Cours Commun 2

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C C e e d d e e p p Centre d’étude et de défense de l’école publique Campus de la Plaine ULB CP 236 1050 Bruxelles www.cedep.be Le CEDEP est constitué de 12 associations : Association des Directeurs de l’Enseignement Officiel (ADEO), Association des Enseignants socialistes de la Communauté française de Belgique (AESF), Association des Professeurs issus de l’ULB (APrBr), Centrale générale des Services publics (CGSP-Enseignement), Centre d’Action laïque (CAL), Centre d’Etudes Charles Rogier (CECR), Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Education active (CEMEA), Conseil des Pouvoirs organisateurs de l’Enseignement officiel neutre subventionné (CPEONS), Fédération des Amis de la Morale laïque (FAML), Fédération des Associations de Parents de l’Enseignement officiel (FAPEO), Ligue de l’Enseignement et de l’Education permanente (LEEP), Syndicat libre de la Fonction publique (SLFP-Enseignement). Le CEDEP prend ses décisions à l’unanimité. Proposition d’un cours commun : EDUCATION PHILOSOPHIQUE, ETHIQUE ET CITOYENNE 1. Rétroactes La proposition SIMONET Le 17 janvier 2012, Madame Marie-Dominique SIMONET, Ministre de l’Enseignement obligatoire, annonça l’instauration pour 2013 d’un «tronc commun» à l’ensemble des cours dits « philosophiques » (morale non confessionnelle, religions catholique, protestante, israélite, islamique et orthodoxe). Ce « tronc commun » comportait trois grands axes : le questionnement philosophique, le dialogue interconvictionnel et l’éducation à la citoyenneté active. La position du CEDEP Le CEDEP partage son souhait de renforcer une formation commune à tous les élèves visant l’amélioration du vivre ensemble. Mais le CEDEP a fait connaître publiquement le 27 avril 2012 son désaccord sur les modalités proposées par la Ministre et a formulé deux demandes qui ont été présentées à la Commission de l’Education du Parlement de la FWB lors de l’audition du 23 octobre 2012. La critique du CEDEP porte sur le fait que le « tronc commun », censé donc être le même pour tous, serait enseigné différemment et séparément aux enfants dans le cadre des cours de religion et de morale existants dans l’enseignement officiel. Comment dès lors envisager l’apprentissage du dialogue, de la renco ntre et de la tolérance ?

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  • CCeeddeepp

    Centre dtude et de dfense de lcole publique Campus de la Plaine ULB CP 236 1050 Bruxelles

    www.cedep.be

    Le CEDEP est constitu de 12 associations : Association des Directeurs de lEnseignement Officiel (ADEO),

    Association des Enseignants socialistes de la Communaut franaise de Belgique (AESF), Association des

    Professeurs issus de lULB (APrBr), Centrale gnrale des Services publics (CGSP-Enseignement), Centre

    dAction laque (CAL), Centre dEtudes Charles Rogier (CECR), Centres dEntranement aux Mthodes

    dEducation active (CEMEA), Conseil des Pouvoirs organisateurs de lEnseignement officiel neutre subventionn

    (CPEONS), Fdration des Amis de la Morale laque (FAML), Fdration des Associations de Parents de

    lEnseignement officiel (FAPEO), Ligue de lEnseignement et de lEducation permanente (LEEP), Syndicat libre

    de la Fonction publique (SLFP-Enseignement). Le CEDEP prend ses dcisions lunanimit.

    Proposition dun cours commun :

    EDUCATION PHILOSOPHIQUE,

    ETHIQUE ET CITOYENNE

    1. Rtroactes

    La proposition SIMONET

    Le 17 janvier 2012, Madame Marie-Dominique SIMONET, Ministre de

    lEnseignement obligatoire, annona linstauration pour 2013 dun tronc commun

    lensemble des cours dits philosophiques (morale non confessionnelle, religions

    catholique, protestante, isralite, islamique et orthodoxe). Ce tronc commun

    comportait trois grands axes : le questionnement philosophique, le dialogue

    interconvictionnel et lducation la citoyennet active.

    La position du CEDEP

    Le CEDEP partage son souhait de renforcer une formation commune tous les

    lves visant lamlioration du vivre ensemble. Mais le CEDEP a fait connatre

    publiquement le 27 avril 2012 son dsaccord sur les modalits proposes par la

    Ministre et a formul deux demandes qui ont t prsentes la Commission de

    lEducation du Parlement de la FWB lors de laudition du 23 octobre 2012.

    La critique du CEDEP porte sur le fait que le tronc commun , cens donc tre le

    mme pour tous, serait enseign diffremment et sparment aux enfants dans le

    cadre des cours de religion et de morale existants dans lenseignement officiel.

    Comment ds lors envisager lapprentissage du dialogue, de la rencontre et de la

    tolrance ?

  • CEDEP Page 2 sur 6 18 avril 2013

    Par ailleurs, le rle des professeurs de ces cours est denseigner une option

    philosophique particulire et on ne peut en mme temps attendre deux quils

    enseignent les diffrentes manires de penser, de faon quilibre, neutre et

    impartiale. Cest clairement contradictoire.

    Do la demande du CEDEP : les matires du tronc commun envisag par Mme

    la Ministre, au lieu dtre enseignes sparment aux enfants inscrits aux diffrents

    cours de religion/morale, devraient faire lobjet dun cours commun tous les

    lves, donn dans le cadre du programme obligatoire, par des professeurs forms

    particulirement lenseignement de ces matires communes. La mise en uvre du

    cours commun devra se faire par tapes et saccompagner de mesures transitoires

    pour le personnel enseignant.

    A noter quil correspond la proposition de dcret introduisant un cours de

    philosophie et d'histoire culturelle des religions dans le programme du troisime

    degr de l'enseignement secondaire , faite en 2009 par M. Richard MILLER, Mme

    Florence REUTER, M. Gilles MOUYARD et Mme Franoise BERTIEAUX, mais le

    CEDEP ltend lducation la citoyennet active dune part, et tout

    lenseignement obligatoire dautre part.

    Par ailleurs, lobligation de frquenter les cours philosophiques actuels dans

    lenseignement officiel pose problme : est-ce le rle de notre enseignement public

    dimposer aux parents de se dfinir et de dclarer par crit leur appartenance

    religieuse ou philosophique en choisissant pour chaque enfant, ds la premire

    primaire, une religion ou labsence de religion ? Au nom de quoi les oblige-t-on

    faire ce choix ? Pourquoi ne pas respecter la libert des familles dduquer leurs

    enfants comme elles le souhaitent dans ce domaine qui relve exclusivement de la

    sphre prive ?

    Lillgalit de la situation actuelle

    Lors de leur audition du 12 mars 2013 par la Commission de lEducation, trois

    Professeurs de droit constitutionnel, MM. Christian BEHRENDT (ULg), Hugues

    DUMONT (FUSL) et Marc UYTTENDAELE (ULB), ont notamment soulign que

    l'obligation actuelle faite aux enfants de frquenter un des cours philosophiques

    offerts l'cole, l'exclusion de toute autre conviction, contrevient aux droits

    culturels tels que dfinis

    par larticle 2 du Protocole additionnel du 20 mars 1952 la Convention europenne

    de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Liberts fondamentales L'Etat,

    dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'ducation et de

    l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette ducation et cet

    enseignement conformment leurs convictions religieuses et philosophiques ,

  • CEDEP Page 3 sur 6 18 avril 2013

    par l'article 13 4 du Pacte des Nations Unies du 16 dcembre 1966 Les Etats

    parties au prsent Pacte s'engagent respecter la libert des parents de faire

    assurer l'ducation religieuse et morale de leurs enfants, conformment leurs

    propres convictions

    et par larticle 14.3. de la Charte des droits fondamentaux de lUnion europenne

    jointe au Trait de Lisbonne du 13 dcembre 2007 qui consacre le droit des

    parents dassurer lducation et lenseignement de leurs enfants conformment

    leurs convictions religieuses, philosophiques et pdagogiques .

    Larticle 24 de la Constitution se limite imposer que les coles organises par les

    pouvoirs publics offrent, jusqu la fin de lobligation scolaire, le choix entre

    lenseignement dune des religions reconnues et celui de la morale non

    confessionnelle . Notre loi fondamentale fait donc obligation aux coles publiques

    dorganiser ces cours, mais pas aux parents dy inscrire leurs enfants. La

    Communaut flamande la dailleurs compris puisquelle a supprim cette obligation

    faite aux parents depuis 19971.

    Do lautre demande du CEDEP : la frquentation des cours de religion et de morale

    doit devenir facultative pour les lves, ces cours restant obligatoirement organiss

    par les coles officielles en fonction des demandes, conformment la Constitution.

    Ainsi les familles deviendraient libres dinscrire chaque enfant un cours de

    religion/morale, ou non, dans le respect des convictions qui leur sont propres,

    conformment aux droits culturels tablis par les Nations Unies et lUnion

    Europenne, mentionns ci-dessus.

    Il suffit pour cela que le dcret qui crera le cours commun supprime la phrase qui

    rend obligatoire la frquentation des cours de religions et de morale non

    confessionnelle dans la loi dite du Pacte scolaire 2, ainsi que dans chacun des

    deux dcrets sur la neutralit dans lenseignement officiel3.

    2. Cours commun propos par le CEDEP

    Pour le CEDEP, la suppression de lobligation de frquenter les cours de religions et de

    morale doit saccompagner de la cration dun cours commun. Dans son communiqu de

    presse du 27 avril 2012, il a rsum sa demande dun cours commun comme suit :

    le CEDEP revendique un renforcement de la formation citoyenne, destine tous les

    lves, qui se fonde sur une approche philosophique et sur une connaissance historique des

    religions et des mouvements de pense non confessionnels permettant aux lves dexercer

    librement leur esprit critique.

    1 Dcret flamand du 25 fvrier 1997, article 29, et arrt du gouvernement flamand du 14 juillet 2004. 2 Loi du 29 mai 1959, article 8. 3 Dcret du 31 mars 1994, article 5 et dcret du 17 dcembre 2003, article 6.

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    Le CEDEP a propos ds 2010 dinstaurer4 un cours commun, obligatoire pour

    tous, en vue de dvelopper lesprit critique et d'initier progressivement :

    la dmarche philosophique (les expriences en la matire sont concluantes et montrent que cet enseignement peut se faire ds les classes maternelles),

    la rflexion morale (perception et clarification des valeurs et des rgles de vie),

    la citoyennet dmocratique,

    au respect des diffrences,

    aux principes de la Dclaration universelle des Droits de lHomme (1948) et des conventions internationales qui en dcoulent.

    Ce cours commun devrait dpasser les clivages actuels entre "cours philosophiques"

    en incluant dans le cursus une information impartiale - respectueuse des dcrets -

    d'inspiration anthropologique tant sur le fait religieux que sur le fait agnostique et/ou

    athe et leurs implications morales, et ce par une prsentation tant de l'histoire que

    de l'actualit de ces diverses conceptions du monde.

    La mise au point de ce cours pourrait fructueusement puiser dans la dj longue

    exprience des contacts positifs tant entre les inspections des "cours philosophiques"

    actuels, que de leurs titulaires, entre autres sur le socle commun des valeurs

    humanistes qu'ils vhiculent et qui mritent changes et rflexions (il est noter que

    la prsente proposition ne prjuge pas dune ventuelle rforme des cours de

    religions et de morale non confessionnelle).

    3. Comptences dvelopper

    Le CEDEP propose dappeler ce cours commun ducation philosophique,

    thique et citoyenne pour rencontrer trois demandes et exigences bien

    spcifiques :

    1 -Tout dabord, une ducation philosophique conformment au Rapport

    introductif portant sur lIntroduction de davantage de philosophie dans

    lenseignement, que ce soit court ou long terme 5, discut au Parlement de la

    Communaut franaise le 19 dcembre 2000, sous une forme approprie tout ge

    et ds lcole fondamentale (par exemple au moyen de dispositifs recenss sous

    lappellation de philosophie pour les enfants ).

    4 Proposition 12, 2

    e partie, prsente par le CEDEP dans ses Rflexions en vue dun systme ducatif plus

    performant pour tous les enfants , mai 2010, tlchargeable sur www.cedep.be

    5 Le Rapport introductif portant sur lIntroduction de davantage de philosophie dans lenseignement, que ce soit

    court ou long terme a t dpos le 25 novembre 2000 et dbattu au Parlement de la Communaut

    franaise le 19 dcembre 2000. Il a en outre t publi, avec la discussion au Parlement et les contributions des

    acteurs de la socit civile, aux ditions Luc Pire en collaboration avec le Parlement de la Communaut

    franaise de Belgique en 2001 sous le titre La Philosophie lcole (ISBN 2-87415-100-9).

    http://www.cedep.be/

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    Cette partie du cours visera dvelopper principalement les comptences cognitives

    suprieures comme questionner, penser, rflchir, argumenter, infrer, induire,

    srier, classer, conceptualiser, problmatiser

    Cette ducation philosophique visera aussi faire progressivement discerner chez

    les lves :

    les noncs qui relvent de lexactitude ou de lerreur (pistmologie) ;

    les noncs qui prtendent au bien et au juste (philosophie morale et

    philosophie du droit) ;

    les noncs valuatifs et expressifs qui relvent de la subjectivit des

    prfrences et de lesthtique.

    2 - Ensuite, amener les lves exercer le questionnement et la rflexion

    thiques tels quils sont requis pour lgifrer et se positionner dans la sphre

    publique sur les questions du bien et du juste.

    Cette partie du cours visera dvelopper principalement les comptences se

    dcentrer et couter des points de vue thiques diffrents du sien propre, pouvoir

    respecter le pluralisme thique sans renoncer argumenter ses choix thiques

    propres, poser des choix thico-politiques aprs rflexion et discussion des points de

    vue.

    3 - Enfin, une ducation la citoyennet responsable pour rpondre au souhait du

    lgislateur de la Fdration Wallonie-Bruxelles, exprim dans le Dcret Missions6 et

    le Dcret Citoyennet7, que le cours commun remplisse cette mission pendant toute

    la scolarit obligatoire.

    Avec la mondialisation et le multiculturalisme des socits, le CEDEP pense que le

    moment est venu de garantir un lieu et un cours commun tous les lves pour que

    puisse sy transmettre de faon critique et rflexive lhistoire de nos valeurs

    partages et de nos principes dmocratiques tout en veillant remplir lobjectif de

    socialisation dvolu lcole moderne, un espace commun o penser et construire le

    vivre-ensemble ds le plus jeune ge, malgr des convictions prives diffrentes.

    Cette partie du cours visera dvelopper principalement :

    les comptences lautonomie individuelle : la capacit penser par soi-

    mme, juger par soi-mme et rguler ses motions, la capacit exercer

    son esprit critique, viter les paralogismes et les sophismes pour

    argumenter avec rigueur ;

    6 Dcret dfinissant les missions prioritaires de lenseignement fondamental et de lenseignement secondaire et

    organisant les structures propres les atteindre (D. 24-07-1997 M.B. 23-09-1997).

    7 Dcret relatif au renforcement de lducation la citoyennet responsable et active au sein des tablissements

    organiss ou subventionns par la Communaut franaise (D. 12-01-2007 M.B. 20-03-2007) ; modification : D.

    13-12-07 (M.B. 13-03-08).

  • CEDEP Page 6 sur 6 18 avril 2013

    les comptences la coopration sociale : habilets coopratives,

    comptences communicationnelles dcoute et dexpression ;

    les comptences la participation publique : lgifrer au niveau o lon se

    trouve dans lgalit de droit, prendre la parole, couter, argumenter, se

    positionner, convaincre, se laisser convaincre, rpondre de ses choix, bref

    faire acqurir la majorit civile les comptences qui permettent au citoyen

    dexercer ses droits politiques au sein des institutions dmocratiques.

    Ces trois comptences sont relies aux trois grandes valeurs dmocratiques :

    lautonomie individuelle se lie la libert,

    la coopration sociale la solidarit et

    la participation publique lgalit de droit.

    4. Conditions de mise en uvre

    Le nouveau cours commun sadresse tous les lves, quelles que soient leurs

    convictions philosophiques ou religieuses, il porte sur ce qui unit et non sur ce qui

    divise.

    Pour garantir cette dmarche, le cours applique la pdagogie par comptences

    prconise par le lgislateur depuis 1997.

    Les enseignants devront tre forms spcifiquement pour donner ce cours

    commun, cest la condition sine qua non de sa russite.

    Une nouvelle formation initiale doit tre organise et complte par une solide

    formation continue, en sinspirant notamment de ce qui existe dj dans

    certaines Hautes Ecoles.

    5. Utilit de la rforme

    La cration de ce cours commun concerne tous les rseaux.

    Le cours remplit un objectif qui nest pas celui des autres cours, savoir

    dvelopper le discernement moral et citoyen partir de valeurs communes et

    fdratrices.

    En ce sens il peut tre un moyen dducation au dialogue, de gestion des conflits

    et de prvention de la violence.

    Comme les lves ont cours en mme temps, le cours commun est moins

    coteux que les cours philosophiques obligatoires actuels.

    Le programme du cours commun est entirement sous contrle des pouvoirs

    publics, ce qui nest pas le cas actuellement des cours de religions.

    Ce cours remplit en outre lune des missions ducatives dcrtes par le

    lgislateur et reprise dans le dcret Missions le dcret Citoyennet et les

    deux dcrets Neutralit , savoir lducation la citoyennet responsable.