Découverte d'un ailleurs par des pratiques ritualisées

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DÉCOUVERTE D’UN AILLEURS PAR DES PRATIQUES RITUALISÉES

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Catalogue d'exposition réalisé à la suite d'un workshop. Le projet fut mis au point par deux étudiantes du Master 2 Arts Plastiques de l'Université de Strasbourg. Promotion 2014.

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DÉCOUVERTE D’UN AILLEURS PAR

DES PRATIQUES RITUALISÉES

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Edition 2014 Université de Strasbourg

DÉCOUVERTE D’UN AILLEURS PAR

DES PRATIQUES RITUALISÉES

Art corporel et Société

Catalogue d’exposition

Maïmiti Haoa

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S O M M A I R E

EXPOSITION TEMPORAIRE 09

INTENTIONS PREMIÈRES ET QUESTIONNEMENT 11

NOS PRATIQUES PERSONNELLES 17

CADRE D’EXPOSITION ET PRÉSENTATION DES TRAVAUX 29

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S O M M A I R E

RELATIONS ENTRE LES OEUVRES ET IMPRESSION GÉNÉRALE 47

L'AVANT EXPOSITION 57

L'APRÈS EXPOSITION 69

CORPUS D'IMAGES 75

INFORMATIONS PRATIQUES 82

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EXPOSITION TEMPORAIRE

Je tenais avant tout à remercier Bénédicte Zangré après qu’elle nous ait offert la possibilité d’exposer dans son appartement strasbourgeois pour une durée d’une quinzaine de jours en février 2014 et pour la collaboration fructueuse qui a suivi. Cela nous aura permis de confronter nos idées, de les échanger, d’essayer de se comprendre réciproquement et d’aller plus loin dans nos propres recherches individuelles. Il aura fallu du temps avant de pouvoir enfin se comprendre, car au delà des affinités personnelles, la pré-paration d’une exposition temporaire doit se faire avec l’accepta-tion de l’autre quelque soient ses différents points de vue sur un plan professionnel. Cela n’est pas toujours évident et peut par-fois générer des conflits. Mais peu importe les obstacles, l’impor-tant est de se dire qu’en fin de compte nous y sommes arrivées ... Je remercie également Jean-Louis Hess et Eric Laniol pour la proposition d’exposition qui nous a été faite dans le cadre du workshop «In progress, l’exposition en question», et la mise à disposition d’une salle au Palais Universitaire de Strasbourg. Bien que nous ayons préféré nous installer chez Bénédicte Zangre afin de disposer d’avantage de temps pour expérimenter le dispositif d’exposition, il est certain que nous aurions apprécié bénéficier du cadre du Palais Universitaire pour mettre en avant nos créations plastiques.

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INTENTIONS PREMIÈRES ET QUESTIONNEMENT

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INTENTIONS PREMIÈRES ET QUESTIONNEMENT

Partant du constat que nous travaillons toutes deux sur l’em-preinte dans le champ de l’art, et que nous sommes d’origine étrangère, il nous ait venu à l’idée de partir d’un premier titre qui était un point de départ: avec l’« Exotisme et passage » nous nous étions surtout intéres-sées à ce qui vient d’ailleurs et des pratiques rituelles non européennes. Nous avions porté notre attention sur des termes comme le mot voyage, temporalité, déplacement, exode, étranger, visite, présence, transcendance, passage, extérieur, polarité, horizon. Ainsi notre pre-mier échange eu lieu lors d’une journée passée à l’École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, où se sont déroulés des performances à l’initiative du musicien Philip Corner, de Grazia Giacco et Stéphane Mroczkowski.

Puis nous avons pris la décision de réaliser notre propre expo-sition qui vous sera dévoilée par la suite et à laquelle ce catalogue est destiné. Nous nous sommes accordées sur le titre « Découverte d’un ailleurs par des pratiques ritualisées ». Il faut le comprendre au sens où l’ailleurs intervient comme un cadre lointain où se déroulent des pratiques qui relèvent de l’ordre du rituel. L’ailleurs peut aussi bien être terrestre que céleste, il nous représente, ce que nous sommes, d’où nous venons, ce en quoi nous croyons, ce que nous tenons à présenter à un public donné. Car le lieu et le contexte d’exposition est à prendre en compte, nous avons des pratiques qui se rapprochent de celles que nous avions l’habitude de voir dans nos régions d’origines. Que ce soit une pratique picturale fait au hasard par Bénédicte ou une représentation de tatouages réalisés par mes soins, nous assistons toujours à une sorte d’appropriation des manières de produire qui nous sont communes et que nous essayons d’imiter hors des lieux dans lesquels nous avions pour habitude de les voir s’appliquer. Alors cela sous-entend une sorte

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de partage de nos connaissances, de nos pratiques, de notre culture, une part de nous même en fin de compte, un partage qui se fait avec le monde extérieur, avec l’étranger. Lorsque j’utilise le terme étranger cela fait référence aussi bien à la personne avec qui je travaille car il faut prendre en compte le lieu d’où elle est originaire, sa manière de travail-ler et essayer de s’y adapter, mais l’étranger représente aussi l’occident puisque c’est en occident que le travail actuel est présenté. Au delà d’un «  ailleurs  » qui ferait référence au Burkina Faso et à la Polynésie, il faudrait se poser la question d’un ailleurs invisible et faiblement per-ceptible que seules des pratiques artistiques pourraient révéler. Je parle d’une sorte d’application de pratiques rituelles dans le champ de l’art dans le but de révéler la présence d’esprits comme le fait Bénédicte dans sa peinture, ou encore de montrer simplement les croyances en une force supérieur inexplicable, ou plutôt en la place prédominante du tatouage dans ma culture. Pour ma part je ne tente pas de prouver ou essayer de démontrer à qui que se soit que ce que je raconte et ce en quoi je crois existe vrai-ment. Simplement c’est une manière de présenter le tatouage comme étant un moyen de commémoration des personnes défuntes, d’accep-tation de la présence d’esprits ancestraux, de la reconnaissance d’une culture et de l’essence même de l’homme au sein de cette culture. Pour comprendre cela il faut se pencher sur l’origine de cette art corporel. Bien qu’il ait été découvert dans plusieurs pays, le tatouage reste un mot étroitement liée à la Polynésie puisque son origine étymologique vient de là. Considéré à l’époque par les peuples autochtones comme un art sacré, il définissait ce qu’il y a de plus profond dans l’homme, il marquait son appartenance sociale à un clan, et au delà du caractère identitaire il permettait aux hommes d’être en lien avec des esprits ou

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ancêtres élevés au rang de divinités, qui elles leur avaient justement transmis la technique du tatouage.

Le terme tatouage, qui s’écrivait à la base « tatau », a été rame-né par James Cook à la fin du XVIII siècle suite à ses expéditions en Océanie, il se chargea de le transformer pour en arriver au mot anglais « tattoo ». Lorsque nous procédons à l’analyse de la racine du mot « ta-tau », qui en tahitien signifie « frapper », nous constatons qu’il vient lui même d’une expression « ta-atua » dont le « ta » équivaudrait à « dessin inscrit dans la peau » et « atua » se définirait par « esprit ».Par l’analyse étymologique que j’ignorais jusqu’alors, il m’a était permis de mieux cerner certains aspects du tatouage, de prendre d’avantage en compte le tatouage polynésien dans mon propre tra-vail, chose que je ne faisais pas forcément auparavant, et de trou-ver le point de départ d’une production commune avec Bénédicte.

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Définition du rituel :

Rituel (nom masculin):- Gestes, symboles, prières formant l’ensemble des cérémonies d’une reli-gion.- Dans l’Église latine, livre liturgique contenant les rites accomplis par le prêtre, notamment lors de la célébration des sacrements.- Ensemble d’actes, de paroles et d’objets, codifiés de façon stricte, fondé sur la croyance en l’efficacité d’entités non humaines et approprié à des situations spécifiques de l’existence.- Ensemble des règles et des habitudes fixées par la tradition : Le rituel des rentrées scolaires.

Rituel/Rituelle (adjectif) : - Conforme aux rites, réglé par un rite : Chant rituel. Les prescriptions rituelles du mariage.- Qui est comme réglé par une coutume immuable  : Le petit déjeuner rituel : café au lait, tartines.

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NOS PRATIQUES PERSONNELLES

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NOS PRATIQUES PERSONNELLES Bénédicte Zangré

Mon ressenti sur le travail de Bénédicte est le suivant : elle tente par une pratique picturale de révéler des choses qui seraient invisibles à l’œil nu. Ce qu’elle nous suggère c’est qu’elle est capable de ressentir des émotions qui nous seraient inconnues et se sont justement ses émo-tions qui dictent sa conduite que nous pourrions qualifier de dérou-tante et hasardeuse mais qui ne l’est pas forcément. Elle tente d’établir des nouveaux standards de pratiques cérémonials et de rites.

Sur cette photographie nous pouvons voir Bénédicte Zangré entrain de peindre à la main comme elle a l’habitude de la faire.

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« En Afrique traditionnelle ou animiste, un sorcier ou un fé-ticheur peut déterminer le destin d’un individu à travers par exemple un lancer de cauris, ou des poulets, des rites ances-traux qui perdurent au fil des générations et qui constituent une manière de connaitre la volonté divine et ce qu’elle a prévu sur la vie de cette personne en question. ».

Bénédicte Zangré

Tout est une question d’interprétation. Mais ici elle tente par le fait de peindre de prendre la place du sorcier car cette fois-ci c’est elle qui se charge de révéler par le geste pictural et non plus le sorcier avec son lancé de « cauris ». Par la suite vient l’interprétation qui peut être soit immédiate, soit progressive, elle peut venir d’elle-même ou laisser le choix aux visiteurs de deviner eux même ce qui peut se passer dans ses toiles, elle laisse libre cours à leur imagination.

D’après moi, comme ce qu’elle explique dans son mémoire, dans son pays d’origine certaines démonstrations se rapprocheraient d’avantage de la sorcellerie.

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«  Qu’est-ce que je cherche dans ou à travers le hasard  ? A es-sayer de comprendre ma propre existence, le hasard pou-vant être le remède à toutes les insatisfactions, les clôtures, les frontières, les limites. Il peut, peut-être, nous aider à ré-pondre à cette question existentielle de chaque individu dans sa singularité à savoir, d’où il vient, qui est-il, que devient-il et aussi envisager peut être aussi la possibilité de l’Autre.  ». Bénédicte Zangré

Le hasard est un moyen pour elle de comprendre l’inexplicable et l’inconnu. Elle en parlera en ces termes :

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Bénédicte Zangré, Divination, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014.

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NOS PRATIQUES PERSONNELLES Maïmiti Haoa

Dans mon travail je met en avant le tatouage comme étant un moyen de favoriser la prise de conscience de l’existence du corps, la remise en question de la société, la critique faite par l’art de la société de consommation qui utilise le corps à outrance et n’a pour unique but qu’un soucis d’esthétisation du corps. Cet art qui va favoriser l’utili-sation du corps comme support artistique pourrait sembler étonnant pour certains, choquant pour d’autres, mais cela va dépendre de la conception que les gens ont du tatouage et de l’importance que cela a pour eux.

Maïmiti Haoa, Sans titre, photomontage, 42x29 cm, 2013.

L’utilisation de la technique du photomontage a permis d’avoir un aperçu de plusieurs proposition de la modification corporelle en devenir. Cela s’apparente aux logiciels de morphing informatique uti-lisés par des professionnels de la santé, dans des centres de chirurgie esthétique. Les patients peuvent ainsi se faire une idée de ce qu’il ad-viendra de leur corps après intervention.

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Au cours de mes recherches j’ai été interpellée par l’importance et la prolifération rapide des tatouages dans notre société. Une mul-tiplication des pratiques corporelles qui sont pour la plupart esthéti-santes plutôt que symboliques. Il a alors été question de créer une ins-tallation, 5 mains en plâtre - l’une d’entre elles est présentées ci-dessus - auxquelles viennent s’additionner 5 vidéos. Les vidéos sont néces-saires puisqu’elles permettent au spectateur de mieux comprendre ce que les mains représentent et surtout ce qui leur arrive, et ainsi une sorte de dialogue s’installe entre les sculptures et les vidéos. Je pense que la vidéo et la sculpture sont complémentaires. La sculpture permet de jouer sur la présence et l’absence et donne justement à l’installation un côté mystique. La vidéo sert de support narratif, c’est une sorte de récit. Si nous prenons l’exemple de la main gauche qui a été moulée, nous constatons qu’elle est partiellement recouverte de tatouages en forme de flammes.

Maïmiti Haoa, Sans titre, sculpture en bande de plâtre, 27 cm, 2014.

Après l’utilisation du photomontage comme technique de si-mulation, vient la production de sculptures moulées qui permettent de passer du champ du virtuel avec image en 2D au champ du réel avec cet objet en volume qui n’est autre qu’une main en plâtre.

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Les motifs décoratifs choisis font références aux flammes, car celles-ci sont de nature envahissantes, bien souvent elles sont dévas-tatrices, toxiques, se propageants rapidement et sans difficulté. Le feu consume le corps, il est source de dégradation. De façon symbolique, il est associé à bon nombres de cultes qui voient en lui en même temps un signe divin - c’est d’ailleurs pour cette raison que plusieurs cultes font référence au feu -, tout autant qu’il est perçu comme négativement car associé aux flammes de l’enfer.

Les cinq vidéos présentent chacune une phase de remplissage de la main. La première vidéo présente une main peu recouverte de tatouage, puis elle se remplit visiblement jusqu’à ce que la peau soit entièrement recouverte de peinture. La dernière vidéo présente une main complètement noire, donnant l’impression qu’elle est carbonisée. Elle effectue des mouvements frénétiques aléatoires qui alternent avec des états statiques, de façon métaphorique elle est comme dans une sorte de transe, comme possédée par le tatouage. En effet il est possible d’interpréter tous ces mouvements de deux façons.

Maïmiti Haoa, Sans titre, sculpture en bande de plâtre, 27 cm, 2014.

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Premièrement si nous sommes dans une optique métaphy-sique, le tatouage serait pour le coup responsable de l’agitation de la main. Cette marque corporelle qui ne devait être à la base qu’un simple bracelet épidermique se révèlerait être redoutable puisqu’envahissant. Il est empli d’un fort pouvoir qui relèverait plutôt de l’inexplicable. Il y a par là une sorte de retour aux sources. Comme, expliqué précédem-ment le tatouage était à la base une modification corporelle symbo-lique avant de devenir ce que nous pouvons qualifier à l’heure actuelle d’accessoire de mode. Et c’est justement cet accessoire qui va être la cause de tant d’agitation, et réintroduira le tatouage dans la sphère du mystérieux. D’un autre point de vue et dans la mesure où les dérives médi-cales peuvent survenir à tout moment, il est possible d’imaginer que l’encre qui fut utilisée est nocive pour la santé, et qu’à la suite d’une réaction allergique disproportionnée, la main est devenue presque in-contrôlable, alternant entre des phases de tremblement avant de plon-ger dans un état inerte.

1. Maïmiti Haoa, Sans titre, vidéo, 45 s, 2014. 2. Maïmiti Haoa, Sans titre, vidéo, 46 s, 2014. 3. Maïmiti Haoa, Sans titre, vidéo, 51 s, 2014. 4. Maïmiti Haoa, Sans titre, vidéo, 49 s, 2014.

Aperçu de quatre vidéos sur cinq :

1. 2. 3. 4.

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En définitif, c’est une sorte de parodie qui se joue là, dans laquelle le tatouage traditionnel, ayant été utilisé abusivement, se re-tourne contre son porteur, soit parce ce que la symbolique de chaque tatouage est forte et qu’elle n’est pas à négliger comme beaucoup de monde aurait tendance à le faire. Ensuite parce ce qu’un accident peut arriver n’importe quand, alors il vaut mieux éviter d’abuser en faisant subir à son corps n’importe quelle modification corporelle. Je pense que le fait de peindre directement sur ma peau m’a permit de réaliser une sorte de mise en situation. En effet après avoir recouvert totale-ment chaque parcelle de peau avec des pigment de couleur, j’ai tout d’abord eu l’impression que ma peau me tirait en plus de ressentir des picotements. Le but étant de se « glisser dans la peau » d’une personne tatouée, le fait de recouvrir la peau entraine un certain ressenti assez désagréable, et même après avoir totalement enlevé la peinture la sen-sation est encore présente. Bien que pleinement consciente que se n’en soit pas un vrai, je pense que visuellement le fait de voir sa peau ou bien celle d’une autre personne entièrement recouverte à l’aide d’une encre noir peut effrayer, au delà de ressentir un sentiment d’inconfort physique.

5.

5. Maïmiti Haoa, Sans titre, vidéo, 1min02s, 2014.

Aperçu de la dernière vidéo :

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A force de vouloir avoir une emprise totale sur le corps nous avons tendance à lui faire subir diverses opérations, mais tout n’est pas forcément contrôlable, il faut savoir accepter l’imprévisible. C’est tout ce processus de création et de questionnement autour du tatouage qui m’a permis d’imaginer un travail avec Bénédicte autour des pratiques culturelles non occidentales et en rapport avec le sacré.

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CADRE D’EXPOSITION ET PRÉSENTATION DES TRAVAUX

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CADRE D’EXPOSITION Appartement de Bénédicte Zangré Strasbourg

Voici une reconstitution de la salle d’exposition retenue. Elle mesure 3m de long sur 2,70 m de large. C’est une vue d’ensemble aé-rienne, qui nous laisse apercevoir sur le mur du haut cinq rectangles représentants des peintures. Sur le mur de droite est projetée une ani-mation, celui de gauche accueille une installation qui comprend une toile et une sculpture. Enfin celui du bas comprend une baie vitrée, ce qui réduit le champ d’action.

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Divers points de vue

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PRÉSENTATION DES TRAVAUX Cinq tableaux – Bénédicte Zangré :

Modélisation de l’espace d’exposition.

Le fait de se servir d’une certaine pratique picturale, qui passe par l’utilisation d’instruments comme un pinceau, des doigts, des cordes, cela permettra de révéler une présence invisible. Par manque d’espace les toiles ont été accrochées juste à coté de l’installation qui comprend un buste et une toile. Cependant elles ne viennent pas gêner la lisibilité de l’installation puisqu'elles sont sur un autre pan de mur. Elles peuvent même être mises en comparaison avec la toile de l’instal-lation, en effet la technique picturale est la même.

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1. Bénédicte Zangré, Sans titre, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014.

2. Bénédicte Zangré, Perception, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014. 3. Bénédicte Zangré, Divination, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014.

4. Bénédicte Zangré, Sans titre, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014.

5. Bénédicte Zangré, Perception, acrylique sur toile, 56cmx38cm, 2014.

1. 2.

3.

4. 5.

Photographies des cinq peintures accrochées au mur :

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PRÉSENTATION DES TRAVAUX Sculpture – Bénédicte Zangré et Maïmiti Haoa :

Modélisation de l’espace d’exposition.

En passant par le moulage d’un buste, il s’agit de garder la trace ou le souvenir d’un corps autrefois présent et qui a maintenant disparu. La moulure révèle un corps féminin aux formes généreuses ou plutôt une enveloppe corporelle vide de toute présente vivante ou du moins visible. Dans un second temps la sculpture se voit remplie de marques qui font offices de tatouages et lacérations produits respectivement par Bénédicte et moi même. Elle a eu recourt à l’utilisation de cordes tandis que j’effectuais des motifs reprenant la forme de flammes que j’inscri-vais au pinceau.

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Photographie du buste moulé:

Bénédicte Zangré, Maimiti Haoa, Empreintes résiduelles, peinture, mou-lage, cordelette, 2m, 13cm x 1m, 2014.

Le tatouage entre dans le cadre de pratiques socioculturelles et le fait de présenter un corps qui en est recouvert amène à se poser des questions sur les intentions des personnes qui ont en recourt, d’où est-ce qu’elles viennent, quelle place a le corps dans leur société et com-ment est-il considéré, que représentent ces interventions sur le corps? A cette pratique s’ajoute la flagellation qui peut être soit une auto-mu-tilation ou infligée par un tiers. Dans cette catégorie de modification corporelle volontaire nous retrouvons les scarifications, le rituel de l’autosacrifice, l’ornement du corps avec des objets en tout genre (pier-çing, chaussures chinoises qui permettent d’avoir des pieds minuscules, colliers africains qui permettent d’allonger le coup) qui entrent dans les rites de certaines cultures.

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Sur la sculpture nous retrouvons des marques de cordes imbi-bées d’encre qui ont servis à tracer sur le corps, elles laissent supposer au spectateur qu’il a devant lui un corps fouetté sur lequel des cordes ont laissés leurs empruntes. Qu’elle soit volontaire ou non, la flagellation fait partie de pratiques qui peuvent parfois être courantes, c’est un moyen de torture, de faire pénitence, une pratique sadomasochiste ou encore érotique : Torture : chez les esclaves Pénitence : pour les religieux Érotiques : chez les individus voulant imposer leur dominationCes marques de peintures peuvent aussi être perçues comme le signe d’une présence invisible qui ne communiquerait avec les vivants qu’en se manifestant à travers l’apparition de traces sur le corps, cela équivau-drait à celles apparues sur le buste plâtré.Toutes ces marques visibles à la surface de la « peau » nous révèlent une nouvelle façon de voir et concevoir le corps, comme étant un moyen d’expression servant à décrire notre condition humaine et la société dans laquelle nous vivons et aussi l’enveloppe servant de lieu d’expres-sion mystique. En Afrique les personnes ayant offensés les ancêtres et esprits étaient fouettés, et de même d’après les croyances en Polynésie les tatouages détournés et motifs appliqués sur n’importe qui pouvaient entrainer le courroux des ancêtres divinisés, ce qui s’avèrerait être néfaste pour leur porteur. Sur le continent africains il est d’usage de frapper une personne afin de faire sortir l’esprit qui a prit possession du corps d’un individu. Ainsi le buste présenté est à la fois une représentation du ta-touage comme le cordon qui relie le corps mortel à un univers spirituel, et avec l’utilisation des cordes pour peindre c’est en même temps

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une interprétation de la manifestation d’une présence invisible que l’on aimerait chasser. Plusieurs codes de lecture sont envisageables. Il est même possible de voir le tatouage réalisé sur le buste comme un acte ne respectant pas les coutumes et donc cela entrainerait la flagellation du corps, d'où la présence de deux types d'empreintes.

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PRÉSENTATION DES TRAVAUX Empreinte sur toile – Bénédicte Zangré et Maïmiti Haoa :

Modélisation de l’espace d’exposition.

L’utilisation et l’assemblage de deux grandes toiles ont été né-cessaire afin que je puisse m’allonger dessus et que Bénédicte en vienne à peindre à la main et au pinceau aussi bien sur mon corps que sur les surfaces de la toile qui n’ont pas été recouverts. Ainsi après que je me sois relevée l’empreinte de mon corps apparaît sur ce tableau peint à même le sol et qui serait une sorte de dripping. Nous avions pour but de faire ressortir l’absence du corps, bien qu’il n’y ait pas d’individu matériellement présent devant la toile, cette dernière a tout de même gardé l’empreinte du corps.

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Photographie de la peinture :

Bénédicte Zangré, Maimiti Haoa, Empreintes résiduelles, peinture, mou-lage, cordelette, 2m, 13cm x 1m, 2014.

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VUE D’ENSEMBLE DE L’INSTALLATION Empreintes résiduelles – Bénédicte Zangré et Maïmiti Haoa :

Bénédicte Zangré, Maimiti Haoa, Empreintes résiduelles, peinture, moulage, cordelette, 2m, 13cm x 1m, 2014.

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PRÉSENTATION DES TRAVAUX Animation en stop motion – Bénédicte Zangré et Maïmiti Haoa :

Modélisation de l’espace d’exposition.

L’animation est produite grâce à l’addition de plusieurs clichés pris au préalable lorsque Bénédicte me peignait de façon abstraite sur le dos. Après chaque tracé une photo était prise. Ainsi au fil des photos nous constations que mon dos s’est remplis de peinture comme une sorte de toile vivante. Puis par assemblage de toutes les photos j’ai créé une animation reprenant le principe du stop motion et où nous pou-vons y voir un dos rempli au fur et à mesure par des coups de pinceaux mais sans que l’on pousse voir l’intervention de la main. C’est comme s’il avait était question d’immortaliser ce qu’il reste du geste et rien que cela. L’intention était de présenter au spectateur une surface corporelle envahie par le geste d'un pinceau ou encore une main invisible. Ensuite

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Aperçu du stop motion :

Bénédicte Zangré, Maimiti Haoa, Marques évolutives, Montage vidéo stop motion, 1min05s, 2014.

présenter un geste rituel avec un médium actuel comme l'animation image par image, c'est introduire cette pratique rituelle qui était sacrée et ancestrale dans la sphère du contemporain.Lors de la projection nous avons rencontré un problème avec le vi-déoprojecteur, il ne tournait que 10 minutes, voire moins et sa puis-sance n’était pas suffisante pour le laisser tourner dans une salle à peine éclairée. Il fallait plonger toute la salle d’exposition dans le noir afin de pouvoir apercevoir correctement l’animation, ce qui présentait un inconvénient puisque les oeuvres devenaient alors non visibles et les cartels illisibles.

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L’idéale aurait été d’avoir une salle à part utilisée spécialement pour l’occasion afin de pouvoir présenter l’animation sans que cela puisse gêner la visibilité des autres travaux. Ensuite un vidéo projec-teur plus performant aurait put résoudre ce problème car il aurait été possible de laisser une lumière suffisamment forte dans la salle pour que toutes les oeuvres soient visibles et sans que cela viennent gêner la présentation de l’animation.

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Retrouvez l'animation sur Tumblr à l'adresse suivante :

http://exposition2014-zangre-haoa.tumblr.com

Ou en scannant :

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RELATIONS ENTRE LES OEUVRES ET IMPRESSION GÉNÉRALE

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LES RELATIONS ENTRE LES OEUVRES Analyse de l’installation composée d’une toile et d’un moulage - Étude des liens entre la vi-déo, l’installation et les peintures : La sculpture est peinte de façon à laisser apparaître des traces réalisées à l’aide d’une corde imbibée d’une encre noire. L’application reprend le principe de hasard élaboré par Bénédicte dans sa technique de travail. Mais au delà du fait de produire de simple marques corporelles à même la peau, il s’agissait de marquer le corps. Cette expérience corporelle, bien qu’elle ne soit pas ressentie par le corps d’une personne bien vi-vante, elle peut tout de même se rapprocher du travail collectif effectué précédemment au cours duquel Bénédicte effectuait des mouvements circulaires sur mon corps à l’aide de sa main imprégnée de peinture noir. Apparaît alors une corrélation entre l’utilisation de la main et la corde comme outils corporels. Une substitution a lieu puisque nous passons d’un mouvement effectué par la main de façon lente, progres-sive, à fleure de peau, à l’inverse du marquage à la corde qui s’avère être plus violant tant dans la façon de procéder plastiquement que dans la signification que cela a. C’est à dire que le geste pictural réalisé par la corde fait écho à l’utilisation d’un fouet. L’objet vient d’une certaine façon lacérer le corps, mais cette fois-ci plutôt que d’entrer dans la chair il s’agit de le « marquer » de peinture. Nous passons alors d’une pratique lente et douce au cours de laquelle Bé-nédicte peignait directement sur mon dos et où nous pouvions constater un contacte physique entre deux personnes, comme une sorte de dialogue muet, pour en arriver à un rapport de force entre la corde et le buste moulé. Le photomontage, qui permettra de réaliser l’animation en stop motion, est indispensable pour comprendre que le corps est recouvert progressivement de peinture sans que l’on puisse voir la main de Béné-dicte qui apparaît à l’écran. L’utilisation de la technique du stop motion

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permet de voir apparaître sur la peau des marques qui viennent d’on ne sait où. Ce que nous tenons à présenter c’était un corps qui serait recouvert de traces corporelles grâce à l’intervention d’une main invisible, cela reviendrait à comparait ces traces à des sortes d’apparitions subites qui auraient un caractère mystique.

D’un point de vue technique et au niveau du sens qui en émane, l’installation est à mettre en comparaison avec celle que j’avais réalisé personnellement et dans laquelle j’expliquais le prin-cipe de recouvrement de l’intégralité de la main par une encre nocive et envahissante. L’animation est importante pour que le visiteur qui la voit puisse faire un parallèle entre cette vidéo et l’installation qui est présentée juste en face, à savoir le buste recouvert de peinture et la peinture accrochée au mur. En effet ce qui est visible sur l’anima-tion image par image présente un recouvrement progressif du corps par la peinture, tandis que le buste qui est présenté juste en face est déjà recouvert de peinture. L’animation révèle l’action tandis que le buste en plâtre sert de trace finale de l’action, d’un côté nous avons la représentation du geste et de l’autre nous avons le résultat final. De plus l’installation est composée d’un buste peint autour duquel sont accrochées quelques cordes, et derrière celui-ci une peinture est sus-pendue. Elle est exposée en hauteur et au dessus de la table sur laquelle se trouve le buste. Au delà du dialogue fort déjà existant entre la toile et le buste, je tenais à présenter la relation qui existe entre cette pro-duction et l’animation en stop motion. Car il est important de faire ressortir le fait que la toile est une sorte de superposition en négatif de l’animation, c’est à dire que d’un coté nous avons un corps blanc sur fond noir, et de l’autre nous pouvons voir un fond blanc avec un corps qui est progressivement recouvert de peinture noire. Une toile est pré-sente sur laquelle nous distinguons le contour d’un corps, à l’endroit où le corps était allongé sur la toile il n’y a aucune trace de peinture, tandis

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que sur le pourtour la toile est recouverte de traits réalisés au pinceau et à la main. Nous avions pour idée de faire ressortir le passage d’un corps qui est désormais invisible, cela est à mettre en lien avec la notion d’absence, comme si nous avions peint sur un corps et qu’il a disparu par la suite. Cette toile fait écho à l’animation qui est exposée en face. Ces produc-tions sont toutes deux surélevées et placées au même niveau ce qui en-traine ainsi un dialogue notable entre ces deux oeuvres aussi bien d’un point de vue esthétique que narratif. Tandis que sur l’animation le corps est recouvert progressivement, la toile présente déjà une accumulation de traces picturales, il était important de faire la comparaison entre une oeuvre qui ne révèle que le résultat final d’une action, et une autre oeuvre qui dévoile un processus créatif, une action. D’où l’importance d’avoir associé d’un côté une oeuvre en stop motion et de l’autre une installa-tion comprenant la peinture accrochée au mur et l’objet sculptural posé exposé sur une table. L’animation intitulée Marques évolutives vient ainsi s’opposer à l’installation portant le nom d’Empreintes résiduelles. Les deux oeuvres qui viennent composer l’installation bien qu’elles soient plastiquement de natures différentes, elles ont le même niveau de lecture, c’est à dire que se sont des oeuvres qui présentent une action déjà réalisée, il n’y a pas de surprise comme cela pourrait être le cas avec l’animation. La toile est déjà peinte et a déjà été en contacte avec un corps, tandis que le buste a pour sa part été lacéré. Puis vient l’idée de superposition du buste et de la toile pour donner l’impression que le buste avait été disposé sur la toile, puis tout deux avaient été peint en même temps et que seulement à la suite de cela on avait éloi-gné le buste de la toile, ce qui expliquerait la zone non recouverte de peinture, du moins c’est ce que les visiteurs pourraient être amenés à constater. Ainsi elles sont destinées à être complémentaire encore une fois d’un point de vue esthétique que narratif.

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Tandis que la toile et le buste font ressortir, de la même façon qu’avec mon installation personnelle sur les mains, les notions de pré-sence et d’absence, l’animation quant à elle relate le fait de peindre sur le corps, c’est une sorte de récit.En définitif le constat qui est fait présente une sorte de triangulation entre ces trois objet « stop motion – buste plâtré – toile peinte » qui sont des productions communes à Bénédicte et moi même.

Par la suite Bénédicte a tenu à présenter des peintures qu’elle a réalisé et qui portent encore une fois sur la trace, sur les questionne-ments qu’elle se pose et qui sont à mettre en rapport avec l’installation générale.

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IMPRESSION GÉNÉRALE Vision d’ensemble post-exposition :

Puisqu’il est question de remettre en doute les pratiques ri-tuelles déjà établies et présenter de nouveaux standards à la société grâce à l’art, alors il est important de faire ressortir le travail collectif qui a été entrepris lors du montage de l’exposition. En effet ce travail est le fruit d’un long échange et de l’envie qu’ont eu deux étudiantes d’apprendre à mieux se connaître, à mieux connaître les endroits d’où chacune nous venions, et surtout l’envie d’apprendre à nous connaître nous même. Car il s’agit de la remise en question d’un travail qui doit mélanger plusieurs affluences culturelles et avant même d’avoir à pro-poser n’importes qu’elles idées qu’elles soient, il fallait avant tout se pencher sur nos propres histoires et nos cultures respectives. Le tatouage est une sorte de peinture sur le corps, d’où l’idée d’appliquer la peinture de Bénédicte à même la peau. Il y a par là une double signification, il s’agit en même temps de faire ressortir du geste pictural de Bénédicte une envie qu’elle a d’établir de nouveaux procédés ritualisés et de montrer comment il est possible de révéler la présence des esprits. Cela permet d’élargir les champs d’approches puisque maintenant il n’est plus seulement question de peindre sur une surface plane comme elle l’a toujours fait mais de se confronter au corps et la multiplicité des significations que cela peut engendrer. D’autre part dans mon travail personnel j’ai moi même travaillé en peinture sur des moulages du corps humain que je réalisais, puis j’ex-pliquais comment ces peintures étaient représentatives des tatouages corporels. Il s’agissait surtout de remettre en cause les standards de beauté établis à l’heure actuelle et d’en faire une critique pertinente, de faire ressortir les excès des manipulations corporelles à but esthé-tique, puisque c’est ce que le tatouage représente aujourd’hui. Bien qu’il ait une place dominante dans la quête qu’ont les individus d’appliquer certaines pratiques sociétales, il n’en reste pas moins important en tant

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que signe épidermique symbolique. En effet le tatouage est un mode de modification passé du symbolique à l’esthétique. Bien que les deux champs ne soient pas sur le même pied d’égalité – le côté esthétique étant préféré au sens symbolique des motifs – il n’en reste pas moins que la valeur symbolique de ces mêmes tatouages m’ont amenés à me questionner. Dans mon travail d’écriture de mémoire je ne faisais pas forcément références au tatouage polynésien, ce que je tentais surtout de faire c’était d’établir de nouveaux critères de beauté en passant par le tatouage, peu importe son origine et époque de provenance. Et j’es-sayais de détourner ces mêmes standards de beauté pour montrer com-ment ils peuvent être dangereux pour l’homme. Le tatouage n’avait pas la même signification dans mes recherches personnelles, il était plutôt à caractère esthétisant. C’est seulement après m’être intéressée aux tatouages ancestraux polynésiens pour cette exposition je pense que je peux désormais les présenter dans mon catalogue de recherches personnelles comme des parures sacrées à mettre en opposition juste-ment au tatouage comme simple effet de mode. Malgré mes origines je ne tenais pas à présenter de façon spécifique le tatouage polynésien, au contraire je tentais d’analyser le tatouage dans sa globalité, car en abordant un sujet qui vient d’un endroit d’où nous sommes originaires c’est comme livrer une partie de soi même et donc d’être confronté aux jugements, remarques, critiques. Il est parfois plus facile de parler de n’importe quel sujet de façon générale. Cependant c’est le travail mené avec Bénédicte qui m’a incité à m’engager sur cette voie et de poursuivre de mon coté mes recherches sur le tatouage polynésien afin de savoir s’il est toujours perçu symboliquement avec la même intensité et par quel type de population, ou au contraire maintenant est-ce qu’il n’est plus qu’un « objet » d’apparat.

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Par ailleurs nous sortons nos pratiques culturelles hors de leur contexte pour les exposer en occident, cela se traduit par la présenta-tion à l’étranger, que ce soit Bénédicte ou encore les spectateurs pré-sents dans la salle d’expositions tous sont étrangers dans la mesure où nous ne venons pas de la même région. Mais dans le monde occidental la présence de forces invisibles est inimaginable, cependant c’est l’idée de partage qui a guidé nos actions, un partage de croyances venues d’ailleurs, un partage qui permettraient de faire voyager et surtout de faire fonctionner l’imagination.

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L'AVANT EXPOSITION

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L’AVANT EXPOSITION Réalisation d’une performance :

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Invitées par Stephane Mroczkowski et Grazia Giacco à partici-per à une journée performative avec le musicien Fluxus Philip Corner le 19 février 2014 à l’ESPE, les étudiantes du département des arts vi-suels de l’Université de Strasbourg ont put intervenir sur de vieux pia-nos. Ce fut le début d’un travail collectif et nous avons voulu nous pen-cher sur la trace, le marquage, les techniques d’impressions manuelles, reprenant ainsi le thème de l’atelier dirigé par Stephane Mroczkowski. Que se soit sur une surface lisse comme le papier, les bords d’un piano, ou encore sur un corps n’importe quel support est exploitable. Notre professeur de gravure nous incita à participer à la performance de Philip Corner. Ce dernier étant l’invité d’honneur et travaillant sur la destruction, il décida de démonter un piano et réutiliser les pièces détachées pour former d’autres oeuvres d’art. Il entend le mot destruc-tion au sens «modification». Il ne détruit pas au sens négatif du terme, bien au contraire. Les pianos mis à notre disposition ce jour là étaient vieux et destinés à être envoyés à la casse. En les démontant, il décide d’en faire autre chose, c’est une façon pour lui de leur donner une se-conde vie.

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Il me semble qu’il était important d’amorcer un travail de groupe avec Bénédicte avant de se lancer dans la réalisation de notre exposition commune. L’échange qui suivi autour de cette journée performative fut constructive, se fut une amorce au travail que nous avions à mener à deux. Le temps d’une journée nous étions en plein tâtonnement. Nous nous cherchions encore ce jour là, cela m’a permis de voir comment allait évoluer notre compréhension, interprétation et application d’un thème donné. Bénédicte travaillait plutôt de manière hasardeuse comme à la façon de Fluxus en remettant en question les gestes du quotidien tandis que je poursuivais un travail de gravure et marquage sur le « corps » du piano comme si je lui appliquais un ta-touage.

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Le tatouage est connu pour servir d’élément commémoratif c’est l’une des raisons pour laquelle j’ai pensé à produire des empreintes directement sur mon corps le jour du workshop. De plus il était ques-tion de redonner une seconde vie à ce piano qui avait déjà une histoire. La propriétaire, qui nous a permis de laisser libre cours à notre imagi-nation en intervenant sur son instrument, tenait à ce que nous fassions ressortir l’histoire du piano. Dans un premier temps il était question de graver un récit sur celui-ci, ensuite d’enduire cette gravure d’encre dans laquelle je viendrais me « rouler », et par la suite il ne me resterait plus qu’à me servir de mon corps comme « plaque d’impression ». Ainsi l’empreinte est faite sur la peau et elle sera par la suite transférée sur le feuille. L’impression se retrouve jusque dans la chair, c’est un moyen métaphorique de s’imprégner de l’histoire du piano. Je me suis allongée sur le dos après que certaines parties de mon corps aient été recouvertes de peinture afin de travailler sur l’idée d’empreinte. En effet il était question d’un report d’empreinte de mon corps sur une surface plane comme le papier. De là est venue l’idée de peindre directement sur le corps, un principe qui sera appliqué par la suite lors de notre préparation d’exposition. Je devais me servir du piano comme support d’impression, comme une plaque de gravure dont il ne me resterait plus qu’à me servir pour imprimer sur n’importe quelle surface. Puisque je travaille sur le tatouage, bien qu’il soit réalisé de manière fictive, je peux me servir des gravures réalisées sur le piano pour m’imprimer des motifs directement sur le corps en m’appuyant sur le support. Nous assistons à une première impression faite à même la peau, puis il est possible d’en produire une deuxième en se servant de la peau sur laquelle l’encre n’a pas encore eu le temps de sécher, l’épi-derme deviendrait ainsi un « tampon » vivant.

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Des réflexions antérieures à la performance:Nous tenions à amorcer un travail sur l’Exotisme, la trace, l’empreinte de l’autre. Nous justifions notre intervention par le fait que nous nous servions d’un objet occidental, le piano, pour produire des tatouages/marques «exotiques» soit directement sur le corps, ou inversement nous tenions à reproduir des marques qui étaient sur le corps que nous pensions appliquer par transfert de la peau sur le piano. Selon nous se sont des façons de montrer qu’il y a une évolution dans la manière de faire oeuvre, il ne s’agit plus d’ancrer notre pratique artistique dans un contexte «hors-europe» mais bien au contraire puisque nous vivons en France nous nous servons des moyens mis à notre disposition pour faire évoluer nos pratiques, et en parallèle faire évoluer les objets euro-péens qui pour le cas (les vieux pianos jetables) acquièrent une seconde vie grâce à nous. On se place alors dans une logique d’échange, l’occi-dent (le piano) et le monde non occidental (représenté par nos pra-tique) ne peuvent se suffire à eux même et se doivent de communiquer et interagir, travailler en tandem pour évoluer. Nous devions prendre en compte le fait que Philip Corner travaille sur la «destruction/modification», ainsi nous pouvions justifier le fait que nous travaillons aussi sur la destruction : notre propre culture se voit modifiée, détruite dés lors que nous nous servons d’outils  inap-propriés pour tatouer. C’est à dire qu’il n’est plus simplement question d’utiliser un instrument traditionnel pour tatouer, mais au contraire n’importe quel objet peut être détourné de sa fonction première pour ainsi servir à autre chose, c’est par exemple le cas du piano gravé qui servira de plaque à impression pour la peau et le papier. C’est un nou-veau mode de tatouage qui apparait. Le piano est détourné puisqu’il ne sert plus seulement à faire de la musique mais à imprimer, c’est une seconde vie et moyen d’exister qui sont offerts au piano.

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Voici quelques-unes des idées abordées au préalable pour ef-fectuer un travail en commun avec Bénédicte en parallèle de la per-formance réalisée avec Philip Corner. Cependant nous nous sommes rapidement rendues compte qu’il était difficile d’appliquer nos théories à la pratique. Nous avons donc décidé de continuer à nous interroger sur les idées présentées précédemment et de les réutiliser par la suite lors d’une exposition ultérieure où plusieurs enjeux ne seraient pas à prendre en compte comme c’était le cas durant de cette journée perfor-mative. Car la difficulté a été de mettre en accords nos idées et attentes avec celles des autres intervenantes ce jour là. Nous étions un groupe de 9 personnes, chacun avait l’intention de produire une création plas-tique qui lui serait propre tout en tentant de respecter l’idée général qui était de détruire un piano. Et bien sur il n’était pas évident de faire correspondre tous les travaux. Au delà des termes « exotisme », «  trace » ou encore « empreinte », qui présentaient nos travaux comme des productions se référant à des productions non occidentales, déjà toutes faites et dépassées, nous pré-férions parler de la « découverte d’un ailleurs par des pratiques ritua-lisées » et mettre l’accent sur la façon de faire, sur le « faire oeuvre » à l’heure actuelle.

Partant de ce premier échange nous nous sommes redirigées vers le thème « Art et société », ce que nous voulions c’était avant tout faire ressortir cet aspect exotique et inconnu de nos origines au travers d’une exposition commune.

Retrouvez une vidéo sur Youtube à l'adresse suivante :

https://www.youtube.com/watch?v=Bia59Jcp4UI

Ou en scannant :

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L'APRÈS EXPOSITION

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L’APRÈS EXPOSITION Vers une exposition idéale :

Modélisation de la salle d’exposition initiale de chez Bénédicte à laquelle quelques modifications ont été appliquées. La salle est plus alongée pour donner un effet de profondeur et per-mettre aux visiteurs d’avoir du recule en regardant les travaux situés à droite et à à gauche de la salle.

Au cours du montage de notre exposition nous avions été confrontées à divers problèmes. L’espace, bien qu’il soit suffisamment grand pour accueillir nos travaux, semblait être trop exigu pour per-mettre à un trop grand nombre de personnes de visiter les lieux en même temps, ou bien il serait impossible de placer d’avantage d’œuvres dans le même espace au risque de rendre la pièce étouffante pour le public, voire d’étouffer les autres oeuvres. Cela pourrait entrainer une mauvaise lecture de ces oeuvres de la part des personnes amenées à voir l’exposition. Bénédicte et moi savions qu’il existait un dialogue entre les oeuvres qui se répondaient entre elles, cependant l’espace jugé trop petit pourrait fausser cette lecture.

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L’idéal aurait été d’avoir une pièce beaucoup plus allongée afin de laisser les oeuvres respirer. De cette façon l’installation et la projec-tion continueraient d’être exposées face à face afin que l’interaction qui existe entre elles perdure. La baie vitrée, qui est présente à l’heure actuelle chez Bénédicte, occupe tout un pan de mur qui aurait put servir d’espace d’exposition pour une de mes création personnelle. Bien que cela ne fut pas réalisé, d’une part à cause du manque de place général dans la pièce, ensuite parce je ne tenais pas à présenter mes mains devant la baie vitrée, je pensais tout de même au lieu idéal. Celui-ci serait vide de baie vitrée, il aurait put accueillir mes travaux, ainsi j’y aurais placer une table sur laquelle se trouveraient des mains en plâtre et peinte avec des motifs noirs rappe-lant les tatouages. Il y aurait par là un lien avec ma pratique personnelle puisque j’ai déjà eu l’occasion de créer des mains en plâtres présentées dans une installation avec des vidéos. Cette fois-ci pour cette exposi-tion idéale mais fictive, j’espérais voir mes petites sculptures position-nées en face des toiles de Bénédicte afin qu’il y ait une correspondance

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entre nos travaux respectifs, et ainsi le public pourrait s’apercevoir de ce que nous avions mené chacune de notre coté, avant que nous déci-dions de mêler nos pratiques pour en arriver à des oeuvres comme l’installation ou encore l’animation vidéo dans lesquelles apparaissent aussi bien des peintures et marques corporelles.

Exposition des mains plâtrées.

Ensuite pour le vidéoprojecteur que nous avions utilisé et qui ne fournissait pas un éclairage suffisant, la solution aurait été d’en utili-ser un autre assez performant pour nous permettre de laisser quelques éclairages allumés dans la salle sans que cela n’empêche une bonne visi-bilité de la projection.

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Quelques projecteurs assez puissants auraient permis de diri-ger la lumière directement sur chaque oeuvre et cartel, tout en laissant le reste de la pièce dans le noir. Cela créerait une atmosphère mysté-rieuse qui correspondrait bien à la dialectique recherchée lors de la conception de chaque oeuvre.Au delà du travail entamé avec Bénédicte dans son appartement, je pense que nous aurions aimé le poursuivre dans nos régions d’origine afin de confronter nos oeuvres au regard de la population local, et de voir si ces nouveaux modes de production font sens pour eux.

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CORPUS D'IMAGES

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CORPUS D’IMAGES Photographies de la préparation de l’exposition :

Essais 1 : Vidéo et rituel.

Avant d’opter pour le stop motion, nous avions réalisé une vidéo dans laquelle nous pouvons voir la main de Bénédicte qui peint sur la peau. Mais à la différence du stop motion on perd le coté spontané de la trace qui apparait sur le corps sans que nous ayons put voir aucun coup de pinceau ou geste de la main.

Retrouvez la vidéo sur Youtube à l'adresse suivante :

https://www.youtube.com/watch?v=eAUE3D7qI1k

Ou en scannant :

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Essais 2 : Réalisation d’un stop motion qui a nécessité 41 photographies.

Projection finale

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Préparation d’une des peintures exposées.

L’idée fut inspirée du travail d’impression corporelle mené lors de la performance à l’ESPE.

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Prises de vues de l’installation. Nous pouvons voir le buste de profil ainsi que les motifs qui y figurent et les cordes qui ont servi à réaliser des marques.

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Retrouvez les photographies, vidéos et stop motion sur Tumblr et Youtube aux adresses suivantes :

http://exposition2014-zangre-haoa.tumblr.com

https://www.youtube.com/channel/UCiXxXL440s6Rjxj4LSmWClw

Ou en scannant :

INFORMATIONS PRATIQUES :

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