DÉCEMBRE 2016 DE L’ENVIRONNEMENT - farre.org · Cette « destruction créatrice » décrite il y...

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Un engouement encore timide pour HVE En un an, le nombre d’exploitations certifiées HVE (haute valeur environnementale) a plus que doublé. Pourtant, face à cette évolution générale, elles ne sont aujourd’hui qu’à peine cinq cents en France, essentiellement en production viticole. C inq ans après la mise en place de la certification environnementale, le ministre de l’Agriculture a donné la mission au Conseil général de l’alimen- tation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) de dresser un état des lieux de cette démarche. Le ministère de l’Agriculture avait veillé à ne pas rencontrer les mêmes freins que ceux constatés pour la qualification « agri- culture raisonnée ». Ainsi, il est possible de s’engager dans la certification environnementale par étape, en progressant jusqu’au 3 e niveau HVE, avec une communication sur le produit grâce à un logo HVE. Pour autant, seules 471 exploitations, essentiellement viticoles, sont aujourd’hui certifiées HVE en France. Les raisons de ce faible nombre d’exploitations HVE sont multiples : contexte de crises agricoles, manque d’articulation avec l’approche agro-écologique prônée par le ministère, absence d’incitations à rejoindre la démarche... Le rapport du CGAAER, prévu pour la fin de l’année, devra mieux cerner les blocages pour permettre de (re)lancer la dynamique. Alors que le consommateur est de plus en plus demandeur de produits respectueux de l’environnement, il serait dommage qu’HVE n’en tire pas bénéfice. Luc Smessaert, président de Farre LE FORUM DE L’ENVIRONNEMENT DÉCEMBRE 2016 37 La boîte à outils des agriculteurs récompensée aux Victoires des agriculteurs ! Dans le cadre des 7 es Victoires des agriculteurs, concours mis en place par le Syrpa, le réseau des agri-communicants, le site internet www.boitagri.com créé par l’Association Farre a été récompensé dans la catégorie « Partage & idées neuves ». A près avoir été retenu par un jury d’experts présidé par Erik Orsenna, membre de l’Académie française, un panel de 500 agriculteurs a désigné par son vote le site www.boitagri.com comme projet lauréat « en faveur d’une agriculture dyna- mique et performante, respectueuse de l’environnement et de la qualité de vie des agriculteurs », plébiscitant ainsi le partage d’expériences. « Ce prix récompense deux ans de travail de l’association Farre pour promouvoir les différents leviers de protection intégrée des cultures » a souligné Luc Smessaert, président de Farre, lors de la remise des prix. En effet, le site est le fruit d’un travail collaboratif avec différents partenaires et les agriculteurs du réseau qui ont accepté de partager leurs expériences sur la protection intégrée à travers des vidéos thématiques. De nouveaux sujets seront progressivement intégrés dans le site : la préservation de la biodiversité et la gestion des déchets en sont des exemples. PC Reconnu par le ministère de l’agriculture comme un des outils de la démarche agro-écologique, le site www.boitagri.com est présent sur la plateforme EcophytoPIC La remise des Victoires des Agriculteurs a eu lieu à l’occasion de l’Open Agrifood le 16 novembre 2016 à Orléans

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Un engouement encore timide pour HVEEn un an, le nombre d’exploitations certifi ées HVE (haute valeur environnementale) a plus que doublé. Pourtant, face à cette évolution générale, elles ne sont aujourd’hui qu’à peine cinq cents en France, essentiellement en production viticole.

Cinq ans après la mise en place de la certifi cation

environnementale, le ministre de l’Agriculture a

donné la mission au Conseil général de l’alimen-

tation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)

de dresser un état des lieux de cette démarche.

Le ministère de l’Agriculture avait veillé à ne pas rencontrer les

mêmes freins que ceux constatés pour la qualifi cation « agri-

culture raisonnée ». Ainsi, il est possible de s’engager dans la

certifi cation environnementale par étape, en progressant jusqu’au

3e niveau HVE, avec une communication sur le produit grâce à un

logo HVE. Pour autant, seules 471 exploitations, essentiellement

viticoles, sont aujourd’hui certifi ées HVE en France.

Les raisons de ce faible nombre d’exploitations HVE

sont multiples : contexte de crises agricoles, manque

d’articulation avec l’approche agro-écologique prônée

par le ministère, absence d’incitations à rejoindre la

démarche... Le rapport du CGAAER, prévu pour la fi n de l’année,

devra mieux cerner les blocages pour permettre de (re)lancer

la dynamique. Alors que le consommateur est de plus en plus

demandeur de produits respectueux de l’environnement, il

serait dommage qu’HVE n’en tire pas bénéfi ce. Luc Smessaert, président de Farre

LE FORUMDE L’ENVIRONNEMENT

DÉCEMBRE 2016n° 37

La boîte à outils des agriculteurs récompensée aux Victoires des agriculteurs !Dans le cadre des 7es Victoires des agriculteurs, concours mis en place par le Syrpa, le réseau des agri-communicants, le site internet www.boitagri.com créé par l’Association Farre a été récompensé dans la catégorie « Partage & idées neuves ».

Après avoir été retenu par un jury

d’experts présidé par Erik Orsenna,

membre de l’Académie française, un panel

de 500 agriculteurs a désigné par son vote

le site www.boitagri.com comme projet

lauréat « en faveur d’une agriculture dyna- mique et performante, respectueuse de

l’environnement et de la qualité de vie des

agriculteurs », plébiscitant ainsi le partage

d’expériences.

« Ce prix récompense deux ans de travail

de l’association Farre pour promouvoir les

différents leviers de protection intégrée

des cultures » a souligné Luc Smessaert,

président de Farre, lors de la remise des

prix. En effet, le site est le fruit d’un travail

collaboratif avec différents partenaires et

les agriculteurs du réseau qui ont accepté de

partager leurs expériences sur la protection

intégrée à travers des vidéos thématiques.

De nouveaux sujets seront progressivement

intégrés dans le site : la préservation de la

biodiversité et la gestion des déchets en

sont des exemples. PC

Reconnu par le ministère de l’agriculture comme un des outils de la démarche

agro-écologique, le site www.boitagri.com est présent sur la plateforme EcophytoPIC

La remise des Victoires des Agriculteurs a eu lieu à

l’occasion de l’Open Agrifood le 16 novembre 2016 à Orléans

Et si après les vents du pessimisme

où l’on nous rabâchait à coups

d’éditos déprimants que « c’était

mieux avant », que le « pire était devant

nous », se levait un vent contraire porté

par une génération de nouveaux profils

d’agriculteurs qui avaient décidé de faire

face à l’adversité, de relever la tête et de

prendre des risques pour profiter des dif-

férents bouleversements (numérisation,

robotisation, ubérisation) qui traversent

notre société pour proposer une nouvelle

transformation de l’agriculture ?

Sans parler d’une nouvelle révolution

comme certains n’hésitent pas à le dire ;

l’impression qui se dégage, c’est un foi-

sonnement d’initiatives et des projets

qui émergent un peu partout, tant au

niveau national que sur le terrain et qui

bousculent les schémas traditionnels de

pensée, d’organisation de production.

À Farre, nous avons voulu en tout cas, aller

plus loin et approfondir cette thématique,

d’une part parce que l’innovation est dans

notre ADN mais d’autre part parce que

plusieurs agriculteurs de notre réseau

se lancent dans de nouveaux défis et

incarnent ce renouveau :

• Création d’un nouveau service d’appro-

visionnement d’énergie à partir d’une

unité de méthanisation chez Philippe

Collin en Haute-Marne ;

• Amélioration de l’efficacité des traite-

ments sur les pommiers par modification

de la dureté de l’eau chez Emmanuel

Dalle dans le Pas-de-Calais ;

• Démédication, bien-être animal renforcé

et basse consommation d’énergie chez

Thierry et Christiane Lambert ;

• Création d’une plateforme numérique

pour favoriser l’échange de parcelles

éloignées du siège d’exploitation chez

Mickaël Jacquemin dans la Marne ;

• Création d’un distributeur automatique

de légumes au cœur d’une exploitation

céréalière chez Christophe Grison dans

l’Oise.

Nous pourrions rallonger la liste de ces

projets qui, tous, ont pour caractéristiques

de bousculer l’existant, de parier sur l’ave-

nir en utilisant l’innovation comme moteur

de développement et de rechercher de

nouvelles formes de collaboration pour

concilier développement de la production

et respect de l’environnement.

L’innovation, thème central du prochain colloque FarrePour aller plus loin dans la réfl exion, nous

avons décidé de consacrer notre prochain

colloque Farre sur ces nouveaux enjeux qui

traversent notre secteur avec pour thème

central : Le progrès est mort – Vive l’inno-

vation. Il se tiendra mercredi 1er février au

matin à Paris au siège de l’APCA.

Bousculer les schémas traditionnels de pensée avec l’innovation ! Effet de mode qui ne durera que l’espace d’une saison ou véritable lame de fond qui va modifi er en profondeur le secteur agricole dans les prochaines années ? L’avenir dira si cette tendance se confi rme.

REGARDS CROISÉS

Le progrès est mortVive l’innovation COLLOQUE FARRE

mercredi 1er février 2017

à l’APCA

En développant ce thème, notre objectif

n’est pas de revendiquer je ne sais quel

optimisme béat sur « l’idée de progrès »

mais de montrer que le secteur agricole ne

reste pas fi gé dans ces certitudes et que

c’est souvent dans ces périodes diffi ciles

de remise en cause, « de destruction

créatrice » que peuvent surgir les idées

audacieuses.

Les livres d’histoire regorgent d’anecdotes

sur l’invention de la roue, de la charrue qui

entraînent à leur tour d’autres bouleverse-

ments en cascade. Ces grandes mutations

de l’Histoire nous enseignent que ce ne

sont pas des périodes où l’on invente mais

des moments de « synthèse créative » où

la convergence des technologies trouve un

sens. Il nous semble qu’avec la numérisa-

tion de l’agriculture, nous sommes dans

un de ces moments.

Il suffit pour cela de constater le nombre

important de jeunes diplômés, non issus

du monde agricole qui viennent avec

gourmandise à l’agriculture, avec la volonté

de penser autrement, de faire autre chose

pour répondre aux nouvelles demandes du

consommateur ou du citoyen ou inventer

de nouveaux services ou produits.

Le numérique bouscule les contradictions de l’agroalimentaire Cette « destruction créatrice » décrite

il y a plus d’un siècle par Schumpeter

prend aujourd’hui un sens nouveau avec

l’outil numérique qui bouscule toutes les

contradictions de la chaîne agro-alimen-

taire. C’est pourquoi nous avons demandé

à Nicolas Bouzou, essayiste, auteur de

« L’innovation sauvera le monde » d’être

le grand témoin pour qu’il nous aide à

décrypter ce phénomène et qu’il nous

dise comment une telle vision optimiste

peut se réaliser.

Comment l’agriculture doit-elle se compor-

ter face à ce nouveau paradigme ? Doit-

elle le craindre et tout faire pour inventer

de nouveaux verrous pour sécuriser les

processus de productions, de transfor-

mation, de communication

sans tenir compte du fait que

le consommateur dispose de

nouveaux moyens de pression

et d’expression grandissants ?

Ou au contraire devons-nous

inventer les « foils » de l’agri-

culture qui, à l’image des bateaux du

Vendée Globe, décollent au-dessus des

flots, nous permettrons de nous extraire

de nos pesanteurs et d’imaginer une

agriculture réconciliée avec les consom-

mateurs et le citoyen ?

Gilles Maréchal

Directeur de Farre

Un distributeur automatique de légumes qui répond à une véritable demande des consommateurs.

Création d’un service d’approvisionnementd’énergie à partir d’une unité de méthanisation chez Philippe Collin en Haute-Marne.

« L’innovation sauvera le monde »

Nicolas Bouzou sera le grand témoin du colloque du 1er février. Fondateur de l’entreprise Asterès, société d’analyse

économique et de conseil, il vient de publier un essai aux Editions Plon : « L’innovation sauvera le monde – Philosophie pour une planète pacifi que, durable et prospère ».Dans son ouvrage, à la frontière de l’éco-nomie, de l’histoire et de la philosophie, Nicolas Bouzou estime que l’innovation peut contribuer à sauver le monde, sous certaines conditions. La technologie seule ne suffi ra pas. Seule la philosophie permet de l’orienter de façon positive.Il est nécessaire d’articuler économie et philosophie. Nous assistons aujourd’hui à une mutation extraordinaire, de la même ampleur que celle qui s’est passée au 19e siècle ou durant la Renaissance, mais il manque une direction. L’accélération des nouvelles technologies est passionnante mais une régulation s’appuyant sur une bonne

éthique est nécessaire. Pour Nicolas Bouzou, il faut cesser de dire que le monde d’avant était meilleur. Il faut réhabiliter la notion de pro-grès en lui donnant un contenu

concret. « Face à la mutation dans laquelle nous sommes entrés il y a une quinzaine d’années et qui va durer encore aussi longtemps, nous tremblons d’effrois mal placés. Nous craignons la fi n du travail. Mais la mutation en cours peut être formidablement stimulante pour l’économie et libérer le travail pour une prospérité mieux partagée ».Ne pas avoir peur et redonner de l’espoir, la vision de l’économiste ne serait-elle pas à certains égards trop angélique et béate ? « Sai-sir les promesses de ce nouveau monde hypertechnologique et en pleine mutation qui s’ouvre à nous, tout en sauvant ce qu’il y avait de meilleur dans l’ancien, est bien la seule façon de transformer l’inno-vation en progrès et de réconcilier les peuples avec l’avenir », insiste Nicolas Bouzou. CR

Nicolas BOUZOUéconomiste

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ÉCHOS FARRE

PRATIQUES AGRICOLES - ENVIRONNEMENT - PROGRÈS TECHNIQUES - ÉCHANGES & PARTAGES

EN BREF

Retrouvez sur le site de la boîte à outils des agriculteurs de nouveaux témoignages vidéo de producteurs et des fiches techniques

sur la protection intégrée des cultures, pour des pratiques performantes et durables. Le site est régulièrement enrichi.

Rendez-vous sur www.boitagri.com

Confronté à la diffi culté de gérer de façon optimale des parcelles très éloignées, Mickaël Jacquemin, agriculteur dans la Marne, a conçu avec son beau-frère, Vincent Barbier, l’application « Échangeparcelle ». Un outil simple et gratuit qui s’inscrit pleinement dans des pratiques agricoles orientées vers le développement durable.

L’échange de parcelles entre agriculteurs

voisins est une pratique qui existe

depuis longtemps en agriculture. Mais le

problème s’est posé pour Mickaël Jacquemin

s’agissant de parcelles très éloignées : « nous

n’avons parfois pas assez de connaissances

loin de chez nous pour établir des échanges de

parcelle. L’idée m’est venue avec mon beau-

frère, très féru de nouvelles technologies,

de réfl échir à la façon de faciliter la mise en

relation entre agriculteurs, distants parfois de

plusieurs dizaines de kilomètres ».

Gain de temps « Mettre en place des échanges de parcelles

éloignées permet de faire des économies sur les

charges de structure, avec moins d’usure des

pneumatiques ou une moindre consommation

de carburant par exemple. Les charges opéra-

tionnelles s’en trouvent également diminuées.

Être au plus près des parcelles cultivées permet

d’être plus précis et plus réactif pour intervenir.

En effet, étant engagé sur mon exploitation

dans une démarche volontaire de réduction

de l’usage de pesticides avec le réseau Ferme

Dephy, j’ai identifi é clairement qu’il m’était très

diffi cile de mettre en place un raisonnement

pointu des interventions phytosanitaires sur

des parcelles éloignées ».

Mickaël Jacquemin et Vincent Barbier ont

alors conçu un outil qu’ils ont voulu gratuit

pour les agriculteurs et simple d’utilisation.

En utilisant le site www.echangeparcelle.fr,

l’agriculteur géolocalise le siège de son

exploitation et les parcelles trop éloignées

qu’il souhaite rapprocher. Il précise les

caractéristiques principales et ses exigences

en matière d’éloignement de parcelles. Un

algorithme identifi e parmi les agriculteurs

inscrits tous les échanges possibles. Une alerte

par mail ou texto informe des propositions

d’échange. L’agriculteur reprend la main afi n

de fi naliser l’opération.

« Échangeparcelle » est un outil pertinent

au service de l’agriculture agro-écologique.

CR

Plus proche pour plus d’e� cacité

Un constat simple : une parcelle éloignée coûte de l’argent et sa conduite est moins bien gérée. Sur la base d’un échange responsable, l’outil « Échangeparcelle » met en relation les agriculteurs intéressés.

DR

BiodiversID recrute de nouvelles exploitationsBiodiversID entame sa sixième année d’activité. Ce programme national est constitué de fermes pilotes qui testent et mettent en œuvre de nombreuses actions en faveur de la biodiversité et les suivent grâce à des indicateurs de progrès.

Les agriculteurs intéressés à dresser un état des lieux de la biodiversité sur leurs exploitations, des biotopes existants et des aménagements favorables peuvent prendre part au programme BiodiversID et rejoindre la cinquantaine d’agriculteurs déjà engagés.

Contact : Vickie Audubert, [email protected], 06.25.31.00.62,https://biodiversid.com/

Ont participé au Forum de l’environnement :

L’équipe de Farre,

Nadège Lanier, Pauline Caron, Gilles Maréchal, Claude Richard

19, rue Jacques-Bingen - 75017 Paris

Tél. : 01 46 22 09 20

Site : www.farre.org

Mail : [email protected]

@AssoFarre - Asso Farre

À partir de différents comptages, des enseignements intéressants peuvent être tirés sur la pertinence d’indicateurs de la biodiversité.