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| DOCUMENT DE TRAVAIL | COMBLER LE FOSSÉ : DE LA POLITIQUE À L’ACTION SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX DE LA SANTÉ Tous pour l’équité BRÉSIL | RIO DE JANEIRO | 19–21 OCTOBRE 2011 déterminants sociaux de la santé Conférence mondiale sur les

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| Document De travail |

COMBLER LE FOSSÉ :De la PolitiQue À l’action Sur leS

DÉterminantS SociauX De la SantÉ

Tous pour l’équité

BRÉS I L |R I O D E J A N E I R O | 19–21 OCTOBRE 2011

déterminants sociaux de la santé Conférence mondiale sur les

Tous pour l’équitéTous pour l’équité

| Document De travail |

| Document De travail |

COMBLER LE FOSSÉ :De la PolitiQue À l’action Sur leS

DÉterminantS SociauX De la SantÉ

Tous pour l’équité

BRÉS I L |R I O D E J A N E I R O | 19–21 OCTOBRE 2011

déterminants sociaux de la santé Conférence mondiale sur les

Tous pour l’équité

Remerciementsle document de travail pour la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé intitulé « combler le fossé : de la politique à l’action sur les déterminants sociaux de la santé » a été réalisé sous la direction générale de rüdiger Krech (directeur). le principal auteur et rédacteur de ce document est Kumanan rasanathan. un fi nancement destiné à aider à la préparation et à la réalisation de ce document de travail a été apporté par le gouvernement du Brésil.

carmen amela Heras, ilona Kickbusch, Bernardo Kliksberg, taru Koivisto, Jennifer lee, rene loewenson, Belinda loring, miranda macPherson, michael marmot, Don matheson, lorena ruano, victoria Saint, Jeanette vega et David Woodward ont apporté des contributions importantes à ce travail sous la forme de textes, de fi gures et d’encadrés.

le Groupe consultatif, le comité d’organisation et les coordinateurs régionaux de l’omS pour la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé ont apporté des éléments clés et ont effectué une révision collégiale des premières versions de ce document de travail. ces groupes étaient composés de Silvio albuquerque, carmen amela Heras, mohammed assai, eduardo Barbosa, anjana Bhushan, Jane Billings, Paulo Buss, nils Daulaire, maria luisa escorel, Kira Fortune, luiz a. c. Galvão, Suvajee Good, ilona Kickbusch, Bernardo Kliksberg, taru Koivisto, rüdiger Krech, michael marmot, alvaro matida, malebona Precious matsoso, abdi momin, Davison munodawafa, Jai narain, luiz odorico, rômulo Paes de Sousa, alberto Pellegrini, Felix rigoli, carlos Santos-Burgoa, tone torgersen, agis tsouros, eugenio villar montesinos, Susan Watts et erio Ziglio.

Daniel albrecht, Francisco armada, alanna armitage, Jim Ball, leopold Blanc, ashley Bloomfi eld, ludo Bok, Josiane Bonnefoy, matthias Braubach, Danny Broderick, chris Brown, Kevin Buckett, andrew cassels, Genevieve chedeville-murray, maggie Davies, Barbara de Zalduondo, marama ellis, Sharon Friel, michelle Funk, Peter Goldblatt, volker Hann, Patrick Kadama, rania Kawar, meri Koivusalo, theodora Koller, Jacob Kumaresan, ronald labonté, eero lahtinen, Pierre legoff, michael lennon, margot lettner, Bridget lloyd, Knut lönnroth, Brian lutz, Peter mamacos, nanoot mathurapote, Hooman momen, Davide mosca, carles muntaner, Benjamin nganda, monireh obbadi, eeva ollila, Jeffrey o’malley, cyril Pervilhac, maravand Pinto, Sandy Pitcher, amit Prasad, mario raviglione, marilyn rice, Katja rohrer, ana lucia ruggiero, Xenia Scheil-adlung, Gerard Schmets, ted Schrecker, claudio Schuftan, Hani Serag, alaka Singh, anand Sivasankara Kurup, Zsofi a Szilagyi, martin tobias, Peter tugwell, nicole valentine, vivian Welch, Deborah Wildgoose, carmel Williams, Holly Wong, ilcheong Yi et Hongwen Zhao ont également apporté de précieuses contributions à ce travail, sous la forme de commentaires, de suggestions, de critiques et d’assistance.

D’autres contributions précieuses ont été adressées à l’omS dans le cadre de la consultation publique en ligne organisée pour la première version de ce document de travail en mai et juin 2011. le document de travail tire également parti des travaux précédents de la commission des déterminants sociaux de la santé.

la production éditoriale et la consultation publique ont été dirigées par victoria Saint. la version originale du document a été relue et corrigée par Julie mccoy.

nathalie chenavard, lucy mshana, Susanne nakalembe, Joyce oseku et nuria Quiroz ont fourni un soutien administratif dans la préparation du document de travail.

Catalogage à la source: Bibliothèque de l’OMS:combler le fossé :de la politique à l’action sur les déterminants sociaux de la santé : document de travail.

"ce document de travail vise à orienter les débats lors de la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé [rio de Janeiro, Brésil, 19-21 octobre, 2011]"

1.Facteur socioéconomique. 2.Gestion ressources santé. 3.accessibilité service santé. 4.Défense malade. i.organisation mondiale de la Santé.

iSBn 978 92 4 250240 4 (classifi cation nlm: Wa 525)

© Organisation mondiale de la Santé 2011tous droits réservés. les publications de l’organisation mondiale de la Santé sont disponibles sur le site Web de l'omS (www.who.int) ou peuvent être achetées auprès des editions de l'omS, organisation mondiale de la Santé, 20 avenue appia, 1211 Genève 27 (Suisse) (téléphone : +41 22 791 3264 ; télécopie : +41 22 791 4857 ; courriel : [email protected] . les demandes relatives à la permission de reproduire ou de traduire des publications de l’omS – que ce soit pour la vente ou une diffusion non commerciale – doivent être envoyées aux editions de l'omS via le site Web de l'omS à l'adresse http://www.who.int/about/licensing/copyright_form/en/index.html

les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y fi gurent n’impliquent de la part de l’organisation mondiale de la Santé aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. les lignes en pointillé sur les cartes représentent des frontières approximatives dont le tracé peut ne pas avoir fait l'objet d'un accord défi nitif.

la mention de fi rmes et de produits commerciaux ne signifi e pas que ces fi rmes et ces produits commerciaux sont agréés ou recommandés par l’organisation mondiale de la Santé, de préférence à d’autres de nature analogue. Sauf erreur ou omission, une majuscule initiale indique qu’il s’agit d’un nom déposé.

l’organisation mondiale de la Santé a pris toutes les précautions raisonnables pour vérifi er les informations contenues dans la présente publication. toutefois, le matériel publié est diffusé sans aucune garantie, expresse ou implicite. la responsabilité de l'interprétation et de l'utilisation dudit matériel incombe au lecteur. en aucun cas, l'organisation mondiale de la Santé ne saurait être tenue responsable des préjudices subis du fait de son utilisation.

Conception et mise en page : paprika-annecy.com

Traduction : locordia communications et agence de la santé publique du canada. la version française a été relue par Pascal le Quéré.

Crédits photos : photo du Sous-Directeur general : omS (p. vii); résumé analytique : craig cloutier, creative commons (p. 4); chapitres 1er à 5 : Zoltan Balogh (p. 11); © triangle, creative commons (p. 17); © omS/Harold ruiz (p. 23); hdptcar, creative commons (p. 24); Jakob montrasio, creative commons (p. 29); Zoltan Balogh (p. 32); © ocHa, creative commons (p. 35); conclusion : © Pierre Holtz/uniceF, creative commons (p. 43).

les photos fi gurant dans ce document sont utilisées aux seules fi ns d’illustration ; elles n’ont aucune signifi cation quant à un état de santé, des attitudes, des comportements ou des actions concernant l’une quelconque des personnes apparaissant sur les photos.

Imprimé au Brésil

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taBle DeS matiÈreS

AVANT-PROPOS VII

ABRÉVIATIONS 1

RÉSUMÉ ANALYTIQUE 2

INTRODUCTION 6

CADRE CONCEPTUEL ET FONDEMENT DE L’ACTION SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX 7

CONSIDÉRATIONS POLITIQUES DANS LA MISE EN ŒUVRE DE L’ACTION SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX 8Progrès, obstacles et effet des crises 8Principes et conditions d’action 10

1. LA GOUVERNANCE COMME MOYEN DE LUTTE CONTRE LES CAUSES PROFONDES DES INÉGALITÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ : MISE EN ŒUVRE DE L’ACTION SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX DE LA SANTÉ 11

construire une bonne gouvernance pour agir sur les déterminants sociaux 13 mise en œuvre d’une action intersectorielle 15

2. PROMOTION DE LA PARTICIPATION : UNE DIRECTION COMMUNAUTAIRE POUR AGIR SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX 17

création des conditions pour la participation 18 négocier la participation et garantir la représentativité 21 Faciliter le rôle de la société civile 21

3. LE RÔLE DU SECTEUR DE LA SANTÉ, NOTAMMENT DES PROGRAMMES DE SANTÉ PUBLIQUE, DANS LA RÉDUCTION DES INÉGALITÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ 23

mettre en œuvre le rôle du secteur de la santé dans la gouvernance pour les déterminants sociaux 24 réorienter les services de soins de santé et les programmes de santé publique pour réduire les inégalités 25 instituer l’équité dans la gouvernance des systèmes de santé 26

4. ACTION MONDIALE SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX : ALIGNEMENT DES PRIORITÉS ET DES INTERVENANTS 29

alignement des intervenants mondiaux 30 alignement des priorités mondiales 33

5. SUIVI DES PROGRÈS : MESURE ET ANALYSE AFIN D’ORIENTER LES POLITIQUES ET DE RENFORCER LA RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE DE DÉTERMINANTS SOCIAUX 35

identifi er des sources et collecter des données 36 Décomposer les données 37 Sélectionner des indicateurs et des objectifs 37 avancer malgré l’absence de données systématiques 38 Diffuser les informations sur les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux afi n d’orienter l’action 39 intégrer les données dans les processus politiques 39 Évaluer l’impact de différentes options politiques sur la santé et l’équité 39

CONCLUSION : DES MESURES URGENTES 42

GLOSSAIRE 44

RÉFÉRENCES 46

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)VI | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)VI |vi | World conference on Social Determinants of Health (WcSDH)

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avant-ProPoS

P endant la durée nécessaire à la lecture de ce document de travail, des centaines de personnes vont mourir inutilement en raison d’inégalités en matière de santé, c’est-à-dire des différences de

niveau de santé injustes et évitables ou remédiables entre différents groupes de population. les inégalités en matière de santé provoquent des souffrances inutiles et sont la conséquence de conditions sociales défavorables et de politiques publiques ineffi caces. ces inégalités sont révélatrices des mêmes problèmes qui entravent le développement, un environnement durable, le bien-être des sociétés et la capacité des sociétés à offrir une égalité des chances pour tous. les inégalités en matière de santé sont un problème pour tous les pays et refl ètent non seulement les différences de revenus et de richesses, mais également des différences de possibilités liées à des facteurs comme l’appartenance ethnique et le racisme, la classe sociale, le sexe, le niveau d’éducation, le handicap, l’orientation sexuelle et la situation géographique. ces différences ont des conséquences profondes et représentent l’effet de ce que nous connaissons sous le nom de déterminants sociaux de la santé.

cependant, les inégalités en matière de santé peuvent, par défi nition, être évitées. malheureusement, des millions de personnes meurent chaque année de maladies que l’on sait prévenir. en 2008, la commission des déterminants sociaux de la santé de l’omS a établi des recommandations visant à créer un ensemble complet de mesures nécessaires pour « combler le fossé » en agissant sur les déterminants sociaux dans tous les secteurs de la société. après avoir examiné le rapport de la commission lors de l’assemblée mondiale de la Santé en 2009, les États membres ont décidé de mettre en pratique ces recommandations avec l’adoption de la résolution WHa62.14 intitulée « réduire les inégalités en matière de santé par une action sur les déterminants sociaux de la santé ».

conformément à celle-ci, de nombreux pays mettent en œuvre des actions sur les déterminants sociaux, avec des progrès encourageants vers la réduction des inégalités en matière de santé dans quelques cas. ces dernières années, de nombreux pays ont pris d’importantes mesures en direction d’une couverture santé universelle. on comprend mieux la contribution de la santé à d’autres objectifs tels que la cohésion sociale et le développement économique, ainsi que la nécessité de coordonner les efforts des différents secteurs pour améliorer la santé. les pays sont aujourd’hui plus nombreux à décomposer leurs données afi n de dévoiler les inégalités sanitaires

masquées par les moyennes nationales. il est toutefois nécessaire de renforcer et d’accélérer ces efforts. Depuis le lancement du rapport de la commission en 2008, le monde a connu un certain nombre de crises qui ont renforcé les inégalités mondiales en matière de santé. Par conséquent, il est urgent que nous, dans les gouvernements, la société civile, le secteur privé et les organisations internationales, redoublions d’efforts pour agir sur les déterminants sociaux afi n de lutter contre les inégalités en matière de santé.

Dans ce contexte, la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé représente une occasion de premier plan. ce document de travail a pour objectif d’orienter les actions et de contribuer à atteindre le but de la conférence mondiale, conformément au mandat qu’elle a reçu par la résolution WHa62.14 : partager les expériences sur les façons de répondre aux défi s posés par les inégalités en matière de santé et susciter un engagement en faveur de la mise en œuvre urgente d’actions réalisables sur les déterminants sociaux dans tous les pays. ce document n’entend pas fournir un modèle absolu, mais expose plutôt les composantes essentielles que tous les pays doivent intégrer à leur propre contexte lors de l’adoption d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. les discussions de la conférence mondiale examineront ces thèmes de plus près et montreront comment il est possible, dans tous les pays, de mettre en pratique les politiques relatives aux déterminants sociaux de la santé afi n d’améliorer la santé, de réduire les inégalités sanitaires et de promouvoir le développement.

Dr marie-Paule KienySous-Directeur général

innovation, information, bases factuelles et recherche

organisation mondiale de la Santé

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)1 |

aBrÉviationS

aiS action intersectorielle

commission commission des déterminants sociaux de la santé

conférence mondiale conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé

cSu couverture santé universelle

Déterminants sociaux Déterminants sociaux de la santé

eDS enquête démographique et sanitaire

eiS Évaluation de l’impact sur la santé

micS enquêtes en grappes à indicateurs multiples

mnt maladies non transmissibles

nZDep indice de pauvreté de la nouvelle-Zélande

ocDe organisation de coopération et de développement économiques

oit organisation internationale du travail

omD objectifs du millénaire pour le développement

omS organisation mondiale de la Santé

onu organisation des nations unies

oSc organisation de la société civile

PiB Produit intérieur brut

PnB Produit national brut

PnuD Programme des nations unies pour le développement

SdtP la santé dans toutes les politiques

Sida Syndrome d’immunodéfi cience acquise

SPF-i initiative pour un socle de protection sociale

ue union européenne

unaSur union des nations sud-américaines

uneSco organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture

urban Heart outil d’évaluation et d’intervention pour l’équité en matière de santé en milieu urbain

viH virus de l’immunodéfi cience humaine

COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail | | 2

rÉSumÉ analYtiQue

c e document de travail vise à orienter les débats lors de la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (« la conférence mondiale ») sur les moyens que les

pays peuvent utiliser pour agir sur les déterminants sociaux de la santé (« les déterminants sociaux »), y compris les recommandations de la commission des déterminants sociaux de la santé (« la commission »). les données sur les pays où des progrès ont été réalisés en matière de prise en compte des déterminants sociaux et de réduction des inégalités en matière de santé montrent que des actions sont nécessaires dans les cinq composantes principales qui ont été choisies comme les cinq thèmes de la conférence mondiale :

1. la gouvernance comme moyen de lutte contre les causes profondes des inégalités en matière de santé : mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociaux de la santé;

2. Promotion de la participation : une direction communautaire pour agir sur les déterminants sociaux;

3. le rôle du secteur de la santé, notamment des programmes de santé publique, dans la réduction des inégalités en matière de santé;

4. action mondiale sur les déterminants sociaux : alignement des priorités et des intervenants;

5. Suivi des progrès : mesure et analyse afi n d’orienter les politiques et de renforcer la responsabilisation en matière de déterminants sociaux.

Si les actions concernées doivent être adaptées aux besoins et au contextes spécifi ques de chaque pays, ces composantes forment ensemble les éléments constitutifs d’une « approche fondée sur les déterminants sociaux » qui refl ète le besoin d’agir sur les déterminants sociaux dans l’ensemble de la société.

ce document de travail et la conférence mondiale s’appuient tous deux sur le travail important de la commission, conformément à ce qui a été approuvé par la résolution WHa62.14 de l’assemblée mondiale de la Santé. le thème proposé concerne les modalités de mise en œuvre des recommandations de la commission (voir tableau 1), qui ont été regroupées sous trois objectifs : améliorer les conditions de vie quotidiennes; lutter contre les inégalités dans la répartition du pouvoir, de l’argent et des ressources; mesurer et comprendre le problème et évaluer l’impact des actions.

cadre conceptuel et fondement de l’action sur les déterminants sociauxla majeure partie du fardeau mondial des maladies et les causes principales des inégalités en matière de santé, qui sont présentes dans tous les pays, découlent des conditions dans lesquelles les personnes naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent. ces conditions sont dénommées déterminants sociaux de la santé,

terme consacré utilisé pour englober les déterminants sociaux, économiques, politiques, culturels et environnementaux de la santé. les déterminants les plus importants sont ceux qui génèrent une stratifi cation au sein d’une société (les déterminants structurels), comme la répartition des revenus, la discrimination (par exemple, en raison du sexe, de la classe sociale, de l’appartenance ethnique, d’un handicap ou d’une orientation sexuelle) et les structures politiques et de gouvernance qui renforcent les inégalités en matière de pouvoir économique au lieu de les réduire. les mécanismes structurels qui ont des répercussions sur les positions sociales des individus constituent la cause profonde des inégalités en matière de santé. les disparités imputables à ces mécanismes déterminent le statut et le niveau de santé des individus à travers leur impact sur des déterminants intermédiaires tels que les conditions de vie, les conditions psychosociales, des facteurs comportementaux et/ou biologiques ainsi que le système sanitaire à proprement parler.

le fondement de l’action sur les déterminants sociaux de la santé repose sur trois grands thèmes. Premièrement, la réduction des inégalités en matière de santé constitue un impératif moral. Deuxièmement, il est essentiel d’améliorer la santé et le bien-être, de promouvoir le développement et d’atteindre les objectifs en matière de santé en général. troisièmement, il est nécessaire d’agir sur un certain nombre de priorités sociétales, au-delà de la santé à proprement parler, qui dépendent d’une meilleure équité en santé.

considérations politiques dans la mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociauxles faibles avancées dans la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux refl ètent en partie l’inadéquation de la gouvernance aux niveaux local, national et mondial pour traiter les problèmes clés du XXie siècle. les inégalités en matière de santé remettent en cause la division traditionnelle des sociétés et de leurs gouvernements en domaines cloisonnés. la réduction de ces inégalités demande, plutôt que ces divisions, des réponses politiques cohérentes dans tous les secteurs et les pays, avec un engagement politique ferme de toutes les parties. les principes généraux, qui doivent être adaptés aux besoins et au contexte de chaque pays, peuvent être identifi és pour surmonter les obstacles politiques et techniques qui entravent l’action sur les déterminants sociaux. Premièrement, l’action sur les déterminants sociaux visant à réduire les inégalités en matière de santé exige une application continue et à long terme. Des progrès peuvent néanmoins être visibles à court terme et les pays doivent commencer à mettre en œuvre une approche fondée sur les déterminants sociaux le plus tôt possible. Deuxièmement, l’étape initiale consiste à renforcer la sensibilisation du public aux inégalités en santé et aux déterminants sociaux de la santé. troisièmement, l’équité en santé et le bien-être doivent être considérés comme un objectif prioritaire pour le gouvernement et

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)3 |

l’ensemble de la société. Quatrièmement, il est essentiel de veiller à la coordination et à la cohérence de l’action sur les déterminants sociaux. cinquièmement, une approche fondée sur les déterminants sociaux ne constitue pas un « programme » qui est appliqué, mais nécessite une approche globale qui tienne compte de l’ensemble des cinq composantes appliquées dans l’ensemble de la société.

Stratégies prioritaires pour la mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociaux de la santéles stratégies prioritaires d’action peuvent être identifi ées dans chacune des cinq composantes :

1. la gouvernance comme moyen de lutte contre les causes profondes des inégalités en matière de santé

renforcer la bonne gouvernance de l’action sur les déterminants sociaux. Pour apporter des réponses politiques cohérentes afi n de réduire les inégalités en matière de santé, il est impératif d’établir une gouvernance qui clarifi e les responsabilités individuelles et collectives des différents acteurs et des différents secteurs (par exemple, le rôle des individus, des différentes composantes de l’État, de la société civile, des organismes multilatéraux et du secteur privé) dans la recherche de la santé et du bien-être en tant qu’objectif commun en rapport avec d’autres priorités sociétales. les cinq principes de bonne gouvernance du PnuD (légitimité, vision et orientation stratégique, performance, responsabilisation, équité et impartialité des processus) sont utiles pour défi nir ce qui est nécessaire.

mettre en œuvre une action collaborative entre les secteurs (« action intersectorielle »). De nombreuses politiques nécessaires pour agir sur les déterminants sociaux requièrent une action intersectorielle. le succès de la mise en œuvre d’une action intersectorielle dépend de plusieurs conditions, notamment : la création d’un cadre politique propice et une approche fondée sur la santé; l’accent mis sur les valeurs, les intérêts et les objectifs communs aux partenaires; la capacité à garantir un soutien politique et à s’appuyer sur des facteurs positifs dans l’environnement politique; la participation de partenaires clés dès le départ, avec un engagement en matière d’inclusion; un partage du rôle directeur, de la responsabilité et des récompenses entre les partenaires; un encouragement de la participation du public.

2. Promotion de la participationcréer les conditions pour la participation. la gouvernance nécessaire pour agir sur les déterminants sociaux n’est pas possible sans une nouvelle culture de participation. les éléments essentiels sont : l’institutionnalisation de mécanismes formels, transparents et publics à travers lesquels les organisations de la société civile peuvent contribuer à l’élaboration de politiques; la fourniture

de ressources pour la participation sous forme de mesures incitatives et de subventions; l’examen de l’impact des politiques et des pratiques antérieures sur la capacité des communautés à participer; le renforcement des connaissances et des capacités en fournissant des informations et des formations accessibles à tous les intervenants.

Favoriser la participation et veiller à la représentativité. les gouvernements ont un rôle à jouer dans la stimulation de la participation, afi n de favoriser l’émancipation des individus, en travaillant en faveur d’une représentation publique équitable à travers des mécanismes ciblés sur les groupes sous-représentés ainsi qu'en garantissant la légitimité et en abordant la question des confl its d’intérêt des personnes affi rmant être des représentants de la communauté.

Faciliter la participation de la société civile. les gouvernements peuvent faciliter le rôle clé de la société civile en offi cialisant la participation des organisations de la société civile dans l’élaboration des politiques (notamment en veillant à la responsabilisation), en encourageant les « rapports offi cieux » et en reconnaissant le potentiel des organisations de la société civile à fournir des données pour orienter l’élaboration des politiques.

3. le rôle du secteur de la santé, notamment des programmes de santé publique, dans la réduction des inégalités en matière de santé

assumer le rôle du secteur de la santé dans la gouvernance des déterminants sociaux. il y a quatre grandes fonctions interdépendantes à travers lesquelles le secteur de la santé peut apporter une contribution utile à la gouvernance des déterminants sociaux : encourager l’approche fondée sur les déterminants sociaux et expliquer en quoi cette approche est bénéfi que pour la société et pour différents secteurs; surveiller les inégalités en matière de santé et l’impact des politiques sur les déterminants sociaux; rassembler les secteurs pour planifi er et mettre en œuvre l’action sur les déterminants sociaux; développer les capacités d’action sur les déterminants sociaux.

réorienter les services de santé et les programmes de santé publique afi n de réduire les inégalités. les fournisseurs de services de santé dans tous les secteurs doivent : contribuer à la réduction des inégalités en matière de santé en mesurant l’effi cacité des services existants à travers la continuité des soins pour différents groupes de population; traiter les facteurs qui sont à l’origine de ces différences de performances (par exemple, le fi nancement, la situation géographique et l’horaire des services, ainsi que les compétences et attitudes des travailleurs de santé); travailler avec d’autres secteurs pour supprimer d’autres obstacles.

instituer l’équité dans la gouvernance des systèmes de santé. les gouvernements peuvent réformer la gouvernance à l’aide d’une approche des soins de santé primaires orientée vers un système public, en faisant de l’équité une priorité institutionnalisée. le but

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doit être d’avancer vers une couverture santé universelle qui soit accessible, abordable, disponible, équitable et de bonne qualité pour tous, fi nancée au moyen de l’imposition, d’une assurance sociale ou d’un autre mécanisme de fi nancement mutualisé.

4. action mondiale sur les déterminants sociaux : alignement des priorités et des intervenants

aligner les intervenants et les priorités à l’échelle mondiale. en raison de l’interconnexion du monde moderne, l’action nationale sur les déterminants sociaux n’est pas suffi sante. les organisations internationales, les institutions non gouvernementales et les partenaires de coopération bilatérale doivent coordonner leurs efforts en matière de déterminants sociaux avec ceux des gouvernements nationaux. une meilleure harmonisation des priorités mondiales est également nécessaire. Par exemple, les défi s représentés par les omD, le renforcement de la protection sociale, la lutte contre le changement climatique et contre les maladies non transmissibles sont étroitement liés. tous exigent une action sur les déterminants sociaux et ont des impacts sur les inégalités en santé. en traitant ces défi s, les gouvernements nationaux, les organisations internationales, les institutions non gouvernementales et les partenaires de coopération bilatérale peuvent rechercher une cohérence entre les mesures de gouvernance mondiale (y compris les accords internationaux) de manière à promouvoir une approche fondée sur les déterminants sociaux. cet effort doit être sous-tendu par une attention continue portée à l’équité, en considérant l’équité en santé comme un objectif général de développement pour tous les secteurs.

5. Suivi des progrès : mesure et analyse afi n d’orienter les politiques et de renforcer la responsabilisation en matière de déterminants sociaux

identifi er les sources, sélectionner les indicateurs, recueillir les données et fi xer les objectifs. Pour être effi cace, une action sur les déterminants sociaux doit être mesurée et analysée afi n d’orienter l’élaboration des politiques, d’évaluer sa mise en œuvre et de renforcer la responsabilisation. les inégalités en matière de santé, les déterminants sociaux et l’impact des politiques doivent faire l’objet d’un suivi. les impératifs clés sont : la collecte et le suivi des indicateurs des déterminants sociaux de différents secteurs, en relation avec les résultats sur le plan sanitaire; l’établissement d’objectifs pour l’ensemble de la société en faveur de la réduction des inégalités; l’analyse des données, afi n de mieux comprendre les niveaux de référence et l’impact potentiel des politiques.

avancer malgré l’absence de données systématiques. Dans de nombreux pays, la disponibilité des données pour une action intégrée sur les déterminants sociaux est faible. l’absence de données ne justifi e cependant pas l’inaction. en utilisant les études et les suggestions de la communauté et des organisations de la société civile et en faisant de l’amélioration des systèmes de recueil des données les plus cruciales une priorité, les gouvernements peuvent

élaborer des politiques qui répondent aux besoins de la population et qui soient prises sur la base des informations disponibles les plus précises.

Diffuser les données relatives aux inégalités en matière de santé et aux déterminants sociaux et intégrer ces données dans les processus politiques. l’existence de données ne se traduit pas automatiquement par une action. les données doivent en effet être e xprimées de manière que des publics différents puissent les utiliser et doivent être reliées au processus d’élaboration politique. afi n de garantir que les données amènent à une action sur les déterminants sociaux, les gouvernements et les établissements universitaires peuvent institutionnaliser des mécanismes visant à intégrer des analyses des déterminants sociaux dans le processus d’élaboration des politiques afi n de mettre en œuvre des politiques qui : s’appuient sur des bases factuelles; peuvent améliorer l’échange de renseignements entre les secteurs; peuvent mener des évaluations sur la santé et sur l’équité de toutes les politiques avant leur application, à l’aide d’outils comme l’évaluation d’impact sur la santé.

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)5 |

Tableau 1. Résumé des recommandations de la Commission des déterminants sociaux de la santé1

1. Améliorer les conditions de vie quotidiennes

• Veiller au bien-être des fi lles et des femmes et améliorer les conditions dans lesquelles elles mettent au monde leurs enfants - Privilégier le développement du jeune enfant et l’éducation des fi lles et des garçons

• Gérer le développement urbain - Accroître la disponibilité de logements abordables - Consentir les investissements nécessaires à l’amélioration les conditions de vie dans les bidonvilles, notamment l’alimentation en eau et en

électricité, l’assainissement et le pavage des rues

• Veiller à ce que l’urbanisme encourage de façon équitable les comportements sains et sans danger - Promouvoir la marche, l’utilisation du vélo et les transports en commun - Gérer le système de vente au détail de façon à contrôler l’accès aux aliments contribuant à une mauvaise alimentation - Mettre en œuvre un bon aménagement du milieu et des contrôles réglementaires (par ex. le nombre de points de vente d’alcool)

• Veiller à ce que les réponses politiques au changement climatique tiennent compte des impacts sur l’équité en santé

• Faire du plein-emploi et de l’équité en matière d’emploi un objectif commun aux institutions internationales et faire en sorte que ces deux questions se trouvent au cœur des politiques et des stratégies de développement nationales - Renforcer la représentation des travailleurs lors de l’élaboration des politiques, des législations et des programmes relatifs à l’emploi

• Utiliser les institutions internationales pour soutenir l’action des pays dans la protection de tous les travailleurs - Appliquer les principales normes du travail dans les secteurs structuré et non structuré - Élaborer des politiques garantissant un juste équilibre entre vie professionnelle et vie privée - Limiter les effets néfastes de l’insécurité des travailleurs qui occupent des emplois précaires

• Augmenter progressivement les systèmes de protection sociale - Veiller à ce que les systèmes de protection sociale couvrent les travailleurs précaires, y compris dans le secteur non structuré, le travail domestique

et la garde d’autres personnes

• Mettre en place des services de santé de bonne qualité et à vocation universelle, centrés sur une approche des soins de santé primaires - Renforcer le rôle directeur du secteur public dans le fi nancement équitable des systèmes de santé, sans considération de solvabilité - Lutter contre la fuite des cerveaux dans le domaine de la santé en investissant surtout dans le développement et la formation des ressources

humaines et en concluant des accords bilatéraux pour réguler les pertes et les gains

2. Lutter contre les inégalités dans la répartition du pouvoir, de l’argent et des ressources

• Confi er la responsabilité de l’action pour la santé et l’équité en santé aux plus hautes instances gouvernementales et veiller à ce que toutes les politiques y contribuent de façon cohérente - Évaluer l’incidence sur la santé et l’équité en santé de toutes les politiques et de tous les programmes

• Augmenter les fonds publics pour agir sur les déterminants sociaux de la santé

• Augmenter l’aide mondiale pour atteindre l’objectif de 0,7 % de PNB et étendre l’initiative d’allégement de la dette multilatérale

• Prévoir un volet cohérent sur les déterminants sociaux de la santé dans les documents de stratégie de lutte contre la pauvreté

• Institutionnaliser la prise en compte des conséquences sur la santé et l’équité en santé des politiques et des accords économiques nationaux et internationaux au moment de leur élaboration

• Renforcer le rôle de l’État dans la fourniture des services de base indispensables à une bonne santé (eau et assainissement par exemple) et dans la réglementation des biens et services ayant des effets importants sur la santé (comme le tabac, l’alcool et les denrées alimentaires)

• Élaborer et appliquer une législation qui favorise l’équité entre les sexes et interdise la discrimination sexuelle

• Investir davantage dans les services et les programmes de santé sexuelle et génésique en visant la couverture universelle et le respect des droits

• Renforcer les systèmes politiques et juridiques - Protéger les droits de la personne - Garantir l’identité juridique et tenir compte des besoins et des revendications des groupes marginalisés, en particulier les peuples autochtones

• Faire en sorte que les individus et les communautés soient associés à la prise de décisions concernant la santé

• Faciliter le rôle de la société civile dans la mise en œuvre des droits politiques et sociaux qui infl uent sur l’équité en santé

• Faire de l’équité en santé un objectif de développement mondial

3. Mesurer le problème, l’analyser et évaluer l’effi cacité de l’action

• Veiller à ce qu’il existe, aux niveaux local, national et international, des systèmes de suivi de l’équité en santé - Veiller à ce que tous les enfants soient enregistrés à la naissance - Instaurer des systèmes nationaux et mondiaux de surveillance de l’équité en santé

• Consentir les investissements nécessaires pour produire et communiquer de nouvelles données sur les déterminants sociaux, sur l’équité en santé et sur l’effi cacité des mesures - Consacrer un budget particulier à la production et à l’échange de données

• Former les responsables des politiques, les intervenants et les professionnels de la santé aux questions de déterminants sociaux de la santé et investir dans l’action de sensibilisation - Inclure les déterminants sociaux de la santé dans la formation des personnels médicaux et de santé - Apprendre aux responsables du choix des politiques et aux planifi cateurs à évaluer l’impact sur l’équité en santé - Renforcer les moyens dont dispose l’OMS pour soutenir l’action sur les déterminants sociaux

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introDuction

c e document de travail vise à orienter les débats lors de la conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (« la conférence mondiale ») sur les moyens que les pays

peuvent utiliser pour agir sur les déterminants sociaux de la santé (« les déterminants sociaux »), y compris les recommandations de la commission des déterminants sociaux de la santé (« la commission ») (tableau 1)1. le document est organisé en trois parties. Premièrement, il expose le cadre conceptuel des déterminants sociaux et explique pourquoi la mise en œuvre de réponses politiques cohérentes est essentielle pour le développement, pour la réduction des inégalités en matière de santé et pour d’autres priorités nationales et mondiales. Deuxièmement, il aborde certains défi s politiques auxquels vont être confrontés les pays en agissant sur les déterminants sociaux et qui devront être examinés par la conférence mondiale à l’approche de la « Déclaration de rio », qui constitue un engagement à agir, et en mettant œuvre des actions futures. troisièmement, il vise à fournir une vue d’ensemble relativement technique des manières d’agir sur les déterminants sociaux de la santé, en soulignant les stratégies centrales qui reposent sur les cinq thèmes de la conférence mondiale :

1. la gouvernance comme moyen de lutte contre les causes profondes des inégalités en matière de santé : mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociaux de la santé;

2. Promotion de la participation : une direction communautaire pour agir sur les déterminants sociaux;

3. le rôle du secteur de la santé, notamment des programmes de santé publique, dans la réduction des inégalités en matière de santé;

4. action mondiale sur les déterminants sociaux : alignement des priorités et des intervenants;

5. Suivi des progrès : mesure et analyse afi n d’orienter les politiques et de renforcer la responsabilisation en matière de déterminants sociaux.

ces cinq thèmes étroitement liés (Figure 1) ont été sélectionnés car ils mettent l’accent sur des mécanismes essentiels grâce auxquels les pays peuvent intégrer l’action sur les déterminants sociaux dans leurs objectifs politiques et mettre en place ces politiques dans tous les secteurs. les données des pays ayant effectué des progrès montrent qu’une action globale est nécessaire pour chacun de ces thèmes, qui forment ensemble les composantes d’une « approche fondée sur les déterminants sociaux », prouvant ainsi le besoin d’agir sur les déterminants sociaux dans l’ensemble de la société. le fait d’inclure un thème séparé sur le rôle du secteur de la santé

n’a pas pour but de minimiser le rôle, crucial, des autres secteurs, mais refl ète le grand nombre d'intervenants issus du secteur de la santé attendu à la conférence mondiale et souligne certaines responsabilités essentielles de ce secteur.

le public auquel est destiné principalement ce document est composé de responsables politiques à l’échelle nationale. ce document peut également servir à d’autres publics composés de responsables municipaux, de groupes de la société civile, d’organismes multilatéraux et d’organismes de développement bilatéral. ce document de travail et la conférence mondiale s’appuient tous deux sur l’important travail de la commission, comme cela été approuvé par la résolution WHa62.14 de l’assemblée mondiale de la Santé2, et sur l’importante documentation traitant des déterminants sociaux. conformément à sa longueur et à son objectif, ce document est axé sur les modalités d’application des recommandations de la commission plutôt que sur l’étude approfondie de sujets particuliers ou des conditions de santé ou sur la répétition dans le détail de ce que la commission a déjà établi (en particulier sur les causes des inégalités en matière de santé, par exemple).

Figure 1. Les relations entre les cinq thèmes de la Conférence mondiale

Gouvernance PRIORITÉS MONDIALES

ÉQUITÉ EN SANTÉ ET

DÉVELOPPEMENT

SECTEUR DE LA SANTÉ

ÉDUCATION

JUSTICE

LOGEMENT ET ENVIRONNEMENT

AGRICULTURE ET

ALIMENTATION

TRANSPORT

EMPLOI

ÉCONOMIE ET COMMERCE

INTERVENANTS MONDIAUX

Suivi

Parti

cipat

ion

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)7 |

caDre concePtuel et FonDement De l’action Sur leS DÉterminantS SociauX

i l est connu depuis longtemps que les conditions sociales ont une infl uence décisive sur la santé3 et qu’il est par conséquent nécessaire de promouvoir le bien-être, comme le soulignent

la Déclaration d’alma-ata adoptée en 1978 par la conférence internationale sur les soins de santé primaires4 et la charte d’ottawa pour la promotion de la santé de 19865. la majeure partie du fardeau mondial des maladies et les causes principales des inégalités en matière de santé, qui sont présentes dans tous les pays, découlent des conditions dans lesquelles les personnes naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent1. ces conditions sont dénommées déterminants sociaux de la santé, terme consacré utilisé pour englober les déterminants sociaux, économiques, politiques, culturels et environnementaux de la santé.

les déterminants n’ont pas tous la même importance. les plus importants sont ceux qui génèrent une stratifi cation au sein d’une société (les déterminants structurels), comme : la répartition des revenus; la discrimination en raison du sexe, de l’appartenance ethnique ou d’un handicap; les structures politiques et de gouvernance qui renforcent les inégalités en matière de pouvoir économique au lieu de les réduire. ces déterminants créent un

ensemble de positions socioéconomiques avec des hiérarchies en termes de pouvoir, de prestige et d’accès aux ressources. les structures de gouvernance formelles et informelles, les systèmes éducatifs, les structures du marché du travail et des marchandises, les systèmes fi nanciers, l’attention portée aux problèmes de distribution lors de l’élaboration des politiques et l’étendue et la nature des politiques de redistribution, des prestations sociales et de la protection sociale font partie des mécanismes qui produisent et maintiennent cette stratifi cation. les mécanismes structurels qui ont des répercussions sur les différentes positions sociales des individus constituent la cause profonde des inégalités en matière de santé. ces différences déterminent le statut et le niveau de santé des individus à travers leur impact sur des déterminants intermédiaires tels que les conditions de vie, les conditions psychosociales, des facteurs comportementaux et/ou biologiques ainsi que le système de santé à proprement parler. le rapport fi nal de la commission a utilisé ce cadre 6 (Figure 2) pour orienter ses recommandations.

l’approche fondée sur les déterminants sociaux exige une action coordonnée et cohérente dans les secteurs de la société qui ont une incidence sur les déterminants structurels et permettent d’améliorer

CONTEXTE

SOCIOÉCONOMIQUE ET POLITIQUE

• Gouvernance

• Politiques macroéconomiques

• Politiques sociales marché du travail, logement, terres

• Politiques publiques Éducation, santé, protection sociale

• Culture et valeurs sociétales

DÉTERMINANTS STRUCTURELS DES INÉGALITÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ

Situation socioéconomique

Éducation

Emploi

Revenus

Conditions matérielles (conditions de vie et de travail, disponibilité de l’alimentation, etc.)

Comportements et facteurs biologiques

Facteurs psychosociaux

IMPACT SUR L’ÉQUITÉ EN

SANTÉ ET SUR LE BIEN-ÊTRE

Système de santé

DÉTERMINANTS INTERMÉDIAIRES DE LA SANTÉ

Classe socialeSexe

Origine ethnique (racisme)

Cohésion sociale et capital social

Figure 2. Cadre conceptuel des déterminants sociaux de la santé

Source : Solar and irwin, 20106

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la santé et de réduire les inégalités. en contrepartie, il est désormais reconnu qu’une meilleure santé a une incidence sur d’autres priorités sociétales importantes, notamment sur l’amélioration du bien-être, l’éducation, la cohésion sociale, la protection de l’environnement, l’augmentation de la productivité et le développement économique7. Dans ce « cercle vertueux », les améliorations de la santé et des déterminants de la santé s’alimentent mutuellement8.

l’approche fondée sur les déterminants sociaux repose donc sur une appréciation plus large de la valeur de la santé pour la société et sur le fait que la santé dépend de mesures qui vont bien au-delà du secteur de la santé. l’appel de la commission à agir de manière globale refl ète la réalité des risques pour la santé et les bénéfi ces de l’action à tous les niveaux de gouvernance (local, national et mondial). Dans la mesure où tant les problèmes que les solutions sont systémiques, les politiques publiques occupent une importance centrale, par exemple les politiques de transport et de logement à l’échelle locale, les politiques fi scales, environnementales, éducatives et sociales à l’échelle nationale et les politiques fi nancières, commerciales et agricoles à l’échelle internationale.

l’approche fondée sur les déterminants sociaux refl ète également le fait que la lutte contre les inégalités en matière de santé est indissociable de la lutte contre les inégalités sociales. une action coordonnée visant à améliorer la santé des populations est essentielle pour le maintien d’une économie forte et pour la préservation de la stabilité sociale et de la sécurité nationale et mondiale. mettre l’accent sur les déterminants sociaux permet d’intégrer une action cohérente à un certain nombre de priorités, notamment le renforcement de la protection sociale et la lutte contre le changement climatique, par exemple. en outre, l’approche fondée sur les déterminants sociaux tient compte de l’équité intergénérationnelle, aspect qui a souvent été négligé, mais qui occupe désormais une place centrale dans les défi s posés quant aux politiques publiques. le changement climatique, qui symbolise la dégradation générale de l’environnement, menace de manière importante le bien-être des générations futures. certaines tendances comme l’augmentation des taux de maladies non transmissibles (mnt) et la diminution des possibilités économiques et des droits aux prestations sociales, qui sont observées dans tous les pays, quel que soit le niveau de revenu national, se traduisent déjà par des inégalités intergénérationnelles, par une diminution des conditions sanitaires et par des troubles sociaux.

tous les secteurs ont un intérêt et une responsabilité dans la création de sociétés plus justes et plus inclusives en mettant en

œuvre des politiques cohérentes qui accroissent les occasions et aident au développement. la santé est un indicateur clé d’une bonne gouvernance9. De plus en plus d’efforts sont menés pour élargir la défi nition de ce qui est important dans l’évaluation des objectifs d’une société, au-delà du produit intérieur brut (PiB)10. le progrès des sociétés ne doit pas seulement être mesuré en termes de croissance économique, mais également en termes de durabilité et d’amélioration du bien-être et de la qualité de vie des citoyens.

la santé est un aspect central de cette vaste série d’objectifs sociétaux. l’approche fondée sur les déterminants sociaux utilise ainsi la répartition des niveaux sanitaires, mesurée par le degré d’inégalité en matière de santé, comme un indicateur clé non seulement de l’équité de la société et de la justice sociale, mais également du fonctionnement général de la société. les inégalités en matière de santé constituent un indicateur clair de l’absence de succès et de cohérence des politiques menées dans de nombreux domaines d’une société.

agir sur les déterminants sociaux est également primordial pour l’amélioration de la santé en général. Sans action sur les déterminants sociaux, les objectifs du millénaire pour le développement (omD) liés à la santé et les objectifs de lutte contre les maladies non transmissibles ne peuvent être atteints et les stratégies de prévention ne peuvent être mises en œuvre de manière effi cace pour réduire la souffrance et les dépenses de santé liées aux technologies permettant de traiter des maladies chroniques. il convient toutefois de veiller à ce que l’action sur les déterminants sociaux n’augmente pas les inégalités en améliorant les conditions de vie des plus aisés plus rapidement que pour le reste de la population; c’est pourquoi il est nécessaire de faire de l’équité une priorité. les systèmes sanitaires et sociaux qui visent à réduire les inégalités en matière de santé en étant plus performants et en améliorant plus rapidement la santé des groupes défavorisés peuvent en réalité s’avérer plus effi caces pour toutes les couches sociales.

en conclusion, le fondement de l’action sur les déterminants sociaux de la santé repose sur ces trois grands thèmes. Premièrement, la réduction des inégalités en matière de santé constitue un impératif moral. Deuxièmement, il est essentiel d’améliorer la santé et le bien-être, de promouvoir le développement et d’atteindre les objectifs en matière de santé en général. troisièmement, et plus important encore, il est nécessaire d’agir sur les déterminants sociaux pour atteindre un certain nombre de priorités sociétales qui bénéfi cieront de la réduction des inégalités en matière de santé.

conSiDÉrationS PolitiQueS DanS la miSe en Œuvre De l’action Sur leS DÉterminantS SociauX

Progrès, obstacles et effet des crisesDe nombreux pays progressent vers la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. leur expérience a

inspiré et orienté les recommandations de la commission. Des progrès supplémentaires ont été accomplis depuis le lancement du rapport de la commission. le Brésil, pays d’accueil de la conférence mondiale, a mis en place une commission nationale des

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)9 |

déterminants sociaux de la santé11 et a continué à réduire les inégalités en termes de mortalité infantile et de retard de croissance parallèlement à la réduction des inégalités de revenus et du taux de pauvreté et à l’extension de son système de santé universel12. en réponse au rapport de la commission, une étude sur les inégalités en matière de santé en angleterre à entraîné une action à l’échelle locale et du gouvernement central13. Des pays aussi divers que la chine14, l’inde15, 16, les etats-unis d’amérique17 et la Sierra leone ont pris des mesures progressives, mais importantes vers une couverture santé universelle. l’espagne a fait des déterminants sociaux l’une de ses priorités au cours de sa présidence de l’union européenne en 201018. la région européenne étudie actuellement les déterminants sociaux pour orienter une future politique régionale de santé, tandis que la région africaine a approuvé une stratégie régionale en matière de déterminants sociaux lors d’une réunion d’un comité régional de l’omS19. en amérique du Sud, le conseil des ministres de la Santé de l’unaSur a fait de l’action sur les déterminants sociaux dans la région l’une des cinq priorités du plan d’action de l’organisation 2010–201520.

ces exemples montrent que les recommandations de la commission ont été mises en pratique, c’est-à-dire qu’il existe des solutions aux problèmes qui créent les inégalités en matière de santé et qu’il est possible d’agir sur les déterminants sociaux en avançant dans le sens de la vision du monde de la commission où la notion de justice sociale a un sens. cependant, malgré de nombreux exemples comme ceux décrits ci-dessus, les progrès des pays sont dans l’ensemble lents. Dans la plupart des cas, les pays qui continuent à faire des progrès sont ceux dont les efforts avaient déjà débuté avant le rapport de la commission. Prenant acte de ce retard dans les progrès, la conférence mondiale se fi xe pour but de susciter un engagement politique parmi les pays afi n de mettre en œuvre les actions nécessaires dans le cadre des politiques nationales sur les déterminants sociaux.

il est nécessaire, pour faire des progrès, de lutter contre les obstacles qui entravent la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. ces obstacles incluent le manque de connaissances et de capacités techniques. la conférence mondiale constitue une occasion pour les pays de partager des expériences et de découvrir les connaissances et les outils disponibles. les chapitres suivants de ce document fournissent une vue d’ensemble des stratégies prioritaires pour appliquer les recommandations de la commission.

néanmoins, les plus grands défi s sont d’ordre politique. ces défi s politiques constituent le cadre dans lequel s’applique toute approche technique de l’action sur les déterminants sociaux. la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux exige de faire face à des secteurs qui n’ont pas toujours intérêt à ce que l’équité en santé s’améliore. Par exemple, bien que l’importance du secteur privé soit centrale pour la plupart des déterminants, de nombreuses activités du secteur privé nuisent à la santé et à l’environnement. relever ce défi implique de dépasser le paradigme de la responsabilité sociale des entreprises dont le bilan s’est jusqu’à présent révélé bien plus médiocre que promis. les gouvernements jouent un rôle important dans la mise en place d’un cadre réglementaire des activités du secteur privé qui garantisse le respect de la santé et le développement et dans l’application de ces règles si l’action des entreprises commerciales entrave ces objectifs.

Par ailleurs, les faibles avancées dans la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux refl ètent en partie l’inadéquation de la gouvernance aux niveaux local, national et mondial pour traiter les problèmes clés du XXie siècle. les inégalités en matière de santé sont révélatrices d’un problème complexe qui demande des réponses politiques cohérentes dans l’ensemble des secteurs et des pays, avec un engagement politique ferme de la part de toutes les parties.

ces problèmes interdépendants remettent en cause la division traditionnelle des sociétés et de leurs gouvernements en domaines cloisonnés. l’approche fondée sur les déterminants sociaux exige une réorientation des politiques et une cohérence politique, afi n qu’au lieu de poursuivre des intérêts divergents une coordination des différents secteurs, types d’acteurs et niveaux de gouvernance (mondial, national et local) permette de contribuer conjointement au développement humain durable et de promouvoir leurs objectifs mutuels. les gouvernements doivent assumer leurs responsabilités pour cette coordination, y compris en utilisant la réglementation si cela s’avère nécessaire.

cette approche demande également une meilleure prise en compte des objectifs clés de chaque société. la croissance économique a longtemps été considérée comme la priorité la plus élevée, mais ce principe commence à être remis en cause. les mesures plus larges du bien-être sociétal sont étroitement liées à la santé, comme indiqué par exemple par le rapport de la commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social établi par le gouvernement français10. S’il est important pour la croissance économique que la population soit en bonne santé, cela ne signifi e par pour autant que la croissance économique améliore la santé globale, entraîne une augmentation du bien-être sociétal ou réduise les inégalités en matière de santé. tandis qu’une économie solide peut améliorer la santé, il est établi que cette corrélation devient plus faible dès lors que le PiB par habitant dépasse un seuil de 5 000 dollars américains21.

la nécessité d’adopter une approche fondée sur les déterminants sociaux a été mise en évidence par des crises nouvelles ou exacerbées dans le domaine fi nancier, alimentaire, de la santé publique et de l’environnement depuis 200822. comme ces crises l’ont clairement démontré, l’interconnexion du monde moderne implique que les pays ne peuvent affronter ces défi s seuls ou à travers une action dans un seul secteur. À l’inverse, cela exige des réponses cohérentes et précises à tous les niveaux, du local au mondial. ces urgences ont également mis à nu les échecs de la réglementation et les problèmes liés à la surimportance accordée à des indicateurs restreints de stabilité économique, démontrant ainsi la nécessité d’une action coordonnée et d’un État fort. Par exemple, malgré la doctrine qui prévaut depuis 30 ans, ceux qui ont le plus souffert de ces crises sont souvent ceux qui ont le moins contribué aux problèmes qui les ont causées. les gouvernements se sont mis d’accord pour coordonner leurs politiques et ont levé des fonds pour stabiliser les systèmes économiques comme jamais auparavant. en faisant cela, ils ont souligné qu’il est à la fois nécessaire et possible d’agir sur les déterminants sociaux. en ouvrant un espace pour un vrai débat sur les questions de politique et d’objectifs, ces multiples crises ont ainsi créé une occasion sans précédent d’adopter une approche fondée sur les déterminants sociaux.

COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail | | 10

Par la même occasion, ces mêmes crises ont paradoxalement accentué les défi s politiques liés à la mise en œuvre d’une approche fondée sur les déterminants sociaux dans certains pays, notamment sur les aspects liés à la redistribution, aux droits et à la réglementation. Face à la réduction des marges de manœuvre budgétaires, des appels à réduire les services sociaux ayant un impact sensible sur les déterminants sociaux ont été lancés. cette tendance risque d’aboutir à la répétition d’erreurs passées qui ont eu des effets négatifs, à la fois importants et étendus, sur l’équité en santé. Des leçons doivent être tirées des pays qui ont maintenu et même augmenté leurs dépenses sur les principaux déterminants sociaux en temps de crise.

Principes et conditions d’actionDans ce contexte complexe, la conférence mondiale propose un forum pour évoquer comment des pays, avec l’aide d’organisations internationales, peuvent aider d’autres pays à relever ces défi s politiques. la déclaration politique qui sera publiée par la conférence mondiale, la « Déclaration de rio », refl ètera le résultat de ces délibérations. il n’existe pas de modèle unique pour un pays qui veut surmonter les obstacles politiques et techniques qui entravent l’adoption d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. chaque pays devra agir en fonction de ses propres priorités et conditions. toutefois, il convient d’identifi er certains principes généraux et conditions centrales de l’action.

Premièrement, l’action sur les déterminants sociaux visant à réduire les inégalités en matière de santé exige une application continue et à long terme. Des bénéfi ces peuvent néanmoins être visibles à court terme et peuvent se répercuter dans d’autres secteurs dans lesquels s’appliquent les politiques relatives aux déterminants sociaux, avant que les résultats en termes de réduction des inégalités en matière de santé ne soient manifestes. Pour les pays qui n’ont pas encore adopté une approche fondée sur les déterminants sociaux, le message à transmettre est que le plus tôt sera le mieux. les pays ayant déjà pris des mesures ont l’occasion de les étendre et de les renforcer.

Deuxièmement, l’étape initiale consiste à renforcer la sensibilisation du public aux inégalités en matière de santé et aux déterminants sociaux de la santé. les organisations non gouvernementales peuvent jouer un rôle important dans la sensibilisation aux déterminants sociaux. la sensibilisation du public à l’importance de ces problèmes entraînera une demande d’action. mesurer les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux à l’aide de facteurs clés qui stratifi ent les populations (comme la situation géographique, l’appartenance ethnique, les revenus ou le sexe) peut contribuer à cette sensibilisation et jeter les bases de travaux futurs. les déterminants sociaux doivent être expliqués dans un langage qui permette aux secteurs extérieurs au monde de la santé de comprendre leur importance et leur contribution potentielle à l’intérêt général.

troisièmement, l’équité en santé et le bien-être doivent être considérés comme un objectif prioritaire pour les gouvernements et la société dans son ensemble. Faire de la santé et du bien-être des caractéristiques importantes des sociétés prospères, inclusives et justes requiert de suivre un ensemble de valeurs qui inclut un engagement en faveur des droits de la personne et de l’équité en santé, une démocratisation de la santé et du bien-être et une solidarité

dans le domaine de la santé aux niveaux national et international. investir dans des actions qui ont une incidence sur les déterminants sociaux et sur la réduction des inégalités en matière de santé, pour réaliser le droit de chacun à l’égalité en matière de santé et à une vie valorisée, constitue un impératif moral qui rejoint les engagements pris par tous les pays en faveur de la santé et des droits de la personne à travers les traités internationaux relatifs aux droits de la personne. les approches fondées sur les droits de la personne et les déterminants sociaux, même si elles ne sont pas toujours entièrement coordonnées23, sont fortement complémentaires24. Si les priorités en termes d’équité et de justice varient en fonction des pays, tous peuvent convenir que l’équité en santé entraîne l’égalité des chances.

Quatrièmement, comme mentionné plus loin dans la partie consacrée au renforcement de la gouvernance, il est essentiel de veiller à la coordination et à la cohérence des actions sur les déterminants sociaux. les principales considérations politiques sont 1) la combinaison de l’important rôle de tutelle avec des conditions permettant à différents secteurs de collaborer et 2) la hiérarchisation de l’action. l’approche fondée sur les déterminants sociaux contient un message central selon lequel les autres secteurs peuvent améliorer la santé en effectuant leur propre travail correctement et de manière à atteindre leurs propres objectifs. Dans chaque contexte, il est toutefois nécessaire d’identifi er les domaines dans lesquels l’action est la plus importante et de se concentrer sur ceux-ci. Si mettre en œuvre une approche fondée sur les déterminants sociaux demande parfois de nouvelles ressources, les dépenses existantes du gouvernement peuvent également être évaluées en étudiant comment elles peuvent être coordonnées. la cohérence entre les politiques sociales et économiques revêt par ailleurs une importance capitale. même dans les pays où les politiques sociales visent activement à réduire les inégalités, les politiques économiques tirent souvent dans le sens inverse. la prise en compte et le suivi des conséquences (souhaitées et non souhaitées) des décisions politiques sur la santé et l’équité en santé peuvent être institutionnalisés lors de l’élaboration des politiques. À cet effet, des améliorations importantes sont nécessaires en termes de capacité des gouvernements à mener ces analyses.

cinquièmement, une approche sur les déterminants sociaux ne constitue pas un « programme » à mettre en œuvre. elle nécessite en revanche, dans chaque contexte, une mise en œuvre systématique et un apprentissage des expériences antérieures. les pays ayant accompli des progrès ont démarré avec les problèmes prioritaires et ont fait des progrès grâce à l’expérience qu’ils ont acquise. agir sur les déterminants sociaux implique d’élaborer et d’appliquer les politiques de manière différente. le suivi et l’évaluation (comme évoqué plus loin) sont essentiels pour déterminer si une approche apporte une réelle différence en termes de déterminants sociaux et d’équité en santé. De meilleures méthodes et outils sont nécessaires pour évaluer quelles sont les politiques spécifi ques les plus utiles dans chaque contexte. S’il existe des preuves qui démontrent l’effi cacité de l’action sur les déterminants sociaux sur la réduction des inégalités en matière de santé, des recherches et des connaissances supplémentaires sont nécessaires pour mieux orienter les décideurs sur ce qui fonctionne le mieux dans leur contexte particulier25.

11 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)11 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

1. la Gouvernance comme moYen De lutte contre leS cauSeS ProFonDeS DeS inÉGalitÉS en matiÈre De SantÉ : miSe en Œuvre De l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ

| 12| 12COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail |

1.

a dopter une approche fondée sur les déterminants sociaux requiert de la part des gouvernements coordination et alignement des différents secteurs et des différents types

d’organisations, afi n de pouvoir établir la santé et le développement — pour tous les pays, qu’ils soient riches ou pauvres — comme objectif commun. la constitution d’une gouvernance, dans laquelle tous les secteurs assument leur responsabilité quant à la réduction des inégalités en santé, est essentielle pour atteindre cet objectif. l’action intersectorielle — c’est-à-dire la mise en œuvre effi cace d’un

travail intégré entre les différents secteurs — est une composante essentielle de ce processus.

la Santé dans toutes les politiques (SdtP) est une stratégie politique qui explique comment la santé peut être mise en place en tant qu’objectif commun de l’ensemble du gouvernement et en tant qu’indicateur commun de développement26. la SdtP souligne les liens importants qui existent entre santé et objectifs économiques et sociaux plus larges dans les sociétés modernes. elle considère les améliorations

Tableau 2. Exemples de politiques intégrant une approche fondée sur les déterminants sociaux

Secteurs et problèmes

Relations entre la santé et d’autres objectifs sociétaux

Économie et emploi • Une population en bonne santé stimule la croissance et la reprise économiques. Des individus en meilleure santé sont capables d’accroître l’épargne de leur ménage, d’être plus productifs au travail, de s’adapter plus facilement aux changements professionnels et de rester plus longtemps dans la vie active.

• Les possibilités d’emploi stable et de travail permettent d’améliorer la santé de tous les individus parmi les différents groupes sociaux.

Sécurité et justice • Les taux de violence, de mauvaise santé et de blessures augmentent chez les populations n’ayant qu’un accès limité à l’alimentation, à l’eau, au logement, aux possibilités de travail et à un système de justice équitable. Les systèmes de justice des sociétés doivent faire face aux conséquences d’un accès limité à ces ressources essentielles.

• La prédominance de maladies mentales (outre celles associées à des problèmes de drogue et d’alcool) implique violence, criminalité et emprisonnements.

Éducation et enfants en bas âge

• La mauvaise santé des enfants et des membres de la famille met un frein à l’instruction, réduisant ainsi leur potentiel éducatif et leurs capacités à relever les défi s et à saisir les occasions de la vie.

• Le niveau d’instruction des femmes et des hommes permet de façonner des citoyens engagés et contribue directement à une meilleure santé et à la capacité de participer pleinement à une société productive.

Agriculture et alimentation

• Lorsque la santé est prise en compte dans la production, la fabrication, le marketing et la distribution des aliments, la sécurité alimentaire est améliorée, la confi ance du consommateur accrue et des pratiques agricoles plus durables sont encouragées.

• Une alimentation saine est vitale pour la santé des personnes; une bonne alimentation et des mesures de sécurité permettent de réduire la transmission de maladies de l’animal à l’homme et de soutenir les pratiques agricoles ayant un impact positif sur la santé des agriculteurs et des communautés rurales.

Infrastructures, planifi cation et transport

• La planifi cation optimale des routes, des transports et du logement impose de tenir compte des impacts sur la santé, susceptibles de réduire les émissions coûteuses pour l’environnement et d’améliorer la capacité des réseaux de transport ainsi que leur effi cacité en termes de mobilité des individus, de marchandises et de services.

• De meilleures possibilités de transport, notamment le cyclisme et la marche, permettent de créer des communautés plus sûres et plus agréables à vivre et atténuent la dégradation de l’environnement, tout en améliorant la santé.

Environnement et durabilité

• L’optimisation des ressources naturelles et la promotion de la durabilité, qui peuvent être obtenues plus effi cacement au moyen de politiques infl uençant les schémas de consommation de la population, peuvent également améliorer la santé humaine.

• D’une manière générale, un quart des maladies évitables sont dues aux conditions environnementales dans lesquelles les personnes vivent.

Logement et services de la communauté

• La conception des logements et la planifi cation des infrastructures qui prennent en compte la santé et le bien-être (par exemple : l’isolation, la ventilation, les espaces publics, le ramassage des ordures) et qui impliquent la communauté peuvent améliorer la cohésion sociale et soutenir les projets de développement.

• Des logements accessibles, correctement conçus, et des services communautaires appropriés constituent une partie des déterminants fondamentaux en matière de santé pour les individus et les communautés défavorisés.

Territoire et culture • Un meilleur accès à la propriété peut permettre de soutenir des améliorations en matière de santé et de bien-être pour les peuples autochtones, dont la santé et le bien-être sont spirituellement et culturellement marqués par un profond sentiment d’appartenance à une terre et à un pays.

• Des améliorations en matière de santé pour les autochtones peuvent renforcer l’identité culturelle et communautaire, favoriser la participation citoyenne et soutenir la conservation de la biodiversité.

Source : adapté de l’omS et du gouvernement d’australie-méridionale, 20109

13 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

en matière de santé de la population et les réductions des inégalités en matière de santé comme des questions complexes et hautement prioritaires qui exigent une réponse politique intégrée de l’ensemble des secteurs. cette stratégie examine les effets des politiques sur les déterminants sociaux ainsi que l’impact positif des améliorations en matière de santé sur les objectifs d’autres secteurs. Des exemples de ce type de réponse politique sont disponibles dans le tableau 2. Bien qu'elle constitue une stratégie pratique, la SdtP doit être adaptée au contexte culturel et historique spécifi que à chaque pays27.

cette partie est axée sur la gouvernance à l’échelle nationale. toutefois, de nombreux exemples encourageants d’une approche fondée sur les déterminants sociaux proviennent des niveaux municipaux et infranationaux (dans des États ou provinces par exemple, tel qu’indiqué dans le tableau ci-dessous concernant l’australie-méridionale). Des principes semblables s’appliquent dans ces cas, et il est en effet possible qu’il soit plus facile d’intégrer l’élaboration des politiques concernant les déterminants sociaux dans ces administrations à plus petite échelle.

construire une bonne gouvernance pour agir sur les déterminants sociauxle terme de gouvernance se rapporte à la manière dont les gouvernements (y compris les différents secteurs qui les composent) et autres organisations sociales interagissent, à la manière dont ces organismes communiquent avec les citoyens et à la façon dont les décisions sont prises dans un monde complexe et mondialisé28. la gouvernance se caractérise par un processus dans lequel les sociétés ou les organisations prennent des décisions, déterminent qui sera concerné par ces décisions e t comment la responsabilité des actions pourra être assurée. Pour apporter des réponses politiques cohérentes qui permettront de réduire les inégalités en matière de santé, il est impératif d’établir une gouvernance qui clarifi e les responsabilités individuelles et collectives des différents acteurs et secteurs (par exemple, le rôle des individus, des différentes composantes de l’État, de la société civile, des organismes multilatéraux et du secteur privé) en vue d’établir la santé et le bien-être comme objectif commun en lien avec d’autres priorités sociétales. D’autres dispositifs de gouvernance sont nécessaires, tels que la direction politique et l’engagement à long terme, l’implication de la société civile, des ressources humaines compétentes et averties et un « environnement d’apprentissage » qui favorise l’innovation politique et la résolution des confl its. enfi n, il existe un impératif de cohérence entre les différentes sphères en charge de l’élaboration des politiques.

mettre en place une gouvernance pour agir sur les déterminants sociaux est une tâche complexe, fortement tributaire de chaque système politique national et des personnes qui doivent être impliquées dans chaque contexte. Bien qu’il n’existe pas de modèle uniforme, les problèmes courants doivent être abordés par des modèles de gouvernance différenciés, susceptibles d’instituer la santé en tant qu’objectif commun dans toute la société, avec l’équité en santé comme mesure. ces questions impliquent de décider qui mènera l’action et prendra les initiatives, de clarifi er le rôle des

différents groupes et secteurs, d’assurer la participation des groupes défavorisés, d’assumer la responsabilité des objectifs communs et d’envisager un dispositif de contrôle des progrès. Des outils et instruments pratiques à cet égard sont répertoriés au tableau 3.

le Programme des nations unies pour le développement (PnuD) a établi cinq principes de bonne gouvernance qui permettent d’en encadrer les impératifs28.

Tableau 3. Outils et instruments pratiques pour la mise en œuvre d’une politique fondée sur les déterminants sociaux

• Comités interministériels et interdépartementaux

• Équipes d’actions transversales

• Budgets et comptabilité intégrés

• Systèmes d’information et d’évaluation transversaux

• Développement intégré de la population active

• Consultations communautaires et jurys de citoyens30

• Plateformes de partenariat • Optiques de santé29

• Évaluations des impacts • Cadres législatifs

Source : adapté de l’omS et du gouvernement d’australie-méridionale, 20109

Premièrement, la mise en œuvre de politiques fondées sur les déterminants sociaux doit faire partie d’un processus légitime et donner une voix à chaque partie. les organismes du gouvernement central — au niveau de l’exécutif — jouent un rôle primordial dans la conduite de l’action et l’encadrement de la santé en tant qu’objectif commun, ainsi que dans la médiation des confl its et l’obtention d’un consensus entre les différents secteurs. la gouvernance est particulièrement exigeante lorsqu’il n’existe pas d’intérêt politique mutuel. les gouvernements doivent adhérer à des principes essentiels et confronter les intérêts qui affectent activement l’équité en santé plutôt que d’adopter une approche d’intervenant dans laquelle chaque intérêt est évalué de façon équitable. la nécessité et la valeur d’une véritable participation dans l’élaboration des politiques pour les déterminants sociaux sont examinées ci-après.

Deuxièmement, le travail fondé sur les déterminants sociaux requiert une orientation et une vision stratégique pour agir durablement en vue de réduire les inégalités en matière de santé, notamment pour lutter contre la vision à court terme qui conduit généralement à la mise en œuvre de mesures inappropriées. l’élément essentiel de cette vision impérative est de comprendre que l’intérêt général de la société s’accroît par le travail sur les déterminants sociaux. l’élaboration de stratégies ou de plans nationaux constitue une bonne occasion d’établir un processus de développement et de mise en œuvre des politiques par le biais d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. concernant la mise en place de la gouvernance, le processus utilisé pour ce faire peut s’avérer bien plus conséquent que le document fi nal.

troisièmement, il existe un besoin de garantir les performances tant du processus que de ses résultats. les mécanismes de prise de décisions vis-à-vis des déterminants sociaux doivent être bien rôdés pour l’ensemble des intervenants. le processus et la mise en

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1.

œuvre des politiques en découlant doivent également être effi caces, faisant le meilleur usage possible des ressources en ce qui concerne les objectifs communs identifi és. les démarches de budgétisation, telles que la budgétisation participative, peuvent augmenter à la fois la réactivité et les performances.

Quatrièmement, les responsabilités doivent être claires. tous les acteurs, qu’ils soient issus de différents secteurs du gouvernement, de la société civile ou du secteur privé, doivent pouvoir assumer la responsabilité des décisions prises au sujet des objectifs communs identifi és et de l’impact de ces décisions sur la santé et l’équité en santé. la responsabilité en matière de santé et d’équité ne peut pas se limiter à celle du secteur de la santé. il peut s’avérer utile d’aborder des problèmes politiques particuliers en termes d’objectifs; des objectifs spécifi ques à chaque secteur doivent être désignés en

fonction du déterminant social sur lequel ils agissent. la transparence du processus est cruciale quant à qui prend les décisions et qui est responsable de la mise en œuvre des politiques convenues et de leurs résultats. la mise en place d’optiques de santé, qui permettent d’expliciter la prise de décisions conjointe et d’identifi er les intérêts communs, peut permettre de clarifi er les responsabilités29.

cinquièmement, les processus de prise de décisions axés sur les déterminants sociaux et sur la mise en œuvre de ces décisions afi n de réduire les inégalités en santé doivent être justes. Des pro grès quant aux inégalités en matière de santé sont peu probables sans l’existence de processus équitables et d’un accès aux interventions. les cadres juridiques — par exemple, la consécration des droits à la santé et à ses déterminants dans les constitutions nationales — peuvent s’avérer utiles, mais seulement s’ils sont imposés de façon équitable.

METTRE EN ŒUVRE LA SANTÉ DANS TOUTES LES POLITIQUES EN FINLANDE

la Finlande bénéfi cie d’une longue tradition en matière d’action intersectorielle pour la santé. en 1972, le conseil économique de Finlande a publié un rapport sur les politiques de santé à un moment qui coïncidait avec le lancement d’une action de santé publique dans la société fi nlandaise visant à réduire le taux de mortalité dû à des maladies cardiovasculaires. en 1986, la Finlande est devenue une référence pour la politique de « santé pour tous » de l’omS, avec le lancement d’une stratégie nationale. les politiques de santé nationales qui en résultent ont intégré des politiques intersectorielles pour la santé. Depuis 1997, il existe un comité consultatif de santé publique intersectoriel, nommé par un conseil d’État, dont la mission est de promouvoir l’élaboration des politiques intersectorielles pour la santé à travers les différents secteurs administratifs, organisations et autres organismes concernés.

en 2006, la Finlande a consolidé son expérience en mettant en œuvre une approche de « Santé dans toutes les politiques » (SdtP), érigeant la SdtP en thème central de la santé publique au cours de la présidence fi nlandaise de l’union européenne (ue). l’approche SdtP en Finlande — et également telle qu’elle a été approuvée dans le contexte des politiques européennes — s’applique au gouvernement (au pouvoir exécutif) ainsi qu’aux décideurs et responsables politiques dans une plus large mesure et à tous les niveaux de la gouvernance. elle met l’accent sur le besoin à la fois de soutien public et de direction politique. le secteur de la santé joue un rôle important dans la défense de la santé et dans la fourniture d’une expertise pour l’élaboration des politiques intersectorielles. la mise en œuvre de la SdtP à l’échelle locale et régionale est désormais légalement obligatoire en Finlande.

Bien que la Finlande ait poursuivi sa mise en œuvre d’une approche SdtP nationale personnelle, ses six mois à la tête de l’ue ont transformé la SdtP en un des quatre principes fondamentaux de la nouvelle stratégie de santé de l’ue, « ensemble pour la santé : une approche stratégique pour l’ue 2008–2013 ».

Pour obtenir de plus amples informations sur l’expérience fi nlandaise, rendez-vous sur http://biturl.net/bwxq ou consultez les publications suivantes :

ollila e et al. Health in all Policies in the european union and its member states. Policy brief available from http://biturl.net/bye6.

Puska P, Ståhl t. Health in all Policies - the Finnish initiative: background, principles, and current issues. annual review of Public Health, 2010, 31:27.1–27.14.

« Notre gouvernement se dirige vers une fiscalité fondée sur la santé et l’environnement. Notre expérience montre que l’application de mesures fiscales s’avère très efficace pour améliorer la santé en général et notamment accroître l’équité en santé. Le gouvernement va augmenter les taxes sur, par exemple, l’alcool et le tabac, les confiseries, les chocolats et les glaces. La situation économique est incertaine et il est bon d’avoir des mesures permettant à la fois d’augmenter les recettes et d’améliorer l’équité en santé. »

Mme Jutta Urpilainen, Ministre des Finances, Finlande

15 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

ces principes s’appliquent de la même manière et sont tout aussi importants dans la gouvernance mondiale. les institutions internationales doivent assurer leur légitimité en accordant une voix égale et effi cace à ceux qui sont touchés par leurs décisions – une position désignée par l’expression « infl uence sur un pied d’égalité » dans le rapport de la commission. ces organisations doivent procurer orientation et vision stratégique pour réaliser des efforts mondiaux concertés afi n de promouvoir les déterminants sociaux et doivent chercher des moyens de dépasser les visions à court terme, conséquences inévitables des cycles politiques. elles doivent tenter de s’assurer que ces efforts sont effi caces et répondent aux besoins et aux priorités des personnes concernées. leurs structures de gouvernance doivent garantir une responsabilité réelle envers la population mondiale dans son ensemble. enfi n, les institutions internationales doivent chercher de façon proactive à être justes dans tous leurs processus de prise de décisions ainsi que dans la réalisation de leurs activités.

mise en œuvre d’une action intersectoriellecertaines actions sur les déterminants sociaux impliquent des approches globales de la société et du gouvernement, avec un intérêt explicite pour l’équité en santé dans les politiques et législations nationales. D’autres requièrent simplement que des secteurs individuels accomplissent correctement leur travail (par exemple, la conception et la mise en œuvre de politiques éducatives ou fi scales). cependant, de nombreux impératifs politiques exigent une collaboration entre différents secteurs ou une action intersectorielle (aiS)31. Par exemple, les communautés, en particulier les plus défavorisées, ne perçoivent guère leurs besoins en termes de secteurs fragmentés. la réponse à ces besoins touche donc la prestation de services intégrés. l’idée de l’aiS n’est pas nouvelle dans le domaine de la santé puisqu’elle a été défendue par les mouvements pour les soins de santé primaires et la promotion de la santé au cours des trente dernières années. toutefois, l’absence de développement de la gouvernance et des systèmes nécessaires pour mettre en œuvre des politiques cohérentes sur les déterminants sociaux a constitué un obstacle conséquent au progrès. en outre, l’aiS a souvent instrumentalisé les ressources d’autres secteurs pour le système de santé au lieu d’envisager des efforts pour améliorer conjointement les politiques de chaque secteur21.

les défi s majeurs se caractérisent entre autres par la prise de décisions concernant les problèmes qui doivent être traités par

l’aiS et l’identifi cation des objectifs communs pour différents secteurs ayant des intérêts divergents. tous les secteurs n’ont pas à être impliqués; il est d’ailleurs préférable d’identifi er les secteurs prioritaires pour chaque problème et chaque contexte et de rechercher leur adhésion. les organismes gouvernementaux jouent le rôle central à ce sujet, bien que de nombreuses autorités municipales aient été particulièrement effi caces à l’échelle locale. tous les secteurs impliqués doivent se rendre compte des avantages du travail collaboratif et ces avantages potentiels doivent être au premier plan dans l’identifi cation et la traduction des objectifs communs pour l’aiS. concernant le travail sur les déterminants sociaux, les bénéfi ces attribués à d’autres secteurs se traduisant par des améliorations en matière de santé et d’équité en santé doivent s’articuler clairement par rapport aux programmes et priorités de chaque secteur.

Tableau 4. Étapes nécessaires pour la réussite de l’action intersectorielle

1. Élaborer un cadre politique et une approche de la santé favorables à l’action intersectorielle.

2. Mettre l’accent sur les valeurs partagées, les intérêts et les objectifs des partenaires actuels et potentiels.

3. Garantir le soutien politique : s’appuyer sur les facteurs positifs de l’environnement politique.

4 . Faire participer les partenaires essentiels dès le début; n’exclure personne.

5. Assurer une liaison horizontale appropriée entre les secteurs ainsi qu’une liaison verticale des niveaux à l’intérieur des secteurs.

6 . Investir dans le processus de création d’alliances en travaillant à un consensus au cours de l’étape de planifi cation.

7. Se concentrer sur des objectifs concrets et des résultats visibles.

8 . Garantir que la direction, les responsabilités et les récompenses soient partagées entre les partenaires.

9. Mettre en place des équipes constituées de personnes qui travaillent bien ensemble, avec des systèmes de soutien appropriés.

10. Développer des modèles pratiques, des outils et des mécanismes pour soutenir la mise en œuvre de l’action intersectorielle.

11. Garantir la participation publique; éduquer le public et éveiller les consciences au sujet des déterminants de santé et de l’action intersectorielle.

Source : adapté de l’agence de la santé publique du canada, 200732

« Pour l’Australie-Méridionale, « la Santé dans toutes les politiques » est plus qu’un slogan. Grâce au cadre du Plan stratégique d’Australie-Méridionale, à l’innovation de notre programme Thinkers in Residence et au rôle directeur du Premier ministre et du gouvernement, « la Santé dans toutes les politiques » est au centre de nos décisions gouvernementales. »

M. Mike Rann, Premier ministre, Australie-Méridionale

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1.

METTRE EN ŒUVRE LA SANTÉ DANS TOUTES LES POLITIQUES EN AUSTRALIE-MÉRIDIONALE

Depuis 2007, l’État d’australie-méridionale a adopté une approche de « Santé dans toutes les politiques » (SdtP) qu’elle érige stratégiquement au rang de processus central du gouvernement pour améliorer la santé et réduire les inégalités, au lieu de la mettre en œuvre en tant qu’approche dirigée par et pour le secteur de la santé et imposée à d’autres secteurs. cette approche a été jugée essentielle non seulement pour faire aboutir des priorités de santé, mais également pour toute une série d’objectifs dans le document de planifi cation principal de l’État, le Plan stratégique de l’État d’australie-méridionale.

Des relations intersectorielles fortes ont été façonnées pour explorer l’interdépendance entre divers objectifs internes du Plan stratégique et des déterminants sociaux et pour travailler à la réalisation conjointe des objectifs d’organismes individuels ainsi qu’à l’amélioration de la santé de la population. une analyse des objectifs en santé, s’appuyant sur une méthodologie d’évaluation traditionnelle des impacts sur la santé et intégrant des méthodes supplémentaires, telles que la modélisation économique, a été utilisée pour en renforcer la rigueur et la fl exibilité et pour adapter les objectifs politiques des organismes partenaires. ainsi, l’optique de santé est modifi ée pour chaque projet et l’évaluation est intégrée. une série de projets impliquant différents secteurs a été entreprise. ces projets incluent la sécurité de l’eau, l’installation des immigrants et l’accès à la technologie numérique. les bases pour le succès de l’approche de la Santé dans toutes les politiques en australie-méridionale ont été identifi ées comme étant les suivantes :

• une approche forte et transversale du gouvernement;• un mandat et une coordination du gouvernement central;• des méthodes d’enquête fl exibles et adaptables, à l’aide de l’analyse des objectifs de santé;• des profi ts mutuels et une collaboration;• des ressources de santé dédiées au processus;• des responsabilités et une prise de décisions communes.

en 2011, le gouvernement d’australie-méridionale a intégré des dispositions spécifi ques dans la nouvelle législation de santé publique afi n de renforcer le mandat et la durabilité de cette approche. Pour obtenir de plus amples informations sur l’expérience en australie-méridionale, rendez-vous sur http://biturl.net/bhsn ou consultez les publications suivantes :

Kickbusch i, Buckett K, eds. implementing Health in all Policies: adelaide 2010. adélaïde, gouvernement de l’australie -méridionale, 2010. accessible à http://biturl.net/bhsp.

cette tâche impose de rapprocher les différentes perceptions d’un même problème et les différents langag es utilisés par des secteurs variés pour décrire le même problème. elle implique également d’identifi er les secteurs ayant des intérêts en place dans des activités qui peuvent se rapporter au problème; cette étape du processus exige une solide compréhension des intérêts et objectifs de chaque secteur. un modèle conceptuel montrant l’interaction entre différents déterminants sociaux, incluant tous les secteurs représentés, peut se révéler utile pour démontrer que tous les secteurs concernés ont un rôle à jouer. les étapes nécessaires pour une aiS couronnée de succès sont décrites dans le tableau 4. il peut également être instructif d’adapter des approches intersectorielles innovantes utilisées dans d’autres secteurs; par exemple, les évaluations de l’impact environnemental ont fortement infl uencé le développement de méthodologies d’évaluation de l’impact sur la santé.

les confl its et les compromis entre les objectifs à long et court termes et entre les intérêts des différents secteurs sont inévitables. l’action sur les déterminants sociaux offre de nombreuses possibilités favorables à tous, mais certaines actions nécessaires se traduiront par des résultats insatisfaisants pour certaines parties. Dans la gestion de ces confl its, les gouvernements doivent examiner les déséquilibres de pouvoir entre les différents secteurs et déterminer sur quoi reposent les plus grands intérêts pour la santé et l’équité en santé. Par exemple, lorsque des communautés

et des syndicats sont en litige avec des grandes sociétés au sujet de projets de développement économique en rapport avec des préoccupations concernant les conditions de travail et les impacts sur l’environnement, les gouvernements doivent tenir compte des déséquilibres de pouvoir et des impacts possibles sur la santé et analyser de façon critique de quel côté pencheront les avantages économiques. les gouvernements ont également la responsabilité de défendre les moins puissants et de confronter les intérêts qui font obstacle à l’équité en santé.

ressources utiles (disponibles sur le DvD d’accompagnement)

• Graham J, Amos B, Plumptre T. Principles for good governance in the 21st century. Policy brief no.15. New York, PNUD, 2003.

• Kickbusch I, Buckett K, eds. implementing Health in all Policies: adelaide 2010. Adélaïde, Department of Health, gouvernement de l’Australie -Méridionale, 2010.

• au-delà des limites sectorielles : expériences en action intersectorielle, en politique publique et en santé. Ottawa, Agence de la santé publique du Canada, 2007.

• l’Équité en santé grâce à l’action intersectorielle : analyse d’études de cas dans 18 pays. Ottawa, Agence de la santé publique du Canada et OMS, 2008.

• Déclaration d’Adélaïde sur l’intégration de la santé dans toutes les politiques. Adélaïde, OMS et gouvernement de l’Australie-Méridionale, 2010.

17 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)17 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

2. Promotion De la ParticiPation : une Direction communautaire Pour aGir Sur leS DÉterminantS SociauX

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2.

l a gouvernance nécessaire pour agir sur les déterminants sociaux n’est pas possible sans une nouvelle culture de la participation qui garantit la responsabilité et l’équité. Faciliter la participation peut

aider à protéger le principe d’équité et en assurer l’intégration dans les politiques publiques. outre la participation dans la gouvernance, d’autres aspects de la participation, tels que la participation individuelle dans l’acceptation de services ou la participation des communautés dans la prestation de services, sont également importants pour réduire les inégalités en matière de santé. toutefois, la participation des communautés et des groupes issus de la société civile dans la conception des politiques publiques, dans la surveillance de leur mise en œuvre et dans leur évaluation est essentielle à l’action sur les déterminants sociaux. il existe de nombreux exemples dans lesquels la participation s’est traduite par une plus grande concentration sur la santé, depuis les diverses expériences de budgétisation participative jusqu’aux actions pour les jeunes telles que la campagne « nine is mine » des enfants en inde33, 34.

Par conséquent, la participation constitue une intervention primordiale pour renforcer la durabilité politique à l’échelle nationale et internationale et pour garantir que les politiques et les interventions refl ètent les besoins des individus. la participation des communautés, en particulier, est cruciale pour garantir la responsabilité des décisions. Des pays tels que le Brésil et la thaïlande, qui ont récemment obtenu de bons résultats en matière de réduction des inégalités en matière de santé, se sont repenchés sur cette dimension de la participation (voir encadré p. 20). le fait de soutenir l’action nécessaire sur les déterminants sociaux dans un grand nombre de secteurs, en veillant notamment à ce que les services soient sensibles aux besoins des populations défavorisées, est extrêmement diffi cile sans une plus large participation de la société.

De ce point de vue, la participation renferme une valeur intrinsèque de respect pour l’autonomie et le droit des personnes d’être impliquées dans les décisions qui les affectent. concernant l’action

sur les déterminants sociaux, la participation est une composante de l’objectif global lui-même : représentation, bien-être, dignité et qualité de vie améliorés pour tous les membres de la société. cependant, la participation des communautés dans l’élaboration des politiques peut également servir à conduire de nouvelles initiatives, à augmenter la responsabilisation et à soutenir le changement.

il n’existe pas de « règle d’or » pour garantir la participation dans l’élaboration des politiques. la participation qui entraîne des changements sociaux trouve son origine dans des mouvements sociaux, dans des contextes bien précis. cependant, de nombreuses actions gouvernementales peuvent activement faire obstacle à la capacité des communautés à soulever des inquiétudes concernant leurs conditions de vie quotidiennes et à proposer des solutions aux problèmes. en outre, une résistance demeure entre les responsables politiques et les « experts » concernant les efforts participatifs. les gouvernements peuvent aider à surmonter ces barrières et à créer des conditions qui favorisent la participation de communautés aptes à prendre des décisions qui affectent leur santé dans le contexte dans lequel elles vivent. À cet égard, il est vital d’éviter une politique de coopération symbolique. toutefois, les organisations de la société civile peuvent évaluer la meilleure façon de contribuer à l’action sur les déterminants sociaux, y compris en éveillant les consciences au sujet des inégalités en matière de santé, en aidant les communautés à s’organiser, en défendant une gouvernance meilleure et mieux intégrée et en garantissant la responsabilisation dans la mise en œuvre et les effets des politiques.

création des conditions pour la participationla promotion de la participation peut sembler risquée pour les responsables politiques, car cet effort implique un renversement dans les relations au pouvoir en faveur des groupes de population qui, historiquement, ont souvent été exclus et marginalisés. ils

Figure 3. Le contexte et les ressources qui infl uent sur la participation sociale

Politiciens conscients et motivés pour faire face aux problèmes

CULTURE

Politiques et pratiques antérieures

Connaissances

Structures et espaces Ressources

Les communautés et la société civile qui

peuvent intégrer les problèmes dans les

programmes de prise de décisions pour ensuite

leur trouver une solution

19 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

constituent des déterminants sociaux majeurs pour lesquelles une action est nécessaire en vue de réduire les inégalités. Pour ce faire, il est impératif d’observer une volonté de transférer un réel pouvoir aux communautés et d’assumer les conséquences des exigences du peuple qui pourraient se traduire par un changement en profondeur. Pourtant, la participation récompense de bien des manières les dirigeants politiques en quête de réforme. en élargissant leur circonscription électorale pour s’emparer des processus politiques et s’attribuer les mérites des changements et les avantages qui en découlent, la participation des communautés peut piloter des réformes diffi ciles et créer un héritage conséquent, probablement impossible sans un soutien au changement.

la Figure 3 illustre comment la culture de la participation dans l’élaboration des politiques se crée entre les communautés et la société civile d’une part, et avec les gouvernements d’autre part. cette culture se compose de quatre éléments majeurs : les structures et espaces qui rendent possible la participation, les ressources que les intervenants mettent en jeu, les connaissances nécessaires pour participer et l’impact des politiques et pratiques antérieures sur la participation. ce cadre n’est pas exhaustif, mais pour faciliter la participation de façon effi cace il est impératif de réunir au moins ces quatre éléments.

Défi nir les mécanismes de la participation

les structures politiques, physiques et institutionnelles, ainsi que leurs règles, réglementations et relations peuvent soit bloquer soit favoriser la participation dans l’élaboration des politiques puisqu’elles défi nissent dans quelle mesure la participation se produit et qui peut avoir accès à ces processus. ces structures peuvent être formelles ou informelles. Pour faciliter la participation, les processus doivent être aussi transparents que possible et les procédures informelles doivent être minimisées, car elles sont souvent moins accessibles aux communautés défavorisées. Des mécanismes stables sont nécessaires pour défi nir la participation en tant qu’élément central dans le processus d’élaboration des politiques.

le succès des mécanismes choisis pour défi nir la participation est fortement tributaire du contexte et du processus par lesquels ils sont

intégrés à la gouvernance. les assemblées et conseils ont connu un large succès dans des pays où ils sont étroitement liés au processus d’élaboration des politiques. Dans d’autres pays, leur impact sur la politique a été minime. De même, la décentralisation, là où les fi nancements et les ressources sont délégués à des organismes infranationaux, s’est avérée pratique pour encourager l’engagement de la communauté dans de nombreux pays. toutefois, on compte de nombreuses expériences négatives, notamment lorsque l’engagement, les ressources ou les connaissances se sont révélés insuffi sants pour mettre en œuvre une action en vue de répondre à des attentes plus importantes. De même, d’autres instruments, tels que le dialogue, la budgétisation participative et les jurys citoyens, sont utiles dans la mesure où ils peuvent infl uencer la politique.

Fournir des ressourcesla participation offre de nombreux avantages, mais elle est également onéreuse. les intervenants ont besoin de suffi samment de temps, d’argent, de capacités institutionnelles et de ressources humaines pour participer effi cacement à l’élaboration de politiques qui défendent leurs intérêts. en outre, puisque l’élaboration de politiques est un processus continu, la participation exige la disponibilité des ressources pendant une période soutenue.

les gouvernements peuvent investir dans la participation en offrant des incitations, des subventions et en tenant compte des dates et lieux des processus participatifs pour optimiser la possibilité de participation des individus. les organisations de la société civile peuvent fournir les ressources nécessaires pour la participation et aider les communautés à identifi er quels problèmes ils doivent traiter en priorité pour l’action.

Prendre en compte l’impact des politiques et des pratiques antérieuresl’insuffi sance de mécanismes et de ressources ne constitue pas des barrières à la participation. les expériences précédentes des personnes ainsi que le contexte politique et historique de confrontation au gouvernement infl uencent fortement leur perception et leur capacité à participer à l’élaboration des

« L’Assemblée nationale de santé est un processus qui vise à développer des politiques publiques participatives en matière de santé en impliquant toutes les intervenants. Son rôle est d’associer des liens verticaux représentant les décisions à tous les niveaux avec des liens horizontaux représentant les demandes et les besoins des personnes dans un nouveau schéma harmonieux. Sa mission est placée sous la responsabilité du Ministère de la Santé publique puisqu’elle implique la santé dans toutes les politiques. »

Dr Amphon Jindawatthana, secrétaire général de la Commission nationale de santé, Thaïlande

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2.

politiques. il est d’ailleurs peu probable que les groupes victimes de discrimination s’engagent dans les mécanismes participatifs; par conséquent, les gouvernements doivent faciliter de façon proactive leur participation, non seulement en leur attribuant des ressources, mais également en reconnaissant activement leur culture et leurs représentants, afi n de contribuer à leur bien-être. Dans de nombreux pays, les changements doivent être opérés dans les pratiques du gouvernement et de ses équipes, avec une participation établie en tant que composante centrale de la mission des organismes gouvernementaux.

Développer les connaissances et les capacitésune participation effi cace implique des intervenants compétents et bien informés qui comprennent le processus, voient clairement comment il peut s’exécuter et disposent des compétences politiques et sociales pour manœuvrer à travers les processus bureaucratiques tout en promouvant leur programme. aborder les inégalités en matière d’accès à l’information est par conséquent essentiel. la connaissance et l’éducation nécessaires à une participation effi cace peuvent être acquises par le biais d’une formation formelle ou par une expérience justifi ée. les intervenants qui manquent des

compétences nécessaires peuvent être assistés par des incitations et un accès à l’information et à la formation.

comme il vient d’être mentionné, un des aspects essentiels pour garantir que les groupes marginalisés soient représentés de façon appropriée dans les processus politiques consiste à développer leurs capacités et leurs connaissances afi n de pouvoir participer. les communautés demandent un accès à l’information, mais elles doivent également être en mesure d’interpréter et d’utiliser ces informations. Par conséquent, les informations doivent être rendues publiques, par le biais de plateformes auxquelles les personnes peuvent avoir accès, en les présentant de telle sorte qu’elles soient comprises par les communautés, et en développant les compétences pour interpréter ces informations. outre les aptitudes d’analyse, les communautés ont besoin davantage de « connaissances de la bureaucratie » pour démystifi er les structures, acteurs et processus bureaucratiques impliqués dans l’élaboration des politiques, pour renforcer leur sensibilisation aux occasions qui existent pour infl uencer le processus politique et pour leur permettre de participer avec des atouts en main. les organisations gouvernementales doivent développer leur aptitude à faciliter la participation, notamment leur réactivité face aux demandes des communautés et

INSTITUER LA PARTICIPATION AU BRÉSIL ET EN THAÏLANDE

le Brésil et la thaïlande sont deux pays qui ont affi ché des progrès impressionnants en matière de santé et dans la réduction des inégalités en matière de santé au cours des 20 dernières années. ils ont également été des pionniers de l’augmentation de la participation publique à l’élaboration des politiques.

au Brésil, les approches participatives en matière de prise de décisions concernant la santé ont été inspirées par les mouvements sociaux qui ont conduit à la création du système de santé universel ainsi qu’aux progrès qui en découlent dans les soins de santé primaires et la protection sociale. la constitution brésilienne de 1988 déclare que la santé — y compris le droit de participer à la gouvernance en matière de santé — est un droit fondamental pour tous. cet engagement a ouvert la porte à la défi nition de la participation publique à l’échelle municipale, régionale et nationale. la participation des conseils de santé à tous les niveaux (y compris les conseils de santé municipaux dans 5564 villes, où la moitié des conseillers sont des utilisateurs du système de santé) est appuyée par des conférences de santé nationale régulières. les modèles innovants tels que la budgétisation participative ont également été mis en œuvre dans certaines administrations.

en thaïlande, au cours des dix dernières années, les assemblées de la société civile ont conduit à l’offi cialisation de l’assemblée de santé nationale, qui a lieu tous les ans depuis 2008, mandat que lui a conféré la nouvelle loi nationale relative à la santé. adaptant les mécanismes utilisés par l’assemblée mondiale de la Santé de l’omS, l’assemblée nationale de la santé rassemble plus de 1500 personnes issues d’organismes gouvernementaux, d’universités, de la société civile, des professions de santé et du secteur privé pour aborder des problèmes de santé majeurs et aboutir à des résolutions pour orienter l’élaboration de politiques. les impacts politiques attribuables aux résolutions de l’assemblée comprennent la protection des budgets pour la couverture de santé universelle, l’approbation de stratégies pour l’accès universel aux médicaments et la création de commissions nationales d’évaluation de l’impact sur la santé et commerce et santé. De plus amples informations sont disponibles sur http://en.nationalhealth.or.th/.

vous trouverez de plus amples informations sur les expériences brésiliennes et thaïlandaises en consultant les publications suivantes :

cornwall a, Shankland a. engaging citizens: lessons from building Brazil’s national health system. Social Science and medicine, 2008, 66:2173–2184.

rasanathan K et al. innovation and participation for healthy public policy: the fi rst national Health assembly in thailand. Health expectations, 2011, doi: 10.1111/j.1369-7625.2010.00656.x.

21 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

leur capacité à s’engager avec des propositions exprimées dans un registre différent de celui auquel elles sont habituées.

négocier la participation et garantir la représentativitéles gouvernements peuvent négocier la participation par de nombreux biais, dans l’optique de faciliter l’émancipation. la Figure 4 fournit une vue d’ensemble de cette ligne directrice, de la fourniture d’informations au transfert de pouvoir. les groupes les plus défavorisés doivent être identifi és à l’avance et un plan doit être développé pour garantir que ces groupes soient correctement représentés. les groupes marginalisés font souvent face à des barrières supplémentaires qui entravent les efforts pour les inciter à s’engager. cette situation peut exiger des approches nouvelles et fl exibles – par exemple, organiser des forums réservés aux femmes, à l’aide des nouvelles technologies de communication pour atteindre les jeunes, et faire très attention à la justesse culturelle lorsqu’on s’adresse à des minorités ethniques et à des peuples autochtones. les processus régionaux sont essentiels pour renforcer les efforts nationaux dans la recherche de la participation. les gouvernements jouent également un rôle dans le travail avec les communautés pour garantir la légitimité de ceux qui déclarent être des représentants de communautés, en abordant les confl its d’intérêts et en faisant pression par des intérêts en place à l’échelle nationale et internationale.

Faciliter le rôle de la société civilela société civile peut jouer de nombreux rôles importants dans la mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociaux. une des fonctions essentielles est de faire comprendre aux décideurs politiques et exécutants des programmes qu’ils doivent assumer leur responsabilité et respecter leurs engagements; cette supervision inclut la surveillance des dépenses par rapport aux budgets. les organisations de la société civile peuvent infl uer sur la responsabilité en encourageant

les mécanismes de contrôle des institutions et, indirectement, en consolidant les institutions ayant une responsabilité (par exemple, la démocratie électorale et les médias indépendants). les organisations de la société civile peuvent également produire des preuves pour le travail sur les déterminants sociaux. la précision des informations fournies par la société civile et la capacité de ces groupes à être une source d’informations crédibles sont parfois remises en question. comme pour d’autres sources d’informations, il peut y avoir des problèmes de rigueur, mais la société civile est certainement en mesure de fournir l’accès à des informations inédites. Dans les pays où les données et informations du gouvernement sont inappropriées, les groupes de la société civile peuvent constituer la principale source d’informations crédibles et à jour pour orienter l’élaboration des politiques axées sur les déterminants sociaux.

les gouvernements peuvent activement faciliter le rôle de la société civile dans l’action sur les déterminants sociaux. ils peuvent formaliser les implications des organisations de la société civile dans les processus d’élaboration de politiques — par exemple, en soutenant leur rôle dans le maintien des responsabilités par la constitution d’organismes consultatifs de la société civile et en s’engageant formellement avec des initiatives de surveillance. À l’échelle nationale et internationale, les organismes offi ciels peuvent examiner et encourager les « rapports parallèles » des organisations de la société civile – des évaluations indépendantes qui complètent et qui souvent révèlent des problèmes survolés dans les publications offi cielles. Parmi les exemples, on trouve les rapports parallèles de la société civile pour la Session extraordinaire de l’assemblée générale sur le viH/sida des nations unies et le rapport de la société civile de la commission des déterminants sociaux de la santé36. ces exemples mettent l’accent sur le besoin du gouvernement d’être mieux informé sur la valeur et l’utilité du savoir produit par les groupes de la société civile et de développer la capacité de ces groupes à entreprendre et à présenter des recherches sous une forme qui soit compréhensible pour d’autres publics.

Informer

Fournir des informations équilibrées et objectives pour aider les personnes

à comprendre les problèmes, les autres choix possibles, les possibilités et les

solutions

Consulter

Chercher à obtenir des commentaires de la

part des communautés touchées concernant

les analyses, les autres choix possibles et les

décisions

Participer

Travailler directement avec les communautés

tout au long du processus pour garantir la compréhension et la prise en considération des préoccupations et

des aspirations

Transférer le pouvoir

Lorsque les communautés ont « le dernier mot » au sujet

des décisions essentielles qui ont des répercussions

sur leur bien-être

Collaborer

Former des partenariats avec les communautés quant à chaque aspect

de la décision, y compris la recherche de nouvelles possibilités et le choix de la solution

préférée

Figure 4. Techniques pour rechercher l’engagement des communautés dans le processus politique

Source : adapté de Solar and irwin, 20106, lui-même adapté de international association for Public Participation, 200735

| 22COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail |

2.

PARTICIPATION À L’ACTION À ROSARIO, ARGENTINE

la ville de rosario en argentine (population inférieure à 1 million de personnes) a, au cours des dernières années, développé un système de santé publique fortement axé sur les soins primaires dans lequel la participation est une composante centrale. cofi nancé par les gouvernements municipaux et provinciaux, le système fournit des services de santé gratuits à tous les habitants de la ville. il repose sur les principes de participation communautaire, de participation des travailleurs de la santé à la gestion, d’accès universel et équitable, de droit à la santé, de planifi cation décentralisée et d’autonomie et de responsabilité des travailleurs de la santé.

ce système s’appuie sur des centres de soins primaires. les organisations communautaires ont une infl uence importante dans ces centres et travaillent ensemble au sein d’une fédération pour analyser des projets municipaux et en discuter. outre cette participation communautaire, les travailleurs de la santé participent également à la gestion des centres.

À travers ce processus participatif, la santé est devenue une priorité municipale. en 1988, le budget de la santé représentait moins de 8 % du budget municipal; en 2003, ce chiffre est passé à 25 %. le taux de mortalité infantile a chuté de 25,9/1000 naissances en 1988 à 11,4/1000 naissances en 2002. les consultations dans ces centres de santé ont augmenté de 314 % au cours de la même période. en 2009, la ville a ouvert un nouvel hôpital qui fournit un accès universel; le design de l’hôpital a été pensé en tenant compte du point de vue des patients.

ressources utiles (disponibles sur le DvD d’accompagnement)

• Civil Society Report to the Commission on Social Determinants of Health, 2007.

• International Association for Public Participation. Trousse d’outils de participation du public. Accessible à l'adresse http://biturl.net/bzdg.

• Valentine N et al. Health equity at the country level: Building capacities and momentum for action. a report on the country stream of work in the cSDH. Social determinants of health implementation discussion paper 3. Genève, OMS, 2011.

23 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)23 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

3. le rÔle Du Secteur De la SantÉ, notamment DeS ProGrammeS De SantÉ PuBliQue, DanS la rÉDuction DeS inÉGalitÉS en matiÈre De SantÉ

| 24COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail |

3.

B ien que la mise en œuvre de politiques fondées sur les déterminants sociaux soit essentielle pour améliorer la santé et réduire les inégalités, le secteur de la santé a lui aussi un

rôle crucial à jouer. le secteur de la santé doit permettre d’établir un dialogue sur les raisons pour lesquelles la santé et l’équité en santé constituent des objectifs communs à l’ensemble de la société et pour identifi er comment d’autres secteurs (avec leurs propres priorités spécifi ques) peuvent tirer profi t de l’action sur les déterminants sociaux. le secteur de la santé doit travailler de cette façon avec d’autres secteurs afi n de réduire les différences en matière d’exposition et de vulnérabilité face aux menaces de santé.

en outre, les systèmes de santé eux-mêmes (les acteurs, institutions et ressources qui entreprennent des actions essentiellement dans le but d’améliorer la santé), y compris les programmes de santé publique, constituent un déterminant social. De fait, au lieu de réduire les inégalités en matière de santé, le secteur de la santé les aggrave souvent en fournissant un meilleur accès et une meilleure qualité de soins à des couches de la société qui comparativement ont des besoins moindres. les paiements directs pour les services de santé entraînent 100 millions de personnes dans la pauvreté chaque année37. les choix concernant le fi nancement des systèmes de santé et la localisation des services de soins de santé, tout comme l’attitude des professionnels de santé envers différents groupes de la société, sont primordiaux pour déterminer si le secteur de la santé a un impact positif ou négatif sur les inégalités en matière de santé. Pour garantir que le secteur de la santé réduise les inégalités en matière de santé au lieu de les aggraver, il est impératif de fournir des services de soins équitables à tous les groupes de la société, pour tous les types de soins. renforcer la compétence des programmes de santé publique pour aborder les déterminants sociaux est une étape majeure dans cette direction38, 39. S’il n’agit pas pour réduire les inégalités, le secteur de la santé sera en mauvaise posture pour demander à d’autres secteurs de lancer une action sur les déterminants sociaux.

l’approche des soins de santé primaires considère l’augmentation de l’équité comme une valeur centrale pour le secteur de la santé, tout comme la garantie d’une couverture universelle, la mise en place d’une action intersectorielle et la facilitation de la participation et de la négociation dans la direction du secteur de la santé21. l’approche des soins de santé primaires a davantage en commun avec une approche fondée sur les déterminants sociaux et tend vers des objectifs semblables3. Pour compenser le manque de performances vis-à-vis des groupes de population défavorisés, les différentes stratégies visant à renforcer les systèmes de santé et les programmes de santé publique doivent instituer une priorité explicite pour l’équité au moyen d’une ligne directrice en matière de soins et de fonctions du système de santé. cette tâche exige d’aller au-delà des mesures classiques du progrès pour dévoiler les disparités non seulement dans les résultats en matière de santé, mais également dans l’utilisation et la qualité des services. ce type d’évaluation est important non seulement pour améliorer l’équité en santé, mais également pour faire des progrès vis-à-vis des priorités de santé. Par exemple, la probabilité d’atteindre les objectifs de santé prioritaires tels que les omD et l’élimination de la tuberculose

est diminuée par une prestation de services dérisoire envers des populations « diffi ciles à atteindre »40, 41.

les réformes défendues pour le renouvellement des soins de santé primaires (couverture universelle; soins axés sur les personnes; politiques publiques équitables; direction, tutelle et participation améliorées)21 peuvent favoriser de meilleures performances en termes d’équité si elles sont appliquées dans l’ensemble des « fondations » ou des fonctions du système de santé : prestation de services; professionnels de santé; systèmes d’information sanitaire; accès aux médicaments, vaccins et technologies; fi nancement de la santé; direction.42

mettre en œuvre le rôle du secteur de la santé dans la gouvernance pour les déterminants sociauxil existe quatre grandes fonctions interdépendantes à travers lesquelles le secteur de la santé peut apporter une contribution utile à la gouvernance pour l’action sur les déterminants sociaux. Premièrement, le secteur de la santé joue un rôle essentiel dans la défense d’une approche fondée sur les déterminants sociaux et explique comment cette approche est bénéfi que à la fois pour la société et pour les différents secteurs. le secteur de la santé doit notamment exprimer les raisons pour lesquelles les inégalités en matière de santé constituent un indicateur de priorité absolue du manque de bien-être d’une société qui justifi e une réponse intégrée. Deuxièmement, le secteur de la santé dispose d’une expertise particulière et d’une responsabilité dans la surveillance des inégalités en matière de santé et de l’impact des politiques sur les déterminants sociaux. troisièmement, avec le tri des éléments probants et une défense satisfaisante, le secteur de la santé est susceptible de jouer un rôle important pour réunir les secteurs afi n de planifi er et mettre en œuvre

25 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

un travail sur les déterminants sociaux — par exemple, l’identifi cation de problèmes qui requièrent un travail collaboratif, la mise en place de relations et l’identifi cation d’alliés stratégiques dans d’autres secteurs comme partenaires potentiels. Quatrièmement, le secteur de la santé joue un rôle important dans le développement des capacités de travail sur les déterminants sociaux. il est important de mettre en garde le secteur de la santé sur le fait qu’il doit éviter de revendiquer un de ces rôles en tant que fonction exclusive.

Pour entreprendre effi cacement ces fonctions, une série de tâches et de responsabilités spécifi ques peut être identifi ée9 :

• comprendre les programmes politiques et les impératifs administratifs d’autres secteurs;

• Développer des connaissances et des bases factuelles des orientations politiques et stratégiques;

• Évaluer les conséquences de santé comparatives des orientations au sein du processus de développement politique;

• mettre en place des plateformes régulières pour le dialogue et la résolution de problèmes avec d’autres secteurs;

• Évaluer l’effi cacité du travail intersectoriel et l’élaboration de politiques intégrées dans le partenariat avec d’autres intervenants;

• renforcer les capacités grâce à de meilleurs mécanismes, ressources, soutiens d’organismes et personnels dévoués et compétents;

• travailler avec d’autres branches du gouvernement pour atteindre leurs objectifs et, ce faisant, faire progresser la santé et le bien-être.

un grand nombre de ces responsabilités représente un terrain nouveau pour le secteur de la santé, qui par conséquent doit développer sa propre capacité à travailler effi cacement sur les déterminants sociaux.

réorienter les services de soins de santé et les programmes de santé publique pour réduire les inégalitésPlacer l’équité au cœur des services de soins de santé implique avant tout d’évaluer la performance des services de santé existants et des programmes en matière de réduction des inégalités en matière de santé. cette évaluation implique de comprendre comment les services existants opèrent, y compris leurs buts, objectifs et cibles (c’est-à-dire, la « logique » des services et des programmes), et comment les activités de ces services interagissent avec la création d’inégalités en matière de santé dans la société.

un grand nombre de modèles sont utiles pour évaluer si les services de santé existants exacerbent ou atténuent les inégalités en santé38, 43, 44. la Figure 5 illustre le modèle tanahashi, qui envisage l’accès, la fourniture et l’usage des services de soins de santé pour conceptualiser les étapes nécessaires à une personne entre la perception d’un problème de santé et la prestation effi cace des services de santé. À chaque étape, la « perte » de personnes par

les services et programmes de santé se traduit par une souffrance évitable. Par exemple, pour recevoir des soins effi caces, les personnes ayant une tension artérielle élevée doivent savoir qu’elles ont un problème, rechercher des soins pour leur état, obtenir des soins, recevoir des conseils appropriés, obtenir le traitement prescrit, respecter le traitement et être effi cacement soulagées par le traitement, avec une issue satisfaisante à leur problème.

l’objectif principal des services et programmes de soins de santé est de garantir que ce chemin complexe soit parcouru avec succès et dans les meilleurs délais. l’échec à garantir cette manœuvre se traduit par une mauvaise performance et la non-obtention des résultats de santé publique souhaités. Pour la plupart des services de soins de santé, le taux de personnes ne recevant pas de soins effi caces à chaque étape et la qualité des soins reçus diffèrent selon les groupes de population. cette disparité constitue un mécanisme fondamental à travers lequel les services et programmes de soins de santé augmentent les inégalités en santé. mesurer la performance en décomposant les données pour des groupes de population ciblés, notamment les plus défavorisés de par leur contexte social, est une condition préalable pour identifi er comment les services de santé peuvent réduire leur contribution aux inégalités sociales.

À partir de là, il est possible de défi nir les points d’entrée pour les interventions des services de soins de santé afi n d’atténuer les inégalités en matière de santé39. Dès lors que l’on sait quels groupes bénéfi cient des services et des programmes et, plus important, quels groupes n’en bénéfi cient pas ou reçoivent des services de moins bonne qualité, les raisons de ces disparités peuvent être examinées et les barrières aux soins, spécifi ques à ces groupes, identifi ées. un grand nombre de ces barrières existent en dehors du secteur de la santé dans d’autres déterminants sociaux. cependant, le secteur de la santé peut apporter une contribution importante en abordant d’abord les facteurs sous son contrôle, tels que le fi nancement, la localisation et les délais des services, ainsi que les compétences et attitudes des travailleurs de la santé. il peut également travailler avec les communautés pour identifi er les barrières et leurs solutions, y compris en garantissant que les soins s’étendent au-delà des services à visée curative, à des activités de promotion et de prévention.

Figure 5. Le modèle Tanahashi illustrant la prestation et la couverture des services

Source : omS, 201043, adapté de tanahashi, 197845

OBJECTIF DE LA PRESTATION DE SERVICES

Disponibilité

POPULATION CIBLE

Acceptabilité

Accessibilité

Contact

Effi cacitéPopulation cible qui ne commu-

nique pas avec les services

Proc

essu

s de

la p

rest

atio

n de

ser

vice

s

Courbe de couverture

| 26COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail |

3.

cette stratégie fournit une base pour la réorientation des services et programmes afi n de réduire les inégalités et pour une surveillance continue afi n d’observer si les changements ont produit l’effet attendu. elle peut également être alignée sur des approches fondées sur les droits de la personne pour renforcer les systèmes de santé, qui visent à garantir que les installations, les biens et les services de santé sont disponibles, accessibles à un coût abordable, acceptables, adaptés et de bonne qualité. Dès que les services existants ont été examinés, des interventions spécifi ques doivent être défi nies dans une analyse de la façon dont les obstacles aux soins peuvent être réduits. ces interventions peuvent non seulement impliquer des changements dans la prestation des soins (par exemple, des changements ou une meilleure gestion des services proposés), mais également des tentatives pour aborder les déterminants sociaux qui entravent l’accès aux soins. les programmes, bien qu'ils ne puissent pas être responsables de toutes les interventions potentielles, peuvent comprendre une série de mesures pour réduire les différences d’exposition et de vulnérabilité face aux menaces de santé, notamment les différences qui se déclarent lorsque la personne tombe malade. les programmes, bien qu'ils peuvent engager des partenaires d’autres secteurs pour agir sur les différences sociales qui se traduisent par des inégalités en santé.

il existe un potentiel de collaboration entre les programmes qui identifi ent les problèmes courants entraînant des différences d’exposition ou de diffi cultés dans l’accès aux soins. Par exemple, les déterminants essentiels de l’épidémie de tuberculose sont le tabagisme, l’abus d’alcool, le diabète, la pollution de l’air intérieur et le viH/sida46. ces problèmes se retrouvent souvent chez les groupes de populations défavorisées, caractérisés par des déterminants sociaux courants tels que la pauvreté, la discrimination et de mauvaises conditions de logement et d’éducation. en outre, le dépistage et le diagnostic du viH/sida, de la tuberculose et des mnt sont souvent entravés par le niveau médiocre de qualité et de couverture. la réorientation pour lutter contre ces déterminants sociaux d’une façon cohérente fournit à ces programmes de santé publique de bonnes occasions pour améliorer mutuellement leurs performances vers ces objectifs communs et leurs propres objectifs.

instituer l’équité dans la gouvernance des systèmes de santéla réorientation de la prestation des services de soins de santé doit être soutenue par des réformes de la gouvernance des systèmes de santé, par le biais d’une approche de soins de santé primaires. ce parcours est nécessaire pour améliorer la capacité du secteur de la santé à concevoir des politiques qui contribuent à l’équité dans l’ensemble des fonctions du système de santé. la défi nition de l’équité dans les systèmes de santé place notamment de grandes exigences sur la capacité de gouvernance des ministères nationaux de la santé pour accompagner le changement, notamment dans les pays où une large proportion des systèmes de santé échappe au contrôle direct des ministères. il est diffi cile de négocier et de piloter le changement dans des services dirigés par des autorités infranationales, le secteur privé et des organisations non gouvernementales (y compris des groupes confessionnels). cependant, les progrès dépendent de l’intégration de l’équité dans ces services en tant que première recommandation ou du moins de l’évaluation de leur contribution au système de santé dans son ensemble. Diriger les ressources vers des groupes défavorisés qui manquent de pouvoir politique ou plaider en faveur de fi nancements suffi sants pour fournir des soins de santé équitables est plus diffi cile, mais pourtant essentiel.

aborder ces défi s impose une planifi cation claire et transparente au niveau central, avec des ministères nationaux de la santé conscients de l’importance des autres acteurs et intervenants dans les systèmes de santé, mais également en revendiquant leur mission et leur rôle de pilote du système dans son ensemble. le développement de stratégies de santé nationales qui engagent ces autres partenaires est l’occasion de renforcer la capacité des ministères nationaux de la santé de déléguer le système de santé dans son ensemble (par exemple, en établissant les priorités pour aborder les inégalités) et de mettre en œuvre des mécanismes pour la négociation et la réglementation entre les différents intervenants. le développement de stratégies peut également être utilisé pour vérifi er si le problème essentiel en matière d’équité est de remédier aux problèmes de santé qui touchent les groupes les plus défavorisés, de réduire les écarts

« Dans le secteur de la santé, nous avons un rôle crucial à jouer dans l’action sur les déterminants sociaux, même si la plupart échappent à notre contrôle direct. Nous pouvons nous-mêmes veiller à ne pas aggraver le problème des inégalités en matière de santé. Nous avons également la tâche d’encourager l’action, de travailler avec les différents secteurs et de mettre les éléments factuels à la disposition des responsables politiques de tous les secteurs. »

Professeur Michael Marmot, président de la British Medical Association en 2010-2011 et

ancien président de la Commission des déterminants sociaux de la santé

27 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

de santé entre les groupes, de « niveler » le gradient social pour l’ensemble des groupes, ou une combinaison des trois. les efforts du secteur de la santé pour remédier aux inégalités en matière de santé varieront en fonction du contexte national, de la nature et de l’étendue des inégalités en matière de santé présentes, ainsi que de la structure des systèmes sociaux et de santé. la gouvernance des systèmes de santé doit donc répondre de façon appropriée en attribuant des ressources et en favorisant les groupes défavorisés dans l’ensemble des fonctions du système de santé.

le fi nancement des soins de santé pour garantir une couverture de santé universelle et équitable (accès et utilisation de services de qualité sur l’ensemble de la chaîne de soins pour tous les membres de la société) pose également un problème particulier pour la gouvernance du système de santé47. la couverture de santé universelle et équitable (Figure 6) implique d’assurer l’accès et la couverture réelle de tous les groupes (« largeur »), pour tous les soins nécessaires (« profondeur »), à des coûts abordables et dans des conditions acceptables, avec des ressources spécifi ques pour aborder les besoins différenciés des personnes les moins aisées (« hauteur »). Parvenir à une couverture de santé universelle n’est pas chose aisée et il est même possible de l’observer dans les pays à revenus élevés. Si l’accent n’est pas suffi samment mis sur l’équité, avec une priorité pour les personnes les plus défavorisées dans les services nouveaux et existants, l’augmentation de la couverture risque en fait de creuser les inégalités48. cependant, les preuves montrent que tendre de manière équitable vers une couverture de santé universelle est possible dans des pays ayant tous types de revenus. le fi nancement des systèmes de santé est un élément essentiel à prendre en considération. les frais des prestations de

services ont été explicitement pointés du doigt pour dissuader d’un usage approprié des soins de santé, entraînant des millions de personnes dans la pauvreté. Par conséquent, tous les pays doivent mettre en œuvre des mécanismes de fi nancement collectif pour fi nancer les services de santé par l’imposition, des régimes d’assurance sociale ou une combinaison des deux.

Bien sûr, la couverture de santé universelle implique davantage que des mécanismes de fi nancement ou un accès à une série de services de base. elle implique la prise en compte de toute une série de problèmes complexes, y compris la performance, la qualité, l’effi cacité, l’acceptabilité et la fi xation de priorités en matière de besoins ainsi que l’impact des déterminants sociaux sur ces problèmes. Développer l’éducation des communautés en matière de santé et les compétences culturelles des professionnels de santé peut permettre de réduire les inégalités vis-à-vis de la qualité des services fournis.

même dans des pays où les conditions de la couverture de santé universelle sont largement répandues, des inégalités marquées subsistent entre des groupes socioéconomiques, ethniques et géographiques. D’autres mécanismes de fi nancement doivent donc être envisagés, tels que la liaison entre fourniture de services de santé et régimes de protection sociale plus étendus et la fourniture d’une assistance ciblée aux groupes ayant les besoins les plus importants. le fi nancement de formules qui prennent en compte les besoins et les déterminants sociaux (plutôt que la taille de la population uniquement) constitue un outil pratique à cet égard. une protection fi nancière est également requise pour assurer des revenus lorsque les personnes tombent malades et sont incapables de travailler.

Figure 6. Aboutir à une couverture de santé universelle équitable (CSU)

Source : Frenz et vega, 201049 adapté de l’omS, 200821

Couverture santé universelle équitable (tous les groupes dont les besoins sont effi cacement couverts)

Profondeur : tous les services nécessaires sont pris en compte

Largeur : les systèmes de santé couvrent tous les groupes de population

atteindre tous les groupes

intégrer d'autres services

Hauteur :

facilitateurs d'accès, qui tiennent compte des circonstances différencielles et des besoins des groupes défavorisés

réduire les paiements de l’utilisateur et

les autres obstacles, habiliter et rendre

autonome

Système ou programme de santé

universel

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3.

RÉORIENTER LES PROGRAMMES DE SANTÉ PUBLIQUE AU CHILI

le chili s’est récemment lancé dans une réorientation de ses programmes de santé publique afi n de réduire les inégalités en matière de santé. en 2008, des évaluations de santé fondées sur le modèle de tanahashi ont été entreprises pour six programmes de santé publique majeurs : santé des enfants, santé génésique, santé cardiovasculaire, santé buccale, santé des travailleurs et marée rouge (effl orescence algale). l’objectif de ces évaluations était d’identifi er des barrières différentielles et des facilitateurs pour la prévention, la détection de cas et le succès des traitements et pour donner des directives afi n de réorienter chaque programme et d’améliorer l’équité dans l’accès aux soins.

Des équipes pluridisciplinaires ont entrepris les évaluations, avec la participation de travailleurs de la santé issus de tous les niveaux du système de santé, de communautés, d’administrations du secteur de la santé et des décideurs d’autres secteurs. en 2010, tous les programmes ont appliqué les recommandations proposées, à l’aide de stratégies intersectorielles et participatives. Par exemple, le programme de santé cardiovasculaire a mis en œuvre 67 interventions de bonne pratique identifi ées par cette évaluation et a assisté toutes les équipes de santé régionales dans le développement de plans d’action spécifi ques pour mettre en pratique ces interventions. Dans le programme red tide (marée rouge), des stratégies ont été développées pour un meilleur traitement du problème, avec une réduction des effets néfastes sur les pêcheurs par une diversifi cation temporaire et une restructuration des conditions de travail. ce processus s’est traduit par le développement d’une batterie d’indicateurs et de méthodologies pour évaluer l’équité de l’accès aux programmes de santé publique.

De plus amples informations sur l’expérience chilienne sont disponibles sur http://www.equidad.cl/.

ressources utiles (disponibles sur le DvD d’accompagnement)

• Blas E, Sivasankara Kurup A, eds. equity, social determinants and public health programmes. Genève, OMS, 2010.

• Frenz P, Vega J. Universal health coverage with equity: what we know, don’t know, and need to know. Background paper for the global symposium on health systems research. 2010. Accessible à l'adresse http://biturl.net/bzdv.

• Rasanathan K et al. Primary health care and the social determinants of health: essential and complementary approaches for reducing inequities in health. Journal of epidemiology and community Health, 2011, 65:656-660.

• Narrowing the gaps to meet the goals. New York, UNICEF, 2010. Accessible à l'adresse http://bitURL.net/bzdw.

• Putting our own house in order: examples of health-system action on socially determined health inequalities. Copenhagen, WHO Regional Offi ce for Europe, 2010.

• monitoring equity in access to aiDS treatment programmes: a review of concepts, models, methods and indicators. Genève, OMS, 2010.

• rapport sur la santé dans le monde, 2008 : les soins de santé primaires - maintenant plus que jamais. Genève, OMS, 2008.

• rapport sur la santé dans le monde, 2010 : le fi nancement des systèmes de santé : le chemin vers une couverture universelle. Genève, OMS, 2010.

29 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)29 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

4. action monDiale Sur leS DÉterminantS SociauX : aliGnement DeS PrioritÉS et DeS intervenantS

| 30COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail |

4.

i l est nécessaire d’agir sur les déterminants sociaux, non seulement au sein des pays, mais aussi au niveau international. l’intégration croissante de l’économie mondiale a entraîné une augmentation

des fl ux transfrontaliers de marchandises, de services, de capitaux et de personnes, ce qui affecte la santé et l’équité en santé, à la fois directement et par le biais des conséquences économiques. cette tendance a également considérablement réduit le champ d’action des gouvernements en matière de politiques traitant des déterminants sociaux. la société civile, entre autres, est de plus en plus inquiète du fait que ce processus ait placé les considérations économiques au-dessus de la santé.

Pour augmenter la capacité des acteurs mondiaux (notamment des organismes de coopération bilatérale, des organismes régionaux, des groupes philanthropiques et des organisations internationales) d'agir sur les déterminants sociaux à l’échelle locale et nationale, des améliorations dans la gouvernance mondiale sont indispensables. Des politiques mondiales cohérentes qui ne s’affaiblissent pas entre elles mais qui contribuent mutuellement au développement sont également essentielles. comme les mécanismes de gouvernance nationale, les mécanismes de gouvernance mondiale sont actuellement inadaptés pour faire face à des problèmes multi-facettes tels que les inégalités en matière de santé ou d’autres priorités mondiales. cette situation va obliger les institutions mondiales à se réformer pour s’adapter aux nouvelles réalités du XXie siècle.

les circonstances actuelles rendent donc particulièrement important de veiller à ce que la santé, l’équité en santé et les déterminants sociaux soient totalement et convenablement intégrés aux nouveaux modèles de politiques économiques et de gouvernance mondiale qui vont se faire jour. cette tâche va obliger le secteur de la santé, aux niveaux national et international, à s’engager activement dans des débats visant à réformer le système mondial afi n d’assurer un régime de politiques cohérent orienté vers l’équité en santé et les déterminants sociaux et soutenant les efforts nationaux qui tendent vers ces objectifs. la capacité technique du secteur de la santé (au niveau des gouvernements et de la société civile) de participer à ces débats de manière effi cace et sensible doit être renforcée.

un système mondial mieux orienté vers les déterminants sociaux impliquera de respecter les engagements pris (par exemple, lors du consensus de monterrey, dans la Déclaration de Doha ou lors du Sommet de Gleneagles) pour atteindre l’objectif de 0,7 % d’aide au développement par les pays à revenu élevé, soutenu par une meilleure coopération Sud-Sud. Des améliorations complémentaires dans la qualité et l’attribution de cette aide, en fonction des priorités des bénéfi ciaires, seront également nécessaires. une réfl exion sur le développement, dans le cadre des négociations commerciales multilatérales du « cycle de Doha pour le développement » et des réformes après-crise du système fi nancier international, sera indispensable. au cœur de tous ces efforts, il sera essentiel de veiller à ce qu’un espace de politique suffi sant soit réservé aux gouvernements nationaux afi n qu’ils puissent aborder effi cacement la question des déterminants sociaux.

alignement des intervenants mondiauxla gouvernance mondiale doit être harmonisée dans les différents secteurs pour agir sur les déterminants sociaux, avec l’équité en santé comme objectif central des politiques et indicateur de la cohérence de ces politiques. cet effort peut s’appuyer sur les récents progrès observés dans la compréhension de l’importance stratégique de la santé pour le développement ainsi que pour des questions telles que la politique étrangère, la sécurité et la croissance économique. De plus, il est urgent que les différents intervenants dans le développement adoptent une démarche commune pour soutenir l’action des pays dans l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies nationales portant sur les déterminants sociaux. la coopération pour le développement peut constituer un obstacle au travail sur les déterminants sociaux si elle est fragmentée, liée à des secteurs, projets ou sources d’approvisionnement spécifi ques ou soumise à des politiques qui peuvent aller à l’encontre de l’équité et/ou de la santé. De même, si des intervenants avancent des objectifs contradictoires, il est diffi cile pour les pays de lancer les stratégies pangouvernementales nécessaires pour affronter des problèmes tels que les inégalités en matière de santé.

le programme pour l’effi cacité de l’aide constitue une plateforme solide sur laquelle s’appuyer. les principes de la Déclaration de Paris sur l’effi cacité de l’aide50 (à savoir l’adhésion du pays, l’alignement sur les institutions et stratégies nationales, l’harmonisation de l’aide au développement, la gestion des résultats et la responsabilité mutuelle) sont indispensables pour améliorer la participation des acteurs mondiaux dans les actions nationales sur les déterminants sociaux. le Programme d’action d’accra50 doit également être entièrement mis en œuvre.

en plus d’améliorer leur propre alignement, les acteurs mondiaux peuvent s’assurer de renforcer - et non d’affaiblir - les capacités de gouvernance des pays bénéfi ciaires afi n de coordonner l’aide au développement. cette action exige de renforcer les compétences de négociation et de gestion des gouvernements et de mobiliser suffi samment de volonté au sein des organismes d’aide au développement pour mettre en œuvre des processus de planifi cation cohérents qui fi xeront et poursuivront un objectif à long terme pour les pays, en conformité avec leurs priorités nationales. la société civile peut également jouer un rôle constructif en surveillant les interactions et activités entre les secteurs gouvernementaux et les organismes d’aide au développement et en encourageant l’action sur les inégalités en matière de santé et la lutte contre les politiques nationales et internationales qui ont des effets potentiellement néfastes sur les déterminants sociaux.

le potentiel de coopération entre les pays à revenu faible et modéré est de plus en plus important, avec la présentation d’initiatives et le renforcement des capacités pour une action intégrée sur les inégalités en matière de santé. l’expérience et les accomplissements de nombre de ces pays vis-à-vis des déterminants sociaux peuvent donner un formidable élan ainsi que des idées et des moyens aux autres pays pour faire face aux mêmes types de questions et de défi s. cette coopération peut accroître le fl ux d’informations, de ressources,

31 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

d’expérience et de savoir dans les pays en développement, pour un coût réduit. les transferts de technologie entre pays à revenu faible et modéré et le renforcement des capacités dans l’action sur les déterminants sociaux contribuent fortement au processus de développement. les acteurs mondiaux peuvent encore enrichir cet échange en améliorant les outils d’observation, d’évaluation et de mesure de l’impact. ils peuvent également faciliter les mécanismes d’échange (par exemple, avec des centres d’information ou des bases de données interrogeables) afi n de permettre aux pays d’identifi er et d’accéder aux réseaux et ressources techniques disponibles et ils peuvent promouvoir les dispositifs de coopération technique. ces initiatives doivent être intégrées dans les programmes d’aide et alignées sur les actions de coopération des sources traditionnelles.

les acteurs mondiaux peuvent jouer un rôle crucial dans le développement des capacités d’action sur les déterminants sociaux. le contrôle des déterminants sociaux et l’augmentation des

possibilités d’accès à la technologie en sont deux axes essentiels. les acteurs mondiaux peuvent améliorer l’accès et l’utilisation des technologies de l’information et des innovations au niveau des principaux déterminants sociaux, par exemple la productivité agricole, la gestion de l’eau et de l’assainissement, la sécurité énergétique et la santé publique. les efforts existants peuvent être amplifi és pour faciliter l’utilisation des technologies et renforcer les capacités nationales en matière d’innovation, de recherche et de développement.

toutefois, l’aide n’est qu’un aspect de la gouvernance mondiale pour agir sur les déterminants sociaux. il est également essentiel que l’ensemble du système de gouvernance mondiale soit cohérent et que les tensions et confl its potentiels soient résolus d’une manière favorable à la promotion des déterminants sociaux et de l’équité en santé. Parmi les aspects concernés de la gouvernance mondiale fi gurent les accords internationaux dans des domaines tels

PRÉSIDENCE ESPAGNOLE DE L’UNION EUROPÉENNE EN 2010 : CATALYSEUR DE L’ACTION NATIONALE, EUROPÉENNE ET MONDIALE SUR LES DÉTERMINANTS SOCIAUX

l’une des grandes priorités de la présidence espagnole de l’union européenne (ue) en 2010, « innovation en santé publique : surveillance des déterminants sociaux de la santé et réduction des inégalités de santé », a été coordonnée par le gouvernement espagnol, en collaboration avec la commission européenne et l’omS. la promulgation de cette stratégie a fait suite à la désignation en 2007, par le ministère espagnol de la santé, de l’équité en santé et des déterminants sociaux de la santé comme priorités, la surveillance en étant une première étape cruciale.

Pendant sa présidence de l’ue, l’espagne a proposé de contrôler les déterminants sociaux aux niveaux national, européen et mondial et de réfl échir au rôle de l’ue dans la réduction des inégalités en matière de santé dans le monde. De là est né le rapport « vers l’équité en santé : surveillance des déterminants sociaux de la santé et réduction des inégalités de santé », qui a examiné les travaux existants et a mis en avant les principales priorités pour progresser davantage dans ce domaine. l’autre résultat majeur au niveau européen — les conclusions sur « la Santé dans toutes les politiques » — a été approuvé par le conseil ePSco (conseil emploi, politique sociale, santé et consommateurs).

Sur le plan national, la présidence espagnole de l’ue a lancé l’élaboration d’une stratégie nationale pour l’équité en santé, fondée sur les délibérations de la commission nationale pour la réduction des inégalités sociales de santé, qui avait été organisée dans ce but. les principaux thèmes stratégiques sont :

1. Développer des systèmes d’information sur l’équité en santé afi n d’orienter les politiques publiques;2. Promouvoir et développer les connaissances et les outils favorisant le travail intersectoriel, en avançant vers l’idée de « Santé

et équité dans toutes les politiques »;3. Promouvoir les politiques visant à assurer l’équité chez les enfants et les jeunes ainsi qu’un bon départ dans la vie pour tous

les enfants, quelle que soit la situation de leurs parents; 4. Développer un plan permettant la visibilité politique de la Stratégie nationale sur l’équité en santé et les déterminants sociaux

de la santé.ces actions ont été mises en œuvre au niveau infranational (dans les communautés autonomes) avec une formation continue sur la manière d’accorder une plus grande place aux déterminants sociaux et à l’équité en santé dans les stratégies, les programmes et les activités du secteur de la santé. Des efforts supplémentaires ont été concentrés sur les roms, la plus grande minorité ethnique d’espagne, qui connaît une incidence disproportionnée de maladies, dans l’optique de l’équité en santé. ces efforts ont impliqué la société civile rom à l’échelle locale et nationale.

De plus amples informations sont disponibles à l’adresse http://biturl.net/byt6.

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4.

que le commerce et la sécurité, le système fi nancier international, la réglementation des migrations et le rôle des organismes multilatéraux. la mobilité internationale des capitaux, sans cesse croissante, entraîne de grosses pertes des recettes publiques nécessaires pour agir sur les déterminants sociaux, en raison de la fuite des capitaux, de l’évasion et de la concurrence fi scales. cette mobilité contribue également à l’instabilité macroéconomique. en outre, la dépendance vis-à-vis des marchés fi nanciers et des accords commerciaux internationaux peut revêtir d’importantes contraintes pour le champ d’action de la politique en matière de développement et de couverture sociale. les effets négatifs des mouvements migratoires croissants liés à l’augmentation des inégalités dans le domaine de la santé (par exemple, la migration des professionnels de santé vers des pays à revenu plus élevé) sont de plus en plus visibles. Si ces questions ne sont pas traitées de manière appropriée et effi cace sur le plan mondial et que les gouvernements nationaux ne disposent pas du champ d’action et du soutien extérieur nécessaires pour gérer correctement ces effets, les progrès relatifs aux déterminants sociaux de la santé dans les pays pourraient s’en trouver sérieusement affectés.

Dans tous les pays, le secteur de la santé (tant dans les gouvernements que dans la société civile) doit discuter des questions mondiales potentiellement importantes vis-à-vis des déterminants sociaux et préconiser des structures et des politiques mondiales s’inscrivant dans la promotion de l’équité en santé aux niveaux national et international. la capacité de relever ces défi s et l’infl uence potentielle de ces activités sur les politiques peuvent être améliorées par la coopération internationale et la formation d’alliances stratégiques

avec d’autres intervenants ayant des objectifs globalement proches (par exemple, la protection sociale, l’éducation, l’emploi et la protection de l’environnement).

le système des nations unies peut donner l’exemple en termes de cohérence des politiques et de meilleur alignement de la gouvernance mondiale en accélérant son propre processus d’harmonisation pour soutenir le renforcement des capacités par les États membres, qui doivent traiter la question des déterminants sociaux aux niveaux national et international. l’onu peut notamment, en réorganisant sa présence dans les pays de sorte que tous les organismes travaillent ensemble et de manière intégrée sur les questions prioritaires (notamment les inégalités en matière de santé), améliorer sa capacité d'aider les pays à relever des défi s complexes. la récente initiative sur la mise en place d’un Socle de protection sociale est un bon exemple de démarche mondiale visant à accélérer les progrès relatifs aux déterminants sociaux (voir encadré p. 33). les organismes des nations unies peuvent poursuivre ces efforts en créant une plateforme commune visant à renforcer les démarches portant sur les déterminants sociaux et en intégrant les actions relatives aux déterminants sociaux dans les principaux accords et objectifs. ces considérations doivent rester au premier plan dans la mise en œuvre des omD, mais également dans la défi nition des priorités mondiales après la mise en œuvre des omD afi n d’adopter une démarche fondée sur les déterminants sociaux. il sera peut-être possible d’utiliser les mécanismes et structures de gouvernance du système des nations unies pour améliorer davantage la coordination intersectorielle et agir sur les déterminants sociaux.

33 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

alignement des priorités mondialesles inégalités en matière de santé comptent parmi les nombreux problèmes complexes qui épuisent les capacités de la gouvernance mondiale pour y trouver une réponse effi cace. nombre de ces priorités globales sont étroitement liées. Des progrès concernant le changement climatique sont par exemple nécessaires pour garantir que les bénéfi ces des omD ne soient pas menacés. en cas de manque de cohérence, les progrès réalisés sur une priorité pourraient avoir des conséquences néfastes non souhaitées sur d’autres aspects. la non-considération de l’équité au sein des pays dans les premiers omD implique une forte possibilité que, dans certains pays, les améliorations de certaines questions aient entraîné une augmentation des inégalités51, 52. les acteurs mondiaux devront donc veiller à la cohérence des politiques en progressant vers les différentes priorités mondiales avec des initiatives qui se soutiendront mutuellement au lieu de s’entraver.

Positionner l’équité en santé comme un objectif de développement transversal peut permettre une meilleure harmonisation, étant donné que les déterminants sociaux ont un rôle à jouer dans toutes les grandes priorités mondiales. Par exemple, la mise en œuvre des

omD liés à la santé requiert des interventions du secteur public pour affronter les risques spécifi ques, accompagnées d’interventions visant à réduire la pauvreté et à promouvoir la protection sociale, l’éducation et l’autonomisation. la plupart des facteurs de risque immédiat de tuberculose, de paludisme, de viH/sida et de mortalité maternelle et infantile sont liés aux conditions sociales. De plus, la tuberculose, le paludisme, le viH/sida et la mortalité maternelle et infantile ont des déterminants sociaux communs avec d’autres conditions de santé publique. ces déterminants sociaux englobent d’autres omD, tels que ceux portant sur la pauvreté, l’égalité des sexes, l’éducation et l’environnement.

les maladies non transmissibles (mnt) ne sont pas abordées dans les omD, mais sont de plus en plus reconnues comme une menace pour le développement socioéconomique de tous les pays. trois semaines avant la conférence mondiale, l’assemblée générale des nations unies convoquera une réunion de haut niveau sur la prévention et la lutte contre les mnt. il est impossible de lutter contre les épidémies de mnt sans agir sur les déterminants sociaux et prendre en compte à la fois les facteurs communs d’inégalités en matière de santé et les conditions visées dans les omD en matière

MISE EN ŒUVRE DE L’INITIATIVE POUR UN SOCLE DE PROTECTION SOCIALE DES NATIONS UNIES

l’extension de la protection sociale à tous est une stratégie fondamentale dans l’action sur les inégalités en matière de santé et les autres priorités mondiales. le projet de socle de protection sociale soutient les stratégies défi nies au niveau national et comprend un ensemble de droits, de services et de structures sociales dont chaque personne devrait pouvoir bénéfi cier. Selon les nations unies, ce socle de protection sociale devrait comprendre deux grands éléments permettant d’assurer les droits de la personne :

• Des services : l’accès géographique et fi nancier aux services essentiels tels que l’eau potable et l’assainissement, la santé et l’éducation;

• Des prestations : un ensemble de prestations sociales de base, en numéraire ou en nature, afi n d’assurer un revenu minimum et l’accès aux services essentiels, notamment aux soins.

avec le développement de plus en plus important des pays et le redressement des économies à la suite des récentes crises, l’initiative pour un socle de protection sociale des nations unies (SPF-i) constitue un cadre pour la mise en place systématique de systèmes de protection sociale plus complets.

l’initiative SPF-i soutient un nombre croissant de pays dans leurs efforts visant à instaurer des systèmes de protection sociale à tous les stades du processus. Des outils pour la planifi cation et la mise en œuvre de cette action ont été mis au point. les acteurs de l’initiative SPF-i ont recueilli des données, consigné des expériences et développé des outils (par exemple, les examens des dépenses liées à la protection sociale, l’élaboration de budgets consacrés à la protection sociale, des modèles actuariels, l’évaluation des besoins, l’évaluation des coûts, le renforcement des capacités et un processus de suivi et d’évaluation) permettant de soutenir les pays dans leurs efforts pour établir leur propre socle de protection sociale. les demandes d’assistance technique peuvent être adressées à l’un ou l’autre des organismes des nations unies participants.

Plusieurs organisations nationales et internationales ont approuvé l’initiative SPF-i. celle-ci fournit un modèle d’action intersectorielle sur les déterminants sociaux et va au-delà des missions des institutions des nations unies. cette initiative est mise en œuvre suivant une démarche cohérente sur l’ensemble du système, avec des réponses conjointes des pays de l’onu et des conseils des institutions des nations unies dans leur domaine respectif, afi n de garantir un recours optimal aux experts, aux ressources et à l’aide logistique.

De plus amples informations sur l’initiative pour un socle de protection sociale des nations unies sont disponibles à l'adresse http://biturl.net/bhtc.

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4.

« Il est primordial d’agir sur les déterminants sociaux de la santé pour tendre vers une couverture santé universelle. Les démarches coordonnées telles que l’Initiative pour un socle de protection sociale menée par l’OIT et l'OMS sont les plus prometteuses. »

M. Assane Diop, directeur exécutif, secteur de la protection sociale, Organisation internationale du Travail

de santé. Pour lutter contre ces problèmes, il est primordial de faire intervenir un ensemble de secteurs, notamment la fi nance, le commerce, l'agriculture, l’urbanisme, le transport et l’environnement. Des politiques fi scales peuvent par exemple être mises en place pour lutter contre les facteurs de risque des mnt en réduisant la consommation de tabac, de matières grasses, d’alcool et de sel, en prévenant l’obésité et en encourageant l’activité physique.

la diminution des inégalités en matière de santé, la lutte contre les mnt et la prévention des dangers face au changement climatique sont clairement liées53. l’utilisation de sources d’énergie propres et de chauffages domestiques plus performants peut par exemple permettre de réduire les émissions de carbone noir, un puissant gaz à effet de serre, et d’éviter un grand nombre de décès dus à des maladies respiratoires dans les communautés les plus pauvres de la planète. cependant, le défi de la gouvernance mondiale concernant l’action sur les déterminants sociaux repose moins sur la reconnaissance de situations favorables pour tous lors de l’alignement des priorités que sur la gestion des tensions. Par exemple, pour atténuer les tensions entre la réduction des émissions et la création de chances équitables dans le domaine de la santé et du développement, il est indispensable d’équilibrer le juste partage des charges (à savoir, les « responsabilités communes, mais différenciées » citées par la convention-cadre des nations unies sur les changements climatiques) et la déclaration constitutionnelle de l’omS énonçant que chacun a droit au « plus haut niveau de santé possible »54. toutes les mesures qui peuvent être mises en œuvre pour réduire les émissions ne contribueront pas au développement des plus défavorisés ni à la réduction des inégalités en matière de santé, et vice-versa. en outre, tous les partenaires n’accepteront pas nécessairement l’équité en santé comme une mesure partagée des progrès vis-à-vis des priorités mondiales. Quoi qu’il en soit, les mesures nécessaires pour réduire les émissions de carbone à un niveau permettant de limiter à 2 °c le réchauffement de la planète doivent être prises de sorte à assurer également les chances d’un

développement humain durable et des possibilités économiques qui permettront de prendre en charge les déterminants sociaux dans les pays à revenu faible et modéré.

en résumé, les questions qui doivent être examinées par la gouvernance mondiale pour la gestion de ces confl its sont similaires à celles abordées ci-dessus pour la gouvernance nationale. la prochaine conférence des nations unies sur le développement durable (rio+20) constitue une excellente occasion d’approfondir ces discussions et de trouver des moyens de renforcer les actions coordonnées dans le domaine de la santé et de l’environnement. l’échéance des omD en 2015 pousse aussi les acteurs mondiaux à réfl échir à la manière de procéder aux réformes nécessaires pour assurer la cohérence des politiques, avec la mise en œuvre d’une démarche fondée sur les déterminants sociaux pour harmoniser les actions relatives aux principales priorités.

ressources utiles (disponibles sur le DvD d’accompagnement)

• Committee for Development Policy. implementing the millennium Development Goals: Health inequality and the role of global health partnerships. New York, Nations Unies, 2009.

• Friel S et al. Climate change, noncommunicable diseases, and development: the relationships and common policy opportunities. annual review of Public Health, 2011, 32:133–147.

• Koller T et al. Global health inequalities and social determinants of health: opportunities for the EU to contribute to monitoring and action. In: moving forward equity in health: monitoring social determinants of health and the reduction of health inequalities. Espagne, ministère de la santé et des politiques sociales, 2010:50–59.

• Global health and foreign policy: strategic opportunities and challenges. Note par le secrétaire général. A/64/365. New York, Assemblée générale des Nations Unies, 2009.

• WHO. Global status report on noncommunicable diseases 2010. Genève, OMS, 2011.

35 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)35 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

5. Suivi DeS ProGrÈS : meSure et analYSe aFin D’orienter leS PolitiQueS et De renForcer la reSPonSaBilitÉ en matiÈre De DÉterminantS SociauX

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5.

u ne gouvernance effi cace en termes de déterminants sociaux nécessite un suivi et des mesures pour orienter l’élaboration des politiques, évaluer leur mise en œuvre et

renforcer la responsabilisation. les inégalités en matière de santé, les déterminants sociaux, la mise en œuvre des politiques ainsi que leur impact doivent faire l’objet d’un suivi55. ces informations doivent être institutionnalisées dans le cadre des mécanismes de responsabilisation afi n d’orienter les politiques dans tous les secteurs.

Dans de nombreux pays, l’une des explications à l’absence d’action pour lutter contre ces problèmes est une information inappropriée sur les inégalités en matière de santé. Sans efforts visant à comparer l’état de santé de différents groupes de population, les inégalités en matière de santé restent invisibles et l’évolution des indicateurs de la santé moyenne masque souvent des différences qui persistent ou s’accentuent entre les groupes. l’amélioration de la collecte des données et de l’analyse des disparités a permis de mettre les inégalités de santé à l’ordre du jour des programmes politiques, en particulier dans certains pays à revenu élevé. Bien que nécessaire, la mesure des différences en matière de santé ne suffi t toutefois pas à soutenir la gouvernance pour agir sur les déterminants sociaux. la disponibilité des données varie considérablement selon les pays. Pourtant, il est urgent dans tous les pays de procéder à une meilleure mesure des déterminants sociaux et de leur impact sur la santé et d’analyser l’impact de l’ensemble des politiques sur les inégalités en matière de santé.

la surveillance des déterminants sociaux requiert de collecter des données, de les diffuser et de les appliquer aux processus d’élaboration des politiques. la mesure des inégalités dans le domaine de la santé est généralement plus développée que la mesure des facteurs sociaux favorisant la santé ou la maladie. en outre, on collecte plus systématiquement des informations sur les facteurs de risque biologiques que sur la répartition des risques sociaux et environnementaux pour la santé. ce manque d’informations constitue un obstacle au suivi des effets des politiques, ainsi qu’au développement et à l’évaluation des interventions sur les déterminants sociaux fondées sur des données factuelles et visant à réduire les inégalités. il faut aller au-delà de l’épidémiologie traditionnelle pour envisager d’autres méthodes liées au cadre culturel, aux systèmes de valeurs, aux objectifs et aux attentes des populations10. le fait de porter un regard trop étroit sur la santé et les maladies voile les relations entre les déterminants sociaux et les objectifs de développement au sens plus large.

la surveillance des inégalités en matière de santé et des déterminants sociaux doit être entièrement intégrée dans le processus d’élaboration des politiques, en particulier les mécanismes de responsabilisation. cette intégration implique de tenir compte des vastes différences entre pays en termes de disponibilité des données, de contexte politique et de nature des inégalités en matière de santé elles-mêmes. avant tout, elle requiert de disposer d’informations utilisables qui permettent d’orienter l’élaboration de politiques effi caces pour agir sur les déterminants sociaux, de surveiller les changements en matière d’inégalités et d’expliquer l’impact de stratégies et de choix spécifi ques.

il est primordial de savoir quelles données sont les plus importantes dans un contexte donné et de savoir transformer ces données

en informations pouvant être utilisées par les différents publics (notamment les communautés et la société civile) qui contribuent à l’élaboration des politiques. une attention importante doit être portée autant à la diffusion et à la disponibilité de données utilisables sur les déterminants sociaux et les politiques associées qu’à la génération de données. Dans tous les cas, la collecte de données a un coût et représente une charge pour les prestataires; il est donc important d’en circonscrire la collecte et l’analyse à ce qui est nécessaire pour orienter et surveiller les politiques plutôt que de collecter des données juste pour le principe.

identifi er des sources et collecter des donnéesl’élaboration des politiques nécessite de disposer d’informations sur les déterminants sociaux et les problèmes de santé. la surveillance des déterminants sociaux nécessite des informations supplémentaires à celles provenant uniquement du secteur de la santé. les systèmes de collecte de données d’autres secteurs (par exemple, celui de l’éducation et du logement) peuvent représenter de riches sources d’informations sur les déterminants sociaux essentiels et constituer des mesures du développement. comme le champ d’action des politiques sur les déterminants sociaux doit couvrir plusieurs secteurs, leur surveillance doit se faire selon une approche systémique, en identifi ant les informations nécessaires sur les déterminants sociaux pour réduire les inégalités en matière de santé. la disponibilité des données nécessaires pour faire le lien entre ces déterminants sociaux et les inégalités en matière de santé est cruciale pour progresser.

idéalement, les systèmes de surveillance doivent pouvoir repérer les inégalités sur l’ensemble du gradient social plutôt que de s’intéresser uniquement à des moyennes de population ou à des groupes marginalisés connus. Des données sur les inégalités en matière de santé et sur les performances des systèmes de santé peuvent être obtenues à partir de plusieurs sources couramment utilisées par les systèmes d’informations sur la santé. toutefois, ces systèmes ne sont généralement pas conçus pour la génération, la synthèse ou la diffusion systématique de données et d’informations sur les déterminants sociaux, les inégalités en matière de santé ou les relations entre les deux. le lien n’est pas bien établi entre les mesures sanitaires et les systèmes de suivi des politiques d’autres secteurs.

les statistiques de l’état civil, notamment les registres des naissances et des décès, constituent une bonne base pour analyser les disparités en matière de santé. les registres indiquant la cause du décès permettent de contrôler le taux de mortalité en fonction de facteurs sociaux tels que l’éducation, la profession, le sexe, l’appartenance ethnique et le lieu de résidence. les recensements fournissent des informations très utiles sur les groupes de population et peuvent également apporter des informations sur les déterminants sociaux, en particulier s’ils sont rapprochés des données sur la mortalité. les enquêtes dans la population peuvent fournir des données essentielles en l’absence de systèmes d’informations sanitaires systématiques ou pour examiner des questions particulières. les dossiers médicaux fournissent des informations sur les problèmes

37 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

de santé et les performances du secteur de la santé; cependant, ils sont souvent incomplets et excluent les personnes qui n’ont pas recours aux services de santé.

les mesures visant à étendre l’enregistrement des actes d’état civil, qui concernent actuellement plus de la moitié de la population mondiale, constituent une étape importante dans la réduction des inégalités. les informations sont particulièrement rares concernant les groupes marginalisés (par exemple, les communautés rurales, les migrants en situation irrégulière ou les populations urbaines défavorisées) bien qu’elles soient essentielles pour appréhender les inégalités en matière de santé. la qualité et l’actualisation des données sont également importantes. la collecte d’informations sur les facteurs sociaux associés aux inégalités et la possibilité d’analyser ces données par situation géographique peuvent fortement aider à l’élaboration de politiques, mais il est souvent extrêmement diffi cile de garantir la qualité et l’actualisation des données dans les groupes les plus pauvres et marginalisés.

Décomposer les donnéesPour pouvoir étudier les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux, les données doivent être séparées, analysées et comparées - ou « décomposées » - en fonction des principaux facteurs connus pour être associés aux inégalités en matière de santé. ces « stratifi cateurs » sociaux sont l’âge, les revenus, le niveau d’éducation, la classe sociale, la profession, le sexe, l’appartenance ethnique (ou « raciale » dans certaines circonscriptions), le handicap et le lieu de résidence (réduit à la plus petite unité administrative possible). cette décomposition est essentielle pour mettre en œuvre des politiques de lutte contre les inégalités et elle permet également d’améliorer la prise de décisions et la responsabilisation au niveau local. les avancées des systèmes d’information géographique facilitent la collecte de données géographiques décomposées et leur diffusion sous une forme utilisable.

le choix des stratifi cateurs dépend du contexte, puisqu’il n’est pas faisable ni même souhaitable de décomposer les données suivant tous les facteurs possibles, étant donné les ressources limitées disponibles pour la collecte de données. Par exemple, dans les populations où les niveaux d’emploi et d’éducation sont universellement élevés, la situation relative à l’emploi et le niveau d’éducation seront de mauvais indicateurs des conditions socioéconomiques. Dans les populations à faible revenu et dans les communautés n’utilisant pas uniquement le système monétaire, les revenus ne seront pas nécessairement un bon marqueur des conditions socioéconomiques et il faudra peut-être identifi er d’autres éléments de mesure. D’autres aspects spécifi ques au contexte peuvent refl éter la richesse des personnes et des ménages, comme la possession de biens matériels (par exemple, un réfrigérateur, une radio, un vélo), la richesse agricole (par exemple, du bétail ou des terres) et l’accès aux services de base (par exemple, l’eau courante, des toilettes, un compte bancaire et les structures de soins).

Sélectionner des indicateurs et des objectifsPour pouvoir orienter les changements politiques, les systèmes de suivi ont besoin de défi nir des buts pour réduire les inégalités en matière de santé, avec des indicateurs et des objectifs clairs dans les différents secteurs. ces systèmes de suivi devraient comprendre des indicateurs mesurant les déterminants sociaux et des méthodes pour mettre en lien les données des différents secteurs, ce qui permettrait

d’examiner leur impact sur la réduction ou l’augmentation des inégalités en matière de santé. lors de la sélection des indicateurs, les questions d’actualisation, de comparabilité, d’harmonisation et d’accessibilité sont à prendre en compte.

Tableau 5. Liste d’indicateurs potentiels pour la surveillance des déterminants sociaux et des inégalités en matière de santé

Indicateurs en termes de déterminants sociaux Source

1. Service total de la dette en pourcentage du revenu national brut

Banque mondiale

2. Proportion dans laquelle les citoyens d’un pays sont en mesure de participer au choix de leur gouvernement; étendue de la liberté d’expression, de la liberté d’association et de la liberté de la presse

Banque mondiale

3. Dépenses totales du gouvernement pour la santé et l’éducation en pourcentage des dépenses totales du gouvernement

OMS; UNESCO

4. Rapport entre les salaires et les bénéfi ces des sociétés

Banque mondiale

5. Proportion de jeunes non scolarisés et sans emploi, par âge et par sexe

OCDE

6. Taux d’emploi dans le secteur non structuré (%) OIT

7. Coeffi cient de Gini (répartition des revenus) Banque mondiale

8 . Taux d’alphabétisation (%) dans la population de plus de 15 ans *

PNUD; UNESCO

9. Rapport entre les travailleurs les mieux payés et les moins bien payés *

OIT

10. Rapport entre le taux net de scolarisation en école primaire des garçons et celui des fi lles *

PNUD; UNESCO

11. Réalisation d’études primaires/secondaires par groupe ethnique/« racial » d’un pays *

UNESCO

12. Accès à l’eau potable (%) * OMS

Indicateurs en termes de santé

1. Espérance de vie en bonne santé (hommes, femmes) * OMS

2. Accouchements sous la surveillance d’un accoucheur qualifi é (% par quintile de richesse) *

OMS

3. Taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans (milieu rural, urbain) *

OMS

4. Taux de mortalité infantile (par quintile de richesse) * OMS

5. Nouveau-nés avec un poids de naissance faible (% par niveau d’éducation de la mère) *

OMS

6. Enfants de moins de 5 ans avec un poids et une taille modérément ou extrêmement bas (milieu rural, urbain) *

OMS

7. Prévalence de l’obésité chez les adultes (15 ans et plus) (par quintile de richesse) *

OMS

8. Prévalence du VIH chez les adultes âgés de 15 à 49 ans (hommes, femmes) *

OMS

Les indicateurs refl ètent une large palette de déterminants (des causes profondes aux conditions de risque). Tous sont des indicateurs existants, avec des données disponibles pour plusieurs pays et indication de la source. Les indicateurs suivis d’un astérisque (*) devraient être stratifi és selon une ou plusieurs dimensions, par exemple le statut socioéconomique, l’éducation, la profession, le sexe et/ou l’appartenance ethnique (religieuse, « raciale », appartenance tribale).

Les types de différentiels potentiels à l’intérieur d’un pays sont indiqués entre parenthèses pour les indicateurs de santé. Pour un certain nombre d’indicateurs fi gurant sur cette liste, il existe suffi samment de données stratifi ées pour permettre une surveillance. Pour les autres, les efforts de collecte des données doivent être renforcés à l’échelle nationale.

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5.

ces indicateurs doivent également trouver un équilibre entre les mesures refl étant des facteurs qui augmentent le risque de problèmes de santé et les mesures qui favorisent le bien-être des populations. Des indicateurs et des objectifs sont indispensables en termes d’écarts sanitaires, d’accès aux services et de déterminants sociaux. Des indicateurs existants pour le suivi de démarches axées sur les droits de la personne ou l’examen d’aspects spécifi ques des inégalités (par exemple, l’inégalité entre les sexes) peuvent également être utilisés. la défi nition d’objectifs et d’indicateurs ne doit pas être un aspect purement technique; comme pour les indicateurs utilisés à d’autres fi ns, elle doit faire partie du processus d’élaboration des politiques de réduction des inégalités en matière de santé.

les indicateurs choisis pour contrôler les politiques visant à réduire les inégalités en matière de santé doivent être bien compris par les responsables des différents secteurs infl uant sur les déterminants sociaux, ainsi que par les communautés. ainsi, des mesures simples pourront être plus transparentes et faciles à interpréter que des mesures sommaires complexes. les inégalités en matière de santé peuvent être évaluées suivant des mesures relatives et absolues; les deux types de mesures, étant donné qu'elles illustrent des aspects différents, sont toutes deux nécessaires sur la durée pour effectuer des analyses détaillées et contribuer à l’élaboration des politiques.

le tableau 5 présente une liste d’indicateurs potentiels permettant de surveiller les déterminants sociaux et les inégalités en matière de santé, issue d’une première liste établie au cours du processus de la commission56 et affi née depuis. le chili et l’angleterre ont déjà suivi une démarche similaire lors de récents travaux sur les déterminants sociaux, en sélectionnant des indicateurs spécifi ques et en publiant ensuite des données par circonscription. la conférence mondiale offre l’opportunité de discuter de ce cadre et de donner un élan à la création d’une liste internationale. l’intention est de sélectionner un petit nombre d’indicateurs permettant une comparaison à l’échelle internationale et refl étant à la fois les inégalités en matière de santé et les étapes clés dans l’accumulation d’inégalités sociales au cours de la vie. une plus grande série d’indicateurs serait nécessaire pour contrôler les principales politiques par rapport au contexte local ou national. ces indicateurs doivent être identifi és au niveau opérationnel correspondant afi n de refl éter la situation locale, mais ils doivent en même temps permettre de comprendre les circonstances qui mènent à des inégalités en matière de santé.

avancer malgré l’absence de données systématiquesÀ l’échelle mondiale, l’observation des inégalités en matière de santé va de pays disposant de peu de données sanitaires systématiquement collectées à des pays mesurant systématiquement les inégalités en matière de santé, mais pouvant toutefois manquer de données sur les déterminants sociaux. le renforcement des systèmes de collecte de données pour remédier à ces manques est souvent un processus lent. Dans cette situation, l’insuffi sance de données ne devrait pas empêcher l’action visant à réduire les inégalités en matière de santé. D’ailleurs, les responsables politiques ont souvent à prendre des décisions sans avoir d’informations ou de preuves systématiques.

Plusieurs possibilités permettent de surmonter le manque de données systématiques sur la population. Des enquêtes dans la population, menées à intervalles réguliers, peuvent apporter certaines informations. les enquêtes démographiques et sanitaires (DHS), par exemple, menées tous les cinq ans dans de nombreux pays, recueillent des données sur l’éducation et l’emploi des personnes dans les foyers participants et constituent une précieuse ressource pour décrire les différences sanitaires entre groupes liées à des facteurs sociaux. les enquêtes en grappes à indicateurs multiples (micS) et l’enquête sur la santé dans le monde (WHS) sont d’autres enquêtes utiles. les données des établissements de soins peuvent également servir, dans certains cas, à comparer les communautés en termes de tendances géographiques des maladies et du recours aux services.

un meilleur usage peut être fait des méthodologies qualitatives telles que les observations, les évaluations et les expériences des politiques en conditions réelles. la production des preuves nécessaires pour agir sur les inégalités en matière de santé requiert une approche multidisciplinaire refl étant la variété des secteurs concernés. il est probable que les principaux problèmes et groupes sociaux défavorisés soient bien connus. Des sources de données supplémentaires peuvent se faire jour en exploitant les connaissances des personnes travaillant au plus près des communautés tout comme des communautés elles-mêmes. les groupes de la société civile, notamment les syndicats et les organisations communautaires, disposent souvent de données et d’informations approfondies sur les problèmes ainsi que sur les processus nécessaires pour mettre en œuvre des actions relatives aux déterminants sociaux. De plus, les chefs communautaires, les professionnels de santé, les responsables de l’exécution des programmes et les décideurs politiques sont des sources de connaissances existantes sur les problèmes infl uençant les déterminants sociaux et les inégalités de santé ainsi que leurs solutions potentielles. les pays disposant de peu de données peuvent utiliser les éléments d’autres pays en tenant compte des différences entre leur pays et celui d’où proviennent les informations.

les actions effi caces sur les inégalités en matière de santé requièrent généralement un certain investissement pour étendre les systèmes de suivi, en particulier pour obtenir davantage d’informations sur les déterminants sociaux. même avec des systèmes de suivi bien développés, la plupart des informations disponibles se rapportent aux problèmes de santé, et une attention bien moindre est accordée à la mesure des déterminants sociaux (et à la répartition des inégalités). Pour aborder cette question, deux stratégies majeures sont requises : (1) la collecte de nouvelles données sur certains facteurs et (2) de meilleurs partage, mise en lien et harmonisation des données existantes entre les différents secteurs. les pays peuvent aspirer à des systèmes qui collectent systématiquement et de manière cohérente des informations sur les déterminants sociaux, les problèmes de santé et les déterminants de santé correspondants. Si l’on choisit de collecter de nouvelles données, les défi s consisteront à identifi er les facteurs clés devant être étudiés, à la lumière du contexte (par exemple, quelles communautés sont les plus défavorisées), et de veiller à ce que ces nouvelles données puissent être rapidement utilisées pour orienter les politiques et contrôler les interventions prévues.

39 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

Diffuser les informations sur les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux afi n d’orienter l’actionla disponibilité d’éléments soulignant les inégalités en matière de santé ou l’effi cacité d’options particulières de politiques ou de programmes n’entraîne pas automatiquement la mise en œuvre de politiques systématiques sur les déterminants sociaux. transformer ces éléments en informations utiles pour agir sur les déterminants sociaux et l’équité en santé exige des mécanismes permettant d’évaluer l’information et de la communiquer aux décideurs et autres intervenants. les données sur les déterminants sociaux doivent être mises plus largement à la disposition de différents secteurs afi n de permettre leur analyse, leur interprétation et leur défense par un ensemble d’acteurs, y compris la société civile et les communautés. l’information doit notamment faire l’objet d’un retour et être intégrée dans les mécanismes de responsabilisation pour la mise en œuvre des politiques.

une meilleure diffusion de l’information doit s’accompagner d’efforts pour présenter l’information de manière signifi cative pour le public et pour renforcer la capacité de la communauté à interpréter et utiliser cette information. Par exemple, les sites internet publics et de simples mécanismes tels qu’un codage rouge-jaune-vert peuvent permettre de comparer les progrès de différentes zones géographiques ou de différents groupes sociaux en ce qui concerne les principaux déterminants sociaux. la synthèse d’informations sous forme de revues, de notes de politiques ou de lignes directrices peut rendre ces informations accessibles aux décideurs politiques. la mise en place de systèmes de rétroaction et de partage des connaissances, tels que les communautés de pratique, fournit des occasions de comparaison et d’apprentissage en équipe pour les professionnels et les décideurs politiques. les « observatoires » se sont révélés être des organismes utiles dans de nombreux pays pour analyser et diffuser les données liées à la santé et synthétiser ces données sous une forme utilisable par les décideurs politiques, mais leur travail doit maintenant se concentrer davantage sur les déterminants sociaux.

intégrer les données dans les processus politiquesles processus politiques au sein de la société ne s’appuient pas seulement sur des éléments factuels et rationnels, mais reposent plutôt sur la négociation entre plusieurs intérêts, souvent

contradictoires. De plus, le processus par lequel les données et les informations sont traduites par la mise en œuvre de politiques est lui aussi complexe. le système de collecte de données sur les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux doit être aligné sur les processus d’élaboration des politiques afi n que les données soient transmises aux responsables politiques sous une forme signifi cative et en temps voulu et que les objectifs et responsabilités des gouvernements soient pris en compte. les informations sur les inégalités en matière de santé et les déterminants sociaux doivent contribuer à identifi er les problèmes et à développer des options politiques. les données permettant d’identifi er des problèmes peuvent provenir de collectes ou de comptes rendus systématiques aussi bien que d’initiatives spécifi ques. une série d’outils peuvent aider à examiner l’impact des différentes politiques sur les inégalités en matière de santé. Des outils tels que des tableaux de bord et des points de référence peuvent aider à simplifi er et résumer les questions liées à l’équité en santé afi n d’en tenir compte lors de l’élaboration des politiques. Quoi qu’il en soit, la question n’est pas de choisir exactement le bon outil, mais plutôt d’intégrer la sensibilisation aux déterminants sociaux et aux inégalités en matière de santé dans le processus global.

Évaluer l’impact de différentes options politiques sur la santé et l’équitéDès lors que la réduction des inégalités de santé a été reconnue comme priorité élevée dans le processus politique, il est important de recourir à un ensemble d’outils pour étudier l’impact des politiques de différents secteurs sur l’équité. il existe deux grandes approches, l’une consistant à évaluer l’impact sur la santé, l’autre l’impact sur l’équité. les outils relatifs à l’équité entre les sexes et aux droits de la personne peuvent également s’avérer utiles.

l’évaluation de l’impact sur la santé (eiS) est un outil important dans la mise en place d’une action intégrée sur les déterminants sociaux, puisqu’elle aide les responsables politiques à évaluer systématiquement la manière dont différentes options politiques peuvent infl uer sur la santé, ce qui leur permet de tenir compte des conséquences sur la santé lorsqu’ils ont à choisir entre plusieurs options. l’eiS s’inspire des méthodologies mises au point pour évaluer l’impact environnemental et comprend des étapes et procédures similaires à d’autres évaluations d’impact, notamment les évaluations de l’impact sur la pauvreté, de l’impact social et de l’impact stratégique. Quatre grandes valeurs sont à la base de l’eiS comme aide à la prise de décisions : la démocratie, l’équité,

« Nous ne devons pas ignorer les inégalités en matière de santé entre groupes ethniques lorsqu’elles surviennent. Nous devons faire preuve d’audace et de détermination dans notre réponse afin de parvenir au changement nécessaire. En Nouvelle-Zélande, d’importants progrès ont été réalisés pour commencer à évaluer la prévalence et l’impact du racisme sur la santé et les inégalités rencontrées par les Ma-ori, avec par exemple les mesures de l’enquête sur la santé en Nouvelle-Zélande. »

Mme Tariana Turia, Ministre associée de la Santé, Nouvelle-Zélande

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5.

CONTRÔLE DE L’ÉQUITÉ EN AFRIQUE ORIENTALE ET AUSTRALE

Presque tous les pays d’afrique orientale et australe se sont engagés politiquement à promouvoir l’équité en matière de santé. en 2007, eQuinet, un réseau composé de professionnels, d’universitaires et de membres de la société civile, de l’État et du parlement de la région promouvant l’équité en matière de santé a analysé et publié un rapport sur l’équité en santé dans la région. ce rapport a donné lieu à une résolution adoptée en 2010 lors de la réunion des ministres de la santé d’afrique orientale, centrale et australe, visant à surveiller et à communiquer les progrès réalisés dans la lutte contre les inégalités en matière de santé. en outre, ce rapport a été utilisé en 2009, en consultation avec les organismes de la région, pour développer un cadre de collecte et d’analyse d’éléments sur l’équité en santé au niveau national et régional. l’initiative appelée « equity Watch » (contrôle de l’équité) voit des équipes nationales, composées d’acteurs étatiques et non étatiques et travaillant avec eQuinet, organiser, analyser et présenter sous une forme accessible une série d’éléments quantitatifs et qualitatifs existants permettant d’évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre les inégalités en matière de santé, d’apprécier les déterminants sociaux et les soins et de contribuer au dialogue social sur les propositions visant à renforcer l’équité en santé. en plus des domaines d’importance pour des pays donnés, tous les rapports de contrôle de l’équité comptent 25 indicateurs de progression :

• cinq indicateurs de la progression de l’équité en santé;• Sept indicateurs de l’accès aux ressources nationales et aux déterminants sociaux;• Huit indicateurs des ressources des systèmes de santé fonctionnant par redistribution;• cinq indicateurs d’un retour plus juste de l’économie mondiale.

le Groupe d’experts sur l’évaluation et la surveillance communautaire de la santé dans la région a aidé à évaluer ces indicateurs de progression. au niveau national, le premier contrôle de l’équité au Zimbabwe et le dialogue consécutif ont conduit à renforcer le soutien de la société civile et des parlementaires à la mise en place de soins de santé primaires. le contrôle de l’équité au mozambique a fait l’objet d’une discussion en 2010 afi n de déterminer le travail de suivi nécessaire, actuellement réalisé, notamment l’amélioration de l’équité dans l’attribution des ressources et la recherche continue sur les déterminants sociaux et les inégalités en matière de santé au sein des districts. lors de la réunion d’examen du rapport sur le contrôle de l’équité en Zambie, publié en juin 2011, les intervenants ont proposé de le renouveler chaque année, en complément du suivi de la mise en œuvre du Plan national stratégique pour la santé et ont proposé de l’utiliser pour orienter l’action des principaux secteurs concernés par les déterminants sociaux. les rapports du contrôle de l’équité au Kenya et en ouganda sont en cours de fi nalisation (les éléments du rapport kényan vont aussi alimenter la nouvelle Politique nationale de santé) et un deuxième contrôle régional de l’équité, en cours de synthèse, permettra de connaître les progrès, les lacunes et les pratiques encourageantes, à confronter à la résolution des ministres de la santé.

De plus amples informations sont disponibles à l'adresse http://www.equinetafrica.org.

le développement durable et l’utilisation éthique des éléments probants. l’eiS fournit des recommandations sur la manière dont une proposition de politique, de projet ou de stratégie peut être modifi ée ou adaptée afi n d’éviter les risques, de promouvoir les progrès et de réduire les inégalités en matière de santé.

De la même manière, les outils d’évaluation de l’équité en santé visent à orienter les politiques par rapport à leurs effets sur les inégalités en matière de santé. Par exemple, l’outil « urban Heart » (outil d’évaluation et d’intervention pour l’équité en matière de santé en milieu urbain, voir http://www.who.or.jp/urbanheart.html) est un outil éprouvé, mis au point par l’omS dans l’optique d’intégrer systématiquement les questions d’équité en santé dans le cycle de planifi cation, en particulier dans les milieux urbains. Des audits de l’équité en santé peuvent permettre de juger si la répartition des services ou des ressources est juste, en fonction des besoins sanitaires de différents groupes et de différentes zones, et d’identifi er les actions prioritaires.

ressources utiles (disponibles sur le DvD d’accompagnement)

• Marmot M et al. Fair society, healthy lives: strategic review of health inequalities in england, post-2010, the marmot review. Londres, UCL, 2010.

• Sadana R et al. Overview: Monitoring of social determinants of health and the reduction of health inequalities in the EU. In: moving forward equity in health: monitoring social determinants of health and the reduction of health inequalities. Madrid, Espagne, ministère de la santé et des politiques sociales, 2010:23–31.

• Stiglitz J et al. report by the commission on the measurement of economic Performance and Social Progress. Accessible à l'adresse http://www.stiglitz-sen-fi toussi.fr/en/index.htm.

• WHO. urban Health equity assessment and response tool (urban Heart). Accessible à l'adresse http://www.who.or.jp/urbanheart.html.

41 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)41 | conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)

OBSERVATION DES INÉGALITÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ ET DES INDICATEURS SOCIAUX EN NOUVELLE-ZÉLANDE ET EN ANGLETERRE

en nouvelle-Zélande, la réduction des inégalités en matière de santé est devenue une priorité au cours des vingt dernières années. la loi de 2000 relative à la santé publique et au handicap (Public Health and Disability act) reconnaît explicitement la nécessité de réduire les inégalités dans le secteur de la santé. l’évolution des politiques et des pratiques a été accompagnée, voire menée, par la multiplication substantielle des éléments démontrant l’existence d’inégalités en matière de santé. cette avancée a permis de réduire les inégalités de santé entre les indigènes ma-ori et les néo-zélandais non indigènes au cours de la dernière décennie. les principales avancées ont porté sur :

• le développement d’un indice de pauvreté de la nouvelle-Zélande (new Zealand Deprivation index ou nZDep), un indice de synthèse fondé sur le recensement dans des zones restreintes et qui s’appuie sur plusieurs facteurs socioéconomiques pour fournir une mesure du statut socioéconomique en fonction du lieu de résidence;

• le développement et l’application de protocoles de données pour l’enregistrement de l’appartenance ethnique dans les dossiers médicaux;

• l’Étude sur la population et la mortalité (census-mortality Study), projet qui vise à mettre en lien les données sur la mortalité et celles des recensements et permet de disposer de données plus nombreuses et de meilleure qualité pour l’observation des inégalités en matière de santé;

• l’élargissement de l’enquête sur la santé en nouvelle-Zélande, avec l’intégration de questions sur des expériences de discrimination raciale afi n de mieux comprendre l’impact du racisme entre personnes sur les inégalités en matière de santé entre différents groupes ethniques;

• l’établissement d’une série de rapports sur les questions sociales en nouvelle-Zélande, qui mesurent le bien-être social sur la durée vis-à-vis de dix questions sociales (incluant la santé, sans s’y limiter).

vous trouverez davantage d’informations sur l’expérience de la nouvelle-Zélande dans les publications suivantes :

crampton P et al. Degrees of deprivation in new Zealand. Wellington, Bateman, 2002.

ministry of Health. ethnicity data protocols for the health and disability sector. Wellington, ministry of Health, 2004. accessible à l'adresse http://biturl.net/bhue.

Harris r et al. racism and health: the relationship between experience of racial discrimination and health in new Zealand. Social Science and medicine, 2006, 63:1428–1441.

Blakely t et al. tracking disparity: trends in ethnic and socioeconomic inequalities in mortality, 1981–2004. Wellington, ministry of Health, 2007. accessible à l'adresse http://biturl.net/bhuf.

Pega F et al. monitoring social well-being: the case of new Zealand’s Social reports / te P rongo oranga tangata. Social Determinants of Health Discussion Paper 3 (case Studies). Genève, omS, 2010. accessible à l'adresse http://biturl.net/bhuc.

en angleterre, à la suite de l’examen des inégalités en matière de santé dirigé par m. michael marmot, des objectifs nationaux ont été proposés dans trois domaines : la santé tout au long du gradient social (espérance de vie, espérance de vie en bonne santé et bien-être), le développement de l’enfant sur l’ensemble du gradient social (maturité scolaire et jeunes déscolarisés, emploi et formation), et revenus suffi sants pour vivre en bonne santé. tous les objectifs n’ont pas pu être directement mesurés, notamment en ce qui concerne leur répartition sociale ou géographique. À court terme, les meilleurs indicateurs disponibles pour la plupart de ces objectifs ont été identifi és et seront utilisés tout au long de la vie. outre l’espérance de vie et l’espérance de vie sans incapacité, ces indicateurs sont :

• le développement du jeune enfant;• la proportion de jeunes âgés de 16 à 18 ans non scolarisés, sans emploi ni formation (mesure liée à la transition entre l’école et la

vie active);• la proportion de gens touchant des prestations sous conditions de ressources (mesure de la pauvreté dans la population adulte).

l’analyse a été menée et publiée pour chaque collectivité locale du pays à l’occasion du premier anniversaire de l’examen marmot. l’indice de pente d’inégalité a également été calculé pour les deux mesures de santé afi n de quantifi er le gradient social dans chaque collectivité locale. l’analyse était simple, a suscité beaucoup d’intérêt et a permis de contrôler les progrès. vous trouverez davantage d’informations à l'adresse http://www.marmotreview.org et http://biturl.net/bwu6.

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concluSion : DeS meSureS urGenteS

a gir sur les déterminants sociaux pour construire des sociétés favorisant l’intégration, améliorer la santé et parvenir à un plus grand développement peuvent s’avérer être des tâches

diffi ciles. il est toutefois possible d’agir dans tous les pays, quel que soit le niveau de revenu. chaque pays peut commencer à mettre en place une approche fondée sur les déterminants sociaux pour améliorer le fonctionnement de sa société et ouvrir la voie vers la réduction des inégalités en matière de santé. en outre, avec la volonté politique nécessaire, des progrès considérables peuvent être faits pour augmenter l’attention portée aux déterminants sociaux de la santé et établir des politiques plus cohérentes avec cet objectif à l’échelle mondiale.

ce document de travail, qui présente les principaux processus de sa mise en œuvre, est loin d’être exhaustif. toutefois, si l’exécution des stratégies nationales va devoir être adaptée aux réalités de chaque pays, il est possible d’identifi er les thèmes prioritaires dès le départ pour commencer à agir.

tout d’abord, il faut favoriser une bonne gouvernance de l’action sur les déterminants sociaux, à tous les niveaux, du niveau local au niveau mondial. cet effort doit intégrer le travail de l’ensemble des gouvernements, de l’ensemble du système international et, aux deux niveaux, du secteur de la santé et des différents secteurs. une action mondiale sur les déterminants sociaux requiert de tenir compte de tous les intérêts et d’inclure toutes les parties concernées par le processus de prise de décisions, en particulier les plus défavorisées. elle nécessite également un accord sur les objectifs communs des secteurs; les inégalités en matière de santé doivent être reconnues comme mesure commune de l’échec des politiques et les confl its entre différents intérêts doivent être résolus dans l’optique de ces objectifs communs. Dans un environnement mondial de plus en plus préoccupé par les impacts sociaux des disparités de la vie, le moment est venu d’institutionnaliser la volonté d’accorder une plus grande place à l’équité dans les processus de prise de décisions, dans l’ensemble des gouvernements et du système de gouvernance mondiale. en coopérant avec différents pays et en développant des

règlements, des normes et des politiques au niveau international, la communauté mondiale a la responsabilité d’observer de quelle manière ses actions soutiennent ou s’éloignent de cette volonté. une liste d’actions prioritaires potentielles à examiner lors de la conférence mondiale est présentée dans l’encadré ci-dessous.

ensuite, les inégalités dans la répartition du pouvoir entre les différentes classes sociales et les différents groupes de la société doivent être améliorées, en favorisant la participation de groupes jusque-là exclus de la prise de décisions. il est essentiel d’encourager la participation politique des communautés pour créer une large assise sociale appuyant des politiques innovantes sur les déterminants sociaux. la participation de la communauté peut fortement améliorer la qualité et la réactivité des services de santé et autres services sociaux en améliorant la gestion, le suivi, la responsabilité et l’évaluation. en facilitant et en renforçant la participation, les gouvernements doivent reconnaître le rôle directeur des mouvements sociaux et des organisations de la société civile. il faut combler le fossé existant à l’heure actuelle entre le discours et la réalité sur la participation. il faut pour cela lutter contre les obstacles à la pleine participation, dont un grand nombre provient peut-être des gouvernements et organismes internationaux eux-mêmes. ces entités doivent investir dans la participation de la communauté en créant des conditions favorables et en favorisant l’autonomisation de tous les intervenants.

Par ailleurs, l’observation des inégalités en matière de santé ne peut pas se limiter au secteur de la santé et à la mesure des résultats en matière de santé. la mesure des inégalités au niveau des résultats sur la santé permet de défi nir le problème, mais fournit peu d’éléments pour le résoudre. l’observation des inégalités vis-à-vis de déterminants sociaux clés et la mise en relation de données provenant de différents secteurs peuvent permettre d’optimiser la conception de politiques par le biais d’une approche fondée sur les déterminants sociaux en apportant des changements si des résultats contraires sont identifi és.

« Il existe suffisamment de preuves associant les indicateurs de santé aux problèmes sociaux. Nous savons déjà, par exemple, que les politiques publiques sont fondamentales pour agir sur les déterminants sociaux de la santé. Nous devons admettre qu’il existe également suffisamment de preuves montrant qu’il est possible de faire les choses différemment. La volonté politique et la coopération entre les pays sont des éléments fondamentaux. »

Dr Alexandre Padilha, Ministre de la Santé, Brésil

conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé (cmDSS)43 |

LISTE D’ACTIONS PRIORITAIRES POTENTIELLES À EXAMINER LORS DE LA CONFÉRENCE MONDIALE

• Accord sur un cadre de surveillance mondiale qui permettrait aux pays de mesurer les déterminants sociaux - Intégration d’une démarche fondée sur les

déterminants sociaux dans de nouvelles mesures des objectifs sociétaux

- Révision, validation et application du cadre présenté dans ce document

• Intégration d’une approche fondée sur les déterminants sociaux et d’objectifs harmonisés pour aborder les principales priorités mondiales de la période post-OMD

- Changement climatique - Sécurité alimentaire - Socle de protection sociale des Nations Unies - Santé des femmes et des enfants - Maladies non transmissibles - VIH/sida, tuberculose et paludisme

• Plateforme commune des Nations Unies pour travailler sur les déterminants sociaux de la santé - Sensibilisation - Programme de recherche - Renforcement des capacités et instruments - Assistance technique conjointe

D’autre part, pour mettre en œuvre les processus soulignés dans le présent document, il est urgent de renforcer durablement les capacités politiques et techniques à tous les niveaux : parmi les responsables politiques, les fonctionnaires publics intervenant dans la prestation de services, dans la société civile et dans le secteur privé. la communauté mondiale peut jouer un rôle crucial dans le renforcement des capacités pour travailler sur les déterminants sociaux en facilitant l’échange d’expériences et de connaissances, en créant et en diffusant des outils et en dispensant des formations. c’est lorsqu’elles portent sur des pays dont les contextes sont similaires que ces activités peuvent se révéler les plus utiles.

ensuite, malgré la nécessité globale de travailler sur l’ensemble des secteurs, il reste primordial d’agir dans le secteur de la santé. l’institutionnalisation de l’équité dans ce secteur non seulement permet à ce dernier de contribuer à la réduction des inégalités en matière de santé, mais envoie également un signal clair aux autres secteurs. Si le secteur de la santé « ne met pas de l’ordre dans ses affaires »57 et ne prend pas des mesures effi caces refl étant l’ampleur du problème, la motivation pour agir et les progrès qui en découleront sur les inégalités en matière de santé risquent d’être compromis. le secteur de la santé a un rôle important à jouer dans tous les domaines abordés dans ce document, que ce soit sur le plan national ou mondial, pour générer et encourager une plus grande attention sur les déterminants sociaux. S’il ne peut pas espérer avoir un rôle dominant dans ce processus, le secteur de la santé devrait ouvrir la voie en concluant des alliances stratégiques avec d’autres secteurs ayant des programmes globalement proches (par exemple, la protection sociale, l’éducation, l’emploi et la protection de l’environnement). en outre, le secteur de la santé peut infl uencer les débats et orienter la formulation de politiques affectant les déterminants sociaux.

enfi n, les pays qui ont réalisé des progrès au niveau des inégalités en matière de santé n’ont pas nécessairement eu recours à toutes

les stratégies mentionnées dans ce document. ces pays ont identifi é les résultats souhaités, pas toujours liés à la santé, et ont entamé une action. À une époque où les problèmes sont éminemment complexes, il est urgent d’agir sur les déterminants sociaux pour atteindre les omD, relever les défi s environnementaux, notamment le changement climatique, lutter contre les mnt, assurer le développement économique et social, mettre en place des systèmes de protection sociale et veiller à n’exclure aucun groupe sociétal en exerçant la liberté qui existe dans l’égalité des chances pour tous. la conférence mondiale est l’occasion pour les pays, la communauté mondiale, la société civile et le secteur privé de prendre la décision d’agir sur les déterminants sociaux afi n d’atteindre ces objectifs communs et d’empêcher que des millions de personnes meurent inutilement chaque année à cause de l’injustice sociale.

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GloSSaire

Action intersectorielle (AIS) : travail intégré entre différents secteurs en vue d’un but collectif. Dans le domaine de la santé, l’aiS renvoie aux actions touchant à la santé entreprises par des secteurs autres que celui de la santé, éventuellement - mais pas nécessairement - en collaboration avec celui-ci.

Audit de l’équité en santé : audit spécialisé permettant de juger si la répartition des services ou des ressources est juste, en fonction des besoins sanitaires de différents groupes et de différentes zones, et d’identifi er les actions prioritaires.

Budget participatif : approche participative du budget national conçue pour renforcer la collaboration entre gouvernement, secteur privé et société civile. les processus de budget participatif permettent une utilisation plus effi cace et équitable des ressources publiques, le renoncement à des pratiques de corruption et l’obtention de résultats plus durables.

Commission des déterminants sociaux de la santé (CDSS) : réseau mondial de décideurs politiques, de chercheurs et de responsables de la société civile réunis par l’omS pour combattre les causes sociales des problèmes de santé et des inégalités en matière de santé. la cDSS a disposé d’un mandat de trois ans (2005-2008) pour réunir et examiner des informations sur ce qui était nécessaire pour réduire les inégalités en matière de santé au sein des pays et entre les pays, et pour transmettre ses recommandations d’action au Directeur général de l’omS.

Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques : traité international, établi en 1992, visant à étudier les possibilités de réduction et de lutte contre le réchauffement de la planète. Plus récemment, un certain nombre de nations ont approuvé le Protocole de Kyoto, qui est un ajout juridiquement contraignant au traité68.

Couverture santé universelle : accès et utilisation de services de qualité sur l’ensemble de la chaîne de soins par tous les membres d’une société. la couverture santé universelle garantit que les groupes défavorisés, ayant des besoins plus importants en matière de santé, reçoivent les ressources nécessaires pour bénéfi cier des services de santé adaptés à leurs besoins.

Déclaration de Paris sur l’effi cacité de l’aide : la Déclaration de Paris sur l’effi cacité de l’aide exprime le consensus de la communauté internationale sur la direction à prendre pour réformer les prestations et la gestion de l’aide au développement afi n d’en améliorer l’effi cacité et d’obtenir des résultats58.

Déterminants sociaux de la santé : circonstances dans lesquelles les individus naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent, incluant le système de santé. ces circonstances sont façonnées par la répartition des capitaux, du pouvoir et des ressources aux niveaux mondial, national et local, elle-même infl uencée par les choix politiques. les déterminants sociaux de la santé sont en grande partie responsables des inégalités en matière de santé. ce terme englobe également les forces sociales, politiques, économiques, environnementales et culturelles qui déterminent les conditions de vie des personnes.

Disparités sanitaires : Différences d’état de santé entre des groupes de population. ce terme est utilisé pour décrire les inégalités en santé, en particulier aux États-unis.

Enquêtes démographiques et sanitaires (DHS) : enquêtes auprès des ménages, représentatifs au niveau national, sur des échantillons de grande taille (habituellement entre 5 000 et 30 000 ménages). ces enquêtes permettent d’obtenir des données sur de nombreux indicateurs de suivi et d’évaluation de l’impact dans les domaines démographique, sanitaire et nutritionnel. ces enquêtes sont généralement menées tous les cinq ans afi n de permettre des comparaisons au fi l du temps60.

Enquêtes en grappes à indicateurs multiples (MICS) : Programme d’enquête développé par l’uniceF pour fournir des données rigoureuses sur

le plan statistique et comparables au niveau international sur la situation des femmes et des enfants64.

Épidémie : Survenue de cas d’une maladie en nombre supérieur à ce qui est normalement observé dans une certaine communauté, un certain secteur géographique ou pendant une certaine saison.

Équité en santé : absence de différences en matière de santé, différences non seulement inutiles et évitables, mais également considérées comme injustes. l’équité en santé ne signifi e pas que tout le monde devrait présenter le même état de santé, mais que tous les groupes de population devraient avoir des chances égales dans le domaine de la santé et qu’il ne devrait donc pas y avoir de différences systématiques dans l’état de santé de différents groupes.

Évaluation de l’équité : Processus structuré pour évaluer l’impact potentiel d’un programme ou d’une politique sur les inégalités et/ou les populations défavorisées.

Évaluation de l’impact social : Processus d’analyse, de suivi et de prise en charge des conséquences sociales, souhaitées et non souhaitées, positives ou négatives, des politiques et programmes en place, ainsi que de tous les changements sociaux découlant de ces interventions. l’objectif premier de l’évaluation de l’impact social est de créer un environnement biophysique et humain plus équitable et durable66.

Évaluation de l’impact sur l’environnement : Processus visant à prédire les effets environnementaux des initiatives proposées avant qu’elles ne soient mises en œuvre. Plus spécifi quement, l’évaluation environnementale peut permettre d’identifi er de possibles effets sur l’environnement, de proposer des mesures pour en nuancer les effets néfastes, ou de prédire s’il y aura des effets néfastes notables pour l’environnement61.

Évaluation de l’impact sur la santé (EIS) : combinaison de procédures, de méthodologies et d’outils qui permet à une politique, un programme, un produit ou un service d’être évalués quant à leurs effets sur la santé des populations63.

Évaluation des besoins : Procédure systématique pour déterminer la nature et l’ampleur des besoins sanitaires d’une population, les causes et facteurs contributifs de ces besoins et les ressources humaines, organisationnelles et communautaires disponibles pour répondre à ces besoins63.

Gouvernance : manière selon laquelle les gouvernements (y compris leurs différents secteurs constitutifs) et autres organisations sociales interagissent, se comportent avec les citoyens et prennent des décisions dans un monde complexe et mondialisé. Dans ce processus, les sociétés ou organisations prennent des décisions, déterminent qui sera concerné par ces décisions et défi nissent les moyens d’assurer la responsabilité des actions28.

Gradient social : Écarts de santé qui affectent l’ensemble de la population mondiale et qui sont souvent liés au statut socioéconomique, mais qui s’observent dans tous les pays, quel que soit le niveau de revenu. Dans le monde, les plus pauvres parmi les pauvres souffrent d’une santé médiocre. au sein des pays, il est démontré, de manière générale, que plus la position socioéconomique est basse, moins l’état de santé est bon.

Inégalité de santé : Différence dans l’état de santé de différents groupes de personnes. Dans certaines juridictions, inégalité de santé est employé dans le même sens qu’inégalité sanitaire.

Inégalité sanitaire : inégalité injuste et évitable ou réparable en matière de santé entre les populations d’un même pays ou de plusieurs pays. ces différences découlent de processus sociaux et ne sont ni naturelles ni inévitables.

Initiative pour un socle de protection sociale des Nations Unies (SPF-I) : initiative conjointe des nations unies visant à former une coalition mondiale avec les institutions des nations unies, les organisations internationales

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non gouvernementales, les banques de développement, les organisations bilatérales et autres partenaires de développement pour une collaboration aux niveaux national, régional et mondial qui permettra aux pays de mettre en place des socles nationaux de protection sociale pour leurs populations. l’initiative SPF-i correspond à un ensemble de prestations, de services et d’équipements essentiels dont tous les citoyens devraient bénéfi cier pour garantir l’exercice des droits prévus dans les traités sur les droits de la personne69.

Justice sociale : organisation de la société en vue du bien commun de tous, pour lequel la participation de tous est attendue. la promotion et le respect de la justice sociale impliquent de faire partie d’une société où tous les membres, quel que soit leur milieu, ont des droits fondamentaux et un accès équitable aux richesses et ressources de leur communauté.

Maladies non transmissibles (MNT) : Également appelées maladies chroniques, les mnt sont des maladies de longue durée qui connaissent généralement une progression lente. les quatre principaux types de mnt sont les maladies cardiovasculaires (par exemple, les crises cardiaques et les avc), le cancer, les maladies respiratoires chroniques (par exemple, les affections pulmonaires obstructives chroniques) et le diabète.

Mécanismes de fi nancement collectif : Financement des services de santé à l’aide de l’imposition, de régimes d’assurance sociale ou d’une combinaison des deux, qui permet de réduire les dépenses directes au moment de la prestation des services.

Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) : les omD des nations unies comptent huit objectifs que les 191 États membres de l’onu ont décidé d’essayer d’atteindre d’ici à 2015. la Déclaration du millénaire, signée en septembre 2000, engage les responsables mondiaux dans la lutte contre la pauvreté, la faim, la maladie, l’analphabétisme, la dégradation de l’environnement et la discrimination envers les femmes. les omD sont dérivés de cette Déclaration et ont tous des objectifs et indicateurs spécifi ques.

Optique de santé : composante importante de l’approche Santé dans toutes les politiques, utilisée pour identifi er les principales relations entre la santé et le bien-être de la population et les autres objectifs sociétaux et parvenir à des résultats mutuellement bénéfi ques. les cinq étapes clés de l’optique de santé sont : renforcer les relations avec les autres secteurs et convenir d’un axe politique, examiner les impacts entre la santé et l’axe politique en question et identifi er les options politiques en fonction de bases factuelles, présenter les recommandations politiques émises conjointement par l’ensemble des organismes partenaires, suivre ces recommandations dans le processus de prise de décisions et évaluer l’effi cacité de l’optique de santé29.

Outil d’évaluation de l’équité en santé : outil conçu pour faciliter la prise en compte de l’équité en santé et des inégalités dans le processus d’élaboration de politiques (voir ci-dessous un exemple d’outil d’évaluation de l’équité en santé avec urban Heart).

Outil d’évaluation et d’intervention pour l’équité en matière de santé en milieu urbain (Urban HEART) : outil éprouvé, mis au point par l’omS dans l’optique d’intégrer systématiquement les questions d’équité en santé dans le cycle de planifi cation, en particulier dans les milieux urbains. l’outil urban Heart constitue un guide convivial permettant aux décideurs politiques et autres intervenants, à l’échelle nationale et locale, d’évaluer les inégalités en matière de santé en milieu urbain et d'y répondre 70.

Programme d’action d’Accra : accord international, adopté en 2008, qui met en avant la nécessité de procéder à des réformes spécifi ques dans le secteur de l’aide au développement afi n d’améliorer l’effi cacité de l’aide58.

Protection sociale : ensemble des programmes et politiques visant à réduire la pauvreté et la vulnérabilité en favorisant l’effi cacité des marchés du travail, en diminuant l’exposition aux risques et en renforçant la capacité des personnes à se

protéger contre les risques et les interruptions/pertes de revenus. les politiques et procédures qui entrent dans le cadre de la protection sociale regroupent cinq grands types d’activité : les politiques et programmes portant sur le marché du travail, les programmes d’assurance sociale, l’aide sociale, les plans d’assurance par zone ou de micro-assurance et la protection de l’enfance67.

Renforcement des capacités : Processus par lequel des personnes, des organisations, des institutions et des sociétés développent la capacité d’effectuer des actions, de résoudre des problèmes et d’établir et atteindre des objectifs. le développement des capacités nécessite d’agir sur trois niveaux interdépendants : individuel, institutionnel et sociétal59.

Santé : État de complet bien-être physique, mental et social, par opposition à la simple absence de maladie ou d’infi rmité62.

Santé dans toutes les politiques : Stratégie politique qui établit la santé comme objectif commun de l’ensemble du gouvernement et comme indicateur commun de développement. cette stratégie souligne les liens importants qui existent entre santé et objectifs économiques et sociaux au sens large dans les sociétés modernes. elle considère les améliorations vis-à-vis de la santé de la population et la réduction des inégalités de santé comme des questions complexes hautement prioritaires qui exigent une réponse politique intégrée de l’ensemble des secteurs. cette réponse doit tenir compte de l’impact des politiques sur les déterminants sociaux ainsi que des bénéfi ces qu’apportent les améliorations dans le domaine de la santé aux objectifs des autres secteurs26.

Société civile : espace d’action collective autour d’intérêts, d’objectifs et de valeurs communs. la société civile est généralement distincte des acteurs gouvernementaux ou commerciaux, bien que les frontières entre eux soient parfois fl oues. la société civile est hétérogène, englobant des organismes de charité, des organisations de développement non gouvernementales, des groupes communautaires, des organisations féminines ou masculines, des organismes confessionnels, des associations professionnelles, des syndicats, des mouvements sociaux, des coalitions et des groupes de revendication. il n’existe pas de point de vue unique de la société civile et les acteurs de la société civile ont à affronter des questions de représentativité et de légitimité similaires à celles rencontrées par d’autres représentants et défenseurs. il est essentiel d’inclure la société civile, malgré sa complexité et son hétérogénéité, pour avoir le soutien public et permettre aux personnes et groupes marginalisés de s’exprimer, tout comme à d’autres qui ont souvent du mal à se faire entendre. les acteurs de la société civile peuvent améliorer la participation des communautés dans la prestation de services et dans la prise de décisions en matière politique.

Soins de santé primaires : approche de l’équité en santé et des systèmes de santé qui souligne l’importance des soins primaires (à savoir, la prestation de services de soins accessibles et intégrés par des cliniciens pouvant répondre à la grande majorité des besoins en matière de soins de santé individuels, développer un partenariat durable avec les patients et exercer dans le cadre familial et communautaire) ainsi que la nécessité de travailler dans différents secteurs, de prendre en compte les facteurs économiques et sociaux qui ont une infl uence sur la santé, d’encourager la participation des communautés dans les systèmes de santé et de veiller à l’utilisation et au développement de technologies appropriées en termes de mise en place et de coût. les efforts en matière de soins de santé primaires visent à rapprocher les soins du lieu où vivent les personnes, à assurer l’implication de ces dernières dans les décisions concernant leur santé et à prendre en charge des aspects cruciaux de l’environnement physique et social essentiel à la santé, tels que l’eau potable, l’assainissement et l’éducation. cette approche a été codifi ée dans la Déclaration d’alma-ata en 197865.

Système de santé : ensemble structuré et interdépendant de tous les acteurs et organismes dont l’intention première est d’améliorer ou d’entretenir la santé.

COMBLER LE FOSSÉ : De la PolitiQue À l’action Sur leS DÉterminantS SociauX De la SantÉ| Document De travail | | 46

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l a conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé représente une formidable occasion d’empêcher la perte de milliers de vies chaque jour à cause de l’injustice sociale. ce document de

travail a pour objectif d’orienter les actions et d’aider à atteindre le but de la conférence mondiale : partager des expériences sur la manière de réduire les inégalités sanitaires et de susciter un engagement en faveur de la mise en œuvre urgente d’une action sur les déterminants sociaux. ce document n’entend pas fournir un modèle absolu, mais expose plutôt les composantes essentielles (qui constituent les thèmes de la conférence mondiale) que tous les pays doivent intégrer lors de l’adoption d’une approche fondée sur les déterminants sociaux. il entend montrer qu’il est possible, dans tous les pays, de mettre en pratique les politiques relatives aux déterminants sociaux de la santé afi n d’améliorer la santé et le bien-être, de réduire les inégalités sanitaires et de promouvoir le développement.

Département Éthique, équité, commerce et droits de l'homme

organisation mondiale de la Santé20, avenue appiacH-1211 Genève 27

www.who.int/social_determinants

Tous pour l’équité

BRÉS I L |R I O D E J A N E I R O | 19–21 OCTOBRE 2011

déterminants sociaux de la santé Conférence mondiale sur les

Tous pour l’équité

ISBN 978 92 4 250240 4