Dépêche a journée 25 nov 2010 dépendance

4

Click here to load reader

Transcript of Dépêche a journée 25 nov 2010 dépendance

Page 1: Dépêche a journée 25 nov 2010  dépendance

Arnaud LavorelLigne directe: 01 53 10 39 45

Dépêche n°141253Paris, Jeudi 25 novembre 2010, 19:55:20

Dépendance : « on doit réfléchir du GIR 1 au GIR 6 etprévoir un socle assurantiel en complément d'unsocle public » (D. Jacquat)

« Je considère qu'on doit réfléchir [à la prise en charge de la perte d'autonomie] du GIR 1jusqu'au GIR 6 » parce que, parmi les personnes dont le niveau de dépendance est classé GIR 5ou 6, lesquels donnent lieu au versement de prestations extra-légales de la part des caisses deretraite, il y en a qui requièrent de l'aide par exemple lorsqu'elles sont âgées de 90 ans avec desenfants qui en ont 70… ». C'est ce que déclare le député Denis Jacquat, (UMP, Moselle),président du groupe de travail « longévité » à l'Assemblée nationale à l'occasion d'une journéed'étude sur le 5e risque et l'assurance dépendance organisée par l'Institut Silverlife en partenariatavec l'institut de formation Caritat et « La Tribune de l'assurance ». Prenant ses distances avec lerapport de Valérie Rosso-Debord (UMP, Meurthe-et-Moselle) qui en juin 2010, préconisait derestreindre le versement de l'APA aux seuls GIR 1, 2 et 3, Denis Jacquat rappelle qu'au momentde la création de l'APA, la prise en charge des personnes classées en GIR 4 (faiblementdépendante) n'était pas prévue dans la prestation avant d'être ajoutée par la suite.

Denis Jacquat, rapporteur du projet de loi portant réforme des retraites, rappelle qu'il avait en sontemps soutenu l'absence de récupération sur succession pour financer l'APA. Il attribue en effetl'échec de la PSD (la prestation créée en 1997 pour couvrir la perte d'autonomie et qui a étéremplacée par l'APA à partir de 2002) à ce « blocage psychologique » qui entoure la récupérationsur succession. « Pour moi, il peut y avoir un socle public - l'APA - avec un complémentassurantiel », ajoute-t-il. Denis Jacquat considère enfin que le débat sur la dépendance est aussi« l'occasion d'introduire une véritable politique de prévention pour retarder l'apparition de la perted'autonomie ». S'agissant du financement, il assure que les retraités imposables ne sont pasforcément défavorables à une augmentation de leur taux de CSG (6,6 % aujourd'hui contre 7,5 %pour les actifs) afin de l'aligner sur celui des actifs « à condition que ce supplément de CSG soitfléché ».

POURQUOI RÉFORMER LA DÉPENDANCE ?

Pierre-Alain de Malleray, ancien directeur adjoint du cabinet de trois ministres des Affairessociales entre 2007 et 2010 (Xavier Bertrand, Brice Hortefeux puis Xavier Darcos) et depuis peudirecteur général de MutRé, pôle réassurance de la Mutualité française (AEF n°138432), estrevenu sur l'histoire récente de ce débat. Il rappelle ainsi que les politiques publiques en lamatière ont poursuivi deux objectifs : d'une part « garantir le libre choix entre la vie à domicile etla vie en établissement », une constante quelle que soit le bord politique du gouvernement enplace, et d'autre part « améliorer la qualité de la prise en charge, notamment en maison deretraite » un consensus étant apparu au moment de l'épisode de la canicule de 2003 sur le faitque la France avait un important retard à combler sur le taux d'encadrement des résidents demaisons de retraite.

De fait, aujourd'hui, de plus en plus de personnes sont couvertes contre la perte d'autonomie etde plus en plus le sont à domicile : entre 2003 et 2008, la proportion de personnes dépendantesen maisons de retraite (entendue comme étant celle dont le degré de dépendance varie entre leGIR 4 et le GIR 1) est passée de 45 % à 38 %. Par ailleurs, le taux d'encadrement des résidents

Page 2: Dépêche a journée 25 nov 2010  dépendance

a progressé et contrairement aux craintes qui avaient été exprimées il y a quelques années,l'assistance apportée par les professionnels grâce à une meilleure solvabilisation des personnesdépendantes n'a pas eu d'effet de substitution sur l'assistance fournie par la famille ou lesproches. L'aide pour les démarches administratives ou la visite chez le médecin reste surtoutapportée par les proches tandis que les professionnels s'occupent davantage du ménage, destoilettes ou de l'habillage.

UNE URGENCE FINANCIÈRE

La réforme de la prise en charge de la dépendance s'impose néanmoins pour des raisonsfinancières : Pierre-Alain de Malleray souligne que « l'aide aux personnes âgées est aujourd'huila première dépense sociale des conseils généraux » (plus de 6 milliards d'euros), devant leRSA, et représente « plus de la moitié du produit fiscal de certains départements ». Par ailleurs,le nombre de personnes dépendantes est amené à augmenter dans les années à venir,particulièrement à compter des années 2030, au moment où la génération issue du baby boomarrivera aux âges où la dépendance devient plus fréquente. En revanche, l'évolution future dunombre d'aidants donne lieu à débat : la population des aidants pourrait ne pas suivre l'évolutiondu nombre des personnes dépendantes en raison de la baisse du nombre des femmes inactivesâgées de 50 à 64 ans. A l'inverse, l'aide informelle pourrait aussi se développer sous l'effet dudéclin de la situation de veuvage : ainsi, « pour les femmes européennes âgées de plus de 85ans, la présence d'un conjoint en 2030 devrait être 3 fois plus fréquente qu'en 2000 ».

Pierre-Alain de Malleray rappelle également que la proportion des personnes dont les revenussont inférieurs au coût de la prise en charge en maison de retraite approche 80 %. Ce sontessentiellement celle dont les ressources sont trop importantes pour pouvoir bénéficier des aidesau logement (APL- ALS) et qui ne paient pas suffisamment d'impôts pour bénéficier à plein desaides fiscales accordées par l'État.

LES PISTES ENVISAGÉES JUSQU'À AUJOURD'HUI

Il rappelle les pistes évoquées pour financer le cinquième risque. D'abord la solution consistant àrestreindre l'APA aux GIR 1 à 3 (rapport de Valérie Rosso-Debord) sans doute une « mauvaiseidée » selon lui, puisqu' « une personne en GIR 4 qui n'est pas prise en charge avance plus vitevers le GIR 3 ou 2 ». Autre solution instruite par Xavier Bertrand en 2008 : « instaurer unecontribution facultative et plafonnée sur le patrimoine » pour ceux qui ont plus de 100 000 eurosde patrimoine (idée qui avait été évoquée - avec des montants différents - dans le rapport Marini-Vasselle et reprise dans le rapport Rosso-Debord). Autre piste : améliorer l'équité des aidespubliques par une remise à plat des aides publiques en établissement en fusionnant les aides aulogement, l'APA et les aides fiscales. La régulation des tarifs pratiqués par les établissements,solution déjà engagée par les pouvoirs publics, contribuera également à « résoudre l'équationfinancière » de la dépendance.

La construction d'un partenariat public-privé est aussi une piste : « Tout le monde convient que ladépendance au grand âge est un risque prévisible » assure Pierre-Alain de Malleray mais unrisque qui est aujourd'hui « insuffisamment anticipé » d'autant qu'il est peu probable que lesallocations publiques puissent couvrir tous les coûts. La question qui devra être résolue (et qui afait l'objet d'un groupe de travail depuis le début de l'année) est l'harmonisation des référentielsd'évaluation de la dépendance. Aujourd'hui, les produits du marché sont très différents etreposent sur des outils d'éligibilité disparates (grilles ADL, Aggir, etc.) et les assureurs redoutentd'être liés par les standards publics.

Deux options très différentes restent toutefois à trancher pour la forme que pourrait prendre cepartenariat public-privé : soit une assurance obligatoire pour les plus de 50 ans qui auraitvocation à se substituer à l'APA (rapport Rosso-Debord), soit une assurance facultative quiviendrait compléter l'APA. Dans ce cadre un « label » pourrait être conféré aux contrats qui

Page 3: Dépêche a journée 25 nov 2010  dépendance

respectent un cahier des charges (outil d'éligibilité, garanties minimales, sélection médicale,évolution des primes et garanties, portabilité des droits, etc.) avec éventuellement « une incitationde type fiscal » en fonction des ressources des souscripteurs, et des marges de manœuvrebudgétaires…

CRITIQUE DU RAPPORT ROSSO-DEBORD

Pour sa part, Luc Broussy, conseiller général PS du Val d'Oise et vice-président de lacommission sociale de l'ADF, a listé quatre points de désaccord avec le rapport Rosso-Debord.Tout d'abord, il ne traite (comme le faisait le rapport Marini-Vasselle) que la question duvieillissement sans aborder la convergence entre la dépendance avant et après 60 ans. Pourautant, Luc Broussy s'oppose à une confusion des prestations handicap et dépendance.

Deuxième sujet de désaccord : le recours sur succession. « Le financement individuel aujourd'huin'est pas la solution, c'est le problème. Les gens ne peuvent pas payer l'ensemble des frais pourcouvrir leur dépendance (…) il s'agit donc de savoir comment les solvabiliser plutôt qued'inventer de nouvelles pistes pour les faire payer davantage ». Luc Broussy estime le recourssur succession « injuste » notamment parce qu' « il encourage les donations » (certainespersonnes seront prises en charge par la collectivité parce qu'elles auront tout légué à leursenfants avant de devenir dépendantes). Cette solution pose par ailleurs la question de savoir« quelle frontière il faut mettre entre la perte d'autonomie et les soins » : on ne récupérera pas lessommes engagées par la collectivité pour soigner un cancer mais on le fera pour la prise encharge de la dépendance…

L'assurance préconisée par le rapport ne prend pas non plus en compte la capacité contributivedes assurés (on paie en fonction de son seul risque et non en fonction de ses moyens). Enfin, lasuppression de la prise en charge des GIR 4 par l'APA est « absurde » et « stupide » puisque lesGIR 4 seront alors de nouveau pris en charge par l'aide ménagère des caisses vieillesse et« aucune caisse vieillesse ne peut assumer cela ».

Luc Broussy estime qu'il faut augmenter la part du financement de solidarité nationale, ce quisuppose un prélèvement nouveau si besoin en alignant le taux de CSG des retraités sur celuides actifs de manière « lissée dans le temps » (sur 5 ans). Il préconise par ailleurs d'alourdir lafiscalité sur le patrimoine. Enfin, comme Denis Jacquat, Luc Broussy insiste également sur lanécessité d'instaurer un plan de prévention de la dépendance avec des moyens conséquents etde manière plus générale une adaptation de la société au vieillissement de sa population. « Laprise en charge de la dépendance ne constitue qu'un élément - certes important - d'une politiqueglobale de prévention du vieillissement dans ce pays » estime-t-il.

D'après la FFSA, 5 millions de personnes sont actuellement couvertes contre le risque de perted'autonomie dont 1,5 million par les assureurs, 3,2 millions par les mutuelles « 45 » et 0,3 million parles institutions de prévoyance. La collecte annuelle de cotisations dans le cadre de ces contrats estsupérieur à 500 millions d'euros pour un encours total de 3 milliards d'euros. Les trois quarts dumontant des cotisations sont collectés par les sociétés d'assurance (essentiellement 27 sociétésd'assurances dont 4 qui se partagent le gros du marché). Les sociétés d'assurance ont en effet collecté374,6 millions d'euros de cotisations en 2009 (le montant moyen de la cotisation annuelle s'établit à360 euros).

Environ 150 millions d'euros de prestations sont versées chaque année au titre des 15 000 rentes encours (le montant moyen de ces rentes s'établit à 550 euros par mois). 81 % des rentes serviesactuellement ne concernent que la dépendance lourde mais la moitié des contrats commercialisésaujourd'hui couvrent également la dépendance partielle.

Page 4: Dépêche a journée 25 nov 2010  dépendance

À lire aussiLa première « Matinale parlementaire de l'assurance » lance le débat sur le financement de ladépendanceAEF n° 140759 du Mercredi 17 novembre 2010

Dépendance : « Je souhaite la création d'un nouveau risque, d'une nouvelle branche de lasécurité sociale » (Nicolas Sarkozy)AEF n° 140733 du Mercredi 17 novembre 2010

Valérie Rosso-Debord veut rendre obligatoire la souscription d'une assurance dépendance dès50 ans et relever la CSG des retraitésAEF n° 134045 du Jeudi 24 juin 2010

Dépendance: le gouvernement enterre le recours sur succession au profit d'une "contributionvolontaire sur le patrimoine"AEF n° 96835 du Mercredi 28 mai 2008

Dépendance: la mission sénatoriale d'information dispose de six mois de plus pour affiner sespropositionsAEF n° 99092 du Mardi 8 juillet 2008

Cette dépêche fait partie du dossier :Cinquième risque

Dépêche n° 141253 © Copyright AEF - 1998/2010 - ipConformément au code sur la propriété intellectuelle, toute reproduction ou transmission, de cette dépêche eststrictement interdite, sauf accord formel de AEF.