Le inonde angoissé redoutait un nouveau cataclysme. Déjà, par deux fois, le projectile céleste avait frôlé la terre de bien près. Cette fois-ci, on s'attendait à la fin du monde. Après les cataclysmes du temps d'Ozias et d'Achaz, il n'était point besoin d'être prophète pour prédire un nouveau cataclysme cosmique. La terre quittera sa place, une flamme ardente dévorera l'air, des pierres brûlantes tomberont du ciel, et les eaux des mers se dresseront pour retomber sur les continents.

«Voici venir de par le Seigneur un homme fort et puissant, comme une averse de grêle, un ouragan destructeur; comme des trombes d'eau qui s'abattent avec violence, qu'il précipite à terre ». (Isaïe, XXVIII, 2).

« L'homme fort et puissant » était un corps céleste, le projectile du Seigneur. Une fois de plus, il était destiné à châtier la terre. « Le fléau débordant passera. » (XXVIII, 18), telle était la nouvelle prophétie d'Isaïe. Encore que le peuple de Jérusalem proclamât son espérance « le fléau passera sans nous atteindre » (XXVIII, 15), il n'avait pas fait de pacte avec la Mort 1.

Il n'y aura pas de refuge possible. « Les eaux noieront le refuge illusoire » (XXVIII, 17). « Un arrêt de ruine, de par le Seigneur, contre tout le pays » (XXVIII, 22).

« Car le Seigneur... frémira comme en la vallée de Gabaon, pour accomplir son oeuvre, son oeuvre singulière, pour exécuter son travail, son travail inouï » (XXVIII, 21).

Quel était le « travail inouï » de la vallée de Gabaon ? En cette vallée, l'armée de Josué assista à une pluie de bolides, et vit la lune et le soleil immobilisés dans le firmament.

« Tout à coup, le pays sera envahi de « poussière ténue » avec force tonnerre, tremblements de terre, et fracas, tempête, ouragan, flammes d'un feu dévorant » (XXIX, 5-6).

« Un feu dévorant », « un torrent qui déborde », « vient passer les nations au crible destructeur », avec « l'averse et la grêle » (XXX, 27-30).

Le prophète, déchiffrant les signes du ciel, assumait le rôle de sentinelle de l'univers, et de son poste de garde à Jérusalem lançait l'alarme :

« Que la terre écoute... car le Seigneur est indigné contre toutes les nations... il les a vouées au massacre » ~(XXXIV, I-2).

Il dressait ensuite le tableau désolé de la terre détruite, et du ciel en état de dissolution : (XXXIV, 4, et suiv.) :

« Les cieux s'enroulent comme un livre, Et toute leur armée tombera... Dans les cieux, l'épée du Seigneur... Les torrents du pays se tourneront en poix, Et sa terre en soufre ; Le sol y deviendra de la poix, Qui brûlera nuit et jour, Jamais il ne s'éteindra ».

Isaïe renvoyait ses lecteurs à la description de ces fléaux dans le « Livre du Seigneur » :

« Cherchez au Livre du Seigneur : Il n'en manque pas un » (XXXIV, 16). Ce livre appartenait probablement à la même série que le Livre du juste, qui contient le récit des événements dont Josué fut témoin à Gabaon; de vieilles traditions, et des observations astronomiques devaient être consignées dans le Livre du Seigneur, aujourd'hui disparu.

Maimonide et Spinoza, les Exégètes

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Ego sum Dominus, faciens omnia, extendens caelos solus, stabiliens terram, et nullus mecum. Irrita faciens signa divinorum, et ariolos in furorem vertens. Convertens sapientes retrorsum : et scientiam eorum stultam faciens. Prophetiae Isaiae

XLIV, 24-25 (Vulgate). Avant que d'aborder la description de cette journée où s'accomplirent les prophéties faites

par Isaïe après la mort d'Achaz, j'aimerais présenter l'opinion commune à de nombreuses générations de commentateurs. Peu de savants ont eu entre les mains les livres des Mayas, non plus que les papyrus égyptiens, ou les tablettes d'argile des Assyriens. Mais le livre d'Isaïe et les autres livres des Ecritures ont été lus par des milliers de personnes, en des centaines de langues, pendant des siècles. La manière dont s'exprime Isaïe est-elle vraiment obscure ? C'est par un phénomène psychologique d'aveuglement collectif qu'on n'a pas compris les descriptions claires et cent fois répétées des phénomènes astronomiques, géologiques et météorologiques. On a vu en elles une espèce particulière de métaphore poétique, qui s'exprimait en une langue fleurie.

L'examen, même rapide, des ouvrages des différents commentateurs d'Isaïe déborderait les limites d'un ouvrage plus important que celui-ci. Nous nous contenterons donc de citer l'opinion de deux grands maîtres de la pensée, en négligeant les milliers d'autres commentateurs.

Maimonide, en arabe Mocheh Ben Maimoum, (1135-1204) écrit dans le Guide des Egarés 1, que la croyance en la Création est un dogme fondamental de la religion juive. « Mais nous ne considérons pas comme un article de foi que l'univers doive retomber au néant. » « Cela dépend de Sa Volonté. » « Par conséquent, il est possible qu'Il préserve l'univers éternellement. » « La croyance en la destruction ne se trouve pas nécessairement impliquée dans la croyance en la création. » « Une moitié de la théorie d'Aristote nous paraît juste ... Son opinion est que l'univers étant permanent, est indestructible ; il n'aura pas plus de fin qu'il n'a eu de commencement. »

En abordant ainsi le problème, il était naturel que Maimonide répugnât à accepter dans leur sens littéral les mots et les phrases des Prophètes, et des autres livres de la Bible, où étaient annoncés la destruction du monde, ou quelque altération de son harmonie 2. Selon lui, ces expressions n'étaient que la traduction en style poétique d'idées et de faits politiques.

« Les étoiles sont tombées », « le ciel est renversé », « le soleil est assombri», « la terre est dévastée et tremble » : ces formules, dit Maimonide, sont « employées fréquemment par Isaïe, moins souvent par les autres Prophètes, pour évoquer la chute d'un royaume ». Dans ces versets, le mot « humanité » revient de temps à autre : c'est encore là une métaphore, soutient Maimonide : « quelquefois les prophètes emploient le mot « humanité », au lieu de « le peuple d'un certain endroit », dont ils prédisent la destruction; par exemple, Isaïe, annonçant la destruction d'Israël, déclare : «jusqu'à ce que le Seigneur ait chassé l'homme » (VI, 12) ; de même Sophonie : « J'extirperai l'homme de la surface du monde » (I, 3-4).

Il prétend, en appliquant la méthode critique réaliste des aristotéliciens, qu'Isaïe et les autres Prophètes d'Israël avaient une tendance naturelle à l'hyperbole, et qu'au lieu de dire « Babylone tombera » ou « est tombée», ils parlaient de fantastiques bouleversements cosmiques.

« Quand Isaïe reçut de Dieu la mission d'annoncer la destruction de l'Empire babylonien, la mort de Sennachérib et celle d'un de ses successeurs, Nabuchodonosor 3, il se mit à décrire leur chute en ces termes : « Ni les étoiles du ciel, ni ses constellations brillantes ne feront resplendir leur lumière » (XIII, 10); et plus loin : « Je vais faire chanceler les cieux, la terre ébranlée sera

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secouée par le courroux du Seigneur Dieu des armées, au jour de son ardente fureur » (XIII, 13). je ne crois pas qu'on puisse être si insensé ou si aveugle pour accepter le sens littéral de ces expressions métaphoriques et oratoires, et prétendre qu'à la chute du Royaume de Babylone, la nature des étoiles, la lumière du soleil et de la lune se trouvèrent altérées, ou que la terre fut perturbée. Tout ceci n'est que l'image d'un pays vaincu : ses habitants, sans aucun doute, trouvent obscure toute lumière, et amères toutes douceurs; la terre leur paraît trop étroite, et les cieux différents ».

« Il use d'expressions semblables... quand il évoque la perte de tout le pays d'Israël, lorsqu'il tomba au pouvoir de Sennachérib « ... Car les écluses s'ouvriront là-haut, et les fondements de la terre branleront. La terre est mise en pièces, elle craque et se fend, la terre est secouée, la terre chancelle comme un homme ivre » (Isaïe, XXIV, 18-20).

Certes, l'assujettissement de Juda par l'Assyrie n'était pas un événement joyeux, mais que pouvait donc trouver Isaïe de si néfaste dans la destruction de Babylone, pour qu'il s'exclamât « Les étoiles cesseront de briller » ?

A la lecture de leurs œuvres, on se rend compte qu'aucun exégète n'a été assez « insensé et aveugle » pour se borner à adopter le sens étroit des mots, cieux, étoiles, soufre, feu ou tempête 4. Maimonide, à propos des versets ci-dessus cités (Isaïe, XXXIV, 4-5), écrit : « Comment quiconque a des yeux pour voir peut-il trouver dans ces versets une expression obscure, qui l'induirait à penser qu'ils désignent des événements cosmiques à venir ? ... Le prophète veut dire que certains personnages, pareils aux étoiles de par leur position permanente, élevée et immuable, connaîtront une chute rapide. »

Maimonide cite Ezéchias, Joël, Amos, Michée, Aggée, Habacuc, les Psaumes; dans des versets semblables à ceux d'Isaïe déjà cités, il découvre par hasard la description de la « nuée de sauterelles »; il y voit une évocation de la destruction de Samarie, ou « celle des Mèdes et des Perses » présentée « en métaphores parfaitement intelligibles pour ceux qui comprennent le contexte ».

Rien ne peut déranger l'harmonie d'un monde bien ordonné. Pour étayer cette thèse, les prophéties ont été considérées comme des métaphores, car, selon Maimonide, si l'harmonie du monde est immuable, les vrais prophètes n'ont pu affirmer le contraire. « Notre opinion, à l'appui de laquelle nous avons cité ces passages, écrit Maimonide, est bien établie : aucun prophète, ni aucun sage, n'a jamais annoncé la destruction de l'univers, le changement de sa condition actuelle, ou l'altération permanente d'aucune de ses propriétés. » Cette théorie de Maimonide, qui nie le changement dans l'univers, est une déduction, non des textes qu'il interprète, niais d'une conception philosophique posée a priori. Les prophètes ont pu se tromper dans leurs oracles, mais il semble invraisemblable que par « étoiles », ils aient voulu dire « personnes ». Si on lit les chapitres XXXVI à XXXIX d'Isaïe, les chapitres correspondants des Rois et des Chroniques, et d'autre part les fragments du Talmud, et du Midrash sur l'invasion de Sennachérib, on acquiert la certitude qu'en cette occasion du moins, les prophètes ne se trompèrent pas, et que l'harmonie du monde fut réellement bouleversée à l'époque d'Ezéchias, du temps même des Prophètes.

Maimonide affirme que les prophéties de Joël se rapportaient à Sennachérib; mais il est contraint d'avouer quelque étonnement : « Vous allez peut-être objecter : Comment, si l'on accepte votre interprétation, le jour qui vit la chute de Sennachérib peut-il être nommé « le grand, le terrible jour du Seigneur » ?

je montrerai dans les pages suivantes qu'aux heures qui précédèrent la nuit où l'armée de Sennachérib fut détruite, l'ordre naturel fut bouleversé. Les prophéties doivent être interprétées non en elles-mêmes, mais à la lumière des descriptions que les Ecritures et le Talmud nous font de ces bouleversements. Les commentateurs antérieurs à Maimonide semblaient avoir plus d'intuition, et c'est à leur propos qu'il écrivit :

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« L'univers poursuit depuis lors son cours régulier. Telle est mon opinion. Telle devrait être notre croyance. Nos sages cependant disaient des choses bien étranges au sujet des miracles : ainsi, le Bereshith Rabba, et le Midrash Koheleth affirment que les miracles, dans une certaine mesure, sont naturels. »

Baruch Spinoza part de l'hypothèse que « la nature observe toujours des lois et des règles...

bien qu'elles ne nous soient pas toutes connues, et par conséquent, elle garde un ordre fixe et immuable ». Les « miracles » ne sont que des événements dont on ne peut expliquer la cause naturelle. « Dans la mesure où un miracle est supposé détruire ou interrompre l'ordre de la nature ou ses lois, non seulement il ne nous donne aucune connaissance de Dieu, mais au contraire... il nous fait douter de Dieu et de tout le reste. » « Ce que les Ecritures entendent par miracle ne peut être que I'œuvre de la nature 5 ».

Toutes ces prémisses sont philosophiquement exactes, et aucune objection ne peut leur être opposée. Naturellement elles ne sont valables qu'autant que le philosophe se refuse à prétendre que les lois naturelles connues de lui sont les seules lois véritables.

Spinoza, dans son examen de certains passages des Ecritures, applique pareils principes, et déclare nettement que les événements surnaturels qui y sont décrits s'expliquent uniquement par la subjectivité de la perception, et le mode particulier d'expression, des anciens Hébreux.

« je me bornerai à un exemple emprunté aux Ecritures, et laisserai le lecteur juge du reste. Au temps de Josué, les Hébreux croyaient communément que le soleil se déplace en un mouvement quotidien, tandis que la terre demeure fixe. Ils adaptèrent à cette opinion préconçue le miracle qui se produisit au cours de la bataille avec les cinq rois. Ils n'affirment pas seulement que le jour fut plus long que d'habitude, mais aussi que le soleil et la lune s'immobilisèrent, ou cessèrent leur mouvement ».

Et il en conclut que « tant pour des raisons religieuses, que sous l'influence d'idées préconçues, les Hébreux imaginèrent et relatèrent un événement totalement différent de l'événement réel ». « Il est nécessaire de connaître l'opinion de ceux qui firent le récit premier de cet événement... et de distinguer ces opinions de la véritable impression faite sur nos sens, autrement nous confondrons opinions et jugements avec le miracle, tel qu'il se produisit vraiment; allons même plus loin, nous confondrons les événements véritables avec des événements symboliques et imaginaires. »

Spinoza cite comme autre exemple le Livre d'Isaïe, et particulièrement le chapitre qui contient la prophétie de la chute de Babylone. « Les étoiles du ciel... ne feront pas resplendir leur lumière; le soleil s'obscurcira dès son lever, la lune n'enverra plus sa lumière ». Et le philosophe écrit : « je suppose que personne n'imagine qu'à la chute de Babylone, ces événements se sont véritablement produits, ni n'ajoute foi aux paroles du Prophète : « je vais faire chanceler les cieux, la terre ébranlée sera secouée. » Beaucoup d'événements bibliques doivent être considérés comme des expressions purement juives ». « Les Ecritures emploient le style le plus propre à émouvoir les hommes, et en particulier les hommes simples... Elles parlent donc de Dieu et des événements en termes inexacts. »

Encore qu'il accuse les témoins de subjectivité, et les écrivains hébreux de l'intention d'impressionner le lecteur ou l'auditeur par des descriptions sensationnelles, Spinoza arrive néanmoins à un non sequitur : « Tous ces textes enseignent clairement que la nature garde un ordre fixe et immuable... Nulle part les Ecritures n'affirment que certains événements sont en contradiction ou en désaccord avec les lois naturelles », et il appuie son point de vue sur un argument théologique : il est écrit au Livre de l'Ecclésiaste : et je sais que ce que Dieu fait sera éternellement. »

C'est parce qu'il était impossible de trouver d'autre interprétation, que les événements furent dénommés miracles, et furent expliqués par la subjectivité des perceptions, et le symbolisme de

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leur narration. Mais en dehors même des faits que cette étude s'efforce d'établir comme historiques, les paroles d'Isaïe et des autres Prophètes de l'Ancien Testament ne permettent pas de douter que les « pierres tombées du ciel » désignaient en vérité des météorites; le soufre et la poix étaient du vrai soufre et de la vraie poix; le souffle de feu brûlant, la tempête et l'ouragan, le soleil obscurci, la terre ébranlée, le dérangement du temps et des saisons étaient l'exacte représentation d'une perturbation dans le comportement régulier de la nature.

Sur quoi se fonde « la certitude » que le mouvement de la terre ne subit aucun dérangement, alors que tous les éléments du système solaire se perturbent plus ou moins les uns les autres ? jusqu'à la chute des météorites en 1803, la science affirmait que les blocs tombés du ciel étaient un mythe.

Le « personne n'imagine » de Spinoza ne correspond plus à la vérité. L'auteur de ce livre, en tout cas, infirme ce jugement.

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Chapitre 2

L'an 687 avant J.-C.

Vers 722, Samarie, capitale des dix tribus, fut prise par Sargon II après trois ans de siège, et la population du Royaume Nord, Israël, fut emmenée en captivité par ses vainqueurs, et n'en revint jamais.

Aux environs de 701, Sennachérib, fils de Sargon, entreprit la troisième campagne de son règne. Elle était dirigée contre la Palestine, au Sud; l'histoire de toutes les campagnes de Sennachérib est gravée en caractères cunéiformes sur des tablettes d'argile cuite. Le document appelé « prisme Taylor » contient le récit de huit campagnes de Sennachérib. Celui-ci relatait en ces termes sa marche à la victoire : « Les roues de mon char de guerre étaient couvertes de fange et de sang ».

Le récit de la troisième campagne inscrit sur le prisme correspond à la narration du second livre des Rois (XVIII, 13-16). Selon les deux sources, Sennachérib prit de nombreuses cités. « Le fier Ezéchias, roi de Juda », fut « enfermé comme un oiseau en cage » dans sa capitale Jérusalem; mais Sennachérib ne s'empara pas de Jérusalem. Il se contenta d'un tribut d'or et d'argent 1, qui lui fut envoyé à Lachish, en Palestine du Sud après quoi, il partit avec son butin.

Ezéchias ne pouvait que se soumettre : les moyens dont il disposait pour défendre le pays étaient insuffisants ; dès le départ de Sennachérib, persuadé que ce n'était là qu'une trêve, il se mit à construire des forteresses qu'il garnit de troupes, et se tint prêt à obstruer ou détruire les sources et les ruisseaux à la première alarme; ces préparatifs sont décrits au second Livre des Chroniques (XXXII, I-6).

Sennachérib, alarmé par la rébellion d'Ezéchias qui s'était allié au roi d'Ethiopie et d'Egypte Taharqou revint avec son armée, et à nouveau installa son quartier général près de Lachish. L'un des capitaines de Sennachérib, Rab-sha-keh, vint à Jérusalem. Il s'adressa en hébreu aux émissaires d'Ezéchias, et à voix forte, pour que la foule massée sur les murs pût l'entendre (Isaïe, XXXVI, 18). « Qu'Ezéchias ne vous abuse pas en vous disant que le Seigneur vous aidera. Les dieux des autres nations ont-ils délivré leur pays des mains du roi d'Assyrie ? » Il leur dit aussi de se rappeler le sort de Samarie, que les dieux n'avaient pas sauvée lorsqu'elle avait été attaquée par les Assyriens. Il ajoutait que Sennachérib exigeait des témoignages de soumission, et promettait de les emmener en déportation sur une terre aussi bonne que la leur. Les émissaires d'Ezéchias ne répondirent rien, comme il leur avait été ordonné. Rab-sha-keh rejoignit alors son souverain, qui avait quitté Lachish, et assiégeait Lobna. Le roi d'Ethiopie Taharqou franchit la frontière égyptienne, et se prépara à livrer combat à Sennachérib. Rab-sha-keh, une seconde fois, somma Ezéchias de se soumettre : « Ne te laisse pas duper par le dieu à qui tu te fies en t'imaginant que Jérusalem ne sera pas livrée aux mains du roi d'Assyrie ».

La prophétie d'Isaïe affirmait que Jérusalem ne tomberait pas entre les mains du roi d'Assyrie, et que le roi qui outrageait le Seigneur serait détruit par « un souffle» envoyé par Lui.

Les Ecritures, par trois fois, présentent une relation très détaillée des événements (Rois, Livre II, 18-20 ; les Chroniques, Livre II, 32 ; et Isaïe, chapitres XXXVI-XXXVIII ). Seule la première version rapporte la première partie du récit : la conquête par Sennachérib de toutes les

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villes fortifiées de Juda, la soumission d'Ezéchias au roi d'Assyrie, et le paiement d'un tribut. Mais les trois livres narrent la révolte d'Ezéchias contre Sennachérib, et son refus de se soumettre ou de payer le tribut. Il est évident que, malgré la mention répétée de Lachish, il dut y avoir deux campagnes distinctes : à l'issue de la première, Ezéchias se soumit et accepta de payer le tribut. La seconde campagne eut lieu plusieurs années après. Dans l'intervalle, Ezéchias « répara le mur en ruine, exhaussa les tours, bâtit un second mur extérieur, restaura Mello dans la cité de David, et fit fabriquer des javelots et des boucliers en abondance; il mit à la tête de l'armée des chefs militaires; et quand Sennachérib entra dans Juda, Ezéchias fit obstruer les sources à l'extérieur de Jérusalem, et exhorta le peuple de la ville à être fort et courageux ». C'est alors que se produisit la destruction miraculeuse de l'armée assyrienne.

Les annales de Sennachérib ne rapportent que la première partie de l'histoire : la capture des villes du pays, la soumission d'Ezéchias, et le tribut qu'il paya. Le prisme ne cite pas le siège de Lachish, mais il existe un relief assyrien où est représenté l'abandon de ce siège. Les sources assyriennes passent sous silence les défaites en Judée, mais une inscription cunéiforme d'Esarhaddon, fils de Sennachérib, rapporte le meurtre de ce dernier par ses propres fils dans des termes identiques à ceux des Ecritures.

La destruction de l'armée de Sennachérib ayant eu lieu au cours d'une campagne ultérieure (évidemment la dernière), avant l'assassinat du roi, elle n'a pas été inscrite sur la tablette de la huitième campagne. Cette destruction se produisit donc au cours d'une neuvième, et peut-être d'une dixième campagne; et son issue désastreuse ne pouvait pas inciter le roi à commander un nouveau prisme, qui fît état de cette campagne.

Au siècle dernier, on s'aperçut que la première partie du récit du Livre des Rois est la réplique même de l'histoire inscrite sur le prisme, et que la seconde partie de la narration du Livre des Rois, du Livre entier des Chroniques, et du Livre d'Isaïe, est l'histoire distincte d'une autre campagne de Palestine 2.

La première campagne contre Juda eut lieu en 702 Ou 701 La date de la seconde campagne semble être 687 ou, moins vraisemblablement, 686.

« Sur les dernières années de son règne, c'est-à-dire après la conclusion du récit du prisme, ses annales personnelles, interrompues à cette date, ne nous fournissent aucun renseignement. Sennachérib, une fois de plus, fit son apparition à l'Ouest (687, ou 686 ?) 3.

Ignis e coelo

Le Livre des Rois décrit la destruction des armées de Sennachérib en termes très laconiques. « Or, cette même nuit, l'ange du Seigneur parut dans le camp des Assyriens, et y frappa

185.000 hommes. Le lendemain matin, il n'y avait plus que des cadavres. Sennachérib, roi d'Assyrie, repartit; il reprit le chemin de son pays, et demeura à Ninive ».

Les Chroniques présentent une description semblable : « Là-dessus le roi Ezéchias et le prophète Isaïe se mirent en prière pour implorer les cieux;

et le Seigneur envoya un ange qui extermina toute l'armée du roi d'Assyrie dans le camp même, avec les chefs et les généraux, si bien que le roi s'en retourna dans son pays tout confus ».

Quel fut donc le caractère de cette destruction ? Malach, traduit par « ange », signifie en hébreu « quelqu'un qui est envoyé pour exécuter un ordre», et l'on suppose que ce fut l'ordre du Seigneur. Le Livre des Rois et Isaïe expliquent que c'était un souffle violent, qui tomba du ciel sur l'armée de Sennachérib 1. «J'enverrai un souffle et il reprendra le chemin par où il est venu », telle fut la prophétie faite immédiatement avant la catastrophe. La mort simultanée de dizaines de milliers de soldats ne peut être attribuée à une épidémie, comme on le fait communément, car les effets d'une épidémie ne sont point si soudains. Les phénomènes de contagion exigent au minimum quelques jours ; et en admettant qu'une épidémie puisse causer

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des ravages dans un grand camp militaire, elle ne peut décimer une foule sans suivre jour après jour une courbe croissante.

Les sources du Talmud et du Midrash, qui sont nombreuses, font un tableau concordant de l'anéantissement de l'armée de Sennachérib : un souffle tomba du ciel sur le camp de Sennachérib. Ce n'était pas une flamme, mais un souffle qui brûlait tout : « leurs âmes furent brûlées, quoique leurs vêtements restassent intacts ». Le phénomène s'accompagna d'un fracas terrifiant 2.

Arad gibil signifie en langue babylonienne : « ignis e coelo » (le feu tombant du ciel) 3. Hérodote présente une version différente de la destruction de l'armée de Sennachérib. Au

cours de son voyage en Egypte, les prêtres égyptiens lui apprirent que l'armée de Sennachérib, qui menaçait la frontière égyptienne, avait été anéantie en une seule nuit. Ils ajoutaient qu'en souvenir de cet événement miraculeux, on avait placé dans un temple égyptien l'effigie d'une divinité tenant à la main une souris; ils lui expliquèrent ainsi le symbole : des légions de souris avaient envahi le camp assyrien, grignoté les cordes des arcs, et les autres armes; et les troupes réduites à l'impuissance, saisies de panique, s'étaient enfuies.

Flavius Josèphe reprit la version d'Hérodote, et ajouta qu'il existait une autre version de l'historien chaldéo-hellénistique Bérose. On trouve dans les Antiquités Judaïques une phrase qui devait introduire une citation de Bérose, mais la citation elle-même est absente du texte que nous possédons. De toute évidence, l'explication proposée était différente de celle d'Hérodote. Josèphe lui-même, avec le tour d'esprit rationaliste qui lui est coutumier, prétend que c'est la peste bubonique qui provoqua, lors de la première nuit du siège, la mort soudaine de 185.000 guerriers assyriens, campés sous les murs de Jérusalem.

Hérodote rapporte qu'il a vu la statue du dieu tenant la souris à la main qui fut érigée en commémoration de l'événement. Deux villes égyptiennes, Panopolis (Akhmim) au Sud, et Létopolis au Nord, pratiquaient le culte du même animal sacré, la musaraigne. Hérodote n'alla pas au Sud de l'Egypte. C'est donc la statue de Létopolis qu'il a dû voir. Aujourd'hui encore on découvre dans les fouilles de Létopolis de nombreuses souris de bronze, où sont parfois gravées des prières de pèlerins.

Les deux villes qui vénéraient la souris étaient « les villes sacrées de la foudre et des météorites 4 ». Le nom égyptien de Létopolis est représenté par le hiéroglyphe qui désigne d'autre part la « foudre ».

Un texte datant du Haut Empire, et retrouvé à Létopolis, nous révèle qu'une fête était célébrée dans cette ville en commémoration de « la nuit de feu qui détruisit l'ennemi ». Ce feu ressemblait à « la flamme poussée par le vent jusqu'au bout du ciel, et jusqu'au bout de la terre 5 ». Le texte ajoute, prêtant ces paroles à la divinité : « J'avance, et marche dans le feu dévorant, le jour où fut repoussé l'ennemi ». Ainsi le dieu à la souris était le dieu du feu dévorant.

Les commentateurs, cependant, ont vu dans la souris le symbole d'une peste bubonique 6, et ils en ont conclu, d'accord avec Josèphe, que l'armée de Sennachérib avait dû être décimée par une épidémie.

Il est étonnant que les nombreux commentateurs d'Hérodote, et ceux, non moins nombreux, de la Bible, n'aient pas remarqué une certaine coïncidence dans les différentes descriptions de la calamité. Ezéchias était atteint d'une affection bubonique, et à deux doigts de la mort il fit appeler Isaïe; celui-ci dit d'abord au roi qu'il était condamné; il revint pourtant peu après, avec un remède (un cataplasme de figues, pour l'appliquer sur 1'ulcère), et il révéla au roi que le Seigneur le délivrerait de la mort immédiate, et qu'il libérerait aussi « cette ville des mains du roi d'Assyrie ». « Et voici, de la part du Seigneur, le signe... je vais faire reculer l'ombre des dix degrés que le soleil lui a déjà fait descendre sur le cadran solaire d'Achaz. Et le soleil recula de dix degrés 7 ».

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On explique généralement ce passage par une illusion d'optique 8. On suppose que le cadran solaire associé au nom d'Achaz était un cadran construit par Achaz, père d'Ezéchias. Mais le Talmud explique que le jour fut raccourci de dix degrés le jour des funérailles d'Achaz, et prolongé de dix degrés le jour où Ezéchias tomba malade, et guérit; et tel est le sens des paroles d'Isaïe : « Je vais faire reculer l'ombre des dix degrés que le soleil lui a déjà fait descendre sur le cadran solaire d'Achaz 9 ». Les sources rabbiniques affirment explicitement que le mouvement du soleil fut dérangé le soir même où l'armée de Sennachérib fut détruite par un souffle dévorant 10.

Pour revenir à Hérodote, nous allons consacrer notre attention à un fait important, et pourtant négligé des commentateurs. Le célèbre paragraphe où Hérodote narre comment les prêtres égyptiens lui révélèrent que depuis la fondation du royaume d'Egypte le soleil avait plusieurs fois changé de direction, se trouve placé immédiatement après le récit de la destruction de l'armée assyrienne.

De même, les Ecritures rapportent, sans solution de continuité, l'anéantissement de l'armée assyrienne et la perturbation du mouvement solaire. Les deux documents semblent maintenant s'accorder parfaitement.

Le vingt-trois mars

C'est apparemment quelque phénomène cosmique qui provoqua la destruction brutale de l'armée assyrienne, et perturba la rotation de la terre. Des masses gazeuses, en pénétrant dans l'atmosphère, purent provoquer l'asphyxie, et décimer tous les êtres vivants en certains lieux.

Mais cette explication doit s'appuyer sur d'autres sources. Les perturbations du mouvement solaire n'ont pu se limiter à l'Egypte et à la Palestine, et certaines manifestations du cataclysme, telle l'invasion du ciel par des masses gazeuses, ont dû se remarquer en d'autres régions du globe.

Il importe d'abord de fixer plus exactement la date de la destruction de l'armée de Sennachérib. Les recherches modernes nous enseignent qu'elle se produisit en l'année 687 (686 semble moins probable). Le Talmud et le Midrash fournissent un autre renseignement précieux : la destruction se produisit la première nuit de la Pâque. L'énorme armée fut anéantie au moment où le peuple entonnait le Hallel, l'hymne d'action de grâces du service de la Pâque 1. Or la Pâque était célébrée aux environs de l'équinoxe de printemps 2.

Le livre d'Edouard Biot, « Catalogue général des étoiles filantes et des autres météores observés en Chine après le VIIe siècle avant J.-C. 3 », commence par cette affirmation :

« Années avant Jésus-Christ : 687. En été à la quatrième lune, jour sin-mao (23 mars), pendant la nuit, les étoiles fixes ne parurent pas, quoique la nuit fût claire. Au milieu de la nuit, les étoiles tombèrent comme une pluie. »

La date du 23 mars a été calculée par Biot. L'affirmation citée se fonde sur de vieux textes chinois attribués à Confucius. Dans une autre traduction du texte due à Rémusat 4, le même passage est rendu ainsi : « Bien que la nuit fût claire, il tomba une étoile en forme de pluie ».

Le Livre de Bambou fait évidemment allusion au même événement, lorsqu'il rapporte que lors de la dixième année du règne de l'empereur Koei (le dix-septième empereur de la dynastie Yu, soit le dix-huitième empereur depuis Yao) « les cinq planètes abandonnèrent leur route prescrite, et la nuit les étoiles tombèrent comme une pluie; la terre fut ébranlée 6 ».

Les mots des annales « la nuit, les étoiles tombèrent comme une pluie » présentent une frappante analogie avec ceux du texte de Confucius relatifs au phénomène cosmique du 23 mars 687. Les annales nous apprennent que le phénomène fut causé par une perturbation planétaire. Quant au texte de Confucius, il est précieux, puisqu'il nous fournit la date du phénomène année, jour, mois.

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Le ciel nocturne était sans nuage, donc les étoiles auraient dû être visibles, et elles ne le furent pas. Ceci nous rappelle les paroles mêmes des Prophètes 6 .

Le catalogue de Biot, qui commence par cette évocation de l'année 687, n'enregistre ensuite, au cours de la succession des siècles, et jusqu'au début de notre ère, que la chute de météores isolés : le prodige de l'an 687 est donc un phénomène unique dans les annales de la Chine.

Or il eut lieu la même année, et au même moment de l'année, (23 mars 687) que la destruction de l'armée de Sennachérib, selon la date que lui assignent les calculs modernes et le Talmud. Le texte chinois nous offre une description brève, mais précise, de cette même nuit où l'armée assyrienne fut anéantie. Logiquement, nous devrions découvrir dans les sources chinoises quelque allusion à un dérangement du mouvement solaire. Quarante-cinq à quatre-vingt-dix degrés de longitude séparent la Chine de la Palestine, ce qui implique un décalage variant entre trois et six heures.

Huai-nan-tsé 7, écrivain du second siècle avant notre ère, nous apprend que « lorsque le duc de Lu-yang livra la guerre à Han, le soleil se coucha au cours de la bataille. Le duc, brandissant sa lance, fit signe au soleil. Et le soleil, à sa demande, rebroussa chemin, et passa à travers trois demeures solaires. »

Cette narration subjective et mythologique nous fait penser au point de vue primitif et subjectif de l'auteur du Livre de Josué, et probablement aussi des contemporains de Josué. C'est l'interprétation primitive d'un phénomène naturel. Cependant, le récit chinois diffère de la relation du Livre de Josué, en ce sens qu'il ne s'agit plus d'une longue immobilisation du soleil, mais d'un court mouvement rétrograde : sur ce point, la description chinoise s'accorde avec le chapitre XX du second Livre des Rois.

On ne connaît pas exactement l'époque où Han régna. On suppose parfois, en se fondant sur des calculs astronomiques, que ce fut au Ve siècle avant notre ère, sinon plus tard 8. Si la date est exacte, le phénomène décrit se produisit antérieurement à la domination de la dynastie Han sur la Chine.

La Chine est vaste; elle se divisait alors en très nombreuses principautés. Il est probable que l'histoire du prince Tau de Yin est une nouvelle narration du même événement, dans une région chinoise différente. Lu-Heng 9 rapporte que le prince Tau de Yin était l'invité involontaire de l'Empereur de Chine quand le soleil reprit sa place au méridien. On vit là un signe qui conviait l'Empereur à laisser le Prince retourner en son royaume.

L'histoire des tyrans d'Argos nous apprend que le soleil se coucha rapidement, et que le soir tomba avant l'heure normale. Nous avons reconnu là le même phénomène, qui, selon les sources rabbiniques, se produisit au jour des funérailles d'Achaz, père d'Ezéchias... Le prodige d'Ezéchias, celui du duc de Lu-yang, et du prince Tau de Yin eurent lieu au temps des mêmes tyrans, semble-t-il. « Atrée, dit Apollodore 10, stipula avec Thyeste, qu'il (Atrée) serait roi, si le soleil rétrogradait. Et lorsque Thyeste accepta, le soleil se coucha à l'Est. » Ovide décrit ce phénomène qui marqua l'histoire des tyrans d'Argos : Phœbus s'arrêta « à mi-chemin, fit faire demi-tour à son char et à ses coursiers, qui se trouvèrent face à l'aurore 11 ». Dans Les Tristes, Ovide fait encore allusion à cette tradition littéraire 12 des « chevaux du soleil qui s'écartent de leur route 13 ». Une inscription maya prétend qu'une planète frôla la terre 14.

Les trois « demeures solaires » des Chinois devaient correspondre à dix degrés sur le cadran solaire du palais de Jérusalem.

Selon les sources du Talmud 15, la même perturbation, mais en sens inverse, eut lieu au jour des funérailles d'Achaz. Cette fois, le jour fut abrégé. Les observations astronomiques modernes ont enregistré le cas de deux perturbations consécutives d'un corps céleste, la seconde corrigeant l'effet de la première. En 1875, la comète de Wolf passa à proximité de la grande planète Jupiter, et sa trajectoire en fut modifiée. En 1922, dans les mêmes circonstances, sa trajectoire subit une seconde modification, mais qui corrigea l'effet de la première. On ne

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remarqua aucune altération du cycle de révolution de Jupiter, non plus que de sa rotation. Il y avait en effet une énorme différence de masse entre ces deux corps.

Le culte de Mars

Le corps qui périodiquement (tous les quinze ou seize ans), s'approchait de l'orbite de la terre devait avoir un volume considérable, puisqu'il était capable d'en altérer la rotation. Il semble cependant qu'il ait été beaucoup plus petit que Vénus, ou qu'il n'approcha pas autant qu'elle de notre planète, puisque les cataclysmes d'Osias, d'Achaz et d'Ezéchias eurent des effets moindres que ceux de l'époque de l'Exode et de la Conquête. Cependant, ils durent impressionner vivement les peuples de cette époque, et s'incorporer à leur mythologie cosmogonique.

Est-il possible dès lors, d'y découvrir des allusions susceptibles de nous apporter quelque lumière sur le corps qui s'approchait ainsi périodiquement de la terre ?

Le peuple latin faisait, à cette époque, sa première apparition sur la scène de l'histoire; ses connaissances scientifiques étaient des plus limitées; il était donc naturel qu'il accordât au prodige une place prépondérante dans sa mythologie. Au reste, celle-là même n'était point originale, puisqu'elle était l'exacte réplique de la mythologie grecque. Un seul dieu y joue un rôle différent de celui qu'il tient dans l'Olympe grec. C'est le dieu Mars, l'Arès des Grecs 1. Mars, dieu de la guerre, venait immédiatement après Jupiter-Zeus. Il personnifiait la planète Mars; le mois du même nom lui était consacré, et l'on considérait le dieu Mars comme le père de Romulus, fondateur de Rome. C'était le dieu national de Rome. Tite-Live a écrit dans la préface de son Histoire de Rome : « Le plus puissant des empires, après celui du ciel ». « Le peuple romain... professe que son père, et le père de son Empire n'est autre que Mars ».

Si les Romains associent les premières activités de Mars à la fondation de Rome, nous pouvons en déduire que la naissance de Rome eut lieu à une époque ou le dieu-planète se manifesta par quelque insigne exploit.

C'est approximativement au temps des grands bouleversements naturels contemporains d'Amos et d'Isaïe que Rome fut fondée : selon les calculs de Fabius Pictor, l'événement aurait eu lieu dans la seconde moitié de la première année de la huitième Olympiade, soit en l'an 747 avant Jésus-Christ. Les autres autorités romaines ne varient que de quelques années 2. L'année 747 marque dans le Moyen-Orient le début d'une nouvelle ère astronomique. Et c'est vraisemblablement en cette même année qu'eut lieu la « commotion » d'Osias.

Selon la tradition romaine, la conception de Romulus, la fondation de Rome, la mort de Romulus, se produisirent en des années de grands bouleversements, accompagnés de phénomènes célestes et de perturbations dans le mouvement solaire. Ces phénomènes étaient plus ou moins en relation avec la planète Mars. Plutarque écrivait : « Quelques-uns attribuent au surnom de Quirinus donné à Romulus la signification de « Mars 3 ». La légende prétend que Romulus fut conçu la première année de la seconde Olympiade (772), au cours d'une éclipse totale de soleil. Selon les historiens latins, le jour même de la fondation de Rome le soleil interrompit sa course, et le monde fut plongé dans les ténèbres 4. Au temps de Romulus, « une peste s'abattit sur le pays qui, sans maladie préalable, amenait une mort immédiate ». Il y eut « une pluie de sang », et d'autres calamités. Pendant longtemps, la terre fut déchirée par des tremblements de terre. La tradition juive rapporte que les premiers fondateurs de Rome voyaient leurs huttes s'effondrer aussitôt que construites 5 »

D'après Plutarque, d'étranges phénomènes accompagnèrent la mort de Romulus : « Il y avait dans l'air des désordres mystérieux, inexplicables, accompagnés de bouleversements incroyables; le soleil ne donna plus de lumière, et la nuit tomba sur eux, non pas avec la paix et le calme, mais avec des coups de tonnerre terrifiants, et des vents déchaînés ». C'est au milieu de cette tempête que Romulus disparut 6.

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Ovide décrit ainsi les prodiges de cette journée : « les deux pôles tremblèrent, et l'Atlas disparut ; des nuages s'élevèrent et obscurcirent les cieux ... le ciel fut déchiré de traits de flammes... et le peuple s'enfuit; Romulus, sur les coursiers de son père (Mars) monta vers les étoiles 7.

Ezéchias était contemporain de Romulus et de Numa. Saint Augustin ne l'ignorait pas, qui écrivait : « Or, ces jours vont... jusqu'à Romulus, roi des Romains, ou même jusqu'au début du règne de son successeur Numa Pompilius. Ezéchias, roi de Juda, régna certainement jusqu'à ce temps-là 8. »

Si Mars a réellement été le visiteur cosmique déifié de l'époque d'Ezéchias et de Sennachérib, il paraît naturel qu'on ait situé son activité au temps de Romulus et de la fondation de Rome, et que le culte de Mars ait commémoré par quelque cérémonie importante la date de la perturbation.

Les recherches modernes ont déterminé que la seconde campagne de Sennachérib contre la Palestine eut lieu en 687. Le Talmud nous apporte des précisions complémentaires. C'était au printemps de cette même année, la nuit de la fête de la Pâque. Les sources chinoises donnent la date exacte de la grande perturbation cosmique : le 23 mars 687, à minuit.

La principale cérémonie du culte de Mars se déroulait au cours du mois consacré à ce dieu-planète. « Les ancilia, ou boucliers sacrés... étaient portés en procession par les Salii, prêtres de Mars, à la fois guerriers et danseurs, plusieurs fois au cours du mois de Mars, et jusqu'au 23, (tubilustrium), jour de la lustration des trompettes militaires (tubae); et une seconde fois, en octobre jusqu'au 19 (armilustrium), où les ancilia et les armes de l'armée étaient purifiées et rangées pour l'hiver... C'est à partir de la fin de février seulement que commençaient les préparatifs du culte de Mars 9 ». « La cérémonie principale du culte de Mars semble être celle de tubilustrium, le 23 mars 10 ».

La date du 23 mars, associée à tous les événements mentionnés ci-dessus, est très remarquable. On ne peut s'étonner que le culte de Mars comportât deux fêtes à deux époques différentes ( la seconde date, 19 octobre, suit de presque un mois l'équinoxe d'automne ) : le même phénomène cosmique amena, nous le savons, une série de désordres.

La perturbation du mouvement solaire qui précéda de quelques heures la destruction de l'armée assyrienne eut lieu le premier jour de la Pâque. Le cataclysme du temps de l'Exode avait été causé par la planète Vénus. Il y avait par conséquent, au moment de l'équinoxe de printemps, deux fêtes religieuses dont les dates coïncidaient, l'une en l'honneur de la planète Mars, l'autre en l'honneur de la planète Vénus. Les cérémonies en l'honneur de Minerve duraient du 19 au 23 mars, et le 23 du même mois on célébrait le culte de Mars et celui de Minerve Athénê 11.

Mars dévie l'axe terrestre

Vénus fut d'abord comète, et au cours de l'époque historique, elle devint planète. Au VIIIe siècle avant notre ère Mars était-il une comète ? Il est prouvé que bien avant le VIIe siècle Mars était une planète du système solaire. L'astronomie chaldéenne possédait un système à quatre planètes où Vénus manquait, mais non point Mars.

Les textes anciens, du moins ceux qu'on possède encore, ne font jamais mention de la naissance de Mars, alors qu'il font tous allusion à celle de la planète Vénus.

Le nom babylonien de la planète Mars est Nergal 1, et il est cité bien avant le VIIIe siècle. Mais c'est à cette époque seulement que la planète prit une importance exceptionnelle; on lui adressa de nombreuses prières : « Rayonnante demeure, qui éclaire la terre... qui donc est ton égal ? » On lui bâtit des temples, on lui érigea des statues; lors de la conquête de Samarie par Sargon, père de Sennachérib, les nouveaux colons qui y furent amenés dressèrent aussitôt une statue dédiée à la planète Mars 3.

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On redoutait sa violence : « Nergal, tout-puissant entre les dieux, crainte, terreur, splendeur redoutable 3 », écrivait Esarhaddon, fils de Sennachérib. Shamash-shoum-ouléin, roi de Babylone, et petit-fils de Sennachérib, écrivait : « Nergal, le plus violent d'entre les dieux ».

Il est caractéristique que Nergal fût considéré par le peuple assyrien comme le dieu de la défaite. Un autre petit-fils de Sennachérib, Assourbanipal, roi d'Assyrie, écrivait : « Nergal, le guerrier parfait, le plus puissant d'entre les dieux, le héros prestigieux, le seigneur puissant, roi de la bataille, qui détient le pouvoir et la force, le maître de la tempête, et qui apporte la défaite 4 ».

Il est également remarquable qu'au VIIe et au VIe, siècle, le nom de Nergal entrait couramment en composition avec des noms propres. Deux généraux, l'un et l'autre appelés Nergal-Séréser, faisaient partie de l'état-major de Nabuchodonosor 5. Un roi du nom de Nergilissar régna sur Babylone 6. Le même nom «Nergal-Séréser » revient continuellement dans les documents du VIIe siècle; il est porté par des prêtres, des guerriers, des marchands de bétail, des criminels.

A Babylone, au VIIIe siècle, la planète Mars était appelée « la planète imprévisible 7 ». Les inscriptions historiques du VIIIe siècle notent les oppositions de l'étoile Mars (Nergal).

Elles étaient soigneusement observées, au même titre que ses conjonctions. « Les mouvements de Mars tenaient une grande place dans l'astronomie babylonienne : son lever et son coucher, ses disparitions et ses retours... sa position par rapport à l'équateur, les variations de son intensité lumineuse, sa position par rapport à Vénus, Jupiter et Mercure 8 ». Aux Indes également, « il semble que les différentes phases du mouvement rétrograde des planètes, et spécialement de Mars, aient été l'objet d'une extrême attention 9 ».

On implorait Nergal, en levant les mains vers l'étoile 10 : « Toi, qui parcours le ciel... avec splendeur et terreur... roi de la bataille, dieu du feu qui fait rage, dieu Nergal ». Nergal-Mars était appelé à Babylone « l'étoile de feu 11 ». Nergal, l'étoile de feu, arrive à la manière d'une tempête. Il était aussi Sharappu, « l'astre qui brûle », « la flamme brillante venue du ciel », le « seigneur de la destruction 12 ». Tous les peuples ont appelé Mars l'étoile de feu 13. Ying-Huo, la « planète de feu », tel est le nom de Mars dans les cartes célestes chinoises 14. Sargon (722-705 av. J.-C.), père de Sennachérib, écrivit « au mois d'Abou, le mois où descend le dieu de feu 15. »

Certains textes même affirment sans ambiguïté que la planète Mars-Nergal est la cause directe des cataclysmes des VIIIe et VIIe siècles, où, pour reprendre les paroles d'Isaïe, « la terre fut ébranlée terriblement », et « arrachée à sa place ». Ainsi peut-on lire : « Nergal assombrit les cieux, et fait sortir la terre de ses gonds 16 »; et encore : « Nergal... là-haut, apaise les cieux... et fait trembler la terre 17 ».

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Chapitre 3

Par quoi les orbites de Vénus et de Mars furent-elles modifiées ?

Quand Vénus entra dans le système solaire, elle suivit d'abord une ellipse allongée, et pendant des siècles, mit en danger les autres planètes. Les peuples des deux hémisphères redoutaient sa dangereuse trajectoire; ils l'observaient soigneusement, et en enregistraient le mouvement.

Dans les derniers siècles avant notre ère, l'année de Vénus de 225 jours, et sans doute aussi son orbite, étaient pratiquement les mêmes qu'aujourd'hui. Dès la seconde moitié du VIIe siècle avant notre ère, Vénus, objet de la vigilance anxieuse des hommes, avait cessé d'être une cause de terreur ou d'appréhension; déjà, sans doute, était-elle établie sur l'orbite qu'elle suit scrupuleusement depuis lors. Quelles furent les causes de la modification de son orbite ?

Cette question en appelle immédiatement une seconde : Mars ne suscitait aucune crainte chez les astrologues anciens, et au second millénaire son nom était rarement cité. En Assyrie-Babylonie, la mention de Nergal est exceptionnelle sur les inscriptions antérieures au IXe siècle. Sur le plafond astronomique de Senmut, Mars ne figure pas parmi les planètes, et ne tient pas de place notable dans la mythologie primitive des dieux-planètes.

Mais au IXe et au VIIIe siècle avant notre ère, cette situation changea du tout au tout. Mars devint la planète redoutée. Par suite, Mars-Nergal fut promu dieu de la guerre et de la tempête. Ce qui nous amène à poser cette question : pourquoi Mars, jusqu'alors inoffensif, rapprocha-t-il soudain son orbite de la terre ?

Toutes les planètes du système solaire gravitent à peu près dans le même plan, et si une planète venait à suivre une ellipse allongée, elle menacerait les autres planètes. Les causes qui affectèrent l'ellipse de Vénus et celle de Mars doivent être les mêmes. Il se peut qu'une comète ait modifié les ellipses de l'une et de l'autre; mais il est plus simple, sans faire appel à un troisième agent, de supposer que les deux planètes, dont l'une suivait une ellipse très allongée, entrèrent en collision.

La rencontre de Vénus et de Mars, si elle eut lieu, dut être visible de la terre. Il n'est pas impossible que les deux planètes soient entrées en contact à plusieurs reprises, et chaque fois avec des effets différents.

Si le contact de Vénus et de Mars est un fait que les hommes purent observer, les traditions et les documents écrits doivent en témoigner.

Quand l'Iliade fut-elle composée ?

« Un grand conflit s'était élevé entre les membres de la sphère. » EMPEDOCLE 1.

Jusqu'à maintenant, il n'a pas été possible de déterminer la date de la composition de l'Iliade et de l'Odyssée. Les hypothèses des auteurs anciens eux-mêmes sur l'époque où vécut Homère révèlent de considérables différences. Elles varient entre 685 (date proposée par l'historien Théopompe), et 1155 avant Jésus-Christ (d'après certaines sources citées par Philostrate.

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Hérodote a écrit qu' « Homère et Hésiode » créèrent le Panthéon grec « pas plus de quatre cents ans avant moi », c'est-à-dire vers 884, l'année 484 étant considérée comme celle de la naissance d'Hérodote. Le débat est loin d'être clos. Certains auteurs prétendent qu'un long intervalle s'écoula entre la date de la composition des épopées homériques, et celle de leur rédaction. D'autres croient qu'elles ont été composées peu de temps avant la découverte de l'alphabet grec, soit vers 700 2. On estime, d'autre part, que cette découverte dût être très antérieure à 700, si l'on admet que les œuvres d'Homère sont beaucoup plus anciennes.

On pense généralement que la chute de Troie se produisit plusieurs générations avant Homère, et aussi que les grands poèmes attribués à Homère furent l'œuvre de plusieurs générations. On suppose parfois que la chute de Troie se situe au XIIe siècle 3.

Par ailleurs, on a démontré que le degré de civilisation que révèle l'épopée homérique correspond à celui du VIIIe ou même du VIIe siècle. L'âge de fer était depuis longtemps commencé, et beaucoup d'autres détails excluent la possibilité d'une époque antérieure 4.

Il est fort probable que les poèmes homériques furent composés à cette époque, ou peu après. Si l'on parvenait à déterminer la date de la prise de Troie, l'on saurait si les poèmes furent composés plusieurs siècles après la destruction de la ville. La tradition rapporte qu'Enée, s'étant échappé de Troie, gagna Carthage (construite au milieu du VIIIe siècle) : cette tradition implique donc que Troie fut détruite au VIIIe ou à la fin du IXe siècle.

Mais pourquoi aborder ici cette question subsidiaire, compliquée en soi, et apparemment sans grand rapport avec les deux problèmes précédemment posés : à savoir, comment l'orbite de Vénus devint-elle circulaire, et comment celle de Mars fut-elle modifiée pour provoquer un contact avec la terre ? Même si ces sujets avaient quelque point commun, comment résoudre un problème à trois inconnues ?

Et pourtant nous avons quelque chance de découvrir la solution du problème astronomique qui nous intéresse, et de déterminer la date de l'épopée troyenne, si nous étudions le cadre cosmique de l'œuvre d'Homère.

Faisons une expérience très simple : si le poème d'Homère ne fait pas mention d'Arès, le Mars grec, ceci tendrait à prouver que l'Iliade et l'Odyssée ont été composées au Xe siècle ou avant, et qu'en tout cas, les événements qui y sont décrits ne purent se produire après cette époque. Si au contraire Arès figure en tant que dieu de la guerre dans l'épopée d'Homère, on peut conclure qu'elle a été composée au VIIIe siècle, ou ultérieurement puisque c'est au VIIIe siècle que Mars-Nergal, divinité jusqu'alors obscure, devint un dieu de première importance. Des poèmes épiques si riches en mythologie, et datant du VIIe ou VIIIe siècle, ne sauraient rester muets sur les activités de Mars-Arès, devenu à cette époque « furieux ».

Nous allons donc examiner les poèmes homériques sous cet angle : la tâche est aisée, car les descriptions des violences d'Arès foisonnent dans l'Iliade.

Cette épopée raconte, l'histoire des batailles que les Grecs livrèrent devant Troie à Priam et à son peuple. Les dieux jouèrent un rôle très important dans ces combats et ces escarmouches, en particulier Athénê et Arès; Athénê protégeait les Grecs; Arès les Troyens. D'un bout à l'autre de l'épopée, ils sont les principaux antagonistes.

Athénê commença par écarter Arès du champ de bataille : « Alors Athénê, prenant la main du dieu terrible des combats : - « Arès, Arès, s'écrie-t-elle,

toi qui te souilles de sang, et qui renverses les remparts, ne laisserons-nous pas les Grecs et les Troyens combattre ?... » En même temps, elle entraîne le farouche Mars loin du combat 5.»

Mais ils s'affrontèrent à nouveau sur le champ de bataille. « Le furieux Arès » « restait sur la gauche de la bataille ».

Aphrodite, déesse de la lune, désirait aussi participer à la guerre. Mais Zeus, maître de l'Olympe, lui dit :

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« Ma fille, les combats ne sont pas ton partage; préside aux doux soins de l'amour, et laisse Athénê et le farouche Arès s'occuper des travaux de la guerre ».

Ainsi le dieu de la planète Jupiter ordonna à la déesse de la lune de laisser la bataille au dieu de la planète Mars, et à la déesse de la planète Vénus. Phœbus Apollon, dieu du soleil, parla en ces termes à la planète Mars :

« Alors Apollon, élevant la voix, parla en ces mots au dieu de la guerre : « Arès, Arès, fléau des humains, toi dont le bras ensanglanté renverse les remparts, n'iras-tu point écarter du champ de bataille ce mortel issu de Tydée ? »

Arès, qui ne respire que le carnage, court animer les cohortes troyennes... Sa voix exhorte... « jusqu'à quand souffrirez-vous que les Grecs moissonnent vos cohortes ?

Arès couvrit de ténèbres le champ de bataille : « Et terrible, Arès couvre d'une profonde nuit le champ de bataille, et va de tous côtés

seconder les Troyens... Il a vu s'éloigner Pallas Athénê, la déesse tutélaire des Grecs. » Héra, déesse de la terre « presse du fouet ses divins coursiers », et « les portes des cieux

mugissent, et s'ouvrent d'elles-mêmes; ces portes sont gardées par les Heures, à qui le ciel immense et l'Olympe sont confiés ».

Elle interrogea Zeus : « Père des mortels, n'es-tu pas indigné contre Arès, à la vue de tous ses attentats, et de tant

de vaillants guerriers... qu'il a couchés dans la poussière ?... Grand Jupiter, puis-je sans exciter ton courroux, châtier son audace ? »

Et Jupiter répondit : « Va, et oppose-lui Athénê, qui plus d'une fois a su le livrer aux plus cruelles douleurs. » Ainsi, arriva l'heure du combat. Pallas Athénê attaqua Arès « le fléau des mortels », et

poussa de toutes ses forces sa lance « vers les liens de la ceinture ». « Le dieu jette un grand cri, semblable à ceux de dix mille combattants livrés à une fureur

homicide. » « Ainsi que naît tout à coup une nuit ténébreuse à l'arrivée des nuages amenés par le souffle

brûlant des vents du midi, ainsi... parut le sombre Arès s'élevant dans les nuages, vers l'espace immense du ciel. »

Dans le ciel, il se plaignit amèrement d'Athénê à Jupiter « C'est de toi que naissent nos divisions, toi qui produisis cette déesse insensée, funeste,

dévouée à l'injustice... Tous les autres dieux de l'Olympe obéissent avec soumission à tes lois... mais tu es toujours indulgent à son égard, parce que tu as mis au monde cette furie. »

« Et Zeus répondit : « De tous les Immortels qui habitent l'Olympe, tu m'es le plus odieux; tu ne respires toujours

que discordes, que guerres, que combats. » Arès perdit donc la première manche. « Héra et Athénê (furent) satisfaites d'avoir réprimé

les fureurs d'Arès.» Le poème continue sur ce ton, et on en néglige trop aisément le caractère allégorique. Au cinquième livre de l'Iliade, le nom d'Arès (Mars) revient plus de trente fois, et dans tout le poème il ne quitte jamais la scène, soit aux cieux, soit sur le champ de bataille. Aux livres XX et XXI, le combat des dieux sous les murs de Troie fait rage.

« Athénê pousse des cris belliqueux... et Mars accourt au secours des Troyens. » « Les Immortels, descendus de leurs demeures fortunées, enflamment ainsi les deux armées

au combat, et, affranchis de tout obstacle, versent parmi elles une rage dévorante. Le maître des cieux et des hommes tonne du plus haut des cieux avec un bruit formidable; Poséidon ébranle la terre immense jusqu'au sommet des montagnes. Le mont Ida, avec ses sources nombreuses, les tours de Troie, et les vaisseaux des Grecs s'agitent et tremblent. Le roi des Ombres, Pluton, épouvanté... craint que Poséidon, ouvrant la terre ébranlée, ne découvre aux dieux et aux hommes ses demeures... tel est le tumulte qui s'élève aux combats des divinités. »

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Dans cette bataille livrée par les divinités, sur et sous la terre, Troyens et Grecs s'affrontaient, et l'univers entier rugissait et tremblait. La bataille eut lieu dans les ténèbres ; Héra étendit un voile épais; le fleuve « enfla ses vagues, agita avec fureur toutes ses ondes ». Même l'océan redoutait la foudre, et les tonnerres que Jupiter faisait retentir aux cieux. Alors, « un torrent de flammes » s'abat « sur la campagne, l'embrase, et consume les morts... la plaine est desséchée ». Puis « le fleuve est embrasé », « les habitants des eaux tourmentées... se retirent dans les antres ou s'agitent au fond de leur demeure limpide.. l'eau embrasée... bouillonne et pousse un mugissement terrible ». Le fleuve n'avait plus envie de couler, mais il s'immobilisa, « incapable de protéger Troie ».

« Mais la discorde exerce sa rage effrénée sur les autres dieux... Ils fondent l'un sur l'autre avec un tumulte horrible. La terre en mugit... Le ciel immense fait retentir sa trompette... Zeus se repaît du spectacle de la guerre des Immortels. »

« Arès commence le choc... courant vers Athénê, armée de sa lance de fer « 0 toi, dit-il, dont rien n'égale l'audace, pourquoi précipiter encore les dieux au combat ?... Aurais-tu oublié le jour où... tu conduisis toi-même la lance téméraire et fis couler le sang d'une divinité ? »

C'est encore Athénê qui triompha dans ce combat avec Arès. « (Arès) frappe l'égide... Arès, teint de sang, ébranle l'égide de son javelot immense... la

déesse recule, saisit de sa main invincible un rude et énorme bloc, limite d'un champ dans un âge reculé. Elle lance le roc sur le cou de Mars furieux, et le dépouille de sa force... ».

« Pallas Athénê sourit fièrement... » « Insensé, qui crois pouvoir m'opposer ta valeur, ne sens-tu point en ce moment de quel droit je me glorifie de la surpasser ? ».

Aphrodite s'approcha d'Arès blessé, et lui « prenant la main », « le conduisit hors de la mêlée ». Mais « Athénê vole sur leurs traces... fond sur Aphrodite, la touche de sa main terrible, et la renverse au même instant ».

Ces extraits de l'Iliade montrent que la mêlée de Troie était l'écho d'un drame cosmique. Les commentateurs savaient qu'à l'origine Arès n'était point seulement un dieu de la guerre, et que cette qualité ne lui était que secondaire. Le dieu grec Arès est la planète latine Mars. Toutes les œuvres classiques le déclarent abondamment. Les « Poèmes homériques » affirment aussi qu'Arès était une planète. On lit dans l'hymne homérique à Arès : « Très puissant Arès... Valeureux guerrier qui suit ton cercle de feu dans l'Ether, parmi les sept étoiles errantes (les planètes), où tes coursiers de feu t'emportent toujours au-dessus du troisième char 6. » La planète Mars détruit les villes, fait l'ascension du ciel dans un sombre nuage, livre combat à Athénê (la planète Vénus) : comment interpréter ces diverses activités ? Les commentateurs soupçonnaient bien qu'Arès devait représenter quelque force naturelle élémentaire : Arès devenait alors le dieu de la tempête, ou du ciel, ou de la lumière, ou le dieu soleil, et ainsi de suite 7. Explications futiles. Arés-Mars est ce que désigne son nom même : la planète Mars. On découvre chez Lucien une assertion qui justifie mon interprétation du drame cosmique de l'Iliade. Cet auteur du second siècle de notre ère écrit dans son livre L'Astrologie ce commentaire significatif, encore que généralement négligé, sur les épopées homériques : « Tout ce qu'il a dit (Homère) de Vénus et de Mars... ne repose sur aucune autre science que celle-ci (l'astrologie). Et c'est en vérité les rencontres de Vénus et de Mars qui sont le fondement de la poésie d'Homère 8. » Lucien ne soupçonne pas qu'Athénê est la déesse de la planète Vénus 9; mais il n'ignore pas la signification véritable du thème cosmique de l'épopée homérique, ce qui montre que les divers épisodes du drame céleste formaient la base même de ses connaissances astrologiques.

D'autres avant moi ont proposé semblable interprétation des poèmes d'Homère; mais il n'est pas possible de les identifier. Cependant Héraclite, auteur obscur du Ier siècle, qu'il importe de ne pas confondre avec le philosophe Héraclite d'Ephèse, a écrit un ouvrage sur les allégories homériques 10. A ses yeux, Homère et Platon étaient les deux plus grands esprits qu'ait produits

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la Grèce, et il s'employa à concilier la description homérique des dieux, anthropomorphique et satirique, avec le point de vue idéaliste et métaphysique de Platon. Au paragraphe 53 de ses Allégories, Héraclite réfute l'opinion de ceux qui interprètent les combats entre les dieux chez Homère comme des collisions entre les planètes. Ainsi, certains philosophes anciens devaient soutenir le point de vue auquel je suis personnellement arrivé, au terme d'une série de déductions.

Le problème de la date où fut originellement composée l'épopée homérique peut se résoudre

à l'aide des critères suivants : si le conflit cosmique entre les planètes Vénus et Mars y est mentionné, l'œuvre d'Homère n'a guère pu être composée avant 800. Si la terre et la lune participent au conflit, 747, et peut-être une année plus proche encore, dut présider à la naissance de l'Iliade. La première rencontre qui ébranla la terre s'était déjà produite, et c'est pourquoi Arés-Mars est appelé le « fléau des mortels », qui « souillé de sang renverse les remparts ». Homère fut donc le contemporain d'Amos et d'Isaïe, ou, plus vraisemblablement, il vécut peu de temps après eux. La guerre de Troie et le conflit cosmique appartiennent à la même époque; et la guerre de Troie ne peut précéder Homère de plusieurs siècles : peut-être même ne sont-ils pas séparés par un seul siècle.

Il est dès lors possible de préciser l'affirmation de Lucien concernant la rencontre de Vénus et de Mars, source première de l'épopée homérique. En vérité, il n'y eut point qu'une rencontre fatale entre les deux planètes : deux au moins sont décrites dans l'Iliade, au Ve et au XXIe livre. Ces rencontres furent de vrais contacts, car le simple passage d'une planète devant une autre n'eût pas déclenché un drame cosmique.

Huitzilopochtli

Si Athénê, déesse de la planète Vénus, était la protectrice des Grecs, le dieu tutélaire des Troyens était Arès-Mars. La même situation se retrouve dans l'ancien Mexique : le dieu tutélaire des Toltèques était Quetzal-cohuatl, et représentait la planète Vénus. Mais les Aztèques, qui supplantèrent les Toltèques au Mexique, étaient sous la protection du dieu Huitzilopochtli (Vitchilupuchtli) 1.

D'après Sahagun, Huitzilopochtli était « le grand destructeur des villes et le meurtrier des peuples ». Nous avons déjà rencontré dans l'Iliade l'épithète « destructeur des murs souillé de sang », régulièrement appliquée à Mars. « Dans la guerre, il (Huitzilopochtli) était pareil au feu vif, et grandement craint de ses ennemis », écrit encore Sahagun 2.

Dans son important ouvrage sur les Indiens de l'Amérique, H. H. Bancroft écrit : « Comme Mars et Odin, Huitzilopochtli tenait de la main droite une lance ou un arc, et de la

main gauche tantôt un faisceau de flèches, tantôt un bouclier rond et blanc... C'est de ces armes que dépendait le salut de l'Etat, de même qu'il dépendait à Rome de l'ancile de Mars tombé du ciel, ou en Grèce du Palladium de la belliqueuse Pallas Athénê. Certaines épithètes le désignent également comme le dieu de la guerre; c'est ainsi qu'il est appelé le terrible dieu Tetzateotl, ou le furieux Tetzahuitl 3. » Bancroft continue : « On pourrait comparer la capitale des Aztèques à la Rome antique à cause de leur commun esprit belliqueux. Il était donc juste de faire du dieu national des Aztèques un dieu de la guerre semblable au Mars des Romains 4. »

Huitzilopochtli n'était pas semblable à Mars, il était Mars lui-même. L'identité de leur aspect, de leur caractère, de leurs exploits s'impose, puisqu'ils étaient le même dieu-planète.

Les cérémonies religieuses des anciens Mexicains évoquaient également le conflit entre Mars et Vénus. Dans l'une de ces cérémonies, le prêtre de Quetzal-cohuatl perçait d'une flèche l'effigie de Huitzilopochtli, dès lors considéré comme mort 5. Il semble que cette cérémonie ait symbolisé la décharge électrique jaillie entre Vénus et Mars.

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Mais les Aztèques ne pouvaient supporter la mort de Mars, le farouche destructeur des villes, le dieu de l'épée et de la peste : ils poursuivirent leurs luttes contre les Toltèques qui pratiquaient le culte de Vénus. Ces luttes entre Aztèques et Toltèques durent se produire plus tôt qu'on ne le suppose généralement; avant notre ère, peut-être, alors que le souvenir du conflit cosmique était encore très vif.

Le Tao

« Qu'appelons nous Tao ? Il y a le Tao, qui est la Voie du Ciel, et le Tao, qui est la voie des Hommes. » KOUANG-TSE.

Les planètes du système solaire furent perturbées par les contacts de Vénus, de Mars, et de

la terre. Nous avons déjà cité les annales des livres de Bambou, où il est écrit que dans la dixième année du règne de l'Empereur Koei, dix-huitième monarque depuis Yao, « les cinq planètes abandonnèrent leur course. La nuit, les étoiles tombèrent en pluie. La terre trembla 1 ». Les perturbations planétaires étaient dues aux collisions de Vénus et de Mars. Une autre chronique chinoise situe au temps du même Empereur Koei les batailles de deux étoiles, alors aussi brillantes que des soleils.

« En ce temps-là, on vit les deux soleils s'affronter dans les cieux. Les cinq planètes étaient agitées de mouvements inaccoutumés. Une partie du mont T'ai chan s'effondra 2. »

Nous reconnaissons dans les deux corps ennemis Vénus et Mars. Eratosthène, chargé au IIIe siècle avant notre ère du soin de la bibliothèque d'Alexandrie, interprétait ainsi le phénomène : « Au troisième rang est l'étoile (stella) Mars...Elle fut poursuivie par l'étoile (sidus) Vénus. Vénus alors s'empara d'elle, et l'enflamma de son ardente colère 3. »

Dans une carte astronomique du Moyen Age (1193), qui servit à l'éducation des Empereurs, et qui est nommée la carte astronomique de Soutchéou 4, il est affirmé, sous l'autorité des Anciens, que les planètes abandonnèrent leur course; Vénus un jour, déserta le Zodiaque, et attaqua l' « Etoile-loup ». L'altération de la course des planètes était considérée comme le signe de la colère divine, car elle se produisait quand l'Empereur ou ses ministres avaient commis quelque faute.

Dans la vieille cosmologie chinoise, « la terre est représentée comme un corps suspendu dans l'air, et se déplaçant vers l'Est 5 »; elle était donc considérée comme l'une des planètes.

Le passage suivant emprunté au texte taoïste de Wen-tsé 6, décrit les différentes calamités qui, nous l'avons montré, sont les manifestations du même phénomène.

« Quand le ciel, courroucé contre les êtres vivants, veut les détruire, il les brûle. Le soleil et la lune perdent leur forme et subissent une éclipse. Les cinq planètes abandonnent leurs voies ordinaires; les quatre saisons empiètent les unes sur les autres; le jour est obscurci; les montagnes prennent feu et s'effondrent; les rivières se dessèchent; il tonne alors en hiver, et il gèle en été; l'air est lourd, et les hommes étouffent; l'Etat périclite; l'aspect et l'harmonie du ciel sont altérés; les mœurs de l'âge sont bouleversées [jetées en désordre]... tous les êtres vivants se querellent. »

Hoei-nan-tsé, auteur taoïste du IIIe siècle de notre ère, évoque ce dérangement du soleil et de la lune, et rapporte la même tradition : « Si les cinq planètes s'écartent de leur route, l'Etat et les Provinces sont dévastés par une inondation 7. »

Le Taoïsme est la principale religion de la Chine. « Le mot Tao signifiait à l'origine la révolution de la voie des cieux autour de la terre. Ce mouvement céleste était considéré comme la cause de tous les phénomènes terrestres. Le Tao était situé aux environs du pôle céleste, considéré comme le siège de la puissance, parce que tout tourne autour de lui. Avec le temps, Tao représenta l'énergie cosmique universelle cachée par delà l'ordre visible de la nature 8 .

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« Yuddha »

Dans un vieux livre d'astronomie hindoue, le Surya-Siddhanta, on trouve un chapitre intitulé.: « Des conjonctions planétaires. » L'astronomie moderne ne connaît qu'une sorte de conjonction entre les planètes, lorsqu'une planète (ou soleil) s'interpose entre la terre et une autre planète. Nous distinguons seulement les conjonctions et oppositions supérieures et inférieures. Mais l'ancienne astronomie hindoue admettait l'existence de multiples conjonctions différentes. Il y avait ainsi : samyoga (conjonction), samagama (rapprochement), yoga (jonction), melaka (association), yuti (union), yuddha (rencontre, dans le sens de conflit, de combat)

Le premier paragraphe du chapitre intitulé : « Des conjonctions planétaires », nous apprend qu'entre les planètes, il y a des conjonctions simples (samyoga samagama), et des rencontres avec combat (yuddha). L'énergie des planètes qui se manifeste dans les conjonctions est appelée bala. Une planète peut être vaincue (jita) dans une rencontre apasvya ; elle peut être abattue (vidhvasta), ou complètement écrasée (vijita). Une planète puissante est appelée balise; et la planète victorieuse jayin. « Vénus triomphe généralement ».

A propos de cette dernière phrase, le traducteur du Surya-Siddhanta a écrit : « Dans ce passage nous quittons le domaine propre de l'astronomie, et empiétons sur celui de l'astrologie. » A l'exception des premières lignes d'introduction, où l'ouvrage est présenté comme une révélation du Soleil (introduction fréquente dans les traités d'astronomie hindous), le style est très sobre : racines carrées, figures géométriques, termes algébriques, chaque phrase de l'ouvrage est écrite dans une langue scientifique infiniment précieuse 2.

Ce manuel du Surya-Siddhanta révèle également une conception correcte de la terre, « sphère », ou « globe de l'éther ». Les anciens Hindous rangeaient donc la terre parmi les planètes, bien qu'elle fût, selon eux, le centre de l'univers 3. Aryabhata soutenait que la terre tourne sur son axe 4. Comme l'auteur du Livre de Job, qui écrivait que la terre n'est suspendue « à rien » (XXVI, 7), le Surya savait que les termes « au-dessus » et « au-dessous » sont seulement relatifs.

« Et partout sur la terre, les hommes croient que leur place est en haut; mais, puisque c'est un globe évoluant dans l'éther, où serait donc sa partie supérieure, et où serait sa partie inférieure ? 5 »

Le chapitre étrange du Surya-Siddhanta sur les conjonctions des planètes et leurs conflits quand elles se rapprochent a fait croire aux savants modernes que cette partie de l'ouvrage n'offrait pas la valeur scientifique si évidente ailleurs; ou bien qu'il était le fruit de l'invention astrologique, peut-être même une interpolation. Nous savons maintenant que ce chapitre présente la même valeur que les autres, et que des rencontres de planètes se sont réellement produites plusieurs fois dans le système solaire.

Dans l'astronomie hindoue, une jonction de planètes est appelée Yoga (Yuga). Il est très significatif que les âges du monde soient également nommés yogas ou conjonctions planétaires 6 (plus exactement, jonctions).

Le Bundehesh

Le texte indo-iranien du Bundehesh 1 parle lui aussi de la théomachie, cette bataille entre les dieux, que décrivent les poèmes homériques, l'Edda, et l'épopée d'Huitzilopochtli. « Les planètes s'élancèrent à l'assaut du ciel, et jetèrent la confusion dans le cosmos tout entier 2. »

Au cours de cette longue bataille entre les corps célestes, l'un d'eux plongea le monde dans une nuit totale, bouleversa la création et la couvrit de vermine. Nous avons reconnu dans cet acte du drame cosmique le premier contact de la terre avec la comète Typhon. D'autres actes suivirent. Les perturbations planétaires durèrent longtemps. « La sphère céleste était en

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révolution... les planètes, accompagnées de nombreux démons, se jetèrent sur la sphère céleste, et mélangèrent les constellations; la création était méconnaissable, comme si le feu défigurait toute chose, et recouvrait tout de fumée 3. »

C'est la planète appelée Gokihar, ou « progéniture du loup » et « perturbatrice particulière de la Lune 4 », ainsi qu'un corps céleste appelé Miévish-Muspar « porte-queue », donc une comète 5, qui semèrent la confusion dans le Soleil, la Lune et les étoiles. Mais finalement « avec le consentement de tous, le Soleil attacha Muspar à ses rayons, pour l'empêcher de nuire 6 ».

La planète Gokihar, progéniture du loup, et « perturbatrice de la Lune » n'est autre que la planète Mars. A cause de ses queues, Muspar semble être Tystrie, le « chef des étoiles en lutte contre les planètes ». A l'issue de ces batailles célestes, le Soleil fit de Vénus l'Etoile du Matin et du Soir, ou il assigna à Lucifer une position plus basse, pour l'empêcher de nuire. Dans le Bundehesh, les forces en conflit ne sont pas nommées « dieux » mais simplement « planètes ».

Lucifer précipité

On peut dire que la planète Mars, en entrant en collision avec Vénus, épargna à la terre une immense catastrophe. Depuis les temps de l'Exode et de Josué, Vénus était redoutée des peuples du monde entier. Pendant près de sept cents ans, cette terreur demeura suspendue sur l'humanité comme l'épée de Damoclès. Dans les deux hémisphères, on offrait à Vénus des sacrifices humains pour l'apaiser.

Après des siècles de peur, le danger s'éloigna, mais pour céder la place à un nouveau péril. Les peuples, maintenant, redoutaient Mars; tous les quinze ans ils appréhendaient son retour. Mais, entre temps, Mars avait subi le choc, sinon les chocs répétés de Vénus, et avait ainsi sauvé la terre.

Vénus, qui était entrée en contact avec la terre au XVe siècle avant notre ère, entra en collision avec Mars au VIIIe siècle. A cette époque, la vitesse elliptique de Vénus était inférieure à celle qu'elle possédait lors de sa rencontre avec la terre, mais Mars, dont la masse n'est que le huitième de celle de Vénus, n'était pas de force à lui résister. Il est donc très remarquable que Mars, bien que mis hors de combat, ait néanmoins réussi à transformer l'orbite elliptique de Vénus en une orbite presque circulaire 1. Du point de vue terrestre, Vénus remplaça sa trajectoire qui s'élevait jusqu'au zénith et au delà, par la trajectoire actuelle 2, où elle ne s'écarte jamais du soleil de plus de 48 degrés; c'est ainsi qu'elle devint une étoile du soir ou du matin, qui précède le soleil levant ou le soleil couchant. Terreur du monde pendant plusieurs siècles, Vénus était devenue une planète exemplairement soumise.

Isaïe, en évoquant symboliquement le roi de Babylone, qui détruisait les villes, et transformait le pays en un désert, prononça les paroles très remarquables que l'on sait sur Lucifer, qui tomba des cieux, et fut précipité au sol. Les commentateurs soupçonnèrent que ces mots appliqués au roi de Babylone recalaient quelque légende relative à l'Etoile du Matin. Leur sort se ressemblait étrangement : l'un et l'autre tombèrent de haut. Mais que signifie cette chute de l'Etoile du Matin ? se demandèrent les commentateurs.

Très significatives sont les paroles d'Isaïe sur l'Etoile du Matin, qui « affaiblit les nations » avant d'être précipitée. Elle les avait affaiblies, certes, par deux contacts successifs avec la terre, et en maintenant les hommes dans une terreur continuelle pendant des siècles.

Le livre d'Isaïe, à chaque chapitre, témoigne qu'avec l'éloignement de Vénus qui, de ce fait, ne traversait plus l'orbite de la terre, le danger ne disparut pas, mais au contraire, redoubla.

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Chapitre 4

Le dieu-glaive

Dans la Babylone du VIIIe siècle, la planète Mars devint un dieu important et redouté : on lui adressait prières, hymnes, invocations, et l'on murmurait des formules magiques, « les mots magiques prononcés en levant les mains en direction de la planète Nergal (Mars) ». Les prières étaient donc adressées directement à la planète 1. Comme l'Arès des Grecs, Nergal était appelé « roi de la bataille, qui apporte la défaite, qui donne la victoire ». Nergal ne pouvait être considéré comme un dieu favorable au peuple babylonien; en une nuit fatale il avait infligé un cruel désastre à Sennachérib.

« Effrayante lumière, Nergal, roi des batailla, Ton visage éblouit, et ta bouche est de feu, Dieu-flamme furieux, dieu Nergal. Tu es l'Angoisse et la Terreur, Dieu-Glaive, Seigneur qui erres dans la nuit, Dieu-flamme horrible et furieux... Dont les assauts sont un flot de tempête. »

Au cours de l'une de ses grandes conjonctions, l'atmosphère de Mars s'allongea, si bien

qu'elle ressembla à un glaive. Maints prodiges célestes, avant et après celui-ci, prirent aussi cette forme. C'est ainsi qu'au temps de David apparut une comète, qui avait la forme d'un homme « entre le ciel et la terre, tenant à la main une épée, étendue sur Jérusalem » 2.

Le Mars romain était représenté avec un glaive; il devint le dieu de la guerre. Le Nergal chaldéen est appelé le « dieu-glaive ». Isaïe mentionna ce glaive, quand il annonça le retour du cataclysme, le torrent de soufre, les flammes, les tempêtes, et le vacillement du ciel. « L'Assyrien tombera sous les coups d'un glaive, qui n'est pas d'un homme; une épée qui n'est pas d'un mortel en fera sa proie. Il prendra la fuite devant le glaive 3. » « Et toute leur armée (celle des cieux) tombera... car elle est ivre dans les cieux, l'épée du Seigneur 4. »

Les Anciens classaient les comètes selon leur aspect; dans les vieux textes astrologiques, comme dans le Livre des Prophéties de Daniel, les comètes qui avaient la forme d'une épée étaient rattachées à la planète Mars 5.

Outre cet aspect qu'affectait l'atmosphère de Mars, allongée à son approche de la terre, une seconde raison a contribué à faire de Mars le dieu de la guerre. Un caractère belliqueux ou « martial » fut attribué à la comète, à cause du grand trouble et de l'intense anxiété qu'elle suscitait, et qui provoquaient les migrations et les guerres. Depuis les temps les plus reculés, les prodiges célestes sont en effet considérés comme les présages de grands bouleversements et de grandes guerres.

La planète qui entrait en collision avec les autres planètes et se ruait contre la terre, armée d'un glaive de feu, devint le dieu de la guerre, et arracha son titre à Athénê Ishtar.

« Les dieux du ciel t'ont déclaré la guerre », proclament les hymnes à la planète Nergal, et c'est cette même guerre que décrit l'Iliade.

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Nergal était appelé quarradu rabu, « le grand guerrier ». Il livra la guerre aux dieux et à la terre. L'idéogramme le plus courant pour Nergal, en caractères cunéiformes sémitiques, est namsaru qui signifie « épée » 6. Sur les inscriptions babyloniennes du VIIe siècle, la planète Mars était appelée « la plus violente des divinités ».

Hérodote disait que les Scythes adoraient Arès (Mars), et le représentaient par un cimeterre de fer. Ils lui offraient des sacrifices humains, et répandaient du sang sur le cimeterre 7. Solinus écrivit des Scythes : «, Le dieu de ce peuple est Mars ; au lieu d'images, ils adorent des épées 8. »

La guerre dans le ciel entre les planètes, la guerre sur terre entre les nations errant dans l'angoisse, la ruée vers la terre d'une planète, qui brandissait une épée de flammes, attaquait les mers et les continents, tout ceci concourut à faire de Mars le dieu de la guerre.

L'épée du dieu de la guerre ne ressemblait pas à l'épée d'un « homme puissant »; elle ne s'enfonçait pas dans la chair; niais elle amenait la peste et la mort. Une prière à la planète Mars (Nergal) déclare :

« Demeure radieuse, qui éclaires la terre... Qui est ton égal ? Quand tu te rues à la bataille, Quand tu terrasses l'ennemi, Qui peut éviter tes regards, Se préserver de tes assauts ? Ton signe est un rets terrible , Etendu au ciel et sur terre... La maladie obéit à ton signe; Elle affaiblit Les hommes, Ton signe, quand il paraît là-haut, Jette la maladie sur le pays. »

L'épidémie de peste qui semble la conséquence du premier contact avec la planète Mars se

répéta à chacun des contacts ultérieurs. Amos prononça ces paroles : « je vous ai frappé par la rouille et le dessèchement du blé… Je vous ai dépêché une peste semblable à celle d'Egypte. »

Les Babyloniens regardaient Nergal comme le dieu de la guerre et de la peste. Telle était, aux yeux des Grecs, la planète Arès, et, aux yeux des Romains, la planète Mars.

Le Loup Fenris

Dans les textes d'astronomie babylonienne, il est dit qu' « une étoile prend l'aspect de différents animaux : lion, chacal, chien, porc, poisson » 1. Ceci, à notre avis, explique le culte que portaient aux animaux les peuples anciens, et en particulier les Egyptiens.

La planète Mars, par suite de la déformation de son atmosphère à l'approche des autres corps célestes - Vénus, Mars, la terre - prit diverses formes. Les Mexicains rapportaient qu'Huitzilopochtli, le farouche destructeur des villes, apparaissait sous l'aspect d'oiseaux et de bêtes 2. Mars, une fois, ressembla indiscutablement à un lion, ou à un chacal. A Babylone, où il avait au reste plusieurs noms, on l'appelait Chacal 3. En Egypte aussi, il semble bien que le dieu à tête de loup ou de chacal ait représenté Mars. On disait qu'il était « le loup qui rôde et tourne autour de cette terre » 4.

On lit sur la carte astronomique de Soutchéou qu' « un jour Vénus se jeta sur l'étoile-loup ». Cette étoile-loup semble désigner Mars 5.

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Dans la religion romaine 6, le loup ou Lupus Martius symbolisait le dieu Mars; de là naquit la légende de Romulus, fils de Mars, qui fut nourri par une louve. Selon la légende, la conception de Romulus eut lieu au cours d'une très longue éclipse.

Le Vukadlak des Slaves, qui suivait les nuages et dévorait le soleil ou la lune, avait la forme d'un loup 7. Les tribus de la Germanie septentrionale citaient aussi le loup Sköl qui pourchassa le soleil 8. Dans l'Edda, le dieu planétaire qui obscurcit le soleil est appelé loup Fenris : « Comment le soleil, dévoré par Fenris, peut-il donc revenir dans le ciel paisible ? » L'épopée islandaise représente la bataille entre Mars et Vénus, comme une lutte entre le loup Fenris et le serpent Midgard.

« Le serpent éblouissant, gueule béante, dans les cieux là haut » et « le loup écumant » se battent dans le ciel. Des tempêtes se déchaînent en plein été; puis vient le jour, et « le soleil s'assombrit »; au milieu d'un grand bouleversement, « les cieux s'entrouvrent »; « dans son courroux, le maître de la terre frappe, et tous les hommes doivent fuir de leurs maisons. Le Soleil devient noir, la terre s'abîme dans la mer, les étoiles brûlantes s'abattent des cieux, le fleuve s'emporte... jusqu'à ce que le feu monte plus haut que les cieux eux-mêmes 9 ».

Le temps du Glaive et le temps du Loup

La crainte du jugement Dernier, loin de pacifier les nations, provoqua maintes guerres et de grandes migrations.

Les Scythes quittèrent les plaines du Dniepr et de la Volga, et se dirigèrent vers le Sud. Mycènes et les îles de la mer Egée furent abandonnés des Grecs qui, pendant ces années de bouleversements cosmiques, mirent le siège devant Troie. Les rois assyriens guerroyèrent en Susiane, en Palestine, en Egypte, et jusqu'au delà du Caucase.

Les guerres civiles, les luttes entre tribus et entre familles devinrent si générales que les mêmes plaintes retentirent partout. Comme je l'ai déjà dit, ces conflits, autant que son apparence guerrière, firent conférer à Mars le titre de dieu de la guerre.

« ... Le pays est en feu, et le peuple est devenu la proie des flammes... Personne n'a pitié de son frère », dit Isaïe (IX, 19). En Egypte, une inscription du XIIIe siècle note en même temps que la perturbation du mouvement de la lune, des luttes incessantes dans le pays : « Cependant, les années passaient dans l'hostilité, chacun s'emparant des biens de son voisin, personne ne se souvenant de protéger son fils 1. » Isaïe, parlant du jour de Colère, proclame. « je vais exciter les Egyptiens les uns contre les autres, ils vont se battre entre frères, entre amis, entre villes, entre royaumes 2. » Il en avait été de même, sept cents ans plus tôt, au temps des cataclysmes amenés par Vénus. Un sage égyptien se lamentait ainsi : « je te montre la terre sens dessus dessous; le soleil est voilé, et n'apparaît plus brillant au regard des hommes. je te montre le fils devenu ennemi, le frère devenu ennemi, un homme tuant son père 3. »

La Voluspa islandaise déclare : « Le soleil s'obscurcit... Les frères lutteront entre eux, et se tueront... Temps de la Hache, temps de l'Epée qui fend les boucliers, temps du vent, temps du loup, avant que le monde ne s'abîme; et jamais plus les hommes ne s'épargneront 4. »

Les guerres de Shalmaneser IV, de Sargon Il, et de Sennachérib furent menées entre les cataclysmes, et même parfois pendant qu'ils se déchaînaient; à plusieurs reprises, elles furent interrompues par les forces naturelles. Sa seconde campagne inspira ces mots à Sennachérib : « Le mois de la pluie est arrivé avec les grands froids, et de gros orages ont fait tomber pluie sur pluie, et beaucoup de neige. J'ai eu peur des torrents gonflés des montagnes; j'ai fait demi-tour avec mon char, et j'ai repris la route de Ninive 5. »

Avant qu'il n'entreprît la dernière campagne de Palestine, ses astrologues lui conseillèrent de se hâter, s'il voulait éviter un désastre 6. Nous avons vu qu'il ne put y échapper. Cependant Isaïe, qui incitait Ezéchias à résister à Sennachérib, avait envisagé l'éventualité d'une

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catastrophe l'année de l'opposition de Mars, et fondait tous ses espoirs sur une intervention des forces naturelles.

Comme le prouve une inscription du roi Sargon 7, les Babyloniens appelaient l'année de l'opposition de Mars « l'année du dieu-feu », et son mois, « le mois de la descente du dieu-feu ».

Dans La Naissance du dieu de la Guerre, le poète hindou Kâlidâsa esquisse une description très vivante des guerres simultanément livrées dans les cieux et sur la terre, et les associe en une seule bataille immense.

« Une horrible nuée... d'oiseaux affreux arriva... et obscurcit le soleil; des serpents monstrueux, plus noirs que la suie, crachant un venin brûlant dans l'air, jetèrent la panique dans l'armée. Le soleil était entouré d'un halo défaillant : à l'intérieur, se tordaient de grands serpents affreux, et dans le cercle même du soleil étaient des spectres de chacals. »

« Un craquement énorme ébranla l'univers, Au milieu des éclairs et des flammes de feu Qui allumaient les cieux jusque en leurs confins, Jetant partout l'effroi dans le ciel sans nuages ; Et des charbons ardents s'abattirent en trombe, Mêlés au sang des morts, et à leurs ossements ; La fumée, les éclairs, horrifiaient Leurs âmes ; Et le ciel morne était comme la peau des ânes ; Les éléphants tombaient, les chevaux trébuchaient, Les soldats, culbutés, abandonnaient leur poste Et le sol, sous leurs pas, craquait; l'océan se gonflait ; Le tremblement de terre épouvantait l'armée 8. »

Pendant un orage, les décharges électriques s'échangent généralement entre deux nuages ou

entre un nuage et le sol. Mais si, pour une raison quelconque, le potentiel électrique de l'ionosphère venait à s'accroître suffisamment, il se produirait une décharge entre la couche supérieure de l'atmosphère et le sol, et un coup de tonnerre formidable éclaterait dans un ciel sans nuages.

Selon Kâlidâsa, le dieu-planète Çiva « déposa sa semence dans le feu», et engendra ainsi Kumara, lequel livra bataille au grand démon nommé Taraka, qui « troublait le monde ».

Les astrologues babyloniens ont attribué à leurs dieux-planètes la faculté d'émettre les cris de différents animaux : lion, porc, chacal, cheval, âne, et de deux espèces d'oiseaux 9. Les anciens Chinois affirmaient de même que les planètes poussent des cris d'animaux, lorsqu'elles approchent de la terre, accompagnées d'une grêle de pierres 10. Il est fort probable que le craquement qui déchira quelque jour « le ciel pur » fit un bruit semblable à Ta-ra-ka, le nom du démon qui livra combat aux planètes.

Le roi éthiopien qui se dressa contre Sennachérib s'appelait Taharka ou Tirhakah (Tahargou) 11. En maints lieux du Proche et du Moyen-Orient, ce nom et des noms similaires sont brusquement devenus fort courants à la fin du VIIIe siècle avant notre ère.

Taraka jeta la confusion dans l'univers, de sorte que :

« Les saisons ont oublié Dans quel ordre elles se suivent ; Elles apportent au même instant Toutes les fleurs d'été, du Printemps, de l'automne. »

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Selon les sources rabbiniques, la nuit où fut détruite l'armée assyrienne, Sennachérib lui-

même eut la vie sauve, mais fut grièvement brûlé. Quelque temps après son retour de la désastreuse campagne de Palestine, il fut assassiné par deux de ses fils, alors qu'il priait dans un temple. Esarhaddon poursuivit ses frères parricides, les tua, et devint roi. Au cours d'une de ses campagnes en Egypte, un prodige naturel jeta la panique dans ses armées qui se dispersèrent, et s'enfuirent de Palestine, où le dieu-tempête Nergal avait déjà détruit l'armée de Sennachérib. Des inscriptions cunéiformes, composées au VIe siècle, sous le règne de Nabonidus, dernier roi de Babylone, rapportent laconiquement les principaux événements de la campagne d'Esarhaddon : « Au VIe siècle, les troupes assyriennes envahirent l'Egypte. Un grand orage les mit en fuite 12. » Une armée aussi disciplinée que l'armée assyrienne ne se serait pas débandée devant un simple orage. Cette inscription a suggéré à son traducteur moderne que le récit des Ecritures se rapportait, non à l'armée de Sennachérib, mais à celle de son successeur. Sinon, il nous faudrait penser que l'armée assyrienne fut anéantie deux fois de suite par un phénomène naturel. Il est cependant probable qu'après la destruction de l'armée de Sennachérib, les violentes décharges atmosphériques, ou certains signes célestes fréquemment visibles à cette époque, jetèrent la panique dans les troupes assyriennes.

Les séismes, le déplacement des pôles terrestres, les variations de climat, certains prodiges célestes terrifiants, provoquèrent de grandes migrations. Les Aztèques quittèrent leur pays natal. « Ces Mexicains emportaient avec eux une idole qu'ils appelaient Huitzilopochtli... Ils prétendaient que cette idole leur avait ordonné de quitter leur pays, et leur avait promis de les rendre seigneurs et maîtres de toutes les terres... riches en or, en argent, en plumes... et en toutes choses nécessaires à la vie. Les Mexicains partirent donc comme les enfants d'Israël, à la recherche d'une terre promise 13. » Aux Indes, le dieu tutélaire des envahisseurs aryens était Indra, dieu de la guerre, le Mars hindou.

Les Ioniens et les Doriens se répandirent sur les Iles, les Latins furent repoussés par de nouveaux arrivants dans la péninsule de l'Apennin, les Cimmériens traversèrent l'Europe et le Bosphore, et s'installèrent en Asie Mineure, les Scythes franchirent le Caucase et se fixèrent en Asie.

Synodos ou Rencontres et collisions planétaires

Nous nous souvenons que Flavius Josèphe, après avoir présenté le récit qu'avait fait Hérodote de la destruction de l'armée de Sennachérib, se proposait de citer une version différente de Bérose, qu'il introduisait par ces mots : « Voici ce qu'a écrit Bérose... » Malheureusement, la suite du texte a disparu. Or, si nous savons ce qui s'est passé la nuit du 23 mars 687, n'est-il pas possible de reconstituer le texte de Bérose ?

Nous pouvons affirmer que Bérose savait que le cataclysme avait pour cause le contact d'une planète avec la terre. Dans ses Questions naturelles, Sénèque décrit les cataclysmes de l'eau et du feu, qui menèrent le monde à deux doigts de la destruction. Il cite en même temps l'opinion de Bérose, et celle-ci est assez remarquable, puisqu'elle se fait l'écho d'antiques connaissances en tous points semblables à celles que nous sommes parvenus à déterminer par une longue série de déductions et de conclusions. Sénèque écrit : « Bérose, traducteur de Bel, attribue aux planètes, la cause de ces perturbations. » Et il ajoute : « Sa certitude était si grande qu'il a fixé les dates de l'embrasement et du déluge universels. La terre entière, dit-il, sera consumée, quand les étoiles qui suivent actuellement une orbite différente se réuniront sous le signe du Cancer, et s'aligneront en sorte qu'une ligne droite pourrait passer par le centre de tous ces globes. Le déluge arrivera quand ces mêmes planètes seront en conjonction au Capricorne 1. »

Si l'on néglige les détails, évidemment erronés, de cette théorie, il reste une vérité capitale. Les cataclysmes de l'embrasement et du déluge étaient attribués à l'influence des planètes, et

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leur conjonction était appelée l'instant fatal. Si telle était l'opinion de Bérose sur les cataclysmes universels, il est fort probable qu'il a expliqué avec les mêmes principes le cataclysme qui anéantit l'armée de Sennachérib. Ainsi peut-on reconstituer l'explication de Bérose, absente du texte de Josèphe.

Les astronomes chaldéens savaient que le système solaire n'est pas immuable, et que les planètes subissent des changements. Nous lisons dans Diodore de Sicile : « Chacune des planètes, selon eux (les Chaldéens) a une course différente, et sa rapidité et sa période sont susceptibles de changements et de variations 2. » Ils rangeaient la terre au nombre des planètes : ces mêmes Chaldéens, selon Diodore, affirmaient que « la lumière de la lune est réfléchie, et ses éclipses dues à l'ombre de la terre » 3. Ils n'ignoraient donc pas que la terre est un globe qui se meut dans l'espace, fait également connu de quelques philosophes grecs 4.

Ces philosophes grecs savaient que les planètes, si elles se rapprochaient trop, subissaient des perturbations considérables, et que de leur atmosphère bouleversée naissaient des comètes. Telle était l'importance de pareilles perturbations, qu'elles pouvaient provoquer sur notre globe le déluge ou un embrasement général.

Zénon de Citium, le fondateur de l'école stoïcienne 5, Anaxagore (500-428 av. J.-C.) et Démocrite (460-370 av. J.-C.) déclaraient que les planètes en conjonction pouvaient devenir coalescentes, et prendre ainsi la forme de comètes. Aristote, qui comprit mal leur doctrine, déclara : « Nous-mêmes avons observé la coïncidence de Jupiter avec une des étoiles des Gémeaux, qui s'en trouva cachée; pourtant, aucune comète ne s'est formée 6. »

Nous savons par Diogène de Laërte qu'Anaxagore croyait que les comètes étaient « la conjonction de deux planètes, qui émettent des flammes 7 » et Sénèque, sans nommer explicitement Anaxagore ni Démocrite, a écrit : « Voici l'explication que donnent plusieurs auteurs anciens. Quand une planète entre en conjonction avec une autre, leurs lumières se confondent, et elles prennent l'apparence d'une étoile allongée... L'intervalle qui les sépare est éclairé par chacune d'elles, s'enflamme, et se change en une traînée de feu 8. » Sénèque critiqua cette explication de la nature des comètes, en considérant que « les planètes ne peuvent rester longtemps en conjonction, la loi de la vélocité des corps devant nécessairement les séparer ».

Platon, suivant en cela les sages égyptiens, attribua le déluge et l'embrasement universels à l'action d'un corps céleste qui modifia sa trajectoire, et se rapprocha de la terre; il suggéra même que les planètes pouvaient provoquer des cataclysmes mondiaux périodiques 9. Le mot grec qui désigne la collision des planètes est synodos : selon un traducteur moderne, il implique à la fois une rencontre dans l'espace et une collision de planètes 10

Les Romains savaient que la terre est une planète. Pline, par exemple, écrivait : « Les humains sont distribués tout autour de la terre, et leurs pieds sont tournés vers les pieds de ceux qui sont à l'opposé... Autre merveille que la terre reste suspendue sans tomber, et nous entraîne avec elle 11. »

La terre, membre du système planétaire, entra en conflit avec d'autres planètes, et l'on retrouve chez les auteurs anciens la preuve qu'ils ne l'ignoraient point. Origène, dénonçant les théories de Celsus, écrivait : « Quant à nous, nous n'attribuons pas le déluge et l'embrasement universels aux cycles et aux périodes planétaires; mais nous déclarons qu'il faut chercher leur cause dans la prédominance du mal, que le déluge ou l'incendie anéantissent 12. » Celsus et Origène savaient donc parfaitement que le déluge et l'embrasement universels sont dus aux planètes, et que ces cataclysmes peuvent être prévus par le calcul.

Pline a écrit-. « La plupart des hommes ignorent une vérité qu'ont découverte, par leur difficile étude du firmament, les fondateurs de la science, à savoir que les éclairs sont les feux des trois planètes supérieures 13 ». Il les distinguait des éclairs ordinaires causés par la rencontre de deux nuages. Sénèque, son contemporain, établissait la même distinction entre les

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éclairs qui « frappent les maisons », ou « petites foudres », et les foudres de Jupiter « qui font écrouler la triple masse des montagnes 14 ».

Pline a décrit de façon très concrète une décharge interplanétaire. « Le feu céleste jaillit de la planète, comme craquent et pétillent les fragments d'une bûche enflammée 15, ». Si cette décharge tombe sur la terre, « elle s'accompagne de grands bouleversements de l'atmosphère » dus aux « douleurs de l'enfantement, pourrait-on dire, de la planète en gésine 16 »

Pline ajoute que la foudre de Mars tomba sur Bolséna, « la ville la plus riche de Toscane », et la brûla complètement. Il dit tenir ces renseignements de textes toscans, qui ne sont autres que les livres étrusques.

Bolséna, ou l'ancienne Volsini, était une des principales villes étrusques, peuple dont la civilisation précéda celle des Latins dans la péninsule de l'Apennin. Le royaume étrusque était situé sur l'emplacement de la Toscane actuelle, entre le Tibre et l'Arno.

Près de Bolséna, ou Volsini, se trouve un lac du même nom : il a environ onze kilomètres et demi de long, dix de large, et est profond de quatre-vingt cinq mètres. On a longtemps considéré ce lac comme un ancien cratère volcanique empli d'eau. Pourtant, sa surface de 117 kilomètres carrés dépasse de beaucoup celle des plus grands cratères connus , ceux de la Cordillère des Andes en Amérique du Sud, et ceux des îles Hawaï (îles Sandwich) dans le Pacifique. En conséquence, cette interprétation a été récemment critiquée. D'autre part, quoique le fond du lac soit fait de lave, et que le sol alentour contienne en abondance des cendres, de la lave, et des colonnes de basalte, le cône volcanique est absent.

En rapprochant la description de Pline, et les données du lac de Volsini, on peut être amené à se demander si les cendres, la lave et les colonnes de basalte, ne sont pas plutôt la conséquence de la « décharge » que mentionne Pline. De plus, si cette décharge est due à Mars, elle s'est vraisemblablement produite au VIIIe siècle avant notre ère. Les cataclysmes de cette époque provoquèrent le rapide déclin de la civilisation étrusque, de nouvelles migrations en Italie, la fondation de Rome. Les Etrusques, d'après la citation de Censorinus qui figure au chapitre « les Ages du monde », pensaient que des prodiges célestes annonçaient la fin de chaque âge. « Les Etrusques étaient versés dans la science des étoiles, et, après avoir attentivement observé les prodiges, ils enregistraient ces observations dans leurs livres ».

L'Assaillant des murailles

Après les bouleversements où Nergal « arracha la terre de ses gonds», et où, selon Isaïe, elle « fut secouée » et « chancela» des séismes puissants et réitérés dévastèrent des pays entiers, détruisirent des villes, abattirent les murailles des places fortes. « Assaillant des murailles, souillé de sang», tel apparaît Arès aux yeux d'Homère. Hésiode l'appelle « le saccageur des villes 1 » « Voici, dit Amos, que le Seigneur donne des ordres; il fera s'écrouler la grande maison ». C'est alors que se produisit la « commotion » du temps d'Osias, d'Achaz, et d'Ezéchias, où « les briques sont abattues» (Isaïe IX, 10), et « seul un très petit nombre d'hommes demeure »; « jour de déroute, d'écrasement et de confusion, envoyé par le Seigneur, Dieu des armées» (Isaïe XXII, 5), tandis que « les murailles sont jetées à bas ».

Les déplacements répétés du globe, la dislocation de la lithosphère, le glissement des couches intérieures durent provoquer toute une série de séismes pendant une longue période ; mais on ne prêtait guère attention à ces tremblements de terre locaux, qui semblaient négligeables après les gigantesques cataclysmes où « le ciel avait basculé ».

A maintes reprises, les rapports des astronomes de Ninive et de Babylone signalent des tremblements de terre, mais avec une extrême brièveté; ainsi peut-on lire : « La nuit dernière, il y a eu un tremblement de terre ». Ces secousses sismiques fréquentes devinrent pour les magiciens une riche matière à oracles, qui se condensaient en formules stéréotypées : « Quand la terre tremblera au mois de Shevat », ou bien « Quand la terre tremblera au mois de Nisan »,

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tel ou tel événement alors se produira. Il arrivait que l'observation reposât sur un fondement exact : tel est le cas de cette formule : « Quand la terre tremblera tout un jour, il y aura une destruction de tout le pays, quand elle tremblera continuellement, il y aura une invasion de l'ennemi 2. »

Nombreux sont, en Mésopotamie, les textes qui signalent des tremblements de terre au VIIIe et au IXe siècle; une date même leur est attribuée 3. Nous ne connaissons rien de comparable dans les temps modernes. L'un de ces rapports impute le désastre à Nergal (Mars). « La terre a tremblé; tout le pays s'est effondré; Nergal étrangle le pays 4. » Les temples, pourtant très soigneusement construits, et avec des fondations qui pussent résister aux chocs, étaient fréquemment détruits par les cataclysmes, et l'invariable coupable était Nergal. C'est lui qu'on rendait responsable de l'effondrement du temple de Nippur, détruit par un séisme 5.

De nombreuses inscriptions des rois babyloniens, successeurs de Sennachérib, signalent des palais et des temples qu'il fallut réparer. Souvent, deux rois successifs, et à quelques années d'intervalle, durent remettre en état les mêmes édifices. C'est ce que firent Nergilissar (Nériglissar), et Nabuchodonosor 6. Au cours des grands cataclysmes des VIIIe et VIIe siècles, tous les bâtiments furent endommagés, et les nouvelles constructions furent calculées de façon à absorber des chocs fréquents. A la fin du VIIe siècle, Nabuchodonosor décrivit les précautions qu'on fut contraint de prendre : les fondations étaient « enfoncées dans les entrailles de la terre ». Les fouilles ont mis à jour 7 des pierres énormes dont les joints s'encastraient les uns dans les autres. Les Babyloniens s'étaient également aperçu que les murs de briques cuites possédaient une plus grande élasticité que les murs de pierres; sur une base de grands blocs de pierres, on éleva donc des murs de briques 8.

« La terre a rejeté de l'huile et de l'asphalte », observèrent les astrologues officiels. Le phénomène s'expliquait aisément dans un pays aussi riche en pétrole que la Mésopotamie 9.

A différentes reprises, les Ecritures et les sources rabbiniques ont évoqué la réparation des brèches de la Maison du Seigneur. Le jour de la « commotion » d'Osias, une grande brèche s'ouvrit dans le temple 10. Les allusions aux murs lézardés des maisons, des grands palais, des petites habitations, sont fort nombreuses dans les Prophètes du VIIIe siècle. Isaïe parle des « brèches de la cité de David» qui « sont nombreuses 11 ». Les murs du temple étaient le souci permanent des rois de Jérusalem, ainsi que le rempart extérieur de la ville, « qui fut jeté à bas 12 ».

Les tremblements de terre étant aujourd'hui assez rares en Palestine, les fréquentes allusions qu'y font les Prophètes et les Psalmistes n'ont cessé d'étonner les commentateurs : « Les tremblements de terre occupent dans les conceptions religieuses des Israélites une place exagérée, étant donné la rareté de ce phénomène en Palestine 13 ».

C'est un séisme qui détruisit Troie, cadre de l'épopée homérique. Les fouilles de l'expédition archéologique de l'Université de Cincinnati ont établi que la fameuse « sixième cité » d'Hissarlik, forteresse du roi Priam, avait été démolie par des secousses sismiques 14.

Plusieurs théories ont été proposées sur les causes des tremblements de terre, mais aucune

n'est entièrement satisfaisante. L'une d'elles fait du tremblement de terre un cas particulier du processus de formation des montagnes. On suppose que les montagnes sont nées de la contraction de la croûte terrestre, lors du refroidissement de la terre 15. Cette théorie postule qu'à l'origine la terre était liquide. Le plissement de la croûte forme les montagnes et provoque les tremblements de terre.

Une seconde théorie attribue les tremblements de terre à la mise en mouvement des masses de terre, sinon de continents entiers. Cette théorie postule elle aussi l'existence d'une mince croûte reposant sur un substrat visqueux. Certaines similarités entre la flore et la faune de l'Amérique du Sud et de l'Afrique occidentale ont fait naître l'hypothèse que les deux

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continents, jadis unis, se sont séparés dans des époques géologiques récentes, et ont ensuite dérivé dans des directions opposées. Pour cette théorie, la convection thermique est la cause mécanique de la dérive, le magma produisant la chaleur.

Une troisième théorie suppose l'existence de hautes montagnes et de profondes vallées sur la surface intérieure de la croûte, face au magma. Le glissement de roches énormes sur les pentes de ces montagnes, par l'effet de la gravitation, serait à l'origine des séismes.

La côte occidentale de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud, ou côte de la Cordillère, et la côte orientale de l'Asie jusqu'aux Indes néerlandaises, constituent la zone où l'activité sismique est la plus intense, 80% de la force mécanique produite par les volcans y étant concentrée. Une autre zone est comprise entre la Méditerranée et le plateau asiatique.

Dans l'espoir de découvrir une relation entre les tremblements de terre et d'autres phénomènes naturels, on a fait une étude statistique des tremblements de terre constatés au milieu du XRXe siècle; les résultats suggèrent que les séismes sont plus nombreux au moment de la nouvelle et de la pleine lune, ou bien quand la force d'attraction de la lune agit soit dans le même sens que celle du soleil, soit en sens contraire. L'époque où la lune est au périgée, c'est-à-dire le plus près de la terre, serait également favorable aux séismes 16. La validité de ces observations est très contestée.

Cependant, le processus de la formation des montagnes demeure inexpliqué; la dérive des continents n'est qu'une hypothèse; la fragmentation de la croûte terrestre doit s'expliquer par quelque cause autre que la gravitation; celle-ci agissait déjà lors de la constitution de la croûte, et elle eût pu lui conférer d'emblée sa forme présente. Toutes ces théories ne sont donc que des hypothèses sur les causes inconnues de phénomènes connus.

Les documents recueillis dans les pages précédentes suggèrent une quatrième hypothèse : les tremblements de terre résulteraient de la torsion de la croûte, à la suite d'un changement de position de l'équateur, et du déplacement du magma du globe par l'attraction directe d'un corps cosmique très proche. Attraction, déplacement, torsion, provoquèrent de même la formation des montagnes.

Si cette conception de l'origine des tremblements de terre est exacte, ceux-ci n'ont dû cesser de se raréfier depuis le dernier cataclysme cosmique. Il suffit, pour s'en assurer, de relire l'histoire de la péninsule apennine, de la Méditerranée orientale, de la Mésopotamie, fondée sur des documents dignes de foi et de comparer dans les mêmes régions l'activité sismique, d'alors à celle d'aujourd'hui.

Nombre d'auteurs classiques mentionnent les tremblements de terre de Mésopotamie, de Grèce, de Rome. Je me bornerai, pour suggérer quelque idée de l'activité de ces temps lointains, à rappeler que cinquante-sept tremblements de terre furent constatés à Rome en une seule année 17, au cours des guerres puniques (217 av. J.-C.).

Si notre interprétation est exacte, non seulement les séismes ont dû être plus violents et plus nombreux dans le passé qu'aujourd'hui, mais encore les Anciens ne devaient point en ignorer les causes.

Or il se trouve que Pline a écrit : « Les Babyloniens prétendent que même les tremblements de terre et les fissures du sol, comme au reste tous les autres phénomènes, sont causés par l'influence des étoiles; dans ce cas, par trois étoiles (planètes) seulement celles auxquelles ils attribuent la foudre 18.

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Chapitre 5

Les coursiers de Mars

L'exemple d'Abraham Rockenbach et de David Herlicius, qui écrivaient aux environs de 1600 et étaient bien informés sur la question des comètes de l'Antiquité 1, prouve qu'ils avaient connaissance de certains vieux manuscrits aujourd'hui disparus.

Un pamphlétaire, qui était aussi un érudit, Jonathan Swift, a écrit dans ses « Voyages de Gulliver » (1726) que Mars avait deux très petits satellites. « Certains astrologues... ont de même découvert deux petites étoiles, ou satellites, qui tournent autour de Mars; la plus proche est éloignée du centre de la planète exactement de trois fois son diamètre, et la plus éloignée de cinq. La première opère sa révolution en l'espace de dix heures, et la seconde en 21 heures et demie... Ce qui prouve indubitablement qu'elles obéissent à la même loi de gravitation qui régit les autres corps célestes 2 ».

En fait, Mars a bien deux satellites, simples fragments rocheux : le diamètre de l'un est inférieur à quinze kilomètres, celui de l'autre à huit kilomètres 3. Leurs périodes de révolution sont respectivement de 7 heures 39 minutes, et 30 heures 18 minutes. Leur distance au centre de Mars est encore inférieure au chiffre cité par Swift 4. Elles ont été découvertes par Asaph Hall en 1877. Elles n'étaient point observables avec les instruments d'optique du temps de Swift; et ni Newton, ni Halley, ses contemporains, ni même William Herschel au XVIIIe siècle, ou Leverrier au XIXe, n'ont soupçonné leur existence 6. Swift faisait montre d'une étonnante hardiesse, en mesurant en heures leurs très brèves périodes de révolution, et c'est vraiment une curieuse coïncidence, si ces satellites sont une invention swiftienne, qu'il ait deviné correctement non seulement leur existence, mais leur nombre, et surtout leurs courtes révolutions. Le passage, en tout cas, a provoqué l'étonnement des,critiques littéraires.

Le hasard, ainsi, aurait admirablement fait les choses; mais il est possible aussi que Swift ait eu connaissance de quelque texte mentionnant les deux satellites de Mars, et inconnu de nous ou de ses contemporains. Il est remarquable qu'Homère parle des « deux coursiers de Mars », qui tiraient son char ; et Virgile les a également mentionnés 6.

Quand Mars était tout près de la terre, les deux satellites étaient visibles; ils précédaient la planète, et tournaient autour d'elle. Au cours des perturbations qui se produisirent, ils s'approprièrent sans doute un peu de l'atmosphère de Mars, alors dispersée, et apparurent avec d'éclatantes crinières 7. Les coursiers étaient attelés, quand Mars (Arès) se préparait à descendre sur la terre pour la châtier.

Lorsque Asaph Hall découvrit les satellites, il choisit de leur donner les noms de Phobos (la Crainte) et Deimos (I'Epouvante), ceux-mêrnes des deux coursiers de Mars 8. Sans avoir une totale conscience de la portée de cette décision, il conférait aux satellites les noms sous lesquels les Anciens les connaissaient.

Nous ignorons si Swift apprit dans quelque ancien traité d'astronomie l'existence des deux satellites de Mars, mais il est en tout cas certain que les poètes anciens la connaissaient.

Les terribles

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Vénus avait une queue plus courte qu'au temps où elle était comète, mais encore suffisamment longue pour suggérer l'impression d'une flamme, d'une fumée ou d'une chevelure qui lui eût été attachée. Lorsque Mars heurta Vénus, astéroïdes 1, météorites et gaz furent arrachés à cette queue, et commencèrent à mener une existence semi-indépendante, certains suivant l'orbite de Mars, les autres des trajectoires différentes.

Ces essaims de météorites, avec leurs appendices gazeux, étaient les comètes nouvelles ; leur forme, sujette à variations, leurs déplacements par groupes créaient une impression étrange. Celles qui suivaient Mars faisaient songer à une armée bruyante groupée derrière son chef. D'autre part, leurs orbites variaient constamment, et leur taille, modeste, prenait parfois des proportions gigantesques. Elles provoquaient la terreur chez les peuples de la terre. Peu après la collision avec Vénus, Mars commença de menacer la terre : alors, les nouvelles comètes, frôlant notre globe, ajoutèrent à l'horreur, car elles rappelaient sans répit aux hommes l'heure du péril.

L'Arès d'Homère, lorsqu'il part au combat, est accompagné de créatures horribles et inlassables, Crainte, Epouvante et Discorde. Crainte et Epouvante attellent les brillants coursiers d'Arès, bêtes terribles qui répondent aux mêmes noms. Discorde, « sœur et camarade du meurtrier Arès, tempête sans cesse. D'abord, elle ne soulève qu'un peu son casque, puis elle dresse la tête dans les cieux, tandis que ses pieds foulent la terre ».

Les Babyloniens évoquent également la planète Mars-Nergal et sa compagnie de démons, et on lit dans les hymnes à Nergal 2 : « De grands géants, des démons affreux, avec des membres terrifiants, courent à sa droite et à sa gauche ». Ces « démons furieux » sont encore dépeints dans le poème Nergal-Eris kigal 3; ils amènent la peste et les tremblements de terre.

Il semble aussi que les figures mythologiques des Furies latines, et des Erinnyes grecques, représentées avec des serpents enroulés autour de la tête et des bras, des yeux qui jettent des flammes, et des bras qui brandissent des torches en immenses cercles de feu, s'inspiraient des mêmes prodiges; aussi rapides dans leurs mouvements, changeant de forme toutes les heures et frappant avec une violence redoutable, les Erinnyes allaient en groupe, comme des chasseresses ou comme « une meute de chiens sauvages ». 4 Parfois, elles semblaient se scinder en deux groupes 5.

C'est à ces comètes, qui évoluent par groupe à la suite de Mars ou d'Indra, que sont dédiés la plupart des hymnes védiques.Elles sont appelées Marouts, « luisants comme des serpents » « éblouissants et forts », « éclatants comme des feux 6 »

« Indra, puissant héros, tu nous donnes la gloire, Indra terrible au milieu des terribles Marouts. Tu es puissant, et tu nous donnes la victoire 7. »

Il est dit que leur « force est égale à celle de leur père ».

« Votre charge, ô Marouts, paraît éblouissante... Nous vous invoquons, grands Marouts. Eternels voyageurs de l'espace... Comme l'aube, ils allument dans les nuits obscures Des rayons de feu, les Puissants, Et leur lumière éblouissant Le firmammt ressemble à une mer de lait... Dans leur course splendide, effrénée, Ils ont revêtu leur plus vive couleur 8 »

Ces comètes ont lancé des pierres

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« 0 vous, puissants Marouts aux lances éclatantes, Qui ébranlez l'inébranlable..... Qui projetez des pierres sur votre passage..... Tous les êtres humains redoutent les Marouts 9. Que votre marche soit brillante, ô Marouts... Luisants comme des serpents. Que vos flêches rapides, ô Marouts, Généreux bienfaiteurs, passent très loin de nous, Et loin de nous la pierre que vous décochez 10 ».

Les météorites, en pénètrant dans l'atmosphère de la terre, font un terrible fracas. De même

les Marouts :

« Au coeur du jour, les Marouts ont créé les ténèbres... Alors, en entendant les clameurs des Marouts, Sur toute la surface de la terre, Les hommes ont courbé la tête 11 ».

Les mêmes ténèbres, le même vacarme ont été décrits dans les sources rabbiniques, les

Ecritures, les traditions romaines, et les hymnes à Nergal. La similarité de la description des « Terribles » dans les hymnes védiques et dans Joël est frappante; personne, jusqu'à ce jour, ne semble l'avoir soulignée; qu'on nous permette donc quelques citations supplémentaires.

Les comètes, à leur naissance, ressemblèrent à des torches qui tournoyaient ou à des noeuds de serpents; elles tournaient comme des roues, et les fantasmagories célestes évoquaient des chars rapides. Changeant de forme, les Marouts ressemblèrent à des chevaux galopant dans le ciel, puis à une armée de guerriers, qui bondissaient en une invincible ascension.

Les versets du second chapitre de Joël (II, 2-II) sont cités dans leur ordre, en y intercalant des fragments empruntés à plusieurs hymnes védiques consacrés aux Marouts.

Joël II, 2.

« Jour de ténèbres et d'obscurité, Jour gris et couvert de nuées. Telle l'aurore se répand sur les montagnes : Un peuple immense et vigoureux Tel qu'il n'y en a jamais eu depuis l'origine, Et qu'il n'y en aura plus désormais, Jusqu'aux époques les plus lointaines ».

Hymnes védiques.

« Au coeur du jour, les Marouts ont créé les ténèbres 12. La terrible armée des Marouts, De ces héros éternellement jeunes 13. Tous les humains redoutent les Marouts, Plus terribles à voir que les rois 14.

Joël II, 3

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« Devant lui, un feu dévorant, Derrière lui, une flamme brillante. Rien ne lui échappe.»

Hymnes védiques

« Comme un souffle de feu... Brillants et forts, Brillants comme des feux, impétueux

Joël Il, 4

« A des chevaux, ils sont comparables Ils chargent comme des coursiers. »

Hymnes védiques

« Leurs charges font trembler la terre Et elle semble se briser Quand, sur les chemins de l'espace, Ils attellent pour la victoire. » Ils soignent leurs chevaux comme pour la course, Pressant la pointe du roseau Au flanc de leurs coursiers rapides 16. »

Joël II, 5

« On dirait le vacarme de chars bondisant sur les sommets, Le crépitement de la flamme qui dévore la paille, Une armée formidable rangée en bataille. »

Hymnes védiques

« Ils sont des conducteurs ardents, Qui s'élancent à la bataille. Ils sont éblouissants, leurs desseins sont terribles, Ils terrasseront l'ennemi. Sur vos chars, qui ploient sous le faix des éclairs.. Armée de chars, armée terrible des Marouts 17. »

Joël II, 6

« Devant eux frissonnent les peuples, Les visages blêmissent. »

Hymnes védiques

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« Le fils de l'homme s'humilie à votre approche... Vous avez fait trembler les hommes, Et trembler toutes les montagnes 18. »

Joël II, 7

« Comme des preux, ils se ruent à l'assaut, Comme des guerriers, ils escaladent les murs, ils suivent chacun son chemin, Sans confondre leurs pistes. »

Hymnes védiques

« Notre victoire est violente, magnifique, Totale, écrasante, et splendide. L'inlassable année des Marouts... Aux terribles desseins, comme ceux des géants 19. »

Joël décrit comment ces guerriers, arrivés avec le feu et les nuages, se rueront sur les murs,

entreront par les fenêtres, se répandront par la ville, invulnérables. Les Hymnes védiques décrivent en termes identiques les conquêtes de cette terrible armée.

S'il subsistait quelque doute sur la nature des « Terribles », les lignes suivantes le dissiperaient :

Joël II, 10

Devant eux, tremble la terre, Les cieux vacillent, Le soleil et la lune s'obscurcissent. Les étoiles perdent leur éclat.»

Les Marouts sont souvent nommés « ceux qui ébranlent le ciel et la terre. »

Hymnes védiques

« Vous ébranlez le ciel, ô terribles Marouts, Et secouez même l'inébranlable. »

« Quand ceux dont la charge est terrible Ont fait trembler les rocs, Ou quand Les vigoureux Marouts Ont ébranlé le fond du ciel »

« Cachez les ténèbres haïes, Apportez la lumière ardemment désirée 20. »

La terre gémit, les météorites (I'armée du Seigneur) emplirent le ciel de leur cri de bataille,

« qui parcourut toute la surface de la terre », et « les hommes courbèrent la tête ». Tels étaient, selon Joël, « les prodiges dans le ciel et sur la terre, sang, tourbillons de fumée

» ; « le soleil tourne en ténèbres, la lune en sang ».

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Les nuages, le feu, le vacarme étourdissant, les ténèbres en plein jour, le ciel envahi de formes fantastiques ressemblant à des chars, des chevaux emballés, des guerriers en marche ; le tremblement de la terre, l'oscillation du ciel : ces prodiges furent vus, entend , ressentis, et redoutés à la fois sur les bords de la Méditerranée et de l'océan Indien, car ils n'étaient pas dus à des perturbations locales, mais au déploiement de forces cosmiques à une échelle cosmique. Joël ne s'inspire pas des Védas, ni les Védas de Joël. Cet exemple n'est pas le seul qui démontre que des peuples, séparés par l'océan, ont décrit le même spectacle en termes identiques. C'étaient des spectacles grandioses projetés sur l'écran céleste, visibles d'abord aux Indes, puis quelques heures après, à Ninive, à Jérusalem et Athènes, puis à Rome, et en Scandinavie, et enfin au pays des Mayas et des Incas.

Les spectateurs ont vu dans ces prodiges célestes, soit des démons telles les Erinnyes des Grecs et les Furies des Latins, soit, des dieux auxquels ils adressaient des prières comme les Védas, soit des exécuteurs de la colère de Dieu, et c'est le cas de Joël et d'Isaïe.

« Il élève une bannière pour appeler une nation lointaine, Il siffle pour la faire venir des confins de la terre, Et la voilà qui, légère, accourt à la hâte. Nul d'entre eux ne traîne, ne trébuche. Nul ne dort, ni ne sommeille ; Nul ne dénoue la ceinture de ses reins, Ni ne délace la courroie de ses souliers. Aiguës sont les flèches, Et tous leurs arcs tendus. Les sabots de leurs chevaux sont comme le silex, Et les roues de leurs chars ressemblent à l'ouragan. C'est le rugissement de la lionne... Et le grondement du jeune lion… Semblable au grondement de la mer : Quand on regardera la terre, on ne verra que ténèbres et angoisse : Et au ciel se répandront de sombres nuées 21. »

Le grondement des roues semblables à l'ouragan, les chevaux aux sabots de silex, les nuées

qui éteignent la lumière céleste sont des images d'une commune inspiration.

Hymnes védiques

« Et les Marouts virils, aux armes redoutables, Jamais ne combattent entre eux ; Solides sont les armes de vos chars, Et vos visages resplendissent 22. Ceux qui de par leur seule force Paraissent triompher de la terre et du ciel, Sont parés de la gloire des brillants héros, Radieuse jeunesse, aux ennemis fatale 23

Ceux qui comme le vent se ruent, Plus brillants que des langues de feu, Plus résistants que des soldats bardés de fer... Unis, tels les rayons aux roues des chars, Avec le fier regard des héros triomphants, Plus prompts que les coursiers les plus rapides 24... »

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Les terribles guerriers lancèrent une pluie de météorites, bombardant les murs des villes et

les maisons de graviers brûlants, en même temps que des secousses sismiques détruisaient des cités entières.

« La multitude des terribles » est comme « une poussière ténue», leur invasion « sera instantanée », dit Isaïe 25. Le Seigneur enverra son armée « avec force tonnerre, tremblements de terre, et fracas, tempêtes, ouragans, flammes d'un feu dévorant ».

« Les Marouts lancent leurs éclairs, Frappent avec la foudre, Brûlent avec le vent, Ebranlent les montagnes 26. »

Isaïe (XXV, 4) dit que « le souffle des Terribles est comme un ouragan contre le mur ». « Vous (le Seigneur) faites cesser la clameur des étrangers... Le chant triomphal des

Terribles s'éteint 27. » Les Marouts sont souvent appelés « les Terribles ». le terme même qu'employait Isaïe. Les «

Terribles » des Védas n'étaient pas d'ordinaire nuées d'orages, non plus que les « Terribles » de Joël et d'Isaïe n'étaient des êtres humains. C'est sans doute par pur hasard que les spécialistes des questions religieuses ont omis de remarquer la similitude parfaite des dénominations et des descriptions.

A nos yeux, les Marouts ne sont autres que des comètes qui après la collision de Vénus et de Mars, se multiplièrent à l'infini et se mirent à tourbillonner sur de minuscules orbites. Elles suivaient Mars ou le précédaient. Le mot Mars (génitif : Martis) aurait la même origine que Marouts. Il est donc réconfortant de constater que la parenté philologique a été déjà établie 28, et plus encore, de constater que cette assimilation philologique fut signalée sans qu'on connût les liens réels qui unissaient la planète Mars aux « Terribles ».

En rapprochant les données historiques d'Israël, les textes astronomiques chinois, les textes religieux latins, nous avons établi que la cause des cataclysmes du VIIIe et du VIIe siècle fut la planète Mars. L'épopée grecque nous a appris pourquoi, le danger de Vénus écarté, la planète Mars devint menace pour la terre. Dans les conflits célestes, Arès ou Nergal, symbolisant l'un et l'autre la planète Mars, étaient entourés de créatures démoniaques. Le nom Mars vient du mot hindou Marout, les Marouts, les « Terribles », sont les mêmes que les « Terribles » de Joël et d'Isaïe.

Les philologues ont discuté de l'origine du mot grec Arès et lui ont refusé une racine commune avec Mars. Il me semble que, tout comme Mars dérive de Marouts, les Terribles des Védas, Arès a été formé sur le nom hébraïque qui désigne « les Terribles », et qui est ariz, dans le livre d'Isaïe et de Joël.

Dans un texte aujourd'hui disparu, Pline parlait de la formation de comètes à partir des planètes. La carte de Soutchéou fait également allusion à certaines époques révolues où des planètes, Mars, Vénus, et d'autres, donnèrent naissance à des comètes.

Les pierres tombées des planètes

Nous avons lu l'imploration des hymnes védiques aux Marouts : « Passez très loin de nous, et loin de nous la pierre que vous décochez. »

Quand des comètes passent à proximité de la terre, on constate parfois une chute de pierres. Le cas classique est celui de la météorite qui tomba à Aegospotamos, alors qu'une comète brillait au ciel 1. Le Varahasanhita hindou considère les météores comme des présages de dévastation par le feu et les tremblements de terre 2.

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Les planètes étaient divinisées, et les pierres qui tombaient d'elles ou des comètes nées de leurs rencontres, étaient redoutées, et adorées comme des projectiles divins 3.

La pierre de Cronos à Delphes 4, l'effigie de Vénus à Chypre 5, celle de Diane à Ephèse qui, d'après les Actes (XIX, 35) provenait de la planète Jupiter, les pierres d'Ammon et de Set à Thèbes 6, étaient toutes des météorites. Le palladium de Troie était une pierre lancée par Pallas Athénê 7 (la planète Vénus). La pierre sacrée de Tyr était une météorite attribuée à Astarté (Vénus). « Parcourant le monde, elle (Astarté) trouva une pierre tombée de l'air; elle la ramassa, et la consacra sur l'île sainte (Tyr) 8. » A Apheca en Syrie, s'abattit une météorite que l'on prit pour Astarté elle-même; et on éleva au point de chute un temple à la déesse. La date des fêtes était fixée « de façon à coïncider avec l'apparition de Vénus, comme Etoile du Soir et du Matin 9 ».

La pierre qui servait d'assise au temple de Salomon (Eben Shetiya ou pierre de feu) est un bolide, tombé au temps de David, vers le début du Xe siècle, alors que passait au ciel une comète ayant l'apparence d'un homme qui brandissait une épée 10. Le bouclier sacré de Numa, l'ancile du Mars romain, était un autre bolide, qui s'était abattu au début du VIIe siècle 11, et on le prétendait envoyé par Mars.

Bien que la planète Mars fût depuis longtemps paisible, on continuait d'observer sa position au moment des chutes de météorites. Les chinois écrivaient en 211 avant notre ère : « La planète Mars étant au voisinage d'Antarès, une étoile est tombée à Toung Kiun, et en arrivant au sol, elle s'est transformée en pierre 12. » Les gens de l'endroit gravèrent sur la pierre des prophéties de malheur à l'adresse de l'Empereur : celui-ci fit détruire la pierre. L'habitude, qui s'est depuis maintenue, d'inscrire sur de telles pierres des messages à l'usage des peuples et des rois, était donc déjà connue.

Une des pierres tombées du ciel est encore aujourd'hui l'objet d'un culte : c'est la Pierre Noire de la Caaba à la Mecque. Les doigts et les lèvres de générations de pèlerins en ont noirci la surface, mais sous cette couche superficielle elle a conservé sa couleur rouge originelle. C'est l'objet le plus sacré de la Mecque; il est exposé à l'intérieur de la Caaba, et les pèlerins font des milliers de kilomètres pour le toucher et le baiser. La Caaba est plus ancienne que le mahométisme. Mahomet, au début de sa carrière, adorait Vénus (al-Uzza), et les autres dieux planétaires : ils sont encore aujourd'hui l'objet d'une grande vénération, en tant que « filles du dieu » 13.

D'après la tradition musulmane, la pierre noire serait tombée de la planète Vénus 14. Une autre légende prétend qu'elle fut apportée sur terre par l'archange Gabriel 15. Cette légende pouvant recéler quelques renseignements précieux sur l'origine de la pierre, il conviendrait de nous demander qui était l'archange Gabriel ?

Les Archanges

Les Ecritures attribuent la destruction de l'armée de Sennachérib à un « souffle », et quelques versets après, à un ange de Dieu 1. Le Talmud et le Midrash, qui relatent l'anéantissement de l'armée assyrienne par un « souffle » et un « fléau » accompagné d'un fracas terrifiant, la nuit même qui suivit la journée où l'ombre du soleil recula de dix degrés, apportent d'intéressantes précisions : le châtiment fut infligé par l'archange Gabriel, qui avait pris l' « apparence d'une colonne de feu » 2. Nous croyons avoir établi que ce fléau était l'oeuvre de Mars.

Les archanges personnifient-ils les planètes ? « Une vieille tradition, remontant à l'époque de Gaon, prétend qu'il y a sept archanges, dont chacun est associé à une planète 3 »; et que « les sept archanges jouent un rôle important dans l'ordre de l'univers, par suite de leur association avec les planètes et les constellations. » Les diverses venions varient quelque peu, lorsqu'elles établissent la correspondance entre les noms des anges et les planètes 4. Certains textes

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médiévaux associent Gabriel à la lune, et un ou deux à Mars 5. Le texte suivant rend pourtant possible l'identification de Gabriel. Il est associé à la fondation de Rome. Selon la légende juive, lorsque Salomon prit la fille du Pharaon pour femme, « l'archange Gabriel descendit du ciel, et plaça un roseau dans la mer ». La terre se déposa peu à peu alentour, et le jour où Jéroboam fit dresser les veaux d'or, on éleva dans l'île une petite hutte; ce fut la première habitation de Rome 6. Gabriel assume donc en cette circonstance le rôle que les Romains attribuaient à Mars, celui de fondateur de Rome 7. Et notre hypothèse se trouve vérifiée par les sources rabbiniques : c'est bien la planète Mars qui provoqua l'anéantissement de l'armée assyrienne au printemps 687; puisque l'archange Gabriel est un autre nom pour désigner la planète Mars, les anciens juifs connaissaient l'origine du « souffle », et savaient qui était cet « ange du Seigneur », fatal à l'armée assyrienne.

Gabriel est l'ange gardien du feu; il est aussi, selon Origène l'ange de la guerre. Nous reconnaissons maintenant en ses attributs ceux mêmes de Mars-Nergal. La tradition rabbinique nous apprend qu'avant de mourir, les guerriers de l'armée de Sennachérib furent autorisés par Gabriel à entendre « les chants des habitants célestes ». Il est possible d'interpréter ces chants comme le bruit causé par la planète toute proche. Les mots d'Isaïe (XXXIII, 3) : « au fracas de votre tonnerre (hamon), les peuples fuient », devraient, selon la tradition juive citée par Jérôme, se rapporter à Gabriel, Hamon étant une autre de ses dénominations 9.

La planète Mars est rouge. Or Maadim (celui qui est rouge, ou celui qui rougit) est le nom de Mars dans les textes d'astronomie hébraïques. Un de ces textes déclare : « Le Seigneur a créé Mars (Maadim), afin qu'il les précipite (les nations) dans l'enfer 10. »

Quelques sources rabbiniques attribuent la destruction de l'armée assyrienne à l'archange Michel, et d'autres aux deux archanges ensemble 11. Qui était donc l'archange Michel ?

On découvre sa présence d'un bout à l'autre du récit de l'Exode. Ainsi la colonne de feu et de

nuées est nommée l'ange de Dieu (Exode, XIV, 19). Selon le Midrash 12, c'est l'archange Michel qui se transforma en « un mur de feu », séparant ainsi les Israélites des Egyptiens. Michel, dit-on, était fait de feu. L'Agadah affirme : « Michel a été désigné comme grand prêtre du sanctuaire céleste, en même temps qu'Aaron devenait le grand prêtre d'Israël », c'est-à-dire à l'époque de l'Exode. Michel est encore l'ange qui apparut à Josué, fils de Noun.

L'image familière de l'archange Michel terrassant le dragon symbolise le combat qui eut lieu au ciel au moment du Passage. Michel allume le feu en touchant la terre, et les flammes du buisson ardent émanaient de l'archange. Il a sa demeure au ciel, et il est le précurseur de Shehina (ou Présence de Dieu). Mais comme Lucifer, il est précipité des cieux, et Dieu lui lie les mains. Tous ces attributs et ces actes 13 nous révèlent la planète que représente Michel : c'est de toute évidence Vénus.

L'archange Michel, ou la planète Vénus, et l'archange Gabriel, ou la planète Mars, sauvèrent le peuple israélite en deux circonstances dramatiques : au Passage de la mer Rouge, alors qu'ils apercevaient déjà l'armée égyptienne envoyée à leur poursuite (« Les Israélites, levant les yeux, aperçurent les Egyptiens qui étaient à leur poursuite. Ils furent saisis de terreur ») 14; la mer se fendit, ils la traversèrent à pied sec, et arrivèrent sur l'autre rive. Leurs ennemis furent projetés en l'air, puis engloutis par les lames, qui soudain s'abattirent, quand une étincelle jaillit entre Vénus et la terre.

Huit siècles s'écoulèrent après l'Exode. Les troupes assyriennes qui, une génération plus tôt, avaient réduit à l'exil les dix Tribus d'Israël, envahirent la Judée avec la volonté d'écraser la rébellion du peuple juif, et de le détruire à jamais.

Un « souffle » tomba de la planète Mars sur le camp des Assyriens, qui furent décimés. Les sources rabbiniques ne se sont pas trompées, qui attribuèrent le phénomène aux deux archanges

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: Vénus poussa Mars contre la terre, et les deux planètes furent en conséquence les instruments de la destruction.

L'auteur du livre apocryphe de l'Ascension (Assomption) de Moïse savait que « Vénus et Mars sont chacune aussi grandes que la terre entière 15 ».

En signe de reconnaissance pour leur intervention aux moments critiques de l'histoire d'Israël, Michel et Gabriel sont devenus « les Anges gardiens » des juifs.

Gabriel est l'Hercule des Hébreux (Héraclès). En fait, les auteurs classiques indiquaient clairement qu'Hercule représentait la planète Mars 16. Dans l'Evangile selon saint Luc (I, 26), Gabriel est l'ange de l'Annonciation à la Vierge.

Dans l'Eglise Catholique romaine, Michel est le « chef de l'armée céleste le premier des saints, après Marie », et le vainqueur de Satan.

Le culte des planètes en Judée au VIIe siècle

On n'était point encore parvenu à dissocier la divinité du corps céleste qui l'incarnait au moment où le Royaume Nord fut détruit (723 Ou 722) et sa population emmenée dans un esclavage sans retour. « Elles (les dix Tribus du Royaume Nord) avaient délaissé tous les commandements du Seigneur leur Dieu; elles s'étaient fabriqué des veaux de métal fondu et des pieux sacrés; elles s'étaient prosternées devant toute l'armée des cieux, et avaient rendu un culte à Baal. » (Rois II, XVII, 16).

Quelques années après la destruction de l'armée de Sennachérib et la délivrance de Juda, Manassé, fils d'Ezéchias, « bâtit des autels à toute l'armée des cieux, dans les deux parvis du temple du Seigneur » (Rois II, XXI, 5). « Il (Manassé) rebâtit les hauts lieux qu'avait renversés son père Ezéchias, éleva des autels à Baal, fit faire des pieux sacrés, et se prosterna devant l'armée des cieux à qui il rendit un culte.» (Chroniques II, XXXIII, 3).

C'est seulement à l'époque de Josias, petit-fils de Manassé, et peu avant l'exil de Juda à Babylone, que le peuple juif, ayant rudement lutté pour conquérir son existence nationale et purifier ses conceptions religieuses, parvint à un pur monothéisme. « Le roi (Josias) ordonna au grand prêtre Helcias... de jeter hors du temple du Seigneur tous les objets fabriqués pour le culte de Baal, d'Astarté, et de toute l'armée des cieux. Il les fit brûler hors de Jérusalem, dans les champs du Cédron, et en fit porter la cendre à Béthel. Il renvoya les prêtres des idoles que les rois de Juda avaient établis pour offrir l'encens sur les hauts lieux, dans les villes de Juda, et aux environs de Jérusalem, ainsi que les prêtres qui versaient l'encens à Baal, au Soleil, à la Lune, aux signes du Zodiaque, et à toute 'l'armée des cieux » (Rois II, XXIII, 4-5)-

Les Ecritures ne cachent pas qu'en Judée, aussi bien qu'en Israël, le culte des planètes était le culte officiel des prêtres, des rois, de nombreux prophètes, et du peuple même. Ainsi, Jérémie, contemporain du roi Josias, déclare : « En ce temps-là, - Oracle du Seigneur - on tirera de leurs sépultures les os des rois de Juda, ceux de ses prêtres, de ses prophètes, et des habitants de Jérusalem, on les exposera au soleil, à la lune, à toute l'armée des étoiles, qu'ils ont aimées, qu'ils ont servies, suivies, consultées, et adorées. » ( Jérémie, VIII, 12) ; et encore : « Les maisons de Jérusalem et les palais des rois de Juda seront souillés comme le sol de Topheth, toutes ces maisons sur les toits desquelles on a brûlé l'encens en l'honneur de l'armée des cieux » (Jérémie, XIX, 13).

Au temps de Jérémie et du roi Josias, on trouva un manuscrit dans le temple (Rois II, XXII). On pense généralement qu'il s'agit du Deutéronome, le dernier livre du Pentateuque. Il fit une vive impression sur le roi.

« Quand tu lèveras les yeux vers le ciel, et que tu y verras le soleil, la lune et les étoiles, toute l'armée des cieux, garde-toi de te laisser aller à te prosterner, et à rendre un culte à ces astres, que le Seigneur, ton Dieu, a donnés en partage à tous les peuples qui sont sous le ciel. » (Deutéronome, IV, 19.)

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« Tu ne feras point d'images taillées figurant quoi que ce, soit de ce qui est en haut dans le ciel, ou ici-bas » (V, 8), ce qui, mot pour mot, est une phrase du Décalogue (Exode, XX, 4).

« S'il se trouve chez toi.... un homme ou une femme qui fasse ce qui est mal... en allant servir d'autres dieux; et se prosterner devant eux, devant le soleil, ou la lune, ou l'armée des cieux... ce que je n'ai pas commandé... tu feras traîner aux portes de la ville l'homme ou la femme, et là, les lapideras jusqu'à ce que mort s'ensuive » (XVII, 2-5).

Nous assistons ici aux luttes séculaires, qui permirent d'élaborer la conception du Dieu juif, créateur, au lieu que chose créée et planète inanimée; elles se livraient encore aux ultimes décades précédant l'exil à Babylone, et l'arme la plus efficace était le livre qu'on attribuait à Moïse.

Quand le peuple de Jérusalem fut emmené en exil à Babylone, quelques-uns réussirent à s'enfuir en Egypte et ils emmenèrent avec eux Jérémie. Et tous lui déclarèrent : « De toutes façons, nous allons remplir toutes les promesses que nous avons faites de brûler l'encens à la Reine du ciel, et de lui verser des libations, comme nous le faisions, nous et nos pères, nos rois et nos chefs, dans les villes de Juda et les rues de Jérusalem. Nous avions alors du pain à satiété, nous ne savions pas ce que c'était que le malheur. Or, depuis que nous avons cessé d'offrir l'encens à la Reine du ciel, et de lui répandre des libations, tout nous manque, et nous périssons par le glaive et la famine » (Jérémie, XLIV, 17-18).

Il paraît évident, d'après ce passage, que les Israélites qui purent se réfugier en Egypte pensaient que le malheur frappait leur peuple, non parce qu'ils avaient abandonné leur Seigneur Dieu, mais parce que sous le règne de Josias et de ses fils, ils avaient cessé d'adorer les dieux planétaires de Manassé, et en particulier la Reine des cieux, la planète Vénus.

Ces réfugiés fondèrent au début du VIe siècle une colonie militaire à Abou (dans l'île Eléphantine), en Haute-Egypte. Des fouilles ont mis au jour, au début du siècle présent, les documents sur papyrus de cette colonie; la colonie juive d'Eléphantine adorait Yaju (Javhé), le maître du ciel, comme en témoignent les noms mêmes de nombreux membres de la colonie. Les érudits s'étonnèrent pourtant de trouver sur l'un des papyrus le nom Anat-Yahu; ils ne savaient si c'était celui d'une déesse, d'un lieu, ou d'une personne. « Anat est habituellement le nom de la déesse chananéenne, qui s'identifie, selon une inscription de Chypre, avec Athénê 1. » Les faits historiques révélés par le présent ouvrage jettent quelque lumière sur ce culte.

L'obscure tradition qui suggérait que là planète Vénus avait joué un rôle important aux jours où les ancêtres de ces réfugiés quittèrent l'Egypte et subirent les souffrances de l'eau et du feu, de la mer et du désert, explique le rapprochement de ces deux noms.

Le peuple juif n'a pas reçu « la suprématie » 2 dans la seule journée où, sur le Sinaï, la Loi lui fut donnée. Le message monothéiste fut le résultat d'une longue conquête aux tragiques épisodes : voici la fumée qui s'élève de Sodome et de Gomorrhe anéanties, voici les plaies de l'Egypte et la marche libératrice entre les lames dressées de la mer Rouge; les marches dans le désert sous le linceul des nuages, aux lueurs du naphte enflammé; les luttes intestines, la recherche de Dieu, de la justice entre les hommes, et le combat héroïque pour sauvegarder l'indépendance nationale sur cette étroite bande de terre que convoitent l'Egypte et l'Assyrie : c'est après ces tribulations sans nombre qu'Israël fut choisi pour apporter à tous les peuples du monde un message de fraternité humaine.

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Chapitre 6

Une amnésie collective

C'est un fait établi par la science de l'esprit humain que les plus grandes terreurs de l'enfance (et quelquefois même de l'âge adulte) s'oublient très souvent; leur souvenir s'efface de la conscience, ou s'enfouit dans les zones inconscientes de l'esprit; il continue d'y vivre et peut se traduire par des peurs bizarres, des névroses, qui vont jusqu'à provoquer une rupture de la personnalité.

Un des événements les plus terrifiants que connurent les hommes de jadis fut l'embrasement universel; des apparitions célestes effrayantes l'accompagnèrent, des tremblements de terre, l'éruption de milliers de volcans, la fusion du sol, l'ébullition des mers, la submersion des continents, les bombardements de ce monde chaotique par des pierres brûlantes, le grondement de la terre déchirée, et le sifflement des tornades de cendres.

Cet embrasement universel ne fut pas le seul : mais celui du temps de l'Exode fut le plus catastrophique. Les Hébreux l'ont décrit dans cent passages. Aux VIe et Ve siècles, après l'exil de Babylone, ils ne cessèrent d'en apprendre et d'en répéter le récit traditionnel; toutefois, ils perdaient de vue les terribles réalités que les mots recouvraient. Selon toute apparence, les générations postérieures à l'exil considéraient ces descriptions comme des évocations poétiques propres à la littérature religieuse.

Au début de notre ère, les auteurs du Talmud se demandaient si le déluge de feu prophétisé par les antiques traditions aurait lieu, ou non. Ceux qui répondaient par la négative appuyaient leur argument sur le Livre de la Genèse et la promesse divine que le Déluge ne se produirait pas deux fois. Leurs adversaires admettaient bien que le déluge d'eau ne se reproduirait pas, mais défendaient la possibilité d'un déluge de feu; on les a attaqués, sous le prétexte qu'ils donnaient une interprétation limitative à la promesse du Seigneur. Les uns et les autres négligeaient la partie capitale de leurs traditions : l'histoire même de l'Exode et tous les passages relatifs au cataclysme cosmique, inlassablement répétés dans l'Exode, les Nombres, les Prophètes et les autres Livres des Ecritures.

Les Egyptiens du VIe siècle avant J.-C. savaient que des cataclysmes s'étaient abattus sur

d'autres pays. Platon, d'après ce que Solon apprit en Egypte, évoque des destructions universelles par le déluge et l'incendie : « Vous ne vous rappelez qu'un déluge; mais beaucoup de cataclysmes se sont produits antérieurement. » Les prêtres égyptiens soutenaient que leur pays avait été épargné; mais, ce faisant, ils oubliaient ce qui était arrivé en Egypte. A l'époque de Ptolémée, le prêtre Manéthon entreprit de narrer l'invasion des Hyksos, et il avoue qu'il ignore la nature et la cause du « souffle du déplaisir céleste à qui s'abattit sur le pays : il apparaît donc évident que le souvenir, encore vivant en Egypte au temps de Solon et de Pythagore, avait, sous Ptolémée, déjà sombré dans l'oubli. On se contentait de répéter quelque vague tradition d'un embrasement universel, sans savoir quand, ni comment, il s'était produit.

Le prêtre égyptien que Platon représente en conversation avec Solon supposait que le souvenir de ces cataclysmes s'était perdu, parce que les hommes cultivés et les oeuvres de l'esprit y avaient péri ensemble. Ainsi, ces bouleversements « échappèrent à votre attention, car pendant de nombreuses générations, les survivants disparurent sans avoir la possibilité de

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s'exprimer par l'écriture » 2. On retrouve le même argument chez Philon d'Alexandrie, écrivain du Ier siècle de notre ère ; « Par suite des destructions réitérées par l'eau et par le feu, les générations contemporaines de ces cataclysmes ne purent transmettre aux générations suivantes le souvenir des événements, ni leur ordre chronologique 3.»

Quoique Philon eût connaissance de ces destructions par l'eau et par le feu, il ne lui vint pas à l'esprit que le Livre de l'Exode décrivait une catastrophe provoquée par le feu, ni que de semblables désastres avaient bouleversé les temps de Josué, et même d'Isaïe. Il pensait que la Genèse narrait « comment le feu et l'eau ravageaient les choses de la terre », et que la destruction par le feu, que les philosophes grecs lui avaient révélée, ne s'appliquait qu'au cas de Sodome et Gomorrhe.

L'oubli de ces cataclysmes est imputable non à l'absence de traditions écrites, mais à un phénomène curieux, qui incita des peuples entiers, savants et érudits compris, à ne voir que des allégories et des métaphores dans des textes qui pourtant décrivent clairement des perturbations cosmiques.

La vie des individus, aussi bien que celle des nations, révèle un phénomène psychologique bien connu : les événements les plus terrifiants peuvent être oubliés ou rejetés dans l'inconscient. Des impressions qui devraient être inoubliables semblent s'être effacées. Découvrir leurs vestiges et leurs correspondances dans la vie physique des peuples est une entreprise assez semblable à la lutte contre l'amnésie chez l'individu.

Du folklore

« Le jour en fait au jour le récit, Et la nuit le répète à la nuit. Ce n'est pas une langue, ce ne sont point des paroles Dont la voix pourrait rester incomprise. »

Psaumes XIX, 2-3.

Les érudits qui se consacrent à l'étude des folklores n'oublient jamais que ces récits doivent

être interprétés. A leurs yeux, ces contes ne sont pas les produits ingénus et limpides de l'imagination des peuples, mais recouvrent un sens plus profond, quelque signification secrète.

Les mythologies des peuples classiques et tout particulièrement des Grecs font aussi partie du folklore. Bien avant notre ère, on avait décelé leur caractère allégorique, et recherché les interprétations possibles.

Macrobe, au IVe siècle de notre ère, émit le premier l'idée que la plupart des dieux de l'antiquité égyptienne et grecque personnifiaient le Soleil. A l'encontre de l'opinion de ses prédécesseurs, il vit en Osiris le symbole du Soleil, et en Isis, celui de la Lune. Jupiter représentait lui aussi le Soleil.

A mesure que le rôle joué par les planètes dans l'histoire du monde diminuait pour finalement sombrer dans l'oubli, le Soleil et la Lune monopolisèrent les interprétations des mythes naturels.

Ce fut la mode au XIXe siècle d'expliquer que les mythes anciens étaient inspirés par le mouvement du soleil et de la lune, pendant le jour, la nuit, le mois et l'année. Râ, Amon, Mardouk, Phaéton, Zeus 1, et même des héros tels que Œdipe devinrent des symboles solaires 2.

Le rôle prédominant attribué au Soleil et à la Lune dans la mythologie reflète leur importance dans la nature. Cependant les planètes, dans les époques lointaines, tenaient une place de tout premier plan dans l'imagination des peuples; leurs religions en témoignent assez. En fait, le Soleil et la Lune (Shamash et Sin, Hélios, Apollon, et Sélèné ) étaient aussi considérés comme planètes, mais d'importance plutôt secondaire.

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Leur place au milieu des autres planètes surprend parfois les érudits modernes. car ces deux astres sont infiniment plus visibles que les autres. L'importance accordée à Saturne, Jupiter, Vénus et Mars est encore plus surprenante, si l'on ignore les grands drames qui se déroulèrent au ciel, il y a plusieurs milliers d'années.

Les folkloristes modernes s'attachent surtout à étudier le folklore des peuples primitifs, que n'ont point perverti les déformations de générations de copistes et d'interprètes, On estime que ces légendes, prises à leur source, sont susceptibles d'éclairer non seulement la mentalité des peuples primitifs, mais aussi des problèmes généraux de sociologie et de psychologie.

La sociologie explore la mythologie pour y trouver des renseignements sur les coutumes sociales. Certains folkloristes, tel James Frazer, ont concentré leurs efforts sur ce point. Freud a étudié très spécialement le parricide, et il le représente comme une des institutions les plus communes des temps primitifs. Selon lui cette coutume, si répandue jadis, subsiste à l'état de tendance inconsciente chez l'homme moderne.

Cependant les institutions sociales et les coutumes ne sauraient engendrer des mythes. Un écrivain, qui explora ce sujet, a fort justement déclaré : « Ce qui est normal dans la nature et la société éveille rarement l'imagination créatrice de mythes; plus vraisemblablement, c'est l'anormal qui l'émeut, quelque cataclysme frappant, quelque terrible violation du code social 3. »

Les phénomènes naturels ordinaires sont encore moins aptes à inspirer des légendes que la vie sociale quotidienne. Le soleil se lève chaque matin, il se déplace d'Est en Ouest; la lune change de phase quatre fois par mois, l'année comporte quatre saisons; ces changements réguliers n'éveillent pas l'imagination des peuples, parce qu'ils ne contiennent en eux-mêmes rien d'inattendu, aucun élément de surprise. Les couchers et les levers de soleil, la rosée matinale et la brume du soir sont des spectacles habituels; si un spectacle unique imprime en nous une image profonde, ceux-là s'effacent et se confondent dans la grisaille d'un souvenir sans relief. Les tempêtes de neige et les orages ne laissent pas non plus de trace indélébile. Seules les perturbations de l'ordre social, ou physique, sont capables d'exciter l'imagination collective. Sénèque dit : « C'est pour cette raison que la multitude des étoiles, qui confèrent au firmament sa beauté, ne retient pas l'attention des masses; mais qu'il se produise un changement dans l'ordre universel, et tous les regards se fixent sur le Ciel 4. »

Les catastrophes de caractère local, même très violentes, ne sauraient elles-mêmes engendrer des mythes cosmiques. Ce sont les grands cataclysmes du passé qui impressionnent le plus vivement les races humaines. Les comètes, à cause de leur relation fréquente avec les cataclysmes universels, et de leur aspect terrifiant, offrent un exemple typique des phénomènes susceptibles d'enflammer l'imagination populaire. Mais je ne sais pourquoi on n'a jamais tenu compte, en interprétant les légendes et les mythes, de l'impression qu'elles durent causer sur les peuples antiques.

Depuis la découverte de l'imprimerie, il est facile de déceler l'immense émotion collective que crée l'apparition de comètes particulièrement brillantes. Elles font surgir une moisson de livres et de brochures. Les Anciens étaient-ils à l'abri de ce sentiment ? C'est fort peu probable. Alors, pourquoi les exégètes de la Bible et les commentateurs des épopées antiques ont-ils été assez négligents pour ne pas songer aux phénomènes qui n'ont pu manquer d'impressionner vivement nos lointains ancêtres ? Ou bien alors, est-ce qu'aucune comète n'apparut jamais dans le ciel antique ? La question ne se pose même pas.

A l'aide de ces remarques, nous pourrons expliquer la similitude frappante de certains concepts chez des peuples de culture différente, que séparent parfois des océans.

L'âme des peuples et les idées innées

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La similitude des motifs folkloriques chez les peuples des cinq continents et des îles océaniques pose un difficile problème d'ethnologie et d'anthropologie. Les migrations d'idées peuvent s'expliquer par des migrations de peuples, mais comment des motifs folkloriques peu communs peuvent-ils se retrouver dans des îles isolées, alors que les aborigènes n'ont aucun moyen de traverser la mer ? Et pourquoi le progrès technique n'accompagna-t-il pas le développement spirituel ? Certains peuples qui en sont encore à l'âge de pierre possèdent les mêmes motifs folkloriques que des nations très civilisées. Le caractère fort particulier de quelques-uns de ces motifs ne permet pas de penser que le simple hasard présida à la naissance des mêmes thèmes aux quatre coins du monde. Le problème ne laisse point d'embarrasser les savants modernes : faute de mieux, ils ont prétendu que les motifs folkloriques étaient innés dans l'âme des peuples. Ils les apportent à leur naissance, comme les animaux possèdent l'instinct de conservation, de reproduction, savent construire des tanières ou des nids, se déplacer par troupeaux, ou émigrer par bandes vers les pays lointains. Mais, avec pareil principe, comment expliquer que, par exemple, les aborigènes de l'Amérique et les peuples européens ont identiquement imaginé une sorcière sous la forme d'une femme qui parcourt le ciel à cheval sur un balai ? « La sorcière mexicaine, comme sa sœur d'Europe, avait un balai sur lequel elle traversait l'air et on l'associait à la chouette. En fait, la Reine des sorciers, Tlagoltiotl, est représentée à cheval sur un balai, et nantie du chapeau pointu des sorciers 1. » Il en va de même pour des centaines de croyances, aussi fantastiques et bizarres.

A mon sens, on pourrait expliquer ainsi la similitude des motifs folkloriques chez de nombreux peuples : beaucoup de croyances sont le reflet de faits historiques. La légende du déluge qui recouvrit la terre, les collines et même les montagnes, se retrouve de par le globe entier. Il faut tenir en bien piètre estime les capacités intellectuelles de nos ancêtres, pour imaginer qu'une crue extraordinaire de l'Euphrate eût suffi à donner aux nomades du désert l'illusion que le monde était inondé, et que la légende née ainsi eût pu se transmettre de peuple à peuple. Il importerait en même temps de découvrir une solution au problème géologique de la distribution de l'argile et des dépôts alluviaux.

Les peuples anciens, au même titre que les peuplades primitives actuelles, ne disposaient pas des moyens que nous utilisons pour lutter contre les éléments, et vivaient sous la menace constante des orages et des cyclones tropicaux, du froid et des tempêtes de neige : ils devaient donc être plus accoutumés que nous aux perturbations saisonnières, et la crue d'un fleuve n'eût pu les terrifier au point qu'ils en colportassent le récit aux quatre coins du monde, en lui attribuant les proportions d'un cataclysme cosmique.

On ne fait pas grand cas des traditions de bouleversements et de cataclysmes, pourtant communes à tous les peuples du monde; sous le prétexte par trop étroit qu'aucune force n'aurait pu jadis transformer le monde, qui ne s'exercerait encore de notre temps : principe qui est le fondement de la géologie actuelle et de la théorie évolutionniste. « La continuité actuelle rend improbables les cataclysmes et les bouleversements du passé, dans le monde de la matière et dans le monde vivant; de plus, nous cherchons à interpréter les changements et les lois du passé d'après ceux que nous constatons aujourd'hui. C'est le secret de Darwin, qu'il tenait lui-même de Lyell 2. » Il a été cependant montré dans cet ouvrage que des forces se sont manifestées dans les temps historiques, qui aujourd'hui sont sans effet, et qu'elles étaient d'ordre purement physique. Les principes scientifiques interdisent d'affirmer qu' une force qui n'agit plus maintenant n'a pas pu agir dans le passé.

Faut-il donc que nous soyons en collision permanente avec les planètes et les comètes, pour croire en ces cataclysmes ?

Les spectacles du ciel

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Il y a eu des perturbations cosmiques, des cataclysmes ont ravagé la terre, mais les sorcières ont-elles vraiment chevauché leur balai à travers les airs ? Le lecteur doit m'accorder que des catastrophes cosmiques, si elles se sont vraiment produites, ont pu, et même ont dû, laisser des souvenirs identiques chez tous les peuples de la terre. Mais certaines images fantastiques ne semblent présenter aucune correspondance avec les réalités. Laissons-nous guider par l'idée suivante : si nous retrouvons tout autour du globe la même image céleste fantastique, il est probable que cette image s'est réellement projetée sur l'écran du ciel, et que les spectateurs en furent tous les peuples, au même instant. Or, il est arrivé qu'une comète prît la forme extraordinaire d'une femme chevauchant un balai, et l'image était si nette qu'elle s'imposa à tous les peuples de la terre. C'est un fait avéré que les aspects divers des comètes impressionnent vivement les peuples, même à notre époque : une comète, a-t-on dit, ressemblait à « un crucifix tout sanglant », une autre à une épée. En fait, chaque comète a une forme particulière, susceptible d'altérations tant qu'elle nous est visible.

Pour illustrer ceci par un autre exemple, on peut se demander pourquoi les Mayas ont attribué le nom de Scorpion à la constellation connue de nous et des Anciens sous le même nom 1. Les contours de cette constellation n'évoquent pas la forme d'un scorpion. « C'est une très étrange coïncidence de nomenclature 2. »

La constellation, qui n'a rien de la forme du scorpion, a probablement reçu ce nom parce qu'une comète qui, elle, ressemblait à un scorpion y fit un jour son apparition. En fait, nous lisons sur une des tablettes astronomiques de Babylone . « une comète s'enflamma, et elle émit une lumière aussi vive que le jour, et au milieu de cette lumière éblouissante, elle donnait des coups de queue comme un scorpion furieux 3 ». Si ce n'est pas cette apparition précise de la comète qui fit appeler la constellation « Scorpion », ce dut être un phénomène semblable, à une époque différente.

Un autre exemple est celui du dragon. Cet animal fantastique domine la littérature universelle, l'art, et la religion des peuples. Il n'y a sans doute pas de nation où il ne soit un motif important ; cependant, le dragon n'existe pas. Certains savants ont émis l'hypothèse qu'il pouvait être le représentant de quelque race animale aujourd'hui éteinte. Sans doute était-il une menace terrible pour l'humanité, puisqu'on le rencontre sur le drapeau chinois, en lutte avec saint Michel et saint Georges, dans la mythologie égyptienne, dans les hiéroglyphes et sur les bas-reliefs mexicains, sur les bas-reliefs assyriens. Et pourtant, jamais on n'a pu retrouver d'ossements de cette race présumée éteinte.

Souvenons-nous de la description de la comète Typhon, dans un chapitre précédent : étalée sur le ciel comme un animal aux multiples têtes, le corps couvert d'ailes, le feu jaillissant de ses gueules : nous reconnaîtrons sans peine l'origine de la légende du dragon.

Subjectivité de l'interprétation des événements : leur authenticité

L'interprétation subjective ou magique que les traditions proposent des cataclysmes est la cause majeure du discrédit où on les tient. La mer s'entrouvrit : le peuple attribua le phénomène à l'intervention de son chef; il leva sa baguette sur les eaux, et elles se séparèrent. Evidemment, il n'est personne au monde, ni aucune baguette, qui jouisse d'un pareil pouvoir. La remarque vaut pour Josué, qui commanda au soleil et à la lune de s'immobiliser. L'esprit scientifique ne pouvant admettre qu'un homme parvienne à arrêter le mouvement du soleil et de la lune, il nie en même temps la réalité de l'événement. D'autre part, les livres qui, entre tous, nous laissent incrédules, sont justement les livres qui exigent notre adhésion, les livres religieux, encore que nous fassions sur eux nos plus solennels serments.

Les peuples du passé étaient enclins à voir des miracles dans tous les événements inhabituels : et c'est pour cela que l'homme moderne, qui ne croit plus au miracle, rejette ensemble l'événement et son interprétation. Mais, puisque nous retrouvons le même événement

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dans les traditions de nombreux peuples, et une interprétation différente chez chacun d'eux, il est possible de vérifier son authenticité, que les sciences de la Nature nous aident à contrôler, d'autre part. Si, par exemple, les pôles géographiques ont changé de place, ou l'axe terrestre d'inclinaison, le cadran solaire de l'antiquité ne devait plus indiquer l'heure exacte. Si les pôles magnétiques ont été intervertis, les laves volcaniques anciennes doivent présenter une orientation magnétique inversée.

Le folklore offre un autre moyen de vérification. Isaïe prédit au roi Ezéchias, quelques heures sans doute avant l'événement, que l'ombre reculerait de dix degrés sur le cadran solaire (comme nous le savons, Mars était alors très près de la terre, et Isaïe pouvait établir ses calculs en s'inspirant d'observations antérieures sur les perturbations causées par Mars). Les Chinois expliquaient que le même phénomène était destiné à assurer le succès des entreprises stratégiques de leurs princes, ou à mettre fin à leurs querelles. Les Grecs ont vu dans le phénomène la manifestation du courroux céleste, suscité par le crime des tyrans d'Argos, et les Latins un présage, qu'ils associaient avec Romulus, fils de Mars. D'autres interprétations de ce même phénomène se découvrent dans l'épopée islandaise, dans l'épopée finnoise, et dans les légendes japonaises, mexicaines, polynésiennes. Les Indiens d'Amérique racontent que le soleil recula de plusieurs degrés, pour échapper à un jeune garçon qui essayait de le prendre au piège, ou à quelque animal qui l'effrayait.

L'extrême variété de ces interprétations des causes et des fins du phénomène est la meilleure preuve que le folklore des différents peuples s'applique à un même événement réel, et seules les explications du « miracle » appartiennent au domaine de l'invention subjective. De plus, les différentes légendes présentent maints détails qui n'auraient pu être inventés, à moins d'une connaissance profonde des lois du mouvement et de la thermodynamique. Il est inconcevable, pour citer un exemple, que les Anciens et les races primitives, par pur hasard, aient pu imaginer qu'un immense incendie embrasa les pampas et les forêts mexicaines, lorsque le soleil, afin d'éviter le piège de l'enfant, fit marche en arrière.

De nombreux peuples offrent une description identique du phénomène; ne pourrait-on supposer qu'une légende née en un point précis du globe s'était répandue par tout le monde ? Dès lors, l'authenticité de l'événement raconté serait entachée de doute. Mais c'est justement parce que le même événement sert de point de départ à des traditions très dissemblables, que son authenticité revêt la plus grande probabilité, surtout si l'événement concorde avec les témoignages historiques, les cartes anciennes, les cadrans solaires, et les données des sciences de la nature.

Dans le chapitre « Vénus dans le folklore des Indiens », quelques exemples ont été proposés à l'appui de cette thèse. Pour l'illustrer plus complètement, examinons le motif de l'immobilisation du soleil dans les légendes des Polynésiens, des Hawaïens, et des Indiens de l'Amérique du Nord.

Le cycle de légendes le plus connu dans les îles du Pacifique est la trilogie qui a pour héros le demi-dieu Maouï 1. « Des nombreux exploits de Maouï, trois semblent particulièrement fameux : la pêche de la terre, la capture du soleil, et la conquête du feu 2.» Il existe deux versions de ces légendes, l'une en Nouvelle-Zélande, l'autre à Hawaï, mais elles procèdent l'une et l'autre d'une même tradition.

La version hawaïenne de la capture du soleil se présente ainsi : « La mère de Maouï était fort ennuyée de la brièveté des jours, due à la rapidité de la course

du soleil. Comme il était impossible de faire sécher convenablement les feuilles de tapa dont il se vêtait, le héros décida de couper les jambes du soleil, pour l'empêcher de courir si vite.

Maouï partit donc vers l'Est, là où le soleil surgit chaque jour du monde souterrain. Et quand l'astre apparut, il lui lia les jambes, l'une après l'autre, et attacha solidement les cordes aux grands arbres. Immobilisé, le soleil ne put s'enfuir, et Maouï lui infligea une terrible correction

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avec son arme magique. Le soleil implora grâce, et quand il eut promis d'avancer désormais plus lentement, Maouï le relâcha. »

La « pêche des îles », c'est-à-dire l'apparition de nouvelles îles, eut lieu en même temps. La relation de cause à effet avec la modification du mouvement solaire est évidente. Une version polynésienne de la pêche des îles ajoute même qu'une étoile servit d'appât.

L'histoire suivante est narrée dans la tribu des Ménomènes (Indiens algonquins 3) : « Le petit garçon fit un nœud coulant, qu'il disposa sur le chemin; quand le soleil arriva en cet endroit, le nœud l'attrapa au cou, et commença de l'étrangler, au point qu'il perdit presque le souffle. Les ténèbres se firent, et le soleil appela les ma'nidos : « A l'aide, coupez ce lien, avant qu'il ne me tue 4 ». Les ma'nidos arrivèrent, mais la corde avait pénétré si profondément dans le cou du soleil, qu'ils ne purent le libérer. Lorsque tous (sauf un) eurent abandonné, le soleil appela la Souris, pour ronger la corde. La Souris se mit à la grignoter, mais c'était une opération difficile, parce que la corde était brûlante, et profondément enfoncée dans le cou du soleil. Cependant, après de laborieux efforts, la Souris réussit dans son entreprise. Alors, le soleil reprit souffle, et les ténèbres se dissipèrent. Si la Souris avait échoué le soleil serait mort. » L'histoire de la capture du soleil évoque l'arrêt brutal du mouvement solaire au firmament. La légende contient un détail intéressant, qui nous permet de comprendre un phénomène naturel.

Dans un chapitre antérieur, nous avons discuté des différentes versions de l'anéantissement de l'armée de Sennachérib, et des phénomènes physiques qui la provoquèrent. Selon les Ecritures, au temps d'Isaïe, le soleil interrompit son mouvement, et recula de dix degrés sur le cadran solaire. La nuit suivante, l'armée de Sennachérib fut détruite par un « souffle » du ciel. En Egypte, cette victoire sur l'ennemi commun des Egyptiens et des Israélites était commémorée par une fête à Letopolis, « la ville de la foudre » : l'animal sacré de la ville était une souris, et les fouilles effectuées sur son emplacement ont mis au jour des souris de bronze, où sont inscrites les prières des pèlerins. Hérodote a vu dans cette même ville la statue d'un dieu, qui tenait à la main une souris en commémoration de la destruction de l'armée assyrienne. On lui expliqua que le désastre assyrien fut provoqué par une invasion de souris qui auraient grignoté les cordes des arcs. Hérodote rapporte la narration du changement du mouvement solaire immédiatement après celle de la destruction de l'armée assyrienne. Nous avions admis que l'image de la souris devait avoir quelque rapport avec le drame cosmique; cependant, nous avions dû nous contenter de voir dans la souris le symbole d'une épidémie de peste, dont la maladie du roi Ezéchias offrait par ailleurs un exemple.

La légende indienne qui combine la capture du soleil et l'exploit de la Souris, explique le rapport réciproque de ces deux éléments. Apparemment, l'atmosphère du corps céleste éclatant qui surgit dans les ténèbres prit la forme allongée d'une souris. On comprend dès lors que le « souffle » qui détruisit l'armée de Sennachérib fût symbolisé par cet animal. La légende indienne de la grande Souris qui libéra le soleil pris au piège est venue directement des images qui se déployaient sur l'écran céleste.

Nous voyons ainsi comment le folklore des peuples primitifs peut résoudre le difficile problème soulevé par Isaïe et Hérodote.

Les Egyptiens, comme les Indiens Ménomènes, ont vu une souris dans le quadrupède qui s'esquissait au ciel; pour les Indiens Utahs (Utes), c'est le lapin qui symbolise l'arrêt brutal du mouvement solaire 5. Le lapin partit en direction de l'Est, avec l'intention de briser le soleil en morceaux. Il attendit son lever. « Le soleil se préparait à se lever, mais lorsqu'il aperçut le lapin, il se recoucha. Ensuite, il se leva lentement, et oublia l'animal. Le lapin lui porta un coup de sa massue, qui fit voler un fragment de soleil; il s'abattit sur le sol, et mit le feu au monde. Le feu poursuivit le lapin, qui prit la fuite. Il courut jusqu'à une bûche, et lui demanda si elle pouvait lui offrir un refuge. « Non, je vais être réduite en cendres. » Il reprit sa course, et posa la même question à une roche qui présentait une fissure : « Non, je ne peux te sauver; la grande

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chaleur me fait éclater. » Enfin, il arriva à une rivière . « Non, je ne peux te sauver; je vais bouillir, et tu seras ébouillanté. »

Sur la plaine, le lapin traversa les broussailles, mais le feu arriva, les broussailles flambèrent, et lui tombèrent sur le cou, « et depuis lors, cette partie du corps des lapins est demeurée jaune ».

« Partout, il voyait s'élever la fumée. Il fit quelques pas sur le sol ardent, et l'une de ses pattes brûla jusqu'au genou. Jusqu'alors, il avait eu de longues pattes. Il marcha sur deux pattes, et l'une d'elles brûla complètement, il sautilla sur une patte, mais elle subit le même sort. »

Au chapitre « Phaéton », nous nous sommes demandé comment le poète Ovide aurait pu connaître le rapport entre l'interruption du mouvement solaire et l'embrasement, du monde, si ce cataclysme ne s'était véritablement produit. Le même raisonnement s'applique aux Indiens. Ce récit de la capture du soleil comporte de nombreuses variantes, niais l'embrasement universel en est l'immuable conséquence. Les forêts et les plaines brûlent, les montagnes fument et vomissent de la lave, les fleuves entrent en ébullition, les cavernes des montagnes s'effondrent, et les roches éclatent, quand le soleil, à peine apparu au-dessus de l'horizon, s'en retire, pour ne se lever qu'ensuite.

La légende indienne offre un exemple supplémentaire de l'arrêt du soleil sur sa trajectoire, et de l'embrasement mondial qui s'ensuivit. Avant le cataclysme, « le soleil passait très près du sol ». Le but de l'attaque était de « faire briller le soleil un peu plus longtemps, les jours étant trop courts ». Après le cataclysme, « les jours s'allongèrent ».

Il semble que les ancêtres des Indiens Chochones, tribu de l'Utah (Colorado), et du Nevada, vivaient, au temps de Sennachérib et d'Ezéchias, sous une longitude telle que le soleil s'élevait juste au-dessus de l'horizon à l'Est, lorsqu'il changea de direction, puis reparut.

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Chapitre 7

L'arrachement des pôles

Quelles altérations du mouvement de la terre, de la lune, et de Mars furent provoquées par les rencontres des VIIIe et VIIe siècles ?

La lune, beaucoup plus petite que Mars, eût été considérablement influencée par lui, en s'en approchant suffisamment. Son orbite eût pu soit se rapprocher, soit s'éloigner de la terre. Il importe donc de rechercher si, peu après 687, on a entrepris une refonte du calendrier lunaire.

De même, la terre aurait pu être « déviée de sa place première ». Ceci eût impliqué une modification de son orbite (donc de la durée de l'année); une modification de l'inclinaison de son axe de rotation sur le plan de l'écliptique (donc une altération des saisons) ; un déplacement des pôles, un changement de la vitesse de rotation axiale, et de la durée du jour, et ainsi de suite. On parviendrait à déceler quelques-uns de ces changements si l'on possédait une carte du ciel établie avant 687. Or cette carte existe. Elle est peinte sur le plafond du tombeau de Senmout, le vizir égyptien. Comme nous le savons déjà 1, ce tombeau date d'une époque postérieure à l'Exode, mais antérieure à Amos et Isaïe.

Les cartes de Senmout représentent le ciel égyptien à deux époques différentes. L'une dépeint le ciel avant l'interversion des pôles, provoquée par le cataclysme qui mit fin au Moyen Empire ; l'autre est une image du ciel égyptien au temps de Senmout. La première carte a fort intrigué les archéologues, parce que l'Est et l'Ouest y sont intervertis. Ils jugent en ces termes la seconde carte, où l'Est et l'Ouest occupent leurs places normales : « On éprouve une certaine surprise à constater que les cartes célestes qui sont venues jusqu'à nous ne répondaient guère à une observation directe, ou à des calculs faits au moment de l'érection du monument, où elles figurent 2. »

L'astronomie moderne n'admet pas, n'envisage même pas, la possibilité d'une interversion de l'Est et de l'Ouest, pas plus que du Nord et du Sud à une époque historique. Il n'y a aucune interprétation possible de la première carte. La seconde, avec ses constellations déplacées, a suggéré à l'auteur du passage ci-dessus, qu'elle figurait quelque tradition plus ancienne. Le seul changement admis par l'astronomie moderne provient de la précession des équinoxes, le lent mouvement de l'axe de la terre qui décrit un cercle en 26.000 ans environ. La précession ne saurait, et de loin, expliquer la position des constellations sur la carte, si nous considérons la chronologie conventionnelle (et à plus forte raison si nous adoptons la chronologie révisée, qui rapproche des temps modernes l'époque de Senmout et de la reine Hatshepsout).

Les cartes astronomiques de Senmout nous permettent donc d'étudier les changements de position et de direction des pôles, provoqués par les cataclysmes du VIIIe et du VIIe siècle, et par ceux du XVe.

Selon Sénèque, la Grande Ourse avait été l'étoile Polaire. Après un bouleversement cosmique qui transforma la configuration du ciel, c'est l'une des étoiles de la Petite Ourse qui devint l'étoile Polaire.

Les tablettes astronomiques hindoues composées par les Brahmanes dans la première moitié du premier millénaire avant notre ère révèlent une déviation générale des étoiles de la position qu'elles eussent dû normalement occuper à l'époque où les observations furent faites, compte tenu de la précession des équinoxes 3.

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Les savants modernes se sont étonnés de cette erreur, à leurs yeux inexplicable; étant donné les méthodes géométriques qu'employaient les astronomes hindous, et la précision de leurs calculs, une erreur d'une fraction de degré semble inadmissible.

Dans les Jaiminiya-Upanisad-Brahmana il est écrit que le centre du ciel, ou point autour duquel tourne le firmament, est situé dans la Grande Ourse 4. Nous avons rencontré la même affirmation dans le Thyeste de Sénèque.

En Egypte aussi « la Grande Ourse était considérée comme l'étoile Polaire 5 ». « La Grande Ourse ne se couchait jamais 6. » Est-il possible que la précession des équinoxes ait modifié la direction de l'axe au point que, il y a trois ou quatre mille ans, l'étoile Polaire fit partie de la Grande Ourse 7 ? Non. Si la terre a suivi le mouvement régulier que nous constatons aujourd'hui, il y a quatre mille ans l'étoile la plus proche du pôle Nord devait être alpha du Dragon 8. Le changement fut brutal. La Grande Ourse « arriva et se baissa 9 ». Dans es sources hindoues, il est dit que la terre s'écarta de sa place habituelle de 100 yojanas 10 ; le yojana correspondant à une distance de 8 à 15 kilomètres, le déplacement se situait donc entre 800 et 1500 kilomètres.

De nombreuses traditions, de par le monde, narrent la naissance de l'étoile Polaire. Les Hindous des Védas adoraient l'étoile Polaire, Dhrura, « l'immobile », « l'immuable ». Les Puranas racontent comment Dhrura devint l'étoile Polaire. Les Lapons la vénèrent, et croient que, si elle se déplaçait, la terre serait anéantie par un grand incendie 11. La même croyance se retrouve chez les Indiens de l'Amérique du Nord 12.

Le jour où l'ombre, à midi, est la plus courte est le jour du solstice d'été; elle atteint sa longueur maxima le jour du solstice d'hiver. Ce procédé pour déterminer les saisons par la mesure des ombres était connu dans l'ancienne Chine, et ailleurs.

Nous possédons les textes chinois qui notaient les longueurs maxima et minima des ombres à midi. On suppose que ces textes datent de 1100 av. J.-C. « Mais les ombres les plus longues et les plus courtes qui y sont enregistrées ne correspondent pas aux longueurs actuelles 13 ». D'après les anciennes cartes des Chinois, le jour le plus long a une durée qui ne correspond nullement aux différentes latitudes géographiques où ils ont fait leurs observations ; on suppose donc que les résultats notés étaient empruntés aux astronomes de Babylone : hypothèse étrange 14.

La durée du jour le plus long de l'année dépend de la latitude, ou distance au pôle, et elle varie avec les lieux. Les gnomons, ou cadrans solaires, peuvent être construits avec une extrême précision 15.

Plusieurs auteurs classiques savaient que la terre avait changé de position et tourné vers le Sud. Rares étaient pourtant ceux qui connaissaient la véritable cause de cette perturbation. Diogène de Laërte a répété l'enseignement de Leucippe. « La terre pencha, ou s'inclina vers le Sud, parce que le temps froid et neigeux qui s'établit dans les régions septentrionales les rendit rigides et inflexibles 16. » La même idée se retrouve chez Plutarque qui, lui, citait les préceptes de Démocrite : « les régions septentrionales étaient mal tempérées, mais les régions méridionales l'étaient fort bien. Ces dernières, par conséquent, devinrent fécondes, grandirent, et l'excès de poids fit pencher le tout de leur côté 17. » Empédocle, cité par Plutarque, enseignait que le Nord fut arraché à sa position, et les régions septentrionales s'en trouvèrent exhaussées, tandis que les méridionales s'abaissaient. Anaxagore enseignait que le pôle reçut un choc, et que le monde s'inclina vers le Sud.

Comme nous l'avons vu, Sénèque dans Thyeste, attribue fort justement le déplacement du pôle à un cataclysme cosmique.

Temples et obélisques

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Nous savons par les auteurs anciens que les temples de l'Ancien Monde étaient construits face au soleil levant 1, et par conséquent face aux planètes visibles, puisqu'elles traversent toutes les signes du Zodiaque, ou se déplacent dans l'écliptique. Le point où le soleil se lève change chaque jour, et l'écliptique, de ce fait, oscille lentement d'un solstice à un autre. Afin d'observer avec précision un éventuel déplacement brusque des pôles, il devint nécessaire de construire des observatoires sur l'emplacement des temples; et comme l'orientation Est-Ouest ne suffisait plus, on dut les munir d'un dispositif qui permit de contrôler la position du soleil les jours de l'équinoxe de printemps et d'automne, où le soleil se lève exactement à l'Est, et se couche exactement à l'Ouest.

Le Talmud de Jérusalem (section Erubin) 2 rapporte le « fait étonnant 3 » que le temple de Jérusalem était construit de telle façon qu'aux deux jours des équinoxes, le premier rayon du soleil levant pénétrait directement dans le temple par la porte Est. C'est dans ce but qu'on ouvrait pour ces deux jours-là, cette porte orientale, autrement fermée toute l'année.

Les jours d'équinoxe, le premier rayon du soleil entrait par la porte Est, et pénétrait jusqu'au cœur du temple 4. Cette disposition n'était pas commandée par un quelconque culte du soleil. Elle avait été imposée par les événements catastrophiques du passé, où la Terre avait changé de position par rapport au soleil levant et couchant. Le premier jour de l'année nouvelle coïncida avec l'équinoxe d'automne. C'étaient là des rites antiques, dans les temples de Babylone aussi, il y avait « la porte du soleil levant», et « la porte du soleil couchant 5 ». Comme on commençait de croire que le système planétaire s'était enfin stabilisé (cf. Isaïe, LXVI, 22), la porte est du temple de Jérusalem fut fermée à jamais : elle ne sera ouverte qu'à l'arrivée du Messie.

Quoique ignorant de ces vieilles coutumes, et des textes anciens relatifs à l'orientation des temples, un écrivain de la fin du XIXe siècle est arrivé à la conclusion que les temples de l'Ancien Monde faisaient face au levant 6. La position des temples lui en fournissait d'innombrables preuves, mais il constata avec quelque étonnement que les fondations des temples plus anciens révélaient des changements d'orientation successifs. « Les nombreux changements d'orientation du temple d'Eleusis, qu'ont mis en lumière les fouilles françaises, étaient si frappants et si suggestifs » que l'auteur s'est demandé « si l'orientation des temples, et les différents changements de direction ne pouvaient s'expliquer par des motifs astronomiques 7. »

Les travaux d'autres auteurs ont pu déterminer que seuls les temples plus récents étaient orientés vers l'Est, tandis que les fondations des temples antérieurs au VIIe siècle étaient orientés dans un sens qui s'écartait délibérément de l'Est 8 (la même remarque vaut pour d'autres fondations archaïques).

Nous n'ignorons plus que les positions du levant et du couchant se trouvèrent bouleversées à plusieurs reprises, et les changements d'orientation des fondations ne s'expliquent point autrement. Des fondations comme celles d'Eleusis témoignent des changements de direction de l'axe terrestre, et des variations de la position des pôles. Le temple détruit par le cataclysme était chaque fois reconstruit avec une orientation nouvelle.

Outre les temples et leurs portes, les obélisques servaient à déterminer la position de l'Est et de l'Ouest, ou du levant et du couchant aux jours des équinoxes. Faute de comprendre leur vraie destination, on s'est demandé à quelle fin ils avaient été construits : « L'origine et la signification religieuse des obélisques restent assez obscures 9 ».

Deux colonnes furent érigées devant le temple de Salomon 10. Les Ecritures sont muettes sur leur objet.

L'Amérique avait aussi des obélisques en forme de colonnes; parfois, un anneau était placé au point le plus élevé du pilier pour laisser passer les rayons du soleil. « On observait avec un soin extrême les solstices et les équinoxes; des colonnes de pierre s'élevaient à l'Est et à l'Ouest de Cuzco, pour observer les solstices... Au sommet des colonnes, étaient disposés des disques

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par où pénétraient les rayons solaires. On faisait des marques sur le sol, préalablement nivelé et pavé. On tirait des lignes pour fixer les mouvements du soleil. »

« Afin de déterminer avec précision les équinoxes, une colonne de pierre s'élevait sur le parvis nu du temple du soleil, au centre d'un vaste cercle... L'instrument s'appelait inti-huatana, c'est-à-dire l'endroit où le soleil est enchaîné ou encerclé. On trouve des inti-huatana sur les hauteurs de Ollantay-tampu, à Pisac, à Hatuncolla et en d'autres lieux 11. »

Les obélisques égyptiens ont pu servir de gnomons, ou horloges solaires. La longueur et la direction de l'ombre indiquaient l'heure. Les obélisques placés par paires servaient de calendriers : aux équinoxes de printemps et d'automne, lorsque le soleil se levait exactement à l'Est et se couchait exactement à l'Ouest, leurs ombres devaient demeurer tout le jour continues.

Ce passage de Pline montre avec évidence que les obélisques servaient à vérifier l'ombre du soleil (et la position de la terre).

« L'obélisque (de Sésothis, ramené d'Egypte) qu'on a érigé sur le champ de Mars (à Rome) a reçu du défunt Empereur une destination singulière : par l'ombre qu'il projette. on mesure la longueur des jours et des nuits. » Suit cette remarque : « Depuis presque trente ans, cependant, on s'aperçoit que les observations enregistrées par ce cadran solaire ne concordent plus : le Soleil a-t-il modifié sa trajectoire, à la suite de quelque bouleversement du système céleste ? La Terre s'est-elle quelque peu écartée de son centre (phénomène qui, m'a-t-on assuré, a été constaté en d'autres endroits) ? Ou bien, un séisme, limité à notre seule cité, a-t-il modifié la position originaire du cadran solaire ? Ou encore, les inondations du Tibre ont-elles provoqué un affaissement des fondations du bloc 12? »

Le passage montre que Pline envisageait toutes les hypothèses possibles, sans exclure l'événement connu, qui s'était produit à l'époque lointaine où, selon Plutarque, « le pôle fut faussé, et s'inclina », et où la terre, selon Ovide, « s'enfonça un peu plus bas que sa place habituelle ».

L'horloge solaire

Les, pôles n'avaient plus les mêmes positions. Toutes les latitudes furent déplacées, et l'axe changea de direction. L'année s'augmenta de 360 à 365 jours 1/4, fait qui sera prouvé dans un prochain chapitre. Il est probable que la longueur de la journée fut également altérée. Naturellement un cadran solaire construit avant 687 devenait inutilisable pour son dessein premier, mais il servira au moins à confirmer notre hypothèse.

Une horloge de ce genre, datant d'une période approximativement comprise entre 850 et 720 avant J.-C. a été retrouvée à Faijum, en Egypte, à la latitude 27°. Elle comporte un style vertical qui projette l'ombre sur un plan horizontal, portant des divisions horaires 1. Or ce cadran solaire n'indique correctement l'heure ni à Faijum, ni nulle part ailleurs en Egypte. Un savant qui tentait d'en découvrir le fonctionnement arriva à la conclusion que l'extrémité du style devait être orientée vers l'Est le matin, et vers l'Ouest l'après-midi; et plusieurs autres savants ont convenu que c'était la seule façon d'utiliser cette horloge solaire. Mais, il était impossible de lire l'heure selon cette méthode. « Puisque toutes les ombres sont en fait plus rapprochées du style que les marques correspondantes de l'instrument, le style qui projette l'ombre sur la surface plane devait être plus élevé qu'il ne l'est. L'actuelle extrémité du style est incapable de projeter l'ombre sur le plan; pour qu'elle y parvienne, elle devrait se trouver sur une ligne parallèle au-dessus de l'extrémité actuelle 2.

« Les divisions portées sur le plan n'ont pas dû être faites d'après des observations réelles, mais d'après quelques principes théoriques 3. » Comme l'a fort justement remarqué un critique . « Cette explication implique qu'en aucune saison de l'année l'horloge ne marquait correctement les heures, à moins qu'on ne modifiât à chaque heure la hauteur de cette partie de l'instrument qui projette l'ombre 4. »

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Cette horloge solaire ne possédant aucun procédé technique qui permit de modifier la hauteur du style, il est peu probable qu'on se soit livré à une manipulation renouvelée à chaque heure du jour. En outre, pour changer la longueur du style à chaque heure, opération en soi impraticable, il eût fallu qu'une autre horloge marquât les heures sans qu'il fût besoin d'aucune manipulation, et indiquât ainsi le moment exact où le style de la première horloge devait être modifié. Si l'on pouvait obtenir l'heure sans manipulation aucune, quel pouvait donc être l'objet de cette étrange horloge solaire ?

On a donc cherché à expliquer autrement l'utilisation de ce cadran solaire égyptien. Un savant a émis cette hypothèse : à une époque lointaine (compte tenu de la précession des équinoxes), l'horloge solaire était employée à une certaine latitude en Egypte le jour du solstice d'été. Mais il constate : « Cependant, on n'a pas tenu compte des variations de la déclinaison du soleil, entre son lever et son coucher... En toutes autres saisons de l'année, il eût été nécessaire à chaque heure, ou à chaque fois qu'on lisait l'heure, de modifier la longueur du style, ou d'incliner le plan, ou d'accomplir les deux opérations simultanément. En fait, quand le soleil avait une déclinaison Sud, ou même une légère déclinaison Nord, les deux opérations eussent été indispensables. Nous en concluons donc qu'à l'origine, l'horloge était employée à l'époque du solstice d'été, ou à proximité du solstice d'été 5. » Cette explication se heurte elle aussi à cette invraisemblable nécessité d'un rajustement de l'instrument à chaque lecture, qui supposerait d'autre part que les Egyptiens avaient quelque meilleur moyen de connaître l'heure exacte. La conclusion à laquelle arrive l'auteur de cette explication, à savoir qu'à l'origine l'horloge ne servait qu'une seule journée, paraît étrange et est en contradiction avec la définition et l'objet des horloges.

En admettant même que cette théorie fût exacte, son auteur n'est point parvenu à faire fonctionner le spécimen trouvé à Faijum, mais seulement une horloge similaire retrouvée en morceaux. Encore dut-il avoir recours à la précession des équinoxes, et supposer que la construction de cette horloge remontait à une période antérieure de plusieurs siècles à celle que détermine la chronologie.

L'horloge solaire trouvée à Faijum, construite sous la dynastie libyenne, entre 850 et 720 avant notre ère, nous aidera à calculer la longueur du jour, l'inclinaison du pôle sur l'écliptique, et les latitudes de l'Egypte à cette période historique. La modification d'un seul de ces trois facteurs eût suffi à rendre inutilisable cet instrument; or il est fort probable que les trois facteurs subirent des modifications.

Si nous ne possédons pas le cadran solaire du roi Achaz, nous avons, par contre, l'horloge solaire employée en Egypte avant le grand cataclysme de 687, et peut-être même avant celui de 747.

L'horloge à eau

Outre le gnomon, ou cadran solaire, les Egyptiens employaient l'horloge à eau (ou clepsydre), qui avait sur le premier l'avantage d'indiquer l'heure la nuit aussi bien que le jour.

Un spécimen intact a été retrouvé au temple d'Ammon à Karnak (Thèbes) à 25°1/2 au Nord de l'équateur. Il date du règne d'Amenhotep II, de la XVIIIIe dynastie, père d'Ikhnaton. Le vase a une ouverture par laquelle l'eau s'écoule. Sur la face interne, sont gravées des marques horaires. Le jour égyptien étant divisé en heures dont la longueur variait avec celle du jour, le vase présente des séries différentes de marques, correspondant aux saisons de l'année. Quatre de ces marques ont une importance toute particulière : celles de l'équinoxe d'automne, du solstice d'hiver, de l'équinoxe de printemps, et du solstice d'été. Aux périodes des équinoxes, le jour et la nuit ont une durée égale sous toutes les latitudes; mais aux périodes des solstices, lorsque le jour ou bien la nuit, selon le cas, atteignent leur longueur maxima, la durée du jour varie avec la latitude. Plus la distance à l'équateur est grande, plus la différence est sensible

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entre la nuit et le jour au moment du solstice. Cette différence dépend également de l'inclinaison de l'équateur sur le plan de l'orbite ou écliptique; celle-ci est aujourd'hui de 23°1/2. Si cette inclinaison venait à changer, ou en d'autres termes, si l'axe polaire modifiait sa position astronomique (direction), ou sa position géographique, chaque pôle prenant une position nouvelle, la durée du jour et de la nuit serait également modifiée, sauf aux équinoxes.

L'horloge à eau d'Amenhotep II révéla un très curieux agencement au savant qui l'étudia. En cherchant à déterminer la longueur du jour au solstice d'hiver, il découvrit que la construction de l'horloge avait été calculée pour un jour de 11 heures 18 minutes, alors que le jour du solstice à 25° de latitude Nord est de 10 heures 26 minutes, soit une différence de 52 minutes. De même, le constructeur de l'horloge attribuait une durée de 12 heures 42 minutes à la nuit du solstice d'hiver, tandis qu'elle est de 13 heures 34 minutes, en sorte qu'elle est raccourcie de 52 minutes.

Au solstice d'été, jour le plus long de l'année, l'horloge prévoyait un jour de 12 heures 48 minutes, au lieu de 13 heures 41 minutes, et une nuit de 11 heures 12 minutes au lieu de 10 heures 19 minutes.

Aux équinoxes de printemps et d'automne, la durée du jour est de 11 heures 56 minutes : or l'horloge indique précisément 11 heures 56 minutes. La durée de la nuit est alors de 12 heures 4 minutes : et c'est le chiffre exact de l'horloge.

La différence de durée entre le jour actuel et le jour que l'horloge avait pour objet de mesurer est très logique. Au solstice d'hiver, le jour, d'après l'agencement de l'horloge, a cinquante-deux minutes de plus que le jour actuel à Karnak et à la même date, et la nuit cinquante-deux minutes de moins. Au solstice d'été, le jour a cinquante-trois minutes de moins selon la clepsydre, et la nuit cinquante-trois minutes de plus.

Les chiffres de l'horloge marquent une différence moindre que celle aujourd'hui observée à Karnak entre la longueur du jour aux deux solstices, ou entre le jour le plus court, et le jour le plus long de l'année. L'horloge à eau d'Amenhotep II, si elle a été correctement construite, et correctement interprétée, suggère soit que Thèbes était plus proche de l'équateur, soit que l'inclinaison de l'équateur sur l'écliptique était inférieure à l'angle actuel de 23°1/2. Dans ce cas comme dans l'autre, le climat des latitudes de l'Egypte ne pouvait être le même que maintenant.

Comme il apparaît d'après nos investigations, l'horloge d'Amenhotep est devenue inutilisable au milieu du VIIIe siècle; le même sort eût été réservé à celle qui aurait pu la remplacer à cette époque, après les cataclysmes de la fin du VIIIe et du début du VIIe siècle : une fois de plus l'axe du monde et l'axe de la terre changèrent de position.

Un hémisphère se déplace vers le sud

« Contemplez le monde qui se courbe Avec son dôme massif, La terre, l'étendue des mers, et la profondeur des cieux »

Virgile, Eglogues, IV, 50. Le déplacement des pôles entraîna hors du nouveau cercle polaire la calotte glaciaire, alors

que d'autres régions prenaient sa place. L'actuelle position du pôle, ou l'actuelle direction de l'axe n'a pas un caractère définitif : elle n'obéit ainsi à aucune loi connue de l'astronomie ou de la géologie. Schiaparelli a fait la même remarque : « La permanence des pôles géographiques dans la même région de la terre ne peut être encore considérée comme établie d'une manière incontestable par des arguments astronomiques ou mécaniques. Cette permanence pourrait être un fait aujourd'hui qu'elle resterait encore à prouver pour les âges antérieurs de l'histoire du globe. » « Notre problème, si important du côté astronomique et mathématique, touche aux

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fondements de la géologie et de la paléontologie; sa solution est liée aux événements les plus grandioses de l'histoire de la terre 1. »

Le pôle actuel n'a pas toujours été le pôle terrestre, et les modifications qu'il a subies ne sont pas le résultat d'un lent processus. La calotte glaciaire recouvrait les pôles; brusquement, une catastrophe a mis fin aux époques glaciaires. Des régions qui possédaient un climat modéré se sont instantanément trouvées transportées à l'intérieur du cercle polaire. En Amérique, et en Europe, la nappe de glace se mit à fondre. D'énormes quantités de vapeur d'eau s'élevèrent à la surface de l'océan, provoquèrent un accroissement des précipitations et la formation d'une nouvelle calotte glaciaire. Les raz de marée gigantesques qui déferlèrent sur le continent, plus encore que le déplacement de la glace, provoquèrent, surtout dans le Nord, l'ébranlement des terrains erratiques, et le transport à de longues distances d'innombrables roches qui vinrent s'échouer sur des formations sans parenté aucune avec elles.

Si nous considérons la distribution de la couche glaciaire dans l'hémisphère Nord, à la dernière période glaciaire, nous constatons qu'elle est délimitée par un cercle d'environ 3600 kilomètres de rayon, dont le centre se trouve à proximité. de la côte orientale du Groënland, ou dans le détroit entre le Groënland et la terre de Baffin, près du pôle Nord magnétique actuel. La partie Sud-Est de la Sibérie est à l'extérieur du cercle, la vallée du Missouri, jusqu'au 39e degré de latitude Nord, la partie orientale de l'Alaska (mais non l'occidentale) y sont incluses. Le Nord-Est de l'Europe est largement à l'intérieur du cercle. La ligne passe à l'arrière des monts Oural où elle s'incurve vers le Nord, pour traverser l'actuel cercle polaire.

Une question se pose alors : à une époque lointaine, le pôle Nord n'était-il point situé à 20°, ou davantage, de sa position présente, donc plus près de l'Amérique ? Pareillement, le pôle Sud eût été situé à quelque 20° du pôle actuel 2.

Les cartes astronomiques des brahmanes ont décontenancé les astronomes modernes. Calcutta étant séparée de la baie de Baffin par 180° de longitude, les cartes brahmanes suggèrent une position de la terre telle que le point d'intersection de l'axe avec la surface du globe se situerait sur la terre de Baffin, à proximité de l'actuel pôle magnétique. Le changement de latitude dans les régions à l'Est et à l'Ouest des Indes eût été moindre.

Il est probable qu'il y a vingt-sept ou peut-être trente-cinq siècles, le pôle Nord se trouvait

sur la terre de Baffin, ou sur la presqu'île de Boothia Félix, en continent américain. L'extermination brutale des mammouths fut causée par un cataclysme; ils périrent

vraisemblablement par asphyxie ou électrocution. Et c'est l'irruption presque immédiate du continent sibérien dans la région polaire qui explique sans doute l'état de conservation des mammouths 3.

Il semble que les mammouths et d'autres animaux furent détruits par un brusque afflux de gaz, et la disparition de l'oxygène absorbé par les incendies qui faisaient rage dans les couches supérieures de l'atmosphère. Quelques instants plus tard, les mammouths, à demi morts ou morts, pénétraient dans le cercle polaire. En quelques heures, la partie Nord-Est de l'Amérique glissait de la zone polaire dans une région modérée, tandis que la partie Nord-Est de la Sibérie accomplissait le déplacement inverse. La Sibérie connut pour la première fois le climat froid qui la caractérise aujourd'hui, lorsque l'âge glaciaire prit brutalement fin en Europe et en Amérique.

Nous affirmons ici qu'aux époques historiques, ni le Nord-Est de la Sibérie, ni la partie occidentale de l'Alaska, n'étaient compris dans les régions polaires; ils s'y installèrent à la suite des cataclysmes des VIIIe et VIIe siècles. Cette assertion implique que ces terres, dans la mesure où elles n'étaient pas recouvertes par la mer, étaient très vraisemblablement habitées par l'homme. Il importerait donc de procéder à des fouilles dans la partie Nord-Est de la Sibérie,

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pour établir si ces toundras maintenant désertiques se trouvaient, il y a vingt-sept siècles, des foyers de civilisation.

En 1939 et 1940, « une des plus étonnantes et des plus importantes découvertes du siècle » (E. Stefansson) fut faite à Point-Hope, en Alaska, sur les côtes du détroit de Béring : on y trouva au Nord du 68°, et à 200 kilomètres environ à l'intérieur du cercle polaire, une ville ancienne de quelque 800 maisons, dont la population avait été plus importante que celle de la cité moderne, Fairbanks 4.

Ipiutak, nom que les Esquimaux donnent aujourd'hui à l'emplacement de cette ville antique, dut être construite avant l'ère chrétienne. On lui attribue généralement 2000 ans d'âge. Les fouilles ont mis au jour des ivoires sculptés, différents de ceux qu'ont produits la civilisation des Esquimaux, et les civilisations des Indiens de l'Amérique du Nord. Des tombeaux étranges, faits de troncs d'arbres, contiennent des squelettes dont les yeux, avec leurs globes artificiels taillés dans l'ivoire, et incrustés de jais, dévisagèrent les archéologues de leur regard pétrifié.

On trouva également dans des tombes des objets de fabrication soignée, finement gravés, assez semblables à ceux que produisait la Chine du Nord il y a deux ou trois mille ans : d'autres objets évoquent les sculptures des peuplades Ainous, dans le japon septentrional, et des indigènes du fleuve Amour en Sibérie. La civilisation révélée par ces fouilles n'avait pas la simplicité qui caractérise les habitants des régions arctiques. Elle était complexe, révélant chez ce peuple un raffinement qu'aucun peuple esquimau n'atteignit jamais, et où se décèle nettement l'influence de l'Asie Orientale 5.

Au centre de l'Alaska, région glacée depuis de nombreux siècles, on a retiré du sous-sol des animaux dont la chair adhérait encore aux os. « Des ossements de mammifères appartenant à des espèces éteintes, ou existant encore aujourd'hui, ont été découverts dans la plupart de ces régions... Ils ne sont pas fossilisés, mais conservés par la glace, et dans certains cas, de la chair, des ligaments, de la peau sont demeurés attachés aux os 6. »

En 1938, on a trouvé dans la région de Fairbanks « la peau presque intacte d'un bison géant, dont les poils n'avaient point disparu».

« Il est possible que quelques-uns des objets façonnés découverts à huit ou dix mètres de profondeur aient été primitivement à la surface, ou presque. Mais la position de certains autres nous invite à les associer avec les ossements d'animaux disparus, à de grandes profondeurs. Les objets identifiés sont faits de pierre taillée, d'os et d'ivoire 7. »

En 1936-1937, dans l'étroit secteur désigné sous le nom d'Ester, on a retrouvé divers objets, et de nombreuses pierres calcinées, mêlés à des ossements de mammouths, de mastodontes, de bisons, et de chevaux, sous les dépôts de vase d'Ester Creek, à quelque vingt mètres de la surface primitive du sol 8. En 1938, de semblables découvertes ont été faites à Engineer Creek sous quarante mètres de vase 9.

Ces vestiges de vie et de civilisation à pareille profondeur y furent enfouis par des cataclysmes antérieurs à celui qui est décrit dans ce chapitre. Certains, cependant, ont été engloutis au cours des catastrophes cosmiques des VIIIe et VIIe siècles. Quand la rotation de la terre fut perturbée, des vagues de transport déferlèrent vers l'Est à cause de l'inertie, et vers les pôles lorsque les eaux se retirèrent du renflement équatorial où seule la rotation terrestre les maintient. L'Alaska a donc dû être balayé par des flots venus du Pacifique.

Des villes semblables à celle qu'on a mise au jour en Alaska, et certaines plus importantes même, seront très probablement découvertes dans le Kamtchatka, ou plus au Nord, dans la région où les rivières Kolyma et Léna se jettent dans l'océan Arctique. Les conditions qui assurèrent la parfaite conservation des mammouths durent produire les mêmes effets sur les êtres humains; il n'est donc pas exclu qu'on puisse retrouver aussi des corps humains, prisonniers de la glace.

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Les archéologues devront rechercher si l'anéantissement de tous les êtres vivants et en particulier des mammouths, en ces régions du Nord-Ouest de l'Amérique et du Nord-Est de l'Asie, eut lieu au VIIIe et au VIIe siècle, ou bien au XVe siècle avant notre ère (sinon antérieurement); en d'autres termes, si les bandes de mammouths furent anéanties au temps d'Isaïe, ou au temps de l'Exode.

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Chapitre 8

L'année de 360 jours

La longueur de l'année, avant la dernière série de cataclysme qui changea la direction de l'axe terrestre, déplaça les pôles, et modifia l'orbite de notre globe, devait être différente de ce qu'elle est depuis ces événements.

On possède de nombreux témoignages qui attestent qu'avant de compter 365 jours 1/4, l'année ne comportait que 360 jours. Cette année de 360 jours ne faisait au reste qu'assurer la transition entre une année plus brève encore, et l'année actuelle.

Dans la période qui sépare le dernier cataclysme du XVe siècle et la première catastrophe cosmique du VIIIe siècle, la durée d'une révolution terrestre semble avoir été de 360 jours 1.

A seule fin d'étayer cette affirmation, j'invite le lecteur à faire un voyage autour du monde. Commençons donc par l'Inde.

Les textes contemporains des Védas parlent constamment d'une année qui ne se compose que de 360 jours. « Tous les textes des Védas parlent uniformément et exclusivement d'une année de 360 jours. On trouve dans tous les Brahmanas des textes qui assignent sans ambiguïté cette durée à l'année 2.» « Il est curieux que les Védas ne mentionnent nulle part une période intercalaire : ils ne se lassent pas de déclarer que l'année a 360 jours, mais ne font nulle part allusion aux cinq ou six jours, qui appartiennent sans conteste à l'année solaire 3.

L'année hindoue de 360 jours est divisée en 12 mois, de 30 jours chacun 4. Les textes précisent que la lune est croissante pendant quinze jours et décroissante pendant quinze autres jours. Ils déclarent également que le soleil se déplace vers le Nord pendant six mois ou 180 j'ours, puis vers le Sud pendant une durée égale. Ces chiffres ont suscité chez les savants une perplexité que reflète la citation suivante « Le passage du Nidana-Sutra où il est affirmé que le soleil reste treize jours 1/2 dans chacune des vingt-sept Naksatras, et donc que l'année solaire compte 360 jours, prouve non point le caractère conventionnel et inexact de ces données, mais la fausseté essentielle des conceptions. » « Ils attribuent à chaque demi-lunaison une durée de quinze jours; et nulle part il n'est reconnu que ce nombre soit trop fort 5. »

Les travaux d'astronomie des Brahmanes utilisent des procédés géométriques extrêmement ingénieux; il paraît donc déconcertant qu'ils ne se soient pas aperçus que l'année de 360 jours était trop courte de cinq jours 1/4. En dix ans, cela fait une erreur de cinquante-deux jours. L'auteur que je viens de citer a été contraint de conclure que les Brahmanes possédaient une « idée très confuse de la véritable longueur de l'année ». C'est seulement à une époque ultérieure, ajoute-t-il, que les Hindous reconnurent l'évidence de ces faits. Un auteur allemand a écrit de même : « Les Védas nous révèlent l'existence de la vieille année Savana de 360 jours, et d'autres conceptions similaires. Ainsi est-il prouvé qu'il fallut de longs siècles avant qu'on parvînt à établir l'année de 365 jours 6. »

Voici un passage tiré de l'Aryabhatiya, vieil ouvrage hindou de mathématiques et d'astronomie : « Une année comprend douze mois; un mois 30 jours; un jour 60 nadis, et un nadi 60 vinadikas 7. »

Le mois de trente jours, et l'année de 360 jours servaient de fondement à la chronologie primitive de l'Inde, et à la détermination des dates de l'histoire.

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Les Brahmanes savaient que la durée de l'année, du mois et du jour change à chaque nouveau cycle du monde. La citation suivante est extraite du Surya-Siddhanta, ouvrage classique de l'astronomie hindoue; immédiatement après l'introduction, on lit : « Seule la révolution des âges a produit ici une différence dans l'estimation du temps 8 ». Une note du traducteur de cet ancien ouvrage explique: «Selon le commentaire, ces dernières phrases signifient qu'au cours des Grands Ages successifs... il y a eu de légères différences dans le mouvement des corps célestes. » Le Surya ajoute, à propos du mot bija, ou correction du temps à chaque nouvel âge : « Le temps est le destructeur des mondes ».

L'année religieuse, comme l'année du calendrier, comprenant 360 jours, ou douze mois lunaires de trente jours chacun. C'est sensiblement à partir du VIIe siècle avant notre ère, que l'année hindoue compta 365 jours 1/4. Cependant, l'année religieuse demeura fixée à 360 jours : elle fut alors appelée savana.

Lorsque le calendrier hindou adopta l'année de 365 jours 1/4, et le mois lunaire de 29 jours 1/2, le vieux système ne fut pas pour cela abandonné. « Le mois naturel, comprenant environ vingt neuf jours 1/2 selon le temps solaire moyen, est alors divisé en trente jours lunaires (tithi). Et cette division, quoique arbitraire et anormale, puisque les jours lunaires commencent et se terminent à n'importe quel moment du jour et de la nuit naturels, revêt une importance pratique capitale pour les Hindous : ils règlent sur elle la célébration de maintes cérémonies, elle détermine les périodes fastes et néfastes, et ainsi de suite 9. »

Ce double système n'est rien d'autre que la superposition d'une nouvelle mesure du temps à l'ancienne.

L'ancienne année des Perses comprenait 360 jours, ou douze mois de trente jours chacun ; au

VIIe siècle, cinq jours Gâthâs furent ajoutés au calendrier 10. Le Bundehesh, livre sacré des Perses, décrit en ces termes les 180 apparitions successives du

soleil, du solstice d'hiver au solstice d'été, et du solstice d'été au solstice d'hiver suivant. « Il y a 180 ouvertures (rogin) à l'Est, et 180 à l'Ouest... Et le soleil, chaque jour, entre par une ouverture, et sort par une autre... Il revient au Varak en 360 jours, et 5 jours gâthâs 11 »

Les jours gâthâs sont « cinq jours supplémentaires ajoutés au dernier des douze mois, qui compte de ce fait trente-cinq jours. Aucune ouverture supplémentaire n'est prévue pour ces jours-là. Ce dispositif semble indiquer que l'idée des ouvertures est antérieure à la rectification du calendrier, qui ajouta les cinq jours gâthâs à une année originaire de 360 jours 12.

A Babylone, l'année comprenait primitivement 360 jours 13. Les tablettes astronomiques

antérieures à l'Empire néo-babylonien assignent 360 jours à l'année, sans mentionner de jours supplémentaires. Avant même qu'on ne déchiffrât les inscriptions cunéiformes, on savait que l'ancienne année babylonienne ne comportait que 360 jours. Csétias a écrit que les murs de Babylone avaient 360 « furlongs » (7200 mètres) de circonférence, « autant qu'il y avait de jours dans l'année 14.»

Les Babyloniens divisaient le Zodiaque en 36 décans, un décan représentant l'espace parcouru par le soleil par rapport aux étoiles fixes en une période de dix jours. « Cependant, les 36 décans de 10 jours chacun, ne peuvent constituer qu'une année de 360 jours 15 ». Pour expliquer cette mesure du Zodiaque apparemment arbitraire, on a émis l'hypothèse suivante « Des astronomes de Babylone ont dû attribuer d'abord 360 jours à l'année, et la division du cercle en 360 degrés devait indiquer l'espace parcouru par le soleil chaque jour dans sa révolution supposée autour de la terre 16. » Mais aucune explication n'est proposée pour les cinq degrés du Zodiaque en excédent.

L'ancienne année babylonienne se composait de douze mois de trente jours chacun, les mois étant comptés à partir de la nouvelle lune. Comme il s'écoule 29 jours 1/2 entre une nouvelle

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lune et la suivante, le calendrier babylonien soulève chez les savants une perplexité déjà rencontrée par ailleurs. « Les mois de trente jours commencent avec la nouvelle lune. Comment faisait-on concorder ceci avec les faits astronomiques ? Nous n'en savons rien. L'usage de la période intercalaire était encore inconnu 17 ». II semble qu'au VIIe siècle, cinq jours furent ajoutés au calendrier babylonien. Ils étaient considérés comme néfastes, et inspiraient une crainte superstitieuse.

En Assyrie, l'année équivalait à 360 jours. La décade était appelée Sarus; elle comprenait

3600 jours 18. « L'année des Assyriens, comme celle des Babyloniens, se composait de mois lunaires; et il

semble que les rapports astrologiques relatifs à l'apparition de la lune et du soleil aient eu pour objet de déterminer et de prévoir la durée du mois lunaire. Si cela est exact, l'année courante en Assyrie devait être l'année lunaire. Le calendrier assigne trente jours pleins à chaque mois; or, la durée du mois lunaire est à peine supérieure à vingt-neuf jours et demi 19. » «Il semble impossible que le mois du calendrier et le mois lunaire coïncident si exactement à la fin de l'année 20. »

Les documents assyriens mentionnent des mois de trente jours seulement, et ceux-ci vont de croissant à croissant 21. En Assyrie, comme dans les autres pays, les astronomes considèrent de toute évidence le mois lunaire comme équivalant à trente jours. Les savants modernes se demandent comment les astronomes assyriens arrivaient à faire coïncider la durée des mois lunaires avec la révolution de la lune; et comment les observations qu'ils rapportaient au Palais royal pouvaient être si constamment entachées d'erreur.

Du XVe au VIIIe siècle avant notre ère, le mois des Israélites comportait trente jours, et

douze mois formaient une année. Nulle part ne se trouvent mentionnés des mois inférieurs à trente jours, ni des années de plus de douze mois. Le Deutéronome (XXXIV : 8, et XXI : 13) et les Nombres (XX : 29) nous montrent clairement que les mois comportaient trente jours : il y est ordonné de célébrer le deuil pendant « un mois plein», et le deuil dure trente jours. La Genèse, rapportant l'histoire du Déluge, calcule par mois de trente jours : cent cinquante jours se sont écoulés entre le dix-septième jour du second mois et le dix-septième jour du septième mois 22. Ce texte semble avoir été composé entre l'Exode et le bouleversement du règne d'Osias 23.

« Les Hébreux observaient les mois lunaires. Les grandes fêtes de la nouvelle lune au temps des Juges et des Rois en sont le témoignage 24. « La fête de la nouvelle lune, primitivement, était au moins aussi importante que celle du Sabbat 25 ». Etant donné que ces mois (lunaires) comportaient trente jours, sans qu'aucun mois de vingt-neuf jours vînt s'intercaler entre eux, et que douze de ces mois formaient une année, sans jours supplémentaires, ni mois intercalaires, les exégètes de la Bible n'ont trouvé aucune conciliation possible entre ces trois chiffres : 354 jours, ou douze mois lunaires de vingt-neuf jours et demi; 360 jours, multiple de douze fois trente ; 365 jours 1/4, longueur de l'année actuelle.

En Egypte, l'année comptait 360 jours, avant qu'on ne lui en ajoutât cinq. Le calendrier du papyrus Ebers, document du Nouvel-Empire, fixe l'année à douze mois, de trente jours chacun 26.

Dans la neuvième année du règne de Ptolémée Evergète (238 av. J.-C.), un groupe de prêtres égyptiens se réunit à Canope afin de réformer le calendrier. Ils rédigèrent un décret, et l'on a retrouvé en 1860, à Tanis, dans le Delta, la tablette sur laquelle il fut inscrit. L'objet de ce décret était d'harmoniser le calendrier et les saisons, « selon la présente disposition du monde » comme le déclare le texte. Il ordonnait qu'on ajoutât tous les quatre ans un jour aux « 360 jours et aux cinq jours qu'on avait déjà ordonné d'ajouter 27. »

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Les auteurs du décret n'ont pas spécifié la date exacte où furent ajoutés les cinq jours. Mais ils déclarent très explicitement que cette réforme mit fin à une période où l'année ne comportait que 360 jours.

J'ai déjà fait remarquer que le calendrier de 360 jours ne fut introduit en Egypte qu'après la chute du Moyen-Empire, pendant la période hyksos. Les cinq jours supplémentaires ont dû être ajoutés aux 360 jours, après la chute de la XVIIIe dynastie. En effet, les nombreuses inscriptions datant de cette dynastie ne font jamais mention des « cinq jours». Les jours additionnels, ou, comme les appelaient les Egyptiens, « les cinq jours qui sont en plus de l'année 28 » nous sont révélés par des documents du VIIe siècle, et des siècles suivants. Les pharaons des dynasties ultérieures avaient coutume d'écrire : « L'année et les cinq jours ». La fin de l'année était célébrée non pas au dernier des jours additionnels, mais au trentième jour de Mésori, le douzième mois de l'année 29. »

Au Ve siècle, Hérodote a écrit : « Les Egyptiens, assignant trente jours à chacun des douze mois, ajoutent cinq jours chaque année à ce nombre; ainsi font-ils concorder le calendrier avec le cycle complet des saisons 30. »

Le livre de Sothis, attribué à tort au prêtre égyptien Manèthon 31, et Georgius Syncellus, le chronologiste de Byzance 32 soutiennent qu'originairement les cinq jours supplémentaires ne suivaient pas les 360 jours du calendrier, mais qu'ils ne furent ajoutés qu'à une date ultérieure 33, ce que corrobore le texte du décret de Canope.

Celui-ci, lorsqu'il parle « d'amender les erreurs du ciel », suggère que l'introduction des jours additionnels ne fut pas résultat d'un progrès de la connaissance astronomique, mais fut nécessité par une altération réelle des mouvements planétaires. Dans Isis et Osiris 34, Plutarque évoque par une allégorie cet accroissement de la durée de l'année. « Hermès, qui jouait avec la lune, gagna la soixante-dixième partie de chacune de ses périodes d'illumination et, avec tous ses gains, il composa cinq jours qu'il intercala parmi les 360 jours. » Plutarque nous apprend également que l'un de ces jours additionnels passait pour être néfaste : personne ne traitait d'affaire ce jour-là, et les rois eux-mêmes « ne s'occupaient pas de leur personne, avant la tombée de la nuit ».

Les fêtes de la nouvelle lune étaient très importantes à l'époque de la XVIIIe dynastie. Les nombreuses inscriptions de cette période assignent uniformément trente jours aux mois qu'elles citent. Le retour des fêtes de la nouvelle lune à des intervalles de trente jours, implique que telle était la durée du mois lunaire.

Si nous récapitulons, nous constatons la concordance de tous ces faits. Le décret de Canope établit qu'à une certaine période de l'histoire égyptienne, l'année ne comptait que 360 jours, et que les cinq jours lui furent ajoutés à une date ultérieure; le papyrus Ebers révèle que, sous la XVIIIe dynastie, l'année du calendrier comportait 360 jours, et se divisait en douze mois de trente jours chacun; d'autres documents de la même période attestent également que le mois lunaire comportait trente jours, et que la nouvelle lune revenait douze fois en une période de 360 jours. Le Livre de Sothis déclare que cette année de 360 jours fut établie sous les Hyksos, après la chute du Moyen-Empire, et avant la XVIIIe dynastie.

Au VIIIe ou au VIIe siècle, les cinq jours furent ajoutés à l'année à la suite d'événements qui les firent considérer comme néfastes.

Bien que l'adaptation du calendrier aux exigences nouvelles de la nature eût été déterminée

par de rapides calculs, beaucoup de nations continuèrent pendant quelque temps d'observer une année civile de 360 jours, divisée en douze mois de trente jours chacun.

Cléobule, 1'un des sept sages de la Grèce antique, évoque cette division de l'année en douze mois de trente jours, dans sa fameuse allégorie du père et de ses douze fils, dont chacun a trente filles 35.

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A partir de l'époque de Thalès, qui également faisait partie des sept sages, et qui était capable de prévoir les éclipses, les Hellènes savaient que l'année comporte 365 jours. Ils attribuaient à Thalès la découverte de ce chiffre exact. Comme Thalès naquit au VIIe siècle, il n'est pas impossible qu'il ait été l'un des premiers Grecs à connaître la nouvelle durée de l'année. C'est en effet au début de ce siècle que l'année prit sa durée actuelle. C'était Solon, contemporain de Thalès, et lui aussi l'un des sept sages, qui, disait-on, avait découvert que le mois lunaire compte moins de trente jours 36. Bien qu'avertis de la durée exacte de l'année, et du mois, les Grecs après Solon et Thalès n'en continuèrent pas moins à observer l'ancien calendrier devenu erroné; Hippocrate nous en apporte le témoignage: « Sept années comprennent 360 semaines », ainsi que Xénophon, Aristote et Pline 37. On explique la persistance de l'ancien calendrier par un certain respect pour l'année astronomique disparue, et l'avantage de sa simplicité dans les calculs.

Les anciens Romains assignaient eux aussi 360 jours à l'année. Plutarque a écrit dans la Vie de Numa qu'à l'époque de Romulus, VIIIe siècle, l'année romaine n'avait que 360 jours 38. Divers, auteurs latins affirment que le mois ancien comportait trente jours 39.

De l'autre côté de l'Océan, les Mayas avaient une année de 360 jours. Ils lui ajoutèrent par la

suite cinq jours, et l'année s'appela alors tun (période de 360 jours, plus cinq jours). Tous les quatre ans, ils ajoutaient un jour supplémentaire à l'année. « Ils en faisaient un compte séparé, et les appelaient les jours pour rien, c'est-à-dire pendant lesquels on ne faisait rien », a écrit J. de Acosta, l'un des premiers historiens qui s'intéressa à l'Amérique 40.

Le frère Diégo de Landa, dans son Yucatan before and after the Conquest, a écrit : « Leur année présentait la même perfection que la nôtre : elle comptait 365 jours et six heures, qu'ils groupaient en deux sortes de mois. Les uns de trente jours s'appelaient U, qui signifie la lune, et ils duraient de l'apparition à la disparition de la nouvelle lune 41 ». Les autres comptaient vingt jours (uïzal hunekeh) : on découvre ici les vestiges d'une méthode de calcul plus ancienne sur laquelle je reviendrai lorsque j'examinerai les systèmes antérieurs à celui qui attribue 360 jours à l'année.

De Landa a également écrit que les cinq jours additionnels étaient regardés comme « néfastes et malheureux ». Ils étaient appelés « jours sans nom 42 ». Les Mexicains, à l'époque de la conquête, appelaient « lune » une période de trente jours : ils n'ignoraient pas cependant que la période lunaire synodique est égale à 29,5209 jours 43, chiffre plus exact que celui du calendrier grégorien introduit en Europe quatre-vingt-dix ans seulement après la découverte de l'Amérique. De toute évidence, ils avaient conservé une vieille tradition, remontant à l'époque où l'année avait douze mois de trente jours chacun, et 360 jours au total 44.

Dans l'ancienne Amérique du Sud, l'année comptait aussi 360 jours et se divisait en douze mois.

« Au Pérou, l'année était divisée en 12 quilla, ou lunes de trente jours, cinq jours étaient ajoutés, qu'on appelait Allca-canquis 45, ». Par la suite, un jour fut ajouté tous les quatre ans, pour assurer l'exactitude du calendrier.

Traversons le Pacifique, pour retourner en Asie. Le calendrier des peuples chinois présentait

une année de 360 jours, groupés en douze mois de trente jours chacun 46. La division toujours valable de la sphère en 360 degrés est une réminiscence du système de

360 jours. Chaque degré correspondait au mouvement diurne de la terre sur son orbite, ou à la partie du Zodiaque parcourue d'une nuit à une autre. Après 360 changements, le ciel. pour l'observateur terrestre, reprenait sa position primitive.

Quand l'année passa de 360 à 365 jours 1/4, les Chinois ajoutèrent cinq jours un quart à leur année, et appelèrent cette période supplémentaire Khe-ying ; ils se mirent également à diviser la

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sphère en 365 degrés 1/4, adoptant ainsi la nouvelle durée de l'année, non seulement dans leur calendrier, mais aussi dans la géométrie terrestre et céleste 47.

Les anciens Chinois basaient le calcul du temps sur le coefficient soixante; de même aux Indes, au Mexique, et en Chaldée soixante était le coefficient universel.

La division de l'année en 360 jours reçut de multiples marques de respect 48, et stimula les progrès de la géométrie et de l'astronomie : rien d'étonnant donc à ce que les gens ne l'aient point abandonnée, dès qu'elle ne fut plus valable. Ils conservèrent leurs « lunes » de trente jours, bien que le mois lunaire fût devenu plus court, et se refusèrent à intégrer les cinq jours supplémentaires dans l'année.

Nous constatons donc que le monde entier se servit d'abord du calendrier de 360 jours, et qu'à une date ultérieure, approximativement au VIIe siècle avant notre ère, cinq jours furent ajoutés, « jours en plus », « jours pour rien ».

Les savants qui ont étudié le calendrier des Incas au Pérou, et celui des Mayas au Yucatan se sont étonnés qu'il ne comportât que 360 jours. La même réaction a déjà été constatée, lorsqu'il s'agissait du calendrier des Égyptiens, des Perses, des Hindous, des Chaldéens, des Assyriens, des Hébreux, des Chinois, des Grecs et des Romains.

Généralement les savants abordent le problème sur le seul terrain de leur spécialité, sans soupçonner que les calendriers de tous les peuples de l'antiquité le posaient, et dans des termes identiques.

Deux faits surtout leur paraissaient étonnants : d'abord, une erreur de cinq jours un quart ne pouvait échapper à l'attention des astronomes, ni même des paysans les plus incultes, car les saisons eussent été décalées de plus de deux cents jours en quarante ans, période suffisamment courte pour que quiconque pût aisément l'observer. Le second sujet de perplexité était la durée même du mois. « Les Anciens semblent avoir généralement attribué à la lunaison, ou mois synodique, la durée de trente jours. » Nombreux sont les documents qui affirment que le mois, ou « lune » équivaut à trente jours, et que son début coïncide avec la nouvelle lune.

Semblables assertions des anciens astronomes fournissent en elles-mêmes la preuve que le calendrier n'était pas une création conventionnelle comportant une erreur admise. En fait, l'existence à cette époque-là d'un calendrier international parait des plus improbable. Après des siècles de navigation maritime et d'échanges intellectuels internationaux, nous n'avons pas été capables d'établir un calendrier que reconnût le monde entier. Les musulmans ont adopté l'année lunaire, basée sur les mouvements de la lune, et ils la font coïncider avec l'année solaire en y intercalant systématiquement quelques jours au bout d'un certain nombre d'années. Beaucoup d'autres religions et de peuples ont leur calendrier particulier, où se retrouvent les vestiges des anciens systèmes. Tel est par exemple le cas de nos mois de trente ou de trente et un jours : les cinq jours additionnels furent répartis entre les anciens mois lunaires. Cependant, le calendrier moderne n'assigne pas une durée de trente jours à l'intervalle compris entre deux lunaisons; et il n'admet pas davantage que douze lunaisons équivalent à 360 jours.

L'uniformité du calcul du temps de par le monde, entre le XVe, et le VIIIe siècle, s'explique par le mouvement de la terre autour de son axe et sur son orbite, et par la révolution de la lune, tels qu'ils avaient lieu réellement à cette époque historique.

La durée d'une révolution lunaire devait être presque exactement de trente jours et celle de l'année, si l'on néglige des variations de quelques heures, demeurait apparemment constante à 360 jours.

Puis une série de cataclysmes se produisit, qui modifia l'axe et l'orbite de la terre, et l'orbite de la lune. L'année, après avoir traversé une période marquée par le dérangement des saisons, se stabilisa enfin : elle devint une année « de lente évolution » (Sénèque), comptant 365 jours, 5 heures, 48 minutes, 46 secondes ; tandis que le mois lunaire équivalait à 29 jours, 12 heures, 44 minutes, 27 secondes, période synodique moyenne.

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Les perturbations des mois

A la suite des bouleversements successifs, la terre mit 365 jours 1/4 pour achever sa révolution, au lieu de 360, et les jours eux-mêmes présentaient sans doute une légère différence, dans l'un et l'autre cas. Le mois, au lieu de trente jours, n'en compta plus que vingt-neuf et demi. Tels sont les chiffres au début et à la fin de ce siècle, qui fut le témoin de « la bataille des dieux ». Au reste, la durée du mois et de l'année dut passer par des étapes intermédiaires. Celle de l'année oscilla sans doute entre 360 et 365 jours 1/4. Mais la lune, étant plus petite (ou moins résistante) que la terre, fut davantage perturbée par les rencontres, et les valeurs intermédiaires du mois lunaire durent présenter des variations plus considérables.

Plutarque déclare qu'au temps de Romulus, on « fixait le mois irrégulièrement et irrationnellement »; certains mois avaient trente-cinq jours, ou davantage, « pour tenter de maintenir l'année à 360 jours ». Ce fut Numa, successeur de Romulus, qui, selon Plutarque, corrigea les irrégularités du calendrier, et changea l'ordre des mois. Cette déclaration soulève la question suivante : « Ne se peut-il point que la lune, dans la période comprise entre des cataclysmes successifs, ait réellement décrit son cycle de révolution en trente-cinq ou trente-six jours ? » Si cela est exact, l'orbite de la lune dut alors être soit une ellipse soit un cercle avec un rayon plus grand que précédemment. Dans ce dernier cas, chacune des quatre phases de la lune devait durer neuf jours. Il y a donc quelque intérêt à signaler que dans beaucoup de sagas traitant de la lune, le nombre neuf est fréquemment utilisé dans la mesure du temps 1.

Plusieurs savants ont découvert qu'à un certain moment de leur histoire, les peuples divisèrent le temps en périodes de neuf jours; c'est ce que firent les Hindous, les Perses 2, les Babyloniens 3, les ÉgyptienS 4 et les Chinois 5. Dans les traditions religieuses, dans la littérature, et les ouvrages d'astronomie, se révèle une rivalité entre les périodes de sept jours et de neuf jours, pour représenter le quart du mois.

A l'époque de l'épopée homérique, la semaine de neuf jours l'emporta en Grèce; par suite, on trouve dans l'œuvre homérique à la fois la semaine de sept jours, et celle de neuf jours 6. Et les Romains gardaient le souvenir du temps où la semaine comptait neuf jours 7.

Le passage d'une phase de sept jours à une phase de neuf jours se retrouve dans les traditions des peuples de Roumanie, de Lituanie, de Sardaigne, en Europe chez les Celtes, en Asie chez les Mongols, et chez les tribus d'Afrique occidentale 8.

Pour expliquer cet étrange phénomène dans le calcul du temps, évidemment en relation avec la lune, on a suggéré qu'outre la phase de sept jours, on observait aussi bien une phase de neuf jours, qui correspond au tiers du mois 9. Mais cette idée est inacceptable, car le tiers d'un mois de 29 jours 1/2 équivaudrait sensiblement à dix jours, et non pas à neuf 10. De plus, la division du mois en quatre périodes est bien plus commode puisqu'elle reflète exactement la succession des « quartiers lunaires », tandis qu'une période de neuf jours tombe entre ces différentes phases.

Par conséquent, nous pouvons conclure, en nous appuyant sur d'innombrables témoignages, que, pendant le siècle des perturbations, dans une période comprise entre deux cataclysmes, la lune a suivi une orbite plus ample, d'une durée de trente-cinq à trente-six jours. Elle s'y est maintenue pendant quelques décades, jusqu'à ce qu'un nouveau bouleversement l'ait rejetée sur une orbite correspondant à une durée de vingt neuf jours et demi, qu'elle n'a cessé de suivre depuis lors.

Cette perturbation des mois s'est produite dans la seconde moitié du VIIIe siècle, au début de l'histoire romaine 11. Au reste, une tablette babylonienne nous révèle des dates significatives, telles que « le trente-troisième jour du mois ».

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Ainsi le mois, qui comportait trente jours, en compta trente-six, puis vingt-neuf et demi. Le dernier changement coïncide avec l'altération de l'orbite terrestre, qui amena notre globe à accomplir sa révolution en 365 jours I/4.

Les années de dix mois

Lorsque le mois se composait d'environ trente-six jours, et l'année de 360 à 365 jours 1/4, celle-ci ne devait comporter que dix mois. Et tel était le cas, en vérité.

Beaucoup d'auteurs classiques nous apprennent que l'année, au temps de Romulus, comprenait dix mois, et Numa, son successeur, en ajouta deux : janvier et février. Ovide écrit « Quand Le fondateur de la Ville (Rome) mit de l'ordre dans le calendrier, il décida qu'il y aurait deux fois cinq mois dans l'année. Il décréta la réorganisation de l'année : le mois de mars était le premier, et celui de Vénus le second… Mais Numa n'oublia pas Janus, ni les Ombres ancestrales (février); c'est ainsi qu'il fit précéder les anciens mois de deux mois nouveaux 1 ».

Germinus, astronome grec du Ier siècle avant notre ère, affirme également que c'est Romulus (au VIIIe siècle) qui détermina l'année de dix mois 2. Aulus-Gelle, auteur du second siècle, écrit dans ses Nuits attiques : « l'année comprenait non point douze mois, mais dix 8 ». Si l'on doit en croire Plutarque, ses contemporains étaient persuadés que, du temps de Romulus, les Romains calculaient l'année « non par douze mois, mais par dix; ils ajoutaient plus de trente jours à quelques-uns des mois 4 ». L'année de dix mois était encore l'année officielle au début du règne de Numa 5. « Mars demeura le premier mois jusqu'au règne de Numa, et l'année complète, jusqu'alors, comprenait dix mois », a écrit Procope de Césarée, qui vécut dans les dernières années de l'Empire Romain 6. Les noms de Mars et de Vénus attribués, du temps de Romulus, au premier et au second mois de l'année, révèlent bien l'importance de ces deux divinités à cette époque de l'histoire. juillet s'appelait Quintilis, (le cinquième). Le décalage de deux mois survit encore dans les dénominations : septembre, octobre, novembre, décembre, c'est-à-dire, le septième, le huitième, le neuvième et le dixième mois.

Non seulement l'année comportait un nombre de mois inférieur à douze, mais encore le Zodiaque, cette route du soleil et de la lune à travers le firmament, qui est actuellement divisé en douze signes, n'en comportait que dix à une époque, et onze a une autre. Les astrologues de Babylone, de la Grèce ancienne, et d'autres pays encore, utilisaient un Zodiaque de moins de douze signes 7. Un cantique hébraïque en langue araméenne introduit dans le service Seder, fait allusion aux onze constellations du Zodiaque.

Une des preuves de l'ancienneté des calendriers des peuples primitifs, c'est que bon nombre d'entre eux ne comportent que dix mois, parfois onze. Si la durée de révolution lunaire était de trente-cinq jours et quelques heures, l'année avait en effet un peu plus de dix mois.

Les Samoyèdes de langue Yourak divisent l'année en onze mois 8; les indigènes de Formose également 9. L'année des Kamtchadales comporte dix mois « dont l'un, disent-ils, en vaut trois 10 ». Dans le Pacifique, près de l'équateur, les habitants de l'archipel Kingsmill (également dénommé archipel Gilbert), ont pour année une période de dix mois 11. Dans les îles Marquises (en Polynésie, sous l'équateur) dix mois constituent une année tau ou puni, mais la véritable année de 365 jours y est également connue 12.

Les Toradjas des Indes Néerlandaises calculent le temps par mois lunaires. Chaque année, cependant, ils « sautent » une période de deux ou trois mois, dont ils ne tiennent aucun compte dans leur mesure du temps 13.

Les Chams en Indochine ont un calendrier de dix mois 14. Il en va de même pour les indigènes de plusieurs îles de l'océan Indien 15.

Les aborigènes de la Nouvelle-Zélande omettent de compter deux mois de l'année. « Ces deux mois ne figurent pas sur le calendrier : ils n'ont aucune utilité; et il n'y a aucune explication à leur existence 16 ».

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« Chez les Yorubas, dans le Bas-Nigeria, les trois mois (février, mars, avril) ne portent généralement aucun nom spécifique 17 ».

Les calendriers des peuplades primitives ressemblent donc à l'ancien calendrier romain. Ils n'ont pas été établis au mépris de l'année solaire (« des années de moins de douze mois nous paraissent le plus étrange des phénomènes ») 18. Leur défaut, c'est qu'ils montrent une constance plus grande que la terre dans sa révolution autour du soleil. Les efforts pour adapter les vieux systèmes au nouvel ordre naturel sont encore visibles dans les calendriers des aborigènes du Kamtchatka, du Bas-Nigeria, des Indes néerlandaises, et de la Nouvelle Zélande. Au lieu d'introduire deux mois supplémentaires, comme le fit Numa, ils triplent la durée d'un des mois, ou créent un « temps mort » de deux mois, qui est éliminé de leur calendrier.

Les témoignages qui établissent l'existence d'une année de dix mois sont si nombreux que leur abondance même suscite quelque embarras : en effet, la période où l'année compta dix mois de trente-cinq ou trente-six jours fut des plus brève : comment se fait-il alors que cette année de dix mois ait laissé des marques si nombreuses dans les calendriers du monde entier ? La réponse à cette question apparaîtra aisée, lorsque nous aurons établi que c'était en réalité la seconde fois dans l'histoire du monde que l'année comportait dix mois. A une époque beaucoup plus reculée, où l'année avait une longueur totalement différente, une révolution de la terre équivalait en durée à dix révolutions de la lune. Un autre ouvrage explorera cette période de l'histoire.

La réforme du calendrier

Au milieu du VIIIe siècle, le calendrier jusqu'alors en usage s'avéra inexact. Entre l'année 747 et le dernier cataclysme du 23 mars 687, les mouvements du soleil et de la lune subirent des modifications répétées, si bien qu'on dut réajuster le calendrier en conséquence. Les réformes opérées à cette époque devinrent lettre morte à leur tour, et de nouvelles refontes furent nécessaires. C'est seulement après le dernier cataclysme de 687, et avec la stabilisation du système planétaire dans sa forme présente, que le calendrier est devenu permanent.

Plusieurs des tablettes d'argile retrouvées à Ninive dans la Bibliothèque Royale 1, contiennent des observations astronomiques antérieures à l'établissement de l'actuel système planétaire. L'une d'elles fixe le jour de l'équinoxe de printemps au sixième jour de Nisan. « Au sixième jour du mois de Nisan, le jour et la nuit sont égaux.» Un savant constate que cette différence est inexplicable 2. A en juger d'après les méthodes extrêmement précises qu'ils employaient, et d'après le soin de leurs observations, les astrologues de Ninive n'ont pu commettre une erreur de neuf jours.

Comme l'indiquent les différents systèmes figurés par les tablettes astronomiques de Ninive, l'ordre du monde a changé à plusieurs reprises au cours d'un seul siècle. A chaque modification, les astronomes chaldéens étaient donc chargés de corriger le calendrier. « D'après certains passages des tablettes astronomiques, il est visible que le calcul du temps et des saisons était la principale tâche des astrologues de Mésopotamie 3 ». Les savants se demandent comment des hommes spécialisés dans cette tâche purent commettre les énormes erreurs que révèlent les tablettes, et transporter ces erreurs dans des systèmes où les mouvements du soleil, de la lune et des cinq planètes étaient enregistrés à différentes reprises et à des intervalles réguliers, ces mouvements et ces intervalles étant constamment différents de ceux que révèlent aujourd'hui l'ordre du ciel. Comment les observateurs du ciel qui ont rédigé les tablettes anciennes ont-ils pu être assez négligents pour attribuer 360 jours à l'année, erreur grossière, qui entraîne au bout de six années une divergence d'un mois plein ? Comment les astronomes des observatoires royaux pouvaient-ils annoncer au roi les mouvements et les phases de la lune à des dates fausses, alors qu'un enfant sait reconnaître la nouvelle lune 4 ? Comment pouvaient-ils les noter

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ensuite sur des tablettes extrêmement savantes, qui témoignent de connaissances mathématiques fort poussées 5 ? Les savants en sont réduits à parler « d'erreurs énigmatiques ».

Quant à nous, il nous paraît que les tablettes et leurs divers systèmes astronomiques sont le reflet des changements qui survinrent dans le système du monde, et des essais qu'on fit pour adapter le calendrier à ces modifications successives.

Quand le cataclysme du 23 mars 687 modifia une fois de plus la longueur de l'année et des mois, les résultats des calculs pourtant récents s'avérèrent incertains, tant qu'on ne les eut point revérifiés par une série de nouvelles investigations.

Après ce cataclysme, et jusqu'en 669, ou 667, les fêtes de la nouvelle année n'ont pas été célébrées à Babylone 6. « Pendant huit années du règne de Sennachérib, et douze années de celui d'Esarhaddon; pendant vingt ans... la fête de la nouvelle année fut supprimée », nous apprend une vieille chronique inscrite sur une tablette d'argile 7. D'après les inscriptions cunéiformes, un nouvel âge du monde 8 commença sous le règne de Sargon II et un autre sous le règne de son fils Sennachérib.

Du temps d'Assourbanipal, fils d'Esarhaddon, et petit-fils de Sennachérib, on dut recommencer tous les calculs sur les mouvements des planètes, la précession des équinoxes, le retour périodique des éclipses; et ces nouvelles tablettes furent déposées dans la Bibliothèque Royale de Ninive, avec les tablettes antérieures ou leurs copies. Les tablettes de Ninive fournissent le plus précieux instrument de travail qui se puisse découvrir, pour étudier les changements de l'ordre du monde aux VIIIe et VIIe siècles.

Les changements successifs qui affectèrent la course du soleil dans le firmament ont conduit les astronomes babyloniens à distinguer trois « chemins du soleil » : le chemin Anou, le chemin Enlil, le chemin Ea. Ces trois « chemins » ont donné beaucoup de mal aux commentateurs de l'astronomie babylonienne, et les hypothèses, sitôt que proposées, se trouvaient rejetées 9. Les chemins Anou, Enlil et Ea suivis par les planètes semblent désigner leurs écliptiques correspondant à différents âges du monde. Comme le soleil, les planètes ont suivi successivement les chemins Anou, Enlil, et Ea.

Plusieurs passages qu'on relève ici et là dans le Talmud 10 évoquent une refonte du

calendrier opérée par Ezéchias. Le Talmud a été composé approximativement 1000 ans après le règne d'Ezéchias, et il est loin de rapporter tous les détails de la réforme. Mais il déclare qu'Ezéchias doubla le mois de Nisan.

Par la suite, afin de faire coïncider l'année lunaire et l'année solaire, on ajouta un mois intercalaire, en doublant, au bout d'un certain nombre d'années, le dernier mois, Adar. L'introduction de ce mois intercalaire a été maintenue dans le calendrier hébraïque jusqu'à nos jours.

Les rabbins se sont demandé pourquoi Ezéchias avait ajouté un mois de Nisan supplémentaire (le premier mois). Les Ecritures rapportent qu'Ezéchias, au lieu de célébrer la Pâque le premier mois, la repoussa au second 11. Le Talmud nous explique que ce n'était pas véritablement le second mois, mais un mois de Nisan surajouté au premier.

Il faut remarquer qu'en Judée, au temps d'Ezéchias, les mois ne portaient pas les noms babyloniens; il importe alors de rapporter les faits comme suit : Ezéchias, après la mort d'Achaz et avant la seconde invasion de Sennachérib, ajouta un mois, et recula la fête de la Pâque. D'après le Talmud, cet ajournement avait pour objet de faire correspondre plus exactement l'année lunaire et l'année solaire. Comme nous le verrons, il semble bien y avoir quelque rapport entre ce geste et les décisions que prit Numa, vers la même époque.

Le Talmud ne révèle pas quelles modifications permanentes Ezéchias introduisit dans le calendrier, mais il est évident qu'à cette époque, pareils calculs devenaient une besogne compliquée. De même que Moïse « ne savait comment calculer le calendrier, jusqu'à ce que

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Dieu lui eût clairement montré les mouvements de la lune », de même à l'époque d'Ezéchias, la détermination des saisons et des mois échappa au domaine du calcul, et fut fonction de l'observation directe : il était donc impossible de faire aucune prévision à longue échéance. Isaïe appelait les astrologues « les augures pour le mois 12 ».

Comme nous l'avons déjà dit, le Talmud 13 signale que le temple de Salomon était construit de telle sorte qu'aux jours des équinoxes, on pût vérifier la direction des rayons du soleil levant. Une plaque, ou un disque d'or était fixé à la porte Est : les rayons du soleil levant le traversaient et tombaient au centre même du temple. La fête du Tabernacle (Sukkoth) « était à l'origine une fête de l'équinoxe, comme le déclare l'Exode XXIII, 16 et XXXIV, 22. Elle était célébrée pendant les sept derniers jours de l'année, et précédait immédiatement le jour de la nouvelle année, jour de l'équinoxe d'automne, le dixième jour du septième mois 14 ». En d'autres termes, le jour de la nouvelle année, jour de l'équinoxe d'automne, était célébré le dixième jour du septième mois, et, en ce jour, le soleil se levait exactement à l'Est, et se couchait exactement à l'Ouest, le jour des Expiations coïncidait avec lui 15. Par la suite, le jour de la nouvelle année fut avancé et fixé au premier jour du septième mois. On peut remarquer que, sur le calendrier juif comme sur les tablettes babyloniennes, la date des équinoxes était déplacée de neuf jours. L'une des tablettes déclare qu'au printemps le jour et la nuit sont égaux, le quinzième jour du mois de Nisan. Selon une autre, le phénomène se produit le sixième jour du même mois. Ceci indique que les modifications apportées au calendrier des fêtes à Jérusalem furent calquées sur les changements astronomiques.

La porte Est du temple de Jérusalem ne présentait plus une orientation correcte, après le déplacement des points cardinaux. En montant sur le trône, après la mort d'Achaz, Ezéchias décréta « une réforme religieuse de grande envergure Les Chroniques, II, XXIX, 3, déclarent : « La première année de son règne, le premier mois, il rouvrit les portes du temple, et les répara ». Apparemment, les modifications de la rotation terrestre qui eurent lieu à l'époque d'Osias, et une seconde fois le jour des obsèques d'Achaz, rendaient une réforme nécessaire. Ezéchias convoqua donc les prêtres « sur la place orientale», et leur dit : « Nos pères ont prévariqué » et « ont clos les portes du portique ».

Dans l'époque antérieure à l'exil, on tenait pour « une nécessité absolue que deux jours par an le soleil pénétrât directement par la porte Est ». « Par toutes les portes de l'Est côte à côte, jusqu'au cœur même du temple proprement dit 17 ». Le portail Est, également appelé « portail du soleil », servait à contrôler non seulement les équinoxes où le soleil se lève exactement à l'Est, mais aussi les solstices. Un dispositif appliqué au portail réfléchissait les premiers rayons du soleil lors des solstices d'hiver et d'été, où le soleil se lève respectivement au Sud-Est et au Nord-Ouest. Selon certaines autorités talmudiques les anciens prophètes avaient beaucoup de mal à faire fonctionner le mécanisme 18.

Les temps bibliques nous ont laissé les vestiges de trois systèmes de calendrier 19. Ils revêtent un intérêt tout particulier, si nous nous souvenons que les tablettes de Ninive contiennent trois représentations systématiques des mouvements solaires et planétaires, chacune étant complète en soi et en tous points différente des autres.

Le rajustement du calendrier, à l'époque d'Ezéchias qui vit naître un nouvel ordre du monde, semble avoir été une opération fort longue et très ingrate. Un siècle encore après Ezéchias, au temps de Solon et de Thalès, Jérémie, Baruch et Ezéchiel continuaient à dresser le calendrier an par an 20.

Quand les Juifs revinrent de leur exil à Babylone, ils rapportèrent leur calendrier actuel, où les mois portent des noms assyro-babyloniens.

« Car, tout comme les nouveaux cieux et la nouvelle terre que je vais créer doivent subsister devant moi, déclare le Seigneur, ainsi doivent subsister votre race et votre nom », lit-on au dernier chapitre du livre d'Isaïe. Tout le monde viendra se prosterner devant le Seigneur « d'une

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nouvelle lune à l'autre, et d'un sabbat à l'autre ». Les « nouveaux cieux », c'est le firmament où les constellations et les astres ont pris des places nouvelles. Et le Prophète promet que le nouveau ciel sera éternel, et que les saisons suivront à tout jamais l'ordre établi.

Daniel, le sage juif de la cour du roi Nabuchodonosor, roi de l'Exil, bénissant le nom du Seigneur, dit au roi : « C'est lui qui fait changer le temps et les saisons 21 », phrase très remarquable, qu'on retrouve dans nombre de prières juives. Le changement des saisons ou des « dates fixes » (moadim) désigne une altération de l'ordre naturel, avec déplacement de la date des solstices, et des équinoxes, et des cérémonies mêmes qui y sont associées. « Ce changement du temps » pourrait s'appliquer à tous les changements précédents, et non point seulement au dernier en date; c'est le « changement du temps et des saisons » qui provoqua les réformes du calendrier.

Les anciennes observations astronomiques de l'Inde présentent un ensemble de calculs fort

différents de ceux des temps modernes. « Ce qui est extraordinaire, c'est la durée assignée aux révolutions synodiques... Cette rencontre dans l'astronomie hindoue de toute une série de valeurs numériques qui n'ont qu'un rapport lointain avec les chiffres généralement acceptés est en vérité si surprenante qu'on se sent au premier abord fortement tenté de douter de l'authenticité du texte... De plus, chaque chiffre est toujours indiqué deux fois 22 ».

Dans l'ouvrage astronomique de Varaha Mihira, les révolutions synodiques des planètes, qu'il est pourtant aisé de calculer sur le fond des constellations fixes, ont une durée trop courte de cinq jours environ dans le cas de Saturne, de plus de cinq ours pour Jupiter, de onze jours pour Mars, de huit à neuf jours pour Vénus, et d'un peu moins de deux jours pour Mercure. Dans un système solaire où la terre tourne autour du soleil en 360 jours, les périodes synodiques de Jupiter et de Saturne seraient de cinq jours plus courtes que leurs périodes présentes, et celle de Mercure de moins de deux jours. Mais les planètes Mars et Vénus du tableau synodique de Varaha Mihira devaient suivre des orbites différentes de leurs orbites actuelles, même si l'année terrestre n'était que de 360 jours.

C'est au VIIe siècle que le calendrier hindou subit des modifications, ainsi qu'en Chine, et à la même époque l'année de dix mois fut remplacée par celle de douze mois 23.

Le calendrier égyptien fut réformé au VIIIe siècle. Nous avons déjà évoqué le cataclysme qui eut lieu sous le règne du pharaon Osorkon II de la dynastie libyenne. Une autre perturbation de caractère cosmique se produisit quelques décades plus tard, et toujours à l'époque des rois libyens. Dans la quinzième année du règne de Sosenk III, « il se produisit un prodige très remarquable, de nature incertaine, mais qui semblait être en relation avec la lune 24 ». Le document contemporain, rédigé par le fils du roi, le grand prêtre Osorkon, déclare : « Dans l'année 15, au quatrième mois de la troisième saison, le vingt-cinquième jour, sous le règne de son auguste Père, divin législateur de Thèbes, avant que les cieux dévorent (ou : ne dévorent pas) la lune, un grand courroux s'éleva sur cette terre 25. » Peu après Osorkon « introduisit un nouveau calendrier pour les offrandes 26 ». Les mutilations de l'inscription ne permettent pas de déterminer la nature exacte de cette réforme du calendrier 27.

Il semble que la même perturbation ou une perturbation semblable du mouvement de là lune soit évoquée par une inscription assyrienne, qui parle « d'un obstacle arrêtant la lune sur sa route ». « jour et nuit, elle était gênée par l'obstacle. Elle ne demeura pas dans son auguste position. » La durée du phénomène a permis de conclure qu' « il ne pouvait s'agir d'une éclipse de lune 27 ». L'allusion à la position inaccoutumée de la lune interdit également cette interprétation.

A la fin du VIIIe ou au début du VIIe siècle avant notre ère, les Romains opérèrent une

réforme du calendrier. Dans le chapitre précédent, nous avons cité le passage d'Ovide (les

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Fastes) relatif à la réforme de Romulus, qui divisa l'année en dix mois, et à celle de Numa qui fit précéder les mois existants de deux mois nouveaux. « La vie de Numa » de Plutarque contient le passage suivant, déjà partiellement cité : « Il (Numa) s'appliqua aussi à établir le calendrier, non point avec exactitude, mais non sans quelques soigneuses observations. Car, sous le règne de Romulus, la détermination des mois avait été irrégulière et irrationnelle, attribuant à certains moins de vingt jours, aux autres trente-cinq et davantage. On n'avait aucune idée de l'inégalité des mouvements annuels du soleil et de la lune; on s'en tenait à ce seul principe que l'année devait comporter 360 jours 29 ».

Numa réforma le calendrier, et « les corrections qu'il apporta étaient destinées à en appeler d'autres, et de plus importantes dans l'avenir. Il changea aussi l'ordre des mois 30. Numa était contemporain d'Ezéchias 31.

Dans la seconde moitié du VIIe siècle avant notre ère, les Grecs déterminèrent par le calcul

la nouvelle durée du mois et de l'année. Diogène de Laërte attribuait à Thalès de Milet, l'un des « sept sages de l'antiquité », la

découverte du nombre de jours que comporte l'année, et de la longueur des saisons. Dans sa Vie de Thalès, il a écrit : « Il a été le premier à déterminer la course du soleil du solstice au solstice »; il ajoute : « on dit qu'il a découvert les saisons de l'année, et qu'il l'a divisée en 365 jours 32 ». Il a été « le premier à prévoir les éclipses du soleil, et à fixer les solstices 33 ». Thalès aurait écrit deux traités intitulés « Du solstice » et « De l'équinoxe », tous les deux disparus.

Si l'année naturelle a toujours été identique à la nôtre, il est fort étonnant que cette découverte ait été attribuée à un sage qui vivait à une époque aussi tardive que le VIIe siècle, alors que l'Egypte et l'Assyrie étaient déjà de très vieux royaumes, et que la dynastie de David parvenait à ses dernières décades. Il est facile de calculer le jour le plus long et le jour le plus court de l'année, donc la durée de celle-ci, par la longueur des ombres portées. On croit que Thalès est né dans la première année de la trente-cinquième olympiade, soit en 640 av. J.-C. La manière dont progresse la culture semble nous interdire d'attribuer à une seule et même personne la découverte du nombre de jours de l'année, problème simple, et la prévision des éclipses par le calcul, qui exige des connaissances autrement complexes. Plutarque et Diogène de Laërte prétendent que Solon, autre sage de la même période, reconnut que l'intervalle entre une nouvelle lune et la suivante était d'une demi-journée inférieur à trente jours, et qu'il modifia la longueur des mois, pour les faire coïncider avec le mouvement de la lune. Mais cette mesure doit s'interpréter comme une adaptation du calendrier au nouvel ordre cosmique. L'intervalle entre une nouvelle lune et la suivante est une division du temps naturelle, et presque aussi facile à observer que le jour et la nuit : les peuplades primitives, absolument incultes, savent que la durée de la révolution lunaire est inférieure à trente jours.

De l'autre côté du globe, au Pérou, les hommes comptaient le temps à partir du dernier

cataclysme, et cette méthode de calcul était encore en usage lorsque les Européens arrivèrent dans le pays, au début du XVIe siècle 34.

Après le dernier cataclysme, on procéda à une nouvelle détermination du temps et des saisons; le roi Inti-Capac-Yupanqui ordonna qu'on fit des observations et des calculs astronomiques; une réforme du calendrier s'ensuivit; et l'année, jusque-là de 360 jours, « en comporta alors 365 et cinq heures 35 ».

« Cet Inca semble avoir été le premier à ordonner et fixer les cérémonies... C'est lui qui établit les douze mois de l'année, leur donnant à chacun un nom, et décidant des cérémonies qui devraient être observées au cours de chacun d'eux, car, quoique ses ancêtres se servissent du quipu pour compter les années et les mois, ils n'avaient jamais été réglés dans cet ordre avant l'époque de ce seigneur 36 ».

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« Toutes les histoires toltèques font mention d'une assemblée de sages et d'astrologues qui fut convoquée dans la cité de Huehue-Tlapallan afin de travailler à la correction du calendrier et à la réforme du comput annuel, reconnu erroné et qui avait été usité jusqu'à ce moment 37. »

A un méridien de là, de l'autre côté du Pacifique, au Japon, un calendrier fut instauré en 660 avant notre ère, et les années y sont comptées à partir de cette date.

En Chine, l'astronome Y-hang, en 721, déclara à l'Empereur Hieuntsong que l'harmonie du ciel et les mouvements des planètes s'étaient altérés, et qu'il était désormais impossible de calculer à l'avance la date des éclipses. Et il cite d'autres autorités, qui affirmaient que du temps de Tsin, la planète Vénus passait à 4°au Sud de l'écliptique et éclipsait Sirius. Y-hang expliquait que la trajectoire de Vénus s'était modifiée au temps de Tsin 38.

Tout autour du globe, dans les années qui suivirent 687, on travailla à réformer le calendrier. Entre 747 et 687, le calendrier avait été plongé dans une confusion chaotique, car la longueur de l'année, du mois, et sans doute aussi du jour ne cessait de changer. Avant le VIIIe siècle, il y avait eu une période relativement longue, où l'année comprit 360jours, et le mois lunaire presque exactement 30jours.

Les calendriers, les cartes célestes, les cadrans solaires, et les clepsydres antérieurs à 687 devinrent inutilisables à partir de cette date. Tous les chiffres établis après 687 sont demeurés pratiquement inchangés jusqu'à nos jours, à part quelques rectifications de détail, résultant de la plus grande précision des calculs modernes. Cette stabilité du calendrier tient à ce que l'ordre du monde n'a subi aucune altération. Nulle modification n'a été observée dans le ciel, si ce n'est quelques légères perturbations entre les planètes, qui n'ont point eu d'influence sensible sur leurs mouvements. Nous avons de ce fait la confiance illusoire de vivre dans un univers où règne l'ordre. Pour employer les termes d'un savant moderne, « quoique l'ordre dans lequel se succèdent les événements célestes soit quelque peu complexe, il est néanmoins systématique et invariable. La montre la plus exacte n'a jamais égalé la précision des mouvements du soleil, de la lune, des étoiles. En fait, on a réglé jusqu'à maintenant nos montres sur les mouvements diurnes apparents des corps célestes. Après avoir constaté que des centaines de phénomènes et non pas seulement quelques ns obéissent depuis bien longtemps à un ordre rigoureux, les hommes se sont peu à peu rendu compte qu'une harmonie grandiose et intégrale règne en ces régions qui, avant la naissance de la science, étaient le domaine des divinités capricieuses 39.

Mais les témoignages des temps anciens nous ont au contraire appris que l'ordre actuel n'est pas l'ordre primitif. Il y a à peine vingt-sept siècles que notre harmonie s'établit,

« Quand la lune reçut son orbite, Quand le soleil d'argent se fut fixé, Quand la Grande Ourse fermement s'installa à sa place 40. »

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Chapitre 9

La lune et ses cratères

Dans son mouvement de révolution autour du soleil, la terre est accompagnée par son satellite, la lune, qui elle-même tourne autour de notre globe. La lune présente toujours la même face aux habitants de la terre. Le télescope révèle, à la surface de la lune, la présence d'océans de lave desséchée et de vastes formations appelées cratères. Par suite de l'absence d'atmosphère, les accidents du relief apparaissent très nettement, et s'il existait une ville ou un village, ils n'échapperaient pas au télescope du mont Palomar. Mais c'est une planète morte, et d'aspect très inhospitalier. Pendant un demi-mois, elle est plongée tout entière dans des ténèbres glacées, et pendant un autre demi-mois, elle est brûlée par un soleil ardent. Elle n'a pas d'eau, pas de végétation, et probablement pas de vie. Les anciens se préoccupaient de savoir si des êtres humains l'habitaient. Les modernes, eux, s'intéressent surtout à l'origine de ses cratères.

Il existe deux théories : pour la première, ces cratères appartiendraient à de grands volcans éteints; pour la seconde, ils seraient le résultat des bombardements de grosses météorites qui s'abattirent sur la masse semi-liquide de la lune avant sa solidification. Il y a plus de 30.000 cratères, petits ou grands. Quelques-uns de ces renflements circulaires se dressent à 20.000 pieds au-dessus des plaines : on mesure leur hauteur par la longueur de leur ombre portée. Certains, tel Clavius près du pôle Sud de la lune, ont un diamètre de près de 250 kilomètres. L'ouverture formidable de ces cirques lunaires ne permet guère de les comparer avec les volcans terrestres. C'est au reste pourquoi l'on se demande si ces montagnes circulaires appartiennent vraiment à la famille des volcans. Le plus vaste cratère terrestre produit par la chute d'un corps céleste se trouve dans l'Arizona. Il n'atteint pas 1 kilomètre de diamètre, chiffre très inférieur à ceux de nombreux cratères lunaires.

De toutes manières, les deux théories supposent que la lune a été le théâtre d'un grand cataclysme. Pour provoquer la formation de ces cratères, il a fallu que des forces énormes, externes ou internes, entrent en action. Si ces formations ont été provoquées par un choc sur une masse visqueuse, de grands météores ont dû surgir de toutes parts.

De longues raies blanchâtres ou « rayons », larges parfois de plus de 15 kilomètres, semblent diverger de certains cratères. Nous en ignorons l'origine. Il y a également des crevasses irrégulières, larges de plus d'un demi-kilomètre, et de profondeur inconnue.

Nous avons vu que la lune fut entraînée à plusieurs reprises dans les cataclysmes cosmiques décrits au cours de ce livre. En même temps que la terre, elle traversa la substance de la grande comète du temps de l'Exode et, au cours des conflits planétaires du VIIIe siècle avant notre ère, elle fut plus d'une fois déviée de son orbite par Mars. Cependant la lave se répandit sur la surface de la lune, de grosses bulles crevèrent et formèrent les cirques, qui eurent tôt fait de se refroidir pendant la longue nuit lunaire, aucune atmosphère ne les protégeant du froid des espaces cosmiques. C'est aussi au cours de ces rencontres ou de ces contacts que des failles et des sillons s'ouvrirent sur la surface de la lune.

Pour les Grecs et les Romains, ces « ébats » de Mars et de la lune étaient les manifestations d'une idylle amoureuse 1. L'Iliade nous apprend que Jupiter-Zeus conseilla à Aphrodite (la

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déesse grecque qui représente la lune) de ne pas se battre avec Arès-Mars, de laisser ce soin à Héra (la terre) et à Pallas Athénê, et de se consacrer tout entière aux doux travaux de l'amour.

Les contacts interplanétaires ressemblent quelque peu à l'union et à la fécondation dans le monde de la biologie. A l'instant de ces contacts, la lave se répand sur la surface des planètes, fertilisant le terrain pour la végétation, et les comètes nées de ces contacts évoluent dans le système solaire, et font pleuvoir sur les planètes des gaz, des pierres, peut-être aussi des spores, des germes et des larves. Ainsi la conception antique qui imaginait des « idylles » entre les dieux et les déesses planétaires n'est qu'une légende pour les non-initiés, mais un mythe chargé de symboles pour les gens avertis.

Les vastes « mers » de lave sèche, les grands cratères de cette planète sans air et sans eau témoignent des dévastations terribles et meurtrières que les collisions interplanétaires peuvent entraîner. Les grands cratères, les montagnes, les failles, les plaines de lave qu'on découvre sur la lune sont la conséquence des bouleversements décrits dans ce livre, mais aussi de bouleversements antérieurs. La lune est un vaste cimetière inconnu, qui se meut autour de notre terre; elle nous rappelle quel destin peut frapper les planètes.

La planète Mars

La planète Mars accomplit actuellement sa révolution autour du soleil en 687 jours terrestres. Son orbite, entièrement extérieure à celle de la terre, est aussi une ellipse, mais plus allongée, en sorte que la distance de la planète au soleil varie considérablement au cours d'une révolution.

Quand Mars et la terre sont de part et d'autre du soleil, la distance entre elles est de plus de 200.000.000 miles, et peut atteindre 248.600.000 miles. A partir de ce moment, la distance entre les deux planètes diminuant, Mars devient chaque nuit plus brillante, et le point lumineux insignifiant qui la désignait se métamorphose en une étoile plus étincelante qu'aucune des constellations. Au cours d'une période légèrement supérieure à un an, son éclat devient cinquante-cinq fois plus lumineux et dépasse même celui de Jupiter.

La terre et Mars approchent l'une de l'autre tous les 780 jours, période synodique de Mars. Mais, par suite de la forme elliptique des deux orbites, et de la différence en directi,on de leurs rayons les plus longs, la distance entre Mars et la terre varie à chaque opposition. Toutes les sept oppositions, c'est-à-dire tous les quinze ans, lorsque Mars franchit la partie de son orbite la plus voisine du soleil, la terre étant à ce moment au point de son orbite le plus éloigné du soleil, la conjonction est particulièrement proche, et s'appelle « opposition favorable ». Les astronomes attendent impatiemment cet instant, car il n'est point de corps céleste, sauf la lune, qui se puisse observer plus facilement que Mars lors d'une « opposition favorable ».

A son opposition, Mars passe à une distance de la terre comprise entre 61.000.000 miles, et 35.500.000 miles (en « opposition favorable »). En quinze ans, cette distance subit donc des variations considérables, puisqu'elle se situe entre 248.600.000 et 35.500.000 miles.

Les perturbations cosmiques rapportées par la tradition hébraïque - la première, le jour des funérailles d'Achaz, la seconde, lorsque l'armée de Sennachérib envahit la Palestine - furent séparées par un intervalle de quatorze ou quinze ans, si les chiffres des Rois II XVIII, 13 s'appliquent bien à l'invasion que le cataclysme interrompit tragiquement. La Période de grâce de quinze ans, en apparence arbitraire, que mentionnent Isaïe, LVIII, 5, et les Rois, II xx, 6, a pu avoir aussi quelque rapport avec le retour périodique des cataclysmes. Les années 776, 747, 717 Ou 702, et 687 semblent correspondre à des « oppositions favorables » de Mars, où les perturbations, normales lors des périodes d'opposition, prirent des proportions catastrophiques.

Si, pour d'autres raisons, on admet le contact de Mars et de la terre à quelque époque du passé, la forme de leur orbite dont le rapprochement maximum se produit actuellement tous les quinze ans pourrait bien s'expliquer par un contact ou une série de contacts, séparés par des

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intervalles de cet ordre de grandeur, alors que les deux planètes suivaient des orbites incurvées et plus proches l'une de l'autre.

L'inclinaison de l'axe de rotation de Mars sur le plan de son orbite et la durée de sa rotation

diurne sont sensiblement les mêmes que celles de la terre. L'équateur de la terre est incliné de 23 degrés et demi sur le plan de l'écliptique, et celui de Mars est incliné de 24 degrés sur le plan de son orbite, ressemblance qu'on ne retrouve entre aucune autre planète du système solaire. La durée moyenne de la rotation de la terre sur elle-même est de 23 heures, 56 minutes, 4 secondes; celle de Mars de 24 heures, 37 minutes, 23 secondes. Il n'existe pas deux autres planètes dont la rotation diurne présente une aussi frappante identité : reconnaissons toutefois qu'on n'est arrivé à aucun chiffre définitif sur la durée du jour de Vénus.

Est-il possible que l'axe de rotation et la vitesse de rotation de Mars, que certaines forces ont stabilisés et maintiennent dans leur présent état, furent affectés par la terre au temps du contact ? Mars, plus petite que la terre, eut une influence moins considérable sur la rotation de celle-ci et sur la position de ses pôles.

La surface de Mars est couverte d'un abondant réseau de « canaux ». Schiaparelli, qui les

découvrit, prétendait que certains facteurs géologiques avaient contribué à leur formation. D'autre part « il prenait grand soin de ne pas nier l'hypothèse, qui ne comporte aucune espèce d'impossibilité », selon laquelle des êtres humains, doués d'intelligence, habiteraient sur Mars, et auraient eux-mêmes pu construire les canaux.

Le savant Percival Lowell a mené toute sa vie une vraie croisade pour persuader ses collègues et tous ses contemporains que des humains doués d'intelligence habitent Mars, et que les canaux sont leur oeuvre. De son observatoire de Flagstaff, dans l'Arizona, il crut déceler de l'eau sur Mars. Selon lui les calottes polaires étaient des masses de glace; à cause du manque d'eau, les habitants de Mars creusaient des canaux qui amenaient l'eau dans les régions désertiques 1.

Au début du XXe siècle, on se mit en quête de moyens techniques pour communiquer, par signaux lumineux, avec les hypothétiques Martiens. On proposa, par exemple, de construire sur les étendues sibériennes une chaîne de postes émetteurs de signaux, disposés selon une figure géométrique : celle-ci devait représenter le théorème de Pythagore sur le rapport des trois côtés d'un triangle rectangle. S'il y avait des êtres intelligents sur Mars prétendait-on, ils ne manqueraient pas de remarquer et d'interpréter les signaux. S'ils n'étaient pas suffisamment intelligents pour les découvrir et en comprendre lac signification, il n'était pas si urgent de communiquer avec eux. L'expérience ne fut pas tentée.

Après les contacts de Mars avec des planètes plus grandes et plus puissantes qu'elle-même, il semble peu probable que des formes de vie supérieures aient pu s'y maintenir, si elles y ont jamais existé. Mars est plutôt une planète morte. Toute forme de vie supérieure dut être anéantie : les oeuvres mêmes des « Martiens » durent disparaître avec eux. Les « canaux » de Mars semblent l'effet de forces géologiques qui répondirent par des fissures et des fêlures aux forces extérieures qui se déployaient dans les collisions interplanétaires.

L'atmosphère de Mars

L'atmosphère de Mars est invisible. S'il y a sur cette planète des êtres vivants, et s'ils sont doués d'organes de la vue, ils voient un ciel noir, et non point bleu comme le nôtre.

L'atmosphère de Mars fait l'objet de nombreuses observations, qui ont abouti à des résultats contradictoires, et apparemment, peu satisfaisants. L'enveloppe gazeuse est transparente, en sorte que le contour de la planète apparaît très nettement. Les calottes polaires saisonnières de Mars sont le résultat de la distillation : une calotte polaire disparaît quand l'été arrive dans son

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hémisphère, et reparaît en hiver. On ignore si elles sont composées d'anhydride carbonique, ou de glace, si elles sont des nuages qui recouvrent les régions polaires, ou des nappes cristallisées. L'existence de la vapeur d'eau dans l'atmosphère de Mars a été admise par un groupe d'observateurs (observatoire de Lowell), tandis que d'autres (observatoire de Lick) la niaient. Actuellement, on considère comme presque définitivement acquis que l'atmosphère de Mars ne contient qu'une quantité absolue de vapeur d'eau extrêmement faible, le vingtième environ de l'atmosphère terrestre. Les résultats obtenus par l'observatoire du mont Wilson confirment cette théorie.

Les observations relatives à l'oxygène que contiendrait l'atmosphère de Mars sont peu concluantes : on suppose généralement que la quantité d'oxygène, s'il en existe dans l'atmosphère de Mars, est inférieure à 0,1%, par unité de surface, de celle contenue dans notre atmosphère 1.

L'analyse spectrale de l'atmosphère des planètes présente de grosses difficultés : leur lumière est de la lumière solaire reflétée; elle contient donc l'image spectrale de l'atmosphère solaire (raies d'émission du spectre); d'autre part, l'atmosphère de la terre, que cette lumière déjà réfléchie traverse, imprime ses propres bandes spectrales caractéristiques (raies d'absorption) sur la lumière que les planètes réfléchissent. La conclusion qui en découle, et qu'on livre au grand public, est que le « spectre de Mars est pratiquement celui de la lumière solaire réfléchie » (E. Doolittle). Ceci nous inviterait à penser que Mars n'a pas d'atmosphère, ou une atmosphère d'une densité infime. Il y a cependant une légère différence entre la distribution de la lumière dans le spectre, et la lumière qui arrive directement du soleil. D'autres observations viennent confirmer la présence d'une atmosphère, dont l'altitude peut s'évaluer à quatre-vingt-dix kilomètres environ.

D'autre part, la minceur qu'on attribue à la couche atmosphérique est en contradiction avec certains résultats obtenus par les photographies en lumières violette et rouge. Les premières révèlent une série de nuages invisibles sur les photographies en lumière rouge. Celles-ci par contre révèlent l'existence d'une seconde série de nuages, invisibles sur les photographies en lumière violette.

Dans cette étude des cataclysmes cosmiques, nous nous sommes efforcés d'établir qu'au VIIIe et au VIIe siècle avant notre ère, un corps céleste s'est à plusieurs reprises approché de la terre; que ce corps céleste était la planète Mars, que sa trajectoire avait été antérieurement modifiée par son contact avec Vénus, qui jusqu'alors avait traversé l'orbite de la terre, et qu'en conséquence, Vénus, la terre, et Mars prirent de nouvelles positions dans le système solaire. Ces contacts entre Vénus, la terre et Mars s'accompagnèrent tous d'échanges entre les atmosphères de ces planètes; la terre prit des nuages carboniques à Vénus, et un peu de l'atmosphère de Mars. Les précipitations blanchâtres qui forment les calottes polaires de Mars sont probablement de nature carbonique, et ont été enlevées à la queue de Vénus. Seules les différences de composition atmosphérique et de température entre Mars et la terre empêchent la dissolution continue de cette « manne » par les rayons solaires.

Les principaux composants de l'atmosphère de Mars doivent se retrouver dans l'atmosphère de la terre. Mars, « le dieu de la guerre », a dû y en laisser une partie au cours de ses visites. L'oxygène et la vapeur d'eau figurant en faible quantité dans l'atmosphère de Mars, les éléments principaux de celle-ci doivent être d'autres corps qui existent aussi dans l'atmosphère terrestre. Ce pourrait être l'azote. Mais l'on n'a pas encore établi la présence - ou l'absence - de l'azote sur Mars.

Outre l'oxygène et l'azote, principaux composants de l'atmosphère terrestre, l'argon et le néon s'y trouvent en quantités décelables. Les raies spectrales de ces gaz rares n'apparaissent que lorsqu'ils sont excités par une haute température. Par conséquent, on ne peut les déceler par les raies d'émission d'un corps relativement froid, comme c'est le cas de Mars. On n'a pas

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encore étudié les raies d'absorption de l'argon et du néon. Cette étude rendrait possible l'analyse spectrale de ces gaz rares sur les planètes : dès qu'elle sera faite, il importera de soumettre Mars à cette expérience. Si l'analyse les décèle en grandes quantités, nous saurons enfin ce qu'a apporté Mars à la terre, quand les deux planètes sont entrées en contact.

L'équilibre thermique de Mars

Le diamètre équatorial de Mars est d'environ 6750 kilomètres, le rapport des volumes de Mars et de la terre est 15/100, et l'on suppose que le rapport des masses est 10,8/100.

Le volume de Mars n'est que le sixième de celui de Vénus, et Vénus est, pense-t-on, sept fois et demi plus lourde que Mars.

Par suite de l'excentricité de l'orbite de Mars, l'insolation à l'aphélie est bien moindre qu'au périhélie (le rapport étant environ 5 : 6), et dans l'hémisphère Sud, l'été est beaucoup plus chaud, mais bien plus court que dans l'hémisphère Nord. La distance moyenne Mars-Soleil étant plus grande que la distance Mars-Terre, on suppose que Mars reçoit par unité de surface moins de la moitié de lumière et de chaleur que reçoit notre planète ; pour cette raison, sa température doit être d'environ 65° C. inférieure à celle de la terre, et se maintenir constamment au-dessous de zéro. La température annuelle moyenne aux latitudes équatoriales de Mars équivaut alors sensiblement à celle des régions polaires de la terre.

Or la mesure radiométrique de la température de Mars montre qu'il existe en fait un excès de température 1. Mars émet plus de chaleur qu'elle n'en reçoit du soleil. Cet excès de chaleur provient-il de l'intérieur de la planète ? Mars est plus petite que la terre; le rapport de sa surface à son volume est plus grand, elle a dû par conséquent se refroidir avant la terre, soit que leur naissance, il y a des millions d'années, ait été simultanée (théorie des marées), soit que Mars ait été expulsée du soleil nébuleux avant notre globe par la force centrifuge (Kant Laplace). Quelle est alors la cause de l'excès de chaleur de Mars ?

Par suite de la différence de leurs masses, les contacts entre Mars et la terre ont dû provoquer des bouleversements plus considérables à l'intérieur et à la surface de Mars, qu'à l'intérieur et à la surface de la terre. Un contact interplanétaire a dû amener une conversion de mouvement en chaleur, et ceci peut expliquer que les radiations thermiques de la planète excèdent la quantité de chaleur apportée par l'insolation.

Les contacts qui eurent lieu, il y a à peine trois mille ans, entre Mars et Vénus, et, à un moindre degré de violence, entre Mars et la terre sont probablement à l'origine de la température actuelle de Mars. Les décharges électriques interplanétaires ont également pu provoquer des fissions atomiques, suivies de radioactivité et d'émission de chaleur.

Les gaz de Vénus

Une partie de la queue gazeuse de Vénus demeura attachée à la terre, une autre fut arrachée par Mars, mais la masse principale des gaz suivit la tête de la comète. Des gaz restés sur la terre, une partie forma des dépôts de pétrole, une autre des nuages, qui se précipitèrent lentement et enveloppèrent la Terre pendant de nombreuses années. Les gaz conservés par Vénus brûlèrent ou fumèrent très longtemps, jusqu'à épuisement de l'oxygène pris à la terre. Ce qui en resta forme aujourd'hui l'enveloppe de nuages carboniques de l'Etoile du Matin ; sur toute l'épaisseur accessible à l'analyse spectrale, l'oxygène et la vapeur d'eau sont absents. La planète est couverte de nuages de poussière. L'anhydride carbonique entre dans la composition de l'atmosphère de Vénus 1.

La brillante enveloppe de Vénus est un reste de la queue qu'elle possédait, il y a trois mille ans, alors qu'elle était une comète. Le pouvoir réflecteur (albédo) de Vénus est supérieur à celui de toutes les autres planètes : 0,75, alors qu'il est 0,22 pour Mars, et 0, 13 pour la lune 2. Il

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dépasse de loin le pouvoir réflecteur des sables désertiques, et est presque égal à celui de la neige fraîche.

D'après ces données, on a tout droit de supposer que Vénus doit être riche en vapeurs de pétrole. Si sa température est trop élevée pour que le pétrole puisse se liquéfier, et tant qu'elle le sera, les hydrocarbures circuleront sous forme gazeuse. Les raies d'absorption du spectre de l'hydrocarbure sont dans l'infrarouge lointain, que n'atteignent pas les photographies habituelles. Quand la technique de la photographie de l'infrarouge sera perfectionnée, et capable de distinguer les bandes de l'hydrocarbure, il est probable que le spectrogramme de Vénus révélera la présence des gaz d'hydrocarbure dans son atmosphère, si toutefois ces gaz se trouvent dans la partie supérieure de l'atmosphère où pénètrent les rayons solaires.

Si le pétrole qui s'est déversé sur la terre, lors du contact avec la comète Vénus, fut formé sous l'effet des décharges électriques à partir d'hydrogène et de carbone gazeux, Vénus doit elle aussi avoir du pétrole, dont la formation est due aux décharges qui, comme nous l'admettons, passèrent entre la tête et la queue de la comète, lors de son contact avec la terre, et avec d'autres corps célestes. Dès lors nous pouvons indirectement suggérer certaines conclusions sur la présence de pétrole à l'état liquide dans la planète Jupiter; car, s'il est établi que Vénus a été expulsée de Jupiter, et si elle a du pétrole gazeux, normalement Jupiter doit aussi avoir du pétrole. La découverte de méthane dans l'atmosphère de Jupiter (les seuls constituants connus de son atmosphère sont les gaz délétères, méthane et ammoniaque) rend assez plausible cette présence du pétrole : les gaz dits « naturels », qu'on trouve sur les terrains pétrolifères, ou à proximité, se composent largement de méthane.

La théorie moderne de l'origine du pétrole, dont le fondement est l'action de celui-ci sur la lumière polarisée, considère le pétrole comme provenant de la matière organique. Par conséquent, si je ne m'abuse, Vénus et Jupiter doivent posséder une source organique de pétrole. Il a été montré aux pages précédentes (certains textes historiques le suggèrent) que Vénus (donc Jupiter aussi bien) est peuplée de vermine. Cette vie organique peut être à l'origine du pétrole.

L'équilibre thermique de Vénus

Les observations radiométriques faites en 1922 aux observatoires du mont Wilson et de Flagstaff ont montré qu' « une quantité considérable de chaleur » est émise par la partie obscure du disque de la planète Vénus.

Vénus, plus proche du soleil que la terre, tourne successivement vers notre globe sa partie obscure et sa partie éclairée : elle présente des phases comme la lune. La température de ces deux faces a été mesurée par une méthode radiométrique ; on a ainsi établi que « la température à la surface de la planète est presque uniforme dans l'hémisphère éclairé, comme dans l'hémisphère obscur ». « Cette vigoureuse formule (de E. Pettit et S. B. Nicholson) représente sans doute la découverte la plus importante qu'on ait faite sur Vénus 1. » Les mêmes résultats ont été obtenus indépendamment, et presque en même temps, par deux autres chercheurs 2.

Comment expliquer cette uniformité approximative de température dans les deux hémisphères de Vénus ? On a tiré la conclusion suivante : la rotation diurne de Vénus est très rapide, et en conséquence, la nuit n'est pas suffisamment longue pour que la température subisse une baisse sensible. Mais cette conclusion est en contradiction totale avec un fait qu'on croyait établi : la non-rotation de Vénus par rapport au soleil (ou une rotation par rapport aux étoiles fixes avec une période égale à la durée d'une révolution sur son orbite, soit 225 jours terrestres). Par suite de la couche de nuages qui la recouvre, il est impossible d'observer par des moyens directs si Vénus a une rotation diurne ou non. Les données spectrographiques suggèrent que la planète gravite en présentant toujours la même face au soleil, comme la lune le

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fait pour la terre, ou tout au plus qu'elle tourne avec une extrême lenteur 3. De toute manière, une courte période de rotation est exclue par les données spectrographiques,

« Si la période de rotation de Vénus est de 225 jours, comme beaucoup d'observateurs sont amenés à le croire, on ne voit guère comment la haute température de la couche de l'atmosphère nocturne peut se maintenir 4. »

Aucun compromis n'est satisfaisant. On ne peut ignorer ni les résultats radiométriques, qui suggèrent une brève période de rotation, ni les données spectrographiques précises, qui indiquent une longue période de rotation : « Il y a là, et pour longtemps encore, ample sujet à discussion et controverse. »

En réalité, les deux méthodes d'observation ne sont pas contradictoires : la face sombre de Vénus dégage de la chaleur par rayonnement, parce que Vénus est elle-même chaude. Les propriétés réfléchissantes, absorbantes, isolantes, et conductrices de la couche de nuages de Vénus modifient l'action de la chaleur solaire sur la planète. Mais, à la base du problème, il reste ce fait certain : Vénus produit de la chaleur.

Vénus est née, et immédiatement après s'est trouvée expulsée par un processus violent ; comète, elle a suivi une ellipse très proche du soleil; par deux fois, elle est entrée en contact avec la terre, avec des décharges électriques entre les deux corps, et conversion du mouvement en chaleur; elle a fait l'expérience de plusieurs contacts avec Mars, et probablement aussi avec Jupiter. Tous ces événements se sont déroulés entre le troisième et le premier millénaire avant notre ère. Dès lors, le noyau de la planète Vénus doit encore être chaud. De plus, s'il y a de l'oxygène sur Vénus, le pétrole doit y brûler. Telles sont les conclusions que suggère l'histoire de Vénus, comme nous avons tenté de l'établir ici.

Un dernier mot

« Le monde sera détruit, le puissant océan desséché, et cette vaste terre consumée. Cultivez donc la bienveillance, cultivez la compassion. »

Cycles du monde dans Visuddhi-Magga. Le système solaire n'est point demeuré immuable depuis des billions d'années; certains de

ses membres ont abandonné leur place primitive au cours des périodes historiques. Certes, nous n'étions point présents lorsqu'il prit sa forme actuelle, mais ce n'est point là une raison valable pour renoncer à connaître ou à découvrir son origine.

Des cataclysmes ont à plusieurs reprises réduit en ruines la civilisation de cette terre. Malgré cela, notre terre ne s'est pas si mal comportée, si l'on compare son destin à celui de Mars; et à en juger par le degré de civilisation qu'a atteint l'humanité, on constate une amélioration relative des conditions de vie sur la planète. Pourtant, si des événements aussi dramatiques se sont produits dans le passé, ils peuvent se reproduire dans l'avenir, avec une issue différente - fatale peut-être.

La terre est entrée en contact avec d'autres planètes, et avec des comètes. Aujourd'hui, la trajectoire d'aucune planète ne constitue un danger pour la terre, et seules les orbites de quelques astéroïdes, simples rochers de quelques kilomètres de diamètre, traversent la route que suit notre globe. Voilà une découverte récente, qui causa la stupéfaction des savants. Mais la possibilité n'est pas exclue que quelque jour futur, deux planètes du système solaire entrent en collision, et non plus une planète et un astéroïde. L'orbite de Pluton, la planète la plus éloignée du soleil, quoique beaucoup plus excentrique que l'orbite de Neptune, traverse celle-ci. Il est vrai que le danger d'une collision n'est pas imminent, puisque l'orbite de Pluton fait un angle de 170 avec le plan de l'écliptique. Mais le long axe de cette orbite change de direction, et un contact futur entre les deux planètes est probable, si une comète ne vient pas dégager les

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orbites de ces corps. Les astronomes verront alors les planètes interrompre ou ralentir leur rotation, entourées de toutes parts de champs magnétiques. Une étincelle jaillira d'une planète à l'autre, qui évitera la collision et l'écrasement des deux lithosphères; enfin, les planètes s'écarteront, et suivront de nouvelles orbites. Alors Pluton deviendra peut-être un satellite de Neptune. Il se peut encore que le même Pluton rencontre non point Neptune, mais son satellite, Triton, trois fois plus petit que lui. Pluton deviendra-t-il un nouveau satellite de Neptune, sera-t-il repoussé vers le soleil, libérera-t-il Triton de sa condition de satellite ? Tout cela ne saurait être qu'hypothèses.

Les satellites de Jupiter offrent un autre exemple d'intersection : l'orbite du sixième satellite croise celle du septième et le huitième, très irrégulier, traverse la route du neuvième. On devrait pouvoir déterminer depuis quand le sixième et le septième satellite suivent leurs présentes trajectoires; les chiffres obtenus ne seraient probablement pas très élevés.

Toute collision de deux planètes dans le passé entraîna invariablement une série de collisions planétaires nouvelles. La collision entre les grandes planètes, sujet du volume qui fera suite à ce livre, provoqua la naissance de comètes : celles-ci coupèrent les orbites d'autres planètes et entrèrent en collision avec elles. L'une de ces comètes au moins, Vénus, est devenue planète aux temps historiques, et cette métamorphose détruisit partiellement Mars et la terre. Des planètes, chassées de leurs trajectoires, se rencontrèrent maintes fois, avant de se stabiliser dans leurs positions actuelles, où leurs orbites ne se croisent pas. Les seuls cas d'intersection qui subsistent sont ceux de Neptune et de Pluton, des satellites de Jupiter, et de quelques astéroïdes qui traversent les orbites de Mars et de la terre.

Il se peut aussi que des comètes heurtent la terre, comme le fit Vénus, comète. Heureusement, dans cette gigantesque catastrophe, Vénus était légèrement plus petite que la terre. Une grande comète fondant des espaces interstellaires peut entrer en collision avec l'une des planètes, et l'expulser de son orbite; alors le chaos renaîtrait. Il se pourrait encore que quelque étoile sombre, analogue à Jupiter ou Saturne, se trouve sur la trajectoire du soleil, soit attiré dans le système solaire, et y cause des ravages.

Le monde savant a prétendu que, dans quelques centaines de millions d'années, la chaleur solaire serait épuisée, et qu'alors, (c'est ainsi que Flammarion effrayait ses lecteurs) le dernier couple humain périrait de froid dans les glaces de l'équateur. Mais nous n'en sommes point encore là. Les théories modernes expliquent l'émission de chaleur par la dissociation des atomes, et les savants estiment volontiers que le soleil contient d'immenses réserves de chaleur. Une explosion du soleil serait plutôt à craindre. Alors, la terre le saurait quelques minutes après, juste avant de disparaître. Si la fin du monde par le froid appartient à un avenir très lointain, l'explosion du soleil est d'autre part fort improbable. Assurément, pense-t-on, notre globe a des billions d'années paisibles devant lui. Le monde, croit-on, a gravité sans heurts pendant des siècles et des siècles, et il continuera sa ronde régulière pendant des siècles encore. L'homme fera son chemin pendant ces siècles à venir, si l'on réfléchit que la civilisation a moins de 10.000 ans d'âge, et si l'on considère les immenses progrès techniques du siècle dernier.

Maintenant, personne ne redoute plus la fin du monde. L'homme se cramponne à ses biens terrestres, fait le compte de ses possessions, les protège et les défend; les peuples déchaînent des guerres pour conserver ou agrandir leurs territoires historiques. Et pourtant, au cours de ces dernières cinq ou six mille années, une série de grands cataclysmes s'est abattue sur la terre, dont chacun a bouleversé les frontières des mers, dont certains ont inversé la position des fonds marins et des continents, englouti des royaumes, faisant place nette pour de nouveaux empires.

Les collisions cosmiques ne sont pas des phénomènes « divergents», c'est-à-dire des phénomènes qui, de l'avis des savants modernes, violent ce qu'ils croient être les lois physiques. Par leur nature, ils appartiennent à ce jeu de phénomènes qui constituent la dynamique de

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l'univers : ce sont, pour employer. les termes de cette philosophie, des phénomènes « convergents ».

« De peur que vous ne pensiez, peut-être sous l'influence de la religion (l'on peut remplacer « religion » par « science »), que la terre et le soleil, et le ciel, les mers, les étoiles, et la lune doivent nécessairement être éternels, à cause de leur qualité divine », songez aux cataclysmes du passé, et puis, « considérez les mers, et les continents, et le ciel, leur triple nature... leurs trois structures immenses qu'une seule journée précipitera à la ruine; et l'édifice puissant du monde, soutenu depuis tant d'années, s'écroulera et s'abîmera 1 ».

« Et tout le firmament s'effondrera sur la divine terre, et sur la mer; il tombera alors des cataractes ininterrompues de feu dévorant : les continents et les mers seront consumés, le firmament, le ciel, et les étoiles et la création elle-même fondront et seront dissous en une seule masse. Alors disparaîtront les orbes scintillants des luminaires; la nuit et l'aurore, les jours constants et peuplés de soucis, le printemps, l'été, l'hiver, l'automne 2. » « Une seule journée verra les funérailles de l'humanité entière. Tout ce que par une longue patience a produit la fortune, tout ce qui s'est élevé à l'éminence, toute célébrité et toute splendeur, les grands trônes, les grandes nations, tout sera englouti dans un seul abîme, sera détruit en une seule heure 3. »

La violence des flammes fera éclater La structure de la croûte terrestre 4

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Epilogue

Les problèmes inépuisables

Dans ce livre, première partie d'une cosmologie historique, j'ai tenté de montrer que deux séries de cataclysmes se sont produites pendant les temps historiques, il y a trente-quatre et vingt-six siècles : ainsi la guerre, et non la paix, régnait dans le système solaire, très récemment encore.

Toutes les théories cosmologiques affirment que les planètes gravitent régulièrement, depuis des billions d'années. Or nous prétendons qu'elles ne suivent leurs orbites actuelles que depuis quelques milliers d'années. Nous affirmons aussi qu'une planète, Vénus, fut d'abord une comète et qu'elle est entrée dans la famille planétaire à une époque dont l'humanité garde encore le souvenir; ainsi se trouvait expliquée l'origine d'une des planètes. Nous avons supposé que la comète Vénus était issue de la planète Jupiter. Puis nous avons découvert que de petites comètes étaient nées des contacts entre Vénus et Mars : le problème de l'origine des comètes dans le système solaire recevait ainsi une solution. La jeunesse relative de ces comètes explique pourquoi, malgré la dispersion des matières de leur queue dans l'espace elles ne sont pas encore entièrement désintégrées. L'origine cométaire de Vénus nous a appris que les comètes ne sont pas des corps presque immatériels, des « riens visibles », comme on l'a cru, parce qu'il était possible de voir des étoiles à travers leur queue, ou bien parce que, lors du passage d'une ou deux comètes devant le soleil, leurs têtes n'étaient pas visibles.

Nous prétendons que l'orbite de la terre a changé plus d'une fois, et, en même temps, la durée de l'année; que la position géographique de l'axe terrestre et sa direction astronomique ont été altérées à diverses reprises, et qu'à une date récente l'étoile Polaire faisait partie de la Grande Ourse. La durée du jour a été modifiée; les régions polaires déplacées; la glace polaire a recouvert des latitudes modérées tandis que des régions nouvelles pénétraient à l'intérieur du cercle polaire.

Nous sommes arrivés à la conclusion que Vénus, Mars et la terre ont échangé des décharges électriques lorsqu'elles se sont frôlées, et que leurs atmosphères sont entrées en contact; que les pôles magnétiques de la terre ont été invertis il y a quelques milliers d'années à peine; que l'orbite de la lune a changé, entraînant une modification de la durée du mois, et ceci à plusieurs reprises. Pendant les 700 ans qui séparent le milieu du second millénaire avant notre ère et le VIIIe siècle l'année a comporté 360 jours, et le mois presque exactement trente jours; mais, avant cette époque, le jour, le mois et l'année avaient une longueur différente.

Nous avons montré pourquoi le côté obscur de Vénus émet autant de chaleur que son côté éclairé par le soleil; nous avons de même expliqué la présence de canaux sur Mars, de cratères et de mers de lave sur la lune, par le processus violent des collisions interplanétaires.

Nous estimons avoir fait un grand pas vers la solution du problème que posent la formation des montagnes, les invasions marines, l'échange de place entre la mer et les continents, l'apparition d'îles nouvelles, et l'activité volcanique, l'origine des tremblements de terre, les brusques changements de climat, la destruction de quadrupèdes en Sibérie septentrionale, l'anéantissement d'espèces entières.

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En outre, il est apparu que des agents extra-terrestres provoquaient l'énorme évaporation d'eau à la surface des océans et des mers qu'on postulait pour expliquer les grandes précipitations et la formation des couches glaciaires. Bien que l'hiver Fimbul s'explique par ces phénomènes, nous sommes tentés d'admettre que les roches erratiques, le gravier, l'argile, et le sable contenus dans les couches rocheuses furent amenés non par la glace, mais par de gigantesques lames que souleva une altération de la rotation du globe terrestre. Ainsi se justifiait le déplacement des moraines de l'équateur vers des latitudes et des altitudes plus hautes (Himalaya), ou bien de l'équateur vers le pôle sud à travers l'Afrique.

Nous avons reconnu que les différentes religions des peuples de la terre. ont une origine astrale commune. Le récit biblique des plaies et autres miracles de l'époque de l'Exode est historiquement vrai, et les prodiges rapportés comportent une explication naturelle. nous avons appris qu'il y eut un embrasement universel, extrêmement meurtrier, et que le naphte s'est abattu du ciel; que le passage de la mer Rouge et la théophanie au mont Sinaï ne sont pas des contes; que l' « ombre de la Mort » ou le crépuscule des dieux (Götterdämmerung) évoquent l'époque des pérégrinations dans le désert; que la manne ou l'ambroisie est réellement tombée du ciel, ou plus exactement des nuages de Vénus.

Nous avons également découvert que le miracle de Josué, l'immobilisation du soleil et de la lune, n'est pas une histoire pour les seuls crédules; nous avons saisi pourquoi des idées communes fleurissent dans les folklores de peuples que séparent des océans, et constaté l'importance des bouleversements mondiaux dans les thèmes des légendes; nous avons appris pourquoi les planètes étaient divinisées; quelle planète était personnifiée par Pallas Athénê; comment il importait d'interpréter les combats célestes de l'Iliade, et de déterminer la date même où cette épopée fut composée; pourquoi le peuple romain fit de Mars son dieu national et le père des fondateurs de Rome. Nous avons compris ce que signifiaient les messages des prophètes hébreux, et en particulier ceux d'Amos, d'Isaïe, de Joël, et de Michée. Nous sommes même parvenus à fixer l'année, le mois, le jour de la dernière catastrophe cosmique, et à établir la nature de l'agent qui détruisit l'armée de Sennachérib.

La cause des grandes migrations de peuples aux XVe et VIIIe siècles nous a été révélée, et aussi bien l'origine de cette croyance qui fait du peuple juif le peuple élu. Nous avons élucidé la signification originelle des archanges, et les sources des représentations eschatologiques du Jugement Dernier.

Tel est le bilan des résultats acquis au cours de ces pages où tant de questions furent agitées; nous avons pourtant conscience d'avoir soulevé plus de problèmes que nous n'en avons résolu.

Et, entre autres, celui-ci : s'il est vrai que des cataclysmes cosmiques se sont produits il y a si peu de temps, que ne pourrions-nous découvrir dans un passé plus reculé ? Que pourrait bien nous révéler le Déluge, jusqu'à présent considéré comme une crue de l'Euphrate, qui émut vivement les Bédouins au sortir du désert ? Plus généralement, ne pouvons-nous projeter quelque lumière sur le passé plus obscur, et sur les conflits célestes plus lointains ?

Comme il a été expliqué dans la préface, l'histoire des cataclysmes telle qu'il est possible de la reconstituer d'après les témoignages de l'humanité et de la nature ne figure pas intégralement dans ce volume. Nous n'en avons présenté ici que deux chapitres - deux âges du Monde - Mars, Vénus. J'ai l'intention, dans une étude ultérieure, de pénétrer plus avant dans le passé et de reconstituer l'histoire de plusieurs bouleversements cosmiques antérieurs. J'espère pouvoir y apporter quelques renseignements sur les circonstances qui précédèrent la naissance de Vénus hors du corps de Jupiter, et expliquer en détail pourquoi Jupiter, planète qu'un tout petit nombre de personnes savent situer aujourd'hui dans le ciel, était la principale divinité des peuples antiques. Enfin, j'essaierai de répondre à quelques-unes des questions qui ont été soulevées aux premières pages du prologue de ce présent volume.

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La cosmologie historique nous permet, grâce à ce principe des cataclysmes universels, d'établir l'histoire synchronisée des peuples de l'Ancien Monde. Les tables chronologiques qui se fondaient sur le calcul astronomique - nouvelle lune, éclipses, lever héliacal ou culmination de certaines étoiles - ne sauraient être exactes, puisque l'ordre de la nature a changé depuis les temps anciens. Mais les grands bouleversements de caractère cosmique peuvent servir de point de départ à une histoire plus exacte des nations.

Dans « Ages in chaos », j'ai tenté cette synchronisation des histoires des différents peuples de l'Ancien Monde. Le point de départ en est la simultanéité des cataclysmes naturels dans les pays de l'Orient antique; et la confrontation des témoignages sur ces cataclysmes, tels que nous les livrent les différents peuples anciens. Puis j'ai rassemblé les témoignages politiques fournis par les documents archéologiques de l'Orient ancien, sur une période couvrant plus de mille ans, de la fin du Moyen-Empire égyptien jusqu'à l'époque d'Alexandre de Macédoine : en remontant les siècles pas à pas, j'ai opéré une révision totale de la chronologie des événements de l'antiquité; elle révélera des différences de plusieurs siècles avec la chronologie classique.

L'évolution de la religion, y compris la religion d'Israël, s'éclaire d'une lumière nouvelle. Les faits établis par le présent ouvrage peuvent aider à déterminer l'origine et le développement du culte des planètes, du culte des animaux, des sacrifices humains - et aussi la provenance des croyances astronomiques. L'auteur ne peut éviter d'inclure dans cet ouvrage le problème de l'origine de la religion, en particulier du monothéisme. Il importe de rechercher pourquoi et comment le peuple juif, qui eut les mêmes expériences que les autres peuples, et comme eux pratiqua d'abord le culte des astres, abandonna très rapidement les divinités astrales, et condamna le culte des idoles.

Les Ecritures nous invitent à un nouvel examen de la Bible, qui permettra de découvrir le processus de transition de la religion astrale au monothéisme, avec sa conception d'un Créateur unique, qui n'est ni étoile, ni animal, ni être humain.

La psychologie soulève ici un problème curieux : Freud a sondé l'homme moderne pour y découvrir les instincts primitifs. Selon lui, dans la société de l'âge de pierre, les fils, parvenus à l'âge adulte, guettaient l'occasion de se débarrasser de leur père, autrefois tout-puissant, désormais accablé par l'âge, et d'imposer leur volonté à leur mère; et cet instinct ferait partie de l'héritage que l'homme moderne tient de ses ancêtres préhistoriques. Suivant la théorie d'un autre psychologue, Carl Jung, il existerait une âme collective inconsciente, réceptacle et véhicule d'idées qui s'y déposèrent dans les temps primitifs; et cette âme aurait une influence considérable sur nos concepts et notre comportement individuels. A la lumière de ces théories, nous pouvons nous demander dans quelle mesure les terrifiantes expériences des cataclysmes universels font maintenant partie de l'âme humaine, et quelle proportion on en pourrait éventuellement discerner dans nos croyances, nos émotions, notre comportement, qui plongent leurs racines dans les zones inconscientes ou subconscientes de notre esprit 1.

Le présent ouvrage a, ici et là, utilisé les données de la géologie et de la paléontologie : roches transportées à des distances énormes, et déposées au sommet de formations différentes; mammouths tués au cours d'un cataclysme, changement de climat; frontières primitives des glaces polaires; moraines de l'Afrique; vestiges de civilisation humaine au Nord de l'Alaska; origine d'une importante partie des nappes de pétrole, formation des volcans, causes des tremblements de terre. Cependant les données géologiques, paléontologiques, et anthropologiques qui se rapportent aux problèmes des cataclysmes cosmiques sont nombreuses, et permettraient de composer un tableau complet des événements du Passé, tout autant que les données de l'Histoire.

A quelles certitudes est-il possible de parvenir sur l'extinction des espèces, sinon des genres, sur le conflit qui oppose la théorie de l'évolution à celle des mutations catastrophiques, sur

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l'évolution de la vie animale et végétale en général, à l'époque où vivaient des géants, et où la terre était peuplée de brontosaures ?

L'immersion et l'émersion des continents, l'origine du sel marin, des déserts, du sable, des dépôts de charbon dans l'antarctique, et des palmiers dans les régions arctiques; la formation des roches sédimentaires; la présence insolite de roches ignées sur des terrains qui contiennent des fossiles d'animaux marins et terrestres, et celle du fer dans les couches superficielles de la croûte terrestre; la durée des époques géologiques, et l'âge de l'homme sur la terre - autant de questions qui doivent être traitées à la lumière de la théorie des catastrophes cosmiques.

Et il y a encore les problèmes physiques. Les phénomènes rapportés dans cet ouvrage, la modification des orbites et de la vitesse de rotation des planètes, la transformation d'une comète en planète, les contacts et les décharges interplanétaires nous contraignent à étudier la mécanique céleste d'un point de vue nouveau.

La théorie des catastrophes cosmiques peut, s'il le faut, s'accorder avec la mécanique céleste de Newton. Les comètes et les planètes, se poussant les unes les autres, ont pu changer d'orbites, encore qu'il soit curieux que Vénus, par exemple, ait pu acquérir une orbite circulaire, ou que la lune, également arrachée à sa position première, ait pu conserver une orbite presque circulaire. Néanmoins, il y a des précédents à cette conception. La théorie planétésimale postule d'innombrables collisions entre des planètes infiniment petites, qui furent éjectées du soleil, arrondirent peu à peu leurs orbites, et formèrent des planètes et des satellites ; la théorie des marées considère aussi les planètes comme dérivées du soleil ; elles furent balayées par le passage d'une étoile dans une direction et avec une force qui, combinées à l'attraction gravitationnelle du soleil, créèrent des orbites presque circulaires. Tel serait aussi le sort des satellites par rapport aux planètes autour desquelles ils gravitent 2. Un autre précédent à la formation d'orbites presque circulaires dans des circonstances extraordinaires nous est offert par la théorie qui considère les satellites rétrogrades comme des astéroïdes captés, qui réussirent ultérieurement à suivre des orbites sensiblement circulaires.

Si pareils effets du contact entre deux étoiles, ou de la capture d'un corps céleste par un plus grand, ne sont pas incompatibles avec la mécanique céleste, les orbites résultant des collisions planétaires ne semblent pas davantage en rupture d'harmonie avec elle.

Les savants évaluent différemment les résultats physiques du ralentissement ou du renversement de la rotation diurne de la Terre. Certains estiment qu'une destruction intégrale de notre globe et la volatilisation de sa masse entière suivraient ce ralentissement ou cet arrêt. Ils accordent cependant que la destruction ne serait pas aussi totale, si la terre poursuivait sa rotation, et si son axe seul avait été dévié. Ce phénomène pourrait être provoqué par le passage de la terre à travers un champ magnétique intense, qui formerait un certain angle avec l'axe magnétique de notre planète. Une toupie d'acier en rotation, lorsqu'elle est déviée par un aimant, continue de tourner. Théoriquement, l'axe terrestre pourrait être dévié pendant un certain temps, et d'un angle quelconque, et aussi de telle façon qu'il soit dans le plan de l'écliptique. En ce cas, l'un des deux hémisphères - Nord ou Sud - connaîtrait un jour d'une durée inhabituelle, et l'autre une nuit anormalement longue.

La déviation de l'axe pourrait produire l'effet visuel d'un mouvement rétrograde ou d'un arrêt du soleil. Une plus grande déviation produirait un jour ou une nuit multipliés; et une déviation plus considérable encore, un renversement, avec interversion de l'Ouest et de l'Est, tout cela sans qu'il y ait rupture grave du mouvement mécanique de la rotation et de la révolution de la terre. D'autres savants soutiennent que le ralentissement ou même l'arrêt théorique de la rotation diurne de la terre n'amènerait pas sa destruction totale. Toutes les parties de la terre tournent avec la même vitesse angulaire, et si le ralentissement ou l'arrêt théorique maintenait l'égalité de la vitesse angulaire des différentes parties du globe solide, la terre survivrait au ralentissement, à l'arrêt, ou même au renversement de sa rotation. Cependant, les vitesses

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angulaires de rotation des parties fluides - l'air et l'eau des océans - seraient bouleversées, et la terre balayée par des ouragans et des raz de marée. Les civilisations seraient anéanties, mais non pas le globe.

Selon cette explication, les conséquences du ralentissement de la vitesse angulaire de rotation dépendraient donc de la façon dont il s'est produit. Si l'action d'un milieu extérieur, par exemple un épais nuage de poussière, intéressait également toutes les parties de la surface du globe, la vitesse de rotation de celui-ci serait modifiée, et peut-être annulée, et l'énergie de sa rotation serait transférée au nuage de poussière. Le bombardement des particules de poussières frappant l'atmosphère et le sol provoquerait un dégagement de chaleur. La terre se trouverait ensevelie sous une couche de poussière si épaisse que sa masse s'en trouverait notablement accrue.

L'arrêt de la rotation diurne pourrait également être causé, et très efficacement, par le passage de la terre à travers un champ magnétique intense, Des tourbillons seraient engendrés à la surface de la terre 3 qui, à leur tour, donneraient naissance à des champs magnétiques, dont l'interaction avec le champ magnétique extérieur ralentirait ou arrêterait la rotation de la terre.

Il est possible de calculer la masse d'un nuage de particules et aussi l'intensité du champ magnétique, qui causeraient l'arrêt de la rotation de la terre, ou son ralentissement, par exemple à la moitié de sa vitesse originelle. Un calcul approximatif montre que si la masse de ce nuage était égale à la masse de la terre, et était formée de particules de fer aimantées presque à saturation, il créerait un champ magnétique assez intense pour arrêter la rotation de la terre, si l'intensité du champ magnétique était de moitié, il réduirait la rotation terrestre de la moitié de sa vitesse originaire. Cependant, si le nuage était chargé d'électricité, l'intensité de son champ magnétique dépendrait de sa charge.

Si, après l'interaction avec le champ magnétique, la terre recouvrait sa rotation, celle-ci n'aurait presque certainement plus la même valeur qu'auparavant... Si le magma intérieur au globe continuait à tourner à une vitesse angulaire différente de celle de l'écorce, il tendrait à imprimer à la terre un lent mouvement de rotation. La théorie des marées attribue l'origine de la rotation de la terre à l'action des météorites.

Si la vitesse angulaire des différentes strates ou segments du globe était bouleversée par une action quelconque, ces strates ou ces segments se déplaceraient, et la friction créerait de la chaleur. Des crevasses et des failles s'ouvriraient, les mers surgiraient de leur lit, des terres seraient submergées, et d'autres s'élèveraient en chaînes de montagnes, et l'on verrait « le centre de la terre tremblant de terreur, et les couches supérieures de la terre se détacher 4 ».

Les actions exercées entre les différentes strates qui en résulteraient pourraient également convertir une partie de l'énergie de rotation non pas en chaleur, mais en d'autres formes d'énergie, y compris l'énergie électrique. Une décharge électrique de grande intensité pourrait passer ainsi entre la terre et le corps extérieur (ou le nuage).

La mécanique céleste n'est donc pas en contradiction avec la théorie des catastrophes cosmiques. Je dois cependant reconnaître qu'en recherchant les causes des bouleversements du passé, et en considérant leurs effets, j'ai conçu quelque scepticisme sur les grandes théories des mouvements célestes, qui ont été formulées alors que la science n'avait pas connaissance des faits historiques décrits ici. Le sujet mérite d'être étudié à fond, et quantitativement. Qu'il me suffise pour l'instant de poser ceci : la mécanique céleste classique, malgré les nombreux calculs qui ont été poussés jusqu'à des décimales éloignées ou vérifiés par les mouvements célestes, n'est acceptable que si le soleil, source de lumière et chaleur, et d'autres radiations dues à la fusion et à la désintégration des noyaux atomiques, est dans l'ensemble un corps électriquememt neutre, et s'il en est de même pour les planètes circulant sur leurs orbites usuelles.

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Les principes fondamentaux de la mécanique céleste, y compris la loi de gravitation, doivent être remis en question, si le soleil possède une charge suffisante pour influencer les orbites des planètes ou des comètes. Dans la mécanique céleste de Newton, fondée sur la théorie de la gravitation, l'électricité et le magnétisme ne jouent aucun rôle.

Quand les physiciens découvrirent que l'atome est constitué comme un système solaire, les atomes d'éléments chimiques variés différant par la masse de leurs soleils (noyaux), et par le nombre de leurs planètes (électrons), cette idée fut accueillie très favorablement. On fit cependant remarquer avec quelque insistance qu'un atome diffère du système solaire parce que ce n'est pas la gravitation qui fait tourner les électrons autour du noyau, mais l'attraction électrique ». (H.-N. Russel.)

Une seconde différence a été notée : un électron dans un atome, en absorbant l'énergie d'un photon (lumière), saute sur une autre orbite, puis sur une autre encore, quand il émet de la lumière, et libère l'énergie d'un photon. Par suite, la comparaison avec le système solaire n'a plus semblé valable. « Nous ne lisons pas dans les journaux du matin que Mars a sauté sur l'orbite de Saturne, ou Saturne sur l'orbite de Mars », a écrit un critique. Evidemment, nous ne lisons pas cela dans les journaux du matin; mais un grand nombre de documents anciens nous ont décrit en détail de semblables événements, et nous avons tenté de reconstituer les faits en comparant d'innombrables documents. Le système solaire est construit exactement comme l'atome. Seulement, en raison de la petitesse de l'atome, les électrons frappés par l'énergie d'un photon sautent d'une orbite à une autre plusieurs fois par seconde; tandis qu'étant donnée l'immensité du système solaire, le même phénomène ne s'y produit qu'une fois par centaines ou milliers d'années. Au milieu du second millénaire avant notre ère, le globe terrestre a subi deux déplacements, et au VIIIe et au VIIe siècle, il en subit trois ou quatre nouveaux; dans la période intermédiaire, Mars, Vénus, et la lune furent également déplacées.

Les contacts entre les corps célestes ne sont pas limités au domaine du système solaire. De temps en temps, on voit dans le ciel une nova, étoile fixe et éclatante qui, jusqu'alors, avait été modeste, sinon invisible. Elle brille pendant des semaines ou des mois, puis son intensité décroît. On explique le phénomène par la collision de deux étoiles (selon la théorie des marées c'est ce qui est arrivé au soleil ou à son hypothétique compagnon). Des comètes venues d'autres systèmes solaires ont également pu naître de ces collisions.

Si les lois qui régissent l'activité atomique s'appliquent aussi au macrocosme, les événements décrits dans ce livre ne constituent point des accidents de la circulation céleste, mais des phénomènes normaux comme la naissance ou la mort. Les décharges électriques entre les planètes ou les photons intenses, émises lors de leurs contacts, ont provoqué des métamorphoses dans le monde organique et inorganique. Cette question fera l'objet d'un autre volume où j'aborderai certains problèmes posés par la géologie, la paléontologie et la théorie de l'évolution.

Après être parvenus à établir quelques faits historiques, et à résoudre un remise nombre, de problèmes, nous nous heurtons maintenant à une multiplicité de problèmes nouveaux, surgis dans presque tous les domaines de la science.

Nous nous sentons contraints de poursuivre sans repos la route où nous nous sommes engagés, le jour où nous nous sommes demandé si le miracle de Josué, l'homme qui arrêta le soleil, était un phénomène naturel. Les cloisons étanches dressées entre les différentes sciences font naître chez chaque savant l'illusion que les spécialités autres que la sienne ne comportent aucun problème, et qu'il peut, en toute confiance, leur faire des emprunts. Ce livre montre évidemment que les problèmes qui appartiennent à un domaine particulier de la science empiètent sur tous les domaines voisins, malgré leur apparente indépendance.

Nous éprouvons pleinement ce sentiment de limitation qui s'empare du savant solitaire, lorsqu'il s'est proposé un dessein aussi ambitieux que cette exploration des fondements du

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monde et de son histoire. Il n'était point exceptionnel, au cours des siècles révolus, que les philosophes entreprissent une synthèse des connaissances humaines dans les différentes branches du savoir. Aujourd'hui que la science ne cesse de se spécialiser davantage, quiconque affronte pareille tâche devrait, en toute humilité, se poser la question qui sert d'épigraphe à ce livre « quota pars tanti operis nobis committitur ».

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Deuxième partie : Mars

Chapitre I

Amos. 1. Raash est traduit par « tremblement de terre », ce qui est incorrect ici. Cf. Jérémie,

X, 22 : « Une grande commotion (raash) vient du Nord. » Dans les Ecritures « tremblement de terre » est rendu par des mots dérivés des racines Raad, hul, regoz, hared, Palez, ruf et raash (commotion).

2. Le mot Rsisim traduit par « lézardes » n'est pas assez fort ; mieux vaut : « il fit s'écrouler les grandes demeures ». Les mots hébreux que la version du roi Jacques traduit par « lézardes » sont Bedek; bkia, peretz, shever.

3. Plusieurs autorités rabbiniques prétendent que le plus ancien des prophètes de cette époque est Osée (Osée, Amos, Isaïe).

4. Les documents qui nous permettent d'identifier Khima avec Saturne et Khésil avec Mars seront Présentés ultérieurement.

5. Breasted, Records of Egypt, IV, Sect. 743. Voir J. Vandier, La famine dans l'Egypte ancienne (1936), p. 123.

6. Breasted, Records of Egypt, IV, Sect. 742-743. 7. II Chroniques, XXVI, 16 et suiv. 8. Ginzberg, Legends, IV, 262. 9. Ibid., VI, 358. 10. Zacharie, XIV, 5.

L'année 747 avant J.-C. 1. F. Cumont, L'Astrologie et la religion chez les Grecs et les Romains (1912), p. 8, 9.

Pour être plus exact, la première éclipse que Ptolémée calcula est du 21 mars 721. 2. T. von Oppolzer, Canon der Finsternisse (1887). 3. K. Marti « Chronology ». Encyclopaedia Biblica, ed. Cheyne et Black. 4. Cf. Amos, I, 1 ; Zacharie, XIV, 5 5. J. de Acosta, The Natural and Moral History of the Indies (d'après la trad. E.

Grimston, 1604; réédité en 1880). 6. Georgius Syncellus (éd. G. Dindorf, 1829), II, 203. 7. Newcomb, The American Nautical Almanac, 1891 (1890). 8. A. Gaubil, Traité de l'astronomie chinoise, vol. III des Observations mathématiques,

astronomiques, géographiques, chronologiques, et physiques... aux Indes et à la

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Chine, éd. E. Souciet (1729-1732) ; J. B. du Halde, A Description of the Empire of China (1741), II, 128-129.

Isaïe. 1. Seder Olam 20. 2. Yad signifie « main » aussi bien que « signe ». 3. Voir « les Terribles ». Infra. 4. Schiaparelli : Astronomy in the Old Testament, p. 43. Oppolzer et Ginzel ont établi

les lois des éclipses de soleil dans l'antiquité, mais en postulant qu'il n'y avait pas de modifications dans les mouvements de la Terre et de la Lune.

5. Le Talmud de Jérusalem, section Berrakhot, 13b. 6. En hébreu, Pah signifie originellement « bitume » ou « poix » comme le montre le

Psaurne XI, 6. 7. Section Sanhedrin 96a ; Pirkei Rabbi Elieser 52 ; Hippolytus sur Isaïe. Cf. Ginzberg,

Legends, VI, n. 367, 81.

Les Tyrans d'Argos. 1. Archiloque, Fragment 74. 2. D'après la trad. de F. J. Miller (1917). 3. Note de F. J. Miller dans sa traduction de Thyeste.

Revenons à Isaïe. 1. Psaumes, XLVI, 5 : « Dieu se tient en son milieu (Jérusalem) ; elle est inébranlable...

Dieu l'aide. »

Maimonide et Spinoza, exégètes. 1. D'après la traduction anglaise de M. Friedlander (1928). 2. Apparemment, Maimonide suit l'opinion de Philon, Philosophe juif du Ier siècle ;

dans son Eternité du monde, il développait l'idée que le monde avait eu une création, mais qu'il était indestructible; il admettait pourtant des altérations naturelles dues aux inondations et aux embrasements périodiques d'origine cosmique, qui exerçaient leurs ravages sur une grande échelle,

3. Nabuchodonosor vécut un siècle après Sennachérib. 4. L'Exégèse de saint Augustin offre un exemple de l'interprétation de pareilles

expressions. Pour lui, « la grêle et les charbons » (Psaume XVIII) représentent les reproches dont les coeurs sont meurtris « comme par la grêle ». « Et il envoya ses flèches et les dispersa » (Psaume XV) : Augustin y voit suggéré le départ des Evangélistes, portés sur des routes droites par les ailes de la Force. Saint Augustin : Exposition on the book of Psalms, éd. Ph. Schafft (1905).

5. Tractatus Theologico-Politicus (1670), chap. VII. Les phrases citées ont été traduites par J. Ratner dans : The Philosophy of Spinoza.

Chapitre 2

L'An 687 avant J.-C. 1. Trente talents d'or d'après les deux sources ; 300 talents d'argent selon le Livre des

Rois ; 800 talents d'argent selon le prisme.

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2. H. Rawlinson fut le premier à distinguer deux campagnes de Sennachérib contre la Palestine. G. Rawlinson pensait de même. Le « cylindre Taylor » couvre une période qui va jusqu'au vingtième jour d'Adar 691 avant J.-C. H. Winckler apporta à l'appui de cette théorie l'argument suivant : Taharqou devint roi d'Ethiopie et d'Egypte après 691. « Ceci peut seulement signifier que Sennachérib fit une nouvelle campagne après la destruction de Babylone (689) dont lui-même ne donne aucun récit. » La date assignée par le récit du Livre des Rois (à la quatorzième année du règne d'Ezéchias) explique pourquoi les premiers commentateurs ne virent point deux campagnes distinctes. La mention de Lachish dans les deux campagnes soulevait une nouvelle difficulté. En faisant ce rapprochement, K. Fullerton remarqua (« The invasion of Sennachérib » dans Biblioteca sacra, 1906) que Richard Cœur de Lion, au cours de deux croisades différentes, se servit de Lachish comme base d'opération. Les historiens modernes sont d'avis que Taharqou ne devint pas roi avant 689. Voir aussi J. V. Prásek « Sanheribs Feldzüge gegen Juda », Mitt d. Vorderasiat. Ges. (1903), et R. Rogers, Cuneiform Parallels to the Old Testament (1926), p. 259.

3. H. R. Hall, Ancient History of the Near-East (1913). p. 490. « Le récit juif tel qu'il nous est présenté semble être confondu avec celui de l'invasion précédente en 701. Le récit des Rois appelle Taharqou « roi », alors qu'il ne put l'être avant 689 au plus tôt ». Voir aussi D. D. Luckenbill, The annals of Sennacherib (1924), p. 12.

Ignis e coelo. 1. II Rois, XIX, 7 ; Isaïe, XXXVII, 7. 2. Section Shabbat 113b, Sanhedrin 94a ; Jérôme sur Isaïe X, 16 ; Ginzberg, Legends,

VI, 363. 3. Cf. Winckler, Babylonische Kultur (1902), p. 53 ; Eisler, Weltmantel und

Himmelszelt, II, 451 et suiv. 4. G. A. Wainwright. « Letopolis ». Journal of Egyptian Archeology, XVIII (1932). 5. « Le feu dévorant de Letopolis est une réminiscence de « la flamme poussée par le

vent jusqu'au bout du ciel et de la terre » qui se rattache à <───>, le signe hiéroglyphique primitif qui désignait la foudre et qui est identique à celui de Letopolis ». Ibid.

6. Cf. I Samuel, VI. 4. 7. lsaïe, XXXVIII, 6-8 ; et II Rois, XX, 9 et suiv. 8. Schiaparelli dans son Astronomy in the Old Testament, p. 99, fait allusion à une série

d'écrits pleins « d'idées curieuses ou excentriques» au sujet des « degrés d'Achaz ». et renvoie à Winer, Bibl. Realwörterbuch I, 498-499 ou « sont passés en revue des aphorismes très remarquables ». « Aucune des explications ne paraît fondée, écrit Winer. Et il ne sera jamais possible d'établir les faits qui servirent de fondement à ce récit. »

9. Voir le Talmud de Babylone, Sanhedrin 96a ; Pirkei Elieser 52. D'autres sources sont citées par Ginzberg, Legends, VI, 367. M. Gaster, The Exempla of the Rabbis, 1924, dans le chapitre « Merodach and the sun », cite des références du Talmud à ce phénomène.

10. Seder Olam 23. Cf. Eusèbe et Jérôme sur Isaïe, XXXIV, I. Voir Ginzberg, Legends, VI, 366.

Le 23 mars.

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1. Le Talmud de Jérusalem, section Pesahim ; Seder Olam 23 ; Tosefta Targum, II Rois, XIX, 35-37 ; Midrash Rabba, III, 221 (éd. anglaise de H. Freedman et M. Simon).

2. Depuis 2000 ans, la fête de la Pâque, qui se détermine d'après le calendrier lunaire, est célébrée entre le milieu de mars et la fin d'avril.

3. Paris, 1846. 4. Abel Rémusat, Catalogue des bolides et des aérolithes observés à la Chine, et dans

les pays voisins (1819) : « On a beaucoup discuté sur ce texte de Confucius » (p. 7.) 5. The Chinese Classics (trad. et annot. par J. Legge, éd. Hong Hong). III, Pt. I, 125. 6. Joël II, 10 ; III, 15. 7. Huai-nan-tae VI. IV voir Forke, The World Conception of the Chinese, p. 86. 8. Moyriac de Mailla (1679-1748). Histoire générale de la Chine : Tong-Kien-Kang-

Mou (1877), vol. I, affirme que la dynastie Han prit le pouvoir dans le dernier quart du Ve siècle ; Forke, The World Conception of the Chinese, pense que la guerre du duc de Lu-yang contre Han se déroula au VIIe siècle. Mais ces dates reposent sur des calculs astronomiques dont l'exactitude est suspecte.

9. Lu-Heng II, 176. Voir Forke, The World Conception of the Chinese, p. 87. 10. Apollodore, La Bibliothèque, épitome II. 11. Ovide, L'art d'aimer, 328 et suiv. (trad. J. H. Mosley, 1929 ». 12. Ovide, Les Tristes, II, 391. 13. Dans « l'Est et l'Ouest », nous avons parlé plus en détail du soleil qui se couche à

l'Est au lieu de l'Ouest, et cité plusieurs auteurs grecs. Nous y reviendrons en examinant les traditions orales des peuples primitifs dans un chapitre sur le folklore.

14. Publié par Ronald Strath. Je n'ai pu retrouver cette publication. Dans Moons Myths and Man (1938), p. 258, Bellamy y fit allusion. J'ai trouvé une autre allusion à l'ouvrage de Strath dans Jean Gattefossé et Claudius Roux, Bibliographie de l'Atlantide et des questions connexes (Lyon, 1926), sous le n°, 1184, mais ces auteurs n'ont pu retrouver la publication. Cf. P. Jensen, Kosmologie, III. R561, 5a : « Une grande étoile tomba. » Les Babyloniens appelaient Jupiter « La grande étoile ». Et Jensen demandait quelle grandeur avait cette étoile.

15. Section Sanhedrin 96a.

Le culte de Mars. 1. Outre Arès, Hercule représente aussi la planète Mars. Eratosthène Eratosthenis

catasterismorum reliquiœ, éd. C. Robert, 1878) : « Tertia est stella Martis quam alii Herculis dixerunt. » (Mars est la troisième étoile, d'autres disent que c'est Hercule). De même, Macrobe (Saturnalia, III. 12, 5-6), qui s'appuie sur Varron.

2. Polybe fixe la fondation de Rome à la seconde année de la septième olympiade (751 av. J.-C.) ; Verrius Flaccus à la quatrième année de la sixième olympiade (752); Varron. à la troisième année de la sixième olympiade (753). Censorinus adopta la date de Varron.

3. Plutarque, Vies « La vie de Romulus » (trad. B. Perrin, 19I4). 4. Cf. F. K. Ginzel, Spezieller Kanon der Sonnen und Mondfinsternisse (1899). et T.

von Oppolzer, Kanon der Finsternisse (1887). 5. Voir Ginzberg, Legends, VI, 280. 6. Plutarque, Vies « La vie de Romulus. » 7. Ovide, Les Fastes (trad. Frazer, 1931), II vers 489 et suiv. 8. Saint Augustin : La Cité de Dieu, liv. XVIII, chap. XXVII. 9. Cité dans W. W. Fowler « Mars », Encyclopoedia Britannica, 14e éd.

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10. Roscher, « Mars », dans Roscher's Lexikon der griech. und röm Mythologie. 11. Ibid., Col. 2402.

Mars dévie l'axe terrestre. 1. J. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal (1904), p. 3. 2. II Rois, XVII, 30. 3. Luckenbill, Records of Assyria, II, Sect. 508. 4. Ibid., Sect. 922. 5. Jérémie, XXXIX, 3. 6. Je discuterai dans Ages in Chaos de l'ordre chronologique des rois dans l'Empire

néo-babylonien. 7. Schaumberger, dans Kugler, Sternkunde und Sterndienst in Babel, 3e supp., p. 307. 8. Bezold, dans Boll's Sternglaube und Sterndeutung, p. 6. 9. Thibaut, « Astronomie, Astrologie und Mathematik », Grundriss der indoarischen

Philologie und Alterthumskunde, III (1899). 10. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 9, 19 (« Zauberspruch mit

Handerhebung an den Mars-Stern »). 11. Schaumberger dans Kugler's Sternkunde, p. 304 ; Böllenrücher, Gebete und Hymnen

an Nergal, pp. 21 et suiv. 12. Langdon, Sumerian and Babylonian Psalms (1909), p. 85. 13. Apuleius, Tractate of the World ; documents dans Chwolson, Die Ssabier und

Ssabismus, II, 188. 14. Rufus et Hsing-chih-tien, The Soochow Astronomical Chart. 15. Luckenbill, Records of Assyria, II, Sect. 121. 16. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 9. 17. Langdon, Sumerian and Babylonian Psalms, p. 79.

Chapitre 3

Quand l'Iliade fut-elle composée ? 1. The Fragments of Empedocles (trad. W. E. Leonard, 1908). p. 30. 2. Voir R. Carpenter. « The Antiquity of the Greek Alphabet » et B.Ullman, « How Old

is the Greek Alphabet ? » dans American Journal of Archaeology, XXXVII (1933) et XXXVIII (1934). respectivement.

3. Quand il découvrit les vestiges les plus anciens, Schliemann identifia l'avant-dernière des villes superposées avec celle de l'Ilium de l'Iliade, mais plus tard, les archéologues changèrent d'opinion et déclarèrent que les ruines de la sixième ville étaient celles de la Troie homérique.

4. G. Karo, « Homer » dans Ebert's Reallexikon der Vorgeschichte, vol. V. 5. L'Iliade liv. V (d'après la trad. édit. Flammarion). 6. The Odyssey of Homer with the Hymns (trad. Buckley) p. 399. La traduction de H.

Evelyn-White (vol. d'Hésiode dans la Loeb Classical Library) est : « Qui fait tourner la sphère de feu parmi les planètes en leur septuple révolution à travers les airs, où tes coursiers de feu t'emportent toujours au-dessus du troisième firmament céleste. » Allen, Holliday et Sikes, The Homeric Hymns (1936) p. 385, considèrent l'hymne à Arès comme post-homérique.

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7. Ces vues divergentes sont présentées par L. Preller (Griechische Mythologie [18941, G. F. Lauer (System der griechischen Mythologie [1853], p. 224), F.G. Welcker(Griechische Gotterlehre, I [1857],415). Et H.W.Stoll (Die ursprüngliche Bedeutung des Ares (1855).

8. Lucien. Astrologie, Sect. 22. 9. Dans la même phrase, Lucien identifie Vénus avec l'Aphrodite de 1'Iliade. 10. Heracliti questiones Homericae (éd. Teubner 1910). Cf F. Boll, Sternglaube und

Sterndienst (éd. W. Gundel, 1926), p. 201.

Huitzilopochtli. 1. J. G. Müller, Der mexikanische Nationalgott Huitzilopochtli (1847). 2. Sahagun, A History of Ancient Mexico (trad. F. R. Bandelier, 1932), p. 25. 3. H. H. Bancroft, The Native Races of the Pacific States (1874-1876), III, 302. 4. Ibid., p. 301. 5. Sahagun, Historia general de las cosas de la Nueva España, III, chap. I. Sec. 2.

Tao. 1. James Legge (éd.), The Chinese Classics, III, Pt. I, 125. 2. L. Wieger, Textes historiques (2e éd., 1922-1923). I, 50. 3. Eratosthène, éd. Robert, p. 195. 4. The Soochow Astronomical Chart (trad. et éd. Rufus et Hsing-chin-tien). 5. J. C. Ferguson, Chinese Mythology (1928). p. 29. 6. Wen-Tsé dans Textes Taoïstes, trad. C. de Harlez (1891). 7. Hoei-nan-tsé dans Textes Taoïstes. 8. L. Hodous, « Taoism », Encyclopadia Britannica, 14e éd.

Yuddha. 1. Surya-Siddhanta, chap. VII (trad. Burgess). 2. La formule suivante est une illustration de la méthode du Surya. « Multipliez la

circonférence de la terre par la déclinaison du soleil en degrés, et divisez par le nombre de degrés du cercle; le résultat en yojanas donne la distance depuis le lieu sans latitude au lieu où le soleil passe au-dessus de nous.» Chap. XII.

3. Tycho Brahé, postérieurement à Copernic, admettait encore cette conception. 4. Surya-Siddhanta, note p. 13. 5. Ibid., p. 248. 6. Bentley, A Historical View of the Hindu Astronomy (1825), p. 75 : « Les périodes

elles-mêmes étaient nommées Yugas, ou conjonctions ».

Le Bundehesh. 1. The Bundahis, Pahlati Texts (trad. West). 2. Die Planeten rannten, Verwirrung stiftend, gegen den Himmel an.» J. HerteI. « Der

Planet Venus in Avesta », Berichte der Sächsischen Akademie der Wissenschaften, Phil, hist. Klasse, LXXXVII (1935).

3. Le Bundehesh, chap. III, sect. 19-25. 4. Voir plus loin le Loup Fenris, note 5. 5. Olrik, Ragnarok, p. 339. 6. Le Bundehesh, chap. V. Sect. I.

Lucifer précipité.

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1. L'excentricité de l'orbite de Vénus est 0,007. 2. Inclinaison sur le plan de l'écliptique 3°4' (Duncan, 1945).

Chapitre 4

Le Dieu-glaive. 1. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 19. Bezold dans Boll, Sternglaube

und Sterndeutung, p. 13 : « Gebete der Handerhebung : von denen eine Anzahl an Planetengötter andere dagegen ausdrücklich an die Gestirne selbst (Mars) gerichtet sind » (des prières avec élévation des mains ; certaines sont adressées aux dieux planétaires, d'autres, très nettement, aux planètes elles-mêmes).

2. I Chroniques, XXI, 16. 3. Isaïe, XXXI, 8-9. 4. Isaïe, XXXIV, 4-5. 5. Gundel, « Kometen», dans Pauly-Wissowa, Real-Encyclopädie, XI, col. 1177, avec

référence à Cat. cod. astr., VIII, 3, p. 175. 6. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 8. 7. Hérodote Iv. 62. 8. Solinus Polyhistor (trad. A. Golding, 1587), chap. XXIII. 9. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 36.

Le Loup Fenris. 1. Kugler, Babylonische Zeitordnung, vol. II de Sternkunde und Sterndienst in Babel,

91. 2. Sahagun, Historia general de las cosas de Nueva España, vol. I. 3. Bezold. dans Boll, Sternglaube und Sterndeutung, p. 9. 4. Breasted, Records of Egypt, III, Sect. 144. 5. Ceux qui interprétèrent cette carte supposèrent que l'étoile Loup représentait Sirius. 6. Cf. Virgile, Enéide IV, 566 ; Tite-Live Histoire de Rome, liv. XXII, I, 12. Sur la voie

Appienne, une statue de Mars se dressait entre deux statues de loup. « Parmi les animaux qui représentent Mars, le loup tient la première place... Le loup était associé si intimement à Mars que Lupus Martius, ou Martialis devint son appellation ordinaire. Quant à la signification du symbole, il est difficile de la saisir. » Roscher dans Lexikon d. Griech, und röm, Myth. s. v. de Roscher. « Mars ». Col. 2430.

7. J. Machal, Slavic Mythology (1918), p. 229. 8. L. Frobenius, Das Zeitalter des Sonnengottes (1904,), I. 198. 9. The Poetic Edda : Völuspa (trad. Bellows. 1923).

Le temps du Glaive et le temps du Loup. 1. Breasted. Records of Egypt, IV, Sect. 764. 2. Isaïe, XIX, 2. 3. Gardiner, « New Literary Works frorn Ancient Egypt », Journal of Egyptian

Archaeology, I (1914). 4. The Poetic Edda : Völuspa (trad. Bellows). 5. Luckenbill, Records of Assyria, II, Sect. 250. 6. Ginzberg, Legends, IV, 267, n. 53. 7. Luckenbill. Records of Assyria, II. Sec. 121.

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8. D'après la trad. de A. W. Ryder (1912). 9. Kugler, Babylonische Zeitordnung, p. 91. 10. F. Arago, Astronomie populaire, IV, 204. 11. Isaïe, XXXVII, 9. 12. Sidney Smith, Babylonian Historical Texts (1924), p. 5. 13. Manuscrit Ramirez (XVIe siècle) trad. de D. Charnay, Histoire de l'origine des

Indiens qui habitent la Nouvelle Espagne selon leurs traditions (1903). p. 9.

Synodos ou rencontres et collisions planétaires. 1. La même idée, mais qui attribue les causes des catastrophes à la variation des

positions des étoiles, se trouve dans Nigidius, cité par Lucan et dans Olympiodore, Commentaire sur Aristote. Voir Boll, Sternglaube, p. 201, et idem, Sphaera, p. 362, Gennadius (George Scholarius, Patriarche de Constantinople), Dialogus Christiani cum Judaeo (1464). Une édition française des ouvrages de Gennadius a été imprimée en 1930.

2. Diodore de Sicile « Bibliothèque historique ». II, 31 (d'après la trad. Oldfather). 3. Ibid. 4. Aristarque de Samos reconnaissait que la Terre et les autres planètes tournent autour

du Soleil. 5. Sénèque, De Cometis. 6. Aristote, Météorologique, I, 6. 7. Diogène de Laërte, Vies « Vie d'Anaxagore ». 8. Sénèque, De Cometis. 9. Platon, Timée, 22C, 39D. 10. Boll, Sternglaube, p. 93 et 201. Le terme grec « implique une rencontre dans le

même plan horizontal et vertical et une collision. Les planètes se précipitent les unes sur les autres, et causent la destruction du monde ». (« Ein Zusammentreffen und auch ein Zusammenstossen auf derselben Ebene, also nach Breite und Höhe stossen die Planeten ineinander und lösen dadurch das Weltende aus. »)

11. Pline, Histoire naturelle, II, 45. 12. Origène, Réfutation de Celse, liv. IV, chap. XII, dans vol. IV des Pères anté-nicéens

(éd. A. Robert et J. Donaldson, 1890). 13. Pline, Histoire naturelle, II, 18. 14. Sénèque, Thyeste. 15. Pline, II, 18. 16. Ibid. 17. Ibid., II. 53.

L'Assaillant des Murailles. 1. Hésiode, Théogonie, 935 et suiv. Purandara, ou « le destructeur de villes » est le

nom communément attribué à Indra. 2. R. C. Thompson (éd.), The Reports of the Magicians and Astrologers of Nineveh and

Babylon in the British Museum (1900), vol. II, nos 263, 265. 3. Voir Kugler. Babylonische Zeilordnung, p. 116. 4. Ibid. 5. Langdon. Sumerian and Babylonian Psalms, p. 99. 6. Voir « Mars dévie l'axe terrestre », note 6. 7. R. Koldeway, The Excavations at Babylon (1914) ; idem, Das Wieder enistandene

Babylon (4e éd., 1925).

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8. Koldeway, Die Königsburgen von Babylon (1931-1939), vol. I et II. Cf. Pline, II, 84 : « La partie de la cité construite en matériaux solides étant spécialement exposée à des effondrements de cette nature... des murs en brique d'argile sont moins endommagés par les secousses. »

9. Kugler, Babylonische Zeitordnung, p. 117. 10. Josèphe, Antiquités, IX, X, 4. Voir Ginzberg, Legends, VI, 358. 11. Isaïe, XXII, 9. 12. II Rois, XII, 5 ; XXII, 5 ; II Chroniques, XXXII, 5 ; Amos, VI, II ; IX, II. 13. A. Lods, Israel : From Its Beginnings to the Middle of the Eighth Century, trad. S. H.

Hooke, 1932), p. 31. 14. C. W. Blegen « Excavation at Troy », American Journal of Archaeology, XXXIX

(1935). 17. 15. Voir la discussion du problème de l'origine des montagnes dans le chapitre « La

Planète Terre ». 16. Cf. Les publications scientifiques d'A. Perrey. 17. Pline, II, 86. 18. Pline, II, 81.

Chapitre .5

Les coursiers de Mars. 1. Voir « La Comète Typhon ». 2. Travels into Several Remote Nations of the World, de Lemuel Gulliver (Londres,

1726), II, 43. 3. Les diamètres de ces satellites ne sont pas exactement connus (Russell, Dugan et

Stewart, 1945). 4. La distance de Phobos à la surface de Mars est inférieure au diamètre de la planète

(et la distance au centre est inférieure à un diamètre et demi). 5. Leverrier est mort un mois après qu'Asaph Hall eut fait sa découverte. 6. Iliade, XV, 119 ; Géorgiques III, 91. Les chevaux étaient sacrifiés à Mars (Plutarque,

Les Questions romaines, XCVII), soit parce qu'on les utilisait dans la guerre, soit parce que les satellites de Mars ressemblaient à des chevaux attelés à un char.

7. G. A. Atwater suggère que c'était peut-être là des effets électriques. 8. Asaph Hall, The Satellites of Mars (1878) : « Des différents noms qui ont été

proposés pour ces satellites, j'ai choisi ceux que me suggérait Mr. Madan, d'Eton, Angleterre ». Deïrnos et Phobos.

Les Terribles. 1. Entre Mars et Jupiter, se trouvent plus de mille astéroïdes dont on a pensé qu'ils

furent jadis une planète. G. Atwater se demande s'ils ne sont pas le résultat de la rencontre entre Mars et Vénus.

2. Böllenrücher, Gebete und Hymnen an Nergal, p. 29. 3. On a découvert des fragments de ce poème à el-Amarna, vraisemblablement. Il est

très probable que les Ethiopiens qui triomphèrent de l'Egypte au VIIIe siècle, occupèrent Akhet-Aten (Tell-el-Amarna), et qu'une partie des archives y fut déposée par eux.

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4. J. Geffcken « Eumenides, Erinyes » dans Encyclopaedia of Religion and Ethics, éd. J. Hastings, vol. V.

5. Euripide, Iphigénie en Tauride, V, 968 ; Eschyle : Les Euménides. 6. Vedic Hymns (trad. F. Max Müller. 1891). 7. Ibid., Mandala, I. Hymne 171. 8. Ibid., Hymne 172. 9. Ibid., Hymne 85. 10. Ibid., Hymne 172. 11. Ibid., Hymne 48. 12. Ibid., Hymne 38. 13. Ibid., Mandala V, Hymne 53. 14. Ibid., Mandala I, Hymne 85. 15. Ibid., Hymnes 39, 172. 16. Ibid., Hymnes 86, 172. 17. Ibid., Hymnes 172, 19, 36 ; Mandala V, Hymne 53. 18. Ibid., Mandala 1, Hymne 37. 19. Ibid., Hymnes 168, 64. 20. Ibid., Hymnes 168, 167, 106, 38, 86. 21. Isaïe, V, 26 et suiv. 22. Mandala VIII, Hymne 20. 23. Mandala X, Hymne 77. 24. Ibid., Hymne 78. 25. Isaïe, XXIX, 5. 26. Hymnes védiques, Mandala V. Hymne 54. 27. Isaïe, XXV, 5. 28. « Pourquoi refuser de reconnaître en Mars, Martis, une forme parallèle de Marouts ?

Je ne prétends pas que les deux mots soient identiques, j'affirme seulement que la racine est commune... S'il subsistait un doute sur l'identité d'origine de Marout et de Mars, il serait dissipé par le nom ombrien Cerfo Martio qui, comme Grassmann (Zeitschrift, XVI, 190, etc. de Kuhn) l'a montré, correspond exactement à l'expression sardha-s maruta-s, l'armée des marouts. Des coïncidences si parfaites ne sauraient être accidentelles.» F. Max Müller, Vedic Hymns (1891), I, XXV.

29. Ibid., p. 26. 30. Cf. Pauly-Wissowa, Real-Encyclopädie, vol. XI, col. 1156.

Les pierres tombées des planètes. 1. Aristote, Météorologique, I, 7. 2. Frazer, Aftermath. (supplément à The Golden Bough) (1936), p. 312. Deux villes

grecques, Bura et Heliké, furent détruites par un tremblement de terre et un raz de marée, ensevelies sous la terre et la mer en 373 avant J.-C., alors qu'une comète brillait au ciel.

3. Selon Mahomet, on inscrivait sur les pierres qui s'abattirent sur les tribus coupables le nom de ceux qu'elles devaient tuer.

4. G. A. Wainwright, « The Coming of Iron », Antiquity, X (1936), 6. 5. Olivier, Meteors, p. 3. 6. Wainwright, Journal of Egyptian Archaeology, XIX (1933), 49-52. 7. Cf. Bancroft, The Native Races, III, 302.

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8. R. Cumberland, Sanchoniatho's Phoenician History (1720). p. 36. Lucien dit qu'Astarté était l'étoile déchue de Sanchoniathon. Ibid., p. 321. Voir aussi F. Movers, Die Phönizier, I. 639.

9. Frazer, The Golden Bough, V, 258 et suiv. Voir « Le culte de l'Étoile du Matin », note 18.

10. I Chroniques, 21 ; II Samuel, 24. Voir sect. Yoma V, 2 ; cf. sect. Sota 48b ; et Ginzberg, Legends, V, 15,

11. Olivier. Meteors, p. 3. 12. Abel Rémusat, Catalogue des bolides et des aérolithes observés à la Chine, p. 7. 13. Wellhausen, Reste arabischen Heidentums, p. 34. 14. F. Lenormant, Lettres assyriologiques (1871-1872). II, 140. 15. Ibid.

Les archanges. 1. II Rois. XIX, 7-35 ; Isaïe XXXVII, 7, XXXVII, 36. 2. Talmud de Babylone sect. Sanhedrin, 95b ; Tosefta Targum Isaiah, X, 32 ; Aggadat

Shir-5, 39 et 8, 45 ; Jérôme sur Isaïe XXX, 2. 3. J Trachtenberg, Jewish Magic and Superstition (1939), p. 98. 4. Ibid., p. 250. 5. Ibid., p. 251. 6. Ginzberg, Legends, VI, 128 et 280, d'après sect. Shabbat 56b et autres sources ; M.

Grünbaum, Gesammelte Aufsätze sur Sprach und Sagenkunde (1901), p. 169 et suiv. 7. Tite-Live, Histoire de Rome, I, Préface ; Macrobe, Saturnalia, XII. 8. Origène, De principiis, I, 8. « Une mission particulière est assignée à chaque ange...

à Gabriel, la conduite de la guerre. » Cf section Shahbat, 24. 9. Jérôme sur Isaïe, X, 3 ; Aggadat Shir 5, 39 ; Ginzberg, Legends, VI, 363. Cf. V.

Vikentiev « Le Dieu Hemen », Recueil de Travaux (1930), Faculté des Lettres, Université égyptienne, Le Caire.

10. Pesikta Raba 20, 38b. 11. Midrash Shemot Raba (éd. Vilna, 1887), XVIII, 5 ; Tosefta Targum II Rois, XIX, 35. 12. Pirkei Rabbi Elieser, 42. 13. Des documents nombreux sur l'archange Michel se trouvent dans Ginzberg, Legends,

Index, à « Michel ». 14. Exode; XIV, 10. 15. Ginzberg, Legends, II, 307. 16. Voir « Le culte de Mars » note I. Plutarque a écrit dans La fortune des Romains,

chap. XII : « Il est affirmé qu'Hercule fut conçu durant une longue nuit. le jour ayant été reculé, et retardé contre l'ordre naturel, et le soleil immobilisé. »

Le culte des Planètes en Judée au VIIe siècle. 1. E. Sachau, Aramäische Papyrus und Ostraka aus einer jüdischen Militärkolonie zu

Elephantine (1911), p. 25. 2. S. A. B. Mercer, The Supremacy of Israel (1945).

Chapitre 6

Une amnésie collective.

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1. Cf. Ginzberg « Mabul shel esh » dans Ha-goren, VIII, 35-51. 2. Platon, Timée, 23C. 3. Philon, Moïse. II.

Le folklore 1. Dans l'histoire de Phaéton, Ovide indique clairement que le Soleil et Zeus sont deux

divinités séparées. 2. Dans un autre ouvrage, j'ai l'intention de rechercher le prototype historique de la

légende d'Oedipe roi. 3. L. R. Farnell « The value and the methods of mythological study ». Proceedings of

the British Academy. 1919-1920, P. 47. 4. Les Questions Naturelles, VII.

L'âme des peuples et les idées innées. 1. Lewis Spence, The History of Atlantis (1930), p. 224. 2. H. F. Osborn, The Origin and Evolution of Life (1918), p. 24.

Les spectacles du ciel. 1. Sahagun, dans le quatrième chapitre du septième livre de son ouvrage historique,

déclare que les mexicains appelaient la constellation Scorpion (Scorpio) de ce même nom.

2. Seler, Ges. Abhand. zur Amer. Sprach und Alterthumskunde, II (1903), 622. Son hypothèse, en désaccord avec l'affirmation de Sahagun. est que le Scorpion des Anciens était situé plus au Sud. Il est vrai cependant qu'avec le déplacement des pôles, les étoiles prirent des positions nouvelles.

3. Kugler. Babylonische Zeitordnung, p. 89.

Subjectivité de l'interprétation des événements : leur authenticité. 1. « De tous les mythes de la Polynésie, aucun sans doute n'a été aussi fréquemment

cité que ceux qui relatent les exploits et les aventures du demi-dieu Maouï. Le cycle Maouï est l'un des plus importants pour l'étude de cette région. » Dixon, Oceanic Mythology, p. 41.

2. Ibid., p. 42. 3. Hoffman, Report of the Bureau of American Ethnology, XIV, 181, reproduit par S.

Thompson, Tales of the North American Indians (1929). 4. Ma'nido est « un esprit ou une créature spirituelle; toute personne ou sujet doué d'un

pouvoir spirituel ». 5. R. H. Lowie, « Shoshonean Tales », Journal of American Folklore, XXXVII (1924).

61 et suiv.

Chapitre 7

L'arrachement des pôles. 1. Voir chapitre « L'Est et l'Ouest ». 2. A. Pogo « Astronomie égyptienne du tombeau de Senmout », chronique d'Égypte,

1931. 3. J. Bentley, A Historical View of the Hindu Astronomy (1825), p. 76.

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4. Thibaut, « Astronomie, Astrologie und Mathematik ». p. 6. 5. G. A. Wainwright, « Orion and the Great Star », Journal of Egyptian Archaeology,

XXII (1936). 6. Wainwright « Letopolis ». Journal of Egyptian Archaeology, XVIII (1932). 7. Wainwright Studies présenté à F. L. Griffith, pp. 379-380. 8. Cf. H. Jeffreys, « Earth », Encyclopaedia Britannica (14e éd,). 9. Wainwright, Journal of Egyptian Archaeology, XVIII, p. 164. 10. J. Hertel. Die Himmelstore im Veda und im Awesta (1924), p. 28. 11. Kunike, « Sternmythologie ». Welt und Mensch, IX-X ; A. B. Keith, Indian

Mythology (1917). p. 165. 12. The Pawnee Mythology (recueillie par G. A. Dorsey, 1906). part. I, p. 135. 13. J. N. Lockyer, The Dawn of Astronomy (1894). p. 62 ; cf. M. Cantor, Vorlesungen

über Geschichte der Mathematik (2e éd., 1894). P. 91. Laplace a tenté d'expliquer ces chiffres.

14. Kugler, Sternkunde und Sterndienst in Babel, I, 226-227. 15. Un gnomon, haut de 277 pieds, construit par Toscanelli en 1468, pendant la

Renaissance, pour la cathédrale de Florence, indique midi à une demi-seconde près. R. Wolf, Handbuch der Astronomie (189O-1893) n. 164.

16. D'après la traduction de Whiston dans New Theory of the Earth. La version moderne de L. D. Hicks est très différente.

17. Plutarque, « Quelle est la cause de l'inclinaison du Monde ? » dans le volume III de sa Morale (d'après la traduction revue par W. Goodwin).

Temples et obélisques. 1. Plutarque, Vies « Vie de Numa » Les temples font face à l'Est et au Soleil». 2. Talmud de Jérusalem, section Erubin V, 22c. 3. J. Morgenstern « The Book of the Covenant -, Hebrew Union College Annual, V.

1927, p. 45. 4. Morgenstern « The Gates Righteousness ». Hebrew Union College Annual, VII,

1929. 5. Winckler, Keilinschriftliche Bibliothek, III, Part. 2 (1890), p. 73. 6. Lockyer, The Dawn of Astronomy. 7. Ibid., p. 8. 8. H. Nissen, Orientation, Studien zur Geschichte der Religion (1906) : E. Pfeiffer,

Gestime und Wetter im griechischen Volksglauben (1914), p. 7. Voir aussi F. G. Penrose, Philosophical Transactions of the Royal Society of London, CLXXXIV, 1893, 805-834, et CXC, 1897, 43-65.

9. R. Engelbach, The Problem of the Obelisks (1923), p. 18. 10. I Rois, VII, 15. 11. Markharn, The Incas of Peru, pp. 115, 116. 12. Pline, Histoire naturelle, XXXVI, 15 (d'après la traduction Bostock et Riley).

L'Horloge solaire. 1. Le jour égyptien était divisé en heures, qui représentaient des parties égales du temps

compris entre le lever et le coucher du soleil, indépendamment de la longueur du jour.

2. L. Borchardt, « Altägyptische Sonnenuhren », Zeitschrift für ägyptische Sprache und Altertumskunde, XLVIII (1911), 14.

3. Ibid., p. 15.

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4. J. MacNaughton, « The Use of the Shadow Clock of Seti I ». Journal of the British Astronomical Association, LIV, No 7 (Sept. 1944).

5. Ibid.

L'Horloge à eau. 1. L. Borchardt, Die altägyptische Zeitrechnung (1920). pp. 6-25.

Un hémisphère se déplace vers le Sud. 1. G. V. Schiaparelli, De la rotation de la terre sous l'influence des actions géologiques

(St-Petersbourg, 1889), p. 81. 2. En direction de la Queen Mary Land, sur le continent antarctique. 3. Les auteurs grecs ont signalé que l'ambroisie était efficace pour embaumer les morts

: on versait de l'ambroisie liquide dans les narines du cadavre, tel était aussi le procédé des Babyloniens, lors de la même opération, mais ils utilisaient le miel.

4. Par F. G. Rainey et ses collègues pour le compte de l'American Museum of Natural History de New-York ; les résultats de leur expédition ont paru dans les publications anthropologiques du musée.

5. Description de Evelyn Stefansson dans Here Is Alaska (1943).p.138 et suiv. 6. F. G. Rainey, « Archaeology in Central Alaska », Anthropological Papers of the

Museum of Natural History, XXXV, Pt. IV (1939), 391 et suiv. 7. Ibid., p. 393. 8. Découverte de P. Maas. 9. Par J. L. Giddings.

Chapitre 8

L'année de 360 jours. 1. W. Whiston dans New Theory of the Earth (1696) a cru pouvoir affirmer qu'avant le

Déluge, l'année se composait de 360 jours. Il trouva des allusions à une année de 360 jours dans les auteurs classiques; mais comme il ne reconnaissait qu'une seule grande catastrophe, le Déluge, il prétendit que ces allusions se rapportaient à l'ère antédiluvienne.

2. Thibaut « Astronomie, Astrologie und Mathematik », Grundriss der indo-arischen Philologie und Alterthumkunde (1899), III, 7.

3. Ibid. 4. Ibid. 5. Ibid. 6. F. K. Ginzel « Chronologie ». Encycklopädie der mathematischen Wissenschaften

(1904-1935), Vol. VI. 7. The Aryabhatiya of Aryabhatta, traduction de W. E. Clark (1930). d'un ancien

ouvrage hindou de mathématiques et d'astronomie, chap. III, « Kalabriya ». ou le calcul du temps, p. 51.

8. Surya-siddhanta : A Text Book of Hindu Astronomy (trad. Ebenezer-Burgess, 1860). 9. Ibid., commenté par Burgess, note p. 7. 10. « Douze mois... de trente jours chacun... et les cinq jours gâthâs à la fin de l'année. »

« The Book of Denkart », dans H. S. Nyberg, Texte zum mazdayasnischen Kalender (Uppsala, 1934), p. 9.

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11. Bundahis (trad. West), chap. V. 12. Note de West dans sa traduction du Bundehesh, p. 24. 13. A. Jeremias, Das Alter der babylonischen Astronomie (2e éd., 1909), p. 58 et suiv. 14. The Fragments of the Persika of Ktesias (Ctesiae Persica), éd. J. Gilmore (1888), p.

38 ; Diodore, II, 7. 15. W. Gundel. Dekane und Dekansternbilder (1936), p. 253. 16. Cantor, Vorlesungen über Geschichte der Mathematik, I, 92. 17. « Sin » dans Roscher, Lexikon der griech. und röm. Mythologie, col. 892. 18. Georgius Syncellus, éd. Jacob Goar (Paris, 1652), pp. 17, 32. 19. R. C. Thompson, The Reports of the Magicians and Astrologers of Nineveh and

Babylon in the British Museum, II (1900), XIX. 20. Ibid., p. 20. 21. Langdon et Fotheringham, The Venus Tablets of Ammizaduga, p. 45-46 ; C. H. W.

Johns, Assyrian Deeds and Documents, IV (1923), 333 ; J. Kohler et A. Ungnad, Assyrische Rechtsurkunden (1913), 258, 3 ; 263, 5 ; 649, 5.

22. Genèse VII, II et 24 ; VIII, 4. 23. Selon une autre variante de l'histoire du Déluge (Genèse VII, 17 ; VIII,6), le Déluge

aurait duré quarante jours au lieu de cent cinquante. 24. Samuel, I, XX, 5-6 ; Rois II, IV, 23 ; Amos, VIII, 5 ; Isaïe, I, 13 ; Osée, II, II ;

Ezéchiel, XLVI, I, 3. Dans la Bible, le mois s'appelle Hodesh, ou « la nouvelle (lune) », ce qui confirme que la lunaison était de trente jours.

25. J. Wellhausen, Prolegomena to the History of Israel (1885), p. 113. 26. Cf. G. Legge dans Recueil de travaux relatifs à la Philologie et à l'archéologie

égyptiennes et assyriennes (La Mission française du Caire, 1909). 27. S. Sharpe, The Decret of Canopus (1870). 28. E. Meyer, « Aegyptische Chronologie, » Philos. und hist. Abhandlungen, der Preuss.

Akademie der Wissenschaften (1904). p. 8. 29. Ibid. 30. Hérodote, History, liv. II, 4 (trad. A. D. Godley). 31. Voir le volume de Manéthon dans la Loeb Classical Library. 32. Georgii Monachi Chronographia (éd. P. Jacobi Goar, 1652), p. 123. 33. Au temps du roi hyksos Aset. Mais voir le chapitre « Des changements de l'heure et

des saisons. » 34. D'après la traduction de F. C. Babbit. 35. Voir Diogène de Laërte, Vie des philosophes illustres, « Vie de Thalès ». 36. Proclus, Commentaire sur le Timée, Diogène de Laërte, Vies, « Vie de Solon » ;

Plutarque, Vies, « Vie de Solon ». 37. Aristote, Historia animalium, VI, 20 ; Pline, Histoire naturelle, XXXIV, 12 (trad.

Bostock et Riley). 38. Plutarque : Vies « La vie de Numa », XVIII. 39. Cf. Geminus, Elementa astronomiae VIII ; cf. aussi Cléomède, De motu circulari

corporum celestium, XI, 4. 40. J. de Acosta, The Natural and Moral.Histories of the Indies, 1880 (Historia natural Y

moral de las Indias, Séville, 1590). 41. Diego de Landa, Yucatan, p. 59. 42. D. G. Brinton. The Maya Chronicles (1882). 43. Note de Gates au Yucatan de De Landa, p. 59.

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44. R. C. E. Long, « Chronology Maya », Encyclopaedia Britannica (14e éd.). « Ils (les Mayas) n'utilisaient jamais l'année de 365 jours pour calculer la durée entre deux dates.»

45. Markham, The Incas of Peru, p. 117. 46. Joseph Scaliger, Opus de emendatione temporum, p. 225 ; W. Hales, New Analysis of

Chronology (1809-1812), I, 31 ; W. H. Medhurst, notes pp. 405-406 de sa traduction The Shoo King (Shanghai, 1846).

47. H. Murray, J. Crawfurd, etc.... An Historical and Descriptite Account of China (p. 235) ; The Chinese Classics, III, Pt. 2, éd. Legge (Shanghai, 1865), note p. 21. Cf. aussi Cantor, Vorlesungen, p. 92 : « Zuerst wurde von den Astronomen Babylons das Jahr von 360 Tagen erkannt, und die Kreisteilung in 360 Grade sollte den Weg versinnlichen welchen die Sonne bei ihrem vermeintlichen Umlaufe um die Erde jeden Tag zurücklegte. »

48. C. F. Dupuis (L'origine de tous les cultes, 1835-1836), en anglais The Origin of all Religious Worship (1872), p. 411, a rassemblé des documents sur le nombre 360, qui, dit-il, représente les jours de l'année sans les jours additionnels. Il cite les 360 dieux de la « théologie d'Orphée », les 360 éons des génies gnostiques, les 360 idoles devant le palais de Dairi au Japon, les 360 statues qui entourent celles de Hobal, adoré des anciens Arabes, les 360 génies qui prennent possession de l'âme après la Mort, « selon la doctrine des Chrétiens de saint Jean », les 360 temples édifiés sur la montagne de Lowharn en Chine, et le mur de 360 stades « dont Sémiramis entoura la cité » de Babylone. Toutes ces données n'ont pas suggéré à celui qui les recueillait l'idée qu'une année astronomique de 360 jours avait été la raison du caractère sacré du nombre 360.

49. Medhurst, The Shoo King.

Les perturbations des mois. 1. « Le nombre neuf revient avec une telle insistance dans de très nombreuses

sagas qui, pour d'autres raisons, peuvent être identifiées comme des sagas consacrées à la lune, que, j'en suis convaincu, le caractère sacré de ce nombre tire son origine de son utilisation très ancienne dans la division du temps.» L'auteur de ce passage (E. Siecke, Die Liebesgeschichte des Himmels, Untersuchungen zur indogermanischen Sagenkunde, 1892) ne supposait pas qu'il y eût eu un changement dans la nature des cycles lunaires, et ne connaissait pas les travaux du savant que je cite dans la note suivante; pourtant, il fut contraint d'admettre que neuf correspondait à une subdivision du mois.

2. A. Kaegi, « Die Neunzahl bei den Ostarien » dans le volume dédié à H. Schweizer-Sidler (1891).

3. Kugler, « Die Symbolik der Neunzahl », Babylonische Zeitordnung, p. 192. 4. E. Naville, Transactions of the Society of Biblical Archaeology, IV (1875), I,

18. 5. Roscher, Die enneadischen und hebdomadischen Fristen und Wochen, vol.

XXI, n° 4, des Abhandlungen der Philol.-histor. Klasse der Kgl. Sächs, Ges. der Wissenschaften (1903).

6. Roscher, Die Sieben und Neunzahl im Kultus und Mythus der Grichen, ibid., vol. XXIV, n° I (1904) : « Die beiden Arten von Fristen schon bei Homer und ebense auch im ältesten Kultus nebeneinander vorkommen » (p. 54). « In der Zeit des älteren Epos herrschend gewordene 9 tàgige Woche » (p. 73).

7. Cf Ovide, Métamorphoses, VII, 23 ; XIII, 951 ; XIV, 57.

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8. Roscher, Die Sieben und Neunzahl 9. Roscher, Fristen und Wochen. 10. Le mois sidéral, ou période durant laquelle la lune accomplit une révolution

par rapport aux étoiles fixes, est de vingt-sept jours, sept heures, quarante-trois minutes. Mais les phases de la lune changent selon le mois synodique de vingt-neuf jours, douze heures, quarante-quatre minutes. Après le mois synodique, la lune revient à la même position par rapport au soleil, pour l'observateur terrestre.

11. Ce sont sans doute ces perturbations qui amenèrent les dieux dans Les nuées d'Aristophane à accuser la Lune d'avoir jeté le désordre dans le calendrier et le culte. Aristophane, Les Nuées, V. 6 15 et suiv.

12. Kugler, Babylonische Zeitordnung, p. 191, note.

Les années de dix mois. 1. Ovide, Les Fastes, I, 27 et suiv. 2. Geminus, « Introduction aux phénomènes » dans Petau, Uranologion (1630). 3. Aulu-Gelle Noctes Atticae, III, 16. 4. Plutarque, Les Questions Romaines, XIX. 5. Eutrope, Brevarium rerum romanorum, I, 3, déclare : « Numa Pompilius divisa

l'année en dix mois ». Ceci doit se rapporter au début du règne de Numa, alors que le calendrier de Romulus était encore en usage.

6. Procope de Césarée, Le livre des guerres, liv. V, « La guerre des Goths », (d'après la trad. H. B. Dewing, 1919), Sect. 31.

7. Boll, Sternglaube und Sterndeutung, p. 92 ; A. del Mar, The Worskip of Augustus Caesar, pp. 6. 11, avec références à Ovide, Virgile, Pline, Servius et Hyginus.

8. M. P. Nilsson, Primitive Time Reckoning (1920), p. 89. 9. A. Wirth, « The aborigines of Formosa, » The American Anthropologist, 1897. 10. A. Schiefner, Bulletin de l'académie de Saint-Petersbourg, Hist. phil. Cl., XIV

(1857), 198, 201 f. 11. H. Hale, Ethnography and Philology : U. S. Exploring Expedition, 1838-42, VI

(1846), 106, 170. 12. G. Mathias, Lettres sur les Isles Marquises (1843), 211. 13. N. Adriani et A. C. Kruijt, De Bare'e-sprekende Toradja's (1912-1914), II, 264. 14. Frazer, Ovid's Fasti (1931), p. 386. 15. Ibid. 16. W. Yate (missionnaire anglais du début du XIXe siècle), cité dans Frazer, Ovid's

Fasti, page 386. 17. Ibid. 18. Nilsson, Primitive Time-Reckoning, p. 89.

La réforme du calendrier. 1. Le palais de Ninive fut la résidence de Sargon II, Sennachérib, Esarhadon, et

Assourbanipal. 2. J. Menant, La Bibliothèque du palais de Ninive (1880), p. 100. 3. R. C. Thompson, The Reports of the Magicians and Astrologers of Nineveh and

Babylon, II, XVIII. 4. « Les magiciens, qui calculaient la longueur des mois et publiaient des

renseignements sur ce sujet, constituaient une classe très importante du clergé babylonien et assyrien.» Ibid., p. 23.

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5. C. Bezold, « Astronomie, Himmelschau und Astrallehre bei den Babyloniern » dans Sitzungsberichte der Heidelberger Akademie der Wissenschaften, Philos. histor. Klasse, 1911, exprime l'opinion qu'avant le VIe siècle, les Babyloniens ne connaissaient pas les longueurs relatives de l'année solaire et les douze mois lunaires. Voir aussi Gundel, Dekane und Dekansternbilder, p. 379.

6. S. Smith, Babylonian Historical Texts, p. 22. 7. Ibid., p. 25. 8. A. Jeremias, Der alte Orient und die ägyptische Religion (1907), p. 17 ; Winckler,

Forschungen, III, 300. 9. Bezold, Zenit und Aequatorialgestirne am babylonischen Fixsternhimmel (1913), p.

6 ; N. Jastrow. The Civilization of Babylonia and Assyria (1915), p. 261. 10. Section Berakhot 10b ; Pesahim 56a ; autres sources dans Ginzberg, Legends, VI,

369. 11. II Chroniques, 30. 12. Isaïe, XLVII, 13. 13. On trouvera des références du Talmud dans l'article cité à la note suivante. 14. Morgenstern « The Gates of Righteousness», Hebrew Union College Annual, VI,

(1929), p. 31. 15. Morgenstern déclare : « Le dixième du septième mois, l'antique Israël célébrait

originellement non le Jour des Expiations, mais le jour de la Nouvelle Année. » Ibid., p. 37.

16. Ibid., p. 33. 17. Ibid., p. 17, 31. 18. Le Talmud de Jérusalem, sect. Erubin 22c. 19. Morgenstern, «The Three Calendars of Ancient Israel », Hebrew Union College

Annual, I, (1924), 13, 78. 20. Le Talmud de Jérusalem, section Sanhedrin I, 19a. 21. Daniel, II, 21. 22. G. Thibaut, p. XLVII de sa traduction du Panchasiddhantika, l'ouvrage

astronomique de Varaha Mihira (Bénarès, 1889). 23. A. del Mar, The Worship of Augustus Caesar, p. 4. 24. Breasted, Records of Egypt, IV, sec. 757. 25. Ibid.. Sect. 764. Voir controverse dans Zeitschrift für ägyptische Sprache, VI (1868). 26. Breasted, Records of Egypt, IV, Sect. 756. 27. A. Erman, Zeitschrift für âgyptische Sprache, XLV (1908), 1, 7. 28. P. Jensen, Die Kosmologie der Babylonier, p. 39. 29. Plutarque, Vies, « La vie de Numa ». (Trad. B. Perrin). 30. Ibid. 31. Cf. saint Augustin : La cité de Dieu, Liv. XVIII, chap. XXVII. 32. Diogène de Laërte, La vie des philosophes illustres, (d'après la trad. anglaise de R.

D. Hicks, 1925). 33. Ibid., voir aussi Hérodote I, 74. 34. Brasseur, Manuscrit Troano, p. 25. 35. F. Montesinos (vers 1628-1639), Memorias antiguas historiales del Perù, Il, chap.

VII. 36. Christoval de Molina (vers 1570 to 1584), An Account of the Fables and Rites of the

Yncas, trad. et éd. C. R. Markham (1873), p. 10.

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37. Brasseur, Histoire des nations civilisées du, Mexique, p. 122. Parmi ses sources était Ixtlilxochitl, Sumaria relación, etc.; M. Veytia (1718-1779), Historia antigua de México, I (1944), chap. II.

38. A. Gaubil, Histoire de l'astronomie chinoise (1732), pp. 73. 86. 39. F. R. Moulton, The World and Man as Science Sees Them, p. 2. 40. Le Kalevala, Rune 3.

Chapitre 9

La lune et ses cratères. 1. Mars eut des contacts avec la Lune et avec la planète Vénus; le résultat de ces

« idylles » fut que la déesse Vénus (Aphrodite) fut associée dans la mythologie non seulement avec la planète de ce nom, mais avec la Lune elle-même.

La Planète Mars. 1. P. Lowell, Mars (3e éd., 1897) ; idem, Mars and Its Canals (1906).

L'atmosphère de Mars. 1. W. S. Adams et T. Dunham, Contributions for the Mount Wilson Observatory, n°

488 (1934).

L'équilibre thermique de Mars. 1. W. W. Coblentz et C. 0. Larnpland du Lowell Observatory, et E. Pettit et S. B.

Nicholson du Mount Wilson Observatory.

Les gaz de Vénus. 1. C. E. St. John et J. B. Nicholson, « The spectrum of Venus », Contributions from the

Mount Wilson Observatory, n° 249 (1922). On a émis l'hypothèse que Vénus est couverte de formaldéhyde (R. Wildt), bien qu'aucune raie spectrale de ce composé n'ait été identifiée dans l'atmosphère de Vénus.

2. Chiffres d'Arrhenius, Das Schicksal der Planeten (1911), p. 6. E. A. Antoniadi (La planète Mercure [1939], p. 49) donne 0,63 pour Vénus, 0,17 pour Mars et 0,10 pour la Lune.

L'équilibre thermique de Vénus. 1. F. E. Ross, « Photographs of Venus », Contributions from the Mount Wilson

Observatory, n° 363 (1928). 2. Coblentz et Lampland, Journal of Franklin Institute, vol. CXCIX. (1925). 804. 3. E. St. John et S. B. Nicholson, « The Spectrum of Venus » Astrophysical Journal,

vol. LVI (1922). 4. Ross, « Photographs of Venus ». p. 14. 5. Ibid.

Un dernier mot. 1. Lucrèce, De rerum natura, V (trad. C. Bailey, 1924). 2. The Sibylline Oracles, trad. Lanchester.

Page 115: Deuxième partie Mars - bibliotecapleyades.lege.net · l'ouragan, mais bien le silex et l'ouragan qui sont comparés aux guerriers 3. Les ténèbres évoquées en conclusion du tableau

3. Sénèque, Naturales quaestiones, III, XXX (trad. J. Clarke). 4. Sénèque, Epistolae morales, épître XCL (trad. R. M. Gummere).

Épilogue

Les problèmes inépuisables 1. A propos de mon hypothèse d'une amnésie collective, G. A. Atwater suggère

qu'on devrait rechercher les traces des expériences terrifiantes du passé dans le comportement présent de l'homme.

2. L'un des auteurs de la théorie des marées, Harold Jeffreys, écrit que « la petitesse des excentricités des orbites des planètes et des satellites » est le plus remarquable des « faits très frappants » qui « demeurent encore inexpliqués » par la théorie des marées.

3. Voir la description d'une calamité soudaine dans Nombres XVI, 45-49 où des milliers d'Israélites errant dans le désert furent « consumés comme en un instant ».

4. Voir « La marée ».