DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de...

22
DES GENS QUI DANSENT PETITE HISTOIRE DES QUANTITÉS NÉGLIGEABLES Pièce de danse pour cinq acrobates / Création collective 2018 N AÏF PRODUCTION 1

Transcript of DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de...

Page 1: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

DES GENS QUI DANSENTPETITE HISTOIRE DES QUANTITÉS NÉGLIGEABLES

Pièce de danse pour cinq acrobates / Création collective 2018

NAÏF PRODUCTION

1

Page 2: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

.

Aujourd’hui, de l’autre côté du stylo, j’ai 38 ans.

Fils d’une institutrice et d’un fonctionnaire territorial,

je suis né dans une ville entourée de remparts, dont

le symbole est un pont qui ne mène nulle part.

Entre 12 et 19 ans, porté par des envies d’ailleurs,

je me suis inventé acrobate dans une salle des

fêtes de MJC, quelque part entre cirque et hip-hop.

Du bout de notre très loin, nous étions quelques

uns, dansant sans en dire le nom, à rêver de

scène, à rêver d’annoter au crayon nos rancœurs

poétiques, à la marge d’une vie taillée pour qui

nous n’étions pas.

C’est un chapiteau, poussé pour un été sur les

terrains laissés par les bâtiments tombés, qui m’a

montré le chemin de l’école. Les clefs de ma

première fuite.

Cinq ans de formation au Centre National des Arts

du Cirque, pour y devenir acrobate-équilibriste-

danseur. Une spécialité solitaire ; moi et le rien du

sol autour, peut-être la pratique la plus éloignée de

la topologie circassienne.

J’y ai rencontré beaucoup de gens, appris pas mal

de trucs, en ai raté au moins autant…J’y appris

quand même à mettre des mots sur le silence de

mon théâtre de corps.

C’est la roulette des auditions qui m’a sorti de

l’école et du pays, pour m’envoyer danser en

Belgique, auprès d’Alain Platel chez les Ballets C

de la B. J’y resterai 6 ans. Le temps de laisser

revenir la nécessité du changement.

Fuite en avant.

Mais peureux pragmatique, je ne sais avancer qu’à

reculons. Pour regarder demain, je m’accroche à

hier. Je devine le chemin à faire en regardant

derrière. Pendant tout ce temps, je n’ai cessé de

continuer à échanger, rêver et travailler avec ceux

qui m’avaient, au début de l’histoire, permis les

dimensions du rêve et appris mes premières

roulades.

J’ai donc participé avec deux complices

avignonnais, à la vie du collectif 2 Temps 3

Mouvements. Pour ce qui restait de notre rêve de

MJC, une compagnie de danse, entre cirque et

hip-hop... Cette expérience sous sa forme

collective a pris fin il y a deux ans et c’est

aujourd’hui à travers Naïf production que

l’aventure continue.

NAÏF PRODUCTION

Ni collectif, ni compagnie, Naïf est une structure

horizontale a-hiérarchique, qui se donne les

moyens de l’action et fait sienne l’axiome selon

lequel il n’y a pas de création qui ne soit

collective. Nous défendons la nécessité du

«nous» pour que s’incarne l’initiative personnelle,

le collège de cerveaux pour que l’idée advienne.

Dans un monde de l’art qui, réalisant de vieilles

idées droitières, érige aux créateurs solitaires des

statues mussoliniennes, nous risquons un « on »

de gauchers, qui traite l’utopie avec exigence et

responsabilité. Qui dit surtout qu’on ne fait rien

tout seul, que l’association est la nécessité de la

réussite pour que celle-ci ne soit plus le triomphe

d’un seul sur tous, que nos identités cesseront

d’être meurtrières quand elles ne seront plus des

œillères, et que tous nos particularismes, toutes

nos spécificités si aigües soient-elles, nous

montrent en pointillé, le chemin d’un en-commun.

Labyrinthique, mosaïque, mais inclusif.

Un endroit d’où écouter le bruit du monde, et

tenter de faire entendre la voix des quantités

négligeables.

Je m’appelle Mathieu Desseigne-Ravel,

2

Page 3: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

.

▪ 1991-1999

Autodidaxie avignonnaise

Acrobatie circassienne sans circassien

Hip-hop sur VHS

Capoeira par ouïe-dire

▪ 2000-2005

Formation au Centre National des Arts du Cirque ;

Pierre Doussain, Guy Alloucherie, Christophe Huysman, Denis Plassard, Christophe Lidon, Bertrand

Brossard, Emmanuelle Lyon, Anne Lebatard, Jean-Antoine Bigot, Alexandre del Perugia, Franck Micheletti

▪ 2004 -2005 : Sortie du CNAC

Création de ZOOO de Denis Plassard

Kilo : spectacle de fin d’étude du CNAC mis en scène par Jean Pierre Laroche et Thierry Roisin

▪ 2005-2012 : Les Ballets C de la B / Alain Platel

VSPRS ( 2006)

Ramalha ramalha ramalha (projet autonome des ballets C de la B en Palestine)

Pitié (2008)

Out of Context (2010)

▪ 2008 : Avec Hors série / Hamid Ben Mahi

Les labos d’artistes

▪ 2008-2013 : avec le Collectif 2 temps 3 mouvements

La Stratégie de l’Echec (2009)

Et des poussières (2012)

▪ 2012-2014 : avec la compagnie HVDZ / Guy Alloucherie

Les Veillées

▪ 2012-2014 : avec l’Onde et la Cybelle

La voie est libre (Paris, Annecy, Beyrouth)

▪ 2014 : avec la compagnie Dame de Pic / Karine Pontiés

Tyrans

▪ 2016 : avec la compagnie 111 / Aurélien Bory

Espaece

▪ 2014-2017 : Avec Naïf Production

Je suis fait du bruit des autres (2014)

La Mécanique des Ombres (2016)

Bâtards : petite forme éducative (Sujet à Vif 2017, en collaboration avec La Coma / Michel Schweizer)

PARCOURS ARTISTIQUE

3

Page 4: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

4

POUR TENTER UN RÉSUMÉ

L’EQUIPE

Au plateau :

Créé et dansé par :

Nacim Battou, Clotaire Fouchereau, Julien Gros, Andres Labarca et Lucien Reynès

Autour du plateau :

A l’initiative du projet : Mathieu Desseigne-Ravel

Accompagnateurs : Sylvain Bouillet et Lucien Reynès

Collaboration artistique : Michel Schweizer

Création lumière : Pauline Guyonnet

Composition sonore : Christophe Ruetsch

Administration et développement : Aurélie Chopin et Caroline Navarre

Des gens qui dansent (petite histoire des quantités négligeables)Pièce de danse pour cinq acrobates masculins

Format 1h – A partir de 10 ans

Création les 4 et 5 juillet 2018 pour Montpellier Danse

LES SOUTIENS

Coproduction :

- Montpellier Danse dans le cadre d’une résidence de création à l’Agora, cité internationale

de la danse de Montpellier

- Théâtre National de Chaillot

- CDCN - les Hivernales / Avignon

- Scène conventionnée Houdremont / La Courneuve

- Théâtre Jean Vilar / Vitry-sur-Seine

- CDCN - le Pacifique / Grenoble

- CCN de Rilleux-La Pape, direction Yuval Pick dans le cadre de l’accueil studio

- Pôle National Cirque la Verrerie / Alès

- Pôle National Cirque Circa / Auch

- Ballet de l’Opéra national du Rhin - Centre Chorégraphique National / Mulhouse dans le

cadre du dispositif Accueil Studio 2018

- Théâtre d’Arles, scène conventionnée art et création - nouvelles écritures, pôle régional

de développement culturel.

Avec le soutien de la DRAC PACA et du CDCN de Toulouse dans le cadre d’un accueil en

résidence technique

Page 5: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

5

PLANNING DE CRÉATION

Du 26 mars au 7 avril 2018 : Furies / Châlons-en-Champagne

Du 9 au 21 avril 2018 : CDCN - Les Hivernales / Avignon

Du 4 au 11 Mai 2018 : Circa / Auch

Du 14 au 26 Mai 2018 : Sc. conv. Houdremont / La courneuve

Du 28 mai au 8 juin 2018 : CDCN - Le Pacifique / Grenoble

Du 11 au 16 Juin 2018 : CDCN - Les Hivernales / Avignon

Du 18 au 30 Juin 2018 : CDCN de Toulouse

Du 1er au 3 juillet 2018 : Théâtre de la Vignette / Montpellier

4 et 5 juillet 2018 : Premières dans le cadre du festival Montpellier Danse

Page 6: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

6

Le corps est une langue et chaque langue dit un monde.

Danser, c’est mettre des idées en mouvements,

Les idées sont des armes de résistance au réel,

Danser est un acte de résistance.

Dans un espace vide, où ont été oubliés un micro, un dictaphone et peut-être une chaise, cinq

acrobates, petite communauté masculine, tâtonnent bruyamment vers le point d’équilibre qui rend

solidaire nos solitudes.

Ils tentent de composer avec la double injonction contradictoire contenu dans notre nature :

solitude ontologique et besoin de communauté.

La langue acrobatique est une langue du pauvre. Une langue à trous, où dans chaque espace

vide se bouscule une série de formules exclamatives. Elles sont autant de façons de taper du

poing sur la table pour être entendu.

Un bon endroit pour poser la question du langage, support indispensable de la pensée et premier

pas dans le trajet vers l’étrangeté de l’autre, où à chaque intersection se cache la possibilité de la

violence.

Ce travail sera l’occasion de mettre en parallèle la langue du corps et celle des mots.

Pour réaliser comment l’une contient l’autre, voire même comment l’une produit l’autre.

En effet l’hypothèse de départ est celle-ci :

Toute pensée est contingente et son domaine de production est un corps.

Lire Proust c’est entendre le souffle de l’asthmatique cherchant un air trop rare, de virgules en

virgules au long de phrases s’étalant parfois sur plusieurs pages. Lire Nietzsche, c’est entrevoir

une pensée qui évolue dans un espace contraint par son terme, sa limite, celle d’un corps malade

qui sait que la dégradation est son seul horizon.

Alors aime ton destin. Cette vie qui n’est qu’un corps puisqu’il n’y a rien d’autre. Là est la liberté.

Ce qui se passe dans ce repli réflexif, c’est la création d’une distance, d’un décollement. La

possibilité d’une certaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué

de la vie.

Le corps est la terre d’origine du langage par ce qu’il est le lieu d’expression, de mise en tension

de nos conflits intimes.

Le conflit, c’est le moteur, le début de toutes les histoires, de maux en mots, la genèse de la

fiction.

A cette lisière, l’homme est au seuil du conte, cette béquille indispensable pour avancer moins

seul dans les chaos de la vie.

Ici nait la nécessité de l’invention du théâtre comme lieu privilégié de la représentation symbolique

des conflits.

Alors mettons en mots ces corps qui nous font être. Et pour ce faire, un métier, outil d’usure du

réel qui en exhume une poétique, nous sera bien utile.

Faisons parler tous ces bougeurs.

Page 7: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

7

LUCIEN REYNES (danseur acrobate) : Dyslexique comme bien d’autres, les mots

comme mes membres se mélangeaient.

A coup de sport on s’entête à me construire.

C’est dans le cirque que je trouve une forme de confiance ambiguë.

Je me lance donc un peu plus loin avec cette idée en tête : je serai acrobate.J’entre curieusement dans les grandes écoles (ENACR, CNAC), y développe des points de vue et de corps

sur la gravité. J’imagine par la suite des objets à mouvoir comme le plateau ballant.

Je vis quelques aventures de spectacle avec des équipes telles que La Scabreuse, Cahin-caha, Yoann

Bourgeois, Yves Noël Genod, Marine Mane.

Je fais un détour vers la construction de décors (CFPTS, atelier du plateau, Festival d’Avignon IN).

Enfin, je retrouve ceux avec qui j’ai commencé le cirque adolescent pour faire de la danse et cosigne Je suis

fait du bruit des autres et La Mécanique des Ombres au sein de Naïf Production.

ANDRES LABARCA (danseur acrobate) : Santiago du Chili. 1989. Une ville

entourée de montagnes, écrasée par la pollution de Santiago, par les effets d’une

dictature et la désillusion politique de tout un peuple ; C’est dans cette ville que je

débute ma formation d’acrobate et mon chemin d’artiste dès 2007, toujours

influencé par l’histoire de mon pays et de ses personnages révolutionnaires. Je

poursuis ma formation de manière autonome en participant à plusieurs stages en

Argentine (La Arena) et au Brésil (École Nationale du Cirque de Rio de Janeiro)

pour connaître différentes cultures et différentes approches du cirque.

En 2009, j’intègre l'École Nationale des Arts du Cirque de Rosny-sous-Bois (Enacr), où je me spécialise

dans la technique des équilibres sur les mains, tout comme au Centre national des arts du cirque de

Châlons-en-Champagne (CNAC). J’intègre par la suite la compagnie Kiaï pour la création du spectacle

OFF sous la direction de Cyrille Musy et le regard extérieur de Mathurin Bolze et poursuis parallèlement

mon projet personnel de création collective SABORDAGE avec Mehdi Azema, Justine Berthillot et Frédéri

Vernier, tous membres de la 25e promotion du CNAC.

NACIM BATTOU (danseur) : Mon envie de vivre de la danse me pousse à

m’installer à Londres pendant un an et j’y rencontre les les précurseurs du

mouvement hip-hop. À mon retour en France, je suis le cursus de formateur

proposé par l’ADDM84. Depuis 2004, je développe une dynamique pédagogique

forte. Je nourris parallèlement mon envie de chorégraphier en menant des projets

en solo ou en créant le collectif Pas à pas avec Yani Abbass, Anthony Duplissy,

Julien Malatrait et Michael Varlet. Je présente une performance solo pendant 3 ans

lors de multiples événements (notamment au Liban). En tant que danseur-

interprète, je collabore notamment avec les compagnies Le Rêve de la Soie, En

L ’ E Q U I P E

phase, Grand Bal, 2 temps 3 mouvements, Rosa Liebe, Kairos, La Barraca, Stylistik… auprès desquelles

je gagne en expérience. Je crée en 2015, la compagnie AYAGHMA.

Page 8: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

CLOTAIRE FOUCHEREAU : Né en octobre 1993 à Paris, je débute le cirque à

l’âge de seize ans avec Cirque en scène, une petite école amateur de la ville de

Niort. J’intègre ensuite la formation de l'Ecole nationale des arts du cirque de

Rosny-sous-Bois (Enacr) et du Centre national des arts du cirque (CNAC) de

Châlons-en-Champagne en tant que voltigeur en main à main avec mon frère

jumeau. Très vite, la danse et l'acrobatie au sol et au trampoline prennent une

grande importance dans ma pratique. Après moultes péripéties, j’exerce sans

prétention la belle discipline de l’acro-danse.En 2014, je participe au spectacle Infinitude mis en scène par Chloé Moglia, puis joue pour la Nuit

Blanche à Paris le spectacle Nuage mis en scène par Stéphane Ricordel. En 2016 dans le cadre

de la formation au Cnac, je participe à la reprise du spectacle Plan B sous la direction d’Aurélien

Bory et Phil Soltanoff / Cie 111.

CHRISTOPHE RUETSCH (compositeur) : Mon travail prend des formes

diverses : de l’écriture de musiques électroacoustiques pour le concert aux

musiques de scènes (Danse, Théâtre, Cirque, Projets pluridisciplinaires) en

passant par des installations ou encore des pièces radiophoniques.

Lauréat de deux commandes d’État pour le Groupe de Recherche Musicale

(Radio France) je reçois la bourse Beaumarchais-SACD en 2014 dans le cadre

de l’aide à l’écriture pour la création musicale dans la catégorie Cirque.

En mai 2008, je pars en résidence à Tchernobyl et travaille sur des

phonographies dans la zone contaminée. Je créé en juin 2009 Atomic Radio

137 pour les Ateliers de Création Radiophonique (France Culture) et “ Zona “en

2010 (commande de l’État et du GRM), puis « Atomic Radio 137 live » en 2011.

Depuis quelques années, je m’intéresse particulièrement au développement du travail en live, ce qui se

traduit entre autres, par l’élaboration d’une lutherie électronique personnelle donnant lieu à des concerts,

ciné concerts et performances axées sur le jeu en direct.

.

JULIEN GROS (danseur) : Je commence le break en 1997 au hasard d’un hall

d’immeuble. Nous n’appelions pas ça du « hip-hop » et encore moins de la « danse ». Loin de la ville, c’est

en zone dite rural que je découvre cet art. Puis, entrainements, transmissions, rencontres, créations : un

parcours qui m’a permis de mettre des mots sur ma pratique. J’ai 35 ans, 20 ans de danse, hip-hop en

dominante, break en particulier. Et autodidacte par nécessité. J’ai enseigné la danse hip-hop une quinzaine

d’année avec de multiples expériences en associations, MJC et milieux scolaires.

Puis je créé au sein de différentes compagnies et groupes : la compagnie Amazigh, Massilia Force, Original

Rockerz, la compagnie Ayaghma, la Loly Circus, et des rencontres humaines importantes avec une tournée

au Bénin en Afrique de l’Ouest et la participation au tournage du documentaire « Enfants de sourds ». En

2011, je crée la compagnie Havin’Fun et Les voix sourdes puis Mauvais rêves de bonheur qui intègre à sa

création la langue des signes.

Page 9: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

PAULINE GUYONNET (création lumière) : Après une formation au cadre et à la

lumière en BTS Audiovisuel, je suis reçue en 2005 à l’ENSATT. Dans le cadre des

ateliers-spectacle, je travaille avec Philippe Delaigue, Guillaume Delaveau, Simon

Délétang, Olivier Maurin, Christian Schiaretti et Marc Paquien. C'est également à

l'occasion d'un atelier que je rencontre Marie-Christine Soma et fais plusieurs stages

sous sa direction.

Je consacre mon mémoire de fin d'études au « Sacré et La Lumière ».

Depuis ma sortie de l'ENSATT en 2008, j’ai assisté Marie-Christine Soma lors de ses

créations lumières pour Michel Cerda, Jacques Vincey, Bertrand Blier.

J’ai également effectué la régie lumière pour quelques spectacles de Declan Donnellan, Laurent Gutmann et

François Rancillac.

En parallèle, je me consacre à la création lumière. Je suis particulièrement des metteurs en scène et artistes

depuis quelques années tels que Marie-Pierre Bésanger, Charlotte Bucharles avec qui je poursuis mon travail

sur la lumière et le sacré, Joséphine Serre et Naïf production.

MICHEL SCHWEIZER (collaboration artistique) : Inclassable, bien qu’inscrit dans

le champ chorégraphique, Michel Schweizer opère dans ses différentes créations,

un croisement naturel entre la scène, les arts plastiques et une certaine idée de «

l’entreprise ». Depuis plus de 18 ans, il convoque et organise des communautés

provisoires et éphémères. S’applique à en mesurer les degrés d’épuisement.

Ordonne une partition au plus près du réel. Se joue des limites et enjeux

relationnels qu’entretiennent l’art, le politique et l’économie.

SYLVAIN BOUILLET

(accompagnateur du projet et co-porteur de Naïf Production) :

Je développe dès le plus jeune âge un goût immodéré pour l’agitation et le

mouvement. Le le skateboard, que je pratique de manière obsessionnelle, m’incite à

réinventer mes appuis, à construire des trajectoires personnelles et à cultiver l’art de

la chute.

Dans une MJC d'Avignon où je m'essaye à l'acrobatie, je rencontre Mathieu Desseigne et Nabil Hemaizia. De

cette rencontre découle la fabrication d'un langage commun et neuf années d'un parcours que nous

construisons ensemble au sein du collectif 2 Temps 3 Mouvements.

Professeur des écoles de formation, je considère la scène comme un espace d’aventures collectives où se

joue le vivre ensemble. J’expérimente depuis plusieurs années, des ateliers de recherche avec des publics

variés. De ces aventures répétées nait Je suis fait du bruit des autres en 2014, une création partagée avec des

amateurs. Co-porteur du projet de Naïf Production avec Mathieu Desseigne et Lucien Reynès, nous créons Je

suis fait du bruit des autres en 2014, un projet réécrit avec des amateurs à chaque nouvelle édition, le trio La

Mécanique des Ombres puis Des gestes blancs, un duo avec un enfant

Porte un regard caustique sur la marchandisation de l’individu et du langage. Se pose surtout en organisateur.

Provoque la rencontre. Nous invite à partager une expérience dont le bénéfice dépendrait de notre capacité à

accueillir l’autre, à lui accorder une place. Cela présupposant ceci : être capable de cultiver la perte plutôt que

l’avoir…

Page 10: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

Avant les premières images, les bribes de scènes, les premières traces des gestes à venir, toutes ces

choses éparses, diffuses, que l’on appelle « idées », avant tous les signes concrets d’un début, il y a

la nécessité.

Ce truc qui pousse. Au fond.

Qui monte et tend jusqu’a souvent nous paralyser d’impuissance et qu’on a un peu honte de nommer

envie ou besoin…

Avant de céder à la folle impudeur, à l’incroyable prétention d’avoir à dire des choses qui pourraient

être partagées, il y a des questions.

Entre autres, celles-ci pour cette fois :

Comment faire, dans les velours du spectacle vivant subventionné, pour parler du monde sans

indécence ?

Comment dire les beautés de nos peurs contemporaines ? La violence de ce monde, dont on cherche

souvent, la conscience à l’abri derrière le rideau de scène, à se débarrasser ?

Dans ce monde bavard, où les clichés publicitaires tiennent lieu d’horizon des valeurs et où l’impudeur

et l’obscénité font office de liberté d’expression, quelles sont les histoires qui doivent être dites ?

Et de manière plus anecdotique, qu’est ce qui fait danse ?

Est-ce que l’hybridité se revendique et peut servir de ciment identitaire ?

Est-ce que la bâtardise anoblit ? Danse-t-on sans être danseur ?

Quelles sont les langues à inventer, a-scolaires, a-culturelles, pour incarner un pensée ?

DES ÉLÉMENTS POUR DES DÉBUTS DE RÉPONSE…

« Les danseurs, ce sont des gens qui dansent »

Alain Platel

« Je laisse à d’autres, l’idée que le spectacle vivant pourrait ne pas être un engagement, une prise de

position » Guy Alloucherie

« Danser, c’est mettre une idée en mouvement,

Les idées sont des armes de résistance au réel

Danser est un acte de résistance. »

Mathieu Desseigne-Ravel

AvANT CHAQUE DÉBUT DE CRÉATION, IL Y A DES QUESTIONS

10

Page 11: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

POUR REGARDER LE MONDE SANS INDÉCENCE

(ET TENTER DE POSER EN CHEMIN DE PETITES DÉFINITIONS PERSONNELLES)

CRÉER, C’EST SE RETOURNER…

Se retourner sur 10 ans de plateau et presque 25 ans de

pratiques acrobatiques, dansées et gigoteuses, passées

à opposer mon poids à la gravité des choses.

Me retourner sur une vie de spectateur à m’entendre

raconter des histoires en images, en mots, en

mouvements …

Sur 6 ans de paternité liseuse pendant lesquels les

archétypes des contes ont réinvesti mon quotidien et plus

récemment, sur mes réticences à la « Culture », machine

à légitimer les inégalités déguisées en miracle égalitaire.

Sur l’envie de ne plus parler de moi, ne plus me mettre

en scène, de comprendre ce moment où le témoignage

individuel transcende son anecdote pour nous parler de

nous, fouiller cet en commun manifeste et fuyant qui

nous relie tous.

Comprendre qu’une fois déconstruites toutes les velléités

dramaturgiques, ne restent que quelques thèmes,

quelques idées. Toutes les narrations ne sont que des

prétextes à ce que nous puissions réentendre la même

histoire, sempiternellement recommencée.

Ce que je choisis d’entendre entre les mots de toutes les

histoires, c’est le besoin de communauté .

Une communauté première, humaine, de chair, de

sueur et de sang. Communauté de souffrances et de

désirs.

Désir de plus que soi : ce dont l’autre est le nom.

Nous sommes des êtres in-finis. Plus que nous-mêmes

et trop peu à la fois, enfermés en nous comme dans un

costume trop petit dont nous ne connaitrons

paradoxalement jamais les contours, mus par un désir

insatiable qui donne à dieux son nom.

Nous sommes des êtres séparés (pour s’aimer comme

pour se haïr, on se rentre dedans), qui rêvons de l’autre,

notre manque à combler, miroir déformant de notre

profond sentiment d’unicité.

Communauté de solitaires, nous sommes des êtres

fictionnels. Ce qui nous tient ensemble ce sont les

mots de l’histoire. Nous avons besoin d’être et de

nous raconter, moins pour comprendre ou pour

expliquer que pour nous accompagner dans notre

marche à tâtons dans l’inexpliqué de la vie.

CRÉER, C’EST SE SOUVENIR…

Je choisis de penser que l’on ne crée rien qui

n’existe déjà. On se souvient de ce que notre temps

a choisi d’oublier. On rappelle à la réalité ce qu’elle

ne veut voir ni entendre, ce qu’elle n’est pas, ou plus.

C’est une alternative au réel.

Les créateurs peuvent rester dans les bibles. La

dignité, la justesse et la justification de l’artiste

procèdent de ce qu’il est un trait d’union

mnémonique entre l’officiel et l’oublié.

Seules les histoires amnésiques sont bonnes à dire.

Des petits contes de résistance à la réalité du

storytelling politique et de secret story… lutter contre

le dévoiement de l’histoire en disant les fables

oubliées.

11

Page 12: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

LE THÉÂTRE

La question du cadre, du point de vue.

L’endroit d’où l’on regarde…

Le théâtre est un espace régit par un ensemble de

règles momentanément justes parce que décrétées.

Le théâtre est l’endroit où l’expérience vécue

transcende son anecdote pour nous parler de nous. Il

ne s’agit pas d’universaliser en diluant, mais d’opérer

le déplacement de l’expérience vécue, pour proposer

un endroit où le heurt des subjectivités créent de

l’addition.

Sinon comment dire la violence de nos réalités,

comment sentir les souffrances étrangères, comment

dire l’en-commun de vies si différentes, comment se

comprendre dans des langues si lointaines ?

C’est la question de l’empathie qui est à l’œuvre

puisque le constat premier c’est « je ne suis pas toi ».

Le théâtre est l’endroit où, au travers des différences,

advient la reconnaissance.

Etre « au théâtre », ce devrait être « concerner ».

UNE POÉTIQUE DU RÉEL

La politique a ses lieux.

Ou avait… qu’en reste-t-il aujourd’hui?

La politique est une désuétude. La façade décrépite

d’un bâtiment en ruines d’où les idées ont été

chassées par les idéologies.

L’espace du théâtre ouvre la voie à une poétique du

réel. Le chemin vers des possibles inexistants, les

sentiers de l’utopie.

Une poétique du réel comme un moyen de dépasser

le constat, une alternative par ce qui est révélé par la

métaphore.

C’est le filtre d’une distance nécessaire qui nous

permet, nous autorise, à le penser tel qu’il pourrait

être.

CRÉER, C’EST ACCEPTER DE NE PAS SAVOIR…

Et décider d’avancer à la lumière de cette seule

certitude.

C’est revendiquer le droit à l’erreur et la nécessité de

celle-ci comme étalon de la recherche.

Renoncer aux projets et à la logique de produit qui les

sous-tend, et laisser le désir instituer en sujets les

passants rencontrés au cours du voyage.

Il n’y aurait peut-être donc à dire que je ne sais pas

mais que j’ai le désir d’essayer et que ce désir vaut tout

autant que nos prétendues nécessités.

Il faudrait que je vous dise que je recommence ce qui

par tous a déjà été fait.

Que de l’histoire que vous allez entendre, j’ai juste

changé les mots.

Mais il se peut qu’au détour d’un choix hasardeux, qui

nous fait opter pour un mot plutôt que pour un autre, se

cachent les accords d’une musique oubliée. Une faille,

soudain, dans la discontinuité des discours officiels, un

nouveau point de vue sur les choses.

Commencer – c’est le secret de ce qui suivra - c’est le

risque pris de pouvoir, par ces petits bonheurs que l’on

nomme erreur, se retrouver au bon endroit.

LA BEAUTÉ DU MONDE

L’art n’a peut-être d’autre fonction que de tenter de

donner à voir la beauté du monde. Qu’elle qu’en soit

son visage, sa violence.

L’art serait donc intrinsèquement un optimisme.

Donnant à voir, à sentir toutes les beautés, il est donc

fondamentalement populaire puisqu’elles nous sont

indispensables à tous.

12

Page 13: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

NOTE D’INTENTION

Je ne sais plus lequel d’entre eux a commencé. Ils étaient là.

Petite communauté masculine, en déséquilibre incertain au bord du vide.

Cinq silhouettes mouvantes, fluides et anguleuses, feignantant sur les sentiers de leurs petites

impasses identitaires.

Je me souviens m’être demandé si le heurt des corps au sol, le son mat de leurs chocs les uns contre

les autres produisait vraiment une musique.

Je les ai regardés.

Tenter, avec de violentes précautions, de trouver ce point fragile, incertain, qui rend solidaire nos

solitudes.

Ils cherchaient une direction commune, une langue maternelle oubliée. Marionnettes sans fil, ils

bougeaient (quand même).

J’ai vu de la joie dans leurs yeux d’enfants fous. Apatrides culturels, ils dansaient (malgré tout),

mettaient en majuscule les minorités.

J’ai senti leurs poids s’opposer à la gravité des choses. Leurs mains se saisir. Leurs corps se lier.

Ensemble, à rebours de leurs savoir-faire, sur les traces laissées dans leurs corps par l’acrobatie, ils

se sont souvenus.

Les quantités négligeables ; notre part d humanité. D’incertitude.

Oubliée, sacrifiée aux logiques de projets.

Ils savaient le coût du dérisoire,

Ils avaient le goût de l’absurde,

Ils savaient vivre…

Sur les débris de ce monde, il y a des gens qui mettent en corps leurs idées de résistance. Il y a

toujours, entre les ruines de la soirée d’hier et le monde de demain, suspendu à l’instant, aux lèvres

des possibles, des gens qui dansent (quand même).

13

Page 14: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

DE LA DANSE

Emigré d’autodidaxie, mes viandes d’origine

acrobatique contrôlée et nourries aux hormones hip-hop

ont mis du temps à colorier d’envie mes complexes de

mécréant à l’endroit de la danse.

Dans les temples de Culture, pendant les cérémonies

de danse, je me sens toujours un peu étranger... Erudit

des traditions locales, mais un peu étranger.

.

Le mot « danse » a donc mis du temps à s’imposer à

moi.

Et le fait est : je ne suis pas danseur. De formation tout

du moins. Mais peut-être que cela est assez pour

justifier mes atermoiements sémantiques autour du

terme et lui préférer «bougeur», «gigoteur», «acteur

physique».

C’est la question de la langue qui est ici soulevée. La

question de la culture, du conditionnement culturel.

N’ayant reçu en apprentissage aucun langage défini,

mon rapport à la danse est resté dans le domaine de

«l’invention».

Qu’est-ce qui fait danse, à partir de quand le geste

mérite d’être anobli par le terme ?

Danser de tout et malgré tout donc, danser moche ou

carré, chercher la danse comme le mot, chercher à dire

en faisant sentir.

Danser, c’est être ce qu’on ne peut dire. Exprimer un

état au-delà de la conscience, une nécessité à la lisière

de l’intention.

Danser c’est relier, convoquer l’invisible, jeter des ponts

éphémères et fragiles entre l’avant et l’après. Se situer

pour trouver l’instant qui ne peut se penser mais se

sent. Conjurer le passage du temps culturel qui éloigne,

pour faire ressurgir les signes ataviques, les archétypes

premiers de notre appartenance à la communauté

humaine.

LE CIRQUE, UNE DÉFINITION (TOUTE PERSONNELLE)

ET UN RAPPORT SINGULIER A LA DANSE

Le vivant se meut, nous nous émouvons en

mots de ne plus le comprendre.

Et nous oublions d’être. En mouvement.

Chutant, lâchant, roulant et résistant, changeant

parce que vivants.

14

Page 15: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

LE CIRQUE

Le cirque est ce qui arrive quand les corps sont mis en mouvement par l’acrobatie.

Le cirque, l’acrobatie, comme domaine de recherche formelle, me permettent de définir un cadre de réflexion

autour des thèmes suivants : Altérité, identité, langue maternelle (apprentissage culturel) et communautés

minoritaires.

L’acrobatie est l’artisanat du corps, un art du mouvement.

L’acrobatie est le langage du cirque quand il se met en mouvement.

Tant que le cirque cherchera son identité, ses discours intrinsèques, dans les seules formes de la prouesse,

de la virtuosité, du danger et du dépassement de soi, il pourra toujours se demander de quelle dose de

sciure, de nez rouge et de contemporanéité il est constitué, il ne trouvera rien.

Il restera le parent pauvre des autres arts. Il continuera à singer, entre chacune de ses figures, formes figées

en elles-mêmes, les vocabulaires des danses classiques, contemporaines, hip-hop…

La langue maternelle de l’acrobate est faite d’onomatopées exclamatives. Fortes, mais qui sont autant de

prisons sémantiques, saturées de leur propre signifiance.

Le cirque pourrait être pensé comme une écriture globale, un tout qui englobe mais dépasse le moment de

la seule performance, de l’exploit.

Le cirque a une façon bien à lui de mettre les idées en mouvement, mais ces idées ne peuvent se déployer

que sous-tendues par une pensée. Une pensée, une intention, est une écriture.

Cela pose la question de la langue et de son vocabulaire.

Cela revient à se poser la question des discours de ces pratiques, non plus seulement de leurs enjeux.

LES ACROBATES

Disons qu’ils sont avant tout, comme sorte d’état premier, des saltimbanques. Disons maintenant qu’il faille

revenir à l’étymologie : les saltimbanques sont ceux qui sautent sur le banc, qui sautent du banc.

Enlevons un C, et c’est du ban qu’ils sautent. Ce ban (de ban-lieue, lieu du ban, de l’exclusion) peut-être

entendu non seulement comme un exil ou une exclusion, une mesure de dénigrement et d’indignité, mais

aussi comme une désignation des marges, de la non norme, des abords de l’admis, des parages du normal,

de la fange.

Les acrobates sautent sur le banc, du ban ; Ils s’extraient de leur condition, en dépasse l’ostracisme et la

catégorisation. Ils transcendent leur nature minoritaire.

Le cirque, l’acrobate, parlent de minorités (rassemblées autour d’une culture, d’évidences de pensées, de

réflexes) mais tend à dépasser les barrières de sa communauté pour aller vers l’autre.

L’acrobate est un minoritaire qui rêve de plus que ce qu’il est. Il interroge la réalité depuis la marge.

Vis à vis du poids, de la norme et de l’appartenance héritée, l’acrobatie est une résilience.

Une résistance.

15

Page 16: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

DANSE ACROBATIQUE, UNE DANSE DE L’ACROBATIE ?

La figure de la virtuosité, de la performance, centrale dans l’acception circassienne du mouvement, ne peut

à elle seule être moteur d’écriture, support de pensée, sans devenir juxtaposition stérile de formes

saturées.

Il faudrait ici comme en toute chose, puisque seul le chemin qui mène aux choses les rend belles, revenir en

amont du moment de «la figure». Dans les traces laissées par sa recherche. Sur le chemin que cette quête

de dépassement a laissé dans le corps de l’acrobate. Entre les réflexes et les intelligences nouvelles acquis

lors du processus d’apprentissage.

Laisser se dire, donc, ce que la pratique et l’expertise ont inscrites au verso de la performance, pour que

s’en dégage la langue qui en est la genèse. Il faudrait donc sans doute user le matériel physique formel pour

que de cette dégradation, de cette volontaire « redescente », se dégage du sensible, du sens à sentir.

Il n’est pas question ici d’éloge de la sobriété, de la pauvreté du geste ou de minimalisme, mais du besoin de

passer au-delà de la seule forme, derrière le paysage des gestes finis, accomplis, par l’usure et la

dégradation du signe rendu possible par l’expertise.

La question de la virtuosité n’est pas évacuée, mais déplacée de son endroit premier.

Pour elle-même, elle est forme saturée de sens, péremptoire, définitive comme une sommation, rude

comme une entrée en dialogue qui frapperait du poing sur la table avant de parler.

Quelles sont les autres virtuosités? Les triviales, les presque quotidiennes, les petites, approximatives, à

peine visibles, les abords du vertige, les « a peu pré-senteurs »…

Le geste acrobatique est dépassement, transgression de la norme, transfiguration des possibles.

Se lancer et après d’improbables vrilles, arriver «quand même» sur ses pieds, tenir «trop longtemps», à

l’envers dans une position étrange…

Ces points de transgression peuvent aussi faire l’objet d’un déplacement. Ne se trouvant plus à l’endroit de

leurs évidences, ils se mettent à résonner, à signifier (peut -être) différemment.

Utiliser ces moments de torsion de la norme, du possible, pour fabriquer des «incongruités», des

anormalités de langage (puisque c’est de marge dont parle le mieux le cirque).

Furtives, discrètes, elles seraient de nature à faire un peu vriller la réalité du discours de cette danse.

Une fabrique de petites incongruités… ?

CE LANGAGE À VENIR

Pendant les 11 dernières années, au hasard de mes recherches, de mes répétitions, j’ai construit en chemin

un petit lexique personnel nourri de mes pratiques acrobatiques et de mes influences.

Ce pourrait peut-être être considéré comme une langue, ma langue.

Il ne sera pas question ici de transmission, de mise en scène et de mise en corps chez d’autres, de ce qui

pourrait être mon vocabulaire.

Cette étude cherche le temps nécessaire à ce que les expériences se rencontrent et se mélangent.

16

Page 17: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

DE LA MUSIQUE

Puisque cette étude cherche les gestes comme les

mots d’un discours, les appelle d’une nécessité, il en

sera sans doute de même avec le traitement sonore.

La place du mot, du langage, y sera un axe de

réflexion fort.

Avant ou après l’intelligible, le directement

discursif…

Le son des choses, du monde, ici donc des corps,

pourrait faire l’objet d’un traitement particulier, d’un

retraitement… puisque les danses sont autant de

partitions rythmiques, musicales.

Les oppositions entre rythmique organique, gutturale,

et lyrisme mélodique, pourraient être un écho au

chemin de la construction culturelle que suppose le

langage.

ET LA LUMIÈRE

Dans cet espace vide où les corps sont décors, la

seule scénographie sera lumineuse. Effaçant et

dévoilant, distanciant ou enfermant, elle sera la

réalité de ce monde.

17

Page 18: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

Chorégraphie, mise en scène et interprétation Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne et Lucien Reynès et une

vingtaine d’amateurs issus des territoires concernés Regard extérieur Samuël Lefeuvre Création sonore

Thomas Barlatier Création lumière Pauline Guyonnet Costumes Natacha Costechareire

Je suis fait du bruit des autres est né d’un questionnement sur la manière de partager un processus de

création avec le public.

Sur chaque territoire investi, un groupe d’une vingtaine de personnes volontaires, sans prérequis et de

tous âges, est constitué et invité à vivre cinquante heures de création pour fabriquer une œuvre

collective à partir d’une structure initiale que nous avons formalisée.

Le processus qui cherche une danse essentielle, possible pour tous, participe finalement à

l’émergence des singularités. Il respecte la capacité des corps. L’erreur et la contrainte sont source de

création et la fragilité est guidée vers la poésie.

Coproduction : Off Space e.V (Sarrebrück), CDC les Hivernales (Avignon), Relais culturel régional de Flers (61), Hostellerie

de Pontempeyrat (62). Avec le soutien de KLAP, maison pour la danse (Marseille), de l’Agora, cité internationale de la danse

(Montpellier), du théâtre Jean Vilar de Vitry-SurSeine et du CDC du Val de Marne la Briqueterie. Le projet, initialement porté

par le collectif 2 Temps 3 Mouvements, a bénéficié du soutien de la DRAC PACA, de la région PACA et du département de

Vaucluse.

AU RÉPERTOIRE DE NAÏF PRODUCTION

JE SUIS FAIT DU BRUIT DES AUTRES (2014)

18

Page 19: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

“ Nous sommes au tout début, vois-tu. Comme avant toute chose.

Avec mille et un rêves derrière nous et sans acte. “

(Notes sur la mélodie des choses / Rilke)

Dans ce trio de danseurs-acrobates, l’ombre est invitée à faire la lumière sur notre condition.

Recommencer notre histoire à travers une gestuelle mécanique pour atteindre l’autre, esquisser nos gestes premiers …

Trois figures entre prototype et archétype gesticulent pour redécouvrir les codes oubliés. L’histoire est absurde sans but

autre que de se fabriquer ensemble.

Et si nous naissions tous le même jour ? Ici, nous sommes tous égaux. Le moindre geste est reflexe instinctif. La

psychologie est abandonnée et le regard va à l’essentiel. Parce que nous dansons visage caché, les conditions de

l’empathie se déplacent et le chemin vers l’altérité est à reconstruire, inlassablement…

Coproduction : Espace périphérique – Paris Villette, Théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine, MC93 de Bobigny, Le Centquatre¨- Paris.

Avec le soutien du CDC les Hivernales (Avignon), de l’Agora, cité internationale de la danse (Montpellier). Le projet bénéficie du

soutien de la DRAC PACA, de la région PACA, du Conseil départemental du Val de Marne et de la SPEDIDAM.

LA MÉCANIQUE DES OMBRES (2017)

Chorégraphie, mise en scène et interprétation Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne et Lucien Reynès

Conseil artistique Sara Vanderieck Création sonore Christophe Ruetsch Création lumière Pauline Guyonnet

19

Page 20: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

Limite : tendance, ancrée dans la structure de la pensée moderne, à transformer l’espace où se développe la vie en

zones de séparation contenant la vie.

Sujets à vif : personne amenée à faire l’expérience de la séparation.

Sujets à vif : profil de personne ayant tendance à se séparer du vivant.

Bâtard : sujet humain dont l’équilibre semble s’arranger avec des origines floues, confuses, à qui l’on a recommandé de

ne pas trop accorder d’importance à ses états d’âme et par là même occasion à lui-même.

Production déléguée : La Coma et Naïf Production

Coproduction : festival d’Avignon, SACD, Le Gymnase, CDC Roubaix, Hauts-de-France

Avec le soutien : du Théâtre d'Arles, scène conventionnée pour les nouvelles écritures / La Villette, Paris / Le CDC Les Hivernales, Avignon

Mathieu Desseigne-Ravel et Michel Schweizer ont été accueillis en résidence à l’Agora, cité internationale de la danse, avec le soutien de la

Fondation BNP Paribas.

BÂTARDS : PETITE FORME EDUCATIVE ( SUJET À VIF 2017)En collaboration avec la Coma / Michel Schweizer

FORMAT : 30 min

Conception et interprétation Mathieu Desseigne-Ravel et Michel Schweizer

Création photographique Ludovic Alussi

Conception sonore Nicolas Barillot

20

Page 21: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

DES GESTES BLANCS (2018)

21

Des Gestes Blancs est un essai physique sur la paternité, qui explore le lien entre un père et son enfant. Une

tentative dansée où se rencontrent deux corps au rapport de poids et de taille très contrasté.

Ici, la figure du père et de l’enfant canalise et oriente notre lecture des corps au plateau.

Il serait presque possible de laisser jouer ce cadre. Leur simple présence pose déjà sur scène, de possibles

interprétations déclinées autour des notions d’autorité, de dépendance, de conflit, d’amour, de complicité.

Ne reste plus qu’à danser sans fabriquer d’histoires supplémentaire. Laisser voir un duo qui dans le déséquilibre

de ses forces, cherche une justesse, trouve le désir de jouer à deux, se risque avec pudeur à la tendresse. Une

danse où l’image de l’un n’est que le reflet de l’autre, déformé dans le temps et dans l’espace.

Format 45 min

Direction artistique et chorégraphie Sylvain Bouillet Dramaturgie Lucien Reynès Conseil artistique Sara

Vanderieck Interprétation Charlie Bouillet et Sylvain Bouillet Création lumière Pauline Guyonnet Composition

musicale Christophe Ruetsch

COPRODUCTION : CDCN les Hivernales - Avignon, Le Cratère – scène nationale d’Alès, CCN Malandain – Ballet Biarritz ,

CDCN - Le Pacifique – Grenoble.

SOUTIENS : DRAC PACA, Ville d’Avignon, KLAP – Maison pour la danse de Marseille, Agora – Cité internationale de la danse

de Montpellier.

Page 22: DES GENS QUI DANSENT - theatrejeanvilar.com · possibilité d’unecertaine idée de soi, un peu de lumière pour avancer à tâtons dans l’inexpliqué de la vie. Le corps est la

22