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07-11/12/2008 Yaound, Cameroun

CODESRIA

12th General Assembly Governing the African Public Sphere

12e Assemble gnrale

Administrer lespace public africain

12a Assembleia Geral Governar o Espao Pblico Africano

LIslam et la femme dans lespace public nigrien

Mahaman Alio Dpartement dHistoire

Universit Abdou Moumouni de Niamey

CODESRIA

12th General Assembly Governing the African Public Sphere

12e Assemble gnrale

Administrer lespace public africain

12a Assembleia Geral Governar o Espao Pblico Africano

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La relation entre lislam et lespace public au Niger, particulirement son rapport avec lEtat,

a t tudie assez tt (Triaud 1981) et il est apparu nettement le jeu dquilibre auquel se

livrait le politique, notamment le premier prsident de la rpublique M. Diori HAMANI

(1960-1974) pour prserver la lacit du jeune Etat ; un jeu qui noccultait tout de mme pas

la flagrante ralit, que lcrasante majorit de la population du Niger tait musulmane.

Mme sil est connu que des femmes ont occup de hautes fonctions dans les rgimes

prcoloniaux de lespace nigrien, on retient que ce fut la faveur de lanne internationale de

la femme en 1975, que la femme nigrienne a song braver la coutume et aller la

conqute dun espace qui tait jusqualors rserv aux hommes. Timide au dpart, cet

investissement de la femme nigrienne dans lespace public deviendra total partir de la

marche du 13 mai 1991 organise pour revendiquer une reprsentation plus importante la

Confrence Nationale Souveraine devant se tenir en juillet de la mme anne.

En novembre 1991, M. Cheffou Amadou, le Premier Ministre issu de cette Confrence

Nationale, commenait son discours par la formule consacre utilise par les musulmans au

nom de Dieu, Le Clment, Le Misricordieux , formule qui a laiss pantois plus dun

politicien, habitu aux formules plutt laques comme mesdames, messieurs, mes chers

compatriotes . Cet vnement, plutt insolite, marque pourtant une nouvelle phase des

relations entre le sacr et la sphre publique au Niger.

La dmocratisation de la socit nigrienne a aussi amen, dans lespace public, les

associations confessionnelles (musulmanes et chrtiennes), les autres associations et ONG

fminines, chacune cherchant imposer ses arguments (souvent travers la rue) la classe

politique. Ainsi, au propre comme au figur, lespace public (la rue, les lieux de meeting, les

mdias, lespace politique etc.) est devenu un enjeu pour ces forces. Ce qui distingue ces

nouvelles forces sociales de celles auxquelles les Etats africains taient habitus, notamment

les syndicats et les scolaires, cest que celles-ci posent des problmes nouveaux, indits et

mme dans certains cas rvolutionnaires : les musulmans rclamaient, sinon linstauration de

la sharia (loi musulmane) comme dans certains Etats du Nord-Nigria, du moins la prise en

compte de lislam dans les affaires de lEtat1 ; les Chrtiens demandaient la prise en compte

de leur religion face la toute-puissance des musulmans, et les femmes rclamaient, en plus

de la ratification de la CEDEF (Convention portant Elimination de toutes les formes de

Discriminations lEgard des Femmes), un quota dans les fonctions administratives et

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politiques et un code de la famille sur la question du mariage.

Un autre fait nouveau est la mobilisation de lintelligentsia : le leadership de lislam au Niger

nest plus lapanage dune catgorie dhommes appels marabouts que lopinion gnrale

associe de plus en plus lobscurantisme ambiant, mais celle dintellectuels arabisants forms

dans les grandes universits des pays du golfe arabique (et qui cherchent se faire une place

comme celle jusque-l occupe par les seuls europhones) et celle aussi dintellectuels forms

lcole occidentale, sans distinction de sexe.

Si, sur le plan institutionnel, laspect genre a t pris en compte par les autorits nigriennes

depuis les annes 1990-2000, avec la cration dune direction de la promotion de la femme,

puis dun Secrtariat dEtat la condition fminine et enfin dun Ministre de la promotion de

la Femme et de la protection de lenfant, il faut par contre attendre 2007 pour voir apparatre

un Ministre des affaires religieuses et un Conseil islamique. Il faut dire que des pesanteurs

sociales nationales interagissent avec des facteurs extrieurs : les femmes sont soutenues et

encourages par le mouvement fministe mondial, alors que les musulmans du Niger prennent

exemple sur ce qui se passe au Nigria voisin, le tout sur fond de recherche et dacquisition

des dividendes politiques linterne et financiers lexterne.

Ce quil y a lieu dappeler le paradoxe nigrien, cest--dire une administration laque

rgissant une ralit islamique (Idrissa 2005 :348) sera mis rude preuve avec la floraison

et la diversit des moyens dinformation : la presse , la tlvision et la radio prives,

soustraites du contrle de lEtat, deviennent plus accessibles, librent la parole, et rendent

plus efficiente la mobilisation autour didaux ou de revendications identitaires ou sociales.

Un des effets de cette libralisation des mdias est quelle profite la formation et la

transformation continues de la femme nigrienne qui ne tient plus rester cette bonne

pouse religieusement formate dont lhomme exploite la crdulit et lignorance..

Cest donc toute cette lutte dinfluence entre lislam et la question du genre dans la gestion de

lespace public que nous voulons analyser, en particulier travers certaines questions qui ont

focalis le dbat public : le projet de code de la famille de 1993 (sur lequel nous insisterons

parce quil a le plus attir lattention et mobilis les nergies ; ce sera llment le plus

illustratif de notre analyse), la CEDEF (convention pour llimination de toutes les formes de

discrimination lgard des femmes) en 1999 et le FIMA (Festival international de la mode

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africaine) en 2000. Nous tenterons aussi de cerner les dynamiques au sein des groupes : dune

part la lutte dinfluence entre femmes musulmanes et femmes laques ; dautre part la

disparit de plus en plus marque entre les vieux ordres soufis (Tijaniya et Qadriyya) et le

mouvement rformiste musulman ( izala). Enfin, nous verrons si ce dbat ne pose pas la

question du choix dun modle de socit ou sil nest quun aspect de la lutte pour laccs au

pouvoir. La dmocratie ayant montr chacun la voie pour se faire entendre, lespace public

devient un enjeu pour les diffrentes forces en prsence.

La dmocratisation du Niger et lespace public comme enjeu

Rappelons que cest avec la dmocratisation du pays partir de 1991 que lespace public est

devenu un enjeu, ce qui a suscit, pour loccuper, une floraison dassociations, de partis

politiques et un fractionnement des anciennes structures syndicales2. Cest dans cette

ambiance que sont ns diffrents groupes de pression identitaires (islamiste, fministe,

chrtien, etc.) avec pour objectif dimposer leurs vues aux dirigeants travers la mobilisation

de lopinion publique. Le jeu politique fond sur les lections rduit la marge de manuvres

des autorits politiques qui agissent avec tact pour ne pas heurter llectorat. La libert qui a

accompagn la dmocratisation a, pour un pays comme le Niger qui a vcu des dictatures

civiles et militaires depuis son indpendance, entran lexpression de toutes les formes de

frustration qui ont pour enjeu lespace public et la mobilisation de moyens dexpression

consquents qui justifie la floraison des mdias : plus dune vingtaine de radios prives, plus

de trente titres de journaux et quatre stations de tlvision prives qui viennent sajouter aux

deux publiques.

La mondialisation a, dans son aspect communication, beaucoup contribu un changement de

mentalits et dapproches fond sur une solidarit internationale, sur un transfert des valeurs

culturelles de lOccident et de lOrient vers lAfrique, ainsi que sur la disponibilit de

linformation en temps rel, information diffuse quotidiennement par le Central News

Network amricain (CNN), Al-Jazeera, Al-Arabia, et de plus en plus capte au Niger travers

les antennes paraboliques.

Avec le mouvement syndical qui a dj eu croiser le fer avec les diffrentes dictatures et a

contribu instaurer la dmocratie au Niger, le mouvement fministe soutenu de lextrieur

et reprsentant une certaine mode avec de grandes confrences organises sur les femmes

lchelle mondiale (Mexico 1975, Nairobi 1985, Beijing 1995, etc.), tait lun des premiers

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exprimer son besoin de libert.

La naissance du mouvement fministe nigrien et son influence sur lespace public

La ncessit de la participation de la femme aux aff aires publiques a t note depuis

longtemps par les socits africaines bien avant que Lnine ne dclare quil est impossible

dassurer la vraie libert, de btir la vraie dmocratie, moins encore le socialisme, sans la

participation des femmes la vie politique, la fonction publique, la milice, sans les

arracher lambiance abrutissante du mnage et de la cuisine .

Les femmes ne seront pas libres de lextrieur, elles se libreront elles-mmes,

individuellement et collectivement a su bien dire J. Ki-Zerbo (2003 :126). Comme pour lui

donner raison, les femmes du Niger se sont organises ds les premires heures des

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