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Chronologie du mandat d’arrêt européen 27 Septembre 1996 : signature du Traité de Maastricht instituant le « troisième pilier » de l’Union européenne dans un objectif de « coopération dans les domaines de la Justice et des affaires intérieures (article K 3). 2 Octobre 1997 : signature du Traité d’Amsterdam assignant comme objectif à l’action en commun dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale ; 15 et 16 Octobre 1999 : Conseil européen de Tampere élevant les questions liées à l’espace de liberté, de sécurité et de justice au premier rang des priorités des Etats membres de l’Union européenne ; le principe de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et des jugements a vocation à devenir « la pierre angulaire de la coopération judiciaire tant civile que pénale au sein de l’Union » ; proposition de suppression de la procédure formelle d’extradition entre les Etats membres pour les personnes qui tentent d’échapper à la Justice après avoir fait l’objet d’une condamnation définitive et de création de procédures accélérées d’extradition. Juillet 2000 : la commission dépose un rapport au Conseil des ministres et au Parlement. 11 Septembre 2001 : attentats aux Etats-Unis. 21 Septembre 2001 : Conseil européen extraordinaire de Bruxelles et adoption d’un « plan d’action » contre le terrorisme, dont le premier pont consiste dans la mise en place d’un mandat d’arrêt européen ayant vocation à se substituer au système actuel d’extradition entre Etats membres. 11 Décembre 2001 : propositions de la Commission européenne de deux décisions cadres, l’une relative à la lutte contre le terrorisme et l’autre relative au mandat d’arrêt européen puis accord politique sur la seconde proposition. 14 Décembre 2001 : Conseil européen de Laeken entérinant cet accord politique. 13 Juin 2002 : adoption par le Conseil de l’Union européenne de la décision cadre « relative au mandat N°1

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Chronologie du mandat d’arrêt européen

 27 Septembre 1996 : signature du Traité de Maastricht instituant le « troisième pilier » de l’Union européenne dans un objectif de « coopération dans les domaines de la Justice et des affaires intérieures (article K 3).

2 Octobre 1997 : signature du Traité d’Amsterdam assignant comme objectif à l’action en commun dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale ;

15 et 16 Octobre 1999 : Conseil européen de Tampere élevant les questions liées à l’espace de liberté, de sécurité et de justice au premier rang des priorités des Etats membres de l’Union européenne ; le principe de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et des jugements a vocation à devenir « la pierre angulaire de la coopération judiciaire tant civile que pénale au sein de l’Union » ; proposition de suppression de la procédure formelle d’extradition entre les Etats membres pour les personnes qui tentent d’échapper à la Justice après avoir fait l’objet d’une condamnation définitive et de création de procédures accélérées d’extradition.

Juillet 2000 : la commission dépose un rapport au Conseil des ministres et au Parlement.

11 Septembre 2001 : attentats aux Etats-Unis. 21 Septembre 2001 : Conseil européen extraordinaire de Bruxelles et adoption d’un

« plan d’action » contre le terrorisme, dont le premier pont consiste dans la mise en place d’un mandat d’arrêt européen ayant vocation à se substituer au système actuel d’extradition entre Etats membres.

11 Décembre 2001 : propositions de la Commission européenne de deux décisions cadres, l’une relative à la lutte contre le terrorisme et l’autre relative au mandat d’arrêt européen puis accord politique sur la seconde proposition.

14 Décembre 2001 : Conseil européen de Laeken entérinant cet accord politique. 13 Juin 2002 : adoption par le Conseil de l’Union européenne de la décision cadre

« relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres ».

26 Septembre 2002 : avis du Conseil d’Etat français selon laquelle le mandat d’arrêt européen est bien conforme aux principes constitutionnels français ; cependant, il précise que sa transposition dans notre droit interne doit conduire à écarter le principe constitutionnel selon lequel l’Etat doit se réserver le droit de refuser l’extradition pour les infractions qu’il considère comme des infractions à caractère politique.

17 Décembre 2002 : adoption à l’unanimité du mandat d’arrêt européen par l’Assemblée Nationale française.

13 Février 2003 : adoption du mandat d’arrêt européen par le Sénat français. 25 Mars 2003 : adoption de la loi relative au mandat d’arrêt européen par la France et

création au Titre XV de la Constitution françaises relatif aux communautés européennes et à l’Union européenne d’un troisième alinéa à l’article 88-2 mentionnant explicitement le mandat d’arrêt européen.

1er Janvier 2004 : entrée en vigueur théorique de la décision cadre du 13 Juin 2002 et substitution de cette décision cadre aux textes existants en la matière.

9 mars 2004 : loi Perben II introduit le mandat d’arrêt européen dans le code de procédure pénale.

12 Avril 2005 : adoption d’un projet de loi sur le mandat d’arrêt européen par l’Italie, dernier pays de l’Union à ne pas l’avoir encore fait.

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Présentation du mandat d’arrêt européen.Le mandat d’arrêt européen est né de la constatation des lacunes de l’extradition.

L’extradition, longtemps seul mécanisme de coopération entre les Etats en la matière est une procédure lourde et aléatoire. En droit français cette procédure suppose une décision du pouvoir exécutif, pouvant éventuellement être suivi d’un recours administratif contre celle-ci. La validité des décisions de justice s’arrêtant aux frontières, « tout donne l’impression que les Etats, certes portés à s’entraider, le font dans un climat de méfiance, aux mieux de prudence » comme le fait remarquer le professeur Pradel, ce qui ne paraissait plus en phase avec la volonté des Etats membres de l’UE ayant décrétés un « espace judiciaire pénal européen » au sein du traité d’Amsterdam. En outre le développement considérable de la criminalité transnationale a mis en évidence les limites de cet instrument juridique. Plusieurs étapes furent franchies avant que l’on en arrive au mandat d’arrêt européen (nous ne ferons ici que les mentionner dans la mesure où un autre exposé traitera de l’extradition). La convention d’application de l’accord de Schengen (1985) relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes du 19 juin 1990 prévoit un régime simplifié consistant dans la possibilité d’extrader un individu sans procédure formelle en cas de consentement de celui-ci. Dans ce sillage deux autres conventions seront élaborées au sein du conseil des ministres de la Justice et des Affaires intérieures. La première relative à la procédure simplifiée d’extradition entre les Etats membres de l’UE du 10 mars 1995 reprend cette possibilité en cas d’accord à la fois de la personne concernée et de l’Etat requis. La seconde relative à l’extradition entre les Etats membres de l’UE du 27 septembre 1996 supprime la règle de la demande d’extradition par voie diplomatique, chaque Etat désignant une autorité centrale chargée de transmettre et recevoir les demandes d’extradition. Mais ces conventions ont connu peu de succès, d’ailleurs la France ne ratifiera jamais ni l’une ni l’autre. Ce qui expliqua que les membres ayant ratifié, pris d’impatience conclurent des traités bilatéraux en ce sens (ex : Espagne – Italie, Espagne – Grande Bretagne). Traités bilatéraux que la commission ne manquera pas de mentionner au sein des motifs de sa proposition de décision cadre, comme facteur de complexification dans le domaine. Suite aux attentas du 11 septembre les choses se sont précipitées et après d’âpres négociations la décision cadre est adoptée le 13 juin 2000. En vertu de celle-ci les Etats membres s’engagent à exécuter tout mandat d’arrêt européen sur la base du principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales. Le mandat d’arrêt européen est défini a l’article 1er comme « une décision judiciaire émise par un Etat membre en vu de l’arrestation et de la remise par un autre Etats membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté ». Le mandat d’arrêt européen eu un démarrage quelque peu difficile dans la mesure où seuls huit membres avaient transposé la décision-cadre dans leur droit interne au 31 décembre 2003, date limite initialement prévue. La France faisait partie des retardataires.

Les organes européens ont choisi comme instrument une décision-cadre, celle-ci n’a pas force obligatoire par elle-même dès lors qu’elle ne lie les Etats membres que par le résultat, et nécessite donc une transposition en droit interne. Avant de soumettre la proposition de loi de transposition au Parlement, le gouvernement a voulu s’assurer de la conformité de la mesure à la Constitution française. Pour ce faire il a dû saisir pour avis le Conseil d’Etat (CE) dans la mesure où le conseil constitutionnel n’était pas compétent. En effet l’article 34 de la Constitution ne concerne que les engagements internationaux soumis à ratification ou à approbation, ce qui n’est pas le cas de la décision-cadre. Le CE a rendu un avis N° 368-282 du 26 septembre 2002 dont la conclusion est « la transposition en droit français de la décision-cadre nécessite, au préalable, une modification de la Constitution ». En effet notre droit français comprend un principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel l’Etat doit refuser l’extradition lorsqu’elle est demandée dans un but politique. Si il résulte de

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la décision-cadre qu’un Etat a le droit de refuser la remise d’une personne s’il a des raisons de croire que la demande de la remise a été émise dans un but politique, celle-ci ne parait pas assurer selon le CE le principe selon lequel l’Etat doit se réserver le droit de refuser l’extradition pour les infractions qu’il considère comme une infraction à caractère politique. Si d’autres législations contiennent un principe similaire ce n’est pas suffisant selon le CE pour en déduire l’existence d’un principe général de l’ordre communautaire. Cette modification de la Constitution est intervenue par le vote d’une loi constitutionnelle relative au mandat d’arrêt européen du 25 mars 2003. Celle-ci contient un article unique rajoutant un troisième alinéa à l’article 88-2 de la Constitution aux termes duquel « la loi fixe les règles relatives au mandat d’arrêt européen en application des actes pris sur le fondement du Traité de l’Union européenne ». Par le vote de cette loi le Congrès a ainsi habilité le Parlement à adopter les règles relatives au mandat d’arrêt européen, conformément à la décision-cadre. Cette transposition par le législateur ordinaire c’est fait pour le moins curieusement. C’est par un amendement sénatorial, présenté par M. Fauchon, au projet de loi portant adaptation de la justice à la criminalité que fut proposé d’insérer le mandat d’arrêt européen au sein du code de procédure pénale. Ainsi la loi du 9 mars 2004 créa un chapitre IV, dans le titre X du livre IV du CPP, consacré au mandat d’arrêt européen. Il comprend 41 articles répartis en quatre sections qu’on va maintenant essayer de vous présenter.

Définition du mandat d’arrêt européen

I - Présentation de l’institution

A – Adoption

La procédure du mandat d'arrêt européen a été adoptée, suite aux attentats du 11 septembre 2001, pour faciliter les poursuites au sein des Etats membres de l'Union en les simplifiant et en les accélérant. Elle permet aussi d'harmoniser les règles en vigueur dans l'espace judiciaire européen. Ainsi, cette nouvelle procédure permet s'avère indispensable pour lutter efficacement contre la grande criminalité internationale (J.-F. Kriegk, Le mandat d'arrêt européen et les projets de lutte contre le terrorisme : LPA mai 2002, n° 102, p.12.)

Le mandat d'arrêt européen a été adopté sur le fondement du 3ème pilier consacré à la coopération policière et judiciaire en matière pénale, plus précisément de l’article 29 du Traité de l’Union européenne en vertu duquel les Etats membres sont convenus «d’offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice, en élaborant une action commune dans le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale ».

Il se fonde aussi sur l’article 31 du traité précité qui précise que l’action commune des Etats membres vise à « faciliter et accélérer la coopération entre les ministères et les autorités judiciaires des Etats membres pour ce qui est de la procédure et de l’exécution des décisions ».

Enfin, c’est conformément aux engagements du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999 , qu’une décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres a é té adoptée par le Conseil de l’Union le 13/06/2002 (Décision-cadre, 13 juin 2002).

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B - Définition

Il s’agit d’une décision judiciaire d’un Etat membre (l’Etat d’émission) en vue de l’arrestation d’une personne dans un autre Etat membre (l’Etat d’exécution) et de sa remise, soit en vue de l’exécution d’une peine, soit pour l’exercice de poursuites.

C - Autorités compétentes

Le mandat d’arrêt européen permet aux autorités judiciaires des Etats membres de prendre contact directement entre elles ; le fait que les gouvernements n’interviennent plus a en quelque sorte étendu le pouvoir territorial des juges nationaux à l’ensemble de l’Union européenne.

II - Principes fondamentaux

Les Etats membres de l’Union, en vertu de cette décision-cadre, s’engagent à exécuter « tout mandat d’arrêt européen » sur base du principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales. Ces Etats membres étaient tenu de prendre « les mesures nécessaires pour se conformer aux dispositions de la décision-cadre au plus tard au 31 décembre 2003 (article 31 §1).

Le texte international envisagé ne saurait s’intégrer directement dans l’ordre juridique des Etats membres ; il doit y être transposé par le législateur national. Ainsi, en France par exemple la décision-cadre prévoyant le mandat d’arrêt européen devait être transposée pour être applicable dans son droit interne.

III - Domaine d’application de la procédure du mandat d’arrêt européen

Le mandat d’arrêt européen est une procédure de remise qui s’applique uniquement entre Etats membres de l’Union. Elle se substitue à la procédure classique d’extradition entre Etats (Décision-cadre dans ses 1er, 5ème, 7ème et 11ème considérants).

Cette procédure ne saurait valoir pour les Etats non membres de l’Union. Un Etat tiers qui veut se faire remettre un individu aura alors recours à la procédure classique d’extradition prévue par les conventions internationales (Convention du Conseil de l’Europe du 13 décembre 1957 et ses protocoles des 15 octobre 1975 et du 17 mars 1978 ;dispositions sur l’extradition contenues dans le titre III de la convention d’application de l’accord de Schengen du 14 juin 1985 signée le 19 juin 1990 ; et deux conventions du Conseil de l’Union européenne en matière d’extradition des 10mars 1995 et 27 septembre 1996 ).

Entre Etats membres de l’Union européenne, la procédure du mandat d’arrêt européen peut s’appliquer, lorsque les conditions pour lancer un tel mandat sont réunies : le mandat, ne peut être émis que pour des faits punis par la loi de l’Etat d’émission d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté d’une durée au moins égale à un an ou lorsqu’une peine ou mesure de sûreté a été infligée pour une durée au moins égale à quatre mois.

Si ces conditions sont réunies, encore faut-il que l’Etat membre ait recours à cette procédure vis-à-vis d’un autre Etat membre. En effet, s’il n’utilise pas cette procédure, l’Etat membre a la possibilité de se faire remettre un individu en utilisant la procédure d’extradition simplifié prévue par la convention relative à la procédure d’extradition simplifiée entre les

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Etats membres de l’Union européenne du 10 mars 1995 (Adoptée sur la base de l’article 34 du Traité de l’Union européenne).

On peut donc constater que le recours au mandat d’arrêt européen pourra avoir lieu plus fréquemment au regard des exigences de durée de la peine encourue qui sont plus faibles que pour l’extradition. En effet, l’extradition, ordinaire comme simplifiée, n’est possible que si les faits sont punis de peines criminelles par la loi de l’Etat requérant, ou bien lorsque les faits sont punis de peines correctionnelles par la loi de l’Etat requérant mais que la peine d’emprisonnement encourue est supérieure ou égale à deux ans d’emprisonnement. En revanche, quand on examine les exigences lorsqu’il a eu une condamnation, on constate que les conditions sont plus dures pour le mandat d’arrêt européen : la sanction infligée doit être supérieure ou égale à quatre mois et elle doit être seulement supérieure ou égale à deux mois pour l’extradition.

Les procédures du mandat d’arrêt européen et d’extradition simplifiée se distinguent de la procédure d’extradition ordinaire, qui ne sera plus utilisée que pour les Etats tiers à l’Union européenne.

Lorsque les Etats concernés sont bien membres de l’Union et que l’Etat d’émission décide d’avoir recours à la procédure du mandat d’arrêt européen, encore faut-il que les conditions de son émission soient remplies.

IV- Conditions d’émission du mandat d’arrêt européen

A - La règle de la double incrimination

1 - Portée de la règle

Pour un certain nombre d’actes criminels, la remise peut être subordonnée à la condition que le fait pour lequel est demandée la remise constitue une infraction en application du droit de l’Etat membre d’exécution.

En revanche, une liste de trente-deux infractions graves pouvant donner lieu à remise sans contrôle de la double incrimination a été dressée, entre autres : terrorisme, traite des êtres humains, corruption, participation à une organisation criminelle, faux monnayage, homicide, racisme et xénophobie, viol, trafic de véhicules volés, fraude y compris la fraude aux intérêts financiers communautaires.

2 - Application en droit français

La loi Perben II, intégrant la décision-cadre, traite de la règle de la double incrimination dans l’article 695-23 du code de procédure pénale. Elle prévoit qu’en principe, pour qu’il puisse y avoir émission d’un mandat d’arrêt européen, il faut que le fait in fractionnel selon l’Etat d’émission, soit aussi in fractionnel au regard de la loi de l’Etat français, Etat d’exécution (CPP, art.695-23, al. 1er). Mais elle prévoit l’abandon du principe de la double incrimination d’une part pour si les faits envisagés sont punis par la loi de l’Etat d’émission d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté supérieure ou égale à 3 ans et, d’autre part, ces faits sont constitutifs d’une des 32 infractions (sus évoquées) considérées comme crimes et délits les plus graves (CPP, art. 695-23, al. 2).

B - Les cas de refus d’exécution et de remise

Chaque Etat membre ne donne pas exécution à un mandat d’arrêt européen si :

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Un jugement définitif a déjà été rendu par un Etat membre pour la même infraction contre la même personne (principe de ne bis in idem) ;

L’infraction est couverte par une amnistie dans l’Etat membre d’exécution ;La personne concernée ne peut pas être considérée responsable par l’Etat membre

d’exécution en raison de son âge.

En présence d’autres conditions (prescription de l’action pénale ou de la peine en application des dispositions de l’Etat membre d’exécution, jugement définitif pour le même fait émis par un pays tiers), l’Etat membre d’exécution peut refuser de donner exécution au mandat. En tout état de cause, le refus doit être motivé.

La décision-cadre prévoit aussi la possibilité de saisir et de remettre certains objets, à savoir des pièces à conviction ou des objets acquis du fait de l’infraction.

Sous présentation de certains renseignements (relatifs au mandat d’arrêt, à la nature de l’infraction, à l’identité de la personne…) tout Etat membre permet le transit sur son territoire d’une personne qui a fait l’objet d’une remise.

Le mandat se traduit, dans la langue officielle de l’Etat membre de l’exécution. De plus, il est envoyé par tout moyen permettant d’en avoir une trace écrite et d’en pouvoir vérifier l’authenticité par l’Etat membre de l’exécution.

En droit français, les cas où la remise doit où peut être refusée sont prévus par les articles 695-22 et695-24 du CPP.

C - Les difficultés posées par les règles nationales existantes : la non extradition pour des motifs politiques et la non extradition des nationaux.

1 - position du problème

La décision cadre semble écarter les obstacles traditionnels applicables en matière d'extradition lorsqu'elle énumère les motifs pour lesquels l'exécution du mandat d'arrêt européen doit(art.3) ou peut(art.4), selon les cas, être refusée et qu'elle fixe les cas dans lesquels l'Etat membre d'exécution peut demander des garanties à l'Etat membre de l'émission(art.5).Elle prévoit, d'une part, que l'Etat d'exécution est tenu de remettre ses ressortissants; mais la remise pourra alors être subordonnée à la condition que la personne recherchée soit renvoyée dans l'Etat d'exécution pour y subir sa peine(art.5 al.4). D'autre part, elle ne réserve pas spécialement le cas des infractions politiques.

2 - Difficultés rencontrées:cas de la France

Il est des cas où la France exclu la remise: quand la personne est requise pour une infraction politique et quant la personne requise est un français.

a) Les infractions politiques

Selon l'article 696-4 du CPP l'extradition n'est pas accordée lorsque le crime ou le délit à un caractère politique ou lorsqu'il résulte des circonstances que l'extradition est demandée dans un but politique.

Les principes de non extradition pour ces deux catégories d'infractions sont considérés comme des principes fondamentaux à valeur constitutionnelle par la jurisprudence du conseil d'Etat (CE, avis, sect., 9 nov.1995, n°35744).

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Or, la décision cadre, dans ses articles 3 et 4, qui prévoient les cas de non exécution du mandat d'arrêt européen, ne comprend pas les infractions politiques.

Cependant, son 12ème considérant prévoit que l'Etat d'exécution peut refuser la remise d'une personne lorsque la demande est faite en raison "des opinions politiques" de cette personne.

Le conseil d'Etat dans son avis du 26 septembre 2002 (16), a estimé que ce 12ème considérant prévoit la possibilité de" refuser la remise d'une personne si la demande est présentée dans un but politique" ; mais la décision-cadre ne prévoit pas la possibilité pour l'Etat de refuser la remise pour une infraction à caractère politique. Aussi, le conseil d'Etat a considéré la décision-cadre contraire à un principe fondamental à valeur constitutionnelle et donc contraire à la constitution. Il a alors estimé nécessaire de modifier la constitution française par la loi constitutionnelle du 25 mars 2003.

b) La non extradition des nationaux

La décision-cadre admet à certaines conditions que la remise d'un national puisse être refusée (CPP, art.4, al.7, 6° et CPP, art.5, al.4, 3°), mais elle ne pose pas une obligation de refuser.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004, la procédure d'extradition ordinaire ne s'applique plus entre Etats membres de l'Union. Joue en priorité, c'est-à-dire quand elle peut s'appliquer, la procédure de mandat d'arrêt européen et donc le nouveau chapitre IV du titre X du livre IV du CPP qui permet, sauf certains cas ou sous certaines conditions, la remise de nationaux par l'Etat français (CPP, art.695-24, al.3 et CPP, art.695-47).

V - Procédure d’exécution du mandat d’arrêt européen

A la différence de l’extradition qui utilise les voies diplomatique, judiciaire et administrative, la procédure du mandat d’arrêt européen est entièrement judiciaire. Elle permet la remise de la personne recherchée, d’autorité judiciaire à autorité judiciaire.

Procédure plus simple et plus rapide, il est revenu à chaque Etat membre d’organiser, la procédure d’exécution du mandat d’arrêt européen.

Nous nous proposons de présenter la situation en général (A) avant d’illustrer le cas de la France (B).

A - Procédure en général

1 - Les grandes lignes de la procédure

En ligne générale, l’autorité d’émission communique le mandat d’arrêt européen directement à l’autorité judiciaire d’exécution. La collaboration avec le système d’information Schengen (SIS) ainsi qu’avec les services d’Interpol est prévue. Si l’autorité de l’Etat membre de l’exécution n’est pas connue, le réseau judiciaire européen fournit son assistance à l’Etat membre d’émission.

Tout Etat membre peut adopter les mesures de contrainte nécessaires et proportionnées à l’encontre d’une personne recherchée. Lorsque la personne recherchée est arrêtée, elle a le droit d’être informée du contenu du mandat ainsi que de bénéficier des services d’un avocat et d’un interprète.

En tout état de cause, l’autorité d’exécution a le droit de décider de maintenir la personne en détention ou de la remettre en liberté moyennant certaines conditions.

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Dans l’attente d’une décision, l’autorité judiciaire d’exécution doit prendre une décision définitive sur l’exécution du mandat d’arrêt européen. Ensuite, elle notifie immédiatement la décision prise à l’autorité d’émission.

Toutefois, lorsque les informations communiquées sont insuffisantes, l’autorité d’exécution peut demander à l’autorité d’émission des informations complémentaires.

Toute période de détention relative au mandat d’arrêt européen doit être déduite de la durée totale de la privation de liberté éventuellement infligée.

La personne concernée peut exprimer son consentement à la remise de manière irrévocable et en étant pleinement informée. Dans ce cas spécifique, l’autorité judiciaire d’exécution doit prendre une décision définitive sur l’exécution du mandat dans les dix jours suivant le consentement.

Chaque Etat membre reste libre de prévoir que, moyennant certaines conditions, le consentement soit révocable. A ce sujet, il doit faire une déclaration à l’acte d’adoption de la décision cadre en indiquant les modalités pratiques permettant la révocation du consentement.

2 - Respect des droits et libertés fondamentaux

La protection des droits et libertés fondamentaux s’impose aux Etats membres de l’Union européenne. Celle-ci est prévue par l’article 6 du Traité de l’Union européenne qui pose les valeurs communes à respecter en visant expressément les normes de la convention européenne des droits de l'homme. Ces droits et libertés sont édictés afin d’assurer à la personne recherchée le droit à un procès équitable (J.-cl Europe, Fasc.6521, §76 s.) tel que prévu aux articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ces normes minimales sont reprises dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000 (JOCE n°C 364, 18 déc. 2000, p.1 ; J.cl. Europe, Fasc. 160, § 86 à 88 et §123 à 126.

B - Procédure en France

La loi française prévoit une transmission et un traitement direct d’autorité judiciaire à autorité judiciaire. En effet dès le premier article du chapitre IV (CPP, art. 695-11) il est indiqué que « le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire ».

1 - Modalités d’exécution

Le chapitre IV, lorsqu’il envisage les modalités d’exécution du mandat d’arrêt européen, distingue selon que l’Etat français est l’Etat d’émission (CPP, art. 695-16 à 695-21) ou l’Etat d’exécution.

a) Etat français, Etat d’émission

Quand la France est l’Etat d’émission, le mandat d’arrêt européen est émis par les juridictions françaises, plus précisément par le Ministère public. L’article 695-16 prévoit les cas pour les quels le Ministère public pourra l’émettre. Soit une juridiction d’instruction, de jugement ou d’application des peines, décerne un mandat d’arrêt, le Ministère public près cette juridiction, afin d’assurer l’exécution de ce mandat pourra émettre un mandat d’arrêt européen (CPP, art.695-16, al.1er). Soit lorsque les juridictions de jugement ont prononcés des peines privatives de liberté d’une durée d’au moins quatre mois, alors le Ministère public pourra émettre un mandat d’arrêt européen, en vue de l’exécution de ces peines (CPP, art.695-16).

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L’article 695-15 prévoit les modes de transmission du mandat d’arrêt européen : soit le Ministère public l’adresse directement, par tout moyen laissant une trace écrite, à l’autorité de l’Etat où se trouve la personne si ce lieu est connu. Autrement le Ministère public le transmet soit par la voie du SIS ( système d’information Schengen ), soit par le système de télécommunication sécurisé du réseau judiciaire européen, soit à défaut par Interpol ou par tout autre moyen laissant une trace écrite.

Cette procédure de remise est beaucoup plus facile à mettre en oeuvre que la procédure d’extradition classique (J.-cl. Procédure pénale, Fasc.25§9 à 43).

En effet lorsque la demande de remise se fait par l’extradition, le cheminement de cette demande revêt une certaine complexité. La demande d’extradition est présentée par le procureur de la République du tribunal territorialement compétent pou juger l’infraction. IL transmet la demande au procureur général de la cour d’appel. Lequel l’envoie au Ministère de la justice. Ce dernier, quand la demande lui paraît fondée, saisit le Ministre des affaires étrangères, qui saisit l’agent diplomatique français accrédité auprès de l’Etat requis, pou qu’il transmette la demande au Ministre des affaires étrangères du dit Etat.

b) Etat français, Etat d’exécution

Lorsque le mandat d’arrêt européen est émis par les juridictions étrangères et que l’Etat français est l’Etat d’exécution, la procédure est la suivante : Si « la personne recherchée se trouve en un lieu connu sur le territoire national, le mandat d’arrêt européen est adressée directement au procureur général territorialement compétent qui l’exécute après s’être assuré de la régularité de la requête. Dans les autres cas, le mandat d’arrêt européen est exécuté au vue de la transmission effectuée dans les conditions prévues à l’article 695-16, alinéa 2 » (CPP, art. 695-26, 1er al.).

La « personne appréhendée en exécution d’un mandat d’arrêt européen doit être conduite dans les 48 heures devant le procureur général territorialement compétent » (CPP, art.695-27, 1er al. 1ère phrase). Il lui notifie le mandat d’arrêt européen (CPP, art.695-28, al. 1er). Il ordonne son incarcération sauf si elle offre des garanties suffisantes de représentation (CPP, art.695-28, al. 3). Enfin, il avise sans délai le Ministère de la justice et lui adresse copie du mandat d’arrêt européen (CPP, art. 695-28, al. 4)

La chambre de l’instruction est immédiatement saisie de la procédure. La personne recherchée comparait devant elle dans les 5 jours qui suivent sa présentation au procureur général (CPP, art.695-29). Le Ministère public et la personne recherchée sont entendus (CPP, art.695-30, al.3). Si lors de sa comparution, la personne recherchée déclare consentir à sa remise et maintient son consentement, la chambre de l’instruction lui demande si elle entend renoncer à la règle de la spécialité. Si la chambre de l’instruction constate que les conditions légales d’exécution du mandat d’arrêt européen sont réunies, dans les 10 jours qui suivent la comparution de la personne recherchée, elle rend un arrêt par lequel elle lui donne acte de son consentement à la remise et le cas échéant de sa renonciation à la règle de la spécialité et accorde la remise (CPP, art. 695-31, al. 1 et al. 2).

En revanche si la personne recherchée déclare ne pas consentir à sa remise, la chambre de l’instruction statue par une décision motivée dans les 20 jours de sa comparution. Cette décision peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation (CPP, art.695-31, al. 3).

Lorsque la décision de la chambre de l’instruction est devenue définitive, elle est notifiée, par le procureur général, à l’autorité judiciaire de l’Etat membre d’émission (CPP, art. 695-37, dernier al.).

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Le procureur général prend alors les mesures nécessaires pour que la personne recherchée soit remise à l’autorité judiciaire de l’Etat d’ (émission au plus tard dans les 10 jours de la décision définitive de la chambre de l’instruction (CPP, art.695-37, al.1er), sauf cas de force majeure (CPP, art 695-38) ou remise différée (CPP, art.695-39) qui nécessiteront des délais supplémentaires.

Ainsi lorsque la remise de la personne recherchée est demandée à l’Etat français, on constate à nouveau que la procédure du mandat d’arrêt européen est une procédure de remise plus simple que la procédure d’extradition.

En France, bien que cette procédure privilégie la célérité et la simplicité dans sa mise en oeuvre, la loi assure le respect des droits et libertés fondamentaux (prévus à l’article 6 du Traité de l’Union européenne) de la personne recherchée.

2 - Respect des droits et libertés fondamentaux en France

La procédure de mandat d’arrêt européen telle que décrite dans le chapitre IV du code de procédure pénale, veille ainsi à garantir les droits et libertés fondamentaux de la personne recherchée.

En effet, le mandat d’arrêt européen prévoit la règle de spécialité et la possibilité, pour la personne poursuivie, d’y renoncer. L’article 695-18, alinéa 1er prévoit la règle de la spécialité du mandat d’arrêt européen quand la France est l’Etat d’émission. Si cet Etat a obtenu la remise de la personne recherchée, pour certains faits, il ne peut la poursuivre, la condamner ou la détenir pour des faits autres, commis antérieurement à la remise. Puis dans les alinéas suivants (CPP, art.695-18, al. 2 à 6) sont prévu cinq cas où la règle de la spécialité peut être écartée. La règle de la spécialité et la possibilité d’y renoncer sont aussi prévu quant la France est l’Etat d’exécution (CPP, art.695-26, al. 2).

La personne poursuivie selon cette nouvelle procédure se voit reconnaître le droit à un avocat. Les articles 695-19, alinéa 2, 695-27, alinéa 2 et 695-30, alinéa 3 prévoient la possibilité, pour la personne remise de se faire assister d’un avocat.

Elle a aussi droit à un interprète. Ce droit est prévu par les articles 695-18, alinéa 2 et 695-30, alinéa 3.

La personne une fois arrêtée est informée du contenu du mandat d’arrêt européen.Dans l’Etat d’exécution, existe des voies de recours contre la décision d’exécuter le

mandat d’arrêt européen. Ainsi, l’article 695-31, alinéa 4 prévoit que « si la personne recherchée ne consent pas à sa remise, la chambre de l’instruction statue par une décision motivée qui peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation par le procureur général ou par la personne recherchée ». L’article 695-32 prévoit aussi « la possibilité de former opposition dans l’Etat membre d’émission à la décision rendue en son absence ».

VI - RECOURS

Les Etats membres sont libres de décider les types de recours qu'ils veulent organiser dans le délai fixé pour la remise. En général, un recours en cassation est prévu.

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Jurisprudence en matière de mandat d’arrêt européenLa jurisprudence de la Cour de cassation en France en matière de mandat d’arrêt européen s’étoffe petit à petit.

Mandat d’arrêt européen et extradition :La chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 15 mars 2005 rappelle qu’aucune disposition légale ne s’oppose à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen alors même qu’une procédure d’extradition est en cours pour les mêmes faits.

Champ d’application dans le temps du mandat d’arrêt européen :Le mandat d’arrêt européen peut recevoir exécution lorsque la demande de remise pour l’exécution d’une peine privative de liberté concerne au moins un fait commis après le 1 er

novembre 1993 justifiant la peine prononcée. Cette décision est soulignée dans un arrêt de la Cour de cassation du 21 septembre 2004.La Cour rappelle le 5 août 2004 que la procédure du mandat d’arrêt européen s’applique si une partie des faits de l’affaire s’est déroulée après le 1er novembre 1993.

Rédaction, notification et transmission du mandat d’arrêt européen :Dans son arrêt du 1er septembre 2004, la cour de cassation approuve la chambre d’instruction d’avoir rejeté les différentes exceptions de nullité soulevées par la personne arrêtée et relatives à la rédaction, à la notification et à la transmission d’un mandat d’arrêt européen.

Mandat d’arrêt européen : refus d’exécutionLa chambre d’instruction peut refuser l’exécution d’un mandat d’arrêt européen quand les faits visés ont été commis en tout ou en partie sur le territoire français, selon la Cour de cassation le 8 juillet 2004.

La chambre criminelle de la Cour de cassation admet dans un arrêt du 13 octobre 2004 que la chambre de l’instruction statue sans recours lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à ce que soient autorisées des poursuites pour d’autres infractions que celles ayant motivé la remise du mandat d’arrêt européen.

Critiques du mandat d’arrêt européen

Critiques positives : Le mandat d’arrêt supprime la prérogative qui était laissée au pouvoir politique de

procéder à une extradition ou de la refuser. Il supprime également le contrôle exercé par les juridictions administratives. La procédure est désormais exclusivement judiciaire : le mandat d’arrêt européen est transmis d’autorité judiciaire à autorité judiciaire, sans détour par la voie diplomatique, l’intervention des autorités centrales étant limitée à un simple rôle de coordination administrative. Il est attendu de cette « judiciarisation », outre bien sûr l’automaticité de la remise lorsque les conditions sont réunies, un raccourcissement des procédures, l’article 17 de la décision cadre posant en principe qu’ « un mandat d’arrêt européen est à traiter et exécuter d’urgence ».

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L’instauration du mandat européen permet d’espérer la fin des résistances nationales excessives tel que dans le cas de Rachid Amda qui a été détenu plus de cinq ans en Grande-Bretagne dans le cas d’une procédure d’extradition.

La suppression du contrôle de la double incrimination pour la majorité des faits évite un contrôle trop étendu du juge de l’Etat d’exécution. Ce contrôle est en effet incompatible avec l’idée même d’un mandat d’arrêt européen.

Alors que la libre circulation des marchandises, des capitaux, des services, des travailleurs et plus largement des personnes, est devenue une réalité quotidienne au sein de l’Union européenne, cette liberté fondatrice du marché unique ne s’étendait pas aux décisions de justice, dont l’effet se confinait dans les limites des frontières nationales. Non seulement un Etat ne pouvait pas procéder lui-même à l’exécution de telles décisions sur le territoire d’un autre Etat, mais aucune règle n’imposait à l’Etat requis d’y procéder lui-même pour le compte de l’Etat requérant. Désormais, avec le mandat d’arrêt européen, les décisions de Justice prennent effet même au-delà des frontières nationales.

La rigueur du principe de souveraineté engendrait un alourdissement considérable des procédures. De plus, l’extradition était une procédure longue, soumise aux aléas des relations diplomatiques, et dont l’issue était le plus souvent suspendue, en dernier ressort, au bon vouloir de l’exécutif de l’Etat requis. Si au sein de l’Union européenne, rien n’était plus aisé pour une personne recherchée que de passer d’un Etat membre à un autre, plusieurs années de procédure pouvaient être nécessaires pour obtenir le retour de la personne dans l’Etat d’origine du forfait. Désormais, le mandat d’arrêt européen devrait éviter ces écueils.

Le mandat d’arrêt européen marque la fin du refus d’extradition des nationaux par les Etats membres de l’Union européenne.

Le mandat d’arrêt européen impose aux Etats membres un mécanisme uniforme dans leurs rapports entre eux.

La décision cadre pose un jalon an matière de reconnaissance mutuelle des décisions de Justice, transposant à la coopération judiciaire un principe respectueux des spécificités nationales.

Critiques négatives : Le Conseil européen de Tampere d’Octobre 1999 a opté pour une reconnaissance

mutuelle des décisions plutôt que pour une harmonisation progressive des législations. Or, la reconnaissance mutuelle des décisions accroît la primauté accordée aux procédures sur la loi proprement dite. De plus, elle permet la mise en place d’un espace judiciaire qui laisse subsister les disparités entre les systèmes pénaux des Etats membres de l’Union européenne. Le mandat d’arrêt européen n’induit pas une unification des législations et des procédures pénales, il permet au contraire la coexistence de profondes disparités entre les Etats membres. La rapidité à mettre en œuvre le mandat d’arrêt européen s’est faite au détriment d’une coopération judiciaire cohérente entre les Etats membres, qui ne peut se faire que par un rapprochement des éléments essentiels de droit pénal et de procédure pénale. Cette coopération judiciaire cohérente doit être fondée sur des projets équilibrés prévoyant notamment un équilibre entre les droits de la défense et les droits de l’autorité de poursuite, entre l’action policière et son contrôle par la Justice.

La coopération judiciaire est abordée sous un angle avant tout répressif et coercitif.

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Le mandat d’arrêt européen n’est qu’un élément de la procédure pénale qui pour être efficace doit aussi prévoir des règles sur le recueil des preuves, l’audition des témoins, l’intervention d’experts…

Le mandat d’arrêt prévu par la décision cadre n’est pas vraiment européen car il ne résulte pas de stratégies d’enquête décidées au niveau européen. Il permet seulement de faciliter l’exécution des mandats délivrés dans le cadre de procédures nationales.

La mise en place d’un mandat européen repose sur un principe de confiance mutuelle. Or, il est loin d’être évident que tous les systèmes pénaux des pays de l’Union respectent la démocratie et l’Etat de droit. De plus, comment interpréter la notion de « violation grave et répétée par les Etats membres des droits fondamentaux » ? En effet, seul cette violation permettra de suspendre la procédure. Or, sans définition réelle de la notion, le mandat d’arrêt européen sera tout puissant même si l’Etat ne respecte pas les droits les plus élémentaires de l’Homme.

Le mandat d’arrêt européen n’implique aucun transfert de souveraineté à une instance supranationale car les décisions d’émettre un mandat comme de l’exécuter appartient aux autorités judiciaires nationales. On est encore bien loin d’une justice de type fédéral.

Le contrôle de constitutionnalité de la décision cadre est problématique compte tenu du fait qu’il s’agit d’un acte de droit dérivé qui a vocation à s’appliquer immédiatement dans le droit interne. Il serait aujourd’hui nécessaire de renforcer les contrôles au niveau européen pour remédier à ce paradoxe.

Aucune procédure ne permet de sanctionner le défaut de transposition, la transposition incomplète ou la transposition tardive (exemple de l’Italie) de la décision cadre.

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