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Accompagnement social et éducatif spécialisé ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ Diplôme d’État d’ ITINÉRAIRES PRO DEES • DC1 Les publics La psychologie La connaissance du milieu socio-culturel L’action éducative L’oral et l’élaboration d’un dossier (DPP) 21 thématiques Connaissances à mobiliser Méthodologie de l’épreuve 5 e édition DIPLÔMES DU SOCIAL N°1

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Accompagnement social et éducatif spécialisé

ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉDiplôme d’État d’

ITINÉRAIRESPRO

DEES • DC1

✔ Les publics

✔ La psychologie

✔ La connaissance du milieu socio-culturel

✔ L’action éducative

✔ L’oral et l’élaboration d’un dossier (DPP)

21 thématiques

Connaissancesà mobiliser

Méthodologie de l’épreuve

5e édition

DIPLÔMES DU SOCIAL

N°1

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Introduction générale – Logique et philosophie du DC 1 7

Partie 1 Essai d’une typologie des publics qu’un éducateur spécialisé peut rencontrer

Introduction 12

1. Enfants ou adolescents présentant des troubles du comportement, des difficultés d’insertion ou de socialisation 17

2. Publics handicapés moteurs, mentaux ou sensoriels adultes 25

3. Adultes en difficulté d’insertion sociale, familiale, professionnelle ou psychologique 30

Conclusion – Lorsqu’alter rencontre ego 33

Types de structures éducatives, sociales, médicales et médico-sociales 35

Partie 2 PsychologieIntroduction 42

1. Les théories du fonctionnement psychique 44

2. L’être humain : un être en devenir 55

3. Psychopathologie 75

4. Thérapeutiques 91

Conclusion 107

Partie 3 L’acteur dans son environnement socio-culturel

1. Le processus de socialisation par la culture 110

Sommaire

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2. Sociétés modernes et sociétés traditionnelles 114

3. L’intégration, processus qui complète la socialisation 121

4. La socialisation selon Pierre Bourdieu 124

5. Stigmatisation 128

6. Des lieux de socialisation 133

7. La famille 135

8. Le monde de la jeunesse 147

9. L’insertion 171

10. L’entreprise 177

11. L’exclusion 182

12. La situation spécifique de la migration 191

13. Les freins à l’apprentissage 195

14. L’économie comme facteur de socialisation 202

Partie 4 Éléments de pédagogie de l’éducation spécialisée

1. Fonctionnement collectif et place de la personne 220

2. L’action éducative : les fondements 255

3. L’action éducative : les supports 304

Partie 5 La certification : épreuve de pratiques professionnelles

L’épreuve de pratiques professionnelles 338

Conclusion générale – Un guide pour une éthique éducative spécialisée 342

Bibliographie générale 343

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Adultes en difficulté d’insertion sociale, familiale, professionnelle ou psychologique

Structures et professionnels dédiés aux adultes rencontrant des difficultés de diverses natures sont nombreux à œuvrer quotidiennement. Des publics sont accompagnés par des éducateurs dans des missions diverses dans les asiles de nuit, entreprises d’insertion, centres d’adaptation à la vie active, centres d’accueil pour demandeurs d’asile, centres provisoires d’hébergement pour réfugiés, centres spécialisés de soins aux toxicomanes, centres de cure, de post-cure, lieux de vie, centres hospitaliers universitaires, centres de stabilisation, etc. Ils sont nombreux à développer à la fois projets et identités profession nelles adaptées aux logiques et besoins des publics accueillis.

Si l’on se focalise plus particulièrement sur les CHRS, on retrouve dans ces structures des publics que les réfugiés partagent avec d’autres partenaires. Issus de la tradition asilaire, les éducateurs intervenant dans les centres d’hébergement et de réinsertion sociale rencontrent aujourd’hui des nouvelles populations, à l’image des réfugiés ou des demandeurs d’asile par exemple.

Dans un rapport FNARS, il était mentionné qu’environ 30 % des publics hébergés en CHRS sont des travailleurs pauvres. Cela crée de fait un effet miroir complexe à gérer pour le travailleur social : son usager lui ressemble de plus en plus. Certains établissements de type CHRS accueillent hommes, femmes, familles ou des publics qui conjuguent des problématiques multiples, parfois singulières (conduites addictives, porteurs du VIH, porteurs du VHC), et voient ainsi leurs missions muer avec le temps, passant de l’hébergement d’urgence à l’accompagnement social.

Les éducateurs sont devenus les témoins privilégiés de la paupérisation des publics accueillis et de l’augmentation de problèmes de santé physiques et mentaux. Ces publics fragilisés tant du point physique que psychologique viennent questionner les éducateurs et les institutions sur les critères de prise en charge, certaines personnes se situant à la marge entre prise en charge sociale et psychiatrique. Même si la notion de souffrance psychosociale devient centrale, une question aujourd’hui demeure majeure et réfère aux critères ou traces qui

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Adultes en difficulté d’insertion sociale, familiale, professionnelle ou psychologique

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permettent de considérer une personne davantage sur un versant qu’un autre : prise en charge médicale ou accompagnement social ?

Parce qu’un nombre important de CHRS sont mixtes, les publics sont aujourd’hui composés d’une population hétérogène : femmes et hommes sans ou avec enfants (scolarisés pour la majeure partie d’entre eux, jeunes ou âgés, même si les premiers paraissent moins nombreux), demandeurs d’asile, ex-déte-nus, personnes victimes d’une rupture personnelle, etc. Les profils sont devenus très disparates, invitant les professionnels à une adaptabilité plus grande et une capacité à travailler en réseau plus conséquente. Une partie de cette population a un niveau scolaire au moins égal au baccalauréat, et une part non négligeable d’individus ont une expérience professionnelle effective. Cette configuration balaie vivement les représentations qui associaient les CHRS à des structures n’accueillant que les sans-domicile-fixe, le « SDF » semblant incarner la figure du nouvel errant ou nomade des sociétés modernes. Sans contribuer à la construc-tion d’une nouvelle allégorie, une mise en relief des indices communs à une partie des personnes accueillies en CHRS est cependant permise.

« Nous avons de plus en plus, dans notre structure, des personnes qui ont des problèmes de santé assez graves, une dépendance alcoolique plutôt forte, notam-ment chez les hommes, et des femmes qui sont de plus en plus nombreuses à présenter des problématiques psychiatriques. On remarque également chez eux une forme de distance à des choses, telles que le travail, le vivre avec les autres, la sociabilité quotidienne. On a par exemple des personnes qui, malgré une vraie expérience profes sionnelle ou un excellent niveau scolaire, sont aujourd’hui loin du travail, tellement loin qu’on a le sentiment qu’elles ont perdu l’attache ou l’accroche qui pourrait les faire renouer avec cet univers. De fait, cela nous conduit à réviser nos basiques et nos modalités d’appro che et d’accompagnement. »

G., éducateur spécialisé

Les prestations proposées par les éducateurs en CHRS semblent avant tout orientées vers la resocialisation des personnes, considérant que pour les profes-sionnels rencontrés, les freins les plus importants pour les personnes en grande difficulté sont ceux générés par les problèmes de santé graves. En définitive, la complexité des prises en charge résulte intrinsèquement de la combinaison des difficultés portées par l’usager. Cela n’est pas sans questionner la désignation de ce dernier par les professionnels : quelle problématique devient prioritaire et permet de qualifier l’usager accompagné ? Cette réflexion permet de reconsidérer d’une part la catégorie, d’autre part les dispositifs qui reposent pour la plupart sur une difficulté considérée comme majeure et sur laquelle vient s’appuyer puis se déployer la prise en charge.

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Essai d’une typologie des publics qu’un éducateur spécialisé peut rencontrer

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« Avec nos publics, je dirais qu’il faut agir en même temps et en fonction de chacun, de sa trajectoire, de ses ressources, de son état, dans des directions diverses. À côté des questions d’hébergement et d’aide à la recherche d’un loge-ment, nous menons de nombreuses actions pour l’insertion professionnelle, avec notamment de l’aide à la recherche d’emploi, de formation ou de stage. À cela il faut ajouter d’autres problé matiques qu’ont à gérer nos usagers, entre autres des besoins en conseil juridique, accès aux droits, particulièrement chez les migrants mais pas uniquement, ainsi qu’un travail d’accompagnement ou d’adaptation à la vie sociale, active, économique : ce que l’on appelle plus simplement de la remobilisation. Cette remobilisation est généra lement complétée par tout ce qui est accompagnement avec consultations et suivi médical, et l’on s’aperçoit que l’on se retrouve avec des publics où tout est enchevêtré, tout est prioritaire, et rien ne peut être traité sans prendre en considération la problématique adjacente. »

C., chef de service CHRS

Comment donc qualifier ces personnes très souvent considérées comme « en situation de crise ou d’urgence sociale » et dont le qualificatif mériterait qu’on le déconstruise ? Comment qualifier cet usager accompagné aujourd’hui qui peut tout à la fois être malade, apatride, sans logis, désocialisé, seul, sans emploi, etc. ? Comment l’éducateur reconnaît-il ces personnes, considérant que la déclinaison se fait en vue d’une réponse adaptée aux besoins fondamentaux de ces derniers ?

Dans cette multitude de personnes en souffrance, en errance ou simplement en difficulté, l’éducateur spécialisé est amené à croiser des « familles échouées, éclatées, explosées » (parfois ce qu’il en reste), ou bien encore des femmes avec leurs enfants plongés ensemble pour de multiples raisons dans des difficultés conplexes, qu’il appréhende à la fois singulièrement et dans leurs logiques grou-pales ou systémiques. Avec toujours ce leitmotiv : comment évoquer une catégorie de publics quand ces derniers ne répondent pas à des indicateurs qui pourraient la fonder, comme c’est le cas pour les victimes de violences qui ne répondent plus aujourd’hui à un profil type ? Les critères d’âge, d’appartenance à une classe sociale, économiques et culturels particuliers, de lieu et de qualité d’habitation ou d’origine géographique, ethnique (pour ne citer qu’eux) ne peuvent en aucun cas dessiner « la femme victime de violence » de la même manière qu’ils ne peuvent désigner des sujets qui traversent d’autres difficultés, tels « les toxico-manes » ou les « addicts » par exemple. Dans ce souci d’identification des publics, nous ne pouvons omettre d’interroger la qualité de ceux que les éducateurs de prévention tout comme les éducateurs de rues rencontrent.

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Conclusion Lorsqu’alter rencontre ego

Les publics que rencontrent les éducateurs spécialisés dans le cadre de leurs missions sont très variés tant du point de vue de leur situation, de leurs difficul-tés, de leurs caractères que de leurs problématiques. Ces dernières sont à la fois si semblables et si différentes qu’il serait vain de vouloir en saisir avec précisions toutes les figures.

Malgré tout, une des fonctions fondamentales de l’éducateur est de « norma-liser » ou de « rendre acceptable » les personnes qui lui sont confiées, pour un mieux-vivre ensemble. Derrière cette dimension éducative qui traverse de fait la dénomination de sa profession, éducateur, la contradiction présente dans les missions de ce dernier se retrouve également chez les usagers qu’il a en charge, l’incitant à composer avec. « Nous ne savons pas, nous ne voulons pas savoir que nous avons affaire à des êtres essentiellement contradictoires, puisque précisé-ment ils se font à partir de leurs contradictions. En refusant la contradiction ou en la tranchant purement et simplement par un décret volontaire, on renonce à l’assumer et on se prive du même coup du pouvoir de la dépasser 1. »

Considérons alors que la volonté farouche d’inscrire l’autre dans cette « démarche normative » se conjuguera sans cesse avec le diagnostic social, psychologique, environnemental, lui-même métamorphosé sous l’effet des représentations communes en pronostic de retour ou pas à l’état de « normalité acceptable ». Inéluctablement, les dispositifs d’assistance ou de prise en charge ont par essence une incitation à redessiner l’autre, l’usager, en début de prise en charge et au fur et à mesure de son évolution. Avec des objectifs de réparation et ce, à partir de standards, modèles et autres figures de référence, l’éducateur spécialisé tente d’éviter certains écueils, notamment l’enfermement de l’autre dans un schéma prescriptif, rejoignant dès lors ce que Jacques Lacan désignait par « orthopédie mentale ». En effet, derrière cette transformation normative d’un enfant, adolescent ou adulte en usager, il préexiste fondamentalement, à travers un certain nombre de protocoles conjugués à des rituels 2, une rencontre entre un professionnel et un sujet où chacun accède à une forme de légitimité

1. Jacques Ardoino, Propos actuels sur l’éducation, Tome 1, Éditions Gauthier-Villars, 1978.2. Nous entendons « rituel » au sens où Claude Lévi-Strauss le définit : « Il consiste en paroles proférées, gestes accomplis, objets manipulés, indépendamment de toute glose ou exégèse appelée par ce genre d’activité, et qui relève non pas du rituel même, mais de la mythologie implicite, […] en quoi ces opérations telles qu’on les exécute au cours du rite diffèrent des opérations analogues dont la vie quotidienne offre aussi l’occasion » (L’Homme nu, éditions Plon, 1971).

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Types de structures éducatives, sociales, médicales et médico-sociales

Cette liste indicative reprend la typologie du DERPAD 1. Elle dresse l’ensemble des structures susceptibles d’intégrer une fonction éducative spécialisée. Mis en œuvre par une convention interministérielle signée en 1996, le DERPAD – groupement d’intérêt public depuis mars 2006 – a pour objet d’apporter de nouveaux outils aux équipes sanitaires, éducatives, sociales, pédagogiques de l’Île-de-France en charge de situations de jeunes particulièrement en difficulté.

1. Soins somatiques/sidaServices hospitaliers

– Médecine des adolescents et santé publique – Pédiatrie – Services de consultation – Permanences d’accès aux soins de santé (PASS)

Dispensaires et centres de soins divers – Maisons d’enfants et pouponnières à caractère sanitaire – Établissements de réadaptation, de rééducation et de convalescence – Centres de santé dentaire – Dispensaires et centres de santé polyvalents – Centres d’examens de santé – Centres de soins infirmiers

Dispositifs de soins sida – Centres de dépistage anonyme et gratuit – Hébergements « Sida info service »

1. Dispositif expert régional pour adolescents en difficulté : 75, rue de Turbigo 75003 Paris – tél. : 01 53 42 36 15 – fax : 01 53 04 03 72 – [email protected].

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Essai d’une typologie des publics qu’un éducateur spécialisé peut rencontrer

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2. Soins psychiques – Hospitalisation complète en psychiatrie des adultes – Hospitalisation complète en psychiatrie des enfants et adolescents – Hospitalisation et accueil de jour des adultes – Hospitalisation et accueil de jour des enfants et adolescents

Autres services de soins – Accueils en urgence – Centres médico-psychologiques des adultes (CMP) – Centres médico-psychologiques des enfants et adolescents (CMP) – Services de consultation en psychiatrie – Centres d’accueil et de crise (CAC) – Centres d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) – Centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) – Bureaux d’aide psychologique universitaires (BAPU) – Centres d’action médico-sociale précoce (CAMPS) – Appartements thérapeutiques – Ateliers thérapeutiques – Services médico-psychologiques régionaux (SMPR) – Centres de post-cure pour malades mentaux – Centres de thérapie familiale – Placements familiaux spécialisés

3. Toxicomanie/alcoologieToxicomanie

– Centres d’accueil et de soins spécialisés – Services de prévention, insertion et réduction des risques – Points écoute

Alcoologie – Centres de soins en alcoologie – Services de prévention ou d’insertion – Mouvements d’anciens malades

4. Éducation spéciale des enfants et adolescents – Centres scolaires et/ou professionnels – Instituts médico-éducatifs (IME), médico-pédagogiques (IMP) et médico-

professionnels (IMPRO)

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Types de structures éducatives, sociales, médicales et médico-sociales

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– Instituts thérapeutiques, éducatifs et pégagogiques – Centres d’accueil familial spécialisé – Foyers d’hébergement spécialisés – Établissements pour handicapés moteurs et sensoriels – Services d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) – Jardins d’enfants spécialisés

5. Protection de l’enfanceProtection administrative (publique et habilitée)

– Foyers de l’enfance – Maisons d’enfants à caractère social – Villages d’enfants – Centres de placement familial socio-éducatif – Établissements d’accueil mère-enfant – Pouponnières à caractère social

Protection judiciaire (publique, PJJ et habilitée) – Unités éducatives (ou services) auprès des tribunaux – Centres d’action éducative (CAE) – Centres d’action éducative et d’insertion (CAEI) – Foyers d’action éducative (FAE) – Centres de placement immédiat (CPI) – Centres éducatifs renforcés (CER) et fermés (CEF) – Services éducatifs en milieu carcéral

Autres services – Services de milieu ouvert – Services de réparation et services de médiation pénale – Médiation familiale, parentale… – Lieux de vie – Clubs de prévention – Lieux d’accueil et d’écoute – Accueils d’urgence (enfants et adolescents) – Services d’hébergement diversifié – Insertion scolaire et professionnelle

6. PMI, planification familialeÉtablissements de PMI et de planification familiale

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Essai d’une typologie des publics qu’un éducateur spécialisé peut rencontrer

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7. Scolaire, périscolaire et orientationOrientation

– Centres d’information et d’orientation (CIO) – Maisons départementales pour personnes handicapées (MDPH) (ex CDES) – Missions locales et permanences d’accueil (PAIO) – Espaces dynamique insertion

Établissements scolaires – Collèges et lycées – Centres de formation d’apprentis ou professionnelle – Internats scolaires (collèges et lycées) – Lycées professionnels et/ou agricoles – Maisons familiales et rurales – Autres écoles de formation

Classes d’enseignement spécialisé – Établissements régionaux d’enseignement secondaire adapté – Section d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) – Classes relais – Unités pédagogiques d’intégration – Classes pour non-francophones

8. Jeunes majeurs, adultes et famillesServices d’aide à la famille et divers

– Circonscriptions d’action sanitaire et sociale – Travailleuses familiales – Services d’aide et d’action socio-éducative – Entreprises d’insertion – Maison de la justice et du droit Points d’accès au droit – Agences locales pour l’emploi

Établissements d’hébergement et d’accueil – Foyers de jeunes travailleurs (FJT) – Centres provisoires d’hébergement – Centres d’accueil non conventionnés – Centres d’adaptation à la vie active (CAVA) – Centres pour demandeurs d’asile – Centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) – Accueils d’urgence

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Types de structures éducatives, sociales, médicales et médico-sociales

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– Espaces solidarité insertion (ESI) – Accueil éducatif des jeunes majeurs

9. Adultes handicapésServices d’hébergement

– Foyers – Maisons d’accueil spécialisées – Placements familiaux spécialisés – Services d’accompagnement à la vie sociale

Autres services – Travail protégé (ESAT…) – Formation et réinsertion professionnelle – Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH, ex COTOREP)

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Les théories du fonctionnement psychique

L’intérêt que l’homme porte à lui-même et au monde qui l’entoure n’est pas nouveau. Il existe depuis la plus haute Antiquité. Ce qui préoccupait les philo-sophes de la Grèce antique, berceau de notre civilisation, c’était la question de la place que l’homme occupait dans le monde qui l’entourait, des rapports qu’il entretenait avec celui-ci. Que pouvait-il connaître de ce monde ? Le monde exis-tait-il sans lui, à jamais inconnaissable ? La connaissance du monde était-elle à jamais tributaire de l’incarnation humaine et donc subjective ? La discussion prenait la forme, pour Platon, d’un débat entre l’intelligible et le sensible. Le conflit entre objectivité et subjectivité était né. Il dure depuis plus de deux mille ans. La philosophie s’est d’abord préoccupée de la connaissance du monde, de sa nature, et des modalités de cette connaissance. L’intérêt de la recherche s’est déplacé ensuite sur l’homme. Il a commencé à devenir un objet de connais-sance pour lui-même, au centre du dispositif de compréhension du monde. Il est devenu sujet de la connaissance, source du savoir sur lui-même et sur le monde. C’était au siècle des Lumières.

La psychologie, telle que nous la connaissons aujourd’hui, s’est constituée à la fin du xixe siècle, lorsque l’essor des disciplines scientifiques, la génétique, la physiologie, a suscité le souhait d’un rassemblement de toutes les connais-sances qui concernaient l’homme pour les unifier. Conçu dans un premier temps comme discipline scientifique, objectivable, expérimentable, le débat d’origine entre l’objectif et le subjectif s’est déplacé à l’intérieur même de la psychologie, donnant naissance à la psychologie expérimentale et à la psychologie clinique.

La psychologie expérimentale, calquée sur le développement des sciences, a pour objectif de mettre en évidence des liens de causalité entre différents phénomènes observés et les lois qui les régissent. Elle repose sur l’énoncé d’une hypothèse et sur sa démonstration par une expérimentation qui valide ou inva-lide la proposition de départ. Les outils de la psychologie expérimentale sont le contrôle des variables de l’expérimentation, la quantification, la mesure des résultats.

La psychologie clinique s’appuie sur l’écoute du sujet, son observation, la prise en compte de ses paroles.

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Les théories du fonctionnement psychique

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Ces différentes approches reposent sur des conceptions philosophiques diffé-rentes de l’homme. Leurs apports respectifs procèdent d’un point de vue qui ne peut se donner chaque fois comme unique, mais dont l’originalité serait de venir enrichir, interroger, compléter les théorisations déjà existantes. Elles témoignent, au-delà des divergences, de l’extraordinaire vitalité et fertilité de ce champ de connaissance.

1. La psychanalyse

a. La naissance de la psychanalyseLe fondateur de la psychanalyse, Sigmund Freud, né en 1856 dans l’Empire autrichien, est mort en 1939 en Angleterre où il venait de se réfugier après le rattachement de son pays à l’Allemagne nazie. Pendant toute sa carrière, Freud a tâché de décrire avec une précision toujours plus fine le fonctionnement de l’appareil psychique et d’apporter des réponses à des questions telles que  : Qu’est-ce qui nous fait agir ? décider ? penser ? rêver ? réussir ou échouer ? mourir même ? Freud ne s’est pas contenté d’élaborer un travail théorique : la majeure partie de son temps, il l’a passée à écouter des patients pour tenter de soulager leur souffrance. Freud, au début de sa carrière, est un scientifique qui travaille en neuropathologie. Puis il découvre les leçons de Charcot, psychiatre à la Salpêtrière, lequel se montrait capable, en public, au moyen de l’hypnose, de susciter, puis de supprimer à volonté paralysies et anesthésies chez ses patientes hystériques. Preuve est faite alors de l’absence de toute causalité organique dans l’origine des troubles.

Sa rencontre avec le docteur Breuer, qui soignait également des patientes hysté-riques, le conforte dans l’idée de l’importance de la remontée à la conscience d’états émotionnels et de souvenirs enfouis par le biais de la talking cure, la cure par la parole.

Dès lors, au fil des années, alternant hésitations, innovations, corrections, Freud élabore les concepts et la méthode de la psychanalyse.

Ses idées ont cheminé bien après lui et font partie maintenant de notre patri-moine culturel, celui que l’on utilise sans plus savoir d’où il vient.

b. L’inconscient : le réservoir des pulsionsL’inconscient est le concept principal de la psychanalyse. Si Freud a inventé le mot, il n’a pas découvert la chose, élaborée durant des siècles de culture euro-péenne, de Montaigne à Leibniz et Nietzsche. À l’origine de toute activité psychique, il y a pour Freud une énergie psychique, enracinée dans le biolo-gique. Ce sont les pulsions. La théorie psychanalytique repose sur la théorie des pulsions, qui constitue le soubassement du système. La source d’énergie crée une tension interne dont le but est – au moyen d’un objet de désir – de se décharger,

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Psychologie

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afin de ramener l’appareil psychique à un état de tension minimal. L’inconscient est le grand réservoir des pulsions, pulsions de vie, pulsions de mort aussi. L’inconscient est régi par le principe de plaisir, c’est-à-dire la recherche de la satis-faction. Il utilise pour y arriver un certain nombre de procédés, que l’on appelle les processus primaires. Ils sont l’expression de la logique de l’inconscient, qui ne connaît ni le temps, ni le principe de non-contradiction.

➲➲ Les deux topiquesDu grec topos : « lieu ». La première figuration de l’appareil psychique proposée par Freud en 1900 se compose de trois systèmes :

– L’inconscient, hypothèse qui permet d’expliquer la genèse d’évènements psychiques incompréhensibles, tels les rêves, les lapsus, les actes manqués, les symptômes, les phobies, délires…

– Le préconscient, instance intermédiaire soumise à la censure et au refoulement. – Le conscient, en contact avec la réalité extérieure.

Vingt ans après la première topique, Freud présente, au début des années 1920, une seconde théorie de l’appareil psychique qui met en jeu trois instances : le ça, le moi, le surmoi.

– Le ça, en totalité inconscient, ouvert sur le somatique, le biologique, réservoir d’énergie pulsionnelle, régi par le principe de plaisir.

– Le moi, partie du ça, modifiée sous l’influence du monde extérieur, et donc soumis au principe de réalité.

– Le surmoi, partie du moi constituée par intériorisation des interdits parentaux.

c. L’angoisseL’angoisse est un éprouvé de danger dont l’origine n’est pas consciente.

Freud a élaboré deux théories de l’angoisse : – Dans la première, elle est une réponse à une absence de décharge et de satis-

faction de la pulsion sexuelle. – Dans la deuxième, Freud élargit sa pensée. C’est l’angoisse signal de danger.

Le moi, soumis à un afflux d’excitation qu’il ne peut décharger, réagit par de l’angoisse. L’angoisse, en effet, présente un caractère de déplaisir particulier qui a pour but de mettre le sujet en alerte face à la menace interne liée à la perte de l’objet d’amour. « L’angoisse doit être tenue pour un produit de l’état de détresse psychique du nourrisson », affirme-t-il. Ainsi, la naissance est la première expérience d’angoisse, accompagnée d’augmentation d’excitation, de tension, de décharge, de déplaisir. Freud montre que l’angoisse de séparation sert de trame à toutes les angoisses de l’être humain : angoisse de la naissance, certes, mais aussi angoisse du sevrage, angoisse de castration, angoisse de mort.

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Les théories du fonctionnement psychique

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d. Les mécanismes de défenseIls désignent les techniques que le moi utilise dans ses conflits avec les revendi-cations pulsionnelles en provenance du ça, et contre tout ce qui peut susciter le surgissement de l’angoisse. Les mécanismes de défense font partie du fonction-nement normal de tout sujet.

– Le refoulement désigne le rejet dans l’inconscient de représentations conflic-tuelles liées à une pulsion en provenance du ça.

– La régression désigne le retour du sujet à des étapes dépassées de son déve-loppement avec des modes d’expression et de comportement significatifs de ces étapes.

– La formation réactionnelle est un investissement conscient, directement opposé et d’intensité égale à un investissement pulsionnel inconscient.

– La projection consiste à attribuer à autrui des désirs méconnus en soi. – Le déplacement est lié à une représentation refoulée, dont la charge affective

qui l’accompagnait va investir d’autres représentations, d’autres objets. – La dénégation tient au fait que le sujet ne peut pas accepter qu’une idée, une

représentation, puisse le concerner. – Le clivage est un mécanisme archaïque. On distingue le clivage du moi et le

clivage de l’objet. Le clivage du moi se produit sous l’effet d’un traumatisme psychique : le moi de l’enfant, qui cherche à maîtriser son angoisse, réagit à une revendication pulsionnelle trop puissante en se scindant en deux. Les deux parties se mécon-naissent sans aucun lien possible. L’une reste en contact avec la réalité ; l’autre, par le délire, construit une réalité autre.Le clivage de l’objet, décrit par Mélanie Klein, désigne la dissociation de l’objet en « bon » et « mauvais ». Il signale la non-élaboration de la position dépres-sive, étape développementale constitutive de l’identité du sujet.

– Le déni est un mécanisme caractéristique de la psychose. Tout le rapport du sujet à la réalité disparaît. Il se produit une rupture entre le moi et la réalité, qui laisse le moi sous l’empire du ça. Ensuite, le moi reconstruit une autre réalité conforme aux désirs du ça. De là, les discours délirants, les hallucinations visuelles, auditives…

Certains mécanismes de défense mobilisent une grande quantité d’énergie psychique, rendant peu disponible le sujet pour d’autres investissements ; ce sont des mécanismes de défense archaïques, utilisés dans la psychose et les troubles graves de la personnalité : déni, clivage, projection. D’autres se mettent en place au cours du développement et sont constitutifs de tout fonctionnement névro-tique normal ou pathologique : le refoulement, le déplacement, la formation réactionnelle, la sublimation, etc.

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Le processus de socialisation par la culture

La participation à la vie sociale suppose un ensemble de conditions et de facteurs facilitants. Le rôle des éducateurs est à la fois de favoriser l’ensemble de ces condi-tions préexistantes et de mettre en place des dispositifs concrets innovants. Faire partie d’un ensemble social est l’une des conditions essentielles pour grandir et passer de l’état de l’enfance à celui d’adulte. Sans la médiation d’autrui, sans l’apport et sans le partage de références avec les autres, il est tout simplement impossible d’évoluer. Que nous considérions les trajectoires de l’enfant à l’adulte, on retrouve des processus fondamentaux qui permettent la socialisation, l’in-sertion ou l’intégration. Mais ces trois concepts ne reflètent pas exactement les mêmes réalités. Nous allons donc en approfondir le sens.

1. L’approche culturalisteParler de socialisation, c’est d’abord tenter de prendre en compte ce qui fonde le socle commun des ensembles humains et des différentes caractéristiques qui structurent une société. Les anthropologues Ruth Benedict 1, Margaret Mead 2, Ralph Linton 3 et Abraham Kardiner 4, fondateurs de l’école Culture et Personnalité, encore nommée École culturaliste, avaient pour objectif de montrer l’influence des institutions et des coutumes sur la personnalité de l’individu. Ils définissaient la culture comme étant la somme globale des attitudes, idées et comportements partagés par les membres de la société et comme la somme des résultats matériels de ces comportements ; c’est-à-dire les objets fabriqués par l’homme. Margaret Mead, à la suite d’une comparaison de trois études ethnographiques, de 1931 à 1935 dans des sociétés d’Océanie, a démontré que la personnalité de l’individu n’était pas déterminée par son sexe, mais par un système de rôles imposé par le modèle culturel en œuvre dans chaque société.

1. Benedict Ruth (Fulton), Échantillons de civilisations (Patterns of Culture), Éditions Gallimard, 1950.2. Mead Margaret, Mœurs et sexualité en Océanie [1963], Plon, 2001.3. Linton Ralph, Le Fondement culturel de la personnalité [1945], Dunod, 1956.4. Kardiner Abraham, L’Individu dans la société, Essai d’anthropologie psychanalytique, Éditions Gallimard, 1969.

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Le processus de socialisation par la culture

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a. Se conformer aux modèles existantsPar exemple, les Arapesh ne valorisent pas l’autorité masculine mais donnent à voir une solidarité entre les deux sexes. L’enfant est imprégné très tôt de ces modèles en étant confronté à des règles, des interdictions verbalisées ou non. Arrivés à l’âge adulte, l’homme et la femme n’ont pas d’autre choix que de se conformer à ces modèles propres à cette culture spécifique de manière consciente et inconsciente. Ces premiers travaux ont montré que les comportements et les idéaux d’une société ne sont donc pas universels mais relatifs. Cette démarche introduisait pourtant une difficulté d’ordre méthodologique : si la relativité culturelle est totale, comment traduire un système de croyances propres à une société dans des termes et concepts appartenant à une autre ? Fallait-il se limiter à la collecte d’études monographiques sans jamais tenter de les unifier dans une théorie des sciences de l’homme ? Pour dépasser ce dilemme et formuler une synthèse conceptuelle cohérente, Abraham Kardiner a approfondi la théorie des rapports entre institution et personnalité. Pour lui, il existe un processus de modelages réciproques : le milieu influence l’individu et celui-ci le transforme en retour. Ceci l’amena à développer les concepts d’institutions et de personna-lités de base. Selon Abraham Kardiner, la culture est l’ensemble des institutions maintenant la cohérence d’une société. Les modalités de satisfaction des besoins fondamentaux de l’homme sont en grande partie fixées par la culture.

b. Institutions primaires et secondairesIl en conclut que des individus vivant dans une même société et soumis à un même ensemble d’institutions « primaires » (la famille, le contexte géographique, le système éducatif, les règles alimentaires, la méthode de sevrage des nourris-sons, les soins qui leur sont prodigués ou refusés, les tabous sexuels) partagent le même type de personnalité. Celle-ci fait alors l’objet d’une projection dans l’imaginaire social à travers ce qu’Abraham Kardiner appelle des institutions « secondaires » qui sont représentées par l’ensemble des systèmes de croyances. Plusieurs critiques ont été adressées au culturalisme notamment parce qu’il lui a été reproché l’imprécision des concepts d’institutions primaires et secondaires. Par exemple, pourquoi les systèmes de croyances sont-ils à ce point déconnec-tés des institutions primaires ? En effet, le système éducatif, si on appliquait ce modèle de raisonnement à notre société occidentale, est certes un lieu de socia-lisation primaire, mais il est aussi le véhicule d’un système de représentations et de croyances. Par exemple, il entretient l’idée d’une certaine méritocratie, d’un possible accès au savoir pour chacun et d’un égal accès à la promotion sociale 1.

1. Voir Mikel Dufrenne, La Personnalité de base [1953], PUF, 1972. Cet auteur souligne l’importance d’ajou-ter à cette théorie la notion de désirs spirituels renvoyant à la justice et à l’absolu. Elle permet de dépasser des déterminismes primaires dans la socialisation et d’arriver à une flexibilité pour se comporter de manière finalement libre.

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L’acteur dans son environnement socio-culturel

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2. Une définition de la culture par un psychosociologue d’inspiration culturaliste

S’inspirant des travaux des anthropologues culturalistes, le psychosociologue Carmel Camilleri définit la culture de la manière suivante : il s’agit pour lui de « l’ensemble plus ou moins fortement lié des significations acquises les plus persistantes et les plus partagées par les membres d’un groupe 1 ». Ceci s’explique par l’appartenance et la filiation au collectif et au fait que ces significations sont imposées à chacun sur l’ensemble des stimuli qui émanent de l’environnement, mais aussi d’eux-mêmes. Il précise enfin que la reproduction de ces significations s’effectue par des voies non génétiques.

Tant qu’ils ne sont pas intégrés dans des significations, les événements, les êtres et les choses demeurent étrangers à l’individu. Ils ne peuvent agir sur lui que par l’intermédiaire du sens dont ils sont enveloppés consciemment ou non. Ces significations sont les seules médiations possibles pour se représen-ter la réalité et correspondent à un modèle culturel (pattern). Celui-ci unifie les comportements et prend la forme d’une logique qui se retrouve à travers toutes les grandes instances de la vie collective, comme c’est le cas des rapports au sein de la famille, entre les sexes, les générations, la relation au travail, la religion, la mort, au pouvoir, etc. Tout individu appréhende donc les divers stimuli de son environnement par le biais d’un sens conforme à la logique du modèle culturel du groupe auquel il appartient. Les conduites à leur égard sont orientées en fonc-tion de la manière dont ils sont préalablement signifiés. Ainsi, cette logique se traduit par des constantes qui donnent une cohérence à la variété possible des comportements individuels.

Dans l’exemple de ce que l’on qualifie de « logique patriarcale », la hiérarchisa-tion des sexes s’effectue au profit de l’homme et entraîne plusieurs conséquences dans le rapport à la femme, dont notamment celle d’une supériorité du statut 2 de l’homme sur la scène publique, qui peut s’inverser dans la sphère privée.

3. Spécificité des significations culturellesLes unités de sens culturels sont construites et acquises à l’échelle de la société. Elles ne sont pas innées comme peuvent l’être les significations biologiques,

1. Carmel Camilleri, « La culture et l’identité culturelle : champ notionnel et devenir », in Margalit Cohen-Emerique (sous la dir.), Chocs de culture : concepts et enjeux de l’interculturel, L’Harmattan, 1991.2. Le concept de statut renvoie à deux types de définition. D’une part, la situation d’un individu ou d’un ensemble d’individus relativement à une définition juridique. D’autre part, sur un plan plus sociologique, c’est la position que l’on occupe dans un environnement social en articulation avec différents signes ou critères distinctifs tels que la profession, le sexe ou l’âge par exemple, et qui octroie des droits et des devoirs spécifiques, du pouvoir ou de la dépendance à autrui. Avoir un statut, c’est aussi avoir l’obligation de se mouler dans un cer-tain nombre de rôles et donc dans des prescriptions sociales de comportements. Dans les sociétés modernes, la multiplicité des systèmes d’organisation fait qu’un individu peut avoir des statuts multiples et donc être amené à jouer des rôles très variés. Ces statuts peuvent être plus ou moins congruents entre eux, c’est-à-dire donner lieu à une plus ou moins grande harmonie et continuité pour un même individu. Cf. Linton, op. cit.

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Le processus de socialisation par la culture

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tel que le sentiment de faim, par exemple. D’autre part, ces unités de sens sont collectives parce qu’elles sont partagées par un groupe et liées à l’appartenance à ce même groupe ; elles rassemblent en permettant aux individus de se compor-ter d’une façon analogue devant les événements. Par exemple, le choix des aliments, leur préparation ainsi que les événements qui donnent lieu à la prise des repas sont des significations culturelles. Mais, et c’est pour cela que Carmel Camilleri considère qu’elles sont aussi un « facteur d’uniformisation différen-tielle 1 », ces significations spécifiques permettent de distinguer des groupes entre eux et parfois de nourrir des antagonismes. Enfin, pour être culturelles, les significations doivent être suffisamment étendues dans le temps et l’espace, c’est-à-dire qu’elles doivent être durablement partagées par la majorité des individus membres de la société considérée. Ainsi, liées à l’idée de patrimoine commun, les significations culturelles sont considérées comme des valeurs 2 par les membres des sociétés qui les transmettre aux générations suivantes.

4. La formation culturelle est dynamiqueLa culture n’étant pas une entité statique, il faut considérer les sujets comme des porteurs de culture qui sont à la fois sources et réceptacles des ensembles de significations et de valeurs. De manière classique, on distingue les contenus culturels de la structure sous-jacente, c’est-à-dire du modèle dont la logique est la source. Par exemple, dans le cas d’une rencontre avec des représentants d’une autre société, les membres d’un groupe peuvent refuser de changer de significa-tions, mais ils peuvent aussi les transformer ou en inventer d’autres à la condition que la logique du modèle ne soit pas totalement bouleversée. C’est ce que les anthropologues appellent l’« acculturation », concept que nous aborderons plus loin dans notre exposé. De nouvelles formations culturelles sont donc possibles, même si leur cohérence n’apparaît pas de prime abord. Il est essentiel que, pour le sujet, l’ensemble culturel continue de lui donner le sentiment de pouvoir mainte-nir cette cohérence. Une société peut se transformer à cette condition. Les sujets peuvent ne plus porter en eux la même signification que la génération précédente, sans qu’il y ait, pour autant, bouleversement de la logique du modèle culturel. La culture supporte donc des transformations variables en fonction des sociétés et de l’objet même du changement opéré. Mais l’acquisition de la culture est indissociable du processus de socialisation, processus dont les caractéristiques varient en fonction des sociétés.

1. Carmel Camilleri, Margalit Cohen-Emerique (sous la dir.), op. cit.2. Ensemble des préférences collectives qui orientent et donnent une légitimité aux règles sociales et aux orientations de l’action.

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L’intégration, processus qui complète la socialisation

Le concept d’intégration apparaît, selon l’analyse de Claude Lévi-Strauss, comme un horizon sans existence réelle. Relevant à la fois du champ de la sociologie et du champ de la politique, il résulte d’une préoccupation du maintien du lien social dans des sociétés où prévaut la valeur de l’individu sur la totalité. L’éclatement et la diversité des références posent nécessairement la question des manières de consolider une identité collective. On peut alors, avec Dominique Schnapper, considérer l’ensemble de la société en tant que telle, mais aussi la relation que chacun des individus ou des sous-ensembles entretient à un système plus étendu. C’est ce qu’on appelle l’« intégration à la société 1 ». On se pose alors la question de l’intégration de tel ou tel sous-ensemble à une société déjà constituée. Les travaux de sociologues ont surtout utilisé ce terme dans le rapport que les populations immigrées peuvent entretenir à la société globale, et réciproquement.

En effet, le Haut Conseil à l’intégration en a formulé la définition suivante : « Il s’agit de susciter la participation active à la société nationale d’éléments variés et différents, tout en acceptant la subsistance de spécificités culturelles, sociales et morales et en tenant pour vrai que l’ensemble s’enrichit de cette variété, de cette complexité. Sans nier les différences, en sachant les prendre en compte sans les exalter, c’est sur les ressemblances et les convergences qu’une politique d’inté-gration met l’accent afin, dans l’égalité des droits et des obligations, de rendre solidaires les composantes ethniques et culturelles de notre société et de donner à chacun, quelle que soit son origine, la possibilité de vivre dans cette société dont il a accepté les règles et dont il devient un élément constituant » 2.

1. Lire Dominique Schnapper, La Communauté des citoyens, Sur l’idée moderne de nation, Gallimard, 1994 et Qu’est-ce que l’intégration ?, Gallimard, 2007.2. Il faut noter que l’intégration se distingue de l’assimilation – qui donne plutôt à penser qu’il faut perdre ses particularités pour prendre sa place parmi ses semblables –, comme de l’insertion qui renvoie plutôt à l’inscription dans un registre socio-économique satisfaisant pour l’individu et la société. «  L’assimilation est le processus par lequel un être vivant en transforme un autre en sa propre substance. Assimiler devient alors synonyme d’absorber, d’ingérer ; la fusion s’opère jusqu’à la disparition de l’élément étranger qui vit une conversion dans la substance de l’organisme assimilateur. » (Jacqueline Costa-Lascoux, « Assimiler, insérer, intégrer », in Projet, n° 227, automne 1991. Elle met l’accent sur le partage de principes partagés.)

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L’acteur dans son environnement socio-culturel

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1. La solidaritéOn retrouve le concept de solidarité énoncé par Émile Durkheim, selon qui un groupe social est intégré dans la mesure où les membres possèdent d’abord une conscience commune et partagent une communauté de croyances et de pratiques. Deuxièmement, ils doivent être en interaction. Troisièmement, ils doivent éprouver l’idée d’un avenir commun. C’est sur cette logique que Durkheim a pu décliner l’existence d’une société religieuse, domestique ou politique.

L’intégration évoque ainsi l’existence d’un processus, comme il en existe un pour la socialisation. En réalité, le premier est assez proche du second, puisque l’on peut le considérer comme un processus où l’individu intériorise des normes, des exigences et des valeurs permettant à la collectivité de se maintenir. Par l’éducation et la socialisation, chacun doit pouvoir contribuer à un ensemble social. C’est par un tel processus que l’individu devient membre d’une collectivité au sein de laquelle il a pu naître ou la rejoint à l’issue d’un parcours migratoire. L’intégration est l’acquisition d’un sentiment d’appartenance par l’intériorisation des connaissances, normes et valeurs partagées. À l’inverse, l’absence de normes, de règles ou de lois est qualifiée d’« anomie » 1.

De manière conséquente, cette appartenance fait que chacun parvient à inté-rioriser l’idée que puisse exister, à côté de sa propre existence, celle d’un domaine public auquel il peut contribuer. Ainsi, l’identité personnelle est étroitement arti-culée autour de cet ensemble dont les valeurs sont incorporées individuellement.

2. Construction identitaire et intégrationDans cette acception, le rôle des éducateurs est alors de faciliter le processus d’intégration des personnes accompagnées afin qu’elles trouvent place dans un ensemble, tout en en partageant les fondamentaux et en développant des compétences pour contribuer à l’avancée de la société. Il s’agit donc à la fois de prendre en compte ce qui, au plan personnel ou au plan des sous-groupes repérés, étaie l’identité individuelle et en favorise le lien et le rapport à la globalité. On comprend alors que l’on peut avoir été socialisé tout en ne se sentant pas intégré à la société globale. On peut parler alors d’exclusion, concept dont nous dessine-rons les contours ultérieurement.

Cette première définition des grands concepts nous amène à en préciser la portée et certaines des déclinaisons avec les travaux de sociologues tels que Pierre Bourdieu et Erving Goffman. En effet, nous comprendrons que, dans son évolu-tion, l’individu demeure l’enjeu de forces sociales et que ses marges de manœuvre sont contraintes par les espaces de socialisation qu’il fréquente et que la qualité de son intégration en résulte directement.

1. Au sens où l’entend Émile Durkheim : absence de normes, de règles ou de lois de sorte que les individus ne savent plus comment se conduire.

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L’intégration, processus qui complète la socialisation

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Valeur Expression de préférences et de croyances collectives, s’exprimant à travers des prin-cipes généraux et des orientations fondamentales.

Culture Ensemble plus ou moins fortement lié des significations acquises les plus persistantes et les plus partagées par les membres d’un groupe.

Socialisation Incorporation progressive des traits généraux caractéristiques de la culture de son groupe d’origine, celui qui est censé définir son appartenance sociale de base.

Intégration Acquisition d’un sentiment d’appartenance par l’intériorisation des connaissances, normes et valeurs partagées.

Acculturation(cf. chapitre XII)

Processus par lequel s’effectuent des échanges, des emprunts et des réinterprétations d’ordre symbolique permettant d’aboutir à une élaboration culturelle individuelle ou collective.

Assimilation Processus par lequel un groupe social intègre un individu ou un autre groupe en le rendant semblable par l’inculcation de la totalité de ses valeurs et de ses références culturelles.

Représentation sociale

Élaboration psychologique et sociale qui intègre des informations, des images, des normes et des modèles, des opinions, des croyances, des valeurs, etc.

Idéologie Configuration plus ou moins élaborée et formalisée d’idées, de croyances et de représen-tations spécifiques à une période, une société, un groupe ou une instance.

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Odile Pougnaud est philosophe de formation et psychologue clinicienne-psychothérapeute.

Philippe Ropers est directeur général d’un centre de formation en travail social.

Cécile Soris est éducatrice spécialisée et directrice d’une association d’action sociale.

Stéphane Rullac est docteur en anthropologie, éducateur spécialisé et formateur-chercheur dans une école supérieure du travail social en Île-de-France.

Ahmed Nordine Touil est enseignant en sciences humaines à l’université.

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