Débat Parlementaire Abolition Peine de Mort 1

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JOURNAL OFFICIELDE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISEDÉBATS PARLEMENTAIRESASSEMBLÉE NATIONALE

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  • * Anne 1981 . N' 27 A . N. (C. R .) ISSN 0429-30880242-6765 Vendredi 18 Septembre 1981 *

    JOURNAL OFFICIELDE LA RPUBLIQUE FRANAISE

    DBATS PARLEMENTAIRESASSEMBLE NATIONALE

    CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    7' Lgislature

    SECONDE SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1980-1981(14 SEANC E)

    COMPTE RENDU INTEGRAL

    1'r Sance du Jeudi 17 Septembre 1981.

    SOMMAIRE

    PRSIDENCE DE M . CIIRISTIAN NUCCI1. Abolition de la peine de mort . Discussion d ' un projet

    de loi (p. 1135).M . Forni, prsident de la commission des lois, rapporteur.M . Badinter, garde des scea .Ix, ministre de la justice.Question pralable de M . Clment : MM . Clment, Sguin.Suspension et reprise de la sance ,p . 1147).MM . Joxe, le prsident.M . le prsident de la commission, rapporteur . Rejet de la

    question pralable.Discussion gnrale:Demande de rappel au rglement ip . 1148).MM . Nungesser, le prsident.M . Marchand.Rappels au rglement 1p . 1151).MM . Nungesser, le prsident . Joxe, Ducolon.Renvoi de la suite de la discussion la prochaine sance.

    2. Ordre du jour (p . 1153) .

    PRESIDENCE DE M . CHRISTIAN NUCCI,vice-prsident.

    _La sance est ouverte quinze heures.M. le prsident. La sance est ouverte.

    I

    ABOLITION DE LA PEINE DE MORT

    Discussion d'un projet de loi.M. le prsident. L'ordre du jour appelle la discussion du

    projet de loi portant abolition de la peine de mort (n"' 310, 316).La parole est M. Forni, prsident et rapporteur de la

    commission des lois constitutionnelles, de la lgislation et del'administration gnrale de la Rpublique.

    M. Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur.Monsieur le prsident, monsieur le garde des sceaux, mesdames,messieurs, c'est un moment historique que nous vivons.C'est une page que nous allons tourner . Avec nous, la Franceva sortir de cette priode qui l'avait mise au ban des grandesnations civilises .

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    ASSEMBLEE NATIONALE 1" SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    M. Pierre-Charles Krieg. Il ne faut pas exagrer, tout demme!

    M. Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur.Grce vous, un long combat va s'achever, une longue luttetrouver son terme.

    Parce que aujourd'hui nous crivons l'histoire, laissons chacunl'occasion d'ouvrir son cur, de laisser parler sa conscience.Chacun pourra, dans la dignit que je souhaite, rflchir haute voix pour, s'il en tait besoin, se dterminer un peuplus ou mettre fin ses hsitations . Chacun le pourra, et cesera l'honneur de notre assemble . du Parlement, de l'ensemblede ceux qui, avec vous, monsieur le garde des sceaux, crirontun nouveau chapitre dans le grand livre des mmoires denotre temps.

    Parce que ce dbat, ce projet transcendent les clivages poli-tiques traditionnels . ..

    M . Bernard Stasi . Trs bien !M . Raymond F'irni, prsident de la commission . rapporteur.

    . . .abolissent les frontires de la doctrine, gomment les rivagessur lesquels d'habitude campent opposition et majorit, parcequ'aujourd'hui, dans le pays, des hommes et des femmes, l'es-pace d'un instant, tracent de nouveaux contours aux visagespolitiques qu ' ils rencontr ent gnralement, scrutent le choixde chacun et de chacune d'entre nous, la dignit est plus quejamais ncessaire . (Appluudissements sur dirers bancs .)

    M. Bernard Stasi . Trs bien!M. Ra rnond Forni, prsident de la commission . rapporteur.

    Jamais, depuis soixante-douze ans, nous n'avions tant senticette communion dans laquelle se retrouvent abolitionnistesconvaincus, hommes cle gnrosit et de responsabilit.

    Jamais, parce que nous sommes aux limites du conscient etde l'inconscient, de l'absurde et de la logique, de la passionet de la srnit, parce que deux conceptions s'affrontent, parcequ'il s'agit de la vie ou de la mort, jamais nos discussionsn'auront revtu un tel caractre exceptionnel, jamais nousn'aurons senti d'aussi prs le frisson de l'histoire . Rarementnous aurons tant mesur le poids de notre responsabilit.

    Et pourtant, tant de grandes voix se sont leves ici, tantde cris admirables nous sont parvenus! Nous avons la certi-tude, mes chers collgues, qu' prsent tout a t dit et qu'ilnous appartient de conclu re.

    Ce dbat, nous l'avions rclam depuis longtemps . Et s'il n'apas eu lieu, c'est parce que nos initiatives se sont heurtesaux hsitations du gouvernement prcdent, et notamment celles de son garde des sceaux, M . Peyrefitte.

    Certes, la position du ministre de la justice d'alors et duchef de l'Etat n'tait pas une opposition de principe l'aboli-tion, mais ils estimaient inopportun un dbat sur la peinecapitale dans une priode o le peuple prouvait, selon eux.un sentiment grave et croissant d'inscurit . La question del'abolition de la peine de mort, disaient-ils ds 1977, n'est pasune question d'actualit . Comme si inscurit et peine de mortallaient de pair, comme si, dans les pays abolitionnistes, l'ins-rit avait grandi lorsque avait t dcide la suppression de lapeine capitale, comme si la diminution de la criminalit taitlie la mort de quelques hommes!

    C'tait, dans un schma simpliste, faire crouler l'dificerpressif que d'aller dans cette voie, c'tait protger le peuplefranais que de maintenir dans l'article 12 du code pnal .lapeine de suppression de la vie.

    Chacun se souviendra aussi qu'en 1978 M. Pierre Bas et legroupe socialiste, par une manoeuvre, un biais de procdure la demande de la disparition dans le budget, des crdits dubourreau avaient tent de relancer, de remettre sur le chan-tier le problme de principe, celui de la peine capitale . A cetteoccasion, le garde des sceaux n'annonait-il pas qu'en 1979, leGouvernement laisserait venir er. discussion des propositionstendant abolir la peine de mort ? Le Gouvernement prend cetengagement, il le tiendra, affirmait-il : une fois de plus, lesespoirs furent marqus par l'chec.

    En 1979 encore, forts de cet engagement, les dputs adopt-rent en commission, une large majorit, l'admirable rapportde M. Sguin . Malgr cette volont affirme, malgr des tr-sors d'ingniosit dploys, le Parlement dut se ( ontenter, le26 juin de cette mme anne, d'un dbat de rflexion et d'orien-tation sur la dclaration du Gouvernement, dbat relatif l'chelle des peines criminelles, non sanctionn par un vote,mais qui permit chacun des participants et l'opinion publi-que l'coute de cerner ce qu'tait cette poque-l l'tat de laquestion . Parce qu'ils sentaient qu'aux rticences, aux reculades,aux refus, aux arguties du Gouvernement s'ajoutait une volontpolitique de refuser d'aller jusqu'au bout, reprenant, en novem-

    bre 1979, leur marche, l'ensemble de ceux qui forment aujour-d'hui la famille abolitionniste dposrent de nouveau des amen-dements supprimant les crdits du bourreau . On nous promitalors le dpt d'un projet de loi sur la revision de l'chelledes peines avant la fin de la session, et un dbat, sanctionnpar un vote, qui nous permettrait d'aborder le problme defond.

    Nous avions le sentiment d'avoir gagn : nous avions ttromps.

    On cerna mieux les intentions relles lorsqu'en ) y a, uneinterrogation de M . Sguin . le garde des sceaux rpondit ;_la peine de mort tait un problme complexa auquel il nepouvait tre apport de rponse simpliste et qu'aux yeux duGouvernement de rcents crimes en sries qui avaient profon-dment mu l'esprit public rendaient inopportun dans l'imm-diat le dpt de ce texte . A la volont majoritaire, cettevolont affirme de tous ceux qui voulaient enfin qu'il soit tenucompte de leurs voeux, de leurs souhaits . de leurs convictions,rpondit le scandaleux, l'abominable projet n scurit-libert .(Murmures sur quelques bancs du rassemblement pour !a Rpu-blique et de l'union pour la dmocratie franaise .)

    M. Pierre-Charles Krieg . Oh !M . Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur.

    Beaucoup comprirent alors que c'en tait fini de l'aversion pro-fonde de M . Gisca r d d'Estaing et de l'horreur que suscitait lapeine de mort . ce crime lgal, M . Peyrefitte lorsqu'il crivaiten 1949 Le Mythe de Pnlope . Mais parce que nous savionsune chance lectorale proche, un- dernier sursaut des abo-litionnistes permit de mehre en garde le Gouvernement et lePrsident de la Rpublique sur la responsabilit qui serait laleur si une excution, une seule, venait intervenir, alors quela reprsentation nationale risquait quelques jours, quelquessemaines ou quelques mois plus tard, de dsavouer le chef del'Etat.

    M. Jean Brocard . Et les assassinsM. Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur.

    Lorsqu'il s'agit de la vie ou de la mort, lorsqu'il s'agit de faireun choix dchirant . douloureux, ent re laisser vivre ou laissermourir, le mpris de la reprsentation nationale devient plusinsupportable encor e . Ecarter d 'un artifice ce qui est pourchacun d'entre nous un choix personnel, philosophique, reli-gieux,, thique ou politique, malmener la conscience de chacun,c'est afficher l'irrespect, c'est mettre en cause l'indpendancedu pouvoir lgislatif,

    M. Albert Brochard . Laissez la libert de vote aux membres devotre groupe!

    M. Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur.Aujourd'hui, nous pouvons et nous devons faire triompher,comme le souhaitait Beccaria, la cause de l'humanit . Bel opti-misme, me direz-vous, et sur quoi se fonde-t'il ? Quelquechose aurait donc chang dans le gouvernement des hommes?

    Souvenons-nous que l'lection de Franois Mitterrand le10 mai dernier, que l'avnement d'une nouvelle majorit prsi-dentielle venant renforcer les rangs aes abolitionnistes sont lesraisons essentielles sur lesquelles s'appuie l'esprance. Nous quisommes ici rassembls, avons pris des engagements . Nous quinous retrouvons en ce mois de septembre 1981, avons fait despromesses, et parce que dans celles-ci figurait l'abolition de lapeine de mort, nous avons toutes raisons de croire l'issueheureuse du projet de loi en discussion.

    Pourrions-nous, d'ailleurs, dsavouer celui qui, l'occasionde la campagne lectorale, dclarait : Dans ma conscience pro-fonde, qui rejoint celle des glises, l'glise catholique, lesglises rformes, la religion juive et la totalit des grandesassociations humanitaires internationales et nationales . . . (Pro-testations sur de nombreux bancs du rassemblement pour laRpublique et de l'union pour la dmocratie franaise .)

    M . Jean-Paul Chari . Il ne faut pas tout mler !M. le prsident . Messieurs, tchez de conserver ce dbat

    la dignit qui lui sied ! (Applaudissements sur les bancs dessocialistes et des communistes .)

    M. Jean-Paul Chari. Justement !M . Raymond Forni, prsident de la commission, rapporteur,

    Je termine ma citation de Franois Mitterrand : . . .dans maconscience, dans le for de ma conscience, je suis contre lapeine de mort .

    Pourrions-nous . mes chers collgues, ne pas saluer le couragede M. Chirac qui, lui-mme, s'opposait avec la mme vigueur la peine de mort ?

  • ASSEMI>LEF. N. TION:ILF, 1 "

    L ' honntet, l'honntet politique . la responsabili t dont nuitssonnes invertis, d .divent nous conduire, au terme uc notre longchemin . a f ' a,'c .;mlaissenent de noie mandat.

    C ' est aussi parce que des promesses avaient t prodiguesdepuis des annes dj ; c ' est parce que nous irons le sentimentque la volont du Parlement a t trop longtemps et volontaire-ment iunorie ; c ' est parce que l ' on ne peut plus se contenternavement d ' associer la garantie de la scurit au maintiende la peine de mort, de lier le sentiment d'inscurit lasuppression de la peine capitale : c ' est pa -ci' que nous ne p ou-vons plis tolrer que soient bafous les granas principes denotre dmocratie, que ce dbat doit se tenir aujourd'hui.

    Souvenons-nous que la France est de plus en plus margina-lise au sein da la Communaut europenne ; qat de plus onplus des pressions s ' exercent sttr elle pour que s ' affirment, lplus qu'ailleurs, une solidarit de points de vue, une commu-naut de rfrence . Pouvons-nous Iongtelaps encore rester insen-sibles aux suppliques, aux demandes qui, ici ou l . sont lan-ces sur la scne internationale pour que notre pays alinne1 droit et raison? Souvenuns-nnus que noir e Constitutionelirrnnie reprend en exergue cette ide matresse, ce prin-cipe gnreux de la Dclaration universelle des droits del 'il Sonie qui affirme : 2 Tout individu a droit la vie, laliber t et la sfnet de sa personne.

    Comment imaginer que cette majorit nouvelle, que cettemajorit panctuclle, ne suit point soucieuse cFatigner le droitaime la tr . :dition humaniste de notre pays ?

    Et puis souvenons-nous enfui de l'immense re :punaa''ilit, dudamne qui, chaque fois, est celui de l'homme qui se retrouve face lui-mime . face au chois de la vie ou de la mort . Il lui incombel'horrible dcision de laisser, selon l ' hvpoerile formule, s lajusttee suivie son cour.; , ou d ' arricr le in-es, de retenir lamain et d^ gracier celui que . quelques mois plu : tint, au nonedut peuple franais, des hommes avaient condamn l'excution.

    Aussi loin que nous remontions dans l'histoire de la V" Rpu-blique, cils mn de ses prsidents a exprim son aven :ion pro-fonde pou r la peine de mort.

    , ,te nrfrerais, avouait le gnral de Gaulle . que personnene mit c : d ent . -

    Ce qui m'est le phis pnible, de trs loin, c'est le problmedes grces dclarait Georges Pompidou . . Pour moi, chaquefois, c ' est un drame de conscience , ajoutait-il.

    M . Albert Brochard . Vous les avez assez combattus!

    M . Raymond Forni, prsoh'et de la ce i ne nis.sio,?, rapporteur.Quant Franois Mitterrand, il affirmait le 18 mies dcinier :

    Je ferai ce que j'aurai haire dans le cadre d'une loi quej'estime excessive, c ' est--dire rgalienne, d'un pouvoir excessifdonn un seul homme : disposer de la vie d'un autre . Mais madisposition est celle d'un homme qui ne ferait pas procder des excutions capitales.

    :Mons nous laisser subsister l'intrusion du pouvoir politiquedans ce qui relve du pouvoir judiciaire ou :ilions-nous endbarrasser et mettre fin son empitement '. Atln p s-nnus jouerles Ponce Pilate, nous assurer rote rclstive iraneui l ii' deconscience, en transfrant l'excution d'une peine, la plus lourde,la plus pnible, la plus horrible, l'exercice d'un pouvoirrgalien ?

    Il faut que soit mis un terme cette ambigut, commodeparfois sur laquelle trop souvent certains se reposaient, rassursqu ' ils taient, parce que la dcision finale appartenait l ' autre,jur sigeant en cours d'assises out chef de l'Etat titulaire dudroit de grce.

    Le dilemme est d'autant plus douloureux, difficile, qu'il s'estrarement pos au cours de ces dernires annes et que cetteraret tendait ncessairement confrer chaque dcision unedimension de principe.

    Ce dbat, c'est aujourd'hui qu'il doit avoir lieu.Le Gon-ornement a voulu soumettre l'Assemble nationale

    un projet dpouill . un dispositif concis, clair . sans ambigut.Il a tenu galement le prsenter avec rigueu r et sans repren-dre, au risque de la sser, ce que d'autres avant lui avaient puaffirmer.

    Depuis Robespierre, Lamartine, Hugo ou Jaurs, cette mmetribune, nies chers collgues, tout a t dit . Depuis que desphrases merveilleuses ont t prononces pour la postritpar Koestler, Camus ou Naud, la peine de mort est devenueun mythe. ; elle revt les caractres de la chose sacre . Chti-ment expiatoire, offrande l'opinion publique, acte politiquedestin rassurer, elle a tour tour revcu ces pacti s es sanssortir ce pendant du domaine de l'irrationnel, du domainemythique .

    SE .1\CI: DU 17 SEPTE?,i3ItE 1931

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    Il est clone ncessaire que, au degr: d'information que nouspesstluns, au paroxysme d ' une p rucc lure, un ex p os des motifsse limite quelques consilratiens l' ndatnerimles, tut prin-ctpe : la peine de mort est abolie d ' une marnire dfinitiveet _ni'rale . Dans tous les cas o elle pouvait s ' appliquer, propre de tous les crhucs o elle pouvait foc prononce,elle est rempiac'ee par la deteniion ou la rehut nn criminelle peruluit . Le choix ainsi opr par le Gouvernement a valeurde symbole, et c ' est le symbole qui est ;cul susceptible demettre un terme l' insunpert :a .le . U dia -un le sait, un symbolen ' a de force que s ' il traduit une idde simple.

    Cc ries, t ., . .- nue ;Bose nnraie,,t put.;m poser auxquelles votre

    rappor '.eor se doit de rpondre.D ' abord, aurions-nous dis, aurions-nous pi e utiliser une autre

    procdure que la voie lgislative :'En la n',(tire il convient simplement de renvoyer ceux qui

    s ' interrn-,col ainsi l ' article 11 de notre Consiiintiun. Celui-c riprcvoit en effet que peut Pin' seul soumis au rfrendum toutprojet de loi portant sur l ' or anisation des peuinirs oublies,coupnria nt approbation d'un accord de conununaut ou tendant autoriser la ratifleatinn d'un trait . ..

    Chacun comprend bien que tourte dmarche visant utilisercette procdure et dune rformer la rale constitutionnellenous aurait cngaals dans un processus long, difficile . inadquat.Nous n ' aurions pas pu et nous ne devons pas nous rfugierderrire ce moyen confot ble qui consiste laisser l ' opinionpublique dcider seule . Ii y , 'e . mes chers enil_ ; .u_'s . de notrerespensabilit . de notre crdibilit . Il y va du fimotiunncmentm

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    ASSl' lbLEE NATION .11 .E 1" St' 1NUE DU 17 SEPTEMIiltE 1981

    A creux-lit . j ' indique que nette prcipilalimn, toute initie . touteadoption d ' un dispesiiif qui M ' entrerait pas dans le ce :Ire duneconception ginirale clans la,nu'lle s h :u'ui :niser . l . 'nt :n'ernti,,net ri'preseiun . protection de la soc,t e et dat e - ,cit de q,, l :l :o's-uns et seraient cerns l ' homme. ses limites et ses cunlrainte s ,cons'titcurait une damrtbe qui t .' uuurreil conduire qu ' l ' chec.Or nous arums tr op souvent ressenti cal cime dans le domainepnal pour prendre quelque risque que ce soit clans un domaineo l ' on touche l ' intinii, oit les (luises et le : hennin ., s ' apprcientau rythme du temps qui passe . des sanctions que l ' an inflige,des rsnitals que l ' un obtient.

    Poser le problme de l e t peine de remplacement ou de substi-tution aujourd ' hui . c ' est laisser croire l'efficacit de l a sanc-tion que nous voulns abolit' : i d e s ( lai-ser inca inlr qu 'tulefois disparue la peine de mort . se urcra ut_ doute sur l ' efficacitde notre jusl !ce . natra un malaise dans le peuple de Francequi, tent par les dmau'cItes suscites par quelques uns eu parquelques associat i ons, laissera panier la vengeance . laissent sedvelopper la vindicte, laissera libre cours la lui du talion.

    M. Albert Brochard . Ah a ' . ..M. Raymond Forni, prsident de ln ronnidee i on . rupporte'ar.

    Nous souhaitons simplement que nous suit accord un dlai.Ce projet de loi, voulu simple ol sobre, doit apper t, . gaiementune rponse claire . prcise . non ambigu . I .a Commission u sou-hait qu ' il en soit ainsi et \mi re rapporteur se joint ces cuis.

    Vous en avez fini, me direz-vous, et vous n avez point parldes victi111es, connue si ,j ' accrditais . pal' Utes ..ilences . la thsetrop souvent entendue sel un laquelle tutti abolitioeaiste semoque du sang vers par les criminels, selon laquelle nousaurions plus de considration pou r eux que pour ceux qui ontt frapps.

    En ce domaine galement, l'incomprhension a domin undialogue souvent strile o l'Intolrance triomphail, o le procsd'intention tait la rgle. Notre souci essentiel est d'assurerla scurit des victimes : nitre proccupation premire estd'accorder tous le droit la vie et, au fond de nous-manes,nous connaissons l'horreur, le ch'ume . la tra g die qui frappent iciou l au rythme de la folie des hommes.

    Nous savons que des vies sont gaches, que le souffle s'arrte.que la mort frappe et, chaque instant . pour nous . abolition-nistes, l'image de ces hommes et (le ces femmes est prsenteen nos mmoires. Cette image nous obsde . Mais c 'est prcis-ment parce que nous mesurons l horreur, parce que nousmesurons l'absurde que nous ne voulons pas rpondre la foliepar l'acte conscient, par l'acte froid.

    M. Robert Badinter, garde des sceaux, ministr e de la justice.Trs bien !

    M. Raymond Forni, prsident de la rmrnalissiot . rapporteur.A la barbarie du crime ne doit pas rpondre la ,. barbariedu chtiment.

    Mesdames, messieurs, c'est entre vos mains que re p ose aujour-d ' hui le sort de quelques-uns . Ils sont peu oie chose ctde l'image que nous voulons donner de la France. du respectque nous souhaitons pour elle . Ils ne sont rien, sauf peut-trepour ceux qui ont, quelques instants de leur vie, ctoyces hommes ou ces femmes partant l'chafaud.

    Ce n'est pas un ao r te de courage qui vous est demand, c'estun acte (le foi . un acte de foi en l'homme et je suis persuadque l'immense majorit de ceux qui, sur ces bancs ont rflchiavec moi, souhaitera comme moi que soit abolie la peinecapitale . (Applaudissements sur les boucs ales socialistes etdes comniuei.ste.s et sur quelques bancs du rassemblement pourln Rpublique et de l'union pour la dmocratie francaist_' .)

    M. le prsident. La parole est M. le garde des sceaux.ministre de la justice.

    M. le garde des sceaux . Monsieur le prsident, mesdames, mes-sieu rs les dputs . j'ai l'honneur, au nom du Gouvernement dela Rpublique, de demander l'Assemble nationale l'abolitionde la peine de mor t en France.

    En cet instant . dont chacun d'entre vous mesure la portequ'il revt pour notre justice et pour nous, je veux d'abo rdremercier la commission des lois parce qu ' elle a compris l ' espritdu projet qui lui tait prsent et, plus particulirement, sonrapporteur, M . Raymond Forni . 111,11 seulement parce qu ' il estun homme de coeur et de talent mais parce qu'il a lutt dans lesannes coules pour l'abolition. Au-del de sa personne et.comme lui, je tiens remercier tous ceux, quelle que soit leurappartenance politique qui, au cou rs des annes passes . notam-ment au sein des commissions des lois prcdentes, ont gale-ment uvr pour que l ' abolition soit dcide, avant mme quen'intervienne le changement politique majeur que nous connais-sens .

    Cotte c'omnm ninn d ' esprit . cotte communaut de pense tra-vers les clivages politiques montrent bien que 1' dbat quiest ouvert ae iuurd ' ilui dev:utt anus cet d 'abord un dam deconscience et le chois auquel chacun den're lues urocderel 'engagera ;, 'r-;unn .'I l cet!en'.

    Ra.mund l'und ,, eu raison de souligner qu ' une longue marelle

    s ' achcc aujourd hni . Prs- de deux sicles sont (coulesdepuis que dans la pr'trire assemble pa! letnraiairu' q1, ailconnue la Franc, . Le Pelletier de Saint-Fargeau demandaitl'abolition de le peine capitale . C 'tait en 179.1.

    .le regarde la m :u'clu' de la Femme.La France est grande . niai seulement par sa puissance . niais

    au-del de sa puissance . par l ' clat des ides, des causes. de la

    g nrosit qui l ' ont emport aux mumeals privilgis de sonhistoire.

    La France est granite parc, qu ' elle a t la premire enEurope abolir la iorlure malgr les esprits prcautionneux qui,dans le pays, s ' exclamaient l 'poque que, sans la tontu re

    . lajustice fratncai .se serait dsarme. que, sans lai torture, les bons

    sujets seraient livrs aux sclrats.La Femme a t parmi les premiers pa}

    .s du monde abolirl 'esclavage, ce crime qui dshonore muure l ' humanit.

    Il se trouve que la France aura t, en dpit de tant d ' effortscourageux, l 'un tics derniers pays, presque le dernier -- et jebaisse la voix pour le dire en Europe occidentale . dont ellea t si souvent le foyer et le poile, abolir la peine de ntort.

    Pourquoi ce retard ? Voil la premire question qui se pore 11ous.

    Co n ' est pas la faute du gnie national . C ' est de France . c' estde cette eueeitlte . souvent, que se sont leves les plus granitesvoix, celles qui out rsonn le plus hait et le plus loin dans laconscience humaine, celles qui ont soutenu, avec le plus d ' lo-quence . la cause de l ' abolition . Vous avez, fort justement, men-sieur Forai . rappel Hugo, j ' y ajouterai, parmi les 'erirains,Cants . Comment, dans celle enceinte, ne pas penser aussi Gambetta, Clemenceau et surtout au grand Jaurs' : 'fousse sont levs

    . 'fous ont soutenu la cause de l'abolition . Alorspourquoi le silence a-t-il persist et pourquoi n'avons-nous pasaboli

    .le ne pense pas non plus que ce soi t cause chi tempramentnaaiunal . Les Francais ne sont cortes pas plus rpressifs, moinshumains que les aut res peuples . Je le sais pas exprience . ,faceset jur s franais savent tire aussi gnreux que les- antres.1.a rponse n'est donc pas l . 11 faut la chercher ailleurs.

    Pour tus vert . j'y vois une explication qui est d ' ordre politique.Pourquoi

    L ' abolition. je l'ai dit . regroupe, depuis deux .sicles . des

    femmes et des hommes de toutes les classes politiques et, bienau-del, de toutes les couches cle la nation.

    Mais si l'on considre l'histoire de notre pays, on remarqueraque l'abolition, en 'ont que telle, a toujours t une des grandescauses de la gauche franaise . Quand je dis gauche, comprenez-moi, j'entends forces de changement

    . forces de progrs, parfoisforces de rvolution, celles qui

    . en tout cas, font avancer l'his-toire. (Applaudissements sur les bancs des socialistes, sur denombreux bancs tics communistes el. sir quelques battes de l ' ,t,tiwtpour lu dutocralie franaise .)

    Examinez simplement ce qui est la vrit. Regardes-1m

    J'ai rappel 1791, la premire Constituante, la grande Consti-tuante . Certes, elle n'a pas aboli, mais elle a pos la question,audace prodigieuse en Europe cette poque . Elle a rduit lechamp de la peine (le mort, plus que partout ailleurs on Europe.

    I .a premiiv'a assemble rpublicaine que la France ait connue,la grande Convention, le 4 brumaire an 1V de la Rpublique, aproclam que la peine de mort tait abolie en Franc, dater del'instant o la paix gnrale serait rtablie .

    M. Albert Brochard . On sait ce que cela a cot en Vende 1Plusieurs dputs socialistes . Silence les Chouans !M . le garde des sceaux . La paix fut rtablie mais avec elle

    Bonaparte arriva . Et la peine de mort s'inscrivit dans le codepnal qui est encor e le ntre, plus pour longtemps . il est vrai.

    Mais suivons les lans.La Rvolution de 1830 a engendr, en 1832, la gnralisation

    des circonstances attnuantes le nombre des condamnations mort diminue aussiltit tic moiti.

    La Rvolution de 1848 entrains l'abolition de la peine de mor ten matire politique, que la France ne remettra plus en causejusqu' la guerre de 1939.

    Il faudra attendre ensuite qu'une majorit de gauche soittablie au t'entre de la vie politique franaise, clans les annesqui suivent 1900 . pour que suit nouveau soumise aux repr-sentants du peuple la question de l'abolition . C'est alors qu'icimme s'affrontrent, dans un dbat dont l'histoire de l'logocnceconserve pieusement le souvenir vivant, et Barrs et Jaurs .

  • ASSE\IBLEE NATIONALE

    SI :ANCE ItU 17 SEPTEMBRE 1981

    1139e__

    s

    Jaurs que je selue en votre nom tous -- a t . de tousles orateurs d' la gauche, de tous lis socialistes, celui qui anunc le plus haut, le plus loin . le plus noblement l'loquence 1du cran' et l 'loquenee d : la raison, Calai qui a S'rvi, cantinepersonne . le eouialisnle . la libert et l' abolition . iapplauc:ai'a+r+rts ,sur les bancs des socialistes et sur p!rrsfc+ns bancs (lesenm iii il sl es .)

    Jaurs. .. (Interruptions sur 1(1 balles de l ' ru+ior, d' lu druro-crali, jiliu (lise et du rassemblement mute lu Rrpuhlipur .)

    Il y a des noms qui genent encor, certains d'entre vous :'tApplaa,liss ,teins sur les harles des suci,tiis(es et des (aourri'nisles.)

    M . Michel Noir . Pro, oesteur

    M. Jean Brocard. \ ' oas n'tais pas la cour . mais l'As-semble!

    M . le prsident . 1lessieues de l ' opposition, je vous en prie.Jaut' .s appartient . au mime titre que (I ' autres Minimes poli-

    tiques, l 'histoire de notre pays. ( :tpi,buufrssrrnrntx sur lesder.+rs btntt-s .)

    M . Roter Corrze. Mai ., pas Badinter!

    M. Rot'ert Wagner . Il veau manque des muni-lue s . nurnsieur legarde des sceaux!

    M. le prsident . Veuilles. continuer, monsieur le garde desSru'aux.

    M . le garde des sceaux. Mes-Mmes.de l ' claiancuue nt d, ntr . cuucrptiunsbcs rio d ' insister.

    .tlais je dois rappeler, puisque, l' h idence, a parole n ' estpas teinte en vous . la phrase que pronunt'a (laure . . : La peinede tout est contraire et, que I nurnanit depuis ciels mille ansa pens de plus haut et riv de plus noble . Elle est contraire la fuis l 'esprit du christianisme et ii l ' esprit (le la Rvo-luti .m.

    En 1908 . Briand . son tour, entrct'ril de demander laCh,enbre labolitinn . Curicusenient, il ne le fit pas en usantde son loquence. 11 s'effore ;a (le convainc( e en reprc ;entant la Chambre une donne trs simple, que l ' exprience recenle- (Ie fcule positiviste --- venait (te mettre en lumire.

    Il fit observer en effet que par suite du temp rament diversdes Prsidents de la Rpublique . qui se sont succd cet!,poque de grande stabilit social^ et conomique, la pratiquede la peine de mort avait singulicrement volu pendant deuxfois dix ans : 1388-1897, les Prsidents faisaient exoulcr :189E-1907, les Prsidents -- Loubet . Fallii abhorraientla peine de mort el . lias consquent . accordaient systmatique-ment la grce . Les donnes taient cla i re, dans la preutierepriode oit l ' un pratique 1'exeution : 3 Oti(i hnntici tes ; dansla seconde priode, oit la douceur dos hommes fuit qu ' ils yrpugnent et que la peine de mort disposait de la pratiquerpressive : 1 008 homicides, prs de la moiti.

    'Pelle est la raison pour laquelle Briand, au-del mime desprincipes, tint demander la Chambre d ' abolir la peine demort qui . la France venait ainsi de le mesurer, n'tait pasdissuasive.

    Il se trouva qu ' une partie de la presse entreprit aussittune campagne t r s violente contre les abolitionnistes . Il setrouva qu'une partie de la Chambre n'eut point le couraged ' aller vers les sommets que lui mont r ait Briand . C ' est ainsique la peine de mort demeura en 1908 dans not re droit et dansnotre pratique.

    Depuis lot es soixante-quinze ans -- jamais, une aseemlileparlementaire n ' a t saisie d ' une demande de suppression dela peine de mort.

    Je suis convaincue cela voue fera plaisir d ' avoir certesmoins d'loquence que Briand mais je suis sr que . vous . vousaurez plus de cou r age et c'est cela qui compte.

    M . Albert Brochard . Si c ' est cela le courage .'

    M . Robert Aumont, Celte interruption est malvenue !

    M . Roger Corrze . Il y a eu aussi des gouvernements degauche pendant tout ce temps!

    M. le garde des sceaux . Les temps passi'renl.On petit s'interroger : pourquoi n ' y art-il rien eu en 1930 '

    La raison est que le temps de la gauche fut compt . L ' autreraison, plats simple, est que la guerre pesait dj sur les esprits.Or, les temps de guerre ne sont pas propices poser la ques-tion de l'abolition . Il est vrai que la guerre et l'abolition necheminent pas ensemble .

    La Libration . Je suis convaincu, peur met part. que, si legouvernement de Libration na pas pus' la question del ' abolition, c ' est parce que les temps lrnub! .s, les crimes dela gnct't-e, les pre,n'es terribles de i ' n,cupatiun faisaient (liteles s e nsibilits n ' iaicnl pis cet gard prles . 11 fallait quercviennc nt non seu t enicvit la paix dc, arme, ratais 1ratai I . paixnies dettes.

    Cette anal}se vaut aussi pute' les temps do la dcolonisation.C'est saintem nt aprs ces preuves historiques qu ' en verite

    pouvait id es, soumise voire assemble la grande question del ' ahulilinn.

    Je n ' irai pas plus loin dans l ' interrogation -- M . Forai l ' afait mais pourquoi

    . au cruo r ; de la dernire l,pislature, lesgouvernements n'ont-ils pas voulu que votre assemble soitsaisie de l ' abolition :,lors que la commission des lois et tantd ' entre vous, avec courage, rclamaient ce dbat Certainsniemhres du gouvernem e nt et non Lies moindres - s'taientclela'-bs, titre personnel . partisans de

    (ion niais ouiavait l sentiment entendre ceux qui avaient la responsa-bilit de la proposer, que, clans ce tluntaine, il tait, l encore.urgent d ' attendre.

    Attendre, aprs deux cents ans!Attendre, comme si lui peine de mort au la guillotine tait un

    fruit qu ' un devrait laisser mrir ar :ull cle le cueillit . 'Attendre? Nous savons bien en vrit que la cause tait

    la crainte de l 'opinion publique . D'ailleurs, certains vous diront.mesdames, messieurs les dputes, qu ' en volant l ' abolition vousntcannaitries les (cales de la dnmeeatie parce que vous igno-reriez l ' opinion publique . Il n'en est rien.

    Nul plus que vous, l ' instant du vote sur l ' ahelitiun, nerespectera la lui fondamentale de la dniucratie.

    Je me rfre non pas seulement celte conception selonlaquelle le Parlement est, suivant l ' image emplo)be par tutgrand ,\nulais, un phare qui unvrc la voie de l 'ombre pourle pays, niais simplement la lui fondamentale de la dmo-cratie qui est la volont du suffrage universel et, pour les lus,le respect du suffrage universel.

    Or, deux reprises, la question a t directement -- j'yinsiste --- pose devant l 'opinion pahlietue.

    Le Prsident de la Rpublique a fait connuitee lotis, nonseulement sali sentiment personnel, son aversion pour la peinede mort, mais aussi . trie clairement . sa volont de demanderau Gouvernement de saisir le I'arlcmnent d'une demande d'abo-lition, s ' il tait lit . Le pays lui a rpondu : oui.

    Il y a eu ensuite des Meulions lgislatives . Au cours de lacampagne lccturale, il n ' est pas Ln des partis de gauche quin'ait fait figurer publiquement dans san programme . ..

    M . Albert Brochard. Quel programme?

    M . le garde des sceaux . .. .l ' abolition du' la peine tic mort.Le pays a lu une nlajoril de gauche : ce faisant . en connais-:ance de cause . il savait qu ' il approuvait un programme lgislatifclans lequel se t r ouvait inscrite, au premier rang des obligationsmurales, l ' abolition de la peine de mort.

    Lorsque eues la volerez., c'est t ee pacte solennel, celui quilie l'lu au pays . celui qui fait que son premier devoir d'luest le respect de l'engagement pris avec ceux qui l 'ont choisi,celle dmarche de respect du suffrage universel et de la dmo-cratie qui sera la virure.

    D ' autre, vous diront due l 'abolition, parce qu'elle pose ques-tion toute conscience humaine . ne devrait tre dcide quepar la voie de rfercndtun . Si l'alternative existait, la questionmriterait sans doute examen . \lais, vous le savez aussi bienque moi et Raymond Forai l ' a rappel, cette voie est constitu-tiunncllcment ferme.

    Je rappelle l'Assemble -- mais en vrit ai-je besoin de lefaire" -- que le gnral de Gaulle, fondateur de la V' Rpu-blique . n'a pas voulu que les questions de socit ou, si l'onprfre, les questions de morale soient t ranches par la proc-dure rfrendaire.

    Je n'ai pas besoin non plus de vous rappeler, mesdames,messieurs les dputs, que la sanction pnale de l'avortementaussi bien que de la peine de mort se trot:vent inscrites clansles luis pnales qui, aux termes de la Constitutiun, relventde votre seul pouvoir.

    Puu' consquent, prtendre s ' en rapporter un rfrendtun,ne vouloir rpondre que par un rferencju!II, c'est mconnaitredlibrment la fois l'esprit et la lett re de la Constitutionet c'est, par tic fausse habilet . refuser de se prononcer publi-quement par peur de l'opinion publique, i Ipplturdisseurcutssen' les barres des socialistes et sin' quelques bancs des c'onmta-taistes .)

    salai' Barrs en dpitsur ce point : je n ' ai pas

  • 1140 ASSEMBLEE NATIONALE me me_

    Rien n'a t fait pendant

    les annes co .les pour clairercelle opinion

    publique . Au contr aire !

    On a refus l'expriencedes pays

    abolitionnistes ;

    on

    ne s'est

    jamais interrog sur

    lefait essentiel que les grandes dmocraties occidentales,

    nos

    proches, nos siurs, nos voisines, pouvaient vivre sans la peinede

    mort . On

    a

    nglig

    les

    lude

    conduites

    par

    toutes

    lesgrandes organisations internationales, tels le Conseil de l'Europe,le Parlement europen, les Nations unies elles-mmos dans lecadre du comit d'tudes contr e le crime . On a occult leursconstantes conclusions . II n'a jamais, jamais eV' tabli unecor rlation quelconque entre la prsence ou l'absence de lapeine de mort Cians une lgislation pnale et la courbe dela criminalit sanglante . On a, par contre, au lieu le rvleret de souligner ces vidences, entretenu l'angoisse, stimulla peur, rave , is la confusion . On a bloque le phare sur l'accrois-sement indiscutable . douloureux, et auquel il faudra faire face,mais qui est li des conjonctures conomiques et sociales, dela petite et moyenne dlinquance de violence, celle qui, de toutefaon, n'a jamais relev de la peine de mu e t . Mais taus lesesprits loyaux, s'accordent sur le fait qu'en France la criminalitsanglante n'a jamais vari al mme. c i mpte tenu du nombred'habitants, tend plutt sta g ner : on s'ct tu . En un mot, s'agis-sant de l'opinion . parce qu'on pensait au .: suffrages, on a attisl'angoisse collective et on a relus l'opinion publique lesdfenses de la raison . (Applaudissem e nts sur les buttes dessocialistes et sur quelques bancs des conuntuistes .)

    En vrit, la question de la peine de mort est simple pourqui vent l'analyser avec lucidit . Elle ne se pose pas en terniesde dissuasion, ni mme de technique rpressive, mais en terniesde choix politique ou de choix moral.

    Je l'ai dj dit, mais je le rpte volontiers au regard dugrand silence antrieur : le seul rsultut auquel ont conduittoutes les recherches menes par les criminologues est laconstatation de l'absence de lien entre la peine de mort etl'volution de la criminalit sanglante . Je rappelle encore cet gard les travaux du Conseil de l'Europe de 1962 : le Livreblanc anglais, prudente recherche mene travers tous lespays abolitionnistes avant que les Anglais ne se dcident abolir la peine de mor t et ne refusent depuis lors, par cieuxfois, de la rtablir : le Livre blanc canadien, qui a procdselon la mme mchoui les travaux conduits par le comitpour la prvention cru crime cr par l'O .N .U., dont les der-niers textes ont t labors l'anne dernire Caracas ;enfin, les travaux conduits par le Parlement europen, auxquelsj'associe nitr amie Mme Roudy, et qui ont abouti ce voteessentiel par lequel cette assemble . au nom de l'Europe qu'ellereprsente . de l'Europe occidentale bien sr, s'est prononce une crasante majorit pour que la peine (le mort disparaissede l'Europe . Tous, tous se rejoignent sur la conclusion quej'voquais.

    Il n'est pas difficile d'ailleurs, pour qui veut s'interrogerloyalement, de comprendre pourquoi il n ' y a pas entre la peinede mort et l'volution de la criminalit sanglante ce rapportdissuasif que l'on s'est si souvent appliqu chercher sanstrouvait sa source ailleurs, et j'y reviendrai dais un instant . Sivous y rflchissez simplement, les crimes les plus terribles,ceux qui saisissent le plus la sensibilit publique et on lecomprend ceux qu'on appelle les crimes atroces sont commisle plus souvent pas des hommes e,npot ts par une pulsion deviolence et de mort qui abolit jusqu'aux dfenses de la raison.A cet instant de folie, cet instant de passion meurt rire, l'vo-cation de la peine, qu'elle soit de mort ou qu'elle soit perp-tuelle, ne trouve pas sa place chez l'homme qui tue.

    Qu'on ne me dise pas que, ceux-l . on ne les coactamne pasa mort

    . Il suffirait de reprendre les annales des derniresannes pour se convaincre du contraire . Olivier, excut, dontl'autopsie a rvl que son cerveau prsentait des anomaliesfrontales . Et Carrcin, et Rousseau . et Garceau.

    Quant aux autres, les criminels dits de sang-froid, ceux quipsent les risques, ceux qui mditent le profit et la peine,ceux-l, jamais vous ne les retrouverez dans des situationso ils risquent l'chafaud . Truands raisonnables, profiteurs ducrime, criminels organiss, proxntes, trafiquants, maffiosi,jamais vous ne les trouverez dans ces situations-l

    . Jamais!(Applaudissements sur les bancs des socialistes et des commu-nistes .)

    Ceux qui interrogent les annales judiciaires, car c'est lou s'inscrit dans sa ralit la peine de mort, savent que dansles trente dernires annes vous n'y trouvez pas le nom d'un grand n ganster, si l'on peut utiliser cet adjectif en parlantde ce type d ' hommes . Pas un seul a ennemi public n'y a jamaisfigur.

    M. Jean Brocard . Et Mesrine?

    SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    M . Hyacinthe Santoni . Et Buffet ? Et Bouleras?

    M . le garde des sceaux. Ce sont les autr es, ceux que j'vo-quais prcdemment qui peuplent ces annales.

    En fait. ceux qui croient la valeur dissuasive de la peine

    de mort mconnaissent la vrit humaine. La passion crimi-nelle n'est pas plus arrte par la peur de la mort que d'autrespassions ne le sont qui, celles-l, sont nobles.

    Et si la peur de la mort arrtait les hommes, vous n'auriezni grands soldats, ni grands sportifs . Nous les admirons, maisils n'hsiteet pas devant la mort . D'autres, emports pard'autres passions, n'hsitent pas non plus . C'est seulement pourla peine (le mort qu ' on invente l 'ide que la peur de la mortretient l 'homme dans ses passions extrmes . Ce n'est pas exact.

    Et, puisqu'on vient de prononcer le nom de deux condamns mort qui ont t excuts, je vous dirai pou rquoi, plusqu'aucun auto, je puis affirmer qu'il n'y a pas & uns la peinede mort de valeur dissuasive : sachez bien que, dans la foulequi, autour du palais de justice de Troyes, criait au passagede Buffet et de Bontems : i A mort Buffet ! A mort Bontems ! s,se trouvait un jeune homme qui s'appelait Patrick Henry.Croyez-moi, ma stupfaction, quand je l'ai a pp ris, j 'ai comprisce que pouvais signifier, ce jour-l, la valeur dissuasive de lapeine de mort (Applaurlisseuccul .s sur les bains des socialisteset des communistes .)

    M . Pierre Micaux. Allez l'expliquer Troyes !

    M . le garde des sceaux. Et pour vous qui tes hommes d'Etet,conscients de vos responsabilits, croyez-vous que les hommesd'El t, nos amis, qui dirigent le sort et qui ont la responsa-bilit des grandes dmocraties occidentales, aussi exigeante quesoit en eux la passion des valctn's morales qui sont cellesdes pays de libert, croyez-vous que ces hommes responsablesauraient vot l'abolition ou n'auraient pas rtabli la peinecapitale s'ils avaient pens que celle-ci pouvait tre de quelqueutilit par sa valeur dissuasive centr e la criminalit sanglante ?Cc serait leur faire injure que de le penser.

    M . Albert Brochard . Et en Califor nie ?Reagan est sans doute un rigolo!

    M . le garde des sceaux . Nous lui transmettrons le propos.Je suis sr qu'il apprciera l'pithte!

    Il suffit, en tout cas, de vous interroger t r s concrtementet de prendre la mesure de ce qu'aurait signifi exactementl'abolition si elle avait t vote en France en 1974, quand leprcdent Prsident de la Rpublique confessait volontiers,mais gnralement en priv, son aversion personnelle pour lapeine de mort.

    L'abolition vote e n 1974, pour le septennat qui s'est acheven 1981, qu'aurait-elle signif pour la sret et la scuritdes Franais? Simplement ceci : trois condamns mort, quise seraient ajouts au 333 qui se trouvent actuellement dansnos tablissements pnitentiaires . Trois de plus.

    Lesquels ? Je vous les rappelle . Christian Ranucci : je n'auraisgarde d'insister, il y a trop d'interrogations qui se lvent sonsu j et . et ces seules interrogations suffisent, pour touteconscience prise de justice, condamner la peine de mort.Jrme Carrein : dbile, ivrogne, qui a commis un crime atroce,mais qui avait pris par la main devant tout le village la petitefille qu'il allait tuer quelques instants plus tard, montrant parl mme qu'il ignorait la force qui allait l'emporter. (Murmuressur plusieurs bancs du rassemblement pour la Rpublique etde l'anion pour la dmocratie franaise

    .) Enfin, Djandoubi, quitait unijambiste et qui, quelle que soit l'horreur et le termen'est pas trop fort de ses crimes, prsentait tous les signesd'un dsquilibre et qu'on a empor t sur l'chafaud aprs luiavoir enlev sa prothse.

    Loin de moi l'ide d'en appeler une piti posthume : cen'est ni le lieu ni le moment, mais ayez simplement prsent votre esprit que l'on s'interroge encore propos de l'innocencedu premier, que le deuxime tait un dbile et le trois' ununijambiste.

    Peut-on prtendre que si ces trois hommes se troules prisons franaises la scurit (le nos concito'

    ou-verait de quelque faon compromise?

    M . Albert Brochard . Ce n'est, pas croyable ! Note e . .,tomespas au prtoire !

    M . le garde des sceaux . C'est cela la vrit et la mesureexacie de la peine de mor t . C'est simplement cela . (Applaudis-seutet'ls p rolongs sur les bancs des socialistes et des commu-nistes .)

    M . Jean Brocard . Je quitte les assises !

  • ASSEMBLEE NATIONALE

    SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    1141

    1

    M . le prsident. C'est votre droit !M. Albert Brochai-d . Vous tes garde des sceaux et non

    avocat !M. le garde des sceaux . Et cette ralit . ..

    M. Roger Corrze . Votre ralit!

    M . le garde des sceaux . . . . semble faire fuir.La question ne se pose pas, et nous le savons tous . en termes

    de dissuasion ou de technique rpressive, mais en ternies poli-tiques et surtout de choix mural.

    Que la peine de mort ait une signification politique . il suai-rait de regarder la carte du mancie pour le cansla'cr . Je regrettequ ' un ne puisse pas prsenter une telle carte l'Assemblecomme cela fut fait au Parl e ment europen . 0 y verrait lespays abolitionnistes et les autr e;, les pays de libert et lesmares.

    M . Ci artes Miossec . Quel amalgame !M . te garde des sceaux . Les choses sont claires . Dans la majo-

    rit crasante des dmocraties occidentales, en Europe parti-culirement, dans tous les pays o la libert est inscrite dansles institutions e1 respeete dans la pratique . la peine de morta disparu.

    M. Claude Marcus . Pas aux Etats-Unis.

    M. le garde des sceaux . J ' ai lit en Europe occidentale, maisil est significatif que vous ajoutiez les Etats-Unis . Le calqueest presque complet . Dans les pays de libert . la lui communeest l ' abolitien, c ' est la peine de mort qui est l'exception.

    M . Rager Corrze . Pas dans les pays socialistes.

    M . le garde des sceaux . Je ne vous le fais pas lire.Partout, dans le monde, et sans aucune exception, o triom-

    phent la dictature et le mpris (les droits de l'homme . partoutvous y trouvez inscrite, en caractres sanglants, le peine de mort.(Applcradisscnu'nts sur les bancs des socialistes .)

    M. Roger Corrze. Les communistes en ont pris acte!

    M. Grard Chasseguet . Les communistes ont apprci.

    M. le garde des sceaux. Voici la premire vidence : clans les. tape de libert l'abolition est presque partout la rgle : dans lespays oit rgne la dictature, la peine de mort est partout pra-tique.

    Ce partage du monde ne rsulte. pas d'une simple concidence,mais exprime une corrlation . La vraie signification politique dela peine de mort . c'est bien qu'elle procde de l'ide que l'Etata ie droit de disposer du citoyen jusqu' lui retirer la vie.C'esi raz l que la peine de mort s'inscrit dans l'as systmestotalitaires.

    C'est par l mmo que vous retrouvez . dans la ralit judi-ciaire . et jusque dans celle qu ' voquait Raymond Forni, la vraiesignification de la peine de mort . Dans la ralit judiciaire,qu ' est-ce que la peine de mort'. Ce sont douze hommes etfemmes, deux jours d'audience, l'impossibilit d'aller jusqu'aufond des choses et le droit, ou le devoir, terrible, de trancher,en quelques quarts d ' heure, parfois quelques minutes . le problmesi difficile de la culpabilit, cl, au-del, de dcider de la vie oude 11 mort d'un autre tre . Douze personn' .s, dans une dmo-cratie . qui ont le droit de dire : celui-l doit vivre . celui-l doitmourir! Je le dis : celte conception de la justice ne peut trecelle des pays de libert, prcisment pour ce qu'elle comporte designification totalitaire.

    Quint au droit de grce, il convient, comme Raymond Fornil'a rap p el, de s'interroger son sujet . Lo rsque le roi repr-se p ta :t Dieu sur la terre, qu'il tait oint par la volont divine,le dru,' de grce avait un fondement lgitime. Dans une civili-sation, a'ns une socit dont le institutions sont imprgnes parla foi religieuse, on comprend aisment que le reprsentant deDieu ait pi disposer du droit de vie ou de mort . Mais clans unerpublique, dans une dmocratie, quels que soient ses mrites,quelle que r oit sa conscience, aucun homme, aucun pouvoir nesaurait disputer d ' un tel droit sur quiconque en temps de paix.

    M. Jean Fe tala . Sauf les assassins!M . le garde des sceaux . Je sais qu'aujourd'hui et c'est l

    un problme t najear certains voient dans la peine de mortune sorte de r 'cours ultime, une forme de dfense extrme dela dmocratie contre la menace grave que constitue le terro-risme . Li 3 nit ,fine, pensent-ils, protgerait ventuellement ladmocratie au ' ieu de la dshonorer .

    Cet argument procde d'une mconnaissance complte de laralit . En effet, l'Histoire montre que s'il est un type de crimeq ui n'a jamais recul devant la menace de mort, c'est le crimepolitique . Et, plus spcifiquement, s'il est un ty p e de femmeou d'homme que la menace de la mort ne saurait faire reculer,c'est bien le terroriste . D'abord . parce qu'il l affronte au coursde l'action violente ; ensuite parce qu'au fond de lui, il prouvecette trouble fascination de la violence et de la mo r t, cellequ'on donne, mais aussi celle qu'on reoit . Le terrorisme qui,pour moi, est un crime majeur contre la dmocratie, et qui,s'il devait se lever dans ce pays, serait rprim et poursuiviavec toute h fer met requise, a pour cri de rallieraient . quelleque soit l ' idologie qui l ' anime . le terrible cri des fascistes de laguerre d'Espagne : - l ' ira la nonrte ! Vive la mort! . Alors,croire qu'on l'arrtera avec la mort, c 'est illusion.

    Allons plus loin . Si, clans les dmocraties voisines, pourtanten proie au terrorisme . on se refuse rtablit' la peine dc' mort,c ' est, bien sr . par exigence morale, mais aussi par raison poli-tique . Vois savez en effet, qu ' aux yeux de certains et surtout desjeunes, l ' excution du terroriste le t r an .scend'', le dpouille dece qu ' a t na ralit criminelle de ses actions, en fait unesorte de hros qui aurait t jusqu ' au bout de sa couse, qui,s'tant engag au service ('une cause, aussi odieuse suit-elle,l ' aurait servie jusqu ' la mort . Ds lors, apparait le risqueconsidrable, que prcisment les hommes d ' Etat des dmocratiesamies ont pes . de voir se lever clans l ' ombre, pour un terroristeexcut, vingt jeunes gens gars . Ainsi, loin de le combattre,la peine de mort nourrirait le terrorisme . uApploralissemerts surles bancs des socialistes et sur quelques bancs des conni iiu ist es .)

    A cette considration de fait, il faut ajouter une donnemurale : utiliser contre les terroristes la peine de mort, c ' est,pour une dmocratie, faire siennes les valeurs vie ces derniers.Quand, aprs l'avoir arrt, aprs lui avoir extorqu des corres-pondances terribles, les terroristes . au ternie d'une parodiedgradantz de justice, excutent celui qu'ils ont enlev, nonseulement ils commettent un crime odieux, mais ils tendent la dmocratie le pige le plus insidieux, cciui d'une violencemeurtrire qui, en fo r ant cette dmocratie recourir la peinede mort . pourrait leur permettre de lui donner, par une sorted'inversion des valeurs, le visage sanglant qui est le leur.

    Cette tentation, il faut la refuser. sans jamais, pour autant,composer avec celte forme ultime de la violence, intolrabledans une dmocratie, qu'est le terrorisme.

    Mais lorsqu'on a dpouill le problme de son aspect passionnelet qu'on veut aller jusqu'au bout de la lucidit, on constate quele choix entre le maintien et l'abolition de la peine de mort,c'est, en dfinitive, pour une socit et pour chacun d'entre nous,un choix moral.

    Je ne ferai pas usage de l'argument d'autorit, car ce seraitmalvenu au Parlement, et trop facile dans cette enceinte . Maison ne peut pas ne pas relever qu'en clans les dernires annes,se sont prononcs hautement contre la peine de mort, l'glisecatholique de France, le conseil de l'glise rforme et le rabbi-nat . Comment ne pas souligner que toutes les grandes associationsinternationales qui militent de par le monde pour la dfensedes liberts et des droits de l'homme -- Amnesty international,l'Association inter nationale des droits de l'homme, la Ligue desdroits de l'homme --- ont fait campagne pour que vienne l'abo-lition de la peine de mort.

    M. Albert 3rochard . Sauf les familles des victimes ! (Jhirm+un'esprolongs sur les battes des socialistes .)

    M . le garde des sceaux. Cette conjonction de tant de consciencesreligieuses ou laques, hommes d-e Dieu et hommes de libe rts, une poque o !'on parle sans cesse de crise des valeursmorales, est significative.

    M. Pierre-Charles Krieg . Et 33 p . 100 des Franais!

    M . te garde des sceaux . Pour les partisans de la peine demort, dont les abolitionnistes et moi-mme avons toujoursrespect le choix en notant regret que la rciproque n'a pastoujours t vraie, la haine rpondant souvent ce qui n'taitque l'expression d'une conviction profonde, celle que je res-pecterai toujours chez les hommes de libert, pour les partisansde la peine de mort, disais-je, la mort du coupable est une exi-gence de justice . Pour eux, il est en effet des crimes tropatroces pour que leurs auteurs puissent les expier autrementqu'au prix de leur vie.

    La mort et la souffrance des victimes, ce terrible malheur,exigeraient comme contrepartie ncessaire, imprative, uneautre mort et une autre souffrance . A dfaut, dclarait un minis-tr e de la justice rcent, l'angoisse et la passion suscites clans lasocit par le crime ne seraient pas apaises . Cela s'appelle, je

  • 1142

    ASSEMBLEE NATIONALE l'

    crois, un sacrifice expiatoire . Et justice, pour les partisans dela peina de mort, ne serait pas faite si la mort de la victimene rpondait pas, en cho, la mort du coupable.

    Soyons clairs . Cela signifie simplement que la loi du taliondemeurerait, tr avers les millnaires . la lui ncessaire, uniquede la justice humaine.

    Du malheur et de la souffrance des victimes . j'ai . beaucoupplus que ceux qui s ' en rclament, souvent mesur dans ma viel'tendue . Que le crime soit le point de rencontre, le lieu gom-trique du malheur humain . je le sais mieux que personne.Malheur de la victime elle-mme et, au-del . malheur de sesparents et de ses proches . Malheur aussi des parents lu criminel.Malheur enfin, bien sou vent, de l ' assassin . Oui, le crime estmalheur, et il n ' y a pas un homme pas une femme (le coeur,de raison, de responsabilit, qui ne souhaite d'abord le combattre.

    Mais ressentir. au profond (le soi-mme. le malheur et ladouleur clos victimes . mais lutter de toutes les manires pour quela violence et le crime reculent dans notre socit, cette sensi-bilit et ce combat ne sauraient impliquer la ncessaire mise mort du coupable . Que les parents et les proches de la victimesouhaitent cette mort par raction naturelle de l'tre humainblesse, je le comprends, je le conois. Mais c'est une ractionhumaine, naturelle . Or tout le progrs historique cle la justicea t de dpasser la vengeance prive . Et comment la dpasser.sinon d'abord en refusant la loi du talion ?

    La vrit est que . au plus profond des motivations de l' atta-chement la peine de mort, on trouve . inavoue le plus souvent.la tentation de l ' limination . ('c qui parait insupportable beaucoup. c ' est moins la vie du criminel emprisonn que lapeur qu ' il rcidive un jour . Et ils pensent que la seule garantie, cet gard . est que le criminel soit mis mort par prcaution.

    Ainsi . dans cette conception, la justice tuerait moins parvengeance que pan prudence . Au-del de la justice d ' expiation.apparait donc la justice d'limination, derrire la balance, laguillotine . L ' assassin doit mou r ir toute simplement parce que.ainsi, il ne rcidivera pas . Et tout parait si simple, et tout paraitsi juste!

    Mais quand on accepte ou quand on prne la justice d ' limi-nation . au nom de la justice, il faut bien savoir dans quellevoie on s'engage . Pour tre acceptable, mme pour ses partisans,la justice qui tue le criminel doit tuer en connaissance de cause.Notre justice, et c'est son honneur, ne tue pas les clments.Mais elle ne sait pas les identifier coup sr . et c'est l'exper-tise psychiatr ique la plus alatoire, la plus incertaine de toutes,que, dans la ralit judiciaire, on va s'en remettre . Que le verdictpsychiatrique soit favorable l'assassin, et il sera pargn.La socit acceptera d ' assumer le risque qu ' il reprsente sans quequiconque s ' en indigne . Mais que le verdict psychiatrique lui soitdfavorable . et il sera excut . Quand on accepte la justiced'limination, il faut que les responsables politiques mesurentdans quelle logique de l ' histoire on s'inscrit.

    Je ne parle pas de socits o l'on limine aussi bien lescriminels que les dments, les opposants politiques que ceuxdont on pense qu ' ils se raient de nature a polluer le corpssocial . Non, je m ' en tiens la justice des pays qui vivent endmocratie.

    Enfoui, terr . au cour mme de la justice d'limination,veille le racisme secret . Si, en 1972, la Cour supme des Etats-Unis a pench vers l'abolition, c'est essentiellement parce qu'elleavait constat que 60 p . 100 des condamns mort taient desnoirs, alors qu'ils ne reprsentaient que 12 p. 100 de la popu-lation . Et pour un homme de justice, quel vertige! Je baissela voix et je me tourne vers vous tous pour rappeler qu ' enFrance mime, sur trente-six condamnations mort dfinitivesprononces depuis 1945, on compte neuf trangers soit 25 p . 100,alors qu'ils ne reprsentent que 8 p . 100 de la population ;parmi eux cinq Maghrbins, alors qu'ils ne reprsentent que2 p . 100 de la population . Depuis 1965, parmi les neuf condamns mort excuts, on compte quatre trangers, dont t r ois Maghr-bins . Leurs crimes taient-ils plus odieux que les autres ou bienparaissaient-ils plus graves parce que lems auteurs, cet instant,faisaient secrtement horreur ? C'est une interrogation, ce n'estqu'une interrogation, mais elle est si pressante et si lancinanteque seule l'abolition peut mettre fin une interrogation quinous interpelle avec tant de cruaut.

    li s'agit bien, en dfinitive, dans l'abolition, d'un choix fonda-mente l, d'une certaine conception de l'homme et de la justice.Ceux qui veulent une justice qui tue, ceux-l sont anims parune double conviction : qu'il existe des hommes totalement cou-pables, c'est--dire des hommes totalement responsables de leursactes, et qu'il peut y avoir une justice sre de son infaillibilitau point de dire que celui-l peut vivre et que celui-l doitmourir .

    SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    A cet ge de nia vie, l ' une et l ' autre affirmations me parais-sent galement errones . Aussi terribles, aussi odieux quesoient leurs actes, il n'est point d'hommes en cette terre dontla culpabilit soit totale et dont il faille peur toujours dses-prer totalement

    . Aus:i prudente que suit la justice . aussimesurs et angoisss que soient les femmes et les hommes quijugent, la justice demeure humaine, clone faillible.

    Et je ne parle pas seulement de l'erreur judiciaire absolue,quand, aprs une excution

    . il se rvle, comme cela peutencore arriver, que le condamn mort tait innocent etqu 'une socit entire c ' est--dire nous tous au nomde laquelle le verdict a t rendu, devient ainsi collective-ment coupable puisque sa justice rend possible l ' injusticesuprme . Je parle aussi de l ' incertitude et de la contradictiondes dcisions rendues qui font que les mmes accuss, condamns mort une premire fois, dont la condamnation est cassepour vice de forme, sont de nouveau jugs et, bien qu'il s'agissedes mmes faits, chappent, cette luis-ci, la mort, comme si,en justice, la vie d ' un homme se jouait au hasard d'une erreurde plume d ' un greffier. 0, u en tels condamns, pour descrimes moindres

    . seront excutalors que d ' autres . plus cou-pables, sauveront leur tte la fa 'eue de la passion de l'audience,du climat ou de l'emportement di tel ou tel.

    Cette sorte de loterie judiciaire, qu^ ; ' a que soit la peine qu 'onprouve prononcer ce mot quanti il y va de la vie d'unefemme ou d'un homme, est intolrable . Le plus haut magistratde France . M. Aydalot . au terme d'une longue carrire toutentire consacre a la justice et, pour la plupart de son activit,au parquet disait qu ' la mesure (le sa hasardeuse applica-tion

    . la peine de mort lui tait devenue . lui magistrat, insup-portable

    . Parce qu'aucun homme n'est totalement responsable,parce qu'aucune justice ne peut tre absolument infaillible,la peine de mort est moralement inacceptable

    . Pour ceuxd'entr e nous qui croient en Dieu, lof seul a le pouvoir dechoisir l'heure ct notre mort

    . Pour tous les abolitionnistes,il est impossible de reconnatre la justice des hommes cepouvoir de mort parce qu'ils savent qu'elle est faillible.

    Le choix qui s'offre i( vus consciences est donc clair : ounotre socit refuse une justice qui tue et accepte d ' assumer,au nom de ses valeurs fondamentales -- celles qui l'ont faitegrande et respecte entre toutes la vie de ceux qui fonthorreur, dments ou criminels ou les deux la fois, et c'estle choix de l'abolition ; ou cette socit croit, en dpit del'exprience des sicles, faire disparaitre le crime avec lecriminel, et c'est l'limination.

    Cette justice d'limination, cette justice d'angoisse et de mort,dcide avec sa marge de hasard, nous la refusons . Nous larefusons parce qu ' elle est pour nous l ' anti-justice, parce qu' elleest la passion et la peur triomphant de la raison et del'humanit.

    J'en ai fini avec l'essentiel, avec l'esprit et l'inspiration decette grande lui . Raymond Forni, tout l'heure, en a dgagles lignes directrices . Elles sont simples et prcises.

    Parce que l'abolition est un choix moral, il faut se prononceren toute clart . Le Gouvernement vous demande donc de voterl'abolition de la peine de mort sans l'assortir d'aucune restric-tion ni d'aucune rserve . Sans doute, des amendements serontdposs tendant limiter le champ de l'abolition et enexclure diverses catgories de crimes . Je comprends l'inspira-tion (le ces amendements, nais le Gouvernement vous deman-dera de les rejeter.

    D abord parce que la i'onmle

  • ASSEMBLEE NATIONALE 1"'

    de leu rs membres . le Gouvernement cnntprcnit partait ernent lespr teeupations qui ]es animent, riais il dentandtra que cesantcndeelents en soient rcjetes.

    La scurit (les personnels de police et du personnel pni-tentiaire doit tre a-sor e . foutes le .; mesures n(rr saines pourtissuver !eue prutection doivent !'Ire prises . aleis, dors la Pr : ncede la fin du xx ,iecic . on n' conlie pas la guillotine lesein u assurer la s'ciril des policier ; et tie rs s .n'vciliante . Etquant la sanction du crins,' qui lits atteindrait, ,tuas! lgitimequel!_' soit, celte peine ne peut f'li'c . dans ni's luis, plus ,traceque celle qui frapperait les lutteurs de crimes co tinta l'en-contre d ' autres victimes . Soy ris clairs : il ne peul exieter clansla justice franc,sise de privilge pnal au prulit de quelqueproies ;fun oit corps quo ce suit

    . ,1e suis sur crise' les personnelsdo police et les personnels pnitentiaires le comprendront.Qu ' ils sac-lent que Itou nous nwntrecons altentils leur scuritsans; jamais pour autant en faire un corps piet dans laltipabible .

    Dans le mime dessein de clart, le projet n'offre aucunedisposition cen,',tnaet une quelconque peine de remplacement.

    Pour des raison, morales d'abord : la peine de mort est tonsupplice, et l'on ne remplace pas un supplice par ton autre.

    Pour des raisons de politique et de clart lC' tslatives aussi:par peine (le remplacement, l 'on vise communment une prriodetic stuet, c 'est--dire tut dlai inscrit dans la loi pendant lequelle cendal

    .nr n'est pas susceplibie de bnefieter d ' une mesurede s il , - :,,tien conditionnelle_ ou d ' une quelconque suspension desa peine

    . Une telle peine cr oisse dj dans notre droit et saamide ; :cul atteindre dix-huit annes.

    Si je demande l'Assemble de ne pas ouvrir, cet gard,un dbat tendant modifier cotte mesure de sret, c'estparce quo, dans un dlai de doux ans -- dlai relativement(mu e t au retard du processus d'dification de la loi pnale le Gouvernement au r a l 'honneur de lui soumettre le projetd'un nouveau code pnal, un code pnal adapt ta socitfranaise de la fin du xx- sicle et, je l ' espre, de l'horizondu Xxi' sicle

    . A celte occasion, il conviendra que soit dfini,tabli, peso pan yens ce que doit tre le systme des peinesPour la societ e franai, d'aujourd'hui et de demain

    . C'estpourquoi je vous demande de ne pas mler au dbat de principesur l ' abolition tue discu .sion sur la peine de remplacement, ouplutt sur la mesure de siu'et, parce que cette di ;utussionserait la fois inopportune et inutile.

    Inopportune parce que, pou r tre harmonieux, le systmedes peines doit tre pens et dfini en son entier, et non iafaveur d'un dbat qui, par son objet nime, se rvle ncessaire-nient passionn et aboutirait des solutions partielles.

    t)iscussion inutile parce que la mesure de sret existantefrappera l'vidence tous ceux qui vont t re condamns lupeine de r('elusion criminelle perptuit clans les deux out rois annes a't plus qui s'couleront avant que voies n ' irez.ni,sclaines

    . messieurs les dputes, (i nfini notre systme de peineset, que, par consquent, la question de leur libration ne sauraiten aucune faon se poser. li es lgislateurs que v

    .tus tes saventbien que ia dfinition inscrite dans le nouveau code s 'appliquera eux, suit par l'effet imwdiat de la loi pnale plus douce.soit si elle est plus svre parce qu ' on ne saurait fairede discrimination et que le rgime de libration conditionnellesera le lit se pour tous les condamns perptuit

    . Parconsquent, l ' ouvrez pas maintenant cette, discussion.

    Pour les mmos raisons de ,fart et (le sil .,.'licit . nous n'avons

    pas insr dans le projet les dispositions'' i al ives au temps deguerre- Le Gouvernement sait bien que, e tnci le mpris de lavie, la violence mortelle deviennent ls toi commune, quandcertaines valeurs essentielles du tempe ,

    .e prix sont rempiaccespar d ' autos qui ex p riment la primaut (le la dfense de lapat rie- alors le fondement mme de l'abolition s'efface de laconscience coileatire pour la dure du conflit, et, bien entendu,l'abolition est alors entre parenthse

    Il est apparu au Gouvernement t, 'il tait m;avenu . au momentois vous dcidiez enfin de l'abolitit ' u dans le France en paix quiest

    . heu casernent la notre, de dbattre du domaine ventuel t'la pci"e de mort en temps de guerre, une g, rrc que rio')heureusement n'annonce . Ce sera au Gouvernement et au lgit

    .

    latcur du temps de l'preuve si elle doit survenir qu ' orappartiendra d ' y pourvoir, en mme temps qu' aux nombreusesdispositions particulires qu'appelle une lgislation de guerre.Mais arrter les modalits d'une lgislation de guerre rie`instant o nous abolissons la peine de mort n'aurait point ,lesens . Ce serait hors de pro p os au moment o, aprs centquatre-vingt-dix ans de dbat, vous allez enfin prononcer etdcider (le l 'abolition.

    J'en ai termin .

    SEANL'E DU 17 SEI"l'EMBIRE 1981

    1143

    Les propos que j ' ai tenus, le., raisons que j ' ai avances, cistrect.t'ur . cotre cu!: .sennce ruas le ts aveicut dj dicts aussi bienqu ' moi . .Jr lreais simplement, it cc nsnnu'nt es-ce :del de nette

    jurtiti :sir_ . les rappeler . au Hunt du G .tan crnentcnl.Je ,ais que tiens nos lois . Mut d p end de volte volont et

    de cotre Cen;rieitec . .1' :;ais stuc b:'aucunp d ' en t re i-ut's, d ; :risla majorit cannen t dan,.; l'uppo iii tn . ont lutt peut Uabiilitmn,Je sais que le f'ar!entzat acrait pu aisment, de sa seule ini-tietive, librer nos lois du la peine tic merl . Anus avez acceptque ce .soit sir art prujct du G,t ir:cnnimieo( que soit suumete cos votes l ' abelit ;nru, arsccient ainsi le Gouvernement et mui-m,nte cette ;;made mesure . Laiscet-m'oi vous en reuu'reser.

    Demain, rince vous, la justiee franaise ne sera plus unejustice qui Me

    . Demain, note vous, il n ' y aura plis, pournuis'( honte commuait . d ' ex,- .utions furtives- l'aube, sous le daisunir, dans ter prion, franaises

    . Deroain, ' es paves sanglantes (lenotre justice seront tournes.

    A cet instant plus qu ' aucun autre, j ' ai le sentiment d ' assumermon ministre, au sens aneictu, :ut sens noble, le plus noblequi suit . c 'est- dire au sens de - service Demain, vousvoterez l ' abolition de la peine de mort . Lgislateur franais . detout MOU cuti r . je VOUS en remet'eit . I .Ipp ' -,ut dr,.se ' tueil!a sur lesbene, dise surfal ; .st,'s et des rotrtut :montes et sur quelques bancstiti rassemblement pour ln Rpublique et de l ' rtttioit pour lad nioirutie frurc rxc Les d'pe' 's so

  • 1144

    ASSi MBLEE NATIONALE l' SE .\NCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    un acte de soumission au Gouvernement . t :1l,p t uuc!isscutents

    lu prubUmu est c s sentrcl. On ne peut rduire le db:,t sur

    .sur lrlssienrs hunes de l ' anion pour ln dmocratie franaise .

    l ' abolition un dbat sur le principe. un dbat unis :uialement

    Protestations sur les ! :sues tics socinlides .)

    moral,' Cous vos lecteurs . mesdames . insssieurs les

    dames. me;sicars les conuntutiste.; . voilent ils

    de mort Y

    socialistes, nies-abolir la peine

    M. Yves Dollo . Et les vtres?

    M . Pascal Clment . Et vous-mmos ? Est cm votre convictionintime ou votre sens de la discipline politique qui l'emporteraau manient du vote?

    Qtt ' en est il des convictions de M . le ministre de l ' intrieur quirclamait

    . il y a quelques annes, clans un article du l'rorcttrol.alors qu ' if prsidait voire groupe l'-\ssemble la peine demort pour les trafiquants de drogue et tmoignait de la dfiance l 'gard de la prison casse des rductions de peine?Ai Defferre dposa du reste une proposition de loi le 12 avril 1973pour dfendre cette ide qui est cosigne aujourd ' hui par unPrsident cle la Rpublique et _suite ministres.

    M. Antoine Gissinger . ("est le changement!M . Pascal Cl.nent . Quand on sait en outre que, dans un

    amalgame plutt tonnant- vous crives, monsieur le darde dessceaux . que les Franais . en votant pour la gauche socialiste etcommuniste lors des deux dernires consultations lectorales. ont

    tacitement admis et s intplicitentent consenti - l'abolitionde la peine de mort . il ore semble que le dbat est fausse . C'estl ' une des raisons qui me poussent opposer ta question pra-lable.

    Aujourd 'hui . une majorit de dputs va voter l'abolitionde la peine de mort au nom du peuple franais . avec: la convic-tion que leur vote exprime sa volont. A la vrit . nous nesavons pas ce que les Franais pensent, car vous ne les consul-tez pas !

    Je crois que personne ici ne contestera la responsabilitdes Francais dans le domaine de la justice . Vous avez vous-mme

    . monsieur le gar de des sceaux . voqu ric ecuuncnt ledevoir judiciaire des Franais . La justice est un droit poureux mais aussi un devoir qui peut tre difficile assumer

    . Ilsle savent bien ceux qui . par le biais du tir :_e au sor t . sontconduits siger aux assises :mec la charge erasaute, au non:de tous leurs concitoyens . de rendre un verdict.

    La justice rendue au nom du peuple franais n ' est donc pasun vain mot

    . Un problme dont la gravit et les implicationssociologiques et psychologiques n ' chappent personne

    . ne peuttre dbattu dans les conditions actuelles et ramen au rangd'uni' promesse lectorale.

    S'il est vrai, en l'tat actuel de la Constitution. que seul le

    pouvoir lgislatif est en mesure de dbattre et de lgifrersur le maintien ou l'abolition de !a peine rte mort nous au r ionssouhait peur les raisons que j'ai dveloppes et il ne s'agitpas d'un abandon de nos responsabilits qu'un sujet de cetordre soit sounijs au verdict populaire.

    Les Francais sont seuls lorsqu'ils sont au banc des jurs . Leurvote est individuel . Ils peuvent aussi, seuls devant l'urne, jugeren leur finie et conscience de la ncessit de maintenir oud'abolir la peine de mort.

    Il fallait pour cela modifier la Constitution afin qu'unrfrendum puisse avoir lieu, conformment aux dclarationsdu Pr sident de la Rpublique qui prvoyait d'us son pi-ogranun electoral

    . au chapitre de : . institutions, que les possibilil,s derecoures au rfrendum seraient l argies* . Quelle meilleureapplication pour un rfrendum qu'ut dbat national sur lapeine de mort !

    M. Albert Brochard. Trs bien !

    M . Pascal Clment . Pour quoi tant de prcipitation dposerce- projet de loi puisque le candidat Franois Mitterrand avaitcourageusement annonc lors de la campagne lectorale qu'ilexercerait systmatiquement son droit de grce s'il tait lu ?

    M. Raymond Forni, prsident vie In commission, rapporteur.On vous l'a dj expliqu! Il n'est de pire sourd que celui quine veut pas entendre !

    M. Pascal Clment. Une autre raison me pousse exprimerma conviction que nous ne pouvons dlibrer valablement : lacertitude que l'abolition de la peine de mort ne peut treenvisage que dans le cadre d'une refonte du code pnal etd'un rexamen de l'chelle des peines.

    J'voquais le talent, niais aussi l'chec, des grands abolition-nistes qui nous ont prcds cette tr ibune pour dbattre dela peine de mort . Aucun n'avait voulu ou n'avait pu envisagerde priode vie transition, aucun n'avait rsolu de manire salisfaisante le problme de la peine de substitution . Or, cet aspect

    Une majorit d'entre nous, inc majorit de Franais, au nondes ides

    . du uusur et de la intitule . (st certainement contre lapente de mort

    . Il est normal et gt'nreux d ' avoir la volume deres,re,ler la vie, de sc' reluscr prononcer une peine irrver-sible qui dpasse l'hu :nnte

    . Il est vrai aussi j ' adhre profon-dment cet argument que l ' Inemne change : celui quicommet le crime (dl autre que celui que l ' on juge, celui quel 'on juge est autre que celui qui sortira de prison dix ou vingtans plus tard . Cette conviction ouvre les portes toutes lesesprances et justifie le refus d ' une sanction irrversible quidcscspre cic l ' homme.

    Mais il y a la ralit et notre responsabilit l ' gard dupeuple franais

    . La ralit, c'est le meur tre, les vielintes, lecriminel qui . loin d ' tre touch par la gru g e et de s'amender,rcidive . Notre devoir, notre responsabilit, c ' est de rpondre la lgitime exigence de la socit qui entend tre dfendueet t re prmunie contre la violence.

    La loi autorise l'individu se dfendre lorsque sa vie est endouter : c'est la lgitime dfense . Nous avons de mme le devoirde nous dfendre par les armes contre les agressions venuesde l'extrieur, je veux parler de la guerre . Vous-mme, mon-sieur le garde des sceaux, avez tabli rcemment un parallleentre le devoir judiciaire des Franais et leur devoir militaire.Au nom de quelle logique et de quel principe n ' aurions-nouspas le droit de dfendre la socit contr e l'indiv i du qui l'agresse,contre le criminel, en allant ntnte, s'il le faut . jusqu' luiter la vie?

    S'il y a respect de la vie, c'est celle des innocents et desfutures victime.; qui m'intresse bien avant celle du criminel.Je n'hsite pas parler de la victime

    . mme si on considrecela je l'ai lu ce matin dans un quotidien eomute un poncifencombrant.

    La socit a donc le droit ou alors soyons pacifistes etrefusons d'armer les bras de nos soldats -- de d .un^r la mortpour se dfendre

    . Ce droit n'e,,t lgitim que per la ncessit.La peine de meur t n'e : t suppo r table que si elle est ncessaire.Dans ces condition .:, elle ne peut tre supprime que si autrechose joue le rifle qu'elle tenait : eutpcher l'homme de devenircriminel, entpccher le criminel de rcidiver.

    J ' voquerai d'abord la question de l'exemplarit. Tout a t

    dit ou presque in' Ce sujet . Les statistiques ne sont gure pro-bantes et il est difficile de prouver que le spect r e de la guil-lotine a ou n'a pas frein le bras du criminel . Mais lequel d'en-Ire nous peut tre sr que la mort ne possde aucun caractredissuasif

    Que penser de cette sorte de cade qui fait hsiter certainsmalfaiteurs au moment de tirer sur un policier ? S ' agit-il du res-pect de la vie d'autrui ou de la peur d'encourir la peine demort ?

    Que penser des preneurs d'otages, de ceux qui enlvent desenfants? Pourquoi prennent-ils le risque, en les restituantvivants, d'tre arrt:;? Qui peut dire avec ceclitucle que cen'est pas la peur de la mort qui assure la vie sauve l'enfantretrouv? ( .%ppin,rdis .sen,ents sur les bancs de l ' union pose ladcu,ocrotte franu-uise.)

    Au-del du problme de l'exemplarit, un autre se pose quepersonne n'a le droit de gommer . La rcidive existe, et elle estd'autant plus rvoltante qu'elle aurait pu tre vite.

    La rcidive n'est pas rare, et elle est, bien souvent, le faitde criminels qui avaient t antrieurement passibles de la peinede mort . Bnficiaires de la clmence des ,jurs . ils ont tcondamns la rclusion perptuelle. Par le jeu des rductionsde peine, quinze ans aprs

    . ils sont so rtis de prison et ils ontrcidiv . Cette question cet trop essentielle pour que nous . lgis-lateur, contribuions i l'aggraver en acceptant d'abolir la peinede mor t sans avoir rsolu le problme de la peine de rempla-cement.

    Le proiet de loi qu'on demande de voter aujourd'hui prvoitl'abolition de la peine de mort et, dans tous les cas o elletait prvue, son remplacement par la dtention perptuit.Or nous savons que la dtention perptuit est non appliqueet inapplicable pour des raisons thiques d'abord, car la dten-tion perptuit prise la lettre ne serait pas :poins inhumaine,dgradante et cruelle que la peine de mort.

    M. Robert-Andr Vivien . Trs bien!M. Pascal Clment . En outr e, nous savons torts, monsieur le

    garde des sceaux, que vous souhaitez qu'aucune peine ne soitirrversible . Mais nous savons aussi que tous les criminels nes'amendent pas . Alors quelle peine choisir? Quelle solutionadopter ?

  • SE 1NC'E DU 17 SEPTEMBRE 1J81

    1 145ASSEMB1 .EE NATIONALE

    < Il n 'y a aucune rai son de prvoir une peine de renlld :,ce-nienl . disiez-vous en an it 1979 . et, vertuant le cas de erintiuelsparticulirement dangereux . voua :demie, quis nr sal,reientrire rend .; en limite' qu ' aprs de tris binait,: Innes de du-n-lion avec une prudence et dei garanties e'lrna,-

    :uns aurions \oulu dbattre aujourd ' hui de ces uar :ttie.;.Nous uc vous signerons p as un chque en banc . N .nts tauolirmt spas la peine de mort sans elre surs que nous p s surl . ins lesnu,}rus de decouracer le crime. d ' enlpcher le.; rcid i ves.

    Cu vide politique, ce vide juridique qui fait qu ' nies yeuxro c dbat n ' a pas lieu d ' tre aujourd ' hui, nous ne sommes pst .,les seul ; l ' cl?rutner et yens dclCZ ci-eimlie que, demain, sila peine de mort est abui,, ce suit lent le peuple franais etceux qui nul mission de le protger - outre Imbue quiprennent soudain unseienue de l ' incapecitr du sistnleciaie a punir et prvenir le crime.

    (lue levez-vous :durs si, pousss par un sentiment d ' inscurit.convaincus de la dmission du pouvoir judiciaire, le ; F'nuleaisderident de' plu.; en plus nombreux de se diendre tout seuls':

    (lue direz-tutu Si, coeure (le risquer sa cout re (les cri-minels qui, eux, ne la risqueront plus . cu-ure tic' revoir, intervalle.; rguliers, les mentes maliaitcus, notre police preuvede pins en plus souvent la tentation d ' en finir elle-nlrne :necles plus dangereux

    Avant d'abolir la peine de mort, il vous fallait aussi, et c'estmue question de justice . revoir l ' chelle des peines.

    En abolissant la peine de Mort vous supprimez le dernierchelon dans la hirarchie de, peines . Ce seront donc lus crimesles plus graves qui seront, dans l ' intention n'lue du le gieialeur,prmpurtiunnellenu'nt les moins punis.

    -\vee votre projet, nu>nsienr le !sarde des sceaux, la sanctionencodrlle tluns certains cas per le blues sera la mc'me quecelle qui frappera l ' assassin . ' foutes les peines seront donciu(lirecieincn1 aggraves.

    Or, chacun sait que telle n'est pas votre conception de finfl-chisseu>ent qu'il convient d'introduire dans l ' chelle des peines.Vote estes en ralit partisan de l'abaissement ;le l ' chelle despeine . (M . le (farde des scearu ., fait tir signe de (linal10(1 .)Mais par votre projet ores aggravez, sans le vouloir, donc sansncessit vidente, toutes les peines frappant les crimes dontlet lutteurs n'encouraient pas ,jusqu ' prsent la peiuc de mort.

    Volts commettez par l tncme une faute sur le plan du droitet vous vota opposez l'article 8 de lac Dclaration des droitede l'homme qui dispose en effet que r la lui ne doit tablir quede; peines str ictement et videmment ncessaires

    Or ce n'est plus le cas ds lors que les peines sont aggravesincidemment.

    Enfin . on voque l'volution historique et l'exemple des autrespays . Ou nue pardonnera de t rouver, de lotis les argnnu'nts don-n s , celui-l comme le plus faible . Ce n'est point parce qu'unexemple est frquent qu'il est bon . Ce n'est point parce qu ' unevolution se dessine qu'elle est irrsist'hle . C - est l'homme quifait l'Histoire, La France le -sait miens qu'un autre pay-s, ellequi, dans ses sursauts . dans ses esa l lors et parfo i s dans sessolitudes, a t plus souvent prophtique pou r les autres qu'il laremorque des modes.

    Oui, c'eid t mieux, plus Oigne de notre dmocratie . dedonner la parole au peuple.

    M . Antoine Gissinger . Trs mien !M. Pascal Clment . Oui . veux semblez vous mfier d ' un rf-

    rendum qui avait . sur un tel sujet, tonte sa justification, Vouene pouvez vous rclamer etc suffrage universel quand il vousarrange, vous en fliciter quand il vous porc au pouvoir, vousen mfier quand vous craignez se dcision,

    MM . Jean-Paul Chari, Francis Geng et Albert Brochard . Trsbien!

    M . Pascal Clment . C 'est pourquoi je vous demande . nies cherscollgues, de voter celte question pralable afin de donner laparole au peuple franais . (Applatidi.sseneents sur eertuiies bancsde l ' uni.rne poil) la dmocratie franaise et chu rassemblement pou>'la Rpublique .)

    L'abolition, si elle rgle le problme moral, laisse entier leproblme social . L'idal, en e t fet, reste l'abolition, conditionde garantir la socit sa protection et sa scurit . Notre mis-sion de lgislateur c'est de distinguer le bien commun du bienpartieulier, de regarder au-dl vie l'chafaud les responsabilitssociales qui sont les ntres.

    Le dbat ne doit pas tre un dbat politis, La mort, quece soit celle de l'assassin ou celle de la victime, n'est ni dedroite ni de gauche, (App'mtdisse illI t,s sar ct' (lowoLren .r i,nnede l'lnuion pour lu (t ;>u0, renie franaise et die ras .embleutcetpour la Rpublitithb)

    M . le prsident . La parole est M. Siiuin, inscrit contre laquestion pralable . I .11,1,' .rrrrli15 CUts site r1P nu,nlurr( .r baetrsdr.; .seri(el i stes et s,ir gin ' 1s u bu-s del rcussr,nbic~urn( 1,0111 lalirl,nt>l ql ' 1

    M. Philippe Sguin . \tunrsieur te prsident. mmnsicur le garde

    dus sveaux, mes chers cnlleucs, la question pralable quetuent :oui M . Clivnt'nt oppos eu projet de lui portant abolitionde la peine de rnuri, je recnunaitrai veloutiers un immensemente.

    L ' initiative de M. Clment nmus minitel en effet de poser la

    seule . la dertire vraie quest Mn laquelle nous avons repoudre puisqmi, videmment . usus le savons tous, l 'abolitions ers vole : devons-nous subordonner . conditionner notre dcision une aut r e qui con

    .sistereil en la cration d'une peine nou-velle, applicable aux erinenels qui . eau ., notre vole, auraient tpassibles (le la penne capitale?

    C 'est je le repu-te. le grand mrite de la question pralable

    et en la combattant, n ' exprinlf,nl titre ri;:oureusemenL per-sunnel, je chercherai moine enlpu,'Icr un rejet qui est acquis(Pavenec qu'a convaincre les uns que la peine de substitutionne duit pas rien' une condition de notre . vote et persuader lesautres quelle pourrait tre une garantie de la prennit de notrechoix.

    Tel est mon propos et mime s ' il serait outrecuidant de mapart de prtendre rallier mes rues, chemin lais utt . les adver-saires de l i abulilion, je nl 'J emploierai ncanmoins, ne serait-cequi, par re:pecl pour eux et pour leurs convictions.

    M . Jean-Paul Chari . Merci.M . Alain Hautecceur . Tris bien !M . Philippe Sguin . Mus chers colluues, monsieur le ministre

    (le la justice, nous devons noue garder de la prtenliun quiserait probablement dmesure et clanl,ennsc, de vouloir arbi-trer ter soir, devant l'Histoire, sur le fond d'un dbat aussiancien

    . ( .In, ;! .^ails.-rru,lrl .; sur (livr er'' buires dru ro .csentb!eulentpour lu li -pethligt,e et ,piclquees buires de l'union pour la dnia

    .

    La controverse sur la peine de mort dure depuis des sicleset assurment elle si' poursuivra aprs notre verdict . Le dbatp : ;r :enteutaire est luu-mibne entam depuis prs de deux sicles.Tant de grandes voix se. sont exprimes ici nlme que nousminimes; probablement condamns cime comparaisons peu ftat-1ense ;, des plagiats ou a des redites . Ne surestimons dune pasle ride qui nous resvicut : sachons; de mente viter dans cettegrande et a :nricnne conirontaliun de dsigner des vainqueurset des vaincus.

    M . Antoine Gissinger . Trs bien!M . Philippe Sguin . Ne surestimions pas notre rle car nous

    n'avons en vrit qu' donner une dernire chiquenaude quisuffira l'abatt re un trop viens nt,>nuntenl qu'ont dj affai-bli, branl . ratin . par leur talent et leur cour age des hommeset des femmes qui s'illustr rent dans les prtoires, les assem-bles, les i'uiises, les univet'sits, les associations

    . hommes etfemmes auxgnets revient tout le mrite . (M, te garde (les sceauxfait en S,gitc cfa.s .scsfire Yin .)

    Je ne veux certes pas lilllii liscr notre dbat et nier que lapossibilit enfin reconnue au Parlement de se pronnnccr constitueun vnement trop ton-:temps diffr . Nous nous sommes assezbattus pour obtenir ce choit, surtout aprs le vote sans qui-voque intervenu le 14 juin 1979 devant notre commission deslois, pour ne pas nous f ;ilieiler qu'il nous soit enfin reconnu.

    \'the initiativn nu nsieur le garde des sceaux, n'est que nor-male et logique . Etait anormale et illogique, l'attitude de ceuxqui n'ont pas voulu d'un dbat dent nous sommes nombreux power qu'il aurait, ds 1978, avec une aut r e majorit, conclu l'abolition.

    Et je souhaiterais qu'on reconnaisse la part qu'ont prise ce combat . qui tait aussi un combat pour le Parlement, ceuxqui sent intervenus sans relche lors des prcdentes lgislaturespour que nous puissions statuer.

    M . Alain Hauteceeur et M . Philippe Marchand . Trs bien !M . Philippe Sguin . On ne m'en voudra pas de penser en

    particulier ceux qui appartenaient l ' ancienne majorit.(Applaudissements sur dit-ers bancs des socialistes .) Nombred'ent re eux sont ici prsents. com pte mon ami Pierre Bas, prsi-dent du groupe parlementaire polo' l'abolition . Mais commentoublier ce que fut aussi l'action d'Eugne Claudius-Petit, cellede Michel Aurillac, celle d'Arthur Paecht et celle aussi duregrett Jacques Plot?

    C'est en pensant d'abord eux que Je rpondrai m. Clmentque sa proposition tendant l'ornanis etion d'un rfrendumn'a sans cloute plus de relle actualit . Le rapporteur et le

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    ASSEMBLEE NATIONALE 1" SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981

    ministre l'ont fort bien dit et je n'insisterai pas sur ce point :

    dont on nous arcab :ait ici mme et dans une presse dsormaisl ' ide Pou \ait sembler sduisante, sous rserve d ' une modification

    bien-r,ens ::nue ne ngliger aucun inu en qui frit de nature constitutionnelle qui avait ses incunvnients, aussi longle,nps

    prulungir la priode d ' interruption vies excutions ouverte auque l ' accs la sance publia : :e tait refus aux propositi ;)ns

    lendemain de la n :url de D ,jandou hi . Nous risquions, en effet,d 'abolition : aujourd ' hui, elle risque effectivement d'appaI t te

    de perdre un temps inutile, puisque. ds lors que le choix

    soit colonie un moyen de reporter indfiniment la dcision aiten-

    s nn ; ;u :;ait, il coin., nuit de ne pins l ' luder.

    due . soit et co se:mit eiuore plus grave c,nune une

    Et c ' est prrisnient clans cette situ :.tion de fait que nous

    drobade du Parlement devait une respons :,bilil yi, en l ' tat

    devons trouver les fondements de notre dcision et non dansde notre droit, lui apparlicni exclusivement .

    la confrontation de nos passions ou cl2 nus sensibilits,QM . Raymond Forni, prsident de la co,rt i:

  • ASSEMBLEE NATIONALE

    SEANCE DU 17 SEPTEMBRE 1981