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De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité catéchétique » en paroisse Thèse GUY GUINDON Doctorat en théologie pratique Docteur en théologie pratique (D. Th. P.) Québec, Canada © Guy Guindon, 2017

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De la « préparation aux sacrements » à la

« réciprocité catéchétique » en paroisse

Thèse

GUY GUINDON

Doctorat en théologie pratique

Docteur en théologie pratique (D. Th. P.)

Québec, Canada

© Guy Guindon, 2017

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De la « préparation aux sacrements » à la

« réciprocité catéchétique » en paroisse

Thèse

GUY GUINDON

Sous la direction de :

Alain Faucher, directeur de recherche

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Résumé

Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques du Québec

en l’an 2000, de la préparation aux sacrements à l’implantation des parcours catéchétiques ?

À partir d’une recherche-action, le chercheur s’interroge sur la faisabilité de ce passage.

L’hypothèse initiale était que ce changement était possible par la prise en charge de la

formation des catéchistes par l’équipe pastorale paroissiale. Mais dès le point de départ,

l’équipe de recherche-action a fait voler en éclats cette hypothèse en soulignant que la

problématique de la catéchèse paroissiale dépassait le cadre d’une formation des catéchisés

et des catéchistes.

L’équipe de recherche s’est rendu compte que le modèle catéchétique actuel issu de la

préparation aux sacrements n’était pas viable, car il entraînait la paroisse dans une

dynamique de consommation de services religieux. La catéchèse est plus qu’un

enseignement magistral. C’est la rencontre d’un Dieu vivant qui conduit à un acte de foi et

à l’insertion dans une communauté vivante de ceux qui souhaitent devenir disciples du

Christ. C’est en sortant du paradigme de la formation chrétienne centrée presque

exclusivement sur l’enseignement et en reconnaissant que les catéchisés autant adultes que

jeunes, les parents, les bénévoles, les catéchistes, les membres de l’équipe pastorale, le

curé, la communauté célébrante et l’Esprit-Saint sont tous des acteurs que l’on a pu tracer le

portrait d’une autre manière de vivre la catéchèse.

La foi s’approfondit par la découverte de la Parole de Dieu et en échangeant les échos

qu’elle suscite en soi entre les différents acteurs. La catéchèse devient, par cet échange

entre tous les acteurs et par la reconnaissance des apports de chacun, un lieu d’actualisation

de la Parole de Dieu.

Cette recherche se poursuit par une corrélation entre quatre éléments :

• la relecture de la pratique,

• la réflexion catéchétique dans la Tradition de l’Église,

• l’apport des sciences humaines par le concept de la « réciprocité éducative »,

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• la proposition d’un troisième paradigme catéchétique par les travaux de Denis

Villepelet.

De cette corrélation a surgi l’élaboration du concept de « réciprocité catéchétique ». Ce

concept se veut une proposition qui énumère les différents éléments nécessaires afin de

vivre le passage de la préparation aux sacrements à la « réciprocité catéchétique ». Cette

orientation catéchétique propose une démarche communautaire où tous les acteurs dans une

dynamique dialogique et centrée sur la Parole de Dieu accompagnent selon leurs charismes

et rôles les catéchisés. La finalité de la catéchèse a pour objectif de former des disciples-

missionnaires témoins du Christ vivant dans leur paroisse et dans le monde d’aujourd’hui.

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Abstract

With the secularization of the public schools in the year 2000, how can the leap from

sacramental preparation to the establishment of catechetical programs of formation begin

within our parishes?

Based on a research and action methodology, the researcher wonders whether this leap is

feasible. The initial hypothesis is that this leap to a catechetical process of formation within

the parish is possible if the parish pastoral team take the initiative to have the catechists

trained for the task. From the beginning the research-action team have shattered this

hypothesis by stressing that the problematic of parish catechesis went beyond the

framework of the parish community for the formation the catechists.

The research team have come to the conclusion that the actual catechetical model of

sacramental preparation is not viable, as it fostered the parish community to have a

consumer mentality when faced with religious practices. Catechesis is more than just

magisterial teaching; it is rather an encounter with the living God who guides one to an act

of faith and integration into a living community of Disciples of Christ.

From this paradigm of Christian formation centred exclusively on teaching, and

recognizing that the catechized, adults as well as youth, parents, volunteers, catechists,

members of pastoral teams, the pastor, the celebrating community, and the Holy Spirit as

well, are all agents for which we can trace the portrait of diverse manners of living and

receiving catechesis. The faith grows in profundity as one discovers the Word of God and

shares the effects of that Gospel taking root in ones heart.

Catechesis then becomes, through this sharing between persons, a place of actualizing the

Word of God.

This research seeks to find a correlation between four elements:

• a rereading of the actual practice

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• a catechetical reflection in the tradition of the Church

• the contribution of the human sciences by the concept of "educational reciprocity”

• the proposition of a third catechetical paradigm based on the work of Denis Villepelet.

From this correlation arose the concept "catechetical reciprocity". This concept is a

proposal that lists the different elements necessary to live the transition from sacramental

preparation to "catechetical reciprocity". This catechetical orientation proposes a

community approach in which all actors in a dialogical dynamic centered on the Word of

God accompany the catechized according to their charismas and roles. The purpose of

catechesis is to train missionary disciples who give witness to Christ living in their parish

and in the world today.

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TABLE DES MATIÈRES

Résumé .................................................................................................................................. iii Abstract ................................................................................................................................... v TABLE DES MATIÈRES .................................................................................................... vii

Listes des tableaux ............................................................................................................... xiv Listes des figures .................................................................................................................. xv Listes des graphiques ........................................................................................................... xvi Listes des abréviations et des sigles ................................................................................... xvii Dédicace .............................................................................................................................. xix

Avant-propos et remerciements ............................................................................................ xx Introduction ............................................................................................................................ 1

Chapitre 1 : Origine du projet et méthode de la recherche ................................................... 11

1. La théologie pratique : ses origines, ses caractéristiques .................................. 12 1.1 L’événement Schleiermacher ............................................................................ 12 1.2 Théologie pastorale.................................................................................................. 13

1.2.1 Théologie pastorale catéchétique.......................................................................... 14 1.2.2 Théologie pratique : une pluralité de définitions et de méthodes ......................... 14

1.2.3 Marcel Viau .......................................................................................................... 15 1.2.4 La Faculté de théologie de l’Université de Montréal ........................................ 16 1.2.5 Marc Donzé ....................................................................................................... 17

1.2.6 James Newton Poling ........................................................................................ 20

1.2.7 Exhortation apostolique « Pastores Dabo Vobis » ............................................... 21

1.2.8 La théologie pratique : situation actuelle .......................................................... 22 1.3 La recherche-action en théologie pratique ........................................................ 23

1.3.1 Ses origines et son fondement .............................................................................. 24 1.3.2 Définition retenue ................................................................................................. 26 1.3.3 Objectifs poursuivis par la recherche-action ........................................................ 29

1.3.4 Démarche proposée pour la thèse ......................................................................... 30

1.3.4.1 Phase préliminaire ............................................................................................. 30 1.3.4.2 Formulation de l’hypothèse de départ et description de la pratique .................. 31 1.3.4.3 Constitution de l’équipe de recherche-action ................................................... 33

Rôle du chercheur ............................................................................................. 35 1.3.4.4 Revue de la littérature ....................................................................................... 37

1.3.4.5 Reformulation de l’hypothèse et planification de l’action ................................ 38

1.3.4.6 Phase d’analyse de la cueillette des données .................................................... 41

1.3.4.7 Corrélation ......................................................................................................... 46 1.3.4.8 Prospective ........................................................................................................ 56 1.4 Conclusion du chapitre ..................................................................................... 58

Chapitre 2 : Description de la pratique et formulation de l’hypothèse de départ ................. 59 2.1 Description du contexte de la recherche .................................................................. 62

2.1.1 Le diocèse de Saint-Jérôme...................................................................... 62 2.1.2 Paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila .............................................................. 72 2.1.3 L’équipe pastorale paroissiale .................................................................. 91

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2.1.3.1 L’équipe pastorale, canon 517 § 2 ........................................................ 92

2.1.3.2 L’équipe d’animation paroissiale, une autre alternative possible ......... 92 2.1.4 L’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila ...................... 93 2.1.5 Les catéchistes et les aides-catéchistes bénévoles ................................... 95

2.2 Élaboration de la question de recherche .................................................................. 97 2.3 Formulation de la question de recherche ............................................................... 100

Chapitre 3 : Revue de la littérature ..................................................................................... 103 3.1 L’évolution de la catéchèse et du rôle des catéchistes dans l’histoire de l’Église . 103 3.1.1. La période apostolique....................................................................................... 104 3.1.2 Les premiers siècles : développement et déclin du catéchuménat .................. 106 3.1.3 Le Moyen Âge ................................................................................................ 109

3.1.4 Les réformes catholiques et protestantes : l’ère des catéchistes ..................... 112 3.1.5 La catéchèse à la fin de l’ère des catéchistes et au début du mouvement

catéchétique (1900-1960) ............................................................................................ 117 3.2 L’évolution de la catéchèse à partir de Vatican II .......................................... 128 3.2.1 Les documents qui ont marqué l’évolution de la catéchèse de l’Église universelle

depuis Vatican II .......................................................................................................... 129

3.2.1.1 Directoire général de catéchèse (1971) ............................................... 129 3.2.1.2 Rituel de l’initiation chrétienne des adultes ........................................ 131 3.2.1.3 Exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi ..................................... 133

3.2.1.4 L’Exhortation apostolique Catechesi Tradendae ............................. 134 3.2.1.5 La catéchèse des adultes dans la communauté chrétienne du Conseil

International pour la catéchèse ........................................................................ 136 3.2.1.6 Guide pour les catéchistes de (1993) ............................................... 138 3.2.1.7 Directoire général pour la catéchèse 1997 (DGC)........................... 140

3.3 Catéchèse dans différentes régions du monde : caractéristiques, rôle des

catéchistes, des paroisses et acteurs de la catéchèse .................................................... 145 3.3.1 La France ........................................................................................................ 146

3.3.1.1 Pierre Raysac et la formation des catéchistes ..................................... 146

3.3.1.2 Jean-Pierre Leconte ............................................................................. 147 3.3.1.3 Les entretiens de Vavin ....................................................................... 147

3.3.1.4 Jean Joncheray .................................................................................... 148 3.3.1.5 Jean-Marie Labelle .............................................................................. 149 3.3.1.6 Denis Villepelet .................................................................................. 150 3.3.1.7 Deux documents de l’épiscopat français ............................................. 154

3.3.2 L’Allemagne ....................................................................................................... 158 3.3.2.1 Norbert Mette ...................................................................................... 158

3.3.3 La Belgique ..................................................................................................... 160

3.3.3.1 André Fossion ..................................................................................... 160 3.3.3.2 Henri Derroitte .................................................................................... 165

3.3.4 L’Italie ................................................................................................................ 169 3.3.4.1 Flavio Pajer ......................................................................................... 169

3.3.4.2 Emilio Alberich ................................................................................... 171 3.3.5 Les États-Unis ................................................................................................. 174

3.3.5.1 Contexte et défis de la pratique catéchétique aux États-Unis ............. 174 3.3.5.2 Orientations de la catéchèse aux États-Unis ....................................... 175 3.3.5.3 Rôle de la paroisse et des catéchistes aux États-Unis ......................... 175

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3.3.6 La Corée du Sud .............................................................................................. 178

3.4 L’évolution de la catéchèse dans l’Église du Québec ..................................... 179 3.4.1 Les années 1900 à 1960 .................................................................................. 179 3.4.2 Le renouveau catéchétique 1960-2000 ........................................................... 182 3.4.3 La catéchèse confrontée à la laïcisation et à une société sécularisée .............. 190 3.4.4 Réflexions de quelques théologiens du Québec .............................................. 194

3.4.4.1 Paul-André Giguère ............................................................................ 195 3.4.4.2 Normand Provencher .......................................................................... 195 3.4.4.3 Jean-Marc Charron et Suzanne Desrochers ........................................ 196 3.4.4.4 Gilles Routhier .................................................................................... 197

3.5 L’évolution dans le diocèse de Saint-Jérôme .................................................. 200

3.6 Conclusion du chapitre ................................................................................... 202 Chapitre 4 : L’analyse des données recueillies ................................................................... 204

4.1 Formation de l’équipe de recherche-action ........................................................... 204 4.1.1 Cheminement de l’équipe de recherche-action ...................................... 205 4.1.2 Description de la première intervention ................................................. 207 4.1.3 Description de la deuxième intervention ............................................... 208

4.1.4 Première analyse par l’équipe de recherche-action................................ 209 4.1.4.1 La formation de disciples et de témoins.............................................. 211 4.1.4.2 Changement de modèle paroissial ...................................................... 211

4.1.4.3 Tous acteurs en catéchèse ................................................................... 211 4.1.4.4 L’inscription, signe d’un processus de construction identitaire .......... 211

4.1.4.5 Le prêtre acteur en catéchèse et disciple du Christ ............................. 212 4.1.4.6 La catéchèse un lieu d’échange, de partage et de conversion ............. 212 4.1.4.7 Un lieu de promotion du sacerdoce baptismal et de l’ecclésiologie de

communion ..................................................................................................... 213

4.1.4.8 Décloisonnement : passage d’une paroisse exclusive à une paroisse

inclusive .......................................................................................................... 213 4.1.4.9 Spiritualité du manque et de la miséricorde ........................................ 213

4.1.4.10 Conclusion de la première analyse.................................................... 214 4.2 Une deuxième analyse par le chercheur ................................................................ 215

4.2.1 Les unités de sens ................................................................................... 215 4.2.2 Les catégories ......................................................................................... 215 4.2.3 Les éléments retenus ou discriminés ...................................................... 215

4.3 Description du milieu à partir de la recherche-action............................................ 216

4.3.1 Une paroisse en crise, à la croisée des chemins ..................................... 216 4.3.2 Les premiers fruits de l’implantation des parcours intergénérationnels 222

4.4 Des rôles à spécifier ............................................................................................... 226

4.4.1 Importance de spécifier les rôles de chacun en catéchèse ..................... 226 4.4.2 Des textes de références pour l’équipe de recherche-action .................. 226

4.5 Cheminement de l’hypothèse de départ ................................................................ 228 4.6 Différents passages ................................................................................................ 230

4.6.1 La catéchèse a pour but la formation de témoins de Jésus Christ, de

disciples de Jésus ............................................................................................ 231 4.6.2 Passage d’une pastorale de service à une pastorale d’engendrement .... 232 4.6.3 Passage d’une « catéchèse animée par quelques acteurs » à « tous acteurs

en catéchèse ».................................................................................................. 234

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4.6.4 Passage d’une catéchèse comme rite de passage à une catéchèse comme

découverte de son identité chrétienne ............................................................. 251 4.6.5 Passage de « prêtre distributeur de sacrements et gérant » à « prêtre guide,

animateur et initiateur de la foi » .................................................................... 252 4.6.6 Passage d’une catéchèse magistrale à une catéchèse qui est un lieu

d’échange de la Parole de Dieu et de conversion............................................ 254

4.6.7 Passage d’une catéchèse axée sur les sacrements à une catéchèse qui fait la

promotion du sacerdoce baptismal .................................................................. 255 4.6.8 Passage d’une communauté paroissiale exclusive à une paroisse vivante qui

accueille et insère les catéchisés ..................................................................... 256 4.6.9 Passage d’une catéchèse centrée sur la perfection à celle du manque et de la

miséricorde ...................................................................................................... 259 4.6.10 Passage d’une catéchèse enseignante à une catéchèse paroissiale

d’initiation chrétienne ..................................................................................... 260 4.7 La formation dans une paroisse qui opte pour l’option de prioriser la catéchèse au

centre de la vie paroissiale ........................................................................................... 262 4.7.1 Une formation pour tous ........................................................................ 263

4.7.2 Définir la formation pour les baptisés ............................................. 263 4.7.3 La formation des catéchistes et d’un corps de catéchistes ............... 264 4.7.3.1 La formation et la constitution d’un corps de catéchistes ............... 264

4.7.3.2 Les catéchistes ................................................................................. 266 4.7.4 Présentation de la grille d’André Fossion et commentaires des catéchistes

......................................................................................................................... 268 4.7.5 Catéchistes : recrutement et reconnaissance des compétences ........ 271 4.7.6 La formation de l’équipe pastorale ........................................................ 272

4.7.7 La formation des pasteurs ...................................................................... 274

4.7.8 La formation requise de la communauté chrétienne .............................. 275 4.7.9 Collaboration entre les acteurs de la catéchèse ...................................... 278

4.8 L’émergence d’une réflexion sur un nouveau concept : la réciprocité catéchétique279

Chapitre 5 : Corrélation et prospective ............................................................................... 283 5.1 Description des pôles de la corrélation .................................................................. 283

5.1.1. Les résultats de l’analyse des données recueillies lors de la recherche-

action ............................................................................................................... 284 5.1.1.1 Éléments synthèses de l’analyse de la cueillette des données de la

recherche-action. ............................................................................................. 284

5.1.1.2 La formation dans une paroisse qui veut devenir une communauté

d’engendrement ............................................................................................... 286 5.2 Le Processus de corrélation ................................................................................... 288

5.2.1 L’origine de la réciprocité éducative ..................................................... 288 5.2.1.1 Qu’est-ce que la réciprocité éducative? .............................................. 289 5.2.1.2 Les caractéristiques de la réciprocité éducative .................................. 293

5.3 Corrélation entre « la pratique étudiée » et « la réciprocité éducative » ............... 308

5.3.1 Corrélation « la formation de disciples témoins » et « la réciprocité

éducative » ...................................................................................................... 308 5.3.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et « la réciprocité

éducative » ...................................................................................................... 309

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5.3.4. Corrélation entre une « catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne » et

« la réciprocité éducative » ............................................................................. 310 5.3.5. Corrélation entre « prêtre disciple et évangélisateur » et « réciprocité

éducative » ...................................................................................................... 311 5.3.6. Corrélation entre « catéchèse, lieu d’échange de la Parole de Dieu et des

paroles » et « la réciprocité éducative » .......................................................... 312

5.3.7. Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal » et « la

réciprocité éducative » .................................................................................... 312 5.3.8. Corrélation entre « paroisse inclusive » et « la réciprocité éducative » 313 5.3.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et « la réciprocité

éducative » ...................................................................................................... 314

5.3.10. Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation » et « la réciprocité

éducative » ...................................................................................................... 315

5.3.11 Conclusion corrélation « pratique » et « réciprocité éducative » ......... 317 5.4 La catéchèse dans les documents du Magistère après le Concile Vatican II ......... 317

5.4.1 Les documents conciliaires Vatican II ................................................... 318 5.4.2 Le Message au peuple de Dieu : Synode sur la catéchèse en 1977 ....... 322

5.4.3 L’exhortation apostolique Catechesi Tradendae .................................... 324 5.4.4 Le Directoire général pour la catéchèse de 1997 ................................... 326 5.4.5 Le document de la Ve Conférence générale de l’Épiscopat Latino-

Américain et des Caraïbes d’Aparecida .......................................................... 329 5.5 Corrélation entre « pratique » et « Magistère » .............................................. 335

5.5.1 Corrélation entre « formation de disciples témoins » et « Magistère » . 335 5.5.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et « Magistère » ......... 336 5.5.3 Corrélation entre catéchèse où tous sont acteurs et Magistère............... 337

5.5.4 Corrélation entre « catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne » et

« Magistère » ................................................................................................... 338 5.5.5 Corrélation entre « prêtre disciple et évangélisateur » et « Magistère » 338 5.5.6 Corrélation entre « catéchèse lieu d’échange de la Parole de Dieu, de

paroles » et « Magistère » ............................................................................... 339 5.5.7 Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal » et

« Magistère » ................................................................................................... 340 5.5.8 Corrélation entre « paroisse inclusive » et « Magistère » ...................... 341 5.5.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et « Magistère » ....... 342 5.5.10 Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation » et « Magistère »343

5.5.11 Conclusion corrélation « pratique » et « Magistère » .......................... 344 5.6 La thèse de Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde

complexe : nouvelles problématiques catéchétiques ................................................... 346

5.6.1 Objectifs de la thèse ......................................................................... 346 5.6.2 Réception de la thèse dans le milieu théologique et catéchétique ......... 347 5.6.3 La structure de la thèse de Denis Villepelet ........................................... 348 5.6.3.1 Première partie : la catéchèse comme praxis communicationnelle ..... 348

5.6.3.2 Deuxième partie : « La catéchistique aux prises avec la complexité. Mise

en place philosophique de la notion de paradigme » ...................................... 351 5.6.3.3 Catéchèse et théologie pratique .......................................................... 352 5.6.3.4 Troisième partie : Typologie de trois paradigmes catéchistiques ....... 354

5.7 Corrélation entre « pratique » et « la thèse de Denis Villepelet » .................. 357

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5.7.1 Corrélation entre « catéchèse qui forme des témoins et disciples de Jésus »

et « la thèse de Denis Villepelet » ................................................................... 357 5.7.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et « la thèse de Denis

Villepelet » ...................................................................................................... 358 5.7.3 Corrélation entre « catéchèse où tous sont acteurs » et « la thèse de Denis

Villepelet » ...................................................................................................... 359

5.7.4 Corrélation entre « catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne » et « la

thèse de Denis Villepelet » ............................................................................. 360 5.7.5 Corrélation entre « prêtre, disciple et évangélisateur » et « la thèse de Denis

Villepelet » ...................................................................................................... 361 5.7.6 Corrélation entre « catéchèse lieu d’échange de la Parole de Dieu, des

paroles » et « la thèse de Denis Villepelet » ................................................... 362 5.7.7 Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal » et « la

thèse de Denis Villepelet » ............................................................................. 362 5.7.8 Corrélation entre « paroisse inclusive » et « la thèse de Denis Villepelet »

......................................................................................................................... 363 5.7.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et « la thèse de Denis

Villepelet » ...................................................................................................... 364 5.7.10 Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation » et « la thèse de

Denis Villepelet » ........................................................................................... 365

5.7.11 Conclusion de la corrélation « L’analyse de la cueillette des données » et

« la thèse de Denis Villepelet » ....................................................................... 366

5.8 Pour un passage en paroisse de la « préparation aux sacrements » à la réciprocité

catéchétique ................................................................................................................. 367 5.8.1 Quelques constats de la corrélation ................................................. 369

5.8.1.1 Finalité de la catéchèse ....................................................................... 369

5.8.1.2 Une pastorale d’engendrement............................................................ 370 5.8.1.3 Une catéchèse où tous sont acteurs ..................................................... 370 5.8.1.4 Une catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne ........................... 370

5.8.1.5 Un prêtre disciple et évangélisateur .................................................... 371 5.8.1.6 Une catéchèse lieu d’échange de la Parole de Dieu, des paroles ........ 372

5.8.1.7. Une catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal ........................... 372 5.8.1.8 Une paroisse inclusive ........................................................................ 374 5.8.1.9 Une catéchèse de la miséricorde ......................................................... 374 5.8.1.10 Une Catéchèse paroissiale d’initiation .............................................. 375

5.9 La réciprocité catéchétique comme proposition de transformation de la pratique

catéchétique en paroisse .............................................................................................. 376 5.9.1 Point d’ancrage de la réciprocité catéchétique ....................................... 376

5.9.1.1 Les fondements théologiques .............................................................. 376 5.9.1.2 Les fondements ecclésiologiques ........................................................ 378 5.9.1.3 Les fondements sociologiques ............................................................ 382 5.9.1.4 Les Fondements anthropologiques...................................................... 383

5.9.1.5 Les fondements pédagogiques ............................................................ 384 5.9.2 La nécessité d’un changement dans la pratique de la catéchèse

paroissiale ....................................................................................................... 385 5.9.3 Une nouvelle compréhension de l’initiation chrétienne en paroisse387 5.9.4 Pour une définition de la réciprocité catéchétique en paroisse ........ 388

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xiii

5.10 Prospective ...................................................................................................... 388

5.10.1 Les acquis de la recherche et les questions qu’elle suscite .................. 389 5.10.2 Pour un renouvellement de la pratique du ministère ordonné, des

ministères délégués et des ministères baptismaux .......................................... 390 5.10.3 La paroisse, lieu de développement d’une pastorale de réciprocité

catéchétique ..................................................................................................... 392

5.10.4 Enjeux des changements de paradigme ........................................... 393 5.10.5 Proposition pour l’implantation de la réciprocité catéchétique ....... 393 5.10.6 Un guide pour les parcours des baptisés .............................................. 396 5.10.7 Donner aux baptisés un alphabet et une grammaire ........................ 397

Conclusion du chapitre ................................................................................................ 397

Conclusion .......................................................................................................................... 399 Les apprentissages de l’intervenant ............................................................................. 400

Retour sur les étapes de la thèse .................................................................................. 404 Une recherche fondamentale sur la catéchèse ............................................................. 411 Les apports de la réciprocité catéchétique à la vie de l’Église .................................... 411 La catéchèse, activité centrale de la paroisse, comme lieu d’initiation, d’expérimentation

et d’inscription dans une tradition ............................................................................... 412 L’éclatement de la vision catéchétique comme activité limitée à l’enseignement ...... 413 La réciprocité catéchétique et les possibilités de développement pour l’avenir .......... 415

Mot de la fin ................................................................................................................ 416 Bibliographie ...................................................................................................................... 417

Annexe 1 : Protocole de Recherche .................................................................................... 436 Annexe 2 : Document de présentation du projet présenté aux participants de la recherche-

action .................................................................................................................................. 470

Annexe 3 : Lettre d’invitation aux participants pour le recherche-action .......................... 480

Annexe 4 : Formulaire de consentement à l’intention des membres de l’équipe pastorale

paroissiale et des catéchètes bénévoles de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila ................. 482 Annexe 5 : Formulaire d’engagement à la confidentialité ................................................. 493

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xiv

Listes des tableaux

Tableau 1 : Quatre actes fondateurs de la théologie pratique ............................................... 18

Tableau 2 : Rencontres de l'équipe de recherche-action ...................................................... 38

Tableau 3 : Description du diocèse de Saint-Jérôme 1951 et 2011 ...................................... 63

Tableau 4 : Changement du texte de la charte québécoise : Charte des droits et libertés de la

personne ........................................................................................................................ 67

Tableau 5 : Carte de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila 2007 ............................................ 73

Tableau 6 : Populations des villes qui recoupent la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila de 1991

à 2006 ........................................................................................................................... 74

Tableau 7 : Statistiques sur la population des villes Sainte-Thérèse, Blainville et de la

province du Québec ...................................................................................................... 77

Tableau 8 : Statistiques sur la population des villes Sainte-Thérèse, Blainville et province

du Québec ..................................................................................................................... 78

Tableau 9 : Statistiques sur la population des villes Boisbriand, Mirabel, Rosemère .......... 79

Tableau 10 : Statistiques sur la population des villes Boisbriand, Mirabel, Rosemère ........ 80

Tableau 11 : Appartenance religieuse des personnes vivant dans les villes de la paroisse de

2001 .............................................................................................................................. 83

Tableau 12 : Appartenance religieuse des personnes vivant dans les villes de la paroisse

2011 .............................................................................................................................. 84

Tableau 13 : Description des tâches de l’équipe pastorale paroissiale de la paroisse Sainte-

Thérèse-d’Avila pour l’année 2006-2007..................................................................... 94

Tableau 14 : Les catéchistes bénévoles et les aides-catéchistes ........................................... 96

Tableau 15 : Synthèse d’une première observation .............................................................. 97

Tableau 16 : Les trois paradigmes catéchétiques ............................................................... 152

Tableau 17 : Compétences catéchétiques ........................................................................... 164

Tableau 18 : Formation des catéchistes, vision d’Henri Derroitte ..................................... 167

Tableau 19 : Vision de la formation des catéchistes d’Émilio Alberich ............................ 172

Tableau 20 : Calendrier des rencontres .............................................................................. 205

Tableau 21 : Première analyse validée par le groupe de recherche-action ......................... 209

Tableau 22 : Les catégories discriminées ........................................................................... 216

Tableau 23 : Diagnostic de l’enquête : risquer l’avenir ..................................................... 217

Tableau 24 : Synthèse des passages à vivre pour le renouvellement de la vie catéchétique en

paroisse ....................................................................................................................... 261

Tableau 25 : Formation des catéchistes .............................................................................. 286

Tableau 26 : Principes et orientations de l’andragogie....................................................... 292

Tableau 27 : Propositions et cadre référentiel de la réciprocité ......................................... 300

Tableau 28 : Synthèse des études sur la réciprocité éducative ........................................... 306

Tableau 29 : La catéchèse et les documents du Concile Vatican II ................................... 318

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xv

Listes des figures

Figure 1 : Processus de recherche-action en spirale ............................................................. 28

Figure 2 : Relation de correspondance entre la révélation et les diverses situations

historiques selon Edward Schillebeckx ........................................................................ 50

Figure 3 : Schéma corrélation en catéchèse Louis Ridez ..................................................... 53

Figure 4 : Corrélation dans la thèse ...................................................................................... 55

Figure 5: Représentation des villes dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila ...................... 76

Figure 6 : Description des pôles de la corrélation .............................................................. 284

Page 16: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

xvi

Listes des graphiques

Graphique 1 : Les baptêmes à la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila de 1991-2009 ............... 86

Graphique 2 : Populations des villes de la région de 1991-2006 ......................................... 87

Graphique 3 : Les sacrements à la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila de 1991-2009 ............ 88

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xvii

Listes des abréviations et des sigles

I) Abréviation des livres bibliques

Ac Actes des Apôtres

Ap Livre de l’Apocalypse

Ex Livre de l’Exode

Ga Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates

Jn Évangile de Jean

LC Évangile de Luc

Mc Évangile de Marc

Mt Évangile de Matthieu

1 Co Première lettre aux Corinthiens

2 Co Deuxième lettre aux Corinthiens

II) Sigles ecclésiaux et documents du Magistère

AECQ Assemblée des évêques catholiques du Québec

AG Décret sur l’activité missionnaire de l’Église, Ad gentes, Vatican II, (7

décembre 1965

CD Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Église, Christus

Dominus,Vatican II, (28 octobre 1965)

CHL Exhortation apostolique, Christifideles laici, Jean-Paul II, (30 décembre

1988.

CT Exhortation apostolique, Catechesi tradendae, Jean-Paul II, (16 octobre

1979).

CEC Catéchisme de l’Église Catholique, (11 octobre 1992).

CELAM Conférence Épiscopale Latino-Américaine et des Caraïbes

CNER Centre national de l’enseignement religieux, France

DCG1971 Directoire Catéchistique Général ( 11 avril 1971)

DGC Directoire général pour la catéchèse, (15 août 1997)

DV Constitution dogmatique sur La Révélation Divine, Dei Verbum, Concile

Œcuménique Vatican II, (18 novembre 1965).

EN Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, Paul VI, 8 décembre 1975.

GS Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps, Gaudium et

spes, Concile œcuménique Vatican II, (7 décembre 2016).

ISPC Institut Supérieur de Pastoral Catéchétique de l’Institut Catholique de Paris

LG Constitution dogmatique sur l’Église, Lumen gentium, Concile œcuménique

Vatican II, (21 novembre 1964).

No Ce sigle indique le numéro dans les documents du Magistère auquel on fait

référence.

PO Décret sur le ministère et la vie des prêtres, Presbyterorum Ordinis, Vatican

II,(7 décembre 1965).

PDV Exhortation apostolique, Pastores Dabo Vobis, Jean-Paul II, 25 mars 1992

Page 18: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

xviii

RICA Rituel d’initiation chrétienne des adultes, Ordo initiationis christianae

adultorum, (6 janvier 1972), dernière édition (26 mai 1996) Éditions

Desclée-Mame 1997.

RM Encyclique, Redemptoris missio, Jean-Paul II, (7 décembre 1990)

VD Exhortation apostolique post-synodale, Verbum Domini, Benoît XVI, 30

septembre 2010

III) Autres sigles et documents

CAFOC Centre académique et de formation continue

Cégep Collège d'enseignement général et professionnel

CERUL Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval

CHSLD Centre d’hébergement et de soins de longue durée

Clé USB Support numérique qui comprend les rapports et les verbatims des rencontres

de la recherche-action

CLSC Centre local des services communautaires

PSC Paroisse Sacré-Coeur

PSJC Paroisse Saint-Jean-de-la-Croix

PSTA Paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

PSTB Paroisse Sainte-Thérèse-de-Blainville

Page 19: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

xix

Dédicace

Pour tous ceux qui ont osent réfléchir, planifier, organiser la catéchèse différemment afin

de constituer une Église où tous ses membres sauront se catéchiser, catéchiser ceux qui

frappent à sa porte, catéchiser ceux qu’elle ira rencontrer en sortie à tous les carrefours de

la vie contemporaine :

Pour la première fois peut-être il nous faut penser pour elle-même, dans

un milieu laïque, hors de l’école chrétienne avec les seules forces de

l’Église, de la communauté chrétienne, une formation religieuse

authentique et efficace. Il s’agit donc, pour l’Église d’organiser son

enseignement proprement religieux avec la même ampleur, avec le même

soin que l’État met à organiser l’enseignement profane.

Joseph Colomb, PSS

Pour un catéchisme efficace, 1956.

Page 20: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

xx

Avant-propos et remerciements

On ne peut pas penser la catéchèse sans l’Église et c’est la même réalité pour l’élaboration

de cette thèse en théologie pratique. Cette thèse est le fruit d’un long pèlerinage. Certes, le

leader c’est l’auteur, mais sans l’appui de ma famille et l’encouragement des paroissiens,

des catéchisés, des parents, des bénévoles, des catéchistes, de l’équipe de recherche-action,

de l’équipe pastorale paroissiale de la paroisse, des autres communautés chrétiennes, de

mes confrères prêtres et du soutien de mon diocèse et de la Compagnie des Prêtres de Saint-

Sulpice, elle n’aura pas été possible.

J’ai parcouru des milliers de kilomètres tout au long du fleuve Saint-Laurent, je ne compte

plus les allers-retours entre le diocèse, le Grand Séminaire de Montréal et l’Université

Laval à Québec. Je tiens à remercier mon directeur de recherche Monsieur l’abbé Alain

Faucher, le doyen de la faculté de théologie Monsieur l’abbé Gilles Routhier et le directeur

du programme en théologie pratique Monsieur l’abbé Yves Guérette et toute l’équipe du

Doctorat en Théologie Pratique qui m’ont accompagné dans cette démarche de recherche et

de créativité. C’est l’espérance dans le renouveau catéchétique partagé, par tant de baptisés,

qui m’a donné la résilience pour réaliser ce travail qui est le fruit des partages et des

solidarités que nous avons vécus ensemble.

Je voudrais aussi dire merci à tous ces gens qui m’ont aidé et sont décédés et ne pourront

voir le résultat final  : Denise, Francine, Gerry… Un grand merci pour ceux qui m’ont aidé

dans les corrections de la thèse  : Johanne, Renée, Marie-Claude, Carole, Gilbert, Marcel,

Stephen, Yves, Christian, Claude, Denis et pour tous les autres…

Encore merci à tous, pour votre solidarité, vos expertises, votre soutien et surtout votre

prière.

Union de prières en la Sainte Trinité source de tout amour.

Guy Guindon, PSS

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1

Introduction

« Écoutez ! Voici que le Semeur sortit pour semer »1. La parabole du Semeur est libératrice

pour tout catéchiste et prêtre qui œuvre en catéchèse. Elle annonce que le Semeur, c’est le

Christ lui-même2. Les différents terreaux représentent les destinataires de la Parole de Dieu,

soit les femmes et les hommes d’aujourd’hui ancrés dans différentes cultures, divers

milieux sociaux, économiques et politiques. Nous pouvons préparer la terre, mais c’est

Dieu qui fait pousser et donne la croissance3.

Cette parabole me rappelle ma jeunesse. Sur la terre de mon oncle, j’ai eu l’opportunité de

vivre une expérience unique. J’ai participé au défrichage d’une parcelle afin de préparer

une terre nouvelle pour l’agriculture. Je me souviens de toutes les étapes que la famille a dû

franchir à cette occasion; nous avons dû travailler fort et sur le long terme afin de

transformer une prucheraie en une prairie cultivable qui aujourd’hui produit des moissons

abondantes. L’abattis s’est développé au cours de l’hiver, avec la joie d’amener les billots

au moulin à scie afin de transformer les troncs en bois de charpente. Au printemps suivant,

les souches ont été enlevées. Comme jeune, j’étais impressionné par la puissance du

bulldozer qui rasait les souches et créait d’immenses tas de racines afin de dégager la

prairie pour la culture. Je croyais à tort que tout était presque prêt pour être semé. C’était

une erreur. Lorsque mon oncle a labouré le sol la première fois, les labours ont fait surgir

des milliers de racines qui l’ont recouvert. Nous avons dû les ramasser une à une afin de

dégager le terrain. Il a fallu herser à trois reprises pour enlever toutes les racines qui étaient

restées enfouies dans le sol avant de réaliser le premier semis. Pendant de longues journées

d’été, avec de grands efforts, nous remplissions des wagons de racines afin de libérer le sol.

Lorsqu’est arrivé le printemps suivant, ce fût le temps des premières semailles. Le semoir, à

son tour, a fait surgir de nouvelles racines que nous avons encore ramassées. La récolte fut

maigre ou mince, le sol avait besoin de matière organique afin d’être plus fertile. C’est suite

à trois autres années d’efforts et après l’épandage de fumier que la nouvelle prairie a pu

donner des rendements satisfaisants et récompenser tous les efforts investis. Mais dans cette

1 Mc 4,3. 2 Église catholique. Congrégation pour le clergé., Directoire général pour la catéchèse (Ottawa: Conférence

des évêques catholiques du Canada, 1997), 15. J’utiliserai l’abréviation DGC pour faire référence à ce

document et le chiffre après l’abréviation correspond au numéro du paragraphe. 3 1 Co 3,9.

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2

expérience, j’ai toujours ressenti la présence d’un mystère. L’aménagement du territoire est

ma responsabilité, mais la croissance des plantes dépend de l’Autre, il y a toujours un

sentiment à la fois de réalisation, d’impuissance et d’émerveillement. Je peux préparer,

transfigurer, améliorer les conditions de cette nouvelle prairie. Pour ce qui est de la

croissance des plantes et le contrôle du climat, cela dépasse ma propre intervention. Cette

expérience forte m’a permis d’approfondir la spiritualité paysanne. Croire que toute

situation peut être changée, transformée tout en acceptant le mystère de la vie, de la foi qui

nous dépasse. Une nouvelle prairie est un chantier en évolution; si on arrête de l’entretenir,

la nature se charge de transformer la prairie neuve en forêt. Rapidement s’effacent tous les

efforts héroïques des pionniers. Cette expérience de jeunesse devient pour moi une analogie

de la pratique pastorale catéchétique actuelle.

Une pratique enracinée à découvrir

La pratique pastorale paroissiale en catéchèse s’exerce dans un contexte semblable. Nous

sommes des ouvriers qui œuvrent au service du Maître qui est Dieu : « Moi, j’ai planté,

Apollos a arrosé; mais c’est Dieu qui donnait la croissance. Donc celui qui plante n’est pas

important, ni celui qui arrose; seul importe celui qui donne la croissance »4. Chaque terre

est différente, il peut même y avoir des changements climatiques qui obligent à transformer

nos méthodes. Mais n’est-ce pas ce qu’a vécu le Québec, une série de changements

religieux, culturels, économiques et sociaux?

L’Église du Québec est entrée depuis plusieurs décennies dans ce travail d’adaptation avec

des succès et des échecs. Elle a vécu plusieurs chantiers dans le domaine de la catéchèse et

de l’éducation religieuse à partir du début des années soixante5.

La pratique catéchétique est exigeante, elle est composée de plusieurs éléments qui

compliquent sa transformation. La catéchèse n’est pas seulement un enseignement

magistral, c’est une activité aussi complexe que de créer une terre nouvelle. Le DGC

4 1 Co 3, 6-7. 5 Secrétariat de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, L'école catholique au Québec : Éphémérides

1964-2007, dir. Assemblée des évêques du Québec (Montréal : Assemblée des évêques du Québec, 2007).

Page 23: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

3

rappelle que l’activité catéchistique est complexe et composée de diverses tâches qui sont

toutes importantes et essentielles :

Les tâches sont toutes nécessaires. Comme l’organisme humain a besoin pour

vivre que tous ses organes fonctionnent, la vie chrétienne, pour atteindre sa

maturité, a besoin que soient cultivées toutes ses dimensions : la connaissance

de la foi, la vie liturgique, la formation morale, la prière, l’appartenance

communautaire, l’esprit missionnaire. Si la catéchèse néglige une seule de ces

dimensions, la foi chrétienne n’atteindra pas son plein développement6.

Le DGC indique que la catéchèse a aussi la mission de promouvoir les droits de l’homme :

la liberté religieuse, le droit au travail, le droit à l’éducation et d’avoir l’opportunité de

créer une famille stable. La catéchèse, c’est œuvrer à aider la croissance humaine,

spirituelle et sociale de tout chrétien adulte :

L’œuvre évangélisatrice de l’Église, dans ce vaste domaine des droits de

l’homme, ne peut renoncer à la tâche de faire découvrir la dignité inaliénable

de toute personne humaine. En un certain sens, « c’est la tâche centrale et

unifiante du service que l’Église, et en elle les fidèles laïcs, est appelée à rendre

à la famille des hommes ». La catéchèse doit les préparer à ce devoir7.

Une pratique en mouvement

La pratique catéchétique a toujours été en mouvement au Québec. Lorsque je débute dans

mon ministère presbytéral en 1984, je suis plongé immédiatement dans une nouvelle

pratique pastorale en paroisse, celle de l’initiation sacramentelle des enfants. Auparavant,

les écoles publiques effectuaient la catéchèse. Les célébrations des sacrements se vivaient

en paroisse avec les familles. Le projet à cette époque propose un nouveau partenariat entre

l’école, la paroisse et la famille. Les évêques demandent de déplacer l’initiation

sacramentelle de l’école à la paroisse avec des catéchèses préparatoires pour les

sacrements. À ce moment, pour l’école publique « trois réalités éducatives se partagent la

6 DGC 87. 7 DGC 19.

Page 24: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

4

formation des jeunes en milieu scolaire : le projet éducatif, l’enseignement religieux et

l’animation pastorale »8. Les paroisses ont comme mission dans ce projet de préparer les

jeunes en leur faisant expérimenter l’initiation sacramentelle par des catéchèses

préparatoires, les célébrations des divers sacrements et accueillir les jeunes dans la vie

paroissiale9. Les paroisses ont investi d’énormes ressources afin d’initier sacramentellement

les jeunes enfants en paroisse. Les parents sont invités à accompagner leurs enfants et à les

insérer dans la vie de la communauté.

Ce chantier a connu plusieurs succès. Il y a eu l’engagement et la formation de centaines

d’agentes et agents pastoraux pour accompagner les jeunes dans les écoles primaires et

faire des liens avec les paroisses. Les prêtres, en lien avec les animatrices de pastorale,

visitaient de trois à cinq fois par année tous les groupes d’élèves. Les enfants prenaient

plaisir aux activités pastorales et les animatrices de pastorale étaient des personnes

ressources appréciées des professeurs et des directions d’école. Les parents, dans la très

grande majorité, après quelques résistances, aimaient cette manière de faire.

Ce modèle prit fin par des décisions d’ordre politique lors de la laïcisation des écoles

publiques. Ce fut le terme de l’animation pastorale et des cours d’enseignement religieux.

L’Église du Québec n’était pas prête à vivre la fin de ce modèle qui portait des fruits ni à

s’engager dans un nouveau chantier alors que la nouvelle pratique commençait à peine à se

stabiliser et à entrer dans la culture catholique des Églises particulières. Le choc a été

brutal. On peut se demander si ce changement n’a pas causé chez plusieurs intervenants

pastoraux un choc post-traumatique. Ce nouveau défi demandait un réinvestissement

majeur à une Église affaiblie par le vieillissement de son personnel et sa lassitude des

nombreux changements de modèle catéchétique depuis les années soixante imposé par les

choix de la société. Jean-Marc Charron, théologien qui est ex-doyen de la Faculté de

théologie à l’Université de Montréal, décrit le contexte de ces nouveaux défis :

8 Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales

(Montréal: L'Assemblée des évêques du Québec, 1983), 10. 9 Idem, 9-10.

Page 25: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

5

Encore une fois, il s’agit pour nous de reprendre en main une responsabilité

que, depuis plus de 20 ans, nous avons abandonnée à l’État. En pratique, cela

signifie se redonner des lieux d’expertise et de formation, reconstruire des

réseaux nationaux d’échange d’expérience, faire travailler ensemble les

catéchètes, les pédagogues et les théologiens. Tout cela demandera du temps,

de la patience et surtout de l’humilité dans la mesure où il nous faut

aujourd’hui faire le deuil des certitudes et des solutions globales en matière

d’éducation de la foi10.

À partir des années 2000, une question se pose : comment faire face à la prochaine grande

mutation de la pratique de la catéchèse en paroisse? Pour répondre à cette question, j’ai fait

appel à mes expériences de recherche. Depuis plusieurs années, je m’étais investi dans la

catéchèse. J’ai participé à la Recherche-action du diocèse de Saint-Jérôme durant les

années 1989-1995. Trois des conclusions de cette recherche étaient pour moi autant de clefs

permettant le renouvellement des pratiques pastorales paroissiales : 1) tenir compte de

l’importance des rapports intergénérationnels; 2) repenser l’initiation chrétienne;

3) reconsidérer l’avenir de la paroisse avec les enjeux socioculturels actuels11.

Mon désir, par la recherche doctorale, c’est de prendre un temps de réflexion pour saisir et

approfondir ma compréhension de cette transformation qui s’enclenche. Le passage de la

préparation aux sacrements à une démarche plus large d’initiation chrétienne est crucial

alors que les paroisses ont des ressources et une expertise limitées. C’est une question vaste

à laquelle j’ai été confronté en 2005, en tant que pasteur de paroisse, quand s’est terminé

l’enseignement religieux catholique dans les écoles publiques. Les évêques catholiques du

Québec ont invité les pasteurs à repenser la catéchèse en paroisse : « Le modèle paroissial

et le lien des chrétiens à la communauté ont besoin d’être repensés selon une nouvelle

vision, mieux ajustée au statut de minorité qui est désormais celui des disciples du Christ

dans une société pluraliste »12.

10 Jean-Marc Charron, « La transmission de la foi au Québec... à l'heure des reconfigurations scolaires,

sociales et ecclésiales, » dans Catéchèse 172 (2003) : 93. 11 Jacques Grand'Maison et al., Le défi des générations : enjeux sociaux et religieux du Québec d'aujourd'hui

: recherche-action, sixième dossier, Cahiers d'études pastorales ; 15 (Saint-Laurent Québec : Fides, 1995),

448-452. 12 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation à

la vie chrétienne (Montréal : Médiaspaul, 2004), 82-83.

Page 26: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

6

C’est à partir de cette réflexion et de cette situation qui me commande de bâtir les premiers

parcours d’initiation chrétienne que m’est venue l’idée de capter cette opportunité de lancer

une recherche-action. J’ai voulu saisir comment il est possible de repenser, refaçonner la

paroisse et la catéchèse pour l’évangélisation des baptisés et des non-croyants. Plusieurs

interpellent la paroisse afin d’approfondir et de découvrir l’héritage d’une tradition

catholique dont de nombreux paroissiens se disent dépositaires. D’autres encore qui

arrivent de tous les horizons ont vécu une expérience spirituelle forte. Ils découvrent

l’amour de Jésus et sont motivés à Le connaître davantage. J’avais, avec la coordonnatrice

paroissiale de l’époque, lors du début de cette recherche, trois convictions :

• La foi s’approfondit par une dynamique intergénérationnelle; c’est pour cela que

l’on demandait la présence d’un adulte significatif pour les jeunes qui s’étaient

inscrits en catéchèse.

• La catéchèse se vit dans une démarche qui prend du temps; on proposait des

parcours sur trois ans.

• L’équipe pastorale devait former les catéchistes bénévoles afin d’animer les

groupes de catéchèse.

C’est avec ces convictions que j’ai entrepris la recherche. Je dois rester vigilant pour ne pas

être à la recherche de solutions prémâchées et parachutées sur la réalité, du prêt-à-porter

pastoral. Ayant le désir de poursuivre mes travaux de recherche dans une dynamique

participative et ayant vu les fruits acquis par l’expérience lors de la Recherche-action du

Diocèse de Saint-Jérôme tout particulièrement dans l’élaboration du rapport « Le drame

spirituel des adolescents », j’ai choisi de vivre une nouvelle recherche-action avec les gens

du milieu13. Dès le début, j’ai accepté de me remettre en question et d’accueillir des

propositions qui pourraient ouvrir de nouvelles perspectives. Mon désir était d’offrir à tous

la possibilité de s’exprimer et de chercher ensemble. J’ai vécu un itinéraire marqué par un

constant va-et-vient entre la pratique, les expériences dans d’autres milieux, les travaux de

13 Jacques Grand'Maison et al., Le drame spirituel des adolescents : profils sociaux et religieux : premier

dossier de la recherche-action du diocèse de Saint-Jérôme (Saint-Laurent, Québec : Fides, 1992).

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plusieurs chercheurs, les apports des sciences sociales et une relecture de la Parole de Dieu

ainsi que des documents du Magistère. Cette dissertation est le fruit de cet itinéraire.

Une thèse en cinq chapitres

Dans le premier chapitre, je présente la méthode de recherche. J’ai choisi de procéder par

une démarche en théologie pratique; j’indique d’abord quels sont les éléments de cette

vaste discipline en théologie qui m’ont inspiré pour conduire la recherche. Parmi toutes les

possibilités de la théologie pratique, j’ai décidé d’utiliser la méthode de la recherche-action.

C’est une méthode qualitative qui permet la participation et la collaboration des gens du

milieu dans le processus de recherche. Cette participation a permis d’ouvrir de nouveaux

horizons. L’équipe de recherche-action s’est investie et a participé pleinement au processus.

La méthode a permis d’objectiver la pratique choisie, de la nommer, d’entrer en dialogue

avec la Parole de Dieu, de mieux connaître l’expérience de plusieurs autres chercheurs et

les travaux d’aggiornamento de la théologie catéchétique par le Magistère depuis le Concile

Vatican II. Cette thèse suit une démarche inductive.

Dans le deuxième chapitre, je présente la première version de l’hypothèse de recherche.

Elle se modifiera ensuite au fil de la démarche. Ce chapitre décrit le contexte et les enjeux

existants au moment d’amorcer la recherche. Pour présenter le travail effectué dans la

démarche préliminaire, je me suis inspiré des six pôles d’observation d’une pratique afin de

nommer la pratique, les enjeux d’évangélisation et plus spécifiquement ceux de la

catéchèse14. Cette observation systématique a conduit à une critique personnelle de ma

pratique et également à une remise en question de l’ecclésiologie du chercheur que je suis,

de celle des intervenants pastoraux et de l’institution. Cette observation m’a permis de

sortir d’un déni institutionnel face aux enjeux catéchétiques actuels. J’ai dû préciser

davantage la question de recherche à partir de l’observation de la pratique.

14 Gilles Raymond, « Les six pôles d'exploitation d'une pratique. La praxéologie pastorale et Thomas H.

Groome, » dans La praxéologie pastorale : Orientations et parcours Tome 1, dir. Jean-Guy Nadeau (Montréal

: Fides, 1987).

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Dans le troisième chapitre, c’est à partir de la première synthèse réalisée à la fin du chapitre

deux que je poursuis la recherche afin de découvrir quels sont les acteurs de la catéchèse et

leurs rôles par deux lectures simultanées, soit une lecture diachronique et une lecture

synchronique. La lecture diachronique m’a permis d’identifier qui sont les acteurs de la

catéchèse dans l’histoire de l’Église. La lecture synchronique permet de comparer des

expériences catéchétiques contemporaines vécues dans quelques pays avec la pratique

analysée. J’ai identifié les similitudes, les différences et les nouveautés de la pratique que je

vivais. La lecture diachronique qui est historique ouvre des horizons en identifiant la variété

des pratiques et des acteurs de la catéchèse. Cette lecture m’a permis de constater comment,

malgré les ruptures historiques vécues par la Révolution Tranquille, nous sommes encore

très attachés, à notre insu, à des manières de faire héritées du Concile de Trente et ce,

malgré notre désir de nous inscrire dans des pratiques contemporaines. La lecture

diachronique permet de nuancer divers types d’orientations catéchétiques comme la

pratique catéchuménale et la catéchèse communautaire. J’ai pu découvrir également

comment a émergé le renouveau catéchétique dans l’Église Catholique et comment il nous

interpelle encore aujourd’hui.

Ces deux lectures permettent de ressaisir que la pratique catéchétique n’est jamais isolée du

monde, même si certains groupes se referment sur eux-mêmes. La catéchèse est toujours en

interaction avec la société. Cela est constitutif de ce qu’elle est. Je décris comment le

contexte dans lequel se vit une pratique est marqué par son milieu et la nécessité d’en tenir

compte afin d’être pertinent pour les contemporains qui vivent des démarches

catéchétiques.

Le quatrième chapitre présente l’analyse des données recueillies lors de la recherche-action.

Dans ce chapitre, j’explique comment, par le travail de l’équipe de recherche-action, ses

interventions sur le terrain, l’hypothèse de départ a volé en éclat. L’équipe de recherche a

réalisé un travail d’approfondissement remarquable. Elle a perçu que l’angle d’attaque

proposé au commencement de la recherche-action était trop limité et que les enjeux de la

pratique étaient différents de la première formulation de l’hypothèse de départ. La

recherche-action a permis d’inclure non seulement les préoccupations des prêtres et des

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agents pastoraux mandatés, mais aussi les apports des enfants, des parents, des catéchistes

et de la communauté célébrante. La recherche qui, au point de départ, se centrait sur la

pratique de quelques experts de l’équipe pastorale, qui forment les catéchistes bénévoles, se

retrouve avec une dynamique complètement inversée. Au lieu de rester dans une

dynamique unilatérale d’enseignement, l’équipe de recherche propose d’impliquer tous les

paroissiens dans l’action catéchétique. Elle se demande si les apports des différents acteurs

ne pourraient pas changer la dynamique de la pratique en soulignant que tous peuvent

participer au renouvellement de la pratique catéchétique. Cette manière différente d’animer

la catéchèse peut-elle ouvrir une nouvelle voie afin de rencontrer de Jésus Christ par un

accès plus démocratique à la Révélation, à la Parole de Dieu et à l’expérience des

catéchisés? Cette démarche peut-elle provoquer un tournant décisif pour le chercheur et

l’équipe de recherche-action? Voilà quelques-unes des interrogations qui seront

approfondies dans ce chapitre.

Dans le cinquième chapitre, j’expose le travail de corrélation théologique entre quatre

éléments. Le premier est l’étude de la pratique qui a été nommée et décrite lors de la

cueillette des données. Le deuxième est le concept de la réciprocité éducative que j’ai

découvert lors de la revue de littérature. Le troisième ce sont les travaux de Denis Villepelet

sur les possibilités catéchétiques dans le monde contemporain. Le quatrième est la réflexion

catéchétique du Magistère dans l’Église après le Concile Vatican II. Cette corrélation met

en dialogue les divers déplacements que la recherche a opérés en moi : la découverte de la

résistance aux changements internes de l’Église face à une catéchèse renouvelée, la peur du

changement institutionnel dans l’Église locale, la découverte des différents rôles des acteurs

de la catéchèse au cours des siècles ainsi que des propositions et expériences dans quelques

régions du monde. Je présente les enjeux de l’appel pressant de l’équipe de recherche-

action, de nombreux catéchistes et des parents de passer du rôle des consommateurs à celui

d’acteurs dans la catéchèse. Le fruit de la recherche est d’identifier l’espoir de nombreux

chrétiens de vivre définitivement le passage de la préparation aux sacrements à la

réciprocité catéchétique.

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Cette recherche m’a amené comme pasteur vers une nouvelle terre. J’ai dû défricher,

essoucher, labourer, herser, nettoyer le sol de la pratique catéchétique pour dégager une

nouvelle prairie prometteuse et féconde afin de permettre au Semeur de semer à nouveau.

La recherche m’a remis en question dans ma manière d’être, de faire et de vivre l’action

catéchétique comme baptisé, prêtre, pasteur et formateur de futurs prêtres. Cette démarche

inductive m’a permis de vivre un cheminement qui apporte un nouveau savoir-faire dans le

débat sur les enjeux de la catéchèse dans notre monde contemporain. Cette recherche a

permis de questionner ma propre pratique dans une sous-discipline de la théologie

pratique : la catéchétique. Elle m’a invité à quitter mon rôle de « technicien qui travaille à

perpétuer le système déjà en place » afin de devenir un leader qui rassemble les forces vives

et élabore une nouvelle pratique pour l’Église d’ici et d’aujourd’hui.

Cette thèse est l’itinéraire d’un pasteur qui décide de façonner un travail en théologie

pratique en s’inscrivant dans une démarche inductive et qualitative en Église tout en

respectant la rigueur de la démarche scientifique. Bonne lecture!

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Chapitre 1 : Origine du projet et méthode de la recherche

Cette recherche étudie une pratique qui est en émergence et qui est inédite pour un milieu.

Le défi d’implanter les parcours catéchétiques est une nouveauté au Québec en 2005. Les

paroisses au Québec n’ont pas cette expertise. Comme le dit Jean-Marc Charron, c’est une

situation nouvelle et les paroisses avaient perdu cette habileté au cours des dernières

décennies au profit de l’école publique15. C’est sur ce défi que veut se pencher cette

recherche. Comment relever ce défi d’implanter la catéchèse en paroisse?

Cette thèse décrit le cheminement théologique et pratique d’un pasteur qui s’interroge sur

les difficultés d’implanter les parcours catéchétiques dans une paroisse du diocèse Saint-

Jérôme après la laïcisation des écoles publiques en l’an 2000 et la fin de l’enseignement

religieux catholique en l’an 200516. Dans ce chapitre, je présente l’itinéraire emprunté et la

méthode utilisée pour réaliser cette recherche.

Pour cette recherche en théologie pratique, j’ai dû me situer comme praticien et comme

chercheur. J’ai participé à diverses recherches comme chercheur. J’ai été un des membres

de la recherche-action du diocèse de Saint-Jérôme qui s’est réalisée au début des années

199017. J’ai complété une maîtrise en praxéologie pastorale à l’Université de Montréal en

199518. J’ai réalisé une licence canonique en catéchèse à l’Institut Supérieur de Pastorale

Catéchétique de l’Institut Catholique de Paris (ISPC) en utilisant la méthode de

l’observation participative19.

Dans un premier temps, je vais faire une courte présentation de la théologie pratique afin de

situer ma méthode de recherche dans l’ensemble de cette sous-discipline de la théologie.

15 Jean-Marc Charron, « La transmission de la foi au Québec... à l'heure des reconfigurations scolaires,

sociales et ecclésiales, ». 16 Comité sur les affaires religieuses, La laïcité scolaire au Québec : Un nécessaire changement de culture

institutionnelle, Avis au ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport (Québec : Ministère de l’Éducation du

Loisir et du Sport, 2006), 1-4. 17 Jacques Grand'Maison et al., Le défi des générations : enjeux sociaux et religieux du Québec d'aujourd'hui

: recherche-action, sixième dossier, 554. 18 Guy Guindon, « Requêtes de ré-initiation chrétienne dans une paroisse de banlieue » (Mémoire maîtrise,

Université de Montréal, 1995). 19 Guy Guindon, « Entre le greffon et le gui : Étude du parcours de formation : L'École de l'Évangile du

diocèse de Saint-Étienne proposé aux jeunes adultes de 18-30 ans. Enjeux anthropologiques et

ecclésiologiques d'une formation. » (Mémoire licence canonique, Institut Catholique de Paris, 1997).

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J’expose la méthode de la recherche-action puis les outils que j’ai utilisés afin de réaliser

cette recherche. Le chemin parcouru n’a pas été statique, il a demandé de la souplesse et

j’ai dû m’adapter tout au long de l’évolution de la démarche.

1. La théologie pratique : ses origines, ses caractéristiques

La théologie pratique se définit comme une discipline de la théologie :

La théologie pratique, c’est cette discipline théologique qui s’occupe de

l’activité par laquelle l’Église se réalise en fait, et doit se réaliser, dans chaque

situation concrète. Elle s’en occupe en éclairant théologiquement la situation

donnée à chaque instant, situation dans laquelle l’Église doit s’accomplir elle-

même dans toutes ses dimensions20.

La reconnaissance de cette discipline est tout de même récente dans le monde catholique.

Les origines de la théologie pratique prennent racine chez les protestants et seront par la

suite empruntées et transformées par les catholiques selon leurs besoins dans différents

contextes et milieux.

1.1 L’événement Schleiermacher

Le Dr Friedrich Schleiermacher, théologien allemand, est considéré comme le père de la

théologie pratique21. Il a permis d’élever la théologie au rang de science. Pour lui, la

théologie est composée de trois éléments qui sont complémentaires et en relation entre eux.

Il compare cet ensemble de trois éléments à un arbre : les racines, le tronc et le feuillage

qu’il appelle communément la couronne. Les racines de l’arbre sont la théologie

philosophique; cette dernière fait appel à la théologie fondamentale. Le tronc de l’arbre est

la théologie historique. La théologie pratique est l’ensemble du feuillage de l’arbre22. Selon

Bernard Kaempf, pour Schleiermacher, la théologie pratique a pour but l’édification de la

20 Karl Rahner, Écrits théologiques ; tome XI Axes théologiques pour demain, traduit par Hélène Bourboulon

(Tours : Desclée De Brouwer/Mane, 1970), 110. 21 Jean-Louis Klein, Schleiermacher Friedrich Daniel Ernst (1768-1834) (2016 [visité le 30 mai 2016]);

accessible à http://www.universalis.fr/encyclopedie/friedrich-daniel-ernst-schleiermacher/. 22 Paul H. Ballard et John Pritchard, Practical theology in action : Christian thinking in the service of church

and society (London : Spck, 1996), 59.

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communauté par ses membres et ses ministres. La théologie pratique est l’art d’exercer le

ministère dans la communauté :

Le but ultime en est l’édification ou la construction de la communauté

(Erbauung), et la tâche de la théologie pratique consiste à élaborer les règles

qui rendent une telle édification ou construction possible. Schleiermacher écrit

encore que ces règles forment une technique en vue de la conservation et de la

perfection de l’Église ou de l’exercice d’une activité réfléchie de la part des

pasteurs23.

Selon lui, Friedrich Schleiermacher estime que la théologie pratique ne peut se réaliser que

si l’on a intégré à la fois la théologie philosophique et la théologie historique. Elle sera

aussi toujours liée à un contexte précis, au pays, à la culture ainsi qu’aux divers courants de

pensée de cette région. La théologie pratique est vue comme une science dans la mesure où

elle peut résoudre des problèmes précis comme le fait une autre science en analysant le

problème, en élaborant une solution et en appliquant le résultat de la recherche pour vérifier

son analyse. Toujours selon Bernard Kaempf, la vision de Friedrich Schleiermacher a

permis de développer une expertise pour la formation des pasteurs et des intervenants dans

son pays, l’Allemagne.

1.2 Théologie pastorale

Friedrich Schleiermacher par ses travaux a donné une notoriété à la théologie pratique dans

sa région. À la même époque se développe dans le monde catholique et protestant toute une

réflexion sur la nécessité de former les ministres. La réflexion théologique sur cette

pratique est appelée théologie pastorale24. Toute cette réflexion est faite afin d’habiliter les

pasteurs, dans le monde protestant, et les prêtres et les religieux, dans le monde catholique,

à être de bons ministres25. Dans le cursus de la théologie, plusieurs cours seront des exposés

23 Bernard Kaempf, « La théologie pratique selon D. F. Schleiermacher, » dans La théologie pratique : Statut

- méthodes perspectives d'avenir, dir. Bernard Reymond et Jean-Michel Sordet (Paris : Beauchesne, 1993),

10. 24 Bernard Kaempf, « Histoire de la théologie pratique, » dans Introduction à la théologie pratique, dir.

Bernard Kaempf (Strasbourg : Presses universitaires de Strasbourg, 1997), 28-29. 25 Marcel Viau, « De la théologie pastorale à la théologie pratique, » dans Précis de théologie pratique :

Deuxième édition augmentée, dir. Gilles Routhier et Marcel Viau (Bruxelles : Lumen Vitae, Montréal :

Novalis, 2004), 42.

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14

sur des éléments pratiques du ministère; on se centrera surtout sur le savoir-faire. James W.

Fowler va jusqu’à affirmer que la théologie pastorale était considérée comme une formation

subalterne, de deuxième ordre, de deuxième main26. On parle d’une formation technique

qui peut, à la limite, être considérée comme universitaire27. La théologie spéculative sera

perçue pour de nombreux théologiens classiques comme la première forme de théologie.

1.2.1 Théologie pastorale catéchétique

En 1950, à Paris, Pierre-André Liégé, théologien français, développe le concept de

théologie pastorale catéchétique à la suite d’une réflexion sur le travail pastoral. Il va être

un pionnier de la théologie de l’évangélisation et de la mission28. Il est un des leaders du

monde catéchétique français et plus particulièrement à l’Institut Supérieur de Pastorale

Catéchétique à Paris. La théologie pastorale catéchétique s’inscrit comme un lieu de

formation pour les ministres et aussi de réflexion sur l’évangélisation du monde moderne

en dialogue avec la culture. On assiste ici à un déplacement : on se centre de plus en plus

sur la question du rapport entre l’évangélisation et la culture. Ce n’est plus exclusivement

une théologie pastorale qui veut former des ministres, mais une théologie qui veut

développer une Église en dialogue avec le monde.

1.2.2 Théologie pratique : une pluralité de définitions et de

méthodes

De 1960 à 1980, à travers le monde, un changement important est apporté dans le

vocabulaire et aussi dans la méthode utilisée en théologie pratique. Le terme « théologie

pastorale » est de moins en moins utilisé; le concept qui articule la théologie et la pratique

dans le monde ecclésial et séculier sera nommé la « théologie pratique ». Les théologiens

des États-Unis, du Québec, de la France, de l’Allemagne, tant chez les catholiques que les

protestants mentionneront la nécessité d’articuler les diverses sciences humaines avec la

26 James W. Fowler, « The Emerging New Shape of Pratical Theology : New Life for Practical Theology, »

Pastoraltheologische Informationen 16 (1996): 206. 27 Marc Donzé, « La théologie pratique entre corrélation et prophétie, » dans Pratique et théologie, dir. Pierre

Gisel (Genève : Labor et Fides, 1989), 183. 28 Pierre-André Liégé, « Pour une théologie pastorale catéchétique, » dans Revue des sciences philosophiques

et théologiques 39, no. 1 (1995) : 17.

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15

théologie. La théologie pratique, comme le soulignent James Fowler et Jacques Audinet,

s’ouvre aux laïcs29. Paul M. Zulehner relèvera un autre déplacement : « la réflexion

théologique dans ce domaine touchera autant les pratiques intraecclésiales que les pratiques

des chrétiens dans le monde séculier »30. Cette expression « théologie pratique » va de plus

en plus s’imposer et sera considérée dans le monde catholique comme un synonyme de la

théologie pastorale :

L’étude d’une véritable discipline théologique est donc nécessaire : la théologie

pastorale ou pratique, réflexion scientifique sur l’Église qui se construit chaque

jour, avec la force de l’Esprit, au cours de l’histoire, donc sur l’Église comme

« Sacrement universel de salut », comme signe et instrument vivant du salut de

Jésus Christ dans la Parole, dans les sacrements et dans le service de la

charité31.

1.2.3 Marcel Viau

Marcel Viau est un des leaders de la théologie pratique dans la région de Québec. Il a

produit plusieurs articles et livres sur le sujet32. Pour définir la théologie pratique, il utilise

une démarche en trois temps. Il commence, dans un premier temps, par expliquer ce qu’est

pour lui la théologie, dans un deuxième temps, ce qu’est une pratique et, dans un troisième

temps, la théologie pratique. Donc, pour Marcel Viau, la théologie pratique est une

démarche complexe qui conduit à la production d’un discours cohérent et suivi. Il appelle

cette production d’un discours « artefact théologique »33. Cet artefact est le fruit de

l’observation de faits et d’événements qui, par la suite, est interprété à la lumière de la foi

chrétienne dans une démarche herméneutique afin de proposer des pistes d’action pour les

gens d’aujourd’hui :

29 Jacques Audinet, Écrits de théologie pratique, Théologies pratiques (Outremont ; Novalis, Paris : Cerf

Bruxelles : Lumen vitae, Genève : Labor et Fides, 1995), 242. 30 Paul M. Zulehner, « Théologie pratique, » dans Nouveau dictionnaire de théologie, dir. Peter Eicher (Paris :

Cerf, 1996), 1019. 31 Jean-Paul II, Église catholique, Je vous donnerai des pasteurs : Exhortation apostolique post-synodale

Pastores dabo vobis de sa sainteté Jean-Paul II sur la formation des prêtres dans les circonstances actuelles,

Fides éd. (Cap-Saint-Igance, Québec: Fides, 1992). L’abréviation PDV fait référence à l’exhortation

apostolique Pastores dabo vobis. J’indique le numéro de paragraphe par cette abréviation no 57. 32 Marcel Viau, Introduction aux études pastorales (Montréal : Paulines, Paris: Médiaspaul, 1987). 33 Marcel Viau, « De la théologie pastorale à la théologie pratique », 47.

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16

Un des principaux objectifs des disciplines théologiques consiste à rendre

compte de la situation particulière du christianisme contemporain tout en

proposant des solutions adaptées aux pratiques humaines actuelles34.

La pratique apparaît pour Marcel Viau comme un système d’actions et d’interactions liées

entre elles avec leurs règles propres dans un contexte précis et qui s’influencent

mutuellement. Il ajoute que les pratiques d’intervention chrétienne sont des actions pensées

et articulées en Église afin de promouvoir une démarche humaine de libération.

Marcel Viau affirme que la théologie pratique consiste à produire un artefact théologique.

Ce discours s’élabore à partir des pratiques des baptisés et des intervenants. Ceux-ci

interprètent leurs situations de vie en utilisant divers outils : la Parole de Dieu, la Tradition,

l’histoire et les sciences humaines. Ils élaborent un discours théologique qui décrit, analyse,

discerne et propose des pistes de « Salut » individuel et ecclésial. La théologie pratique est

une démarche pluridisciplinaire qui fait appel à divers champs et méthodes. L’expertise des

diverses sciences sociales comme la sociologie, la psychologie et l’éthique est utilisée.

1.2.4 La Faculté de théologie de l’Université de Montréal

C’est à l’Université de Montréal que l’on a développé la « praxéologie pastorale », un

champ d’activité de la théologie pratique. La praxéologie pastorale est une démarche de

théologie pratique en plusieurs étapes. Elle analyse les pratiques sociales ou ecclésiales.

Elle utilise des grilles d’analyse empruntées aux sciences humaines afin de produire un

discours théologique. Elle a pour but de former des intervenants qui recherchent des pistes

de solutions à différents problèmes sociaux et ecclésiaux. Je laisse à André Beauregard le

soin de présenter cette démarche35. C’est une méthode proposée en quatre étapes :

1. Observation

i. Une première observation spontanée, le premier regard

ii. Une deuxième observation systématisée avec l’aide d’instruments

34 Idem, 42. 35 André Beauregard, « La pastorale a aussi ses lois : encore fait-il les connaître, » dans La praxéologie

pastorale : orientations et parcours, dir. Jean-Guy Nadeau (Montréal : Fides, 1987), 33-40.

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17

2. L’interprétation

i. Cinq traits de l’interprétation

1. La relation à Dieu

2. Signifiance

3. Identité des acteurs

4. Les relations entre individus et dans la vie ecclésiale

5. La dimension éthique

ii. Problématisation vis-à-vis de la pratique

iii. Hypothèse de recherche

iv. Formulation du discours

v. Distance critique face au discours

3. Intervention

4. Prospective

Cette méthode se veut un moyen pour perfectionner les interventions des acteurs. Le

discours théologique se produit par une mise à l’épreuve de l’interprétation de la pratique

en vérifiant sa pertinence sur le terrain. L’écueil possible de cette méthode est de rester trop

près de la pratique en se centrant davantage sur un objectif d’efficacité immédiat et perdre

ainsi la distance critique nécessaire face à des situations complexes qui appellent un regard

et une interprétation nouvelle. Le défi est de faire dialoguer théologiquement la pratique, la

Parole de Dieu, l’apport des sciences humaines, la culture. Le but est la production d’un

discours théologique et la proposition d’une action libératrice à la suite du Christ. Voici

comment Jean-Guy Nadeau, un des premiers promoteurs de cette démarche, la décrit :

s

La praxéologie pastorale s’identifie comme une approche herméneutique des

pratiques chrétiennes, visant à intégrer analyse empirique et discours critique.

Science de l’action sensée, elle vise à faire émerger à la conscience la réalité

et le discours d’une pratique particulière pour les confronter à ses porteurs et

à ses référents, de façon à rendre cette pratique plus consciente de son

langage, de ses modes et de ses enjeux en vue d’accroître sa pertinence et son

efficacité, son service ou son coefficient de libération36.

1.2.5 Marc Donzé

Marc Donzé est prêtre, docteur en théologie et professeur en théologie pastorale de 1986

à1997 à l’Université de Fribourg. Dans sa définition de la théologie pratique, il insiste sur

36 Jean-Guy Nadeau, « La praxéologie pastorale : faire théologie selon un paradigme praxéologique, » dans

Théologiques 1, no. 1 (1993) : 80.

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la dimension de la médiation de l’Église dans le monde actuel. Il élargit sa définition en

parlant des quatre axes de l’action de l’Église qui recoupent ce que Marcel Viau identifie

comme les quatre actes fondateurs de la théologie :

Tableau 1 : Quatre actes fondateurs de la théologie pratique

Quatre axes de l’action de l’Église

selon Marc Donzé37

Quatre actes fondateurs

de la théologie pratique

selon Marcel Viau38

Martyria : témoignage et annonce de la

Parole

Proclamer : pédagogie religieuse, catéchèse

aux adultes, homilétique, communication

Leitourgia : prière, Eucharistie et vie

sacramentelle

Célébrer : culte, rituel, liturgie

Diakonia : service des pauvres et justice Soutenir : entraide, action sociale,

transformation

Koinõnia : service de la communion et

œcuménisme

Édifier : croissance personnelle,

accompagnement spirituel, développement

des communautés

Un élément original dans la définition de Marc Donzé est qu’il indique que la théologie

pratique a pour but le développement humain et spirituel non pas seulement des individus,

mais aussi des communautés. Il indique qu’il y a une corrélation nécessaire entre la

pratique et les référents utilisés pour la réflexion théologique, comme l’événement de la

Mort-Résurrection du Christ, la Parole de Dieu et la Tradition. La pratique et les référents

s’éclairent mutuellement dans une interaction afin de constituer un discours critique qui

propose des avenues de transformation de la vie des chrétiens et des communautés. Dans un

autre article, Marc Donzé propose une méthode ou une démarche en théologie pratique qui

s’inspire de la technique de la corrélation39. Voici comment il décrit cette méthode :

La méthode qui me paraît la plus adéquate est celle d’une corrélation critique

entre la réalité de la pratique ecclésiale et ses référents (dans l’ordre : le Christ,

l’Évangile, la Tradition), une corrélation qu’il ne faut pas concevoir dans un

37 Marc Donzé, « Objectifs et tâches de la théologie pratique » dans Revue des sciences religieuses 69, no 3

(1995): 295. 38 Marcel Viau, « Les actes fondateurs de la théologie pratique, » dans Précis de théologie pratique, dir.

Gilles Routhier et Marcel Viau, Théologies pratiques (Montréal : Novalis, Bruxelles : Lumen Vitae, 2004),

246. 39 Marc Donzé, « La théologie pratique entre corrélation et prophétie » dans Pratique et théologie, 183-190.

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système de questions-réponses, au sens où la pratique questionnerait et le

monde de la référence répondrait, mais comme une interaction constante entre

les requêtes du temps présent, les pratiques du peuple de chrétiens et les

références fondatrices40.

Il présente cette démarche de théologie pratique en cinq étapes. Ces étapes ne sont pas

vécues nécessairement l’une après l’autre, mais sont cinq moments qui s’interpellent tout

au long de la démarche. Cette démarche se veut aussi interdisciplinaire. Elle fait appel à

d’autres disciplines dans le monde des sciences sociales et aussi aux différentes disciplines

de la théologie. Elles entrent en dialogue, se questionnent, s’interpellent et découvrent de

nouvelles pistes pour les pratiques et une nouvelle compréhension de la réalité dans chacun

des différents champs épistémologiques. Voici les cinq étapes de cette démarche :

1. Phase préliminaire. C’est la perception des expériences pastorales, du

positionnement de l’Église dans le monde et des questions que cela pose.

2. Phase d’analyse. C’est l’analyse sociothéologique des expériences pratiques,

dont la situation de l’Église, du monde (et du pasteur) qui commande que l’on

fasse une étude approfondie.

3. Phase de corrélation. C’est la mise en relation critique réciproque des données

de l’analyse avec les données de la Révélation, de la Tradition et de l’Histoire.

4. Phase de projet. C’est l’élaboration de scénarios pour un agir pastoral renouvelé,

lesquels peuvent servir à une prise de décision, pour que l’Église soit au vrai

plus évangélique et plus prophétique.

5. Phase de vérification. C’est la lecture de la pratique, dont le renouvellement a

été pensé et décidé, pour percevoir la pertinence de tout le processus de

réflexion et de l’action renouvelée41.

L’objectif de la théologie pratique est de devenir un carrefour, bien sûr complexe, de points

de vue qui permettent une critique des différentes pratiques, une interpellation de la

théologie et des sciences sociales qui aide à nommer un nouveau savoir et qui ouvre des

portes pour une pratique pastorale renouvelée.

40 Idem, 185. 41 Idem, 187-188.

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20

1.2.6 James Newton Poling

James Newton Poling est théologien et professeur émérite du Garrett-Evangelical

Theological Seminary à Evanston en Illinois. Le point de départ de la théologie pratique de

James N. Poling est présenté par les pratiques vécues par les individus et les

communautés42. Ces pratiques font l’objet d’une analyse critique qui est un va-et-vient

entre la réflexion et les pratiques elles-mêmes. L’analyse se fait par une corrélation entre

les différentes disciplines théologiques et les sciences sociales. Dans sa définition, James N.

Poling ajoute la nécessité du discernement herméneutique. Il utilise l’expression « everyday

guidelines and skills » pour souligner que ce travail n’est jamais accompli de manière

définitive. La théologie pratique est une dynamique de transformation des individus et des

communautés. Cette idée est également présente chez James Fowler qui est un psychologue

et théologien méthodiste aux États-Unis qui a vécu de 1949 à 2015. Autant James Fowler

que James N. Poling exercent un déplacement dans leur perception de la théologie pratique.

Pour eux, elle ne s’adresse pas seulement aux pasteurs, mais à toute la communauté qui

continue son pèlerinage sur la terre. Dans sa définition, il y a un élément eschatologique. La

théologie pratique est comme un lieu de discernement des appels de l’Esprit Saint qui guide

l’Église et les chrétiens. Ce discernement est une tâche qui n’est jamais définitive. James N.

Poling décrit la méthode en théologie pratique en sept étapes. Cette démarche est semblable

à celle d’autres écoles des États-Unis, d’Angleterre et aux méthodes utilisées au Canada.

Voici une description systématique du cheminement qu’il propose :

• Description de la pratique

• Identification des intérêts et des divers enjeux des individus et des groupes

en présence de la pratique et discernement des impacts sur chacun

• Corrélation de la pratique avec la culture et la tradition chrétienne, l’aspect

herméneutique

• Interprétation selon les éléments recueillis, aussi selon la vie et la tradition

de la communauté

42 James Newton Poling et Donald Eugene Miller, Foundations for a practical theology of ministry (Nashville

: Abingdon Press, 1985).

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21

• Critique de l’interprétation

• Ligne directrice et propositions pour la pratique étudiée43.

James N. Poling attache une grande importance à la première étape, celle de la description

de la pratique. Il propose une approche holistique avec plusieurs points de repère : l’histoire

personnelle, les relations interpersonnelles, les groupes d’intérêts, les réseaux en présence,

la culture, les sous-cultures, le genre, les pratiques minoritaires ou majoritaires. Il insiste

pour souligner que chaque pratique est particulière et marquée par une tradition qui lui est

propre. Il indique que l’un des buts de la théologie pratique est la formation des personnes

et des communautés44.

1.2.7 Exhortation apostolique « Pastores Dabo Vobis »

Le développement de la théologie pratique se poursuit et, dans l’Église Catholique, celle-ci

est maintenant devenue un des aspects de la formation des futurs prêtres. Elle est vue

comme la discipline théologique qui permet un discernement ecclésial sur les situations

complexes du monde contemporain :

L’étude d’une véritable discipline théologique est donc nécessaire : la théologie

pastorale ou pratique, réflexion scientifique sur l’Église qui se construit chaque

jour, avec la force de l’Esprit, au cours de l’histoire, donc sur l’Église comme

«sacrement universel de salut » (180), comme signe et instrument vivant du

salut de Jésus Christ dans la Parole, dans les sacrements et dans le service de la

charité. La pastorale n’est pas seulement un art ni un ensemble d’exhortations,

d’expériences, de recettes; elle possède sa pleine dignité théologique, parce

qu’elle reçoit de la foi les principes de l’action pastorale de l’Église dans

l’histoire, d’une Église qui « engendre » tous les jours l’Église elle-même,

selon l’heureuse expression de saint Bède le Vénérable : « Nam et Ecclesia

quotidie gignit Ecclesiam » (181). Parmi ces principes et ces critères, il y a

celui, particulièrement important, du discernement évangélique de la situation

socioculturelle et ecclésiale dans laquelle se développe l’action pastorale45.

43 Idem, 62-69. 44 Ibid. 45 PDV, 57.

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1.2.8 La théologie pratique : situation actuelle

Ce survol fait émerger plusieurs constantes. Bien que récente, la théologie pratique est le

résultat d’une recherche continue, effectuée par de nombreux de théologiens et praticiens

dans les différentes régions du monde. Ces derniers ont le souci d’interpréter le message de

l’Évangile afin que leurs concitoyens puissent découvrir la force du message de Jésus

Christ.

La théologie pratique n’est pas un domaine de recherche uniforme. Elle se transforme selon

les antécédents historiques, les situations culturelles et les défis géographiques qui

l’entourent. Les points communs de ses diverses formes sont l’événement fondateur du

christianisme ainsi que son désir de s’adresser aux êtres humains dans le présent et

d’apporter une dynamique de libération par l’événement de la Mort-Résurrection du

Christ46. Une autre caractéristique est son ouverture au dialogue avec plusieurs sciences :

l’histoire, la philosophie, les sciences humaines et même les sciences pures.

La théologie pratique fait le pari que la pratique peut nous permettre de discerner l’action

de l’Esprit Saint agissant dans le monde. Les pratiques sont des mines ou des sources de

significations qui permettent aux théologiens d’actualiser la Parole de Dieu. C’est aussi le

développement d’une théologie inductive qui part de pratiques afin de réfléchir et de

constituer un discours théologique à la lumière de la Révélation. Voici ce que Jean-Guy

Nadeau affirme à ce sujet :

On reconnaîtra aisément qu’une théologie ne saurait se limiter à la pratique des

humains. Elle doit s’intéresser à l’agir divin. Par ailleurs, cet agir est déjà

l’objet de la théologie systématique qui le thématise, par exemple, en termes de

révélation, de création et de salut. Devant ce fait, la théologie pratique

s’intéressera plus spécifiquement à reconnaître l’agir divin à travers les

pratiques des humains comme le fait, par exemple, le Nouveau Testament tant

à travers les Évangiles qu’on lit aujourd’hui comme pratique de Jésus qu’à

travers les Actes des apôtres (praxeis apostolôn). C’est pourquoi la théologie

46 Karl Rahner, « Problèmes de théologie pratique, » dans Écrits théologiques Tome XI (Tours : Desclée de

Brower, Mame, 1970).

Jean-Guy Nadeau, « Une méthodologie empirico-herméneutique, » dans Précis de théologie pratique ;

Deuxième édition, dir. Gilles Routhier et Marcel Viau (Montréal : Novalis, Bruxelles : Lumen Vitae, Paris :

Les Éditions de l'Atelier, 2007).

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pratique se construit aujourd’hui comme une discipline théologique déterminée

par un rapport empirico-herméneutique à la pratique, particulièrement, mais

non exclusivement à la pratique des croyants. Son défi est de mettre à jour les

articulations entre la pratique divine et la pratique humaine du salut (ou du

contre-salut)47.

La théologie pratique prend le pari de renouveler le discours théologique à partir des

diverses pratiques qui viennent féconder la compréhension de la Révélation. Elle crée un

nouveau discours adapté au langage culturel d’aujourd’hui afin de proposer des pistes de

renouvellement des diverses pratiques chrétiennes dans les champs ecclésiaux et sociaux et

d’avoir un apport d’humanisation et de sanctification du monde contemporain.

1.3 La recherche-action en théologie pratique

La théologie pratique, selon moi, consiste en l’élaboration d’un discours théologique. Elle

utilise une pratique chrétienne d’une communauté ou la pratique d’un croyant qu’elle met

en corrélation avec son expérience pastorale, avec la Tradition, les sciences humaines, la

vie de la communauté chrétienne et la société dans laquelle se vit la pratique. Cette

interaction que l’on peut nommer interdisciplinarité permet de nommer de nouvelles

connaissances, d’évaluer les pratiques actuelles, d’identifier les écarts entre la culture et la

vie de foi. Elle propose des pistes nouvelles d’actions individuelles, communautaires et

ecclésiales pour une nouvelle évangélisation dans une dynamique de transformation de

l’Église et de la société. La théologie pratique peut m’aider à répondre à mon

questionnement sur la manière d’implanter la catéchèse en paroisse. Pour ce faire, je suis

une démarche dialogique entre quatre éléments : la pratique, la Parole de Dieu, les sciences

humaines et l’apport de théologiens.

La démarche que je présente dans cette thèse est un va-et-vient entre les différentes étapes

que j’énumère. Mon choix de méthode s’inspire de mon expérience dans la recherche-

action du diocèse de Saint-Jérôme, des travaux sur la praxéologie pastorale de l’Université

de Montréal, des travaux de Marc Donzé, de James N. Poling, de Louisette Lavoie et des

47 Jean-Guy Nadeau, « La pratique comme lieu de la théologie pratique, » dans Laval théologique et

philosophique 60, no 2 (2004), 207.

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échanges lors des études que j’ai suivies à l’Institut Supérieur de Pastorale Catéchétique de

Paris (ISPC) et à la Faculté de Théologie et de Sciences Religieuses de l’Université Laval

dans le programme de théologie pratique48. C’est à partir de ces expériences et du choix de

la pratique étudiée que j’ai opté pour la méthode de la recherche-action en théologie

pratique.

1.3.1 Ses origines et son fondement

La recherche-action est née de la nécessité de dépasser les travaux scientifiques en

laboratoire. Elle veut permettre aux différents acteurs des pratiques de façonner un apport à

la recherche et ainsi développer de nouvelles connaissances. Marcel Viau décrit ainsi

l’originalité de la recherche-action :

En somme, la recherche-action est originale à plusieurs égards; elle tend à

réduire la distance entre théorie et pratique, sur le plan méthodologique, de

deux façons principales : 1) en incitant la recherche à sortir du cadre étroit du

laboratoire où les problèmes s’analysent « in vitro », pour étudier de l’intérieur

(« in vivo ») les situations sociales sur le terrain même où celles-ci se

produisent; 2) en favorisant le rapprochement et même l’étroite collaboration

entre le chercheur et les acteurs de la recherche par un processus où

l’implication du chercheur et la participation font partie intégrante de l’étude49.

La recherche-action par l’apport des sciences humaines permet d’ouvrir la dimension

scientifique au-delà de son cadre traditionnel. Gabriel Goyette et Michelle Lessard-Hébert

décrivent les différentes finalités, fondements et outils méthodologiques de la recherche-

action :

Nous avons ensuite précisé une problématique à partir de quatre finalités ou

fonctions pouvant être attribuées à la recherche-action :

1) une fonction de construction de la connaissance;

2) un rôle critique face à la science dite traditionnelle;

3) une fonction de changement social;

48 Louisette Lavoie est docteure et professeure au Département des sciences de l’éducation de l’Université du

Québec à Trois-Rivières. 49 Marcel Viau, Introduction aux études pastorales, 107-108.

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4) une fonction de formation50.

La recherche-action permet, par la participation des acteurs de la pratique, de nommer

l’action de Dieu dans la vie actuelle, d’identifier les éléments qui pourraient être changés et

transformés afin de correspondre davantage aux objectifs désirés. Michel Liu rappelle que

la recherche-action est une méthode qui permet à la fois une recherche fondamentale et

l’identification de pistes pour l’amélioration de la pratique :

La richesse de la recherche-action est précisément de pouvoir être à la fois une

méthode de recherche fondamentale, une démarche participative de

changement et une voie de remises en cause radicale d’une institution par ses

membres. Ce sont ces dimensions multiples qui permettent à la recherche-

action de se développer et qui lui donnent le potentiel lui permettant d’évoluer

et de produire les résultats51.

Il y a deux grandes motivations qui m’ont aidé à faire le choix de cette méthode de

recherche. La première motivation est liée aux acquis méthodologiques que j’ai pu

développer au cours des dernières années. Ma deuxième motivation est liée au choix de

mon sujet de recherche. J’espère, par la recherche-action, développer une expertise

personnelle et aussi transformer la communauté où je travaille afin qu’elle puisse être plus

évangélique. La méthode de la recherche-action offre cette possibilité d’aider à planifier et

à effectuer un changement afin de répondre à un nouveau défi.

La recherche-action est une méthode qualitative qui est récente et qui a été développée dans

les domaines de l’ethnologie, de l’éducation et de la psychologie. C’est une méthode qui a

des approches variées et qui s’adapte à la fois au contexte et aux besoins du chercheur. Elle

a comme axiome que le chercheur est un intervenant dans la démarche de recherche qui

s’associe avec les gens du milieu dans lequel il intervient. Elle a plusieurs objectifs : décrire

une situation, comprendre une pratique, évaluer un besoin précis, proposer une intervention

adaptée, expérimenter la solution proposée, évaluer l’intervention, évaluer les conséquences

50 Gabriel Goyette et Michelle Lessard-Hébert, La recherche-action : ses fonctions, ses fondements et son

instrumentation (Sillery, Québec : Presses de l'Université du Québec, 1987), 17. 51 Michel Liu, Fondements et pratiques de la recherche-action, Logiques sociales (Paris Montréal : Éd.

l'Harmattan, 1997), 39.

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de l’action et proposer une interprétation de l’action entreprise. La recherche-action, par

son aspect dynamique, produit des connaissances nouvelles par le mouvement de va-et-

vient que le chercheur expérimente entre la réflexion et l’action.

1.3.2 Définition retenue

Dans les différentes lectures que j’ai effectuées, j’ai pu noter quelques définitions qui m’ont

aidé dans ma réflexion et dans la préparation de mon action sur le terrain. J’ai choisi la

définition du groupe de Louisette Lavoie. Cette définition, pour moi, est la plus exhaustive

et elle est aussi plus proche de ce que je veux réaliser dans ma recherche :

La recherche-action est une approche de recherche à caractère social, associée

à une stratégie d’intervention et qui évolue dans un contexte dynamique. Elle

est fondée sur la conviction que la recherche et l’action peuvent être réunies.

Selon sa préoccupation, la recherche-action peut avoir comme buts le

changement, la compréhension des pratiques, l’évaluation, la résolution de

problèmes, la production de connaissances ou l’amélioration d’une situation

donnée. La recherche-action doit : avoir pour origine des besoins sociaux réels,

être menée en milieu naturel de vie, mettre à contribution tous les participants à

tous les niveaux, être flexible (s’ajuster et progresser selon les événements),

établir une communication systématique entre les participants et s’auto évaluer

tout au long du processus. Elle est empirique et elle est en lien dynamique avec

le vécu. Elle a un design novateur et une forme de gestion collective où le

chercheur est aussi acteur et où l’acteur est aussi chercheur52.

Cette définition est proche aussi de celle des travaux d’André Dolbec qui présente la

recherche- action comme une méthode qui peut provoquer et stimuler le changement :

On pourrait considérer la recherche-action comme étant un système

d’activités humaines qui vise à faire émerger un processus collaboratif

dans le but de produire un changement dans le monde réel53.

52 Louisette Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation (Sainte-Foy,

Québec : Presses de l'Université du Québec, 1996), 41. 53 André Dolbec, « La recherche-action, » dans Recherche sociale : de la problématique à la collecte des

données, dir. Benoît Gauthier (Sainte-Foy : Presses de l'Université du Québec, 2003) : 527. Les caractères gras de la citation sont de l’auteur.

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La recherche-action demande au chercheur de s’investir dans le milieu d’intervention

comme un acteur, de demander la collaboration de personnes impliquées sur le terrain

comme co-chercheurs. Dans une dynamique d’échanges et de partages mutuels, l’équipe

recueillera des données pour les analyser, proposer une intervention afin de répondre aux

besoins ou relever le défi identifié. L’équipe vérifiera l’impact de cette action dans le

milieu et ensuite proposera une autre action selon les résultats recueillis. Procéder en équipe

et dialoguer sur le défi à relever dans ce type de méthode suscite l’élaboration d’un

nouveau savoir ainsi que la formation de l’équipe de chercheurs et provoque par le fait

même un changement dans le milieu.

Il y a plusieurs types de recherche-action. Plusieurs auteurs comme le groupe de Louisette

Lavoie proposent différentes typologies. Le modèle proposé par ce groupe présente une

démarche en spirale qui permet, par des cycles successifs, d’arriver à résoudre le problème.

Voici comment ce groupe présente la mise en œuvre de la recherche-action :

La démarche à entreprendre comprend donc une étape préalable à réaliser

individuellement et cinq grandes étapes à vivre en groupe. Ces étapes sont les

suivantes :

Étape préalable

Étape 1 - Réflexion initiale

Étape 2 - Précision du problème et de son contexte

Étape 3 - Planification de l’action

Étape 4 - Action et observation

Étape 5 - Évaluation et prise de décision54.

Ces étapes sont à reprendre à plusieurs reprises, ce qui visuellement pourrait donner

l’image d’un escalier en colimaçon pour arriver à la résolution du ou des problèmes. C’est

cette méthode qui sera mon modèle de base pour ma recherche tout en sachant qu’il y aura

des adaptations à apporter au fil du processus.

54 Louisette Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation, 187.

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Louisette Lavoie et ses collaborateurs présentent visuellement la démarche de la recherche-

action comme une spirale55.

Figure 1 : Processus de recherche-action en spirale

La recherche-action est une dynamique ouverte. Elle se modifie selon les besoins et les

découvertes dans son processus. C’est au fur et à mesure de ces cycles qu’elle s’oriente :

« Dans une recherche-action, le cadre de réflexion fondé sur les théories et l’expérience est

nécessairement ouvert. Il s’enrichit, se précise ou se transforme au fur et à mesure que les

cycles de planification-action-réflexion se succèdent »56.

55 Ibid. 56 Mario Roy, Ph.D. et Paul Prévost, Ph.D., « La recherche-action : origines, caractéristiques et implications

de son utilisation dans les sciences de la gestion, » Recherches qualitatives 32, no. 2 (2013) : 135.

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1.3.3 Objectifs poursuivis par la recherche-action

La recherche-action comporte plusieurs avantages. Le fait que le chercheur soit impliqué et

travaille avec les gens du terrain permet d’atteindre plusieurs objectifs qui sont communs à

l’ensemble du groupe impliqué. La recherche-action permet d’atteindre quatre grands

objectifs qui sont en interrelation les uns avec les autres. Ces objectifs ont été communiqués

à l’équipe de recherche-action57.

Recherche

La recherche-action permet de développer de nouvelles connaissances par le travail

d’observation, de proposition de nouvelles actions et d’interprétation des données

recueillies58. C’est plus qu’une simple cueillette, c’est aussi la production d’un nouveau

savoir à partir du va-et-vient entre la pratique et la réflexion.

Action

La recherche-action est une méthode qui permet aux différents acteurs de vérifier leurs

réflexions par l’action59. Les gens font un premier diagnostic et ensuite proposent des

solutions alternatives et réalisent les plans élaborés. L’action et l’intervention sur le terrain

sont le laboratoire de cette méthode.

Formation

Le processus en cinq étapes est un outil de formation pour les personnes qui participent à la

recherche-action. Elle permet l’acquisition de nouvelles connaissances par l’implantation

de nouvelles actions, elle stimule l’acquisition de nouvelles habiletés et permet une

intégration d’un nouveau savoir par l’évaluation. C’est en sorte un genre de formation

continue60.

57 Annexe 2. 58 Michel Liu, Fondements et pratiques de la recherche-action, 21. 59 Marcel Viau, Introduction aux études pastorales, 111. 60 Gabriel Goyette et Michelle Lessard-Hébert, La recherche-action : ses fonctions, ses fondements et son

instrumentation, 94.

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Transformation

Par l’autoévaluation présente dans le processus et par la proposition de nouvelles pistes

d’interventions, le milieu se transforme61. Le but de la recherche-action est de transformer

le milieu :

Rappelons enfin que la recherche-action a pour objectif de développer la

connaissance, d’améliorer ou de mieux articuler les pratiques éducatives ou

sociales. Elle se propose également de modifier le système auquel

appartiennent les personnes concernées62.

1.3.4 Démarche proposée pour la thèse

Par la méthode de la recherche-action, j’ai pu constituer une équipe de recherche qui m’a

permis d’approfondir, de creuser et de trouver des éléments de réponses à l’hypothèse de

départ. Je peux identifier huit étapes dans ma démarche de recherche en théologie pratique.

Je les nomme et j’explique en quoi elles consistent :

1. Phase préliminaire

2. Formulation de l’hypothèse de départ et description de la pratique

3. Constitution de l’équipe de recherche

4. État de la question

5. Reformulation de l’hypothèse et planification de l’action

6. Phase d’analyse de la cueillette des données

7. Corrélation

8. Prospective

1.3.4.1 Phase préliminaire

Cette étape est le point de départ de la recherche, elle comporte trois stades. C’est l’étape

où le chercheur est invité à se situer et à décrire les premiers enjeux qu’il perçoit de la

61 Idem, 80. 62 Louisette Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation, 185.

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pratique choisie pour la recherche, le fait d’écrire constitue une première prise de distance

afin d’objectiver sa pensée. L’objectivation par l’écriture de l’intuition de départ permet de

la nommer, décrire son évolution et de constater ses déplacements au cours de la recherche.

L’objectif de cette étape est d’identifier le chercheur, le sujet de la recherche et les

motivations du chercheur. C’est aussi l’occasion de décrire la pratique et découvrir les

enjeux qui pointent afin de délimiter le champ de recherche.

1.3.4.2 Formulation de l’hypothèse de départ et description

de la pratique

Toute recherche a comme point de départ une intuition. Il y a un défi à relever, une pratique

qui interpelle. C’est une idée complexe qui demande à être nommée, puis à être vérifiée par

un processus objectif avec l’aide d’instruments reconnus et utilisables par d’autres

intervenants pastoraux. La pratique choisie peut être vaste et suscite plusieurs questions de

recherche. Le fait d’écrire permet au chercheur de préciser sa question de recherche afin de

pouvoir entreprendre une démarche de théologie pratique réalisable et aussi vérifiable. Ce

travail ne peut se faire qu’en faisant un premier essai. Cet essai devient le point de départ de

la phase préliminaire.

Après avoir identifié l’objet de la recherche, le travail subséquent est de décrire le contexte

où se vit la pratique, ce qui permettra de préciser le sujet de recherche. Toute pratique

s’enracine dans un terrain précis. En réalité, c’est l’analyse de l’environnement de ce terrain

qui permet de prendre une plus grande distance critique vis-à-vis de l’intuition première du

chercheur. Après avoir choisi le lieu de la pratique à étudier, sa description devient un autre

élément nécessaire pour sa compréhension et son étude. Pour ce faire, je reprends ici l’outil

des six différents pôles de l’observation d’une pratique ecclésiale. Ce travail permet

d’identifier la pratique et aussi de permettre à d’autres personnes de participer à la

recherche :

Tous les intervenants dans une « pratique » peuvent identifier « qui » fait

« quoi », « où », « quand », « comment » et « pourquoi ». Avec une telle base,

la praxéologie peut assumer l’émergence des pratiques réelles des gens

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32

ordinaires et favoriser leur participation tant à la nomination qu’à l’élaboration

de cette pratique63.

Par ces questions simples et efficaces, j’ai pu décrire le milieu, les différents intervenants et

je commence à nommer les enjeux de la pratique. Gilles Raymond arrive à la conclusion,

dans son article, que l’utilisation des pôles de l’observation permet de systématiser les

différentes composantes de la pratique, de découvrir les déplacements vis-à-vis de la

pratique et des discours sur cette pratique64. C’est après avoir défini les acteurs, les lieux et

les différentes interactions que se vit un autre stade de la recherche. Jean-Guy Nadeau

appelle cela une observation critique. C’est le moment, après la présentation du milieu et

des acteurs, de définir quels sont les enjeux qui sont en cause :

Ainsi, passant de « l’observation spontanée » (le récit), à une « observation

guidée » (l’analyse des six pôles) de leur pratique, les agents en saisissent

davantage de faits, de relations, de discours, etc.. Passant de l’observation

guidée à « l’observation critique » (interaction des enjeux internes et externes

d’une pratique), les agents sont amenés à réarticuler ce que Ricœur appelle

l’intrigue (et que nous appelons le drame) de la pratique, de façon à y retrouver

le souffle que l’observation guidée, plus analytique, avait pu faire perdre de

vue65.

C’est en articulant les différents éléments de l’observation du milieu des acteurs ainsi que

les écrits sur des thèmes nommés par l’observation des six pôles d’exploration d’une

pratique que peuvent surgir plusieurs questions de recherche. Le travail du chercheur est de

définir une question de recherche précise afin de poursuivre la démarche en théologie

pratique. Les deux autres étapes vont se vivre simultanément et s’influencer mutuellement :

il s’agit de la constitution de l’équipe de recherche-action et de l’état de la question.

63 Gilles Raymond, « Les six pôles d'exploitation d'une pratique. La praxéologie pastorale et Thomas H.

Groome, », 108. 64 Idem, 124-125. 65 Jean-Guy Nadeau, « Les agents de pastorale et l'observation du réel, » Idem, 102.

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33

1.3.4.3 Constitution de l’équipe de recherche-action

C’est par la constitution d’une équipe de recherche formée par les différents intervenants en

paroisse que se poursuit le travail. Pour la recherche, le prêtre modérateur, le prêtre

collaborateur, une animatrice de pastorale et deux catéchistes vont constituer l’équipe de

recherche-action. Cette équipe a bien accueilli l’hypothèse de départ, mais l’a rapidement

mis de côté afin d’en formuler une autre et ouvrir davantage les horizons. L’équipe a

proposé deux interventions : une première, la rencontre des catéchistes et une deuxième, la

rencontre des parents qui accompagnaient les jeunes catéchisés. Le chercheur et les co-

chercheurs sont à la fois chercheurs et intervenants. Il a été important de définir les normes

éthiques. J’ai choisi d’utiliser le modèle proposé par l’Université Laval dans le contexte des

recherches qui se vivent avec des personnes.

La question éthique

Cette recherche se réalise avec la participation de plusieurs personnes. Cette participation

est gérée selon les normes éthiques reconnues par l’Université Laval66. Les principes

éthiques reposent sur un énoncé politique de trois conseils du gouvernement du Canada67.

Les différents critères retenus pour tous les travaux de recherche qui incluent une

participation avec les êtres humains sont :

Le respect de la dignité humaine, le respect du consentement libre et éclairé, le

respect des personnes vulnérables, le respect de la vie privée et des

renseignements personnels, le respect de la justice et de l’intégration,

l’équilibre des avantages et des inconvénients, la réduction des inconvénients

et l’optimalisation des avantages68.

C’est à partir de ces critères que j’ai conçu le projet et délimité les normes éthiques à

appliquer pour la recherche. Il y a eu une correspondance entre le Comité d’éthique de la

recherche de l’Université Laval (CÉRUL) et moi-même afin de préciser mon rôle comme

66 Comité d'éthique et à la création. Vice-Rectorat à la recherche et à la créativité, « Modalités de gestion de

l'éthique de la recherche sur des êtres humains », Éditions Université Laval (Québec : Université Laval,

2006). 67 Instituts de recherche en santé du Canada et al., « Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la

recherche avec des êtres humains », Secrétariat interagences en éthique de la recherche (Ottawa : Travaux

publics et services gouvernementaux du Canada, 1998 (avec les modifications de 2000, 2002 et 2005)). 68 Idem, i.5-i.6.

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chercheur. Comme j’étais le prêtre modérateur de la paroisse et que plusieurs membres de

l’équipe de recherche-action étaient mes employés, j’ai dû préciser quelques aspects du

protocole de recherche pour objectiver la démarche, m’assurer de la liberté de parole et la

protection de la confidentialité. J’ai inséré en annexe le document d’autorisation de la

démarche et son renouvellement69. Chaque personne qui a été invitée à participer a reçu une

invitation écrite et devait donner sa réponse au secrétariat de la paroisse pour s’assurer de la

liberté de chacun70. Lors de la première rencontre, j’ai remis à tous les participants un

formulaire de consentement à l’intention des participants à la recherche-action71. Il y avait

également un formulaire d’engagement72. Pour aider le discernement des personnes invitées

à participer à la recherche, j’ai joint un document de présentation du projet qui présentait

sommairement l’étape préliminaire de la recherche-action73. Cette démarche a confirmé

aussi mon choix de rédiger un rapport après chacune des rencontres et de le faire approuver

par l’équipe de recherche-action. Le rapport écrit réalisé après chacune des rencontres

permettait d’objectiver le contenu des échanges et aussi d’assurer un suivi pour le groupe

d’une rencontre à l’autre. Lors de la première rencontre, j’ai présenté toute la démarche de

la recherche en théologie pratique et j’ai situé la méthode de la recherche-action dans le

processus. Je trouve important de situer les co-chercheurs en leur disant qu’ils feraient un

premier travail d’interprétation et que je ferais un deuxième travail d’interprétation par une

corrélation avec la Parole de Dieu, les sciences humaines et des travaux d’un théologien. Il

est intéressant de remarquer que les participants, à la fin de la recherche-action, étaient tous

enthousiastes et voulaient que je reste en contact avec eux pour leur communiquer

l’avancement des travaux. Ils devenaient des collaborateurs et se sentaient solidaires de

cette démarche. Ce processus a permis au groupe de recherche-action de vivre une

démarche de croissance humaine et spirituelle.

Le choix des participants

Le sujet de la recherche est de mesurer l’impact de la formation des catéchètes bénévoles

par l’équipe pastorale paroissiale. L’objectif est de former un groupe de cinq à sept

69 Annexe 5. 70 Annexe 3. 71 Annexe 4. 72 Annexe 5. 73 Annexe 2.

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personnes pour vivre la recherche-action. Dans un premier temps, tous les membres de

l’équipe pastorale furent invités. De l’équipe pastorale, deux ont décidé de s’engager. Dans

un deuxième temps, on a procédé à une deuxième invitation auprès des catéchistes

bénévoles qui étaient présents régulièrement aux rencontres de catéchèse et qui animaient

ou co-animaient un groupe de catéchèse. Deux catéchistes se sont également engagés. Le

groupe de recherche-action est finalement constitué du chercheur, de deux membres de

l’équipe pastorale et de deux catéchètes bénévoles.

Rôle du chercheur

Dans une recherche-action, le chercheur assume plusieurs rôles. Il est à la fois chercheur,

participant et initiateur de la recherche. Le chercheur est celui qui prépare la démarche

préalable; il conçoit un plan de recherche, une problématique, une première recherche

bibliographique, des hypothèses de départ avec un premier diagnostic. Il s’entoure d’une

équipe avec qui il fera route. Ensemble, ils sont participants et co-chercheurs. Il est celui

qui invite à se joindre au groupe et qui s’assure de la libre participation de chacun. Il

distribue la documentation de départ. Il est un facilitateur et il devient un membre de

l’équipe pour développer la recherche. Il accepte que les choses puissent changer, qu’on

puisse orienter différemment la recherche selon les travaux de l’équipe. Il est celui qui

permet à tous de s’exprimer. Il rend possible une relation d’égalité dans le groupe. Il est

aussi une personne ressource pour aider le groupe dans son cheminement tout en s’assurant

de la rigueur scientifique. Il est capable d’accepter de vivre cette recherche dans un climat

de changement et, ainsi, de vivre l’incertitude liée à une recherche qui est en mouvement et

qui peut apporter des éléments neufs et inédits. Il fait connaître ses opinions de la même

façon qu’il est attentif à celles des autres qui sont toutes aussi importantes pour le

déroulement de la recherche. Il est capable de prendre une distance critique par rapport aux

autres participants et aussi par rapport à son sujet de recherche.

Le chercheur se trouve en tension à plusieurs niveaux. Il est celui qui anime sans imposer

tout en guidant le groupe pour qu’il puisse atteindre ses objectifs de recherche. Il présente

au début de chaque rencontre une synthèse des délibérations de la rencontre précédente que

les co-chercheurs bonifient, modifient, pour que celle-ci reflète les travaux de l’équipe des

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chercheurs. Il est ouvert à la nouveauté afin de confirmer, infirmer ou bâtir de nouvelles

hypothèses de recherche et créer de nouveaux matériaux. Il est celui qui tient le rythme de

la recherche et travaille à sa réalisation.

Rôle des participants

Les participants sont actifs dans une recherche-action. Ils collaborent à l’élaboration des

instruments. Ils s’impliquent selon leurs talents dans la recherche. Ils participent à

l’élaboration de la problématique et à l’action. Ils participent aussi aux prises de décisions

qui touchent la recherche et l’action. Ils sont capables de patience, car la recherche-action

se vit dans le temps et on ne peut pas prévoir les résultats à l’avance. Ils agissent en

professionnels dans la démarche de la recherche.

C’est le chercheur qui initie l’ensemble des activités et qui propose le premier jet des

différentes synthèses après chaque réunion. Les participants font, à partir de ces données,

une nouvelle synthèse et la modifient selon les délibérations, les échanges, les découvertes,

l’identification d’éléments nouveaux et les actions prises ensemble. Les participants

orientent la recherche par le travail d’équipe. C’est par ce va-et-vient entre la pratique et la

réflexion du groupe que s’élabore un nouveau discours sur le sujet choisi et traité par

l’équipe.

Rôle commun au chercheur et aux co-chercheurs

Le chercheur et les co-chercheurs ont des engagements communs. Ils doivent tous

participer aussi bien à l’action qu’à la recherche. Ils doivent accepter cette démarche de

découverte en vivant l’incertitude qu’elle peut apporter au gré des questionnements, des

découvertes et des interpellations diverses. Cette expérience se vit à deux niveaux, c’est-à-

dire individuellement et collectivement. Chacun peut vivre différemment cette recherche et

c’est l’interaction qui permettra de vivre une expérience de groupe.

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Une recherche-action demande plusieurs qualités : flexibilité, autonomie, curiosité,

adaptabilité, lâcher prise et aussi du leadership. Mario Roy et Paul Prévost expliquent bien

à la fois le rôle de leadership du chercheur et l’apport des co-chercheurs dans la recherche :

Au plan de l’intervention, le chercheur se situe sur un continuum de

participation à l’action qui peut aller de la facilitation du processus de

changement jusqu’à la promotion d’idées et d’actions visant à changer la

situation. Sur le plan de la recherche, le chercheur doit se donner les moyens de

poser un regard réflexif sur l’action au fur et à mesure de son déploiement et

permettre à ses partenaires de contribuer à cette réflexion puisqu’ils sont aussi

des co-chercheurs qui souhaitent comprendre comment changer le système

dans lequel ils évoluent (Greenwood & Levin 2007)74.

Après avoir décrit les enjeux éthiques et les rôles des participants, je présente comment se

vit la recherche-action. Je reprends les différentes étapes et j’en décris les principaux

éléments.

1.3.4.4 Revue de la littérature

Une fois la question de recherche définie, le chercheur dresse un état de la question. Dans la

recherche, j’ai choisi trois angles d’approfondissement. Le premier est une lecture

diachronique. Elle est utile afin de constater l’évolution de la pratique choisie au cours des

siècles. Y a-t-il des similitudes? Quels sont les points communs, les divergences, les

questions qu’apportent les pratiques vécues en catéchèse au cours des siècles? Le deuxième

angle est d’identifier des pratiques semblables vécues récemment dans différents contextes.

Les mêmes questions reviennent : y a-t-il des similitudes, quels sont les points communs,

les divergences, les questions qu’apportent les pratiques vécues dans d’autres milieux?

Quels sont les éléments nouveaux qui ressortent dans les autres milieux? Le troisième angle

est de faire un bilan des recherches actuelles en lien avec le sujet de la recherche de même

que suivre les aggiornamentos du Magistère depuis le Concile Vatican II. Ces trois angles

permettent de mettre déjà en dialogue la pratique choisie, l’histoire de l’Église, le vécu de

différentes communautés chrétiennes, les documents du Magistère. L’état de la question

74 Mario Roy et Paul Prévost, « La recherche-action : origines, caractéristiques et implications de son

utilisation dans les sciences de la gestion, » : 136.

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permet une prise de distance et la préparation de matériaux théologiques qui pourront servir

à l’étape de la corrélation.

1.3.4.5 Reformulation de l’hypothèse et planification de l’action

Les membres de l’équipe ont pris au sérieux la recherche-action. Ils ont saisi que la

démarche suivait leur rythme, leurs réflexions et les orientations du groupe. La démarche a

été vécue en neuf rencontres. Je présente un tableau avec les étapes de la recherche-action

planifiées dans le protocole de recherche et celles réalisées. Voici les changements qui ont

été apportés par l’équipe de recherche.

Tableau 2 : Rencontres de l'équipe de recherche-action

Étapes planifiées Étapes réalisées

Étape préalable

Préparation du dossier de recherche par le

chercheur

Étape préalable

Préparation du dossier de recherche par le

chercheur

Étape 1 - Réflexion initiale Étape 1 - Réflexion initiale

Une rencontre

Étape 2 - Précision du problème et de son

contexte

Étape 2 - Précision du problème et de son

contexte

Deux rencontres

Étape 3 - Planification de l’action

Étape 3 - Planification de l’action

Une rencontre

Étape 4 - Action et observation

Étape 4 - Action et observation

Avec les catéchistes bénévoles

Une rencontre

Avec les parents qui ont inscrit des jeunes

aux parcours catéchétiques

Une rencontre

Étape 5 - Évaluation et prise de décision Étape 5 - Évaluation et prise de décision

Évaluation de la rencontre des catéchistes

Une rencontre

Évaluation du premier cycle

Une rencontre

Étape 6 - Réaction après une première

observation spontanée du chercheur à partir

des rapports des différentes rencontres.

Une rencontre

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Afin de permettre une plus grande liberté à l’équipe de recherche-action, j’avais un

protocole de recherche très détaillé avec des questions d’évaluation à chacune des étapes.

Pour m’aider à objectiver les discussions, chaque participant tenait un journal de bord

personnel qui lui permettait de prendre des notes et de suivre sa propre progression. À

chacune des rencontres, un rapport était remis et validé par l’équipe. Les rapports ont

permis, selon les témoignages des membres de l’équipe de recherche-action, d’intégrer la

démarche et d’en suivre la progression75.

Comme le cadre et le projet de recherche étaient bien définis, cela a été plus facile pour

moi, comme chercheur, d’accompagner le groupe et aussi de suivre son évolution. Ainsi,

dès la première rencontre, les gens ont commencé à discuter de l’hypothèse de recherche.

Quand ils ont saisi qu’ils pouvaient la confirmer, l’infirmer ou la modifier, ils ont eux-

mêmes et par consensus modifié la démarche selon l’évolution de la recherche.

L’étape préalable a permis au chercheur de présenter le contexte de l’hypothèse, de

préparer et de proposer une bibliographie sommaire composée de dix-neuf titres76. Dans

cette bibliographie, il y a des articles, des parties d’ouvrages, des livres. Les textes ont été

choisis avec ces critères : ils touchaient à la catéchèse, à la paroisse, à la formation des

catéchistes bénévoles, aux bénévoles.

Lors de la réflexion initiale, les membres de l’équipe de recherche se sont appropriés la

démarche et ont pris conscience des horizons possibles de la recherche.

C’est au moment de l’étape de la précision du problème et de son contexte que l’équipe de

recherche-action a pris le temps de discuter et a modifié l’hypothèse de départ. Elle a élargi

les horizons à partir de son expérience. Le groupe a décidé de prendre une rencontre de plus

afin de s’entendre et de préciser la nouvelle hypothèse. Comme on pourra le constater dans

75 Les rapports et les verbatims des rencontres de la recherche-action sont sur une clé USB qui est disponible

pour les chercheurs qui aimeraient consulter les documents au bureau de la Faculté de théologie et de sciences

religieuses. Pour les prochaines notes, j’utilise l’abréviation Clé USB pour désigner ce support numérique. 76 Annexe 2, pages 478-479.

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le chapitre suivant, on est passé de la formation des catéchètes bénévoles par l’équipe

pastorale à la nécessité de former tous les acteurs dans la communauté paroissiale et

d’approfondir l’apport de chacun dans le processus catéchétique.

Au moment de la planification de l’action, les co-chercheurs ont décidé de procéder à deux

interventions auprès de deux groupes : les catéchistes bénévoles et les parents qui ont

inscrit leurs enfants aux parcours catéchétiques. L’équipe de recherche a voulu vérifier ce

que pouvaient apporter les catéchistes bénévoles à l’organisation catéchétique de toute la

communauté et comment ces derniers voyaient et évaluaient la proposition d’André

Fossion pour la formation des catéchistes77. La deuxième intervention était de rencontrer

les parents qui participaient aux parcours catéchétiques et vérifier ce qu’ils pouvaient

apporter comme contribution à la démarche catéchétique et quelles étaient leurs attentes.

Lors de la première intervention, tous les catéchistes des différents parcours et ceux qui

collaborent à la préparation aux sacrements ont été invités. Huit catéchistes bénévoles sur

une vingtaine ont participé à la rencontre, dont deux faisant partie de l’équipe de recherche.

À la fin de la rencontre, les participants ont souhaité qu’il y ait d’autres rencontres entre les

catéchistes, ils désiraient une plus grande collaboration avec l’équipe pastorale paroissiale

et ils exprimaient un désir de formation. Lors de la deuxième intervention, l’équipe de

recherche a rencontré plusieurs parents dont les enfants ont été inscrits dans les parcours.

Plusieurs dizaines de parents ont été invités afin de pouvoir en rassembler au moins cinq.

Lors de la rencontre, sept parents sont venus avec trois enfants. À la fin de la rencontre, ils

étaient heureux d’avoir été consultés pour cette recherche.

L’étape de l’évaluation s’est vécue en deux rencontres. La première rencontre a été une

relecture de la première intervention et a permis à l’équipe de vérifier si elle devait modifier

la préparation pour la deuxième intervention. Cela a été aussi l’occasion de commencer à

étudier le matériel ramassé auprès des catéchistes bénévoles. La deuxième rencontre a été

une évaluation de toute la démarche et aussi du parcours effectué. L’équipe de recherche-

77 André Fossion, La compétence catéchétique (2007 [visité le 11 mai 2007]); accessible à

http://www.lumenonline.net/.

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action a nommé des enjeux et des pistes de renouvellement des pratiques. L’équipe a aussi

manifesté son désir de pouvoir être informée de l’analyse plus en profondeur des données

recueillies lors de la recherche-action.

Une autre étape s’est ajoutée. Après quelques mois de travail, j’ai pu corriger la

présentation et l’orthographe des différents rapports. Après une première lecture, j’en ai fait

une première analyse en nommant les principaux enjeux que j’ai retenus dans la démarche.

Cet écrit initial est un premier constat que j’ai soumis à l’équipe de recherche-action.

L’équipe de recherche-action a confirmé plusieurs éléments et bonifié le premier constat

par quelques ajouts78. Par la suite, j’ai effectué une analyse de contenu plus systématique

par la méthode qualitative des catégories conceptualisantes :

L’analyse qualitative va donc progresser à mesure de l’écriture, de la réécriture

et de l’accumulation, d’abord de constats, puis, de plus en plus, de textes plus

longs. Au départ, la lecture répétée des matériaux à l’étude va, en effet, plutôt

susciter chez l’analyste l’émergence de constats79.

Cette esquisse a permis aux membres du groupe de recherche d’affiner leur analyse globale

de la recherche-action avec les verbatims de neuf rencontres, les rapports de huit d’entre

elles et mes notes personnelles. Après cette première analyse de l’équipe de recherche-

action, j’ai poursuivi le travail de recherche. Je présente dans la prochaine section comment

j’ai réalisé l’analyse du contenu.

1.3.4.6 Phase d’analyse de la cueillette des données

Le travail pour élaborer le corpus d’analyse a été important. Les rapports ont été rédigés au

fur et à mesure de la recherche-action et ils ont tous été présentés à l’équipe de recherche-

action qui les a approuvés en y apportant les corrections d’usage. Le travail suivant fut de

recopier les verbatims des différentes rencontres. Dans un premier temps, à l’aide d’un

78 Clé USB, 782-783. 79 Pierre Paillé et Alex Mucchielli, L'analyse qualitative en sciences humaines et sociales (Paris : Colin,

2003), 106.

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dictaphone j’ai recopié les dix-huit cassettes qui ont été enregistrées. Dans un deuxième

temps, j’ai procédé à une seconde écoute afin de corriger la première version et une

troisième écoute pour identifier les différents interlocuteurs et anonymiser le texte.

Pour effectuer l’analyse du contenu, j’ai choisi la méthode de « L’analyse qualitative à

l’aide des catégories conceptualisantes ». C’est une méthode inductive qui permet à partir

de différents matériaux (les notes personnelles, les rapports de réunion, les verbatims ou

autres productions) de nommer des phénomènes afin de pouvoir arriver à élaborer des

concepts à partir des pratiques étudiées et analysées. Pour utiliser cette méthode d’analyse,

je m’inspire principalement des travaux de Pierre Paillé et Alex Mucchielli80. Mais qu’est-

ce qu’une catégorie?

La catégorie se situe, dans son essence, bien au-delà de la simple annotation

descriptive ou de la rubrique dénominative. Elle est l’analyse, la

conceptualisation mise en forme, la théorisation en progression. On peut définir

la catégorie comme une production textuelle se présentant sous la forme d’une

brève expression et permettant de dénommer un phénomène perceptible à

travers une lecture conceptuelle d’un matériau de recherche81.

Pierre Paillé et Alex Mucchielli résument le concept de catégorie en le qualifiant comme la

description d’un phénomène. L’avantage de cette technique, c’est qu’elle peut utiliser

divers matériaux et qu’elle permet aussi de décrire différents types de pratique et de

fonctionnement82. Pour faire l’analyse, j’ai procédé par diverses étapes : la première a été

de faire une « épochè », c’est-à-dire une mise entre parenthèses de mon hypothèse de départ

pour que, par l’analyse qualitative, puissent émerger les concepts et les découvertes de

l’équipe de recherche. À la deuxième étape, j’ai choisi de faire l’analyse des verbatims car

ils comprennent la lecture et l’adoption des rapports de recherche. La troisième étape a été

de procéder à l’analyse en subdivisant le texte en unités de signification que je nomme

unités de sens : « Une unité de signification est une phrase ou un ensemble de phrases liées

80 Idem, 147-179. 81 Idem, 147. 82 Idem, 150.

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à une même idée, un même sujet ou, si l’on veut, à un même thème »83. Chacune des unités

de sens est qualifiée par quelques mots pour décrire ce qui se passe. Ces nominations sont

des catégories ouvertes. De plus, les catégories ouvertes sont regroupées en catégorie

générale qui décrit un phénomène présent dans le corpus qui a été choisi. Une catégorie

peut décrire un phénomène qui est récurrent, un fait significatif, une expérience particulière

qui illumine le reste du corpus. Cela peut aussi être un regroupement de plusieurs

catégories que l’on peut qualifier d’ordinaire; elles expriment une réalité particulière ou

complexe :

Une catégorie nomme un phénomène; mais elle n’est pas limitée aux seules

expériences fortes, pas plus qu’elle ne doit toujours se situer à un haut niveau

de densité conceptuelle. Pour une catégorie forte, conceptuellement dense, on

trouve plusieurs catégories « ordinaires », moins denses84.

Confectionner des catégories, c’est déconstruire le texte, chercher les clefs de

compréhension possible, exposer la complexité des phénomènes présentés et les métissages

dont la présence se cache derrière la réalité présentée. Il y a trois manières possibles de

validation des catégories selon Pierre Paillé et Alex Mucchielli : la définition d’une

catégorie, la spécification de ses propriétés et l’identification de ses conduites85. Lorsque

l’on parle de définir une catégorie, il s’agit de décrire un phénomène, de dégager une vue

d’ensemble et d’en saisir l’originalité. C’est le fait de la décrire à l’aide d’un concept qui

permet de visualiser le phénomène et de lui donner une image propre. La spécification de la

catégorie est d’identifier ses propriétés afin de permettre de la distinguer ; c’est de nommer

ses éléments constitutifs. Comme exemple, on peut prendre un bateau : c’est un véhicule; il

est étanche à l’eau; il flotte; il peut être propulsé par un moteur à hélice ou par une voile. Le

troisième élément de validation d’une catégorie, c’est d’identifier ses conditions

d’existence : « Les conditions d’existence d’un phénomène renvoient aux situations,

événements ou expériences en l’absence desquels le phénomène ne se matérialiserait tout

simplement pas dans le contexte qui est le sien »86. Ces trois éléments permettent de valider

83 Idem, 133. 84 Idem, 165. 85 Idem, 169. 86 Idem, 171.

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une catégorie. Si une catégorie fait appel à plusieurs définitions et de très nombreuses

spécifications, il est possible qu’il soit nécessaire de fractionner la catégorie pour être

davantage spécifique. Il peut aussi s’avérer dans l’analyse d’un long texte que l’on identifie

deux catégories très semblables; alors, il est nécessaire de se demander si on ne parle pas du

même phénomène. Si la catégorie explique le même phénomène, on peut les fusionner. Le

travail d’analyse est un peu comme un entonnoir qui permet de préciser le sens et le

contenu du texte.

Le chercheur qui élabore le travail de l’analyse du contenu se retrouvera toujours en tension

entre trois pôles différents : « Trois points de tension émergent plus particulièrement : la

tension entre la prospective émique et la prospective étique, entre la singularité et la

généralité et, comme troisième point de tension, entre l’événement et le contexte »87. C’est

ainsi que le chercheur sera toujours en tension avec ses propres perspectives « étiques » et

les perspectives du milieu qu’il étudie « émiques » :

En anthropologie, l’explication émique, c’est donc le point de vue de l’acteur,

de la culture autochtone, avec leurs référents propres, leurs catégories en

usage s’alimentant à une cosmologie, une praxis et une logique cognitivo-

émotionnelle façonnées par des siècles de construction culturelle.

L’explication étique, c’est l’explication du chercheur, c’est l’articulation d’un

système interprétatif externe dont la légitimité relève de la perspective méta-

culturelle à laquelle tente d’accéder le chercheur, adoptant pour ce faire à la

fois un point de vue « séculier », une perspective comparative ainsi qu’une

pratique méthodologique basée sur l’observation et l’analyse « naturalistes »

en profondeur88.

Il n’y a pas d’indication pour dire si c’est une ou l’autre des perspectives qui est la

meilleure. La démarche ne se situe pas à ce niveau. Il est important que le chercheur soit à

l’écoute et, selon les découvertes, lors du processus, il sera appelé à passer de l’un à l’autre.

La deuxième tension est que, dans la recherche, un événement isolé peut avoir autant de

valeur qu’une expérience récurrente. Le chercheur doit à l’aide des catégories trouver

l’équilibre entre les deux. Le troisième lieu de tensions se trouve entre l’événement et le

contexte. Il est évident qu’ils sont interdépendants et qu’il est important de les nommer

87 Idem, 175-179. 88 Ibid.

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distinctement, bien qu’ils aient des liens indissociables. Il est important de décrire à la fois

l’événement et ce qui l’entoure, sachant que l’événement est toujours situé dans un temps et

un lieu.

L’analyse de contenu à l’aide des catégories conceptualisantes permet de définir des

catégories qui décriront différents phénomènes autant au niveau individuel, familial, social,

ecclésial que théologique et pastoral. Juan Salvador ajoute que cette méthode permet de

rendre compte de la pratique sur le terrain : « Les catégories sont utilisées aussi bien pour

ordonner des auteurs, des textes, des informations théoriques ou produites par d’autres que

pour rendre compte de résultats d’enquête terrain »89. Ces catégories deviendront des

éléments qui permettront de poursuivre la réflexion. Elles seront des matériaux essentiels

pour approfondir la démarche théologique. L’analyse de contenu pourra faire ressortir des

éléments qui viendront à la fois confirmer, infirmer, transformer l’hypothèse de recherche

si ce n’est que de faire du neuf et faire ressortir des éléments inattendus. L’analyse de

contenu permet aussi de faire ressortir les diverses propositions afin de transformer les

pratiques. Ces éléments deviennent du matériel pour les prochaines étapes de la démarche

théologique. C’est aussi le temps de poursuivre la réflexion théologique. Comme le

souligne Marc Donzé, tout en respectant la dimension épistémologique et méthodologique

de l’analyse de contenu, déjà celle-ci fera ressortir des éléments qui seront des éléments qui

sont utiles pour la prochaine étape, la corrélation :

Il importe de les soumettre à une première évaluation théologique. Il s’agit ici

de réaliser un moment d’interpellation et de questionnement critique entre

l’interprétation scientifique de la réalité perçue et une vision théologique de

l’homme, de Dieu de l’Église, de l’histoire (une sorte de première corrélation

élémentaire : voir infra). C’est une interpellation réciproque, fort utile en ce

sens qu’elle permet à la théologie de marquer les limites de l’apport des

sciences de l’agir, mais aussi qu’elle permet à ces sciences de poser de

questions pertinentes à la théologie90.

89 Salvador Juan, Méthodes de recherche en sciences sociohumaines : Exploration critique des techniques, Le

sociologue (Paris : Presses universitaires de France, 199), 273. 90 Marc Donzé, « Théologie pratique et méthodes de corrélation, » dans Les études pastorales à

l'université : perspective, méthodes et praxis, dir. Adrian Vischer (Ottawa : Les presses de l'Université

d'Ottawa, 1990), 97.

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46

La pratique étant bien présentée en soulignant les éléments qui émergent, tout est prêt afin

de poursuivre l’approfondissement théologique par l’étape de la corrélation.

1.3.4.7 Corrélation

L’étape de la corrélation en théologie pratique repose sur quelques présupposés de base.

C’est la reconnaissance que les pratiques chrétiennes peuvent être un médium pour nous

parler de Dieu91. Les pratiques deviennent des lieux où Dieu se manifeste en s’insérant dans

la vie, dans l’histoire de l’humanité. Les expériences chrétiennes deviennent des lieux de

médiation, d’accueil de la révélation et une expression de celle-ci : « Ce n’est que dans des

expériences humaines actuelles que les hommes et les femmes accèdent à une expérience

personnelle de la foi chrétienne, où la « révélation est reçue et accueillie »92. Edward

Schillebeeckx décrit l’expérience comme le lieu de la réception de la Révélation. Il est clair

pour lui que l’expérience ne produit pas la Révélation, mais qu’elle est le fruit de la

Révélation. Elle est l’expression de cet accueil de Dieu dans l’humanité. Edward

Schillebeeckx va plus loin en montrant que c’est par l’initiative de Dieu et par son désir de

rejoindre l’humanité que c’est possible. L’expérience exprime une réalité qui la dépasse, un

Dieu d’amour qui veut sauver l’humanité :

Il existe cependant de sérieuses raisons de penser que ce n’est pas l’homme qui

(comme un ventriloque) fait parler Dieu, mais bien que c’est Dieu qui se donne

à connaître comme celui qui transcende toute l’expérience proprement

inexprimable93.

L’expérience se trouve à témoigner de la présence de Dieu; c’est dans une perspective

semblable que Paul Tillich va présenter l’importance de l’expérience. Il souligne que

l’expérience est un médium. Un lieu qui permet aux sources de la théologie de témoigner

de Dieu. L’expérience par sa réalité propre ne produit pas elle-même la réalité spirituelle.

L’expérience reçoit le donné révélé :

91 GS, 11. 92 Edward Schillebeeckx, L'histoire des hommes, récit de Dieu, Cogitatio fidei : 166. (Paris : Cerf, 1992), 59. 93 Idem, 61.

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47

L’événement sur lequel se fonde le christianisme (il l’appelle “Jésus de

Nazareth”) ne découle pas de l’expérience, il est donné dans l’histoire.

L’expérience n’est pas la source d’où l’on tire les contenus de la théologie

systématique, mais le médium par lequel on les reçoit existentiellement94.

Ainsi, pour Paul Tillich, l’expérience devient un prisme qui permet de saisir une image de

Dieu. La deuxième prémisse, c’est que ces expériences peuvent permettre, pour les

contemporains, de mieux découvrir la pertinence de la Révélation pour aujourd’hui en

interprétant cette expérience pour le monde actuel.

La corrélation devient ce travail d’interprétation de l’expérience à l’aide des outils et des

sources de la théologie pour actualiser le message, la Bonne Nouvelle. Mais comment

décrit-on la corrélation? Pour Marc Donzé, la corrélation est une confrontation, une critique

réciproque des divers éléments de la théologie :

À partir de la situation pastorale dûment analysée, il importe de réaliser une

confrontation critique réciproque avec des situations semblables parallèles de

A.T. du N.T. et de l’histoire de l’Église, en respectant bien sûr l’homologie de

rapports, pour faire advenir une interprétation nouvelle ou une pratique

nouvelle, plus appropriée à la fois aux requêtes du temps présent et aux

indications de l’Évangile et de la Tradition. La corrélation est réciproque en ce

sens que l’aujourd’hui pose des questions inédites ou nouvelles dans leur

contexte et que l’Évangile et l’histoire gardent une fonction permanente

d’interpellation pour les réalisations d’aujourd’hui95.

C’est par le dialogue des différentes sources que l’on fait surgir aujourd’hui une nouvelle

lecture théologique de la pratique étudiée et aussi des différentes sources utilisées. Le but

pour Marc Donzé est de parvenir à faire de nouvelles propositions pour la pratique et, par la

suite, les vérifier sur le terrain. La démarche de Marc Donzé est très proche de ce que

j’expérimente et elle permet de rendre participants à la démarche pas seulement le

94 Paul Tillich, Théologie systématique Introduction Première partie : Raison et révélation, traduit par André

Gounelle (Paris : Éditions du Cerf, Genève : Labor et Fides, Québec : Presses de l'Université Laval, 2000),

61. 95 Marc Donzé, « Théologie pratique et méthodes de corrélation, » dans Les études pastorale à l'université :

perspective, méthodes et praxis, dir. Adrian Visscher (Ottawa : Les presses de l'Université d'Ottawa, 1990),

98.

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48

théologien, mais aussi les destinataires qui deviennent collaborateurs et co-chercheurs dans

la démarche. C’est ce que j’expérimente dans cette recherche :

Mais il apparaît que les destinataires devraient aussi devenir acteurs d’une

théologie pastorale, pour qu’elle ne reste pas un domaine « réservé » de

spécialistes. […] Donc pour le dire en un mot pas de théologie pastorale sans

collaboration avec les agents pastoraux (et tout le Peuple de Dieu)96.

Pour Marc Donzé, le travail théologique ne se vit pas simplement par un dialogue envers

les différentes sources de la théologie, mais aussi avec les différents acteurs de la pratique.

La corrélation pour Paul Tillich s’inscrit dans la méthode de la théologie systématique.

C’est dans cette dynamique que se situe la corrélation. Il décrit de cette manière la

théologie systématique :

Si la théologie systématique a pour tâche d’expliciter les contenus de la foi

chrétienne, trois questions se posent d’emblée : celle des sources de la

théologie systématique; celle du médium par lequel elle les reçoit; celle de la

norme qui en détermine l’utilisation97.

Pour lui, il y a plusieurs sources de la théologie. La première, c’est la Bible car elle est le

document qui témoigne des origines et du début de l’Église. Les autres sources sont liées à

la réception de la Révélation dans le temps et les divers lieux. Pour Paul Tillich, on ne peut

faire table rase de tout ce qui a été vécu. On ne peut oublier que la Révélation s’incarne

toujours dans un lieu et un milieu; pour lui, la culture sera une source théologique. Dans

son livre sur la théologie systématique, il conclut ainsi sur les sources de la théologie :

Ce survol des sources de la théologie systématique montre bien leur richesse

presque illimitée : la Bible, l’histoire de l’Église, l’histoire de la religion et de

la culture. De plus, il montre qu’il y a une hiérarchie dans cette source

immense de matériaux, selon leur relation plus ou moins directe avec

l’événement central sur lequel se fonde la foi chrétienne, le surgissement de

l’être nouveau en Jésus en tant que Christ98.

96 Marc Donzé, « Théologie pratique et méthodes de corrélation », 85. 97 Paul Tillich, Théologie systématique Introduction Première partie : Raison et révélation, 56. 98 Idem, 64.

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Pour Paul Tillich, le discours théologique se fait par le dialogue des différentes sources de

la théologie, par le médium de l’expérience chrétienne qui reçoit et qui témoigne de la

Révélation. Comme critère d’évaluation de ce dialogue, il va proposer une norme. Pour lui,

la norme, c’est de participer par la grâce au renouvellement de sa personne et du monde en

Christ :

Le présent système utilise comme norme matérielle pour la théologie

systématique l’ « Être nouveau en Jésus le Christ ». Il considère que c’est elle

qui convient le mieux à la situation apologétique actuelle. Si on la combine

avec le principe critique de toute théologie, on formulera ainsi la norme

matérielle : l’être nouveau en Jésus le Christ, en tant qu’il est notre

préoccupation ultime99.

Ainsi, par cette norme, tout le rapport de dialogue entre la pratique, l’expérience et les

différentes sources de la théologie rend possible une interprétation pour permettre, comme

le souligne Paul Tillich, de libérer l’homme de son aliénation et lui permettre de goûter à

une nouvelle liberté. La corrélation se fera par ce qu’il appelle le cercle herméneutique.

C’est la question des êtres humains d’aujourd’hui qui surgit de la situation actuelle qui

reçoit une réponse de Dieu. Paul Tillich explique ce mouvement complexe en plusieurs

étapes. C’est que chaque source questionne la pratique et permet d’affiner la question afin

de trouver la réponse de Dieu. Le discernement des éléments trouvés se fait par la norme

identifiée. Le cercle herméneutique devient comme une spirale qui passe de la pratique aux

différentes sources afin de trouver une réponse adaptée pour la situation d’aujourd’hui. Un

des dangers de l’utilisation du cercle herméneutique de Paul Tillich, c’est qu’une personne

se limite à une ou deux sources ou bien le fait de manière superposée sans interaction entre

les différentes sources. L’avantage de cette méthode, c’est la mise en valeur de

l’importance de la Parole de Dieu et de la médiation de l’expérience pour contruire un

discours théologique.

99 Idem, 76.

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Edward Schillebeeckx, comme je l’ai présenté plus tôt, montre que l’expérience chrétienne

est une expression de la Révélation située dans le temps et l’espace : « Une expérience – et,

comme nous le verrons plus loin, une « révélation » – n’a lieu que dans un cadre psychique

et sociohistorique »100. Il souligne que la Révélation est toujours située dans l’espace et le

temps et qu’elle nous est accessible par la médiation de l’expérience. Pour lui, tout discours

et tout témoignage sont situés dans une expérience. Il poursuit en écrivant que chaque

expérience de révélation en plus d’être située dans le temps fait vivre un passage. C’est une

expérience à la fois de rupture et de continuité. C’est une rencontre qui transforme et fait

émerger une nouvelle réalité :

Dans chaque expérience révélatrice se produit un passage bouleversant, une

pascha qui nous fait passer d’une intégration acquise routinière et acritique, à

travers une désintégration, à une désintégration, à une réintégration avec une

orientation nouvelle. Chaque expérience révélatrice implique conversion,

révision de vie, réorientation101.

L’expérience de Jésus Christ devient lieu de révélation, mais elle est transmise par la

médiation d’une expérience située dans le temps, l’espace. Pour bien la saisir, il est

important de comprendre à la fois la personne de Jésus Christ et son expérience située dans

un contexte précis. Pour comprendre l’expérience chrétienne dans chacune des périodes de

l’histoire, il faut la situer dans son contexte et la faire dialoguer avec l’expérience de Jésus

dans son contexte. Voici le schéma qu’il présente dans son livre :

Figure 2 : Relation de correspondance entre la Révélation et les

diverses situations historiques selon Edward Schillebeckx

message de Jésus message néotestamentaire

contexte sociohistorique

de Jésus

contexte sociohistorique

du Nouveau Testament

100 Edward Schillebeeckx, L'histoire des hommes, récit de Dieu, 48. 101 Idem, 55-56.

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se reproduit dans une autre relation, par exemple :

saisie patristique de la foi saisie médiévale de la foi

contexte sociohistorique

de l’époque

contexte sociohistorique

du Moyen Âge

et ce rapport donné et reproduit doit finalement se reproduire à nouveau dans le rapport ou

l’articulation :

saisie actuelle de la foi en 1990

notre contexte sociohistorique et existentiel actuel102.

Donc, la corrélation pour Edward Schilleebeckx sera de mettre en dialogue l’événement

Jésus Christ et son contexte avec d’autres moments au cours de l’histoire pour arriver à

aujourd’hui. Cette corrélation permet une actualisation de l’expérience chrétienne. Cette

mise à jour vient s’ajouter aux pages qu’écrit la Tradition, car vivre la Tradition, ce n’est

pas répéter, mais proposer à la lumière de la foi et des diverses interprétations historiques

un message pour aujourd’hui, c’est découvrir sous un nouvel angle l’événement Jésus

Christ. Les sources de la théologie d’Edward Schillebeeckx sont : Jésus Christ comme

événement révélateur par excellence ; la Bible, plus particulièrement le Nouveau

Testament ; la Tradition par les diverses interprétations de la foi par l’Église au cours des

âges ; l’histoire et les différents contextes historiques. Ces critères permettent de

comprendre et de discerner les éléments qui ressortent de la corrélation entre les sources et

l’expérience croyante.

L’apport de Louis Ridez est complémentaire à la réflexion sur la corrélation proposent Paul

Tillich et Edward Schillebeeckx. Ces derniers soulignent l’importance de la pratique et la

nécessité de la mettre en corrélation plusieurs éléments : l’expérience chrétienne

102 Idem, 82.

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d’aujourd’hui, l’expérience fondatrice qui est Jésus Christ, la Parole de Dieu, les diverses

interprétations au cours de l’histoire. Les multiples situations historiques sont situées

chacune dans leur contexte propre. Le dialogue et le va-et-vient s’effectuent dans la

majorité des situations dans une dynamique dialectique. Louis Ridez se laisse interpeller

par une autre science pour faire sa corrélation. Il utilise les sciences de l’éducation et plus

particulièrement ce que l’on appelle Le triangle pédagogique103. Il décrit la corrélation

comme une démarche qui met en relation l’expérience d’aujourd’hui, les expériences

fondatrices de la foi et le sujet. Pour lui, la corrélation se fait avec trois pôles. Le premier

est celui de la « foi/Tradition ». Il indique ici toute l’expérience fondatrice du christianisme,

l’initiative de Dieu qui vient interpeller l’homme aujourd’hui, car la foi est un don. Le

deuxième pôle est celui de « Église/monde ». La foi se vit dans une communauté chrétienne

qui est elle-même enracinée dans une société avec une culture concrète. Le troisième pôle

est le fait que toute expérience est située et localisée dans un lieu et un espace

« situation/expérience ». La corrélation sera de mettre en relation ces différentes sources

dans un rapport de réciprocité :

Pour résumer dès maintenant ce qu’est la démarche corrélative, nous dirons

qu’elle établit entre les deux sources de l’acte catéchétique : les expériences

significatives d’aujourd’hui et les expériences fondatrices de la foi, un rapport

de réciprocité critique, et constructive, dialectique et multiforme104.

Les critères qu’utilise Louis Ridez sont que Dieu intervient dans l’histoire d’aujourd’hui,

que le message de Dieu est une expérience de libération pour tous les êtres humains qui les

invite, par l’action de l’Esprit-Saint, à être des hommes nouveaux par l’adhésion au Christ.

Un autre critère est que la foi se vit en Église.

Louis Ridez souligne que la foi est don. Dieu intervient dans l’histoire. Cette irruption de

Dieu vient interpeller la vie des chrétiens et des communautés qui sont invités, à la lumière

de l’Évangile, à faire un discernement dans leur pratique pour être fidèles à l’appel de Dieu.

103 Jean Houssaye, Théorie et pratiques de l'éducation scolaire (1) : Le triangle pédagogique (Berne : Peter

Lang, 2000 ; Troisième édition). 104 Louis Ridez, « La corrélation en catéchèse : expériences de la tradition et expériences d'aujourd'hui, » dans

Adultes dans la foi : Pédagogie et catéchèse, dir. André Fossion et Louis Ridez (Paris : Desclée, Bruxelles :

Lumen Vitae, 1987), 114.

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Chaque époque crée son propre discours et exprime une nouvelle expérience de foi. La

corrélation permet de mieux saisir à la fois l’expérience personnelle, le vécu ecclésial et

l’insertion dans la société. Le rôle du catéchiste sera de créer le lien entre les trois pôles :

celui de la foi-tradition, l’Église-Monde, la situation et l’expérience.

Figure 3 : Schéma corrélation en catéchèse Louis Ridez105

Ces trois modèles de corrélation donnent au théologien le rôle de mettre en dialectique la

Révélation, l’expérience chrétienne et la réflexion de l’Église au cours des siècles. Afin de

poursuivre l’analyse, on utilise l’histoire ainsi que les éléments du contexte culturel. Les

sciences humaines dans ces modèles peuvent être instrumentalisées. C’est ce qu’écrit Paul-

André Turcotte, dans un article, que par souci d’être fidèle aux sources, à la Révélation, on

peut utiliser les sciences sociales comme des instruments techniques et non pas comme un

vis-à-vis qui permet une interpellation et la production d’un nouveau savoir. Pour lui, les

sciences sociales peuvent permettre à la théologie d’éviter dans plusieurs circonstances de

se replier sur elle-même :

En clair, trois défis s’adressent à la théologie : sortir du discours totalisant et

systématisé renvoyant à la société de chrétienté; se situer en aval, et non en

amont de l’analyse des sciences sociales; ouvrir à des dimensions critiques, en

105 Idem, 128.

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référence à l’inspiration d’une tradition religieuse maintenue grâce à des

communautés plus ou moins institutionnalisées106.

Ainsi, la théologie est invitée à entrer en dialogue avec d’autres sciences pour ouvrir ses

horizons. La corrélation, pour ma recherche, est l’occasion de vivre une dynamique de

réciprocité entre différentes sources de la théologie et les apports des sciences sociales. Je

définis comme source théologique l’événement fondateur de Jésus Christ107. La Révélation

est saisissable par la médiation de l’expérience de la Mort et de la Résurrection du Christ

qui est accessible par deux moyens : la Bible et la Tradition108. Cette Tradition se perpétue

par la vie du Peuple de Dieu qui essaie de vivre selon les conditions locales l’expérience du

Christ comme l’ont fait les premiers disciples. Les repères de la vie du Peuple de Dieu sont

présents dans le texte des Actes des Apôtres109. Une autre source de la théologie, c’est

l’expérience chrétienne. J’utilise la pratique de la communauté chrétienne de la paroisse

Sainte-Thérèse-d’Avila plus particulièrement celle qui a été recueillie par la recherche-

action. De plus, comme source théologique, je fais appel aux différentes réflexions de

théologiens. Le champ est vaste, il y a de nombreux théologiens. J’utilise le discours de

plusieurs théologiens plus particulièrement celui réalisé par Denis Villepelet. Ces

théologiens qui ont travaillé sur la question de la formation de la catéchèse et/ou du défi de

faire de la catéchèse dans le contexte du monde contemporain. Dans ma démarche de

corrélation, j’ajoute un autre pôle, celui de l’utilisation des sciences sociales, pour mettre en

dialogue les différentes sources de la théologie et celles de la pratique. Voici un schéma

permettant de visualiser cette démarche :

106 Paul-André Turcotte, « Sociologie, théologie et pastorale. Conditions institutionnelles et pratiques, » dans

Théologiques 1, no. 1 (1993) : 33. 107 Concile Vatican II, « La Révélation divine : Constitution dogmatique de Divina Revelatione ( Dei Verbum

), » dans Vatican II Les seize documents conciliaires (Montréal : Fides, 1966). Pour ce document j’utilise

l’abréviation DV et pour numéro de paragraphe j’indique le chiffre seulement : DV 4. 108 DV 9. 109 Ac, 2, 42-47.

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Figure 4 : Corrélation dans la thèse

Le rôle du théologien est de mettre en relation les différentes sources de la théologie avec la

pratique et les sciences humaines. Chaque source possède ses propres caractéristiques et

son autonomie. La corrélation est de faire un va-et-vient afin de constituer un discours, un

artefact théologique à partir de ces matériaux. Les critères théologiques que j’utilise sont

issus de la synthèse des éléments que j’ai retenus dans les pages précédentes par la

présentation de la théologie pratique et de la corrélation. Le premier critère : c’est que la foi

est un don de Dieu, la foi se reçoit; on ne se le l’approprie pas110. Le deuxième critère :

nous sommes tous créés à l’image de Dieu, la personne humaine est sacrée par la dignité

que Dieu lui donne et l’être humain est appelé à être un gérant et non pas un propriétaire de

la création. Le troisième critère : Dieu veut sauver tous les êtres humains et les aider à vivre

une dynamique de libération à la lumière de l’événement Jésus Christ. Je m’inspire ici du

texte de 1 Tim 2,3-4 : «Voilà ce qui est beau et agréable aux yeux de Dieu notre Sauveur

110 Église catholique. Catéchisme de l'Église catholique : Édition définitive avec guide de lecture. Paris :

Centurion, Bruxelles : Éditions Racine, Ottawa : Éditions Concacan Inc., Ottawa, 1998.

Abréviation : CEC, 153.

Théologien

Parole de Dieu

Sciences sociales

Travaux de Denis

Villepelet

La pratique

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qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la

vérité »111. Le quatrième critère : Jésus Christ est celui qui nous révèle le vrai visage de

Dieu et la mission de chaque être humain qui est appelé à devenir enfant de Dieu. Le

cinquième critère : Dieu continue à se manifester dans l’histoire pour réaliser son œuvre de

Salut et de libération de tous les humains. Le sixième critère : Dieu invite les êtres humains

à accueillir le Royaume de Dieu et à participer au renouvellement de l’humanité par

l’action de l’Esprit Saint dans l’attente du retour du Christ. Le septième critère : la

découverte de Jésus Christ nous amène à nous recevoir comme frères et sœurs pour que

l’Église devienne signe du Salut pour le monde d’aujourd’hui. Comme le souligne André

Charron, ce n’est pas l’Église qui est la fin en soi de l’action pastorale, mais elle en est le

signe :

Mais l’Église n’est que le sacrement et non pas le principe du salut-libération.

Elle ne s’identifie pas au Règne de Dieu : elle n’en est que le sacrement.

Annonce, manifestation et service voilà qui relativise sa place et son rôle,

l’invite à une décentration par rapport à elle-même. […] L’Église n’est pas là

pour elle-même : elle est au service du Règne de Dieu sur le monde112.

Ces sept critères sont les points de référence afin de constituer le discours théologique qui

veut répondre à l’amélioration d’une pratique et à la vérification de l’hypothèse de départ.

Il permet de répondre au questionnement de départ et de faire l’évaluation à partir de la

pratique, de la Bible, de la Tradition, du discours théologique contemporain et des sciences

humaines. Ils seront des outils afin d’évaluer la réalisation ou la transformation de

l’hypothèse de départ. La section suivante vient conclure la démarche en ouvrant des pistes

possibles pour la réalisation des conclusions de la recherche.

1.3.4.8 Prospective

L’interprétation théologique conduit à faire une évaluation de l’hypothèse de départ et à

indiquer les déplacements vécus par la pratique et par les apports des différentes sources de

111 Version TOB 112 André Charron, « La spécificité pastorale du projet d'intervention, » dans La praxéologie pastorale

Orientation et parcours tome II, dir. Jean-Guy Nadeau (Montréal : Fides, 1987), 164.

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la théologie et des sciences humaines. Il reste cependant une étape afin de compléter la

démarche. Il s’agit de la prospective. La prospective est l’étape de se projeter dans le futur.

C’est à partir de l’observation, de la vérification de l’hypothèse et de l’interprétation

théologique que s’ouvre l’étape de la prospective. C’est un temps pour évaluer et pour

nommer les différents possibles des pratiques à venir. La prospective peut à la fois être très

optimiste ou prévenir des dangers possibles dans lesquels la pratique peut s’enfermer. C’est

ainsi que Jean-Guy Nadeau indique que c’est une étape d’ouverture :

La prospective nous permet de sortir d’une relation ou d’un lieu relativement

clos, déjà organisé, pour découvrir un chemin imprévu quoiqu’en puissance

d’actualisation dans le réel113.

La prospective est donc la poursuite du temps d’interprétation. Elle regarde les différentes

avenues de faisabilité dans le milieu de la pratique étudiée et dans d’autres lieux ecclésiaux

ou séculiers. La prospective part donc du présent et propose une vision qui se veut

mobilisatrice des forces vives afin de poursuivre l’accueil du Royaume de Dieu. Les

propositions de transformation de la pratique permettre de développer des nouveaux

moyens concrets afin de réaliser l’accueil du Royaume de Dieu ici-bas et aussi dans l’au-

delà. La prospective a une dimension prophétique, elle interpelle le présent afin que les

pratiques soient signes de l’Évangile pour aujourd’hui et s’ouvrent sur une promesse. Elle

ouvre sur un possible, qui peut être pour le contemporain invraisemblable, car elle permet

de s’ouvrir à d’autres horizons. La prospective fait un acte de foi dans l’intervention de

Dieu pour aujourd’hui comme il l’a fait pour les patriarches de l’Ancien Testament et les

apôtres et disciples depuis la Résurrection de Jésus. C’est le rappel que la Révélation vient

rejoindre les êtres humains pour aujourd’hui : « Avant d’être portée comme mémoire du

passé, la Révélation du Seigneur s’est affirmée comme promesse, ouvrant l’histoire,

l’orientant vers des possibilités inespérées. C’est ce qui s’est produit avec Abraham et

Moïse, par exemple »114.

113 Jean-Guy Nadeau, « La prospective en praxéologie pastorale, » dans La praxéologie pastorale :

Orientations et parcours Tome II, dir. Jean-Guy Nadeau et Section des études pastorales Faculté de Théologie

(Montréal : Fides, 1987), 262. 114 Idem, 264.

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L’étape de la prospective est le temps de vérifier les possibles de l’hypothèse ou de sa

transformation dans la paroisse. Elle propose des moyens pour arriver à réaliser l’hypothèse

retenue en tenant compte du contexte actuel. Elle met en évidence les pas à faire, les étapes

à franchir, la formation à acquérir, les conversions, les ruptures et les aspects des pratiques

à poursuivre. La prospective ouvre aussi sur un questionnement à savoir si la pratique

étudiée peut se réaliser dans d’autres lieux et d’autres milieux.

1.4 Conclusion du chapitre

Opter pour la discipline de la théologie pratique à l’aide de la démarche de la recherche-

action, c’est s’engager dans une démarche inductive. C’est prendre le pari de Jésus Christ

qui, par l’action de l’Esprit-Saint, continue d’inspirer le Peuple de Dieu afin de découvrir le

plan du Salut pour le monde contemporain. La pratique et la problématique de la catéchèse

dans le processus de l’évangélisation constituent une situation complexe. Il est nécessaire

d’ouvrir ses horizons pour bien saisir toute l’ampleur de la problématique. Il est nécessaire

de sortir des sentiers battus. La méthode de la recherche-action permet de tenir compte de

l’expérience des gens qui sont sur le terrain et également de faire appel aux autres

expériences et réflexions de nombreux théologiens et acteurs de la catéchèse.

C’est avec cette méthode que je scruterai dans le prochain chapitre le contexte de la

pratique étudiée. Quels sont les enjeux de l’implantation des parcours catéchétiques dans

une paroisse qui n’a fait depuis 1984 que de la préparation aux sacrements à partir de la

politique des évêques catholiques du Québec115 ?

115 Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales.

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59

Chapitre 2 : Description de la pratique et formulation de

l’hypothèse de départ

Toute pratique pastorale s’inscrit toujours dans un lieu précis qui a son histoire, sa tradition,

ses interactions avec le contexte ecclésial, social, politique et culturel. Dans le premier

chapitre, j’ai présenté la méthode de recherche. Dans le deuxième chapitre, je décris le

contexte dans lequel a évolué la recherche-action et je nomme les premiers éléments de la

problématique de la recherche. Comme je suis dans une démarche de recherche-action, ma

posture sera celle du théologien qui est à la fois chercheur et acteur. Œuvrer comme pasteur

d’une paroisse, c’est accompagner humainement et spirituellement des hommes et des

femmes qui veulent vivre l’Évangile en relevant les défis, les joies et les peines dans

l’actualisation de la Bonne Nouvelle. Pour réaliser cette démarche de théologie pratique,

dans la communauté paroissiale, j’ai pu compter sur la collaboration de quelques membres

de l’équipe pastorale paroissiale et de bénévoles. Pour vous situer, je commence par le récit

d’une expérience qui illustre plusieurs enjeux de cette recherche.

Au mois de septembre 2005, je me retrouve, à 19 h, dans la salle paroissiale avec plusieurs

membres de l’équipe pastorale paroissiale. L’équipe pastorale paroissiale avait préparé

fébrilement la rencontre des parents dans les semaines précédentes et nous en étions aux

derniers préparatifs. Je pressens que ce moment est un tournant majeur pour la paroisse. À

cette soirée, l’équipe pastorale paroissiale propose une nouvelle démarche catéchétique.

C’est le passage de la préparation aux sacrements à l’initiation chrétienne. C’est également

le passage de la préparation aux sacrements centrée exclusivement sur les enfants à une

catéchèse d’initiation chrétienne intergénérationnelle. Pour les parcours catéchétiques, on

demande que les enfants soient accompagnés d’un adulte significatif pour lui. Il peut s’agir

du père, de la mère, du grand-père, de la grand-mère, du parrain, de la marraine… Au début

de la rencontre, nous avons souhaité la bienvenue aux gens et présenté l’horaire de la

soirée. Suite à cette présentation, l’équipe pastorale paroissiale a nommé les changements

survenus dans la société québécoise dans le monde de l’éducation dont en particulier la

laïcisation des écoles publiques et les conséquences pour la pratique catéchétique

paroissiale. Au moment de la présentation du nouveau programme d’initiation chrétienne,

un parent lève la main et pose quelques questions en rafale: « Encore un changement!

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60

Qu’est-ce qui nous dit que vous ne changerez pas d’idée encore l’an prochain? Pourquoi

l’école ne fait-elle plus la catéchèse? Avez-vous pensé à nous, les parents, avec nos horaires

surchargés, qu’est-ce que nous allons faire? Êtes-vous sûrs que vous n’allez pas perdre des

gens avec vos affaires? Est-ce que mon jeune pourra faire sa première communion en

blanc? Pourquoi demandez-vous la présence des parents? Les rencontres tiendront-elles

compte des besoins de nos enfants? Qu’est-ce que vous nous offrez à nous, parents? ».

Les questions sont nombreuses. Plusieurs parents sont intervenus chacun à leur tour. Je me

suis senti débordé par l’ampleur des réactions. Je me souviens d’avoir dit : « C’est vrai que

tout change, la réalité est différente aujourd’hui, je ne peux même pas vous promettre que

tout cela ne changera pas demain. Mon objectif, c’est que je puisse vous aider à devenir

disciples de Jésus Christ ».

L’émotion dans l’assemblée est palpable. Un autre parent demande la parole à son tour, il

se retourne et se met face au groupe de parents en disant : « Pour moi, la foi c’est

important. Je n’ai pas tous les mots pour le dire, mais je trouve essentiel de m’engager et de

donner à mon enfant un héritage familial et de lui redonner sa religion. Ça vaut la peine de

s’y investir ». Il y a un silence, l’atmosphère devient plus sereine. Le climat change et les

parents commencent à partager leur propre expérience d’apprentissage de la foi dans leurs

mots et selon leur vocabulaire.

Je me risque à répondre à une question sur la pertinence de la présence des parents aux

diverses catéchèses. Je leur confie simplement que, sans leur appui, la paroisse aura beau

présenter les plus belles catéchèses avec les personnes les plus compétentes possibles, cela

ne remplacera jamais la présence des parents. Leur appui dans cette démarche d’initiation

chrétienne accentue de beaucoup l’efficacité, la crédibilité et la pertinence de la catéchèse

auprès des enfants. Plusieurs dizaines de parents se sont inscrits ce soir-là et c’est ainsi qu’a

commencé une transformation importante de la paroisse.

Auparavant, les écoles faisaient l’enseignement religieux et depuis 1983 les paroisses

donnaient la catéchèse immédiate pour la préparation de la célébration des sacrements de

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l’initiation chrétienne en trois ou quatre rencontres. Les parents n’avaient qu’à conduire

leurs enfants à l’église et venaient les chercher à la fin de la rencontre. Puis, ils se

présentaient avec leur famille aux célébrations du premier pardon, de la première

communion et de la confirmation. Maintenant, la catéchèse se vit par un parcours

catéchétique de trois ans dans lequel s’insèrent la préparation et la célébration des

sacrements de l’initiation chrétienne.

Ce passage de la préparation aux sacrements à une démarche d’initiation chrétienne est

crucial. Il s’est réalisé avec les moyens et l’expertise dont l’équipe pastorale paroissiale

disposait à ce moment. Dans toutes les étapes de changements importants ou de fondation

surgissent des réflexions, des idées nouvelles et des intuitions. Il y a toujours le danger

aussi de mettre en veilleuse ces intuitions importantes. Je veux dans cette recherche

m’interroger sur la place de la catéchèse et le rôle des catéchistes bénévoles dans ce

contexte paroissial.

Depuis plusieurs années, je m’étais investi dans la catéchèse. J’ai participé à la Recherche-

action du diocèse de Saint-Jérôme durant les années 1989-1995. Trois des conclusions de

cette recherche étaient pour moi autant de clefs permettant le renouvellement des pratiques

pastorales paroissiales : 1) tenir compte de l’importance des rapports intergénérationnels; 2)

repenser l’initiation chrétienne; 3) reconsidérer l’avenir de la paroisse avec les enjeux

socioculturels actuels116. Il s’agit de proposer une initiation chrétienne intergénérationnelle

au cœur de la vie paroissiale en lien avec les enjeux de la vie de la société d’aujourd’hui.

Mon désir, par cette recherche, c’est de prendre un temps de réflexion pour saisir et

approfondir ma compréhension de cette transformation qui s’enclenche. C’est à partir d’une

intuition personnelle et de mon expérience comme pasteur que j’ai formulé la question

initiale pour la recherche. Voici l’hypothèse que j’ai formulée au début de la phase

préliminaire de la recherche-action. Avec un regard critique sur la pratique étudiée, je vais

pouvoir soit la confirmer, l’infirmer ou la transformer par cette recherche :

116 Jacques Grand'Maison et al., Le défi des générations : enjeux sociaux et religieux du Québec

d'aujourd'hui : recherche-action, sixième dossier, 448-452.

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Hypothèse de recherche : Un des rôles de l’équipe pastorale paroissiale, dans la

paroisse, est d’animer le service de catéchèse. Donc, d’interpeller, de former,

d’insérer, d’accompagner les catéchètes bénévoles dans la vie paroissiale.

L’équipe pastorale a aussi pour but, par l’animation du service de la catéchèse,

de favoriser la participation des personnes catéchisées aux diverses activités de

la vie paroissiale117.

Tout ne pourra pas être étudié. J’ai fait des choix et des champs d’études immenses restent

encore à explorer. Je pense entre autres à toutes les pratiques d’évangélisation qui touchent

la première annonce ou la maturation de la foi. Je vais me concentrer sur la pratique de la

catéchèse et ses enjeux dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila en 2005-2007.

2.1 Description du contexte de la recherche

La recherche s’est effectuée à la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila dans le diocèse de Saint-

Jérôme. Dans cette section, je présente quelques caractéristiques du diocèse, de la paroisse

et du milieu où s’est vécue cette recherche. Cette description est nécessaire afin de

comprendre, dans les autres chapitres, l’ancrage de la pratique et les défis qui se rapportent

à l’hypothèse de départ.

2.1.1 Le diocèse de Saint-Jérôme

Le diocèse de Saint-Jérôme a été fondé le 23 juin 1951 par le pape Pie XII118. Ce diocèse

est une jeune Église particulière qui a été façonnée par plusieurs événements. Elle est née

au moment où l’Action catholique rayonnait dans diverses communautés locales et

plusieurs mouvements du Québec. C’est une Église qui avait peu de moyens financiers.

Elle était composée de plusieurs régions, très différentes les unes des autres, avec peu de

points communs, sauf d’être en banlieue de Montréal :

117 Annexe 2. 118 Gérard Lajeunesse, Une Église se raconte : Saint-Jérôme 1951-2001, Carte Blanche éd. (Montréal :

2001).

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Le territoire du diocèse était donc un damier aux multiples couleurs. On ne

pouvait parler de cohérence ou de solidarité. Encore moins d’identification

interne. La seule identification semblait être celle de Montréal119.

Un premier trait caractéristique de la pratique étudiée, c’est qu’elle se situe dans un diocèse

fondé en 1951 formé de régions différentes. Ce n’est pas un milieu homogène. Voici

quelques statistiques qui décrivent bien les conditions de départ de cette Église : « 80 000

fidèles, 41 paroisses, 131 prêtres dont 111 séculiers, 142 frères, 445 religieuses, 1 collège

classique, 1 école normale et 1 hôpital »120. Je vous présente un tableau afin de vous

montrer l’évolution du diocèse au cours des soixante dernières années.

Tableau 3 : Description du diocèse de Saint-Jérôme 1951 et 2011

Fondation

du diocèse 1951

2011121 Différence

Population

catholique

80 000 407 065 327 065 de plus

Paroisses 41 39 Deux paroisses de moins

Prêtres 111 séculiers

20 religieux

66 prêtres séculiers

20 prêtres religieux

45 prêtres séculiers de moins

Catholiques

par prêtres

610 4733 Augmentation de 4123

catholiques par prêtres

Religieux

Religieuses

142

445

10

100

Diminution de 132

Diminution de 345

Agent, agentes

de pastorale

0 79 Nouvelle réalité

Diacre

permanent

0 18 Nouvelle réalité

Ratio des

diocésains par

rapport aux

intervenants

pastoraux

111 1389 Augmentation de plus de

1000 % des diocésains par

rapport aux intervenants

pastoraux

Nous observons à la fois l’augmentation de la population et l’émergence de nouveaux

ministres comme les agents de pastorale laïques et les diacres permanents. Mais il y a une

119 Idem, 17. 120 Idem, 12. 121 Yvon Métras dir., Annuaire de l'Église catholique au Canada : Canadian Catholic Church Directory

(Montréal : Novalis, 2011), 289.

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forte diminution du nombre de prêtres et de personnes consacrées. Si nous faisons le total,

pour l’année 2011, des personnes engagées comme prêtres, personnes consacrées et les

nouveaux ministres, nous arrivons à la conclusion que l’émergence des nouveaux

ministères n’a pas réussi à combler la diminution du personnel pastoral dans l’ensemble de

l’Église diocésaine depuis sa fondation. Il y a plus de gens, plus de besoins et moins

d’effectifs pour réaliser la mission de l’Église. Ce déficit explique en partie la difficulté de

l’Église à relever les défis de l’évangélisation aujourd’hui.

Un deuxième trait caractéristique du milieu, c’est que malgré la création de nouveaux types

d’intervenants pastoraux, comme les agents de pastorale et les diacres permanents, les

intervenants pastoraux sont moins nombreux et les catholiques ont augmenté depuis la

fondation du diocèse. Le ratio des intervenants pastoraux par rapport aux diocésains a

augmenté de plus de 1000 %.

Dans les pages qui suivent, je fais mention de quelques événements qui ont façonné la

courte histoire du diocèse de Saint-Jérôme et leur contribution au développement de

l’Église du Québec. Le premier événement est la réalisation d’une enquête sociologique

avec la participation de Fernand Dumont, sociologue, théologien, poète et essayiste. Il a été

professeur à l’Université Laval et a travaillé sur les enjeux de la société québécoise. Cette

enquête a été commandée par Monseigneur Émilien Frenette, premier évêque du diocèse de

Saint-Jérôme :

En 1956, Mgr Frenette, évêque de Saint-Jérôme, confiait au Centre de

recherches de la Faculté des sciences sociales de l’Université Laval une étude

sociologique de son diocèse; cette enquête devait servir, en particulier, à la

préparation d’une mission diocésaine analogue à celles qui se pratiquent en

France depuis quelques années122.

Ce document témoigne de la vie du début du diocèse. Il fut réalisé en juillet et août 1956 et

a été publié quelques années plus tard123. Dès le début du diocèse, Mgr Émilien Frenette a

le souci d’utiliser les sciences humaines afin de « nommer, décrire » la vie de cette Église

122 Fernand Dumont, L'analyse des structures sociales régionales : Étude sociologique de la région de Saint-

Jérôme (Québec : Presses de l'Université Laval., 1963), 5. 123 Ibid.

Page 85: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

65

naissante. Les résultats de cette enquête inspireront et modèleront la vie et la façon de

penser du diocèse.

Le deuxième événement est la réalisation des résultats de cette enquête par la proposition

d’un projet pastoral pour le diocèse consigné dans le document : La mission du diocèse de

Saint-Jérôme124. Mgr Émilien Frenette insistait pour que l’Église diocésaine soit à la fois

fidèle à l’Évangile et puisse s’adapter aussi aux nouveaux contextes sociaux et religieux de

son temps. Il s’inspirait de la doctrine sociale de l’Église qui a inspiré les mouvements

d’Action catholique :

Le succès visible et bien prometteur de notre Grande Mission, nous pouvons le

résumer, comme tout ce rapport, en deux traits réconfortants : adaptation et

unité de notre Église diocésaine, dans sa pastorale et son apostolat. Pie XII le

rappelait dans un discours du 29 avril 1949 : « Le Corps Mystique du Christ ne

vit pas et n’agit pas dans l’abstrait, en dehors des conditions constamment

changeantes du temps et du lieu; il est toujours de son siècle, il avance avec lui,

de jour en jour, d’heure en heure, adaptant continuellement ses manières et son

attitude à celles de la société au milieu de laquelle il doit agir »125.

La Grande Mission a eu pour objectif de vivifier la foi dans le diocèse de Saint-Jérôme.

Elle visait trois grands objectifs : l’éducation de la foi afin de vivifier les communautés

chrétiennes, la liturgie comme source de vie et l’apostolat comme activité de

renouvellement du tissu social126. Cette mission a mobilisé presque toutes les forces vives

du diocèse à l’époque. À la fin de cette grande opération pastorale, il y a eu six grandes

recommandations. Voici la liste des six grands chantiers : prédication, catéchisme, liturgie,

apostolat laïque, action sociale et éducation127. Un des constats que fait le diocèse à cette

époque, c’est l’écart. Un fossé croissant entre la vie rituelle des gens et la vie séculière. Les

diocésains en général ont comme une « double vie » : la première liée à la pratique rituelle

et l’autre à la vie sociale politique. Il est observé que les gens ont peu de connaissances de

la foi. Pour remédier à cet écart entre la vie séculière et la vie rituelle, on formule quelques

124 Paul-Émile Charbonneau et Maurice Matte, La mission du Diocèse de Saint-Jérôme: une expérience

canadienne de mission générale (Montréal : Fides, 1960). 125 Idem, 7. 126 Idem, 40. 127 Idem, 125-134.

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pistes d’actions. La première piste fut de demander aux prêtres de mieux préparer leurs

prédications pour qu’elles soient des lieux de formation à la vie chrétienne. La deuxième

piste fut le renouvellement de la manière de faire le catéchisme en tenant compte des

découvertes en Bible, en théologie, en catéchèse et en liturgie. À l’époque, on peut noter

une difficulté à faire le catéchisme.

Ces deux documents montrent l’influence de l’Action catholique sur le diocèse et celle de

son type d’analyse : voir, juger et agir. Il identifie déjà le début de la sécularisation de la

société et de l’Église. Je peux identifier comme troisième trait du milieu paroissial que

l’écart entre la vie de foi et la vie séculière est présent avant 1960 dans le diocèse de Saint-

Jérôme. On note également le manque de motivations des jeunes pour vivre le catéchisme.

À l’aube de la Révolution tranquille, l’écart se creuse doucement entre la vie de foi et la vie

courante des gens.

Un autre événement qui marquera le diocèse est la transformation des écoles catholiques en

écoles publiques neutres; cela a commencé par le Séminaire de Sainte-Thérèse qui devient

le Cégep Lionel Groulx en 1967. Cette orientation se poursuit par la laïcisation du réseau

des autres institutions scolaires qui aboutira à la loi 118, le 16 juin 2000 et par la loi 95, le

17 juin 2005. La loi 118 change le statut des commissions scolaires confessionnelles pour

celui de commissions scolaires linguistiques. Au même moment, se termine l’animation

pastorale scolaire dans les écoles publiques au niveau du primaire qui se vivait en

partenariat avec les paroisses128. Le diocèse devra mettre à pied 67 agents de pastorale,

majoritairement des femmes, qui assuraient la présence de l’Église dans les écoles

publiques primaires du diocèse. Elles faisaient le lien entre l’école, la paroisse et les

familles. C’est aussi la disparition du service de pastorale scolaire dans les écoles publiques

au niveau du secondaire. Ces deux services seront remplacés par des services

complémentaires d’animation spirituelle et d’engagement communautaire. La loi 95

remplace définitivement l’enseignement moral et religieux, catholique ou protestant, par un

128 Projet de loi 118: Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le secteur de l'éducation concernant

la confessionnalité, première session, trente-sixième législature.

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67

cours d’éthique et de culture religieuse129. Cette loi, par son article 13, change un des

articles de la Charte des droits et libertés de la personne :

Tableau 4 : Changement du texte de la charte québécoise :

Charte des droits et libertés de la personne

Ancienne version Nouvelle version

Les parents ou les personnes qui en tiennent

lieu ont le droit d’exiger que dans les

établissements d’enseignement publics,

leurs enfants reçoivent un enseignement

religieux ou moral conforme à leurs

convictions, dans le cadre des programmes

prévus par la loi.

Les parents ou les personnes qui en tiennent

lieu ont le droit d’assurer l’éducation

religieuse et morale de leurs enfants

conformément à leurs convictions, dans le

respect des droits de leurs enfants et de

l’intérêt de ceux-ci.

Les parents perdent leur droit d’exiger que les établissements d’enseignement publics

puissent leur offrir un enseignement moral conforme à leurs convictions. C’est le

gouvernement qui prendra ce droit et l’exercera en proposant un programme pour tous. Les

parents deviennent responsables de l’enseignement religieux de leurs enfants, mais celui-ci

est encadré par le respect du droit des enfants qui sera déterminé par le gouvernement. Ces

deux projets de loi renvoient directement la responsabilité de la formation religieuse aux

parents et indirectement aux groupes religieux. L’éducation religieuse devient une question

privée. Un quatrième trait de la pratique qui est étudiée, c’est le changement radical dans

les acteurs de la formation chrétienne des jeunes. Les responsables de la formation

chrétienne avant la loi 118 étaient l’école, la famille et la paroisse. À partir de l’an 2000,

c’est la famille et la paroisse qui deviennent les acteurs de la formation chrétienne des

jeunes. L’éducation religieuse devient une affaire strictement privée, l’État se réservant un

enseignement religieux général sans l’accord des parents. L’école n’est plus qu’un lieu de

formation générale présentant les grandes religions et proposant une attitude de dialogue

entre elles.

129 Projet de loi 95 : Loi modifiant diverses dispositions législatives de nature confessionnelle dans le domaine

de l'éducation, première session, trente-septième législature.

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68

Deux autres événements, à caractère social, marquent l’imaginaire des diocésains et aussi

de toute la population du Québec. Le premier événement s’appelle : l’expérience de

Tricofil130. Le deuxième événement est l’expropriation des terres de Mirabel pour la

construction de l’aéroport international de Montréal131. Ces événements, par leurs aspects

sociaux et dramatiques, justifient toute l’attention de l’Église diocésaine. À l’usine Tricofil,

plusieurs intervenants pastoraux, dont Jacques Grand’Maison, vont accompagner des

travailleurs dans une expérience de cogestion d’entreprise afin d’essayer de sauver leurs

emplois. Jacques Grand’Maison est un prêtre du diocèse de Saint-Jérôme qui est

théologien, sociologue et écrivain. Il a été professeur à l’Université de Montréal en

théologie et a participé à de nombreuses équipes de recherche sur la pastorale, la culture, la

politique. Par ce mouvement social, des dizaines de personnes se mobiliseront pour la

défense des ouvriers lors des restructurations et des fermetures des industries du textile132.

L’objectif est de sauver et conserver les emplois des ouvriers et de les habiliter à la gestion

de leur entreprise.

Une expérience semblable sera vécue avec les gens expropriés pour la construction de

l’aéroport de Mirabel. Plusieurs prêtres et agentes de pastorale vont appuyer les agriculteurs

afin de les aider à se faire entendre et les aider dans leurs revendications auprès du

gouvernement fédéral. Mgr Charles Valois s’associera à ce mouvement social par diverses

interventions auprès des différents paliers des gouvernements fédéral et provincial afin

d’aider les expropriés de l’aéroport de Mirabel qui demandaient la rétrocession des

terres133. Mgr Charles Valois a été le troisième évêque du diocèse de Saint-Jérôme de 1977

à 1997. L’Église de Saint-Jérôme a toujours été sensible à la justice sociale.

La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila s’inscrit dans cette orientation de l’Église diocésaine et

participe à plusieurs œuvres sociales. Tous les ans, la paroisse organise la guignolée afin de

130 Paul-André Boucher et al., Tricofil tel que vécu! (Montréal : Éditions C.I.R.I.E.C. : Presses H.E.C., 1982). 131 Jean-Paul Raymond et Gilles Boileau, La mémoire de Mirabel : le président des expropriés, Jean-Paul

Raymond, se raconte à Gilles Boileau, Collection Témoignage (Montréal : Méridien, 1988). 132 Jacques Grand’Maison, Une tentative d'autogestion (Montréal : Presses de l’Université de Montréal,

1975). 133 Charles Valois, Le courage de changer (Montréal : Novalis, 2009), 149-163.

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ramasser des fonds pour les démunis. Plus de 200 bénévoles participent à cette activité et

plus spécialement les jeunes et leurs familles qui sont inscrits aux parcours catéchétiques.

Ces fonds seront distribués en partie par l’organisme du Panier d’épicerie populaire. Cet

organisme regroupe les paroisses environnantes et d’autres organismes sociaux pour la

distribution des denrées pour les pauvres pendant la période de Noël. La paroisse dans son

histoire a créé deux organismes qui s’occupent de la récupération des vêtements qui sont

vendus à prix modique à des personnes pauvres. Ces deux organismes, Dépanne-tout, La

société d’entraide familiale de Sainte-Thérèse, sont devenus des corporations à but non

lucratif autonomes qui continuent de collaborer avec la paroisse. La paroisse continue son

aide aux pauvres en partenariat avec trois organismes du milieu : Regain de Vie, le Centre

d’entraide de Sainte-Thérèse-de-Blainville et les Chevaliers de Colomb. Le cinquième trait

de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, c’est que celle-ci continue son partenariat avec les

organismes sociaux du milieu pour aider les démunis.

Un autre événement marquant est le projet du diocèse pour l’animation des communautés

chrétiennes. À cause de la diminution du nombre de prêtres dans le diocèse et dans le souci

de développer une plus grande participation des laïcs à la vie interne de l’Église diocésaine,

Mgr Charles Valois a développé le concept de laïcs « responsables de paroisse » en se

basant sur une interprétation du canon 517 § 2 du droit canonique de 1983134. Ces

orientations se retrouvent dans le document : « L’animation des communautés paroissiales

dans l’Église de Saint-Jérôme » du 29 juin 1994. Ce modèle, au cours de l’année pastorale

2006-2007, se vivait dans 19 communautés paroissiales sur 39 dans le diocèse de Saint-

Jérôme.

Le plan quinquennal de réaménagement des communautés paroissiales 1999-2004 a

transformé l’Église diocésaine. Ce plan est inspiré d’une lettre pastorale de Mgr Gilles

Cazabon, quatrième évêque du diocèse de Saint-Jérôme de1997 à 2008 : « Faire Église

autrement »135. L’objectif de la lettre est d’orienter le diocèse vers une nouvelle

134 Église Catholique, Code de droit canonique : Édition bilingue et annotée traduit par código de derecho

canónico (Montréal : Wilson & Lafleur ltée, 1990), 332. 135 Gilles Cazabon, Faire Église autrement (Saint-Jérôme : Diocèse de Saint-Jérôme, 1999).

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organisation de l’animation des paroisses en secteurs ou la fusion de plusieurs paroisses.

Les secteurs sont des regroupements de plusieurs communautés paroissiales :

À partir de l’expérience de secteurs existants ou à identifier plus clairement à

l’avenir, naît dans certains milieux le besoin d’un nouveau modèle

d’aménagement pastoral. Ce modèle pourrait nous acheminer éventuellement

vers la nomination d’un personnel pastoral non plus pour une ou des paroisses

prises individuellement, mais pour un secteur comme tel. Ce modèle irait dans

le sens d’une « sectorisation » de l’activité pastorale paroissiale136.

Ce plan de réaménagement se poursuit actuellement. Il a donné lieu à plusieurs

regroupements de paroisses qui sont devenues de nouvelles paroisses.

La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est une des plus anciennes paroisses du diocèse de

Saint-Jérôme. Elle a été fondée en 1789 et a connu quinze remodelages de territoire depuis

sa fondation. Le territoire d’origine correspond à l’actuelle MRC Sainte-Thérèse-de-

Blainville sans la ville de Sainte-Anne-des-Plaines, avec une petite partie de la municipalité

de Mirabel sur son côté est. Depuis sa fondation, elle a donné naissance à treize autres

paroisses. Cependant, avec le projet de réaménagement des paroisses en 2007, le territoire

d’origine se trouve actuellement subdivisé en 6 paroisses francophones et une paroisse

anglophone située à Rosemère. La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, en 2007, regroupe trois

anciennes paroisses : Sainte-Thérèse-de-Blainville, Saint-Jean-de-la-Croix et Sacré-Cœur.

La paroisse Saint-Jean-de-la-Croix a été fusionnée à la paroisse Sainte-Thérèse-de-

Blainville en 1997. Le milieu dans lequel se vit cette recherche a connu un regroupement de

paroisses au cours des années 2002-2005. Les deux paroisses de Sainte-Thérèse-de

Blainville et de Sacré-Cœur sont fusionnées et prennent le nom de Sainte-Thérèse-d’Avila.

Un sixième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila c’est que l’équipe pastorale

paroissiale anime trois communautés locales : Sainte-Thérèse-de-Blainville, Saint-Jean-de-

la-Croix et Sacré-Cœur.

136 Idem, 4.

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71

Un des derniers événements majeurs du diocèse fut le lancement de la Mission

catéchétique137. Deux documents diocésains indiquent les orientations du diocèse dans ce

domaine. Le premier document est un envoi en mission de l’Église diocésaine afin de

remplacer l’enseignement religieux catholique qui n’existe plus dans les écoles dans la suite

des conséquences de la loi 118. Le document invite les paroisses et les diocésains à

développer une pastorale qui invitera les gens de tous âges à opter pour une catéchèse

d’initiation. Le deuxième document est une proposition de réalisation des orientations de

l’Assemblée des évêques catholiques du Québec contenue dans : « Jésus Christ, chemin

d’humanisation »138. Ce document se nomme : Semer l’Évangile dans le champ du monde.

Mgr Gilles Cazabon souligne dans la présentation du document : « Nous désirons inscrire

la formation à la vie chrétienne de l’Église de Saint-Jérôme dans l’élan de la nouvelle

évangélisation que le Pape Jean-Paul II a donné à toute l’Église »139. Un septième trait que

nous pouvons identifier, c’est que la formation à la vie chrétienne devient une priorité pour

le diocèse et que les paroisses doivent proposer des catéchèses d’initiation.

Tels sont les grands événements et les courants de réflexions qui ont marqué la vie

diocésaine et qui ont influencé le milieu où se vit la recherche. Le diocèse de Saint-Jérôme,

au cours de son histoire, a été façonné par la mentalité de l’Action catholique. La pastorale

sociale est une grande préoccupation. C’est un diocèse qui fait une place importante au

laïcat dans ses structures internes. Plusieurs laïcs sont impliqués comme agentes et agents

de pastorale et participent à la charge pastorale des prêtres. C’est un diocèse qui a fait

l’option de regrouper les communautés paroissiales pour former des équipes pastorales

composées de prêtres et de laïcs. Pour la formation à la vie chrétienne, il privilégie la

formation des adultes. Dans cette section, j’ai décrit quelques éléments caractéristiques de

l’histoire du diocèse de Saint-Jérôme et ses grandes orientations. Dans la prochaine section,

on pourra constater comment ces options ont influencé l’organisation pastorale de la

paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila.

137 Gilles Cazabon, Une grâce pour notre Église : Envoi en mission catéchétique (Saint-Jérôme : Diocèse de

Saint-Jérôme, 2002). 138 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation

à la vie chrétienne. 139 Diocèse de Saint-Jérôme, Semer l'Évangile dans le champ du monde (Saint-Jérôme : Dizones inc., 2004).

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72

2.1.2 Paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila se situe au Centre-Sud du diocèse de Saint-Jérôme, au

carrefour de deux axes routiers importants : l’autoroute 15 et l’autoroute 640. Elle est aussi

traversée du nord au sud par la route 117 et l’autoroute 15. L’autoroute 13 est située à

quelques kilomètres à l’ouest. La paroisse est au centre de la municipalité régionale de

comté Thérèse-de-Blainville. C’est une petite MRC en superficie, mais elle a une

population importante. Voici comment cette MRC se décrit :

On compte 88 MRC au Québec et celle de Thérèse-de-Blainville figure parmi

les trois plus importantes du Québec en termes de population, qui atteint plus

de 143370 personnes. Avec sa petite superficie de 202,54 km2, elle est la

deuxième MRC du Québec, après Laval, sur le plan de la densité de

population140.

C’est un milieu urbain situé en banlieue nord de Montréal. Les limites territoriales de la

paroisse ne correspondent pas aux diverses limites municipales. La paroisse recoupe des

parties de plusieurs municipalités : Sainte-Thérèse, Blainville, Boisbriand, Mirabel et

Rosemère. Cette situation géographique complique la description de sa population, car les

données officielles des municipalités, de la province du Québec et du recensement du

Canada suivent les frontières municipales.

Pour donner une idée des différents secteurs de la paroisse, je vais présenter les

caractéristiques des villes qui recoupent la paroisse et je ferai une pondération selon le

nombre de ménages de chacune d’elles. Je m’inspire des statistiques des différentes

municipalités. Je prends en compte le nombre de logements par secteur ou par rue, et

également les données qui sont actualisées tous les ans lors de la guignolée à la paroisse

Sainte-Thérèse-d’Avila. Voici le nombre de ménages qui ont été répertoriés en 2007 : ville

de Sainte-Thérèse 10 264, ville de Blainville 3 649, ville de Mirabel 582, ville de

Boisbriand 227, ville de Rosemère 127. Afin de visualiser où se trouve cette ville, je vous

présente une carte de la région. Les limites de la paroisse sont marquées d’une ligne

pointillée.

140 Société de développement économique SODET, MRC de Thérèse-de-Blainville (2009 [visité le 11 mars

2009]); accessible à http://www.sodet.com/Mr/mrc.asp>.

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73

Tableau 5 : Carte de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila 2007141

Pour voir l’évolution de la population, je vous propose d’observer l’évolution

démographique des cinq villes, au cours des vingt dernières années, par un tableau réalisé à

partir des statistiques des recensements du gouvernement du Canada. J’utilise la période

1991 et 2006, car c’est la plus proche du moment où s’est vécue la recherche-action en

2007.

141 Mapmobility, « Laval & les Basses-Laurentides », (Saint-Laurent : JDM Géo & Les publications Mapart,

2008).

Page 94: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

74

Tableau 6 : Populations des villes qui recoupent la paroisse

Sainte-Thérèse-d’Avila de 1991 à 2006

Villes Sainte-

Thérèse142

Blainville 143

Boisbriand144 Mirabel145 Rosemère146

Province

de

Québec

Recensement

1991

21 300 22 679 21 124 17 838 11 416 6 895

963

Recensement

1996

23 477 29 603 25 277 22 330 12 025 7 138

795

Recensement

2001

24 269 36 029 26 729 27 330 13 391 7 237

479

Recensement

2006

25 224 46 493 26 483 34 626 14 173 7 546

131

Augmentation

de population

entre 1991 et

2006

18.42 % 105.00 % 25.36 % 94.11 % 24.15 % 9.42 %

La population de la région s’est accrue rapidement dans les vingt dernières années. On

constate que les villes de Blainville et Mirabel ont doublé leur population. Pour ce qui est

des autres villes, elles ont crû deux fois plus rapidement que la population du Québec. Ces

142 Statistique Canada, Profil des communautés, ville de Sainte-Thérèse (Gouvernement du canada, 2006

[visité le 11 mars 2009]); accessible à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2473010&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&Search

Text=Sainte-Thérèse&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=, Idem, Idem, Idem 143 Statistique Canada, Profil des communautés, ville de Blainville (2006 [visité le 11 mars 2009]); accessible

à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2473015&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&Search

Text=blainville&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=, Idem 144 Statistique Canada, Profil des communautés, ville de Boisbriand (2006 [visité le 11 mars 2009]);

accessible à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2473005&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&Search

Text=Boisbriand&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=, Idem 145 Statistique Canada, Profil des communautés, ville de Mirabel (2006 [visité le 11 mars 2009]); accessible à

http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/Page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2474005&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&Search

Text=mirabel&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=, Idem 146 Statistique Canada, Profil des communautés, ville de Rosemère (2006 [visité le 11 mars 2009]); accessible

à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/Page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2474005&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&Search

Text=mirabel&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=.

Page 95: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

75

données amènent à nommer un huitième trait : l’augmentation rapide de la population de la

région et de la paroisse.

La ville de Sainte-Thérèse et surtout le quartier historique constituent le centre de la

paroisse. Plusieurs institutions se retrouvent regroupées au centre de la paroisse autour de

l’église Sainte-Thérèse-d’Avila. Il s’agit du Cégep Lionel-Groulx, du CLSC et du CHSLD

Drapeau-Deschambault. Le Cégep Lionel-Groulx comptait pour l’année scolaire 2006-

2007, 4109 étudiants dont 2648 étudiants inscrits dans les programmes préuniversitaires et

1279 inscrits en programmes d’études techniques, 939 étudiants étaient inscrits dans les

domaines des arts et lettres, des arts plastiques, de la musique et du théâtre, soit 22 % de la

population étudiante147. De nombreux organismes culturels gravitent autour du Cégep,

comme des écoles de musique. Certains projets sont réalisés en partenariat avec les

municipalités environnantes. D’ailleurs, la ville de Sainte-Thérèse se déclare ville d’arts et

de culture. Il y a plusieurs autres écoles sur le territoire de la paroisse, neuf écoles primaires

publiques, trois écoles secondaires dont une privée et deux centres de formation pour les

adultes148. Un neuvième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, c’est l’existence de

quinze institutions d’enseignement allant du primaire au Cégep sur le territoire de la

paroisse. La région est caractérisée par un ensemble de quartiers résidentiels offrant

plusieurs services et commerces. Les industries manufacturières ne font travailler qu’une

faible partie de la population. Une grande majorité des travailleurs se déplacent vers Laval

et l’île de Montréal pour travailler. C’est une banlieue proche de Montréal desservie par un

réseau de transports en commun, dont un train de banlieue.

Lors de mon arrivée comme administrateur paroissial en 2002, plusieurs membres de mon

équipe pastorale paroissiale me disaient que la population de la paroisse était surtout âgée et

pauvre. C’est pour cela que je trouve important de vérifier si la population de la paroisse est

vieillissante et/ou pauvre. Pour m’aider dans cette observation, je prendrai les données des

différents recensements du Canada de 1996, 2001, 2006. J’ai choisi plusieurs données liées

147 Collège Lionel-Groulx, « Rapport annuel 2006-2007 », (Sainte-Thérèse : 2007). 148 Commission scolaire de la Seigneurie-des-Mille-Îles, École et centres - présentation (2009 [visité le 11

mars 2009 ]); accessible à https://bv.cssmi.qc.ca.

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76

à la population : l’âge, les familles, les ménages, le logement, la langue, la mobilité, le

travail et le pourcentage de gens à faible revenu.

Je présente deux tableaux dans cette section. Les tableaux 7 et 8 sont la description des

deux villes les plus importantes dans la paroisse avec comme point de comparaison les

données de l’Institut de la statistique du Québec. Les tableaux 9 et 10 tracent le portrait des

trois autres villes qui recoupent la paroisse dans des secteurs moins importants. Pour aider à

comprendre les proportions des différentes villes dans la paroisse, je vais indiquer le

nombre de ménages par ville et leur proportion pour l’ensemble de la paroisse Sainte-

Thérèse-d’Avila. Ces statistiques sont extraites du recensement 2006 du Canada ainsi que

des organismes d’urbanisme des différentes villes149.

Figure 5: Représentation des villes dans la paroisse Sainte-

Thérèse-d’Avila

149 Statistique Canada, secteurs de recensement (Gouvernement du Canada, [visité le 16 mai 2009]);

accessible à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-597/index.cfm?Lang=F.

La proportion de chacune des villes dans la paroisse Sainte-Thérèse-d'Avila

Sainte-Thérèse

Blainville

Boisbriand

Mirabel

Rosemère

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Tableau 7 : Statistiques sur la population des villes Sainte-Thérèse, Blainville et de la Province

du Québec

Sous thème Ville de Sainte-Thérèse Ville de Blainville Province du Québec

Année de recensement Année de recensement Année de recensement

1996 2001 2006 1996 2001 2006 1996 2001 2006

Chiffre total de la population 23 477 24 269 25 224 29 603 36 029 46 493 7 138 795 7 237 479 7 546 131

Âge et sexe

% de la population âgée de 0 à 14 ans 18,0 16,3 14,2 25,9 26,5 25,7 19,2 17,8 16,6

% de la population âgée de 15 à 64 ans 71,1 70,7 68,7 69,9 68,6 68,6 68,7 68,9 69,1

% de la population âgée de 65 ans et plus 10,9 13,0 17,1 4,2 4,8 5,7 12,1 13,3 14,3

Âge médian 35,9 38,3 42,7 32,0 33,8 35,1 36,2 38,8 41,0

Familles et ménages

% de couples (mariés ou en union libre)

avec enfants (de tout âge)

56,3 50,9 44,3 68,1 66,0 65,3 59,6 55,4 51,7

% de couples mariés ou en union libre

avec un enfant de moins de 25 ans

51,4 45,5 40,7 65,2 63,6 62,8 54,9 50,7 46,9

Total des ménages privés 9 795 10535 11 745 10105 12 285 16 090 2 822 030 2 978 115 3 189 340

% des ménages formés d’une seule

personne

28,2 30,4 35,7 12,9 12,4 14,2 27,3 29,6 30,7

% de ménages comptant un couple avec

enfants

27,8 23,8 19,2 48,7 48,0 45,6 31,5 28,3 25,7

Taille moyenne du ménage 2,4 2,3 2,1 2,9 2,9 2,9 2,5 2,4 2,3

Revenu médian des ménages 42 321 45 275 45 102 62 032 70 286 75 770 42 714 45 371 46 419

Logement et coûts d’habitation

Total des logements privés occupés par

des résidents habituels

9 800 10535 11 745 10110 12 210 16 090 2 822 030 2 978 110 3 189 340

% des logements privés occupés possédés 45,7 46,0 47,6 77,8 82,8 84,1 56,5 57,9 60,1

% des logements privés, occupés ou loués 54,2 54,0 52,4 22,1 17,2 15,9 43,4 42,0 39,8

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78

Tableau 8 : Statistiques sur la population des villes Sainte-Thérèse, Blainville et province du

Québec

Sous thème Ville de Sainte-Thérèse Ville de Blainville Province du Québec

Année de recensement Année de recensement Année de recensement

1996 2001 2006 1996 2001 2006 1996 2001 2006

Chiffre total de la population 23 477 24 269 25 224 29 603 36 029 46 493 7 138

795

7 237

479

7 546 131

Langue

% de la population dont la langue

maternelle est l’anglais

3,5 3,2 3,8 2,1 2,4 2,8 8,3 7,8 7,7

% de la population dont la langue

maternelle est le français

91,7 92,2 90,8 93,1 92,8 91,4 80,9 80,9 79,0

% de la population dont la langue

maternelle est une langue non officielle

seulement.

3,6 3,8 4,5 3,7 4,0 4,8 9,3 10,0 11,9

Travail et revenu

Taux d’emploi 58,8 63,8 63,2 68,5 72,3 73,9 55,0 58,9 60,4

Taux de participation 65,5 67,7 66,8 74,8 75,9 77,4 62,3 64,2 64,9

Taux de chômage 10,2 5,9 5,3 8,5 4,7 4,5 11,8 8,2 7,0

% de personnes à faibles revenus avant

impôt

25,8 20,3 18,5 15,0 9,1 8,1 23,5 19,2 17,2

Mobilité et migration

% ayant habité à la même adresse 5 ans

auparavant

51,5 50,0 55,2 52,4 54,1 54,6 60,1 61,1 61,9

% ayant déménagé dans la même

subdivision de recensement (SDR)

20.9 18,2 15,1 15,9 13,8 13,9 21,4 19,9 20,6

Page 99: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

79

Tableau 9 : Statistiques sur la population des villes Boisbriand, Mirabel, Rosemère

Sous thème Ville de Boisbriand Ville de Mirabel Ville de Rosemère

Année de recensement Année de recensement Année de recensement

1996 2001 2006 1996 2001 2006 1996 2001 2006

Chiffre total de la population 25 227 26 729 26 483 22 689 27 330 34 626 12 025 13 391 14 173

Âge et sexe

% de la population âgée de 0 à 14 ans 27,7 26,9 23,7 25,5 25,3 24,0 23,8 23,0 19,9

% de la population âgée de 15 à 64 ans 68,4 68,2 69,5 67,6 67,6 68,9 67,4 67,6 69,5

% de la population âgée de 65 ans et plus 4,0 5,0 6,8 6,9 7,0 7,0 8,8 9,3 10,6

Âge médian 31,3 33,0 35,6 33,8 33,7 34,3 36,8 38,6 41,4

Familles et ménages

% de couples (mariés ou en union libre)

avec enfants (de tout âge)

70,2 67,2 64,1 65,3 62,7 60,8 68,8 67,3 65,7

% de couples (mariés ou en union libre

avec au moins un enfant âgé de moins de

25 ans

66,8 65,1 59,6 60,8 59,4 57,7 63,6 63,3 60,5

Total des ménages privés 8 620 9 275 9 575 7 945 9 760 12 715 4 020 4 500 4 875

% des ménages formés : une seule

personne

15,4 16,5 19,4 15,8 17,2 18,9 14,4 14,3 15,4

% de ménages, un couple avec enfants 46,9 44,6 38,0 44,2 42,4 39,5 48,0 47,6 44,9

Taille moyenne du ménage 2,9 2,9 2,8 2,8 2,8 2,7 3,0 2,9 2,9

Revenu médian des ménages 59 728 62 919 62 890 49 983 55 032 59 981 72 869 83 703 88 648

Logement et coûts d’habitation

Total des logements privés occupés par

des résidents habituels

8 620 9 275 9 570 7 945 9760 12 715 4 020 4 500 4 875

% des logements privés occupés possédés 65,7 68,7 68,5 72,3 74,7 76,1 87,1 88,9 91,2

% des logements privés, occupés ou loués 34,3 31,3 31,5 27,7 25,2 23,8 12,9 11,1 8,8

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80

Tableau 10 : Statistiques sur la population des villes Boisbriand, Mirabel, Rosemère

Sous thème Ville de Boisbriand Ville de Mirabel Ville de Rosemère

Année de recensement Année de recensement Année de recensement

1996 2001 2006 1996 2001 2006 1996 2001 2006

Chiffre total de la population 25 227 26 729 26 483 22 689 27 330 34 626 12 025 13 391 14 173

Langue

% de la population dont la langue

maternelle est l’anglais

3,0 3,0 2,4 2,0 1,7 1,5 18,3 15,8 14,4

% de la population dont la langue

maternelle est le français

88,3 86,1 86,7 96,1 96,1 96,3 73,3 76,3 76,3

% de la population dont la langue

maternelle est une langue non officielle

seulement.

7,4 10,0 9,9 1,2 1,4 1,6 6,8 6,3 7,4

Travail et revenu

Taux d’emploi 67,1 70,8 72,1 63,7 71,2 73,6 65,7 66,6 66,7

Taux de participation 73,9 74,1 75,3 70,5 74,4 76,6 70,1 69,7 69,0

Taux de chômage 9,2 4,5 4,3 9,6 4,3 3,9 6,3 4,4 3,2

% de personnes à faibles revenus avant

impôt

20,0 14,2 11,8 16,9 11,1 9,3 11,5 7,4 5,6

Mobilité et migration

% ayant habité à la même adresse 5 ans

auparavant

53,9 60,5 65,2 54,3 59,0 53,7 67,5 61,7 69,5

% ayant déménagé dans la même

subdivision de recensement (SDR)

16,2 14,3 12,9 16,0 12,8 12,7 10,2 9,3 6,7

Page 101: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

81

En observant les tableaux, je me rends compte qu’il y a deux catégories de population. La

population de la ville de Sainte-Thérèse présente des caractéristiques différentes des autres

villes. C’est une population qui a vieilli beaucoup plus vite que celle de la population de la

province. Plusieurs centres de personne âgées ont été construits afin de répondre aux

besoins de cette population au centre de la ville de Sainte-Thérèse. Ces résidences sont des

indices de ce vieillissement de la population locale : Le Jardin des sources, Les Résidences

du marché, Résidence Le 15 Lesage, Plein air, Le Boisé Sainte-Thérèse. C’est aussi une

ville qui a le plus haut taux de personnes qui vivent seules. Ce taux est presque le double de

toutes les autres villes environnantes.

Le revenu médian est légèrement au-dessous de la moyenne provinciale pour la ville de

Sainte-Thérèse soit environ 1 300 $. Le revenu médian est supérieur de 14 626 $ à 43 546 $

dans les municipalités riveraines. Une autre grande différence, c’est le pourcentage de

personnes qui vivent dans des logements loués. Il est de 52,4 % pour Sainte-Thérèse et

moins du tiers pour les autres villes.

Pour ce qui est de la langue maternelle, les villes se ressemblent davantage. Elles sont

composées par une forte majorité de personnes, plus de 86 %, qui parlent français.

Seulement la ville de Rosemère a une minorité anglaise plus importante qui se situe

actuellement à 14,4 %.

Le taux de chômage est très bas dans toutes les villes. Il est significativement en dessous de

la moyenne provinciale. La région vit dans une situation près du plein d’emploi. Les

personnes à faible revenu sont, d’après la définition de Statistiques Canada, des gens qui

dépensent 70 % ou plus de leur revenu total pour la nourriture, le logement et l’habillement.

C’est à Sainte-Thérèse que ce taux est le plus élevé, soit 18,5 %. Il est évident que la

situation s’est améliorée si on regarde les statistiques du recensement de 1996 où le taux

était de 25,8 %.

Avec l’observation de ces tableaux, nous pouvons arriver à la conclusion qu’il y a deux

réalités dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila. Il y a un secteur de la paroisse qui est plus

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82

âgé, plus pauvre et dont la majorité des gens sont locataires. Leur situation est soit égale,

soit légèrement inférieure à la moyenne provinciale. Les autres secteurs sont des quartiers

plus riches, plus jeunes avec un taux de chômage très bas, constitués de familles avec

plusieurs enfants. D’après ces statistiques, on peut déjà identifier deux portraits selon les

secteurs : un premier sous-groupe qui est minoritaire, environ 31 % des logements sont

habités par des familles ayant des revenus au-dessus de la moyenne nationale et un autre

sous-groupe d’environ 69 % qui a des caractéristiques semblables à ceux de la province du

Québec. Le secteur de la ville de Sainte-Thérèse est légèrement plus vieux que la

population en général et davantage locataire que propriétaire. Donc l’équipe pastorale

paroissiale a raison de dire qu’il y a plus de personnes âgées dans la paroisse que la

moyenne nationale pour un secteur important de la paroisse, mais dans son ensemble la

paroisse a des caractéristiques plus jeunes et plus riches que la population en général. En

comparaison des villes environnantes, le secteur autour du vieux Sainte-Thérèse a une

population plus vieille que les autres villes de la banlieue nord de Montréal. Comme

dixième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, on peut identifier deux groupes

socioéconomiques importants dans la paroisse, le premier groupe (69 % de la population)

est plus âgé, locataire et un peu plus pauvre que la moyenne nationale, le deuxième groupe

(31 % de la population) est composé de familles avec des enfants, propriétaires dont le

revenu est plus élevé que la moyenne nationale.

Je poursuis la description de la population de la région et de la paroisse en m’attardant sur

l’appartenance religieuse des citoyens. Les statistiques sur l’appartenance aux divers

groupes religieux sont disponibles pour le recensement de 2001 et 2011. Le recensement de

2006 ne comportait pas ces questions150. Je vais m’attarder à analyser les statistiques de

2001, car l’intervention se passe en 2007. Après une première analyse, je comparerai avec

les statistiques de 2011 pour observer s’il y a des changements significatifs dans

l’appartenance religieuse des gens. Je présente un tableau des différentes municipalités et

de l’appartenance religieuse de la population.

150 Statistique Canada, Profil des communautés 2001 (2001 [visité le 11 mars 2009]); accessible à

http://www12.statcan.ca/english/Profil01/CP01/Index.cfm?Lang=F, Idem

Page 103: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

83

Tableau 11 : Appartenance religieuse des personnes vivant dans

les villes de la paroisse de 2001

Sainte-

Thérèse

Blainville

Boisbriand

Mirabel

Rosemère

Total

Province du

Québec

POPULATION 24 269 36 029 26 729 27 330 13 391 7 237 479

TOTAL

RELIGION 23 865 36 015 26 670 27 110

13 220 7 125 580

Catholique 21 380 33 500 22 705 25 245 10 770 5 939 715

Pourcentage de

catholique 89.58 % 93.01 % 85.13 % 93.12 %

81.46 % 83.34 %

Protestante 470 615 550 440

(8.7 %)

1 160

(4.7 %)

335 590

Orthodoxe

chrétienne 90 15 95 10

255

100 375

Autres religions

chrétiennes 170 255 285 255

80

56 750

Musulmane 20 100 35 0 10 108 620

Juive 0 10

(5.4 %)

1 460 10

100

(1.2 %)

89 920

Bouddhiste 125 55 600 40 10 41 375

Hindoue 0 0 10 0 0 24 525

Sikh 0 0 0 0 0 8 225

Religions

orientales 10 10 15 0

0

3 425

Autres religions 70 0 0 0 0 3 870

Aucune

appartenance

religieuse

(6.4 %)

1 530

(4 %)

1 465

(3.4 %)

910

(4.1 %)

1 115

(6.2 %)

830

(9.8 %)

713 190

Comme on peut le constater, la population est majoritairement catholique. Deux minorités

religieuses sont localisées dans deux quartiers de la région chacun situé à deux ou trois

kilomètres de la paroisse. Il y a une communauté juive hassidique dans la ville de

Boisbriand. La ville de Rosemère a, depuis sa fondation, une communauté anglophone

dynamique qui anime le milieu. D’ailleurs, il y a plusieurs communautés protestantes et

tous les ans, il y a une rencontre œcuménique avec la paroisse catholique voisine qui se

nomme Saint-Luc. On peut constater avec le tableau que la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

est formée majoritairement de catholiques francophones. Le deuxième groupe par

importance dans toutes les villes est celui qui se déclare sans appartenance religieuse. Son

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84

taux est de 6.4 % pour la ville de Sainte-Thérèse et de 4 % pour Blainville. Par le

tableau 12, nous serons en mesure de voir l’évolution des tendances.

Tableau 12 : Appartenance religieuse des personnes vivant dans

les villes de la paroisse 2011151

Sainte-

Thérèse

Blainville

Boisbriand

Mirabel

Rosemère

Total

Province du

Québec

POPULATION 24 805 53 070 26 760 41 605 14120 7 732 520

TOTAL

RELIGION 24 800 53 070 26 760 41 605

14120 7 732 520

Catholique 19 785 44 555 20 180 35 020 10735 5 775 740

Pourcentage de

catholique 79.76 % 83.95 % 75.41 % 84.10 %

76.02 % 74.69 %

Protestante 145 365+ 140 105

445

202 805

Orthodoxe

chrétienne 65 325 205 100

190

129 780

Autres religions

chrétiennes 615 955 725 965

315

248 560

Musulmane 240 460 290 115 140 243 430

Juive 25 0 2080 40

35 85 100

Bouddhiste 75 165 385 55 45 52 390

Hindoue 0 20 0 0 0 33 540

Sikh 0 0 0 0 0 9 275

Religion

traditionnelle 0 0 0

2 025

Autres religions 20 20 40 120 0 12 340

Aucune

appartenance

religieuse

15.30 %

3800

11.64 %

6180

10.10 %

2705

12.18 %

5070

15.58 %

2200

12.09 %

937 545

En observant le tableau de l’appartenance religieuse de 2011, il y a quelques changements

significatifs. Le pourcentage des catholiques a beaucoup baissé dans toutes les villes et,

dans la même proportion, il y a une augmentation des gens qui ne s’identifient à aucune

151 Profil de l’ENM, des villes de l’Enquête national des ménages de Statistique Canada de 2011 pour les

villes de Sainte-Thérèse, Blainville, Boisbriand, Mirabel et Rosemère.

Statistique Canada, Profil de l'ENM, 2011 (Gouvernement du Canada, [visité le 28 juin 2016]); accessible à

http://www12.statcan.gc.ca/nhs-enm/2011/dp-pd/prof/index.cfm?Lang=F.

Page 105: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

85

appartenance religieuse. Cela indique que les catholiques qui ne s’identifient plus à la

religion catholique ou quittent la religion catholique s’inscrivent dans le recensement

comme n’ayant aucune appartenance religieuse. Cela confirme l’effet de la sécularisation et

également la baisse du nombre des baptêmes et des inscriptions pour les parcours

catéchétiques.

On peut noter que les groupes protestants ont perdu un plus grand pourcentage de leurs

membres que ceux des catholiques. Les autres religions chrétiennes qui sont

majoritairement des groupes indépendants sont en croissance. Pour ce qui est des

bouddhistes et des musulmans, il faudrait vérifier si les mouvements dans les statistiques

sont dus en grande partie à des déplacements de gens de Montréal vers les banlieues nord

de Montréal. Un onzième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, c’est la diminution

significative du sens d’appartenance religieux des catholiques dans la paroisse qui est

environ de 10 % en dix ans.

Dans la section suivante, je présente à l’aide de tableaux qui donnent les statistiques sur les

différentes célébrations sacramentelles vécues dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila. Je

compare, par deux tableaux, les statistiques des célébrations et l’évolution de la population.

Vous pourrez remarquer qu’au début, il y a trois communautés paroissiales Sainte-Thérèse-

de-Blainville (PSTB), Saint-Jean-de-la-Croix (PSJC) et Sacré-Cœur (PSC). La paroisse

Sainte-Thérèse-de Blainville a été fondée en 1789, celle de Sacré-Cœur en 1953 et Saint-

Jean-de-la-Croix en 1981. Les trois paroisses ne forment plus qu’une paroisse actuellement.

Il y aura les statistiques des inhumations dans le cimetière paroissial de Sainte-Thérèse-

d’Avila (PSTA) qui est le seul sur le territoire des villes de Sainte-Thérèse, Blainville,

Boisbriand et Rosemère.

Page 106: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

86

Graphique 1 : Les baptêmes à la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila de 1991-2009

92 92

70

5161

77 84 82

109

90

110 103 105

177192 192 187

214 207 207 205194 199

210194 195

144

122

5341

5437 35 40

12

337325

311302 303

324

301

276

308300 304 298

249

299285

252

223207

162

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009

Baptême PSTB baptêmes PSC Baptêmes PSJC total des trois communautés PSTA

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87

Graphique 2 : Populations des villes de la région de 1991-2006

En observant le graphique 1, on peut remarquer que la ligne qui représente les baptêmes

dans l’ensemble des communautés qui forment actuellement la paroisse a tendance à

décroître au cours des dix-sept dernières années. Mais en contrepartie, on peut observer une

nette augmentation de la population en général, au graphique 2. Cette différence dans les

courbes des tableaux indique déjà que bon nombre de paroissiens ne baptisent plus leurs

enfants. Cela vient confirmer ce que nous pouvons constater dans les statistiques de

l’enquête des ménages de Statistique Canada 2001 et 2011. Les effets de la perte de 10 %

de catholiques et de la sécularisation se font déjà sentir depuis plusieurs années sur la vie de

la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila et en regardant la courbe des baptêmes de la ligne

violette qui indique l’ensemble des baptêmes de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila depuis

1991 on voit clairement le mouvement d’une baisse continue qui confirme les statistiques

des recensements de la diminution significative de l’appartenance religieuse à l’Église

Catholique.

0

5000

10000

15000

20000

25000

30000

35000

40000

45000

50000

1991 1996 2001 2006

Ville Sainte-Thérèse

Ville Blainville

Ville Boisbriand

Ville Mirabel

Ville Rosemère

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88

Graphique 3 : Les sacrements à la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila de 1991-2009

Ce qui est surprenant dans le graphique 3, c’est la variation des statistiques pour la

confirmation et la première communion, et cela depuis le début des années 1990. Il est

nécessaire de souligner que l’école privée Académie Sainte-Thérèse venait à la paroisse

pour la célébration des sacrements de l’Eucharistie et de la confirmation des jeunes inscrits

à leur école. Ils ont cessé cette démarche en 2005. Ceci explique en partie la baisse, car

environ cent jeunes venaient de cette école. Un autre constat est que dès qu’il y a le passage

de la préparation des sacrements à une démarche d’initiation chrétienne en 2005, il y a une

baisse de la demande. Il est intéressant de vérifier si cette baisse est momentanée ou si elle

est le reflet d’une tendance permanente dans la grande région de Sainte-Thérèse. Les

paroisses avoisinantes observent le même phénomène. De plus, le nombre de mariages est

peu élevé et tend à diminuer. Il correspond au faible taux de nuptialité observé selon les

statistiques de la province du Québec qui regroupe tous les mariages civils et religieux. Ce

taux est de 28 % en 2007, un des plus bas en Occident152.

152 Chantal Girard, Le bilan démographique du Québec : Édition 2008, Institut de la statistique du Québec

(Québec : Gouvernement du Québec, 2008), 66.

0

50

100

150

200

250

300

350

400

4501

99

1

19

92

19

93

19

94

19

95

19

96

19

97

19

98

19

99

20

00

20

01

20

02

20

03

20

04

20

05

20

06

20

07

20

08

20

09

Première communion

Confirmations

Mariages

Funérailles

Inhumations

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89

Ces observations sont corroborées par plusieurs études sur la paroisse. Je voudrais

m’attarder aux conclusions des travaux de quelques théologiens et à deux études sur les

paroisses et les communautés chrétiennes dont celles de Risquer l’avenir et Recherche-

action du diocèse de Saint-Jérôme dirigée par Jacques Grand’Maison.

Le rapport Risquer l’avenir illustre bien les transformations qu’ont vécues les paroisses au

cours des années 1970 et 1980153. Ce document est un rapport sur une enquête faite dans les

paroisses du Québec dans les années soixante-dix. Dans son diagnostic sur la situation des

paroisses, le document identifie six changements : chute de la pratique religieuse,

vieillissement des communautés, absence des jeunes, diminution du nombre de prêtres,

présence réduite des communautés religieuses et insuffisance des revenus154. Cette

recherche nomme cinq faiblesses et quatre forces des communautés. Les cinq faiblesses

sont : une identité chrétienne confuse, une relation craintive avec les distants, des tensions

dans la gestion des ressources, l’autonomie des paroisses versus les autorités diocésaines, la

coresponsabilité contredite. Pour ce qui est des forces, cette recherche mentionne :

l’engagement des laïcs, leur formation pastorale, le leadership des diocèses et les

programmes d’animation pastorale155. Je constate que l’on peut identifier les mêmes forces

et faiblesses si on compare ces conclusions à celles de l’observation que je fais

présentement, sauf qu’actuellement j’observe que plusieurs des agents de pastorale n’ont

pas le bagage nécessaire afin d’affronter le défi de la catéchèse en paroisse. Cette étude n’a

pas pu prévoir la laïcisation des écoles publiques et ses conséquences. Si on faisait un

nouveau diagnostic, il serait plus sombre aujourd’hui.

Ce rapport est confirmé par la Recherche-Action du diocèse de Saint-Jérôme qui décrit le

fossé grandissant entre les chrétiens et l’Église institutionnelle. Dans cette recherche, le

groupe de chercheurs arrive à la conclusion qu’il est nécessaire de créer de nouvelles

manières d’entrer en dialogue avec les gens pour annoncer l’Évangile :

153 Assemblée des évêques du Québec et Comité de recherche de l'Institut pastorale des dominicains., Risquer

l'avenir : bilan d'enquête et prospectives (Montréal : Fides, 1992). 154 Assemblée épiscopale de la Province de Québec et al., Voies d'avenir : résumé de la recherche (Montréal :

Fides, 1992), 9-10. 155 Idem, 16-18.

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90

Prendre la mesure des défis - et des échecs - de transmission des valeurs et de

l’héritage sous toutes ses formes dans la société. Le défi majeur pour l’Église

est de repenser ses difficultés et ses échecs de transmission en lien avec ceux

de la société : famille, éducation, tournants d’âge, solidarité

intergénérationnelle156.

Face à cet écart de plus en plus grand et une Église du Québec confrontée aux problèmes de

la diminution du nombre de pratiquants, du nombre de prêtres, de l’appauvrissement de

l’Église institutionnelle, plusieurs théologiens ainsi que plusieurs évêques proposent de

regrouper les paroisses afin de constituer des équipes pastorales et de relever le défi de

l’évangélisation. Certains théologiens, comme Normand Provencher, se posent la question

à savoir s’il n’est pas trop tard157. Normand Provencher est un prêtre religieux Oblat de

Marie Immaculée, professeur émérite à l’Université Saint-Paul à Ottawa. Plusieurs autres

théologiens et praticiens voient la nécessité de proposer un remodelage des paroisses tout

en indiquant qu’il y a là une occasion de proposer un nouveau modèle paroissial plus près

du modèle des communautés chrétiennes des premiers siècles. Alphonse Borras, un prêtre

catholique de Liège qui a enseigné à l’Université Catholique de Louvain, suggère quatre

critères théologiques afin de créer un nouveau modèle paroissial : renoncer à toute velléité

de chrétienté, s’engager dans une logique d’incarnation, tirer les implications de la

catholicité confessée par le Credo, promouvoir la fraternité ecclésiale158. Hervé Legrand,

prêtre dominicain ayant enseigné à l’Institut Catholique de Paris, propose une participation

de tous à la vie et à l’animation de la communauté chrétienne. Il suggère une dynamique

synodale et en faisant la promotion de nouveaux ministères159.

J’arrive à la conclusion que mon observation confirme l’échec de la transmission, la

privatisation du croire, la diminution du sens de l’appartenance à l’Église Catholique. Je

constate l’écart grandissant entre la vie paroissiale et la vie sociale du milieu et la naissance

d’une indifférence religieuse chez une bonne partie de la population. La population de la

156 Jacques Grand’Maison et al., Le défi des générations : enjeux sociaux et religieux du Québec d'aujourd'hui

: recherche-action, sixième dossier, 448. 157 Normand Provencher, Trop tard? : l'avenir de l'Église d'ici (Ottawa : Novalis, 2002). 158 Alphonse Borras, « Le remodelage paroissial : un impératif canonique et une nécessité pastorale, » dans

Paroisses et ministères : métamorphoses du paysage paroissial et avenir de la mission, dir. Gilles Routhier et

Alphonse Borras (Montréal : Médiaspaul, 2001). 159 Hervé Legrand, « Le rôle des communautés locales : Dans l’appel, l’envoi, la réception et le soutien des

laïcs recevant une charge ecclésiale, » dans La Maison Dieu no 215 (1998) : 13.

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91

paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est en croissance constante depuis plus de 20 ans. Mais il

est clair que cette croissance démographique n’est pas accompagnée par une augmentation

du nombre de personnes qui participent aux différentes célébrations liturgiques. Le

mouvement du déclin des demandes sacramentelles s’est développé à partir de 1991 en

s’accentuant à partir de 2003. Nous pouvons voir que les courbes inversées entre la

croissance de la population et la demande des sacrements indiquent qu’il y a un

détachement qui continue chez une grande partie de la population vis-à-vis des diverses

célébrations liturgiques et de l’Église institutionnelle. Les célébrations liturgiques ne sont

plus pour une partie de la population des pratiques religieuses qu’ils souhaitent ou

expérimentent. Le fossé grandit entre la vie liturgique, l’attachement à la paroisse et

l’ensemble de la population.

Comme douzième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, il est à noter que de

nombreux parents ne baptisent plus leurs enfants et cela peut avoir une conséquence sur

l’inscription des jeunes dans les parcours catéchétiques. Une autre question se pose : la

neutralité des écoles publiques n’encourage-t-elle pas une plus grande rupture entre la

population et les paroisses catholiques? Le fait que le baptême n’est plus depuis longtemps

une obligation pour l’inscription à l’école, cela ne banalise-t-il pas l’adhésion à une Église

institutionnelle? La catéchèse n’est-elle pas devenue une simple option en concurrence avec

d’autres activités éducatives comme le sport et dorénavant en déficit de pertinence auprès

d’une large part de la population?

2.1.3 L’équipe pastorale paroissiale

Depuis les années soixante-dix dans le diocèse de Saint-Jérôme, il y a une tradition que les

paroisses soient animées par des équipes pastorales composées de prêtres et de laïcs. C’est

une réalité qui a évolué selon les besoins liés aux diocèses : la diminution et le manque de

prêtres, la volonté de développer un laïcat dans les structures internes de l’Église, surtout la

promotion des femmes et l’augmentation rapide de la population. Ces défis ont permis le

développement des équipes pastorales.

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92

2.1.3.1 L’équipe pastorale, canon 517 § 2

L’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila fonctionne en s’inspirant du

canon 517 § 2 du droit canonique de 1983. Cette formule propose le partage de la charge

pastorale avec une personne qui n’est pas prêtre :

Si, à cause de la pénurie de prêtres, l’évêque diocésain croit devoir confier à un

diacre ou à une autre personne non revêtue du caractère sacerdotal, ou encore à

une communauté de personnes, une participation à l’exercice de la charge

pastorale d’une paroisse, il constituera un prêtre qui, muni des pouvoirs et

facultés du curé, sera le modérateur de la charge pastorale160.

Elle permet à une personne de participer à la charge pastorale et d’assurer la direction de la

paroisse en collaboration avec le prêtre modérateur. C’est une responsabilité large qui

permet à la personne nommée de tout faire, sauf ce qui est réservé aux ministres

ordonnés161. C’est une mesure exceptionnelle qui est prévue afin d’assurer la présence

presbytérale à chacune des communautés et de coordonner l’action pastorale auprès de

plusieurs paroisses avec la collaboration de quelques laïcs mandatés par l’évêque. Une des

difficultés de l’application de cette option, dans le contexte du diocèse de Saint-Jérôme, est

que cette formule est utilisée pour promouvoir le rôle des laïcs dans la vie de l’Église. Dans

plusieurs paroisses, on se retrouve avec un prêtre modérateur, un prêtre collaborateur qui,

en fait, est un vicaire et plusieurs prêtres retraités qui collaborent au ministère presbytéral.

Cette pratique apporte des ambivalences qui nuisent à une bonne compréhension du

ministère ordonné et qui en même temps empêche la promotion d’une réflexion en

profondeur sur la place du laïcat dans les structures internes de l’Église.

2.1.3.2 L’équipe d’animation paroissiale, une autre alternative possible

Alphonse Borras suggère une autre forme de fonctionnement dans les paroisses. Il nomme

ce modèle : l’équipe d’animation paroissiale. C’est une équipe animée par le curé et

composée de laïcs, de religieux et de diacres afin de permettre une collaboration dans

160 Église Catholique, Code de droit canonique : Édition bilingue et annotée can. 517 § 2. 161 Alphonse Borras, Les communautés paroissiales : droit canonique et perspectives pastorales (Paris :

Éditions du Cerf, 1996), 185-186.

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l’exercice de la charge pastorale. C’est la mise en application du canon 519 qui invite à

développer une collaboration entre plusieurs personnes qui ont différentes vocations et

ministères :

Le curé est le pasteur propre de la paroisse qui lui est remise en exerçant, sous

l’autorité de l’Évêque diocésain dont il a été appelé à partager le ministère du

Christ, la charge pastorale de la communauté qui lui est confiée, afin

d’accomplir pour cette communauté les fonctions d’enseigner, de sanctifier et

de gouverner avec la collaboration éventuelle d’autres prêtres ou de diacres, et

avec l’aide apportée par des laïcs, selon le droit162.

Ce modèle demande au prêtre de devenir le coordonnateur de la paroisse. Il peut

s’adjoindre des gens pour l’aider dans différentes tâches. Ce modèle permet une grande

créativité tout en laissant au prêtre le ministère de la présidence de la communauté. Ainsi,

l’ensemble des tâches administratives peut être confié à des laïcs pour libérer le prêtre afin

qu’il se consacre davantage à des tâches pastorales. Il peut créer des postes pastoraux

adaptés à son milieu. Il y a une option à explorer avec ce modèle.

2.1.4 L’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

L’équipe pastorale paroissiale de la paroisse Sainte-Thérèse-D’Avila était composée, pour

l’année 2006-2007, de sept personnes. Elle est animée par deux personnes qui en assurent

le leadership : un prêtre modérateur et une coordonnatrice. Ces deux personnes sont aidées

par un prêtre collaborateur et quatre agentes de pastorale. Le modèle d’équipe pastorale

paroissiale qui se vit dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est à mi-chemin entre le

modèle de « L’équipe pastorale c. 517 § 2 » et « l’équipe d’animation pastorale c. 519 ».

Au niveau canonique, la nomination de la coordonnatrice est faite selon le canon 517 § 2 ce

qui permet d’avoir une personne laïque qui assure la coordination. Cependant dans l’équipe

pastorale, il y a deux prêtres : l’un est modérateur et l’autre collaborateur. Le diocèse de

Saint-Jérôme a fait ce choix afin de permettre la promotion de la coresponsabilité entre

prêtre et laïc. La difficulté, comme le souligne Alphonse Borras, c’est que ces nominations

162Église Catholique, Code de droit canonique : Édition bilingue et annotée can. 519.

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ont été faites dans le souci de suppléer au manque de prêtres et d’assurer l’animation des

communautés chrétiennes. La nomination des coordonnatrices est ambiguë. Elle est en

partie due à une diminution du nombre de prêtres et s’insère en partie de la politique de la

promotion du laïcat. Le danger de cette orientation est de mêler plusieurs questions

théologiques qui sont liées à d’autres enjeux que ceux du manque de prêtres ou de la

promotion du laïcat, par exemple la promotion des femmes dans l’organisation ecclésiale,

l’accessibilité de la femme au presbytérat, le rôle de la communauté dans la nomination de

ses ministres... Ce sont des questions à approfondir, mais je ne pourrai toucher à ces

nombreux sujets d’étude dans cette recherche. Je me concentrerai sur la pratique

catéchétique et ses enjeux dans la paroisse.

Pour l’étude de la description des tâches des membres de l’équipe pastorale, j’ai choisi

l’année 2007, car c’est à cette période que j’ai fait la cueillette de données par la recherche-

action. L’équipe pastorale paroissiale était composée d’un prêtre modérateur, d’une

coordonnatrice, d’un prêtre collaborateur et de quatre agentes de pastorale. Le prochain

tableau indique les rôles et les tâches de chacun ainsi que leur temps d’emploi.

Tableau 13 : Description des tâches de l’équipe pastorale

paroissiale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila pour l’année

2006-2007

Statut Tâches Temps

d’emploi Prêtre modérateur - Vice-président d’assemblée de fabrique

- Animateur de l’équipe des parcours catéchétiques - Prédication dominicale - Célébrations sacramentelles et liturgiques :

mariages, baptêmes, funérailles, célébrations de la

Parole pour les défunts - Supervision du cimetière - Vice-président de la campagne majeure de

financement pour la paroisse - Comité de liturgie - Supervision des travaux du cimetière paroissial

4 jours/semaine

Coordonnatrice - Présidente d’assemblée de fabrique - Animatrice de l’équipe pastorale paroissiale - Gestion du personnel de soutien - Comité de liturgie

5 jours/semaine

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Prêtre collaborateur - Responsable de la pastorale du baptême

- Pastorale auprès des personnes âgées - Animateur du groupe des jeunes adultes - Prédication dominicale - Célébrations sacramentelles et liturgiques :

mariages, baptêmes, funérailles, célébration de la

Parole pour les défunts

5 jours/semaine

Agente de pastorale - Pastorale du mariage - Collaboration à la pastorale des baptêmes

3 jours/semaine

Agente de pastorale - Préparation aux sacrements - Parcours catéchétiques 1 et 2

4 jours/semaine

Agente de pastorale - Parcours de confirmation 2 jours/semaine Agente de pastorale - Parcours catéchétiques 1 et 2 5 jours/semaine

Le tableau nous montre que le temps consacré à la pastorale d’entretien ou traditionnelle est

encore celui qui occupe la plus grande partie du temps. Il y a une bonne proportion du

temps pour l’implantation des parcours catéchétiques et pour le développement de

l’initiation chrétienne, mais les tâches catéchétiques ne sont pas au centre de l’activité

quand on analyse le tableau. Ce sont les tâches de la gestion et de l’administration qui

occupent le plus le prêtre modérateur et la coordonnatrice. Il n’y a pas d’agent de pastorale

qui est mandaté pour la pastorale auprès des personnes âgées et des malades. Comme

treizième trait de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, j’observe que le travail de l’équipe

pastorale paroissiale est centré surtout sur une pastorale d’entretien avec le défi d’implanter

les nouveaux parcours de catéchèse.

2.1.5 Les catéchistes et les aides-catéchistes bénévoles

Au moment de réaliser la recherche, il n’y a pas de liste des catéchistes bénévoles en

paroisse. Chacune des agentes de pastorale avait sa liste qu’elle gardait pour elle. J’ai pu

noter en élaborant le tableau 14 que les animateurs travaillaient chacun spécifiquement dans

son champ de travail sans communication avec les autres. Comme quatorzième trait de la

paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, j’observe que les membres de l’équipe pastorale

travaillent généralement en silo, c’est-à-dire que chacun travaille dans son domaine sans

communication ou peu d’interaction avec les autres. Dans ma recherche, j’en ai répertorié

vingt et un en vérifiant avec les agentes de pastorale. Voici la répartition :

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Tableau 14 : Les catéchistes bénévoles et les aides-catéchistes

Types d’activités Membre de

l’équipe pastorale

impliqué

Nombre de

catéchistes et

d’aides-

catéchistes

Hommes Femmes

Parcours Alpha 1 2 0 2

Parcours bibliques 1

et 2

2 3 0 3

Parcours confirmation 1 7 0 7

Service de préparation

au baptême

2 7 1 6

Service de préparation

au mariage

1 2 1 1

Total 21 2 19

Le nombre de catéchistes est de vingt et un. Le groupe est en majorité composé de femmes.

Chaque animatrice de pastorale a des collaborateurs qu’elle a interpellés pour réaliser son

mandat. Les catéchistes bénévoles sont des auxiliaires pour les agentes de pastorale. Ils

n’ont pas de formation particulière pour réaliser leur rôle. Ils apprennent leur rôle lors des

rencontres de leur comité où ils se distribuent les tâches à faire, c’est comme le dit

l’expression populaire une formation « sur le tas ». Ils ne décident pas des instruments

utilisés dans les parcours. Ils sont des exécutants et ils sont formés au fur et à mesure des

rencontres. Ils n’ont pas de rencontres statutaires avec l’équipe pastorale paroissiale. Ils

sont considérés, dans la paroisse, comme n’importe quels autres bénévoles que ce soient

ceux qui passent la guignolée, qui font des lectures ou qui donnent la communion. Comme

quinzième trait de la pratique de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, j’identifie que les

catéchistes sont des exécutants et ils ne participent pas à la préparation des programmes, ni

aux choix des orientations de la catéchèse en paroisse.

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L’implantation des parcours a exercé une pression sur les différents animateurs de pastorale

afin qu’ils se trouvent des collaborateurs pour les aider dans la réalisation de leur mandat.

Leur présence s’avère de plus en plus nécessaire, mais il n’y a pas eu de réflexion pour

indiquer quel peut être leur rôle. Quelle serait la formation nécessaire pour les aider à

réaliser leur tâche? Comment peuvent-ils s’insérer dans la paroisse et quels seraient les

liens avec l’équipe pastorale paroissiale? Il y a un vide, une nécessité, une urgence à

répondre à ces questions. Comme seizième trait de la pratique de la paroisse Sainte-

Thérèse-d’Avila, c’est le fait que les agents de pastorale, les catéchistes, les bénévoles et les

parents n’ont pas eu de formation pour l’implantation des parcours catéchétiques. Ils

apprennent leur fonction au fur à mesure des activités. Il y a une improvisation dans le

changement de pratique parce que l’Église diocésaine et la paroisse n’ont pas prévu de

formations pour habiliter les gens à se préparer pour ce changement important. Nous

pouvons aussi constater que les parents n’ont pas été préparés au changement provoqué par

la perte des écoles confessionnelles qui est une imposition de l’État.

2.2 Élaboration de la question de recherche

Devant la situation que je viens de décrire, je me demande quelle est la place, le rôle de la

catéchèse et des catéchistes dans la paroisse. Mais avant d’aller plus loin, je veux regrouper

les caractéristiques de la pratique que j’ai identifiées tout au long de ce chapitre. Un tableau

permet de remémorer les principaux traits du milieu et de la pratique que j’étudie.

Tableau 15 : Synthèse d’une première observation

1. La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila se retrouve dans un diocèse jeune composé de

diverses régions hétérogènes avec peu de moyens financiers.

2. Le ratio des intervenants pastoraux par rapport aux diocésains a cru de plus de

1000 % depuis la fondation du diocèse en 1951.

3. L’écart entre la vie de foi et la vie séculière commence avant 1960 dans le diocèse

de Saint-Jérôme. On note déjà à cette époque une difficulté à animer le catéchisme.

4. À partir de l’an 2000, la famille et la paroisse deviennent les seuls acteurs de la

formation chrétienne des jeunes. L’éducation religieuse des enfants est devenue une

affaire privée.

5. La paroisse continue son partenariat avec les organismes sociaux du milieu pour

l’aide aux démunis.

6. La paroisse Sainte-Thérèse d’Avila par son équipe pastorale paroissiale anime trois

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communautés locales : Sainte-Thérèse-de-Blainville, Saint-Jean-de-la-Croix et

Sacré-Cœur.

7. La formation à la vie chrétienne devient une priorité pour le diocèse et les paroisses

doivent s’orienter dans ce sens.

8. Il y a une l’augmentation rapide de la population de la région et la stagnation et le

déclin de la population de la paroisse.

9. L’existence de 15 institutions d’enseignement allant du primaire au Cégep sur le

territoire de la paroisse.

10. Dans la paroisse, nous pouvons identifier une typologie de deux groupes importants

qui décrivent les grandes caractéristiques de la population : le premier (69 % de la

population) est composé de personnes plus âgées, locataires et un plus pauvres que

la moyenne nationale et l’autre groupe (31 % de la population) est composé de

familles avec des enfants, propriétaires dont le revenu est plus élevé que la moyenne

nationale.

11. La diminution significative du sens d’appartenance religieux des catholiques dans la

paroisse, environ 10 % en dix ans entre 2001 et 2011, et la naissance d’une

indifférence religieuse chez une bonne partie de la population.

12. De nombreux parents ne baptisent plus leurs enfants et cela peut avoir une

conséquence sur l’inscription des jeunes dans les parcours catéchétiques.

13. Le travail de l’équipe pastorale est centré surtout sur une pastorale d’entretien avec

le défi d’implanter les nouveaux parcours de catéchèse.

14. Les membres de l’équipe pastorale travaillent généralement en silo, c’est-à-dire que

chacun travaille dans son domaine sans communication ou peu d’interaction avec

les autres.

15. Les catéchistes sont des exécutants et ils ne participent pas à la préparation des

programmes, ni au choix des orientations de la catéchèse en paroisse.

16. Les agentes de pastorale, les catéchistes, les bénévoles et les parents n’ont pas eu de

formation pour l’implantation des parcours catéchétiques, ils apprennent leur

fonction au fur à mesure des activités.

17. La paroisse doit se réapproprier la fonction de catéchiser dans l’Église

d’aujourd’hui.

En évoquant les traits du milieu et de la pratique, nous pouvons conclure que la paroisse

n’était pas prête pour implanter les parcours catéchétiques. La paroisse s’est lancée dans

cette aventure, en affrontant de son mieux la situation qui se présentait à elle, à cause des

changements politiques du Gouvernement du Québec qui a choisi de laïciser les écoles

publiques. Je peux aussi souligner qu’il n’y avait pas d’unité d’action au sein de l’équipe

pastorale, ni de plan structuré dans la paroisse pour relever ce défi. D’ailleurs, lors de la

prise de décision de démarrer les parcours catéchétiques une agente de pastorale a souligné

que tout programme qui demandait plus de trois ou quatre rencontres était irréaliste et que

penser ainsi était de l’ordre de l’inconscience. De plus, les membres du personnel pastoral,

les catéchistes et les bénévoles n’ont pas eu de formation adéquate pour comprendre les

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changements de société, de culture et de vie ecclésiale. Sans cette formation, les résistances

aux changements des parents et des gens à l’interne de l’Église peuvent bloquer la nouvelle

pratique catéchétique qui ne sera plus qu’une simple préparation aux sacrements un peu

plus développée.

La paroisse a comme défi de se donner une expertise dans le domaine catéchétique. La

seule expertise qu’elle a, c’est celle de la préparation aux sacrements qui est différente de la

catéchèse. Ce nouveau défi invite l’équipe pastorale paroissiale à la créativité dans un

contexte où l’Église du Québec est en crise. Les paroisses sont en train de se redéfinir dans

un contexte social autre. Les diverses communautés ont à s’approprier une nouvelle

manière de faire la catéchèse comme le souligne André Fossion :

Ce qui advient aujourd’hui à travers tout cela, c’est non seulement des formes

nouvelles de catéchèse, mais plus fondamentalement une réappropriation par

les communautés elles-mêmes de leur fonction catéchisante. Ce qui naît, c’est

une pastorale catéchétique nouvelle, complexe, elle-même intégrée à un projet

de renouvellement de la présence des communautés dans la cité163.

Cette réappropriation de la fonction de catéchiser est un changement de paradigme majeur.

Nous pouvons identifier un dix-septième point, c’est que la paroisse doit se réapproprier la

fonction de catéchiser dans l’Église d’aujourd’hui. C’est d’abord la fin d’une époque où

l’Église du Québec avait confié cette tâche au système d’éducation publique. Toutes les

instances et les acteurs de la paroisse, sauf quelques exceptions, n’ont pas été formés pour

répondre à un défi d’une telle ampleur : celui de se réapproprier la fonction catéchisante des

paroisses. C’est aussi, pour l’Église, un appel à quitter dans son esprit l’idée que l’école va

collaborer à la formation à la vie chrétienne et plus spécifiquement à la catéchèse. Par le

choix du gouvernement, la foi et l’éducation religieuse ont été reléguées à la sphère privée.

De plus, le Gouvernement, par la modification de la Charte québécoise sur les droits et la

liberté de la personne, se donne un droit de regard sur l’éducation religieuse, car il est

nécessaire qu’elle soit pour le bien de l’enfant sachant que c’est le Gouvernement qui

définit ce qui est bien pour lui. Il est possible que les orientations de l’éducation religieuse

163 André Fossion, « La catéchèse dans un monde en pleine mutation, » dans Catéchèse 172 (2003) : 102.

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100

pour lesquelles opte le Gouvernement et ce que proposent l’Église et les familles

catholiques puissent entrer en conflit. Je pense particulièrement aux questions éthiques et

morales.

Les équipes pastorales paroissiales se retrouvent face à un nouveau défi : elles ont à

partager la tâche de la catéchèse avec l’ensemble des baptisés. Le peu d’agents de pastorale

et de prêtres dans les communautés peut s’avérer une opportunité pour la paroisse. Une

possibilité est de partager les tâches avec les catéchistes, les bénévoles et les catéchisés.

Ainsi, on peut vivre une réorganisation et une démocratisation des tâches qui pourraient

assurer la mission d’accompagner les personnes dans l’approfondissement du don de la foi

reçue de Dieu.

2.3 Formulation de la question de recherche

Par l’observation du milieu et de la pratique, j’ai fait plusieurs constats. Ces découvertes

m’ont invité à réfléchir, plus précisément, sur les enjeux, le rôle de la paroisse, des prêtres

et des agents de pastorale qui ont actuellement la mission d’implanter les parcours

catéchétiques et d’habiliter la paroisse à faire la catéchèse. Cela demande aux membres de

l’équipe pastorale paroissiale d’aider les parents dans cette démarche et en plus de recruter,

d’accompagner, de former des catéchistes, sans oublier d’avoir à mettre sur pied tout un

dispositif catéchétique qui est très embryonnaire actuellement. La paroisse n’a plus

seulement le rôle comme autrefois de donner la préparation immédiate aux sacrements de

l’initiation chrétienne164. La paroisse devient le lieu privilégié de la catéchèse suite à la

laïcisation des écoles publiques. Une question demeure : quels sont la place et le rôle de

chacun dans les différents niveaux de formation des parents, des catéchisés, des agents de

pastorale? Quelle est la mission catéchétique de la paroisse? La paroisse, et plus

particulièrement l’équipe pastorale peuvent-elles jouer un rôle de premier plan dans la

formation catéchétique? Il est dangereux que la catéchèse devienne un monde parallèle

plutôt qu’une partie prenante de la mission de la paroisse. C’est pour cela qu’il est

164 Assemblée des évêques du Québec, L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales.

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101

nécessaire de réfléchir sur les enjeux de la formation des catéchistes bénévoles par l’équipe

pastorale paroissiale.

Pour ces raisons, j’ai précisé mon sujet et je l’ai reformulé en fonction d’une nouvelle

pratique qui se vit dans un contexte nouveau et qui demande à être approfondie. Les acteurs

de ces pratiques apprennent actuellement leur métier comme dit l’expression populaire

« sur le tas ». Cette pratique mérite d’être étudiée. L’expérience des prêtres et des agents de

pastorale qui sont sur le front est sûrement précieuse et peut apporter de nouveaux éléments

à la réflexion théologique. Le fait de démocratiser l’accompagnement des personnes qui

sont en cheminement catéchétique en faisant appel à des catéchètes bénévoles aura

probablement des répercussions sur le vécu des communautés et aussi sur celui des gens.

C’est pour ces raisons que j’ai précisé ma question de recherche par cette formulation :

« Quels sont les enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation des catéchètes

bénévoles par l’équipe pastorale paroissiale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila? ».

Cette question, je l’ai transformée en hypothèse. Cette hypothèse est celle que je propose

aux membres par l’équipe de la recherche-action. Voici l’hypothèse qui est le point de

départ de la recherche-action :

Un des rôles de l’équipe pastorale paroissiale, dans la paroisse, est celui d’animer le service

de catéchèse. C’est à l’équipe pastorale que revient le rôle d’interpeller, de former,

d’insérer et d’accompagner les catéchètes bénévoles dans la vie paroissiale. L’équipe

pastorale a aussi pour but de faciliter la participation des personnes catéchisées aux diverses

activités de la vie paroissiale par l’animation du service de catéchèse.

Pour vérifier cette hypothèse, j’utiliserai trois questions :

1) Quelles seront les répercussions sur la communauté chrétienne et plus

particulièrement sur l’équipe pastorale paroissiale, si la paroisse reprend son rôle

d’être l’un des principaux lieux de catéchèse dans l’Église locale?

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102

2) Dans cette nouvelle pratique, quelle peut être l’articulation entre ces trois

ministères : ministères ordonnés, ministères délégués et ministères baptismaux?

3) Quels seront les effets de la démocratisation du « savoir » et du « savoir-faire »

chez de nombreux bénévoles dans une paroisse?

Après avoir précisé ma question et mon hypothèse de recherche, je présente dans le

prochain chapitre la revue de la littérature. Une question a surgi au début des rencontres de

l’équipe de recherche-action. Cette question a orienté ma recherche dans la revue de

littérature. Quelles sont les caractéristiques et les acteurs de la catéchèse dans l’histoire et

dans les diverses expériences vécues par les diverses communautés chrétiennes aujourd’hui

dans le monde?

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103

Chapitre 3 : Revue de la littérature

La description de la pratique catéchétique de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila me permet

de constater l’écart grandissant entre la vie de foi et la vie séculière des paroissiens. Cet

écart avait commencé avant la Révolution tranquille, il s’est accentué au cours des années.

Désormais, plusieurs concitoyens vivent une indifférence et une méfiance envers l’Église

Catholique. Dans la paroisse, des familles et des membres de l’équipe pastorale ont des

réactions négatives face à l’implantation des parcours catéchétiques, et ceci est dû à un

manque de formation et à des résistances aux changements.

Dès le début de la démarche, l’équipe de recherche-action a transformé l’hypothèse de

recherche : « dans la paroisse, tous sont acteurs dans la catéchèse ». C’est à partir de cette

nouvelle proposition que je poursuis la recherche. Quels sont les défis, les rôles, la

formation des acteurs de la catéchèse au cours de l’histoire? Quels sont les apports et les

enjeux du renouveau catéchétique? Quels sont les déplacements dans l’évolution de la

réflexion du Magistère après le Concile Vatican II? J’identifie les réflexions et les

tendances catéchétiques dans des pays qui ont des défis similaires aux nôtres : France,

Belgique, Italie, États-Unis, Allemagne, Corée du Sud et dans la province de Québec. Ces

questions sont nécessaires pour infirmer et confirmer la démarche de recherche-action que

j’entreprends.

3.1 L’évolution de la catéchèse et du rôle des catéchistes

dans l’histoire de l’Église

J’utilise les travaux de plusieurs théologiens et historiens en catéchèse reconnus comme des

experts par leurs pairs : Gilbert Adler, Joseph Colomb, Élisabeth Germain, Joseph-André

Jungmann, Charles Wackenheim, Gérard Vogeleisen et quelques collaborateurs reconnus

de L’Encyclopédie des catéchistes : Thabor165. Gilbert Adler est prêtre du diocèse de

Strasbourg, et un des fondateurs de l’Institut de pédagogie religieuse de la Faculté de

théologie catholique à Strasbourg. Joseph Colomb, prêtre de Saint-Sulpice (PSS), 1902-

1979, était un philosophe et théologien. En 1962, il a fondé un Institut de formation des

165 Anne-Marie Aitken dir.et al., Thabor : l'encyclopédie des catéchistes (Paris : Desclée, 1993).

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104

catéchistes à Strasbourg. Il a écrit un ouvrage de référence paru en deux tomes : « Le

service de l’Évangile » en 1967166. Élisabeth Germain est religieuse, docteure en théologie,

professeure agrégée de l’Institut catholique de Paris. Joseph-André Jungmann est un prêtre

jésuite (1889-1975), professeur de liturgie à l’Université d’Innsbruck. Il est l’auteur d’un

livre de référence : « Catéchèse : objectifs et méthodes de l’enseignement religieux »167.

Charles Wackenheim était professeur à la Faculté de Théologie de Strasbourg 1992-2002.

Ces différents auteurs me permettent de jeter un regard sur les tendances catéchétiques

anciennes et récentes.

J’ai repris les cinq grandes périodes historiques antérieures au Concile Vatican II que l’on

utilise dans les différents documents classiques sur la catéchèse : la période apostolique, le

développement et le déclin du catéchuménat, le Moyen Âge, l’ère des catéchismes et le

renouveau catéchétique. Je procède à ce survol historique afin d’identifier les acteurs en

catéchèse et leur rôle à chacune des époques. J’énumère les parallèles et les différences en

lien avec la pratique présentée au chapitre deux.

3.1.1. La période apostolique

Quelle est l’origine du mot catéchèse? Le mot catéchèse a pour origine un verbe grec

κατέχειν (katékhein) qui signifie à la fois « enseigner » et « informer » 168. On peut le

définir ainsi : faire retentir, faire résonner la Parole de Dieu169. Il s’agit d’une démarche qui

vise l’adhésion de foi. Les mentions du mot catéchèse dans le Nouveau Testament sont peu

nombreuses et elles ont le même sens170. Cette Parole de Dieu proclamée permet la

166 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, vol. 1 (Paris : Desclée,

1968).

Joseph Colomb, Le service de l'Évangile; manuel catéchétique tome deuxième, vol. 2 (Paris : Desclée, 1968). 167 Joseph-André Jungmann s.j., Catéchèse : objectifs et méthodes de l'enseignement religieux, Troisième

édition modifiée et révisée éd. (Bruxelles : Lumen Vitae, 1965). 168Gabriel Jacquemet et al., Catholicisme : hier, aujourd'hui, demain : encyclopédie, tome deuxième Bethléem

- confrères de la passion (Paris : Letouzey et Ané, 1950), 645-646. 169 Lumen Gentium, abréviation : LG,4. Catéchisme de l’Église Catholique, abréviation : CEC, 4. 170 Ac 18, 25 ; 1 Co 14,19 ; Ga 6,6.

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rencontre avec Jésus Christ. C’est par le caractère performatif de la Parole de Dieu que les

catéchisés découvrent Dieu, présent dans leur vie personnelle et dans la communauté171.

Par les quatre Évangiles, le livre des Actes des apôtres et les lettres de saint Paul, on

découvre une pluralité des ministères pour l’annonce de la Bonne Nouvelle (1 Co. 12, 12-

31). Le livre de la Didachè, écrit vers la fin du premier siècle, insiste sur les dimensions

essentielles afin de vivre la Parole de Dieu : l’écoute de la Parole de Dieu, l’eucharistie, la

formation morale, l’insertion dans la communauté chrétienne et l’appel à la conversion172.

La pédagogie utilisée, héritée du judaïsme, est qualifiée de celle des deux voies :

Cette pédagogie, héritée du judaïsme, consiste à présenter au candidat les deux

voies qui s’ouvrent devant lui, celle de la mort et celle de la vie. Le

catéchumène est ainsi prié d’adopter un comportement moral dépourvu

d’ambiguïté, avant même que soient prononcées sur lui les paroles du

baptême173.

La catéchèse primitive se vit au milieu de la communauté chrétienne. Ses acteurs sont

diversifiés. Voici comment Charles Wackenheim décrit l’organisation de cette époque :

« La fonction proprement catéchétique incombe plutôt aux ministres des communautés

locales : prophètes, didascales (docteurs) ou presbytres (anciens) »174. La catéchèse se vit

au cœur de la communauté, elle est la responsabilité de tous. C’est une pratique pour les

adultes. Elle comprend l’enseignement des apôtres, la fraction du pain, l’initiation à la

prière, une vie morale exemplaire, et exhorte le catéchisé à témoigner de sa foi dans le

monde. Le catéchiste est un ministre de la communauté locale et accompagne le candidat. Il

proclame le kérygme, témoigne de sa foi et appelle à la conversion. Il insère le catéchisé

dans la communauté. La catéchèse touche toutes les dimensions de la vie. Le baptême est le

rite d’entrée dans la communauté. L’Eucharistie devient le moment de se rappeler la mort

171 Benoît XVI, Exhortation apostolique Verbum Domini sur la Parole de Dieu (Courtry : Collège des

Bernadins, 2010). Verbum Domini, abréviation : VD, 53. 172 Anonyme, Les Pères Apostoliques, dir. Dominique Bertrand, Sagesses Chrétiennes (Paris : Les Éditions du

Cerf, 2008), 41-64. 173 Anne-Marie Aitken et al., Thabor : l'encyclopédie des catéchistes, 27. 174 Charles Wackenheim, La catéchèse, Que sais-je? (Paris : Presses universitaires de France, 1983), 14.

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et la résurrection du Christ. On ne parle pas de la formation proprement dite du catéchiste,

mais toute la vie de la communauté est axée vers la mission et le témoignage.

Que peut-on retenir de cette période? Tous les membres de la communauté sont

responsables de la catéchèse. Le lien est organique entre la proclamation de la Parole de

Dieu, l’Eucharistie, l’insertion dans la communauté et la pratique du témoignage de foi. Ces

deux derniers éléments sont clairement absents de la pratique catéchétique paroissiale

étudiée dans ma recherche.

3.1.2 Les premiers siècles : développement et déclin du

catéchuménat

Vers la fin du deuxième siècle et le début du troisième siècle s’organise le catéchuménat

dans l’Église naissante. Cette démarche est un processus initiatique qui se vit en plusieurs

étapes et en Église. Son but est de former des disciples témoins de Jésus Christ. L’Église

est une communauté citadine regroupée autour d’un évêque, et composée de plusieurs

maisonnées175. Le catéchuménat commence par la présentation du kérygme. Le candidat est

introduit dans une démarche d’approfondissement de la foi qui le conduit à professer sa foi.

Après la célébration du baptême, plusieurs catéchèses mystagogiques expliquent les

sacrements et les rites vécus tout au long de la période du carême. L’expérience de Cyrille

de Jérusalem est considérée comme typique de cette période :

En Orient, l’œuvre la plus accomplie est sans doute celle de Cyrille, évêque de

Jérusalem au milieu du IVe siècle. Elle se compose de 24 catéchèses : une

procatéchèse, ou instruction préliminaire, 18 catéchèses prébaptismales

adressées aux catéchumènes, et 5 catéchèses mystagogiques réservées aux

néophytes176.

175 André Charron, « La paroisse : une structure intermédiaire ouvrant sur d'autres lieux où faire Église :

L'éclairage de l'histoire, » dans La paroisse en éclats, dir. Gilles Routhier (Outremont : Novalis, 1995). 176 Charles Wackenheim, La catéchèse, 17.

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107

De catechizandis rudibus est un texte écrit par Augustin au diacre Deogratias qui demande

de l’aide pour mieux exercer sa tâche de catéchiste177. Les commentateurs décrivent le De

catechizandis rudibus de plusieurs manières : « Une catéchèse – modèle d’évangélisation

[…], un traité de méthode catéchétique […], un manuel sur l’enseignement du catéchisme

aux illettrés […], le plus ancien guide du parfait catéchiste […] »178. Dans le dictionnaire

Catholicisme, on le décrit ainsi : « L’évêque d’Hippone donne réellement à Deogratias de

Carthage qui l’a interrogé un manuel de pédagogie catéchétique »179. Le catéchiste, selon

Augustin doit être centré sur le catéchisé : « Connaître l’état du candidat, c’est déjà

percevoir le genre précis de pastorale dont il a besoin »180. La catéchèse est un dialogue

entre le catéchiste, le catéchisé et la communauté chrétienne : « Nous croyons être dans un

système dialogal et concret qui peut, et même doit, se passer de distinction, de notions sur

des choses connues et perçues comme telles »181.

Pour Augustin, la catéchèse est une formation intégrale animée par tous. Le catéchiste

s’adapte selon l’expérience du catéchisé. Les candidats sont accueillis avec miséricorde.

Jésus Christ est la clef d’interprétation de l’Histoire et de la Bible. Le catéchiste témoigne

de Jésus Christ dans la joie, et la catéchèse est plus qu’une tâche pédagogique, mais le fruit

des vertus théologales182.

Selon Jean-Bernard Allard, prêtre de Saint-Sulpice de Montréal, Augustin a vécu dans un

monde pluraliste. Pour Augustin, le catéchiste est un témoin de Jésus Christ, ministre de la

communauté en dialogue avec le catéchisé. Joseph Colomb (PSS), décrit cette période en

quatre points : « La catéchèse est publique et solennelle […], la catéchèse baigne dans le

mystère et le sacré : elle est essentiellement illumination et conversion […], la catéchèse

communautaire est, du coup, liturgique. …], La catéchèse est biblique »183. La catéchèse est

177 Augustin, La première catéchèse = De catechizandis rudibus, Nouvelle bibliothèque augustinienne, 7

(Paris: Institut d'études augustiniennes, 2001). 178 Jean-Bernard Allard PSS, « La nature du De catechizandis rudibus de Saint-Augustin » Thèse de doctorat

(Université du Latran, 1976), 19-20. 179 Gabriel Jacquemet et al., Catholicisme : hier, aujourd'hui, demain : encyclopédie, tome deuxième

Bethléem - confrères de la passion (Paris : Letouzey et Ané, 1949), 646. 180 Jean-Bernard Allard PSS, « La nature du De catechizandis rudibus de Saint-Augustin », 46. 181 Idem, 56. 182 Idem, 78. 183 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 33.

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d’abord au cœur de la communauté, l’affaire de tous, et une activité publique. C’est

l’évêque qui en est le leader et il est accompagné de plusieurs ministres. La catéchèse est en

situation d’interdépendance entre la liturgie et la proclamation de la Parole de Dieu, elle est

un appel à la conversion. Elle demande au catéchumène de témoigner de sa foi par sa vie

dans le monde.

Pour sa part, Joseph-André Jungmann ajoute que la catéchèse se vit dans la durée et permet

de développer les attitudes chrétiennes. Le catéchuménat se rythme selon les fêtes

liturgiques, et est considéré comme une démarche entreprise par un adulte. Les catéchèses

avant le baptême sont données par des ministres que l’on appelle docteurs ou par des

prêtres, des diacres et aussi des laïcs : « Ce premier enseignement pouvait être donné par un

laïc, comme ce fut le cas d’Origène à Alexandrie au IIIe siècle »184. Devant la communauté,

le pasteur interroge les catéchumènes avant leur initiation et demande l’avis aux baptisés.

Les parrains et les marraines accompagnent les catéchisés dans la conversion :

Le parrain pour les hommes et la marraine pour les femmes jouent un rôle

déterminant. Ils se portent garants de la bonne conduite; désormais ils

interviennent à toutes les étapes de l’initiation, assistent aux divers exercices de

la catéchèse comme aux cérémonies sacramentelles185.

C’est l’évêque qui anime et prêche la préparation immédiate au baptême et aux catéchèses

mystagogiques. Le catéchuménat est une expérience qui se vit en Église où chacun des

participants joue un rôle.

Après un bref survol de cette deuxième période, que puis-je déduire de cette recherche? En

bref, que la paroisse n’existe pas, ou qu’elle est très embryonnaire. Les Églises locales se

développent dans les villes et regroupent plusieurs maisonnées animées par un évêque

accompagné de gens qui exercent plusieurs ministères. Le catéchuménat devient l’ossature

de ce modèle ecclésial. Il représente un processus d’initiation et d’insertion dans la

184 Adalbert-Gautier Hamman, Le catéchuménat des premiers chrétiens : catéchèse des débutants : Augustin :

Instructions baptismales de Cyrille de Jérusalem, Grégoire de Nysse, Jean Chrysostome, Théodore de

Mopsueste, Augustin, Pères dans la foi ; 60 (Paris : Migne, 1994), 9. 185 Idem, 11-12.

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communauté chrétienne. Le catéchiste est un témoin de la foi, il vit ce qu’il annonce, il est

reconnu comme un des ministres de la communauté, et il peut s’agir d’un laïc, d’un diacre

ou d’un prêtre. Durant cette période, on appelait souvent le catéchiste un docteur de la foi.

La catéchèse se déroule sur une période de deux à trois ans. Au cours de la dernière année

du catéchuménat, la catéchèse se vit pendant le carême et est animée par l’évêque. Toute la

communauté est impliquée dans cette démarche. Le catéchiste accompagne le catéchisé

dans une démarche dialogique; il initie le catéchisé à la Parole de Dieu, à la prière

personnelle, à la liturgie, à la vie morale selon les Évangiles, au partage, et à l’engagement

au nom de sa foi. Le catéchiste est appuyé par les parrains et marraines, la communauté, les

prêtres et l’évêque.

Le déclin du catéchuménat s’est réalisé graduellement. Les parents chrétiens ont commencé

à baptiser les enfants. Le modèle du pédobaptisme s’est imposé naturellement par le souci

des parents de donner ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants. Par le baptême généralisé

des enfants, la pratique du catéchuménat sera graduellement abandonnée et tombera peu à

peu dans l’oubli.

Comment cette époque interpelle-t-elle la pratique catéchétique paroissiale d’aujourd’hui?

La catéchèse est organisée, liée à la vie de l’Église, fait appel à tous, et forme des adultes

qui rendent compte de leur foi. Le temps du catéchuménat se déroule sur une période

d’environ deux à trois ans. Le catéchiste a un ministère reconnu et peut être un laïc ou un

ministre ordonné. Ce qui émerge de cette époque est le rôle essentiel que jouent les parrains

et les marraines dans l’accompagnement du catéchumène, et les liens qu’ils tissent avec la

communauté chrétienne. Le bilan de cette deuxième période permet de constater un appel à

organiser la catéchèse de manière systématique et à en valoriser les acteurs.

3.1.3 Le Moyen Âge

C’est par l’émergence du modèle paroissial rural, l’essor du monachisme et l’aide de l’État,

surtout à l’époque de Charlemagne, que s’élabore un nouveau modèle ecclésial :

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Réalisée d’abord grâce aux moines missionnaires à un quadrillage

systématique d’évêchés et de paroisses, la pénétration chrétienne n’a pu se

poursuivre qu’avec l’appui du pouvoir politique, des Carolingiens surtout. La

foi chrétienne a été proposée aux païens, voire imposée186.

Le quadrillage paroissial, les fêtes liturgiques, la prédication, les paraliturgies, comme le

théâtre sur les parvis des cathédrales, développent un autre type de vie ecclésiale.

L’imposition par l’Église de la confession et de la communion une fois l’an va accentuer

l’encadrement des fidèles187. Les ordres mendiants prêchent, organisent des maisons de

prière, et ils animent la catéchèse auprès de l’élite. Mais, l’ensemble de la transmission de

la foi se réalise par l’imprégnation de la culture. La paroisse était une des institutions au

cœur de cette période, car elle représentait le lieu central de la vie communautaire,

personnelle, spirituelle et économique des gens. La transmission se faisait par la liturgie, la

prédication, les dévotions populaires, les rites familiaux et par la culture ambiante. Joseph

Colomb énumère quelques caractéristiques de cette époque : la prédication, le

rassemblement dominical, et une catéchèse plus systématique du contenu de la foi. On fait

appel à des méthodes mnémotechniques pour former les catéchisés : « On groupe par 7 (ou

par 10 ou 12) les éléments du dogme et de la morale : 7 demandes du Pater et 7 béatitudes,

7 péchés capitaux et 7 œuvres de miséricorde, etc. »188.

Ce sont les parents et les parrains qui sont responsables de l’éducation religieuse des

enfants. Le clergé et les religieux se concentreront sur la prédication populaire. L’Église et

l’État collaborent afin d’édifier une culture inspirée par le christianisme. Joseph Colomb a

des doutes sur ce modèle : « La catéchèse donnée en ces conditions peut être certes très

efficace : aucun catéchuménat ne peut être aussi influent que le milieu familial. Encore

faut-il que la famille soit instruite, sinon la catéchèse reste élémentaire et confuse189. Dans

186 Élisabeth Germain, 2000 ans d'éducation de la foi, Bibliothèque d'histoire du christianisme ; 1 (Paris :

Desclée, 1983), 49. 187 Giuseppe Alberigo et al., Les Conciles oecuméniques Tome II-2 Les décrets de trente à Vatican II (Paris :

Éditions du Cerf, 1994), 525. 188 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 34. 189 Idem, 35.

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ce type de catéchèse, le lien avec la Parole de Dieu et la liturgie n’est plus aussi organique,

elle est axée sur des « vérités » à enseigner.

Joseph-André Jungmann va dans le même sens que Joseph Colomb et Élisabeth Germain;

c’est la société qui devient le creuset de la formation chrétienne :

On était initié à la foi chrétienne comme on apprenait sa langue maternelle,

sans enseignement systématique. C’était moins la doctrine formulée en

concepts que les institutions solidement établies qui nourrissaient la pensée

religieuse. Et c’était encore aussi, malgré tout, la liturgie. Bien qu’elle ne fût

que peu comprise dans le détail de ses rites, les solennités de ses fêtes

religieuses marquaient les étapes de l’année et renouvelaient constamment la

conscience des mystères de la foi190.

Ces trois auteurs ont des vues convergentes sur la pratique catéchétique et le rôle des

différents intervenants en catéchèse : la pratique est portée par un milieu soutenu par

l’Église et l’État. La foi s’apprend par osmose, et la liturgie suit les rythmes des saisons

dans une civilisation majoritairement agraire. Les fêtes religieuses coïncident souvent avec

les étapes de la vie. Les familles, les parrains et les marraines sont les catéchistes. Les

prêtres et les religieux des ordres mendiants se dévouent auprès des adultes par la

prédication. Tout est chrétien : la vie personnelle, familiale, sociale et ecclésiale. Ce modèle

de vie ecclésiale est devenu désuet après quelques siècles compte tenu des changements

sociaux, économiques et culturels. On note que le peu de formation donnée aux parents, et

aux parrains et marraines, est une des causes de l’ignorance religieuse qui a conduit à la

crise de la Réforme et qui est à l’origine de la Contre-réforme.

Joseph-André Jungmann mentionne que de se fier seulement à la famille est illusoire191. Il

considère que ceci est un fardeau trop lourd à porter sans le soutien d’une communauté

croyante. En tenant compte des limites nommées précédemment, comment pourrions-nous

aider nos parents pour qu’ils deviennent de vrais acteurs dans la pratique actuelle?

190 Joseph-André Jungmann, Catéchèse : objectifs et méthodes de l'enseignement religieux, 28-29. 191 Idem, 30.

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112

Comment utiliser les fêtes liturgiques et la foi populaire pour bonifier notre pratique?

Comment les mettre en relief?

3.1.4 Les réformes catholiques et protestantes : l’ère des

catéchistes

Vers le quinzième siècle, la redécouverte des auteurs de l’Antiquité, et la nécessité de

scolariser et d’alphabétiser la population, rendent désuet le modèle hérité du Moyen Âge.

Ce modèle était basé sur l’approfondissement de la foi par osmose, c’est-à-dire que la vie

du village et ses rythmes religieux permettait d’approfondir la foi. La scolarisation des

enfants devient une priorité pour les gens du seizième siècle :

L’idée, par exemple, qu’il faut instruire les enfants dès leur jeune âge s’est

imposée à Gerson. Elle est développée par la dévotion moderne et les frères de

la vie commune, et Érasme, leur ancien élève, expose dans L’instruction des

enfants (1529) et La civilité puérile, les règles de la pédagogie humaniste192.

Selon Élisabeth Germain, ce sont les réformateurs qui ont eu l’initiative de la création des

catéchismes. Martin Luther popularise le genre; il rédige plusieurs types de catéchisme : un

pour les enfants et un autre pour les pasteurs. Les enfants sont le public cible de la

catéchèse, ils sont formés surtout par les pasteurs : « Ainsi, le catéchisme est composé à

l’intention des enfants même s’il est confié au pasteur qui aura à l’expliquer aux

enfants »193. La Réforme protestante, comme la Réforme catholique, utilise le catéchisme

pour l’approfondissement de la foi. L’Église Catholique, par le Concile de Trente, élabore

un catéchisme qui sera un document de référence pour les évêques et les prêtres.

Dans l’introduction, on souligne que les pasteurs ont à transmettre et à enseigner la doctrine

en utilisant les méthodes pédagogiques appropriées et en instituant le catéchisme paroissial

spécialement pour les enfants :

192 Élisabeth Germain, 2000 ans d'éducation de la foi, 81. 193 Idem, 83.

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113

Les évêques auront soin aussi qu’au moins les dimanches et les jours de fête

que dans chaque paroisse, ceux que cela concerne mettent toute leur diligence à

enseigner aux enfants les rudiments de la foi et l’obéissance qu’ils doivent à

Dieu et à leurs parents; s’il est nécessaire, qu’ils les y contraignent même par

les censures ecclésiastiques194.

Le déplacement est majeur; les parents ont l’obligation d’amener les enfants au catéchisme.

La paroisse devient un élément central de la catéchèse. L’évêque est le responsable de la

catéchèse qu’il délègue aux curés des paroisses. Les paroisses s’organisent en développant

des groupes de catéchistes associés dans différentes confréries. Par orthodoxie et

orthopraxie, le catéchisme va devenir l’affaire des curés : « Or le garant de la vraie doctrine

ne peut être qu’un clerc, un homme d’Église : un homme de savoir formé dans un séminaire

ou une académie »195. L’instruction religieuse devient un moyen de promouvoir

l’humanisme et d’apprendre à l’homme à bien se conduire. Même qu’en France, le pouvoir

politique va imposer sa vision sur le contenu de la catéchèse afin de former de bons

citoyens; l’édification de l’Église est seconde196. Ce sont les catéchismes centrés davantage

sur la morale, à l’image du catéchisme instauré par Napoléon, qui deviendront la source

d’inspiration des différents catéchistes du dix-neuvième siècle :

Désormais comme le catéchisme impérial, les sacrements n’apparaissent plus

que comme des moyens à prendre, des obligations à remplir, devoirs de la

religion (on doit « faire ses Pâques », accomplir son « devoir pascal », comme

on doit accomplir son « devoir d’État »)197.

Claude Fleury (1640-1723), ami de Bossuet et de Fénélon, et confesseur du roi Louis XV,

insère des récits bibliques dans son catéchisme :

Il est évident par-là que le catéchiste doit en savoir beaucoup plus que ce qui

est écrit ici. Il doit avoir bien lu l’Écriture sainte, particulièrement les livres

194 Giuseppe Alberigo et al., Les Conciles oecuméniques Tome II-2 Les décrets de trente à Vatican II, 1551. 195 Élisabeth Germain, 2000 ans d'éducation de la foi, 107. 196 Idem, 127. 197 Idem, 129.

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historiques : il doit, pour bien faire, avoir vu dans les sources tout ce que j’ai

tiré des auteurs ecclésiastiques marqués dans la marge198.

Claude Fleury dit que les meilleurs catéchistes sont les parents, et suggère que ce soit les

pères ou les mères, si cela est possible : « Car les meilleurs catéchistes seraient les pères de

famille, si chacun était bien instruit et soigneux d’instruire ses enfants et domestiques, ils

feraient beaucoup plus de bien que ne peuvent faire les prêtres et les pasteurs »199. Claude

Fleury propose de faire découvrir les grands récits bibliques aux catéchisés.

Un fait sera marquant dans la catéchèse d’après Concile de Trente : l’instauration de la

méthode de Saint-Sulpice en paroisse. La catéchèse est centrée sur les enfants et on utilise

divers types de pédagogie pour la séance : la mémorisation, la narration, le chant,

l’enseignement. Chaque catéchèse fait appel à un récit biblique, à des prières en groupe et à

une interpellation morale. Cette méthode comprend un enseignement doctrinal; on élabore

des liens avec la liturgie et la Bible et on ajoute un volet moral. Un des objectifs de cette

méthode est d’intégrer les jeunes dans la vie paroissiale d’où l’importance de soigner le lieu

de la catéchèse. Cette méthode comprend six étapes : interrogation sur le catéchisme,

présentation d’un récit biblique, retour sur la catéchèse précédente, instruction, chants,

commentaires sur l’évangile du jour et prône200. Cette catéchèse est sous la responsabilité

du curé avec l’aide de bénévoles que l’on appellera catéchistes. En plusieurs endroits, des

confréries de catéchistes vont se former pour soutenir les bénévoles.

Joseph Colomb souligne que le projet de la réforme tridentine n’est pas seulement axé sur

les enfants, mais aussi sur les adultes. D’ailleurs, de nombreux catéchismes leur sont

destinés201. Les évêques et les théologiens qui ont participé aux mouvements de la Contre-

Réforme avaient deux objectifs : développer la connaissance du contenu de la foi chez les

chrétiens et lutter contre la Réforme :

198 Claude Fleury, Catéchisme historique : contenant en abrégé l'histoire sainte et la doctrine chrétienne

(Lyon : Chez Perisse frères libraires, 1850), 8-10. 199 Idem, 29-30. 200 Élisabeth Germain, 2000 ans d'éducation de la foi, 133. 201 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 39.

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115

La plupart du temps, il y a un grand et un petit catéchisme : l’un pour les

enfants, l’autre qui est le livre du maître correspondant et un guide pour le curé

dans le prône destiné aux adultes. Car c’est la paroisse entière qui est

concernée : le catéchisme d’après le Concile de Trente est né pour la paroisse

entière202.

Les dix-huitième et dix-neuvième siècles voient une accentuation de l’enseignement par la

méthode du catéchisme et, parallèlement, la laïcisation de la société se développe :

La société se laïcise, l’atmosphère de la société civile et même de la famille

joue de moins en moins le rôle du catéchuménat. L’enfant (et l’adulte) vit dans

une atmosphère qui ne prépare plus à « entendre » et à goûter le catéchisme203.

Plusieurs communautés religieuses se dévouent à la catéchèse. Elles permettront à de

nombreux démunis de s’alphabétiser et de se catéchiser204. Joseph Colomb réalise une

synthèse de cette période. Il souligne qu’après la catéchèse, il n’y a pas de persévérance

dans l’engagement des jeunes. Les catéchismes sont centrés sur l’instruction religieuse, sur

la doctrine. La catéchèse se vit en marge de la liturgie. Le catéchisme des enfants est coupé

de la vie familiale et de la paroisse. C’est l’affaire du clergé. Les catéchistes sont peu

formés, ils sont des exécutants et des serviteurs du clergé ou des religieux205.

Pour Charles Wackenheim, l’ère du catéchiste, c’est l’époque où on développe la

conviction que c’est par la connaissance que l’on va arriver à développer la foi206. Au dix-

neuvième siècle jusqu’en 1880, les pays d’Europe ont un cheminement semblable à une

institution catéchétique centrée sur l’école et soutenue par les paroisses.

Joseph-André Jungmann décrit le changement du modèle de catéchèse de la période du

Moyen Âge à celle de l’après-Concile de Trente, comme le passage de la catéchèse animée

par la famille et la communauté à la catéchèse du livre : « Le livre acquiert droit de cité

202 Idem, 40. 203 Idem, 44. 204 Paul Broutin, « Le mouvement catéchétique en France au XIXe siècle, » dans Nouvelle revue théologique,

no. 82 (1960) : 608. 205 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 47. 206 Charles Wackenheim, La catéchèse, 37.

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dans la catéchèse et commence à empiéter sur le rôle de formation exercé jusqu’alors par la

communauté religieuse »207. Le catéchiste est celui qui amène les catéchisés à apprendre

par cœur le contenu du catéchisme : « L’accent était mis sur le travail de mémoire et sur la

récitation : il s’ensuivait une mécanisation inévitable chez les catéchistes laïcs moins

cultivés »208. Selon Joseph-André Jungmann, l’école obligatoire provoque un déplacement

important de l’activité catéchistique de la communauté chrétienne vers l’école.

Qu’est-ce que je retiens de cette période? Le catéchisme de Trente devient le livre de

référence pour les évêques qui ont comme mission de créer des catéchismes diocésains.

C’est l’affirmation du modèle de la paroisse territoriale avec un pasteur résident

responsable de la catéchèse. La catéchèse est centrée sur la connaissance, le rassemblement

dominical et la célébration des sacrements. Le public est constitué presque exclusivement

d’enfants malgré la confection de très nombreux catéchismes pour les adultes. La catéchèse

est animée surtout par les clercs et par de nombreux religieux et religieuses qui se

constituent en congrégation pour le service de la catéchèse. Les parents ont comme rôle de

s’assurer que les enfants participent aux rassemblements de la paroisse. Quelques

catéchistes bénévoles aident les enfants à mémoriser les leçons et vérifient s’ils connaissent

par cœur la doctrine selon les termes appris. Comme on est dans une période où l’on

commence à se soucier de l’alphabétisation des masses, le catéchisme devient l’occasion

d’aider ce grand mouvement d’alphabétisation de la population.

Au cours des dix-huitième et dix-neuvième siècles, une période où la scolarisation se

généralise, les enseignants prennent progressivement en charge la catéchèse et deviennent

ainsi le relais des curés et des vicaires. Les parents et la communauté chrétienne sont

marginalisés et parfois exclus de cette pratique. Le développement des connaissances sur la

doctrine, la morale et l’organisation ecclésiale durant cette période est une réussite. La

catéchèse demeure entre les mains de spécialistes. Les catéchistes ne sont dorénavant que

des techniciens spécialisés dans les techniques mnémotechniques. La paroisse commence à

perdre son expertise catéchétique au profit de l’école. Mon regard sur cette période en

207 Joseph-André Jungmann, Catéchèse : objectifs et méthodes de l'enseignement religieux, 31. 208 Idem, 35.

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comparaison avec ma pratique actuelle, m’indique que les parcours utilisés ne sont pas

aussi structurés mais qu’ils font appel davantage à la Parole de Dieu. Deux points de cette

troisième période sont communs avec la catéchèse actuelle : elle est dans les mains de

spécialistes et les parents sont marginalisés.

3.1.5 La catéchèse à la fin de l’ère des catéchistes et au début du

mouvement catéchétique (1900-1960)

Le renouveau catéchétique du vingtième siècle est issu de la découverte de nouvelles

pédagogies, du développement des sciences humaines et d’un retour aux sources des

premiers siècles du christianisme. L’industrialisation, le développement des idéologies

comme le communisme, le nazisme et le fascisme ont ébranlé les institutions civiles et

ecclésiales. La connaissance dans ce contexte n’est plus suffisante pour affirmer la foi.

Plusieurs documents magistériels présentent les enjeux de la catéchèse au début du

vingtième siècle : l’encyclique Acerbo Nimis de Pie X, le décret Quam Singulari (Décret de

la Congrégation des sacrements) approuvé par Pie X et le document Orbem Catholicum de

Pie XI en 1923. Le document Acerbo Nimis est une intervention dans le domaine

catéchétique, il souligne l’ignorance de nombreux chrétiens :

Qu’il y ait, en fait, à notre époque, de nombreux chrétiens qui ignorent

complètement les vérités nécessaires au salut éternel, c’est ce dont on se plaint

communément, plaintes hélas! trop fondées209.

Le document rappelle l’importance du catéchisme, de la prédication les dimanches et jours

de fête et insiste sur la formation, dans chaque paroisse, d’un groupe de laïcs pour faire la

catéchèse210. Le pape dénonce indirectement les résistances du clergé face à l’implication

des laïcs et la difficulté d’organiser la catéchèse spécialement pour les jeunes qui sont dans

des écoles publiques où il n’y a pas d’enseignement de la religion. Il propose une catéchèse

pour les adultes à partir du catéchisme de Trente. Cette lettre encyclique rappelle que la

209 Pie X, Lettres apostoliques de S.S. Pie X ; encycliques, motu proprio, brefs, allocutions, etc, Tome II vols.

(Paris : Bayard, 1936), 69. 210 Idem, 85.

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catéchèse est une invitation à la conversion: « Comme, en outre, le but de l’enseignement

doit être l’amendement de la vie, le catéchiste établira une comparaison entre les préceptes

de vie que Dieu a donnés et la manière dont les hommes vivent en réalité… »211.

Le document Quam Singulari, (Décret de la Congrégation des sacrements) approuvé par

Pie X, définit l’âge de raison (7 ans), soit dès le moment où l’enfant distingue la différence

entre le bien et le mal et la capacité à faire la distinction entre le pain eucharistique et le

pain ordinaire. L’initiation aux sacrements n’est pas décrite comme un aboutissement, mais

comme une étape dans l’initiation chrétienne :

Pour la première confession et la première communion, point n’est nécessaire

une pleine et parfaite connaissance de la doctrine chrétienne. L’enfant devra

cependant ensuite continuer à apprendre graduellement le catéchisme entier,

suivant la capacité de son intelligence212.

Le motu proprio de Pie XI Orbem Catholicum va dans le même sens que Pie X d’appuyer

le développement de la catéchèse en paroisse et dans les institutions scolaires. La catéchèse

doit s’adresser autant aux enfants qu’aux adultes. Il propose la création d’un réseau de

soutien mutuel entre les différents groupes ecclésiaux213. Le décret Provido sane consilio

de la Sacrée Congrégation du Concile, approuvé par le pape Pie XI, demande un même

traitement pour la qualité d’enseignement et autant de rigueur pour l’enseignement

catéchétique que pour l’enseignement des sciences :

Il serait vraiment choquant, au milieu de cette immense organisation

scientifique et devant une pareille ardeur pour s’instruire, de négliger ou

d’omettre la science de Dieu et des fins suprêmes que contient la religion214.

Ce document déplore le peu de formation chrétienne de plusieurs parents. Il propose un

service de catéchèse paroissial, là où il y a de l’enseignement religieux à l’école. Le

211 Idem, 79. 212 Idem, 267. 213 Pie XI, Actes de S.S. Pie XI, encycliques, motu proprio, brefs, allocutions, actes des discatères, etc, vol.

Tome I (années 1922-1923) (Paris : Maison de la Bonne presse, 1927), 272. 214 Pie XI, Actes de S.S. Pie XI, encycliques, motu proprio, brefs, allocutions, actes des discatères, etc, vol.

Tome XI (Année 1933-1934) (Paris : Maison de la Bonne presse), 276-277.

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document précise la complémentarité de la famille, de la paroisse et de l’école : « On

fondera des écoles paroissiales de catéchisme et suivant les méthodes établies, les enfants et

les adolescents y apprendront les rudiments de la foi et des lois divines »215.

L’initiation aux sacrements n’est pas un but, mais une étape dans le processus. Il est

suggéré d’adapter la catéchèse selon les âges. On souligne l’importance de la collaboration

de laïcs bénévoles pour le catéchisme et leur insertion dans la communauté chrétienne selon

la formule de la Confrérie de la doctrine chrétienne. Ces trois documents montrent la

problématique catéchétique au début du vingtième siècle.

Joseph Colomb est conscient que, pour réussir, le renouveau catéchétique doit former les

enfants, les parents, les adultes, les catéchistes et les prêtres. Le défi est de catéchiser dans

un monde de plus en plus sécularisé.

Voici comment Joseph Colomb présente les enjeux à la fin des années soixante :

Le mouvement catéchétique aborde aussi le problème des mentalités : face aux

incroyants, aux croyants non pratiquants, face à l’homme moderne, comment

présenter le message chrétien? Comment présenter le message aux divers

inadaptés? Comment former les prêtres et les catéchistes à tenir compte de ces

mentalités? Comment former le catéchiste à la collaboration avec l’ensemble

des mouvements apostoliques216.

Dès le début du vingtième siècle, plusieurs personnes sont les artisans de ces changements.

Un des premiers artisans est le Chanoine Camille Quinet (1879-1961) : « Il est également

(sic) d’avoir essayé de rendre l’exercice du catéchisme plus concret, plus adapté à des

enfants du Cours moyen, mais la tâche entreprise nous paraît aujourd’hui impossible »217.

Camille Quinet se préoccupe de former les catéchistes et utilise une pédagogie adaptée aux

215 Idem, 286. 216 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 52. 217 Gilbert Adler et Gérard Vogeleisen, Un siècle de catéchèse en France, 1893-1980 : histoire, déplacements,

enjeux, Théologie historique ; 60 (Paris : Beauchesne, 1981), 163.

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enfants218. Mais, dans son travail, on voit bien la tension entre son désir de se centrer sur les

enfants et l’enseignement du catéchisme lui-même :

Ce qui frappe, quand on parcourt ces livres très documentés, c’est la rigidité de

la méthode proposée aux catéchistes; sous couvert de les aider, on leur dicte le

cheminement à suivre, les mots à écrire, les gestes à faire219.

Il a le souci de donner une bonne formation doctrinale aux catéchistes tout en les outillant

pour leurs interventions auprès des enfants220. Le Chanoine Camille Quinet est l’illustration

du passage de l’ère du catéchisme au renouveau catéchétique221.

Par sa formation en pédagogie, Maria Montessori (1870-1952) va renouveler la catéchèse.

À partir de ses découvertes, elle propose une autre façon de procéder en considérant

l’enfant comme un acteur dans la catéchèse222. Elle insiste sur le lien avec la liturgie :

De manière neuve, elle estime que l’enfant ne doit mémoriser les vérités

religieuses qu’au terme d’une certaine expérimentation. La liturgie doit y jouer

un grand rôle, une liturgie accessible aux enfants223.

Marie Fargues a vécu de 1884 à 1973. Cette femme qui avait une formation pédagogique

appartenait au mouvement Éducation nouvelle qui est associé à la méthode de Munich224.

La Méthode de Munich est une méthode inductive composée de trois temps : présentation,

218 Camille Quinet et Lucien Hénin, Pédagogie du catéchisme à l'usage du clergé et des catéchistes

volontaires (Paris : Librairie Saint-Joseph, 1913). Chanoine Camille Quinet, Carnet de préparation d'un

catéchiste : notes pédagogiques ; d'après le catéchisme à l'usage des diocèses de France, vol. Tome 1 Dogme

(Paris : Spes, 1939). 219 Gilbert Adler et Gérard Vogeleisen, Un siècle de catéchèse en France, 1893-1980 : histoire, déplacements,

enjeux, 71. 220 Mary Coke, Le mouvement catéchétique : de Jules Ferry à Vatican II, Chrétiens dans l'histoire

(Paris : Centurion, 1988), 79. 221 Laurent Gutierrez, « L'apostolat catéchistique de Madame Marie Fargues (1928-1964) », Colloque AFEC-

CIEP Éducation, Religion, Laïcité. Quels enjeux pour les politiques éducatives? Quels enjeux pour l'éducation

comparée?, Paris Sèvres France, 19-25 octobre 2005). 222 Maria Montessori, L'enfant (Paris : Desclée de Brouwer, 1900).

Maria Montessori, La Messe vécue pour les enfants (Bruges : Desclée de Brouwer, 1949). 223 Anne-Marie Aitken et al., Thabor : l'encyclopédie des catéchistes, 59. 224 Joël Molinario, Une pédagogie de la Parole en catéchèse : de l'intervention du catéchisme à Dei Verbum

(2015 [visité le 5 juillet 2016]); accessible à http://revue-educatio.eu/wp/.

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explication et application, et s’est développée au début du vingtième siècle225. Dans ses

écrits, Marie Fargues affirme que l’on ne peut pas faire abstraction de l’évolution et du

développement humain et psychologique de l’enfant afin de préparer les catéchèses : « Le

théologien-catéchiste doit être averti de pédagogie et de psychologie »226. Elle souligne que

l’enfant est un sujet à part entière et qu’il peut, lui aussi, témoigner selon les potentialités de

sa foi :

Pour sa part, Marie Fargues va initier le développement du « renouveau

catéchétique » en rappelant que l’enfant est un sujet à part entière et qu’à ce

titre, il a des façons de comprendre et de s’exprimer qui lui sont propres227.

Marie Fargues est une des initiatrices des premières écoles de catéchistes en France, et

collabore avec l’ISPC et pour la formation des catéchistes. Laurent Gutierrez décrit

plusieurs apports de Marie Fargues : « l’enfant sujet de la catéchèse, l’importance de

programmer la formation religieuse de l’enfant selon ses potentialités, le catéchiste qui fait

le lien entre le contenu, la foi et l’enfant »228. Elle est une pionnière importante du

renouveau catéchétique et son œuvre considérable a inspiré toute une génération et celles

qui ont suivi.

Une autre femme a façonné un apport important au mouvement catéchétique, il s’agit de

Françoise Derkenne229. Elle centre sa démarche sur la personne de Jésus Christ. Françoise

Derkenne réalise le passage d’une catéchèse centrée sur la connaissance à une catéchèse qui

est une expérience et une découverte de la présence du Ressuscité230. Elle affirme que le

« catéchisme est dans le missel », que la liturgie est un lieu d’apprentissage et

d’approfondissement de la foi. Elle s’inspire du cycle liturgique pour présenter Jésus Christ

progressivement. Elle propose un nouvel aménagement de la catéchèse en fonction du

renouveau liturgique, des méthodes actives et de la Bible : « En France, Françoise

225 Joseph-André Jungmann, Catéchèse : objectifs et méthodes de l'enseignement religieux, 127-142. 226 Marie Fargues, Introduction des enfants de neuf ans au catéchisme (Paris : Desclée de Brouwer, 1936), 12. 227 Laurent Gutierrez, « L'apostolat catéchistique de Madame Marie Fargues (1928-1964) », 5. 228 Ibid. 229 Françoise Derkenne, La vie et la joie au catéchisme : introduction pédagogique (Lyon : Éditions de

l'Abeille, 1943). 230 Mary Coke, Le mouvement catéchétique : de Jules Ferry à Vatican II, 87.

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Derkenne va être la promotrice de la catéchèse liturgique selon laquelle tout catéchisme est

dans le missel »231.

Joseph Colomb est l’artisan qui a permis d’unifier tout le travail catéchétique réalisé dans le

domaine pédagogique, psychologique, biblique, liturgique et patristique232, dans une

synthèse. Il est un des artisans important du renouveau catéchétique. En 1946, il fonde la

première école pour catéchistes et, en 1947, il développe un programme de licence

d’enseignement religieux. En 1954, il fonde le Centre National de l’Enseignement

Religieux (CNER) à l’appel de l’épiscopat français.

Élisabeth Germain ajoute que, pour Joseph Colomb, la catéchèse est une action spécifique

propre alors que Joseph Colomb affirme que la catéchèse est une discipline théologique233.

Pour ce dernier, le catéchiste n’est pas un répétiteur, mais un accompagnateur et aussi un

formateur. Chez les catéchisés, il a suscité la créativité : « De ce point de vue, les Guides du

Catéchiste sollicitent vivement la créativité de l’éducateur, ne lui permettent pas d’être un

répétiteur »234. Joseph Colomb travaille à unifier les courants de redécouvertes de la Parole

de Dieu, de la liturgie, du renouveau doctrinal en combinaison avec les découvertes en

pédagogie et en psychologie. Il écrit que ce deuil de la séparation de l’Église et de l’État,

imposée par le gouvernement il y a plus de soixante ans, n’a pas été fait pleinement dans

l’Église française. En conclusion, les travaux de Joseph Colomb sont importants, encore

d’actualité, et nous n’avons pas terminé de « déployer les intuitions géniales de l’un des

grands artisans du renouveau du catholicisme français après la guerre de 1939-1945 »235.

La catéchèse ne peut pas se développer sans lien avec la communauté chrétienne. Joseph

Colomb nomme le défi de penser une catéchèse avec des laïcs qui ne sont pas dans un

monde de chrétienté :

231 Laurent Gutierrez, « L'apostolat catéchistique de Madame Marie Fargues (1928-1964) ». 232 Théo Kisalu et Henri Derroitte, Les grandes signatures de la catéchèse : du XXe siècle à nos jours : index

des noms de personnes, Les fondamentaux (Bruxelles : Lumen vitae, 2012), 117-129. 233 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile : manuel catéchétique tome premier, 3. 234 Gilbert Adler et Gérard Vogeleisen, Un siècle de catéchèse en France, 1893-1980 : histoire, déplacements,

enjeux, 207. 235 Idem, 208.

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Or, il apparaît que nous n’avons pas encore jamais pensé vraiment les

exigences de l’enseignement religieux pour lui-même et en lui-même,

séparé de l’école chrétienne; nous n’avons jamais encore pensé au

catéchisme propre à un monde qui n’est pas celui de la chrétienté236.

Joseph Colomb insiste sur l’engagement de foi du catéchiste et sur son désir de vivre la

Parole de Dieu et de Jésus Christ. Le thème de l’incarnation est très présent dans la

théologie de Joseph Colomb et a des conséquences très importantes pour la formation des

catéchistes. Il est celui qui insiste pour que les catéchistes soient toujours près des réalités

des catéchisés de la communauté chrétienne :

Le salut est en effet une histoire, la plus personnelle et la plus communautaire.

Tout l’effort de la présentation catéchétique consiste justement à faire

découvrir l’intériorité spirituelle dans l’histoire la plus charnelle. À faire entrer

dans la progression de la découverte d’un amour dont on sait qu’il ne nous

manquera jamais237.

Dans plusieurs de ses ouvrages, Joseph Colomb insiste sur la fin du catéchuménat social. Il

soutient pour ainsi dire que la société, l’école et la famille dans la majorité des cas ne sont

plus porteuses de la culture chrétienne238. Joseph Colomb suggère que l’Église organise

elle-même un système catéchétique sans compter sur l’aide des écoles chrétiennes. Il désire

que la formation des différents intervenants soit de la même qualité que celle des

professeurs de français, de mathématiques et d’autres matières même si la formation est

hors contexte scolaire : « Il s’agit donc, pour l’Église, d’organiser son enseignement

proprement religieux avec la même ampleur, avec le même soin que l’État met à organiser

l’enseignement profane »239. Les prêtres sont souvent préoccupés par d’autres tâches. La

catéchèse doit être au centre de la préoccupation de la vie chrétienne. Il note que souvent

les parents ne veulent pas trop investir dans les démarches catéchétiques, même ceux qui

ont inscrit leurs enfants dans les écoles privées catholiques : « Parmi ceux qui envoient

236 Joseph Colomb, Pour un catéchisme efficace (Lyon : Vitte, 1948), 32. 237 Henri Denis, « Joseph Colomb, le théologien, » dans Catéchèse 80 (1980): 91. 238 Joseph Colomb, Pour un catéchisme efficace, 32. 239 Idem, 33.

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leurs enfants à l’école chrétienne, un certain nombre seraient prêts à protester si on faisait

trop de catéchisme à leurs enfants »240. Selon Joseph Colomb, la formation est très

importante, car pour lui, les catéchistes sont les témoins de Dieu auprès des catéchisés : « Il

y a plus : car c’est par le catéchiste et en lui que Dieu est présent à l’enfant, que l’enfant au

catéchisme est en présence de Dieu »241. Il insiste pour que l’Église puisse valoriser la tâche

du catéchiste. Il propose de faire des journées pour sensibiliser le peuple chrétien à

l’importance et à la nécessité de la catéchèse. Il y a donc une première tâche qui est celle de

former la communauté chrétienne242. Joseph Colomb suggère qu’une première formation de

base puisse être donnée par des prêtres dans une réunion hebdomadaire avec les

catéchistes :

Et c’est ou ce sera peut-être le rôle essentiel du prêtre – sans préjudice des

catéchismes d’enfants qu’il pourra se réserver – que de faire le catéchisme aux

catéchistes. Dans des réunions fréquentes, de chaque semaine, il exposera la

doctrine des prochains chapitres; il donnera des explications, il simplifiera243.

Les catéchistes ont aussi un rôle dans la formation des parents. Ils ont à développer le souci

des parents à accompagner leur enfant. Par des visites auprès des parents, le catéchiste

devrait aussi développer chez les familles une appartenance à la communauté. Joseph

Colomb propose que les catéchistes soient associés dans un corps et que leur ministère soit

reconnu par l’Église. La catéchèse exige que l’on puisse aménager les locaux nécessaires et

dégager les budgets pour réaliser ce ministère de la Parole. La communauté chrétienne doit

être le lieu d’accueil des jeunes qui entrent dans le monde des adultes; c’est de cette seule

façon que l’on peut stimuler la fidélité à Dieu et à la vie chrétienne244. Joseph Colomb

propose une nouvelle articulation de la fides qua et de la fides quae :

240 Idem, 14. 241 Idem, 116. 242 Idem, 44-45. 243 Idem, 45-46. 244 Idem, 93.

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L’œuvre de Joseph Colomb n’est pas seulement de déplacer le « lieu » de la

foi, par exemple de l’intelligence (chez Lusseau), vers la totalité de la personne

(intellectus et ratio, affectivité, activité). Il cherche à instaurer une relation

active entre les deux pôles depuis longtemps reconnus par la théologie : la fides

quae (ou doctrine) et la fides qua (activité du sujet), l’énoncé et l’énonciation,

dirions-nous aujourd’hui, relation longtemps déséquilibrée par la

prépondérance doctrinaire de la fides quae et la fixation de cette dernière dans

un corpus et un langage dogmatique réputé immuable245.

Je présente maintenant les deux synthèses du renouveau catéchétique effectuées par Joseph

Colomb et Joseph-André Jungmann. Je les ai choisies à cause de leur contexte respectif :

l’un vit dans un monde complètement laïc où les écoles sont neutres, l’autre où les écoles

sont confessionnelles dans une société où il y a séparation entre l’Église et l’État.

Pour Joseph-André Jungmann, le catéchiste est surtout un professeur. Il se concentre sur la

transmission d’un savoir. Il œuvre dans le cadre scolaire et présente la foi comme une

expérience avec le Dieu de Jésus Christ. Il a le souci de collaborer avec les parents et la

communauté chrétienne. Le catéchiste anime la catéchèse à partir de la Bible. Il explique le

catéchisme et propose des liens avec la liturgie tout en utilisant des méthodes pédagogiques

appropriées selon l’âge des catéchisés : « Le principe ici doit être : peu d’enseignement

liturgique, mais beaucoup de liturgie, beaucoup d’actes pratiques de vie religieuse à la

maison, à l’école, à l’église »246. Jungmann est déjà conscient que l’enseignement religieux,

ce n’est pas suffisant :

Si l’on parvient à introduire dès l’enfance dans la catéchèse le contenu de la

liturgie, on fait jaillir là pour le chrétien une source capable de l’alimenter toute

sa vie durant. La doctrine assimilée d’une façon purement théorique s’efface

bientôt de la mémoire et, souvent, il ne s’y ajoute plus de connaissances247.

Joseph-André Jungmann se détache clairement du modèle tridentin de la catéchèse afin de

s’inscrire dans le renouveau catéchétique dans un contexte où l’école publique fait la

245 Georges Duperray, « 1957 : L'affaire du catéchisme, » dans Catéchèse, no. 80 (1980) : 65. 246 Joseph-André Jungmann, Catéchèse : objectifs et méthodes de l'enseignement religieux, 75. 247 Idem, 73.

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catéchèse. Il est conscient que s’il n’y a pas de suivi avec la famille et la communauté

chrétienne, cette catéchèse risque d’être un coup d’épée dans l’eau.

Pour Joseph Colomb qui vit dans un contexte où tout est laïc, la paroisse est un des lieux

catéchétiques possibles, mais pas l’unique lieu. La paroisse jouit d’une place privilégiée

dans la catéchèse. Mais, elle ne peut jouer son rôle que si elle est une communauté vivante

et non pas seulement un lieu de distribution de services administratifs ou sacramentels :

« Et en fait l’absence d’efficacité de beaucoup de nos catéchismes est venue et vient de

cette médiocrité de la communauté paroissiale, qui n’est pas assez signe du Royaume de

Dieu annoncé par le catéchiste »248. Les catéchistes reçoivent leur mission de l’évêque :

Le catéchiste est donc envoyé de Dieu, comme le Christ, et il ne veut que

parler sous l’influence de l’Esprit. Il ne s’agit donc pas en lui radicalement

d’une volonté humaine d’enseigner, mais d’une réponse à un appel de Dieu,

appel de la communauté ecclésiale ressenti comme adressé à lui249.

Le catéchiste doit avoir un minimum de qualités et d’attitudes afin d’exercer ce ministère.

Joseph Colomb parle d’un talent naturel pour communiquer avec les autres, être capable de

s’exprimer et aussi d’avoir la foi : « il faudrait souhaiter peut-être une espèce de postulat,

qui aurait pour but de juger si le minimum des qualités nécessaires est présent, si les

qualités essentielles ne manquent pas »250. Le catéchiste est par son rôle et ministère signe

de la présence de Dieu et témoin d’une Parole vivante pour les gens. Il est un signe de la

médiation qu’il y a entre Dieu et les hommes : « C’est par la médiation du catéchiste que

Dieu parle à l’homme, et nous parlons ici des qualités du médiateur »251. Joseph Colomb

propose cinq niveaux de formation afin de répondre aux besoins de formation selon les

différents besoins des gens. Le premier niveau est celui de la communauté locale où le

prêtre, avec le catéchiste professionnel, forment les catéchistes par des rencontres

régulières. Le deuxième niveau suggère une formation pour un ensemble de paroisses. Le

248 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile; manuel catéchétique tome deuxième, 690. 249 Idem, 742. 250 Joseph Colomb, « Formation des catéchistes, » dans Documentation catéchistique no. 24 (1954) : 10. 251 Joseph Colomb, Le service de l'Évangile; manuel catéchétique tome deuxième, 752.

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troisième niveau de formation est régional et comprend un programme étalé sur deux à trois

ans pour les catéchistes bénévoles. Au quatrième niveau, ce sont des écoles pour la

formation de catéchistes professionnels; on pourrait dire des formateurs de formateurs. Le

cinquième niveau est pour une formation supérieure, c’est-à-dire la maîtrise et le doctorat.

Que pouvons-nous penser de cette période qui s’étale de la fin du dix-neuvième siècle au

début du vingtième siècle? Pendant plus de soixante ans, deux façons de voir se sont

côtoyées. La formule du catéchisme questions-réponses et l’élaboration du renouveau

catéchétique. Cette période a vu naître un déplacement majeur en catéchèse. On est passé

du modèle d’une catéchèse centrée sur le contenu doctrinaire, sa mémorisation dont

l’animation était assurée par les prêtres, religieux et religieuses, qui se faisait à l’école, à

une catéchèse qui part de l’expérience des catéchisés, la liturgie, la Parole de Dieu et les

nouvelles méthodes pédagogiques. Le mouvement catéchétique fait le constat que la

catéchèse centrée sur l’appropriation de connaissances cognitives ne suffit plus. Les apports

en pédagogie, en liturgie, en Bible, et en psychologie suscités par le mouvement

catéchétique, de même que la séparation de l’Église et de l’État, amènent un changement de

paradigme qui va s’inspirer du christianisme des origines. On réalise que la catéchèse est

une expérience ecclésiale où l’on découvre que la foi est un don de Dieu qui s’approfondit

en Église, et qu’elle requière une formation intégrale de la personne. Tous les chrétiens sont

invités à devenir acteurs de cette démarche. Les initiateurs du renouveau catéchétique

mettent en évidence la nécessité d’avoir des catéchistes permanents pour assurer la

continuité pour le système catéchétique, ainsi que pour la formation des catéchistes

bénévoles. Mais le désir de vouloir développer le ministère du catéchiste en lien avec la

communauté provoque beaucoup de résistances.

Dans les pays où l’école catholique publique dispense un enseignement religieux, la

catéchèse se concentre dans les écoles avec l’avènement de l’école obligatoire. Le défi est

différent des milieux où il n’y a pas de catéchèse à l’école. Les catéchistes sont les

professeurs. Les parents ont la seule mission d’amener les enfants à l’école et aux

célébrations sacramentelles à la paroisse. Lorsque l’école est confessionnelle, la paroisse ne

développe pas son expertise catéchétique, mais devient une dispensatrice de sacrements et

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de services religieux. De plus, il est noté que l’Église institutionnelle va vivre en tension

entre les deux modèles catéchétiques. Le Magistère va insister pour que chaque paroisse

puisse avoir son groupe de catéchistes, mais cette idée ne sera reçue que dans les endroits

où l’Église peut compter sur les écoles confessionnelles.

Ce que nous pouvons observer en lien avec notre pratique, c’est que nous avons quitté en

l’an 2000 un modèle semblable à celui que présente Joseph-André Jungmann dans son livre

sur la catéchèse, pour « tomber » dans un modèle semblable à celui décrit par Joseph

Colomb. Nous avons peine à nous relever de la chute du changement, car la paroisse n’a

pas l’expertise à l’heure actuelle pour affronter les résistances internes qui sévissent en bien

des endroits. Il y a un manque de formation chez tous les acteurs de la catéchèse...

3.2 L’évolution de la catéchèse à partir de Vatican II

Le concile Vatican II n’était pas un concile qui avait pour but spécifique la catéchèse et

encore moins la formation des catéchistes. Le Concile rappelle que c’est l’évêque qui a la

responsabilité de la catéchèse dans son diocèse et de son organisation par les prêtres dans

les paroisses252. La restauration du catéchuménat est un des déplacements majeurs du

Concile Vatican II. Pour le Concile, la paroisse est un lieu privilégié pour la catéchèse sans

en être le seul. Le curé a la charge d’organiser la catéchèse en collaboration avec les

religieux, religieuses et les laïcs. Le ministère du catéchiste est reconnu; on suggère, pour

aider la communauté à découvrir son rôle, de présenter les catéchistes à l’assemblée

dominicale253. Le Concile Vatican II propose une catéchèse qui inclut une redécouverte de

la Bible, la liturgie, l’utilisation des sciences humaines, la pédagogie et la spiritualité qui

s’adapte aux cultures. Il soutient aussi le développement de la condition des catéchistes.

252 Christus Dominus (CD) 14 253 Ad Gentes (AG) 14. 17,

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129

3.2.1 Les documents qui ont marqué l’évolution de la

catéchèse de l’Église universelle depuis Vatican II

Les documents du Magistère sur la catéchèse se sont succédés à un rythme accéléré. Un

premier directoire et deux exhortations apostoliques Evangelii Nuntiandi et Catechesi

Tradenda sont publiés en 1971, suivies de la production du Catéchisme de l’Église

Catholique en1993 et la parution d’un nouveau directoire en 1997. Mon objectif ici est

d’indiquer les grandes étapes et l’évolution de la pensée catéchétique du Concile Vatican II

jusqu’à l’an 2000.

3.2.1.1 Directoire général de catéchèse (1971)

Le Directoire général de catéchèse de 1971 est une mise à jour de la catéchèse à partir des

documents conciliaires du Concile Vatican II. Le directoire de 1971 se situe dans la

perspective du document conciliaire de Vatican II Dei Verbum. Le Directoire général de

catéchèse effectue un déplacement : la Parole de Dieu sera un des éléments centraux de la

catéchèse. L’Église a comme mission de poursuivre le ministère de la Parole sous quatre

formes différentes et complémentaires : évangélisation ou prédication missionnaire,

catéchèse, forme liturgique, forme théologique254. Ce document insiste que la catéchèse

s’adresse à tous. On voit un déplacement important : la catéchèse n’est plus centrée

seulement sur les enfants, mais pour tous et les adultes en priorité. Le Directoire général de

catéchèse affirme que la catéchèse des adultes est le modèle prioritaire255. C’est une des

conséquences de la restauration du catéchuménat par le concile Vatican II.

Le Directoire général de catéchèse affirme que chaque acteur est essentiel : l’évêque, les

prêtres, les catéchistes, les familles chrétiennes et la communauté. L’évêque est le

responsable de la catéchèse. Les prêtres collaborent avec l’évêque et ils sont responsables

de la mise en œuvre de la catéchèse dans les communautés paroissiales. La responsabilité

revient aux prêtres et aux diacres d’assurer la direction de la catéchèse en collaboration

avec les autres acteurs de la catéchèse. Le Directoire général de catéchèse affirme que le

254 Église Catholique. Congregatio pro Clericis., Directoire général de catéchèse, Discours du pape et

chronique romaine ; no 256 (Paris : Téqui, 1971), 27. 255 Idem, 29.

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130

rôle de la communauté chrétienne et celui du catéchiste sont très liés : ils s’appuient

mutuellement et leur témoignage est garant de l’efficacité de la catéchèse. Le catéchiste est

le signe de l’Église auprès des catéchisés256. Le catéchiste coopère avec les parents :

La coopération entre les catéchistes et les parents (mise en commun de leurs

avis respectifs sur les programmes, les méthodes, les difficultés qui se

présentent) est nécessaire pour que l’éducation des enfants progresse avec

équilibre et harmonie257.

La formation des catéchistes est proposée en trois volets : formation théologique, formation

en sciences humaines, formation méthodologique. La formation théologique est centrée sur

la Parole de Dieu et la doctrine chrétienne. Le catéchiste vulgarise le message. La formation

en sciences humaines est un outil afin de comprendre la vie des êtres humains aujourd’hui.

Les lieux de formation peuvent être les centres de formation des diocèses ou des centres

paroissiaux de catéchèse258. Les permanents sont invités à former leurs principaux

collaborateurs.

André Fossion, prêtre jésuite, docteur en théologie et directeur du Centre Lumen Vitae de

1992-2002 donne une évaluation positive du Directoire général de catéchèse de 1971. Il le

voit comme une réception des acquis du renouveau catéchétique. Dans son analyse, il

souligne que le document propose une catéchèse qui se base sur deux principes :

l’organicité de la foi et la hiérarchisation du contenu de la foi. Voici comment il explique

son propos : « Pour chacune de ces deux séries de règles, on peut reconnaître, nous allons le

voir, un double principe : un principe d’organicité et un principe de hiérarchisation »259. La

catéchèse est christocentrique et trinitaire. Il nomme trois apports du Directoire général de

catéchèse de 1971. Le premier, la catéchèse des adultes devient la forme privilégiée de

toute catéchèse. Le second, la catéchèse est partie intégrante de la vie des communautés. Le

troisième apport, la catéchèse pour adultes permet le développement d’une créativité et la

256 Idem, 39. 257 Idem, 90. 258 Idem, 114-115. 259 André Fossion, La catéchèse dans le champ de la communication : ses enjeux pour l'inculturation de la

foi, Cogitatio fidei ; 156 (Paris : Éditions du Cerf, 1990), 248.

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participation de tous260. André Fossion se demande si le Directoire général de catéchèse

réduit l’expérience humaine à un moyen pédagogique et à l’engagement seulement comme

une conclusion de la démarche catéchétique.

Pour sa part, Gilles Routhier, prêtre docteur en théologie et doyen de la Faculté de

théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval, analyse ce document en regardant

plus particulièrement le rôle de la famille et celui de la paroisse. Il affirme que le Directoire

général de catéchèse fait peu de place à la paroisse et à la famille261. La famille est presque

absente et son rôle est marginal : « Si les parents n’ont qu’un rôle limité dans la catéchèse,

c’est qu’elle est presque entièrement l’affaire des catéchistes (47 occurrences) qui en sont

les véritables acteurs »262.

Comment se situer avec ces commentaires? Le Directoire général de catéchèse ouvre la

catéchèse à plusieurs types de communautés chrétiennes. La paroisse est un des lieux

privilégiés de la catéchèse et de la formation des catéchistes263. Le Directoire quitte un

modèle centré sur le contenu de la foi et qui faisait appel à la mémoire presque

exclusivement. Il fait le passage d’une catéchèse centrée sur l’enseignement avec une

priorité aux enfants à une catéchèse qui privilégie l’accompagnement des adultes comme

modèle prioritaire. Il insiste sur le fait d’avoir une vision organique de la catéchèse en ayant

comme centre le Christ et la Trinité.

3.2.1.2 Rituel de l’initiation chrétienne des adultes

C’est en 1972 qu’est réalisé le nouveau Rituel de l’initiation chrétienne des adultes

(RICA)264. C’est une commande du Concile Vatican II265. Ce rituel s’inspire du

catéchuménat des premiers siècles de l’Église et de la redécouverte de l’initiation

260 Idem, 258. 261 Gilles Routhier, Sacrée catéchèse ! Quand tu déranges familles et paroisses (Bruxelles : Lumen Vitae,

2007), 11. 262 Idem, 15. 263 Église Catholique. Congregatio pro Clericis., Directoire général de catéchèse, 125. 264 Commission internationale francophone pour les traductions et la liturgie, Rituel du baptême des adultes

par étapes l'initiation chrétienne des adultes (Paris : A.E.L.F., 1974). 265 SC 64

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chrétienne. La visée du rituel est de former des disciples du Christ qui à leur tour

témoignent de la Bonne Nouvelle et par leur insertion dans la communauté participent au

renouvellement de l’Église.

Le RICA propose une démarche en quatre étapes : le temps de la première évangélisation,

le temps du catéchuménat, le temps de la purification et de l’illumination et le temps de la

mystagogie. La démarche se vit en Église, tous les baptisés et les catéchumènes y sont des

acteurs. Ces quatre étapes se réalisent sur une période qui s’échelonne sur deux à trois ans.

Pour les réaliser, le rituel suggère des moyens pédagogiques. On parle d’une catéchèse qui

est en lien avec la liturgie et une familiarisation de la pratique chrétienne par de multiples

expériences vécues avec des baptisés, de la célébration de plusieurs rites liturgiques, de

l’expérimentation de la prière individuelle et communautaire. Le candidat est invité à

entendre le témoignage de plusieurs chrétiens afin de témoigner à son tour après le

baptême. La communauté est un acteur actif, de même que les fidèles qui sont invités à être

témoins du Ressuscité pour les catéchumènes. Le catéchuménat est sous la responsabilité

de l’évêque qui délègue cette tâche aux prêtres et aux catéchistes. Les prêtres sont invités à

mettre en place avec les catéchistes et des laïcs compétents une pastorale d’accueil266. Les

catéchistes sont des témoins actifs de la foi et accompagnent les catéchumènes. Ils les

guident, proclament la Parole de Dieu et adaptent le cheminement aux besoins des

catéchumènes. Ils sont les intermédiaires entre les catéchumènes et la communauté

chrétienne :

Les catéchistes exercent une fonction importante pour le progrès des

catéchumènes et la croissance de la communauté. Ils prendront une part active

dans les rites, chaque fois que cela est possible267.

Le RICA a été publié en 1972. La dernière adaptation a été faite en 1996 pour l’édition

française. Mais comment a été reçu ce rituel? Roger Béraudy, prêtre sulpicien, souligne le

choix des pères conciliaires de revenir aux origines du catéchuménat primitif. Pour lui, le

266 Sacré Congrégation pour le culte divin, Rituel de l'initiation chrétienne des adultes traduit par la

Commission internationale francophone pour les traductions et la liturgie (Paris : Desclé/Mame, 1997), 15. 267 Idem, 23.

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RICA n’invite pas seulement le catéchumène à se convertir, mais aussi la communauté et

les gens qui l’accompagnent. Il souligne que la formation à la vie chrétienne n’est possible

que s’il existe un milieu de vie porteur268. Le RICA ne parle pas explicitement des

catéchistes, mais en relisant les notes pastorales du rituel, on peut conclure que le catéchiste

est celui qui accompagne le catéchumène, qu’il est un témoin et aussi un passeur.

Odette Sarda, religieuse dominicaine et théologienne, et Dominique Lebrun, théologien et

archevêque du diocèse de Rouen, mentionnent que le catéchiste est un témoin : il

accompagne le catéchumène dans sa croissance humaine et spirituelle, il présente la foi

chrétienne, la Parole de Dieu et la Tradition et insère dans la communauté chrétienne le

catéchumène269.

Le RICA vient transformer la pratique baptismale et catéchétique. C’est le retour à

l’expérience du catéchuménat vécu dans les premiers siècles de l’Église. On passe de la

réception des sacrements au concept de l’initiation chrétienne. Le but de la démarche est

l’insertion du baptisé dans la communauté chrétienne. C’est l’Église qui est responsable de

la démarche où finalement chacun joue son rôle.

3.2.1.3 Exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi

Paul VI définit l’évangélisation dans le document Evangelii Nuntiandi comme ceci :

« Évangéliser est, en effet, la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus

profonde »270. Il mentionne que l’Église est à la fois évangélisée et évangélisatrice.

L’évangélisation est décrite comme une activité complexe : « L’évangélisation, avons-nous

dit, est une démarche complexe, aux témoignages variés : renouveau de l’humanité,

témoignage, annonce explicite, adhésion du cœur, entrée dans la communauté, accueil des

signes, initiative d’apostolat »271. La catéchèse est une étape de l’évangélisation. Les lieux

268 Roger Béraudy p.s.s., « Le nouveau rituel du baptême des adultes, » dans La Maison Dieu 121 (1975) :

139. 269 Odette Sarda et Dominique Lebrun, « L'édition définitive du Rituel de l'initiation chrétienne des adultes »

dans La notion d'Initiation chrétienne, dir. Paul De clerck (Paris : Cerf, 2007). 270 EN, 14. 271 EN, 24.

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de la catéchèse peuvent être variés : églises, écoles, foyers chrétiens et tous les autres lieux.

Il insiste sur la formation des catéchistes, surtout des catéchistes paroissiaux : « Il faut

surtout préparer de bons catéchètes – catéchistes paroissiaux, instituteurs, parents –

soucieux de se perfectionner dans cet art supérieur, indispensable et exigeant de

l’enseignement religieux »272. Paul VI confirme l’utilisation des diverses méthodes

pédagogiques, il insiste sur le dialogue avec la culture. Il parle de la nécessité que tous les

membres de la famille participent aux mouvements de l’évangélisation, on voit une

dynamique de réciprocité entre les membres d’une même famille273.

La catéchèse est une étape de l’évangélisation et demande à être organisée, structurée et

animée par le témoignage des différents acteurs. Les mots utilisés pour la catéchèse sont

encore très proches du modèle de l’enseignement, mais on voit, par l’insistance de

l’importance du témoignage, un déplacement vers une vision plus systémique de ce qu’est

la catéchèse. Il ne s’agit plus d’apprendre seulement un contenu, mais de participer et vivre

comme un disciple de Jésus Christ et de s’insérer dans la communauté chrétienne.

3.2.1.4 L’Exhortation apostolique Catechesi Tradendae

L’exhortation apostolique Catachesi Tradendae (CT) est le fruit du Synode de 1977 sur la

catéchèse. Jean-Paul II parle de l’importance du témoignage et le modèle du catéchiste est

le Christ enseignant. Toute la théologie de la Révélation est basée sur le document

conciliaire Dei Verbum. L’objectif de ce document est de renouveler la confiance dans

l’action catéchétique. La catéchèse est décrite comme un des moments de l’évangélisation

qu’il faut distinguer de la première annonce : « La spécificité de la catéchèse, distinguée de

la première annonce de l’Évangile qui a suscité la conversion, poursuit le double objectif de

faire mûrir la foi initiale et d’éduquer le vrai disciple du Christ274. Il propose que la

catéchèse soit une responsabilité commune avec des ministères différenciés. Pour lui, la

communauté chrétienne a une double responsabilité : celle de pourvoir à la formation

272 EN, 44. 273 Église catholique. Pape Paul VI (1963-1978), L'évangélisation dans le monde moderne : exhortation

apostolique « Evangelii nuntiandi » à l'épiscopat, au clergé et aux fidèles de toute l'Église, 8 décembre 1975

(Montréal : Fides, 1976), 77. 274 CT, 19.

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chrétienne des catéchumènes et des baptisés et d’insérer les catéchisés dans la communauté

chrétienne275. La catéchèse n’est pas qu’une préparation immédiate des sacrements ou

l’acquisition de connaissances. La catéchèse est une formation organique et systématique

des catéchisés. Oublier ou omettre les autres dimensions de la catéchèse peuvent conduire à

un appauvrissement et à la transmission d’une image tronquée de la foi276.

L’exhortation reprend l’idée que la catéchèse est pour tous les âges et que la catéchèse pour

adulte est le modèle : « Celle-ci est la principale forme de la catéchèse, parce qu’elle

s’adresse à des personnes qui ont les plus grandes responsabilités et la capacité de vivre le

message chrétien sous sa forme pleinement développée »277. Jean-Paul II décrit le rôle de

chacun dans le document : des évêques, prêtres, religieux et religieuses, catéchistes laïcs,

paroisses, mouvements et familles. Le pape indique que la paroisse demeure un lieu

privilégié pour la catéchèse : « En somme, sans monopoliser et sans uniformiser, la paroisse

demeure, comme je l’ai dit, le lieu privilégié de la catéchèse »278. La paroisse ou un groupe

de paroisses a aussi la responsabilité de former les responsables et de se donner les moyens

adéquats pour réaliser la formation catéchétique279.

Le pape encourage les parents à appuyer leurs enfants dans la démarche catéchétique. Il

suggère même de proposer des rencontres ou des réunions qui pourraient aider les parents

dans leurs tâches propres280. Il encourage l’utilisation des différentes méthodes en catéchèse

tout en s’assurant du respect de l’intégralité du contenu de la foi. Pour la formation des

catéchistes, il se réfère au Directoire général de catéchèse de 1971.

Que penser de ce document qui, en grande partie, est une suite au Directoire de 1971 avec

quelques modifications? Selon André Fossion, ce document s’inscrit dans la perspective du

Directoire de 1971. Un des points positifs, c’est l’intégration avec précautions et

275 CT, 24. 276 Idem, 33. 277 CT, 43. 278 CT, 67. 279 Église catholique. Pape (1978-2005 : Jean-Paul II) et Église catholique. Conférence des évêques

catholiques du Canada., Exhortation apostolique « Catechesi tradendae » de Sa Sainteté le pape Jean-Paul II

à l'épiscopat, au clergé, et aux fidèles de toute l'Église, sur la catéchèse en notre temps (Ottawa : Conférence

des évêques catholiques du Canada, 1979), 91-92. 280 Idem, 94.

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discernement de diverses pratiques de piété populaire. Il y a le danger, selon lui, de modeler

la catéchèse des adultes sur celle des enfants si on y porte toutes nos énergies.

Un autre théologien, Gilbert Adler, va dans une interprétation semblable à celle d’André

Fossion. Il décrit Catechesi Tradendae comme un document qui poursuit l’orientation du

Directoire de 1971 tout en étant un peu plus rigide que les propositions du synode sur la

catéchèse281.

Un des déplacements majeurs dans ce document est le suivant : la catéchèse est une

responsabilité partagée avec des tâches différenciées. Jean-Paul II insiste sur le rôle des

parents comme premiers éducateurs de la foi de leur enfant. La catéchèse a pour but de

former des disciples du Christ à partir d’une première adhésion au Christ afin de les insérer

dans la communauté chrétienne. Il y a cette tension entre le fait de laisser des initiatives aux

Églises locales et le droit de regard des différentes instances qui supervisent la catéchèse à

Rome.

3.2.1.5 La catéchèse des adultes dans la communauté chrétienne du

Conseil International pour la catéchèse

Ce document illustre, dans l’Église, l’approfondissement et l’appropriation de la primauté

de la catéchèse des adultes sur toutes formes de catéchèse en lien avec les communautés

chrétiennes et particulièrement les paroisses. Il a été conçu par le Conseil International pour

la catéchèse qui a été rattaché par Paul VI à la Congrégation du clergé le 7 juin 1973282.

Son but est : « éclairer les aspects les plus significatifs de la catéchèse des adultes »283. On

souligne l’écart grandissant entre les baptisés et la vie ecclésiale, la nécessité de développer

un nouveau langage accessible aux baptisés, de stimuler l’accueil des catéchisés dans les

281 Anne-Marie Aitken et al., Thabor : l'encyclopédie des catéchistes, 66-67. 282 Congrégation pour le clergé Saint-Siège, Profil de la Congrégation pour le clergé (Le Saint-Siège, 2009

[visité le 18 juin 2009]); accessible

http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cclergy/documents/rc_con_cclergy_pro_31051999_fr.html

. 283 Conseil international pour la catéchèse. Session plénière, La Catéchèse des adultes dans la communauté

chrétienne : quelques lignes et orientations (Cité du Vatican : Libreria editrice vaticana, Ottawa : Conférence

des évêques catholiques du Canada, 1991), 7.

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communautés, de proposer une diversité d’approches catéchétiques, de considérer

sérieusement la piété populaire, de rejoindre les gens qui sont loin de l’Église, et pour ceux

qui travaillent ou œuvrent dans les structures internes de l’Église et le clergé, d’adopter un

changement d’attitudes pour accompagner davantage les adultes dans leur cheminement de

foi284.

Le document propose pour le parcours de la catéchèse des adultes une formation holistique

autant pour les catéchumènes que pour les catéchistes qui les accompagnent. Voici la liste

de l’ensemble des éléments nommés : Bible, histoire du Peuple de Dieu, dignité humaine,

fondements de la foi catholique, formation spirituelle, prière, liturgie, dialogue

interreligieux, sens de la mission et participation à la vie de la communauté. Le modèle de

la formation s’inspire de la démarche catéchuménale. La formation des catéchistes a pour

objectif que ceux-ci soient des formateurs de formateurs. Le catéchiste est une personne à

l’écoute, capable d’entrer en dialogue avec l’autre, une personne qui travaille en équipe, a

le sens de la vie ecclésiale et possède des facilités d’adaptation face aux défis de la vie

contemporaine. Le catéchiste sera invité à recevoir une formation initiale et à poursuivre

avec une formation continue tout au long de son ministère.

Le Conseil International pour la catéchèse rappelle le rôle essentiel de la paroisse dans la

formation des laïcs et la catéchèse des adultes : « C’est pourquoi dans la paroisse, la

catéchèse des adultes est projetée, annoncée publiquement dans sa fondation, suivie dans

ses diverses phases, devenant elle-même objet de prière, de joyeuse attention et de

partage »285. On souligne aussi que les prêtres doivent être formés en conséquence pour

assumer cette charge dans les communautés locales :

Comme le rôle du prêtre dans la communauté est irremplaçable, la nécessité

d’une solide formation catéchétique des candidats au sacerdoce doit être

fortement soulignée, et, spécialement en ce qui concerne la catéchèse des

adultes, ils doivent se préparer à animer les catéchistes et à collaborer avec

eux286.

284 Idem, 11. 285 Idem, 32. 286 Idem, 33.

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Ce document approfondit et pousse plus loin la réflexion sur le rôle des catéchistes dans la

paroisse. La catéchèse pour les adultes est le modèle de toute catéchèse et elle a à

s’implanter dans les différentes structures de l’Église particulière, dans les paroisses,

mouvements et autres institutions. Le document insiste en terminant sur la formation

nécessaire du clergé pour vivre le passage afin de prioriser la catéchèse des adultes. La

formation des catéchistes n’est pas un luxe, mais une nécessité pour la vitalité des

communautés chrétiennes. La formation initiale des catéchistes peut se donner autant dans

une paroisse, un groupe de paroisses ou au niveau du diocèse.

3.2.1.6 Guide pour les catéchistes de (1993)

Le Guide pour les catéchistes a été écrit par la Congrégation pour l’évangélisation des

peuples en 1993287. Le document définit le rôle du catéchiste :

Ce service est à la fois ample et diversifié : c’est tout ensemble la proclamation

explicite du message chrétien, avec l’accompagnement des catéchumènes, des

frères et sœurs, aux sacrements jusqu’à la maturité de la foi dans le Christ, mais

aussi la présence et le témoignage; ce service inclut la promotion de l’homme,

se réalise dans l’inculturation, devient dialogue288.

Le Guide pour les catéchistes propose plusieurs types de catéchistes : « des catéchistes avec

la tâche spécifique de la catéchèse […] ou des catéchistes qui collaborent sous diverses

formes d’apostolat »289. Je résume en huit critères les éléments pour discerner le choix d’un

catéchiste : foi personnelle, témoignage au sein de la communauté, amour de l’Église,

communion avec le pasteur local, esprit apostolique, amour des autres, discernement et

bonne communication. Pour la formation des catéchistes, on souligne cinq éléments :

formation humaine, formation spirituelle, formation doctrinale, formation pastorale et

capacité d’inculturer la foi.

287 Jozeph cardinal. Tomko et Giuseppe Uhac, Guide pour les catéchistes : Document d'orientation en vue de

la vocation, de la formation et de la promotion des catéchistes dans les territoires de mission qui dépendent

de la Congrégation pour l'Évangélisation des Peuples (Vatican : Congrégation pour l'évangélisation des

peuples, 1993). 288 Idem, no 3. 289 Idem, no 4.

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139

Le catéchiste joue un rôle d’intermédiaire pour insérer les gens dans la communauté

chrétienne et les inviter à prendre une part active afin d’être des agents de transformation

dans leur milieu. La formation à développer les habiletés pour l’inculturation a pour but de

répondre aux différents défis de la vie contemporaine : urbanisation, sécularisation,

industrialisation, migrations, changements sociopolitiques et évolution du monde de la

jeunesse. Le Guide traite à la fois d’une formation initiale et d’une formation permanente

qui sont nécessaires afin de soutenir les catéchistes dans leur mission. Tout ne repose pas

sur les épaules des catéchistes. Le document insiste pour qu’il y ait une réciprocité entre les

catéchistes, les pasteurs et la communauté chrétienne290. Le formateur des catéchistes est

d’abord un témoin et possède plusieurs qualités professionnelles :

Il importe que le formateur de catéchistes soit doué de qualités spirituelles,

morales et pédagogiques; en particulier, qu’il ait une vie chrétienne intense, de

façon qu’il puisse enseigner surtout par son témoignage; qu’il se tienne proche

des catéchistes pour leur communiquer ferveur et enthousiasme291.

Quels sont les apports et aussi les constantes que ce document apporte? Il décrit les traits

essentiels du catéchiste : « un appel de l’Esprit-Saint; une mission ecclésiale; une

collaboration à la charge apostolique de l’évêque; un lien spécial avec l’activité

missionnaire de l’Église »292. Le modèle catéchuménal est la source d’inspiration de toute

la catéchèse et de la formation. Le catéchiste est celui qui, avec les autres agents de

pastorale et le pasteur, aide à édifier l’Église. Il forme aussi des disciples qui sont appelés

non pas à être des consommateurs, mais des sujets actifs dans l’Église et dans le monde. La

dynamique du témoignage est devenue l’élément moteur de la vie humaine et spirituelle des

catéchistes. Ce document est proche de l’hypothèse de départ. Il insiste sur le rôle du

catéchiste et le lien essentiel et organique avec la communauté chrétienne. Il insiste pour

qu’il y ait une équipe qui s’occupe de la formation des catéchistes qui peut être autant au

niveau paroissial, inter-paroissial ou diocésain, selon les besoins du milieu et la capacité de

formation des diverses organisations. Le catéchiste est un formateur de formateurs.

290 Idem, no 33. 291 Idem, no 36. 292 Idem, no 2.

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140

3.2.1.7 Directoire général pour la catéchèse 1997 (DGC)

Le Directoire général pour la catéchèse est une actualisation de la politique catéchétique

de l’Église293. Le nouveau DGC reprend la réflexion sur la situation de l’Église aujourd’hui

dans le monde contemporain et rappelle les grandes lignes de la typologie faite dans les

documents : Christi Fideles laici et Redemptoris Missio294. Les numéros 24 à 26 du DGC

décrivent les traits de la situation de la société contemporaine actuelle en spécifiant les défis

à relever pour la catéchèse aujourd’hui.

Ce document reprend l’idée du Directoire général de catéchèse de 1971, sur l’importance

d’une formation pour les baptisés. Il s’aligne sur le modèle catéchétique du catéchuménat

en prenant ses balises à partir du RICA295. La théologie de la Révélation utilisée s’inspire

de Dei Verbum : la Parole de Dieu prend une place centrale dans toute démarche

catéchétique. La catéchèse est identifiée à une étape du processus de l’évangélisation qui

permet aux baptisés de mûrir le don de la foi qu’ils ont reçu dans le but d’arriver à

confesser eux-mêmes cette foi reçue. C’est un temps d’approfondissement de la rencontre

de Jésus Christ qui révèle Dieu Père, Fils et Esprit-Saint et conduit à terme à témoigner aux

autres de ce don reçu296. La catéchèse a aussi comme mission d’insérer les baptisés dans la

communauté chrétienne. Le DGC insiste sur deux éléments qui étaient moins présents dans

le directoire de 1971. Le premier élément reconnaît l’importance de l’expérience humaine

comme un élément constituant de la dynamique catéchétique. Le deuxième élément utilise

des sciences humaines comme moyen de soutenir l’approfondissement de la vie humaine et

chrétienne afin de favoriser une plus grande maturité dans la foi. Toute la catéchèse auprès

des jeunes et des adolescents a pour but de les amener à une foi adulte. Les parents sont les

premiers éducateurs de la foi et on rappelle que la famille est « l’Église domestique ». Les

parents sont aussi à être encouragés et supportés dans leur rôle d’éducateurs de la foi par la

communauté chrétienne297. C’est ainsi que le DGC va proposer l’établissement d’une

293 DGC, 7. 294 CHL, 34 et RM 33 295 DGC, 90. 296 DGC, 82. 297 DGC, 227.

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141

catéchèse intergénérationnelle non seulement entre enfants, jeunes et parents, mais qui

inclut aussi les personnes âgées298.

Le catéchiste est un accompagnateur, un guide, un témoin de la foi pour le catéchisé. Son

témoignage est important car il devient le signe de la présence de Dieu dans le monde. Il

permet la communication entre les catéchisés, le groupe de catéchèse et la communauté

chrétienne. Il facilite la création d’un climat et d’un lieu propices à la communication entre

le catéchisé et Dieu299. Être catéchiste, c’est une vocation, un appel de l’Esprit reconnu par

l’Église :« En plus de la vocation commune à l’apostolat, certains laïcs se sentent appelés

intérieurement par Dieu à assumer la charge de catéchistes. L’Église suscite et discerne

cette vocation divine et confère la mission de catéchiser »300. Le catéchiste est un témoin

plus qu’un maître. En plus, il a une mission particulière, spécifique qui est différente des

autres agents pastoraux : « Le rôle du catéchiste, en tant qu’éducateur de la foi, diffère de

celui des autres agents de la pastorale (liturgique, caritative, sociale…), même s’il devra

évidemment agir en lien avec eux »301. La formation touche plusieurs aspects : formation

spirituelle, humaine, théologique, pédagogique, sociale, culturelle. La formation spirituelle

est à la fois individuelle et communautaire. Le catéchiste tient en tension la nécessité d’être

fidèle au contenu de la foi tout en s’inscrivant dans la culture de ses contemporains : « Le

principe de « fidélité à Dieu et fidélité à l’homme » conduit à éviter toute opposition,

séparation artificielle ou soi-disant neutralité entre la méthode et le contenu, affirmant

plutôt leur corrélation et leur interaction »302.

Le rôle des prêtres et des curés est important. Ce rôle prend origine, pour le DGC, dans la

réflexion conciliaire qui s’est faite par le document Presbytérum Ordinis :

Comme éducateurs de la foi, les prêtres ont à veiller, par eux-mêmes ou par

d’autres, à ce que chaque chrétien parvienne, dans le Saint-Esprit, à

298 DGC, 157. 299 DGC, 156. 300 DGC, 231. 301 DGC, 219. 302 DGC, 149.

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142

l’épanouissement de sa vocation personnelle selon l’Évangile, à une charité

sincère et active et à la liberté par laquelle le Christ nous a libérés.303

Le DGC reprend aussi, mais d’une manière pastorale, le rôle du curé en catéchèse qui est

décrit dans le code de droit canonique aux canons 773-777304. On présente le travail propre

du pasteur en cinq tâches distinctes :

– susciter dans la communauté chrétienne le sens de la responsabilité

commune à l'égard de la catéchèse — une tâche qui engage tous les fidèles —

ainsi que reconnaître et apprécier les catéchistes et leur mission;

– soigner l'organisation fondamentale de la catéchèse et sa programmation

adéquate en y faisant participer activement les catéchistes eux-mêmes et en

veillant à ce que la catéchèse soit « bien structurée et bien orientée »; (165)

– susciter et discerner des vocations au service de la catéchèse et, en tant que

catéchiste des catéchistes, veiller à leur formation en consacrant à cette tâche le

plus grand soin;

– intégrer l'activité catéchétique dans le projet d'évangélisation de la

communauté et soigner en particulier le lien entre catéchèse, sacrements et

liturgie;

– assurer que la catéchèse de sa communauté soit liée aux plans pastoraux

diocésains, en aidant les catéchistes à collaborer activement à un projet

diocésain commun305.

L’évêque est décrit comme le grand catéchiste. C’est lui qui est le premier responsable de la

catéchèse. Il propose la vision globale de la catéchèse et sa réalisation dans son Église

locale avec ses principaux collaborateurs, c’est-à-dire les prêtres. Il appuie la formation des

catéchistes et des services de soutien pour les diverses communautés.

La communauté chrétienne a une place de choix dans le DGC et elle ne se limite pas à un

modèle. Elle peut être une paroisse, un mouvement, une association, etc.306. Cette diversité

de vision ne vient pas diminuer le rôle de la paroisse. Au contraire, le DGC vient indiquer

qu’il y a une complémentarité dans les divers types de communautés chrétiennes. Le DGC

décrit la spécificité de la paroisse avec quelques expressions précises : famille accueillante,

303 PO 6 304 Église Catholique, Code de droit canonique : Édition bilingue et annotée 457-458. 305 DGC 225. 306 DGC 253.

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lieu d’unité, lieu d’accueil de tout-venant. Il identifie trois conditions pour assurer son

développement catéchétique307. Elle doit développer une catéchèse qui prend modèle sur la

catéchèse des adultes selon le RICA et faire face à l’indifférence religieuse avec une audace

renouvelée pour accueillir les gens qui vivent des situations d’indifférence religieuse. Le

DGC souligne que la paroisse a besoin d’un noyau communautaire solide afin de pouvoir

assurer l’initiation chrétienne auprès de ses paroissiens.

Cette mission catéchétique se réalise par six tâches précises. Ces tâches de la catéchèse ont

pour but de réaliser l’annonce du Royaume de Dieu aujourd’hui. Cet acte de

communication complexe est christocentrique et trinitaire. La formation invite les

catéchistes à croître dans une maturité humaine, chrétienne et apostolique par une

connaissance plus grande de la Bible et de la théologie. Il invite les catéchistes à adapter cet

acte de communication selon les besoins des catéchisés. Le catéchiste sera initié à des

tâches d’initiation, d’éducation et d’enseignement. Il est à la fois un maître, un éducateur et

un témoin. Il est invité à intégrer dans sa vie le contenu qu’il transmet. Le catéchiste sera

aussi initié à utiliser plusieurs éléments des sciences humaines tels que : la psychologie, la

sociologie, la pédagogie et l’andragogie308.

Mais qu’en pensent les théologiens? J’ai choisi trois théologiens qui présentent leur

évaluation de ce document : André Fossion, Henri Derroitte et Gilbert Adler. André

Fossion décrit ce document comme un aggiornamento depuis la publication du Directoire

de 1971. La structure du DGC est semblable à l’ancien directoire de 1971. Le DGC prend

plus en compte l’expérience humaine : « Le document insiste notamment sur l’importance

de la prise en compte de l’expérience humaine ainsi que sur l’opportunité des méthodes

favorisant la créativité des catéchisés et leur participation à la vie communautaire »309. Dans

son appréciation du DGC, il souligne la vision négative que l’Église entrevoit de la société

actuelle et plus particulièrement de la sécularité. Il indique le danger d’occulter la Parole de

307 DGC 257-258. 308 DGC 242. 309 André Fossion, « Un nouveau Directoire Général pour la Catéchèse, » dans Lumen Vitae LIII, no 1 (1998):

93.

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144

Dieu. Le DGC ne précise pas l’utilisation du Catéchisme de l’Église Catholique (CEC)

pour la catéchèse.

Pour sa part, Henri Derroitte, docteur en sciences religieuses et professeur à l’Université

Catholique de Louvain, exprime des points de vue convergents avec ceux d’André Fossion.

Il décrit l’ensemble du document : « Un des axes dominant (ou sic) de ce texte référentiel

est de situer dans la catéchèse, au cœur de la mission de l’Église, dans une perspective

structurée, cohérente et globale »310. Il nomme aussi les caractéristiques que propose le

Directoire afin de réaliser un projet catéchétique paroissial.

Gilbert Adler commence son article en soulignant que le DGC s’inscrit dans la continuité

de celui de 1971 avec plusieurs ajouts. Il a comme ligne de force la réception des travaux

du renouveau catéchétique. Il donne priorité à la catéchèse pour adultes et décrit les besoins

de formation des différents agents de la catéchèse et des catéchistes. Il souligne la

nécessaire cohérence entre la formation des catéchistes et les autres acteurs.

Que penser de ce document? Le DGC prend le catéchuménat comme modèle inspirateur de

la catéchèse. La catéchèse est au centre de l’évangélisation et a pour mission d’inculturer la

foi dans la paroisse. Les catéchisés sont invités à être des sujets, membres actifs de la

paroisse dans leur cheminement d’initiation. Le DGC interpelle les diocèses et les paroisses

à développer un plan de formation qui donne aux catéchistes à la fois le contenu doctrinal,

la pédagogie et le soutien spirituel et ecclésial afin de réaliser leur mission. Le DGC intègre

à la catéchèse deux aspects sociaux importants : le premier, une attention aux plus petits,

aux plus pauvres avec une invitation au partage et le second, la promotion des droits de

l’homme.

Le DGC compte quelques limites. Il parle peu de la mondialisation. Son regard sur la

sécularisation est à sens unique et n’arrive pas à questionner l’Église sur l’écart qu’elle vit

avec la société civile. Son désir de pratiquer l’inculturation est centré sur les nouvelles

310 Henri Derroitte, « Les tâches de la catéchèse : Regards sur le Directoire général pour la catéchèse, » Idem,

103.

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Églises. Selon moi, il serait important d’affirmer que le défi de l’inculturation est aussi,

sinon plus grand dans les Églises qui sont ensouchées depuis plusieurs générations et

confrontées à la sécularisation, au pluralisme et aux déplacements des populations.

Le DGC insiste sur la formation en proposant plusieurs moyens précis et en distinguant les

tâches de chacun. Il situe la catéchèse au centre de la vie paroissiale et non pas à sa marge.

Il propose que tous soient responsables de la catéchèse incluant les paroissiens qui

célèbrent l’Eucharistie le dimanche. Il propose une formation holistique des catéchistes.

Cette formation des catéchistes est un élément structurant de la vie des communautés

chrétiennes. La formation peut se faire dans les paroisses ou un groupe de paroisses pour

les catéchistes bénévoles. Le DGC indique qu’il est essentiel de former des catéchistes qui

sont spécialistes. Les prêtres et plus spécialement le curé sont invités à former les

catéchistes locaux. Le diocèse a un rôle de coordination et doit voir à la qualité de la

formation des catéchistes locaux et des catéchistes spécialisés.

Par rapport à la pratique catéchétique paroissiale, plusieurs éléments du document

m’interpellent. Le premier élément, c’est que la catéchèse dans la paroisse n’est pas centrée

sur le modèle catéchuménal. Elle n’est pas au cœur de l’activité de la communauté. Les

catéchistes n’ont pas la reconnaissance d’être des ministres envoyés par l’Église participant

avec le curé et les permanents à l’organisation paroissiale de la catéchèse. Il n’y a pas

l’appui solidaire du curé et de l’équipe pastorale envers les catéchistes et les bénévoles. La

catéchèse dans la paroisse est plus centrée sur la préparation aux sacrements que sur la

formation de disciples même si elle désire s’en approcher.

3.3 Catéchèse dans différentes régions du monde :

caractéristiques, rôle des catéchistes, des paroisses et

acteurs de la catéchèse

Dans la section précédente, j’ai présenté la lecture diachronique et ses enjeux, je poursuis

en réalisant une lecture diachronique. Je présente dans les pages suivantes des analyses et

des réflexions effectuées en France, en Belgique, en Italie, aux États-Unis et en Corée du

Sud. Suite à cette présentation générale, je décris le développement de la catéchèse au

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Québec à des documents de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec et des textes

du diocèse de Saint-Jérôme et de quelques théologiens du Québec.

3.3.1 La France

La France est un des lieux de réflexion catéchétique par son réseau des instituts

catholiques et les universités publiques en Alsace et Lorraine.

3.3.1.1 Pierre Raysac et la formation des catéchistes

Pierre Raysac a écrit un article sur l’évolution de la formation des catéchistes entre 1950-

1975311. Il y présente trois périodes distinctes de la formation des catéchistes en France. Au

cours de la première période, dans les années cinquante, les catéchistes formés sont presque

exclusivement des prêtres, des religieux et des religieuses. On y aborde les dimensions

doctrinales et psychopédagogiques, et une réflexion sur les pratiques catéchétiques. Ces

sessions ont du succès mais se heurtent à plusieurs résistances à l’intérieur des structures de

l’Église312. Au cours de la deuxième période, dans les années soixante, il y a une

démocratisation des sessions avec une augmentation de la participation des laïcs qui veulent

se former; on fera plus de place pour présenter la démarche catéchuménale et les avancées

dans le domaine de la pédagogie313. La troisième période, vers le début des années

soixante-dix, voit le nombre de personnes participantes diminuer surtout pour ce qui est des

prêtres et des religieux314. Cette désaffection provoque la fermeture de plusieurs écoles de

catéchistes en France. Dès 1975, on cherche des moyens pour susciter du personnel capable

de prendre la relève en renouvelant l’approche. Les horaires sont plus flexibles.

L’orientation choisie et suggérée est que la catéchèse est l’œuvre d’une communauté et de

tous ses membres.

311 Pierre Rayssac, « Évolution de la formation des catéchistes, » dans Catéchèse, no 59, (1975). 312 Idem, 145. 313 Ibid. 314 Ibid.

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3.3.1.2 Jean-Pierre Leconte

Jean-Pierre Leconte, théologien, sociologue et professeur retraité de l’Institut Supérieur de

Pastorale Catéchétique de Paris, indique que les besoins des catéchisés sont variés et qu’ils

peuvent même être contradictoires. La famille n’est plus un lieu de transmission d’une

tradition religieuse. Elle a besoin d’aide afin de nommer et d’identifier ses propres valeurs.

La catéchèse est devenue pour des familles un lieu d’insertion sociale et de recherche

d’identité315. Jean-Pierre Leconte, suite à deux enquêtes réalisées dans les années 1980,

affirme que pour la formation des catéchistes, on doit tenir compte de la variété des

demandes des catéchisés.

Dans un autre article, il montre la nécessité de développer la formation des formateurs316.

La formation doit tenir compte des usagers et de leur expérience et être animée par une

équipe. Le formateur se retrouve souvent en tension et doit négocier entre les demandes des

catéchisés, des catéchistes et celles des autorités ecclésiales317. L’apport de Jean-Pierre

Leconte est important pour la formation des catéchistes. Dès les années 1980, il indique la

nécessité de revoir la formation des gens face à un monde en changement. Il affirme que

l’on ne peut pas tenir pour acquis que les familles ont ce qui est nécessaire pour

accompagner les jeunes, les adolescents et même les adultes dans la foi.

3.3.1.3 Les entretiens de Vavin

Les entretiens de Vavin consistent en des rencontres de spécialistes en catéchèse qui

réalisent une synthèse de l’expérience de la France318. Dans les Actes du Colloque

Européen de mai 1985, on insiste sur la formation des personnes qui accompagnent les

catéchistes que l’on nomme « formateurs de formateurs » pour les qualifier319. Le défi

des formateurs de formateurs, c’est d’articuler les différentes sciences humaines, la

315 Jean-Pierre Leconte, « Profils de catéchistes image de marque de la catéchèse : Enquêtes en seconde

lecture, » Idem100/101 (1985) : 126. 316 Jean-Pierre Leconte, « Formation de formateurs, » dans La Compétence catéchétique : suite aux travaux

du congrès de l'Équipe européenne de catéchèse à Gazzada (Italie) en mai 1988, dir. Gilbert Adler et Équipe

européenne de catéchèse (Paris : Desclée, 1989), 123-136. 317 Ibid. 318 Collectif, « Les Entretiens Vavin sur la formation, » dans Catéchèse 74 (1979). 319 Robert Moldo, « Essai de Synthèse, » dans Formation et Église : pratiques et réflexion : Actes du colloque

européen, mai 1985 - Strasbourg, dir. Gilbert Adler et Robert Moldo (Paris : Beauchesne, 1987).

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théologie, l’appartenance affective à l’Église et la spiritualité. Le formateur de formateurs

doit être animé intérieurement par le sens de la mission comme les premiers disciples

dans les Actes des Apôtres. Le formateur de formateurs est aussi celui qui est envoyé non

pas en son propre nom, mais au nom de l’Église320.

3.3.1.4 Jean Joncheray

Jean Joncheray a écrit plusieurs articles sur la formation des catéchistes et des laïcs qui

vivent une responsabilité en Église. Il indique que la formation qui se réalise dans des

centres ou des instituts spécialisés de catéchèse dans les grands centres urbains. La

formation s’est sécularisée en faisant une place de plus en plus petite sinon inexistante à la

spiritualité321. En faisant le bilan de la catéchèse lors de la Rencontre européenne de

catéchèse en mai 1988, Jean Joncheray note comme trait commun dans plusieurs pays le

peu de formation des prêtres pour la catéchèse : « Mais, s’agissant des prêtres, le

dépouillement du questionnaire fait apparaître une quasi-unanimité pour dire que la

formation catéchétique des prêtres est peu développée et insuffisante »322. Dans le cursus de

la formation des futurs prêtres, la catéchèse n’est-elle pas vue comme une matière ou

discipline inférieure dans l’Église?

Jean Joncheray poursuit en indiquant que la catéchèse ne peut être détachée de son milieu

ou du lieu où s’enracine sa pratique et que les relations sont essentielles entre les divers

partenaires323. La société et la famille n’arrivent plus à former des citoyens et des chrétiens.

Il est essentiel de penser à une formation holistique du catéchisé. Il souligne le bienfait

d’orienter la formation des différents intervenants en catéchèse vers une pratique plus

générale et intergénérationnelle. Jean Joncheray se pose cette question : « Dans ce cadre,

n’y a-t-il pas un appauvrissement de la formation catéchétique? »

320 André Minet, « La formation diocésaine des animateurs pastoraux, quelques points de repère, » dans Des

laïcs en responsabilité pastorale? Accueillir de nouveaux ministères, dir. Alphonse Borras (Paris : Les

Éditions du Cerf, 1998). 321 Georges Duperray, « Images de la formation en Église, » dans Catéchèse, no 107 (1987): 13. 322 Jean Joncheray, « La production des instruments catéchétiques et la formation des catéchistes en Europe, »

dans La compétence catéchétique dir. ISPC (Paris : Desclée, 1989), 26. 323 Idem, 33.

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3.3.1.5 Jean-Marie Labelle

Jean-Marie Labelle est docteur et professeur : « Docteur en psychologie de l’Éducation,

docteur d’État ès lettres et Sciences humaines, il est professeur de Sciences de l’Éducation

à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg et professeur associé au département de

Psychologie et d’Andragogie de l’Université de Montréal »324. Il est intervenu au colloque

qui s’est tenu à l’Institut de Pédagogie Religieuse de la Faculté de Théologie catholique de

l’Université des Sciences Humaines de Strasbourg les 19 et 20 mai 1988325. Gilbert Adler

lui avait donné ce mandat :

J.M. Labelle, Maître de Conférences à l’Institut des Sciences de l’Éducation de

Strasbourg, devait s’attacher à mettre en relief divers niveaux de

compréhension permettant de rendre compte de la relation de l’apprenant avec

son apprentissage, de la construction du sujet par rapport aux savoirs326.

Jean-Marie Labelle, s’inspirant d’une vision holistique de la personne et influencé par la

philosophie personnaliste, propose un déplacement dans le monde de la formation. Comme

il est spécialiste en andragogie, il présente un nouveau concept qu’il appelle : La

réciprocité éducative. Voici comment il le présente :

L’orientation décisive de la demande didactique consiste, en effet, à permettre

aux apprenants et à l’enseignant de se situer comme des partenaires de la

situation éducative, et pas seulement des « vis-à-vis » ou des « côte à côte »,

afin qu’ils se donnent d’emblée les moyens de fonctionner ensemble. Alors

dans le système éducatif on a l’habitude de parler du contenu, un peu de la

démarche, très peu, voire pas du tout, des acteurs, la réciprocité exige de se

centrer sur les acteurs. À partir desquels, les contenus seront ultérieurement

envisagés327.

324 Équipe de Recherche en Andragogie Développementale, Jean-Marie Labelle (Université Louis Pasteur

Strasbourg, 2011 [cité le 6 juin 2011]);

accessible http://ulpmultimédia.u-strasbg.fr/erad/htm/recherche/individuel/labelle.htm. 325 Gilbert Adler, Personne, société et formation (Paris : Desclée, 1990), 7. 326 Idem, 10. 327 Jean-Marie Labelle, « Des adultes en formation théorie et stratégie d'apprentissage, » dans Personne,

société et formation, dir. Gilbert Adler (Paris : Desclée, 1990), 111.

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150

Ce déplacement change l’ordre des priorités dans l’acte de formation : ce n’est pas le

contenu ou l’apprentissage qui est premier, mais la relation. C’est une reconnaissance que

l’acte de formation ne peut se développer que s’il y a une relation de réciprocité entre les

acteurs. Jean-Marie Labelle décrit ainsi les conséquences pour le formateur : « J’ai créé ce

concept pour signifier que l’enseignant apprend de l’apprenant dans l’acte même

d’enseigner : apprendre à quelqu’un, c’est, dans le même mouvement, apprendre de lui »328.

Le formateur devient un tiers dans la relation, il permet de libérer la parole, il anime, il

informe comme un expert, il démontre un nouveau savoir et guide l’apprenant. Tandis que

l’apprenant dans un premier temps s’exprime, il se documente, il explique et invente un

nouveau savoir à partir de son expérience et de ce qu’il a intégré à nouveau : « La

réciprocité éducative n’est donc pas une relation d’égalité, mais le rapport asymétrique des

singularités qui jouent réciproquement le rôle de tiers dans leur développement

respectif »329. Ce concept n’est pas une formule magique. Il demande des conditions

favorables et une communication authentique entre les différents acteurs. Pour lui, le fait de

développer la réciprocité éducative permet aux gens de dépasser le titre d’acteur, ils

deviennent aussi auteurs. La formation devient un lieu d’intégration de contenu et de

savoir-faire et un lieu d’établissement de nouveau savoir. Cette démarche propose un cadre

théorique qui permet de réfléchir de manière nouvelle la pratique catéchétique.

3.3.1.6 Denis Villepelet

Denis Villepelet est docteur en théologie et en philosophie. Il est maître de conférences à

l’Institut Catholique de Paris. Il a été directeur de l’Institut Supérieur de Pastorale

Catéchétique à l’Institut Catholique de Paris de 1996 à 2005. Il est actuellement

responsable de l’Institut Supérieur de Théologie des arts. Pour Denis Villepelet, la

formation se vit d’abord par une expérience. C’est par des défis, des épreuves que

l’apprenant expérimente, part à l’aventure, vit des ruptures et réinterprète son vécu. Cette

expérience comporte un risque : « Dans tout apprentissage, il y a une part d’errance et de

risque, de solitude et de souffrance qui requiert de l’apprenant le courage de s’exposer à

328 Jean-Marie Labelle, « La réciprocité éducatrice des personnes, fondements de l'éducation des adultes, »

dans Former des adultes en Église : État des lieux aspects théoriques pratiques, dir. Ambroise Binz et collab.

(Saint-Maurice : Éditions Saint-Maurice, 2000), 94. 329 Idem, 95-96.

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l’altérité »330. La communication entre l’apprenant et le formateur est cruciale. Cette

relation est asymétrique. C’est le formateur qui invite l’apprenant à participer à la

traversée : « Le formateur invite et permet le passage à l’autre rive »331. Une déontologie,

une éthique est demandée au formateur. En s’inspirant de plusieurs philosophes dont

Habermas, Denis Villepelet s’oriente vers une éthique de la réciprocité communicationnelle

entre les divers partenaires. Il propose trois principes pour « conduire l’influence

normative ». Ces principes sont : partenariat, solidarité et justice. Pour lui, le premier

principe c’est que les différents acteurs sont des partenaires, chacun bien situé dans son

rôle :

Le partenaire s’expose comme sujet dans sa capacité à rendre raison de ce qu’il

propose : il est conduit à passer de l’attitude objectivante et souveraine à

l’attitude performative qui s’engage dans l’acte de parole pour s’entendre à

propos de quelque chose avec d’autres personnes332.

Le deuxième principe est celui de la solidarité. Le troisième principe est celui de la justice.

Pour Denis Villepelet, il est important que le formateur et l’apprenant puissent avoir des

droits et devoirs égaux en ce qui touche la formation et que les participants de la formation

puissent devenir responsables de leur propre action333. Denis Villepelet, en orientant

l’action de la formation selon ces principes, est conscient qu’elle peut interpeller

l’institution. Cette vision de la formation influence Denis Villepelet dans son analyse de la

situation de la catéchèse au début du troisième millénaire et aussi dans son modèle

d’interprétation. Il poursuit sa réflexion en proposant une typologie qui identifie trois

paradigmes. Ces paradigmes ne sont pas des concepts purement intellectuels. Ils sont des

schémas qui, à partir des diverses pratiques catéchétiques et des constances observées dans

les différents milieux, proposent un type de catéchèse. Chacun des paradigmes a sa logique

et est adapté à un type de terreau particulier. La pensée de Denis Villepelet est aussi

inspirée de sa recherche et de sa réflexion philosophique. Il présente comme clef de

330 Denis Villepelet, « L'influence formative et ses enjeux éthiques, » dans Former des adultes en Église : État

des lieux aspects théoriques et pratiques, dir. Ambroise Binz et collab. (Saint-Maurice : Éditions Saint-

Maurice, 2000), 131. 331 Ibid. 332 Idem, 146. 333 Ibid.

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152

compréhension de la société et de son évolution trois horizons de sens : tradition, modernité

et contemporanéité334.

Chacun des paradigmes correspond à un horizon de sens : le premier paradigme à l’horizon

de sens de la tradition; le deuxième paradigme à l’horizon de sens de la modernité et le

troisième paradigme à l’horizon de sens de la contemporanéité. Chaque des paradigmes

n’est pas meilleur qu’un autre : il correspond à une réponse d’une communauté face aux

besoins de la société et des catéchisés. Pour présenter ces divers paradigmes, Denis

Villepelet les caractérise selon cinq champs de signification. Afin de présenter les différents

paradigmes, j’utilise le tableau de Denis Villepelet335. J’ai ajouté la première colonne pour

une meilleure compréhension :

Tableau 16 : Les trois paradigmes catéchétiques

Le champ

de la

catéchétique

Le champ

ecclésio-

logique

Le champ

sociologique

Le champ

anthropo-

logique

Le champ

pédagogique

Premier

paradigme

Théocentrisme Corps du

Christ

Société

traditionnaire

Partenaire

institutionnel

Enseignement

Deuxième

paradigme

Christo-

centrisme

Peuple de

Dieu

Société

évolutionnaire

Acteur social Apprentissage

Troisième

paradigme

Pneumo-

centrisme

Temple de

l’Esprit

Société

complexe

Sujet Initiation

Dans le premier paradigme, ce qui est dominant, c’est la question de Dieu. La fides quae

est associée à la doctrine. Le catéchiste se trouve comme un enseignant qui doit s’assurer

que le contenu de la doctrine soit bien assimilé par la méthode mnémotechnique. Tout

part de la fides quae qui est annoncée et reçue par la personne qui découvre au plus

profond d’elle-même la fides qua336.

Dans le deuxième paradigme, la société et l’histoire sont considérées comme un projet

« d’émancipation et de libération ». Le statut de la fides quae n’est pas vu comme une

334 Denis Villepelet, Comprendre un monde multiréférentiel : des horizons de pensée différents et simultanés,

Notes de cours: Expression de la foi et diversité des structures de pensée (Paris : Institut Catholique de Paris,

1996-1997). 335Denis Villepelet, L'avenir de la catéchèse (Paris: Éditions de l'Atelier/Éditions Ouvrières, 2003), 96. 336 Idem, 101.

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153

doctrine, mais comme un message. Ce message, c’est le Verbe de Dieu qui vient révéler le

Père par l’action de l’Esprit-Saint. Le rôle du catéchiste, c’est de partir de l’expérience de

foi du catéchisé. Cet élément est central dans ce paradigme et par la présentation de la fides

quae, il approfondit sa foi. La catéchèse est davantage biblique et narrative. Pour la

catéchèse, on partira de la fides qua et par l’approfondissement de la fides quae on veut

conduire le catéchisé à une foi adulte. Le catéchisé en acquérant une foi adulte est invité à

être un acteur de la vie ecclésiale : « La catéchèse transmet moins un objet qu’elle ne

suscite l’acte de se décider pour Jésus et de s’engager à marcher à sa suite »337.

Le troisième paradigme est issu d’une société pluraliste qui a de multiples références. Une

société complexe qui est à la recherche de l’équilibre. Le statut de la fides quae sera celui

de la médiation. Le catéchisé part de la fides qua pour entrer en conversation avec le

catéchiste qui lui partage aussi son expérience et tous les deux cheminent ensemble et

approfondissent la foi en méditant la fides quae. La méthode catéchétique privilégiée est

celle de l’initiation. Le catéchiste devient l’initiateur, c’est lui qui crée un espace favorable,

un bain ecclésial afin d’expérimenter la foi et de partager la fides quae comme une tradition

dans laquelle le catéchisé s’inscrit. Le catéchisé est amené à faire un choix, à se positionner

vis-à-vis de la société et de sa foi. Il est appelé à entrer dans une démarche d’altérité par

rapport à la société. L’expérience initiatique l’invite à vivre une expérience spirituelle forte

qui est davantage mystique. La communauté chrétienne est appelée à être un lieu

d’expérimentation, de partage de la Parole et du témoignage de l’expérience de chacun avec

le Christ mort et ressuscité. Elle devient le lieu d’initiation à cette dynamique

d’émancipation et de libération que suscite la fides qua. Ces trois paramètres nous indiquent

trois façons de vivre la catéchèse et trois types de relation entre le catéchisé, le catéchiste et

la communauté chrétienne.

Dans les articles subséquents, Denis Villepelet approfondit le troisième paradigme en

développant certains aspects. Il intervient au congrès de l’ISPC, du 12 au 15 février 2003,

qui avait pour thème « La catéchèse dans un monde en pleine mutation ». Dans son

intervention de conclusion lors de ce congrès, il indique que vivre les attitudes

337 Idem, 105.

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correspondantes au troisième paradigme demande : d’accueillir le kérygme, de se laisser

initier, de développer une spiritualité forte et d’accepter de se laisser transformer par

l’Évangile. C’est un appel à revenir aux sources chrétiennes et plus particulièrement au

catéchuménat des premiers siècles. Ces indications demandent aux catéchistes d’être des

témoins qui ont intégré la fides quae et sont capables de la traduire en récit lié à leur propre

expérience. Denis Villepelet, par sa réflexion et ses écrits, apporte des questions pertinentes

pour la formation des catéchistes qui sont à vérifier dans l’étude et l’analyse de la

recherche-action. Quelle est la place de la fides qua, et de la fides quae dans la pratique?

Comment se situe cette pratique vis-à-vis des différents paradigmes? Quelles sont les

caractéristiques de la vie des catéchistes et quelle est la pédagogie suggérée?

3.3.1.7 Deux documents de l’épiscopat français

En 2006, les évêques français ont publié deux textes complémentaires issus de plusieurs

années de réflexion. Ils sont une mise en œuvre du DGC pour la France. Ces deux

documents sont : « Texte national pour l’orientation de la catéchèse en France »,

« Proposition pour l’organisation de l’action catéchétique », qui sont publiés dans le même

volume338. Dans le premier document, les évêques décrivent brièvement le contexte dans

lequel se vit la catéchèse et ils identifient deux défis : la crise de la transmission et la

reconnaissance des catéchistes par les communautés locales339.

Les évêques proposent, pour les communautés chrétiennes, une nouvelle orientation de la

catéchèse, celle de vivre un déplacement, d’une catéchèse centrée sur le contenu à une

catéchèse expérientielle, personnelle et communautaire : « La situation actuelle en France

fait percevoir la nécessité d’inscrire la catéchèse dans la vocation missionnaire de

l’Église »340. Cet appel met en perspective le rôle de la paroisse qui devient une

communauté vivante qui témoigne de sa foi, entre en dialogue avec la culture et

accompagne les gens dans une démarche de conversion et d’intégration dans la vie

paroissiale par la vie fraternelle et liturgique.

338 Conférence des évêques de France, Texte national pour l'orientation de la catéchèse en France, et

principes d'organisation (Paris : Bayard, Paris : Fleurus-Mame, Paris : Cerf: 2006). 339 Idem, 16-17. 340 Idem, 24-25.

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Les évêques proposent comme méthode pédagogique celle de l’initiation en s’inspirant du

modèle catéchuménal des premiers siècles de l’Église. Ce choix ecclésiologique invite les

communautés chrétiennes à ne plus considérer la catéchèse comme un service, mais comme

une démarche d’approfondissement de la foi. Dans cette perspective, le catéchiste est invité

à être un témoin et présente la foi qu’il a reçue de l’Église. Il est envoyé en mission par

l’Église :

Le catéchète est frère du catéchisé. Il n’est pourtant pas « à égalité » avec lui :

le devoir de transmettre appelle à exercer une forme d’autorité, celle qui

permet à l’autre de devenir « auteur » de sa vie. Dans une pédagogie

d’initiation, l’autorité du catéchète vient de ce qu’il n’est pas lui-même la

source, mais le garant de la fidélité à une longue histoire de la foi vécue dans

l’Église à travers les âges341.

La catéchèse se vit en Église dans les diverses communautés chrétiennes. La paroisse est

invitée à être un lieu d’accueil pour les familles, les aider à expérimenter la vie chrétienne

sous toutes ses formes et permettre à celles-ci d’élargir leur cercle de connaissance dans le

réseau paroissial342.

Les évêques insistent sur l’importance de la liturgie comme lieu d’intégration et d’insertion

dans la vie communautaire de l’Église. La liturgie est climat de convivialité, lieu de la

Parole de Dieu, partage entre les générations et accueil de tous, spécialement des jeunes. Le

premier document se termine par un appel à vivre la catéchèse dans une culture qui relève

le défi de la diversité des cultures et du pluralisme.

Le deuxième document est centré sur l’organisation de l’action catéchétique. La catéchèse

doit être au centre du projet pastoral et liée à l’équipe pastorale. Le prêtre responsable a un

rôle de leadership à jouer en lien avec son ministère presbytéral dans le développement du

ministère de la Parole avec et pour toute la communauté343.

341 Idem, 53. 342 Idem, 83. 343 Idem, 90.

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156

Les évêques de France donnent aussi une réponse à la question « Quoi faire avec les

demandes sacramentelles que font les gens? ». Ils suggèrent de situer la démarche

sacramentelle à l’intérieur d’un parcours catéchuménal. Cette démarche se vit par une

catéchèse avant, pendant et après la célébration des sacrements. Les évêques insistent sur la

redécouverte de la nécessité de la mystagogie. La conclusion du document affirme que

toutes les activités d’évangélisation incluant la catéchèse se réalisent si elles sont en lien

avec l’Église. Ils rappellent aussi la responsabilité de la communauté chrétienne dans la

réalisation de la mission catéchétique :

Mais quels que soient ces itinéraires, ils ne peuvent donner fruit qu’à la

condition d’être portés par les communautés chrétiennes conscientes de leurs

responsabilités à l’égard de l’évangélisation. Cette responsabilité globale

n’exclut en rien, mais au contraire appelle des ministères et des fonctions

spécifiques qui ne pourront s’exercer véritablement que grâce à un

renouvellement de notre investissement dans la formation344.

Comment a-t-on reçu ce document? François Moog, docteur en théologie et doyen de l’ISP-

Faculté de l’éducation de l’Institut Catholique de Paris, dit que c’est par l’action de l’Esprit

que l’action catéchétique institue l’Église comme sujet. La communauté chrétienne est pour

lui sujet de même que les catéchisés :

En reconnaissant que le destinataire de la catéchèse est un « sujet actif,

conscient et responsable », les membres de la communauté chrétienne doivent

se positionner comme chercheurs de Dieu à ses côtés, dans un dialogue

fraternel qui est constitutif de l’Église comme lieu de dialogue entre Dieu et les

hommes345.

Il souligne que les évêques situent la responsabilité catéchétique dans une dynamique

trinitaire et qu’ainsi, ils promeuvent toute une ecclésiologie qui fait appel à la participation

de tous et au développement des charismes de chacun. Pour sa part, Raymond Brodeur,

344 Idem 345 François Moog, « La communauté chrétienne sujet de l'action catéchétique, » dans Lumen Vitae LXII, no 2

(2007): 161.

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157

docteur en théologie et professeur associé à l’Université Laval, souligne que les évêques

français insistent sur la nécessité pour les autorités diocésaines de définir les postes des

responsables et sur la nécessaire circularité de l’information entre les divers partenaires de

la catéchèse. Il trouve que le texte français est davantage normatif que celui de l’Assemblée

des évêques du Québec346.

Emilio Alberich, docteur en théologie, professeur de catéchétique à l’Université Pontificale

Salésienne de Rome de 1964 à 2003, montre comment l’option vers une catéchèse

missionnaire permet de sortir d’une pratique de repli : « Certes on est bien décidé à

dépasser la vision ecclésiocentrique pour s’ouvrir au service humble et passionné du Règne

de Dieu »347. Il nomme la volonté des évêques de France de forger une nouvelle façon de

vivre la foi et de créer un nouveau type de communauté chrétienne. Les évêques français

montrent leur volonté de dépasser le modèle de la catéchèse tridentine pour aller vers un

nouvel horizon :

Nous pouvons dire que nous sommes devant un document clair et concis qui

dans le contexte de l’option pour une Église missionnaire et par le dépassement

courageux « du paradigme tridentin » veut ouvrir en France une nouvelle étape

sur le chemin de la rénovation catéchétique348.

Ce bref survol de la réalité française nous montre que, depuis un siècle, la catéchèse est en

pleine ébullition. Le constat que l’on peut faire est que la majorité des théologiens et

l’épiscopat acceptent de reconnaître l’essoufflement du renouveau catéchétique, car la

société vit des transformations majeures. On propose que la catéchèse soit missionnaire,

pour tous les âges de la vie, de type catéchuménal avec une pédagogie initiatique et qu’elle

puisse permettre aux nouveaux baptisés de se sentir accueillis dans des communautés

vivantes. La formation des catéchistes et leur reconnaissance par les communautés

paroissiales deviennent un impératif pour vivre ces virages. Étant dans un contexte de

séparation de l’Église et de l’État, plusieurs théologiens proposent une catéchèse qui est à la

346 Raymond Brodeur, « Une lecture à distance, » Lumen Vitae LXII, no 2, 163-175. 347 Emilio Alberich, « Une nouvelle impulsion à la catéchèse évangélisatrice : Le « texte National » à la

lumière du magistère catéchétique du nouveau siècle, » IdemLXII, no 2 : 180. 348 Idem, 189.

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fois kérygmatique et catéchuménale. La catéchèse a pour rôle de proclamer le kérygme et

accompagner les gens à devenir disciples du Christ.

En regardant la pratique étudiée, je note le même essoufflement et des questions très

semblables : l’appui des familles dans leur désir d’approfondir leur foi, le défi d’annoncer

le kérygme à une population devenue analphabète pour la foi, le soutien et la formation des

curés, des membres de l’équipe pastorale, des catéchistes et l’assurance d’une juste

reconnaissance par les communautés locales : ce sont des enjeux communs.

3.3.2 L’Allemagne

Lors de la relecture diachronique, j’ai utilisé les travaux de Joseph-André Jungmann. Pour

aborder l’époque contemporaine, je fais appel à Norbert Mette qui propose une démarche

de catéchèse communautaire en Allemagne.

3.3.2.1 Norbert Mette

Norbert Mette est docteur en théologie et professeur de théologie à l’Université de

Dortmund depuis 2002. Il note des conditions essentielles pour vivre une catéchèse : un

réseau stable de personnes; des relations de réciprocité qui promeuvent l’identité de chaque

personne; vivre en témoins de la foi dans son milieu; une communauté qui promeut la

diversité des cheminements spirituels; une communauté composée de plusieurs

mouvements sociaux349. Il arrive à la conclusion que la foi ne peut croître sans un

environnement communautaire350. Pour lui, il y a complémentarité entre la formation et

l’apprentissage de la foi vécus individuellement et communautairement. Il fait la recension

de l’expérience de la catéchèse communautaire en 1987, en Allemagne. Pour lui, la

catéchèse communautaire se définit ainsi :

La catéchèse communautaire, ainsi comprise, est la catéchèse de la

communauté, et ceci dans un double sens :

349 Norbert Mette, « Les tâches de la communauté ecclésiale dans le processus religieux d'apprentissage, »

dans Concilium, no 194 (1984) : 112-114. 350 Idem, 117.

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- d’une part, chaque chrétien est considéré comme possédant la

compétence à la catéchèse, donc possédant la capacité de transmettre à

d’autres ses expériences de vie chrétienne et de les y faire participer;

- d’autre part, la vie de la communauté elle-même est à considérer comme

école spécifique du chrétien et est à structurer dans cette perspective351.

Il note que le passage de la catéchèse traditionnelle, qu’il nomme « catéchèse pour la

communauté », au passage de la « catéchèse de la communauté » ne s’est pas effectué dans

plusieurs paroisses. Il y a eu des résistances car le changement demandait une

transformation du modèle ecclésiologique vécu en paroisse. Il arrive à la conclusion que

cette évolution est possible s’il y a une volonté de placer la catéchèse au centre de la

paroisse352.

Dans un article écrit en l’an 2000, Norbert Mette affirme que le changement que l’on

espérait ne s’est pas réalisé dans la majorité des paroisses. Au contraire, on peut sentir une

inertie et une méfiance de plusieurs contemporains si la paroisse développe un leadership

dans la formation à la vie chrétienne353. Il continue sa réflexion en soulignant que la

paroisse est plus qu’une structure d’organisation dans l’Église, il la définit comme un lieu

théologique354. La paroisse devient un des outils de l’Église pour actualiser sa mission

d’être sacrement du salut pour l’humanité : « l’Église est le sacrement universel du salut

(24) manifestant et actualisant tout à la fois le mystère de l’amour de Dieu pour

l’homme »355.

Pour Norbert Mette, cette option de décrire la paroisse comme lieu théologique et

d’actualisation du mystère du Salut est dans la continuité historique du christianisme où des

groupes ont par leur témoignage ravivé la foi.

351 Norbert Mette, « Formation et communauté compétence catéchétique et/ou offre interpersonnelle, » dans

Formation et Église : pratiques et réflexion : Actes du colloque européen mai 1985 -Strasbourg, dir. Gilbert

Adler et Robert Moldo (Paris : Beauchesne, 1987), 59. 352 Idem, 72. 353 Norbert Mette, « La communauté chrétienne comme catéchèse vivante, » dans Lumen Vitae LV

(2000) : 140. 354 Idem. 355 GS 45

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160

3.3.3 La Belgique

Dans cette section, je présente deux théologiens belges reconnus internationalement qui ont

écrit sur la catéchèse en lien avec la paroisse : André Fossion et Henri Derroitte.

3.3.3.1 André Fossion

André Fossion est prêtre jésuite, docteur en théologie et professeur au Centre International

Lumen Vitae. Il a produit un ouvrage remarquable qui est paru en 1990 : La catéchèse dans

le champ de la communication356. Il explique le développement dans la seconde moitié du

vingtième siècle du renouveau catéchétique en présentant les grands courants catéchétiques

et leurs originalités. Il présente les impacts de ces courants dans les communautés

chrétiennes, sur les catéchistes et les catéchisés. Son point de départ est une présentation

synthétique de la catéchèse tridentine. Il explique que le changement de la culture, les

conditions économiques, sociales et l’apport des renouveaux bibliques et liturgiques ont

rendu désuet le modèle tridentin. C’est dans ce contexte et en tenant compte des

expériences concrètes vécues par les leaders catéchétiques et des apports des différentes

semaines internationales de catéchèse qui ont eu lieu dans plusieurs régions du monde que

se constitue l’émergence de différents courants catéchétiques. Les semaines d’Anvers 1956,

de Nimègue 1959 et d’Eichstät 1960 ont aidé à développer les grandes lignes de cette

nouvelle impulsion de la catéchèse357. Ces semaines ont donné naissance au courant

kérygmatique qui est centré sur l’annonce du kérygme. Il est de type narratif, centré sur

l’histoire du salut et sur la présentation des récits bibliques. Dans le courant kérygmatique,

le catéchiste témoigne et stimule les gens à la conversion. La méthode pour la catéchèse est

en trois temps : implication, explication et application. Cette méthode touche plus à

l’émotion qu’aux sentiments.

Pour André Fossion, un des écueils possibles de ce courant catéchétique, c’est de s’isoler

uniquement dans la sphère du monde religieux. Cette méthode est très centrée sur

356 André Fossion, La catéchèse dans le champ de la communication : ses enjeux pour l'inculturation de la

foi. 357 Idem, 165-195.

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l’émotion. Elle touche les cœurs. Il y a un danger de rester rivé à des rencontres où on

partage seulement sur les émotions.

André Fossion nomme trois courants catéchétiques issus de la recherche et de la réflexion

sur le courant kérygmatique. Ces trois courants sont : catéchuménal, anthropologique et

historico-prophétique.

Le courant catéchuménal se développe lors des rencontres internationales de catéchèse de

Bangkok en 1962 et de Katimondo en 1964358. Dans ce courant, il y a trois déplacements

majeurs : on priorise la catéchèse aux adultes, on tient davantage compte de l’expérience du

catéchisé, la pédagogie est celle de l’initiation. La démarche se vit en cinq étapes :

préparation, première annonce, catéchuménat, initiation finale ou mystagogie, formation

chrétienne des adultes. Dans cette démarche, les sacrements ne sont pas le but ultime, ils

sont des éléments de l’initiation. Ce modèle demande de se convertir et d’être formé à cette

nouvelle pédagogie catéchétique, car elle marque un déplacement d’un modèle centré sur

l’enseignement à un modèle centré sur la pédagogie de l’initiation. C’est un retour aux

sources, à la grande tradition patristique.

Le courant anthropologique naît presque dans la même période que le courant

catéchuménal. Il a comme priorité de tenir compte de l’expérience humaine des gens. C’est

lors de la Semaine Internationale de Catéchèse de Manille 1967 que va s’articuler ce

courant. Ce type de catéchèse est en continuelle corrélation entre la vie et la foi. Il est

animé par trois principes qui sont interdépendants : continuité, rupture, accomplissement.

Cette catéchèse utilise une pédagogie inductive. Ce courant catéchétique invite le catéchiste

à être un acteur dans la production d’un discours herméneutique. Le catéchiste a besoin

d’outils et s’habilite afin d’observer, lire, comprendre, interpréter, proposer une nouvelle

manière de vivre la foi. Un des écueils possibles, c’est d’en rester à l’étape de la continuité

et de ne pas passer aux étapes de la conversion et de l’accomplissement.

358 Idem, 197-244.

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162

Le courant historico-prophétique s’inscrit dans la même ligne que le courant

anthropologique dans la reconnaissance de l’importance de l’expérience humaine : « La

problématique continuité / rupture / accomplissement entre les réalités humaines et les

réalités de la foi se trouve ici explicitement reprise et même étendue »359. Le courant

historico-prophétique est davantage marqué par une autre vision de l’histoire, de la

politique, des défis sociaux et économiques. Dès le point de départ, ce courant demande

aux catéchistes et aux catéchisés de se situer dans l’histoire, d’observer la présence de Dieu

et ses interpellations afin de promouvoir l’action du salut dans le temps présent. Ce travail

d’interprétation en relisant l’histoire va aider le catéchisé à identifier des évènements

possibles pour améliorer sa situation et celle de sa communauté. Il sera invité à passer à

l’action. L’action est vue comme une réponse de foi. Ce courant catéchétique situe la

catéchèse au centre de l’action pastorale. La catéchèse devient un lieu d’apprentissage de la

vie chrétienne et aussi de la vie d’engagement et de la vie missionnaire. Un des

inconvénients, c’est que cette manière de faire puisse enfermer la démarche dans une

dynamique idéologique qui laisse de côté l’Évangile. Si ce modèle est bien vécu, le

catéchiste devient à la foi un témoin, un guide, il initie à la lecture des signes des temps et

est un médiateur avec la communauté.

André Fossion décrit tout l’apport des divers courants catéchétiques. Il constate que

l’Église est en recherche, vit un moment de crise : pour lui, quatre conditions sont

nécessaires pour sortir de cette impasse. La première, c’est de développer une catéchèse

permanente au sein de la communauté. La deuxième condition, c’est de proposer des

parcours diversifiés. La troisième condition, elle doit s’adresser à des commençants et à des

recommençants. La quatrième condition, c’est de proposer des parcours d’initiation

chrétienne, pour les enfants et les adolescents, inspirés de la démarche catéchuménale360.

Pour André Fossion, toute catéchèse se modèle sur le catéchuménat. Le catéchiste insère le

catéchisé dans une communauté locale précise, mais aussi dans un réseau de communautés

359 Idem, 217. 360 André Fossion, « Vers des communautés catéchisées et catéchisantes, » dans Nouvelle revue théologique

126 (2004) : 600-611.

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locales qui s’appellent l’Église paroissiale, diocésaine et universelle361. La communauté

devient celle qui met en œuvre la catéchèse; elle est le lieu par lequel les catéchisés sont

initiés à la vie chrétienne et dont les catéchistes sont issus. Sa mission est de créer un

espace de liberté et d’expression où la Parole de Dieu pourra résonner entre les gens, et ce,

pour tous les âges de la vie362. André Fossion déclare que la société actuelle ne vit plus à

l’ère de la chrétienté et qu’elle est devenue « autre ». On peut reprendre les paroles de

Tertullien : « On ne naît pas chrétien, on le devient »363.

André Fossion, dans ses articles, va utiliser à partir de 1997 la notion de compétence pour

présenter la démarche catéchétique. Voici comment il définit cette notion de

compétence :

Proposons donc cette définition générale de la compétence : elle est l’aptitude

d’un individu à mobiliser, de manière intégrée et inventive, un ensemble de

ressources savoir, savoir-faire, attitudes pour répondre adéquatement à des

situations données, toujours singulières, et à améliorer constamment cette

attitude par son exercice même dans des situations variées364.

Par cette définition, André Fossion veut élargir la notion de la formation dans le domaine

catéchétique. Il ne veut pas s’enfermer seulement dans une dimension académique. Cette

notion de compétence lui permet d’intégrer dans la formation en catéchèse autant

l’expérience chrétienne que la dimension de la transcendance. Ce concept touche

l’ensemble des dimensions de la vie et propose une vision holistique de l’être humain365.

André Fossion voit la compétence comme ce qui est nécessaire pour un chrétien afin d’être

capable d’approfondir sa foi, vivre en communauté, professer sa foi dans son milieu de vie,

au travail et dans la société en général. Pour lui, le chrétien est un sujet actif qui s’implique

361 André Fossion, « Le catéchuménat, modèle inspirateur de toute catéchèse, » dans Lumen Vitae LXI, no 3

(2006) : 262. 362 Idem, 265. 363 Tertullien et Jean-Pierre Waltzing, Apologétique, 2e éd. Collection des universités de France. (Paris :

Belles Lettres, 1961), 41. 364 André Fossion, « La catéchèse au service de la compétence chrétienne, » dans Lumen Vitae LX, no 3

(2005) : 246. 365 Idem, 247.

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164

dans sa communauté, sa famille et son milieu de vie. Il est invité à collaborer dans une

dynamique de coresponsabilité dans la vie ecclésiale. Pour lui, chaque baptisé a quelque

chose à apporter et il enrichit l’Église. Cette vision du chrétien oriente déjà sa vision du

catéchiste. La formation des catéchistes est vue par André Fossion comme une expérience,

c’est un type de parcours :

Il importe souverainement que la formation soit éprouvée par les catéchistes

eux-mêmes comme une expérience bénéfique, valorisante, libérante,

humanisante, bref comme une expérience de salut pour eux-mêmes, pour leur

propre vie366.

Cette formation n’est pas neutre, elle va plus loin qu’un simple cours : « La formation, en

effet, va bien au-delà de l’information; elle est transformation du sujet »367. La catéchèse

est une activité ecclésiale et se vit au centre de la communauté. Maintenant, je présente plus

en détail les diverses compétences qu’André Fossion trouve nécessaires pour la formation

catéchétique :

Tableau 17 : Compétences catéchétiques

Compétences Caractéristiques des compétences

Théologique Cinq caractéristiques interdépendantes :

Organicité

Intégrité

Intégralité

Systématicité

Essentialité

Culturelle Trois nécessités :

Connaître les catéchisés

Connaître le milieu

Être initié au processus d’inculturation de la foi

Pédagogique Quatre types de pédagogie :

Enseignement

Animation

Apprentissage

Initiation

366 André Fossion, « La formation des catéchistes, » dans Dieu toujours recommencé : Essai sur la catéchèse

contemporaine, dir. André Fossion (Bruxelles : Lumen Vitae, 1997), 211. 367 Idem, 213.

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165

Organisationnelle Quatre objectifs complémentaires :

Mettre dans le coup la communauté chrétienne

Proposer des parcours diversifiés

Accueillir les demandes de baptêmes à tous les âges ayant

comme perspective le catéchuménat pour adulte

Prévoir la catéchèse pour les nouvelles générations

Spirituelle Cinq attitudes :

Se laisser évangéliser par d’autres

Se risquer à l’accueil de l’autre

Allier rigueur et démaîtrise

Proposer sans imposer

Être compagnon de route

Ce tableau montre l’exigence d’être catéchiste. André Fossion propose une formation

holistique, il décrit chacune des compétences en fonction des différents savoirs : savoir,

savoir-faire, savoir-être, on pourrait ajouter le savoir-transmettre. La formation des

catéchistes se vit au cœur de la communauté. Elle a davantage d’efficacité s’il y a en même

temps une formation de la communauté, des prêtres, des diacres et des agents de pastorale.

Cette formation n’est possible que si la paroisse ou un autre type de communauté

chrétienne et le diocèse travaillent de concert.

Pour André Fossion, il y a trois niveaux de formation. Le premier niveau est la formation

des catéchistes de base. Le deuxième niveau est la formation des cadres intermédiaires,

c’est-à-dire ceux qui vont s’occuper des catéchistes paroissiaux et les accompagner dans

leur ministère. Le troisième niveau est celui des formateurs : les experts qui s’occupent de

la formation des cadres et poursuivent la recherche catéchétique. La pensée d’André

Fossion nous interpelle à un changement structurel. Il propose de mettre la catéchèse, qui

est souvent une réalité parallèle dans la communauté, au centre de l’activité ecclésiale.

3.3.3.2 Henri Derroitte

Monsieur Henri Derroitte est professeur à la Faculté de théologie de l’Université catholique

de Louvain. Sa première observation est que la catéchèse se cherche, elle a de la difficulté à

se situer dans la société actuelle. Il souligne les efforts des praticiens et du Magistère qui

proposent des nouvelles perspectives catéchétiques. Il observe les résistances de plusieurs

intervenants sur le terrain : « Mais observez avec moi la réalité des rencontres dans nos

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166

villes et villages et faites les comptes : combien rares sont les endroits où l’on a vraiment

changé, où ces généreuses idées sont devenues réalités »368. La renaissance du

catéchuménat et la redécouverte de l’importance de la catéchèse auprès d’adultes heurtent

les pratiques et suscitent toutes sortes de réactions369. Pour lui, le rôle de la communauté

chrétienne et du catéchiste devient celui de créer des espaces nécessaires et essentiels afin

de faire résonner la Parole par le témoignage, la liturgie, le partage biblique et la charité.

Henri Derroitte insiste pour inviter à la conversion les acteurs de la catéchèse. Il est

inévitable de passer par un désapprendre avant d’apprendre à nouveau. Il y a un deuil à

faire lorsque l’on change de manière de faire et de vivre. Il est nécessaire de nommer ce

qu’on abandonne pour intégrer et s’approprier une nouvelle pratique :

De multiples représentations religieuses encombrent ainsi l’imaginaire. Elles

fragilisent la foi des chrétiens et justifient le refus de la foi des non-chrétiens.

D’où l’importance aujourd’hui d’une catéchèse qui sait mettre en relief

l’essentiel de la foi, son organicité, la hiérarchie de ses affirmations. Ce travail

de mise en relief de l’essentiel de la foi suppose un désapprentissage.

Apprendre, en catéchèse, c’est aussi désapprendre; c’est nécessairement

déstructurer et restructurer les représentations sur des bases théologiques plus

adéquates. Ce travail de désapprentissage est décisif en catéchèse et mérite une

grande attention, sinon on ajoute des représentations nouvelles à des

représentations anciennes qui demeurent et tôt ou tard refont surface en

balayant celles que l’on s’est efforcé de mettre en place370.

Ce préalable indique comment il est important pour le catéchiste de connaître et de

développer les attitudes et les aptitudes pour accompagner les gens dans les changements

de représentations. Le premier élément implique que le catéchiste ait lui-même expérimenté

cette démarche. Henri Bourgeois avait observé que dès que l’on met en place un

catéchuménat, les catéchumènes arrivent : « Là où des catéchuménats existent et agissent,

des catéchumènes et des recommençants se lèvent; là où l’institution catéchuménale fait

défaut ou reste passive, les catéchumènes sont rares et les recommençants demeurent

368 Henri Derroitte, « Les nouveaux catéchistes : Enjeux de leur formation, » dans Les nouveaux catéchistes :

Leur formation, leurs compétences, leur mission, dir. Henri Derroitte et Danielle Palmyre (Bruxelles : Lumen

Vitae, 2008), 8. 369 Henri Derroitte, La catéchèse décloisonnée : jalons pour un nouveau projet catéchétique

(Bruxelles : Lumen Vitae, 2000), 22. 370 Henri Derroitte, « Les conditions d'un renouveau de la catéchèse paroissiale, » dans Lumen Vitae LV

(2000) : 136-137.

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virtuels »371. Le deuxième élément, c’est de développer une catéchèse intergénérationnelle.

Le troisième élément, c’est de déployer une catéchèse qui implique toute la communauté372.

C’est aussi à la communauté, à la paroisse que revient le rôle de soutenir les catéchistes. Le

quatrième élément, on découvre que la catéchèse est essentielle, elle s’expérimente au cœur

de la vie et en dialogue avec toutes les autres activités de la paroisse. Le cinquième

élément, souligne que la catéchèse est initiatique; une catéchèse qui fait entrer dans le

mystère par une expérience ecclésiale :

Il ne s’agit pas d’honorer seulement l’intelligence de la foi (dans un

enseignement et une mémorisation des vérités chrétiennes), il s’agit aussi de

redécouvrir que le croyant est aussi une femme, un homme qui prie, qui agit au

milieu du monde, qui donc vit en relation avec d’autres373.

Le sixième élément, c’est une catéchèse plus missionnaire qui prépare les chrétiens à être

témoins dans l’Église et le monde.

Henri Derroitte interpelle la communauté pour qu’elle soit un lieu ecclésial pour apprendre

la vie de prière, la fraternité, la solidarité et l’action sociale dans le milieu. Sans

communauté, il ne peut y avoir de catéchèse. C’est à partir de sa vision de la catéchèse et

du rôle qu’il donne au catéchiste qu’il arrive à une proposition pour la formation de ceux-ci.

Je présente un tableau pour schématiser le cadre de formation qu’il suggère374.

Tableau 18 : Formation des catéchistes, vision d’Henri Derroitte

Savoirs Caractéristiques

Savoir-être - Construire, faire grandir et mûrir sa foi personnelle

- Développer des valeurs humaines et chrétiennes

- Participer à une vie ecclésiale communautaire

371 Henri Bourgeois, Théologie catéchuménale : à propos de la « nouvelle » évangélisation, Théologies. (Paris

: Éditions du Cerf, 1991), 235. 372 Henri Derroitte, « Advenir catéchiste au sein d'une communauté chrétienne, » dans Lumen Vitae LXI, no 4

(2006) : 389. 373 Henri Derroitte, « Une catéchèse dans la mission de l'Église, » dans Théologie, mission et catéchèse, dir.

Henri Derroitte (Montréal : Novalis, Bruxelles : Lumen Vitae, 2002), 207. 374 Henri Derroitte, « Quelques considérations sur la formation des catéchistes approches théologiques et

pédagogiques, » dans Les nouveaux catéchistes : leur formation, leurs compétences, leur mission, dir. Henri

Derroitte et Danielle Palmyre (Bruxelles : Lumen Vitae, 2008), 33-52.

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- Faire un travail sur soi-même, sur sa vie et sa foi

- Être capable de prise de distance et de remise en question

Savoir - Bible

- Tradition

- Liturgie

- Histoire du christianisme

- Spiritualité

- Sciences humaines : pédagogie, andragogie, développement

psychoaffectif des personnes, des bases en sciences humaines

pour avoir les outils pour analyser le milieu

Savoir-

faire

- Aptitude à intervenir

- Aptitude à écouter

- Aptitude à communiquer

- Aptitude à travailler en équipe

Ces différentes compétences sont nécessaires pour aider le catéchiste à réaliser son rôle.

Elles sont interdépendantes et elles s’entrecroisent. Henri Derroitte est conscient de

l’exigence de cette formation et déplore le peu de place que l’on donne à la formation des

catéchistes dans l’Église occidentale : « Souvent, on le constate à regret, la catéchèse fait

encore partie des espaces dévalorisés dans l’Église occidentale »375.

La formation des catéchistes demande aussi une reconnaissance au niveau ecclésial. Pour

lui, les catéchistes sont plus que des collaborateurs, ils sont des acteurs pastoraux. Pour les

équipes pastorales, ils doivent être considérés comme des co-responsables : « Les

catéchistes doivent se considérer et être considérés non seulement comme des

collaborateurs, mais bien comme des acteurs pastoraux co-responsables qui s’insèrent dans

le projet global de la communauté chrétienne »376. Henri Derroitte propose les

déplacements à vivre dans la vision de la catéchèse et du rôle du catéchiste. Voici quelques

déplacements :

Préparation aux sacrements vers l’initiation chrétienne

Catéchèse d’encadrement vers catéchèse missionnaire

Catéchiste répétiteur vers catéchiste co-responsable de la mission

375 Idem, 51. 376 Henri Derroitte, « Advenir catéchiste au sein d'une communauté chrétienne » : 394.

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En Belgique, on arrive à des conclusions presque identiques qu’à celles trouvées en France.

La nouvelle catéchèse offre plusieurs options : elle s’inspire du modèle catéchuménal; elle

est intergénérationnelle; elle implique toute la communauté; la catéchèse n’est pas en marge

de la paroisse, mais elle est au cœur de sa vie; elle est initiatique; elle est missionnaire. La

formation des catéchistes est une priorité. Le catéchiste est un interprète. La grande

différence avec la catéchèse française, c’est que dans l’enseignement public en Belgique, il

y a encore des cours d’enseignement religieux. La préoccupation des théologiens, entre

autres pour Henri Derroitte et André Fossion, c’est de trouver une manière de miser sur cet

enseignement pour que la catéchèse paroissiale et l’enseignement religieux soient

complémentaires.

La contribution qu’André Fossion et Henri Derroitte apportent pour la recherche, est que la

catéchèse ne peut se déployer sans une formation holistique reconnue par les instances

internes de l’Église locale.

3.3.4 L’Italie

La recherche catéchétique en Italie est vaste; je me limite à deux auteurs qui ont réfléchi à

la fois sur le rôle et la formation des catéchistes et de la communauté chrétienne.

3.3.4.1 Flavio Pajer

Flavio Pajer est religieux, membre de la communauté des Frères des Écoles Chrétiennes, et

professeur. Il enseigne la pédagogie des religions à Rome et à Naples. Il fait le constat que

le modèle tridentin n’est plus approprié pour la situation actuelle377. Il identifie plusieurs

pôles dialectiques, des points de tensions que vivent les paroisses. Les communautés

paroissiales sont en transition entre le modèle tridentin et l’émergence d’un nouveau

modèle, d’une nouvelle façon d’effectuer la catéchèse. Il indique aussi qu’en plusieurs lieux

maintes personnes s’enferment dans l’ancien modèle refusant de vivre ou d’expérimenter

un autre modèle paroissial. Flavio Pajer souligne qu’un type de pratique catéchétique peut

paralyser la croissance de la paroisse :

377 Flavio Pajer, « Les Églises européennes et la crise de la catéchèse paroissiale, » IdemLV, no 3 (2000).

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En effet, l’anonymat des réunions massives, l’institutionnel codifié, le rituel

standardisé, la prise de parole hiérarchisée sont autant de cloisons qui freinent

l’expression personnelle, qui découragent la réciprocité et interdisent

finalement aux personnes de s’investir à part entière dans l’aventure de foi378.

L’établissement d’une catéchèse communautaire demande selon lui quelques conditions

préalables. La famille ne peut, à elle seule, créer un espace nécessaire pour la transmission

de la foi. Il est nécessaire que la famille soit insérée dans un réseau de familles,

d’associations, de mouvements qui peut être entrelacé dans une communauté chrétienne ou

une paroisse. L’approfondissement de la foi s’expérimente dans une dynamique de relation

interpersonnelle : « L’homme découvre ce que c’est d’être chrétien d’abord dans la

personne de Jésus Christ et deuxièmement par le témoignage de ceux qui suivent Jésus

Christ par la pratique de l’amour selon les Évangiles »379. Il faut développer une attitude

d’accueil entre les membres de la communauté et reconnaître que chacun apporte quelque

chose au développement de la vie ecclésiale. Ce sont les conditions essentielles pour le

développement de la catéchèse.

Les conséquences pour les catéchistes sont nombreuses. La catéchèse se vit à tous les âges

de la vie, dans une dynamique de formation permanente. La première personne à être

catéchisée, c’est le catéchiste lui-même. Il est appelé à changer son mode d’intervention en

vivant le passage d’un enseignant à celui d’un guide et d’un accompagnateur. Il est celui

qui fait circuler la Parole de Dieu. Il invite les catéchisés à prendre parole. Le catéchiste

insère les catéchisés dans la communauté et les conduit vers l’autonomie. Il doit développer

des habiletés de solidarité et de communion380. Pour Flavio Pajer, le développement d’une

communauté à la fois catéchisante et catéchisée est exigeant et demande un effort de tous

ses membres. Il note qu’il y a un essoufflement et même dans certaines régions un retour

378 Flavio Pajer, « Une catéchèse où la communauté dans son ensemble est à la fois catéchisante et catéchisée,

» dans Théologie, Mission et Catéchèse, dir. Henri Derroitte (Bruxelles : Lumen Vitae, Montréal : Novalis,

2002), 21-22. 379 Idem, 23. 380 Idem, 31.

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aux anciennes façons de faire381. Il y a aussi une banalisation de la catéchèse qui nuit à son

développement382. Cette réflexion fait découvrir que l’on ne peut agir sur la catéchèse en

pensant garder immobile le modèle paroissial où tout est lié : toucher ici à un des éléments,

c’est interpeller tous les acteurs et la communauté. La formation continue et permanente de

tous les acteurs en catéchèse est inévitable.

3.3.4.2 Emilio Alberich

Emilio Alberich est un religieux salésien. Il a été professeur à la Faculté des sciences de

l’éducation de l’Université pontificale salésienne à Rome. Il opte pour le modèle du

catéchuménat et invite l’Église à réviser sa façon de concevoir et de vivre la catéchèse383.

Cette option influence le modèle de formation pour les catéchistes. Le catéchuménat est

centré sur les personnes. C’est un parcours structuré qui a pour but d’amener les

catéchumènes à vivre leur foi en Église, en dialogue avec la culture ambiante. Le

catéchuménat introduit les catéchumènes dans la communauté, il propose une dynamique

de conversion permanente. L’option catéchuménale appelle à voir la communauté et le

catéchiste sous un nouveau jour384. La catéchèse devient un outil de renouvellement de

l’Église. La catéchèse doit quitter sa fonction de préservation de l’Église afin de devenir un

outil d’édification de celle-ci385. La communauté est le lieu de la catéchèse et aussi, comme

le mentionne Emilio Alberich, elle est la première catéchiste : « Cela signifie que la

première catéchiste, la catéchiste par excellence, c’est la communauté chrétienne qui doit se

considérer comme l’agent qui est d’une manière décisive responsable de la catéchèse »386.

Dans ce contexte, les catéchisés ne sont plus un objet ou un contenant à remplir de

nouvelles connaissances. Ils sont aussi un don de l’Esprit pour la communauté :

Les catéchumènes et les “ré-initiés” sont un don et une ressource pour l’Église,

qui est ainsi enrichie de leur expérience et de leur mode nouveau de vivre la

381 Flavio Pajer, « Le renouveau catéchétique en Italie : Un projet prometteur, un processus enlisé, » dans

Lumen Vitae LVIII, no. 4 (2003) : 388. 382 Idem, 391. 383 Emilio Alberich, « Catéchuménat et catéchèse d'initiation, » dans Catéchèse et initiation, dir. Henri

Derroitte (Bruxelles : Lumen Vitae, 2005), 140. 384 Idem 385 Alberich, « Catéchèse et ré-initiation,», 210. 386 Idem, 202.

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foi. C’est pourquoi ces processus ne doivent pas être pensés en clés de lecture

de conservation ou de récupération : il y aurait alors un grand risque de

désillusion qui affecterait ces initiatives de formation des adultes. Mais il y a

plus que cela : ce sont des expériences qui doivent être reçues en fonction d’un

projet renouvelé d’Église, pour « créer » l’Église387.

Le catéchumène, le catéchisé devient lui aussi un acteur dans le renouvellement de l’Église.

C’est ainsi en situant le catéchiste comme ayant un ministère essentiel qu’Emilio Alberich

voit trois niveaux de formation : ceux qui sont directement sur le terrain, les animateurs des

catéchistes, les responsables diocésains et ceux qui poursuivent la recherche

universitaire388. Tous les niveaux d’interventions sont co-responsables de la mission avec

les équipes pastorales : « Les catéchistes doivent se considérer et être considérés comme

des collaborateurs et des acteurs pastoraux co-responsables qui s’insèrent dans le projet

pastoral global de la communauté chrétienne »389. Pour la formation, il propose une grille

basée sur le savoir-être, le savoir et le savoir-faire. Pour présenter sa proposition, je vais

synthétiser ses idées dans un tableau. J’utiliserai deux documents pour créer ce tableau390.

Tableau 19 : Vision de la formation des catéchistes d’Émilio

Alberich

Savoirs Compétences à acquérir

Savoir-être 1. Témoigner d’une foi vivante

2. Vivre une spiritualité

3. Développer une identité chrétienne et ecclésiale

4. S’enraciner dans son milieu et dans son temps

Savoir 1. Théologiques

a. Bible

b. Dogmatique

c. Morale

d. Liturgie

e. Spiritualité

387 Emilio Alberich et al., Les fondamentaux de la catéchèse, (Bruxelles : Lumen Vitae, Montréal : Novalis,

2006), 193. 388 Idem, 349-350. 389 Idem, 351. 390 Emilio Alberich, « La formation des agents intermédiaires en catéchèse : Réalités et prospectives (Italie), »

dans Formation et Église : pratiques et réflexion : Actes du colloque européen mai 1985 - Strasbourg, dir.

Gilbert Adler et Robert Moldo (Paris : Beauchesne, 1987).

Alberich et al., Les fondamentaux de la catéchèse, 349-364.

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173

2. Pastorale

a. Connaître les enjeux pastoraux de son milieu et de

l’Église particulière

b. Connaître le projet pastoral de la communauté locale et

du diocèse

3. Sciences humaines

a. Pédagogie et andragogie

b. Psychologie

c. Sociologie

d. Économie

e. Culture

Savoir-faire 1. Être des éducateurs à l’écoute, qui tiennent compte des besoins

des personnes, capables d’accompagner et faire expérimenter

diverses activités pour conduire les catéchisés à une maturité

dans leur foi.

2. S’habiliter à faire communiquer les gens entre eux et faciliter la

communication entre les catéchisés, les catéchistes et la

communauté.

3. Être des animateurs qui vont créer une ambiance dans le groupe

pour vivre une expérience propice à l’édification de cellules

ecclésiales vivantes et dynamiques.

4. Être capable de planifier, réaliser et évaluer un projet

catéchétique en équipe en lien avec le plan pastoral et toute la

communauté.

Cette formation pour les catéchistes est aussi indirectement une formation préalable pour

les divers intervenants pastoraux. Emilio Alberich observe qu’il y a en plusieurs endroits,

sinon partout, un manque flagrant de formation catéchétique pour les catéchistes, les agents

pastoraux et les pasteurs391. Emilio Alberich est conscient que cette vision de la formation

appelle à vivre selon un nouveau modèle ecclésiologique de même que l’exercice du

ministère du catéchiste. Il décrit par trois déplacements majeurs cette nouvelle image du

catéchiste : « Catéchèse qui exige et promeut une nouvelle image du catéchiste ou

accompagnateur : plus animateur qu’expert; plus témoin qu’enseignant ou maître; plus

transmetteur d’une expérience que d’une doctrine »392.

Cette nouvelle image du catéchiste est très stimulante, car elle le met comme acteur dans le

renouvellement de la pratique ecclésiale. Il sera important de regarder dans le projet de

391 Alberich et al., Les fondamentaux de la catéchèse, 356-357. 392 Alberich, « Catéchuménat et catéchèse d'initiation, », 137.

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174

recherche-action si cette proposition a des assises ici au Québec, et comment pourrait se

réaliser une telle formation, avec quels moyens et suivant quel programme d’implantation.

Est-ce réaliste? Si oui, comment?

3.3.5 Les États-Unis

Pour ce pays, je me suis centré sur l’étude de trois documents en lien avec mon sujet de

recherche. Le premier provient du Département de l’éducation de la conférence épiscopale

des États-Unis qui présente le plan pastoral pour l’implantation de la catéchèse des adultes

aux États-Unis393. Le deuxième est le National Directory for Catechesis394. Le troisième

document est un guide pour appliquer les orientations du National Directory for Catechesis

des États-Unis produit par le comité de catéchèse des États-Unis395. Ces trois documents,

rédigés après le DGC, sont interdépendants et font la promotion des nouvelles orientations

de la catéchèse aux États-Unis.

3.3.5.1 Contexte et défis de la pratique catéchétique aux États-Unis

Dans ces documents, on présente le contexte de la vie aux États-Unis avec précision en

décrivant les caractéristiques et les défis que la catéchèse relève. On constate l’importance

que l’on met sur les droits individuels jusqu’à parfois tomber dans un relativisme moral et

une privatisation du religieux, l’utilisation des personnes comme des objets et non pas

comme des sujets, le développement de la science et des techniques. Les découvertes

scientifiques et techniques s’effectuent souvent en fonction des profits de quelques-uns

plutôt qu’au bénéfice de l’ensemble de la population. L’Église aux États-Unis constitue une

minorité, elle est confrontée à la diversité des cultures dans sa vie interne et dans la société.

Les contacts œcuméniques et interreligieux sont quotidiens et influencent l’action pastorale

393 Catholic Church. National Conference of Catholic Bishops., Our hearts were burning within us : a

pastoral plan for adult faith formation in the United States (Washington, D.C. : U.S. Catholic Conference,

1999). 394 Catholic Church. United States Conference of Catholic Bishops., National directory for catechesis

(Washington, D.C. : United States Conference of Catholic Bishops, 2005). 395 Catholic Church. United States Conference of Catholic Bishops. Committee on Catechesis., Leader's guide

to the National directory for catechesis (Washington D.C. : United States Conference of Catholic Bishops,

2005).

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175

de ces différents intervenants pastoraux. C’est dans ce contexte que se vit et s’opère la

formation des catéchistes.

3.3.5.2 Orientations de la catéchèse aux États-Unis

Les évêques s’inspirent de Dei Verbum pour orienter la catéchèse. Les évêques des États-

Unis reprennent la vision de la catéchèse proposée par le DGC. La catéchèse a pour but

de former des disciples qui témoigneront à leur tour de leur foi. Les évêques insistent

aussi sur la nécessité d’inculturer la catéchèse. Pour eux, la restauration du catéchuménat

par le Concile Vatican II est un élément qui les a poussés à prendre une option pastorale.

La catéchèse pour adultes est le modèle de toute catéchèse dans les communautés. Le but

de la catéchèse pour adultes est de former des gens qui pourront répondre aux besoins des

différentes communautés. Tous sont responsables de la catéchèse : « All members of the

community of believers in Jesus Christ participate in the Church’s catechetical mission.

Some are called to more specific catechetical roles »396.

3.3.5.3 Rôle de la paroisse et des catéchistes aux États-Unis

La paroisse est un des pivots de la mission catéchétique. Elle est invitée à se donner une

bonne organisation et les ressources nécessaires pour la réalisation de cette mission397.

Chaque paroisse est appelée à proposer trois types de parcours sur quatre possibles :

• Parcours pour les enfants et dans la mesure du possible avec une démarche

intergénérationnelle,

• Parcours pour les adolescents

• Parcours pour les jeunes adultes

• Parcours pour les adultes.

396 Catholic Church. United States Conference of Catholic Bishops., National directory for catechesis, 217. 397 Catholic Church. National Conference of Catholic Bishops., Our hearts were burning within us : a

pastoral plan for adult faith formation in the United States, 72-73.

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176

Ce sont les pasteurs qui sensibilisent et mobilisent leur équipe pastorale, le conseil de

pastorale paroissial et tous les paroissiens afin de réaliser la mission catéchétique. Cette

formation catéchétique est orientée par le modèle du catéchuménat. On présente trois

orientations précises pour la réalisation du projet catéchétique :

• Catechesis for adults of all ages is a priority – adult formation should be

provided in such a way that parishioners would recognize it as the parish’s

primary catechetical mission [...]

• The baptismal catechumenate is a vital component in the organization of

catechesis in the parish

• The catechumenate is an essential process in the parish, one that serves as

the inspiration for all catechesis398

Pour l’appuyer dans la réalisation de la mission, le pasteur peut engager des « Parish

catechetical leaders ». Ces personnes travaillent sous la supervision du pasteur et sont

appelées à planifier, réaliser et évaluer les différents parcours de catéchèse et ont à

interpeller, recruter, former et accompagner les catéchistes. Ils seront formés pour

intervenir dans le filtrage des bénévoles et le respect de la politique de prévention pour les

abus sexuels. Voici comment résume le National Directory for Catechesis la formation de

ces leaders :

Preparation for service as a parish catechetical leader should include advanced

studies in theology, psychology and theory, and administration, as well as

practical catechetical experience with adults, youth, and children. A

comprehensive knowledge of the General Directory for Catechesis and the

Catechism of the Catholic Church is essential399.

Une des tâches du parish catechetical leader sera de former un comité composé de gens de

tous les âges, des différents groupes ethniques et de toutes conditions sociales afin de

réaliser la mission catéchétique400. Les catéchistes ont un rôle propre à jouer. Les évêques

des États-Unis reconnaissent que c’est une vocation, un ministère.

398 Catholic Church. United States Conference of Catholic Bishops., National directory for catechesis, 221. 399 Idem, 225. 400 Catholic Church. United States Conference of Catholic Bishops. Committee on Catechesis., Leader's guide

to the National directory for catechesis, 70-71.

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177

Les évêques insistent sur l’inculturation, la mémorisation de certains contenus dans

l’apprentissage et la nécessité pour les catéchistes de créer un climat et des lieux

accueillants pour la catéchèse. Ils demandent aussi aux pasteurs de présenter les catéchistes

à la communauté chrétienne lors du dimanche de la catéchèse. La formation des catéchistes

est articulée autour de trois éléments : la théologie, les sciences humaines et le

développement de la vie apostolique. Cette formation est donnée prioritairement en

paroisse. L’originalité de la formation des catéchistes aux États-Unis tient à l’insertion de la

personne dans un groupe qui chemine et qui lui permet de grandir dans sa foi et de

développer son attachement à l’Église dans une communauté locale précise. La formation

des catéchistes est vue comme un lieu de croissance spirituelle, humaine et ecclésiale :

The formation of catechesis takes place most effectively within the local

parish. Parish-centered programs remind the catechist that their call comes

from the Church, that they are sent by the Church, and that they hand on the

faith of the Church. Parish-centered programs offer opportunities for the

formation of a local community of prayer, mutual support, and learning.401

Henri Derroitte, dans une analyse du document, souligne le fait que le National Directory

for catechesis est un document qui met l’accent sur l’inculturation. Il souligne l’insistance

sur la mémorisation comme outil pour acquérir les mots de la foi. Il remarque aussi l’effort

des évêques pour la formation des catéchistes402.

La formation des catéchistes des États-Unis selon ces trois documents peut être

interpellante pour l’Église du Québec qui se retrouve depuis l’an 2000 avec une complète

séparation de l’Église et de l’État et presque sans expertise en catéchèse. Les orientations

étatsuniennes peuvent-elles inspirer et interpeller la pratique d’ici?

401 Idem, 69. 402 Henri Derroitte, « Faire évoluer les représentations sur la catéchèse : Nouvelles options catéchétiques de

cinq pays occidentaux, » dans Lumen Vitae LXII, no. 2 (2007) : 210.

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178

3.3.6 La Corée du Sud

L’Église de la Corée du Sud est marquée par une pratique catéchuménale importante.

Plusieurs intervenants pastoraux ont remarqué l’abandon de la pratique religieuse et une

prise de distance de plusieurs nouveaux baptisés après leur baptême. C’est le sujet

qu’aborde Jean-Baptiste Jung Shin-Chul, docteur en théologie à l’Institut Catholique de

Paris et actuellement évêque du diocèse d’Incheon. Le titre de sa thèse est : Élaboration

d’un modèle catéchétique qui articule l’Évangile et la vie pour l’Église de Corée403. Le

point de départ de la thèse est l’observation d’une baisse de la pratique dominicale par

plusieurs nouveaux baptisés quelques années après le baptême. Il en vient à définir que la

problématique de cette réalité est qu’il y a un écart, une rupture entre la vie et la foi de

nombreux baptisés. Il poursuit sa recherche en abordant la question des conditions

favorisant le dialogue entre foi et culture. Sa perspective est de partir du sentiment, de

l’expérience religieuse des Coréens comme point de départ du dialogue et du processus

catéchétique404. À partir de cette observation, de sa découverte de l’importance de la

première expérience religieuse, il propose un modèle catéchétique qui tient compte de

l’expérience religieuse des gens. Voici comment Jung Shin Chul résume sa thèse :

En me basant sur ce fondement théologique (relation entre l’expérience

religieuse et la foi), je vois le déroulement catéchétique comme un

cheminement semblable à celui des disciples d’Emmaüs. Je le propose en

six étapes : La réflexion personnelle qui conduit chaque catéchisé à élaborer

sa « pré-confession », le premier stage pour que chacun raconte sa « pré-

confession », la rencontre avec la dimension cognitive de la foi offerte à

tous, l’interprétation qui met en corrélation les « pré-confessions »

individuelles avec l’expérience de l’Église, le deuxième partage où les

catéchisés échangent leur nouvelle confession, le défi de la décision

personnelle pour vivre la foi dans la vie quotidienne. En une seule phrase : je

peux dire que la catéchèse se déroule des « pré-confessions » à la confession de

foi, de la confession de foi au témoignage de foi tourné vers l’avenir405.

Cette thèse indique que la méthode catéchuménale pour elle-même n’est pas la solution à

toutes les difficultés dans la catéchèse. Cette étude est éclairante pour la recherche, car elle

403 Shin-Chul Jung, « Élaboration d'un modèle catéchétique qui articule l'Évangile et la vie pour l'Église de

Corée » Thèse de doctorat (Institut Catholique de Paris, 2002). 404 Idem, 185. 405 Idem, 344.

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179

indique que le défi de la catéchèse n’est pas seulement de former des catéchistes qui

possèdent bien le modèle catéchuménal. Il s’agit d’accueillir les catéchisés dans leur

expérience religieuse et ensuite d’entrer en dynamique de dialogue, de corrélation avec eux

pour adhérer à la foi chrétienne. L’enjeu est de permettre aux catéchumènes de nommer

quelle est leur expérience originelle avant leur cheminement catéchuménal. Et la suite,

nommer les conversions qu’ils ont à vivre pour adhérer à la foi chrétienne. Ils ont à réaliser

une nouvelle synthèse de leur foi chrétienne en incluant des éléments de leur culture

coréenne, leur expérience personnelle et la vie ecclésiale. Cette expression de foi sera une

nouvelle synthèse qui leur permettra d’approfondir et de découvrir le don de Dieu et de

vivre une nouvelle fidélité.

3.4 L’évolution de la catéchèse dans l’Église du Québec

Je viens de compléter un tour d’horizon afin d’identifier les acteurs et la formation des

catéchistes dans l’histoire de l’Église et dans plusieurs régions du monde. La vie de l’Église

du Québec est liée à son environnement et à son histoire. Je ne peux traiter de toutes les

influences qui ont été vécues au Québec, comme la relation avec les Premières Nations, qui

ont été déterminantes dans notre façon de concevoir l’environnement, la liberté et

l’autonomie. Il y a eu l’influence de la France dans la période de la fondation de la colonie.

L’influence de la Grande-Bretagne après la conquête anglaise. Il est important de rappeler

l’apport des immigrants venus de plusieurs nations : les Allemands, les Juifs, les Irlandais,

les Ukrainiens, les Italiens, les Portugais… Je laisse à d’autres d’approfondir ces thèmes

passionnants. Je présente les grandes lignes de l’histoire et décris les grandes étapes de la

catéchèse à partir du vingtième siècle, en m’attardant aux rôles des catéchistes et de la

paroisse.

3.4.1 Les années 1900 à 1960

De la fin du dix-neuvième siècle à la première moitié du vingtième siècle, il y a une grande

production de catéchismes. Mais Mgr François-Xavier Ross, évêque fondateur du diocèse

de Gaspé (5 mai 1922), est un des premiers évêques du Québec à remettre en question le

modèle du catéchisme utilisé alors :

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180

Mgr Ross, évêque de Gaspé, est un des premiers au Québec à s’élever pour

critiquer vertement un enseignement religieux trop théologique, livresque et

mécanique. Pour lui, il faut d’abord faire comprendre avant de faire apprendre,

il faut s’adresser autant au cœur qu’à l’intelligence406.

Dans les écoles, les titulaires de classe sont également les catéchistes et utilisent de plus en

plus du matériel d’appoint. Le déplacement de la catéchèse de la paroisse à l’école

s’effectue dans le même temps et simultanément à l’application par le gouvernement d’une

loi qui oblige les parents à envoyer leurs enfants de 6 à 14 ans à l’école à partir de 1943407.

Dans les écoles publiques professionnelles se dessine une autre manière de faire. On insiste

pour associer d’autres éléments complémentaires au catéchisme pour la formation

religieuse. C’est ainsi que Paul-André Turcotte présente les déplacements dans les contenus

de l’enseignement religieux :

D’après le programme officiel de 1905 (Allard et Lefebvre, 1998 : 193),

l’instruction morale et religieuse comprend la prière, le catéchisme, l’histoire

sainte avec des notions d’histoire ancienne, la bienséance (instruction civique),

la lecture latine et l’histoire de l’Église catholique (de fait, du christianisme

depuis ses origines). En outre, il est recommandé d’associer les récits bibliques

à l’étude des prières et aux notions de catéchisme408.

Paul-André Turcotte décrit une tension où l’on considère que le catéchisme est de

juridiction paroissiale et l’enseignement religieux de compétence scolaire. On perçoit aussi

le clergé diocésain comme éloigné des enjeux contemporains :

Le catéchisme spécialement en vint à être considéré comme un enseignement

qui, étranger à l’école, sinon à la vie, devait être confiné à l’Église paroissiale.

406 Robert Anctil, « L'enfant prend la parole : un tournant de notre histoire catéchétique, » dans La Société

canadienne d'histoire de l'Église Catholique 46 (1979) : 33. 407 Raymond Brodeur et al., Les Catéchismes au Québec, 1702-1963 (Québec : Presses de l'Université Laval,

Paris : Éditions du CNRS, 1990), 260. 408 Paul-André Turcotte, « La socialisation scolaire du croire et sa gestion institutionnelle : Bible catéchisme

et histoire de l'Église à l'école publique (1905-1970), » dans Social compass 54 (2007) : 55-56.

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181

[…] Ce faisant, ils écartèrent de l’école les vicaires et curés jugés

culturellement décalés409.

On voit bien que se dessine une autonomisation de l’enseignement religieux par rapport à la

paroisse. La tension entre le clergé diocésain et les religieux est déjà le prélude des

changements à venir lors de la Révolution tranquille. Le dernier catéchisme de type

questions et réponses sera publié en 1951; il inclut quelques éléments pédagogiques410.

Réginald Marsolais cible deux événements qui, selon lui, ont préparé le renouveau

catéchétique. Le premier est d’ordre institutionnel par la fondation de l’Office catéchistique

provincial, le deuxième par la formation de spécialistes en catéchèse dans les instituts

européens411. Plusieurs diocèses mettent en place, dans cette période, des offices diocésains

de catéchèse. C’est en 1955 qu’est fondé à l’Université de Montréal L’institut des sciences

religieuses qui jouera un rôle important dans la formation des différents intervenants en

catéchèse.

Cette période aura pour caractéristique de confirmer un déplacement important : le lieu de

vie de la catéchèse passera de la paroisse en lien avec les familles à l’école. Raymond

Anctil utilise cette expression : « l’accent en enseignement religieux se déplace de

l’environnement à l’école »412. Raymond Brodeur va dans le même sens et indique que

toute la formation des catéchistes est dirigée vers les enseignants413. Cette période s’achève

avec une spécialisation des catéchistes qui sont d’abord des enseignants liés à l’école et qui

coordonnent l’enseignement de la catéchèse avec celui des autres matières. Les parents sont

de plus en plus absents de la catéchèse; ils ont un rôle d’appui sans plus. Ils doivent amener

les enfants à l’église. La paroisse devient un lieu plus rituel où se rassemblent les gens pour

la messe et la réception des sacrements. La communauté chrétienne, les pasteurs, les autres

prêtres sont confinés à la célébration des sacrements et au soutien des mouvements de

jeunesse. Durant cette période, il y a absence d’une catéchèse pour les adultes et aussi pour

409 Idem, 59-60. 410 Brodeur et al., Les Catéchismes au Québec, 1702-1963, 97. 411 Réginald Marsolais, « Trois décennies de catéchèse au Québec, » dans Le souffle, no 49 (1974): 66. 412 Anctil, « L'enfant prend la parole : un tournant de notre histoire catéchétique, »: 42. 413 Brodeur et al., Les Catéchismes au Québec, 1702-1963, 292.

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les jeunes adultes. La catéchèse est une affaire d’enfant, elle se vit et se fait à l’école par

des spécialistes, principalement des enseignants.

3.4.2 Le renouveau catéchétique 1960-2000

Le début des années soixante est marqué par deux événements majeurs pour le Québec. Le

premier est la Révolution tranquille et le second est le Concile Vatican II. Plusieurs vivent

ce changement non pas comme le progrès et le développement d’un nouveau modèle

catéchétique, mais bien comme la fin d’un monde et pour quelques-uns la fin de l’Église.

Cette réaction de quelques intervenants montre la résistance aux changements et la

difficulté pour l’Église de trouver un modèle catéchétique qui convient à l’émergence d’une

nouvelle culture.

Au début des années soixante se constituent des centres de formation afin de préparer le

renouveau catéchétique. En septembre 1955 s’ouvre un département de catéchèse à

l’Institut supérieur des sciences religieuses de l’Université de Montréal. En 1961,

l’Université Laval procède à la création de l’Institut de catéchèse. Les évêques décident de

rédiger de nouveaux manuels pour la catéchèse. Ces manuels sont dédiés pour les écoles

primaires; on insiste pour impliquer les parents dans cette nouvelle démarche et on prévoit

des activités pour les classes de maternelle qui vont s’implanter bientôt dans tout le système

d’éducation414.Voici quelques orientations qui guideront la rédaction :

1) l’école comme lieu de formation;

2) l’importance, la nature et les objectifs de l’enseignement religieux;

3) les principales lois de la pédagogie religieuse (adaptation-induction-

activité);

4) le rôle et les qualités du maître de religion;

5) l’atmosphère de la classe de religion415.

Un grand effort est déployé afin de réaliser une synthèse entre les nouvelles pédagogies, les

découvertes bibliques, le renouveau liturgique, l’importance de la doctrine, la morale et un

414 Réginald Marsolais, « Trois décennies de catéchèse au Québec, » : 69-70. 415 Robert Anctil, « L'enfant prend la parole : un tournant de notre histoire catéchétique, »: 36.

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183

lien avec la vie de tous les jours. Les influences européennes sont déterminantes pour la

production de la série Viens vers le Père : « quelle que soit l’originalité de cette publication,

elle a été rendue possible par le travail antérieur de Joseph Colomb et des autres artisans du

renouveau catéchétique français et belge »416. Les manuels étaient prêts pour le début de

l’année scolaire 1964-1965 en commençant par la première année. Les évêques ont fait lire

une circulaire afin d’impliquer toute la population dans ce nouveau mouvement. Cette

intervention s’est faite le premier dimanche de septembre 1964. Voici les principales

caractéristiques présentées dans le document :

- Ce catéchisme est bâti de façon à favoriser le travail d’ensemble des parents,

des maîtres et des prêtres.

- Ce catéchisme vise d’abord et avant tout à éveiller le sens de Dieu chez

l’enfant, à l’initier à la prière et à former sa conscience morale chrétienne.

- Ce catéchisme donne une grande importance à la Parole de Dieu : aux paroles

de Jésus et à la Sainte-Écriture417.

Réginald Marsolais note aussi une statistique très importante; en 1960, il y a seulement

14 % des jeunes qui terminent leur cours en septième année. La scolarisation générale est

un nouveau phénomène : auparavant, 86 % de la population avait quitté l’école après la 6e

année et n’avait donc plus de formation à la vie chrétienne.

Selon Robert Hurley, la série Viens vers le Père est une catéchèse qui inclut dans sa

démarche toutes les découvertes du renouveau catéchétique : « La série VVLP se veut une

catéchèse anthropologique »418. Il souligne que, malgré tous les efforts pour intégrer le

renouveau catéchétique, il y a deux aspects à souligner : le premier, c’est que toute la

pédagogie est utilisée dans un but, celui d’expliquer et de présenter la doctrine aux enfants :

« It is our conclusion that the Viens vers le Père series puts the life experiences of the

children at the service of elucidating doctrine. When it might have moved in the opposite

416 Gilles Raymond, « Porter l'absence, porter la différence. La trace de J. Colomb au Québec, » dans

Catéchèse 80 (1980): 114. 417 Réginald Marsolais, « Trois décennies de catéchèse au Québec, » : 71. 418 Robert Hurley, « Viens vers le Père et le renouveau catéchétique européen, » dans Études d'histoire

religieuse (1997): 94.

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184

direction »419. Robert Hurley souligne que cette démarche n’a pas permis de développer

chez l’enfant la capacité de lire la Parole, la comprendre et de l’interpréter pour

aujourd’hui420.

La production de Viens vers le Père marque une rupture avec tout ce qui a été fait

auparavant421. Ce programme inédit s’est réalisé avec un plan de formation pour les

différents acteurs. Plusieurs instituts proposent des cours du soir, des sessions d’été sont

organisées, des centaines de personnes y participent. La grande majorité sont des

instituteurs, des prêtres, des religieux et des religieuses. L’aventure Viens vers le Père est

un succès pour sa réception dans les écoles et pour son rayonnement à travers le monde. Le

lien avec la paroisse est très diffus, cette dernière accueille les familles afin qu’elles

puissent recevoir les sacrements. Malgré la volonté clairement écrite de stimuler la

participation des parents au projet, cet objectif n’est pas atteint et est souvent simplement

abandonné. La formation des catéchistes reste dans les mains de professionnels et des

professeurs. La pratique catéchétique reste presque qu’exclusivement dans le cadre scolaire.

Cette catéchèse est une démarche d’instruction religieuse avec une pédagogie nouvelle.

Dès les années soixante, on remet en question la confessionnalité scolaire. Le Cardinal

Maurice Roy, archevêque du diocèse de Québec de 1947 à1981, demande au premier

ministre du Québec, dans une lettre du 29 août 1963, que l’on respecte les droits des

catholiques d’avoir leur école confessionnelle. Selon le prélat, l’aspect religieux ne doit être

seulement confiné dans un cours spécifique422. En plus de défendre la confessionnalité

intégrale de l’école publique, dans une allocution adressée à la province de Québec et après

sa nomination comme cardinal, Mgr Maurice Roy déclare qu’il est d’accord pour une saine

séparation de l’Église et de l’État, mais dénonce l’intransigeance des groupes qui proposent

une laïcisation radicale : « Mais seul le laïcisme sectaire demande à l’État d’ignorer toute

419 Robert J. Hurley, Hermeneutics and catechesis : biblical interpretation in the Come to the Father

catechetical series (Lanham, Md. : University Press of America, 1997), 264. 420 Idem, 235. 421 Jean-Paul Rouleau, « La production catéchétique en Amérique française (XVIIe-XXe siècles) Le

fonctionnement d'une institution les enjeux, les acteurs, les stratégies, » dans Une inconnue de l'histoire de la

culture : La production des catéchismes en Amérique française, dir. Raymond Brodeur et Jean-Paul Rouleau

(Sainte-Foy : Éditions Anne-Sigier, 1986), 423. 422 Église catholique. Assemblée épiscopale de la Province civile de Québec. et al., L'Enseignement

confessionnel : textes de l'épiscopat du Québec (Montréal : Fides, 1966), 7.

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religion au point de dresser des cloisons étanches et de gérer la pratique de la foi

religieuse »423.

Ces déclarations ne sont que l’illustration d’un débat qui durera jusqu’à l’an 2000. Après la

publication de la première édition de Viens vers le Père, il y a une révision des textes et

quelques modifications pour s’adapter aux réalités sociales et ecclésiales. Les enseignants

qui donnent la catéchèse sont des gens qui font leur travail comme des professionnels, mais

ne sont presque pas liés à la communauté paroissiale. Les acteurs absents, ce sont les

parents. Il y a eu des essais pour impliquer les parents avec les nouveaux manuels, mais les

résultats furent minimes. On se retrouve avec une catéchèse qui se scolarise et qui, avec les

changements sociaux, se détache de la paroisse; de plus, celle-ci perd sa crédibilité par le

mouvement de laïcisation qui se développe dans la société.

En 1983, plusieurs changements s’effectuent dans le système de l’éducation; ils ont des

répercussions importantes sur la catéchèse. Le gouvernement instaure un régime d’options

qui permet aux parents et aux jeunes de choisir entre l’enseignement moral ou

l’enseignement religieux. Dans la même année, il propose le projet de loi 40 :

Le gouvernement tente un nouvel effort pour répondre aux exigences de la

situation. Il inscrit le droit à l’enseignement religieux dans la loi, généralise le

système à options, maintient des services de pastorale confessionnels et la

possibilité pour l’école d’avoir un statut confessionnel424.

Plusieurs actions législatives sont élaborées afin de déconfessionnaliser les commissions

scolaires : les écoles peuvent demander d’obtenir le statut catholique ou protestant tout en

gardant le régime des options pour l’enseignement moral et religieux, la création d’un

service d’animation pastorale au primaire et le maintien de l’animation pastorale au

secondaire. Il y aura aussi l’adoption de la clause dérogatoire afin de permettre la

réalisation de ce projet. Dans la même période, les évêques du Québec publient deux

423 Idem, 10. 424 Secrétariat de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, L'école catholique au Québec :

Éphémérides 1964-2007, 7.

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documents : un sur l’enseignement religieux et l’autre sur l’initiation sacramentelle425. Le

premier changement est le développement de la distinction de l’enseignement religieux et

de la catéchèse à l’école. Les évêques, en 1984, précisent le contenu des cours

d’enseignement religieux pour chaque année. Par l’expérimentation de ces nouvelles

orientations, on découvre que les jeunes n’ont plus la culture nécessaire pour suivre le

contenu426.

Par ce changement, les évêques veulent confier aux paroisses et aux familles la préparation

des sacrements. Face à la difficulté de l’approfondissement de la foi à l’école, les évêques

comptent sur la paroisse et sur les parents. Ils désirent que celle-ci soit une communauté

vivante qui accueille les jeunes. Les évêques rappellent que les parents sont les premiers

éducateurs de la foi. Les évêques demandent aux parents de s’impliquer dans la préparation

aux sacrements, ce qu’ils n’ont pas fait depuis plusieurs générations. Ils les invitent à être

les initiateurs de la démarche et de la demande. Les parents développent beaucoup de

résistances préférant que tout se passe à l’école. Malgré cela, les évêques définissent ainsi

le rôle de la communauté :

La communauté chrétienne est le lieu véritable de l’initiation chrétienne. La

foi, tout comme la vie chrétienne s’apprend, se communique, se diffuse à

l’intérieur d’une communauté de croyants. La fonction catéchétique de l’Église

prend son appui dans une communauté vivante, dynamique et ouverte427.

La paroisse, se trouvant devant ces nouveaux défis, va interpeller et impliquer des

paroissiens sans qu’ils aient la formation nécessaire. Plusieurs de ces intervenants et

bénévoles donnent des catéchèses initiatiques sans formation et communiquent souvent une

théologie d’avant le Concile Vatican II. Devant cette réalité, et à cause d’un certain

amateurisme dans la pratique pastorale, plusieurs parents perdent confiance envers la

425 Assemblée des évêques du Québec, L'enseignement religieux catholique dans les écoles primaires et

secondaires du Québec : orientations pastorales (Montréal : L'Assemblée, 1984).

Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales. 426 Secrétariat de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, L'école catholique au Québec :

Éphémérides 1964-2007, 8. 427 Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales,9.

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paroisse et lui accordent peu de crédibilité. Plusieurs sont nostalgiques de la période où tout

se faisait à l’école.

Pendant cette même période, l’Église du Québec prend conscience de la nécessité de former

les adultes. L’expérience de Chantier a eu lieu de 1972 à 1984. Cette expérience nouvelle

va proposer un nouveau type de pédagogie qui demandera aux catéchistes d’être à la fois

des animateurs, des andragogues et des enseignants428. Cette façon de faire a un vif succès;

des milliers de petits groupes se forment sur tout le territoire du Québec. « Or, le bilan de

cette première audace est plutôt impressionnant : plus de 2 500 groupes se sont formés à

travers la province impliquant environ 36 000 participants déclarés »429. Mais ce projet est

vécu parfois en marge de la vie paroissiale, sans lien organique avec les structures internes

et traditionnelles et disparaît peu à peu parce qu’il n’est pas intégré au projet pastoral

paroissial, s’il y en a un.

L’enquête Risquer l’avenir sur l’avenir des paroisses remarque que la pratique de la

formation des adultes est peu présente dans celle-ci. La majorité des actions pastorales est

centrée sur la préparation sacramentelle des enfants. Ce surinvestissement auprès des

enfants a de grandes conséquences. Quatre sont identifiées : une foi sans parole, une

identité confuse, une habilité missionnaire réduite et un étouffement de la vie spirituelle430.

La pratique de la préparation sacramentelle devient une ritualisation de la vie sociale et

comme le dit Michel de Certeau, prêtre jésuite et philosophe, une folklorisation du croire :

« Voilà le fait massif : le christianisme objectif se folklorise, il se détache de la foi pour

appartenir à la culture et, dans une évolution générale, il fournit des symboles ou des

métaphores à certains secteurs en crise »431.

La catéchèse pour adulte n’a pas réussi à devenir une pratique dans les milieux paroissiaux.

Il y a une plus grande privatisation du croire, une distanciation et une critique grandissante

428 Office de catéchèse du Québec. et André Gaumond, Les nouveaux défis de l'éducation de la foi des adultes

au Québec (Montréal : Fides, 1988), 11. 429 Idem, 12. 430 Assemblée des évêques du Québec et dominicains., Risquer l'avenir : bilan d'enquête et prospectives, 38-

40. 431 Michel de Certeau et Jean Marie Domenach, Le christianisme éclaté (Paris : Seuil, 1974), 13.

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vis-à-vis de la participation des gens à la célébration eucharistique, pour plusieurs devenue

dépassée. C’est ainsi que dans les conclusions de l’enquête, on propose d’investir

davantage dans la formation chrétienne des adultes et dans la formation des agents de

pastorale afin qu’ils puissent accompagner les groupes. On affirme que le modèle pour

l’évangélisation doit s’inspirer du modèle catéchuménal432.

Les auteurs sont conscients du virage proposé. Ils proposent une formation des agents de

pastorale pour les aider à transformer les paroisses afin qu’elles puissent assurer la

croissance spirituelle des baptisés, la formation des croyants, spécialement des adultes,

l’évangélisation du milieu et la transformation de la culture433.

En 1994, le Comité épiscopal de l’éducation de l’Assemblée des évêques catholiques du

Québec produit un autre document : Options privilégiées en éducation de la foi des

adultes434. Le document propose un virage et même une conversion des diverses pratiques

pastorales. Il propose huit options afin de favoriser le développement de communautés

chrétiennes qui développent une éducation de la foi intégrale. Ce document n’a pas une

grande réception dans les milieux paroissiaux, il n’inspire pas les intervenants pastoraux et

les autorités à proposer de transformer les pratiques paroissiales dans l’Église. Le document

est tranquillement oublié et tabletté…

En 1999 paraît le rapport : « Laïcité et religions : Perspective nouvelle pour l’école

québécoise »435. L’accueil de ce document par le gouvernement du Québec aboutit à la

réalisation des recommandations du rapport qui propose la laïcisation complète du système

scolaire public au Québec. C’est la fin de l’animation pastorale catholique au primaire et au

secondaire. Un peu plus tard, en 2005, c’est le remplacement des cours de l’enseignement

religieux confessionnel par des cours d’enseignement culturel de la religion. Le modèle de

collaboration de la paroisse, de la famille et de l’école est terminé. C’est l’affirmation

432 Assemblée des évêques du Québec et dominicains., Risquer l'avenir : bilan d'enquête et prospectives, 169. 433 Ibid. 434 Comité épiscopal de l'éducation de l'Assemblée des évêques du Québec, Options privilégiées en éducation

de la foi des adultes (Montréal : Comité épiscopal de l'éducation de l'Assemblée des évêques du Québec,

1994). 435 Groupe de travail sur la place de la religion à l'école et al., Laïcité et religions : perspective nouvelle pour

l'école québécoise (Québec : Ministère de l'éducation, 1999).

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publique de la séparation complète de l’Église et de l’État et le signe véritable que l’Église

catholique au Québec n’a plus de prise institutionnelle et politique pour influencer les

écoles publiques primaires et secondaires.

On se retrouve avec une Église et des paroisses concentrées sur l’initiation sacramentelle

pour les enfants. Cette pratique est animée majoritairement par des agentes de pastorale.

Les prêtres sont peu présents ou absents de cette pratique. Les préparations sacramentelles

sont souvent marginalisées dans la vie paroissiale. Il y a peu de catéchistes et ils sont

formés pour la plupart « sur le tas ». Les formations données pour les agentes de pastorale

sont réalisées par les institutions universitaires avec la collaboration des diocèses. La

majorité des formations sont centrées sur l’initiation sacramentelle et n’incitent pas à

façonner des liens avec les projets pastoraux des paroisses. Les catéchistes sont des

bénévoles peu reconnus par les équipes de pastorale. Ils sont considérés comme des

auxiliaires utiles qui exécutent des tâches. Les paroissiens présents le dimanche sont mal à

l’aise avec les gens qui se présentent avec leur enfant pour la première communion. On se

retrouve avec une Église démunie. Heureusement, il y a eu quelques initiatives afin de

développer le catéchuménat qui prend forme dans quelques paroisses et diocèses. La

formation chrétienne des adultes a été utilisée comme un moyen de combler la nécessité de

recruter rapidement et former des agents de pastorale :

Ce bilan indique clairement qu’un déplacement s’est réalisé au cours de cette

période si bien que, depuis les années 1980, les objectifs poursuivis par les

activités sont de plus en plus orientés vers la préparation d’agents pastoraux et

la formation de chrétiens engagés dans l’Église436.

C’est la fin d’une époque. C’est pour l’Église « une grande défaite ». Le combat pour

garder sa présence dans le domaine de l’éducation publique a pris tellement d’énergie

qu’elle n’a pas pu suivre les besoins et les aspirations du Peuple de Dieu.

Finalement, on peut conclure que la paroisse n’est pas prête à ce virage qui lui est imposé

par la vie et les choix politiques de la société québécoise. Il n’y a pas ou très peu de

436 Routhier, Sacrée catéchèse ! Quand tu déranges familles et paroisses, 73-74.

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catéchistes bénévoles, seulement une poignée par paroisse qui aident les agents de

pastorale. Peu, ou très peu de prêtres sont impliqués dans la préparation aux sacrements,

cette tâche est perçue comme une tâche subalterne déléguée aux animateurs de pastorale.

On se retrouve devant une Église essoufflée qui a de la difficulté à reconnaître et à affronter

sa propre réalité. La catéchèse en paroisse est une activité parmi d’autres et est souvent

marginalisée; il en est de même pour ses différents acteurs et particulièrement les

catéchistes bénévoles.

3.4.3 La catéchèse confrontée à la laïcisation et à une

société sécularisée

Le défi à relever pour l’Église du Québec est important. Le dispositif de catéchèse qui

partageait les tâches entre la paroisse, la famille et l’école publique a été complètement

démantelé437. Tout est à refaire. Les évêques vivent au début du millénaire un autre échec,

celui de voir la disparition de l’enseignement religieux catholique. C’est le 15 juin 2005

qu’est approuvée la loi 95 à la première session de la Trente-septième législature au

Québec, qui transforme les cours d’enseignement religieux confessionnel en cours

d’éthique et de culture religieuse. La mise en application commence le 1er juillet 2008. Les

évêques commencent à préparer le terrain pour déplacer la catéchèse de l’école à la paroisse

dans la continuité de la première étape vécue en 1983. Trois documents majeurs orientent

les catholiques pour ce qui est de la catéchèse au début de ce millénaire : le premier,

Annoncer l’Évangile dans la culture actuelle; le second, Proposer aujourd’hui la foi aux

jeunes : une force pour vivre; le troisième, Jésus Christ : Chemin d’humanisation.

Le document Annoncer l’Évangile dans la culture actuelle marque un tournant dans la vie

de l’Église au Québec. L’objectif du document est de situer le ministère de la Parole dans le

contexte de la société québécoise actuelle. L’Église du Québec est consciente que la

religion ne constitue plus une référence importante pour l’identité des gens. Il y a même le

danger pour la population que le fait d’un État laïc inspire des gens à considérer la religion

comme une option : « En outre le fait que l’État, les institutions publiques et la culture ne se

437 Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales, 24-30.

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réfèrent plus à une religion peut signifier pour plusieurs que la religion est une option

facultative »438. Le défi pour les intervenants et les baptisés est de retrouver un langage

pour entrer en communication avec le monde contemporain : « Le miracle de la Pentecôte,

c’est que toutes les nations pouvaient entendre l’Évangile dans leur propre langue. C’est ce

défi qui est aujourd’hui en avant de nous »439. Les évêques invitent les intervenants à être

des ministres de la Parole : « Voilà donc la meilleure définition de notre ministère : rendre

témoignage à la Parole, le Verbe de vie et annoncer cette vie qui nous est apparue »440. Les

évêques poursuivent leur réflexion et arrivent à la conclusion que le ministre de la Parole ne

doit pas seulement enseigner, mais aussi utiliser d’autres formes de transmission de

connaissances qui sont l’apprentissage et l’initiation441. Si l’on transpose cela pour les

catéchistes et les formateurs de catéchistes, on peut indiquer qu’il est nécessaire de bien

connaître la culture. Les catéchistes sont appelés à entrer en conversation avec les

catéchisés et les accompagner dans leur apprentissage de la foi par différentes formes de

transmission : l’enseignement, l’apprentissage et l’initiation.

En nommant plusieurs aptitudes et compétences à développer, les évêques s’inscrivent dans

un modèle d’évangélisation qui se veut ecclésial, ouvert au monde, à la culture et en même

temps qui invite à un renouvellement de la culture par le levain évangélique :

• Mettre en récit son cheminement de foi et sa rencontre avec Jésus Christ

• Témoigner de sa foi

• Lire, partager et actualiser la Parole en communauté

• Découvrir son histoire, sa culture, l’histoire de l’Église locale et nommer sa

propre identité chrétienne

• Approfondir sa vie de prière

• Rendre compte intellectuellement de sa foi

• Développer une aptitude au dialogue

438 Assemblée des évêques du Québec., Annoncer l'Évangile dans la culture actuelle au Québec (Fides,

1999), 48. 439 Idem, 51. 440 Idem, 58. 441 Idem, 71.

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• Discerner les signes des temps442.

Les évêques proposent une diversification des lieux catéchétiques. Ils souhaitent une

catéchèse en lien avec la liturgie et des actions pour développer le partage et la justice

sociale. Ce document confirme le choix pour la formation chrétienne des adultes; on

s’inscrit dans une démarche de formation initiale et permanente. Les évêques reconnaissent

la nécessité d’une première évangélisation. Le déplacement majeur est celui de vivre le

passage de l’initiation sacramentelle à l’initiation chrétienne443. Ce document marque un

tournant pour l’Église du Québec. Il confirme la priorité pour la catéchèse des adultes dans

la formation à la vie chrétienne. Il indique la nécessité d’entrer en dialogue avec une

société, car l’écart entre la vie de la société et celle de l’Église s’est agrandi. Cependant, on

parle peu de la manière à utiliser pour arriver à développer ces compétences. Il ne propose

pas non plus un changement ecclésial pour vivre les objectifs mentionnés. Il est possible

que ce document ait le même sort que les autres, la mise en tablette.

Le deuxième document s’intitule Proposer aujourd’hui la foi aux jeunes : une force pour

vivre444. Ce texte propose plusieurs déplacements dans les diverses pratiques pastorales. Le

premier est selon l’expression « passer du fleuve à la source ». On ne peut plus compter sur

une société chrétienne qui propose un système d’apprentissage à la vie chrétienne dans

lequel l’individu s’insère. Le deuxième s’inscrit la même ligne, celle de passer du cours au

parcours. La foi ce n’est pas seulement connaître une doctrine, c’est vivre une expérience

qui touche tous les sens et qui fait appel à l’intelligence, à l’affectivité, aux émotions, au

corps. Le troisième est de passer de la paroisse « enclos » à la paroisse « réseau ». La

paroisse devient un relais pour l’Évangile, un lieu d’expérimentation de la vie chrétienne.

Le quatrième est de passer de l’initiation sacramentelle à l’initiation chrétienne. C’est le

passage de la pastorale de la demande à celle de la proposition445. Ce document propose un

renouvellement des pratiques d’initiation chrétienne, mais, en même temps, il montre la

difficulté de l’Église du Québec à transformer sa pratique actuelle où ce sont presque

442 Idem, 71-81. 443 Idem, 97. 444 Assemblée des évêques du Québec, Proposer aujourd'hui la foi aux jeunes : Une force pour vivre

(Montréal : Fides, 2000). 445 Idem, 46.

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exclusivement des intervenants pastoraux permanents qui animent les services de la

paroisse.

Le troisième document est : Jésus Christ chemin d’humanisation. Ce document veut donner

les grandes orientations pour la mise en œuvre de la mission catéchétique : « Cette

perspective inspire le présent texte qui veut être un document de référence donnant les

orientations qui guideront au cours des prochaines années les efforts de mise en œuvre de la

mission catéchétique »446. Le texte reprend la présentation de la société contenue dans le

document Annoncer l’Évangile dans la culture actuelle. Les évêques proposent le concept

de formation à la vie chrétienne pour parler du cheminement de foi des catéchumènes et des

baptisés à toutes les étapes de l’évangélisation et à tous les âges de la vie. Ils parlent de

formation intégrale :

C’est pourquoi elle (Assemblée des évêques du Québec) définit l’orientation

générale suivante pour la formation à la vie chrétienne au Québec pour les

années à venir : Ouvrir à la rencontre du Christ, voie d’humanisation intégrale

pour les personnes et pour le monde447.

La formation à la vie chrétienne a trois objectifs : le témoignage, l’engagement des

chrétiens dans l’Église et le monde et la communion fraternelle. Cette formation s’inspire

du modèle catéchuménal en faisant une place de choix aux adultes sans oublier les autres

âges de la vie. Cette formation aura pour but de conduire les personnes vers une foi adulte.

Le document Jésus Christ chemin d’humanisation rappelle que les parents sont les premiers

éducateurs de la foi pour leurs enfants : on privilégie une démarche intergénérationnelle où

parents et enfants pourront dialoguer sur la foi en lien avec la communauté chrétienne. La

paroisse est appelée à se transformer afin de devenir un lieu de vie agréable, stimulant et

nourrissant pour ceux qui veulent approfondir leur foi et vivre des démarches d’initiation

chrétienne448. La paroisse, comme les familles et les intervenants pastoraux, sont invités à

446 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation

à la vie chrétienne, 5. 447 Idem, 23. 448 Idem, 82-83. 84.

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faire un deuil des anciennes pratiques qui ne peuvent plus répondre à cette société en

mutation.

Ce document propose un tableau synthèse sur la catéchèse449. Dans un premier temps, ce

tableau présente les trois étapes du processus de l’évangélisation : la première annonce,

l’initiation chrétienne et la pastorale. Pour chacune de ces étapes, on identifie un type de

catéchèse : catéchèse d’éveil, catéchèse d’initiation et catéchèse permanente. Pour moi,

cette façon de faire peut prêter à confusion et faire perdre la richesse du processus

d’évangélisation qui est composé de trois pratiques différentes et originales avec des

objectifs et buts distincts450. Le danger pour des praticiens d’interpréter que tout devient

catéchèse est que l’on peut se mettre à la recherche d’une activité ou d’une pratique qui

pourra inclure toutes les étapes du processus d’évangélisation en même temps; cela est une

illusion.

Les évêques comparent les changements à vivre à un « grand dérangement » ce qui est peu

dire quand on connaît l’histoire de l’Acadie en 1755451. On connaît le modèle à quitter,

mais on ne connaît pas celui désiré. Il y a une conversion à vivre dans la vision de l’Église,

du monde et dans les pratiques ecclésiales. Le danger, c’est de vouloir revenir à l’ancien

sans faire l’expérience du nouveau. Aller vers un nouveau modèle demande plusieurs

dépouillements, essais, recommencements et un retour à la vie nomade. C’est dans cette

dynamique de réflexion continue que ma démarche doctorale s’inscrit.

3.4.4 Réflexions de quelques théologiens du Québec

Dans cette section, je présente les contributions de cinq théologiens du Québec qui

exposent leur appréciation de la situation actuelle en catéchèse et nomment quelques

perspectives.

449 Idem, 52-53. 450 DGC, 48-50. 451 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation

à la vie chrétienne, 96.

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3.4.4.1 Paul-André Giguère

Paul-André Giguère est théologien. Il a travaillé comme professeur à l’Institut de pastorale

du Collège universitaire dominicain à Montréal. Dans un article sur la formation des

animateurs en pastorale, il arrive à quelques conclusions qui montrent la difficulté d’avoir

des agents de pastorale suffisamment formés et la pauvreté de leur préparation en

catéchèse : « Ces derniers reçoivent une formation si minime qu’elle mérite à peine d’être

appelée formation. Souvent, elle se limite à apprendre à faire ou à dire ce qui est écrit dans

le livret de préparation »452. Pour les plus chanceux, ceux qui ont pu suivre une formation

pastorale et théologique, peu d’éléments sont présentés pour l’éducation de la foi,

l’initiation chrétienne et la catéchèse. Les agents de pastorale dans la majorité des cas

contribuent à une pastorale de maintien de ce qui est en place453. Il arrive à la conclusion

qu’à la fin des années 1990 on peut constater la pauvreté de la catéchèse qui s’adresse aux

adultes appelés à l’époque « éducation chrétienne de la foi aux adultes ».

Il propose un modèle d’intervention, pour le catéchiste, une pédagogie en trois temps :

l’exploration du savoir d’expérience; l’explication de la Parole de Dieu à partir du vécu du

catéchiste; l’appropriation. Il est essentiel de former les catéchistes à la méthode

andragogique et de laisser plus de place pour les catéchisés. On ne peut pas s’improviser

catéchiste : cela demande une préparation, une formation et le développement de plusieurs

compétences et attitudes. La communauté chrétienne a un rôle à jouer et son apport est

indispensable pour aider les catéchisés dans leur cheminement. Paul-André Giguère montre

la nécessité et l’obligation de l’interaction entre les catéchisés, les catéchistes et la

communauté pour arriver à former des adultes matures dans leur foi.

3.4.4.2 Normand Provencher

Normand Provencher est professeur émérite de la Faculté de théologie de l’Université

Saint-Paul à Ottawa. Il affirme que le rôle de la paroisse est d’assurer un lieu de proximité

et de fraternité. Elle a la capacité de mettre en relation des gens et des leviers financiers

452 Paul-André Giguère et Annie Laporte, « Entre le hasard et la nécessité : la formation des animateurs de

catéchèse au Québec, » dans Lumen Vitae LII (1997): 69-70. 453 Ibid.

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pour réaliser des projets pastoraux454. Elle doit éveiller des personnes responsables qui

aideront leurs pairs à croire en leurs ressources et leurs capacités. Il privilégie les rapports

de réciprocité entre les personnes, et plus spécialement pour les personnes qui exercent

l’autorité. Normand Provencher note qu’il y a eu peu de créativité dans les paroisses pour

l’émergence de nouveaux ministères du fait que l’on se soit trop ancré dans une dynamique

de remplacement des prêtres qui sont moins nombreux; cette attitude est stérilisante : « Les

ministères laïcs actuels se situent trop souvent dans une logique de remplacement et dans

une perspective de substitut. Les laïcs sont dans une situation où ils ne peuvent pas explorer

la possibilité de ministères vraiment nouveaux »455.

Toute organisation qui ne suit pas la vie devient désuète et peut mourir. L’Église n’échappe

pas à cette dynamique. On peut se poser cette question : « La difficulté de reconnaître les

catéchistes et la possibilité d’un ministère pour eux au Québec n’est-elle pas

symptomatique d’un deuil qui n’est pas fait et du manque d’audace d’une Église qui se

replie davantage plus sur elle-même plus qu’elle n’avance au large ? »

3.4.4.3 Jean-Marc Charron et Suzanne Desrochers

Jean-Marc Charron est professeur titulaire à la Faculté de théologie et de sciences

religieuses de l’Université de Montréal. Dans son article, La transmission de la foi au

Québec, il présente l’expérience de la catéchèse dans l’Église du Québec au cours des

quarante dernières années456. Il mentionne comment l’an 2000, avec la promulgation de la

loi 118, a complètement changé la donne pour la catéchèse. L’Église du Québec avait

donné sa responsabilité de la formation chrétienne à l’État par l’entremise du réseau

scolaire. Actuellement, l’Église du Québec qui est essoufflée se retrouve avec le défi de

reprendre la catéchèse en main sans y être préparée. Cependant, les communautés

chrétiennes sont dans un état lamentable et il se demande si elles pourront relever le défi. Il

souligne aussi que le contentieux entre les médias et l’Église accentue les difficultés. Le

défi est de se réapproprier une expertise en catéchèse et, sans changement profond dans la

454 Normand Provencher, « Vers la paroisse responsable et évangélisatrice, » Idem LIX (2004): 61. 455 Idem, 67. 456 Charron, « La transmission de la foi au Québec... à l'heure des reconfigurations scolaires, sociales et

ecclésiales, ».

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vie ecclésiale, on ne peut espérer relever le défi. Dans un autre article, réalisé en

collaboration avec Suzanne Desrochers lors d’un colloque tenu en 2004, il analyse les

premières pratiques qui émergent après la laïcisation des écoles.457 Suzanne Desrochers est

adjointe au directeur de l’Office de catéchèse du Québec. Ils soulignent tous les deux que

dans les paroisses, la majorité des activités catéchétiques sont organisées pour les

enfants458. Les auteurs remarquent que le deuil de l’ancien système ne s’est pas concrétisé.

On note les difficultés organisationnelles comme le manque de soutien institutionnel, de

personnel, de formation, de locaux et de matériel. Les premiers essais se butent à des

résistances aux changements autant à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’Église. On ne peut pas

penser à de vrais changements tant que les nouvelles pratiques catéchétiques ne sont pas

insérées dans un projet d’ensemble pour la paroisse et le diocèse.

3.4.4.4 Gilles Routhier

À partir de l’an deux mille, Gilles Routhier écrit plusieurs articles sur la catéchèse et la vie

paroissiale. Son option est de changer les paramètres de la catéchèse avec la nouvelle

culture qui s’élabore dans le nouveau cadre social actuel. Dans son article, L’initiation

chrétienne au Québec ou de la difficulté d’enfanter, Gilles Routhier propose une rupture

avec le modèle précédent et le passage à un modèle de catéchèse qui initie à la foi et qui

s’inscrit dans la durée, rythmé par des rites et des célébrations liturgiques459. Dans l’article

Reprendre la route… Un projet catéchétique pour un temps d’exode, il rappelle la nécessité

de faire le deuil de la chrétienté, de se mettre en dialogue avec la culture460. Pour lui, toute

démarche initiatique doit prendre modèle sur le catéchuménat. Il s’agit d’opérer le passage

de l’école à l’Église ou de passer du modèle scolaire à un parcours initiatique de la foi. Ce

passage demande de former les intervenants : « la formation chrétienne doit d’abord

favoriser une bonne connaissance de ce cadre avant de proposer des « prêts-à-porter » ou

457 Jean-Marc Charron et Suzanne Desrochers, Des pratiques catéchétiques en émergence (Saint-Laurent,

Québec : Éditions FPR, 2007). 458 Idem, 26. 459 Gilles Routhier, « L'initiation chrétienne au Québec : ou de la difficulté d'enfanter, » dans L'Église

canadienne 34 (2001). 460 Gilles Routhier, « Reprendre la route... Un projet catéchétique pour un temps d'exode, » dans Esprit & Vie

112, Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales.

Assemblée des évêques du Québec., L'initiation sacramentelle des enfants : orientations pastorales.no 68

(2002).

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des recettes qui s’avéreront toujours trop courtes et insuffisantes »461. Son commentaire sur

les parents est éclairant. Il note que l’on ne peut penser la catéchèse sans les inclure :

En somme, il s’agit de faire aujourd’hui ce que nous ne sommes pas parvenus à

réaliser au moment du Mouvement catéchétique des années 1960 : qualifier les

parents comme véritables acteurs dans ce domaine, plutôt que de disqualifier

leurs interventions, si bien qu’ils ont fini par se réfugier dans un rôle de

consommateur passif462.

Les catéchistes ne peuvent pas s’improviser et jouer le rôle des exécutants de manuel

didactique. Dans son livre sur Le devenir de la catéchèse, Gilles Routhier rappelle que c’est

la Parole de Dieu qui édifie la paroisse463. Le défi de la mission catéchétique, c’est

d’accepter notre responsabilité comme Église. On ne doit rien attendre de l’État ou d’une

autre institution. L’Église doit s’autonomiser dans sa tâche première, celle de faire des

disciples. La catéchèse demande une démarche ecclésiale, préparée, organisée et insérée au

cœur de la communauté : « La désorganisation, l’amateurisme et l’improvisation sont et

demeurent les ennemis d’une relance crédible du renouveau catéchétique dans notre

Église »464. Gilles Routhier reprend cette expression employée par de nombreux

théologiens : la paroisse est une communauté catéchisante et catéchisée465.

Dans l’article Nouvelles paroisses chances ou impasses, un des éléments neufs dans sa

réflexion, c’est que la paroisse ne peut pas tout faire et que la catéchèse peut se vivre

ailleurs. Mais il ajoute que l’une des chances de la paroisse, c’est qu’elle est là pour

accueillir et être au service de tous. La paroisse a comme mission de créer des lieux où la

Parole pourra être partagée et échangée. La paroisse doit mettre en lien la vie ecclésiale

avec la culture. Dans la dynamique du renouvellement de l’annonce de l’Évangile, Gilles

Routhier indique qu’il y a une priorité pour la première annonce. La catéchèse ne peut

461 Ibid. 462 Idem, 14. 463 Gilles Routhier, Le devenir de la catéchèse (Montréal : Médiaspaul, 2003). 464 Idem, 79. 465 Alphonse Borras, « Nouvelles paroisses et nouvelle catéchèse : comment la catéchèse peut-elle soutenir le

redéploiement paroissial?, » dans Lumen Vitae LVIII, no 4 (2003).

Luc Aerens, Catéchèse de cheminement : pédagogie pastorale pour mener la transition en paroisse

(Bruxelles : Lumen vitae, 2002).

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reposer que sur une première adhésion de foi qui approfondit le don de Dieu, sinon elle a

des chances de devenir de l’enseignement culturel de la religion. Il mentionne la nécessité

d’impliquer la famille. La catéchèse construit l’Église et le croyant par l’échange et le

partage de la Parole de Dieu. Par son actualisation, elle institue et elle crée des disciples466.

La relation catéchétique devient plus qu’une relation de fraternité. Le catéchiste est celui

qui fait résonner la Parole, il est intermédiaire entre le catéchisé et le peuple de Dieu, celui

qui insère dans la communauté, celui qui indique un chemin possible pour rencontrer Dieu.

La relation est asymétrique, car le catéchiste est le guide, celui qui est déjà initié, mais la

relation est basée sur une égale dignité, car tous sont également aimés de Dieu. Cette

pédagogie se vit par étape. D’abord, il y a la reconnaissance de l’autre comme sujet qui est

accueilli avec ce qu’il est, ses motifs, ses intentions, son désir467. Ensuite, c’est l’accueil des

questions du catéchisé par le catéchiste qui partage sa découverte de la foi à partir de

l’Évangile. Par la suite, c’est le début d’une conversation entre le catéchisé et le catéchiste,

c’est l’étape de l’approfondissement de la Parole de Dieu ensemble à partir des différents

points de vue et de la relecture de la Tradition de l’Église. Cette recherche commune

permettra d’arriver à la dernière étape qui sera une nouvelle interprétation de la Parole de

Dieu. La démarche catéchétique devient une démarche herméneutique, un lieu

d’inculturation de la foi. Les catéchisés et les catéchistes deviennent ensemble selon leur

rôle respectif et spécifique des chercheurs de Dieu468. Cet auteur arrive à la conclusion que

ce qui est important dans la relation catéchétique est de développer une relation qui permet

de s’ouvrir à la transcendance par la conversation. Il indique qu’il est essentiel d’intégrer la

catéchèse à la communauté, car celle-ci est une pratique instituante.

Dans son ensemble, l’Église du Québec a vécu au même diapason que l’Église universelle.

Il y a un deuil à vivre, celui de quitter le modèle de chrétienté acquise afin de découvrir

qu’il y a d’autres manières aussi prometteuses d’approfondir la foi. Il y a convergence pour

présenter le catéchiste comme un témoin, lié à la communauté chrétienne et engagé dans le

monde au nom de sa foi. Voici comment on conçoit le catéchiste : le catéchiste est une

personne capable de travailler en équipe. Il est un guide, il connaît et il a déjà expérimenté

466 Routhier, Sacrée catéchèse ! Quand tu déranges familles et paroisses, 82. 467 Idem, 87-88. 468 Idem, 90.

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le chemin qu’il fait découvrir aux autres. Il crée une ambiance, des espaces afin de faire

résonner la Parole de Dieu; il fait le lien entre le catéchisé et la communauté. Dans les

communautés chrétiennes, il y a souvent une grande force d’inertie qui empêche, ralentit ou

bloque les transformations. Tout est en place du point de vue des grandes orientations afin

de renouveler les pratiques catéchétiques en paroisse.

Je note ici que la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila se retrouve dans une situation où elle

veut tenter une transformation, mais elle n’a pas tous les outils pour le faire. Également, il y

a des résistances à entrer dans la réalisation des orientations des évêques du Québec.

3.5 L’évolution dans le diocèse de Saint-Jérôme

À partir de l’an 2000, le diocèse de Saint-Jérôme a produit deux documents. Un premier

document Une grâce pour notre Église : Envoi en mission catéchétique se veut un

encouragement à redécouvrir l’initiation chrétienne dans la nouvelle réalité sociale et

ecclésiale du diocèse de Saint-Jérôme à la suite de la loi 118469. Il vise une promotion de

l’initiation chrétienne qui est une étape du processus de l’évangélisation. Mgr Gilles

Cazabon souhaite qu’elle se vive ensemble avec les familles, les paroisses, les autres

communautés chrétiennes : « C’est grâce à l’effort conjugué de tous ces partenaires sous la

mouvance de l’Esprit que l’Église diocésaine répond encore aujourd’hui à sa mission de

faire surgir d’authentiques disciples de Jésus en des lieux et des temps nouveaux »470. Il

nomme cinq passages à vivre : passer du faire à l’être, passer d’une catéchèse centrée sur

l’enseignement à une catéchèse initiatique, passer d’une catéchèse comme pratique isolée à

une catéchèse qui s’inclut dans le processus de l’évangélisation, passer d’une catéchèse

conformiste à une catéchèse diversifiée selon le besoin des gens. Mgr Gilles Cazabon

souhaite que ce tournant puisse amener un renouvellement des pratiques pastorales.

469 Cazabon, Une grâce pour notre Église : Envoi en mission catéchétique. 470 Idem, 4-5.

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201

Le deuxième document, Semer l’Évangile dans le champ du monde, formule les priorités et

les orientations pour la formation à la vie chrétienne dans le diocèse de Saint-Jérôme471. Il y

a trois priorités : favoriser le cheminement de la foi des adultes, devenir des communautés

chrétiennes interpellantes, initier à la foi chrétienne les enfants et les adultes. Le document

reprend les orientations du document Jésus Christ chemin d’humanisation dans lequel on

indique l’importance de la formation des intervenants en pastorale et des bénévoles, mais il

n’y a pas de proposition concrète si ce n’est celle-ci :

Interpeller et former des bénévoles pour intervenir auprès des adultes. La mise

en œuvre de cette priorité ne peut reposer sur une seule personne pour chaque

parcours, il faudra interpeller et offrir une formation pertinente aux catéchètes

et aux personnes collaboratrices. La formation à un parcours précis ne pose pas

trop de problèmes, les maisons d’édition offrent habituellement ce service. La

formation générale est plus difficile et aura intérêt à se vivre en concertation

avec les autres paroisses et avec le diocèse472.

On peut lire que le programme général de formation n’est pas établi. Ce qui m’inquiète et

m’interpelle, est qu’on laisse la formation pour les parcours à des maisons d’édition. On se

retrouve en situation de conflit d’intérêts et un danger est que la maison d’édition soit plus

préoccupée par la vente de ses livres que de l’intérêt des destinataires. Le document

encourage peu les démarches intergénérationnelles et il est très centré sur la préparation des

sacrements. La finalité de plusieurs priorités est davantage sur la réception des sacrements

que sur la formation des disciples. La formation à la vie chrétienne est aussi vue dans une

dynamique plutôt scolaire que dans une démarche initiatique et ouverte au dialogue. Ce

document est un premier pas, car il redonne à la communauté et aux baptisés la

responsabilité de la formation à la vie chrétienne : « Dans les paroisses, la formation à la

vie chrétienne est la responsabilité du pasteur, de l’équipe pastorale et des catéchètes, mais

elle est aussi celle de l’ensemble des membres de la communauté paroissiale »473. Ce

document pose des questions pour la réalisation de la mise en place de ses orientations.

471 Gilles Cazabon et Diocèse de Saint-Jérôme, Semer l'Évangile dans le champ du monde (Saint-Jérôme :

Diocèse de Saint-Jérôme, 2004). 472 Idem 473 Idem, 29.

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202

3.6 Conclusion du chapitre

Après ce tour d’horizon dans l’histoire et la présentation de quelques expériences qui se

vivent dans différents pays, je présente maintenant une synthèse et le lien avec la question

de recherche. Je rappelle l’hypothèse de recherche : « Un des rôles de l’équipe pastorale

paroissiale est celui d’animer le service de catéchèse. C’est à l’équipe pastorale que revient

le rôle d’interpeller, de former et d’accompagner les catéchètes bénévoles dans la vie

paroissiale. L’équipe pastorale a aussi pour but de faciliter la participation des personnes

catéchisées aux diverses activités de la vie paroissiale par l’animation du service de

catéchèse ».

Ce que l’on peut noter, c’est qu’au cours de l’histoire la catéchèse a pris plusieurs formes,

et les principaux acteurs n’étaient pas toujours les mêmes. Au début de l’Église, il y a eu

l’élaboration du catéchuménat; au Moyen Âge, la catéchèse se vit par osmose avec une

société chrétienne; à l’ère des catéchismes, c’est l’insistance sur le catéchisme et la

connaissance; le renouveau catéchétique met la priorité sur la formation globale de

l’individu en lien avec la communauté. Nous pouvons dire que la catéchèse se développe

lorsqu’il y a des interactions entre les différents acteurs et la communauté chrétienne

célébrante. La catéchèse conserve sa pertinence si elle réussit à articuler sa mission de

former des disciples, le développement des communautés chrétiennes et à répondre aux

aspirations culturelles de son époque.

Nous entrons dans une nouvelle civilisation et les rapports sont transformés. Les

diagnostics sont nombreux et convergents. La crise de la catéchèse n’est pas seulement liée

à une question de parcours. Elle est plus profonde. C’est une crise générale pour toute

l’Église. Le défi est de créer un nouveau christianisme dans une nouvelle culture. On ne

peut penser à une pratique catéchétique qui sera liée à la seule connaissance, à une

expérience forte dans un dialogue entre le catéchisé et le catéchumène. Les pistes qui

surgissent sont de l’ordre d’un changement systémique qui s’inspire du christianisme des

origines. La recherche est tenue de dépasser les évaluations techniques pour approfondir

des questions telles : Quelles pourraient être les possibilités pour sortir de la crise et vivre

une catéchèse qui dépasse le modèle hérité du monde scolaire ainsi que les résistances du

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milieu, spécialement celles des évêques, des prêtres, des diacres permanents, des religieux

et religieuses, des agentes et agents de pastorale, des catéchistes, des parents, des jeunes,

des enfants et des paroissiens du dimanche? L’écoute et l’analyse des propositions des

différents acteurs sont une nécessité avec le souhait que l’on puisse arriver à des pistes

désignant les pratiques possibles d’une catéchèse adaptée pour la paroisse québécoise

contemporaine et qui permet aux différents acteurs de la paroisse de se catéchiser et de

catéchiser ceux qui demandent de vivre l’initiation chrétienne.

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204

Chapitre 4 : L’analyse des données recueillies

Au chapitre précédent, le regard porté sur les enjeux contemporains de la catéchèse dans

plusieurs régions du monde permet de dégager un diagnostic presque commun : le modèle

tridentin de catéchèse ne convient plus à la culture actuelle, les connaissances ne suffisent

plus à nourrir la foi des catéchisés. Depuis les années 1950, les courants catéchétiques ont

permis de redécouvrir l’importance du kérygme, de l’expérience humaine, de la liturgie, du

partage autour de la parole de Dieu et de la vie communautaire. J’ai pu observer que l’on ne

peut confier la catéchèse seulement à des spécialistes, même si leurs pratiques sont

exceptionnelles. Car l’action des spécialistes ne suffit pas pour rendre crédible la catéchèse.

Les catéchisés ont besoin de voir, d’entendre et d’expérimenter que les différents acteurs,

soient les catéchistes, les prêtres, la paroisse, les paroissiens, les parrains, les marraines, les

parents et les amis, vivent une pratique catéchétique concertée et complémentaire afin de

découvrir l’action de Dieu dans leur vie et dans la communauté chrétienne. J’ai pu constater

une similitude avec ma pratique : l’importance de la formation en catéchèse pour tous les

acteurs en commençant par les prêtres, les agentes de pastorale, les catéchistes, les aides

catéchistes, les paroissiens et les membres de la famille qui accompagnent les catéchisés.

Les résistances à vivre un nouveau dispositif catéchétique sont le fruit d’un manque de

formation générale et spécifique en catéchèse de la part des acteurs de la catéchèse. C’est

avec ces acquis que je poursuis la recherche.

Dans ce chapitre, je présente comment s’est formée l’équipe de recherche-action. Je décris

son cheminement, sa réflexion, ses interventions et son analyse de la pratique. Par la suite,

je partirai des conclusions de l’équipe de recherche-action afin de réaliser une deuxième

analyse de l’ensemble de la cueillette de données.

4.1 Formation de l’équipe de recherche-action

L’équipe de recherche-action est composée de cinq personnes : le prêtre modérateur, le

prêtre collaborateur, une agente de pastorale et deux catéchistes bénévoles. Une des deux

catéchistes a été coordonnatrice de paroisse et l’autre a œuvré dans l’enseignement.

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205

4.1.1 Cheminement de l’équipe de recherche-action

L’équipe de recherche-action s’est réunie à neuf reprises du 4 mai 2007 au 29 novembre

2007.

Tableau 20 : Calendrier des rencontres

Projet de recherche Réalisation Date

Étape préalable

Préparation du protocole de recherche,

demande d’autorisation auprès du Comité

d’éthique pour la recherche, document des

participants à la recherche-action.

De l’automne 2006

au printemps 2007.

Étape 1 –

Réflexion initiale

1- Réflexion initiale 4 mai 2007

Étape 2 –

Précision du problème et

de son contexte

2- Précision du problème première partie 18 mai 2007

3- Précision du problème deuxième

partie

25 mai 2007

Étape 3 –

Planification de l’action

4- Planification de l’action 1er juin 2007

Étape 4 –

Action et observation

5- Intervention : rencontre avec les

catéchistes

12 juin 2007

6- Évaluation de la rencontre avec les

catéchistes

15 juin 2007

7- Intervention : rencontre avec les

parents qui ont suivi les parcours

catéchétiques

19 juin 2007

Étape 5 –

Évaluation et prise de

décision

8- Évaluation de la démarche de la

recherche-action

22 juin 2007

9- Première analyse commune par

l’équipe de recherche-action

29 novembre 2007

Dès la première rencontre, j’ai présenté ce qu’est une recherche-action à l’équipe

rassemblée en remettant un document intitulé : « Document de présentation du projet

présenté aux participants de la recherche-action »474. Après la présentation des enjeux de la

recherche, les participants se sont engagés en signant le Formulaire de consentement et de

confidentialité475. J’ai remis plusieurs articles sur les défis et les enjeux de la catéchèse, et

fait parvenir à chacun des membres le Directoire général pour la catéchèse de 1997

474 Annexe 2. 475 Annexe 4, Annexe 5.

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206

« DGC »476. Lors de la deuxième et troisième rencontre, les membres de l’équipe de

recherche-action ont rejeté l’hypothèse qui avait été présentée au point de départ et ils en

ont proposé une autre.

Pour l’équipe de chercheurs, voici les acteurs dans la catéchèse en paroisse : les

prêtres, agents de pastorale, bénévoles, catéchètes, parents, enfants, la

communauté chrétienne. Voici la question : Quels sont les rôles, les attitudes

nécessaires, le type de relations souhaitées entre les acteurs, les motivations

essentielles, le savoir-faire, les qualités de foi indispensables pour que les

parcours de catéchèse puissent aider les gens à découvrir, approfondir et

témoigner de leur foi?

Avec un élément complémentaire : comment faire pour que tous puissent

cheminer ensemble et soient ouverts à des changements dans leur vie

personnelle, dans la vie de la communauté? »

Deuxième question : Comment faire pour qu’à partir des parcours

catéchétiques et des éléments retenus lors de la première rencontre, nous

puissions vivre le passage d’une pastorale de consommation à une pastorale

d’enfantement et d’accompagnement477?

Afin de vérifier l’hypothèse, lors de la quatrième rencontre, l’équipe de recherche-action a

prévu réaliser deux interventions : une auprès des catéchistes et une autre avec les parents

qui avaient participé aux rencontres de catéchèse intergénérationnelle. La cinquième

rencontre a été l’occasion de rassembler des catéchistes et de dialoguer avec eux à partir de

l’hypothèse de travail. C’est à la sixième rencontre que l’équipe de recherche a réalisé le

bilan de cette intervention. La septième rencontre fut l’occasion d’échanger avec des

parents et la huitième d’en effectuer également le bilan. C’est à la neuvième rencontre que

s’est réalisée l’évaluation de la démarche de recherche-action et l’élaboration d’une

première synthèse.

476 Annexe 2, pages 478-479. 477 Les références pour les verbatims et les rapports de la recherche-action sont compilés dans un document

numérique. Ce document numérique est sur une clé USB qui est disponible au secrétariat de la faculté de

théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval. L’abréviation qui sera utilisé pour faire référence à

ce document sera Clé USB 1 suivi du numéro de page. Pour cette note c’est : Clé USB 1, 139.

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207

4.1.2 Description de la première intervention

La première intervention a été une rencontre avec les catéchistes bénévoles. Sur les vingt-

et-un catéchistes et aide-catéchistes de la paroisse, huit se sont présentés. Plusieurs ont

témoigné qu’ils se sont sentis écoutés et choyés de participer à une telle réunion : « Pour

ma part, moi je me suis sentie très bien, bien enrichie, oui »478 [...] « Moi j’ai un souhait :

c’est que ça ne soit pas la dernière rencontre que l’on fait faire comme ça »479. Nous avions

trois objectifs pour cette rencontre :

• Vérifier auprès des catéchistes bénévoles actuels, s’ils ont des besoins de

formation et si oui lesquels.

• Si les catéchistes bénévoles ont des besoins de formation : qu’est-ce que

l’on doit trouver dans cette formation pour répondre aux besoins des

catéchistes?

• Quel est le rôle de l’équipe pastorale paroissiale dans le processus de la

formation des catéchistes bénévoles480?

Pour atteindre ces objectifs, l’équipe de recherche-action a utilisé deux instruments : un

questionnaire et un document qui présentait cinq compétences catéchétiques à partir d’un

article d’André Fossion481. Le questionnaire était composé de quatre questions :

- Qu’est-ce qui vous a amené ou motivé à être catéchiste? Nommez deux ou

trois motivations…

- Quels besoins avez-vous pour vous outiller davantage à votre rôle de

catéchiste?

- À partir du texte et de la grille de Monsieur André Fossion, quelles sont vos

réactions vis-à-vis de votre travail comme catéchiste bénévole?

- Qu’est-ce que vous attendez de l’équipe pastorale paroissiale dans la

formation des catéchistes bénévoles482?

478 Clé USB 1, 471. 479 Clé USB 1, 472. 480 Clé USB 1, 341. 481 Fossion, La compétence catéchétique ([cité le); accessible à. 482 Clé USB 1, 355.

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208

4.1.3 Description de la deuxième intervention

La deuxième intervention comprenait de rencontrer les parents qui avaient participé aux

parcours catéchétiques avec leurs enfants. Les objectifs de cette activité étaient de :

• Nommer quels sont les intérêts des parents dans les parcours catéchétiques.

• Faire l’inventaire des compétences que les parents ont et qui pourraient être mises

à profit lors des parcours catéchétiques483.

Pour arriver à réaliser ces objectifs, l’équipe de recherche avait préparé un questionnaire.

Les questions suivantes ont été utilisées lors de l’intervention :

- Qu’est-ce qui a suscité votre intérêt dans les parcours catéchétiques?

- Quels sont les atouts, les talents, les expériences, les charismes que vous avez

qui pourraient être mis au service de la mission catéchétique?

- Qu’est-ce qui pourrait vous aider à vous impliquer davantage dans les parcours

catéchétiques?

- Qu’est-ce que vous attendez des catéchètes bénévoles dans les parcours

catéchétiques?

- Qu’est-ce que vous attendez de l’équipe pastorale paroissiale, c’est-à-dire des

agentes et agents de pastorale, des prêtres de la paroisse484?

L’équipe de recherche-action a invité plusieurs dizaines de parents en ayant comme objectif

de rassembler environ dix parents485. Lors de la rencontre, sept parents et trois enfants se

sont présentés à la rencontre. Voici comment les parents ont manifesté leur appréciation de

la rencontre :

• C’est stimulant.

• Je découvre que je ne suis pas seul.

483 Clé USB 1, 342. 484 Clé USB 1, 356. 485 Clé USB 1, 516.

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209

• Plus on parle de la foi, plus on échange et cela aide même dans ma vie

professionnelle comme les affaires économiques.

• Je trouve fantastique de nous rencontrer parents, prêtres et de discuter ensemble

et vivre un projet commun.

• Je trouve agréable de savoir que ma parole est importante et cela peut influencer

la paroisse.

• J’ai été surpris de l’appel, merci de nous avoir invités, de nous écouter486.

Cette rencontre s’est transformée en une expérience ecclésiale et un lieu de témoignage

pour chacun. Dans les prochaines sections, je décris les apports de l’équipe de recherche-

action, des catéchistes et des parents pour cette recherche.

4.1.4 Première analyse par l’équipe de recherche-action

Suite à la relecture des comptes rendus des réunions de l’équipe de recherche-action, j’’ai

procédé à une première analyse ainsi qu’à une première théorisation487 Dans le tableau qui

suit, la première colonne montre la première ébauche de cette théorisation réalisée le

27 octobre 2007. La colonne du 27 novembre 2007 a été ajoutée après avoir consulté un

spécialiste en catéchèse, M. Raymond Brodeur, professeur à l’Université Laval, qui m’a

suggéré de résumer les découvertes en des mots clefs. Le document a été présenté le

29 novembre 2007 à l’équipe de recherche-action qui m’a demandé d’ajouter quelques

éléments puis l’a validé. Les éléments supplémentaires sont inscrits en caractère rouge.

Tableau 21 : Première analyse validée par le groupe de

recherche-action

Repères 25 Octobre 2007 27 novembre 2007

1er

Finalité La finalité de la catéchèse, c’est la formation de

disciples. Les catéchistes ont comme mission de

former des personnes capables de témoigner de leur

foi. Les membres de l’équipe pastorale ont à former

Formation de disciples

-vs- formation de témoins

486 Clé USB 1, 636. 487 Paillé et Mucchielli, L'analyse qualitative en sciences humaines et sociales, 161.

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210

des catéchistes qui formeront des disciples capables

de témoigner de Jésus Christ mort et ressuscité en

Église.

2e

Priorité Déplacement des priorités de la paroisse : Passage

d’une paroisse centrée sur la gérance financière et

sur la préparation à célébrer les sacrements à une

paroisse dont le cœur est l’action catéchétique.

Changement de modèle

paroissial : Passage d’une

pastorale de service à une

pastorale d’engendrement

3e

Acteurs Les enfants, les parents, les bénévoles, les

catéchistes, les agents de pastorale, les prêtres et la

communauté célébrante sont tous des acteurs

essentiels de la mission catéchétique.

L’inscription dans une démarche

catéchétique comme signe d’un

processus de construction

identitaire

4e Attitudes :

Interpellation

identitaire

Processus de

croissance

La démarche d’inscription des familles dans les

parcours catéchétiques est la décision d’adhérer à

un cheminement de transmission et

d’approfondissement de la foi chrétienne

catholique et aussi des valeurs humanistes. Ce

processus permet de vivre une démarche identitaire

personnelle, familiale et chrétienne.

L’inscription dans une démarche

catéchétique comme signe d’un

processus de construction

identitaire. Les gens arrivent

avec un langage que l’on doit

connaître.

5e

Pasteur-animateur Le rôle du prêtre dans la mission catéchétique

Le prêtre est aussi disciple.

Il est aussi en processus de croissance.

Changement de perspective :

d’un prêtre distributeur et gérant

à un prêtre guide, animateur et

initiateur de la foi

6e

Espace-temps de

la catéchèse

La catéchèse comme espace de prise de parole par

les différents acteurs devient un lieu de théologie et

d’élaboration d’un discours inculturé de la foi.

La catéchèse devient espace

d’écoute, de prise de parole et

outil pour élaborer un discours

inculturé de la foi.

7e

Ecclésialité de la

catéchèse

Église

communion

La reconnaissance des catéchistes bénévoles et leur

réception dans la communauté chrétienne sont le

signe de la mise en œuvre de la reconnaissance du

sacerdoce baptismal.

Reconnaissance des catéchistes

comme signe de la réception du

concept théologique du

sacerdoce baptismal

8e

Décloisonnement Faire découvrir, ouvrir, déléguer, savoir

transmettre, reconnaître la parole des baptisés,

reconnaître l’action de l’Esprit-Saint par tous les

acteurs.

Passer d’une communauté

exclusive à une communauté

inclusive.

Formation entre les divers

groupes

Faire place aux autres, éviter le

cléricalisme à tous les niveaux.

9e

Spiritualité du

manque et de la

miséricorde

Le droit de dire, se donner droit à la Parole, se faire

confiance, le droit à l’erreur.

Dans les pages qui suivent, je présente une première synthèse que j’ai validée avec le

groupe de recherche-action, lors de la rencontre du 29 novembre 2007. Cette première

synthèse comprend des repères pour transformer la pratique afin que la catéchèse puisse

former des disciples témoin de Jésus Christ. Ces repères sont le fruit de la démarche de

l’équipe de la recherche-action.

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211

4.1.4.1 La formation de disciples et de témoins

La catéchèse a pour finalité la formation de disciples. Au terme de la formation

catéchétique, les catéchisés peuvent à leur tour témoigner de leur foi.

4.1.4.2 Changement de modèle paroissial

L’équipe de recherche-action a pu diagnostiquer que le modèle paroissial actuel ne

convenait plus. Il était basé sur une offre de services et provoquait même un

désengagement progressif de ses membres. Cette pratique paroissiale banalisait les actes

religieux en les réduisant, influencée par la culture ambiante, à un bien de consommation.

Pour les membres de l’équipe de recherche-action, il était important de ne pas centrer

uniquement les efforts des paroisses sur la gestion financière et la préparation aux

sacrements. L’équipe a nommé un passage à vivre : d’une pastorale de services à une

pastorale d’engendrement avec une catéchèse initiatique au cœur de la paroisse.

4.1.4.3 Tous acteurs en catéchèse

Le troisième point identifié, la pastorale catéchétique dans la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila, était un service parallèle aux autres services et l’affaire de quelques agentes de

pastorale et de catéchistes bénévoles. L’équipe de recherche-action a proposé que la

catéchèse soit l’affaire de tous. Les enfants, les parents, les catéchistes, les agentes de

pastorale, les prêtres, la communauté célébrante sont tous des acteurs essentiels de la

catéchèse au sein de la vie paroissiale.

4.1.4.4 L’inscription, signe d’un processus de construction

identitaire

La laïcisation des écoles a eu plusieurs répercussions sur la vie des paroissiens.

L’inscription des familles à la catéchèse provoque, pour plusieurs familles, la décision

d’adhérer à un cheminement d’approfondissement de la foi chrétienne. Les personnes sont

à la recherche de leur propre identité chrétienne et la catéchèse devient le moyen de

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212

participer à un processus de construction identitaire chrétien. Les familles qui s’inscrivent

ne le réalisent pas seulement dans une perspective de demande de rituels, mais bien dans

une dynamique de foi. Cette réalité interpelle les intervenants pastoraux qui identifient trop

rapidement le désir des familles à une seule demande de rituel. Cette demande des parents

est complexe. Elle s’inscrit dans une démarche libre et profonde. Plusieurs veulent

s’inscrire dans la grande tradition catholique reçue par leurs ancêtres. Il y a une démarche

identitaire qui est à la fois une recherche spirituelle et une confirmation de plusieurs valeurs

partagées à la fois par l’Église catholique et leurs propres valeurs personnelles et familiales.

4.1.4.5 Le prêtre acteur en catéchèse et disciple du Christ

Le premier rôle identifié par l’équipe de recherche-action pour le prêtre, est d’être un

disciple du Christ en cheminement. Le prêtre dans ce contexte est surtout un distributeur de

sacrements et un gérant. Face à la crise actuelle, dont les symptômes sont la diminution de

la participation des baptisés à la vie paroissiale, combinée aux diminutions des ressources

financières, le prêtre est souvent plus préoccupé à gérer la décroissance du modèle

paroissial. Le prêtre doit se concentrer sur son rôle de guide, animateur et initiateur de la

foi. C’est un passage à vivre du prêtre fonctionnaire du sacré au prêtre initiateur et pasteur.

4.1.4.6 La catéchèse un lieu d’échange, de partage et de

conversion

La connaissance des divers langages de ceux qui s’inscrivent à la catéchèse est importante

afin d’entrer dans une dynamique d’écoute des paroles des gens et de la Parole de Dieu.

L’échange autour de la Parole de Dieu, par les différents acteurs, devient un lieu

théologique et un cadre possible de la production d’un discours inculturé de la foi. Par cet

échange, la catéchèse, fécondée par la Parole de Dieu et la culture actuelle, devient un

endroit privilégié de conversion. C’est un lieu pour approfondir la foi et découvrir le vrai

visage du Christ.

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213

4.1.4.7 Un lieu de promotion du sacerdoce baptismal et de

l’ecclésiologie de communion

Le ministère du catéchiste découle des sacrements de l’initiation chrétienne et de la

vocation prophétique des baptisés. La réception de sacerdoce baptismal par la communauté

permet de vivre le passage d’une Église qui est centrée exclusivement sur deux ministères,

celui du presbytérat et celui de l’agent de pastoral, à une ecclésiologie de communion

permettant l’éclosion de nouveaux ministères. Les catéchistes par leur vocation propre

revitalisent la communauté chrétienne. Ils deviennent des herméneutes de la Parole de Dieu

pour aujourd’hui.

4.1.4.8 Décloisonnement : passage d’une paroisse exclusive à

une paroisse inclusive

L’équipe de recherche avait noté que plusieurs agents pastoraux et des bénévoles avaient

une attitude cléricale qui empêchait l’insertion de nouvelles personnes dans la paroisse.

C’est pour cette raison qu’elle a proposé un changement d’attitude, qui consistait à ne pas

voir l’autre comme une menace potentielle, mais plutôt comme une personne qui peut être

animée par l’action de l’Esprit Saint. Par leurs rôles, les prêtres, les agents pastoraux, et les

catéchistes sont appelés à reconnaître l’action de l’Esprit Saint dans tous les acteurs de la

catéchèse. C’est le passage d’une paroisse exclusive à une paroisse inclusive et accueillante

à l’étranger.

4.1.4.9 Spiritualité du manque et de la miséricorde

Dans la pratique actuelle, l’équipe de recherche-action a découvert que le manque perçu

dans les différentes pratiques est vue comme une faiblesse, un échec. Dans l’expression du

manque pour l’organisation de la catéchèse, l’équipe de recherche-action a vu dans ce

manque une opportunité de créer un espace pour confectionner du neuf, permettant la

possibilité d’avoir de nouvelles initiatives. C’est un rappel de plusieurs textes bibliques qui

a suscité cette réflexion. On pense à l’épisode de la manne au désert (Ex 16-17), la

multiplication des pains Mt 14, 14- 21; 15, 32-38; Mc 6, 34-44; 8, 1-9; Lc 9, 12-17; Jn 6, 5-

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214

14. C’est souvent à l’occasion de l’expression de manques que Dieu intervient d’une

manière nouvelle. Le cheminement spirituel ne nous invite pas à être parfaits, car seul Dieu

est parfait. Vivre une spiritualité du manque et de la miséricorde, c’est reconnaître que je

suis un être humain qui est limité. C’est reconnaître que Dieu m’aime sans limites.

J’accepte que j’aie besoin de Dieu, de la communauté chrétienne et des autres afin de

cheminer dans la foi.

4.1.4.10 Conclusion de la première analyse

Le climat des rencontres de l’équipe de recherche-action était très convivial et serein. C’est

une démarche qui a permis de vivre une expérience des quatre aspects de toute recherche-

action soit une recherche collective, une action commune, une formation par les échanges,

les dialogues, les lectures et une transformation des acteurs de cette expérience collective.

Rose*** Il faudrait que chaque paroisse, chaque année, fasse quelque chose

comme ça, comme cette recherche-action, ça nous permettrait de savoir, de

répondre aux besoins de la communauté, de répondre aux besoins de

l’évangélisation que l’on veuille faire alors, c’est un point de départ. Sûr, pour

moi je ressors de là, je ressors là avec une des choses auxquelles je dois faire

attention488.

Plusieurs ont senti la présence de l’action de l’Esprit-Saint tout au long des délibérations489.

L’équipe de recherche-action a transformé l’hypothèse de départ, elle a réalisé deux

interventions afin de vérifier ses intuitions. Elle a participé à une première analyse en

identifiant plusieurs concepts pour arriver à suggérer un nouveau mode de vie en paroisse

afin de développer la catéchèse au cœur de la mission de l’Église. C’est à partir de ces

matériaux que je poursuis la recherche.

Ces premières conclusions sont à être validées par le travail que j’effectue dans la deuxième

section de ce chapitre. Je poursuis la recherche par une analyse qualitative où je vais

pouvoir infirmer, confirmer ou transformer la première théorisation afin d’élaborer un

matériel qui pourra me servir pour la corrélation.

488 Clé USB 1, 724. 489 Clé USB 1, 732-733.

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215

4.2 Une deuxième analyse par le chercheur

Je poursuis par l’analyse qualitative de la cueillette des données la recherche. Cette analyse

va me permettre d’approfondir la première analyse et de préparer le matériel pour la

prochaine étape qui sera la corrélation que j’exécute au chapitre 5.

4.2.1 Les unités de sens

Après cette première analyse, j’ai fait « épochè » des premiers résultats490. J’ai choisi de

faire une analyse par catégorisation. Il s’agit d’une méthode inductive qui demande une

démarche préalable, soit celle de diviser tous les verbatims des neuf rencontres en unités de

sens. Cela a permis d’identifier 2 941 unités de sens. J’ai utilisé le logiciel QDA Miner

conçu par la compagnie Provalis Research qui a été fondée en 1989 à Montréal par

Normand Péladeau. Cette société se spécialise dans les instruments d’analyse de texte pour

aider les chercheurs qui utilisent des méthodes d’analyse qualitatives et quantitatives.

4.2.2 Les catégories

Les unités de sens ont été regroupées dans différentes catégories. Pour chaque catégorie,

j’ai fait une description afin d’expliquer le phénomène qu’elle représente. Il peut s’agir de

la description d’un acteur, d’une idée, ou de la description d’un fait isolé491. Suite à cette

description des phénomènes, j’ai commencé la deuxième analyse.

4.2.3 Les éléments retenus ou discriminés

Après avoir fait la description des catégories, quelques éléments ont été exclus de l’analyse.

Par exemple, « animation des rencontres » a été mise de côté. Cette catégorie décrit le

travail du chercheur, qui est l’animateur, suivant le protocole de recherche. La catégorie

490 Renaud Barbaras et Jean Greisch, « Phénoménologie, » dans Encyclopedia Universalis

(http://www.universalis.fr/encyclopedie/phenomenologie/#: 25 juillet 2016). 491 Clé USB 1, 784-827

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216

« faits divers » regroupe des événements qui sont liés aux lieux des rencontres et ne sont

pas en lien avec le sujet de la recherche.

Tableau 22 : Les catégories discriminées

Catégorie Nombre d’unités de sens

Animation des rencontres 300

Faits divers 12

Identification des cassettes 34

Total 346

346 unités de sens sur 2 941 Pourcentage des unités de sens mises de côté : 11 %

4.3 Description du milieu à partir de la recherche-action

La deuxième analyse est centrée sur la découverte des caractéristiques de la pratique

étudiée, en nommant les catégories puis en effectuant des liens entre elles. Ce maillage a

permis d’identifier des concepts et des propositions pour confirmer, infirmer ou transformer

l’hypothèse de l’équipe de recherche-action. Plusieurs citations sont utilisées afin d’illustrer

mon propos. Puisque j’ai décidé d’être le plus près possible du langage utilisé, les textes

peuvent parfois sembler lourds. Il est difficile de recopier un discours; dans les dialogues et

à plusieurs reprises, les gens utilisent des expressions, contractent les mots, s’expriment

également par du langage non verbal. J’ai tenté d’être le plus fidèle possible aux différents

discours souhaitant respecter le plus possible les paroles des chercheurs.

4.3.1 Une paroisse en crise, à la croisée des chemins

Les premiers constats que je viens de présenter sur la pratique par les travaux de l’équipe de

recherche-action, ont confirmé presque en totalité le diagnostic de l’enquête Risquer

l’avenir492. L’enquête de Risquer l’Avenir a été réalisée entre 1989 à 1992, et la recherche-

action en 2007, représentant un écart de 25 années entre les deux recherches. La recherche-

action que j’ai réalisée avec l’équipe dans une paroisse confirme ce qui a été démontré par

l’opération Risquer l’Avenir. Je présente d’abord un tableau synthèse des conclusions de

492 Assemblée des évêques du Québec et dominicains, Risquer l'avenir : bilan d'enquête et prospectives.

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217

Risquer l’Avenir et, à partir de la première analyse, j’identifie quelques éléments qui

ressortent de la présente recherche.

Tableau 23 : Diagnostic de l’enquête : Risquer l’avenir493

Les faiblesses des communautés Les forces des communautés

Une identité chrétienne confuse Les laïcs engagés

Une relation craintive avec les distants Les laïcs pastoralement formés

Les tensions dans la gestion des ressources Le leadership des diocèses

L’autonomie des paroisses et des autorités

diocésaines

Les programmes d’animation pastorale

La coresponsabilité contredite

L’Église n’a plus un rôle de premier plan. Elle est passée de l’avant-scène à l’aube de la

Révolution tranquille à l’arrière-scène durant la dernière partie du vingtième siècle, pour se

retrouver dans les coulisses à l’aube du nouveau millénaire. La paroisse s’est concentrée sur

la préparation aux sacrements, ce qui a eu pour effet que les gens de l’interne et de l’externe

voient celle-ci comme un supermarché du religieux : « Violette*** Comme on le disait

l’autre fois, c’est un supermarché : dans le fond, j’ai besoin, je vais le chercher »494. À cette

situation s’ajoute une problématique financière majeure due à la baisse de fréquentation des

églises. L’ensemble de la population trouve archaïque le message de l’Église :

Violette*** Mais moi je veux parler de… je vais commencer par le contexte

économique. L’Église vit une crise économique à cause de la communauté

désertée et non intéressée par plusieurs paroissiens. Euh… Dans son contexte

historique le chrétien non pratiquant s’est imperméabilisé de l’histoire : soit

qu’il l’ignore, soit qu’il ne voit pas où cela va le mener. Dieu est sûrement

existant quelque part, et pour l’Église, il n’y voit pas… il n’y croit pas à sa

mission principale d’évangéliser, de conduire le chrétien à l’union à Dieu par le

Christ, ce n’est pas sa priorité495.

493 Assemblée épiscopale de la Province de Québec et al., Voies d'avenir : résumé de la recherche, 16-18. 494 Clé USB 1, 119. 495 Clé USB 1, 75.

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218

Cette attitude a développé chez plusieurs le syndrome du « catholique honteux »496.

Souvent le catholique vit un sentiment de honte face à l’Église. Il pense que l’Église est

responsable des problèmes actuels. C’est un des éléments communs qu’a identifié l’équipe

de recherche-action tel que noté dans le procès-verbal du 1er juin 2007 :

• Pour les gens nous ne sommes pas crédibles.

• Il faut dépasser l’idée d’un catholicisme honteux.

• La question de la honte et de la culpabilité est incontournable, il faut aller

plus loin497.

Des paroisses ont été regroupées, la pratique pastorale de l’encadrement, héritée avant le

Concile Vatican II, se perpétue avec la différence que le territoire est plus grand. L’Église

est un élément de honte pour plusieurs personnes et celles-ci veulent s’en dissocier. Sans la

perte de ce sentiment, toute initiative pastorale peut s’avérer un coup d’épée dans l’eau :

Marguerite*** « Pas de relance de l’initiation chrétienne sans dépassement du

catholicisme honteux ». Les gens ont honte. Il y a une honte chez les

catholiques498.

En plus, la foi n’est plus vue, pour plusieurs, comme une démarche collective qui a sa

pertinence sur la place publique. L’équipe de recherche-action confirme les propos de

Normand Provencher dans son article sur la place de l’action de la paroisse dans la vie

publique :

Elle implique une pastorale de l’envoi au monde, envoi au cœur et aussi aux

franges de la société, dans les divers milieux de vie, dans les lieux d’orientation

et de décision de l’économie et du politique, dans les milieux des pauvres et

des sans-voix, pour y rendre neuve toute l’humanité499.

496 Gilles Routhier, « L'initiation chrétienne au Québec : ou de la difficulté d'enfanter, ». 497 Clé USB 1, 240. 498 Clé USB 1, 210. 499 Normand Provencher, « Vers la paroisse responsable et évangélisatrice » : 61-63.

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219

Cette perception négative de l’Église, cette honte, indique aussi un analphabétisme de la foi

chez de nombreux chrétiens. Les paroissiens connaissent seulement quelques éléments du

contenu et des pratiques de leur propre foi :

Lys*** Qui peut désirer ressembler à une personne comme celle-là qui a honte

d’elle-même? Ce n’est pas attrayant ça, pas du tout.

Violette*** C’est quasiment comme un illettré.

Lys*** Bien oui!

Violette*** Un illettré, un illettré n’ira pas parler avec quelqu’un d’habitude

qui sait qu’il a plus de compétence que lui, il va rester en retrait, bien si c’est

illettré dans l’Évangile, c’est la même chose, il ne peut pas y avoir de

communication, premièrement, c’est, il faut la connaissance pour

commencer500.

La formation très limitée des paroissiens est un problème sérieux et aussi une des sources

des difficultés de l’Église à se renouveler. L’équipe pastorale se retrouve avec un travail

important sans avoir tous les outils et toutes les ressources qu’elle pourrait souhaiter afin

d’assumer un leadership de transformation. Chaque animateur porte son dossier

individuellement et s’occupe de ses bénévoles :

C’est là que l’équipe pastorale, elle est aussi, peut-être fermée. On est centré

sur nos dossiers et on reste avec nos dossiers. On est un peu comme l’équipe de

la messe de cinq heures (les bénévoles) qui connaissent leurs affaires et tout ça,

mais qu’on ne laisse pas de la place pour les autres d’entrer avec nous autres.

On n’a pas, peut-être aussi, l’équipe pastorale à vraiment nettoyer nos façons

de faire puis d’être plus ouvert à… ce que l’on disait501.

Préoccupé par son travail, chaque animateur est centré sur la tâche à réaliser. L’équipe

pastorale fonctionne dans une dynamique d’offre et de demande des services religieux. Les

presbytères se sont transformés en bureaux pour recevoir les demandes. Les heures de

bureau sont fixes et les membres de l’équipe sont peu disponibles hors de ces heures :

500 Clé USB 1, 211. 501 Clé USB 1, 90.

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220

Blé*** C’était plus le modèle, le modèle traditionnel aussi ça peut être le curé

autant qu’une équipe pastorale qui décide tout. C’est dans le sens que c’est le

modèle hiérarchique, sans que ce soit négatif-là. C’est une façon de faire.

Marguerite*** Oui, oui, oui, oui, absolument502.

Ce modèle de fonctionnement vécu dans la paroisse est cloisonné et fermé sur lui-même, on

se berce souvent dans un esprit de nostalgie d’un passé idéalisé qui n’a jamais vraiment

existé. Il existe une tension entre les besoins financiers et les projets pastoraux :

Violette*** Puis là, si on mettait autant d’efforts dans la pastorale que l’on en

met dans le fonds, dans le financement, je sais qu’il est important le

financement, on en a parlé, on a dit que si le financement est difficile, c’est

parce que les gens sont absents, alors les énergies doivent être concentrées sur

la pastorale, l’évangélisation, le contact des personnes, l’intérêt à l’autre

autrement, dit former une communauté, former la communauté, il faut se

connaître pour former une communauté503.

L’équipe pastorale travaille souvent en vase clos en faisant appel à ses propres forces pour

toute l’animation : « La mission ne peut reposer sur les épaules d’une seule personne ou de

l’équipe pastorale, elle est la responsabilité de tous »504. Le cléricalisme n’est pas une

exclusivité des prêtres, la maladie a atteint malheureusement aussi des agents de pastorale

et plusieurs paroissiens :

Blé*** Dans le décloisonnement, il y a la question d’un cléricalisme qui n’est

pas le fait juste de prêtres, mais qui…

Rose*** Entre les laïcs, aussi, entre eux autres aussi des fois et qui se mettent

un peu des barrières aux autres, comme si c’était un peu un cercle fermé.

Violette*** Ça, c’est quelque chose, ce n’est pas partout là.

Blé*** À tous les niveaux là505.

502 Clé USB 1, 689. 503 Clé USB 1, 177. 504 Clé USB 1, 136. 505 Clé USB 1, 756-757.

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221

Cette attitude cléricale n’est pas présente chez tous les individus, mais plusieurs membres

de l’équipe pastorale, plusieurs bénévoles et paroissiens l’ont développée. La

communication ne passe pas toujours et il y a souvent des incompréhensions :

Marguerite*** Il y a un court-circuit.

Rose*** Il y a un court-circuit.

Blé*** Il y a un court-circuit entre…

Rose*** Il y a entre…

Marguerite*** Entre la communauté…

Rose*** Et…

Blé*** Et…

Marguerite*** Et les parcours catéchétiques.

Rose*** Les parcours catéchétiques…

Blé*** Et les parents et les enfants.

Marguerite*** Oui!

Rose*** Oui! C’est ça506.

Alors, on peut affirmer que l’implantation des parcours suscite en soi une crise du modèle

existant et il n’est pas assuré que cela soit irréversible. Voici comment l’équipe de

recherche exprimait son opinion dans le procès-verbal du 18 mai 2007 :

Nous arrivons à la conclusion que la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est

arrivée maintenant à une croisée de chemins. Nous arrivons à un point de non-

retour; ou bien on revient à une pastorale de consommation ou bien on passe à

une pastorale d’enfantement et d’accompagnement507.

Cette implantation vient souligner que le modèle de pastorale centré sur les services conduit

à l’impasse et au désagrégement de la communauté paroissiale petit à petit. Pour sortir de

l’impasse, cela demande d’opter pour un autre modèle. S’il n’y a pas ce travail de

506 Clé USB 1, 117. 507 Clé USB 1, 136.

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222

formation, l’implantation conduit à des conflits qui peuvent mener à l’abandon des parcours

catéchétiques sous le prétexte que la paroisse n’a pas les ressources pour l’animer, mais la

raison profonde est une résistance aux changements et le refus d’un changement du modèle

paroissial.

Mettre en application les politiques de l’Église comme la formation à la vie chrétienne,

provoque un changement profond dans les différentes pratiques d’évangélisation surtout

pour la catéchèse. Ces nouvelles pratiques demandent un investissement en temps plus

grand pour les gens qui veulent être catéchisés, par conséquent, les paroissiens peuvent voir

ces exigences comme déraisonnables et les interpréter comme une récupération

institutionnelle.

4.3.2 Les premiers fruits de l’implantation des parcours

intergénérationnels

L’implantation des parcours n’a pas seulement apporté des résistances, elle a aussi apporté

une nouvelle pratique catéchétique. La catéchèse intergénérationnelle s’est implantée dans

la paroisse à la suite d’une réflexion de l’équipe pastorale. Elle est la réception du concept

de parcours dans le document : Proposer aujourd’hui la foi aux jeunes508. Je rappelle ici la

notion du parcours telle que présentée dans ce texte :

Le mot « parcours » met de l’avant l’idée de l’apprentissage de la vérité. Il fait

place à la personne, à son autonomie, à son cheminement. Il fait passer d’une

vérité apprise à une vérité expérimentée509.

Lors de l’implantation des parcours, la paroisse a demandé à ce qu’un adulte significatif

accompagne les enfants pour la catéchèse. C’est ainsi que l’on a pu voir soit le père, la

mère, un grand-père, un grand frère ou une grande sœur accompagner les jeunes. Dans

plusieurs cas, les enfants étaient accompagnés de quatre parents, soit les parents et les

beaux-parents, qui sont venus à tour de rôle. Au début, le premier défi a été d’accueillir

508 Assemblée des évêques du Québec, Proposer aujourd'hui la foi aux jeunes : Une force pour vivre. 509 Idem, 18-19.

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l’agressivité des parents face à la nouvelle réalité des parcours. C’est un défi d’expliquer les

changements survenus dans la société, dans le monde scolaire et les conséquences que cela

apporte. Cette situation a permis l’émergence d’une nouvelle pratique pour

l’approfondissement de la foi de tous ceux qui veulent connaître, vivre et approfondir le

message de Jésus.

Le deuxième défi a été d’impliquer les parents afin qu’ils ne soient pas seulement des

observateurs passifs. Les catéchèses ont dû être modifiées pour intéresser les parents. Les

catéchistes se sont aperçus de l’importance du témoignage qui montrait aux parents que la

foi pouvait se vivre dans la vie quotidienne :

Blé*** C’est le « fun » dans le sens que ce que vous êtes en train de dire, c’est

qu’un des enjeux majeurs, c’est le contact des parents par les catéchètes qui

témoignent de leur vie chrétienne.

Rose*** Oui.

Violette*** À travers aussi de ce que l’on est, des gens au quotidien, qui ont

des difficultés et…

Marguerite*** Autant chez nous.

Blé*** Au quotidien, là.

Violette*** Absolument...510.

Le témoignage donne une valeur à la catéchèse et permet d’illustrer la pertinence de

l’expérience chrétienne dans le monde d’aujourd’hui. En plus, l’implication des parents a

une grande répercussion, voici comment s’exprimait l’un d’eux :

• L’enfant a besoin de voir l’implication de ses parents. Le fait de participer

aux jeux, aux sketchs, est très important.

• Pour les parents, c’est important d’être là.

• La catéchèse, c’est un moment privilégié pour la relation parent-enfant511.

510 Clé USB 1, 27. 511 Clé USB 1, 631.

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224

En plus de développer une meilleure relation parent-enfant, la découverte de l’existence

d’autres familles chrétiennes catholiques qui vivent et approfondissent leur foi atteste le

sérieux du témoignage de leurs parents :

Lotier*** On n’a plus bien le choix, je devrais dire on dirait que l’on se dirige

vers l’Église, pas faire bande à part. Alors, pour moi aussi, c’était

d’accompagner mon fils à huit ans, c’est très différent de dire, d’appuyer mon

fils, mais que je dois d’être là, mais aussi des fois, je suis avec lui parce que je

sais vivre des ateliers enfants, parents-enfants, je dirais ça que c’est

extraordinaire512.

Plusieurs parents étaient heureux de participer à toutes les activités avec les enfants, et

d’autres parents étaient heureux de rencontrer un catéchiste qui répondait à leurs questions

et approfondissait divers thèmes avec eux durant une rencontre d’une trentaine de minutes :

Blé*** Les deux pédagogies que l’on disait, qui convenaient : la pédagogie où

les parents et les enfants veulent absolument être ensemble, parce que bon; « la

sortie de gars » OK. Vraiment, la vraie expression ou, ou des gens qui disent

bien nous on n’a besoin de se retrouver entre adultes ou entre enfants pour

quelquefois faire un échange. Ça confirme ces deux pédagogies.513

On a aussi remarqué que pour les enfants qui ont plus de douze ans, l’importance d’avoir

du temps où ils se retrouvent entre eux pour discuter sans les adultes est nécessaire. La

multiplicité des activités permet aussi de quitter le modèle scolaire pour expérimenter un

autre mode d’apprentissage. Par les activités, les enfants et les parents s’extériorisent et

approfondissent d’une nouvelle manière le message évangélique :

Azalée*** C’était, c’était pas plat, mais des fois faut aller enfants-parents puis,

c’est pas pareil, là c’est vraiment intéressant.

Blé*** OK, c’est intéressant le visuel, les jeux, les figurines sont des éléments

qui sont intéressants autant pour les enfants que pour les adultes, c’est

« cute »…

512 Clé USB 1, 571-572. 513 Clé USB 1, 762.

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225

Lotier*** C’est ce que j’ai vécu, c’est Rose qui animait cette soirée-là. C’était

une pièce de théâtre, où les enfants et les parents se ramassaient en équipe pour

bâtir…514.

Ces expériences permettent d’ouvrir des espaces de discussions, et les parents ont insisté

pour avoir du temps afin d’échanger sur la Parole de Dieu et les thèmes abordés entre leurs

enfants et eux : « Antennaire*** Les gens l’ont dit, quand on a plus approfondi les textes,

les gens avaient aimé ça »515.

Cette appropriation de la Parole de Dieu a eu des répercussions nouvelles. Plusieurs enfants

ont été capables de témoigner de leur foi devant d’autres, ou se sont sentis à l’aise de

dialoguer avec des gens d’autres religions :

Rose*** Le parcours lui a permis d’écouter les autres et aussi de partager avec

des jeunes des autres religions. La religion a encore sa place, les parcours

catéchétiques permettent aux enfants de mieux connaître leur identité

chrétienne et de s’ouvrir au dialogue516.

Les parcours apportent une autre dynamique à la paroisse. On a vu que les parcours

intergénérationnels changent la dynamique paroissiale qui était habituée à préparer les gens

seulement aux sacrements. Ce cheminement avec les catéchisés crée des espaces de

discussions, d’approfondissement de la foi. Ces rencontres suscitent des nouveaux besoins

chez les parents et les catéchisés. Ils réclament, à juste titre, une place dans la paroisse.

Cette nouvelle pratique permet d’approfondir la foi en famille. Par le biais de la paroisse,

ils découvrent qu’il existe un réseau de familles qui veulent approfondir la foi. Cette

pratique interpelle la paroisse à transformer sa manière de vivre afin de répondre aux

nouveaux besoins d’une évangélisation dans un contexte inédit.

514 Clé USB 1, 580-581. 515 Clé USB 1, 611. 516 Clé USB 1, 646.

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226

4.4 Des rôles à spécifier

La recherche-action a permis d’identifier que seulement les tâches de l’équipe pastorale

étaient clairement définies. Les employés de soutien rémunérés avaient des tâches définies

dans leur contrat de travail, alors que les catéchistes, les bénévoles et les autres acteurs de la

catéchèse n’avaient pas de tâches définies.

4.4.1 Importance de spécifier les rôles de chacun en

catéchèse

Au point de départ, l’équipe de recherche-action a identifié quatre acteurs : le prêtre, les

agents de pastorale, le catéchète et un binôme parents-enfants. Rapidement, dans nos

échanges, nous avons vu comment cette vision était partielle. La première modification a

été d’ajouter deux autres acteurs sur notre liste. Le premier acteur était la communauté

chrétienne paroissiale, le deuxième était de distinguer les parents des enfants, c’est-à-dire

de considérer l’enfant comme un acteur à part entière. Ce premier travail a permis une

remise en question de l’hypothèse de départ, afin de spécifier que l’on ne peut parler de la

formation des catéchistes dans la paroisse si on considère cette activité comme autonome et

sans lien avec la communauté et tous les acteurs de la catéchèse.

4.4.2 Des textes de références pour l’équipe de recherche-

action

Cette réflexion a été alimentée par plusieurs textes de spécialistes en pastorale, en catéchèse

et en ecclésiologie. (Voir annexe 2, listes des textes)517. Ces lectures ont été un apport pour

la formation des membres de l’équipe de recherche-action. Une des premières conclusions

de l’équipe : l’ensemble des théologiens de ce groupe fait un bon diagnostic de la situation

actuelle qui est complexe, il n’y a pas de solutions prêts-à-porter. Au moins neuf idées et/ou

concepts ont été retenus par l’ensemble de l’équipe.

Une idée d’André Fosssion :

517 Annexe 2.

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227

• La responsabilité de la catéchèse incombe à toute la communauté518.

Deux idées de Normand Provencher :

• La coresponsabilité vécue à l’intérieur de l’équipe pastorale

• La coresponsabilité s’exerce à tous les paliers d’une Église locale519.

Trois idées retenues d’un article de Flavio Pajer :

• Créer un espace de communication entre les divers membres de la communauté,

• chaque acteur dans la catéchèse est un apport pour la communauté.

• L’importance de l’accueil et la nécessité d’accompagner ces gens qui ont des

parcours très complexes, interrompus, blessés520.

Deux idées de Gilles Routhier :

• L’importance de cheminer en communauté.

• Vivre le passage d’une pastorale d’encadrement à une pastorale d’engendrement521.

Une idée de Robert Comte :

• Les besoins du milieu suscitent une opportunité pour une formation à la paroisse522.

518 André Fossion, « Vers des communautés catéchisées et catéchisantes, ». 519 Normand Provencher, « Vers la paroisse responsable et évangélisatrice, ». 520 Flavio Pajer, « Une catéchèse où la communauté dans son ensemble est à la fois catéchisante et

catéchisée, ». 521 Gilles Routhier, « L'initiation chrétienne au Québec : ou de la difficulté d'enfanter, ». 522 Robert Comte, « La formation d'adultes en responsabilité ecclésiale, » Lumen Vitae LII (1997).

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228

4.5 Cheminement de l’hypothèse de départ

L’implantation des parcours interpelle toute l’équipe de la recherche-action : qui sont les

acteurs et les ministres de la catéchèse en paroisse? L’équipe rejette le modèle paroissial

actuel de l’offre et de la demande des services religieux animés par quelques-uns, et opte

pour le modèle paroissial où tous sont acteurs. Dans un premier temps, elle a identifié les

acteurs en proposant cette liste : les prêtres, les agents de pastorale, les catéchistes, les

parents, les enfants et la communauté chrétienne. Mais un peu plus tard, elle a ajouté un

autre acteur : les bénévoles. Le défi est de susciter la participation de tous et l’accueil

mutuel.

Marguerite*** Plus qu’accueillante, participante.

Blé*** Participante?

Rose*** Oui!

Blé*** C’est ça. On… on… Dans le sens que l’on va plus loin, ce n’est pas

juste l’accueil.

Rose*** C’est plus que l’accueil.

Marguerite*** Tu sais on parle d’urgence en Église là, bien l’urgence a va

peut-être dans ce sens-là aussi là.

Blé*** C’est plus que l’accueil.

Marguerite*** Oui!

Blé*** Il y a un enjeu de participation.

Violette*** Chaque personne doit se sentir interpellée523.

Le fait de passer du rôle de consommateur à participant change la perspective. Ce

changement de perception oblige la paroisse à se décloisonner, car les bénévoles et les

catéchistes ont souvent senti qu’ils étaient là pour boucher les trous. Ils n’étaient pas des

acteurs, mais des figurants, des exécutants :

Blé*** Autrement dit, il y a une tellement grande spécialisation. Il y a un petit

groupe qui s’est accaparé les postes liturgiques de bénévoles et puis, il n’y a

plus de place pour que d’autres puissent entrer et…524.

523 Clé USB 1, 104-105.

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229

Cette difficulté réelle dans l’organisation de la paroisse a permis de pousser plus loin la

réflexion en disant que les acteurs devraient être des partenaires. Cette réflexion permet à

l’équipe de recherche-action de nommer les compétences des parents et des catéchistes. Le

terme des compétences a été utilisé de même que celui de potentialités. Dans cette

perspective, la paroisse et l’équipe pastorale ont comme objectif d’identifier les

potentialités et d’être des catalyseurs pour qu’elles puissent identifier les talents chez les

parents, les catéchistes, etc. :

Violette*** OK, c’est ça.

Blé*** Chez les catéchètes et chez les parents quelles sont leur potentialité? Et

finalement, c’est cette potentialité qui va nous permettre que nos enjeux

majeurs, que l’équipe doit, l’équipe pastorale doit reconnaître et mettre en

valeur pour le développement de la catéchèse de toute la communauté525.

En reconnaissant les acteurs comme partenaires et en les inscrivant dans la vie de la

paroisse, elle devient un lieu de vie et d’initiation à la vie chrétienne et de formation

humaine et communautaire. Après trois rencontres, et à partir de l’hypothèse de départ,

l’équipe de recherche-action arrive le 18 mai 2007 à une nouvelle formulation de celle-ci

avec des modifications importantes. Voici la nouvelle hypothèse qui est proposée et

accompagnée de quelques questions permettant de l’approfondir :

Pour l’équipe de chercheurs, voici les acteurs dans la catéchèse en paroisse : les

prêtres, agents de pastorale, bénévoles, catéchètes, parents, enfants, la

communauté chrétienne. Voici la question : quels sont les rôles, les attitudes

nécessaires, le type de relations souhaitées entre les acteurs, les motivations

essentielles, le savoir-faire, les qualités de foi indispensables pour que les

parcours de catéchèse puissent aider les gens à découvrir, approfondir et

témoigner de leur foi?

Avec un élément complémentaire : comment faire pour que tous puissent

cheminer ensemble et soient ouverts à des changements dans leur vie

personnelle, dans la vie de la communauté? »

524 Clé USB 1, 88. 525 Clé USB 1, 221.

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230

Deuxième question : Comment faire pour qu’à partir des parcours

catéchétiques et des éléments retenus lors de la première rencontre, nous

puissions vivre le passage d’une pastorale de consommation à une pastorale

d’enfantement et d’accompagnement526?

Cette nouvelle hypothèse est mise à l’épreuve lors des deux interventions planifiées par

l’équipe de recherche-action. Ces deux interventions sont les rencontres avec les catéchistes

et les bénévoles et la rencontre avec les parents qui ont participé aux catéchèses

intergénérationnelles.

4.6 Différents passages

Les deux rencontres avec les catéchistes et les parents ont apporté plusieurs éléments

nouveaux en développant les intuitions de base qui avaient été identifiées. L’équipe de

recherche-action s’est aperçue que la seule façon de réaliser la formation des catéchistes par

l’équipe pastorale demandait des changements majeurs dans la paroisse. Une des premières

transformations touche les attitudes des acteurs. Les gens arrivent à la paroisse avec un

amalgame d’expériences de vie. Plusieurs ont eu la chance d’avoir des familles stables,

d’autres ont été blessés par diverses expériences de vie comme la maladie, la violence,

l’avortement… Le prêtre, l’agent de pastorale, les catéchistes et les autres n’ont pas à bénir

toutes les situations, mais à développer un accueil face à ces situations complexes :

Marguerite*** Combien de femmes qui ont dû avorter se sont ramassées avec

une grosse culpabilité parce qu’elles venaient d’en parler à un, un prêtre.

Rose*** Un prêtre qui ne les accueillait pas.

Blé*** Oui. Marguerite*** C’est encore, c’est encore vrai aujourd’hui là.

Violette*** C’est toujours vrai, et le prêtre ne peut pas dire que c’est très, très

bien. Le prêtre ne peut pas dire là.

Blé*** Non, mais il va dire…

Rose*** Il peut être accueillant, le prêtre, par contre.

Blé*** Il commence par être signe de miséricorde, il construit la personne

malgré tous les choix qui peuvent se présenter.

Violette*** C’est ça.

Blé*** Tu sais, accepter cette, cette humanité, tu sais, on voudrait tous que ce

soit parfait, mais notre monde n’est pas de même.527

526 Clé USB 1, 139. 527 Clé USB 1, 767-768.

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231

Le premier passage, c’est d’accepter l’humanité des gens qui viennent à la paroisse.

L’accueil devient en lui-même évangélisateur, il témoigne de la tendresse de Dieu envers

son peuple. Car, même si les membres de l’équipe pastorale sont accueillants, les gens se

sentent souvent exclus. Ils ont entendu des prescriptions morales par des témoignages, les

médias, et ils ne peuvent faire des nuances en ce qui concerne leur propre situation. Le rôle

de la paroisse est de leur rappeler qu’ils sont les bienvenus et ne sont pas exclus. Pour

transformer la pratique, il est important de nommer les objectifs à atteindre et définir un

plan d’action pour en venir à passer d’une catéchèse qui est en marge de la vie paroissiale à

une paroisse dont l’activité centrale est une catéchèse vécue, réalisée, animée par tous, et

accueillante à la diversité des expériences vécues par les gens. La recherche-action a permis

d’identifier neuf éléments pour vivre le changement de modèle de catéchèse en paroisse.

4.6.1 La catéchèse a pour but la formation de témoins de Jésus

Christ, de disciples de Jésus

Un des passages importants est de quitter le modèle de la préparation aux sacrements pour

se diriger vers le modèle de l’initiation chrétienne. Les sacrements sont importants, mais ils

ne sont pas la finalité de la catéchèse. Comme le rappelle le Message au Peuple de Dieu fait

à la suite du synode sur la catéchèse en 1977, au numéro 8, la catéchèse a pour but : « La

catéchèse part de la profession de foi et mène à la profession de foi. Par elle, la

communauté des croyants proclame que Jésus, le Fils de Dieu, le Christ, est vivant et qu’il

est sauveur »528. L’équipe de recherche-action propose de mettre au centre de la pratique la

personne même du Christ, car cela permet à tous les acteurs d’avoir un point commun.

C’est par l’écoute d’un témoignage de foi que je suis touché, que je découvre que je suis

aimé de Dieu et qu’il m’invite à entrer en relation avec lui. L’efficacité de la catéchèse sera

décuplée dans la mesure où le catéchiste, l’agent de pastorale, et le prêtre sont capables de

témoigner de leur foi : « Le message va passer si le catéchiste vit de Jésus Christ en lien

528 Vième Synode des évêques sur la catéchèse, Message au Peuple de Dieu (Paris : Pierre Téqui, 1977), 32-33.

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232

avec la vie quotidienne. Je ne peux donner ce que je n’ai pas »529. L’accueil de ce message

et l’adhésion au Christ conduisent à développer un mode de vie :

Violette*** De toute façon, la vie chrétienne, c’est un choix.

Lys*** Oui!

Marguerite*** Oui.

Violette*** Si tu choisis de vivre une vie chrétienne, c’est que tu dois

t’enligner sur le Maître. […] Dans le fond, ce n’est même pas une option; cela

devrait être un mode de vie, une ligne de pensée qu’il faut prendre en quelque

part530.

Un disciple est une personne en marche qui, par l’approfondissement de la Parole de Dieu

avec d’autres disciples, transforme sa vie et développe un nouveau mode de vie. Cette

manière de voir rejoint la manière dont le DGC définit la catéchèse :

La catéchèse est la forme particulière du ministère de la Parole qui fait mûrir la

conversion initiale, jusqu’à ce qu’elle devienne une profession de foi vivante

explicite et agissante : « la catéchèse naît de la profession de foi et mène à la

profession de foi »531.

Le défi est d’habiliter tous les acteurs de la communauté à témoigner et à professer leur foi

dans leur pratique quotidienne.

4.6.2 Passage d’une pastorale de service à une pastorale

d’engendrement

La paroisse se trouve aux prises avec le modèle de l’offre et de la demande des services

religieux. Il est difficile d’en sortir car le contexte social prône le modèle d’une société de

consommation. Ce type de pastorale, influencée par la culture de la consommation de

masse, a comme conséquence de transformer la célébration des sacrements non pas comme

une étape de cheminement dans la vie chrétienne, mais comme une demande de rites de

529 Clé USB 1, 488. 530 Clé USB 1, 31. 531 DGC, 82.

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233

passage. Dans ce contexte, la foi chrétienne peut perdre sa fonction prophétique et devenir

un élément de base du folklore religieux.

Les parcours catéchétiques interpellent le style de vie familiale des croyants d’aujourd’hui.

Dans un passé récent, l’école publique faisait presque tout en catéchèse, cette situation

demandait peu d’investissement. Par les parcours catéchétiques, les familles sont invitées à

investir du temps et devenir responsables de la catéchèse avec la paroisse, elles ont à

inclure l’approfondissement de la foi dans leur horaire. Plusieurs parents résistent à

s’impliquer, à devenir responsables de la catéchèse de leurs enfants en partenariat avec la

paroisse. Les paroisses découvrent l’importance du rôle des catéchistes et ces derniers

interpellent la paroisse à reconnaître leurs apports originaux. Ils désirent devenir peu à peu

des partenaires et veulent participer aux prises de décisions pour l’orientation de la

catéchèse de la paroisse avec l’équipe pastorale. Ces changements demandent des horaires

plus souples, de travailler le soir, la fin de semaine et le dimanche matin. Ces changements,

provoqués par la nouvelle réalité ecclésiale et sociale, peuvent susciter un braquage dans les

structures internes de la paroisse. Souvent, on peut observer le désir de reculer et même

d’éliminer les parcours catéchétiques qui peuvent être perçus comme des outils

perturbateurs de l’ordre établi de la « préparation aux sacrements ».

L’implantation des parcours catéchétiques demande un investissement de la part des

paroisses : « L’implantation des parcours catéchétiques demande un investissement par les

communautés chrétiennes d’abord en personnel et aussi en matériel »532. Cette réalité était

présente avant la recherche-action. La recherche-action a suscité des questions et des

demandes. La première demande est venue des catéchistes bénévoles eux-mêmes qui ont

demandé de participer aux choix des parcours : « Ce choix doit être fait par une

concertation et le résultat d’une décision commune avec les prêtres, les agents de pastorale

et les catéchètes »533. Les parents, les jeunes, les bénévoles et les catéchistes veulent être

des partenaires. Ils ne veulent pas être seulement des spectateurs. La catéchèse est un

instrument qui a comme objectif de catéchiser la communauté paroissiale : « Rose***

532 Clé USB 1, 5. 533 Clé USB 1, 65.

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234

Parce que les parcours que l’on fait aux enfants et aux parents, mais ça retombe sur la

communauté en fin de compte, ça revient à l’évangélisation de la communauté aussi en

même temps? Marguerite*** Effectivement! »534. La priorité est d’orienter la paroisse vers

le ministère de la Parole. La paroisse peut devenir un lieu de formation, d’engendrement à

la vie chrétienne dans la mesure où elle peut faire une autocritique de sa manière actuelle de

fonctionner :

Rose*** Les parcours catéchétiques…

Blé*** Et les parents et les enfants.

Marguerite*** Oui!

Rose*** Oui! C’est ça.

Rose*** Il n’y a pas… c’est que là c’est ça. Ça ne rejaillit pas sur la

communauté, il y a comme une coupure, une brisure là, il faudrait savoir

comment on peut résoudre ça que ça se rejoigne535?

La catéchèse a plusieurs rôles dont, entre autres, d’être : le lieu de la découverte de la

Parole de Dieu, une réappropriation critique de l’histoire de l’Église locale et universelle, le

lieu d’une expérimentation de la vie chrétienne en dialogue avec la culture d’aujourd’hui,

un soutien pour les familles qui veulent approfondir leur foi, un lieu où l’on apprend à prier

seul et en communauté, et qui se préoccupe de l’aide aux plus pauvres. Le modèle ne

pourra changer qu’à condition que l’on puisse reconnaître les rôles et l’apport des différents

acteurs. Il est essentiel de créer des espaces de prise de parole dans la vie interne de la

paroisse, et décloisonner les secteurs d’activités comme la liturgie, la formation à la vie

chrétienne, le soutien aux familles, l’aide auprès des plus démunis.

4.6.3 Passage d’une « catéchèse animée par quelques acteurs » à

« tous acteurs en catéchèse »

Actuellement, la catéchèse repose sur les épaules de quelques agents de pastorale soutenus

par des bénévoles ou de catéchistes qui sont des exécutants. Pour l’approfondissement de la

534 Clé USB 1, 116. 535 Clé USB 1, 117-118.

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235

question de l’hypothèse de recherche, je pars de cette affirmation faite par l’équipe de

recherche-action : tous sont appelés à être des acteurs.

4.6.3.1 Les enfants

L’enfant a sa propre autonomie, son propre cheminement. Par les témoignages des parents,

on a découvert que les enfants étaient des partenaires actifs dans la catéchèse. Plusieurs

parents laissent leurs enfants libres de s’inscrire ou de suivre une démarche

d’approfondissement de la foi : « Alors, c’est ma belle-fille qui a dit, je veux faire ma

première communion peu importe quelle est la démarche. Elle voulait le faire »536. Ce sont

souvent les enfants qui insistent pour vivre les sacrements et s’inscrire à la catéchèse. Ils

sont des catalyseurs pour amorcer la démarche : « Les jeunes deviennent catalyseurs,

initiateurs de la démarche de foi des parents »537. Ils influencent souvent leurs parents et les

interpellent à entrer dans un processus de formation. Les enfants aiment que les activités

soient variées et qu’ils aient du plaisir. Ils s’attendent à la participation des parents et celle-

ci donne une crédibilité à la catéchèse. C’est la présence des parents, des catéchistes et des

pasteurs à des moments importants et significatifs de leur vie, comme la mort d’une grand-

mère, qui va attester la valeur de la catéchèse. C’est aussi important qu’ils puissent voir le

pasteur et les catéchistes vivre des activités simples avec eux :

Blé*** J’ai été au salon mortuaire pour une des filles, j’ai été manger chez un

autre… Lotier*** Il a joué au « Game Cube » avec mon fils… (Rires de tous).

Blé*** Oui au « Game Cube », ça été effrayant que j’ai eu honte de ma

performance évidemment (Rires de tous)538.

Cette interaction développe et consolide l’identité chrétienne de l’enfant et l’habilite à

témoigner de sa foi dans la vie de tous les jours. On a eu deux témoignages

impressionnants : le premier est qu’un des enfants, lors d’une rencontre avec un enfant

d’une autre religion, a été capable d’exprimer dans ses mots son expérience de foi :

536 Clé USB 1, 572. 537 Clé USB 1, 628. 538 Clé USB 1, 617.

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236

Marguerite*** D’ailleurs, ça ne l’a pas ébranlé.

Stellaire*** Non pas du tout, c’est sa petite amie qui a été ébranlée parce

qu’elle était, elle n’a pas le même Dieu, puis ma fille l’a rassurée en lui disant

que l’on a le même Dieu. C’est juste qu’est un peu différent.

Blé*** Bien ça, je ne l’avais pas vu venir celle-là que même les parcours de

catéchèse les aident au dialogue interreligieux.

Stellaire*** Cela les prépare à faire ça, les parcours...

Blé*** Oui, c’est ça539.

Cet espace de dialogue sur la foi dans les parcours avec différents intervenants leur permet

de faire des liens entre les textes bibliques, cela leur donne l’alphabet nécessaire pour

témoigner, exprimer leur foi et l’approfondir. Si je résume, les enfants sont souvent les

initiateurs de la démarche familiale de l’inscription dans les parcours. Ils veulent être actifs

et des acteurs tout au long de la démarche de formation à la vie chrétienne. Les dialogues et

les échanges permettent aux enfants de développer une plus grande appropriation du

message de l’Évangile et de devenir des témoins de la foi dans la vie quotidienne.

4.6.3.2 Les parents

La majorité des parents viennent inscrire leurs enfants à la paroisse pour qu’ils puissent

recevoir la première communion et la confirmation. Ils sont d’abord surpris qu’on leur

demande de suivre un parcours de catéchèse. Leur expérience personnelle a été différente

car, pour les parents plus âgés, la catéchèse qu’ils ont vécue se faisait à l’école catholique

publique. Ils ont l’impression que l’Église les juge ou leur fait payer leur non-pratique

religieuse en leur imposant des parcours catéchétiques. La proposition des parcours leur fait

peur, ils craignent d’être récupérés par l’Église :

Rose*** Pour toi, pour nous, ce n’est pas de la récupération, mais pour eux, ils

vont sentir ça comme de la récupération.

Marguerite*** En tous les cas on va se le faire dire à tour de bras.

539 Clé USB 1, 578.

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237

Rose*** Oui! Les parents, c’est de même qu’ils le prennent : « or vous voulez

nous récupérer nous… » Eux540.

Ils veulent être de bons parents et leur désir est que leurs enfants ne manquent de rien. Les

parents ont peur d’une catéchèse qui a un ton moralisateur. : « Les parents ont exprimé que

la formation morale, ils peuvent la faire eux-mêmes à la maison. Ils désirent que leur enfant

ait une formation plus spirituelle, religieuse et les aide à vivre comme chrétien »541. Ainsi,

on peut résumer les résistances des parents face à l’implantation des parcours. Ils ont peur

que l’Église profite de cette situation pour les récupérer dans une pratique ritualisante et

très moralisatrice. Au-delà des résistances, les parents ont des attentes et des motivations

bien précises. Leurs enfants sont leur première motivation. Ils veulent leur transmettre un

héritage de croyances et des valeurs religieuses. Ils souhaitent une catéchèse de qualité qui

soit adaptée aux besoins et aux cheminements des enfants. Un grand nombre souhaite aussi

de vivre une expérience familiale :

Une démarche proposée par la paroisse, on voulait s’insérer dans l’Église. Je

voulais accompagner mon fils, vivre les ateliers ensemble parents-enfants, je

trouve cela extraordinaire. J’ai senti que c’était important pour mon fils ma

présence. Cela devient une sortie entre père-fils542.

Les parents aiment être consultés pour le déroulement et l’évaluation du parcours

catéchétique. Plusieurs parents manifestent leur désir de connaître davantage leur foi après

quelques rencontres dans les parcours.

Marguerite*** Ce que l’on dit là-dedans, c’est qu’il faut reconnaître la

compétence des adultes.

Violette*** Bien oui!

Blé*** Bien oui!

Marguerite*** Les parents qui viennent, en tous les cas, c’est une des choses

qui disent dans les documents, je ne peux pas te dire où là.

Blé*** Bien là, on est rendu là.

540 Clé USB 1, 185. 541 Clé USB 1, 134. 542 Clé USB 1, 643.

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238

Marguerite*** Ces adultes-là que l’on a devant nous autres, ils ont des

compétences.

Violette*** Oui, oui543!

C’est ainsi que l’équipe de recherche-action a constaté que les parents étaient des

participants et des acteurs dans la catéchèse paroissiale, et qu’ils avaient des compétences.

J’ai été surpris de découvrir que plusieurs parents demandaient plus de temps pour

échanger sur les différents thèmes ou textes bibliques :

Moi j’aime beaucoup les personnes tu sais; le fait d’être rendu avec en plus

vivre une expérience que ce soit avec mon fils, avec ma fille, on dirait que la

catéchèse est là comme cadre pour favoriser les échanges entre nous. Je le vois

un peu ça, le, la catéchèse c’est que je, c’est ce que je vis la démarche en même

temps que mon enfant. Et ce n’est pas moi qui transmets les connaissances,

c’est comme on le vit ensemble, je peux apprendre de lui autant il peut

apprendre de moi ou du catéchète544.

Ce témoignage est significatif. C’est dans l’échange entre le parent, l’enfant et le catéchiste

que s’approfondit la foi. Le catéchiste participe à cet approfondissement par son action et

son apport. Les parents collaborent à la catéchèse par le dialogue avec les enfants, les autres

parents et les catéchistes :

Antennaire*** On peut aider à aider, à coordonner le café, ou des choses

comme cela sur le tas. Mais si on a à faire une partie de l’animation ou une

partie des discussions avec les enfants là, il faut avoir une bonne idée de […]

Blé*** Passer les feuilles, ça c’est un rôle et le catéchète lui, il est important

qu’il ait l’ensemble de la rencontre et de la démarche.

Antennaire*** Oui.

Blé*** Pour…

Rose*** Connaître la visée.

Blé*** Connaître la visée, connaître la visée.

Rose***La visée, oui.

Marguerite*** C’est très juste

543 Clé USB 1, 213. 544 Clé USB 1, 593.

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239

Blé*** Quoi?

Marguerite*** C’est très juste545.

Il est important d’accueillir les propositions que formulent les parents tout au long du

parcours et d’exprimer les besoins de la communauté.

Je présente une expérience simple, mais combien significative de la collaboration des

parents et son incidence sur le groupe de catéchèse. Dans un groupe de catéchèse

intergénérationnelle qui se rassemblait le samedi matin, une mère qui a une compétence

dans le service à la clientèle a constaté que l’ambiance était un peu froide et impersonnelle

au début. Voyant la situation, elle a voulu y remédier en apportant du café pour tous. Elle a

demandé au catéchiste si elle pouvait prendre cette initiative. Cette initiative est devenue le

déclencheur de la communication et a changé le climat du groupe de catéchèse :

Servir un café peut être un élément pour créer la communication…

Stellaire*** Un déclencheur.

Blé*** Un déclencheur.

Rose*** Oui.

Blé*** C’est important ça.

Stellaire*** Pour briser la glace.

Blé*** Briser la glace.

Rose*** Ça aide à l’accueil546.

Cette initiative a permis de stimuler la communication et, par conséquent, a eu un impact

positif sur la catéchèse car les gens se sont peu à peu sentis à l’aise pour échanger plus en

profondeur. Plusieurs parents ont le désir de s’impliquer au service de la catéchèse en

utilisant leur expertise professionnelle. La catéchèse intergénérationnelle est un lieu de

formation pour les parents; cela leur permet de trouver les mots pour mieux comprendre,

expérimenter et dire leur foi.

545 Clé USB 1, 608-609. 546 Clé USB 1, 590.

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240

Je résumerais ainsi le rôle des parents : ils sont d’abord responsables de

l’approfondissement de la foi de leurs enfants et ceci est leur première motivation. La

catéchèse devient un lieu d’échange pour vivre une démarche familiale avec leurs enfants.

Ils ont des talents et des compétences qu’ils veulent mettre au service de la mission

catéchétique et, après avoir œuvré comme bénévoles et aides-catéchistes, plusieurs ont le

désir de s’engager davantage en devenant eux-mêmes catéchistes.

4.6.3.3 Les bénévoles

Les bénévoles veulent contribuer, mais rappellent souvent qu’ils ont quelques heures par

semaine seulement à consacrer à la vie paroissiale. Leur contribution est importante et aide

à conserver un contact humain avec les catéchisés de tout âge.

4.6.3.4 Les aides-catéchistes

Les aides-catéchistes sont des bénévoles qui ont du temps à consacrer à la communauté

chrétienne. Ils veulent assurer leur développement humain et spirituel. Ce sont des

collaborateurs précieux; ils demandent d’être soutenus, reconnus et formés afin de

développer l’unité lors des réunions de catéchèse.

4.6.3.5 Les catéchistes

Les catéchistes sont des auxiliaires. Ils ont appris sur le tas et durant les rencontres de

planification pour la préparation des activités des parcours catéchétiques. Ils n’ont pas de

rencontres avec l’équipe pastorale, ni la reconnaissance de la communauté, et encore moins

du diocèse.

Voici la vision du catéchiste proposée par l’équipe de recherche-action. Le catéchiste est

d’abord une personne qui connaît son milieu et sa culture : « Il est important de permettre

aux catéchètes de bien connaître la culture »547. Il a un ministère propre, il est envoyé par

l’Église, et il est en lien avec la communauté paroissiale. Son rôle ne se limite pas à

transmettre un contenu. C’est une personne qui a une expérience de foi profonde et

547 Clé USB 1, 229.

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241

enracinée dans sa vie quotidienne, il se laisse transformer par la Parole de Dieu qu’il

annonce. Il interpelle les catéchisés à vivre leur foi selon l’Évangile et, quelquefois, à

prendre des distances sur certains aspects de la culture :

c’est que le catéchiste est un témoin. Et en termes d’enjeux ecclésiologiques on

dit que, que comme témoin, il a à accueillir les gens, mais pas simplement

bénir la culture, mais interpeller les gens à vivre l’Évangile548.

Le catéchiste n’agit pas seul, il appartient à un groupe relié à la paroisse et il porte la

mission catéchétique solidairement avec les autres catéchistes. Il est un intermédiaire entre

les catéchisés et la communauté célébrante. Le catéchiste est capable d’enseigner, d’animer,

d’accompagner et d’initier les gens à approfondir leur foi à la vie de prière, et à vivre en

communauté chrétienne. Il a un sens d’humour et a aussi à cœur de découvrir le talent des

destinataires de la catéchèse et les inviter à collaborer :

Marguerite*** Dans les rôles, un rôle d’enseignement, un rôle de témoignage,

un rôle d’accompagnement, c’est pour se faire proche des jeunes, des parents,

des catéchètes, des différentes personnes dans ces groupes-là, là. Un rôle

technique, toute la question de là, comment je peux dire ça donc tenir là,

prendre les noms, vérifier si les certificats de baptême sont produits, s’assurer

que les gens sont présents, contacter les gens qui ne sont pas présents, etc549.

Ils sont des partenaires et des collaborateurs de l’équipe pastorale et participent en groupe à

l’évaluation des parcours. Ils suggèrent des modifications, des améliorations et sont

impliqués dans le choix des outils pour la catéchèse et dans l’insertion des catéchisés au

sein de la communauté paroissiale.

Cette vision de l’équipe de recherche-action sur le rôle du catéchiste est une modification

importante de la pratique actuelle. L’équipe de recherche-action reconnaît que le catéchiste

a un ministère :

548 Clé USB 1, 534. 549 Clé USB 1, 247.

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242

Blé*** Et ça, c’est les questions que pose l’hypothèse de recherche. C’est que

les catéchètes, ce n’est pas simplement des bénévoles, il y a un ministère.

Violette*** Moi, c’est ce que je voyais.

Blé*** Un ministère catéchétique?

Violette*** C’est ça550.

En reconnaissant le catéchiste comme un ministre qui exerce son service pour et dans la

paroisse, on est obligé de revoir sa relation avec les agents de pastorale, l’équipe pastorale

et les prêtres. Le catéchiste se trouve à être un intermédiaire entre les catéchisés et la

communauté célébrante. Il joue aussi ce rôle de médiation entre les catéchisés d’un côté et

de l’autre, les agents de pastorale et les prêtres. Il est appelé à témoigner de sa foi avec

conviction, tous sont membres d’une paroisse et veulent se sentir solidaires de la mission :

Un des enjeux importants, c’est que les catéchistes veulent se sentir solidaires

avec l’équipe pastorale et souhaitent avoir des moments de ressourcement avec

toute l’équipe. Ils désirent être considérés comme des partenaires qui partagent

une même mission avec des rôles différents et complémentaires. On veut créer

un climat de prière joyeux et fraternel. Apprendre à prier551.

Le désir nommé par les membres de l’équipe de la recherche-action est que d’être

catéchiste, c’est aussi vivre une expérience d’approfondissement de la foi en Église qui

conduit à un témoignage auprès des autres. C’est une expérience apostolique à l’image du

texte qui rappelle le choix et l’envoi des soixante-douze disciples par Jésus552.

4.6.3.6 Les agentes de pastorale

Dans la paroisse, les agentes de pastorale sont responsables d’un ou deux parcours

catéchétiques. Chacune anime son parcours de manière autonome; il y a rarement des liens

550 Clé USB 1, 19. 551 Clé USB 1, 565. 552 Lc 10, 1-16.

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243

entre les différents parcours ou avec la communauté célébrante. Les activités sont

cloisonnées et parallèles. Les différentes agentes de pastorale craignent de partager leur

liste de catéchistes et de bénévoles de peur de les perdre. Le soutien de l’équipe pastorale

est minime, elle se concentre sur le choix des dates de célébration des différents sacrements

et des messes catéchisées.

Cette situation a été évaluée comme insatisfaisante par l’équipe de recherche-action. Elle

propose des modifications importantes dans les rôles, les tâches et les liens à créer avec les

différents acteurs en catéchèse. L’équipe de recherche-action a identifié les prérequis

personnels suivants : l’agent de pastorale doit être une personne qui connaît bien la

situation de l’Église actuelle et de la société. Il est un bon communicateur. Il doit maîtriser

plusieurs compétences comme la pédagogie, la théologie, la liturgie, la vie spirituelle et la

culture. Il doit être capable de travailler en équipe. Il a comme rôle de planifier, d’animer et

d’évaluer les parcours. Il interpelle des personnes pour qu’elles puissent devenir bénévoles,

aides-catéchistes ou catéchistes. Il forme, soutient et accompagne les gens qui travaillent

avec lui et crée des liens entre les catéchisés, l’équipe pastorale et la communauté

paroissiale. Il discerne et nomme les charismes de chacun afin d’inviter les catéchisés à se

mettre au service de la communauté :

Blé*** Utiles et reconnus et mis en valeur dans une démarche catéchétique, et

là ça devient le rôle de l’agent de pastorale de nommer les talents des gens et

de voir comment les utiliser.

Lys*** Il y a un travail de discernement.

Violette C’est ça, ça va juste là.

Lys*** C’est une Parole de discernement.

Blé*** C’est ça, ça veut dire que les membres de l’équipe pastorale et peut être

aussi les anciens catéchètes on devient des sourciers553.

Le rôle de l’agent pastoral est d’identifier les talents des catéchisés et de les mettre en

valeur. L’agent de pastorale est présent aux rassemblements dominicaux pour faire des

553 Clé USB 1, 220.

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244

liens entre le groupe de catéchèse et la communauté chrétienne. Il a le soutien de l’équipe

pastorale, il est membre du groupe qui élabore, planifie et évalue le projet catéchétique. Son

travail est celui d’interpeller, de former et d’accompagner les catéchistes. L’agent de

pastorale n’a pas à faire lui-même la catéchèse avec les catéchisés. Il a pour mission de

constituer une équipe de catéchistes et de bénévoles en lien avec la communauté chrétienne.

Cette équipe soutenue par l’équipe pastorale initie les catéchisés à la foi chrétienne.

4.6.3.7 L’équipe pastorale

L’équipe pastorale fonctionne dans une dynamique d’offre et de demande des services

religieux. L’équipe vit une période de transition, elle est consciente qu’elle est appelée à

transformer sa pratique de pastorale, à passer d’une pastorale de préparation aux sacrements

à une démarche d’initiation chrétienne. Il y a un cloisonnement des dossiers pastoraux et

peu de communication entre les membres. L’équipe pastorale a de la difficulté à se laisser

interpeller par les paroissiens :

Rose*** Autre point… Je participe souvent à la messe de 17 h le dimanche. Je

participe également à un groupe de personnes qui se préparent à la

confirmation. J’ai pu observer que l’équipe pastorale n’était pas impliquée tout

au long de la démarche et n’a pas suivi le cheminement des groupes au fur et à

mesure de la démarche, cette situation est inacceptable. Il est nécessaire de

tenir compte de l’évaluation des parents. La prise en compte des besoins et des

attentes des parents est un point d’ancrage pour améliorer les parcours

catéchétiques et le projet paroissial lié à l’initiation chrétienne554.

L’équipe de recherche-action diagnostique la nécessité de décloisonner l’équipe pastorale et

la structure même de l’organisation paroissiale. Elle propose que l’équipe pastorale soit le

corps qui prend le leadership du changement de modèle ecclésial, que la paroisse passe

d’un modèle hiérarchique et autocratique à un modèle plus participatif. Par ce nouveau

modèle, elle propose que le projet catéchétique soit porté par toute l’équipe pastorale et non

pas seulement par une ou deux agentes de pastorale spécialisées dans le domaine. Les

intervenants pastoraux doivent être moins centrés sur l’exécution de leur travail que sur le

soin à interpeller, recruter, former et accompagner des gens dans la mission catéchétique.

554 Clé USB 1, 143-144.

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245

L’équipe pastorale a besoin d’une formation pour s’habiliter à former des catéchistes

bénévoles, des aides-catéchistes et des bénévoles en s’inspirant de la grille d’André

Fossion555 qui propose un programme de formation pour tous. Ce programme de formation

doit toucher tous les aspects de la vie chrétienne et être composé de plusieurs moments de

ressourcement. Le groupe des catéchistes est un groupe de croissance dans la foi pour les

participants.

Dans ce contexte, l’équipe pastorale est responsable de promouvoir une ecclésiologie de

communion et aussi de faire la promotion du sacerdoce baptismal. Elle a pour rôle de

susciter l’unité dans toute l’action de la vie paroissiale tout en s’assurant du

décloisonnement des activités et du dialogue entre les différents acteurs de la vie

paroissiale. Sa responsabilité est aussi d’ordre spirituel :

Marguerite*** À tous les points de vue, ça prend vraiment une décision, ça

prend du courage pour faire ce changement-là, là. Parce que, il va y avoir des

répercussions, c’est ça que l’on était censé regarder, c’est quoi les enjeux

ecclésiologiques, et je ne sais pas quoi là.

Violette*** Exactement556.

Ce changement ne peut se faire sans qu’il ait été bien planifié. Cette formation doit tenir

compte des résistances aux changements des membres de l’équipe pastorale. Les

animateurs pastoraux n’ont pas été formés à être des initiateurs et promoteurs d’une

nouvelle culture chrétienne en dialogue avec la société pluraliste actuelle.

4.6.3.8 Les prêtres, le pasteur

Les membres de l’équipe de la recherche-action indiquent que le prêtre doit être solidaire

avec les autres intervenants pastoraux. Il a un rôle propre. Quatre-vingt-dix-neuf unités de

555 André Fossion, « La compétence catéchétique : Perspectives pour la formation, » dans Les nouveaux

catéchistes : Leur formation, leurs compétences, leur mission, dir. Henri Derroitte et Danielle Palmyre

(Bruxelles : Lumen Vitae, 2008), 15-32. 556 Clé USB 1, 687.

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246

sens se rapportent aux prêtres dans les verbatims557. Pour ce qui est de l’équipe pastorale,

j’ai identifié quatre-vingt-quinze unités de sens558. L’équipe de recherche-action s’attend à

une complémentarité et une solidarité entre le ministère ordonné et les autres ministères.

La perception du prêtre par les gens dans la paroisse en l’an 2007 est sombre. On le perçoit

comme un distributeur de sacrements. Il est rarement présent aux catéchèses, sauf s’il

s’occupe d’un groupe de catéchèse. Habituellement, il est davantage un gestionnaire, un

administrateur qu’un animateur :

Blé*** Alors ça vient? Marguerite tu parlais de la… du rôle de, pour le prêtre

le financement ce n’est pas son rôle, alors que on devrait penser à…

Marguerite*** Sa priorité, c’est toute la mission, la mission de l’Église. Puis ça

va dans le sens de ce que j’ai écrit là-dedans. Je veux dire, il est là pour

chapeauter tous les… la mission.

Rose*** Tous les services. Oui! La mission559.

Son absence lors des rencontres des catéchèses et sa présence rapide lors des célébrations

du sacrement du pardon et de l’eucharistie sont pour les paroissiens le signe qu’il n’est pas

intéressé à les connaître et à les inviter à faire partie de la communauté.

Les catéchistes et les parents veulent rencontrer le prêtre dans les diverses rencontres de

catéchèse. Les gens sont choqués de son absence dans les réunions :

Antennaire*** Moi, je peux vous dire que les fois que l’on a fait la réunion

pour la confirmation, il y a des parents qui ont quasiment dit ça : « Mais, il était

où le prêtre, on l’a vu une fois? ». Ça avait, avait choqué un peu là.

Marguerite*** À l’évaluation, tu veux dire.

Antennaire*** Il y avait aussi des parents qui avaient été choqués du fait que

vous soyez montré ??pour le Pardon puis « that’s it, that’s all » là. Pour eux

autre c’était… ça aurait été important là560.

557 Clé USB 1, 821-822. 558 Clé USB 1, 803-804. 559 Clé USB 1, 97.

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247

Les catéchistes bénévoles et les parents veulent rencontrer les prêtres à quatre ou cinq

reprises chaque année lors du parcours catéchétique. Ils veulent pouvoir leur parler,

échanger, leur poser leurs questions personnelles en lien avec la vie de famille, l’Église et

la société. La présence du prêtre peut donner une valeur, une importance à la démarche

catéchétique. Les catéchistes et les parents souhaitent que le prêtre puisse aussi être présent

lorsque les familles qui viennent aux parcours vivent des moments forts comme la

naissance d’un enfant, la maladie ou la mort d’un proche. Cette présence aux moments

significatifs de la vie atteste que la catéchèse est plus qu’un discours, mais un témoignage

de vie.

Le rôle du prêtre est de valoriser les différents acteurs de la catéchèse et veiller à ce qu’ils

soient interpellés, formés, accompagnés et valorisés dans leur rôle respectif. L’équipe de

recherche-action propose un déplacement dans le rôle et la fonction du prêtre. Elle trouve

important son rôle dans la liturgie, dans l’animation de la communauté, mais demande de

développer davantage sa tâche dans l’annonce de l’Évangile. Le prêtre est appelé à être en

continuelle tension entre l’interpellation au nom de l’Évangile et l’accueil miséricordieux

signe de l’amour du Père. L’équipe de recherche-action souhaite que le prêtre développe

son travail comme ministre de la Parole de Dieu tout en ayant la préoccupation que cette

proclamation soit liée à la vie concrète du Peuple de Dieu présent dans la paroisse et

enraciné dans une culture précise561.

4.6.3.9 La communauté chrétienne et la communauté célébrante

Dans la recherche-action, les expressions employées qui soulignent la communauté

chrétienne et la communauté célébrante sont : assemblées de paroissiens, 9 unités de sens;

baptisés, 9 unités de sens; catéchisés et pratiquants, 51 unités de sens. Pour ce qui est de la

paroisse, il y a deux catégories qui regroupent 81 unités de sens. La première a 61 unités de

sens la paroisse situation actuelle et future; dans cette catégorie on décrit l’importance de

560 Clé USB 1, 584-585. 561 DGC, 24

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248

vivre le passage d’une paroisse de service à une paroisse centrée sur l’accompagnement des

gens afin de vivre pleinement leur foi comme des disciples témoins de Jésus562. L’autre

catégorie est composée de vingt unités de sens paroisse situation actuelle résistance aux

changements, elle décrit les réflexes de repli sur soi quand on invite une institution à

changer563.

Une des conclusions de la recherche-action est de donner la possibilité aux paroissiens de

participer aux prises de décisions. Mais l’équipe est allée plus loin en suggérant des

assemblées générales pastorales pour discuter des orientations de l’ensemble de la paroisse

afin de dynamiser la communauté :

Blé*** Mais on peut faire une assemblée générale?

Rose*** Pastorale.

Blé*** Pastorale et ça il n’y a pas de problème.

Marguerite*** Moi, j’ai vécu une expérience, à une autre paroisse, puis j’ai

parti cette histoire-là, faire des assemblées pastorales, des assemblées de

paroissiens, mais d’ordre pastoral parce que l’on avait des changements

importants à faire puis avant de les faire, on a… on en a parlé avec la

communauté, puis ça a entraîné chez la communauté toute une dynamique

nouvelle564.

L’expérience des membres de l’équipe de recherche-action montre que la consultation et

l’inclusion des paroissiens, dans un projet pastoral novateur, permettent de gérer les

résistances aux changements et de dynamiser la communauté.

La catégorie baptisés permet de faire quelques constats. Le premier est que les baptisés sont

des personnes capables de faire des choix et d’approfondir la foi en dialogue avec les

autres. Le deuxième est que plusieurs baptisés ont le désir de s’investir dans une formation

pour apprendre davantage sur leur foi. Le troisième est de découvrir les difficultés de

562 Clé USB 1, 818-819. 563 Clé USB, 819-820. 564 Clé USB 1, 128.

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249

l’équipe de pastorale de prendre au sérieux les demandes de formation des baptisés et de

leur faire confiance.

La catégorie suivante est catéchisés et pratiquants. Elle regroupe 51 unités de sens. Une des

premières caractéristiques de cette catégorie est de noter la diversité des cheminements

chez les catéchisés et les pratiquants. Le premier défi pour l’équipe pastorale et les

catéchistes bénévoles est d’accueillir ces gens qui sont très différents les uns et les autres.

Le deuxième défi est d’identifier leurs compétences et les interpeller pour aider à

l’animation catéchétique de la paroisse. Le troisième défi est d’offrir, dans la mesure du

possible, des parcours diversifiés ou de permettre aux membres de l’équipe pastorale et aux

catéchistes bénévoles d’avoir l’occasion de modifier les parcours selon les besoins tout en

conservant l’objectif général. Le but de la catéchèse est de reconnaître qu’ils sont des

membres de la communauté et de leur faire découvrir leur propre responsabilité comme

chrétien :

Rose*** À développer, à être disciple du Christ parce que dans le fond par leur

baptême, ils sont déjà disciples, mais ils ont comme oublié ça, alors donc cet

éveil-là nous permet de développer, d’aller rechercher ce qu’ils ont d’ancré en

eux et puis d’aller plus loin avec…

Lys*** C’est ça, ça se fait pour n’importe quel chrétien quel que soit son âge

que ce soit à 80 ans, on n’arrête jamais de s’éveiller à la foi…

Rose*** Tout à fait565.

La paroisse ne peut être vue comme un groupe composé de gens homogènes, c’est

exactement le contraire. C’est un signe de la présence de Dieu au milieu du monde. Elle

regroupe des gens qui ont une grande variété d’expériences, de cheminements et de

compétences, qui cherchent un sens à la vie, et qui désirent suivre Jésus Christ.

4.6.3.10 L’évêque

565 Clé USB 1, 186.

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250

Dans la recherche-action, on a très peu parlé de l’évêque, si ce n’est que du désir de

l’informer des résultats des travaux et des conclusions de la recherche. Pour la

reconnaissance des catéchistes, l’équipe de recherche-action demande que cela soit réalisé

par le pasteur devant la communauté paroissiale afin de créer des liens effectifs et affectifs

avec les catéchistes. Le souci de ce choix est dans le fait de créer des liens entre les divers

acteurs de la catéchèse dans la paroisse afin que s’établissent une synergie, des liens de

solidarité, de fraternité entre les paroissiens, les catéchistes, les membres de l’équipe

pastorale et le pasteur.

4.6.3.11 Conclusion de la section : Passage de quelques

acteurs à tous acteurs en catéchèse

Le passage de quelques acteurs à tous acteurs demande un changement d’attitude pour tous

les différents acteurs. Il exige de développer l’accueil, la reconnaissance mutuelle et de

reconnaître l’apport de l’autre. Il invite aussi les membres de l’équipe pastorale et les

catéchistes à reconnaître la présence de dons de l’Esprit-Saint dans la communauté

paroissiale ainsi que les compétences des paroissiens. Il invite à considérer la catéchèse non

pas comme un enseignement magistral unidirectionnel, mais bien comme une pédagogie

dialogique qui tient compte de l’expérience de chacun dans ses apports possibles. Il s’agit

de reconnaître la catéchèse comme un instrument de formation de tous les acteurs et de

renouvellement de la communauté paroissiale par l’action de l’Esprit-Saint. La paroisse est

un lieu de sanctification par les sacrements, mais la catéchèse développe son aspect

prophétique par la participation de tous à l’approfondissement et la proclamation de la

Parole de Dieu.

L’absence de réflexion sur le parrain et la marraine dans l’équipe de recherche-action

m’interpelle. Cela est symptomatique d’une pratique très centrée sur la catéchèse des jeunes

enfants et intergénérationnelle. Pour les parents, la compétence est d’être de bons

pédagogues et des témoins de la foi. Pour ce qui est de l’adulte qui se présente pour

l’initiation chrétienne, c’est le parrain qui devient témoin pour lui. Il joue un rôle semblable

à celui des parents, mais l’accompagnement est centré sur une démarche inspirée par

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251

l’andragogique religieuse. Le parrain et la marraine sont des témoins qui permettent

d’élargir la famille chrétienne au-delà des relations du sang.

4.6.4 Passage d’une catéchèse comme rite de passage à une

catéchèse comme découverte de son identité chrétienne

Les intervenants pastoraux sont invités à vivre une conversion; celle de reconnaître que les

gens s’inscrivent dans un parcours afin de redécouvrir leurs racines chrétiennes. Dans la

recherche-action, on a constaté que le geste de s’inscrire dans les parcours est un geste

symbolique qui est polysémique. Les parents désirent s’inscrire dans la religion de leurs

ancêtres. Ce désir qui a pour origine un archétype spirituel et religieux profond est à

approfondir. Dans la rencontre avec les parents, j’ai été surpris d’entendre qu’une des

premières motivations est d’approfondir la foi catholique. Pour eux, c’est un des trésors les

plus précieux qu’ils possèdent :

Ils ont été baptisés et, c’est une motivation et aussi une dynamique de

continuité. On est catholique pratiquant, ça fait partie de notre foi. Un héritage

familial que l’on veut transmettre, ça fait partie de notre façon de vivre, inscrit

dans la vie de famille566.

Plusieurs parents nous ont confirmé cette idée en indiquant la nécessité de conserver la

pratique de vivre la catéchèse en petits groupes. Les petits groupes permettent d’être

accueillis, de pouvoir discuter et également d’échanger. Ces échanges sont un lieu pour

approfondir la foi : « Blé*** Tu ne rentres pas par la grande communauté, tu rentres par des

petits groupes qui te présentent la grande communauté. Violette*** C’est comme cela que

je le sens moi »567. Avec le nouveau contexte social de laïcité, la paroisse devient un lieu

unique d’approfondissement de la foi, d’insertion dans l’Église, de socialisation entre

familles. Mais les familles insistent afin de conserver pour eux un esprit critique vis-à-vis

de l’Église :

Blé*** C’est un genre d’héritage familial que tu veux transmettre que je saisis.

566 Clé USB 1, 643. 567 Clé USB 1, 179.

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252

Stellaire*** Oui, cela a toujours été ça, on va à la messe tous les dimanches, ça

fait partie de notre, de notre façon de vivre, ça fait partie des étapes normales,

de nous autres568.

Les parents n’ont pas nécessairement les mots, le même vocabulaire que les agents de

pastorale, mais le groupe de catéchèse est comme une antichambre qui permet de s’insérer

dans la grande communauté. « Violette*** C’est dans les petits groupes surtout que ça se

favorise parce que dans les masses on ne se salue pas nécessairement, mais dans les petits

groupes on peut s’accueillir »569. C’est là qu’il y a un déplacement. Le parcours de

catéchèse n’est surtout pas un cours. Il est un lieu d’immersion, d’expérimentation et un

laboratoire qui permet de s’inscrire dans une tradition. Le parcours permet un dialogue

entre la foi et la culture actuelle :

Blé*** Oui, mais je trouve ça intéressant parce que je marque ça là. J’ai

marqué dans la quatrième attitude d’interpellation identitaire, j’ai marqué

processus de croissance et les gens arrivent avec un bagage qu’on doit

reconnaître.570

Le groupe de catéchèse devient un lieu théologique de formation à la vie chrétienne qui a

pour but d’habiliter les gens à trouver les mots afin d’exprimer et de témoigner de leur foi

dans la culture actuelle. C’est un travail d’inculturation de la foi qui se met en marche.

Cette réalité vécue dans les groupes de partage de la catéchèse décrit le déplacement d’une

catéchèse comme rite de passage à une catéchèse instituante.

4.6.5 Passage de « prêtre distributeur de sacrements et

gérant » à « prêtre guide, animateur et initiateur de la foi »

La situation actuelle de la paroisse, confrontée à un manque de prêtres et à une diminution

des ressources financières, a des conséquences sur le travail presbytéral. Pour répondre aux

impératifs du milieu actuellement, le prêtre s’investit dans trois secteurs particuliers : la

présidence et l’animation des diverses célébrations sacramentelles; la gérance de la

communauté; la collecte de fonds. L’équipe de recherche-action remet en cause cette

568 Clé USB 1, 571. 569 Clé USB 1, 179. 570 Clé USB 1, 779.

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253

manière de faire. Le premier constat est que le prêtre est lui aussi un disciple du Christ. Il

est d’abord un baptisé et partage cette même dignité d’être un fils de Dieu. Il est en

cheminement, il continue à apprendre comme les autres :

Lys*** As-tu ajouté quelque chose sur pasteur animateur?

Blé*** J’ai marqué le prêtre est aussi disciple.

Lys*** Oui, ça c’est très important.

Blé*** Oui, oui je l’ai indiqué oui. Il y a autre chose que tu voulais souligner ?

Lys*** Non je pense que ça, ça, ça interpelle le prêtre lui-même pour qu’il ne

se fasse pas d’illusion571.

Le prêtre, par son ministère, continue d’apprendre comme tous les autres acteurs. Il est, lui

aussi, dans un processus de croissance continue. Il est appelé à devenir un initiateur. Il est

nécessaire qu’il connaisse sa communauté et les catéchisés, c’est une priorité. Il est

responsable de la mission dans la communauté, de son orientation et c’est un partenaire

dans la formation :

Marguerite*** Bon ! Le prêtre, la mission de chacun, le prêtre est responsable

de la mission. Il est responsable de l’orientation, il est responsable de

l’évaluation continue. Il est partenaire dans l’élaboration du projet. Il est dans

le… partenaire dans la formation, ce n’est pas exhaustif là! J’ai fait ça et bon,

puis garanti qu’on peut trouver quelque chose d’autre là-dessus là572.

Son travail d’initiateur est pour tous et pour la communauté chrétienne. C’est lui qui a le

leadership de former les membres de la communauté avec d’autres partenaires. Un de ses

défis est d’aider la paroisse à se transformer en une communauté catéchisante. Le projet

catéchétique est celui de toute la communauté paroissiale, c’est au prêtre d’en prendre le

leadership : « Marguerite*** Les pasteurs ont le rôle de travailler à ce que la communauté

devienne partie prenante du projet. Blé*** Oui ! Oui ! »573. Comme initiateur, il est guide,

non pas seulement dans les catéchèses, mais aussi dans les moments significatifs de la vie :

« La présence des prêtres en dehors des rencontres de catéchèse est importante, visite à

domicile à des moments essentiels de la vie. La nécessité, la nécessité d’être accessible »574.

Pour les gens de la recherche-action, c’est au prêtre d’envoyer en mission les catéchistes

devant la communauté. Le pasteur de la paroisse a cette responsabilité d’être le leader de la

571 Clé USB 1, 780. 572 Clé USB 1, 92. 573 Clé USB 1, 459. 574 Clé USB 1, 635.

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254

communauté afin d’initier la paroisse à la mission. On peut résumer le passage comme

ceci : celui de prêtre des sacrements à celui de prêtre disciple et évangélisateur.

4.6.6 Passage d’une catéchèse magistrale à une catéchèse qui est

un lieu d’échange de la Parole de Dieu et de conversion

Dans cette section, j’utilise trois catégories : Foi, 8 unités de sens; Bible, Parole de Dieu

qui interpelle, Parole à échanger, Parole à actualiser 22 unités de sens; Espace prise de

parole, 14 unités de sens. Ces trois catégories regroupent 31 unités de sens. La démarche de

la recherche-action a fait ressortir l’importance de la foi comme un don de Dieu ainsi que la

Parole de Dieu comme outil pour dialoguer avec le Seigneur. Le dialogue autour de la

Parole de Dieu entre les acteurs de la catéchèse devient une force mobilisatrice par l’action

de l’Esprit Saint. Cette énergie divine devient le moteur de la vie des chrétiens. Cette

découverte du don de Dieu, par le partage de la Parole de Dieu, les invite à témoigner de

cette expérience spirituelle à tous ceux qui les entourent :

Violette*** C’est en plein le modèle des apôtres, dans le fond c’est ça.

Rose*** Oui.

Violette*** C’est la transmission de la foi, c’est un don, c’est un cadeau que

l’on a reçu notre foi.

Lys*** Oui. On ne garde pas pour soi-même.

Violette*** Ça vient de Dieu, mais…

Lys*** On ne garde pas pour soi-même.

Rose*** On redonne575.

Cette foi s’approfondit par le contact avec la Parole de Dieu. C’est une Parole à écouter, à

découvrir, à échanger et à actualiser. C’est une Parole qui appelle à la liberté : « Mais pour

arriver à faire des vrais choix, il faut se libérer, l’Évangile devrait être un chemin de

libération. Et non pas se laisser manger par un contexte économique là »576. À plusieurs

reprises, autant les parents que les catéchistes ont demandé qu’il y ait plus de temps pour

575 Clé USB 1, 546-547. 576 Clé USB 1, 206.

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échanger sur la Parole de Dieu. C’est l’expression « Laisser à la Parole, la parole » qui est

revenue à quelques reprises :

Violette***Il n’y a pas de temps d’en parler. Il est essentiel que pour arriver à

avoir du temps pour dialoguer, ça j’ai noté ça, je l’ai souvent souligné, il faut

du temps pour approfondir, prendre du temps pour approfondir les textes

bibliques. Laisser à la Parole, la parole577.

Cet espace d’échange a été revendiqué dans les différentes discussions. Pour que cet espace

de prise de parole puisse être efficace, cela demande une confiance réciproque entre les

différents acteurs; alors ce lieu devient un forum propice à l’action de l’Esprit Saint qui agit

par les interactions entre les individus. Cette agora devient une scène de conversion. Cela

demande d’écouter les besoins, les interrogations, les résistances, les colères vis-à-vis de

l’Église. Laisser du temps pour que chacun des acteurs, des intervenants puissent

s’exprimer et se mettre à l’écoute de l’autre. Ces échanges peuvent être éclairés par des

témoignages de chrétiens engagés et des expériences liées à la Tradition de l’Église. Mais

ce processus ne peut s’effectuer que dans le temps. C’est seulement dans ce cadre

d’échange réciproque et d’interpellation mutuelle que la conversion se vit, chez les

catéchisés, mais aussi chez les catéchistes, les intervenants pastoraux, le pasteur et la

communauté chrétienne. C’est le passage d’une catéchèse d’enseignement magistral à une

catéchèse de partage de la Parole de Dieu et des paroles de chacun.

4.6.7 Passage d’une catéchèse axée sur les sacrements à une

catéchèse qui fait la promotion du sacerdoce baptismal

L’équipe de la recherche-action en vient à la conclusion qu’il est important de faire le

passage d’une paroisse centrée sur l’offre et la demande de services religieux à une paroisse

centrée sur l’ecclésiologie de communion. Ce modèle demande de reconnaître que tous sont

des acteurs essentiels de la vie ecclésiale. Il existe plusieurs ministères. Dans l’exhortation

apostolique Familiaris consortio au numéro 38, il est écrit que les parents mariés ont un

ministère particulier : « Grâce au sacrement du mariage, la mission éducative est élevée à la

577 Clé USB 1, 658.

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256

dignité et à la vocation d’un « ministère authentique de l’Église au service de l’édification

des membres »578. C’est ainsi qu’on distingue deux ministères : celui des catéchistes et

celui des parents qui, par le sacrement du mariage, ont la mission de la formation

chrétienne de leurs enfants.

Le rôle des catéchistes et des intervenants pastoraux est de vivifier le don de Dieu chez les

catéchisés afin qu’ils puissent découvrir leur mission d’enfants de Dieu, celle de témoigner

de l’amour du Christ. Le rôle des baptisés n’est plus seulement d’être des auditeurs, mais

d’être des témoins de Jésus Christ. Tous sont invités à devenir témoins du Christ mort et

ressuscité :

Violette*** C’est ça, au début de l’année, là pour le lancement justement de

ces programmes-là, de catéchiste là, la communauté était sensibilisée de porter

tous ces jeunes-là puis leur donner, leur donner de l’information où est-ce que

l’on en est aussi. Puis, leur implication à eux autres est importante, ils ont à

soutenir tout ça, c’est la relève, c’est les témoins de la foi eux autres aussi579.

La catéchèse devient un outil afin de promouvoir le rôle du baptisé qui est appelé à rendre

compte de sa foi. L’ecclésiologie de communion apporte cette dimension de voir que tous

les services et les ministères sont complémentaires et essentiels. C’est le passage d’une

catéchèse sacramentelle à une catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal.

4.6.8 Passage d’une communauté paroissiale exclusive à une

paroisse vivante qui accueille et insère les catéchisés

Dans cette section, j’utilise quatre catégories : décloisonner la catéchèse et la mettre au

centre de la vie paroissiale, 13 unités de sens; messe de 17 h phénomène, 20 unités de sens;

ministères dans l’Église, 27 unités de sens; mouvements et associations, 2 unités de sens.

Ces catégories permettent de décrire la problématique du fonctionnement de la paroisse.

578 Église catholique. Pape (1978-2005 : Jean-Paul II), Les tâches de la famille chrétienne dans le monde

d'aujourd'hui : exhortation apostolique « Familiaris consortio » à l'épiscopat, au clergé et aux fidèles de

toute l'Église catholique (22 novembre 1981) (Montréal : Fides, 1981). 579 Clé USB 1, 705.

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257

La paroisse fonctionne par tiroir. Chaque activité est autonome et n’est pas liée

systématiquement aux autres. Pour illustrer cette idée, j’utilise l’observation faite à partir de

la pratique de la messe de 17 h, le dimanche après-midi. Les gens viennent à l’eucharistie

en cherchant un service religieux. Ils vivent une expérience spirituelle personnelle, ils n’ont

pas de lien avec les autres paroissiens présents, ils sont repliés sur eux-mêmes :

Marguerite*** Il y a ça, dans un côté, mais il y a un deuil d’un autre côté. Il y a

toute la situation au niveau de la communauté de cinq heures, où il n’y en a pas

de manque.

Rose*** Où elle se suffit à elle-même…

Violette*** Elle se suffit à elle-même…

Marguerite*** Puis ça crée, il n’y a pas d’ouverture, il n’y a pas de…

Rose*** Ça fait comme un petit ghetto là.

Marguerite*** Oui! Absolument, absolument, oui absolument580.

Les personnes qui s’occupent du service liturgique sont toujours les mêmes, depuis des

années. Le groupe est replié sur lui-même, il n’a pas besoin des autres :

Il serait nécessaire de changer la culture pour permettre à plus de gens

possibles d’avoir l’occasion et la formation nécessaire pour s’insérer dans

l’équipe et devenir non pas seulement des consommateurs de sacrements, mais

des acteurs581.

Cette situation est présente dans les divers secteurs de la paroisse. Elle illustre bien le

malaise de la paroisse. Le travail pastoral se vit en vase clos ou par cellule. Les tâches des

intervenants fonctionnent souvent sous le même modèle.

Le manque de prêtres et la diminution des religieux et religieuses ont permis le

développement et l’engagement des agents de pastorale depuis les années quatre-vingt. Ce

modèle de fonctionnement est souvent le même où tout passe par le spécialiste :

580 Clé USB 1, 86-87. 581 Clé USB 1, 134.

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258

Cette démocratisation que l’on comprendrait au sens où il n’y a pas une

catégorie de personnes, une catégorie de membres de la communauté, qui

monopolisent, par exemple l’enseignement comme autrefois, c’était l’affaire

des prêtres. Là, on dit, mais écoute, on peut parler de l’enseignement de la

catéchèse, c’est monsieur le prêtre qui est responsable de ça, qui est habilité à

enseigner582.

Le décloisonnement passe par un changement de la pratique actuelle. L’Église est

interpellée à passer du modèle où toute son action est centrée sur deux ministères, celui des

prêtres et des agents de pastorale, à une Église toute ministérielle qui vit une ecclésiologie

de communion. Mais pour être une Église toute ministérielle, il est nécessaire de

reconnaître les divers ministères; ceux des parents, des catéchistes ainsi que l’apport des

enfants, des jeunes, des bénévoles et des baptisés à la vie paroissiale. Cette vision des

ministères demande qu’elle soit inclusive et créatrice afin que tous se sentent membres de

la famille Église :

Blé*** Les bénévoles, alors, c’est que dans les ministères baptismaux on dit

qu’il y a quatre éléments qu’il ne faut pas échapper : bénévoles, catéchètes

bénévoles, parents, enfants et communautés chrétiennes. C’est que pour les

ministères délégués, on parle des agents de pastorale et de ministère ordonné,

on parle de prêtres à ce moment-là. Marguerite*** Et là on va chercher tout le

monde583.

Mais cette manière de voir implique une dynamique de formation permanente pour tous les

acteurs. Cette formation demande d’adhérer à une mission commune, celle d’annoncer

Jésus Christ pour le monde contemporain. Le décloisonnement apporte une nouvelle

perspective et l’adhésion à un projet missionnaire. La catéchèse et la formation des

catéchistes deviennent des éléments inséparables et complémentaires dans le projet

catéchétique. Pour développer cette réalité, la communauté est invitée à opter pour

l’inclusion et à voir l’autre comme une chance et un apport pour vivre l’Évangile. C’est le

passage d’une paroisse cloisonnée à une paroisse inclusive.

582 Clé USB 1, 9. 583 Clé USB 1, 42-43.

Page 279: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

259

4.6.9 Passage d’une catéchèse centrée sur la perfection à

celle du manque et de la miséricorde

Le thème de la vie spirituelle a souvent été mentionné dans la recherche-action. Trois

catégories abordent le sujet de la dimension spirituelle : compétence spirituelle et réactions

grille de Fossion, 5 unités de sens; prière, 12 unités de sens; théologie et spiritualité du

manque, 27 unités de sens. Chez les membres de l’équipe de recherche-action, les

catéchistes et les parents, il y a unanimité à reconnaître que la prière et la spiritualité font

partie intégrante de la vie chrétienne et de la formation des différents acteurs de la

catéchèse.

L’initiation à la prière est importante, elle fait partie de la démarche catéchétique : « La

prière est un lieu de rencontre avec Jésus Christ »584. Ainsi, dans la culture ecclésiale, on

mêle souvent appel à la sainteté et désir d’avoir une organisation et une pratique sans faille,

ce qui n’est pas possible, car nous sommes tous des humains. C’est ainsi que plusieurs

intervenants pastoraux ne veulent pas exprimer des limites, des manques dans leur travail

ou dans leur organisation, car cela peut être perçu comme des faiblesses ou un échec.

Une réflexion à partir de l’expérience des membres de l’équipe de recherche-action en vient

à la conclusion que, dans une communauté chrétienne, le manque n’est pas toujours un

inconvénient, mais peut être un levier. Le manque peut être la conséquence d’une blessure

dans la vie d’un individu ou d’une organisation. Exprimer les manques dans l’organisation,

le manque de bénévoles, suscite souvent l’engagement des gens dans la communauté :

Cela demande de définir les tâches en petits morceaux et dire : on a besoin

d’aide et on fait du recrutement, puis on va nous aider. Dans le fond, c’est

comme une autre dynamique et c’est là que l’on s’aperçoit que lorsque que l’on

exprime les manques, les gens s’impliquent et de… et la façon de s’impliquer

provoque un cheminement de foi.

Marguerite*** Ah ! Ça, c’est évident585.

584 Clé USB 1, 228. 585 Clé USB 1, 86.

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260

Exprimer qu’il y a un manque en soi, dans la vie de la communauté paroissiale devant la

communauté, permet d’ouvrir de nouvelles possibilités. Cela remet en question la façon de

faire à laquelle nous sommes habitués depuis longtemps :

Lys*** La spiritualité du manque, le fait de reconnaître qu’il y a un vide, qu’il

y a une crise, qu’il y a des échecs est comme une façon d’ouvrir des nouvelles

portes. Marguerite*** Moi, je comprends très bien là oui, oui…

Blé*** Oui, tu le formules bien.

Marguerite*** Oui, oui.

Violette***, Mais, je verrais aussi la difficulté des gens à se donner le droit de

le dire.

Rose*** De le dire.

Lys*** C’est vrai586.

Plusieurs grands événements bibliques se passent quand on exprime le manque. Je pense à

la manne dans le désert, la multiplication des pains, la guérison des dix lépreux587. Un autre

aspect de cette spiritualité est le fait d’exprimer que nous sommes humains et que l’on a

besoin des autres. Ce climat permet à plusieurs personnes d’oser prendre la parole et de

partager leur expérience de vie. Plusieurs en profitent pour demander de l’aide et de

l’accompagnement spirituel. Ils peuvent sentir que même s’ils n’ont pas toujours vécu selon

le message de l’Évangile, ils ne sont pas rejetés, ils peuvent être accueillis et invités à

suivre l’Évangile. Il est question ici d’accorder à tous le droit à l’erreur et de reconnaître

qu’à travers l’humanité de chacun Dieu nous interpelle; il s’agit du passage d’une catéchèse

basée sur la perfection à atteindre à une catéchèse de la miséricorde.

4.6.10 Passage d’une catéchèse enseignante à une catéchèse

paroissiale d’initiation chrétienne

Dans cette deuxième analyse, j’approfondis les neuf repères identifiés par l’équipe de

recherche. La pratique catéchétique actuelle est issue du modèle scolaire qui a priorisé

l’enseignement et dont les acteurs étaient des professionnels. L’Église au Québec a tout

586 Clé USB 1, 747. 587 Ex 16. Mt 14, 13-21. Lc, 17, 11-19.

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261

simplement déplacé le modèle de l’école à la paroisse. Les changements ecclésiaux et

sociaux ont montré que le modèle catéchétique appartient à un « autre millénaire ». En

m’inspirant des catéchistes et des parents, j’en viens à la conclusion que la catéchèse n’a

d’avenir que si la responsabilité est partagée entre tous les acteurs de la paroisse et qu’elle

se vit au cœur de son action. C’est dans la complémentarité des ministères et dans une

dimension de formation continue que se crée des espaces afin de laisser résonner la Parole

de Dieu entre tous les acteurs. C’est par cette Parole échangée que l’on pourra avoir une

catéchèse paroissiale initiatique qui renouvellera la communauté chrétienne et, par le fait

même, l’Église.

Tableau 24 : Synthèse des passages à vivre pour le

renouvellement de la vie catéchétique en paroisse

Passage Situation actuelle But visé

1 Modèle de la préparation aux

sacrements

Catéchèse qui forme des témoins et

disciples de Jésus.

2 Pastorale de service Pastorale d’engendrement

3 Catéchèse animée par quelques

acteurs

Catéchèse où tous sont acteurs

4 Catéchèse comme rite de passage Catéchèse qui approfondit l’identité

chrétienne

5 Prêtre des sacrements Prêtre disciple et évangélisateur

6 Catéchèse qui est un exposé sur

la foi catholique

Catéchèse, lieu d’échange de la Parole

de Dieu, des paroles

7 Catéchèse sacramentelle Catéchèse qui promeut le sacerdoce

baptismal

8 Paroisse cloisonnée et tentée par

l’exclusivité

Paroisse inclusive

9 Catéchèse de la perfection Catéchèse de la miséricorde

10 Catéchèse enseignante Catéchèse paroissiale d’initiation

Ces différents passages demandent un changement dans la vie paroissiale. Pour vivre ce

changement, je propose deux éléments qui surgissent de la recherche. Le premier est de

penser à une formation des différents acteurs de la catéchèse dans un projet holistique. Le

deuxième est l’approfondissement et l’émergence d’un nouveau concept, soit celui de la

réciprocité en catéchèse.

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262

4.7 La formation dans une paroisse qui opte pour l’option

de prioriser la catéchèse au centre de la vie paroissiale

Lorsqu’une communauté paroissiale opte de mettre au centre de sa vie la catéchèse et que

celle-ci devient une de ses priorités, cela a de grandes répercussions. On peut se demander

quels sont les instruments qui pourraient nous guider dans un projet de formation de la

paroisse. L’équipe de recherche-action a réfléchi sur la question, trois référents ont été

retenus et ont fait l’unanimité : la Parole de Dieu, le Catéchisme de l’Église catholique et le

Directoire général pour la catéchèse. La Parole de Dieu a été vraiment reconnue comme

l’élément fondamental. Sa connaissance est essentielle pour tous les acteurs et fait partie de

la base de la formation.

Les deux autres instruments pour la formation sont le Catéchisme de l’Église Catholique et

le Directoire général pour la catéchèse. Le Catéchisme de l’Église Catholique est vu

comme un livre de référence pour aider à exprimer et approfondir sa foi. Le Directoire

général pour la catéchèse est, pour les catéchistes, un témoin de leur aspiration et de ce

qu’ils veulent :

Marguerite*** Donne juste un petit exemple. Dans l’exposé préliminaire on

parle de l’annonce de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui, le champ du

monde, il livre dans le champ du monde des semailles de l’Évangile juste en

préliminaire. C’est comme ça dans tous les chapitres, c’est merveilleux. Il faut

le lire, c’est ça je m’aperçois…

Anémone*** C’est notre vie.

Marguerite*** Il faut le lire588.

J’ai été étonné de découvrir que les gens n’avaient pas peur de ces trois instruments : Bible,

Catéchisme de l’Église Catholique et Directoire général pour la catéchèse. Pour les

catéchistes, ces instruments sont comme des dictionnaires, des grammaires qui aident à

écrire. Une paroisse qui opte pour l’option de la catéchèse et veut former ses différents

acteurs doit déjà considérer ces derniers comme des adultes scolarisés. La formation

proposée doit s’inspirer des principes mêmes de l’andragogie religieuse : reconnaître

588 Clé USB 1, 392-393.

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263

l’autonomie des personnes, faire appel à leur expérience, tenir compte des besoins et des

intérêts, répondre au désir de percevoir immédiatement l’utilité de leur apprentissage589.

4.7.1 Une formation pour tous

La formation est un outil pour s’approprier le don de Dieu, un moyen pour vivre une

expérience spirituelle. C’est proposer de rencontrer Jésus Christ, et cela, dans une ambiance

de fête et de vie de famille. Elle doit susciter la construction et développer une relève dans

la communauté paroissiale afin d’assurer l’annonce de l’Évangile.

4.7.2 Définir la formation pour les baptisés

L’équipe de recherche-action a constaté que les baptisés sont des personnes capables de

faire des choix. Ce désir se manifeste par une recherche spirituelle où le désir d’apprendre

est souvent semblable à celui des catéchistes et des intervenants ecclésiaux :

Marguerite*** Puis il y a le désir de vivre, d’apprendre, un désir de grandir

dans la connaissance pas dans la foi, mais dans la connaissance. Puis là, il y a

des nuances à apporter dans le sens que pour les uns ça va être plus des

connaissances, pour d’autres ça va être plus un cheminement de foi : une

connaissance de la Bible par exemple, une connaissance de Jésus Christ, une

connaissance de la vie dans… dans la vie chrétienne590.

Ce désir de mieux connaître, approfondir ou découvrir sa foi se manifeste par des questions,

mais souvent les parents et les jeunes n’ont pas les mots pour exprimer ce besoin. Cette

formation, pour les baptisés, n’est pas seulement liée à développer une meilleure

connaissance du christianisme. Elle devient un outil afin de découvrir, d’affermir sa propre

identité chrétienne. La formation des baptisés n’est pas seulement l’acquisition de

connaissances, mais bien l’appropriation de sa propre identité dans les divers aspects de la

vie de chaque personne. Cette recherche d’identité n’est pas unique aux baptisés : elle

concerne aussi tous les ministres dans l’Église.

589 Office de catéchèse du Québec et al., Principes d'andragogie religieuse (Ottawa : Novalis, 1981). 590 Clé USB 1, 94.

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264

Les catéchistes ont indiqué l’importance de la Bible et du Catéchisme de l’Église

Catholique comme livre de référence, mais un guide précis est absent. Ce dernier

permettrait d’évaluer les différentes propositions de parcours et d’élaborer des parcours

adaptés à la réalité québécoise. Pour la formation des futurs prêtres, chaque conférence

épiscopale produit une ratio formationis sacerdotalis nationalis591. Cette ratio est un guide

pour les formateurs qui englobe tous les aspects de la vie presbytérale, humaine, spirituelle,

pastorale et intellectuelle. Une ratio de formation pour les baptisés pourrait s’inspirer du

modèle pour la vie presbytérale, des résultats de la recherche-action, de l’article d’André

Fossion sur la compétence catéchétique qui a été validée par le groupe de catéchistes, des

tâches de la catéchèse dans le Directoire général de catéchèse, et des orientations des

évêques du Québec dans « Jésus Christ chemin d’humanisation ».

4.7.3 La formation des catéchistes et d’un corps de catéchistes

Plusieurs catégories décrivent le rôle, la tâche et certains aspects de la vie des catéchistes.

Elles regroupent 378 unités de sens, soit 12,85 % du total de l’ensemble de la cueillette des

données. La proposition d’André Fossion sur la formation des catéchistes a été présentée

lors de la rencontre de la recherche-action avec les catéchistes. Cette grille de formation

d’André Fossion propose cinq compétences à acquérir : théologique, spirituelle,

pédagogique, organisationnelle et culturelle. La réception a été positive; elle a enclenché

une réflexion sur la place et le rôle des catéchistes dans la paroisse. Ces notions sont

abordées dans les pages suivantes.

4.7.3.1 La formation et la constitution d’un corps de catéchistes

Le but de la rencontre de l’équipe de recherche-action avec les catéchistes était d’évaluer

les motivations, les besoins de formation, les outils qu’ils aimeraient obtenir. Est-ce que la

grille de formation des catéchistes d’André Fossion correspond à leurs aspirations? Quelles

sont les attentes vis-à-vis de l’équipe pastorale? L’équipe pastorale a présenté le document

591 Conférence des évêques catholiques du Canada. Église catholique, La formation des futurs prêtres : Ratio

formationis sacerdotalis nationalis (Ottawa : Éditions de la CECC, 2000).

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265

de la formation des catéchistes que propose André Fossion. La première réaction des

catéchistes a été d’affirmer que cette grille était réaliste, qu’elle représentait bien leurs

aspirations de formation. Les catéchistes ont aimé la vision holistique de cette proposition.

Ils ont manifesté le désir d’avoir un regroupement de tous les catéchistes pour la formation

en paroisse.

Ce souhait d’avoir un regroupement ou un corps des catéchistes a, pour eux, plusieurs

fonctions. La première est de développer les diverses compétences afin d’assumer les défis

de la formation des catéchisés de tous les âges. Ils proposent même une mobilité entre eux.

Ils soulignent que le catéchiste ne doit pas être cloisonné à un groupe, mais doit pouvoir

servir selon ses charismes. Les catéchistes peuvent apporter leur collaboration aux divers

groupes selon les besoins de formation :

« Cela appelle les gens, les gens à travailler en équipe pour avoir l’ensemble

des compétences ».

Blé*** Alors ces choses que l’on a notées …

Rose*** C’est ce que l’on disait, on n’a pas toutes les compétences, mais que

chacun en équipe on va les avoir les compétences, tout le monde ensemble592.

Selon eux la formation doit se donner en même temps pour tous les catéchistes des

différents parcours. Cette formation commune a pour but de les habiliter à partager les

orientations de la communauté paroissiale et du diocèse. Par contre, ils veulent que la

formation se donne au niveau local pour garder le lien de proximité avec la communauté

paroissiale, mais ils sont ouverts à une collaboration entre les paroisses surtout dans les

parcours spécialisés. Ce groupe est appelé à devenir un lieu de ressourcement et de

solidarité. C’est un groupe de soutien, de lieu de reconnaissance par l’équipe pastorale. Le

modèle de type de formation, ils le puisent dans les Actes des Apôtres en se rappelant la vie

de la communauté primitive :

Tulipe*** Je dirais c’est, c’est ça, moi j’ai besoin de l’enseignement comme,

comme au début des communautés, ils étaient assidus à l’enseignement des

592 Clé USB 1, 538.

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266

apôtres, ils étaient assidus à la prière. Ça fait que moi, c’est ça qui m’est venu à

l’esprit puis j’ai besoin aussi de prier ensemble593.

Ce groupe devient aussi le lieu de coordination de la catéchèse et du lien avec l’équipe

pastorale où se trouvent les leaders et les formateurs du groupe.

4.7.3.2 Les catéchistes

Comme je l’ai mentionné plus haut, les catéchistes désirent une formation qui regroupe tous

les catéchistes des différents parcours. Pour eux, la formation a pour but d’habiliter le

catéchiste à devenir un témoin significatif de Jésus Christ et un représentant de l’Église

universelle :

• Pour les catéchètes et les animateurs de pastorale, il est important qu’ils

aient le goût de partager leur amour de Jésus et de l’Église.

• Une des qualités des différents intervenants est qu’ils soient branchés sur la

foi.

• Il est important de laisser de la place pour que les parents, les catéchètes,

les agents de pastorale, les prêtres, les prêtres puissent s’exprimer.

• L’accueil lors des rencontres est essentiel594.

Avant même de penser et réaliser la formation pour les catéchistes, il est nécessaire que

l’aspirant catéchiste puisse posséder quelques qualités minimales avant d’entrer en

processus de formation. C’est pour cela que l’équipe de recherche-action, après la rencontre

des catéchistes, résume les prérequis en quelques phrases. Le premier prérequis :

- L’importance capitale de faire connaître la personne de Jésus Christ avec

toute son humanité.

- Il faut tomber en amour avec la personne de Jésus pour être catéchiste.

- Le message va passer si le catéchiste vit de Jésus Christ en lien avec la vie

quotidienne.

- Je ne peux donner ce que je n’ai pas.

- Être catéchiste demande d’accepter d’expérimenter la vie communautaire,

d’accepter ses faiblesses, d’avoir le sens de l’humour et d’être

accueillant595.

593 Clé USB 1, 386. 594 Clé USB 1, 56.

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267

Le deuxième prérequis est celui de l’amour de l’Église. Il s’agit d’avoir un vécu en lien

avec la communauté paroissiale. La foi se vit en Église, en communauté. Les gens insistent

sur la foi, qui consiste à vivre une relation vraie et dynamique avec Jésus Christ. Les autres

prérequis sont connexes à cette relation de foi avec Jésus Christ. C’est la capacité de

communiquer cette expérience, d’être capable d’entrer en communication avec les autres et

de connaître l’Évangile. C’est d’accepter d’être dans une dynamique de formation

permanente et de transmettre ce qu’on a reçu. On mentionne la capacité de travailler en

équipe et de reconnaître les compétences chez les catéchisés. Le discernement pour choisir

les catéchistes pourrait s’effectuer par l’équipe pastorale avec le comité de coordination de

la catéchèse en paroisse.

Une fois les prérequis déterminés, je peux mieux définir la formation des catéchistes

bénévoles. Cette formation doit toucher tous les pôles de la vie chrétienne. Ce désir de

formation est orienté vers un approfondissement de la foi, de la Tradition, de la vie

ecclésiale et d’une intensification de la vie fraternelle et missionnaire. Les catéchistes

soulignent que l’ambiance est importante. Ils souhaitent que la formation se vive dans un

esprit de fête. C’est une activité de ressourcement qui se vit dans la joie :

Tulipe*** Faut prier ensemble pour les besoins des catéchètes pour la

communauté qu’on va, dans laquelle on va, on vit. Mais cette prière-là, comme

tu disais : si on est toujours la mine basse ce n’est pas trop, trop attrayant pour

ceux qui viennent alors c’est ça et que : Qu’il y ait un esprit de fête, comme

elle le dit, je trouve cela très important. Puis dans Foi et Lumière, cela m’a

beaucoup apporté. Je fais partie du mouvement Foi et Lumière et il y a toujours

un temps pour la fête596.

Ils ont le désir que le modèle de formation se rapproche de la description de la vie de la

communauté primitive citée dans les Actes des Apôtres. Les catéchistes sont invités à

développer l’habilité de pouvoir raconter et présenter au moins les récits les plus

importants, et d’être capables d’habiliter les catéchisés à découvrir et à utiliser la Bible.

595 Clé USB 1, 492-493. 596 Clé USB 1, 387.

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268

D’ailleurs, cet élément amène à remettre en question la pratique pastorale où les

intervenants et les catéchistes utilisent des feuilles détachées pour présenter des textes

bibliques et non pas une Bible complète.

Les catéchistes ont trouvé important d’apprivoiser le Catéchisme de l’Église Catholique.

Pour eux, c’est un livre de référence et ils peuvent vérifier leur idée sur la foi et aussi, pour

certains, l’actualiser : « Anémone*** Le catéchisme, moi je l’ai et ça m’a bien aidée à

situer des choses là parce que j’avais des vieilles idées »597.

Pour plusieurs, la découverte du DGC a été comme une révélation. Ce document répond à

plusieurs de leurs questions et en même temps présente la catéchèse dans une perspective

similaire à ce à quoi ils aspirent. Selon les critères de l’accueil joyeux par les catéchistes du

DGC, il importe qu’il y ait un fondement biblique, un lien avec la communauté et une

formation holistique. Le DGC propose une catéchèse qui a un objectif missionnaire : il

décrit bien les rôles du curé, des catéchistes, des parents et des autres acteurs. Dans la

formation proposée par le DGC, il y a la dimension théologique, spirituelle, pédagogique,

ainsi que celle des sciences humaines et ecclésiologiques.

4.7.4 Présentation de la grille d’André Fossion et commentaires

des catéchistes

Lors de la rencontre avec les catéchistes, la grille de formation d’André Fossion a été

présentée (voir 4.7.3). Il définit ce qu’est la catéchèse :

Elle consiste en toute activité dialoguée, pédagogiquement organisée, qui a

pour but d’aider les personnes et les communautés à s’approprier la foi et à la

vivre en ses différents aspects598.

Pour la formation des catéchistes, il propose un modèle décliné en cinq compétences :

597 Clé USB 1, 398. 598 Fossion, La compétence catéchétique.

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269

L’activité catéchétique ainsi définie n’est pas simple. Elle requiert de la part

des responsables de la catéchèse et des catéchistes un ensemble intégré

d’aptitudes, de compétences. D’où, la nécessité d’une formation vivant

l’acquisition et l’exercice de ces compétences. Schématiquement, on peut

considérer que toute activité catéchétique réclame de la part des animateurs de

catéchèse la mise en œuvre intégrée de cinq grandes compétences :

théologique, culturelle, pédagogique, organisationnelle et spirituelle599.

Cette grille, je l’ai adaptée à la réalité du Québec600. Je l’ai présentée aux divers catéchistes

pour savoir si elle faisait écho par rapport à leur réalité. Les catéchistes se sont retrouvés

dans cette grille. Ils ont apprécié sa vision globale et la place qu’elle donne à la catéchèse

dans la paroisse. Cela signifie que les catéchistes, pour l’exercice de leur ministère,

proposent une vision ecclésiale et collégiale. Ils considèrent que cette grille est réaliste. Une

de ses qualités est qu’elle permet de distinguer entre ce qui est essentiel dans la formation

de ce qui est accessoire :

Marguerite***, mais elle nécessite néanmoins un minimum de connaissances

de base. Pouvoir distinguer l’essentiel de l’accessoire pour pouvoir mettre en

relation les différentes affirmations de la foi ainsi que les divers aspects de la

vie chrétienne.

Fraisier*** Ça demande une certaine rigueur pour réussir à accomplir ça là. Ce

n’est pas une affaire que l’on peut faire une fois de temps en temps-là, il faut

vraiment s’y appliquer de façon assez…

Marguerite*** Si on se donne une formation commune à partir de ça, je pense

que l’on fait une bonne partie du chemin601.

La vision holistique d’André Fossion, sa structure sous forme de dialogue, sa pédagogie

structurée et sa vision organique ont plu aux catéchistes et à l’équipe de recherche.

Je reprends les cinq compétences en notant les réactions des catéchistes et de l’équipe de

recherche-action. Elles sont présentées dans le même ordre que celui d’André Fossion :

théologique, culturelle, pédagogique, organisationnelle et spirituelle.

599 Ibid. 600 Clé USB 1, 348. 601 Clé USB 1, 424.

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270

Pour la compétence théologique, les catéchistes sont d’accord avec l’énoncé en apportant

quelques ajouts. Les catéchistes insistent sur l’ajout du Notre Père et de quelques éléments

de piété populaire comme le chapelet. Dans l’histoire du Salut, ils insistent sur la

connaissance de la vie de quelques grands saints. Ces éléments vont permettre et stimuler le

dialogue entre les générations. Les catéchistes voient une dynamique de complémentarité

entre la capacité de rendre compte de la foi et la dévotion populaire. Voici un exemple :

Violette*** Si on parle de… gardez ici on a mentionné le chapelet, mais si le

chapelet n’est pas accompagné de la méditation des mystères, cela ne donne

pas grand-chose là. Je pense que le chapelet est en fonction de faire connaître

les quinze étapes de la vie de Jésus, les principales étapes de la vie de Jésus.

Blé*** Les vingt602.

La compétence culturelle est un élément essentiel pour les catéchistes. En lisant ce texte, les

catéchistes ont affirmé que la culture actuelle n’est pas chrétienne, elle est axée sur le

matérialisme et la consommation. Les catéchistes ont insisté sur la capacité d’entrer en

dialogue avec les gens :

Marguerite*** Disons que tout ça bon, c’est intéressant d’avoir les

connaissances dans ce sens-là, mais la chose qui est la plus importante, c’est de

connaître les questions, les goûts, les… des gens, la dernière partie : « Entrer

en dialogue avec les personnes qui participent à la catéchèse ».

Violette*** Oui !

Dicentre***Ah bien oui !

Marguerite*** C’est ça.

Blé*** Le plus important c’est ça, c’est de connaître…

Bouton d’or*** Oui603!

Dans ce dialogue, les catéchistes n’ont pas tout à bénir, mais ils ont la mission d’interpeller

les gens par l’Évangile et de les inviter au dépassement.

Pour la compétence pédagogique, les catéchistes expriment qu’ils n’ont pas reçu de

formation pédagogique; mais lors de la présentation de la grille, il est apparu qu’ils auraient

602 Clé USB 1, 433. 603 Clé USB 1, 439-440.

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271

aimé recevoir une formation qui les aiderait à devenir meilleur enseignant, animateur,

facilitateur d’apprentissage, accompagnateur, compagnon de route et témoin de foi.

La compétence organisationnelle telle que présentée par André Fossion interpelle la

pratique actuelle dans la paroisse. La paroisse a à fédérer les énergies dans un effort

concerté afin de passer d’une pastorale de services à une pastorale d’initiation chrétienne.

Le catéchiste et la paroisse se trouvent en tension entre la nécessité d’être à l’écoute des

besoins des catéchisés, la promotion de l’Évangile et les liens à développer entre les divers

groupes et organismes de la paroisse.

La compétence spirituelle a fait l’unanimité. Pour les catéchistes, être animés par le souffle

de l’Esprit et de l’Évangile est une nécessité. C’est cet Esprit Saint qui développe l’amour

de l’Église. Il est nécessaire de vivre son ministère dans cette dynamique :

Marguerite*** Je suis d’accord avec ça.

Violette*** Bien c’est sûr, il faut être cohérent avec ce que l’on est…

Fraisier*** Ça, ça prend tout cela? (Rires)

Fraisier*** Il n’y a rien à jeter là-dedans, rien à retrancher…604

Dans l’ensemble, la grille d’André Fossion a été bien reçue. Les modifications sont dans

l’ordre de l’adaptation de cet instrument dans une paroisse de la banlieue nord de Montréal.

Cet accueil montre aussi la pertinence d’un programme de formation; mais la recherche-

action a identifié un autre défi : celui du recrutement des catéchistes bénévoles.

4.7.5 Catéchistes : recrutement et reconnaissance des

compétences

L’équipe de recherche-action croit qu’il est important d’interpeller les paroissiens à

s’engager dans la mission catéchétique. C’est évident que les paroissiens veulent collaborer

604 Clé USB 1, 457-458.

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272

sans être pris dans un engagement qui va les emprisonner. Le recrutement a deux objectifs.

Le premier est de former des catéchistes afin de répondre aux besoins des catéchisés et des

gens de tous les âges qui veulent devenir disciples de Jésus Christ dans la communauté

paroissiale. Le deuxième objectif est de demander l’aide des paroissiens afin de mettre leur

compétence au service de la mission catéchétique. Il y a ici un échange, une dynamique

d’enrichissement mutuel. Dans le désir de respecter les gens, leur disponibilité et leurs

charismes, l’équipe de recherche-action a pensé à trois formes précises d’engagement à

partir de la pratique pastorale. Les trois types d’engagements sont : bénévoles, aide-

catéchistes et catéchistes.

Pour l’équipe de la recherche-action, la première étape pour faire du recrutement est

d’abord d’avoir un programme de formation. La deuxième étape est d’informer les

paroissiens et les catéchisés au sujet du rôle et de l’importance de la catéchèse dans la vie

de l’Église. Le recrutement est l’affaire de tous et il n’est pas lié seulement aux tâches des

intervenants pastoraux que sont les agents de pastorale et les prêtres. Le recrutement est à

refaire chaque année, car les gens peuvent avoir d’autres défis à relever dans leur famille ou

au niveau professionnel. Le recrutement des bénévoles est continuellement à

recommencer :

Dans le groupe de parents demandeurs, il y a parmi ces parents des gens qui

ont déjà un parcours personnel, une expertise catéchétique ou biblique. Il y a

des personnes qui ont œuvré dans des groupes comme les scouts, les équipes

sportives, les camps d’été, etc. Ils ont aussi une expérience pertinente605.

L’implication doit être graduelle selon le désir de ceux qui répondent à l’appel.

4.7.6 La formation de l’équipe pastorale

La recherche-action a permis de vérifier l’hypothèse de départ. Par contre, l’hypothèse s’est

transformée car l’équipe pastorale n’a pas à former seulement les catéchistes bénévoles. En

participant à la charge pastorale du pasteur, l’équipe pastorale devient à la fois leader,

605 Clé USB 1, 347.

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273

animatrice et réalisatrice de la formation des différents acteurs de la catéchèse. Les

membres de l’équipe pastorale ont à vivre un passage : celui de devenir formateurs des

acteurs en catéchèse. Le modèle retenu pour la formation des intervenants pastoraux en

catéchèse est un modèle holistique et intégral qui déborde du cadre théologique. Cette

formation est composée de cinq volets : théologie, spiritualité, sciences humaines,

pédagogie et ecclésiologie.

Chez les intervenants pastoraux, la formation théologique a comme défi de développer une

bonne connaissance théologique et de les rendre capables de former des gens qui pourront,

à leur tour, vulgariser le message de Jésus Christ. Cela demande une formation en

littérature biblique, en dogmatique, en histoire, en liturgie, en morale et en ecclésiologie.

L’objectif est de devenir habilité à présenter des outils et des livres de référence qui

deviendront pour les catéchistes et les autres acteurs, des outils familiers afin qu’ils puissent

devenir autonomes dans leur approfondissement de la foi par leurs connaissances des outils

catéchétiques et de leur utilisation. Une autre compétence à acquérir sera la capacité de

raconter les récits fondateurs et tout spécialement les récits bibliques.

La formation spirituelle comporte de connaître plusieurs écoles de spiritualité; c’est

d’expérimenter différents types de prières et d’être capable de les enseigner et de les faire

expérimenter : prière personnelle, oraison, prière en groupe, dévotion populaire. L’objectif

est de faire découvrir toute la diversité de l’héritage spirituel catholique, les différentes

écoles de prières et les différentes spiritualités.

La formation en sciences humaines permet de se procurer des outils afin d’entrer en

dialogue avec le monde contemporain et de mieux le comprendre. Il y a des bases à

apprendre en histoire, en sociologie et en psychologie. Il s’agit de la connaissance du

développement psycho religieux de la personne.

La formation pédagogique comprend de s’habiliter à développer plusieurs formes de

pédagogies. Il y a la pédagogie pour les enfants et les jeunes ainsi que l’andragogie pour les

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274

adultes. C’est aussi de savoir animer des groupes variés et d’être capable d’initier les gens à

la vie chrétienne.

La dernière formation est celle qui touche un domaine ecclésiologique particulier que l’on

appelle l’oïkodomique. Il s’agit du domaine que décrit Marcel Viau lorsqu’il parle de

l’édification de l’Église dans une dynamique communautaire :

On considère également cet acte sous forme communautaire qui regroupe le

secteur de l’édification de l’Église. Le domaine de formation et de recherche

appelé « oïkodomique » prendra cet acte en charge606.

C’est dans ce domaine de formation qu’il serait utile de développer l’habilité à découvrir et

nommer les compétences chez les baptisés par les membres de l’équipe de pastorale. Les

membres de l’équipe pastorale ont à devenir des formateurs de formateurs; la paroisse se

transforme et passe d’un centre de distribution des sacrements à un centre de formation à la

vie chrétienne des baptisés et de formation des acteurs en catéchèse par l’équipe pastorale.

L’équipe de recherche-action, tout en soulignant le rôle de l’équipe pastorale, a mentionné

à la fois les ressemblances et les particularités du ministère presbytéral. La spécificité de ce

ministère demande de développer quelques aspects particuliers de la formation. C’est ce

que je présente dans la prochaine section.

4.7.7 La formation des pasteurs

Les prêtres sont appelés à être des pasteurs de la communauté. Le souhait est que la

paroisse devienne un lieu de formation à la vie chrétienne pour tous les âges. La paroisse

est aussi le lieu de formation des bénévoles, des aide-catéchistes et des catéchistes. Ce

changement de modèle demande plusieurs habiletés pour que le pasteur et les prêtres soient

capables de gérer les changements et les résistances aux changements.

606 Marcel Viau, « Les actes fondateurs de la théologie pratique, » dans Précis de théologie pratique :

Deuxième édition augmentée, dir. Gilles Routhier et Marcel Viau (Montréal: Novalis, 2004).

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275

Le pasteur doit être capable de discerner chez l’autre les dons qu’il a reçus et qui pourraient

aider la communauté paroissiale dans son développement et sa croissance. À partir des

besoins des gens et des besoins de la mission catéchétique en paroisse, le pasteur a à

planifier, préparer, accompagner, réaliser et évaluer la formation des différents acteurs de la

catéchèse. Le pasteur est appelé à être un maître en théologie et en spiritualité. Il est

responsable de la coordination de la vie paroissiale. Son action est de stimuler la mission

d’évangélisation, d’insuffler cet élan dans toutes les dimensions de la paroisse, de se

concentrer sur la proclamation de la Parole de Dieu, et d’animer la formation des différents

acteurs de la catéchèse. Le prêtre est interpellé à développer le sens du travail en équipe et

la délégation des responsabilités à devenir formateurs de formateurs en animant les équipes

pastorales qui deviennent des équipes de formation des baptisés, des bénévoles et des

catéchistes. Dans un travail de collaboration et de coresponsabilité, la responsabilité de

développer le ministère de la Parole afin que tous soient capables de rendre compte de leur

foi, revient au prêtre et à son équipe pastorale.

4.7.8 La formation requise de la communauté chrétienne

Dans la recherche-action, la catégorie « Communauté paroissiale et formation de la

communauté » regroupe 50 unités de sens, ce qui correspond à 1,7 % de tout le contenu de

la recherche. Plusieurs éléments ont été identifiés pour la formation de la communauté

paroissiale. Dans la paroisse, il y a quelques défis à relever afin de réaliser le rêve d’une

communauté paroissiale qui prend en main le ministère de la catéchèse. Cependant, il y a

quelques irritants tels que la difficulté d’accueillir les nouveaux paroissiens et l’attitude

cléricale de certains bénévoles qui ne veulent pas insérer de nouvelles personnes, même si

elles ont toutes les compétences requises. Les nouveaux sont perçus comme des éléments

dérangeants, des perturbateurs de l’ordre établi. Un autre irritant est la peur du changement

et de la nouveauté perçue comme des menaces à la tranquillité, à l’orthodoxie et

l’orthopraxie.

Pour faire face à ces irritants et dans le désir de développer un nouveau modèle paroissial

où la catéchèse est au cœur de la vie de la paroisse, le premier travail de formation est

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276

d’informer la communauté paroissiale du projet catéchétique et de ce qui se réalise dans la

paroisse. Dans la recherche-action, on a constaté que les paroissiens n’étaient pas informés

adéquatement des activités catéchétiques :

Marguerite*** Dans la communauté célébrante : utiliser le feuillet paroissial,

prendre le message dans le (sic), au prône, avoir le témoignage d’une personne

qui a fait partie de l’équipe de catéchètes, ou de catéchistes. Avoir dans

l’homélie traité de la vocation baptismale du rôle de la communauté et de la

mission de l’Église en tenant compte des enjeux présents. Que les gens soient,

les gens de la communauté soient vraiment au courant de ce qui se passe là607.

Il est important d’utiliser les canaux habituels pour informer les paroissiens comme le

mentionnait une des catéchistes. Elle suggérait de demander à des catéchisés qui ont vécu

les parcours et vécu une conversion de partager leur expérience de rencontre avec Jésus

Christ aux paroissiens.

Le deuxième aspect est de rappeler que tous sont des acteurs en catéchèse, même la

communauté paroissiale. C’est elle qui planifie, organise et évalue la catéchèse.

Ces éléments doivent se traduire par des gestes, comme avoir un comité d’accueil aux

célébrations dominicales, inviter les paroissiens à jouer des rôles dans le domaine

liturgique, offrir un café à la fin de la messe, annoncer des moments importants de la vie de

la communauté, présenter les nouveaux baptisés, accueillir les catéchumènes et plusieurs

autres.

Le troisième aspect est d’interpeller des gens de la communauté paroissiale qui viennent

aux eucharisties à collaborer comme catéchistes. La catéchèse est la responsabilité aussi des

gens qui célèbrent; tu as reçu de la communauté et tu es invité à donner en retour :

Comment faire pour recruter les catéchistes?

607 Clé USB 1, 250.

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277

• D’abord, faire un appel à la communauté célébrante en rappelant leur rôle

comme baptisé.

• Nécessité d’annoncer le Royaume de Dieu à tous.

• Interpeller et par la suite, proposer une catéchèse et les accompagner à la

manière de Jésus avec ses apôtres608.

Le quatrième aspect est que la communauté paroissiale dominicale se laisse transformer par

l’arrivée de nouveaux venus qui peuvent l’enrichir par des expériences diverses :

Blé*** La communauté a à être accueillante.

Marguerite*** Et vivante.

Blé*** Et vivante, oui! Pour insérer les…

Marguerite*** Les nouveaux venus.

Blé*** Les nouveaux venus, oui c’est ça et elle a à se laisser transformer par

les apports de ces nouveaux venus.

Rose*** Oui609.

La venue de nouvelles personnes permet à la paroisse de redécouvrir notre héritage, notre

histoire religieuse. C’est une interpellation car les gens arrivent avec des expériences

différentes et des besoins différents qui permettent d’actualiser la vision du christianisme

dans la paroisse.

Le cinquième aspect est la nécessité pour l’équipe pastorale paroissiale de développer une

catéchèse missionnaire. L’équipe pastorale a à promouvoir l’ecclésiologie de communion

afin d’éviter les dérives de l’autocratie dans la dimension hiérarchique de l’Église. La

formation de la communauté, c’est plus que la mise en place d’une expertise catéchétique

afin de répondre aux changements de la société, c’est réaliser l’aggiornamento du Concile

Vatican II enraciné dans une terre particulière qui est une paroisse d’expression française

en Amérique du Nord. Il y a la nécessité d’une inculturation de la foi dans cette terre

608 Clé USB 1, 339. 609 Clé USB 1, 695.

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278

particulière, comme toute paroisse à travers le monde qui s’enracine dans un terroir qui lui

est propre.

4.7.9 Collaboration entre les acteurs de la catéchèse

Dès le point de départ, la recherche-action a réalisé un déplacement en insistant sur

l’importance de nommer tous les acteurs et reconnaître qu’ils sont tous sujets de l’action

catéchétique. Même les enfants sont des acteurs et peuvent contribuer de manière

importante et significative au projet catéchétique. La catégorie « collaboration entre acteurs

de la catéchèse », qui regroupe 106 unités représente 3,6 % de l’ensemble des discussions

qui ont eu lieu tout au long de la recherche-action. Ce thème s’est développé au cours de la

recherche-action et a été confirmé dans les deux interventions lorsque l’équipe a rencontré

les différents acteurs à tour de rôle, soit les catéchistes et les parents qui présentaient un

enfant aux différents parcours.

Dès le point de départ, l’équipe de recherche-action a remis en cause le modèle paroissial

actuel qui est cloisonné et centré sur l’administration des services sacramentels. À partir du

diagnostic posé, l’équipe de recherche-action a fait ressortir l’importance de faire le

passage en paroisse du modèle « pastorale d’encadrement et de services » au modèle «

pastorale d’engendrement ». Elle a identifié les divers acteurs de la catéchèse : enfants,

jeunes, parents, bénévoles, catéchistes, agents de pastorale, prêtre, équipe pastorale et

communauté paroissiale. J’ai ajouté les rôles de parrain et marraine pour rappeler que la

catéchèse a pour modèle le catéchuménat; dans cette pratique, ce sont eux qui

accompagnent les catéchisés comme témoins. L’équipe de recherche action a découvert que

la collaboration, la concertation et la réciprocité entre les acteurs étaient des conditions

nécessaires à la réussite de l’action catéchétique :

Blé*** De voir que ces enjeux-là, c’est de dire que les gens, les catéchètes ne

doivent pas être simplement des techniciens.

Violette*** C’est ça.

Blé*** Ils veulent être…

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279

Rose*** Partie prenante.

Blé*** Partie prenante et aussi des animateurs dans la construction de la

communauté.

Violette*** Ce qui m’a surpris le plus l’autre soir.

Blé*** Oui.

Violette*** Ma grande surprise de voir que tout le monde s’en va dans le

même message central.

Lys*** C’est un besoin légitime réel oui.

Blé*** C’est ça j’ai marqué de devenir des coanimateurs de la mission.

Violette*** Exactement610.

C’est la découverte que tous les acteurs sont partenaires. Les différents acteurs sont unis

finalement à un même projet, celui d’annoncer et de vivre de Jésus Christ. Ils ont comme

objectif de vivre leur foi et de bâtir une communauté chrétienne. Cette construction de la

communauté chrétienne demande de tenir compte du cheminement de chacun et des

charismes des baptisés.

4.8 L’émergence d’une réflexion sur un nouveau concept : la

réciprocité catéchétique

La collaboration entre les acteurs m’a permis de découvrir l’importance de la réciprocité

dans l’action catéchétique en paroisse. J’ai répertorié deux catégories qui regroupent cet

aspect; réciprocité dans l’apprentissage et réciprocité entre les intervenants. Ces deux

catégories regroupent respectivement treize et cinq unités de sens. Cette réciprocité permet

de mieux approfondir l’Évangile et de vivre des déplacements dans ma vie en Église :

Violette*** De consommation à une pastorale de cheminement là? À mon avis

ça peut se faire avec de petits groupes, le langage sera différent et plus

interpellant et surtout plus instructif et pertinent, on n’y gagnera à connaître les

personnes. On ciblera leurs besoins, la fraternité et le sens communautaire se

développeront plus facilement, tous se trouveront enrichis de l’expérience de

l’autre, il y aura une écoute plus respectueuse; plus on donnera un

enseignement intéressant plus le nombre grandira. L’éveil de la foi invitera les

610 Clé USB 1, 557-558.

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280

personnes à vivre et à penser différemment, l’Évangile deviendra une

révélation et un chemin de vérité très éclairant611.

C’est par l’interaction et la médiation de l’autre que s’approfondit la foi. Cette interaction

permet d’affermir ceux qui ont des ministères et en même temps de confirmer la foi des

baptisés :

Rose*** Ils demandent d’avoir toujours un lien avec l’équipe pastorale, laisser

pour aller donner plus de vie à ce qu’ils vont donner, toujours en lien ensemble,

sur une même ligne.

Blé*** Est-ce que l’on peut dire que c’est un lien de réciprocité qu’ils veulent,

Quel homme fait-elle émerger? Quel type d’Église construit-elle? Quel type de

société promeut-elle? Quel Dieu, quel advenir de Dieu, quel salut? Ce n’est pas

dans un sens unique.

Marguerite*** Tout à fait.

Rose*** Exact.

Blé*** Et de plus, ils veulent avoir un lien de réciprocité.

Rose*** Tout à fait.

Blé*** De réciprocité612.

Cette réciprocité ne se limite pas à l’équipe pastorale et aux catéchistes, mais bien à tous les

acteurs. La réciprocité évoquée comme manière de faire la catéchèse rejoint la réflexion de

Marie-Hélène Carrette, responsable de formation pratique à l’Université Laval, sur la

mutualité613, qu’elle décrit comme suit :

Il est intéressant de définir la mutualité comme cette qualité d’être, de présence

et de communication émergeant au milieu des personnes qui s’engagent

ensemble, au niveau de leur personne, quels que soient par ailleurs leurs rôles.

Nous réalisons aussi que développer et vivre la mutualité, contribue à valider

611 Clé USB 1, 176. 612Clé USB 1, pages 541-542. 613 Marie-Hélène Carette, « Bénévolat et mutualité : Chemins de justice et de communion pour l'Église du

XXIe Siècle, » dans Précis de théologie pratique : Deuxième édition augmentée, dir. Gilles Routhier et

Marcel Viau (Montréal, Bruxelles: Novalis, Lumen Vitae, 2007).

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281

notre capacité de reconnaître et d’accueillir notre propre structure relationnelle

blessée614.

Marie-Hélène Carette exprime que c’est en reconnaissant la mutualité entre les acteurs que

la théologie peut se vivre de manière nouvelle. Elle prend comme modèle la Trinité et la

relation continuelle entre les trois personnes divines615. Ainsi, la recherche-action confirme

cette piste, mais va plus loin en établissant que la réciprocité permet à tous d’apprendre les

uns des autres. Cette réciprocité permet d’ajouter un autre acteur à l’ensemble de ceux qui

ont été identifiés au cours du chapitre, il s’agit de l’Esprit Saint. L’Esprit Saint se manifeste

lors des échanges sur la Parole de Dieu.

Ces découvertes viennent confirmer la thèse de Jean-Marie Labelle dans le domaine de

l’éducation que j’ai résumée dans le chapitre deux616. Par la réciprocité éducative, chacun

apprend l’un de l’autre. Les échanges entre l’apprenant et le formateur permettent à chacun

d’apprendre de l’autre. Cette recherche de Jean-Marie Labelle vient éclairer la recherche-

action et pousser la réflexion plus loin. La réciprocité en catéchèse se vit entre les acteurs.

Cette réalité que décrit la recherche-action me permet de nommer ce phénomène d’échange

et de médiation dans l’acte catéchétique par l’expression réciprocité catéchétique.

L’analyse des données a permis de nommer un déplacement par rapport à l’hypothèse de

départ : que la formation des catéchistes bénévoles par l’équipe pastorale est possible, à la

condition que cette formation puisse s’élargir à tous les acteurs de la catéchèse. La

formation n’est pas à sens unique. Elle se vit dans la réciprocité entre les acteurs de la

catéchèse. La recherche-action reprend à son compte que la foi est un don de Dieu. Elle

affirme que ce don peut être approfondi dans la mesure où il y a une catéchèse qui stimule

la réciprocité entre les différents acteurs et la Parole de Dieu. La foi s’expérimente par la

mise en écho de la Bible, de la Tradition, de l’expérience de chacun et plus particulièrement

614 Idem, 679. 615 Idem, 685. 616 Labelle, « La réciprocité éducatrice des personnes, fondements de l'éducation des adultes, ».

Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, Première éd., Pédagogie d'aujourd'hui (Paris : Presses

universitaires de France, 1996).

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282

de témoins. La réciprocité en catéchèse devient dans son exercice en paroisse un lieu

instituant et structurant pour les individus et la communauté paroissiale.

Cette découverte m’invite à poursuivre la réflexion par une corrélation afin de vérifier

comment le Magistère, le concept de réciprocité éducative de Jean-Marie Labelle et la

vision de la catéchèse de Denis Villepelet peuvent permettre de nommer l’originalité qui a

surgi de cette recherche-action.

Page 303: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

283

Chapitre 5 : Corrélation et prospective

Dans le chapitre précédent, l’analyse des données recueillies lors de la recherche-action a

permis d’identifier les défis de la formation catéchétique pour une paroisse. Je poursuis en

mettant les résultats de l’analyse en corrélation avec trois éléments précis : La réciprocité

éducative élaborée par Jean-Marie Labelle, le développement de la catéchèse selon le

Magistère de l’Église Catholique depuis le Concile Vatican II, et la thèse de Denis

Villepelet : Les défis de la transmission dans un monde complexe617.Cette triple mise en

corrélation permet de dégager de nouveaux savoirs.

5.1 Description des pôles de la corrélation

L’interprétation théologique est réalisée par une corrélation de la pratique étudiée avec trois

référents. Cette interdisciplinarité permet d’évaluer les pratiques actuelles afin de proposer

de nouvelles pistes d’actions individuelles, communautaires et ecclésiales. Le discours

théologique ainsi produit est plurilatéral, il est le fruit de l’interaction entre la pratique, le

concept de la réciprocité éducative, du développement de la catéchèse dans les textes du

Magistère depuis Vatican II et de la thèse de Denis Villepelet Les défis de la transmission

dans un monde complexe.

617 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative.

Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques (Paris : Desclée De Brouwer, 2009).

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284

Figure 6 : Description des pôles de la corrélation

5.1.1. Les résultats de l’analyse des données recueillies lors

de la recherche-action

Je présente sous forme de synthèse les dix éléments issus de l’analyse suite à la cueillette de

données. Cette synthèse de la pratique étudiée sert de matériel de base afin de réaliser la

corrélation avec les trois référents choisis : « réciprocité éducative, aggiornamento de la

catéchèse depuis Vatican II, les défis de la transmission dans un monde complexe ».

5.1.1.1 Éléments synthèses de l’analyse de la cueillette des

données de la recherche-action.

1. Catéchèse qui forme des témoins et des disciples de Jésus : La catéchèse est un

élément du ministère de la Parole, elle a pour finalité la rencontre du Christ,

l’adhésion du catéchisé et son habilitation à témoigner comme disciple.

Théologien

Pratique

Réciprocité éducative

Aggiornamento de la catéchèse depuis Vatican

II

Les défis de la

transmission dans un monde

complexe

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285

2. Pastorale d’engendrement : La paroisse est le lieu privilégié de la catéchèse. Elle

propose aux catéchisés un cheminement afin de découvrir la Parole de Dieu,

rencontrer le Christ, vivre les sacrements pour devenir des disciples témoins.

3. Catéchèse où tous sont acteurs : La catéchèse est une tâche prioritaire et centrale

de la paroisse. Tous les paroissiens et les catéchisés, par leurs témoignages, talents

et charismes sont invités à prier, soutenir et s’impliquer afin de réaliser la mission.

4. Catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne : Le groupe de catéchèse est une

entité théologique de formation catéchétique et d’insertion dans la paroisse. Il

permet aux participants d’approfondir, vivre et témoigner de leur identité

chrétienne.

5. Prêtre disciple et évangélisateur : Le prêtre est un disciple de Jésus, par son

baptême, il est responsable du leadership catéchétique en paroisse.

6. Catéchèse lieu d’échange de la Parole de Dieu, des paroles : Les interactions à

partir des récits de vie et de la Parole de Dieu, par les acteurs de la catéchèse,

permettent d’expérimenter la présence de Dieu et de nommer leur relation avec Lui.

7. Catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal : L’action catéchétique promeut

les ministères basés sur les sacrements du baptême et de la confirmation comme

celui des catéchistes, des parents, des parrains, marraines et des autres…

8. Paroisse inclusive : La paroisse est un lieu d’accueil et de démocratisation de la

formation catéchétique, offerte à tous, par tous et pour tous. Tous les catéchumènes

et catéchisés sont des dons de l’Esprit Saint afin de renouveler la paroisse.

9. Catéchèse de la miséricorde : La catéchèse est un lieu d’expérimentation de

l’amour de Dieu. L’accueil de l’amour de Dieu nous permet de nous accueillir

comme enfant de Dieu et comme être humain. La découverte de notre humanité

nous permet d’expérimenter la miséricorde de Dieu. Elle nous ouvre à accueillir

l’autre comme Jésus a accueilli tous les êtres humains.

10. Catéchèse paroissiale d’initiation : Par la catéchèse, la paroisse devient un lieu

d’initiation chrétienne, de formation des catéchistes et des acteurs en catéchèse ainsi

qu’une école de spiritualité. Elle devient une communauté qui témoigne et apprend

de chacun.

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286

5.1.1.2 La formation dans une paroisse qui veut devenir une

communauté d’engendrement

a) Définir la formation d’un disciple témoin de sa foi

La catéchèse est appelée à former des disciples témoins. La formation doit se centrer sur la

rencontre du Christ. C’est une formation intégrale qui permet au catéchisé de relire son

expérience personnelle, découvrir la Parole de Dieu et l’héritage de la tradition catholique,

de lire les signes des temps afin de vivre sa foi à la maison, dans la société et dans le

monde.

b) Le catéchiste, un ministère reconnu dans la paroisse et au cœur de la vie paroissiale

La recherche-action a conclu à la nécessité de reconnaître le catéchiste comme un ministre.

C’est un ministre rattaché à la paroisse et envoyé en mission annuellement devant la

communauté paroissiale du dimanche. C’est une personne qui a trois passions : celle de

l’être humain, du Christ et de l’Église. Il témoigne de sa foi, il connaît la Parole de Dieu, il

peut raconter aisément les récits et vulgariser les textes bibliques. Il possède plusieurs

qualités humaines : l’écoute, l’accueil et un sens de l’humour. Il travaille en équipe. C’est

une personne spirituelle qui prie, anime les prières et initie les catéchisés à la prière. C’est

un missionnaire par l’accueil des catéchisés et leur insertion dans la vie paroissiale.

Voici un tableau, proposé par les membres de l’équipe de recherche, qui propose un guide

pour la formation des catéchistes inspiré des travaux d’André Fossion.

Tableau 25 : Formation des catéchistes

Dimension de la formation Contenus

Théologique • Bible

• Credo, profession de foi

• Histoire de l’Église

• Liturgie

• Morale

Spirituelle • Foi, un don de Dieu

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287

• Prière personnelle

• Dialogue avec Dieu

• Dialogue avec les autres

• Piété populaire

Culturelle, historique et humaine • Connaissance de la culture contemporaine

• Histoire locale

• Psychologie

• Sociologie

Pédagogique • Enseignement

• Animation

• Initiation

• Andragogie

Ecclésiologique et missionnaire • Histoire de la paroisse

• Vivre en communauté paroissiale

• Témoignage

• Mission

• Partage avec les démunis

• Dialogue œcuménique et interreligieux

c) La formation des agents de pastorale, des prêtres et spécialement du curé

Les agents de pastorale ont une formation qui touche les cinq domaines identifiés pour les

catéchistes : théologique, spirituel, culturel, historique, humain, pédagogique,

ecclésiologique et missionnaire. Ils ont comme responsabilité de former les catéchistes et

d’insérer les catéchisés à la communauté paroissiale. Ils sont des formateurs de formateurs.

Ils ont une formation universitaire, ils sont des maîtres de prière et des accompagnateurs. Ils

veillent à ce que les groupes de catéchèse deviennent des lieux d’accueil, de partage de foi

et d’initiation à la mission.

d) Formation de la communauté chrétienne paroissiale

La paroisse est confrontée à des résistances qu’elle ne peut ignorer; son repliement sur elle-

même; un comportement d’exclusion; une culture qui a intériorisé la vie spirituelle comme

une affaire privée et personnelle; les résistances aux changements.

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288

Proposition de cinq pistes d’action afin d’atténuer les résistances dans une paroisse qui

forme des disciples témoins :

• Informer les paroissiens du rôle catéchétique de la paroisse et de chaque baptisé.

• Former un comité mixte de l’équipe pastorale avec les catéchistes pour planifier,

organiser, animer et évaluer la catéchèse.

• Interpeller les membres de la communauté chrétienne à s’impliquer en catéchèse.

• Accueillir et insérer les nouveaux catéchisés dans la vie de la paroisse.

• Impliquer le curé dans la catéchèse qui est au cœur de la vie paroissiale.

Cette synthèse de l’apport de la recherche-action pour la pratique catéchétique permet

d’entreprendre les différentes corrélations afin de dégager quelques pistes de travail.

5.2 Le Processus de corrélation

Qu’est-ce que la corrélation? La corrélation est le moyen d’opérer un travail

d’interprétation théologique à partir de la pratique. Il se réalise en faisant dialoguer les

résultats de l’analyse des données avec d’autres référents. Je vais présenter chacun des

référents et par la suite les mettre en dialogue avec la synthèse de l’analyse de la cueillette

des données.

5.2.1 L’origine de la réciprocité éducative

Jean-Marie Labelle a élaboré le concept de la réciprocité éducative. Je veux approfondir ce

concept que j’ai présenté sommairement au chapitre 3. Jean-Marie Labelle insiste

davantage sur la relation que sur le contenu pour l’apprentissage618. Ses travaux ainsi que

618 Jean-Marie Labelle, « Des adultes en formation théorie et stratégie d'apprentissage, ».

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289

ceux de Jérôme Eneau et de Jean-Louis Boutte permettent d’approfondir le concept de

réciprocité éducative619.

Ce concept « réciprocité éducative » explique l’originalité de l’apprentissage mutuel entre

les enseignants et les apprenants dans une relation éducative : « J’ai créé ce concept pour

signifier que l’enseignant apprend de l’apprenant dans l’acte d’enseigner : apprendre à

quelqu’un, c’est, dans le même mouvement, apprendre de lui »620. J’ai observé à quelques

reprises comment le parent et l’enfant apprenaient l’un de l’autre dans la démarche

catéchétique. Cet élément a été identifié par l’équipe de recherche-action comme constitutif

de l’acte catéchétique.

5.2.1.1 Qu’est-ce que la réciprocité éducative?

Jean-Marie Labelle est arrivé à ce concept par une démarche inductive, à partir du constat

qu’il apprenait de ses étudiants en enseignant : « Il est ainsi un fait communément admis

aujourd’hui que la pratique de l’éducation des adultes, plus encore que les autres pratiques

éducatives, souligne que les effets d’un apprentissage se situent et du côté des apprenants et

du côté des enseignants »621.

Selon lui, l’éducation a un but précis, soit le développement intégral de la personne

humaine qui doit la conduire à l’autonomie : « Je conçois l’éducation comme étant le

processus de développement de la personne vers son autonomie, physique, intellectuelle,

affective, morale, citoyenne »622. Pour fonder sa réflexion, à partir de l’histoire de la

formation des adultes, il note les éléments de réciprocité identifiée par les chercheurs dans

la relation didactique. Jean-Marie Labelle arrive à deux certitudes : la dimension de la

619 Jérôme Eneau, Vers un modèle d'organisation autoformatrice : apports du concept de réciprocité à une

perspective d'autonomisation en formation, Thèse de docotrat ([Montréal] : Université de Montréal, 2003.

Jean-Louis Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice (Paris :

Harmattan, 2007). 620 Jean-Marie Labelle, « La réciprocité éducatrice des personnes, fondements de l'éducation des adultes, »,

94. 621 Jean Marie Labelle, La réciprocité éducative, 1. 622 Idem, 3.

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290

réciprocité est mentionnée depuis des siècles et la relation didactique n’arrive pas, à elle

seule, à expliquer le phénomène de la réciprocité :

Le recours à la réciprocité pour qualifier la relation éducative traverse le champ

de l’éducation depuis les temps les plus anciens […] La pratique éducative de

la réciprocité indique néanmoins qu’elle ne se découvre et ne se développe que

dans l’ouverture à l’autre623.

C’est au cœur même de la parole échangée que se vit la relation didactique qui permet à

chacun d’apprendre de l’autre. On ne peut dissocier l’enseignant de l’apprenant et chacun

apprend de l’autre dans cette relation asymétrique :

La réciprocité confère à la parole le pouvoir alternatif d’être entendue en se

prononçant, et inversement, si bien que le fait d’apprendre et celui d’enseigner

ne sont fondamentalement que l’avers et l’envers d’un seul et unique acte

communicationnel. Le langage devient comme un lieu d’une réciprocité

didactique624.

Jean-Marie Labelle utilise les travaux du philosophe Maurice Nédoncelle pour consolider

les assises de son concept. Un petit détour sur l’apport de Maurice Nédoncelle permet de

mieux comprendre le concept développé par Jean-Marie Labelle. Maurice Nédoncelle,

prêtre et docteur ès lettres et théologie, a été professeur de l’Université des sciences

humaines à Strasbourg. Il a écrit plusieurs œuvres dont : La réciprocité des consciences, et

Explorations personnalistes625. Lucien Jerphagnon l’identifie aux philosophes

personnalistes626. Il souligne qu’il a beaucoup travaillé sur l’intersubjectivité et sur

l’importance de la relation dans la démarche de la croissance de la personne :

Car c’est bien dans le rapport d’amour entre les consciences qui dévoile pour

lui la nature de la personne : tout amour implique, fût-ce de façon

embryonnaire, un propos de promotion mutuelle qui tend à constituer autrui

623 Idem, 102-103. 624 Idem, 156. 625 Maurice Gustave Nédoncelle, La réciprocité des consciences : essai sur la nature de la personne (Paris :

Aubier Editions Montaigne, 1942).

Maurice Gustave Nédoncelle, Explorations personnalistes (Paris : Aubier-Montaigne, 1970). 626 Lucien Jerphagnon (1921-2011) philosophe et historien de l’antiquité.

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291

comme une perspective individuelle. Si dans l’ordre de la nature autrui est pour

le moi une limite, dans l’ordre de la personne il en devient une source627.

Jean Lacroix mentionne que la pensée de Maurice Nédoncelle se modélise sur la relation

trinitaire628. La personne humaine ne peut advenir qu’en développant les relations avec les

autres humains et avec Dieu. En partant de l’affirmation du Christ que nous sommes tous

frères et appelés à être fils de Dieu; l’être humain ne peut arriver à son plein

épanouissement qu’en développant une relation à la fois avec Dieu et avec les autres

humains :

Nédoncelle pose la division de la conscience en moi idéal et moi positif; il fait

coïncider la conscience du « moi idéal » et du « toi ». Cette relation implique le

rapport avec Dieu : l’amour de Dieu et celui des hommes n’existent

profondément que liés et unis entre eux. La relation humaine implique la

relation avec Dieu et réciproquement : la prière humaine et la prière divine sont

liées en nous. Dieu demande l’homme comme l’homme demande Dieu, Dieu

prie l’homme comme l’homme le prie629.

Jean Lacroix insiste sur l’influence du christianisme dans les œuvres de Maurice

Nédoncelle. Yves Labbé fait une relecture de la pensée de Maurice Nédoncelle630. Selon

lui, le point de départ de sa pensée est centré sur l’intersubjectivité. La personne, l’étant,

n’existe que par la relation avec le « toi ». Cette relation conduit à la réciprocité. Mais la

réciprocité dépasse la communication, elle commande la communion et elle a son

assomption dans la transcendance. Selon Yves Labbé, Maurice Nédoncelle a été mis à

l’écart par plusieurs philosophes à cause de ses options pour une transcendance inspirée du

christianisme. Selon Yves Labbé, la question de Dieu est inhérente à la question

philosophique pour Maurice Nédoncelle : « Selon Nédoncelle, la philosophie ne peut

demeurer indifférente à l’égard de Dieu. Elle se trouve placée devant une alternative : ou le

627 Lucien Jerphagnon, « Personnalisme, » dans Dictionnaire des grandes philosophies, dir. Lucien

Jerphagnon (Toulouse : Bibliothèque historique Privat, 1989), 283. 628 Jean Lacroix philosophe de Lyon (1900-1986). 629 Jean Lacroix, « Nédoncelle Maurice 1905-1976, » dans Dictionnaire des philosophes, dir. Pierre Huisman

(Paris : Presses Universitaires de France, 1993). 630 Yves Labbé professeur à la faculté de théologie catholique de Strasbourg.

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292

reconnaître ou le méconnaître »631. Jean-Marie Labelle choisit d’utiliser la dimension

philosophique des travaux de Maurice Nédoncelle en affleurant à peine ses références sur la

transcendance ou les dimensions religieuses.

Il fait appel à l’andragogie pour développer le concept de la réciprocité éducatrice. Voici

une synthèse des grandes orientations de l’andragogie présentée par Jean-Paul Martin et

Émile Savary qui sont les deux formateurs-consultants au Centre académique et de

formation continue (CAFOC) de Nantes :

Tableau 26 : Principes et orientations de l’andragogie632

Principes Orientations

1. L’adulte apprend pendant toute sa

vie.

Le processus d’éducation et de formation

pour l’adulte est un processus permanent.

2. Le besoin de savoir pourquoi il doit

apprendre est capital pour l’adulte.

Les adultes sont motivés pour une formation

lorsqu’ils découvrent quels besoins ils

pourraient satisfaire grâce à elle.

3. Les adultes ont conscience d’être

responsables de leurs propres

décisions et de leur vie.

Les adultes aspirent profondément à se

déterminer eux-mêmes.

4. Le rôle de l’expérience est

important.

C’est le plus grand facteur d’apprentissage

de l’adulte.

5. L’orientation de l’apprentissage se

fait autour de la vie à partir d’une

tâche ou d’un problème.

Ce qui est central en formation, c’est le

développement de compétences.

6. La motivation est constituée de

pressions internes (estime de soi,

désir d’accroître sa satisfaction

personnelle, qualité de vie…).

L’adulte en formation puise en lui-même

l’énergie pour apprendre, se former,

s’autoformer.

631 Yves Labbé, « Une relecture de Maurice Nédoncelle : Une philosophie religieuse de l'intersubectivité, »

dans Revue des sciences religieuses 83, no 2 (2009) : 168. 632 Jean-Paul Martin et Emile Savary, Formateur d'adultes : se professionnaliser, exercer au quotidien,

Pédagogie/Formation (Lyon : Chronique Sociale,, 1996), 46-47.

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293

L’andragogie présente et explique que l’adulte a la capacité d’apprendre toute sa vie autant

à partir d’apport qu’il reçoit que de sa propre expérience qu’il partage et échange avec les

autres. Jean-Marie Labelle utilise la dimension de l’intersubjectivité de Maurice Nédoncelle

afin d’élaborer son concept, cela lui permet de nommer les apports réciproques entre

l’apprenant et le formateur. Voici comment Jean-Marie Labelle définit la réciprocité

éducative :

La formule « Je t’enseigne, tu m’apprends » résume le concept de réciprocité

éducatrice. La relation de réciprocité n’est pas une relation d’égalité, mais un

rapport asymétrique de singularités dont les libertés s’interpellent

réciproquement dans leur développement respectif. La conséquence éthique en

est le respect absolu des différences et leur écoute633.

On peut lire que ce concept fait référence autant à la dimension de l’intersubjectivité qu’à la

dimension de l’apprentissage. C’est une démarche qui invite les acteurs à se mettre dans

une dynamique de croissance mutuelle. Ce concept fait appel à la dimension de

l’andragogie où l’on tient compte de l’expérience des adultes, de leurs motivations et de

leur désir d’autonomie. Il reconnaît les différences et ne vise pas à une uniformisation des

gens, des rôles dans le processus de formation. Il a pour but un approfondissement des

connaissances jusqu’à la construction d’un nouveau savoir par l’apport des différents

acteurs.

Dans la prochaine section, j’explique davantage le concept en analysant quelques

caractéristiques pour ensuite effectuer une corrélation avec la pratique étudiée.

5.2.1.2 Les caractéristiques de la réciprocité éducative

Dans cette section, je présente certaines caractéristiques de la réciprocité éducative.

J’explique quelles sont les répercussions de mettre en place cette réalité dans une

organisation. Je démontre comment Jean-Marie Labelle décrit l’apport et les

transformations dans la vie quotidienne d’un organisme sur : le rôle de l’institution,

633 Jean-Marie Labelle, « L'éducation une mutuelle transhumance, » dans Revue des sciences religieuses 79,

no. 3 (2005): 321.

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l’éthique, la logique interne de ce concept, la stratégie d’application, les acteurs et leurs

rôles, les interactions didactiques et relationnelles, les dérives.

Le rôle de l’institution

L’institution a un rôle de leadership et de soutien : « Son implication première consiste à

reconnaître le bien-fondé du projet de son enseignant. Ainsi engagée au plan du principe,

l’institution devra s’impliquer dans la mise à disposition des moyens »634. Son engagement

se traduit par la préoccupation de fournir des locaux spacieux, du matériel didactique de

qualité, et les budgets nécessaires. Dans la réciprocité éducative, l’institution est appelée à

reconnaître que les apprenants sont des partenaires :

Institution et enseignant doivent reconnaître les apprenants comme partie

prenante, et, en conséquence, comme acteurs et auteurs autant responsables de

l’évaluation, qui décidera de leur succès, qu’ils le sont de leur apprentissage635.

L’engagement de l’institution dans le projet de formation est lié à sa réussite. L’institution

donne de la valeur au projet, elle assume le leadership et valorise l’apprenant et sa

démarche d’entrer en processus de formation :

Un tel dispositif suppose en premier lieu que l’institution s’implique elle-

même : c’est, rappelons-le, une des conditions essentielles de mon modèle de

réciprocité. Son implication première consiste à reconnaître le bien-fondé du

projet de son enseignant636.

L’éthique

Une attitude à développer est l’écoute de l’autre. Il est nécessaire de s’accueillir dans les

différences, car celles-ci sont des richesses. Reconnaître la valeur des interactions par les

différents acteurs : « Reconnaître autrui, c’est le prendre pour vis-à-vis, c’est se placer dans

634 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 257. 635 Ibid. 636 Idem, 256-257.

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la corrélation sujet-sujet, c’est se situer, lui et moi, en partenaires. Reconnaître, c’est faire

exister. Dans le langage personnaliste, c’est aimer »637. L’asymétrie des relations permet de

ne pas gommer les différences, mais de les reconnaître et de permettre à l’autre d’exister.

Pour le formateur, c’est de reconnaître ce que l’apprenant peut lui apporter par les

interactions, les informations et les expériences afin d’arriver à forger un nouveau savoir.

La logique interne de ce projet

On ne peut pas parler de réciprocité si les différents partenaires n’ont pas la liberté de

parole. Le but de la formation, c’est de conduire l’apprenant à l’autonomie.

La stratégie d’application

La réciprocité éducative ne se réalise que s’il y a une entente entre les partenaires. Cette

entente ne doit pas être complaisante, ni se situer dans un rapport de force. Un protocole

doit être établi selon les besoins de l’apprenant afin d’atteindre les objectifs du

programme638. Le contrat s’élabore conjointement. Il fait appel aux expériences des

participants, à leurs besoins, à la tradition de l’institution d’enseignement et à d’autres

éléments au besoin :

Le contrat énonce ainsi la loi fondatrice de l’échange réciproque. Dès lors qu’il

est écrit en protocole, il rend la loi vérifiable et référable et assure le

fonctionnement cohérent de la réciprocité active qui emprunte la voie de

l’intersubjectivité interlocutive639.

La formation amène une transformation des acteurs qui la suivent, autant des enseignants

que des apprenants; par les interactions, elle développe un nouveau savoir.

637 Idem, 196. 638 Idem, 256. 639 Ibid.

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296

Les acteurs et leurs rôles

Dans la réciprocité éducative, il y a un axiome de départ : les acteurs ont une dignité égale.

Chaque acteur est un sujet qui arrive au groupe avec une expérience des savoirs qu’il a

accumulés640. Jean-Marie Labelle reconnaît l’importance d’être sujet et va jusqu’à

renverser les priorités habituelles dans la démarche éducative; ce qui est premier, c’est la

relation, le contenu est second :

Alors que l’habitude la plus courante est de partir des contenus, de parler un

peu de la démarche, puis très peu, voire pas du tout des acteurs, la première

exigence de la réciprocité est de se centrer sur les acteurs, à partir desquels les

contenus seront ultérieurement envisagés641.

Pour l’apprenant, l’implication est de creuser son savoir et d’accueillir les apports de

l’enseignant en les discutant. L’apprenant s’engage à accepter d’être interpellé dans ses

représentations, pendant la formation :

Mais pour accéder à une pensée personnelle, il faut apprendre à partir, à quitter

ses opinions rassurantes, mais souvent lacunaires et partiales, qui constituent

autant d’« obstacles épistémologiques » que Michel Serres désigne lorsqu’il

écrit : « Je n’ai rien appris que je ne sois parti, ni enseigné autrui sans l’inciter

à quitter son nid »642.

L’apprenant a comme rôle d’exprimer ses questions, ses attentes et ses besoins.

L’enseignant est celui qui a l’initiative. Tout en étant à l’écoute, il n’a pas à entrer dans un

laisser-faire. Il fait circuler la parole et présente les apports dans la démarche de formation

avec rigueur et intégrité. L’enseignant aide l’apprenant à vivre des passages. L’apprenant

peut être invité à quitter une représentation antécédente pour arriver à une nouvelle

perspective, une nouvelle manière de concevoir l’existence :

640 Jean-Marie Labelle, « La réciprocité éducative : au détour de l'école? » dans Éducation permanente, no.

144 (2000): 81. 641 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 244-245. 642 Idem, 252.

Michel Serres, Le Tiers-instruit (Paris : F. Bourin, 1991), 27.

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Là apparaît le rôle irremplaçable de l’enseignant : il signifie à l’apprenant les

points de rupture obligés pour penser en vérité. […] Puisque c’est dans les

ruptures que se joue la réflexion personnelle, dans la mesure où elles ouvrent

une brèche à la liberté de l’esprit, dans ce partenariat, l’enseignant occupe une

place un peu décalée, asymétrique et différente, celle du tiers643.

Le groupe est un lieu pour libérer la parole. C’est un lieu d’échange qui devient structurant

à la fois pour l’apprenant et l’enseignant. Le groupe est comme un incubateur; le concept de

réciprocité éducative dépasse le phénomène de l’apprentissage en dyade :

La relation éducative, pour être éminemment dyadique, n’en est pas moins

collégiale et par là les sujets personnels s’éduquent du fait que « le contenu de

l’un en s’explicitant enrichit et fait évoluer les autres ». Dans les témoignages

pédagogiques et andragogiques, l’idée de mutualité éducative s’est imposée

comme marque de la réciprocité644.

Les interactions didactiques et relationnelles

Les relations entre les acteurs ne nivellent pas les différences dans les rôles de chacun.

Dans la réciprocité éducative, la relation n’est pas égalitaire, elle est asymétrique : « La

réciprocité éducatrice n’est donc pas une relation d’égalité, mais le rapport asymétrique des

singularités qui jouent réciproquement le rôle de tiers dans leur développement respectif645.

Cette asymétrie permet à chacun, selon sa singularité, d’être un tiers pour l’autre. Elle met

en relation l’expérience des apprenants et celle des enseignants avec les divers contenus :

Notons en passant, sans pouvoir développer ce point, que l’éducation des

adultes exige en conséquence la mise en œuvre de l’interdisciplinarité, car

seule une démarche d’interaction et d’interpellation des disciplines permettra à

643 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 207. 644 Idem, 186. 645 Jean-Marie Labelle, « La réciprocité éducatrice des personnes, fondements de l'éducation des adultes, »,

95-96.

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l’adulte de mettre ses savoirs nouveaux en correspondance avec le champ

complexe des multiples compétences qu’il entend acquérir ou développer646.

L’apprenant nomme son expérience par la relation didactique, par les apports des autres

participants et de ceux de l’enseignant. Il vit une déstructuration afin d’arriver à une

restructuration. Cette expérience s’expérimente dans la mesure où il peut s’exprimer et

écouter la parole de chacun des acteurs. Ce sont dans ces échanges que se construisent les

nouveaux savoirs. Selon Jean-Marie Labelle, le groupe devient un lieu privilégié

d’apprentissage. Il suggère de créer des groupes de cinq à huit personnes pour assurer

l’efficacité de ce concept : « L’unité de travail est le sous-groupe de cinq à huit personnes,

appelé atelier, car il constitue le lieu privilégié de la production collégiale »647. De

nouveaux savoirs surgissent par l’interaction entre mon expérience personnelle,

l’expérience de l’autre et les contenus échangés par le groupe :

Le groupe est la matrice de la science et du développement personnel, car il est

le lieu de la conformation de la parole. En disant à l’autre ce que je pense,

l’autre m’oblige à découvrir qui je suis vraiment. Il m’amène à affiner,

corriger, développer et enrichir ma pensée en m’offrant de la faire rebondir sur

sa parole, tour à tour interrogative, critique, suggestive648.

Les dérives

Jean-Marie Labelle est conscient des dérives possibles de ce concept. La première est le

non-respect des contrats. Cela brise la confiance et détruit les relations entre les acteurs. La

deuxième est de tomber dans le panneau d’une relation égalitaire entre l’apprenant et

l’enseignant; elle conduit souvent à la manipulation de l’un par l’autre et aussi à un

désintéressement :

646 Jean-Marie Labelle, « Des adultes en formation théorie et stratégie d'apprentissage, », 99. 647Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 248. 648 Jean-Marie Labelle, « Réciprocité éducatrice et conduite épistémique développementale de la personne, »

dans Apprentissage et développement des adultes, dir. Claudia Danis et Claudie Solar (Montréal : Les

Éditions LOGIQUES, 1998).

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Dans la stratégie égalitariste, du fait de l’opposition des différences, le maître

devient vite le jouet des élèves. Comme il s’emploie à réduire les contraintes en

jouant la proximité et l’égalité symétrique, ceux-ci en profitent pour obtenir

toujours plus d’avantages de la situation. S’ils ne tombent pas dans

l’indifférence par retrait ou démobilisation, l’aliénation du système les rendra

de plus en plus tyranniques649.

Si la relation est mauvaise et que l’on n’arrive pas à créer un climat de confiance, on

inverse le processus et on entre dans ce que Jean-Marie Labelle appelle la réciprocité

destructrice : « Dans l’hostilité, la réciprocité provoque leur destruction, qui est l’exact

contraire de leur développement mutuel. Pour lever toute ambiguïté, j’emploie selon les

cas, les deux expressions, réciprocité éducatrice ou réciprocité destructrice »650.

Par son travail, Jean-Marie Labelle démontre l’interaction et la dimension de

l’intersubjectivité entre l’enseignant et l’apprenant. Afin que se réalise la réciprocité

éducative, l’institution a comme mission de prendre le leadership et de créer l’espace et les

lieux nécessaires pour assembler les conditions favorables. La réciprocité éducative

demande de développer diverses aptitudes et attitudes comme le respect et l’écoute

mutuelle. La relation asymétrique permet d’éviter les dérives et la confusion dans les rôles.

Le rôle du formateur a comme objectif de conduire l’apprenant à une autonomie qui le

fasse devenir partenaire.

Deux chercheurs ont développé le concept de réciprocité éducative dans deux perspectives

différentes. Le premier, Jérôme Eneau, docteur en andragogie, professeur à l’université de

Rennes, a travaillé sur la question de l’autoformation, la formation des adultes, la

réciprocité éducative et la réciprocité intergénérationnelle651.

649 Labelle, La réciprocité éducative, 234. 650 Labelle, « L'éducation une mutuelle transhumance, »: 324. 651 Jérôme Eneau est docteur en andragogie et docteur en sciences de l’éducation. Il est maître de conférences

à l’Université de Lyon à l’Institut des sciences et pratiques pédagogiques.

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Le deuxième chercheur, Jean-Louis Boutte, français et docteur en science de l’éducation, a

observé comment des experts proches de la retraite pouvaient transmettre leur connaissance

à des novices652.

Dans son ouvrage, Jérôme Eneau donne un cadre de compréhension pour le concept de

réciprocité éducatrice suite à une recherche collective653. Voici un tableau présentant ce

cadre référentiel :

Tableau 27 : Propositions et cadre référentiel de la réciprocité654

Nature et principes de la réciprocité Proposition 1 La réciprocité est constitutive du lien social (du « faire société »)

Proposition 2 La réciprocité suppose une part d’autonomie individuelle

Proposition 3 La réciprocité suppose des valeurs orientées vers autrui

Dimension opératoire de la réciprocité Proposition 4 La réciprocité prend appui sur la réversibilité de situations asymétriques

Proposition 5 La réciprocité se décline dans la triple obligation « incomputable » de

donner, recevoir, rendre

Proposition 6 La réciprocité vise la coopération et l’intérêt collectif à long terme, non

pas l’intérêt individuel à court terme

Corollaire La réciprocité pose la question du choix des alliances

Effets attendus de la réciprocité Proposition 7 La réciprocité a un effet social régulateur, permettant une forme

d’équilibration des liens sociaux

Proposition 8 La réciprocité a un effet émancipateur, les structures de la réciprocité étant

génératrices de liberté

Jérôme Eneau présente la réciprocité comme une relation asymétrique qui, dans le

processus de la relation, devient éducatrice. Il montre que l’apprentissage n’est pas lié à

l’explicitation ou la démonstration d’un contenu, mais d’abord aux relations entre les

individus :

En plaçant la dynamique des interactions au cœur de la relation éducative, la

théorie de la « réciprocité éducative » apporte un éclairage épistémologique au

processus du développement de l’autonomie de l’apprenant. Elle étaye, du

652 Jean-Louis Boutte est docteur en sciences de l’éducation et professeur associé à l’Université de Provence

dans le Département des sciences de l’éducation. 653 Jérôme Eneau, La part d'autrui dans la formation de soi : Autonomie, Autoformation et Réciprocité en

Contexte Organisationnel (Paris : L'Harmattan, 2005), 222. 654 Idem, 223.

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point vu philosophique, le rôle de la réciprocité dans l’apprentissage, en

conférant une place centrale à autrui dans la relation éducatrice655.

Jérôme Eneau fait ressortir que ce processus d’apprentissage est collégial, et développe

l’autonomie chez l’apprenant. Jean-Marie Labelle par ses travaux sur la réciprocité

éducatrice permet d’expliciter que c’est une démarche éducative d’autonomisation :

L’apport principal de Labelle se trouve probablement dans le couple dialogique

que forment, pour cet auteur, les notions d’autonomie et de réciprocité, dans

une perspective développementale et identitaire : pour Labelle, la réciprocité,

qui est au cœur des interactions humaines, est fondamentalement « éducatrice »

et source d’autonomisation (Labelle 1996, 1998a)656.

Maintenant, je présente l’apport de Jean Louis Boutte, afin de mieux comprendre le

développement de sa pensée pour la réciprocité éducative :

Elle a pour but de montrer la réciprocité de la relation de transmission de

savoir-faire entre un Professionnel expérimenté, considéré comme un Expert et

un Successeur. La réciprocité se traduit par une évolution de la relation vers

une plus grande participation dans les échanges, vers une « relation

complémentaire souple » et un « apprentissage par expression-production ».

Elle se traduit aussi par des apprentissages et des évolutions des représentations

symboliques filiales, pour l’un et l’autre des acteurs657.

Afin de bien saisir l’apport de Jean-Louis Boutte, je reprends ces éléments un à un : le rôle

de l’institution, l’éthique, la stratégie d’application, les acteurs et leurs rôles, les

interactions didactiques et relationnelles, les dérives.

Le rôle de l’institution

655 Idem, 124. 656 Idem, 151. 657 Jean-Louis Boutte, Expert-Novice, une relation éducative réciproque (Université de Provence,

Département des sciences de l'éducation, [Visité le 8 juin 2011]); accessible à

http://147.94.192.36/reperes/boutte/expert_novice.pdf.

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Pour ce qui est du rôle de l’institution, Jean-Louis Boutte appuie Jean-Marie Labelle en

disant que l’entreprise doit s’impliquer. Cet appui pour la formation a des influences sur le

groupe; cela le transforme et développe des expertises qu’il a peut-être perdues. La

réciprocité éducatrice transforme l’expert, le novice et l’entreprise :

La transmission de savoir-faire entre un Professionnel Expérimenté et un

Successeur, entre un Expert et un Novice ne peut donc pas être considérée

exclusivement comme une action ponctuelle, localisée et contextualisée,

finalisée par l’apprentissage du Successeur – du Novice - des savoirs requis par

l’emploi. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large, impliquant l’ensemble

de l’entreprise. Elle requiert de la part de l’entreprise un changement, une

nouvelle vision et de nouvelles pratiques sociales. L’entreprise doit apprendre

ou réapprendre ce que d’autres n’ont pas oublié658.

Jean-Louis Boutte dit que l’entreprise doit changer de paradigme; elle doit aussi devenir

apprenante. Cela lui permet d’être davantage concurrentielle dans la réalité actuelle.

L’institution a le leadership pour ce qui du développement de la réciprocité éducatrice.

L’éthique

En ce qui concerne l’éthique, dans le contexte de la grande entreprise, il s’agit de valoriser

l’expert dans sa compétence acquise au cours des âges et de reconnaître que le novice est

capable d’apprentissage.

La stratégie d’application, les acteurs, leurs rôles

La stratégie d’application est centrée sur une démarche contractuelle. Une des surprises

pour Jean-Louis Boutte a été de découvrir que les experts se trouvaient démunis au moment

d’exprimer leur savoir-faire. Les experts ont eu le défi d’apprendre à transmettre : « Nous

avons étudié le Professionnel expérimenté et son savoir-faire, Expert dans son domaine

professionnel, il est aussi potentiellement Novice dans l’acte de transmettre »659. Afin de

devenir un enseignant, l’expert a besoin de la reconnaissance de ses pairs et de l’entreprise :

658 Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice, 229. 659 Idem, 119.

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Le groupe socioprofessionnel, l’entreprise, le service, l’équipe, les pairs, les

hiérarchiques sont donc influents à la fois sur des facteurs intrinsèques et

extrinsèques de la motivation à transmettre. L’expert peut éprouver le besoin

d’être valorisé, et l’entreprise peut « agir » pour répondre à ses besoins de

valorisation, facteurs de motivation, rejoignant ce que dit Levy-Leboyer

(1998)660.

L’expert se trouve dans un rôle d’accompagnement, et le transfert des connaissances se fait

par l’apprentissage. Cet apprentissage se fait par la répétition du geste661. Quant à

l’apprenant, il doit reconnaître la compétence de l’expert. Sa motivation est liée à

l’apprentissage d’un métier afin de gagner sa vie, et à une reconnaissance sociale par les

pairs et l’entreprise. L’institution a un rôle à jouer dans la reconnaissance de l’importance

de l’apprentissage pour l’expert et le novice, ce qui a comme répercussion le

développement de l’entreprise.

Les interactions didactiques

Les interactions didactiques et relationnelles sont vécues dans le cadre de la réciprocité,

mais avec une pédagogie différente. Pour ce faire, l’entreprise devient un guide dans le

processus. Les experts ont besoin d’une reconnaissance sociale effectuée par l’entreprise

afin de stimuler les troupes :

Le Successeur, tout comme le Professionnel Expérimenté, a besoin de

reconnaissance. Pour l'un comme pour l'autre, cette reconnaissance leur est

fournie certes par l'entreprise, Tiers exclu, mais aussi par l'Autre dans les

interactions qui les unit (sic). [...] La reconnaissance mutuelle, mêle tout à la

fois des aspects symboliques, des aspects relationnels, des aspects de

compétence662.

Jean-Louis Boutte affirme que les deux, autant l’expert que le novice, sont transformés par

la relation. C’est un processus qui se vit en trois étapes : fusion, séparation et

autonomisation. La relation est de l’ordre du compagnonnage, de l’apprentissage du modèle

660 Idem, 121. 661 Abel Pasquier, « Typologies des mécanismes du transmettre, » dans Essais de théologie pratique :

I'institution et le transmettre, dir. René Marlé (Paris : Beauchesne, 1993), 117-134. 662 Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice, 152.

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de maître à disciple. L’expert apprend aussi dans son action à expliquer son savoir-faire et à

aider le novice à faire l’intégration d’un nouveau savoir.

Les dérives

Les dérives possibles dans cette pratique sont les suivantes : le développement d’une

insécurité qui paralyse l’expert et l’empêche d’aller plus loin; le manque de reconnaissance

de l’entreprise et des pairs; la perte de motivation et d’intérêt de la part du novice.

Avec leurs travaux, les trois auteurs, Jean-Marie Labelle, Jérôme Eneau et Jean-Louis

Boutte développent le concept de la réciprocité éducative dans divers milieux.

La revue Éducation permanente présente un dossier sur le concept de réciprocité éducative

préparé par Yvette Moulin, Diana Kébé et Marie-Ange Héber Sufferin Chatagnon. Il s’agit

de : La relation de réciprocité et l’apprentissage : Écoute, don, prise de parole663. Elles

soulignent que la réciprocité est possible si les gens sont ouverts et acceptent de se laisser

interpeller par l’autre : « Celui qui écoute a tendance, pour son bien-être personnel, à

rassurer et à inscrire son interlocuteur dans un cadre bien cerné. Pourtant, l’écoute doit

accepter la surprise, l’inattendu, l’inconnu »664.

Il y a une double dynamique de construction de liens, l’une intérieure et l’autre extérieure.

C’est souvent le groupe de discussion qui sera le tiers permettant l’intégration des

nouveaux savoirs, la création de liens avec les autres et une appartenance à l’institution.

Pour leur part, Pascal Galvani et Daniel Hazard écrivent sur la question du lien social et de

l’autoformation665. Ils indiquent les attitudes à développer afin d’éviter l’exclusion dans une

démarche de réciprocité. Ils soulignent l’importance, pour tous les acteurs, d’être à la fois

663 Yvette Moulin et al., « La relation de réciprocité et l'apprentissage, » Éducation permanente, no. 144

(2000). « Diana Kébé, Yvette Moulin et Marie-Ange Héber-Sufferin Chatagnon sont responsables de

formation au Mouvement des réseaux d’échanges réciproques de savoirs ([email protected]) ». 664 Idem, 156. 665 Pascal Galvani et Daniel Hazard, « Réciprocité, autoformation et lien social : Une recherche-action

européenne, » .

« Pascal Galvani est maître de conférences associé au Laboratoire de recherche en sciences de l’éducation et

de la formation de l’université de Tours et consultant à l’IFRADE (Angers). Daniel Hazard est responsable du

réseaux « Résonnances » d’Angoulême et formateur au Mouvements des réseaux d’échanges réciproques de

savoirs ».

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dans le rôle de l’offreur, du demandeur et du médiateur dans l’activité de formation tout en

respectant la relation asymétrique. La dynamique de réciprocité est actuelle. Elle crée des

lieux d’échanges pour remédier aux ruptures de la transmission dans le monde

contemporain :

La rupture des transmissions traditionnelles (familiales ou communautaires)

des savoirs populaires, quotidiens et domestiques, rend leur acquisition

difficile. Les réseaux d’échanges de savoirs sont un lieu de reconnaissance et

de valorisation de ces savoirs traditionnels qui prennent alors un nouveau

sens666.

La démarche de réciprocité éducative peut permettre une réappropriation des savoirs

d’expériences traditionnelles sommaires qu’un groupe d’individus est en train de perdre.

Un échange entre les personnes, une mise en commun des savoirs et de nouveaux apports

peuvent reconstituer et même renouveler l’héritage d’un passé qui se perd. Ces lieux

d’interaction deviennent un lieu d’habilitation pour vivre dans une société qui est sursaturée

d’information :

De nombreux sociologues considèrent que nous vivons une mutation en

passant des sociétés industrielles basées sur la production des biens aux

sociétés de l’information et de la connaissance où la production de savoirs est

centrale. Dans cette situation, l’accès des savoirs et les capacités

d’autoformation permanente deviennent des éléments vitaux667.

André Giordan montre comment l’utilisation de moyens modernes peut aider, à partir d’une

pratique, à apprendre et à développer de nouveaux savoirs : « Le demandeur devient non

seulement acteur (auteur) ou (coauteur) de ses savoirs et (de sa conscience de ses savoirs,

de sa propre relation à ses savoirs) »668. À partir d’une pratique originale, celle de l’analyse

d’un film, il nomme quelques présupposés de l’acte d’apprendre nécessaires pour une

démarche de réciprocité : « En brisant les barrières d’âges, de classes sociales, d’ethnies,

les rencontres multiples que suscitent les réseaux donnent à ceux qui le désirent les moyens

666 Idem, 127. 667 Idem, 130. 668 André Giordan, « Les formes de réciprocité dans les réseaux d'échange de savoirs et l'apprendre, », 213.

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de s’inscrire dans un projet (de « faire », de « moment », de « vie »…)669. Par leurs

interactions, les échanges permettent de s’ouvrir à de nouveaux horizons. Ces nouveaux

apports interpellent ma vision actuelle et peuvent m’aider à changer les conceptions de ma

vie, mes connaissances, afin de faire un passage vers une nouvelle compréhension : « En

fait, le demandeur-apprenant déconstruit en même temps qu’il construit autre chose : et il

ne lâchera sa conception initiale que lorsque la nouvelle structure sera en place et testée

pour son efficacité »670.

Pour situer les apports des principaux auteurs, j’ai élaboré un tableau synthèse sur le

concept de la réciprocité éducative. Les apports originaux pour chacun des auteurs sont

notés de couleurs distinctes :

• Noir : Jean-Marie Labelle

• Bleu : Jérôme Eneau

• Vert : Jean-Louis Boutte

• Rouge : les auteurs du dossier dans la revue Éducation permanente 144

Tableau 28 : Synthèse des études sur la réciprocité éducative

Modèle Caractéristiques Le rôle de l’institution • Implication

• Promotion du projet

• Leadership dans la proposition et réalisation du projet de formation

• Reconnaissance des apprenants comme partie prenante du projet

• Appui aux experts tout au long du projet

• L’institution doit devenir apprenante

Choix éthique • Liberté de parole

• Autonomie

• Promotion des sujets

• Émancipation des sujets

• Reconnaissances des compétences des acteurs

Stratégie • Contractuelle entre des partenaires

• Choix des alliances

• Chacun peut apprendre de l’autre

Acteurs • Apprenants • Partage ses questions

• Partage ses expériences

669 Idem, 214. 670 Idem, 215.

Page 327: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

307

• S’implique dans le processus de formation

• Capable d’apprentissage

• Intention d’apprendre

• Enseignants

• Experts

• Initie le projet

• Écoute les apprenants

• Présente les apports prévus au programme et au

contrat

• Accompagne les apprenants dans leur processus

d’apprentissage qui comprend des ruptures

épistémologiques

• Encourage l’apprenant à devenir autonome

• Reconnaît son expérience

• Apprend à transmettre

• S’adapte aux besoins de l’apprenant

• Prépare la séquence de formation

• Groupe de

formation

• Lieu d’échange

• Lieu de transition de passage

• Tiers dans le processus d’apprentissage

• Lieu de préparation à s’insérer dans une société

mondialisée

• Construction commune des réseaux

• Institution • S’adapte aux besoins des apprenants

• Propose des parcours adéquats avec le personnel et

les ressources nécessaires

Interactions didactiques

relationnelles • Relations asymétriques

• Coproduction d’un nouveau savoir

• Accompagne les apprenants et les enseignants dans les ruptures

épistémologiques et divers passages

• Vise la coopération et l’intérêt collectif

• Rôle de régulateur

• Processus collégial

• Constitue le lien social

• Interactions, aller-retour entre les acteurs

• Relations transgénérationnelles

• Outils de transformation de tous les acteurs

• Transformation des acteurs, cela change l’institution

• Processus fusion, séparation, altérité

• Appropriation du savoir

• Réversibilité de la relation de réciprocité

• Lieu de ressaisie de la tradition familiale, de l’institution et autres

• Développe une nouvelle citoyenneté

Dérives • Non-respect du contrat

• Les relations égalitaires qui conduisent à des comportements de rapports de

force et de manipulation

• Climat d’hostilité et développement de la réciprocité destructrice

Page 328: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

308

5.3 Corrélation entre « la pratique étudiée » et « la

réciprocité éducative »

Dans les deux premières sections de ce chapitre, j’ai présenté deux synthèses : les éléments

synthèses de l’analyse de la cueillette de la recherche-action de la pratique catéchétique en

paroisse, et le concept de réciprocité éducative. Maintenant, je fais la corrélation entre ces

deux éléments.

5.3.1 Corrélation « la formation de disciples témoins » et « la

réciprocité éducative »

L’étude de la pratique a démontré que les gens qui s’inscrivent aux parcours, tels la

paroisse, les agents pastoraux et les paroissiens ne connaissent pas les besoins de chacun. Il

est essentiel de développer un dialogue afin d’identifier les besoins de chacun, d’établir un

contrat qui tient compte de leurs aspirations et des buts du projet de formation catéchétique.

De plus, les acteurs ne saisissent pas les répercussions des changements sociaux et

ecclésiaux sur la pratique catéchétique.

Le concept de réciprocité éducative pour se réaliser nécessite l’établissement d’un contrat

clair entre les partenaires. Proposer aux gens de devenir des disciples témoins est une

approche nouvelle en catéchèse au Québec pour l’ensemble des paroissiens. Il est

nécessaire de prendre le temps d’expliquer ce que cela signifie et exige d’être un disciple

témoin afin de comprendre les biens fondés de la démarche catéchétique. Cette

compréhension de l’engagement mutuel conclu par un contrat permet aux catéchumènes

adultes ainsi qu’aux parents qui inscrivent les jeunes aux parcours catéchétiques d’avoir un

outil afin d’évaluer le chemin parcouru. La conclusion d’un contrat demande un dialogue

franc et honnête. Voici comment Jean-Marie Labelle décrit les conséquences d’un contrat

entre des partenaires dans une formation :

La stratégie contractuelle au contraire, reposant en permanence sur l’autonomie

des sujets, assure leur engagement mutuel et responsable sur le projet qui les lie

réciproquement sans violence. Institution et partenaires, dans leurs différences

qui les grandissent mutuellement, coïncident, c’est-à-dire tombent d’accord,

Page 329: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

309

sur un programme qui fixe les règles du jeu de chacun et qui se traduit en un

contrat dont les exigences sont à respecter par tous avec une même rigueur671.

La corrélation montre l’importance dès le départ d’entrer dans un dialogue afin d’informer

les catéchisés et les autres acteurs de la catéchèse. Le contrat est multipartite, il demande un

engagement de tous et sa finalité, c’est de former des disciples témoins du Christ.

5.3.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et « la

réciprocité éducative »

L’équipe de recherche-action a diagnostiqué que la catéchèse se vit en marge de la paroisse,

en silo, sans trop de communication avec les autres activités paroissiales :

Rose*** Bien souvent, ce qui fait que les gens ne restent plus en paroisse parce

qu’il y a eu tellement de tiroirs qui se sont ouverts et puis qui se sont fermés et

qui n’avaient pas de lien entre eux autres, qu’à un moment donné, ils ont

définitivement fermé les tiroirs et puis ils n’en veulent plus672.

Dans la réciprocité éducative, l’appui des institutions pour le programme de formation est

essentiel. Pour la paroisse, cela implique un choix prioritaire pour la catéchèse. Pour

l’organiser il est nécessaire d’avoir les effectifs et les locaux suffisants. Cette nouvelle

orientation d’engendrer de nouveaux chrétiens ne pourra se mettre en œuvre que si la

politique de l’institution ecclésiale, c’est-à-dire la paroisse, appuie clairement cette

orientation effectivement et affectivement.

5.3.3. Corrélation entre « une catéchèse où tous sont acteurs » et

« la réciprocité éducative »

La pratique catéchétique dans la province du Québec, avant 2005, reposait sur quelques

acteurs qui étaient presque tous des spécialistes. Le professeur donnait l’enseignement

religieux dans le cadre scolaire. L’animateur de pastorale faisait le lien entre la paroisse et

671 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 236. 672 Clé USB 1, 450.

Page 330: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

310

l’école et le prêtre se concentrait sur la célébration des sacrements. Les conclusions de la

recherche-action proposent de ne pas se limiter à quelques professionnels pour la catéchèse.

Il est nécessaire d’impliquer tous les gens dans la démarche catéchétique : « Les enfants, les

parents, les bénévoles, les catéchistes, les agents de pastorale, les prêtres et la communauté

célébrante sont tous des acteurs essentiels de la mission catéchétique »673. La recherche-

action montre la nécessité d’un échange entre les acteurs afin d’arriver à réaliser l’objectif

de la catéchèse. Dans la réciprocité éducative, on se concentre surtout sur la relation entre

les acteurs, et ce, avant le contenu. C’est la qualité de la relation qui détermine

l’assimilation du contenu et non pas l’inverse. Jean-Marie Labelle va dans le même sens :

Comme il s’agit dans la situation d’apprentissage de ne pas faire semblant, il

importe que les acteurs entrent en scène pour définir leur jeu les uns par rapport

aux autres. Cette règle du jeu est celle du partenariat didactique impliqué par la

réciprocité : la parole de l’enseignant est suspendue à l’attente de savoir des

apprenants. Chacun, à sa place respective, et tous ensemble, apprenants et

enseignants, définissent le scénario du projet commun d’apprendre et

d’enseigner674.

La corrélation vient appuyer la découverte de la recherche-action sur la qualité nécessaire

des relations entre les acteurs. L’originalité qui en ressort est le lien avec la communauté

chrétienne. Le catéchisé n’est plus objet, mais sujet. Le rôle de la communauté est de

reconnaître le catéchisé comme un partenaire.

5.3.4. Corrélation entre une « catéchèse qui approfondit

l’identité chrétienne » et « la réciprocité éducative »

Dans la rencontre avec les parents, nous avons découvert que les motivations pour

l’inscription aux parcours catéchétiques dépassent le seul désir de recevoir les sacrements

de l’initiation chrétienne. Ils veulent que leurs jeunes s’inscrivent dans l’héritage familial

de leur foi. La catéchèse paroissiale devient un lieu d’attestation du vécu familial. Ce

groupe de catéchèse ouvre à un autre cercle où d’autres familles partagent la même foi

673 Clé USB 1, 782. 674 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 246.

Page 331: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

311

catholique : « Deux enfants qui ont suivi les parcours, je voulais qu’ils vivent sa foi avec

d’autres jeunes, en dehors de la famille, avec la communauté. Une démarche proposée par

la paroisse, on voulait s’insérer dans l’Église »675. Pour ce qui est de la réciprocité

éducative, elle permet à l’apprenant de gagner un nouveau statut, celui d’expert. Jean-Louis

Boutte explique : « Ainsi donc, la relation entre les deux partenaires doit être considérée

comme une relation complexe dans laquelle circulent des savoirs, des processus affinitaires,

et se construisent des ipséités, elle n’est ni simple, ni figée »676 677.

La corrélation montre que la démarche de formation implique la réciprocité. L’apprenant

devient autre, il s’approprie les connaissances de l’expert et il le devient à son tour. Le

catéchisé devient un disciple témoin, il s’insère dans une tradition de transmission.

5.3.5. Corrélation entre « prêtre disciple et évangélisateur »

et « réciprocité éducative »

Pour les membres de l’équipe de recherche, le prêtre doit être le leader de la catéchèse. Il a

un rôle de présence, de coordination et de ressourcement à assurer : « Le pasteur a un rôle à

jouer. Je souhaite qu’il puisse être visible et présent à tous les groupes, pour quelques

rencontres et pas seulement qu’il vienne pour les sacrements »678. Dans le concept de

réciprocité éducative, le formateur est appelé à soutenir le projet, à s’entourer de

collaborateurs. Il n’est pas là pour offrir des services, mais cheminer, se mettre en route

avec l’apprenant. Le formateur devient partenaire. Les travaux effectués sur la réalité de la

réciprocité éducative viennent confirmer le déplacement proposé par les membres de

l’équipe de recherche. Le pasteur est appelé à être disciple, leader et partenaire avec les

autres acteurs.

675 Clé USB 1, 643. 676 Jean-Louis Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice, 154. 677 Ipséité : « Caractère de l’être conscient qui est lui-même, soi-même et nulle autre » Collectif, « Le Grand

Robert de la langue française, » Édition Alain Rey (Paris : Dictionnaire Le Robert - VUEF, 2001), 369. 678 Clé USB 1, 55.

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312

5.3.6. Corrélation entre « catéchèse, lieu d’échange de la

Parole de Dieu et des paroles » et « la réciprocité

éducative »

Il a été noté que les catéchistes, les parents, les jeunes veulent plus qu’un enseignement. Ils

demandent plus de temps pour approfondir les textes bibliques. Il faut dépasser la notion de

cours, pour aller vers un échange, un dialogue et même laisser la place au récit de vie. C’est

dans l’échange de la Parole de Dieu et des récits de vie que l’on crée les conditions

favorables pour l’approfondissement de la foi. Dans le concept de réciprocité éducative,

l’apprentissage se vit par un dialogue entre l’apprenant, le formateur et l’institution. Les

trois auteurs étudiés arrivent à la même conclusion : c’est par le dialogue, l’échange entre

les partenaires que se vit le processus de formation679. Le passage d’une catéchèse centrée

sur l’enseignement vers une pédagogie dialogique se trouve ici confirmé. Le groupe de

catéchèse devient le lieu d’apprentissage par la proclamation de la Parole de Dieu, les

témoignages et la réception du contenu. La Parole de Dieu dans l’échange devient elle-

même un acteur.

5.3.7. Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce

baptismal » et « la réciprocité éducative »

Le ministère du catéchiste est basé sur les sacrements de l’initiation chrétienne. Par la

pédagogie de la foi, il ne transmet pas seulement un savoir humain, il communique dans

son intégrité la Révélation de Dieu. Or, Dieu lui-même, tout au long de l'histoire et dans

l'Évangile, s'est servi d'une pédagogie qui doit rester un modèle. L’originalité du travail du

catéchiste, c’est de témoigner de sa foi et de sa relation au Christ. L’équipe de recherche-

action présente le rôle de catéchiste comme cela :

La finalité de la catéchèse, c’est la formation de disciples. Les catéchistes ont

comme mission de former des personnes capables de témoigner de leur foi. Les

membres de l’équipe pastorale ont à former des catéchistes qui formeront des

679 Jean-Louis Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice, 188.

Page 333: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

313

disciples capables de témoigner de Jésus Christ, Mort et Ressuscité en

Église680.

La paroisse, dans l’état actuel, s’est spécialisée dans la préparation aux sacrements. Elle est

ritualisante et non pas formatrice. Elle est appelée à devenir formatrice de ses membres. Le

travail de Jean-Louis Boutte est éclairant car il analyse la difficulté de changer les

perspectives de formation dans le milieu industriel, confronté au vieillissement du

personnel. Ce changement de paradigme est un appel de conversion pour l’institution :

Pour autant, il semble que les pratiques soient encore fortement teintées de

rationalisme. Il semble donc que passer d’un paradigme « Entreprise

Qualifiante », voire de l’« Entreprise Formatrice » à un paradigme « Entreprise

Apprenante » nécessite un changement de point de vue de vision du monde et

de l’entreprise, d’organisation, de pratiques681.

Cette réflexion de Jean-Louis Boutte met en relief l’intuition que la paroisse ne doit pas être

un comptoir de services, un supermarché du religieux, mais bien un lieu de formation. Cette

corrélation montre le désir de l’équipe de recherche-action de transformer la paroisse en

mettant au centre la catéchèse, en priorisant la formation des catéchistes et des bénévoles.

Cela demande une transformation de fond qui apportera son lot de résistances. C’est en

valorisant le rôle du baptisé et du catéchisé que la paroisse retrouvera l’expertise de la

formation catéchétique qui est dans sa nature.

5.3.8. Corrélation entre « paroisse inclusive » et « la réciprocité

éducative »

Pour les gens de l’équipe de recherche-action, il est nécessaire de discerner l’action de

l’Esprit Saint. Il est un des acteurs en catéchèse. Il agit et aide les divers acteurs de la

catéchèse à être des témoins de Jésus Christ. C’est par la reconnaissance de l’action de

l’Esprit Saint en chacun des participants qu’arrive un changement d’attitudes où on quitte la

peur pour l’ouverture à l’autre. C’est ainsi que la paroisse devient inclusive.

680 Clé USB 1, 782. 681 Jean-Louis Boutte, Transmission de savoir-faire : réciprocité de la relation éducative expert-novice, 50.

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314

Dans le concept de réciprocité éducative, il n’y a pas de référence à la transcendance.

Pascal Galvani et Daniel Hazard parlent de transmission. Ils soulignent que dans certains

contextes difficiles du monde contemporain, les groupes d’échange qui fonctionnent à

partir de la réciprocité éducative deviennent des lieux de réappropriation de savoir682. La

dynamique communautaire et les interactions peuvent permettre de se réapproprier sa

propre histoire et celle de la communauté.

Ma pratique est d’ordre théologique. Il y a unanimité pour signifier que la foi est un don de

Dieu. La catéchèse, c’est la rencontre du Christ qui se révèle par la médiation de témoins et

de l’Église. Ainsi, le fait d’entrer en dialogue et d’échanger avec les nouveaux catéchisés et

catéchumènes, aide à se réapproprier sa propre histoire collective; et par l’action de l’Esprit

Saint présent dans les interactions sur la Parole de Dieu, cela permet de s’approprier la

Révélation. C’est l’Église ainsi qui se vivifie.

5.3.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et

« la réciprocité éducative »

Par cette recherche, j’ai réalisé comment au niveau humain et ecclésial, on a peur

d’exprimer les limites que vit chaque être humain ou institution. En faisant ensemble une

relecture, à partir de certains récits bibliques, nous découvrons que lorsque le peuple

d’Israël a exprimé son manque de pain, Dieu lui a donné la manne (Ex 16). Lors des noces

de Cana, il manquait de vin; Marie intercède auprès de Jésus et il transforme l’eau en vin

(Jn 2, 1-12). La spiritualité du manque et de la miséricorde, c’est accepter notre humanité

présente en nous et dans les institutions comme L’Église. La reconnaissance de notre

humanité individuelle et collective nous permet de saisir que nous avons besoin des autres

et de l’Autre afin de progresser dans notre cheminement. C’est faire confiance à la

Providence après avoir agi selon nos capacités. C’est dans cette dynamique du manque que

le partage devient possible, de même que l’ouverture à l’action de Dieu. Dans les travaux

de Jean-Marie Labelle, la question du manque est également présente. Par l’expérience du

682 Pascal Galvani et Daniel Hazard, « Réciprocité, autoformation et lien social : Une recherche-action

européenne, ».

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315

manque, l’apprenant se sent dans une dynamique où il constate que ce manque l’empêche

de se dépasser, l’enferme sur lui-même. La prise de conscience du manque l’ouvre à

accueillir du neuf, à se mettre en route :

Cette conscience de clôture projette imaginairement l’apprentissage comme

une ouverture. La prise de recul, qui à nom ici mise à l’épreuve, devient

synonyme d'élargissement. Dans l'éclatement des limites du non-savoir, c’est

l’horizon de la pensée qui s’étend et qui devient pour la personne un espace de

liberté, lieu de plaisir, déjà là et toujours à conquérir683.

Pour entrer dans cette dynamique à la fois humaine et spirituelle, il est nécessaire

d’accepter le vertige de reconnaître que je ne peux me suffire à moi-même. Il y a le danger

de s’enfermer sur soi par peur de l’inconnu, de l’autre, et cela est souligné tant dans la

pratique étudiée que dans les travaux présentés sur la réciprocité éducative. Mais si

j’apprivoise ce sentiment de vertige, il oblige une sortie de soi, une recherche de l’autre,

l’appropriation de nouveau savoir et leur intégration dans la vie personnelle et

communautaire afin de développer de nouveaux apprentissages, de nouvelles attitudes et le

sentiment d’une nouvelle liberté.

5.3.10. Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation » et

« la réciprocité éducative »

La recherche-action a mis en évidence le besoin de créer un service de formation intégrale

qui touche tous les acteurs de la catéchèse. Pour l’équipe de recherche, la vie de la première

communauté chrétienne (Ac 2, 42) est éclairante. Elle fait mention que sa vie ne se

cantonne pas seulement dans la dimension intellectuelle. La formation est, pour les

participants de la recherche-action, une démarche où chacun partage son expérience

personnelle; c’est aussi un moment de reconnaissance permettant de développer

l’appartenance au groupe des catéchistes et à l’Église.

683 Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 129.

Page 336: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

316

La formation proposée est rigoureuse. Elle est un lieu instituant à la fois pour les

catéchistes, les bénévoles et les intervenants pastoraux, en vue de constituer la communauté

chrétienne. Jean-Marie Labelle souligne un aspect du processus de formation qui confirme

l’option des membres de la recherche-action, à savoir que la paroisse est le lieu de la

formation catéchétique. Il indique que la formation en groupe est importante et devient un

lieu de croissance et un lieu instituant :

Le groupe est la matrice de la science et du développement personnel, car il est

le lieu de la confrontation de la parole. En disant à l’autre ce que je pense,

l’autre m’oblige à découvrir qui je suis vraiment. Il m’amène à affiner,

corriger, développer et enrichir ma pensée en m’offrant de le faire rebondir sur

sa parole, tout à tour interrogative, critique, suggestive684.

La formation touche les différents savoirs. Cette proposition qui émane des conclusions de

la recherche demande un changement majeur du modèle institutionnel de la paroisse. Le

statu quo ne semble plus acceptable; sinon la paroisse poursuivra son dynamisme de

désagrégation lente et graduelle.

Le modèle proposé a plusieurs points communs avec le concept de réciprocité éducative, à

l’exception de la dimension de la transcendance et de la Révélation chrétienne qui oriente la

formation. Pour que la paroisse devienne une institution apprenante, il y a plusieurs défis à

relever. Il faut composer avec les résistances du milieu; il est même possible que les gens

disent « nous le faisons déjà » :

Le risque est grand pour une institution éducative, université ou autre, de

réduire l’inédit qui la provoque de l’extérieur à ce qu’elle connaît déjà et sait

déjà faire et bien faire, d’après ses propres critères. Il risque pour l’innovation

d’être absorbée par le système et de rentrer dans le rang, c’est-à-dire finalement

de disparaître en tant que novatrice685.

684 Jean-Marie Labelle, « Réciprocité éducatrice et conduite épistémique développementale de la personne, »,

120. 685Jean-Marie Labelle, La réciprocité éducative, 287.

Page 337: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

317

La transformation du système de formation a des impacts majeurs et demande un plan

global et la solidarité de l’équipe paroissiale et des autorités diocésaines. Le fait de

développer un service de formation en paroisse engage l’équipe pastorale, mais également

toute la communauté qui se donne un lieu de croissance et s’ouvre institutionnellement à

accueillir de nouvelles personnes. La paroisse devient apprenante et lieu d’initiation.

5.3.11 Conclusion corrélation « pratique » et « réciprocité

éducative »

Le premier aspect que l’on peut souligner est que la pratique se vit avec une dynamique de

transcendance forte et qu’elle est une dimension absente du concept de la réciprocité

éducative. Nonobstant cet aspect, plusieurs points sont communs. Le premier est que la

pratique catéchétique demande aux catéchistes, aux aides-catéchistes et aux catéchisés que

chacun puisse apporter un nouvel éclairage à l’autre par les échanges sur la Parole de Dieu

et la Tradition. Le deuxième est la nécessité d’avoir un contrat sur la formation entre les

partenaires avec un appui institutionnel. Trop souvent, on reste peu attentif aux besoins des

catéchisés. Dans le concept de réciprocité éducative, l’institution doit être partie prenante

du projet de formation de même que les apprenants. Cela interpelle la pratique, car l’appui

institutionnel est souvent déficient, tant de la part des autorités diocésaines que paroissiales.

5.4 La catéchèse dans les documents du Magistère après le

Concile Vatican II

L’analyse de la pratique m’a stimulé à approfondir certains documents du Magistère : les

documents du Concile Vatican II, le message pour le Peuple de Dieu du Synode sur la

catéchèse, l’exhortation apostolique Catechesi Tradendae, le Directoire Général de la

Catéchèse et le document de la Ve Conférence Générale de l’Épiscopat Latino-Américain et

des Caraïbes Aparecida. Dans chacun de ces documents, je recherche la présence de quatre

mots et d’une expression : catéchèse, catéchuménat, catéchiste, paroisse et communauté

chrétienne.

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318

5.4.1 Les documents conciliaires Vatican II

Le Concile Vatican II parle peu de la catéchèse. Il donne quelques orientations générales

qui sont des changements majeurs en ce domaine. Le tableau suivant note la présence des

cinq mots tirés des différents textes conciliaires; j’indique le numéro des paragraphes où ils

ont été relevés.

Tableau 29 : La catéchèse et les documents du Concile Vatican

II

Mots recherchés Documents

Catéchèse Catéchuménat Catéchiste Paroisse Communauté

chrétienne Apostolicam

Actuositatem (AA) 10 30

Ad Gentes (AD) 19, 26, 39 13-14 14-15-17 37 15,32 Christus Dominus (CD) 30 14 14 30,31 30 Dei Verbum (DV) 24 14 25 Nostra Aetate (NA) 4 Optatam totius (OT) 2-19 2

Presbytérorum Ordinis

(PO) 11 7 5

Sacrosanctum Concilium

(SC) 35-109 64-66 68 42

Unitatis Redintegratis

(UR) 6 6

Total des paragraphes

par thème 12 6 6 6 6

En analysant ces données, ce qui est remarquable est que la majorité des paragraphes qui

font mention des mots recherchés sont présents dans les textes qui concernent les pays dits

de « mission », ou ceux qui traitent de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux. On

parle peu de la catéchèse qui se vit dans les paroisses des Églises locales établies depuis

plusieurs siècles.

Page 339: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

319

a) La restauration du catéchuménat

L’événement le plus important, celui qui a transformé la catéchèse, a été la restauration du

catéchuménat686. Il a été pensé surtout pour les nouvelles Églises locales. D’ailleurs, la

démarche catéchuménale est présentée et décrite dans Ad Gentes687. Le Concile Vatican II

rappelle que la responsabilité du catéchuménat est l’œuvre de tous :

Cette initiation chrétienne au cours du catéchuménat doit être l'œuvre non pas

des seuls catéchistes ou des seuls prêtres, mais celle de toute la communauté

des fidèles, spécialement celle des parrains, en sorte que dès le début les

catéchumènes sentent qu'ils appartiennent au peuple de Dieu688.

C’est un cheminement qui s’étale dans le temps, c’est un moment de conversion. C’est

l’occasion d’une rencontre transformante avec le Christ : « Le catéchuménat n'est point un

simple exposé des dogmes et des préceptes, mais une formation à la vie chrétienne intégrale

et un apprentissage mené de la façon qui convient – formation et apprentissage par lesquels

les disciples sont unis au Christ leur Maître »689. L’objectif est de devenir un disciple du

Christ qui s’habilite à témoigner, afin de poursuivre sa vie apostolique, après avoir reçu les

sacrements de l’initiation chrétienne. C’est un cheminement qui s’adresse à tous les êtres

humains, de tous les âges. Le Concile demande d’adapter, selon les circonstances et les

cultures, le chemin catéchuménal690. Cette formation intégrale va initier les catéchumènes à

la lecture de la Bible, à la liturgie, à la vie morale, et à la vie ecclésiale centrée sur la vie

communautaire, dont le sommet sera l’Eucharistie et la vie apostolique : « En outre, les

évêques seront attentifs à ce que les catéchistes soient dûment préparés à leur tâche : ils

devront bien connaître la doctrine de l'Église et apprendre, dans la théorie comme dans la

pratique, les lois de la psychologie et les disciplines de la pédagogie »691. La formation des

catéchistes comprend des éléments théologiques, pédagogiques et un témoignage de foi.

686 CD14, SC 64. 687 AG 14-15 688 AG 14. 689 AG 14. 690 SC 65. 691 CD 14.

Page 340: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

320

Les Pères du Concile affirment que l’accueil des catéchumènes et l’instauration du

catéchuménat sont des instruments pour aider à l’édification de l’Église.

b) Catéchèse, une activité de formation intégrale

Les Pères situent la catéchèse dans le ministère de la Parole. La catéchèse est une formation

globale qui touche la Bible, la liturgie, la participation à la vie de l’Église et l’apostolat. Ils

rappellent l’importance du rassemblement dominical comme élément de structuration de la

vie chrétienne692. La catéchèse n’est jamais tournée exclusivement vers la vie intérieure de

l’Église, mais elle sera une invitation à devenir missionnaire, à témoigner à tous du don

reçu de Dieu : « Le plus grand nombre possible de frères et de sœurs doivent être instruits

convenablement de l'art de la catéchèse, y être préparés, afin de pouvoir collaborer

davantage encore à l'apostolat»693.

c) Le rôle du catéchiste et de ses collaborateurs

Le catéchuménat et la catéchèse auprès des enfants, des jeunes et des adultes sont des

tâches qui ne reviennent pas seulement aux prêtres, mais doivent être partagées par toute la

communauté. Ce ministère, par le soutien de la communauté chrétienne, des parrains et des

marraines, a pour but l’implantation de l’Église et le développement de la communauté

chrétienne694.

d) Formation des catéchistes et support de l’Église

Ma première observation est que le mot catéchiste n’est pas utilisé au singulier dans les

textes du Concile Vatican II. On utilise toujours l’expression des catéchistes au pluriel.

C’est un corps comme une armée695. De plus, c’est un ministère qui collabore au ministère

presbytéral : « puissent remplir le plus parfaitement possible leur fonction en collaborateurs

692 SC 56. 693 AG 26. 694 AG 14-15. 695 AG 17.

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321

efficaces de l'ordre sacerdotal »696. Cette formation touche toute la vie chrétienne : doctrine,

Bible, liturgie, morale, prière, vie spirituelle, témoignage et pédagogie. On propose aux

catéchistes la lecture continue de la Bible697. Les Pères du Concile invitent à créer des

structures de formation pour les catéchistes dans le diocèse ou en paroisse. On insiste sur le

support à apporter aux catéchistes et même dans certaines circonstances sur les subsides

pour ceux qui y travaillent à plein temps : « En outre, à ceux qui se dévouent entièrement à

cette besogne, on devra procurer par une juste rémunération un état de vie décent et la

sécurité sociale »698. On parle aussi de fonder une œuvre pour les catéchistes; on reprend ici

l’idée de Pie X sur la doctrine chrétienne699. Les Pères indiquent que les catéchistes sont

invités, dans diverses circonstances, à présider la prière commune et s’il manque de prêtres

à assumer les baptêmes, surtout si les personnes sont en danger de mort700.

e) La paroisse et son rôle dans la catéchèse

La paroisse est vue comme une cellule du diocèse : « Les laïcs développeront sans cesse le

sens du diocèse, dont la paroisse est comme une cellule »701. De plus, on présentera la

paroisse comme lieu de la catéchèse et comme lieu d’insertion dans la vie ecclésiale702.

C’est également un lieu d’apostolat et de témoignage703. Le curé est le premier responsable,

dans sa paroisse, de la catéchèse et il valorise le ministère de la Parole dans un esprit

missionnaire704. Les Pères associent le développement de l’Église locale avec la catéchèse

et le développement de l’apostolat. On présente ces deux orientations comme

complémentaires.

La critique que je peux faire de ces orientations générales est que les objectifs proposés

concernent davantage les pays dits de « mission » au moment du Concile Vatican II.

696 AG 17. 697 DV 25. 698 AG 17. 699 Pie X, Lettres apostoliques de S.S. Pie X ; encycliques, motu proprio, brefs, allocutions, etc. 700 AG17, SC 68. 701 AA 10. 702 AA, 10. 703 AG 37. 704 CD 30-31.

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322

L’aspect novateur du Concile est de lier la dynamique missionnaire et la formation

catéchétique pour tous les âges avec les divers aspects de la vie chrétienne.

5.4.2 Le Message au peuple de Dieu : Synode sur la

catéchèse en 1977

L’expression, « la catéchèse part de la profession de foi pour arriver à la profession de

foi », utilisée par Anne-Marie Aitken et Odile Dubuisson, m’a amené à approfondir son

origine. Elle se trouve dans le document du Message au Peuple de Dieu du Synode de

1977705. Dans ce message, la catéchèse est une partie de l’évangélisation. C’est un

enseignement systématique qui touche la question du Salut. On demande que le

catéchuménat serve de référence pour les différents parcours et que la catéchèse conduise à

une rencontre du Christ706.

a) La catéchèse : une démarche en trois mouvements

Lors de la IVe Assemblée Générale Ordinaire, les Pères du Synode rappellent que la

catéchèse se vit par étapes, dans une dynamique d’approfondissement continue de la foi.

Cette annonce de la Parole de Dieu doit s’enraciner dans la vie et la culture locale. La

catéchèse est une partie de l’évangélisation. Le Message pour le Peuple de Dieu décrit la

catéchèse par trois expressions : « la catéchèse est parole, la catéchèse est mémoire, la

catéchèse est témoignage »707. La catéchèse est Parole, car elle a sa source dans la

profession de foi proclamée par un témoin et conduit le catéchisé à faire sa propre

profession de foi708. La catéchèse est mémoire, car elle met en contact avec la Tradition de

foi. Pour entrer en contact avec la Tradition, il est nécessaire de se mettre à l’écoute et à

l’approfondissement de la Parole de Dieu. La catéchèse initie au Symbole de la foi et à la

découverte de la riche histoire de l’Église. Elle est témoignage, car cette vie reçue de Dieu

705 Anne-Marie Aitken, « Vers une pédagogie intergénérationnelle?, » dans Catéchèse 122 (1991).

Odile Dubuisson, L'acte catéchétique : son but, sa pratique (Paris : Le Centurion, 1982). 706 Ibid 707 Synode des évêques, « Message pour le Peuple de Dieu : La catéchèse en notre temps, spécialement pour

les enfants et les jeunes, » dans La Documentation catholique, no. 1731 (1977): 1018. 708 Ibid.

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323

ne peut être gardée pour soi. Cette Parole se communique et lorsqu’elle est proclamée et

vécue, elle devient un outil de transformation de la vie des individus et des communautés

pour renouveler le monde autour d’elle. Les Pères concluent leur présentation de la

catéchèse en précisant sa pédagogie :

Toute catéchèse complète doit unir indissolublement : la connaissance de la

Parole de Dieu, la célébration de la foi dans les sacrements, la confession de la

foi dans la vie quotidienne. La pédagogie de la foi a donc une caractéristique

propre : elle conduit à la rencontre de la personne du Christ, à la conversion du

cœur, à l’expérience de l’Esprit dans la communion ecclésiale709.

Pour les Pères du synode, la paroisse est un lieu ordinaire pour la catéchèse. Tous sont

appelés à être acteurs dans la catéchèse et doivent être formés adéquatement afin

d’exercer un ministère important et essentiel pour l’Église.

b) La catéchèse : une responsabilité partagée par tous

Nous sommes tous responsables de la catéchèse. Elle part de la profession de foi reçue d’un

disciple du Christ. Cette proclamation reçue invite le catéchisé à prendre la route, à devenir

à son tour un disciple témoignant de sa rencontre du Christ, rencontre qui l’a transformé en

lui apportant une joie contagieuse qu’il communique aux autres.

c) La catéchèse : un droit pour tous

Dans la conclusion de ce Message, le pape Paul VI souligne l’importance de la liberté

religieuse; tous les catéchisés ont le droit d’être catéchisés dans un espace de liberté. C’est

un droit lié aux droits de l’homme.

d) Synthèse autour de quelques mots : catéchèse, catéchuménat, catéchiste et paroisse

Pour conclure, la catéchèse prend sa source dans une profession de foi entendue qui a pour

but de stimuler la rencontre avec le Christ. Le catéchisé découvre que la catéchèse est

709 Vième Synode des évêques sur la catéchèse, Message au Peuple de Dieu, 1019-1020.

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Parole, mémoire et témoignage. Elle le conduit à devenir un témoin qui proclamera sa foi à

son tour dans l’Église et dans le monde. Le catéchuménat est le modèle de toute catéchèse.

L’activité catéchétique est complexe et doit tenir compte de tous les défis afin

d’accompagner les catéchisés dans leur rencontre avec Jésus Christ et, ce, malgré les

résistances et parfois les hostilités du milieu. Le catéchiste est un acteur important de la

catéchèse, il travaille en collaboration étroite avec le prêtre, à la vie et à l’animation de la

communauté chrétienne710. La paroisse, par la catéchèse, est appelée à se renouveler.

5.4.3 L’exhortation apostolique Catechesi Tradendae

L’Exhortation apostolique Catechesi Tradendae est le deuxième document important du

pontificat de Jean-Paul II, il a été constitué après le synode sur la catéchèse.

a) Catéchèse

La catéchèse a pour but de former des disciples du Christ. Les nouveaux baptisés apportent

par leur adhésion au Christ leur contribution à la construction du corps du Christ711. Le

catéchisé suit le chemin qui est le Christ, il vit dans la « Sequela Christi »712. Cette

expression latine, utilisée par Jean-Paul II, donne à la catéchèse un élément dynamique.

Elle devient un pèlerinage, un cheminement, une découverte graduelle de la foi. Le

catéchisé vit une conversion, un déplacement intérieur. Il se met en route pour vivre la

« Sequela Christi ». L’exhortation apostolique rappelle que la tâche de la catéchèse est

prioritaire :

La seconde leçon regarde la place même de la catéchèse dans les projets

pastoraux de l'Église. Plus celle-ci se montre capable, au niveau local ou

universel, de donner la priorité à la catéchèse - sur d'autres œuvres et initiatives

dont les résultats seraient plus spectaculaires - plus elle trouve dans la

710 Synode des évêques, « Message pour le Peuple de Dieu : La catéchèse en notre temps, spécialement pour

les enfants et les jeunes, » : 1020. 711 CT, 1. 712 CT, 5.

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325

catéchèse un affermissement de sa vie interne de communauté de croyants et de

son activité externe comme missionnaire713.

Selon ce document, la catéchèse est la responsabilité de tous : des prêtres, des religieux et

religieuses, des catéchistes, avec une mention spéciale pour le rôle des parents. On souligne

le danger de tomber dans une routine qui pourrait paralyser, scléroser et rendre la catéchèse

stérile. Elle est une œuvre essentielle de l’Église. Elle a pour but de former des disciples

témoins du Ressuscité qui développeront une dimension apostolique et seront capables de

rendre compte de leur foi individuellement et en Église.

b) Catéchuménat

On parle peu du catéchuménat, si ce n’est pour rappeler le lien entre enseignement, liturgie

et vie apostolique. La catéchèse pour adultes est vue comme le modèle de toutes les

catéchèses714.

c) Catéchiste

Le catéchiste prend exemple sur le Christ pour son ministère. Il partage sa responsabilité

avec les prêtres et tous les autres partenaires de la communauté chrétienne. La formation

doit être rigoureuse et donnée par les autorités diocésaines ou interdiocésaines.

d) Paroisse et communauté chrétienne

La paroisse prend comme modèle la communauté primitive. Elle se doit d’être accueillante.

L’efficacité de son action est liée à sa capacité d’accueil des autres, des nouveaux, de ceux

qui frappent à la porte. Sans cet accueil, la catéchèse paroissiale peut devenir une action

stérile :

713 CT, 15. 714 CT, 43.

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326

La catéchèse risque de se stériliser si une communauté de foi et de vie

chrétienne n'accueille pas le catéchumène à un certain stade de sa catéchèse.

C'est pourquoi la communauté ecclésiale à tous ses niveaux est doublement

responsable par rapport à la catéchèse : elle a la responsabilité de pourvoir à la

formation de ses membres, mais aussi la responsabilité de les accueillir dans un

milieu où ils pourront vivre le plus pleinement possible ce qu'ils ont appris715.

Dans le document Catechesi Tradendae on précise que la communauté chrétienne a

plusieurs formes : paroisse, école, mouvements et associations… La paroisse n’a pas le

monopole de la catéchèse, elle en est le lieu privilégié.

5.4.4 Le Directoire général pour la catéchèse de 1997

Le Directoire de général pour la catéchèse publié en 1997 est un document d’orientation

générale que l’Église propose dans la suite des travaux du Concile Vatican II pour la

promotion de la catéchèse et du ministère de la Parole. Il est un déploiement du directoire

publié en 1971 :

Le but de ce Directoire est, bien sûr, le même que celui de 1971. Il se propose,

en effet, d’énoncer « les principes fondamentaux théologico-pastoraux, tirés du

Magistère de l’Église et spécialement du Concile Vatican II, afin que l’action

du ministère de la parole – et concrètement la catéchèse – puisse ainsi être

conduite et ordonnée de façon plus adaptée »716.

Je poursuis l’analyse à partir du déplacement de la question de recherche et de

l’approfondissement des thèmes mentionnés en 5.4.

a) Catéchèse

Dans son exposé préliminaire, le DGC explique que le langage sur la catéchèse est en

transformation et s’inspire des documents faits après le Concile Vatican II :

715 CT, 24. 716 DGC, 10.

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327

Le terme « catéchèse » a subi une évolution sémantique durant les vingt siècles

d'histoire de l'Église. En ce Directoire la conception de la catéchèse s'inspire

des documents du Magistère pontifical post-conciliaire, et surtout d'Evangelii

nuntiandi, Catechesi tradendae et Redemptoris missio717.

Cette reconnaissance de l’évolution du terme par le Magistère interpelle plusieurs

intervenants pastoraux qui pensent que la pensée de l’Église est immobile et ne s’adapte pas

aux situations inédites de l’histoire; pourtant c’est tout le contraire qui se passe. Le DGC

décrit la catéchèse comme un christocentrisme trinitaire. C’est Jésus qui nous présente qui

est Dieu et nous fait découvrir qu’il est Père, Fils et Esprit Saint. Le DGC reprend la

pédagogie de Jésus pour parler du mystère de Dieu718.Cette démarche de conversion par la

rencontre du Christ, pour devenir son disciple et témoigner de lui se vit par des activités

d’initiation, d’éducation et d’instruction719. La catéchèse est composée de six tâches

intégrant les dimensions de la vie chrétienne : « La connaissance de la foi, la vie liturgique,

la formation morale, la prière, l’appartenance communautaire et l’esprit missionnaire720.

C’est à la communauté chrétienne et aux catéchistes d’être les agents d’inculturation des

différents catéchismes721. Le DGC rappelle que les méthodes pour la catéchèse peuvent être

tantôt déductives tantôt inductives722.

b) Catéchuménat

Le DGC confirme que la catéchèse se modèle sur le catéchuménat. En reprenant le modèle

du catéchuménat des premiers siècles, on propose des cheminements particuliers aux

personnes qui n’ont jamais entendu parler de Jésus Christ, à celles qui ont pris une distance

vis-à-vis de l’Église ou qui s’impliquent avec dynamisme dans l’Église.

717 DGC, 35. 718 DGC, 100. 719 DGC, 68. 720 DGC, 87. 721 DGC, 110. 722 DGC, 151.

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c) Catéchiste

Le DGC fait une grande place aux catéchistes en reconnaissant le travail qu’ils exercent

comme une vocation. On parle d’un ministère particulier pour l’Église. La catéchèse

participe au ministère de la Parole de Dieu dans l’Église723. La participation des catéchistes

au ministère de la Parole est particulière et unique. Le ministère catéchétique se distingue

des autres ministères dans l’Église : « Dans l'ensemble des ministères et services d'Église,

le ministère catéchétique a son caractère propre, qui lui vient de la spécificité de l'action

catéchétique dans le processus d'évangélisation »724. Le catéchiste agit en médiateur : « Le

catéchiste est, en soi, un médiateur qui facilite la communication entre les personnes et le

mystère de Dieu, des personnes entre elles et avec la communauté »725. C’est le catéchiste

qui par son écoute, son animation et la présentation du contenu des catéchèses fait les liens

entre le catéchisé, l’Évangile et la paroisse. Il stimule le catéchisé à passer d’une personne

passive à un acteur dans les rencontres de catéchèse726. Pour réaliser sa tâche, en plus

d’avoir un appel et des qualités humaines inhérentes à ce ministère, le catéchiste a besoin

de formation727. Cette formation doit l’habiliter à accompagner sur la « Sequala Christi » le

catéchisé et devenir pour lui un guide, une personne ressource et un témoin. Le catéchiste

n’est pas seul dans son ministère, il est accompagné par la paroisse et soutenu par les

prêtres.

d) Paroisse et communauté chrétienne

La catéchèse ne se vit pas seule ou dans des groupes restreints, elle se vit en Église avec la

paroisse ou une communauté chrétienne :

723 DGC, 231. 724 DGC, 219. 725 DGC, 156. 726 DGC, 167. 727 DGC, 237.

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329

La pédagogie catéchistique n'est efficace que dans la mesure où la communauté

chrétienne devient la référence concrète et exemplaire du cheminement de foi

de chaque personne. Cela se produit si la communauté se propose comme la

source, le lieu et le terme de la catéchèse. Elle devient alors concrètement le

lieu visible du témoignage croyant, elle pourvoit à la formation de ses

membres, les accueille en véritable famille de Dieu, en devenant ainsi le milieu

vital et permanent de croissance de la foi728.

Le DGC donne des critères comme celui de développer sa capacité d’accueil afin de

vérifier si une communauté vit bien la catéchèse et si elle est signe de la présence de

Dieu729. L’apport le plus original du DGC est de définir quelques conditions pour aider la

paroisse à jouer son rôle. La paroisse doit prioriser la catéchèse des adultes, s’occuper

d’annoncer l’Évangile à ceux qui sont devenus indifférents au message évangélique et

développer un noyau communautaire qui est un lieu de soutien pour tous les gens en

recherche et vivant un cheminement catéchétique730.

Le DGC voit la communauté chrétienne, la paroisse comme foyer de la catéchèse731. C’est

à la paroisse de susciter des vocations pour les catéchistes732. Il rappelle le rôle de l’évêque

et des prêtres dans le domaine catéchétique. Il souligne l’importance du rôle des parents

dans la catéchèse. Ils sont les premiers éducateurs de la foi de leurs enfants. Les parents

méritent d’être soutenus par ceux qui travaillent à la mission catéchétique.

5.4.5 Le document de la Ve Conférence générale de l’Épiscopat

Latino-Américain et des Caraïbes d’Aparecida

Le cinquième document retenu pour faire la corrélation avec la pratique étudiée est celui de

la Ve Conférence générale de l’Épiscopat Latino-Américain et des Caraïbes qui a eu lieu au

sanctuaire d’Aparecida au Brésil. Ce choix est motivé par le titre : « Disciples

728 DGC, 158. 729 DGC, 221. 730 DGC, 258. 731 DGC, 253. 732 DGC, 233.

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330

missionnaires de Jésus Christ pour que nos peuples aient la vie en lui »733. Ce texte a été

écrit en Amérique Latine, en 2007, la même année que s’est réalisée la recherche-action.

Comme l’une des conclusions de la recherche-action est l’importance de devenir disciple

témoin, je trouve important d’observer les convergences et les différences entre les deux

documents. Ce texte a pris de l’importance depuis l’élection du pape François. Dans son

exhortation apostolique Evangelii Gaudium, le pape cite à huit reprises le document final

d’Aparecida734.

Plusieurs théologiens ont commenté ce texte. João Batista Libana, prêtre jésuite, fait un

bilan critique du document735. Il indique qu’il a permis de garder quelques intuitions de la

conférence de Medellín de 1968, tout en rappelant la dimension hiérarchique de l’Église. Il

est critique en indiquant que plusieurs questions importantes n’ont pas été, pour lui,

suffisamment traitées comme le thème de la sexualité, le célibat des prêtres et les

communautés de base736.

Bernard Lestienne, théologien jésuite, présente une analyse plus positive737. Pour lui, le

texte donne des orientations qui, à long terme, peuvent modifier de manière importante la

vie ecclésiale : « S’il est pris au sérieux, si ses principales orientations sont mises en œuvre,

on peut attendre de vrais renouvellements dans nos Églises. Aparecida se situe dans le

sillage de Medellín (1968) et Puebla (1979) »738. Il souligne que le changement important

dans le texte d’Aparecida est d’indiquer que les baptisés sont disciples missionnaires. Le

733 Conseil Épiscopal Latino-Américain et Benoît XVI, Disciples et missionnaires de Jésus Christ pour que

nos peuples aient la vie en lui : Aparecida : [13-31 mai 2007], Documents d'églises, (Montrouge, Paris :

Bayard, Cerf : Mame, 2008). 734 François, Exhoration apostolique Evangelii Gaudium (Montréal : Médiaspaul, 2013). 735 João Batista Libânio est un prêtre jésuite qui a vécu de 1932 à 2014. Il a été professeur de théologie et a

réalisé plus de 40 publications. Il a été un des artisans de la théologie de la libération.

http://www.jesuites.org/content/joao-batista-libanio-sj 736 João Batista Libânio, « Assemblée d’Aparecida : bilan mitigé, » dans Relations (Montréal: Centre justice

et foi, 2007). 737 Bernard Lestienne SJ est un français qui a passé 30 ans de son apostolat au Brésil. Il a exercé son ministère

à Rio Janeiro, Brasilia en s’occupant de pastorale et des médias catholiques. 738 Bernard Lestienne SJ, « Le Document d’Aparecida, des chemins d’avenir pour l’Église, » dans Dial –

Diffusion d’information sur l’Amérique latine http://www.alterinfos.org/ (2007).

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331

document ne parle plus seulement d’être disciple, mais propose d’être disciple missionnaire

et que les deux mots sont liés intrinsèquement739.

Le document d’Aparecida a aussi été l’objet de nombreuses critiques. Plusieurs évêques ont

souligné qu’il a été modifié avant d’être présenté au Pape. Ils s’accordent pour dire qu’il y a

eu des modifications, mais la divergence de point de vue porte sur l’ampleur des

corrections. Le cardinal Bergoglio, président du comité de la rédaction, mentionne que les

corrections sont mineures :

Le document final, qui est un acte du Magistère de l’Église latino-américaine,

n’a subi aucune manipulation. Ni de notre part, ni de celle du Saint-Siège.

Quelques petites retouches de style, de forme, ont été apportées et un petit

nombre de choses ont été enlevées d’un côté et réintroduites de l’autre740.

Dans ce document, que dit-on sur ces sujets : catéchèse, catéchuménat, catéchistes,

paroisses et communauté chrétienne?

a) Catéchèse

Le document d’Aparecida présente la catéchèse comme une formation intégrale : « La

catéchèse ne peut pas se limiter à une formation purement doctrinale, sinon qu’elle doit être

une véritable école de formation intégrale »741. Le but de toute la démarche d’Aparecida est

de souligner que tous les baptisés sont appelés à devenir des disciples missionnaires. La

finalité de la catéchèse se déplace. Elle n’est plus seulement une rencontre avec Jésus

Christ, mais cette rencontre, pour être véritable, conduit à la transformation de l’être et le

stimule à devenir soi-même une personne qui proclame le Christ Ressuscité. L’atteinte de

cet objectif nécessite une formation autant des catéchisés, des membres des communautés

chrétiennes, des laïcs impliqués dans l’Église que du clergé :

739 Ibid. 740 Stefania Falasca, « Ce que j’aurais dit au consistoire :Interview du cardinal Jorge Mario Bergoglio,

archevêque de Buenos Aires, » dans 30 Jours dans l'Église et le monde (Roma : 30GIORNI 2007). 741 APA, 299.

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La vocation et l’engagement d’être aujourd’hui disciples et missionnaires de Jésus

Christ en Amérique Latine et aux Caraïbes, nécessite une claire et ferme option

pour la formation des membres de nos communautés, pour le bien de tous les

baptisés, quelle que soit la fonction qu’ils remplissent dans l’Église742.

Cette catéchèse est l’œuvre de tous. Les évêques du CELAM rappellent que le succès de la

catéchèse est lié à l’implication et à l’investissement accru des familles, des pasteurs, des

communautés chrétiennes, en prenant soin des parcours catéchétiques et de la création de

commissions diocésaines et paroissiales743. Cette formation catéchétique est l’occasion

d’intensifier l’identité catholique744. La catéchèse est sensible aux enjeux sociaux, aux liens

avec la piété populaire et au dialogue œcuménique745. Elle est également un outil parmi

d’autres pour développer une démarche de guérison intérieure; on parle ici de purification

de la mémoire746. Elle est invitée, dans ses outils didactiques, à faire une place aux divers

moyens de communication et à l’art. La catéchèse est un moment de l’évangélisation qui

devient une démarche de renouvellement de l’Église et de la paroisse.

b) Catéchuménat

Le document parle peu du catéchuménat, mais il le nomme pour souligner qu’il est le

modèle de toute l’initiation chrétienne747.

c) Catéchistes

Les catéchistes, pour bien vivre leurs tâches et responsabilités, ont besoin d’une bonne

formation intégrale et spirituelle748. La formation donnée actuellement aux catéchistes

742 APA, 276. 743 APA, 295. 744 APA, 297. 745 APA, 300. 746 APA, 385. 747 APA, 288. 748 APA, 285.

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manque d’efficacité tant par le manque d’intérêt que de ressources des paroisses et des

pasteurs : « Les services catéchétiques des paroisses manquent souvent de la proche

collaboration des familles. Les curés et autres responsables n’assument pas avec grande

fermeté la fonction qui leur correspond comme premiers catéchistes »749. Les évêques du

CELAM montrent l’importance d’insérer la catéchèse dans le projet de pastorale

d’ensemble où tous s’impliquent. Le CELAM demande aux acteurs de la catéchèse de

trouver des chemins nouveaux pour évangéliser toutes les activités de piété populaire750.

d) Paroisses et communautés chrétiennes

Le document d’Aparecida indique que le modèle de toute paroisse devrait être la

communauté chrétienne des origines751. Le modèle d’organisation des paroisses est défini

comme une communauté de communautés. La paroisse est vue comme une école de la vie

chrétienne, afin de former des disciples missionnaires. Les évêques du CELAM ont repris,

dans leur message final, l’idée que la paroisse est appelée à devenir une maison et une école

de communion en associant les différents mouvements et associations catholiques752. Les

évêques sont conscients des lacunes des différentes paroisses. Ils nomment les défis de

l’évangélisation des paroisses urbaines situées dans les grandes villes753. Dans le document,

le passage proposé est que les paroisses ne soient pas des lieux de services mais bien des

communautés de vie, des écoles qui formeront des disciples missionnaires : « Les plus

grands efforts des paroisses, au début de ce troisième millénaire, doivent être ceux de la

convocation et de la formation de missionnaires laïcs »754. Pour que les paroisses soient

plus efficaces, les évêques font une mise en garde contre des paroisses qui deviendraient

des superstructures où la taille de celles-ci serait tellement grande qu’il n’y aurait plus de

possibilité pour les gens de développer le sens de l’appartenance. C’est pour cela que l’on

pousse le modèle de paroisse « communauté de communautés ». Les évêques parlent aussi

de la motivation des prêtres; on souhaite qu’ils soient des amoureux du Seigneur et des

749 APA, 296. 750 APA, 299. 751 APA, 175. 752 Conseil Épiscopal Latino-Américain et Benoît XVI, Disciples et missionnaires de Jésus Christ pour que

nos peuples aient la vie en lui : Aparecida : [13-31 mai 2007], 39. 753 APA, 173. 754 APA, 174.

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334

missionnaires. On les invite à dépasser le seul fait d’être des administrateurs755. La paroisse

doit être un lieu de spiritualité qui présente toutes les vocations possibles et qui par sa

mission est appelé à devenir un centre de formation permanente pour les disciples

missionnaires756.

e) Disciples missionnaires

La réalité des disciples missionnaires est au centre du document d’Aparecida. Les évêques

du CELAM ont basé leur argumentation théologique sur l’initiation chrétienne, plus

particulièrement, sur les effets des sacrements du baptême et de la confirmation757. Chaque

baptisé est invité à devenir disciple missionnaire. On rappelle que les premiers éducateurs

des disciples missionnaires sont les parents. Chaque disciple missionnaire est appelé à se

former et les évêques du CELAM reprennent les quatre dimensions semblables à celles

proposées dans Pastores Dabo Vobis758. « La formation comprend diverses dimensions qui

devront être intégrées tout au long du programme de formation. Il s’agit de la dimension

humaine communautaire, spirituelle, intellectuelle et pastorale-missionnaire »759.

Pour la formation humaine, ce qui est différent dans ces quatre dimensions est qu’on ajoute

la dimension communautaire et, pour la tâche pastorale, celle de la mission. Ces deux

tâches, soit celle de la dimension communautaire et celle de la pastorale missionnaire sont

les tâches spécifiques que l’on retrouve dans la description des tâches de la catéchèse au

numéro 85 du DGC. Les évêques du CELAM sont conscients que le développement de

l’idée du disciple missionnaire est en continuité avec les réflexions de l’Église. Plus

particulièrement, depuis le Concile Vatican II, cela demande une conversion pastorale760.

Le concept de disciples missionnaires est un déplacement important, celui de passer d’une

pastorale de chrétienté à une pastorale missionnaire. Ce changement permet d’avoir un

755 APA, 201. 756 APA, 306. 757 APA, 153. 758 PDV, 43-59. 759 APA, 280. 760 APA 368.

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335

projet pastoral dynamique, d’éviter un repli identitaire et de s’aventurer dans une pastorale

missionnaire.

5.5 Corrélation entre « pratique » et « Magistère »

Tel que constaté, la pensée du Magistère s’est transformée depuis le Concile Vatican II. Un

des points communs observés avec la recherche-action est qu’ils font tous les deux une

évaluation assez critique de la catéchèse, mais proposent des éléments prospectifs. Les

catéchistes participant à la recherche affirment que la vision du DGC les rejoint. Ils veulent

réaliser ce programme en paroisse761. Les membres de l’équipe de recherche-action n’ont

pas été mis en contact avec le document d’Aparecida ni n’ont été informé de celui-ci.

5.5.1 Corrélation entre « formation de disciples témoins » et

« Magistère »

L’analyse de la pratique rappelle l’importance de vivre une rencontre avec le Christ pour

former des disciples témoins. Les cinq textes du Magistère retenus arrivent à cette même

conclusion. Les points de convergence sont nombreux entre la pratique et les documents du

Magistère. On observe le déplacement de la vision de la catéchèse depuis le Concile

Vatican II. Avant le Concile, la catéchèse était centrée sur l’enseignement d’une doctrine.

Par l’expérience des pays dits de mission et la restauration du catéchuménat, elle devient

une démarche centrée sur la rencontre du Christ qui met en route le catéchisé afin qu’il

devienne un disciple missionnaire et transforme à la fois la vie de la communauté

chrétienne et la société. Ce déplacement, avec quelques variantes, correspond aux

aspirations des conclusions de l’analyse des données de la recherche-action.

Un autre point commun est que la catéchèse n’est pas seulement une démarche de

préparation sacramentelle ou d’un enseignement doctrinal, mais l’initiation à une nouvelle

vie dans le Christ. Que la catéchèse soit une démarche christocentrique et trinitaire fait

aussi unanimité. Un autre point est que la catéchèse est un élément de guérison intérieure;

761 Clé USB 1, 337-338.

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336

cet élément, souligné par Aparecida, est également présent dans la recherche-action.

L’élément qui est davantage ressorti dans la recherche-action est la dimension affective. La

catéchèse doit donner le goût de Jésus, le goût de l’Église. L’approfondissement de la

Parole de Dieu conduit à développer un amour qui transforme, guérit l’être et suscite le

désir de partager ce que l’on a appris et vécu762. Ce que nous pouvons conclure pour cet

élément est la convergence dans la vision de la finalité de la catéchèse. Elle est une

démarche spirituelle, humaine et ecclésiale qui permet de rencontrer Jésus Christ qui nous

révèle qui est Dieu. Cela me donne le goût d’annoncer aux autres ce que j’ai découvert et

comment cela m’a transformé et libéré.

5.5.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et

« Magistère »

Dans les documents du Magistère, la vision de la catéchèse et celle de la paroisse sont

intimement liées. Il n’y a pas de distinction, ni opposition ou séparation. Dans les

documents du Concile Vatican II, on parle peu de la paroisse. Par contre, dans l’exhortation

apostolique Catechesi Tradendae, on voit la catéchèse comme un outil de renouvellement

de la paroisse où celle-ci se laisse transformer toujours davantage afin de devenir un signe

du Salut. Dans le DGC, la paroisse est le foyer privilégié de la catéchèse car elle est le lieu

d’accueil de tous. Dans la paroisse, la catéchèse est une démarche d’enseignement,

d’initiation et de témoignage qui conduit à une rencontre avec Dieu qui est Père, Fils et

Esprit Saint. Dans le document d’Aparecida, comme dans les autres documents, on veut

modeler la paroisse sur la communauté primitive comme souligné dans Ac 2,42-47. La

paroisse n’est pas un lieu de distribution de services mais une école de communion et un

lieu de formation des disciples missionnaires.

Les sacrements sont vus, non comme un objectif à atteindre, mais comme un outil afin de

vivre plus intensément la relation au Christ. Un des éléments qui est très fort dans

Aparecida est l’association de la Parole de Dieu, des sacrements et de l’envoi en mission.

C’est avec une finalité plus claire et la reconnaissance de la paroisse comme lieu privilégié

762 Clé USB 1, 21-22.

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337

de la catéchèse que l’on peut transformer la pratique. Cependant, cela demande une

formation de toute la communauté.

5.5.3 Corrélation entre catéchèse où tous sont acteurs et

Magistère

La spécialisation des acteurs de la catéchèse est liée en grande partie à la pratique issue du

Concile de Trente, qui voulait garantir l’orthodoxie et l’orthopraxie de l’enseignement

catholique. La restauration du catéchuménat et de la catéchèse, dans les pays qui n’ont plus

d’écoles publiques catholiques, a suscité la redécouverte du rôle des acteurs de la catéchèse.

Le document d’Aparecida souligne la nécessité d’avoir un but commun, celui d’arriver

individuellement et collectivement à être disciple missionnaire.

Ce qui est observé dans les documents du Magistère et la pratique, est l’absence de

réflexion sur les parrains et les marraines. Cela indique que le rôle du parrain et de la

marraine n’est pas intégré à la vie ecclésiale. L’absence de la réflexion sur le rôle des

parrains et marraines indique bien que l’on est encore dans une pensée qui est centrée sur

des spécialistes. Il est nécessaire de dépasser cette vision et croire à l’apport de chacun, et

surtout au témoignage de foi des membres de la communauté.

J’ai pu constater que les interactions et la reconnaissance des apports des acteurs ont permis

le cheminement dans la foi de chacun. Si l’on veut dépasser le cadre de l’enseignement, il

est nécessaire de faire appel à d’autres formes d’intervention, comme le témoignage :

« Dans nos célébrations et dans nos rassemblements, nous devrions faire une place plus

grande aux témoignages »763. Il est nécessaire que les différents acteurs puissent intervenir

et dépasser la méthode d’enseignement magistral. Le témoignage et le partage permettent à

un plus grand nombre et spécialement aux parents, aux parrains, aux marraines, aux

paroissiens et aux bénévoles de participer. On pourra vivre ce déplacement si on donne la

parole à tous et que tous peuvent avoir du temps d’écoute et d’échange sur ce qui a été

partagé. Dans la catéchèse, les groupes de partage sont le lieu par excellence pour valoriser

763 Clé USB 1, 237.

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338

cette pratique. Les interactions entre les acteurs consolident à la fois les identités

personnelles et collectives. Cela permet de développer un langage commun, une dynamique

de formation permanente et de valoriser les vocations et les ministères.

5.5.4 Corrélation entre « catéchèse qui approfondit l’identité

chrétienne » et « Magistère »

Dans les différents textes du Magistère, on insiste pour développer l’identité chrétienne des

catéchisés. Ce qui est original dans la recherche-action est que l’identité chrétienne ne

surgit pas seulement de l’apprentissage de nouvelles connaissances, mais bien du partage et

des interactions dans les groupes de catéchèse. D’ailleurs, la plus grande critique des

parents a été qu’ils n’avaient pas le temps d’approfondir les textes bibliques, d’échanger

entre eux et d’en faire l’actualisation.

Dans le contexte contemporain, la catéchèse n’est plus essentielle pour la réussite sociale.

C’est une option parmi d’autres pour bien se préparer à la vie. Pour plusieurs parents, cela

devient l’occasion de partager avec leurs enfants des valeurs essentielles et la foi

chrétienne. Le petit groupe devient le lieu d’intégration. C’est en donnant de la valeur à ces

échanges sur la Parole de Dieu que se construit l’identité individuelle et ecclésiale.

5.5.5 Corrélation entre « prêtre disciple et évangélisateur »

et « Magistère »

L’équipe de recherche-action a suggéré que le prêtre laisse de côté les tâches

administratives, afin de soutenir la catéchèse et la placer au centre de la vie paroissiale pour

la renouveler764. Il est difficile de croire que c’est la formation catéchétique qui peut aider

les paroisses. Pourtant, c’est la solution réfléchie et proposée par la recherche-action. Ce

qui est surprenant est que les différents documents du Magistère vont dans le même sens.

Sans la négliger, l’administration est vue comme secondaire et au service de la mission. Le

prêtre n’est pas seulement le ministre des sacrements. Dans le document Ad Gentes, au

764 Clé USB 1, 136.

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numéro 15, on souligne l’importance du travail collégial des disciples, des catéchistes et

des prêtres. Ensemble, ils portent le souci de développer la communauté chrétienne.

L’exhortation apostolique Catechesi Tradendae va dans le même sens; le prêtre est celui

qui anime la communauté chrétienne en collaboration avec les catéchistes. Le DGC donne

une description détaillée du rôle du curé et des prêtres765. Le prêtre est présenté comme

pasteur et éducateur de la communauté chrétienne766. Le document d’Aparecida invite les

prêtres à être des pasteurs pour la catéchèse et dit, presque mot pour mot, une affirmation

des conclusions de l’analyse de la pratique : le pasteur est lui aussi un disciple et au service

de la communauté767. Cette expression d’Aparecida, le prêtre est « missionnaire ardent »,

vient rejoindre deux autres expressions utilisées dans la recherche-action « avoir le goût de

Jésus Christ, le goût de l’Église ». Cette corrélation montre qu’il y a une convergence sur

l’importance de l’exercice du ministère de la Parole par le prêtre. La catéchèse devient un

des lieux privilégiés de proclamation de la Parole. Cette recherche identifie la nécessité du

développement du ministère de la Parole chez le prêtre, celui de découvrir la pédagogie du

Christ768.

5.5.6 Corrélation entre « catéchèse lieu d’échange de la

Parole de Dieu, de paroles » et « Magistère »

Tel que déjà mentionné, la recherche-action en est venue à la conclusion que les échanges,

dans les petits groupes, faits autour de la Parole de Dieu et en lien avec la communauté

chrétienne qui célèbre le dimanche, permettaient aux individus d’approfondir et d’élaborer

un discours actualisé de leur foi. Ce sont les liens d’affection et d’amitié tissés par les

bénévoles, les catéchistes, les agents pastoraux, les prêtres et la communauté dominicale

qui donnent une crédibilité au message. Est-ce que cette découverte a un écho dans les

textes du Magistère?

Cette initiation chrétienne au cours du catéchuménat doit être l'œuvre non pas

des seuls catéchistes ou des seuls prêtres, mais celle de toute la communauté

765 DGC, 224-225. 766 DGC, 225. 767 APA, 201. 768 DGC, 139-145.

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340

des fidèles, spécialement celle des parrains, en sorte que dès le début les

catéchumènes sentent qu'ils appartiennent au peuple de Dieu769.

Dans les documents du Message pour le peuple de Dieu de 1977 et dans Catechesi

Tradendae, il y a ce même écho : plus la catéchèse est au centre de la vie paroissiale, plus

elle est efficace et permet aux gens de découvrir l’originalité de la vie de croyant. Les

documents du Magistère vont dans le même sens; il y a la nécessité d’entendre, d’écouter et

de partager sur la Parole de Dieu. Ce que la recherche fait découvrir de plus spécifique est

que la prise de parole ne doit pas aller seulement dans un sens. Ce n’est pas exclusivement

celui qui est en situation asymétrique, en poste « d’autorité », qui doit conduire la

discussion. L’approfondissement de la foi se vit par un échange entre tous, chacun

apportant son expérience, son témoignage. C’est dans la prise de parole que se vit

l’intégration et que chaque individu découvre, nomme et intègre l’expérience de la foi.

5.5.7 Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce

baptismal » et « Magistère »

La recherche-action a permis de découvrir comment la catéchèse était à la marge de la vie

paroissiale. Il a été noté que des tensions existent à l’intérieur de l’équipe pastorale, avec

les catéchistes et avec la communauté célébrante qui a du mal à accueillir les nouveaux

catéchisés. Une des pistes pour sortir de cette impasse est de reconnaître le ministère des

catéchistes constitués dans un corps comme un service de la paroisse en lien avec le pasteur

et l’équipe pastorale.

Dans le Concile Vatican II et le DGC, il est mentionné explicitement que le ministère du

catéchiste se base sur les sacrements d’initiation chrétienne : « La vocation du laïc à la

catéchèse découle du sacrement de Baptême et est renforcée par la Confirmation, ces

sacrements par lesquels il participe à l'office sacerdotal, prophétique et royal du Christ »770.

Aparecida va dans le même sens, les évêques encouragent non seulement les catéchistes,

mais aussi d’autres ministères à poursuivre leurs œuvres au niveau de l’Église :

769 AG, 14 770 DGC, 231.

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341

Nous reconnaissons et encourageons les catéchistes, les délégués de la Parole

et les animateurs de communautés qui accomplissent un magnifique travail

dans l’Église, à continuer l’engagement qu’ils ont acquis par le baptême et la

confirmation771.

La problématique se trouve davantage au niveau de la pratique étudiée. Il est vraiment

important de mettre en place cette reconnaissance, non pas comme un simple bénévolat

mais comme un ministère lié au baptême. Cette corrélation amène à poser cette question :

pourquoi cette résistance à reconnaître le ministère du catéchiste? Peut-elle être liée à la

difficulté de la communauté paroissiale et diocésaine de reconnaître des ministres

bénévoles? Cette demande de reconnaissance par les membres de l’équipe de recherche est

commune avec la position du Magistère. Ce qui est problématique est la résistance et

l’inertie de plusieurs prêtres et permanents laïcs à reconnaître les baptisés comme des

ministres dans l’Église. La conversion à vivre n’est pas au niveau magistériel, mais au

niveau des cadres intermédiaires paroissiaux et diocésains.

5.5.8 Corrélation entre « paroisse inclusive » et

« Magistère »

Dans Catechesi Tradendae, on s’en remet à l’action de l’Esprit Saint pour la construction

de l’Église. C’est ainsi que le DGC va l’exprimer : c’est l’action de l’Esprit-Saint qui guide

l’Église dans l’évangélisation. Le document Aparecida mentionne que la rencontre du

Christ est possible par l’action de l’Esprit Saint et c’est Lui qui nous aide à témoigner772.

C’est l’Esprit Saint qui suscite des gens à entrer en cheminement. Ainsi, ces personnes qui

se présentent à la porte de la communauté sont un don pour la paroisse. Elle est invitée à

être inclusive. C’est l’Esprit qui la guide, ce n’est pas une volonté humaine. La corrélation

aide à voir qu’autant le Magistère que la recherche arrive à la même conclusion : il est

important de développer cette attitude à être attentif au signe que l’Esprit Saint manifeste au

cœur de l’expérience individuelle et ecclésiale de chacun et que la paroisse s’enrichit en

accueillant l’étranger.

771 APA, 211. 772 APA, 374.

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342

5.5.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et

« Magistère »

Une autre des découvertes de la recherche-action est que les personnes, suite à des échecs,

des revers ou des questionnements, cherchent un sens à leur vie. Elles sont confrontées à

leur propre finitude humaine. La catéchèse peut être un lieu pour exprimer son humanité,

pour se donner le droit de dire son expérience afin de partager avec les autres. C’est une des

conclusions de la recherche : la nécessité de créer un espace de partage de son humanité et

de réaliser une relecture à la lumière de l’Évangile.

Dans les documents du Magistère, surtout dans le DGC, on insiste sur l’importance de

développer une spiritualité forte pour les baptisés773. Cette insistance sera encore plus

grande pour le catéchiste. Il devient un témoin pour les autres, son accueil permet aux

catéchisés d’avoir un espace, un lieu possible d’accès à la dimension spirituelle :

Enfin, le rapport personnel entre le catéchiste et le catéchisé est extrêmement

important. Il est caractérisé par l'amour de l'éducation, la créativité originale,

l'adaptation, et en même temps, par le plus grand respect de la liberté et de la

maturation de la personne. Par ce sage accompagnement, le catéchiste

accomplit l'un des services les plus précieux de l'activité catéchétique : il aide

les personnes à discerner la vocation à laquelle Dieu les appelle774.

La spiritualité est vue comme l’expression et le témoignage de la vie de foi dans la vie

quotidienne. Le document d’Aparecida souligne plusieurs ombres dans la vie ecclésiale. Il

y a le danger de fausses spiritualités, qui sont contraires au Concile Vatican II ou très

individualistes du fait qu’elles provoquent des replis sur soi775. Il propose des activités de

partage en petits groupes où les gens, à l’aide de la Parole de Dieu et du partage de leur

expérience de foi, développent une spiritualité d’ouverture aux pauvres qui renouvelle le

tissu paroissial776. Ce que l’on peut identifier de cette expérience, de ce travail de

773 DGC, 28. 91. 774 DGC, 156. 775 APA, 100. 776 APA, 179-180.

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corrélation est qu’il y a convergence dans le besoin de créer des groupes qui vont partager

leur expérience de foi à la lumière de l’Évangile. C’est à partir des échanges sur les

expériences humaines et spirituelles avec des tiers que l’on s’ouvre à la dimension

spirituelle.

5.5.10 Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation » et

« Magistère »

Dans la recherche-action, la question de la formation des catéchistes est celle qui est

revenue le plus souvent. Cette pratique est presque inexistante dans la paroisse et les

catéchistes apprennent, comme le dit l’expression : « sur le tas ». Les catéchistes souhaitent

bénéficier d’une formation commune qui se vit en paroisse et promeut le travail en équipe.

Ils désirent être solidaires et exercer leur ministère en complémentarité avec l’équipe

pastorale. Tous s’entraidant selon leurs charismes. Ils souhaitent une formation intégrale

qui touche toutes les dimensions de la vie chrétienne : théologie, bible, psychologie,

histoire de l’Église locale et de la société, spiritualité, travail d’équipe, animation, liturgie,

initiation à la prière, utilisation de plusieurs pédagogies et moyens didactiques, dévotions,

formation aux changements et à la vie ecclésiale. Cette formation doit les habiliter à être

des témoins significatifs de Jésus Christ et de leur amour de l’Église et des gens. Ils veulent

être coresponsables avec l’équipe pastorale et avoir leur mot à dire dans le choix des

parcours.

Les attentes soulignées par la recherche-action viennent rejoindre les indications du

Magistère, comme l’importance d’une formation intégrale qui est en lien avec la

communauté chrétienne vivant son sommet avec l’Eucharistie dominicale. Il y a la

nécessité de connaître et d’approfondir les instruments suivant : la Bible, le CEC et le

DGC. On mentionne dans la pratique et le document Ad Gentes la nécessité de formation

des aides-catéchistes et des bénévoles. Le document d’Aparecida et la pratique proposent

une formation semblable. Il y a un accord : la paroisse est un lieu d’initiation chrétienne par

la catéchèse.

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344

5.5.11 Conclusion corrélation « pratique » et « Magistère »

Cette démarche de corrélation montre les points communs entre les aspirations du groupe

de recherche-action et ceux du Magistère. D’abord, la catéchèse a pour but la formation de

disciples. Le document d’Aparecida va plus loin; il nous invite à devenir des disciples

missionnaires. Pour les participants de la recherche, la paroisse est une communauté qui se

donne des outils pour aider les catéchisés à découvrir, approfondir et témoigner de la Bonne

Nouvelle pour transformer l’Église et le monde afin de devenir des disciples témoins. C’est

un même dynamisme qui anime les deux discours.

Il y a accord pour dire que tous les gens de la paroisse sont appelés à être acteurs. Un des

apports de la recherche-action est l’insistance des interrelations entre les acteurs.

L’inscription dans les parcours est le signe du choix des personnes qui, afin d’approfondir

leur identité chrétienne, s’inscrivent dans une tradition familiale vivante, ouverte,

catholique, sans être moralisatrice. Il y a encore unanimité pour dire que le prêtre est appelé

à assumer un leadership et/ou découvrir l’importance de son ministère de la Parole. On

s’entend pour souligner que la catéchèse est un moment essentiel et privilégié pour

l’évangélisation.

Le Magistère affirme la nécessité d’approfondir la Parole de Dieu par des groupes de

partage. La recherche-action va plus loin. Elle identifie que les échanges entre les acteurs

sur la Parole de Dieu et les sacrements sont des outils qui permettent d’entrer en relation

avec Dieu et que, sans ce dialogue, on reste dans une dynamique de sciences religieuses et

non pas de catéchèse.

La recherche insiste sur le rôle de l’Esprit Saint dans l’approfondissement de la foi par les

échanges entre les différents acteurs à la lumière de l’Évangile. Les convergences sont aussi

importantes pour ce qui est de la formation de tous les acteurs en paroisse.

Tout ce travail de corrélation nous conduit vers une réflexion qui surprend, qui étonne.

Nous arrivons non pas à critiquer la recherche et le discours du Magistère, mais davantage

la pratique actuelle de la catéchèse. Le type de catéchèse qui se vit dans la paroisse n’est

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345

pas en conformité avec ce que proposent l’Église et les conclusions de la recherche-action.

L’espérance suscitée, chez les membres de l’équipe de recherche-action, des catéchistes

bénévoles et des parents qui ont été consultés, est finalement très proche du projet de

l’Église universelle pour la catéchèse. On peut en conclure que le modèle en place est caduc

et ne peut pas être fécond. J’observe le fait qu’il n’y a pas ou peu de formation pour

préparer les catéchistes et les autres acteurs à leur mission. Les résistances viennent des

structures internes de l’Église qui s’attachent à une culture ecclésiale passéiste et non pas à

la mission.

Est-ce que ce projet porté par l’Église et partagé par les personnes consultées est utopique?

Je ne crois pas, mais il commande un changement du modèle ecclésial. C’est cela qui exige

des efforts et qui peut conduire à des affrontements. Je constate que le changement

demandé vient autant de la base que de l’Église institutionnelle. Je crois, en terme

théologique, qu’il s’agit de la réception du Concile Vatican II et des différentes mises à jour

théologiques apportées par les nombreux synodes et de la cinquième Conférence générale

de l’Épiscopat Latino-Américain et des Caraïbes. On n’est pas seulement en crise de

transmission, mais également en crise de réception en Église. Le projet de catéchèse actuel

doit tenir compte de ces aspirations à reconnaître l’importance de la Parole de Dieu, et à

donner à tous des documents de références comme le CEC et le DGC qui permettent aux

personnes catéchistes et bénévoles de ne pas être à la merci du pouvoir réservé, ou de

l’attitude cléricale de certains curés, agents de pastorale ou bénévoles. La catéchèse se base

sur cette réalité : c’est en faisant résonner la Parole qu’elle devient efficace. Cette

proclamation de la Parole de Dieu doit passer par des êtres vivants qui sont en contact les

uns avec les autres. Sans cette proclamation, cet écho de la Parole de Dieu, la catéchèse se

transforme vite en un enseignement religieux culturel, elle perd ainsi toute son essence, elle

bloque et empêche l’accès à la transcendance.

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346

5.6 La thèse de Denis Villepelet, Les défis de la transmission

dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques

Par ses travaux, Denis Villepelet affirme que le monde contemporain et l’Église sont confrontés

à une culture complexe et en continuelle mutation. La catéchèse est une action complexe qui

fait appel à plusieurs éléments. Elle permet d’être en contact avec l’expérience du Mystère

Pascal. Elle explicite toute la Révélation par la Parole de Dieu. Elle insère à la fois dans une

communauté chrétienne, dans une Tradition ainsi que dans une histoire enracinée dans une

culture. Elle développe une identité propre et permet à l’individu de transformer sa vie, afin

qu’il devienne à son tour un élément de renouvellement et de changement dans l’Église et

dans le monde. Pour bien comprendre cette réalité de la catéchèse, il est nécessaire de

comprendre comment tous ces éléments sont interreliés. Il faut décrire les relations entre

ces différentes composantes. Pour mieux saisir toute la complexité et les défis de la

catéchèse, je fais appel aux travaux de Denis Villepelet afin de mieux élucider les défis de

la catéchèse dans une société contemporaine.

Dans cette section, je présente les objectifs des travaux de Denis Villepelet, la réception de

sa thèse, la structure, ses fondements, ses caractéristiques, diverses appréciations de la thèse

par quelques théologiens, et en quoi elle est pertinente pour ma recherche.

5.6.1 Objectifs de la thèse

Par son travail et son expérience dans le diocèse de Versailles et à l’Institut Supérieur de

Pastorale Catéchétique, Denis Villepelet a été confronté aux nombreuses pratiques

catéchétiques en France et dans de nombreux pays du monde. Son travail comme

théologien l’amène à réfléchir sur les enjeux de la catéchèse dans le monde contemporain

en essayant de comprendre la diversité des pratiques : « C’est pour comprendre

catéchétiquement cette diversité que nous avons emprunté le concept de paradigme. C’est

le concept central qui unifie les différentes recherches que présente ce livre »777.

777 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 25.

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347

5.6.2 Réception de la thèse dans le milieu théologique et

catéchétique

Cette thèse, ce livre, a été reçu de différentes façons. Certains ont des critiques sévères et

trouvent ce livre aride, très spéculatif et orienté. Je cite un extrait de la recension de

Philippe de Labriolle, médecin psychiatre hospitalier, à Orléans: « L’essentiel de ce travail

se donne pour tâche de justifier la subordination de la fides quae (la doctrine) à la fides qua

(l’adhésion au Christ). […] C’est en philosophe que s’exprime D. Villepelet dans un

registre spéculatif aride »778.

Étienne Grieu, théologien français et jésuite, en fait une évaluation plus positive. Il y

décode une réflexion fondamentale sur la catéchèse. Selon lui, cette thèse explore le

phénomène de la complexité en catéchèse et présente une clef de compréhension :

« L’auteur distingue trois paradigmes qui correspondent à différentes conceptions de la

catéchèse notamment dans le jeu entre la fides qua et fides quae »779.

Pour sa part, Hadelin de Lovinfosse, prêtre du diocèse de Namur, utilise les travaux de

Denis Villepelet afin de vérifier si le courant kérygmatique dans la catéchèse peut répondre

aux enjeux du monde actuel. Il met en corrélation le troisième paradigme catéchétique

proposé par Denis Villepelet, avec les travaux de Joseph-André Jungmann SJ, dans le but

de décrire les défis du développement d’une catéchèse plus kérygmatique : « Dans cet

ouvrage, l’auteur étudie et présente des fondements philosophiques à partir desquels il est

possible d’harmoniser les exigences actuelles de la raison et le donné de la foi

chrétienne »780.

778 Philippe de Labriolle, « Lecture : Crise catéchétique : le défi, » dans Catholica, no. 108 (2010). 779 Étienne Grieu, « Transmettre la foi, est-ce possible?, » dans Études (2010). 780 Hadelin de Lovinfosse, « La pertinence de la voie kérygmatique en catéchèse » (Travail de fin d’études

dans le cadre du Certificat d’Études en Théologie, Université Catholique de Louvain, septembre 2010), 20.

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348

5.6.3 La structure de la thèse de Denis Villepelet

Denis Villepelet a publié sa thèse dans un livre divisé en trois parties interdépendantes. Son

but est de trouver une nouvelle pratique catéchétique dans un monde inédit. Le monde vit

une réalité nouvelle qui est complexe et l’Église cherche à entrer en dialogue avec lui, afin

d’annoncer Jésus Christ Mort et Ressuscité.

5.6.3.1 Première partie : la catéchèse comme praxis

communicationnelle

Dans cette partie, il présente : « Les enjeux actuels de l’action catéchétique, réflexion

fondamentale sur la catéchèse comme praxis communicationnelle ». Il décrit les enjeux

anthropologiques du croire aujourd’hui. Il utilise la philosophie comme référent afin de

pousser plus loin la réflexion catéchistique. Il explique que la diversité des propositions

catéchétiques est un moyen pour répondre à la diversité du monde actuel. Il utilise la notion

de « paradigme » pour comprendre la pratique catéchétique actuelle et lui permettre de

proposer des pistes d’action pour aujourd’hui. Pour lui, la catéchèse a pour but : « de

former des chrétiens adultes dans leur foi. Cette forme particulière du ministère de la Parole

sert ce but en articulant dans une même dynamique le devenir spirituel et socio-affectif de

la foi et l’approfondissement de la connaissance de la Révélation (DGC paragraphe

82) »781. Les trois paradigmes catéchétiques qu’il propose sont composés de cinq champs

disciplinaires et ceux-ci sont divisés en trois paramètres. Les champs et les paramètres sont

complémentaires. Voir le tableau tel que présenté dans le chapitre 3, « tableau 3.1. Les trois

paradigmes catéchétiques ».

La typologie permet de saisir la réalité actuelle des gens qui, selon ses observations, sont à

la fois pragmatiques, matérialistes, sceptiques, relativistes, sans être dogmatiques. Pour

Denis Villepelet, la catéchèse n’est pas exclusivement une transmission de connaissances

ou un projet d’actions militantes afin d’accueillir le Royaume de Dieu. La catéchèse est un

acte de communication avec un Dieu agissant dans l’histoire qui pose scandale à cause du

781 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 29.

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349

Mystère Pascal. Le monde contemporain est une société multiréférentielle où la foi est un

élément parmi d’autres. C’est une société où le sujet se réfère à sa propre expérience et

analyse tout à partir de lui-même; mais il est souvent fatigué dans ce monde où il se réfère à

de nombreux réseaux de communication, spécialement l’internet. L’homme contemporain

est aussi méfiant envers les institutions et aspire toujours à la liberté. L’acte de croire dans

ce contexte est un défi. Pour qu’il soit crédible, l’acte de foi doit surgir d’un acte rationnel.

Selon Denis Villepelet, c’est un acte relationnel basé sur la confiance; il va au-delà de la

logique du contrat, car il est gratuit et composé de quatre éléments :

• la foi est un don qui permet à l’autre d’exister;

• la réception du don invite aussi à un contre don à l’image de celui qui a été

reçu;

• l’acte de foi est un lieu de libération du cercle vicieux de la violence qui

permet à l’homme de s’ouvrir et de faire confiance;

• l’acte de foi a une dimension communautaire782.

L’homme contemporain choisit ce qu’il veut vivre dans la foi; il s’inscrit dans des valeurs

selon son propre cadre de référence783. Il est pragmatique, matérialiste; il se méfie des

dogmes, mais est ouvert au religieux. C’est un bricoleur de la pensée religieuse784.

« La foi chrétienne comme emphase au croire et les enjeux catéchistiques »

Dans sa thèse, Denis Villepelet s’interroge sur la pertinence de la proposition de la foi dans

la société actuelle. Il explique l’importance et l’actualité du procès de Jésus pour le monde

contemporain. Ce procès permet de sortir du subjectivisme et d’en arriver à une vraie

altérité. Il sort de la logique marchande du matérialisme pour se centrer sur la personne. Il

décrit ainsi la Révélation : « Pour qu’il y ait révélation, il ne suffit pas que Dieu parle, il

faut aussi que sa parole soit parlée, échangée, dialoguée et interprétée »785. En s’inspirant

de la philosophie du langage, l’auteur insiste sur l’importance de la Parole de Dieu. Il

souligne que la définition traditionnelle de la catéchèse est de faire résonner la Parole de

782 Idem, 83-89. 783 Idem, 55. 784 Idem, 56. 785 Idem, 114.

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350

Dieu. Cette importance de la Parole proclamée devient un élément essentiel de l’acte

catéchétique : « Ces traits sont des repères importants pour comprendre pourquoi l’acte

catéchistique est une praxis communicationnelle qui veut donner la première place au

mystère de la Parole de Dieu »786. Cet aspect communicationnel ne met pas simplement

l’accent sur la parole, mais aussi sur l’écoute, nécessaire afin d’apprendre à parler, à

nommer les pratiques et à les interpréter. Pour l’auteur, la Parole de Dieu se veut une

conversation, Denis Villepelet reprend l’interprétation du document Dei Verbum expliquant

la Parole de Dieu dans une dynamique d’échange, d’entretien et de réciprocité entre Dieu et

les hommes787.

Dans ce contexte, la Parole de Dieu devient un lieu de découverte de la transcendance, de

l’expérience pascale et d’un dialogue avec la culture. C’est pourquoi, en soulignant

l’importance de la proclamation de la Parole de Dieu dans l’acte catéchétique, on affirme,

on induit que la catéchèse ne peut se vivre sans ministère. Sans cette annonce explicite qui

se vit de personne à personne, en petits groupes, en lien avec l’Église, la Parole ne peut être

performative et ne peut transformer la réalité.

Dans la conclusion de son deuxième chapitre, l’auteur rappelle que l’expérience de la

catéchèse par la proclamation de la Parole de Dieu suscite la conversion chez l’individu :

« c’est en ce sens qu’il faut déployer la catéchèse comme une action communicative de

parole échangée dans laquelle la fides quae entre en dialogue avec la fides qua en recherche

comme l’interlocuteur privilégié de l’échange »788.

« Agir ou faire en catéchèse l’idée de la praxis catéchistique »

Pour Denis Villepelet, la catéchèse est avant tout un acte de communication de la

Révélation, lieu de dialogue entre Dieu et les hommes. Le danger dans la catéchistique est

d’enfermer la catéchèse dans une technique. La catéchèse n’est pas simplement une

production de documents, de parcours, le fruit d’un mécanisme déjà établi, d’une recette

786 Idem, 115. 787 DV no 2. 788 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 136.

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351

toute faite qui donnerait les mêmes résultats à chaque fois qu’on la réalise789. Pour Denis

Villepelet, la catéchèse est vraiment cette action complexe et toujours nouvelle de

proclamer la Parole de Dieu avec divers instruments selon les nécessités de l’interlocuteur,

sa culture et son langage. Le catéchiste devient interprète; il s’approprie le langage et la

culture de l’autre afin d’y proclamer la Parole de Dieu. La catéchèse étant un acte de

communication, est un lieu de dialogue qui par la Parole proclamée révèle Dieu790.

5.6.3.2 Deuxième partie : « La catéchistique aux prises avec la

complexité. Mise en place philosophique de la notion de

paradigme »

Denis Villepelet part du constat que notre monde est dans un équilibre fragile. Il observe la

perte de fécondité des anciennes formes catéchistiques héritées du passé. Nous sommes

entrés dans une époque où presque tout est complexe; le monde est dans un état de crise

presque permanent, tout en étant dans une stabilité dynamique. Pour comprendre ce monde,

il est important, comme dit l’auteur, de se référer à différentes théories comme celle du

chaos ou de la pensée systémique :

Un système complexe est toujours au bord du chaos, là où il échange un

maximum d’informations avec son environnement. Si le monde contemporain

fonctionne comme un tel système, alors l’état critique qui caractérise ses

grandes dynamiques culturelles, économiques et sociopolitiques est une bonne

désignation de son équilibre global et de sa stabilité structurelle791.

C’est le principe de l’homéostasie qui permet l’équilibre et la santé chez les êtres vivants.

Un monde complexe entraîne une multitude de relations d’interdépendance :

Prendre le parti de la complexité et accepter de regarder la réalité de façon

complexe c’est penser qu’interaction et tensions, solidarité et désagrégation,

identité et hétérogénéité ne s’opposent pas. On ne peut parler de complexité

789 Idem, 162. 790 Idem, 173. 791 Idem, 180.

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352

qu’en reconnaissant que la diversité ou la multiplicité hétérogène engendre ou

tisse sa propre unité792.

Ce monde est complexe et paradoxal. Il est capable de tenir en équilibre des éléments qui

autrefois semblaient contradictoires. Il propose un nouvel horizon de sens pour en saisir le

mécanisme interne : c’est l’émergence d’une nouvelle culture, la naissance d’un nouveau

langage avec sa propre grammaire, un nouveau lexique, et une nouvelle démarche

épistémologique. La catéchèse se retrouve avec le défi d’annoncer l’Évangile dans un

nouveau contexte. Comme ce monde est neuf, il demande une nouvelle herméneutique de

la Mort et de la Résurrection du Christ. Les vieux instruments catéchistiques sont devenus

obsolètes et incompréhensibles pour les contemporains qui ne sont plus capables de

décoder les signes, les symboles, et les langues élaborées dans une époque qui est révolue.

L’évangélisation ne peut se faire qu’en trouvant de nouveaux interprètes pour annoncer ce

Dieu vivant dans un monde en pèlerinage.

5.6.3.3 Catéchèse et théologie pratique

Selon Denis Villepelet, la catéchèse est un lieu théologique. Dans le contexte de la post

modernité, il insiste pour dire qu’il faut ajouter la discipline de la philosophie dans la

réflexion de la théologie pratique. À cause de l’implosion de la modernité, de la crise de la

raison philosophique et du procès de la raison instrumentale, il est nécessaire de créer une

nouvelle raison communicationnelle et herméneutique :

La philosophie ne peut renoncer à la raison et c’est bien un surplus de vigilance

de cette raison qui lui permet de saisir sa crise et son aveuglement devant son

fonctionnement délirant. La postmodernité a découvert que la raison pouvait

déraisonner793.

792 Idem, 211. 793 Idem, 261.

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353

Il poursuit plus loin : « La raison s’autodétruit en s’idolâtrant, mais elle est la seule à

pouvoir lutter contre sa propre déification en devenant autocritique »794. Dans ce début de

post modernité, la catéchèse a besoin de la philosophie et des sciences humaines pour

construire une nouvelle herméneutique. Elle a besoin de la philosophie pour saisir qui l’être

humain est-il devenu et de quelle façon pense-t-il actuellement. C’est dans la dynamique du

dialogue entre les différentes sciences que la catéchèse peut jouer son rôle de faire résonner

la Parole de Dieu pour les contemporains. Le théologien devient à son tour catéchiste,

historien, psychologue, pédagogue, sociologue et, par son discours théologique, crée un

nouveau langage pour exprimer la pratique de la communauté chrétienne et les différentes

pratiques du paroissien qui recherchent la Vérité, le Dieu vivant.

Modèle et paradigmes

Dans sa recherche afin de trouver des instruments qui vont permettre de créer une pratique

catéchistique dans le monde postmoderne, Denis Villepelet fait appel à la notion de

paradigme. Qu’est-ce qu’un paradigme? :

Le paradigme est le mode d’organisation et de structuration des connaissances,

il articule de façon rationnelle les règles de lecture théorique de l’expérience.

Penser c’est peser : la pensée mesure, classe, identifie, rassemble, sépare,

oppose, définit. Elle sélectionne des données et en rejette d’autres. Elle

hiérarchise, valorise, inclut et exclut795.

Denis Villepelet mentionne trois éléments afin de préciser les traits d’un paradigme :

• C’est un modèle qui permet de comprendre et de dépasser un problème.

• C’est une nouvelle façon de faire, une nouvelle synthèse.

• C’est une nouvelle façon de penser qui développe une nouvelle épistémologie.

794 Idem, 262. 795 Idem, 303.

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354

La notion de paradigme aide à comprendre la complexité de la situation de la

postmodernité. La création de paradigmes catéchistiques sort la catéchèse du cul-de-sac de

la modernité et permet de nommer et comprendre les différentes pratiques actuelles796.

5.6.3.4 Troisième partie : Typologie de trois paradigmes

catéchistiques

Cette typologie ne veut pas enfermer les pratiques dans trois catégories précises mais

donner des indications de compréhension, nommer les caractéristiques des différentes

pratiques et leur originalité propre. Chacun des paradigmes fait référence également à

différents types de pédagogie soit : l’enseignement, l’apprentissage et l’initiation797. Denis

Villepelet parle de l’importance de l’andragogie comme élément aidant pour structurer la

nouvelle catéchèse dans le troisième paradigme798.

Il décrit l’horizon de sens du troisième paradigme : la catéchèse dans la postmodernité

relève le défi d’un monde qui a de multiples références. Les gens peuvent appartenir à

différents groupes simultanément sans problème : une nation, un groupe de pression, un

parti politique, ou une communauté virtuelle, car l’identité est multiple. Dans ce monde, les

individus sont centrés sur le moment présent; c’est le seul moment qui compte. Le défi de

cet horizon de sens est de définir la différence entre le monde réel et le monde virtuel. C’est

une société qui a la frénésie du changement, la passion de la nouveauté.

Les trois paradigmes, leur conception de la fides quae et leur modèle pédagogique

La typologie des trois paradigmes permet de saisir l’évolution de la catéchèse au cours de

l’histoire, ainsi que la complexité de la pratique actuelle dans laquelle ils se juxtaposent

parfois dans la même communauté chrétienne, mais où le troisième paradigme est

prédominant.

796 Idem, 311. 797 Idem, 351-354. 798 Idem, 355-361.

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355

Pour approfondir les caractéristiques des trois paradigmes catéchétiques, Denis Villepelet

fait appel à deux principes, soit la fides qua et la fides quae, leurs différentes relations

possibles ainsi que leurs caractéristiques pédagogiques et théologiques.

Le premier horizon de sens est le monde traditionnel. Celui-ci utilisera l’enseignement

magistral comme moyen pour exprimer le contenu de la foi, la doctrine : la fides quae.

L’important est de connaître la foi par son contenu. Le rencontre avec Dieu se vit par la

connaissance du contenu de la foi qui conduit à une maturation et une compréhension de la

foi reçue.

Dans le deuxième horizon de sens qui touche particulièrement la période de la modernité, la

catéchèse est fondamentalement christocentrique et trinitaire. Son point de départ est

l’humanité de Jésus et la reconnaissance de sa filiation divine. La catéchèse est un

mouvement de maturation de la foi par une relecture à la lumière de la Parole de Dieu de

l’expérience humaine. La catéchèse permet de situer le catéchisé dans l’histoire du salut.

L’objectif de ce paradigme est de constituer des militants et des gens engagés qui sont des

acteurs de transformation de la société civile et religieuse par la relecture de leur vie à la

lumière de l’Évangile.

Dans le troisième paradigme, le contenu de la foi est vu comme une médiation qui permet

de nommer, d’approfondir et développer le don reçu de la foi. La dimension kérygmatique

est très importante. La foi est la proclamation du Mystère Pascal :

Cette catéchèse invite à entrer dans le mystère du Christ; elle suscite la

conversion, favorise une véritable expérience de foi, ouvre à toutes les

composantes de la vie chrétienne, entraîne au mode de vie évangélique pour

permettre une vie authentique à la suite du Christ799.

Ce paradigme privilégie la pédagogie de l’initiation. La fides quae est un bain ecclésial et

une tradition à expérimenter, portée par une communauté qui, par ses enseignements en

petits groupes, sa vie fraternelle, ses groupes de partage de la Parole de Dieu, sa liturgie, sa

799 Idem, 429-430.

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solidarité avec les plus pauvres, témoignent de Jésus au jour le jour. Cette initiation se vit

par des expériences concrètes permettant de nommer le don de la foi reçu.

Pour Denis Villepelet, les trois paradigmes sont des outils pour comprendre et distinguer

les différentes pratiques catéchétiques actuelles. Il est conscient que ces trois paradigmes

peuvent être vécus dans un même milieu simultanément. Certaines pratiques peuvent aussi

être un mélange des différents paradigmes selon les paramètres retenus et les champs

utilisés.

Le troisième paradigme est un outil de compréhension, de réflexion, d’interprétation et

également d’animation catéchétique. Ce paradigme, pour bien se vivre, demande d’avoir

une communauté chrétienne qui devient le lieu initiatique. Cela exige une formation des

acteurs en catéchèse et une unité entre eux. Ce paradigme se vit dans une communauté qui

possède des groupes de partage de la Parole de Dieu, une liturgie accueillante, dynamique,

inclusive et une ouverture au monde800.

Cette thèse a l’originalité de présenter les fondements d’une typologie qui peut nous

permettre de comprendre la complexité des pratiques catéchétiques actuelles. Elle nous

rappelle que la catéchèse est une discipline de la théologie pratique qui se trouve au

carrefour des sciences humaines, de la théologie et de l’expérience de foi. À cause de la

dimension anthropologique et ecclésiale de la catéchèse, Denis Villepelet nous invite à

approfondir la catéchétique par un détour philosophique afin de comprendre l’être humain

comme personne et dans sa manière de penser le monde contemporain.

Le danger du troisième paradigme est qu’on l’utilise comme une recette miracle, capable

de répondre à tous les défis de la nouvelle évangélisation. Il propose une démarche

initiatique communautaire au moment même où les gens sont réticents et critiques vis-à-vis

des institutions. Il y a un appel de passer d’un modèle institutionnel à un modèle plus

fraternel et communautaire qui laisse la place aux individus et à leur originalité.

800 Idem, 456-457.

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357

5.7 Corrélation entre « pratique » et « la thèse de Denis

Villepelet »

Dans cette section, j’utilise la notion du troisième paradigme catéchétique de Denis

Villepelet afin de le confronter aux résultats de l’analyse des données recueillies lors de la

recherche-action.

5.7.1 Corrélation entre « catéchèse qui forme des témoins et

disciples de Jésus » et « la thèse de Denis Villepelet »

Pour Denis Villepelet, la catéchèse est d’abord et avant tout un acte de communication.

C’est un lieu théologique où résonne la Parole de Dieu par les échanges entre les acteurs de

la catéchèse. Ces échanges sur la Parole mettent les catéchisés en contact avec Dieu801.

Cette catéchèse permet d’entrer en dialogue avec la Révélation : elle a pour but de former

des adultes chrétiens capables de rendre compte de leur foi. Cette formation touche à la fois

les connaissances, la vie spirituelle et la dimension affective de l’être802.

Dans l’analyse de la pratique, la catéchèse part d’un témoignage, celui du catéchiste, du

prêtre et de témoins, afin de toucher le catéchisé pour qu’il se mette en route et devienne

témoin à son tour. Il y a ici un point commun entre la pratique et la thèse de Denis

Villepelet. C’est par la proclamation de la Parole, les interactions et les échanges entre les

acteurs que se vit la catéchèse. Ce qui ressort de l’analyse de Denis Villepelet est que la

catéchèse a besoin d’un bain initiatique, celui de la communauté chrétienne et spécialement

de la liturgie. Le disciple du Christ ne peut advenir que s’il est porté par le groupe de

catéchèse, la célébration liturgique et l’action commune faite par les catéchisés et les

catéchistes. La thèse de Denis Villepelet vient éclairer la pratique, dans le sens où c’est le

groupe de partage inséré dans la communauté qui devient le lieu théologique de la

catéchèse, et où la paroisse devient le lieu d’initiation. On comprend mieux ici la vision

qu’apporte Denis Villepelet de la fides quae qui, outre une connaissance, est une expérience

d’immersion composée de plusieurs éléments, dont la proclamation de la Parole de Dieu,

801 Denis Villepelet, L'avenir de la catéchèse, 33. 802 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 29.

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358

l’échange des expériences personnelles, la liturgie, la vie communautaire et ecclésiale ainsi

que l’apostolat : « La catéchèse consiste donc à articuler de façon systématique, organique

et progressive fides quae et fides qua »803.

5.7.2 Corrélation entre « pastorale d’engendrement » et « la

thèse de Denis Villepelet »

Denis Villepelet utilise une comparaison pour décrire la relation catéchétique dans la

paroisse. Pour lui, il existe le même lien essentiel entre l’école et la société que celui entre

la catéchèse et l’Église. La catéchèse est essentiellement ecclésiale804. Il insiste afin que la

paroisse soit un lieu de mission et reprend à son compte les orientations du Concile Vatican

II. La tâche de la catéchèse doit être portée par toute la communauté et celle-ci doit s’ouvrir

au monde805. La paroisse est un lieu d’interaction et d’échanges, où la Parole résonne : « Il

faut sans doute s’habituer à penser l’Église comme une communauté de communautés en

réseau, capables de se rejoindre par les moyens contemporains de communication et de se

rassembler de temps en temps dans un espace où il fait bon vivre »806.

La recherche-action en vient à la conclusion que la situation actuelle de la paroisse comme

centre de service pour les sacrements ne peut perdurer. Pour vivre ce passage, elle propose

un service de formation des catéchistes, des aides-catéchistes et des bénévoles en lien avec

l’équipe pastorale. Les catéchisés devraient être en lien avec la communauté qui se

rassemble le dimanche; les groupes de catéchèse seraient des lieux d’approfondissement de

la Parole de Dieu et de témoignages où l’on se partagerait ses expériences.

Les éléments soulignés par l’analyse de la pratique rejoignent les idées de Denis Villepelet.

La nouveauté, c’est l’expression que la paroisse est un « bain ecclésial », un lieu initiatique.

La paroisse devient le creuset dans lequel se vit l’action catéchétique; elle permet aux

catéchisés d’expérimenter une nouvelle vie et de se laisser librement transformer par elle.

803 Idem, 30. 804 Idem, 338. 805 Idem, 340. 806 Denis Villepelet, L'avenir de la catéchèse, 133.

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5.7.3 Corrélation entre « catéchèse où tous sont acteurs » et

« la thèse de Denis Villepelet »

Dans la description du troisième paradigme, la communauté chrétienne est acteur : « C’est

l’Église animée par l’Esprit qui est le sujet de la catéchèse et il n’y aura pas de catéchèse

féconde si la communauté chrétienne ne s’en sent pas responsable en se laissant elle-même

catéchiser»807. C’est par l’interaction de ses membres que se vit la catéchèse. Il est

nécessaire de créer un bain ecclésial pour vivre la catéchèse. Cela demande quelques

conditions. J’en retiens cinq :

• Le catéchisé est intégré dans une communauté fraternelle. Il expérimente

l’appartenance d’une nouvelle famille qui l’accueille.

• Le catéchisé est initié à la vie spirituelle par la liturgie. Il a besoin d’un mentor qui

va l’accompagner pour entrer dans le mystère.

• Le catéchisé vit plusieurs cycles liturgiques; il découvre le mystère de la

sacramentalité et la richesse de la Tradition.

• Le catéchisé expérimente une éthique, une solidarité et une nouvelle fraternité. Il

aide les plus petits, les plus fragiles qui sont ses frères (Mt 2, 31-46).

• Le catéchisé entre dans une nouvelle vie, dans une famille par un

approfondissement intellectuel de sa foi, par la théologie, la spiritualité et la

mystique.

Pour se réaliser, ces dimensions demandent que plusieurs membres de la communauté

s’habilitent en différents domaines à accompagner les catéchisés : des liturgistes, des

accompagnateurs, des amoureux de la Parole de Dieu, des témoins, des personnes engagées

auprès des plus pauvres… Cette conception de la paroisse, comme bain ecclésial, vient

éclairer la pratique d’une manière nouvelle. Dans cette pratique, les paroissiens ne sont plus

des consommateurs mais des acteurs et des témoins. La recherche a insisté sur l’authenticité

807 Idem, 128.

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360

de la vie des acteurs qui devient le moteur de cette action catéchétique. La paroisse est

appelée à être un lieu d’initiation catéchétique. Par ses membres, elle est un lieu d’accueil

qui accompagne les gens selon la pédagogie du pèlerinage. La relation catéchétique change

et sort de la relation vendeur-acheteur pour entrer dans la relation d’accompagnement qui

introduit le catéchisé dans un groupe avec une histoire, une tradition, une identité.

5.7.4 Corrélation entre « catéchèse qui approfondit l’identité

chrétienne » et « la thèse de Denis Villepelet »

Le troisième paradigme, au regard du champ anthropologique, définit la personne humaine

comme une personne qui compose sa propre conception de la vie de foi, à partir des

éléments qu’elle choisit. L’homme contemporain choisit et s’inscrit dans une démarche :

Cette société polycentrique et multiréférentielle est une société des individus.

Chacun est conduit à organiser sa vie en fonction de ce qu’il juge vraiment

important et valable, il lui faut choisir son mode de vie, agir conformément à

ses convictions, en somme maîtriser son existence808.

La dimension d’inscription personnelle devient importante. Dans la pratique, nous avons

constaté que la grande majorité des gens qui s’inscrivent au parcours catéchétique le font

pour des valeurs personnelles : il s’agit pour eux d’inscrire leur enfant dans une tradition

religieuse et une culture familiale. Pour les acteurs de la catéchèse, cette indication

demande de ne plus arriver avec des préjugés sur les motivations des catéchisés. On ne peut

plus affirmer à la légère : « Ils viennent par habitude, pour seulement recevoir des rites

religieux ».

On se retrouve dans un monde où la catéchèse n’est plus obligatoire pour la société civile;

elle est un choix personnel. Le troisième paradigme aide à nommer cette nouvelle réalité

selon laquelle les gens s’inscrivent pour diverses raisons, et que les acteurs en catéchèse ont

808 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 51.

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361

à en tenir compte. Il y a une recherche spirituelle, qui est une recherche d’identité

chrétienne.

5.7.5 Corrélation entre « prêtre, disciple et évangélisateur »

et « la thèse de Denis Villepelet »

Denis Villepelet ne s’attarde pas beaucoup sur le rôle du prêtre; il centre son discours sur la

nécessité d’utiliser l’initiation comme modèle pédagogique. Il propose que ce soit la

communauté chrétienne, la paroisse qui prenne en charge l’initiation. Si la paroisse devient

le lieu qui permet de vivre une démarche initiatique, cela demande plusieurs prérequis pour

le prêtre. On ne peut penser que la paroisse soit un lieu d’initiation que si le prêtre est lui-

même initié. Cela demande des habiletés d’accompagnateur afin de faire en sorte que la

catéchèse soit une expérience porteuse permettant d’insérer les catéchisés dans une

expérience englobante qui facilite l’expérimentation d’un nouvel horizon de sens.

Afin de clarifier le rôle du prêtre, c’est ici que la pratique vient nous éclairer dans une

paroisse qui devient un bain ecclésial. La recherche a clairement défini que la paroisse est

appelée à être un lieu d’engendrement des chrétiens et que tous sont invités à être des

acteurs. Pour le prêtre, la première demande issue de la recherche-action est qu’il soit lui-

même au point de départ un disciple du Christ809. Le deuxième élément est que le prêtre

soit un leader; il doit veiller à l’animation de la catéchèse dans toute la communauté. Par

son pastorat, il crée des partenariats entre tous les acteurs. Il assure le suivi du projet

catéchétique car il est le responsable de l’évaluation continue. Le prêtre, le pasteur, devient

celui qui initie au ministère de la Parole autant les catéchistes et les bénévoles que les

catéchisés. Le prêtre est un initiateur; il est celui qui habilite les baptisés à entrer en contact

avec la Révélation. Il est l’artisan qui crée les conditions favorables pour que puisse exister

ce lieu d’initiation catéchétique. Ce n’est pas seulement un lieu physique, mais un lieu

d’actualisation de la Parole, un lieu herméneutique. Le prêtre devient un guide, le leader

initiatique.

809 Clé USB 1, 776.

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362

5.7.6 Corrélation entre « catéchèse lieu d’échange de la

Parole de Dieu, des paroles » et « la thèse de Denis

Villepelet »

Denis Villepelet définit la catéchèse comme un acte communicationnel. C’est par cette

Parole proclamée, échangée, questionnée que s’ouvre la Révélation aux chrétiens et aux

catéchisés. Il exprime que c’est l’action de l’Esprit Saint qui a permis de recueillir les

témoignages de Jésus et de constituer les quatre Évangiles, et qui continue d’agir dans

l’interprétation de la Parole de Dieu dans les activités catéchétiques : « C’est le même

Esprit Saint qui est au cœur de ceux qui ont écrit comme au cœur de ceux qui lisent les

Écritures et les restituent en Paroles vives »810. Pour lui, dans les groupes d’échanges de la

Parole de Dieu, les catéchistes apprennent autant que les catéchisés. Cette idée

d’apprentissage mutuel vient rejoindre les conclusions de la recherche-action où autant le

formateur que l’apprenant participent à l’interprétation de la Parole et à la découverte de

son sens pour aujourd’hui811. Cette vision sur l’importance des échanges a été partagée par

les parents qui demandaient plus de temps pour échanger sur la Parole de Dieu afin de

l’actualiser dans la culture d’aujourd’hui812. C’est par les échanges que se vit la rencontre

avec Jésus Christ, la conversion et l’approfondissement de la foi.

5.7.7 Corrélation entre « catéchèse qui promeut le sacerdoce

baptismal » et « la thèse de Denis Villepelet »

Pour Denis Villepelet, le catéchiste est celui qui accompagne le catéchisé. Il partage son

expérience. Il anime l’initiation qui est une activité communautaire. Il témoigne de sa foi.

Cette exigence du témoignage fait partie de l’identité même du catéchiste et du chrétien. Le

fait de s’investir pour partager sa foi est le signe de l’être chrétien. Pour lui, la catéchèse

demande de tenir deux pôles ensemble dans une complémentarité. Le premier est d’avoir

un regard ouvert et aimant de la réalité humaine tout en ayant un esprit critique; pour voir le

monde dans ses forces et ses qualités tout en reconnaissant ses limites. L’autre aspect est

810 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 121. 811 Denis Villepelet, L'avenir de la catéchèse, 89. 812 Clé USB 1, 616.

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l’annonce kérygmatique de la Parole de Dieu. C’est le rappel de l’amour fou de Dieu dont

Jésus nous témoigne par l’expérience pascale. La catéchèse est une activité au cœur de la

paroisse. Tous, selon leur engagement baptismal, en sont responsables par leur témoignage

de vie, leur rôle de parents ou de bénévoles, et par la reconnaissance du ministère du

catéchiste lié à la charge pastorale du curé. Il y a convergence des points de vue. Pour

Denis Villepelet, il est impensable de faire de la catéchèse sans catéchistes. Ils animent les

petits groupes des catéchisés avec l’espérance qui les habite : le don de la foi reçu de Dieu.

Les catéchistes et les autres acteurs jouent leur rôle au nom de leur baptême.

5.7.8 Corrélation entre « paroisse inclusive » et « la thèse de

Denis Villepelet »

Pour Denis Villepelet, l’action de l’Esprit Saint est vraiment importante, surtout dans la

description du troisième paradigme. Cette action se manifeste d’abord dans la dynamique

communicationnelle et dans les échanges lors du partage d’expériences813. C’est lors de ces

échanges que se développe l’action catéchétique. La catéchèse devient le lieu pour entendre

comment Dieu s’adresse à nous dans le monde contemporain :

Si la catéchèse peut faire connaître le mystère du don de Dieu, c’est parce

qu’elle est l’œuvre de l’Esprit. Une telle catéchèse est alors plus mystique

qu’expositive dans la mesure où elle invite à goûter le moment présent de

l’Esprit, et favorise une expérience interne et actuelle du Dieu de Jésus Christ

que Karl Rahner appelait naissance de Dieu dans le cœur814.

La catéchèse devient ainsi le lieu d’initiation et d’insertion dans la communauté chrétienne.

Par la médiation de la Parole de Dieu, la catéchèse permet au catéchisé et au catéchiste

d’instaurer une conversation qui laisse de la place à un Autre, c’est-à-dire l’Esprit Saint :

813 Denis Villepelet, Les défis de la transmission dans un monde complexe : nouvelles problématiques

catéchétiques, 33. 814 Idem, 337.

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364

La parole de Dieu ne fait pas exception à la vocation communicationnelle des

paroles humaines. Comme nous l’avons déjà lu dans Dei Verbum, elle s’inscrit

dans une dynamique d’échange, d’entretien et de réciprocité avec l’homme.

Elle se veut conversation815.

Cette idée de bain ecclésial permet d’insérer les nouveaux catéchisés dans cette

conversation humaine et divine. La catéchèse devient ainsi une activité d’introduction et

d’insertion dans la vie paroissiale, elle initie par la participation active à la vie liturgique,

elle met à l’épreuve le catéchisé par la participation régulière et la découverte des cycles

liturgiques. La catéchèse introduit peu à peu à la théologie et à une compréhension à la fois

spirituelle et intellectuelle de la vie de foi. Le point commun avec la pratique est de

proposer une variété d’expériences pour les catéchisés, prendre du temps pour lire, partager

et échanger sur la Parole de Dieu, s’exposer à des témoignages de différentes personnes. La

paroisse devient inclusive quand elle crée un lieu pour échanger sur la Parole de Dieu, sur

les récits de vie. Ce lieu initiatique permet de développer une appartenance à la famille

naturelle, à la famille ecclésiale, et de s’insérer dans les traditions familiales et celles de

l’Église. Les deux types de familles créent des liens affectifs qui permettent de se sentir

aimés et habilitent à aimer l’étranger qui devient frère en Jésus Christ.

5.7.9 Corrélation entre « catéchèse de la miséricorde » et

« la thèse de Denis Villepelet »

Pour Denis Villepelet, le monde contemporain est à la recherche de quelque chose qui le

dépasse. Il a soif d’expériences qui l’ouvrent à la spiritualité : « La quête spirituelle

contemporaine est plus mystique qu’intellectuelle »816. Il y a une nécessité de faire

découvrir que la foi n’est pas une gnose, mais bien un don de Dieu qui ouvre à la

transcendance et à Dieu817. La réception du don de Dieu ouvre à la relation à Jésus Christ et

introduit une démarche intellectuelle, afin de nommer ce Dieu qui se révèle :

815 Idem, 118. 816 Idem, 22. 817 Idem, 28.

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Le oui à Jésus Christ comme réponse au don de la Grâce comporte ainsi une

double dimension. Il est à la fois abandon confiant à Dieu et assentiment à tout

ce qu’il révèle. Cette double polarité de l’acte de foi comme adhésion vitale et

assentiment de l’intelligence au mystère de la révélation forme un tout

indissociable et en tension permanente818.

Dans cette quête spirituelle, un des dangers pour l’homme contemporain est de se créer une

religion à lui, rencontrant ses propres besoins. La spiritualité peut devenir ainsi un repli

identitaire, une forteresse personnelle pour affronter les tempêtes de l’existence :

Cette libre entreprise religieuse qui rend possible une pluralité de choix et

d’options fait émerger des configurations étonnantes. On picore chez Boudha

ou chez Jésus puis on amalgame en recombinant les éléments dans un

« patchwork » multicolore très singulier819.

L’élément présent dans la pratique est de nommer la fragilité humaine et communautaire.

Cette vulnérabilité est vue comme un défi à relever. On pourrait également dire que c’est

une chance. La reconnaissance de la finitude humaine devient un levier pour entrer en

communication avec Dieu et lui laisser une place dans la vie de chacun. C’est également le

souci d’accompagner non pas des gens qui sont parfaits, mais les blessés de la vie, et leur

proposer une démarche de guérison par la rencontre avec Jésus Christ. Il y a également la

contestation de cette culture de la performance. La paroisse, par sa catéchèse, devient un

lieu, une école de spiritualité, qui s’enracine dans l’expérience humaine illuminée par le

partage de la Parole de Dieu et la vie de la communauté.

5.7.10 Corrélation entre « catéchèse paroissiale d’initiation »

et « la thèse de Denis Villepelet »

Pour Denis Villepelet, la catéchèse est un acte de communication ouvert à la transcendance

et au dialogue entre les différents acteurs de la catéchèse. Il souligne que la formation ne

doit pas seulement être centrée sur des connaissances et des habiletés, mais également sur

du savoir-être. Le catéchiste et les autres collaborateurs ont besoin, eux aussi, de se laisser

818 Idem, 332. 819 Idem, 58.

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interpeller par ce qu’ils vivent. Le catéchiste est invité à se laisser catéchiser par sa propre

action : « Bref, c’est en se laissant catéchiser que le catéchète peut faciliter et favoriser cette

résonnance de la Parole, car si elle ne résonne pas pour lui, il ne pourra en faire écho »820.

Une des premières constatations est que la catéchèse devient ce qu’elle doit être par la

réalisation des six tâches et, entre autres, par l’approfondissement des fondements de la foi :

« La connaissance des contenus de la foi est requise par l’adhésion à la foi »821. Face à la

société contemporaine, Denis Villepelet propose d’initier les catéchistes et les autres

acteurs de la catéchèse à la complexité. Pour les aider dans l’herméneutique et la

compréhension de ce monde complexe, il ouvre un chemin particulier, celui du paradigme.

Cet outil n’est pas un article de prêt-à-porter, il permet par ses variantes d’aider à

comprendre les pratiques auxquelles sont confrontés les acteurs de la catéchèse.

L’utilisation de la typologie des trois paradigmes demande de se former selon trois

méthodes de formation : enseignement, apprentissage et initiation. Chacune de ces

méthodes a ses caractéristiques et fait toujours appel aux autres méthodes. Par exemple, la

méthode d’apprentissage demande une partie d’enseignement et d’expérimentation pour en

arriver à réaliser l’objectif de formation822. Ce qui est à retenir est la nécessité de

développer les habiletés à l’initiation chrétienne chez les acteurs.

5.7.11 Conclusion de la corrélation « L’analyse de la

cueillette des données » et « la thèse de Denis Villepelet »

La corrélation de la pratique avec la thèse de Denis Villepelet a confirmé plusieurs aspects

nommés et énumérés par la pratique. La catéchèse a pour but de former des disciples

témoins. Elle est une démarche de formation intégrale. La catéchèse se vit par, et au milieu,

de la communauté chrétienne. Tous les membres de la communauté sont appelés à être des

acteurs de la catéchèse selon leur charisme. Denis Villepelet reconnaît que les gens qui

viennent s’inscrire aux parcours catéchétiques le font par choix libre et dans une démarche

de recherche de valeurs ou de transmission d’un héritage familial. Il reconnaît l’importance

du rôle du prêtre comme un des leaders de la promotion et de la pratique catéchétique dans

820 Idem, 125. 821 Idem, 27. 822 Idem, 351.

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la communauté chrétienne. Cette démarche de comparaison fait ressortir l’importance de

certains points de la pratique, comme l’accueil des catéchisés avec ce qu’ils sont, sans les

juger. La pratique a davantage souligné que les catéchisés sont des êtres humains qui sont

limités par le temps, l’espace et leurs choix de vie. L’importance du dialogue parents-

enfants avec les autres familles est un facteur de crédibilisation de l’action catéchétique.

Pour ce qui est des originalités de la réflexion de Denis Villepelet, la catéchèse est pour lui

un lieu théologique et un acte de communication. La catéchèse fait retentir la Parole de

Dieu : ainsi prend forme une conversation avec Dieu par la médiation de la lecture, du

partage de la Parole, de la vie liturgique et de la vie communautaire. La communauté

chrétienne est appelée à devenir un lieu d’initiation et la fides quae est communiquée non

pas par un discours mais par une expérience initiatique.

La paroisse est invitée à devenir ainsi une école de spiritualité. Le défi pour Denis

Villepelet est de créer un outil de compréhension de la société qui est complexe. La

démarche catéchétique est également complexe. La typologie des trois paradigmes

catéchétiques est l’instrument pour comprendre la complexité de la société et celle de la

démarche catéchétique dans le monde actuel. Cette corrélation permet de saisir qu’une des

difficultés de compréhension de la catéchèse actuelle est qu’elle a les caractéristiques

culturelles du monde ambiant; qu’elle est complexe et demande d’avoir une compréhension

qui permet de maintenir ensemble tous les éléments qui la composent.

Je poursuis la corrélation en articulant les trois éléments choisis : le concept de réciprocité

éducative, le Magistère, et la thèse de Denis Villepelet.

5.8 Pour un passage en paroisse de la « préparation aux

sacrements » à la réciprocité catéchétique

Suite à tout le travail d’analyse entrepris, j’en viens à la conclusion que la pratique actuelle

de sacramentalisation ne peut se poursuivre. Tous les référents démontrent par leur analyse

que cette pratique ne peut être féconde. La catéchèse se trouve en périphérie de la paroisse.

Elle est portée par un petit groupe de bénévoles qui n’ont pas d’accès direct au pasteur ni à

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368

l’équipe pastorale. Le travail se vit en silo sans communication avec les autres secteurs de

la pastorale paroissiale. Il n’y a pas de liste officielle des catéchistes et d’aides-catéchistes

en paroisse. La communauté célébrante n’est pas préparée à jouer son rôle d’accueil des

jeunes, pas plus que son rôle d’accompagnement des adultes qui demandent le baptême.

Ce modèle paroissial centré sur une pastorale de services sacramentels ne permet plus le

développement de la vie de foi, car les autres institutions qui faisaient un travail

complémentaire, comme l’école catholique publique, n’existent plus. Le changement des

écoles confessionnelles en écoles laïques a eu un impact majeur. Le fait que l’État ne

reconnaisse plus la catéchèse a provoqué un questionnement chez un grand nombre de

contemporains. La catéchèse est-elle utile ou nuisible pour le succès, le développement et

l’insertion des enfants dans la société civile? La catéchèse est devenue une option, un

élément complémentaire, comme les cours de sport, de musique, ou d’ateliers d’art, etc.

Les quelques familles qui inscrivent leurs enfants désirent transmettre des valeurs

familiales traditionnelles inspirées de la foi catholique, sans qu’elles soient moralisatrices.

Remettre en question cet élément identitaire, sans en reconnaître les bases profondes, est

pour les familles une négation de ce qu’elles sont. C’est lors de l’entrevue de groupe, vécue

dans un climat de confiance, que les parents ont osé décrire les racines de ce désir

traditionnel et identitaire pour eux.

La compréhension que l’école ne s’occupe plus de la catéchèse et de l’enseignement

religieux commence à peine à être assimilée par la population et les intervenants ecclésiaux.

Les parents, les permanents de l’Église, c’est-à-dire les prêtres, les agents pastoraux, les

catéchistes et les paroissiens n’ont pas encore pu évaluer ce constat ou sont dans le déni

face à l’ampleur du changement.

La catéchèse a été redonnée aux paroisses après plus de soixante ans d’absence. Cette

situation les oblige à créer une nouvelle culture ecclésiale et même sociale. La

sécularisation et la diminution des effectifs en Église, comme les prêtres, les agents de

pastorale et les paroissiens, augmentent davantage le défi de changement. Il devient plus

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369

difficile d’avoir un contact de qualité à cause de l’organisation actuelle du travail en

paroisse. L’Église est devenue une minorité religieuse parmi plusieurs autres dans la

société.

Il y a aussi des deuils à vivre, comme celui d’accepter que la culture ne soit plus chrétienne.

Nous sommes dans un monde pluraliste où l’on ne peut plus tenir pour acquis que les gens

croient. Les gens viennent à nous avec des désirs qu’ils sont plus ou moins capables de

nommer. L’accueil devient un des enjeux majeurs de la catéchèse. Un autre enjeu important

est la capacité pour la paroisse de clarifier ses propres objectifs et de définir un projet

pastoral d’évangélisation comportant la première annonce, soit : l’initiation chrétienne et la

maturation de la foi. Afin de proposer une option pour la catéchèse en paroisse, je fais la

synthèse des éléments relevés par la corrélation.

5.8.1 Quelques constats de la corrélation

La corrélation a permis de nommer les points communs, les divergences et les originalités

de la pratique. J’identifie ce qui ressort de ce processus de corrélation.

5.8.1.1 Finalité de la catéchèse

Ce qui doit orienter la pratique catéchétique dans une paroisse est sa finalité. La recherche a

décrit comme but de la catéchèse la formation des disciples témoins. La réciprocité

éducative a rappelé que l’institution doit avoir une orientation précise si elle veut proposer

un changement. Le Magistère propose comme but de la catéchèse la formation de disciples

missionnaires. Pour Denis Villepelet, la catéchèse conduit par le processus d’initiation à

former un chrétien engagé dans sa communauté et en dialogue avec le monde. J’en conclus

au terme de la recherche que la finalité de la catéchèse est de former des disciples

missionnaires.

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370

5.8.1.2 Une pastorale d’engendrement

La catéchèse n’est pas seulement un enseignement mais comporte six tâches comme le

décrit le DGC. Tant au niveau des sciences humaines, des divers travaux théologiques et du

Magistère, la recherche a démontré que de prioriser la catéchèse est une nécessité si l’on

veut renouveler la paroisse. En transformant la paroisse comme lieu d’accueil des

catéchisés, lieu d’initiation et d’envoi en mission, elle devient un bain ecclésial où se vit la

formation catéchétique qui conduit à un développement de l’identité chrétienne, afin de

permettre aux baptisés de professer leur foi. La paroisse est ainsi un lieu d’engendrement de

disciples missionnaires.

5.8.1.3 Une catéchèse où tous sont acteurs

La paroisse est le lieu d’accueil du tout-venant. Son renouvellement est lié à sa capacité

d’accueillir des étrangers et de former des disciples missionnaires. Cette recherche a

démontré la nécessité de revaloriser le rôle des différents acteurs, des parents et des enfants

et de stimuler les interactions entre eux et avec les catéchistes. Nous avons observé

comment le degré de résistances de la communauté célébrante étaient contre-productives

lorsqu’elle n’était pas impliquée dans la catéchèse. On a aussi déploré le manque de

leadership des prêtres et le non-soutien de l’équipe pastorale. J’ai constaté que les

interactions entre les différents acteurs lors des échanges et des témoignages sur la Parole

de Dieu ont permis une meilleure intégration de l’expérience de foi par l’action de l’Esprit

Saint. Le rôle de leadership du pasteur, soutenu par l’équipe de pastorale, est primordial

pour exprimer l’essentialité de la catéchèse pour la paroisse et tous les autres partenaires. Il

y a toute une mentalité et une vision ecclésiale à développer pour changer cette pratique. La

catéchèse peut s’exercer selon la finalité de former des disciples missionnaires dans la

mesure où tous sont des acteurs en tenant compte leurs rôles et charismes.

5.8.1.4 Une catéchèse qui approfondit l’identité chrétienne

Dans la pratique, j’ai constaté que les échanges intergénérationnels avec l’appui des

catéchistes et du pasteur permettaient le développement de l’identité chrétienne. Dans la

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371

réciprocité éducative, c’est dans les interactions et par l’assimilation du contenu de la

formation que se construit une nouvelle identité, autant de l’apprenant que de l’enseignant.

Denis Villepelet a indiqué que, dans notre société multiréférentielle, la catéchèse et le

Mystère Pascal sont des opportunités pour trouver un sens à sa vie. Actuellement, dans le

cadre paroissial et grâce aux conclusions de la corrélation, il y a une opportunité à saisir. La

catéchèse devient ce temps où le catéchisé décide de s’inscrire dans une démarche de foi

qui lui permet d’approfondir sa relation à Jésus Christ, de découvrir que Dieu est Père, Fils

et Esprit Saint, de se convertir et de devenir un disciple missionnaire. La catéchèse devient

ce lieu, cet espace d’initiation qui permet au catéchisé d’approfondir son identité chrétienne

par une formation ecclésiale intégrale et systémique.

5.8.1.5 Un prêtre disciple et évangélisateur

La recherche conduit à redécouvrir le rôle du prêtre comme ministre de la Parole. Pour la

réciprocité éducative, le leader de l’institution soutient les formateurs et le projet de

formation. Le leader devient partenaire autant de l’apprenant que du formateur. Le

Magistère rappelle le rôle du pasteur soit celui d’être le responsable de la proclamation de

la Parole, de la planification, de l’animation, de l’organisation et de l’évaluation de la

formation catéchétique en partenariat avec les catéchistes, les jeunes, les adultes et les

parents. Le prêtre est appelé non pas seulement à présider les célébrations de l’Eucharistie,

mais encore à piloter le développement d’une équipe pour l’exercice du ministère de la

Parole.

La corrélation montre que le prêtre est interpellé à développer ses capacités pour animer un

groupe, partager la Parole de Dieu, et former des catéchistes et aides-catéchistes. Ceci est

une nouveauté, car auparavant, l’école s’occupait de la catéchèse et les activités d’initiation

étaient réservées à quelques spécialistes, des agents pastoraux spécialisés, sans

nécessairement avoir des liens avec la vie paroissiale. Le prêtre est un évangélisateur qui

s’assure que s’exerce le ministère de la Parole dans la paroisse.

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372

5.8.1.6 Une catéchèse lieu d’échange de la Parole de Dieu,

des paroles

Selon la recherche, faire résonner la Parole de Dieu dans un petit groupe permet de créer le

milieu propice pour se mettre à l’écoute de Dieu. C’est par les interactions et les échanges

d’expériences humaines à la lumière de l’Évangile que les gens vivent la rencontre de Dieu.

La dimension intergénérationnelle des groupes a permis à plusieurs familles d’aborder

ensemble, pour la première fois, leurs expériences sur la vie spirituelle et ecclésiale. La

présence de plusieurs familles, à la catéchèse, vient attester l’authenticité de l’expérience de

sa propre famille. Dans la réciprocité éducative, c’est par le dialogue entre l’apprenant, le

formateur et l’institution que se vit l’apprentissage. Du côté du Magistère, on souligne que

l’écoute et le partage de la Parole de Dieu entre les acteurs de la catéchèse permettent

d’entrer en dialogue avec Dieu. Denis Villepelet insiste sur la mutualité des échanges de la

Parole de Dieu pour approfondir et actualiser la foi.

Échanger sur la Parole de Dieu permet aux catéchisés de s’approprier les grands récits

bibliques et de découvrir que l’accès à la Parole et au dialogue avec Dieu n’est pas réservé

à des spécialistes du religieux. Les gens arrivent avec une vision que le sacré est souvent

inaccessible. Le groupe de partage de la Parole de Dieu et les expériences de vie de chacun

développent l’habilité de se dire, d’entendre les autres et l’Autre et, dans un deuxième

temps, de témoigner de sa foi. Le groupe de catéchèse devient un lieu instituant permettant

de développer l’identité chrétienne de chacun des participants. Il devient une passerelle

entre la famille et la communauté célébrante. C’est le lieu où j’écoute des témoignages,

celui du catéchiste, du prêtre, du parrain, d’un témoin et des autres catéchisés. Le groupe de

catéchèse devient le lieu où le catéchisé s’initie à partager sa foi et à témoigner dans le

groupe, la paroisse et la société.

5.8.1.7. Une catéchèse qui promeut le sacerdoce baptismal

La recherche conduit à cette affirmation : la paroisse ne peut poursuivre en se basant

exclusivement sur le ministère de la Parole de Dieu, des prêtres et des agents pastoraux

mandatés par l’évêque. Aucune paroisse n’aura les moyens de financer ce modèle.

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373

D’ailleurs, les difficultés financières des paroisses obligent plusieurs d’entre elles à

remercier les agents de pastorale et à diminuer le temps du ministère presbytéral. Mais cette

manière de voir est très cléricale, elle limite le ministère de la Parole à quelques

spécialistes.

L’expérience et la recherche montrent que si nous voulons une démocratisation de la vie

ecclésiale, il est essentiel de redonner à chacun sa part de responsabilité. Il est impératif que

tous soient acteurs et de valoriser le rôle et le témoignage de foi des parents, grands-

parents, parrains, marraines, catéchistes et bénévoles. Leurs services et ministères sont tous

liés à la vocation baptismale. Cette conclusion est présente dans le concept de réciprocité

éducative qui propose que l’organisation devienne apprenante.

À partir de la grâce des sacrements de l’initiation chrétienne, le Magistère insiste pour que

les baptisés puissent s’engager dans la catéchèse. Denis Villepelet ajoute la nécessité

d’habiliter les baptisés à la proclamation du kérygme dans la société contemporaine.

La paroisse est invitée à promouvoir le sacerdoce baptismal par la promotion des

catéchistes. Un de ses rôles prioritaire est de développer un groupe de catéchistes qui se

réunit régulièrement autour du pasteur afin de se former, prier, échanger, planifier, vivre,

accompagner les groupes de catéchèse et célébrer avec la communauté le dimanche.

Dans cette recherche, les catéchistes ont insisté pour qu’on célèbre un envoi missionnaire à

tous les ans, devant la communauté liturgique, afin de faciliter leur travail et permettre aux

paroissiens de découvrir l’importance de la catéchèse. Un autre défi est de développer des

outils afin de valoriser le rôle des parents comme premiers éducateurs de la foi, et celui des

parrains et marraines comme témoins actifs de la paroisse dans les catéchèses

intergénérationnelles.

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374

5.8.1.8 Une paroisse inclusive

La foi est un don de Dieu. C’est Dieu qui prend l’initiative et suscite dans le cœur des

humains le désir de le rencontrer et d’approfondir cette relation. La catéchèse est cette

activité ecclésiale qui crée un lieu d’initiation propice, chaleureux et accueillant aux

catéchisés qui veulent répondre à l’appel de l’Esprit Saint; cela est confirmé par le DGC.

Dans le ministère catéchétique, il y a un défi soit celui de reconnaître que l’Esprit Saint

nous précède toujours et qu’il accompagne l’Église dans sa route auprès de tous,

spécialement auprès des enfants et des jeunes adultes.

Chaque catéchisé qui frappe à la porte de la paroisse est un envoyé de Dieu en soutien à son

renouvellement. Dans la réciprocité éducative, on voit que les formateurs apprennent

également des gens qu’ils forment. Un catéchisé est comme un enfant qui est accueilli dans

une famille; il dérange, transforme le style de vie, bouscule, mais il assure à long terme la

survie de la famille. Il y a un lâcher-prise à vivre, c’est-à-dire d’accepter que les apports des

catéchumènes et des catéchisés sont des éléments vitaux du renouvellement paroissial. Ce

ne sont pas les acteurs en catéchèse qui définissent l’action de Dieu, au contraire, ils se

rendent disponibles afin de discerner ecclésialement ce que l’Esprit exprime aux Églises

(Ap 2,7).

5.8.1.9 Une catéchèse de la miséricorde

Dans la réciprocité éducative, Jean-Marie Labelle mentionne que le manque suscite le désir

de la formation. Le document d’Aparecida observe le désir de spiritualité de la population,

mais indique que cette impulsion intérieure doit susciter une charité envers les autres et non

pas un repli sur soi. Denis Villepelet rappelle que dans la société contemporaine, les

individus font un assemblage hétéroclite des éléments religieux pour se composer une

spiritualité personnelle. Le rôle de la catéchèse est d’évangéliser cet assemblage. À

plusieurs reprises durant la recherche, la vie spirituelle est décrite comme le

développement d’une passion, d’un goût à trois dimensions : le goût de l’Évangile, le goût

de l’Église et le goût d’aimer les gens. Les personnes qui ont participé à la recherche-action

étaient unanimes sur la nécessité de la vie spirituelle en Jésus Christ.

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375

Il s’agit d’un pèlerinage qui oblige à un déplacement, à une conversion. Le document

d’Aparecida présente bien ce pèlerinage en quelques étapes : rencontre de Jésus Christ,

conversion, être disciple, communion et mission823.

Dans la recherche, trois points ont été notés pour la vie spirituelle. Le premier est la

rencontre du Christ. Vivre une rencontre avec un Dieu vivant qui nous aime jusqu’à donner

sa vie pour nous. La catéchèse, c’est accueillir cet amour total de Dieu pour nous.

Le deuxième point est la conversion; découvrir que l’on est aimé ne peut nous laisser

indifférent. Cet amour nous transforme, il permet d’être davantage nous-mêmes et cela

nous appelle à nous dépasser, c’est-à-dire à aimer à notre tour comme le Christ. La

rencontre du Christ a également une dimension thérapeutique. Elle guérit nos blessures en

nous faisant découvrir que nous pouvons être aimés pour ce que nous sommes. Cet aspect

thérapeutique se vit par l’accueil des gens dans les groupes de partage. Le fait d’être

accueilli permet de se laisser transformer par l’amour de Dieu et des gens.

Le troisième point est de donner à notre tour ce que nous avons reçu. L’amour de Dieu nous

invite à le recevoir, à l’accueillir, à nous laisser transformer et ensuite à redonner aux autres

ce que j’ai reçu.

5.8.1.10 Une Catéchèse paroissiale d’initiation

La recherche a fait éclater le modèle d’une catéchèse centrée presque exclusivement sur

l’enseignement. La catéchèse est une démarche complexe qui demande une formation

intégrale pour être bien vécue. Les personnes ont confirmé l’intuition d’André Fossion qui

propose une formation comportant l’acquisition de cinq compétences : théologique,

culturelle, pédagogique, organisationnelle, spirituelle. Denis Villepelet propose d’ajouter

une dimension philosophique en utilisant la typologie des trois paradigmes.

823 APA, 278.

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376

Cette formation intégrale, où chacun apprend de l’autre par les échanges, se veut un outil

pour habiliter les différents acteurs à réaliser les diverses tâches de la catéchèse. Une de

mes préoccupations dans cette recherche est de faire écho à un besoin particulier que les

catéchistes ont souligné à plusieurs reprises : la nécessité d’avoir des outils de références

pour les aider à approfondir la catéchèse. Ils ont trouvé libérant de découvrir ces trois outils

de référence : la Bible, le Catéchisme de l’Église Catholique, le Directoire général pour la

catéchèse. Ils s’attendent à recevoir une formation, un élément-clef pour réaliser le

changement du modèle proposé.

5.9 La réciprocité catéchétique comme proposition de

transformation de la pratique catéchétique en paroisse

L’analyse des données et la corrélation ont montré que la catéchèse est complexe et qu’elle

se vit dans une société qui est hétéroclite à son tour. Une de mes découvertes est que la

catéchèse est efficace lorsqu’elle est dialogique. Dans la réciprocité de la communication se

vit l’approfondissement de la rencontre de Jésus Christ.

5.9.1 Point d’ancrage de la réciprocité catéchétique

Pour définir la réciprocité catéchétique, j’utilise la typologie de Denis Villepelet pour

décrire les différents paradigmes dans les champs théologique, ecclésiologique,

sociologique, anthropologique et pédagogique824. Pour moi, la réciprocité catéchétique se

situe dans le troisième paradigme.

5.9.1.1 Les fondements théologiques

La foi est un don de Dieu, puisque Dieu prend l’initiative de venir à la rencontre de l’être

humain par le mystère de l’incarnation. Dans la recherche, les acteurs de la catéchèse sont

décrits comme des éveilleurs. Dieu veut sauver tous les hommes825. Dieu veut entrer en

824 Denis Villepelet, L'avenir de la catéchèse, 87-116. 825 LG, 2.

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377

conversation avec nous, il nous appelle à participer à sa vie divine826. Cette rencontre avec

Dieu invite l’être humain à devenir enfant de Dieu et à partager son héritage827. Ce dialogue

entre Dieu et l’homme se vit par la médiation de l’Église. C’est par le partage de la Parole

de Dieu que s’approfondit la rencontre du Christ, mais cela ne se limite pas à une simple

explication de la Parole de Dieu. La catéchèse se vit selon le modèle de la communauté

primitive828. Elle est christocentrique et trinitaire, elle prend pour modèle la communion à

l’intérieur même de la Trinité. Cette réalité a comme conséquence de modeler la catéchèse

sur la personne de Dieu et des répercussions sur le modèle catéchétique lui-même829. C’est

ainsi que la catéchèse se vit dans ce contexte où les groupes de partage se modèlent sur

cette communion amoureuse de Dieu en trois personnes :

L'action évangélisatrice de l'Église, et en elle la catéchèse, doit chercher plus

fermement à consolider la cohésion ecclésiale. Dans ce but, il est urgent de

promouvoir et d'approfondir une authentique ecclésiologie de communion et

d'engendrer chez les chrétiens une spiritualité ecclésiale profonde830.

La première réciprocité dans la catéchèse est avec Dieu. Dieu entre en dialogue avec toutes

les personnes et ce dialogue permet de transformer la relation avec Dieu. Par la rencontre

de Jésus Christ, je ne suis plus un étranger pour Dieu, je deviens un concitoyen de la

maison de Dieu831. Mais cette rencontre avec Jésus Christ s’approfondit par la proclamation

de la Parole de Dieu. Cette proclamation est essentielle. Paul VI le rappelle dans son

exhortation Evangelii Nuntiandi : « Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom,

l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de

Dieu ne sont pas annoncés »832. Un des éléments centraux de la recherche est de nommer

l’importance de la miséricorde. J’ai identifié, comme défi pastoral, le besoin de permettre

aux gens de découvrir l’amour d’un Dieu qui est prêt à les accueillir tels qu’ils sont; c’est

cet accueil qui les met en route.

826 CEC, 1. 827 CEC, 3. 828 Ac 2, 42. 829 DGC, 100. 830 DGC, 28. 831 Ep 2,19-21. 832 EN 22.

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378

La réciprocité catéchétique a cette particularité de proposer un dialogue avec un Dieu

d’amour et de miséricorde. Dieu vient à nous et l’incarnation en est son expression la plus

profonde. La présence de Dieu qui vient à nous se poursuit par l’action de l’Esprit Saint. La

découverte de ce Dieu se réalise par le témoignage des membres de la communauté

chrétienne. La découverte d’un Dieu d’amour, qui ne juge pas et qui vient en nous pour

nous sauver, s’expérimente par le contact avec des chrétiens qui, par leurs témoignages,

peuvent faire découvrir aux gens que la Parole proclamée est authentique.

5.9.1.2 Les fondements ecclésiologiques

Le témoignage est une partie essentielle dans la réciprocité catéchétique, car le témoignage

permet d’illustrer concrètement la théologie pour les catéchisés. Dans le groupe de la

catéchèse, ces témoignages rendent possible de vivre une première expérience ecclésiale.

La catéchèse en paroisse a pour mission de présenter aux catéchisés l’ensemble de la Parole

de Dieu et la plénitude de la vie ecclésiale par de multiples activités :

Même si les prêtres, religieux et laïcs exercent en commun la catéchèse, ils le

font de manière différenciée, chacun selon sa condition particulière dans

l’Église (ministres ordonnés, personnes consacrées, fidèles chrétiens). Par eux

et selon le rôle de chacun, le ministère de la catéchèse offre, d’une façon

complète, la Parole et le témoignage de la réalité de l’Église. Si une de ces

formes de présence venait à manquer, la catéchèse perdrait une partie de sa

richesse et de sa signification833.

La catéchèse a pour objectif de présenter la « Sequela Christi ». Cette expression signifie

que la rencontre du Christ se vit dans une expérience dynamique. La catéchèse a pour but

de former des disciples missionnaires. Le pape François indique que tous les baptisés sont

invités, à la suite de leur rencontre du Christ, à témoigner de leur foi. Cette perspective

rejoint les conclusions de cette recherche. Je retiens cette expression de « disciple

833 DGC, 219.

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missionnaire ». Toutes les personnes, les structures ecclésiales sont appelées à se convertir

et à éviter une cléricalisation de l’action pastorale, un phénomène observé dans la pratique :

En vertu du Baptême reçu, chaque membre du Peuple de Dieu est devenu

disciple missionnaire (cf. Mt 28, 19). Chaque baptisé, quelle que soit sa

fonction dans l’Église et le niveau d’instruction de sa foi, est un sujet actif de

l’évangélisation, et il serait inadéquat de penser à un schéma d’évangélisation

utilisé pour des acteurs qualifiés, où le reste du peuple fidèle serait seulement

destiné à bénéficier de leurs actions. La nouvelle évangélisation doit impliquer

que chaque baptisé soit protagoniste d’une façon nouvelle. Cette conviction se

transforme en un appel adressé à chaque chrétien, pour que personne ne

renonce à son engagement pour l’évangélisation, car s’il a vraiment fait

l’expérience de l’amour de Dieu qui le sauve, il n’a pas besoin de beaucoup de

temps de préparation pour aller l’annoncer, il ne peut pas attendre d’avoir reçu

beaucoup de leçons ou de longues instructions. Tout chrétien est missionnaire

dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus Christ; nous ne

disons plus que nous sommes « disciples » et « missionnaires» mais toujours

que nous sommes «disciples missionnaires »834.

Cette finalité change la perspective de la paroisse qui n’attend plus seulement que les gens

viennent demander des services religieux; elle part sans plus annoncer la Parole de Dieu à

tous. Cette première annonce permet de susciter le goût de devenir disciples missionnaires

auprès de nombreuses personnes. La catéchèse ne peut pas tout faire. Ce n’est pas une

formule magique qui, par quelques paroles et rites, transforment en quelques rencontres une

personne qui découvre qui est la personne du Christ, en disciple missionnaire. Dans la

paroisse, les activités d’évangélisation sont nombreuses, les activités de la première

annonce précède la démarche catéchétique et se poursuit par les activités de la maturation

de la foi, tout en sachant que les frontières entre les diverses activités sont poreuses et en

interrelations.

Être disciple-missionnaire comporte aussi des exigences pour chaque chrétien. John Meier

souligne que le mot disciple est peu présent dans l’Ancien Testament, mais qu’il est

mentionné très régulièrement dans les Évangiles et les Actes des apôtres :

834 EG, 120.

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380

Le mot « disciple » (mathētēs au singulier, mathētai au pluriel) bénéficie d’une

présence massive dans chacun des évangiles : 72 fois dans Matthieu, 46 fois

dans Marc, 37 fois chez Lc et 78 fois dans Jean, 28. Par contre, à l’exception

des Actes (28 fois, mais jamais en référence aux disciples de l’époque du

ministère de Jésus), le mot est absent de tout le reste du Nouveau Testament835.

Il mentionne trois caractéristiques du disciple de Jésus : l’initiative de l’appel vient de

Jésus; suivre Jésus implique de quitter sa maison; c’est risqué d’être critiqué, dénoncé,

remis en question par l’option d’être disciple. C’est un appel à la conversion, à changer ses

valeurs, son style de vie. Ce travail de formation des disciples missionnaires ne peut se faire

seul, c’est un travail de toute la communauté paroissiale. Cette proclamation de la Parole et

cette expérimentation de la vie ecclésiale ne sont pas seulement pour les gens qui veulent

être catéchisés, mais également pour la conversion de la communauté paroissiale que

l’Esprit Saint invite continuellement à s’évangéliser836.

Dans la recherche, j’ai constaté que l’Esprit Saint est le Maître et qu’Il nous précède.

L’Esprit Saint agit par différentes médiations. Il passe par le partage sur la Parole de Dieu

entre les membres de la famille, par le groupe de catéchèse, par une action de solidarité

quand le prêtre visite une famille qui a perdu un être cher, et par le témoignage. C’est dans

une dynamique de coresponsabilités et de partage de la mission catéchétique que s’inscrit la

dynamique de la réciprocité catéchétique. Cela demande de reconnaître des ministères

autres que ceux mandatés par l’évêque et rémunérés.

Le fait de reconnaître les catéchistes bénévoles comme participants de la mission et de la

charge pastorale du curé s’inscrit dans une démocratisation des ministères. Dans la

recherche, on a également insisté pour reconnaître le rôle des parents comme premiers

éducateurs de la foi pour les aider à vivre leur rôle. Ce concept fait découvrir aux

paroissiens qui viennent le dimanche leur rôle pour accueillir les nouvelles personnes qui

s’inscrivent dans les parcours, et les inviter à s’insérer comme participants actifs dans les

célébrations liturgiques. La liturgie dominicale et le calendrier liturgique deviennent des

835 John P. Meier, Un certain Juif Jésus III Attachements, affrontements, ruptures, traduit par Charles Ehlinger

et Noël Lucas, III vols., Lectio divina (Paris : Cerf, 2009), 42. 836 EN, 13.

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outils catéchétiques. Les paroissiens qui y participent deviennent les acteurs de la

catéchèse, en aménageant la liturgie pour qu’elle puisse faire goûter l’accueil, l’amour de

Dieu et l’action de l’Esprit Saint aux gens.

Proposer la réciprocité catéchétique demande un changement de culture ecclésiale et la

nécessité d’une formation des paroissiens avec l’appui de l’équipe pastorale, du pasteur de

la communauté et du diocèse. La réciprocité catéchétique ne peut prendre vie dans une

paroisse que si elle offre une spiritualité aux gens qui leur permet de vivre une relation

affective avec Dieu. Une spiritualité qui fait appel à la raison et à des fondements

vérifiables théologiquement, et qui tient compte des apports des sciences humaines.

La réciprocité catéchétique n’est possible que s’il y a une volonté claire de la part des

leaders paroissiaux et qu’ils sont appuyés par un noyau de paroissiens. Elle se modélise sur

le catéchuménat. La démarche s’inscrit dans le temps, sur une période d’environ trois ans,

mais il est essentiel qu’il y ait un début et une fin. Pour le début, on s’inspire du rituel pour

l’initiation chrétienne. Il est important d’avoir une célébration liturgique qui souligne le

début des parcours catéchétiques qui sont jalonnés d’étapes devant la communauté

chrétienne. La démarche catéchétique se termine par un rituel d’envoi en mission. La

finalité de la catéchèse est de former des disciples missionnaires; il est nécessaire

liturgiquement et devant la communauté chrétienne de terminer par un envoi. Cet envoi est

une célébration de la Parole où le nouveau disciple-missionnaire prend la Parole, explique

un passage de l’Évangile et témoigne de ce qu’il a découvert dans son cheminement

catéchétique.

La catéchèse, par ses diverses activités, permet aux catéchisés de devenir des témoins

vivants de la Parole de Dieu. Comme le dit Denis Villepelet, la Fides Quae n’est pas

seulement un enseignement, mais un bain ecclésial. Il est constitué d’un ensemble

d’activités complémentaires qui recoupent les six tâches de la catéchèse. La catéchèse

devient ainsi un lieu instituant qui forme des disciples missionnaires, des acteurs en

catéchèse.

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5.9.1.3 Les fondements sociologiques

Le contexte socioculturel dans lequel se vit la pratique catéchétique est véritablement

marqué par la postmodernité. La description faite par les évêques du Québec dans le

document Annoncer l’Évangile dans la culture actuelle est toujours d’actualité837. Nous

sommes dans une culture centrée sur le sujet; le temps qui est important est le présent; il

s’agit d’une société qui est de plus en plus marquée par les moyens de communication,

spécialement les réseaux sociaux. Les institutions sont souvent mises en doute. La vie

sociale est confrontée à la mondialisation et Québec est devenu une société pluraliste838.

Les gens appartiennent à plusieurs groupes et leurs identités sont multiples. Pour ce qui est

du religieux, on est à l’époque du bricolage, chacun composant selon ses propres critères

subjectifs un monde religieux à sa convenance. De nombreux catholiques veulent garder

leur appartenance à l’Église tout en ayant des réserves, des distances sur plusieurs sujets et

positions de l’Église839.

Face à cette diversité, l’analyse me conduit à proposer une attitude pastorale pour la

réciprocité catéchétique, qui est de prendre le temps d’écouter et d’accueillir les gens avec

ce qu’ils sont et leur histoire propre. Dans les échanges de la recherche-action, une

expression résumait l’attitude que l’on voulait développer en nous inspirant de l’attitude de

Jésus : « Accueillir et interpeller au dépassement »840.

Ce que je peux affirmer est que je tiens compte du contexte social et ecclésial où se vit la

catéchèse. Il est important d’être en dialogue avec ce monde. Il n’est ni mauvais, ni bon, il

est différent. C’est dans cette culture que nous sommes interpelés à annoncer l’Évangile. Il

y a un regard autre à porter, celui de voir la culture actuelle positivement avec ses forces et

son originalité, tout en ayant une dimension critique pour identifier ce qui n’est pas en

conformité avec l’Évangile; s’ouvrir au dialogue, refuser le repliement sur soi ou une autre

837 Assemblée des évêques du Québec., Annoncer l'Évangile dans la culture actuelle au Québec. 838 Assemblée des évêques catholiques du Québec, Catholiques dans un Québec pluraliste, Message pastoral

de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec (Montréal : Assemblée des évêques catholiques du

Québec, 2012), 5. 839 Idem, 9. 840 Clé USB 1, 441.

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avenue qui serait de garder le statu quo et de transformer la paroisse en forteresse qui craint

les assauts du monde.

5.9.1.4 Les Fondements anthropologiques

Les référents consultés sur la réciprocité éducative ont confirmé plusieurs éléments de

l’analyse des données. Dans celle-ci je mentionne que l’écoute mutuelle favorise

l’apprentissage et la découverte, voire que la reconnaissance des compétences de l’autre

stimule les échanges. L’entraide entre les catéchistes et les membres de l’équipe pastorale

permet à chacun de se valoriser et d’apprendre les uns des autres. D’abord, elle confirme la

nécessité de l’implication des autorités paroissiales afin de bâtir un programme où il y

aurait réciprocité. La thèse sur la réciprocité éducative de Jean-Marie Labelle permet

d’éclairer ce qui se passe dans les groupes de catéchèse intergénérationnelle où les

catéchistes et les parents témoignent qu’ils apprennent les uns des autres, par les échanges

sur la Parole de Dieu. Cet apport est aussi confirmé par plusieurs documents du Magistère.

La réciprocité catéchétique se base sur les assises anthropologiques de l’intersubjectivité.

L’expérience et l’enquête confirment que chacun apprend de l’autre par la circulation des

paroles, des récits de vie et de la Parole de Dieu. La réciprocité catéchétique devient

possible quand il y a un parcours clair et précis établi par une entente entre les partenaires.

La finalité est de devenir des disciples missionnaires. Selon les expériences des catéchisés,

l’institution paroissiale propose un parcours, une catéchèse adaptée, qui conduira à produire

une catéchèse inculturée pour les contemporains et la société actuelle.

La réciprocité catéchétique a aussi des limites; elle ne peut se vivre qu’avec des groupes à

taille humaine. Pour qu’ils puissent avoir interactions, il est important que les groupes

soient composés d’au maximum trente personnes, et les ateliers de huit à douze personnes.

Un des avantages de la réciprocité catéchétique est qu’elle est adaptée pour des parcours

intergénérationnels, ce qui permet d’insérer des jeunes en bas âge dans une dynamique

dialogique par la présence des parents, grands-parents, parrains et marraines.

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384

5.9.1.5 Les fondements pédagogiques

La réciprocité catéchétique fait appel à trois types de pédagogie : l’enseignement,

l’apprentissage et l’initiation. Elle veut conduire le baptisé à devenir un disciple

missionnaire capable d’initiative, et artisan de l’édification de l’Église et d’un monde

nouveau.

La méthode de l’enseignement est utile pour connaître la Parole de Dieu, les grandes étapes

de l’histoire du salut, la sacramentaire, la dimension morale, la liturgie et la doctrine sociale

de l’Église. C’est aussi la présentation et l’utilisation d’outils afin de poursuivre

l’approfondissement de la foi : la Bible, le Catéchisme de l’Église Catholique, le Directoire

général de la catéchèse et l’histoire du christianisme.

L’enseignement est loin d’être suffisant. Tout le domaine de l’apprentissage est important.

La catéchèse est un lieu d’expérimentation quant au partage de la Parole de Dieu, de

l’initiation à la prière personnelle et communautaire, de l’expérimentation de la charité par

la visite aux malades et de l’aide aux démunis. C’est également apprendre à célébrer

ensemble les anniversaires, les réussites scolaires, la réalisation d’un projet.

La pédagogie de l’initiation utilise à la fois l’enseignement et l’apprentissage dans sa

démarche. La catéchèse par l’initiation devient le lieu de l’insertion dans la culture

ecclésiale et sociale. Sa porte d’entrée est le récit de vie. La première étape est de se mettre

à l’écoute de qui est l’autre. Comme le mentionnait Jean-Baptiste Shin Chul, il est impératif

que le catéchisé nomme sa représentation religieuse du départ841. On ne peut pas changer, si

on ne sait pas d’où l’on vient ni où l’on va.

Par le groupe de catéchèse, l’initiation permet de créer l’espace pour la conversion. Je

nomme ce que je quitte, je découvre un nouvel horizon, je l’expérimente et j’y adhère en

délaissant ma première représentation religieuse afin d’adhérer à une nouvelle. C’est par

841 Jean-Baptiste Jung Shin Chul, il est docteur en théologie et évêque du diocèse d’Incheon en Corée du Sud.

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l’expérimentation d’une nouvelle manière de vivre et par le témoignage que se vit

l’intégration de cette nouvelle vie. C’est la Parole de Dieu qui, par la médiation du

catéchiste, devient le guide de cette transformation; la communauté paroissiale devient la

nouvelle famille identitaire. La réciprocité catéchétique est cette articulation des trois

pédagogies qui accompagne le catéchisé dans sa démarche de conversion.

5.9.2 La nécessité d’un changement dans la pratique de la

catéchèse paroissiale

Proposer un nouveau modèle catéchétique, dans le contexte actuel, peut sembler audacieux

et même utopique. Les résistances sont nombreuses. Il est important d’en prendre

conscience si l’on veut transformer la pratique. Un changement aussi important de

paradigme demande une préparation et des conditions minimales pour le réaliser.

La première résistance est la difficulté d’opérer le deuil de la chrétienté. Ces changements

sont récents, c’est la première génération qui en prend acte. Les paroisses du Québec ne

sont plus au centre de la vie civile. Elles sont passées du centre à la périphérie de la vie

sociale.

La paroisse s’est repliée sur elle-même en espérant un renouveau dans un avenir proche,

mais qui n’arrive pas. Ce repli a provoqué une léthargie dans plusieurs paroisses et suscité

des résistances aux changements. Malgré les résistances, il y a une attente de la part du

Peuple de Dieu pour un changement et un renouveau. Lors de l’implantation des nouveaux

parcours catéchétiques, ma grande surprise dans la pratique a été de découvrir les

nombreuses résistances internes dans la vie de la paroisse. Les résistances se sont

manifestées chez de nombreux intervenants pastoraux mandatés : prêtres et laïcs. Les

résistances ont aussi été nombreuses chez plusieurs bénévoles où tout changement est

interprété comme un danger de perdre sa place.

La réciprocité catéchétique demande un changement du modèle ecclésiologique vécu en

paroisse. Comme l’ont souligné les participants de la recherche-action, le leadership du

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pasteur est capital pour la réussite et l’implantation de ce modèle. Il est nécessaire que

l’évêque et le pasteur appuient l’équipe pastorale paroissiale afin qu’ils puissent s’entendre

sur la mise en place de ce type de modèle catéchétique. Ce modèle demande également que

l’équipe pastorale transforme sa manière de travailler. Pour l’équipe pastorale paroissiale,

cela demande de mettre la formation des acteurs au centre de leur activité. Son défi est de

créer des lieux pour l’apprentissage des acteurs en catéchèse, et elle doit également partager

ces diverses tâches avec les catéchistes. Les catéchistes ne sont pas des exécutants, mais des

ministres à part entière dans le ministère de la Parole. Concrètement pour la catéchèse, la

priorité est la formation, l’accompagnement et le soutien des catéchistes dans leur action.

Cela veut dire de mettre à l’agenda du pasteur et de l’équipe pastorale paroissiale des

rencontres de formation, de coordination et d’évaluation avec les catéchistes, de même que

des visites régulières des groupes de catéchèse avant la planification des rencontres de

groupes de catéchèse.

Un autre changement nécessaire est de former la communauté chrétienne qui célèbre tous

les dimanches. Son rôle dans la catéchèse est d’accueillir les nouveaux venus. Les lieux de

catéchèse ont à être aménagés pour être accueillants, pratiques et multifonctionnels. Vivre

la réciprocité catéchétique demande à l’équipe pastorale et aux catéchistes d’accompagner

les catéchisés dans les moments importants de la vie : l’accueil d’un nouvel enfant dans la

famille, la réussite scolaire et sportive, un mariage; de même, lors des événements plus

difficiles comme les deuils, les changements de travail, la pauvreté, les dépendances et la

séparation dans les familles.

C’est souvent dans le soutien et l’écoute des expériences des catéchisés qu’ils découvrent

que le discours catéchétique n’est pas seulement une utopie, mais une réalité. La réciprocité

catéchétique opère un déplacement, la catéchèse n’est plus une activité quelconque, mais le

centre de la vie paroissiale en lien avec la vie des acteurs de la catéchèse.

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387

5.9.3 Une nouvelle compréhension de l’initiation chrétienne

en paroisse

La catéchèse commence par le désir d’approfondir cet appel à entrer en relation avec le

Dieu de Jésus Christ que j’ai expérimenté. Le point de départ est le don de la foi qui met en

route et invite à s’ouvrir sur de nouveaux horizons. C’est le début d’une quête qui est à la

fois humaine, spirituelle et sociale. La catéchèse a pour objectif de permettre au catéchisé

qui a une foi naissante, de l’approfondir par un contact avec la fides quae, et de devenir

disciple-missionnaire. Dans le modèle de la réciprocité catéchétique, la fides quae est un

bain ecclésial, une démarche composée d’une variété d’expériences liées aux six tâches de

la catéchèse du DGC842. L’approfondissement de tous ces aspects de la catéchèse se fait par

l’intermédiaire d’un groupe de catéchèse. Il sera un lien effectif et affectif avec l’équipe

pastorale, le pasteur et la communauté célébrante.

Le groupe de catéchèse est un lieu, un espace de prise de parole pour les catéchisés. C’est

par les échanges entre les catéchisés et les catéchistes, à l’aide de la Parole de Dieu,

l’expérience humaine et l’expérience ecclésiale, que se vit l’approfondissement de la foi. Le

groupe de catéchèse habilite ses membres à trouver les mots pour exprimer sa foi et

témoigner du Christ Ressuscité.

Les différents acteurs sont également en interrelation et ces relations sont multiples. Le

premier acteur, qu’il ne faut pas oublier, est l’Esprit Saint qui agit par les médiations

personnelles, ecclésiales et communautaires. Le contact avec la fides quae se fait par le

partage biblique, l’écoute de témoignages, la liturgie, les expériences fraternelles, le partage

avec les plus pauvres, la prière personnelle, la découverte de l’art chrétien, l’histoire de

l’Église locale, les pèlerinages, etc.

La cohésion de ces activités dans un programme précis et approuvé par les partenaires

devient un processus initiatique. Il permet d’entrer dans le récit de vie de la communauté

paroissiale. La réciprocité catéchétique devient une expérience initiatique. Pour que cela

puisse vraiment fonctionner, cette démarche d’initiation a besoin d’être ponctuée de

842 DGC, 85-87.

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plusieurs rites où le catéchisé est invité à se dépasser et à prendre sa place dans la

communauté paroissiale. Je propose comme épreuve finale un rite d’envoi en mission. Le

catéchiste présente le candidat à l’envoi en mission en décrivant son cheminement et

l’appréciation de la communauté paroissiale à son égard. Ensuite, le disciple missionnaire

témoigne de son expérience de foi dans la formation catéchétique. Dans un troisième

temps, il anime la liturgie de la Parole et fait la présentation et l’actualisation d’un court

texte de l’Évangile. En conclusion, le pasteur de la communauté envoie le candidat en

mission dans l’Église et dans le monde, et le tout se termine par des agapes fraternelles.

Ainsi, la réciprocité catéchétique devient un modèle catéchétique centré sur la formation de

disciples missionnaires.

5.9.4 Pour une définition de la réciprocité catéchétique en

paroisse

La réciprocité catéchétique est un modèle catéchétique qui propose une formation intégrale

et systématique au catéchisé ayant comme finalité de devenir disciple missionnaire. Cette

démarche catéchétique s’inspire du modèle catéchuménal. Il propose une démarche

d’approfondissement en immergeant le catéchisé dans un bain ecclésial qui lui permet

d’être en contact avec la foi chrétienne et de partager sur le Mystère Pascal. C’est un

processus où tous les acteurs apprennent les uns des autres, par l’échange réciproque. Les

trois pivots de cette initiation sont le groupe de catéchèse, l’expérimentation du mystère

chrétien par la liturgie et l’initiation à la mission. C’est le partage de la Parole de Dieu,

l’expérimentation de diverses tâches de la catéchèse et l’accompagnement spirituel par un

catéchiste ou un parrain qui permettra au catéchisé d’arriver à devenir disciple

missionnaire, prêt à témoigner de sa foi au Christ Mort et Ressuscité à ses contemporains.

5.10 Prospective

La réciprocité catéchétique n’est pas un remède miracle. Cette réflexion a surgi de mon

questionnement en faisant le constat de la désagrégation du modèle ecclésial dans mon

milieu. Je ne pouvais pas rester inactif. J’ai choisi d’entreprendre une recherche-action, car

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j’ai toujours cru à l’action et à la présence du Ressuscité par l’action de l’Esprit Saint au

cœur de l’Église. J’ai été agréablement surpris par cette démarche qui a été formatrice pour

le prêtre et le pasteur que je suis.

5.10.1 Les acquis de la recherche et les questions qu’elle suscite

Le travail en théologie pratique m’a permis à la fois d’affiner mes capacités d’observation,

de poser de meilleurs diagnostics pastoraux et de développer des habiletés dans le travail de

théologie. Une de mes découvertes est l’importance de prendre au sérieux les enquêtes et

l’analyse des cueillettes de données. Cela demande un travail de moine, beaucoup de

patience et l’acceptation d’être remis en cause. J’ai développé mes compétences tant

comme professeur en théologie pratique que comme formateur au presbytérat par cette

rigueur que j’ai développée.

Mes découvertes en lien avec la pratique m’ont montré que les inspirations du Peuple de

Dieu sont souvent à l’avant-garde de la théologie. J’ai été surpris d’observer comment le

diagnostic sur la pratique pastorale à la paroisse étudiée, par les membres de la recherche-

action, était similaire à la réflexion des évêques du CELAM dans le document d’Aparecida.

C’est au moment où j’ai accepté de transformer la question de départ comme animateur de

la recherche-action que j’ai découvert de nouveaux horizons. Voici les constats réalisés

dans cette recherche :

• La culture ecclésiale paroissiale s’est sclérosée par le modèle d’une pastorale de

service influencée par une vision technocratique et fonctionnaliste de la société.

• L’ampleur de la sécularisation interne de l’Église, ainsi que la crainte des

intervenants pastoraux et des paroissiens de parler de foi.

• La non-réception des orientations de Vatican II et des différents aggiornamentos

sur la catéchèse dans les Synodes par les différents intervenants pastoraux.

• La formation actuelle des agents pastoraux et des bénévoles est insuffisante pour

mettre en œuvre l’évangélisation.

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• La vitalité du Peuple de Dieu et son désir de transformer la pratique actuelle.

• Les acteurs de la catéchèse sont multiples et peuvent contribuer de façon

importante à la démarche catéchétique.

• Les dialogues intergénérationnels entre parents, enfants, catéchistes et le pasteur

que je suis, m’ont permis de voir qu’ils sont le lieu privilégié de

l’approfondissement de la foi.

• La découverte de la réciprocité m’a amené à approfondir cette question à partir de

la réciprocité éducative.

• La complexité de la catéchèse souligne l’importance des liens et du soutien de la

communauté célébrante, du pasteur et de l’équipe pastorale pour la réussite du

projet catéchétique.

• Le travail de corrélation a fait surgir le concept de réciprocité catéchétique qui

identifie les mots pour exprimer les aspirations des croyants dans le

renouvellement de la catéchèse.

À la vue de tous ces constats, j’en conclus que la proposition de la réciprocité catéchétique

est un changement de modèle ecclésial.

5.10.2 Pour un renouvellement de la pratique du ministère

ordonné, des ministères délégués et des ministères

baptismaux

La réciprocité catéchétique demande un changement de modèle ecclésial pour la paroisse.

Cela implique une transformation des rôles des différents acteurs. La recherche a démontré

que la vie et le développement de la communauté paroissiale sont liés à sa capacité de

susciter, former, accompagner et envoyer en mission des disciples missionnaires. Le

modèle paroissial existant, basé sur la prestation de services sacramentels, n’a pas d’avenir

à court, moyen et long terme.

Avec la réciprocité catéchétique, j’ai découvert l’importance du leadership du pasteur pour

l’orientation de la paroisse, afin qu’elle soit un lieu de formation de disciples-

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missionnaires. Cela demande au pasteur de susciter la responsabilité commune de la

catéchèse dans la paroisse de s’entourer d’une équipe pastorale, d’une équipe de catéchistes

et de bénévoles qui animeront la catéchèse avec lui. Il veille à ce que la formation des

différents acteurs en paroisse s’organise et se donne de manière efficace, tout en intégrant

la catéchèse dans le plan pastoral d’ensemble de la paroisse. C’est à lui ou à ses délégués de

présider les rites d’accueil des catéchisés lors de leur inscription et de la présentation pour

la mise en route des parcours devant la communauté célébrante. Avec l’approbation de

l’évêque, le pasteur institue les catéchistes annuellement devant la communauté célébrante.

Il préside les célébrations d’envoi en mission des disciples missionnaires.

Les agents de pastorale qui sont mandatés à la catéchèse sont appelés à devenir des

formateurs de catéchistes. Leur travail, en unité avec le pasteur, est de partager la charge

pastorale afin d’habiliter les catéchistes, les bénévoles et les autres intervenants à jouer

leurs rôles respectifs. Ils aident les catéchistes à s’insérer dans les différentes activités de la

paroisse avec leur groupe de catéchèse. Ils sont invités à présider les célébrations de la

Parole et la prière lors des rassemblements des groupes de catéchèse.

Les catéchistes exercent leur ministère en étant associés à un corps, soit celui des

catéchistes de la paroisse. C’est ce groupe qui, par des rencontres régulières avec le pasteur

et les agents pastoraux mandatés, fait le choix des outils didactiques et de la planification

du programme, selon les besoins des catéchisés. C’est un groupe de ressourcement et de

soutien spirituel, ecclésial et humain des catéchistes. Ils ont à accompagner les catéchisés et

doivent être habilités à l’animation de groupes. Ceci, afin d’assurer qu’à chaque rencontre

du groupe de catéchèse, un lieu d’échange de la Parole de Dieu et des expériences

ecclésiales et de la parole des catéchisés sont créés. Les catéchistes, les agents pastoraux et

le pasteur sont, ensemble et simultanément, ceux qui permettent l’insertion des catéchisés

dans les célébrations liturgiques et autres activités paroissiales.

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5.10.3 La paroisse, lieu de développement d’une pastorale de

réciprocité catéchétique

Voici une question qui est souvent posée par plusieurs intervenants pastoraux et les

évêques : « La paroisse peut-elle être encore aujourd’hui un lieu de catéchèse »? La

recherche a répondu avec plusieurs nuances à cette question. La paroisse peut être un lieu

de catéchèse, mais selon plusieurs modalités. Elle peut vivre la catéchèse, comme le

souligne Denis Villepelet, selon trois paradigmes. La paroisse a cette particularité qu’elle

est capable de s’adapter aux situations et aux différentes cultures et différents modèles

catéchétiques. La paroisse restera toujours un des lieux privilégiés de la catéchèse sans en

être le seul843.

La paroisse peut changer à la seule condition qu’il y ait un leadership clair et précis sur

l’orientation de la catéchèse. Sans ce leadership, aucun changement n’est possible. Il faut

une volonté diocésaine plus explicite : le diocèse doit apprendre à gérer positivement les

plaintes de diocésains qui veulent demeurer dans une dynamique de consommation et

refuse toute démarche catéchétique. Les diocèses doivent appuyer les équipes paroissiales

afin qu’elles puissent réaliser les objectifs des projets catéchétiques selon les orientations de

La joie de l’Évangile844. Les résistances peuvent être nombreuses, car tout changement fait

peur. Pour vivre un tel changement, cela demande une formation du personnel pastoral, du

personnel de soutien et des principaux bénévoles dans la paroisse. Il y a un besoin

d’apprendre à accompagner les gens dans l’apprentissage aux changements. L’avantage de

la paroisse est son ouverture et sa structure organisationnelle qui permettent à la fois

d’offrir des groupes de cheminement catéchétique variés, un accès à la liturgie dominicale,

des actions de solidarité avec les plus pauvres et l’accompagnement des gens de tous les

âges. Elle est aussi un signe visible de la présence de l’Église, d’une communauté dans un

lieu.

843 DGC, 257. 844 EG, 110-121.

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393

5.10.4 Enjeux des changements de paradigme

Implanter le modèle de la réciprocité catéchétique demande de changer de culture, de

manière de faire; c’est aussi faire un saut dans l’inconnu. La réciprocité catéchétique est un

nouveau modèle ecclésial centré sur l’ecclésiologie de communion et la complémentarité

des ministères. Cela implique d’avoir une vision positive de la société, c’est-à-dire voir la

culture actuelle non pas comme un empêchement à l’évangélisation, mais comme une

opportunité qui, par la réciprocité catéchétique, va permettre un nouveau dialogue avec la

population. C’est un passage qui se vit en équipe car déjà pour le mettre en route, il est

nécessaire que l’équipe de pilotage puisse vivre et témoigner par sa vie que la réciprocité

catéchétique est possible et suscite un approfondissement de la foi.

5.10.5 Proposition pour l’implantation de la réciprocité

catéchétique

Il est évident qu’il n’y a pas de recette magique afin d’implanter la réciprocité catéchétique.

Je présente quelques propositions qui sont davantage de l’ordre de pistes d’action afin

d’aider à instaurer ce modèle catéchétique.

Chaque paroisse est enracinée dans un terroir; elle a son histoire, ses forces, ses faiblesses,

sa culture et un contexte social unique. La première étape, avant toute implantation du

modèle de la réciprocité catéchétique, est de bien connaître la population, son histoire et les

ressources qui la composent. Comme professeur de théologie pratique, je suis toujours

étonné des réponses des étudiants quand je pose cette question : « Combien y a-t-il de

personnes et de catholiques dans ta paroisse de stage? ». Souvent la réponse est : « Je ne

sais pas ». Le premier rôle du pasteur et d’une équipe pastorale paroissiale est de bien

connaître son milieu et les grands enjeux d’évangélisation sur ce territoire.

La deuxième étape du pasteur et de l’équipe pastorale est de décloisonner les activités

pastorales. Souvent, les prêtres, les agents pastoraux et le personnel de soutien travaillent en

silo; chacun accomplit son boulot sans communiquer et rendre compte aux autres et sans

établir de lien avec les autres activités. Il est important de stimuler les rencontres entre les

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différents groupes afin que chacun puisse connaître ce que l’autre réalise. Convoquer une

assemblée paroissiale pour confectionner un projet paroissial à partir des défis de

l’évangélisation, identifier les enjeux pastoraux ensemble avec l’aide d’une ou de deux

personnes ressources apporte souvent un renouveau inédit. C’est l’occasion de réaliser un

plan pastoral qui permet d’insérer la catéchèse au cœur de la mission paroissiale, en ayant

comme finalité la formation de disciples missionnaires par la réciprocité catéchétique.

La prochaine étape est de former le groupe de catéchistes et prévoir des rencontres

régulières de ce groupe avec les membres de l’équipe pastorale et le pasteur. Ce groupe a

comme mission de susciter, planifier, organiser, soutenir, animer et évaluer la réciprocité

catéchétique. Après la constitution du groupe, il est important d’amorcer une formation

ensemble, en présentant la finalité de la catéchèse : devenir des disciples missionnaires. Ce

plan de formation peut s’inspirer de la grille d’André Fossion en ajoutant l’apport des trois

paradigmes décrit par Denis Villepelet.

Cette formation doit déjà entrer dans la dynamique de la réciprocité catéchétique, en

laissant beaucoup de place pour que les gens puissent partager ensemble sur la Parole de

Dieu, leurs expériences en catéchèse, leur expérience de vie. Ces rencontres par les partages

deviennent des occasions de ressourcement spirituel qui peuvent être ponctuées

régulièrement par des célébrations liturgiques et des moments de prière. C’est le temps

d’identifier les talents, les charismes de chacun et de les valoriser.

La prochaine étape, après la formation du groupe de catéchistes, est de former la

communauté paroissiale par les divers moyens de communication, tels le feuillet paroissial,

le prône, par un témoignage et une explication du rôle que l’on attend de la communauté

célébrante. La communauté paroissiale est le lieu d’accueil des nouveaux membres. Elle est

ministre de l’hospitalité et de l’accueil des nouveaux venus.

L’étape suivante est le choix du parcours de catéchèse effectué par le pasteur, l’équipe

pastorale et les catéchistes. Ceux-ci doivent permettre d’insérer les catéchisés dans le

programme tout au long de l’année. Ainsi, on pourra informer les gens et proposer des

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rencontres d’information et, selon les appels de l’Esprit Saint, auprès des futurs

catéchumènes et des futurs catéchisés. Je suggère des rencontres d’inscription individuelle

afin d’être à l’écoute des besoins de chacun. Le dimanche de la catéchèse est une

magnifique occasion de présenter les catéchistes, les catéchisés en cheminement, de

rappeler le rôle de la communauté paroissiale et de célébrer l’action de l’Esprit Saint au

cœur de la paroisse.

La formation des catéchisés est une formation intégrale et systématique qui touche toutes

les dimensions de la personne et de la vie de foi. La catéchèse a pour finalité de devenir des

disciples missionnaires. Elle doit tenir compte des différents destinataires et aussi

reconnaître leurs apports, car c’est là que se joue la réciprocité en catéchèse. Cette

catéchèse est intergénérationnelle et fait une place pour rappeler l’importance de vivre sa

foi dans la famille qui est une Église domestique. On doit valoriser le rôle des parents

comme premiers éducateurs de la foi, les outiller, et ne pas avoir peur d’aborder avec eux

les questions difficiles comme l’éducation et l’accompagnement des enfants.

Il est important de ponctuer les étapes de cheminement par des célébrations, soit en groupe

ou devant la communauté chrétienne qui célèbre le dimanche. C’est au catéchiste, aux

membres de l’équipe pastorale et au pasteur d’accueillir et d’insérer les catéchisés et les

groupes de catéchèse lors des rassemblements dominicaux et des diverses activités de la

paroisse. Les sacrements de l’initiation chrétienne se vivent tout au long du parcours.

Après les célébrations des sacrements de l’initiation chrétienne, c’est le temps de la

mystagogie. Il est essentiel de permettre aux nouveaux baptisés de partager ce qu’ils ont

vécu et de poursuivre l’approfondissement de la foi en groupe, en visitant des sanctuaires,

des monastères, des groupes catholiques, des mouvements. Il est important de revivre les

sacrements à l’église paroissiale, à la maison, dans la nature, etc., en petits groupes.

L’avant-dernière étape est la préparation de l’envoi en mission. C’est à l’envoi missionnaire

que le catéchisé prend la parole et explique son cheminement et actualise un texte biblique

à son groupe de catéchèse, sa famille et ses amis. Cette célébration de la Parole est

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ponctuée de chants, de textes bibliques et de témoignages. Il est important d’insérer une

présentation du nouveau baptisé par le catéchiste et le parrain. Après la présentation du

témoignage et de l’actualisation du texte, il est bien d’avoir un partage en groupe, une

prière universelle et, à la fin, un envoi par le pasteur. Les parcours de catéchèse se

terminent par le rite d’envoi en mission des disciples missionnaires, suivis des agapes

fraternelles.

5.10.6 Un guide pour les parcours des baptisés

L’objectif de devenir disciple missionnaire est nouveau pour l’imaginaire catholique dans

notre contexte. Il peut sembler utopique. Il demande de développer une nouvelle vision de

la catéchèse et de la vie ecclésiale. Est-ce que les gens vont accepter d’entrer dans une

nouvelle culture ecclésiale et de s’ouvrir à un nouveau rite qui sera l’envoi en mission des

disciples missionnaires? Sans faire une analyse systématique, on peut observer que des rites

semblables existent dans des groupes catholiques et d’autres religions. Je prends exemple

de ce qui se vit dans la religion juive avec la « Bar-mitsva ». Il est évident que si l’on veut

que cet objectif de devenir des disciples missionnaires devienne significatif, il est

nécessaire de transformer cet envoi en une fête de la communauté paroissiale et d’une fête

familiale qui s’inscrit dans une nouvelle culture.

Le programme de formation s’adresse à des adultes et peut s’adapter à des jeunes. On

gagne à préciser les objectifs spécifiques et à les énumérer. Par exemple; si on dit qu’il y a

une initiation à la Parole de Dieu, il est important de souligner que l’on va initier les gens à

trouver les passages bibliques, connaître les 73 livres de la Bible, approfondir les 50

principaux textes bibliques, et être capables d’animer un groupe de partage biblique. Avoir

d’autres objectifs clairs et précis, comme par exemple, dire que l’on va approfondir les sept

sacrements, les dix commandements, cinq formes de prière, l’histoire de l’Église du pays,

cinq grandes écoles de spiritualité et la vie d’une quinzaine de témoins de l’Évangile au

cours des âges. La précision des objectifs permet au catéchisé de voir sa progression et

aussi d’ajouter quelques sujets selon ses intérêts et ses besoins.

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397

5.10.7 Donner aux baptisés un alphabet et une grammaire

La catéchèse pour le catéchisé n’est pas une formation finale, elle est seconde après la

première annonce. Elle marque une étape et permet l’autonomie du catéchisé qui devient,

au terme de son parcours d’initiation chrétienne, un disciple missionnaire. L’important est

de lui permettre de maîtriser plusieurs instruments qui vont l’aider à poursuivre son

cheminement. J’ai été touché et je dirais converti par les participants de la recherche-action

qui exprimaient leur désir d’avoir des livres de références pour les aider à réfléchir sur la

catéchèse. Les membres de l’équipe de recherche-action ont souligné qu’ils ne

comprenaient pas pourquoi que, comme catéchistes, ils n’avaient pas eu accès ou été

informés de l’existence du Directoire générale pour la catéchèse. Les catéchistes désirent

avoir des outils de référence comme la Bible, la Catéchisme de l’Église Universelle et le

Directoire général pour la catéchèse pour poursuivre leur formation. Pour eux, ces ouvrages

de référence sont comme des dictionnaires et des grammaires pour ceux qui enseignent les

langues. Nos baptisés veulent s’équiper afin de pouvoir entrer dans une dynamique de

formation permanente. D’autres outils, comme des livres sur l’histoire de l’Église, les

documents du Concile de Vatican II, et les grands écrits spirituels peuvent être

complémentaires. On gagne toujours à développer un peuple qui est capable de rendre

compte de sa foi et de s’enraciner dans le réel du quotidien.

Conclusion du chapitre

Nous arrivons à la fin de l’étape de corrélation. Le travail de confronter une pratique

pastorale avec les sciences humaines, le Magistère, et les travaux d’un théologien pour cette

recherche est exigeant. Il n’est pas facile d’effectuer le va-et-vient avec la pratique et les

autres éléments en présence. Ce dialogue a permis de faire surgir, par une démarche

inductive, toute la richesse de la vie d’une pratique en questionnement qui se remet

littéralement en cause et propose un changement comme voie d’avenir. C’est par ce travail

épistémologique d’interpellation de la pratique d’une communauté paroissiale, et par

l’acceptation de cette démarche que j’ai pu nommer et élaborer un nouveau modèle

ecclésial en catéchèse, celui de la réciprocité catéchétique. Ma contribution est de proposer

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une voie possible de renouvellement de la catéchèse afin que les paroisses puissent devenir

des lieux d’engendrement de disciples missionnaires.

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Conclusion

« Que le disciple fasse part de toute sorte de biens à celui qui lui enseigne la parole. Ne

vous y trompez pas; on ne se moque pas de Dieu. Car ce que l’on sème, on le récolte : qui

sème dans sa chair, récoltera de la chair la corruption ; qui sème dans l’esprit récoltera de

l’esprit la vie éternelle. Ne nous lassons pas de faire le bien; en son temps viendra la

récolte, si nous ne nous relâchons pas. Ainsi donc, tant que nous en avons l’occasion,

pratiquons le bien à l’égard de tous et surtout de nos frères dans la foi »845.

Ce texte exprime bien la dynamique catéchétique. La catéchèse est une pratique

théologique, missionnaire, en continuel mouvement; elle est appelée à suivre la vie, sinon

elle devient un type d’enseignement religieux stérile. La catéchèse accompagne la vie;

comme la liturgie, elle suit les cycles des saisons. L’efficacité catéchistique dépend de sa

capacité de tenir en équilibre à la fois le rythme liturgique et le rythme de la vie des

catéchisés. La réciprocité catéchétique est ce processus qui touche simultanément les

dimensions spirituelle, humaine, ecclésiale, missionnaire et théologique. La réciprocité

catéchétique tient en équilibre les acteurs de la catéchèse, la proclamation de la Parole de

Dieu, le rythme de la liturgie, la vie sociale, l’expression de la culture locale et le

témoignage de foi des acteurs en catéchèse. Elle crée une agora, un lieu d’échanges qui, par

les apports de la Parole de Dieu, des expériences vécues des participants et de la vie de foi

de la communauté paroissiale chrétienne, produit une catéchèse inculturée. Cette

inculturation n’est pas statique, car chaque « nouvelle génération » est une « nouvelle

génération à évangéliser », et donc à catéchiser. La grande difficulté en catéchèse est de

faire le deuil d’une catéchèse statique afin d’adhérer à une catéchèse qui accompagne la

vie.

Tout au long de cette recherche, j’ai abattu les arbres, j’ai essouché, j’ai ramassé les

racines, j’ai hersé, puis j’ai de nouveau ramassé les racines pour en arriver au premier

semis. Je présente les étapes que j’ai vécues au cours de cette démarche doctorale. Après la

845 Ga 6, 6-10.

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présentation d’un premier bilan, je poursuis en indiquant la façon de mettre de la matière

organique dans le sol afin qu’il puisse produire davantage de fruits.

Dans cette conclusion, je décris le chemin de recherche que j’ai parcouru comme

intervenant, mes acquis, mes déplacements. Je présente une recension des cinq chapitres de

la thèse. J’énumère ensuite ce que peut apporter la réciprocité catéchétique à la vie

ecclésiale. Je nomme certaines limites de cette recherche et j’ouvre des pistes pour le

développement de la réciprocité catéchétique.

Les apprentissages de l’intervenant

Cette recherche m’a permis d’approfondir la méthode de la recherche-action. J’ai accepté

que mon intuition de départ soit remise en question et m’amène sur des chemins inconnus.

Au début, j’étais centré sur le besoin réel et criant de la formation des catéchistes bénévoles

en paroisse et leur relation avec l’équipe pastorale. Par la recherche-action, j’ai découvert

que l’enjeu était beaucoup plus grand que les besoins à court terme de l’équipe pastorale. Il

ne suffisait pas de m’améliorer comme formateur de bénévoles et animateur d’une équipe

pastorale, mais d’accepter de remettre en cause ma vision de la catéchèse, de la paroisse et

des acteurs de la catéchèse.

Comme intervenant, je pensais que je pouvais apporter quelque chose de plus à la pratique

catéchétique. J’ai dû accepter que ce ne soit pas seulement moi qui pouvais apporter des

éléments pour le développement de la catéchèse en paroisse, mais également les

catéchistes, les parents, les enfants et les autres acteurs. Le fait de choisir la recherche-

action est déjà un choix ecclésiologique, car il fait appel à une démarche collective qui a

quatre objectifs : recherche, action, formation et transformation. Ces quatre éléments, je les

ai vécus avec les membres de l’équipe de recherche-action. Par cette recherche-action, j’ai

nommé un nouveau concept : la réciprocité éducative. Lors de la recherche-action, j’ai

consulté les catéchistes et les parents; leurs questionnements, leurs affirmations m’ont

permis de passer d’une conception de la catéchèse classique, tridentine et scolaire à une

vision plus dynamique et interactive. Cette recherche-action m’a formé comme chercheur

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en m’habilitant à réaliser une meilleure corrélation entre la pratique catéchétique et les trois

référents que j’ai choisis : la réciprocité éducative, les dernières avancées du Magistère sur

la catéchèse et la thèse de Denis Villepelet sur la complexité dans la catéchèse.

Cette recherche-action m’a transformé. Comme pasteur, j’ai accepté de voir la réalité et

reconnaître que, souvent et inconsciemment, nous sommes une simple courroie de

transmission d’un modèle dont nous avons hérité. Malgré nos critiques du système

catéchétique actuel, nous nous trouvons à être des complices du statu quo pastoral dans nos

milieux paroissiaux et diocésains.

Devenir agent de changement, cela ne s’improvise pas, mais se prépare et demande du cran,

de l’audace, de la stratégie, un plan d’intervention, de la souplesse et de la patience. Cette

recherche m’a montré que le changement des pratiques catéchétiques demande de la

préparation. Un vrai changement se vit en équipe et requiert l’appui des autorités

ecclésiales. Il touche l’ensemble de la paroisse; il exige un changement de culture

institutionnelle et ecclésiologique. Sans cette préparation et cette formation antécédentes, il

y a le risque de faire seulement du rapiéçage. Tout rapiéçage est risqué, car on peut déchirer

à la fois le vieux tissu et perdre tout, comme l’indique la parabole de l’Évangile :

Personne ne rajoute une pièce de drap non foulé à un vieux vêtement ; car le

morceau rapporté tire sur le vêtement et la déchirure s’aggrave. On ne met pas

non plus du vin nouveau dans des outres vieilles ; autrement, les outres

éclatent, le vin se répand et les outres sont perdues. Mais on met du vin

nouveau dans des outres neuves, et l’un et l’autre se conservent 846.

Comme intervenant pastoral en paroisse j’ai pu expérimenter ce que décrit le groupe de

Paul Watzlawick, John Weakland et Richard Fisch sur leur théorie des changements847.

Paul Watzlawick est un théoricien de la communication et un membre fondateur de l’École

de Palo Alto en Californie. John Weakland a été professeur au département de psychiatrie

846 Mt 9, 16-17. 847 Paul Watzlawick et al., Changements: Paradoxes et psychothérapie, Points; 130. Anthropologie, sciences

humaines (Paris : Éditions du Seuil, 1981).

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de la faculté de Médecine de l’Université de Stanford et membre de l’École de Palo Alto.

Richard Fisch est psychiatre aux États-Unis et membre fondateur de l’École de Palo Alto.

L’école de Palo Alto comprend un groupe de personnes qui, en Californie, a travaillé sur la

communication et les relations entre les individus en développant une approche systémique.

Le groupe de Paul Watzlawick décrit deux types de changements; le premier est un

changement à l’intérieur de l’organisation interne qui pourra améliorer la pratique, mais

sans changer l’ensemble, ce qu’il nomme le changement de type 1. Il parle ainsi d’un

changement de type 2 où l’on transforme des éléments du système, ce qui modifie le

système en lui-même :

Si nous acceptons de faire cette distinction fondamentale entre ces deux

théories nous en déduisons l’existence de deux sortes de changements : l’un

prend place à l’intérieur d’un système donné qui, lui reste inchangé, l’autre

modifie le système lui-même848.

La réciprocité catéchétique n’est pas un changement de type 1, mais elle exige bien un

changement de type 2, qui remet en question l’organisation de la paroisse, son

fonctionnement et les rôles de chacun. Choisir un parcours catéchétique ne renouvelle pas

nécessairement la pratique catéchétique, mais l’aménage différemment tout en gardant

intactes la structure et la vie paroissiales. La réciprocité catéchétique est un changement de

type 2, qui demande une transformation des rôles des différents acteurs et des structures

paroissiales. Cette recherche m’a permis de découvrir que comme intervenant, les

changements de type 2 demandent un leadership, une préparation, des outils de formation

des différents acteurs et de la communauté paroissiale, et de la résilience.

Par cette recherche-action, j’ai découvert à la suite des réflexions de Joseph Colomb et

plusieurs autres que la catéchèse est une sous-discipline de la théologie pratique. Comme

théologien pratique, j’ai vu l’importance d’avoir une bonne épistémologie, une

connaissance détaillée de la pratique, une connaissance historique, et d’être capable de faire

dialoguer la théologie et les sciences sociales. La corrélation, qui est une importante étape

848 Ibid., 28.

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de la méthode que j’ai utilisée, demande une rigueur épistémologique, car le dialogue entre

les différentes sciences, la théologie et les apports de la pratique crée un nouveau savoir, un

artéfact théologique.

J’ai aussi fait le constat, comme le souligne Jean-Marc Charron, de l’absence d’expertise

des intervenants ecclésiaux à tous les niveaux en paroisse. La majorité des intervenants

pastoraux, prêtres, agentes et agents de pastorale, diacres permanents, catéchistes et

bénévoles sont, sauf quelques rares exceptions, des novices qui ne connaissent que la

préparation aux sacrements.

Au cours de cette recherche, je suis devenu un chercheur plus aguerri. J’ai pu voir

l’importance d’utiliser un protocole de recherche. Cet instrument donne des opportunités de

se laisser interpeller par les nouveaux éléments qui surgissent lors d’une démarche de

recherche. J’ai pu constater l’importance des petits groupes comme lieu d’apprentissage et

d’intégration de la foi chrétienne. Ils sont le lieu où chacun peut apporter son savoir

d’expérience, quel que soit son âge. Par les échanges, il y une dynamique de confrontation

des idées et des points de vue qui, à l’aide de l’Évangile, permet un approfondissement de

la Parole de Dieu et un appel à la conversion en Jésus Christ. Cet appel à la conversion

devient l’élément moteur qui permet de passer de l’état du consommateur religieux à celui

d’acteur chrétien en catéchèse, et de disciple missionnaire.

Comme intervenant, j’ai découvert que ce passage, cette transformation intérieure et

communautaire provoquée par des échanges réciproques sur la Parole de Dieu, ne peuvent

se vivre que si l’on accompagne les gens en communauté et durant un laps de temps

prolongé. La conversion et l’appropriation du don de la foi se vivent en communauté par le

soutien de témoins et par l’échange avec eux. Par cette dynamique, le candidat se sent

reconnu comme membre à part en entière; il découvre que son expérience est un apport à la

communauté chrétienne. La communauté chrétienne, par l’accueil des témoignages des

nouveaux et de leur savoir d’expérience, est également interpellée à se convertir. Pour que

cela puisse s’instaurer dans la paroisse, j’ai découvert que le pasteur doit d’abord appuyer

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ces initiatives, mettre la main à la pâte et s’investir. Le rôle et le leadership du pasteur sont

déterminants pour la paroisse.

Un autre aspect que j’ai découvert comme intervenant et comme prêtre, est l’importance du

Ministère de la Parole. Le prêtre a trois fonctions dans l’Église : il est ministre de la Parole

de Dieu, il sanctifie par la présidence de la célébration des sacrements et l’animation de la

prière, et il est appelé à guider la communauté paroissiale849. Trop souvent la pratique du

ministère ordonné est centrée presque exclusivement sur la célébration des sacrements. La

réciprocité catéchétique demande aux ministres ordonnés de redécouvrir l’importance du

leadership et d’assumer leur ministère de la Parole de Dieu. La Parole de Dieu précède les

sacrements. Sans la Parole de Dieu, les sacrements perdent de leur efficacité et leur sens. La

célébration des sacrements n’est pas un but en soi, mais bien une étape dans le

cheminement d’un candidat qui veut devenir disciple missionnaire. Le prêtre, à l’image de

Jésus, est invité à retrouver les attitudes et les aptitudes de Jésus pour l’annonce du

Royaume de Dieu. C’est après cette annonce du Royaume que la célébration des

sacrements prend un sens et devient source et sommet de la vie chrétienne850.

Retour sur les étapes de la thèse

Le premier chapitre de la thèse illustre le chemin que j’ai parcouru. À partir de mon

intuition, la méthode choisie m’a permis de m’ouvrir à d’autres perspectives. La dynamique

de la recherche-action a permis de préciser la problématique par le va-et-vient entre la

théorie, la pratique et les apports des cochercheurs, des catéchistes et des parents; cela m’a

interpellé à changer d’itinéraire à deux reprises. Ces changements de cap ont été possibles,

car j’avais les outils méthodologiques afin d’accueillir et recueillir des nouvelles données

qui m’ont conduit vers de nouveaux horizons, et qui m’ont aidé à identifier la réciprocité

catéchétique. La recherche-action permet d’entrer dans l’élaboration de nouveaux savoirs

en faisant dialoguer la pratique, le savoir d’expérience et les autres référents que j’ai

utilisés.

849 PO, 4-6. 850 SC, 10.

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Le deuxième chapitre m’a offert la possibilité d’observer, de nommer la pratique et les

problématiques liées à la question catéchétique dans la pratique paroissiale. Comme

intervenant, j’ai vécu une introspection sur ma façon d’agir et ma propre perception du

milieu. J’ai pu confirmer que la paroisse était composée de différents quartiers très

différents les uns des autres, mais qu’en général, son visage était proche de la réalité

québécoise avec cette particularité que les personnes âgées se concentrent autour des

églises Sainte-Thérèse d’Avila et Sacré-Cœur. Les populations plus aisées et propriétaires

sont dans les quartiers périphériques construits plus récemment.

Pour ce qui est de la vie interne de la paroisse, j’ai eu plusieurs surprises. La première a été

de constater que l’on n’avait pas de liste commune de catéchistes, et que chacune des

animatrices pastorales travaillait en silo, gardant pour elle ses catéchistes et ses bénévoles

de peur de se les faire voler par les autres membres de l’équipe. J’ai pu observer que

l’équipe pastorale n’était pas prête à prendre le tournant catéchétique; un certain nombre

n’en voyait pas la nécessité. J’ai pu constater que la distanciation de la population

catholique avec l’Église s’est initiée avant la Révolution tranquille. Cet écart entre les gens

et l’Église institutionnelle s’est affermi après les années soixante et ne va qu’en grandissant

depuis l’an 2001. De nombreux parents ne présentent plus leurs enfants pour le baptême.

L’identification à l’Église catholique diminue presque d’un point de pourcentage par année.

On peut résumer que la pratique pastorale paroissiale étudiée est une pastorale d’entretien

qui se cherche et essaie de trouver des voies pour sortir du modèle de l’encadrement; il

s’agirait d’arriver plutôt à une pastorale d’accompagnement du cheminement spirituel des

gens. Les structures internes de la paroisse fonctionnent davantage dans une dynamique

d’exclusion que d’inclusion. En prenant du recul, je m’aperçois que la paroisse n’était pas

prête pour l’implantation des parcours catéchétiques, les intervenants, les bénévoles et

paroissiens n’étaient pas préparés à un tel changement.

Dans le troisième chapitre, à partir du choix de la méthode de recherche, de l’identification

de la problématique, et des recommandations de l’équipe de recherche-action, je me suis

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posé cette question : au cours de l’histoire, quels ont été les acteurs de la catéchèse? J’ai

réalisé une lecture historique des diverses pratiques catéchétiques afin d’identifier les

acteurs. J’ai découvert comment, selon les périodes, les acteurs ont changé. Au début de

l’histoire de l’Église, on catéchise des adultes. Les catéchistes, qui peuvent être des laïcs ou

des ministres ordonnés, vivent en lien très étroit avec la communauté chrétienne. Durant les

premiers siècles, les parrains et marraines accompagnent les catéchisés tout au long de leur

démarche. La démarche prend quelques années et demande une conversion radicale au

catéchumène.

Au Moyen Âge, la catéchèse se vit par osmose. On est catéchisé en participant à la vie du

village. Les parents ont un rôle à jouer; ce sont eux qui, aidés des parrains et des marraines,

apprennent à leurs enfants les rudiments de la foi. La catéchèse se vit au rythme de la vie

familiale et villageoise. Les moyens pédagogiques sont variés : la liturgie, les fêtes du

village, la vie familiale, la musique et l’art.

La période de la Réforme protestante et catholique a été marquée par une

professionnalisation de la catéchèse. Les pasteurs, les prêtres, les religieux et religieuses ont

pris le relais. La méthode de l’enseignement a été privilégiée. Le catéchisme a servi d’outil

d’alphabétisation et d’accès à la lecture et à l’écriture pour un très grand nombre de

catéchisés.

Vers le début du vingtième siècle, il y a eu l’essoufflement du modèle tridentin. La

redécouverte de l’importance de la Bible, de la liturgie, des écrits des Pères de l’Église et

des nouvelles pédagogies a conduit à la création du renouveau catéchétique.

Cette lecture diachronique a permis d’identifier la multiplicité des acteurs au cours de

l’histoire. La catéchèse se développe quand il y a une synergie, une alliance entre les

différents acteurs de la catéchèse, le catéchisé, les autres acteurs et la communauté

chrétienne.

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J’ai identifié plusieurs constats avec la lecture synchronique en comparant différentes

expériences récentes de catéchèse dans quelques pays du monde :

• l’importance que la catéchèse soit une priorité pour la paroisse, sans que celle-ci

ne prétende en être le lieu exclusif dans l’Église;

• le manque de formation des ministres ordonnés, des catéchistes et des parents pour

réaliser la catéchèse;

• le dialogue nécessaire entre la catéchèse et la culture actuelle;

• l’importance d’un projet catéchétique local qui peut compter sur un noyau de

paroissiens solide pour fonder la pratique de la catéchèse;

• la nécessité d’avoir des relations effectives et affectives entre les catéchisés, les

catéchistes, les prêtres, les paroissiens et la communauté chrétienne qui célèbre le

dimanche.

La revue de la littérature m’a aussi permis de voir la nécessité de l’interaction entre les

acteurs du lien organique nécessaire avec la communauté chrétienne et de la clarification

des objectifs de la démarche catéchétique. La revue de littérature fait ressortir le rôle

essentiel du catéchisé, du ministère des parents envers leurs enfants, du ministère des

catéchistes et de celui des prêtres pour la catéchèse.

Au chapitre quatre, je présente le résultat de l’analyse de la cueillette des données de la

recherche-action. Cette étape a été l’occasion de faire ressortir le vécu des gens qui

participent à la démarche catéchétique. Un premier constat est la reprise de l’expression

« catholicisme honteux » utilisée par Gilles Routhier afin de décrire les enjeux de la

catéchèse à l’aube du troisième millénaire851. Les cochercheurs arrivent à la conclusion

qu’il est important de dépasser cette perception du catholicisme honteux. Ils affirment qu’il

ne peut y avoir de nouvelle évangélisation si on ne dépasse pas le catholicisme honteux. Le

deuxième constat est d’accepter que l’Église se trouve en marge de la société. Les

communautés chrétiennes sont des minorités dans la société actuelle. L’analyse des

851 Gilles Routhier, « L'initiation chrétienne au Québec : ou de la difficulté d'enfanter ».

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données m’a permis d’effectuer un saut épistémologique. Au point de départ, je me situais

comme un acteur qui avait à former et apporter un contenu et proposer des animations afin

d’accompagner les catéchisés dans leur démarche de foi. L’équipe de recherche a découvert

que, pour entrer en dialogue avec les gens afin de commencer à cheminer ensemble, il était

nécessaire de découvrir ce qu’ils pouvaient apporter à la démarche catéchétique.

Les catéchisés ne doivent pas être les objets de la pratique catéchétique, mais bien des

sujets actifs et des collaborateurs. Nous avons changé notre perception des personnes qui

demandent de les accompagner dans l’initiation chrétienne. On s’est dégagé de l’image que

les gens étaient seulement des consommateurs de rites religieux. Le fait de s’inscrire ou

d’inscrire leurs enfants dans le contexte actuel était déjà un engagement. Entendre « Je

désire que mes enfants connaissent la foi de leurs parents et de leurs grands-parents » n’est

pas seulement une question folklorique, mais bien le choix de s’inscrire dans une tradition

qu’ils demandent à connaître tout en indiquant très clairement qu’ils ne veulent pas des

catéchèses moralisatrices.

Le groupe de catéchèse est un groupe, un jalon entre la vie du monde et la communauté

chrétienne paroissiale. Le catéchiste est un trait d’union entre les catéchisés et la

communauté chrétienne. La visite périodique du prêtre dans les groupes de catéchèse (par

exemple quatre fois dans l’année) répond au désir de dialoguer avec lui; par sa présence, il

confirme l’importance du groupe de catéchèse. Le groupe de catéchèse est un lieu

théologique instituant. Il est le hall d’entrée de la communauté chrétienne de la même

manière que le catéchuménat l’a été au début de l’Église.

Les catéchistes bénévoles ont précisé leurs attentes pour exercer le ministère de catéchiste.

Ils veulent travailler ensemble en équipe. Ils demandent de former un corps de catéchistes

où ils peuvent s’entraider selon leurs charismes. Dans l’organisation paroissiale, ils

souhaitent être reconnus comme partenaires de l’équipe pastorale et développer un lien

affectif avec le pasteur. Les catéchistes demandent d’être présentés à la communauté et

envoyés en mission catéchétique tous les ans afin que la communauté chrétienne paroissiale

prie pour eux, et qu’elle devienne accueillante pour tous les catéchisés.

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La recherche-action a confirmé cette hypothèse de départ de l’importance de la catéchèse

intergénérationnelle. La présence d’un adulte significatif atteste auprès de l’enfant en

cheminement la valeur de la catéchèse et son authenticité. Le fait de rencontrer d’autres

jeunes et d’autres adultes qui cheminent dans la foi permet au jeune de sortir de son

isolement dans son cheminement de foi; on découvre le même phénomène chez les

adolescents et les adultes.

Le groupe de catéchèse devient le lieu d’échange sur la Parole de Dieu. Les parents et les

enfants souhaitent que l’on utilise différents moyens pédagogiques pour approfondir la

Parole de Dieu : la narration, l’enseignement, les partages, les sketches bibliques, le dessin,

les chants, les jeux… Il est important que l’on puisse s’inspirer de la culture actuelle pour

illustrer les textes bibliques et la Tradition de l’Église. Ce qui m’a étonné est l’insistance

d’avoir quelques textes seulement par rencontre de catéchèse afin de pouvoir les

approfondir et d’avoir le temps de le partager ensemble. Cette interaction entre les

différents acteurs permet d’habiliter le catéchisé à témoigner de sa foi. L’analyse des

données recueillies par la recherche-action arrive à quelques éléments :

• le but de la catéchèse est de former des disciples témoins;

• tous sont des acteurs en catéchèse;

• le groupe de catéchèse est un lieu instituant permettant d’approfondir la Parole de

Dieu, de se l’approprier et d’en devenir des témoins;

• la catéchèse se renouvelle par la formation des disciples et cela demande la

reconnaissance du rôle des catéchisés, des parents, des catéchistes, des prêtres et de

la communauté chrétienne.

La demande explicite du comité de recherche-action est de faire le passage d’une catéchèse

enseignante en marge de la communauté chrétienne et axée sur la préparation aux

sacrements, à une catéchèse d’initiation. Celle-ci forme des disciples témoins au cœur

même de la paroisse, elle la renouvelle et lui permet de rayonner dans la société actuelle.

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C’est à partir des conclusions de l’analyse des données que j’ai établi une triple corrélation

au chapitre cinq. J’ai utilisé trois référents précis : le concept de réciprocité éducative, les

récents apports du Magistère depuis le Concile Vatican II sur la question catéchétique, et la

thèse de Denis Villepelet sur les défis de la transmission dans un monde complexe. Le va-

et-vient entre la pratique et les trois référents m’a permis de mieux cerner le concept qu’est

la réciprocité catéchétique. Le concept de la réciprocité catéchétique s’inscrit dans le

troisième paradigme de la typologie de Denis Villepelet. C’est un concept ajusté pour le

monde contemporain. Il propose une catéchèse d’initiation chrétienne qui se vit par un

« bain ecclésial », c’est-à-dire par une insertion dans une communauté confessante, vécu au

sein du groupe de catéchèse et dans la communauté dominicale. La réciprocité catéchétique

est la reconnaissance que la foi est un don de Dieu, que l’action du Ressuscité se poursuit

par les échanges dans les petits groupes. Ces partages permettent d’expérimenter la

présence de Dieu au milieu du groupe de catéchèse et de faire l’expérience de la vie

ecclésiale. Le contact et l’insertion dans la communauté chrétienne paroissiale qui célèbre

le dimanche sont l’ouverture à l’universalité de l’Église.

La réciprocité catéchétique reconnait que chaque catéchisé qui frappe à la porte devient un

élément du renouvellement de la communauté paroissiale. C’est le même phénomène qui se

vit dans une famille qui accueille un nouveau-né. La réciprocité catéchétique permet aux

catéchisés et aux autres acteurs de la catéchèse de s’approprier la Tradition chrétienne. Par

le partage de la Parole de Dieu, des savoirs d’expérience de chacun, de la découverte de la

Tradition de l’Église en lien avec l’Église Universelle, on permet une démocratisation du

savoir et l’accès à l’approfondissement de la foi non pas seulement par une petite élite, mais

par tout le Peuple de Dieu.

Le chapitre cinq présente comment la pratique a de nombreux points communs avec le

Magistère, avec les principes de la réciprocité éducative et avec les travaux théologiques de

Denis Villepelet. La réciprocité catéchétique est l’affirmation que les découvertes sur

l’évangélisation et la catéchèse réalisées depuis Vatican II doivent être accueillies et reçues.

La crise actuelle de la catéchèse est l’épiphénomène de réception des principes

catéchétiques développés par le Synode de la catéchèse, les Directoires sur la catéchèse, le

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document d’Apparecida et Evangelii Gaudium. C’est aussi la demande criante d’utiliser

une autre manière de catéchiser, c’est-à-dire de passer de la méthode d’enseignement

magistral à une démarche initiatique avec tout ce que cela comporte.

Une recherche fondamentale sur la catéchèse

Cette recherche-action dans ce projet de théologie pratique est une démarche inductive. À

partir du moment où j’ai décrit la pratique et nommé la problématique catéchétique, je suis

entré dans une démarche de recherche fondamentale sur la catéchèse. Le travail de

recherche à partir de la pratique m’a obligé à effectuer des recherches dans l’histoire de

l’Église, à analyser et étudier différentes expériences dans d’autres contextes, à relire et

approfondir les textes du Magistère et à mettre tout cela en dialogue avec la réciprocité

éducative et les apports de Denis Villepelet. Cela m’a permis de cerner davantage que la

catéchétique est un lieu théologique et une sous-discipline de la théologie pratique. Cette

thèse est un approfondissement, un apport à la réflexion théologique sur la catéchèse.

Les apports de la réciprocité catéchétique à la vie de l’Église

Le concept de la réciprocité catéchétique est un retour aux fondements de la catéchèse dans

ses origines. La catéchèse, c’est faire résonner la Parole de Dieu. J’ai découvert comment,

par les échanges sur la Parole de Dieu par les participants dans le groupe de catéchèse, la

Parole de Dieu devient performatrice. Ce n’est pas magique, cela demande de bâtir un

climat de confiance et de respect entre les membres du groupe de catéchèse. Le témoignage

et le lien des catéchistes avec la communauté deviennent essentiels. Cette expression de la

vie chrétienne permet aux catéchisés de découvrir que le cheminement de foi est accessible

pour eux aussi. C’est à partir du témoignage des catéchistes que les gens commencent à

partager leur propre expérience. Ils échangent leurs expériences et, par la suite, font des

liens entre leur propre existence et la Parole de Dieu.

La réciprocité catéchétique, c’est aussi de développer une attitude inclusive chez le prêtre,

les agents pastoraux et la communauté paroissiale qui se rassemble le dimanche. Pour les

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catéchisés, le prêtre est le signe de la présence de Dieu. Ils associent son accueil à celui de

Dieu pour eux.

La réciprocité catéchétique permet de découvrir l’importance du rôle du prêtre dans

l’insertion des catéchisés dans la communauté, et aussi de l’attitude des membres de la

communauté envers les nouveaux. Le catéchisé a des attentes semblables aux attitudes

décrites dans les premiers chapitres des Actes des Apôtres :

Alors, ceux qui avaient accueilli la parole de Pierre furent baptisés. Ce jour-là,

environ trois mille personnes se joignirent à eux. Ils étaient assidus à

l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain

et aux prières. La crainte de Dieu était dans tous les cœurs à la vue des

nombreux prodiges et signes accomplis par les Apôtres. Tous les croyants

vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; ils vendaient leurs biens et

leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous en fonction des

besoins de chacun. Chaque jour, d’un même cœur, ils fréquentaient assidûment

le Temple, ils rompaient le pain dans les maisons, ils prenaient leurs repas avec

allégresse et simplicité de cœur ; ils louaient Dieu et avaient la faveur du

peuple tout entier. Chaque jour, le Seigneur leur adjoignait ceux qui allaient

être sauvés852.

La catéchèse, activité centrale de la paroisse, comme lieu

d’initiation, d’expérimentation et d’inscription dans une

tradition

La réciprocité catéchétique demande un changement d’attitude pour les membres internes

de la paroisse. Ils ont à se convertir et reconnaître chez ceux qui se présentent à la paroisse

pour l’initiation chrétienne qu’ils ne sont plus seulement des consommateurs, des

exploiteurs ou des gens qui ne savent pas ce qu’ils font. Les catéchisés sont des partenaires.

J’ai découvert que, maintenant, les demandes pour l’initiation chrétienne sont des choix

libres liés à plusieurs significations dont, entre autres, une recherche spirituelle profonde. Il

est nécessaire de créer un partenariat entre les catéchisés et les autres acteurs en paroisse et

à s’entendre sur les objectifs à atteindre.

852 Ac 2, 41-47.

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413

La réciprocité catéchétique, c’est de s’inscrire dans une démarche d’initiation chrétienne

qui a plusieurs objectifs et touche plusieurs savoirs : savoir, savoir-faire, savoir-être et

savoir transmettre. Tous les adultes, les jeunes adultes et les parents qui inscrivent un de

leurs jeunes veulent connaître le parcours. Quel est son début? Quels sont les objectifs à

atteindre? Combien de temps cela peut-il prendre? Il est important que les objectifs soient

clairs afin de permettre aux catéchisés de ne pas être seulement des consommateurs, mais

aussi des acteurs et participants vers l’atteinte des objectifs.

Par la réciprocité catéchétique, la paroisse devient un lieu d’initiation. Un des critères pour

reconnaître une paroisse doit être sa capacité à créer un bain initiatique au cœur de la

communauté paroissiale et du rassemblement dominical.

L’éclatement de la vision catéchétique comme activité limitée à

l’enseignement

La réciprocité catéchétique se situe dans le troisième paradigme décrit par Denis Villepelet.

La pédagogie privilégiée est celle de l’initiation qui fait néanmoins appel à l’enseignement

et à l’apprentissage. Le bénéfice avec la réciprocité catéchétique est l’utilisation de

plusieurs pédagogies et de l’andragogie. Le catéchisé vit une expérience qui touche à la fois

ses cinq sens et il s’inscrit dans une tradition, une culture particulière qui est en lien avec la

vie locale. Grâce aux catéchisés, la réciprocité catéchétique permet l’émergence d’une

nouvelle expression du christianisme, qui se transforme et qui dialogue avec la culture dans

une fidélité toujours renouvelée à l’Évangile. C’est une dynamique de tradition vivante qui

exprime toujours son lien avec l’événement fondateur du Christianisme, la Mort et la

Résurrection du Christ. Cette tradition propose des expressions variées qui permettent de

suivre le langage de l’époque où l’on tire à la fois du bon des vieilles traditions et des

nouveautés de l’inédit, produit par les échanges entre les acteurs de la catéchèse.

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Les limites de la recherche et de la réciprocité catéchétique

L’évangélisation touche plusieurs aspects de la vie de foi. Elle est un processus complexe

composé de plusieurs éléments :

Le processus d’évangélisation est, par conséquent, organisé en étapes ou

« moments essentiels » : l’activité missionnaire pour les non-croyants et pour

ceux qui vivent dans l’indifférence religieuse ; l’activité catéchistique

d’initiation pour ceux qui choisissent l’Évangile et pour ceux qui ont besoin de

compléter ou de restructurer leur initiation ; et l’action pastorale pour les

fidèles chrétiens ayant déjà atteint la maturité au sein de la communauté

chrétienne. Ces moments ne constituent pas des étapes définitives : ils sont à

reprendre, si nécessaire, puisqu’ils apporteront la nourriture évangélique la plus

adaptée à la croissance spirituelle de chaque personne ou de la communauté

elle-même853.

La réciprocité catéchétique est située dans le moment essentiel que l’on nomme l’activité

catéchistique d’initiation. Elle accompagne des personnes qui ont choisi de vivre l’Évangile

et veulent compléter leur initiation chrétienne. La réciprocité catéchétique n’est pas une

démarche d’éveil à la foi et de première annonce. Elle est issue de l’accueil d’une première

annonce dans le cœur des gens qui veulent poursuivre le chemin de conversion et s’engager

à suivre le Christ. Ce n’est pas une démarche pour approfondir la foi après avoir été initié;

cela fait partie de la maturation de la foi et de la nécessité pour les disciples missionnaires

de s’investir pour être les meilleurs témoins du Christ dans leur milieu de vie.

Une paroisse est appelée à animer et à proposer ces trois moments essentiels du processus

d’évangélisation. Elle s’associe avec d’autres communautés si elle n’a pas la force d’offrir

la première annonce et l’initiation chrétienne avec ses ressources, c’est-à-dire la réciprocité

catéchétique et la maturation de la foi. Il est nécessaire de perdre cette illusion que l’on peut

offrir une activité expresse ponctuelle qui va offrir la possibilité de donner au catéchisé la

première annonce, l’initiation chrétienne et la maturation de la foi en quelques heures. On

tombe dans la dynamique de consommation avec le tout inclus.

853 DGC, 49.

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La réciprocité catéchétique demande du temps et un changement. La paroisse délaisse son

statut de comptoir de service afin d’offrir le processus d’évangélisation en trois moments

distincts et en interaction; son centre est l’initiation chrétienne avec comme but déclaré de

proposer aux catéchisés de devenir des disciples missionnaires.

La réciprocité catéchétique et les possibilités de développement

pour l’avenir

La réciprocité catéchétique ne s’improvise pas. Elle demande d’abord que le leader, le

pasteur de la communauté paroissiale, en fasse l’option et qu’il soit appuyé par son évêque.

C’est déjà un défi. S’investir dans la réciprocité catéchétique est également d’accepter de

faire le deuil de la pastorale paroissiale comptoir de service. C’est gérer de nombreuses

résistances et même des incompréhensions même si nous savons tous dans l’Église que ce

modèle ne porte pas les fruits escomptés, et que cela va à l’encontre des derniers

développements du Magistère et de la recherche spirituelle du monde contemporain. Il est

plus facile de se conforter dans un modèle qui ne demande pas une conversion personnelle,

que d’accepter d’entrer dans une dynamique synodale et dans les échanges vécus par les

catéchisés et les catéchistes, et être soi-même catéchisé et transformé.

La réciprocité catéchétique par la formation de disciples missionnaires va remobiliser la

paroisse et lui permettre de connaître un nouvel élan. Elle s’inscrit dans une dynamique de

croissance et non pas de gestion de la décroissance. La réciprocité catéchétique, c’est aussi

de se rappeler que les destinataires sont les catéchisés et que la paroisse doit être orientée

pour annoncer le Royaume et non pour gérer la décroissance du nombre de prêtres et tout

adapter la vie de l’Église en fonction seulement de leur nombre. C’est entrer dans une

formation permanente des prêtres et des agents de pastorale qui deviennent des formateurs

de catéchistes et de bénévoles pour l’initiation chrétienne; c’est reconnaître le ministère du

catéchiste et lui donner les espaces, les locaux et les budgets nécessaires, et c’est de l’aider

dans l’exercice du ministère de la Parole de Dieu. C’est également reconnaître les adultes

qui se présentent de même que les parents qui inscrivent leurs enfants comme des

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partenaires de la réciprocité catéchétique. C’est transformer la paroisse, qui est trop souvent

un centre de distribution des sacrements, en un lieu de l’exercice du ministère de la Parole

où tous sont acteurs.

La réciprocité demande de s’inscrire dans une stratégie de changement du système. Un

changement de système de culture ecclésiale, de culture presbytérale, et de culture

d’animation des communautés demande une formation, un plan stratégique et un acte de

foi.

Mot de la fin

Cette thèse m’a permis de défricher, d’essoucher, de herser, d’enlever les racines et de faire

le premier semis qui a donné un fruit, celui de la réciprocité catéchétique. Maintenant, il me

reste à le développer, à engraisser le sol de matières organiques; cela veut dire de

l’expérimenter et de le perfectionner afin qu’il puisse donner des fruits à trente, soixante,

cent pour un.

Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce du Christ Jésus. Ce que tu as

appris de moi sur l’attestation de nombreux témoins, confie-le à des hommes

sûrs, capables à leur tour d’en instruire d’autres. Prends ta part de souffrances,

en bon soldat du Christ Jésus. Dans le métier des armes, personne ne

s’encombre des affaires de la vie civile, s’il veut donner satisfaction à qui l’a

engagé. De même l’athlète ne reçoit la couronne que s’il a lutté selon les

règles. C’est au cultivateur qui travaille dur, que doivent revenir, en premier

lieu, les fruits de la récolte. Comprends ce que je veux dire. D’ailleurs le

Seigneur te fera tout comprendre854.

854 2 Tim 2,1-7.

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24&Data=Count&SearchText=mirabel&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=

All&Custom=.

———. Profil des communautés, ville de Rosemère 2006 [visité le 11 mars 2009]

Accessible à http://www12.statcan.ca/census-recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/Page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2474005&Geo2=PR&Code2=

24&Data=Count&SearchText=mirabel&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=

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———. Profil des communautés, ville de Sainte-Thérèse Gouvernement du canada, 2006

[visité le 11 mars 2009] Accessible à http://www12.statcan.ca/census-

recensement/2006/dp-pd/prof/92-

591/details/page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2473010&Geo2=PR&Code2=

24&Data=Count&SearchText=Sainte-

Thérèse&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=All&Custom=.

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436

Annexe 1 : Protocole de Recherche

Université Laval

Faculté de théologie

et de sciences religieuses

Doctorat en théologie pratique

Examen de doctorat en théologie pratique

Volet prospectif : Protocole de recherche

THL-66114

Présenté à Céline Roussin

Préparé par Guy Guindon

Directeur de thèse : Alain Faucher

Sujet de thèse : « Quels sont les enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation des

catéchètes bénévoles par l’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila dans le

diocèse de Saint-Jérôme? »

Le 4 septembre 2006

Numéro de dossier : 03 132 784

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437

1. Introduction

La paroisse est une réalité qui est en pleine transformation. Elle vit au cœur d’une société.

Elle est en interaction continuelle avec elle. Même si nous vivons dans une société qui a

consacré la séparation de l’Église et de l’État, la paroisse ne vit pas dans un vase clos. Les

choix de société ont des répercussions directes sur la vie interne des communautés. Ma

recherche se veut un apport pour aider les paroisses à relever le défi de l’implantation des

parcours de catéchèse suite à la fin récente de l’éducation catholique publique au Québec.

Ce nouveau défi a des impacts importants sur les équipes pastorales paroissiales. J’ai choisi

d’étudier plus particulièrement les enjeux ecclésiologiques et pastoraux du recrutement et

de la formation des catéchètes bénévoles par l’équipe pastorale.

Dans ce travail je présenterai mon protocole de recherche. Il sera constitué de quatre étapes.

Dans une première étape, je présenterai le milieu de l’intervention, les différents acteurs qui

seront sollicités pour la recherche, la problématique de départ et la question de la recherche.

La deuxième étape sera la présentation de la méthodologie de recherche et la pertinence de

ce choix pour l’étude que je veux poursuivre. Nous poursuivrons, à l’étape suivante, en

décrivant le cadre opérationnel de la recherche et je présenterai la planification prévue pour

réaliser ce projet. La dernière étape consistera à présenter comment les résultats de la

recherche peuvent être utilisés afin de compléter la thèse. Ce travail se veut la présentation

d’une aventure qui j’espère permettra de faire avancer la réflexion.

2. Conceptualisation du problème à l’étude

La catéchèse est un nouveau défi à relever. Jean-Marc Charron, dans une conférence qu’il a

donnée à Paris sur la problématique que vivait le Québec, s’exprimait ainsi sur le défi de la

formation à la vie chrétienne :

Encore une fois, il s'agit pour nous de reprendre en main une responsabilité que depuis

plus de vingt ans nous avons abandonnée à l'État. En pratique, cela signifie se redonner

des lieux d'expertise et de formation, reconstruire des réseaux nationaux d'échange

d'expérience, faire travailler ensemble les catéchètes, les pédagogues et les théologiens.

Tout cela demandera du temps, de la patience et surtout de l'humilité dans la mesure où

il nous faut aujourd'hui faire le deuil des certitudes et des solutions globales en matière

d'éducation de la foi.855

Les équipes pastorales paroissiales sont confrontées à ce défi; ce travail ne pourra pas se

faire sans la collaboration de catéchètes bénévoles. Je décrirai dans cette section le milieu

de la recherche, les différents acteurs et les conditions dans lesquelles se vit ce défi de

reprendre la responsabilité de la formation à la vie chrétienne en paroisse.

2.1. Identification du chercheur

855 Charron, « La transmission de la foi au Québec... à l'heure des reconfigurations scolaires, sociales et

ecclésiales, »: 93.

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438

Je suis prêtre diocésain depuis vingt-deux ans et actuellement je suis prêtre modérateur de

la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila et vice-président du conseil de fabrique de cette

communauté. Je suis responsable de l’accompagnement des futurs prêtres du diocèse de

Saint-Jérôme. Je suis professeur et superviseur de stage pour le Grand Séminaire de

Montréal. Je travaille en paroisse dans une équipe mixte composée de sept membres. Cette

équipe est composée de deux prêtres et de cinq agents pastoraux. Je suis le pasteur de cette

communauté. Je partage la charge pastorale avec une coordonnatrice et nous travaillons en

équipe pour la coordination, la planification et l’orientation de cette paroisse.

2.2. Identification du milieu de vie de la recherche

Cette recherche se vit dans une paroisse de banlieue qui est située au nord de Montréal. Il

suffit de 35 minutes en voiture pour se rendre au centre-ville de Montréal. Je décrirai dans

les pages qui suivent, le diocèse et la paroisse où se vivra la recherche.

2.2.1. le diocèse

Le diocèse de Saint-Jérôme est situé au nord de la ville de Montréal et regroupe le sud et le

centre de la région administrative des Laurentides et la partie sud-ouest de la région de

Lanaudière. Il compte plus de 400 000 catholiques. Le diocèse est composé de 39 paroisses.

Il peut compter sur 83 prêtres diocésains dont une trentaine sont actifs, les autres sont

majoritairement retraités. La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila regroupe 14 320 foyers ce qui

correspond à 35 700 personnes dont un peu plus de 90 % sont catholiques, selon le

recensement de 2001 au Canada.

2.2.2. la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est fondée depuis 1789 et a connu plus de quinze

changements de territoire depuis sa fondation. J’ai été nommé administrateur paroissial des

paroisses Sacré-Cœur et Sainte-Thérèse-d’Avila le premier septembre 2002. Je succédais,

dans la paroisse Sacré-Cœur, à un curé qui avait servi cette communauté depuis près de 20

ans. C’est l’évêque qui a demandé sa démission car il avait atteint l’âge de 75 ans. Pour ce

qui est de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, je succédais à un prêtre qui a donné sa

démission pour raison de santé et qui avait 71 ans. Ces deux prêtres ne partageaient pas

l’orientation du diocèse sur le regroupement des paroisses. Je fus nommé avec le mandat de

« Faire Église autrement » et pour être responsable d’une équipe pastorale mixte avec une

coordonnatrice qui partage ma tâche pastorale. Le regroupement de ces deux paroisses a été

effectué le premier janvier 2005 après deux ans et demi de préparation et de consultation.

En 2004, l’évêque de Saint-Jérôme a proposé un projet pour les cinq prochaines années :

Celui de mettre en place la formation à la vie chrétienne c’est-à-dire :

L'orientation vers un processus permanent d'humanisation dans le Christ a inspiré le

choix de l'expression formation à la vie chrétienne pour désigner les différents

processus d'apprentissage conduisant de l'éveil à la maturité de la foi. En préférant

cette expression à celles d'éducation chrétienne ou d'initiation à la vie chrétienne,

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439

on entend marquer le caractère global de ce projet qui ne se limite ni à l'initiation, ni

à un âge donné, ni à un type de parcours.856

La paroisse a le défi d’implanter des parcours d’évangélisation pour les paroissiens de tous

les âges. C’est une transformation majeure qui change toute la pastorale paroissiale. Ce

projet demande aux gens de vivre un changement qu’ils n’ont pas demandé, qui est imposé

par des choix politiques et ecclésiaux et qui est extérieur à la vie quotidienne de la grande

majorité des paroissiens.

2.2.3. L’équipe pastorale paroissiale de la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila

Les réaménagements pastoraux et la diminution du nombre de prêtres dans le diocèse de

Saint-Jérôme a pour conséquence de favoriser la mobilité des personnes. Depuis le premier

septembre 2002, il y a eu plusieurs départs dans l’équipe pastorale. Le prêtre collaborateur

a été nommé modérateur de la paroisse voisine. La coordonnatrice a démissionné car elle a

discerné que la coordination et la gestion administrative n’étaient pas son charisme. Une

agente de pastorale a pris sa retraite. Quatre nouveaux agents de pastorale ont été engagés

depuis deux ans et un prêtre congolais s’est ajouté en août 2004. Les cinq nouveaux venus

dans l’équipe pastorale vivent leur première expérience en paroisse dans le contexte

québécois. Une agente de pastorale a vécu ses premières expériences pastorales en

Nouvelle-Écosse et elle découvre la culture locale. Elle a décidé, au bout d’un an de travail,

de parfaire sa formation avant de poursuivre comme agente de pastorale. Le prêtre qui vient

du Congo en est à son premier contact avec la culture occidentale; il vit un dépaysement et

une démarche d’inculturation. Trois autres personnes ont suivi quelques cours de théologie

mais n’ont eu aucune préparation dans leur insertion dans le milieu ecclésial. Une de ces

personnes a été remerciée car elle n’arrivait pas à réaliser son mandat.

La nouvelle coordonnatrice s’est insérée dans l’équipe depuis le mois de février 2006.

Comme elle a été nommée au cours de l’année, je n’ai pas eu le temps de l’initier à tous les

dossiers de la paroisse. Les besoins de formation pour l’équipe pastorale sont grands et

nous sous-estimons, à l’intérieur de l’institution ecclésiale, les différents apprentissages

nécessaires pour s’approprier les connaissances, les attitudes, les habiletés et le savoir

transmettre afin d’exercer le ministère demandé aux agents de pastorale.

La population de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila est maintenant de plus de 35 000

personnes. L’évangélisation demande que la paroisse puisse offrir des activités d’éveil

religieux, de catéchèse et de maturation de la foi à tous les âges. La paroisse a fait une

option préférentielle pour les pauvres. Elle développe actuellement une pastorale d’accueil

avec les gens blessés par la vie. Le conseil de pastorale paroissiale a demandé que la

liturgie puisse être un lieu où le plus de gens puissent participer. Il y a aussi les projets de

développer une pastorale auprès des jeunes de douze à dix-neuf ans, un autre secteur

856 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation

à la vie chrétienne (Montréal : Médiaspaul, 2004), 29.

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440

demande notre attention celui de l’accompagnement des personnes âgées et malades, la

pastorale des personnes qui vivent un deuil.

Tous ces projets interpellent l’équipe pastorale paroissiale. Il n’est pas possible que sept

personnes planifient, organisent, animent, célèbrent et évaluent toutes ces activités. Pour

réaliser cette orientation de base cela demande un changement profond dans le travail de

l’équipe pastorale. Les membres de l’équipe pastorale seront invités à s’entourer de

collaborateurs pour réaliser la mission. Le recrutement, la formation, l’accompagnement,

leur insertion dans la communauté et la reconnaissance du travail des bénévoles et des

catéchètes sont devenus des priorités. Mais les prêtres et les agents et agentes de pastorale

ont plus été formés pour faire tout eux-mêmes que pour interpeller et susciter le

développement des charismes chez les bénévoles et les catéchètes. Sans cette

transformation majeure la paroisse ne pourra se développer et l’équipe pastorale pourra

seulement animer un petit groupe restreint de 200 à 300 personnes bénévoles qui seront

plus des exécutants que des collaborateurs. Autour de ce noyau il y aura possiblement mille

personnes qui participeront aux différentes activités. Par cette manière de vivre la pastorale,

cette équipe ne pourra pas développer de nouvelles pratiques mais sera seulement une

équipe qui donnera des services religieux sans plus.

2.3. Les défis à relever dans le milieu

Depuis le début du nouveau millénaire les paroisses au Québec ont à relever deux grands

défis c’est-à-dire : le regroupement des paroisses et la formation à la vie chrétienne. Notre

recherche touchera plus particulièrement l’implantation des parcours catéchétiques qui

demande le recrutement et la formation des catéchètes. Cette tâche sera en grande partie

assumée par les membres des équipes pastorales des paroisses.

2.3.1. Le regroupement des paroisses

Le regroupement des paroisses a été fait afin de permettre la composition d’équipes

pastorales plus nombreuses et mixtes qui pourraient assumer les défis de l’évangélisation

du début du troisième millénaire. L’équipe pastorale est actuellement composée de sept

personnes mais le regroupement des deux paroisses a pour effet que la paroisse compte

maintenant plus de 35 700 personnes. Il y a un danger de perdre les relations de proximité

entre les différents agents pastoraux et la population. Le fait que l’équipe ait à gérer

annuellement l’accueil de 300 familles qui demandent le baptême et 500 familles qui

demandent de célébrer soit l’Eucharistie ou la Confirmation peut orienter les politiques

paroissiales vers une dynamique de réponse à la demande.

Le regroupement des paroisses apporte aussi des défis administratifs car le budget global de

la paroisse de Sainte-Thérèse-d’Avila est de plus d’un million de dollars si on additionne le

budget de roulement de la fabrique et du cimetière paroissial.

2.3.2. La formation à la vie chrétienne

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441

La formation à la vie chrétienne est tout un défi. Elle demande à l’équipe pastorale, aux

personnes impliquées dans la paroisse et à l’ensemble des paroissiens de vivre un

changement majeur. Il y a, dans un premier temps, un deuil à faire qui est celui de l’école

publique qui ne peut plus donner la catéchèse et l’enseignement religieux confessionnel. Il

est à noter qu’il n’y a plus de catéchèse dans les écoles publiques depuis 1984 et qu’il n’y

aura plus d’enseignement religieux confessionnel dans les écoles à partir des années 2007-

2008. C’est la fin d’un modèle et d’une manière de vivre en Église. La nouvelle orientation

demande aux paroisses d’assurer avec les parents l’éveil religieux, la catéchèse et la

maturation de la foi des enfants, des parents et des adultes donc, d’accepter que la

transmission de la foi soit confiée conjointement aux parents et à la communauté. Pour les

parents et les membres internes des communautés il leur faut passer de l’état de

consommateurs ou de personnes qui préparent des célébrations à celui d’être des acteurs

dans l’accueil de la foi et de son approfondissement. Nous entrevoyons à peine les

conséquences de ce choix.

2.3.3. L’implantation des parcours catéchétiques

La situation actuelle, surtout depuis que la loi 118 a été promulguée le 14 juin 2000, fait

que l’Église est invitée à une nouvelle créativité pour accompagner les enfants et les parents

dans les parcours catéchétiques.857 Il y a une nécessité d’assurer une formation plus poussée

que celle de la préparation aux sacrements qui a cours dans les paroisses depuis 1983. Les

expériences de différents pays qui ont assumé la catéchèse depuis des décennies si ce n’est

pas des siècles sont très aidantes. Les parcours de catéchèse se vivent dans le temps. Ils

nécessitent d’atteindre plusieurs objectifs afin d’aider les enfants, les jeunes et les parents à

devenir disciples du Christ. Un parcours de catéchèse est fondamentalement orienté vers

une expérience de rencontre d’une personne. C’est la rencontre de Jésus Christ qui nous

révèle que Dieu est Père, Fils et Esprit Saint. C’est la découverte des Écritures, de la

Tradition, d’une expérience commune de Peuple de Dieu qui a cheminé au cours de

l’histoire; c’est expérimenter la prière par la liturgie, la prière commune et individuelle. La

catéchèse, c’est apprendre à suivre Jésus et à vivre ses valeurs au quotidien par des choix

moraux. La catéchèse se vit dans le monde, elle invite au dialogue avec l’autre dans le

respect de la pluralité des religions et des cheminements.

2.3.4. Les conséquences et problématiques pour l’implantation des

parcours catéchétiques

L’implantation des parcours catéchétiques demande un investissement par les

communautés chrétiennes d’abord en personnel et aussi en matériel. Les parcours

d’initiation chrétienne se vivent dans le temps et selon les temps liturgiques. Actuellement,

la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila offre deux parcours pour compléter l’initiation

chrétienne des enfants. Dans ces deux parcours sont insérées la préparation et la célébration

des sacrements du Pardon, de l’Eucharistie et de la Confirmation. Ces parcours

s’échelonnent sur quatre ans et demandent environ vingt rencontres par année. Il y a quinze

857 Assemblée des évêques du Québec, Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations pour la formation

à la vie chrétienne, 87-88.

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442

rencontres de catéchèse, quelques-unes sont d’ordre liturgique, d’autres sont des activités

caritatives, des fêtes familiales et les parcours se terminent par un spectacle de fin d’année.

La paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila a accueilli en moyenne 250 à 300 jeunes par année qui

se sont inscrits pour la démarche de préparation au Pardon et à l’Eucharistie et environ le

même nombre pour la Confirmation. Si nous prévoyons qu’environ 150 jeunes s’inscriront

à chaque année, nous pouvons compter sur un nombre de 600 jeunes. Dans une situation

idéale il est nécessaire de former des groupes d’environ six jeunes animés par un catéchète

ce qui demande 100 personnes. Je n’ai pas compté les catéchètes qui seront nécessaires

pour accompagner les parents des jeunes afin de les aider à vivre une expérience inter

générationnelle. Pour la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila, le défi pour l’équipe pastorale est

de recruter, former et accompagner les catéchètes. Pour les animateurs, il y aura tout un défi

d’accompagner les catéchètes, de gérer l’ensemble des rencontres, de fournir le matériel

nécessaire pour toutes ces familles et d’insérer cette démarche dans la vie paroissiale. C’est

tout un défi et il y a peu d’expérience car les animateurs de pastorale et les prêtres n’ont pas

été formés pour gérer ces dispositifs de catéchèse. La recherche veut s’attarder à mieux

saisir les enjeux de cette nouvelle donne en pastorale.

2.3.5. Une brève description sur l’état de la question

Les divers changements apportés par la loi 118 ont permis aux paroisses de redevenir un

des principaux lieux d’initiation chrétienne. La catéchèse est devenue au cours des

dernières années une priorité pour l’ensemble des personnes qui travaillent dans les

paroisses. L’Église du Québec s’est donné comme mission de mettre en place tout un

service de formation à la vie chrétienne dans lequel se trouve inséré la catéchèse.858 La

catéchèse se vit dans une démarche qui s’écoule dans le temps et en petits groupes. Pour la

formation des gens qui animeront les parcours de catéchèse, nous pouvons classer ces

divers besoins en trois niveaux de formation. Le premier niveau de formation est celui des

catéchètes bénévoles. Le deuxième niveau est celui des agents de pastorale qui ont comme

responsabilité la formation des catéchètes bénévoles et le troisième niveau est celui de ceux

qui travaillent à la formation des agents de pastorale soit au niveau diocésain, universitaire

ou dans les grandes écoles spécialisées pour la catéchèse. L’enjeu fondamental de la

formation des catéchètes est d’assurer la formation de personnes qui pourront devenir « des

disciples adultes de Jésus ». Cette formation touche l’ensemble des savoirs et presque tous

les aspects de la vie humaine. Nous pouvons affirmer que pour la personne catéchisée, c’est

une démarche plus personnelle. La personne approfondit l’appel qu’elle perçoit afin de

devenir disciple du Christ. Cette formation afin de devenir disciple du Christ regroupera

plusieurs éléments : la connaissance de la Parole de Dieu (Bible et Tradition),

l’apprentissage de la liturgie, la prière individuelle, l’interpellation morale, l’initiation à la

vie communautaire et l’initiation à la mission.859 La formation des catéchètes va reprendre

les mêmes éléments de base que ceux pour devenir chrétien en ajoutant la capacité de

catéchiser des individus et d’animer un petit groupe. Être catéchète demande d’être capable

de dialogue et de souplesse dans l’application du parcours. André ajoute quatre

compétences et trois capacités. Les quatre compétences que nomme André Fossion sont

858 Idem, 39-54. 859 Idem, 70-79.

Page 463: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

443

complémentaires et font appel à différents types de savoir : « compétences théologiques,

compétence relationnelle, compétence pédagogique et compétence d’insertion

ecclésiale ».860 Ces quatre compétences ensemble sont indissociables et pour André

Fossion, si elles sont intégrées, elles permettront de développer trois capacités :

Cette intégration des compétences se manifeste dans l’exercice conjoint d’une triple

capacité : capacité d’analyse des contextes et des situations, capacité de

discernement et de réflexion théologique et finalement capacité de création et

d’innovation à l’intérieur de ces contextes et situations.861

Pour compléter cette section j’ajouterai que la formation gagnerait aussi à développer

l’habitude d’évaluer les catéchèses avec les catéchisés et d’évaluer le chemin parcouru.

Trop souvent on se laisse prendre par des impressions subjectives ce qui fait qu’on perd en

qualité et en expérience au lieu de se faire confiance et de s’installer dans une dynamique

de croissance. L’évaluation est un moyen qui permet au catéchète de devenir à la fois acteur

et sujet de sa formation, c’est ce qu’affirme Ambroise Binz.862

Ce survol du rôle et de la formation nécessaire des catéchètes montre l’importance de ce

ministère. La formation spirituelle et le développement d’une spiritualité adaptée à cette

mission deviennent une nécessité afin de stimuler les gens qui s’engagent dans ce service. Il

est aussi nécessaire de développer, comme le demandent André Fossion, Giancarla Barbon,

Marie-Hélène Carrette et plusieurs autres, des reconnaissances pour le travail accompli. Le

travail de catéchète bénévole est actuellement une interpellation, pour l’Église d’ici, pour la

reconnaissance de ministères autres que ceux liés au ministère presbytéral. Saurons-nous

saisir cette chance de reconnaître des ministères en fonction de la mission et des défis que

nous avons à relever pour l’Église d’ici?

La formation des animateurs de pastorale a surtout été basée sur le modèle de la formation

des prêtres et a repris, chez plusieurs auteurs, les quatre grands thèmes de la formation des

prêtres soient : formation humaine, formation spirituelle, formation intellectuelle et

formation pastorale. La formation d’agent de pastorale qui formera des catéchètes

bénévoles demande d’élargir et de voir sous un autre angle la formation de ceux-ci.

Nous pouvons affirmer que pour la formation des agents de pastorale qui auront à former

des catéchètes le premier élément nécessaire est qu’ils aient déjà une première connaissance

du terrain. Un autre pré-requis important est qu’ils aiment leur tradition ecclésiale tout en

ayant une bonne distance critique et qu’ils aiment les catéchètes et les gens avec qui

travailleront les catéchètes c’est-à-dire les adultes, les enfants, les jeunes et les parents qui

accompagnent leurs enfants. Il est essentiel qu’ils connaissent bien la culture dans laquelle

ils sont insérés, qu’ils puissent l’apprécier tout en ayant une dimension critique pour voir la

possibilité de cohésion entre la foi et la culture.863 Ils auront une bonne formation

860 Fossion, « La formation des catéchistes, », 208-216. 861 André Fossion, « Former pour la catéchèse, » Lumen Vitae LII (1997) : 7. 862 Ambroise Binz, « Évaluer en formation par quelles procédures et avec quels critères?, » Idem: 15. 863 Henri Derroitte, « Quelle catéchèse pour une identité chrétienne ouverte au dialogue ?, » Revue

théologique de Louvain 37 (2006).

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444

théologique qui touchera les domaines suivants : bible, dogmatique, morale, pastorale,

liturgie, œcuménisme et dialogue interreligieux. Comme ils travaillent dans le domaine de

la catéchèse, ils seront appelés à travailler et à articuler plusieurs sciences comme la

théologie, la psychologie, la pédagogie, l’andragogie, la sociologie, l’anthropologie et

plusieurs autres. Ils auront à connaître, gérer et développer le dispositif catéchétique en

insérant de plus en plus de gens dans le service catéchétique. Les animateurs seront invités

à travailler en équipe avec des pairs et aussi avec des dizaines de bénévoles. Ils auront le

défi de développer une ecclésiologie de communion. Ils auront à relever le défi d’inculturer

le message de la foi par leur pratique sachant que c’est un travail qui se vérifie dans le

temps. Une des missions qu’ils auront à relever sera de valoriser les catéchètes en les

présentant à la communauté et, si possible trouver avec le pasteur de la paroisse et avec

l’évêque une manière de reconnaître officiellement les catéchistes. Tout ce travail demande

que les objectifs soient bien définis au point de départ afin de pouvoir les évaluer à la fin

d’un parcours. L’évaluation est le moyen d’estimer le travail et d’en faire une critique

objective et constructive.864 La formation des animateurs comme le mentionne André

Fossion demande rigueur et ouverture.865

Lorsqu’on regarde cette liste d’éléments nécessaires pour la formation des animateurs de

catéchètes, nous pouvons constater que cette réflexion demande un changement de cap dans

le travail de ceux-ci. Les animateurs ne peuvent plus être des enseignants d’une matière qui

n’est plus donnée à l’école. Les agents de pastorale sont invités à devenir des formateurs de

catéchètes qui, en donnant la formation et l’accompagnement auprès des catéchètes, seront

des mentors, ceux qui indiquent la direction et qui facilitent l’acquisition des quatre

savoirs : savoir, savoir-faire, savoir-être et savoir transmettre. Ils seront aussi des personnes

qui permettront l’insertion des catéchètes dans la vie interne de la communauté et

apprendront aux catéchètes à être des passeurs à leur tour pour les destinataires de la

catéchèse. Struart Bate, dans une conférence, ajoutait qu’une des qualités des formateurs de

catéchètes est de développer chez eux un leadership inclusif qui permettra de susciter des

appels afin que d’autres personnes puissent devenir catéchètes et puissent s’impliquer dans

la communauté chrétienne.866

Ce survol nous montre bien que l’on ne peut improviser la formation des formateurs de

catéchètes. La catéchèse a souvent été un parent pauvre du dispositif de formation des

universités et des Église particulières.867 Le défi est grand de revaloriser une formation pour

une tâche aussi importante surtout dans le contexte de l’Église au Québec où tout est

presque à refaire au complet.

2.3.6. la question de recherche

864 Binz, « Évaluer en formation par quelles procédures et avec quels critères?, ». 865 Fossion, « Vers des communautés catéchisées et catéchisantes, ». 866 Struart Bate, La formation des catéchistes [Cd-rom "Clerus Smart-cd] (Congrégation pour le clergé, 2003

[cité le 18 mars 2009]); accessible à rom http://www.clerus.org/clerus/dati/2003-12/15-13/04CCCFr.html. 867 Charron, « La transmission de la foi au Québec... à l'heure des reconfigurations scolaires, sociales et

ecclésiales, »: 83-96.

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445

Face à ce problème ma question de recherche sera : Quels sont les enjeux ecclésiologiques

et pastoraux de la formation des catéchètes bénévoles par l’équipe pastorale de la paroisse

Sainte-Thérèse-d’Avila dans le diocèse de Saint-Jérôme?

3. Stratégie de recherche

J’ai présenté sommairement les acteurs de la recherche, le milieu et aussi ce qui m’a amené

à poser la question de recherche. Dans cette partie, je présenterai quelle est la méthode de

recherche que j’utiliserai, pourquoi ce choix et quels sont les avantages de prendre cette

méthode pour la recherche que j’entreprends.

3.1. Identification de la méthode de recherche

Il y a deux grandes motivations qui m’ont aidé à faire le choix de cette méthode de

recherche. La première motivation est liée aux acquis méthodologiques que j’ai pu

développer au cours des dernières années. J’ai présenté dans mon contrat d’apprentissage

que j’ai pu expérimenter à deux reprises la méthode de la recherche-action : une première

fois dans le cadre de la recherche-action du diocèse de Saint-Jérôme durant les années 1989

à 1995 et une deuxième fois en France lorsque j’ai fait un mémoire sur « L’École de

L’Évangile du diocèse de Saint-Étienne en 1997 ». La deuxième motivation est liée au

choix de mon sujet de recherche. J’espère, par la recherche-action, développer une

expertise personnelle et aussi transformer la communauté où je travaille afin qu’elle puisse

assumer sa responsabilité nouvelle dans le contexte actuel d’être un des lieux privilégié de

la catéchèse. Il y a plusieurs objectifs dans cette recherche ou plusieurs questions à

approfondir. Quelle peut être l’articulation de ces trois ministères; ministères ordonnés,

ministères délégués et ministères baptismaux? Comment la paroisse peut être un lieu de

formation de base pour les catéchètes afin qu’ils puissent jouer leur rôle d’accompagnement

des personnes de tous âges dans la démarche de l’initiation chrétienne? Quelles seront les

répercussions sur la communauté chrétienne de reprendre son rôle d’être un des principaux

lieux de catéchèse dans l’Église locale? La méthode de la recherche-action offre cette

possibilité d’aider à planifier et à effectuer un changement afin de répondre à un nouveau

défi. Elle permet aussi de nommer de nouveaux enjeux et de renouveler le regard des gens

sur une nouvelle pratique.

3.2. Apport de la recherche-action pour la recherche

La recherche-action est une méthode qualitative qui est récente et qui a été développée plus

particulièrement dans les domaines de l’ethnologie, de l’éducation et de la psychologie.

C’est une méthode qui a des approches variées et qui s’adapte à la fois au contexte et aux

besoins du chercheur. Elle a comme axiome que le chercheur est un intervenant dans la

démarche de recherche et qu’il s’associe les gens du milieu dans lequel il intervient. Elle a

plusieurs objectifs dont celui de décrire une situation, d’évaluer un besoin précis, de

proposer une intervention afin de combler le besoin, d’expérimenter la solution proposée,

d’évaluer l’intervention et ses conséquences et de proposer une interprétation de l’action

entreprise. La recherche-action, par son aspect dynamique, produit des connaissances

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446

nouvelles par le mouvement de va-et-vient que le chercheur expérimente entre la réflexion

et l’action.

3.2.1. Définition retenue

Dans les différentes lectures que j’ai faites, j’ai pu noter quelques définitions qui m’ont aidé

dans ma réflexion et dans la préparation de mon action sur le terrain. J’ai été attiré par la

définition du groupe de Louisette Lavoie. Cette définition, pour moi, est la plus exhaustive

et elle est aussi plus proche de ce que je veux faire dans ma recherche :

La recherche-action est une approche de recherche à caractère social associée à une

stratégie d’intervention et qui évolue dans un contexte dynamique. Elle est fondée

sur la conviction que la recherche et l’action peuvent être réunies. Selon sa

préoccupation, la recherche-action peut avoir comme buts le changement, la

compréhension des pratiques, l’évaluation, la résolution de problèmes, la production

de connaissances ou l’amélioration d’une situation donnée. La recherche-action

doit avoir pour origine des besoins sociaux réels, être menée en milieu naturel de

vie, mettre à contribution tous les participants à tous les niveaux, être flexible

(s’ajuster et progresser selon les événements), établir une communication

systématique entre les participants et s’auto-évaluer tout au long du processus. Elle

est empirique et est en lien dynamique avec le vécu. Elle a un design novateur et

une forme de gestion collective où le chercheur est aussi acteur et où l’acteur est

aussi chercheur.868

Cette définition est proche aussi de celle des travaux d’André Dolbec qui présente la

recherche -action comme une méthode qui peut provoquer et stimuler le changement :

« On pourrait considérer la recherche-action comme étant un système d’activités

humaines qui vise à faire émerger un processus collaboratif dans le but de

produire un changement dans le monde réel ».869

La recherche-action demande au chercheur de s’investir dans le milieu d’intervention

comme un acteur, de demander la collaboration de personnes impliquées sur le terrain

comme co-chercheurs. Dans une dynamique d’échange et de partage mutuel, l’équipe

recueillera des données pour les analyser, proposera une intervention afin de répondre aux

besoins ou relever le défi identifié. L’équipe vérifiera l’impact de cette action dans le

milieu et ensuite proposera une autre action selon les résultats recueillis afin d’arriver aux

résultats escomptés. Le fait de réaliser la recherche ensemble et de dialoguer sur le défi à

relever dans ce type de méthode suscitent l’élaboration d’un nouveau savoir, la formation

de l’équipe de chercheurs et provoquent par le fait même un changement dans le milieu.

Il y a plusieurs types de recherche-action. Plusieurs auteurs proposent différentes

typologies. Une équipe de trois chercheurs propose une démarche pour vivre une

recherche-action, il s’agit de Louisette Lavoie, Danielle Marquis et Paul Laurin. Ils ont écrit

868 Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation, 41. 869 Dolbec, « La recherche-action, », 527, Idem

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un manuel que j’utiliserai pour me guider dans cette recherche.870 Le modèle proposé par

cette équipe propose une démarche en spirale qui permet, par des cycles successifs,

d’arriver à résoudre le problème. Voici comment ils présentent la mise en œuvre de la

recherche-action :

La démarche à entreprendre comprend donc une étape préalable à réaliser

individuellement et cinq grandes étapes à vivre en groupe. Ces étapes sont les

suivantes :

Étape préalable

Étape 1 - Réflexion initiale

Étape 2 - Précision du problème et de son contexte

Étape 3 - Planification de l'action

Étape 4 - Action et observation

Étape 5 - Évaluation et prise de décision 871

Ces étapes sont à reprendre à plusieurs reprises ce qui pourrait visuellement donner l’image

d’un escalier en colimaçon pour arriver à la résolution du ou des problèmes. Pour illustrer

cette démarche je vais prendre le schéma suggéré par Louisette Lavoie et ses

collaborateurs.872

870 Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation. 871 Idem, 186. 872 Idem, 187.

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448

Cette méthode sera mon modèle de base pour ma recherche tout en sachant qu’il y aura des

adaptations à apporter tout au long du processus. La recherche-action a des caractéristiques

qui sont avantageuses pour une recherche.

3.2.2. Les caractéristiques de la recherche-action

La recherche-action a plusieurs avantages. Le fait que le chercheur soit impliqué et travaille

avec les gens du terrain permet d’atteindre plusieurs objectifs qui sont communs à

l’ensemble du groupe impliqué. La recherche-action permet d’atteindre quatre grands

objectifs qui sont inter-reliés.

3.2.2.1. Recherche

La recherche-action permet de développer de nouvelles connaissances par le travail

d’observation, de proposition de nouvelles actions et d’interprétation des données

recueillies. C’est plus qu’une simple cueillette; c’est aussi la production d’un nouveau

savoir à partir du va-et-vient entre la pratique et la réflexion.

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449

3.2.2.2. Action

La recherche-action est une méthode qui permet aux différents acteurs de vérifier leurs

réflexions par l’action. Les gens font un premier diagnostic et ensuite proposent des

solutions alternatives et réalisent les plans élaborés. L’action et l’intervention sur le terrain

sont le laboratoire de cette méthode.

3.2.2.3. Formation

Le processus décrit en cinq étapes dans la partie précédente est un outil de formation pour

les personnes qui participent à la recherche-action. Il permet l’acquisition de nouvelles

connaissances par l’implantation de nouvelles actions, il stimule l’acquisition de nouvelles

habiletés et permet une intégration d’un nouveau savoir par l’évaluation. C’est en sorte un

genre de formation continue.

3.2.2.4. Transformation

Par l’auto-évaluation présente dans le processus et par la proposition de nouvelles pistes

d’interventions, les conséquences de cette action sont la transformation du milieu. Le but de

cette méthode est de transformer le milieu :

Rappelons enfin que la recherche-action a pour objectif de développer la

connaissance, d'améliorer ou de mieux articuler les pratiques éducatives ou sociales.

Elle se propose également de modifier le système auquel appartiennent les

personnes concernées. 873

4. Planification opérationnelle de la recherche

La recherche-action ne s’improvise pas, elle demande une préparation détaillée tout en

sachant qu’au cours du processus plusieurs aspects seront à adapter selon les besoins de

l’équipe qui travaillera sur le sujet de recherche. Quelques livres seront des éléments de

référence pour cette recherche. J’utiliserai plus particulièrement le livre La recherche

action : théorie et pratique, manuel d’autoformation qui a été conçu par trois personnes :

Louisette Lavoie, Danielle Marquis et Paul Laurin.874 J’adapterai la démarche proposée afin

de me guider dans l’élaboration et la réalisation du plan de cette recherche. J’utiliserai aussi

d’autres livres qui traitent de la recherche-action ainsi que d’autres ressources.875

4.1. Le choix des participants

873 Idem, 185. 874 Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation. 875 Goyette et Lessard-Hébert, La recherche-action : ses fonctions, ses fondements et son instrumentation.

Dolbec, « La recherche-action, ».

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450

Le sujet de recherche étant axé sur les enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation

de catéchètes bénévoles par les membres de l’équipe pastorale, le choix des participants

sera à l’intérieur de l’équipe pastorale. Je crois que les membres de l’équipe pastorale sont

bien placés pour étudier quels sont les enjeux de ce changement aussi important que

d’implanter des parcours de catéchèse. Ce sont eux qui sont sur le terrain pour mettre en

place tout le dispositif catéchétique.

4.2. Le recrutement des participants

Pour le recrutement, tous les membres de l’équipe pastorale seront invités à se joindre au

groupe de recherche-action. Une lettre sera écrite à chacun des participants possibles pour

lui présenter le projet et ce qui est demandé aux personnes qui veulent participer à cette

recherche-action. Après l’envoi de cette lettre je proposerai une rencontre personnelle afin

de répondre aux questions des participants. Je présenterai la démarche, le rôle du chercheur,

des participants et le formulaire d’informations et de consentement éclairé. Les gens auront

un délai d’une semaine pour réfléchir avant de s’engager par retour du formulaire

d’informations et de consentement éclairé à la personne responsable. Mon objectif est de

former une équipe de quatre à cinq personnes. S’il n’y a pas assez de membres de l’équipe

pastorale qui acceptent la démarche je ferai un appel auprès de cinq catéchètes bénévoles.

Je demanderai à l’équipe pastorale de m’aider à faire une liste de bénévoles selon les

critères suivants : les années d’expérience et les critères que propose André Fossion dans

son article sur la formation des catéchètes.876

4.2.1. Le formulaire d’informations et de consentement éclairé

Tous les participants auront à compléter formulaire d’informations et de consentement

éclairé pour leur participation à la recherche-action. Dans ce contrat il y aura :

• Présentation de la question de la recherche

• Établissement du rôle du chercheur, des participants, des conditions

de réalisation

• Diagnostic concernant le sujet de recherche

o Définition des moyens possibles d’atteinte des objectifs

o Création d’hypothèses concernant des alternatives

d’explication du phénomène étudié

• Présentation de la démarche et de la durée de l’engagement

• La précision du fait que tout participant pourra se retirer de la

recherche sans qu’aucun préjudice ne lui soit imputé

Le formulaire d’informations et de consentement éclairé est un contrat qui permettra de

bien définir le projet de recherche et de proposer des objectifs possibles à atteindre.

4.3. Rôle du chercheur

876 Fossion, « La formation des catéchistes, ».

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451

Dans une recherche-action le chercheur assume plusieurs rôles. Il est à la fois chercheur,

participant et initiateur de la recherche. Le chercheur est celui qui prépare la démarche

préalable; il conçoit un plan de recherche, une problématique, une première recherche

bibliographique, des hypothèses de départ avec un premier diagnostic. Il s’entoure d’une

équipe avec qui il fera route ensemble comme participants et on pourrait dire comme co-

chercheurs. Il est d’abord celui qui invite à se joindre au groupe et qui s’assure de la libre

participation de chacun. Il distribue la documentation de départ. Il est un facilitateur et il

devient un membre de l’équipe pour développer la recherche. Il accepte que les choses

puissent changer, qu’on puisse orienter différemment la recherche selon les travaux de

l’équipe. Il est celui qui permet à tous de s’exprimer et qu’une relation d’égalité se

développe dans le groupe. Il est aussi une personne ressource pour aider le groupe dans son

cheminement tout en s’assurant de la rigueur scientifique. Il est capable d’accepter de vivre

cette recherche dans un climat de changement et ainsi, vivre l’incertitude liée à une

recherche qui est en mouvement et qui peut apporter des éléments neufs et inédits. Il fait

connaître ses opinions de la même façon qu’il est attentif à celles des autres et qui sont

toutes aussi importantes pour le déroulement de la recherche. Il est capable de prendre une

distance critique par rapport aux autres participants et aussi par rapport à son sujet de

recherche.

Le chercheur se trouve en tension à plusieurs niveaux. Il est celui qui anime sans imposer

tout en guidant le groupe pour qu’il puisse atteindre ses objectifs de recherche. Il présente

au début de chaque rencontre une synthèse des délibérations de la rencontre précédente que

les co-chercheurs bonifient, modifient pour que celle-ci reflète les travaux de l’équipe des

chercheurs. Il est ouvert à la nouveauté afin de confirmer, infirmer ou bâtir de nouvelles

hypothèses de recherche et créer de nouveaux matériaux. Il est celui qui tient le rythme de

la recherche et travaille à sa réalisation.

4.4. Rôle des participants

Les participants sont actifs dans une recherche-action. Ils collaborent à l’élaboration des

instruments. Ils s’impliquent selon leurs talents dans la recherche. Ils participent à

l’élaboration de la problématique et à l’action. Ils participent aussi aux prises de décisions

qui touchent la recherche et l’action. Ils sont capables de patience car la recherche-action se

vit dans le temps et on ne peut prévoir les résultats à l’avance. Ils agissent en professionnels

dans la démarche de la recherche. C’est le chercheur qui initie l’ensemble des activités et

qui propose le premier jet des différentes synthèses après chaque réunion. Les participants

font, à partir de ces données, une nouvelle synthèse et la modifient selon les délibérations,

les échanges, les découvertes, les actions prises ensemble, l’identification d’éléments

nouveaux. Les participants orientent aussi la recherche par ce travail d’équipe. C’est par ce

va-et-vient entre la pratique et la réflexion du groupe s’élaborera un nouveau discours sur le

sujet choisi et traité par le groupe.

4.5. Rôles communs aux participants et au chercheur

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452

Le chercheur et les participants ont des engagements communs. Ils doivent tous participer

aussi bien à l’action qu’à la recherche. Ils doivent accepter cette démarche de découverte en

vivant l’incertitude qu’elle peut apporter tels questionnement, découverte et interpellation.

Cette expérience est aussi une expérience qui se vit à deux niveaux c'est-à-dire

individuellement et collectivement. Chacun peut vivre différemment cette recherche et c’est

l’interaction qui permettra de vivre une expérience de groupe.

Une recherche-action demande de vivre plusieurs qualités : flexibilité, autonomie,

interrogation, adaptabilité, lâcher prise et aussi du leadership.

4.6. Début de la recherche action « Étape préalable »

Pour mener à terme la recherche, dans cette étape il est nécessaire de monter un dossier

préliminaire pour permettre à l’équipe de recherche d’avoir des éléments de base pour

démarrer la démarche. Dans ce dossier il y aura une bibliographie d’environ vingt titres sur

la formation des catéchètes bénévoles et sur la formation des agents de pastorale qui

forment les catéchètes et les enjeux actuels de la catéchèse. Un deuxième document sera la

présentation générale de la méthode de recherche : « recherche-action ». Un troisième

document présentera les statistiques de la paroisse sur sa population d’après le recensement

du Canada fait en 2001, les actes liturgiques. Un quatrième document présentera un

diagnostic sur les enjeux catéchétiques de la formation des catéchètes et des agents

pastoraux qui forment les catéchètes. Un cinquième document sera le formulaire

d’informations et de consentement éclairé de cette recherche dans lequel seront inséré

l’horaire et les moyens proposés au point de départ pour vivre la recherche-action.

Dans cette démarche préalable, après avoir reçu l’autorisation du CERUL, le chercheur

rencontrera les membres de l’équipe pastorale paroissiale de la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila pour leur proposer de participer à la recherche-action.

Deux outils serviront à recueillir les données pour la recherche-action. Il y aura un journal

de bord commun personnel et l’enregistrement des rencontres de l’équipe de recherche.

Chacun des participants aura son journal de bord dans lequel il pourra noter ses réactions

personnelles. Cet instrument permettra à chacun de pouvoir observer son évolution et se

rendre compte du chemin parcouru et/ou des déplacements effectués. Cet instrument sera

un outil d’intégration pour chacun.

Les différentes rencontres de l’équipe de recherche seront enregistrées afin de permettre au

chercheur de faire un verbatim des entrevues et de confectionner le premier jet d’une

synthèse des échanges qui sera présentée à la rencontre suivante aux chercheurs. Ceux-ci la

bonifieront ou la modifieront selon les besoins et les perceptions du groupe. Les résumés-

synthèse et leur approbation par le groupe de recherche permettront de jalonner par des

documents le cheminement du groupe et faciliteront le travail pour le rapport qui sera fait à

la fin de la recherche.

4.7. Étape 1 de la recherche action « Réflexion initiale »

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453

Pour chacune des prochaines étapes de la recherche je vais essayer de procéder par un cadre

similaire afin de donner une rigueur à la recherche tout en sachant que ce cadre peut être

transformé selon les besoins et le cheminement du groupe.

4.7.1. L’objectif de l’étape

L’équipe a à identifier un enjeu pastoral ou une pratique pastorale en lien avec le sujet de la

recherche et que l’équipe des chercheurs aimerait travailler.

4.7.2. Durée et lieu de la rencontre

Pour chacune des rencontres je proposerais une rencontre d’une durée de 120 à 150

minutes. Il y aura une pause de quinze minutes après une première partie de 60 minutes. La

rencontre se vivra dans un autre lieu que le bureau de travail. Je pourrais proposer deux

lieux différents soit le monastère des Rédemptoristines à Sainte-Thérèse ou la maison de

Val-Marie à Rosemère. Ce sont des lieux que les membres de l’équipe aiment bien et où

nous sommes bien accueillis. L’équipe de recherche pourrait aussi proposer d’autres

endroits pour se réunir.

4.7.3. L’animateur des rencontres

C’est le chercheur qui animera les rencontres de la recherche-action. Cette manière de faire

permettra d’assurer une continuité et un lien avec les différentes étapes. Afin de d’assurer

l’objectivité de la démarche, à la fin de chaque rencontre une série de questions prises dans

le livre de Louissette Lavoie et de ses collaborateurs seront utilisées pour l’évaluation lors

de la rencontre et si on a atteint l’objectif prévu. L’animateur aura le souci de partager la

parole et de permettre à chacun de s’exprimer. La technique des tours de table peut

permettre à tous de prendre parole.

4.7.4. Enregistrement des rencontres

Chacune des rencontres sera enregistrée. Cela permettra à l’animateur de se concentrer sur

chacun des participants. Un verbatim sera fait après la rencontre. Le chercheur en fera

l’analyse et proposera un résumé-synthèse au groupe des chercheurs qui aura à l’approuver

et à le modifier pour qu’il reflète les délibérations et les recherches du groupe.

4.7.5. Rappel de l’objectif de la rencontre par l’animateur.

L’animateur rappelle l’objectif de la rencontre : identifier un enjeu pastoral ou une pratique

pastorale en lien avec le sujet de la recherche que l’équipe des chercheurs aimeraient

travailler.

4.7.6. Démarche de recherche

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Le chercheur pourra présenter le diagnostic préliminaire de la recherche. Suite à cette

présentation du diagnostic les membres de l’équipe de travail pourront identifier un enjeu

ecclésiologique ou une pratique pastorale qu’ils aimeraient approfondir, développer. Le

groupe pourra réfléchir et vérifier sur les possibilités d’intervention sur l’enjeu retenu qui a

fait consensus au sein du groupe de chercheurs.

Voici une démarche possible pour aider à la recherche lors de la rencontre :

Qu’est-ce que je pense du diagnostic présenté?

Quelle est l’importance que je lui accorde?

Est-ce que ce diagnostic entre en conflit avec mes valeurs, mes convictions, ma façon

de vivre et de voir l’Église?

Est-ce vraiment important de chercher à relever le défi présenté?

Quel est l’enjeu ecclésiologique que j’aimerais approfondir, clarifier, nommer,

développer en équipe de recherche?

Quelle est la pratique pastorale que j’aimerais améliorer, résoudre, changer ou

développer?

4.7.7. Produit de l’étape

L’équipe de recherche aura identifié par consensus un enjeu ecclésiologique ou une

pratique pastorale qui sera le thème de la recherche-action du groupe.

4.7.8. Évaluation et Mandat pour la prochaine réunion

L’animateur à l’aide de l’annexe 1 fait l’évaluation de l’étape et présente le mandat pour la

prochaine rencontre :

À la fin de la rencontre les membres de l’équipe auront le mandat de chercher et de réunir

la documentation relative au thème de la recherche :

Ce mandat consiste à colliger, d’ici la prochaine rencontre, des informations à partir

de livres, de revues ou d’articles, d’échanges avec des personnes de différents

milieux et préoccupées par le thème de la recherche. Le but de cette collecte de

matériel d’informations est de se doter de la documentation nécessaire pour préparer

et préciser l’orientation du projet de recherche.877

Une bibliographie de la revue de littérature que le chercheur aura déjà faite pourra être

disponible pour les chercheurs qui le désirent.

4.8. Étape 2 de la recherche-action « Précision du problème et de son

contexte »

877 Lavoie et al., La recherche-action : théorie et pratique : manuel d'autoformation, 199.

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455

C’est la deuxième étape. C’est important de soutenir la rigueur face à la démarche pour

garder le plus d’objectivité dans la démarche.

4.8.1. L’objectif de l’étape 2

L’objectif de cette deuxième étape est de délimiter de manière plus précise ce qui fait

problème dans l’enjeu théologique et la pratique pastorale identifiés lors de la première

rencontre et situer le contexte entourant les deux éléments retenus.

4.8.2. Durée et lieu de la rencontre de l’étape 2

La durée de la rencontre sera entre 120 et 150 minutes. Il y aura une pause après une heure

de discussion. Le lieu de la rencontre sera décidé par l’équipe pastorale.

4.8.3. Enregistrement de la rencontre et lecture du rapport synthèse de

la dernière rencontre

L’animateur installe le matériel afin d’enregistrer la rencontre. Il distribue une copie du

rapport-synthèse préparé lors de la dernière rencontre. Les membres de l’équipe prennent

connaissance du rapport et apportent les modifications nécessaires pour que celui-ci reflète

les échanges du groupe

4.8.4. Rappel de l’objectif de la rencontre par l’animateur.

L’animateur rappelle l’objectif de la rencontre : l’objectif de cette deuxième étape est de

délimiter de manière plus précise ce qui fait problème dans l’enjeu théologique et la

pratique pastorale identifiés lors de la première rencontre et situer le contexte entourant les

deux éléments retenus.

4.8.5. Démarche de recherche pour la rencontre 2

Dans un premier temps tous les membres de l’équipe, suite à leur lecture et leur collecte de

données, essaient de délimiter de façon précise ce qui fait problème à l’intérieur même de

l’élément identifié : enjeu ecclésiologique ou pratique pastorale.

Dans un deuxième temps, délimiter le contexte des éléments retenus. Quelques questions

peuvent aider à situer le contexte.

• Quel est le contexte ecclésial, le contexte économique, le contexte

culturel, le contexte pastoral où se vivent l’enjeu ecclésial nommé et la

pratique pastorale?

• Historiquement qu’en est-il?

• Quel est l’historique de la paroisse, de l’Église et de la société d’où

émerge le problème?

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456

Il est important de recueillir toutes les informations possibles pour enrichir la réflexion et

pour garder une rigueur dans la démarche. Voici quelques questions à se poser pour

poursuivre la démarche de réflexion :

• Y-a-t-il des auteurs qui ont traité du problème?

• Si oui, dans quels termes?

• Est-ce que les auteurs sont unanimes ou si les points de vue sont

divergents?

• Y-a-t-il des théoriciens, des théologiens qui sont parvenus à établir des

preuves qui peuvent servir de cadre explicatif?

• Si oui, ces preuves sont-elles réfutées?

• Qu’en est-il au point de vue historique, politique, culturel, ecclésial,

théologique?

• Le problème a-t-il déjà été soulevé?

• A-t-on déjà tenté de faire quelque chose?

• Si oui, quels ont été les résultats?

• Qu’en est-il actuellement?

Parmi tous les éléments apportés par chacun, pouvons-nous faire un consensus et identifier

quels sont les éléments qui sont pertinents et qui seront retenus par l’équipe.

4.8.6. Évaluation de la rencontre

À la fin de la rencontre l’animateur fait une évaluation de celle-ci à l’aide des critères

proposés dans le livre de Louissette Lavoie et ses collaborateurs. Ces questions sont à

l’annexe 1 de ce document.

4.8.7. Mandat pour la prochaine réunion

Le mandat pour l’équipe de recherche est, qu’après avoir clairement identifié l’enjeu

ecclésiologique et la pratique pastorale que l’on veut travailler il est temps de se demander

ce qui peut être fait concrètement.

C’est le moment d’étudier un plan d’action, de se faire une idée sur la possibilité de

résoudre les éléments retenus. Le but du mandat est de permettre au groupe de disposer

d’un éventail de pistes et d’actions pour entreprendre la troisième étape.

4.9. Étape 3 de la recherche-action « Planification de l’action »

Cette troisième étape du processus est de permettre à l’équipe de recherche de planifier une

action qui pourra aider à améliorer la situation du groupe de recherche.

4.9.1. L’objectif de l’étape

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457

L’équipe de recherche déterminera et préparera l’orientation de l’action et prévoira le

matériel à utiliser pour poser l’action.

4.9.2. Durée et lieu de la rencontre de l’étape 3

La durée de la rencontre sera entre 120 et 150 minutes. Il y aura une pause après une heure

de discussion. Le lieu de la rencontre sera décidé par l’équipe pastorale.

4.9.3. Enregistrement de la rencontre et lecture du rapport-synthèse de

la dernière rencontre

L’animateur installe le matériel pour enregistrer la rencontre. Il distribue une copie du

rapport-synthèse préparé lors de la dernière rencontre. Les membres de l’équipe prennent

connaissance du rapport et apportent les modifications nécessaires pour que celui-ci reflète

les échanges du groupe

4.9.4. Rappel de l’objectif de la rencontre par l’animateur

L’animateur rappelle l’objectif de la rencontre qui est de préciser et d’élaborer une action

avec les enjeux identifiés lors de la dernière rencontre..

4.9.5. Démarche de recherche

L’équipe de recherche déterminera et préparera l’orientation de l’action en lien avec l’enjeu

théologique et/ou la pratique pastorale choisis. L’équipe préparera le matériel à utiliser pour

poser l’action.

Voici quelques critères de discernement pour le choix de l’action en tenant compte du

milieu et des répercussions sur le milieu :

• Les effets sur l’environnement et le milieu

• Les succès possibles

• La durabilité de l’intervention

• Les conditions objectives (physiques, matérielles, financières, espaces,

etc.)

• Les conditions subjectives (opinions, attitudes et valeurs actuelles des

personnes concernées)

Voici des questions pour aider à identifier l’action à réaliser :

• Que peut-on changer dans ce domaine?

• Que peut-on vraiment faire?

• Par qui? Où? Quand? Comment?

• Qu’apportera le changement?

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458

• Quels seront les impacts de ces changements sur le groupe et sur

l’environnement et ce, à court et à moyen terme?

• Parmi les actions possibles, laquelle ou lesquelles sont les plus

susceptibles de remédier au problème ou encore d’apporter une

amélioration?

Finaliser le projet initial pour l’action en décrivant les points suivants :

• L’enjeu choisi

• La justification du choix de cet enjeu

• Les circonstances pratiques, relatives à l’action en lien avec cet enjeu

• Le rationnel des changements planifiés (ce qui se dit, ce qui se fait, ce

qui se vit)

• La relation entre le changement planifié et les possibilités d’action

Préparer un plan détaillé et un échéancier de travail :

• Qui?

• Qui fera quoi?

• Quand?

• Comment?

Décrire les conséquences de l’action sur l’ensemble des personnes engagées

Justifier le plan d’action

Justifier l’instrumentation retenue

Définir les concepts, les idées par rapport à l’enjeu choisi. Il est nécessaire de définir les

concepts et les idées qui seront constamment utilisés dans la recherche; c’est ce qui

permettra à chacun de comprendre les mêmes choses et de la même façon.

4.9.6. Produit de l’étape

Plan d’intervention détaillé

4.9.7. Évaluation de l’étape

À la fin de la rencontre l’animateur fait une évaluation de celle-ci à l’aide des critères

proposés dans le livre de Louissette Lavoie et ses collaborateurs. Ces questions sont à

l’annexe 3 de ce document

4.9.8. Mandat pour la prochaine réunion

Le mandat se résume en trois grandes actions à réaliser par l’équipe :

• Assumer les tâches relatives au rôle de chacun

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459

• Respecter l’échéancier

• Préparer le matériel

4.10. Étape 4 de la recherche-action « Action et observation »

Cette étape est la réalisation de l’action planifiée par l’équipe de recherche. Il est important

d’être attentif à la cueillette de données lors de cette étape.

4.10.1. L’objectif de l’étape

L’objectif de cette étape est de mettre en opération le plan d’action, d’observer et de relever

les données et recueillir les éléments qui serviront à l'analyse.

4.10.2. Durée et lieu de la rencontre

La durée et le lieu de la rencontre seront déterminés par le projet d’action qui sera décidé

par l’équipe de recherche

4.10.3. Lecture du rapport-synthèse.

Cette étape sera remise lors de la rencontre ultérieure qui aura lieu après le déroulement de

l’action planifiée

4.10.4. Démarche de recherche

Dans cette étape il est important de vivre l’action selon le plan qui a été décidé. Si à cause

de situations imprévues il est nécessaire de modifier ce qui a été prévu, il est important de

noter le pourquoi de cette modification et les facteurs qui ont permis ce changement. Lors

du déroulement de l’activité il est nécessaire d’observer et de noter les données.

4.10.5. Produit de l’étape

L’action et l’observation fournissent un recueil de données qui serviront à réaliser le

prochain mandat.

4.10.6. Évaluation de l’étape

À la fin de la rencontre l’animateur fait une évaluation de celle-ci à l’aide des critères

proposés dans le livre de Louissette Lavoie et ses collaborateurs. Ces questions sont à

l’annexe 4 de ce document

4.10.7. Mandat pour la prochaine réunion

Chacun des membres de l’équipe de la recherche-action, en prévision de la mise en

commun des données recueillies, devra se faire une image la plus précise possible de ce qui

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460

s’est passé et ce, par rapport aux objectifs de départ; c’est ce qui alimentera la réflexion et

influencera la prise de décision.

4.11. Étape 5 de la recherche action « Évaluation et prise de décision »

Cette rencontre est une évaluation du projet de recherche à partir de l’étape réflexion

initiale jusqu’à cette étape qui est l’évaluation et la prise de décision. Pour notre recherche

nous proposons de faire deux cycles dans la démarche. Mais il est nécessaire de faire

l’évaluation et d’être assez souple pour réévaluer avec le groupe la pertinence de faire un

deuxième cycle de recherche.

4.11.1. L’objectif de l’étape

L’objectif de cette étape est de faire l’évaluation à partir des données recueillies depuis le

début : déroulement du projet selon un ordre chronologique, analyse des données

permettant de juger du changement proposé dans la recherche, réflexion sur la démarche de

participation du groupe. C’est l’étape de la réflexion, de l’analyse, de la synthèse, de

l’interprétation, de l’explication et de la prise de décision.

4.11.2. Durée et lieu de la rencontre de l’étape 5

La durée de la rencontre sera entre 120 et 150 minutes. Il y aura une pause après une heure

de discussion. Le lieu de la rencontre sera décidé par l’équipe pastorale.

4.11.3. Enregistrement de la rencontre et lecture du rapport

synthèse de la dernière rencontre

L’animateur installe le matériel afin d’enregistrer la rencontre. Il distribue une copie du

rapport synthèse préparé lors de la dernière rencontre. L’animateur présente les deux

rapport-synthèse des deux dernières étape. Les membres de l’équipe prennent connaissance

des rapports et apportent les modifications nécessaires pour que ceux-ci reflètent les

échanges et le vécu du groupe.

4.11.4. Rappel de l’objectif de la rencontre par l’animateur.

• Pour cette étape, il sera important de revoir le document de l’étape de la planification de

l’action et celui de sa réalisation. L’équipe a à faire l’évaluation de l’action et aussi à

noter les interprétations possibles de l’activité réalisée.

4.11.5. Démarche de recherche

La démarche de recherche arrive à l’étape de revoir tout ce qui a été fait, de faire une

synthèse et de faire ressortir ce qu’on a découvert. A-t-on réussi l’objectif que l’on s’était

donné au point de départ? Avons-nous découvert des éléments neufs dans la compréhension

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461

ou dans notre pratique pastorale? Pour aider à l’évaluation de la démarche on peut utiliser

les questions qui sont en annexe 5.

4.11.6. Produit de l’étape

C’est la production d’un rapport de recherche avec des pistes de réflexion. C’est aussi le

temps de décider si on veut commencer un deuxième cycle dans la recherche-action.

4.11.7. Mandat pour la prochaine réunion

Si l’enjeu ecclésiologique a été suffisamment approfondi ou la pratique pastorale améliorée

ou modifiée selon les attentes du groupe, la rédaction du rapport termine la recherche-

action. Si l’entreprise d’un deuxième cycle est nécessaire, il s’agit de redéfinir l’enjeu

ecclésial à approfondir ou la pratique pastorale à améliorer et de poursuivre les étapes dans

le même ordre qu’au cycle précédent.

Il sera important de suivre toutes les étapes à partir de la réflexion initiale jusqu’à

l’évaluation et la prise de décision.

4.12. début d’un deuxième cycle de recherche, redéfinition du

problème

Pour le chercheur, son souhait est de faire deux cycles de recherche. Cependant pour rester

dans la dynamique de la recherche-action il est important que cette décision soit prise par

l’ensemble du groupe. Cette incertitude fait partie de la dynamique même de cette méthode

de recherche

5. Rédaction du rapport final en lien avec la thèse

La recherche-action complétée et la rédaction des conclusions acceptées par l’équipe de

recherche, le travail se poursuit pour le chercheur. Le chercheur sera invité à faire une

deuxième lecture de cette recherche afin de poursuivre son travail de recherche et de

comparer les résultats avec d’autres travaux faits dans d’autres situations pour faire ressortir

l’originalité des découvertes de l’équipe de recherche et faire un apport à la recherche

scientifique.

6. Conclusion

Dans ce travail j’ai voulu présenter une démarche de recherche qui permettra à l’équipe de

pouvoir faire un travail de recherche comportant plusieurs éléments qui permettent de

garder une distance critique, tout en laissant la place à des modifications. L’avantage de ce

travail c’est qu’il permet au groupe de chercheurs d’avoir un guide précis pour compléter la

recherche. Il sera important dans l’animation du groupe de toujours rappeler que des

modifications peuvent être faites. Il sera utile de noter quelles sont les modifications et le

pourquoi de ces choix de recherche. Plus la recherche action est définie plus elle permet

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462

aux participants de faire des choix. La démarche proposée est une suggestion qui permet

par ses nombreuses questions de susciter la participation de tous et de créer un pour se

remettre en question.

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463

Annexe A

Voici des questions qui permettront d’évaluer si l’équipe de chercheurs a atteint l’objectif

de l’étape de la réflexion initiale :

Questions à poser pour vérifier les possibilités d’interventions dans le contexte de l’équipe

pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila.

Est-il réaliste de prévoir approfondir, clarifier, nommer, résoudre, développer en équipe

de recherche l’enjeu ecclésiologique et la pratique pastorale que l’on a identifié?

Est-ce possible de penser à une rencontre pour chacun des éléments identifiés dans la

démarche où on vivrait une activité pour nous aider à faire face aux défis nommés?

Questions pour vérifier si on a atteint l’objectif du départ :

Au niveau du groupe :

• Est-ce que les membres font consensus sur l’enjeu ecclésiologique et

la pratique pastorale qui seront les deux éléments de notre recherche?

• Est-ce que les membres ont eu la chance de s’exprimer et de

participer?

• Est-ce que, pour tous, le thème de la recherche est arrêté et rédigé de

façon claire?

Au niveau individuel :

• Est-ce que je suis disposé à intervenir dans cette recherche?

• Est-ce que je me suis exprimé et ai-je participé?

• Est-ce que je suis disposé à mettre de côté mes propres perceptions

pour me centrer sur le thème de recherche?

Tâches du groupe

• Déterminer les modalités de fonctionnement

• Déterminer les démarches prioritaires à effectuer

• Instaurer un processus de participation

• Maintenir l’intérêt et la volonté de groupe à s’impliquer

• Rechercher le consensus

• Nommer un animateur

• Nommer un responsable du journal de bord

• Rechercher la clarification et la précision des idées, des suggestions, des

commentaires, etc.

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464

Annexe B

Tâche du groupe pour l’étape 2

• Déterminer les modalités de fonctionnement

• Déterminer les démarches prioritaires à effectuer

• Instaurer un processus de participation

• Maintenir l’intérêt et la volonté de groupe à s’impliquer

• Rechercher le consensus

• Enregistrer les délibérations

• Clarifier l’enjeu théologique et la pratique pastorale retenue

• Décider des éléments qui sont pertinents et qui seront retenus parmi ceux qui

ont été trouvés

• Compiler les notes relatives à son contexte vis-à-vis de l’enjeu

ecclésiologique et de la pratique pastorale

• Tenir compte des limites et des contraintes possibles

6.1.1. Produit de l’étape

Voici quelques questions avant de passer au mandat pour la prochaine réunion :

• Est-ce que l’enjeu théologique et la pratique pastorale et leurs contextes

sont notés ou rédigés de façon claire, même s’il s’agit d’une version

préliminaire?

• Est-ce que chacun a pu collaborer, exposer son point de vue, partager ses

découvertes, ses produits, ses interrogations et ses insuccès?

• Est-ce que le diagnostic posé relativement à l’enjeu ecclésiologique et la

pratique pastorale est partagé?

• Est-ce qu’on a su attendre, expliquer, respecter, accepter les opinions des

autres?

• Est-ce qu’on a su porter attention à ce que les autres apportaient?

• Est-ce qu’on a reçu l’attention à ce qu’on apportait?

• Est-ce qu’on a fait preuve de patience dans ce cheminement?

• Est-ce qu’on a su vivre les inquiétudes et les insécurités propres à toute

démarche de recherche-action?

• Est-ce qu’on a pu vivre les difficultés de l’action collaboratrice?

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465

Annexe 3

Tâche du groupe

• Déterminer les modalités de fonctionnement

• Déterminer les démarches prioritaires à effectuer

• Instaurer un processus de participation

• Maintenir l’intérêt et la volonté de groupe à s’impliquer

• Rechercher le consensus

• Nommer un animateur

• Nommer un responsable du journal de bord

• Rédiger l’objectif de recherche

• Rédiger le plan d’action

• Rédiger les concepts et les idées

• Déterminer l’instrumentation

• Fixer les tâches

• Construire le matériel et les instrumentations de données nécessaires

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466

Annexe 4

Voici des questions pour aider à l’observation et la cueillette de données pour cette

activité :

• Est-ce que le langage et les informations sont appropriés à la clientèle?

• Est-ce que les participants utilisent les moyens d’actions proposés et

comment?

• Que peut-on observer des conséquences de l’action?

• Est-ce que ces conséquences entraînent des conflits, des peurs, des

résistances?

• Est-il possible de discuter des conflits?

• Est-ce que les utilisateurs sont mis à contribution et vont-ils de l’avant?

• Quels sont les principaux changements qui surviennent au regard des

personnes, des interventions, des actions et des circonstances? Bref, ce

qui se dit, ce qui se fait et ce qui se vit?

• Les instruments de collecte de données parviennent-ils à faire ressortir

l’évidence entre l’action et la situation de départ?

Tâches du groupe

• Déterminer les modalités de fonctionnement

• Déterminer les démarches prioritaires à effectuer

• Instaurer un processus de participation

• Maintenir l’intérêt et la volonté de groupe à s’impliquer

• Rechercher le consensus

• Assumer les tâches reliées à chacun des rôles

• Nommer un responsable du journal de bord

• Noter tout ce qui est susceptible de servir ultérieurement (questionnaire,

entrevue) à l’analyse de la situation et à la prise de décision

• S’assurer que l’action se déroule selon les prévisions du plan; dans

l’éventualité d’une modification, la noter pour en faire part aux membres du

groupe

• Organiser les données dans une forme qui permettra d’analyser,

d’interpréter, d’expliquer et de prendre une décision au sujet de l’action

posée

• Faire ressortir tout ce qui fait et/ou ne fait pas évidence entre l’action et la

situation de départ

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467

Annexe 5

Voici quelques éléments pour nous aider à réfléchir ensemble :

• Synthétiser ce qui s’est dit, s’est fait et s’est vécu

• Revoir chaque étape de la recherche

• Consulter le plan initial

• Discuter, échanger, écouter et réfléchir en se basant sur des évidences

et non sur des perceptions ou des intuitions

• Faire ressortir ce qui a été vécu par rapport aux succès, aux difficultés

et aux échecs sans tirer de conclusions trop rapides sur la réussite ou la

non-réussite de la recherche

• Essayer de comprendre les pratiques en reformulant les actions de

façon à pouvoir interpréter et décider des actions futures en se basant

sur un rationnel découlant de l’enjeu ecclésiologique et/ou de la

pratique pastorale définis au point de départ et de son contexte

• Noter l’évolution de la recherche par rapport au contexte où elle a été

vécue.

Quelques questions pour aider à la démarche de recherche?

• Comment s’est déroulée l’action comparativement à la planification?

• Quelle est votre perception des événements?

• Quels sont les effets attendus et inattendus et quelles en sont les causes?

• Quelles ont été les contraintes? Pourquoi?

• Quelles ont été les conséquences de l’action? Comment les justifier?

• Est-ce que les pratiques sont mieux comprises? Dans quel sens?

• Est-ce que des ajustements ont été apportés pour faciliter les actions?

• Quels points de résistances avez-vous rencontrés?

• A-t-il été possible de négocier?

• Comment a-t-on réagi à l’implantation de l’action?

• Quelles possibilités de changement entrevoyez-vous?

• Est-il nécessaire de réviser le thème de recherche?

• La replanification est-elle nécessaire? Dans quel sens?

• Qu’est-ce qui devrait être fait à partir de maintenant?

• Si vous pensez entreprendre un deuxième cycle, avez-vous pensé aux

engagements à prendre?

Tâches du groupe

• Déterminer les modalités de fonctionnement

• Déterminer les démarches prioritaires à effectuer

• Instaurer un processus de participation

• Maintenir l’intérêt et la volonté de groupe à s’impliquer

• Rechercher le consensus

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468

• Nommer un animateur

• Nommer un responsable du journal de bord

• Rédiger le rapport final en faisant ressortir le produit de chaque étape et la

décision prise

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469

Assemblée des évêques du Québec. Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations

pour la formation à la vie chrétienne. Montréal: Médiaspaul, 2004.

Bate, Struart. La formation des catéchistes [Cd-rom "Clerus Smart-cd]. Congrégation pour

le clergé, 2003 [cited juin 2006].

Binz, Ambroise. « Évaluer en formation par quelles procédures et avec quels critères? »

Lumen Vitae LII (1997): 13-37.

Charron, Jean-Marc. « La transmission de la foi au Québec... » Catéchèse 172 (2003): 83-

96.

Derroitte, Henri. « Quelle catéchèse pour une identité chrétienne ouverte au dialogue ? »

Revue théologique de Louvain 37 (2006): 44-59.

Dolbec, André. « La recherche-action. » Dans Recherche sociale : de la problématique à la

collecte des données, sous la direction de Benoît Gauthier, 505-40. Sainte-Foy:

Presses de l'Université du Québec, 2003.

Fossion, André. « Former pour la catéchèse. » Lumen Vitae LII (1997): 120.

———. « La formation des catéchistes. » Dans Dieu toujours recommencé : Essai sur la

catéchèse contemporaine, sous la direction de André Fossion, 209-16. Bruxelles:

Lumen Vitae, 1997.

———. « Vers des communautés catéchisées et catéchisantes. » Nouvelle revue

théologique 126 (2004): 598-613.

Goyette, Gabriel et Michelle Lessard-Hâebert. La recherche-action : ses fonctions, ses

fondements et son instrumentation. Sillery, Quâebec: Presses de l'Universitâe du

Quâebec, 1987.

Lavoie, Louisette, Danielle Marquis et Paul Laurin. La recherche-action : théorie et

pratique : manuel d'autoformation. Sainte-Foy, Québec: Presses de l'Université du

Québec, 1996.

Page 490: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

470

Annexe 2 : Document de présentation du projet présenté

aux participants de la recherche-action

Faculté de théologie et de sciences religieuses

Doctorat en théologie pratique

Document de présentation du projet présenté aux participants de la recherche-action :

« Enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation des catéchètes bénévoles par

l’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila. »

Préparé par Guy Guindon

Directeur de thèse : Alain Faucher

Le 4 octobre 2006

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471

Investigateur principal :

Guy Guindon,

Étudiant au doctorat

1) Présentation du projet

Dans ce document vous trouverez les éléments qui présentent la recherche que

Monsieur Guy Guindon veut effectuer. Vous êtes invités à lire le document pour

vous aider à comprendre la démarche et vous informer de ce projet. Vous pourrez

après la lecture prendre une décision si vous désirez ou non de participer à cette

recherche. Cette recherche se fait dans le cadre du doctorat en théologie pratique de

la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval. Le but du

programme en théologie pratique est d’aider le chercheur à faire un lien entre sa

pratique et la réflexion théologique pour améliorer son intervention dans son milieu.

2) Nature de l’étude

Les divers changements apportés par la Loi 118 ont permis aux paroisses de

redevenir un des principaux lieux d’initiation chrétienne. La catéchèse est devenue

au cours des dernières années une priorité pour l’ensemble des personnes qui

travaillent dans les paroisses. L’Église du Québec s’est donnée comme mission de

mettre en place tout un service de formation à la vie chrétienne dans lequel se trouve

inséré la catéchèse. La catéchèse se vit à l’intérieur d’une démarche qui s’écoule

dans le temps et en petits groupes.

L’implantation des parcours catéchétiques demande un investissement par les

communautés chrétiennes d’abord en personnel et aussi en matériel. Actuellement,

la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila offre deux parcours pour compléter l’initiation

chrétienne des enfants. Dans ces deux parcours sont insérées la préparation et la

célébration des sacrements du Pardon, de l’Eucharistie et de la Confirmation. Ces

parcours s’échelonnent sur trois ans et demandent environ vingt rencontres par

année. Il y a quinze rencontres de catéchèse, quelques-unes sont d’ordre liturgique,

d’autres sont des activités caritatives, des fêtes familiales. Les parcours se terminent

par une fête de fin d’année.

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472

L'objectif de la recherche est d'évaluer les impacts de l'implantation des parcours

catéchétiques dans la paroisse plus précisément : la formation des catéchètes

bénévoles par l'équipe pastorale paroissiale.

Voici mon hypothèse de recherche :

Un des rôles de l'équipe pastorale paroissiale dans la paroisse est celui d'animer le

service de catéchèse. Donc à interpeller, former, insérer, accompagner les catéchètes

bénévoles dans la vie paroissiale. L'équipe pastorale a aussi pour but par l'animation

du service de catéchèse, de faciliter la participation des personnes catéchisées aux

diverses activités de la vie paroissiale.

Voici trois questions pour approfondir cette hypothèse :

1) Quelles seront les répercussions sur la communauté chrétienne et plus

particulièrement pour l'équipe pastorale paroissiale si la paroisse reprend son rôle

d'être un des principaux lieux de catéchèse dans l'Église locale?

2) Quelle peut être l'articulation entre ces trois ministères dans cette nouvelle

pratique : ministères ordonnés, ministères délégués et ministères baptismaux?

3) Quelles seront les effets de la démocratisation du " savoir et savoir-faire" chez de

nombreux bénévoles dans une paroisse?

3) Rôle de chacun

Dans cette section je présenterai le rôle respectif du chercheur, des participants et

quels sont les rôles qu’ils ont à faire en commun.

3.1) Rôle du chercheur :

Dans une recherche-action le chercheur assume plusieurs rôles. Il est à la fois

chercheur, participant et initiateur de la recherche. Le chercheur est celui qui

prépare la démarche préalable; il conçoit un plan de recherche, une problématique,

une première recherche bibliographique, des hypothèses de départ avec un premier

diagnostic. Il s’entoure d’une équipe avec qui il fera route ensemble comme

participants et on pourrait dire comme co-chercheurs. Il est d’abord celui qui invite

à se joindre au groupe et qui s’assure de la libre participation de chacun. Il distribue

la documentation de départ. Il est un facilitateur et il devient un membre de l’équipe

pour développer la recherche. Il accepte que les choses puissent changer, qu’on

puisse orienter différemment la recherche selon les travaux de l’équipe. Il est celui

qui permet à tous de s’exprimer et qu’une relation d’égalité puisse se développer

dans le groupe. Il est aussi une personne ressource pour aider le groupe dans son

cheminement tout en s’assurant de la rigueur scientifique. Il est capable d’accepter

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473

de vivre cette recherche dans un climat de changement et ainsi, vivre l’incertitude

liée à une recherche qui est en mouvement et qui peut apporter des éléments neufs et

inédits. Il fait connaître ses opinions de la même façon qu’il est attentif à celles des

autres qui sont toutes aussi importantes pour le déroulement de la recherche. Il est

capable de prendre une distance critique par rapport aux autres participants et aussi

vis-à-vis de son sujet de recherche.

Le chercheur se trouve en tension à plusieurs niveaux. Il est celui qui anime sans

imposer tout en guidant le groupe pour qu’il puisse atteindre ses objectifs de

recherche. Il présente au début de chaque rencontre une synthèse des délibérations

de la rencontre précédente que les co-chercheurs bonifient, modifient pour que

celle-ci reflète les travaux de l’équipe des chercheurs. Il est ouvert à la nouveauté

afin de confirmer, infirmer ou bâtir de nouvelles hypothèses de recherche et créer de

nouveaux matériaux. Il est celui qui tient le rythme de la recherche et travaille à sa

réalisation.

3.2) Rôle des participants :

Les participants sont actifs dans une recherche-action. Ils collaborent à l’élaboration

des instruments. Ils s’impliquent selon leurs talents dans la recherche. Ils participent

à l’élaboration de la problématique et à l’action. Ils participent aussi aux prises de

décisions qui touchent la recherche et l’action. Ils sont capables de patience car la

recherche-action se vit dans le temps et on ne peut prévoir les résultats à l’avance.

Ils agissent en professionnels dans la démarche de la recherche. C’est le chercheur

qui initie l’ensemble des activités et qui propose le premier jet des différentes

synthèses après chaque réunion. Les participants font, à partir de ces données, une

nouvelle synthèse et la modifient selon les délibérations, les échanges, les

découvertes, l’identification d’éléments nouveaux et les actions prises ensemble.

Les participants orientent la recherche par le travail d’équipe. C’est par ce va-et-

vient entre la pratique et la réflexion du groupe que s’élabore un nouveau discours

sur le sujet choisi et traité par le groupe.

3.3) Rôle commun au chercheur et aux participants :

Le chercheur et les participants ont des engagements communs. Ils doivent tous

participer aussi bien à l’action qu’à la recherche. Ils doivent accepter cette démarche

de découverte en vivant l’incertitude qu’elle peut apporter comme des

questionnements, des découvertes et des interpellations diverses. Cette expérience

se vit à deux niveaux, c'est-à-dire individuellement et collectivement. Chacun peut

vivre différemment cette recherche et c’est l’interaction qui permettra de vivre une

expérience de groupe.

Une recherche-action demande plusieurs qualités : flexibilité, autonomie, curiosité,

adaptabilité, lâcher prise et aussi du leadership.

Page 494: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

474

4) Déroulement de la participation à ce projet de recherche et présentation de la

méthodologie

Les participants à cette recherche sont invités à participer à une recherche-action. La

recherche-action est une méthode qualitative qui est récente et qui a été développée

plus particulièrement dans les domaines de l’ethnologie, de l’éducation et de la

psychologie. Elle a plusieurs objectifs dont celui de décrire une situation, d’évaluer

un besoin précis, de proposer une intervention afin de combler le besoin,

d’expérimenter la solution proposée, d’évaluer l’intervention et ses conséquences et

de proposer une interprétation de l’action entreprise. La recherche-action, par son

aspect dynamique, produit des connaissances nouvelles par le mouvement de va-et-

vient que le chercheur expérimente entre la réflexion et l’action.

La recherche-action demande au chercheur de s’investir dans le milieu

d’intervention comme un acteur, de demander la collaboration de personnes

impliquées sur le terrain comme co-chercheurs. Dans une dynamique d’échange et

de partage mutuel, l’équipe recueillera des données pour les analyser, proposera une

intervention afin de répondre aux besoins ou relever le défi identifié. L’équipe

vérifiera l’impact de cette action dans le milieu et ensuite proposera une autre action

selon les résultats recueillis afin d’arriver aux résultats escomptés. Le fait de réaliser

la recherche ensemble et de dialoguer sur le défi à relever dans ce type de méthode

suscitent l’élaboration d’un nouveau savoir, la formation de l’équipe de chercheurs

et provoquent par le fait même un changement dans le milieu.

La démarche à entreprendre comprend donc une étape préalable à réaliser

individuellement et cinq grandes étapes à vivre en groupe. Ces étapes sont

les suivantes :

Étape préalable

Étape 1 - Réflexion initiale

Étape 2 - Précision du problème et de son contexte

Étape 3 - Planification de l'action

Étape 4 - Action et observation

Étape 5 - Évaluation et prise de décision 878

Ces étapes sont à reprendre à plusieurs reprises ce qui pourrait visuellement

donner l’image d’un escalier en colimaçon pour arriver à la résolution du ou

des problèmes. Pour illustrer cette démarche voici le schéma suggéré par

Louisette Lavoie et ses collaborateurs.879

878Idem, 186. 879 Idem, 187.

Page 495: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

475

Cette méthode sera le modèle de base pour la recherche tout en sachant qu’il y aura

des adaptations à apporter tout au long du processus.

4.4) Caractéristiques, avantages, risques ou inconvénients possibles liés à la

participation

La recherche-action a plusieurs caractéristiques. Le fait que le chercheur soit

impliqué et travaille avec les gens du terrain permet d’atteindre plusieurs objectifs

qui sont communs à l’ensemble du groupe impliqué. La recherche-action permet

d’atteindre quatre grands objectifs qui sont interreliés.

Recherche

La recherche-action permet de développer de nouvelles connaissances par le travail

d’observation, de proposition de nouvelles actions et d’interprétation des données

recueillies. C’est plus qu’une simple cueillette; c’est aussi la production d’un

nouveau savoir à partir du va-et-vient entre la pratique et la réflexion.

Page 496: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

476

Action

La recherche-action est une méthode qui permet aux différents acteurs de vérifier

leurs réflexions par l’action. Les gens font un premier diagnostic et ensuite

proposent des solutions alternatives et réalisent les plans élaborés. L’action et

l’intervention sur le terrain sont le laboratoire de cette méthode.

Formation

Le processus décrit en cinq étapes dans la partie précédente est un outil de

formation pour les personnes qui participent à la recherche-action. Il permet

l’acquisition de nouvelles connaissances par l’implantation de nouvelles actions, il

stimule l’acquisition de nouvelles habiletés et permet une intégration d’un nouveau

savoir par l’évaluation. C’est en sorte un genre de formation continue.

Transformation

Par l’autoévaluation présente dans la démarche de la recherche-action et la

proposition de nouvelles pratiques ou de nouvelles pistes d’interventions, les

conséquences de cette action sont la transformation du milieu. Le but de cette

méthode est de transformer le milieu :

Rappelons enfin que la recherche-action a pour objectif de développer la

connaissance, d'améliorer ou de mieux articuler les pratiques éducatives ou

sociales. Elle se propose également de modifier le système auquel

appartiennent les personnes concernées. 880

La recherche-action compte plusieurs avantages pour les participants en voici une

liste sommaire :

• Une meilleure compréhension de sa pratique

• Une réflexion accrue sur son activité de travail

• Une amélioration de l’attention portée à la complexité des interactions entre

les membres de l’équipe pastorale et les catéchètes bénévoles

• Une plus grande sensibilité à l’écart pouvant exister entre leurs aspirations et

leurs pratiques

• Une nouvelle façon de concevoir la catéchèse et le rôle des membres de

l’équipe pastorale paroissiale et des catéchètes bénévoles

• Développer des habiletés en intervention

• Un intérêt à identifier des théories qui peuvent s’appliquer de façon

personnelle et être utilisées comme hypothèses de travail.

880Idem, 185.

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477

Les inconvénients de la recherche-action :

La recherche-action a les inconvénients de ses avantages. Elle est une démarche de

découverte associée à l’investissement des participants. C’est une démarche qui

laisse place à l’imprévu ce qui peut apporter une certaine insécurité chez les

participants. C’est aussi une démarche qui observe, analyse et interprète les

pratiques des participants. Elle peut ouvrir à des questionnements inédits et faire

découvrir des aspects qui peuvent remettre en question des manières de faire.

Participer à une recherche-action demande d’être capable de se laisser émerveiller,

surprendre et interpeller par la situation étudiée.

4.5) Personnes ressources pour les participants :

Si au cours de la recherche une personne sent le besoin de rencontrer une personne

pour un soutien quelconque, Madame qui est une paroissienne et en même

temps à l’Institut de Pastorale des Dominicains est disponible pour

conseiller les personnes participantes à la recherche. On peut la rejoindre à son

travail ou à domicile par téléphone :

Numéro de téléphone à la maison :

Numéro au travail :

Courriel :

Si une personne au cours de la recherche vivait un inconfort psychologique et avait besoin

de rencontrer une personne ressource, Monsieur , psychologue, est disponible pour

aider les participants à la recherche.

Numéro de téléphone :

5) Durée de l’engagement :

La recherche proposée se vivra sur une période maximale d’un an. L’objectif est de

vivre cette démarche sur une période de trois à six mois. Les rencontres se feront au

rythme d’une à toutes les deux ou trois semaines; chaque rencontre durera de 120 à

150 minutes incluant une pause de 20 minutes. Le lieu sera déterminé au choix du

groupe de recherche. La démarche de recherche devrait nécessiter une dizaine de

rencontres.

Page 498: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

478

6) Participation volontaire et droit de retrait

Vous êtes libres de participer à ce projet de recherche. Vous pouvez aussi mettre fin

à votre participation sans conséquence négative ou préjudice et sans avoir à justifier

votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important

d’en prévenir le chercheur dont les coordonnées sont incluses dans ce document.

Tous les renseignements personnels vous concernant seront alors détruits.

7) Bibliographie sommaire

Dans cette section vous trouverez quelques suggestions d’articles et d’ouvrages qui

sont en lien avec la problématique qui est proposée. Cette proposition

bibliographique est un outil de référence pour ceux qui veulent participer à la

recherche.

Alberich, Emilio. « Identité et formation des catéchistes. » Dans Les fondamentaux de la

catéchèse, sous la direction de Emilio Alberich et collab., 349-64. Bruxelles,

Montréal: Lumen Vitae, Novalis, 2006.

Assemblée des évêques du Québec. Jésus Christ, chemin d'humanisation : orientations

pour la formation à la vie chrétienne. Montréal: Médiaspaul, 2004.

Bate, Struart. La formation des catéchistes [Cd-rom "Clerus Smart-cd]. Congrégation pour

le clergé, 2003 [cited juin 2006].

Béraud, Céline. « La participation des laïcs à la vie ecclésiale. Approche comparée avec les

modalités d'engagement en milieu associatif profane. » La Maison Dieu 241, no 1

(2005): 7-27.

Borras, Alphonse. « Nouvelles paroisses et nouvelle catéchèse : comment la catéchèse peut-

elle soutenir le redéploiement paroissial? » Lumen Vitae LVIII, no 4 (2003): 395-

408.

Charron, Jean-Marc. « La transmission de la foi au Québec... » Catéchèse 172 (2003): 83-

96.

Comte, Robert. « La formation d'adultes en responsabilité ecclésiale. » Lumen Vitae LII

(1997): 29-37.

Durand-Lutzy, Nicole et Office de catéchèse du Québec. Profession catéchète : dire sa foi

avec des mots d'aujourd'hui. Saint-Laurent, Québec: Fides-Médiaspaul formation

chrétienne, 2005.

Page 499: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

479

Église catholique. Congregatio pro clericis. Directoire général pour la catéchèse. Ottawa:

Conférence des évêques catholiques du Canada, 1997.

Église catholique. Pape (1978-2005 : Jean-Paul II) et Église catholique. Conférence des

évêques catholiques du Canada. Exhortation apostolique "Catechesi tradendae" de

Sa Sainteté le pape Jean-Paul II à l'épiscopat, au clergé, et aux fidèles de toute

l'Église, sur la catéchèse en notre temps. Ottawa: Conférence des évêques

catholiques du Canada, 1979.

Fossion, André. « Vers des communautés catéchisées et catéchisantes. » Nouvelle revue

théologique 126 (2004): 598-613.

Latreille, Sylvie. « Les bénévoles en catéchèse: quoi de neuf? » Lumen Vitae LVIII (2003):

409-23.

Office de catéchèse du Québec. Passages : Document d'orientation. Passages éd. Montréal:

Document d'orientation du chantier passages, 2005.

Provencher, Normand. « Vers la paroisse responsable et évangélisatrice. » Lumen Vitae

LIX (2004): 57-71.

Routhier, Gilles. Le devenir de la catéchèse. Pastorale et vie; 17. Montréal: Médiaspaul,

2003.

———. « L'initiation chrétienne au Québec : ou de la difficulté à enfanter. » L'Église

canadienne 34 (2001): 223-35.

Villepelet, Denis. L'avenir de la catéchèse. Éditions de l'Atelier : Éditions ouvrières ;

Lumen vitae, 2003.

———. « Les défis actuels de la tâche catéchétique en France. » Catéchèse 172 (2003): 21-

47.

Weaver, Liz. Le code canadien du bénévolat. Ottawa: Bénévoles Canada, 2001.

Page 500: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

480

Annexe 3 : Lettre d’invitation aux participants pour le

recherche-action

Le 23 avril 2007

Aux membres de l’équipe pastorale

Aux catéchètes bénévoles

Bonjour à tous,

J’ai demandé à Madame la secrétaire _______ avec l’accord de madame ________ qui est

coordonnatrice de la paroisse d’être l’intermédiaire pour vous envoyer la documentation

pour vous inviter au projet de recherche que je poursuis actuellement. Je procède de cette

manière de faire afin d’éviter tout conflit d’intérêt et vous donner toute la liberté requise

d’accepter ou de refuser de participer au projet de recherche sans aucun préjudice.

Vous trouverez dans cet envoi la documentation qui présente le projet de recherche et ce

qu’il demande comme temps pour sa réalisation. Je vous présente mon sujet de recherche

qui est :

L'objectif de la recherche est d'évaluer les impacts de l'implantation des parcours

catéchétique dans la paroisse plus précisément par la formation des catéchètes

bénévoles par l'équipe pastorale.

Voici mon hypothèse de recherche:

Un des rôles de l'équipe pastorale paroissiale dans la paroisse est celui d'animer le

service de catéchèse. Donc à interpeller, former, insérer, accompagner les catéchètes

bénévoles dans la vie paroissiale. L'équipe pastorale a aussi pour but par l'animation

du service de catéchèse de faciliter la participation des personnes catéchisées aux

diverses activités de la vie paroissiale.

Voici trois questions pour approfondir cette hypothèse:

1) Quelles seront les répercussions sur la communauté chrétienne et plus

particulièrement pour l'équipe pastorale paroissiale si la paroisse reprend son rôle

d'être un des principaux lieux de catéchèse dans l'Église locale?

2) Quelle peut être l'articulation entre ces trois ministères dans cette nouvelle

pratique : ministères ordonnées, ministères délégués et ministères baptismaux?

Page 501: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

481

3) Quelles seront les effets de la démocratisation du " savoir et savoir-faire" chez de

nombreux bénévoles dans une paroisse?

Je vous invite à donner une réponse en complétant le document ci-joint pour m’aider à

poursuivre ma recherche. Le nombre de participants que j’espère regrouper est d’environ 5

à 7 personnes.

Je vous remercie de l’attention que vous porterez à cette lettre.

Je vous rappelle que votre participation est libre et laisser à votre discrétion

Guy Guindon

……………………………………………………………………………………………

Projet de recherche :

« Quels sont les enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation des catéchètes

bénévoles par l’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila dans le diocèse

de Saint-Jérôme? »

Je vous invite à cocher un des choix possibles et de remettre le coupon Madame_____

au bureau du presbytère de la paroisse

Je participerai à la recherche : ______________

Je ne peux participer à la recherche : _________

Nom : _____________________________prénom :_________________________

Signature

Merci

Page 502: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

482

Annexe 4 : Formulaire de consentement à l’intention des

membres de l’équipe pastorale paroissiale et des

catéchètes bénévoles de la paroisse Sainte-Thérèse-

d’Avila

Investigateur principal :

Guy Guindon,

Prêtre modérateur de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

Introduction :

Avant d’accepter de participer à ce projet de recherche, veuillez prendre le temps de

lire et de comprendre les renseignements qui suivent. Ce formulaire d’information

et de consentement vous explique le but de ce projet de recherche, ses procédures,

avantages, risques et inconvénients. Il indique les coordonnées des personnes avec

qui communiquer au besoin. Il peut contenir des mots ou des expressions que vous

ne comprenez pas. Si c’est le cas, nous vous invitions à poser toutes les questions

que vous jugerez utiles au chercheur responsable du projet et aux auteurs membres

du personnel affecté au projet de recherche.

1) Présentation :

1.1) Identification du chercheur :

Le responsable de cette recherche est Guy Guindon. Il est prêtre modérateur de la

paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila.

1.2) Conflit d’intérêt :

Guy Guindon est le prêtre modérateur de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila. Les

personnes qui sont invitées à participer à la recherche action sont des membres de

l’équipe pastorale et des catéchètes bénévoles. Guy Guindon se trouve à être le

supérieur des membres de l’équipe pastorale et le prêtre responsable de la paroisse.

Page 503: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

483

Il se trouve en situation d’autorité avec les membres de l’équipe pastorale et les

catéchètes bénévoles.

2) Nature de l’étude

Les divers changements apportés par la loi 118 ont permis aux paroisses de

redevenir un des principaux lieux d’initiation chrétienne. La catéchèse est devenue

au cours des dernières années une priorité pour l’ensemble des personnes qui

travaillent dans les paroisses. L’Église du Québec s’est donnée comme mission de

mettre en place tout un service de formation à la vie chrétienne dans lequel se trouve

inséré la catéchèse. La catéchèse se vit dans une démarche qui s’écoule dans le

temps et en petits groupes.

L’implantation des parcours catéchétiques demande un investissement par les

communautés chrétiennes d’abord en personnel et aussi en matériel. Actuellement,

la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila offre deux parcours pour compléter l’initiation

chrétienne des enfants. Dans ces deux parcours sont insérées la préparation et la

célébration des sacrements du Pardon, de l’Eucharistie et de la Confirmation. Ces

parcours s’échelonnent sur quatre ans et demandent environ vingt rencontres par

année. Il y a quinze rencontres de catéchèse, quelques-unes sont d’ordre liturgique,

d’autres sont des activités caritatives, des fêtes familiales et les parcours se

terminent par une fête de fin d’année.

L'objectif de la recherche est d'évaluer les impacts de l'implantation des parcours

catéchétique dans la paroisse plus précisément par la formation des catéchètes

bénévoles par l'équipe pastorale.

Voici mon hypothèse de recherche:

Un des rôles de l'équipe pastorale paroissiale dans la paroisse est celui d'animer le

service de catéchèse. Donc à interpeller, former, insérer, accompagner les catéchètes

bénévoles dans la vie paroissiale. L'équipe pastorale a aussi pour but par l'animation

du service de catéchèse de faciliter la participation des personnes catéchisées aux

diverses activités de la vie paroissiale.

Voici trois questions pour approfondir cette hypothèse:

1) Quelles seront les répercussions sur la communauté chrétienne et plus

particulièrement pour l'équipe pastorale paroissiale si la paroisse reprend son rôle

d'être un des principaux lieux de catéchèse dans l'Église locale?

2) Quelle peut être l'articulation entre ces trois ministères dans cette nouvelles

pratique : ministères ordonnées, ministères délégués et ministères baptismaux?

Page 504: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

484

3) Quelles seront les effets de la démocratisation du " savoir et savoir-faire" chez de

nombreux bénévoles dans une paroisse?

3) Rôle de chacun

Dans cette section je présenterai le rôle respectif du chercheur, des participants et quels sont

les rôles qu’ils ont à faire en commun.

3.1) Rôle du chercheur :

Dans une recherche-action le chercheur assume plusieurs rôles. Il est à la fois

chercheur, participant et initiateur de la recherche. Le chercheur est celui qui

prépare la démarche préalable; il conçoit un plan de recherche, une problématique,

une première recherche bibliographique, des hypothèses de départ avec un premier

diagnostic. Il s’entoure d’une équipe avec qui il fera route ensemble comme

participants et on pourrait dire comme co-chercheurs. Il est d’abord celui qui invite

à se joindre au groupe et qui s’assure de la libre participation de chacun. Il distribue

la documentation de départ. Il est un facilitateur et il devient un membre de l’équipe

pour développer la recherche. Il accepte que les choses puissent changer, qu’on

puisse orienter différemment la recherche selon les travaux de l’équipe. Il est celui

qui permet à tous de s’exprimer et qu’une relation d’égalité se développe dans le

groupe. Il est aussi une personne ressource pour aider le groupe dans son

cheminement tout en s’assurant de la rigueur scientifique. Il est capable d’accepter

de vivre cette recherche dans un climat de changement et ainsi, vivre l’incertitude

liée à une recherche qui est en mouvement et qui peut apporter des éléments neufs et

inédits. Il fait connaître ses opinions de la même façon qu’il est attentif à celles des

autres et qui sont toutes aussi importantes pour le déroulement de la recherche. Il est

capable de prendre une distance critique par rapport aux autres participants et aussi

par rapport à son sujet de recherche.

Le chercheur se trouve en tension à plusieurs niveaux. Il est celui qui anime sans

imposer tout en guidant le groupe pour qu’il puisse atteindre ses objectifs de

recherche. Il présente au début de chaque rencontre une synthèse des délibérations

de la rencontre précédente que les co-chercheurs bonifient, modifient pour que

celle-ci reflète les travaux de l’équipe des chercheurs. Il est ouvert à la nouveauté

afin de confirmer, infirmer ou bâtir de nouvelles hypothèses de recherche et créer de

nouveaux matériaux. Il est celui qui tient le rythme de la recherche et travaille à sa

réalisation.

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485

3.2) Rôle des participants :

Les participants sont actifs dans une recherche-action. Ils collaborent à l’élaboration

des instruments. Ils s’impliquent selon leurs talents dans la recherche. Ils participent

à l’élaboration de la problématique et à l’action. Ils participent aussi aux prises de

décisions qui touchent la recherche et l’action. Ils sont capables de patience car la

recherche-action se vit dans le temps et on ne peut prévoir les résultats à l’avance.

Ils agissent en professionnels dans la démarche de la recherche. C’est le chercheur

qui initie l’ensemble des activités et qui propose le premier jet des différentes

synthèses après chaque réunion. Les participants font, à partir de ces données, une

nouvelle synthèse et la modifient selon les délibérations, les échanges, les

découvertes, les actions prises ensemble, l’identification d’éléments nouveaux. Les

participants orientent aussi la recherche par ce travail d’équipe. C’est par ce va-et-

vient entre la pratique et la réflexion du groupe s’élaborera un nouveau discours sur

le sujet choisi et traité par le groupe.

3.3) Rôle commun au chercheur et aux participants :

Le chercheur et les participants ont des engagements communs. Ils doivent tous

participer aussi bien à l’action qu’à la recherche. Ils doivent accepter cette démarche

de découverte en vivant l’incertitude qu’elle peut apporter tels questionnement,

découverte et interpellation. Cette expérience est aussi une expérience qui se vit à

deux niveaux c'est-à-dire individuellement et collectivement. Chacun peut vivre

différemment cette recherche et c’est l’interaction qui permettra de vivre une

expérience de groupe.

Une recherche-action demande de vivre plusieurs qualités : flexibilité, autonomie,

interrogation, adaptabilité, lâcher prise et aussi du leadership.

4) Déroulement de la participation à ce projet de recherche et présentation de la

méthodologie

Les participants à cette recherche sont invités à participer à une recherche action.

La recherche-action est une méthode qualitative qui est récente et qui a été

développée plus particulièrement dans les domaines de l’ethnologie, de l’éducation

et de la psychologie. Elle a plusieurs objectifs dont celui de décrire une situation,

d’évaluer un besoin précis, de proposer une intervention afin de combler le besoin,

d’expérimenter la solution proposée, d’évaluer l’intervention et ses conséquences et

de proposer une interprétation de l’action entreprise. La recherche-action, par son

aspect dynamique, produit des connaissances nouvelles par le mouvement de va-et-

vient que le chercheur expérimente entre la réflexion et l’action.

Page 506: De la « préparation aux sacrements » à la « réciprocité … · 2018-04-25 · iii Résumé Comment faire le passage en paroisse, après la laïcisation des écoles publiques

486

La recherche-action demande au chercheur de s’investir dans le milieu

d’intervention comme un acteur, de demander la collaboration de personnes

impliquées sur le terrain comme co-chercheurs. Dans une dynamique d’échange et

de partage mutuel, l’équipe recueillera des données pour les analyser, proposera une

intervention afin de répondre aux besoins ou relever le défi identifié. L’équipe

vérifiera l’impact de cette action dans le milieu et ensuite proposera une autre action

selon les résultats recueillis afin d’arriver aux résultats escomptés. Le fait de réaliser

la recherche ensemble et de dialoguer sur le défi à relever dans ce type de méthode

suscitent l’élaboration d’un nouveau savoir, la formation de l’équipe de chercheurs

et provoquent par le fait même un changement dans le milieu.

La démarche à entreprendre comprend donc une étape préalable à réaliser

individuellement et cinq grandes étapes à vivre en groupe. Ces étapes sont

les suivantes :

Étape préalable

Étape 1 - Réflexion initiale

Étape 2 - Précision du problème et de son contexte

Étape 3 - Planification de l'action

Étape 4 - Action et observation

Étape 5 - Évaluation et prise de décision 881

Ces étapes sont à reprendre à plusieurs reprises ce qui pourrait visuellement

donner l’image d’un escalier en colimaçon pour arriver à la résolution du ou

des problèmes. Pour illustrer cette démarche je vais prendre le schéma

suggéré par Louisette Lavoie et ses collaborateurs.882

881 Idem, 186. 882 Idem, 187.

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487

Cette méthode sera mon modèle de base pour ma recherche tout en sachant

qu’il y aura des adaptations à apporter tout au long du processus. La

recherche-action a des caractéristiques qui sont avantageuses pour une

recherche.

4.4) Avantages, risques ou inconvénients possibles liés à la participation

La recherche-action a plusieurs avantages. Le fait que le chercheur soit impliqué et

travaille avec les gens du terrain permet d’atteindre plusieurs objectifs qui sont

communs à l’ensemble du groupe impliqué. La recherche-action permet d’atteindre

quatre grands objectifs qui sont inters reliés.

Recherche

La recherche-action permet de développer de nouvelles connaissances par le travail

d’observation, de proposition de nouvelles actions et d’interprétation des données

recueillies. C’est plus qu’une simple cueillette; c’est aussi la production d’un

nouveau savoir à partir du va-et-vient entre la pratique et la réflexion.

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Action

La recherche-action est une méthode qui permet aux différents acteurs de vérifier

leurs réflexions par l’action. Les gens font un premier diagnostic et ensuite

proposent des solutions alternatives et réalisent les plans élaborés. L’action et

l’intervention sur le terrain sont le laboratoire de cette méthode.

Formation

Le processus décrit en cinq étapes dans la partie précédente est un outil de

formation pour les personnes qui participent à la recherche-action. Il permet

l’acquisition de nouvelles connaissances par l’implantation de nouvelles actions, il

stimule l’acquisition de nouvelles habiletés et permet une intégration d’un nouveau

savoir par l’évaluation. C’est en sorte un genre de formation continue.

Transformation

Par l’autoévaluation présente dans la démarche de la recherche action e processus et

par la proposition de nouvelles pistes d’interventions, les conséquences de cette

action sont la transformation du milieu. Le but de cette méthode est de transformer

le milieu :

Rappelons enfin que la recherche-action a pour objectif de développer la

connaissance, d'améliorer ou de mieux articuler les pratiques éducatives ou

sociales. Elle se propose également de modifier le système auquel

appartiennent les personnes concernées883.

Les inconvénients de la recherche action :

La recherche action a les inconvénients de ses avantages. Elle est une démarche de

découverte associée à l’investissement des participants. C’est aussi une démarche

qui laisse place à l’imprévu ce qui peut apporter une certaine insécurité chez les

participants. C’est aussi une démarche qui observe analyse et interprète les pratiques

des participants. Elle peut ouvrir des questionnements inédits et faire découvrir des

aspects qui peuvent remettre en question des manières de faire. Pour participer à une

recherche action cela demande d’être capable de se laisser émerveiller, surprendre et

interpeller par la situation étudiée.

883 Idem, 185.

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4.5) Personnes ressources pour les participants :

Si au cours de la recherche une personne sent le besoin de rencontrer une personne

pour un soutien Madame Sylvie Latreille qui est une paroissienne et en même temps

directrice adjointe pour L’Institut Pastorale des Dominicains est disponible pour

rencontrer les différentes personnes participantes à la recherche. On peut la

rejoindre à son travail ou à domicile par téléphone :

Madame X :

Numéro de téléphone à la maison : XXX-XXX-XXXX

Numéro au travail : XXX-XXX-XXXX

Courriel : [email protected]

5) Durée de l’engagement :

La recherche proposée se vivra sur une période maximale de un an. L’objectif est de

vivre cette démarche sur une période de six à huit mois. Les rencontres se feront à

un rythme d’une à toutes les trois semaines et chaque rencontre durera de 120 à 150

minutes incluant une pause de 20 minutes. Le choix du lieu sera le choix du groupe

de recherche. La démarche de recherche devrait prendre une dizaine de rencontres.

6) Participation volontaire et droit de retrait

Cette recherche est complètement indépendante de la vie paroissiale. C’est un projet

qui est lié à un projet de recherche doctorale. Chacune des personnes qui sont

invitée à participer à cette recherche est libre d’accepter et de refuser sans aucune

répercussion ou contrainte. La participation est volontaire et liée au choix de

chacune des personnes. Toute personne qui accepte de participer à cette recherche

peut se retirer en tout temps sans préjudice. La participation à cette recherche

n’enlève en rien les droits des individus.

Pour le bon fonctionnement de la recherche une personne sera invitée à se retirer si

elle a manqué plus de trois rencontres consécutives.

7) Confidentialité et gestion des données

Les entrevues de groupe seront enregistrées et c’est le responsable de la recherche

qui fera un résumé synthèse à partir des échanges du groupe. Seulement le

chercheur responsable aura accès aux enregistrements. Un rapport synthèse

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dépersonnalisé de manière irréversible sera présenté au groupe afin de l’approuver

comme document témoin du cheminement de l’équipe de recherche. À la fin de la

démarche un rapport synthèse sera confectionné par l’ensemble des chercheurs et

approuvé par eux. C’est à partir de ces documents que le chercheur poursuivra son

travail de recherche et écrira sa thèse.

Les enregistrements seront détruits à la fin de la recherche et les rapports d’étape et

le rapport synthèse seront mis en annexe de la thèse. Les enregistrements seront

détruits en présence d’un des participants de l’équipe de recherche.

Le chercheur assurera la confidentialité à l’intérieur des limites prescrites par les

lois québécoises et canadiennes selon le sens des articles 38 et 39 de la loi sur la

protection de la jeunesse.

8) Pour des renseignements supplémentaires

Dans l’annexe A je présente quelques documents qui sont liés au sujet et peuvent

aider les participants dans leur discernement pour participer à cette recherche.

9) Coordonnées du chercheur :

Guy Guindon,

Adresse :

Ville :

Pays :

Code postal :

Téléphone cellulaire :

Téléphone du bureau :

Courriel :

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10) Remerciements :

Je tiens à remercier toutes les personnes qui vont participer à cette recherche. Votre

collaboration est très précieuse pour l’étude de la catéchèse dans les paroisses. Votre

participation est un apport très important pour la réalisation de cette recherche qui se veut

un apport dans la réflexion actuelle sur cette nouvelle pratique qui émerge au Québec dans

l’Église Catholique.

11) Signatures

Je soussigné(e)

_______________________________________________________________ Consens

librement à participer à la recherche intitulé : « Quels sont les enjeux ecclésiologiques et

pastoraux de la formation des catéchètes bénévoles par l’équipe pastorale de la paroisse

Sainte-Thérèse-d’Avila dans le diocèse de Saint-Jérôme? ». J’ai pris connaissances du

formulaire et je me déclare satisfait des explications, précisions et réponses que le

chercheur m’a fournies quant à ma participation à ce projet. Je comprends que je peux

mettre fin à ma participation en tout temps sans avoir de conséquence négative ou de

préjudice et sans devoir justifier ma décision.

____________________________________________________Date :_______________

Signature du participant, de la participante

Je déclare avoir tout expliqué le but, la nature, les avantages, les risques et les

inconvénients du projet de recherche au participant, avoir répondu au meilleur de ma

connaissance aux questions posées et avoir fait l’appréciation de la compréhension du

participant.

___________________________________________________Date :________________

Signature du chercheur

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12) Plaintes ou critiques

Voici les coordonnées de l’ombudsman de l’Université Laval pour ceux qui voudrait le

contacter ou formuler une plainte ou faire des critiques à l’égard de sa participation au

projet de recherche :

Ombudsman

Vous vous sentez lésé dans vos droits ou vous vous croyez victime d'une injustice ?

Vous souhaitez obtenir de l'information ou des conseils ?

Vous avez tout tenté ?

Contactez-nous :

• Téléphone : (418) 656-3081 (notre boîte vocale est confidentielle)

• Courriel : [email protected]

(la sécurité de ce moyen de communication ne peut pas être garantie)

• Télécopie/Fax : (418)-656-3846

(ce télécopieur est exclusif au bureau de l'ombudsman)

• En personne : le Bureau de l'ombudsman est situé au local 3320, Pavillon Alphonse-Desjardins, Cité universitaire,

Québec (Québec) Canada G1K 7P4 o Réception sur rendez-vous au bureau de l'ombudsman de 8h30 à 12h (sauf le lundi et le vendredi) et de

13h30 à 16h30 (sauf le vendredi), ou à l’extérieur selon les circonstances

o Réception sans rendez-vous selon les disponibilités de l'ombudsman : les mardis, mercredis et jeudis de

9h30 à 12h, et de 13h30 à 16h

Copie de ………………………………

Projet approuvé par le Comité d’éthique de l’Université Laval (no

d’approbation________________, le ______________________

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Annexe 5 : Formulaire d’engagement à la confidentialité

Titre de l’étude : Enjeux ecclésiologiques et pastoraux de la formation des catéchètes bénévoles par l’équipe pastorale de la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila dans le diocèse de Saint-Jérôme.

Cette recherche est réalisée par Guy Guindon, étudiant au doctorat sous la direction de

Alain Faucher professeur à la Faculté de Théologie et de sciences religieuses de

l’Université Laval.

Il m’a été expliqué que :

1. Le but de la recherche est de réfléchir sur les enjeux ecclésiologiques et pastoraux de

l’implantation des parcours de catéchèse dans la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila et plus

particulièrement sur la nouvelle pratique de la formation des catéchètes bénévoles par

l’équipe pastorale paroissiale.

2. Pour réaliser cette recherche, les participants feront une recherche-action qui sera animé

par le chercheur. Cette recherche se fera par des entrevues de groupe en suivant les

différentes étapes de la recherche-action : réflexion initiale, précision du problème et de

son contexte, planification de l’action, action et observation. Par la signature d’un

formulaire de consentement écrit je m’engage à assurer la confidentialité des données

recueillies.

3. Comme participant à cette recherche, j’aurai accès à des données qui sont confidentielles.

En signant ce formulaire, je reconnais avoir pris connaissance du formulaire de

consentement écrit signé avec les participants et je m’engage à :

- À assurer la confidentialité des données recueillies, soit à ne pas divulguer l’identité

des participants ou toute autre donnée permettant d’identifier un participant, un

organisme ou des intervenants des organismes collaborateurs;

- À assurer la sécurité physique et informatique des données recueillies;

- À ne pas conserver de copie des documents contenant des données confidentielles.

Je, soussigné, _______________________________, m’engage à assurer la confidentialité

des données auxquelles j’aurai accès.

______________________________________________________ Date

Sylvie Sauvé, secrétaire à la paroisse Sainte-Thérèse-d’Avila

_____________________________________________ Date

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Guy Guindon étudiant et Chercheur

Numéro d'approbation du Comité d’éthique à la recherche de l’Université Laval : 2007-

XXX, le XX mois 2007

Si j’ai des questions à propos de la recherche, je peux contacter le chercheur principal, Guy

Guindon XXX-XXX-XXXX. Pour toute plainte ou critique concernant le projet, je peux

entrer en communication avec l’Ombudsman de l’Université Laval au 418-656-3081 ou par

courriel au [email protected].