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30 Le Moniteur des pharmacies | N° 3038 | Cahier 1 | 28 juin 2014 NOUVELLES TECHNOLOGIES COMMUNIQUER À DISTANCE AVEC SES PATIENTS Pour l’officinal, la proximité et l’expertise se jouent désormais aussi dans la capacité à entretenir une relation à distance avec ses clients. Mais certaines précautions sont à respecter pour tirer le meilleur parti des multiples outils de communication disponibles, sans sortir des clous. | Par Chloé Devis ENTREPRISE A lors que l’officine est en quête de solutions adaptées aux né- cessités économiques et aux évolutions des comportements d’achat, investir dans la communication à distance avec ses patients peut lui apporter une vraie valeur ajoutée », estime Tony Jagu, dirigeant du cabinet Alizé Conseil. « Il ne s’agit pas de remplacer, mais de pro- longer la relation au comptoir, tout en ren- voyant une image de modernité grâce à un usage maîtrisé des outils existants ». Jé- rôme Lapray, directeur marketing de Pharmagest, rappelle que l’usage des technologies concernées s’est large- ment démocratisé, en particulier via l’essor des solutions mobiles, toutes tranches d’âges confondues : « le taux d’équipement global de la population est su- périeur à 70 % et ne cesse de grimper chez les jeunes seniors ». Et d’ajouter que « si les pharmaciens tardent à utiliser mails, SMS et réseaux sociaux dans un contexte professionnel, c’est parfois la demande de leurs clients qui sert de déclic ». « La démarche doit faire l’objet d’une vraie réflexion managériale », indique Tony Jagu. « Avant toute chose, le pharmacien doit être convaincu de l’intérêt qu’elle présente ». Mais c’est aussi l’équipe qui doit être mobilisée. « Le titulaire a tout intérêt à déléguer les tâches liées à l’usage de ces outils auprès de collaborateurs compétents », préconise le consultant. L’équipe aura aussi à « mettre en condition » les clients susceptibles de leur confier leurs coordonnées person- nelles, avec un argumentaire rôdé au comptoir. « Mettez en avant l’intérêt des in- théRèSe bONté

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30 Le Moniteur des pharmacies | N° 3038 | Cahier 1 | 28 juin 2014

NOUVELLES TECHNOLOGIES

COMMUNIQUER ÀDISTANCE AVEC SESPATIENTSPour l’officinal, la proximité et l’expertise se jouentdésormais aussi dans la capacité à entretenir unerelation à distance avec ses clients. Mais certainesprécautions sont à respecter pour tirer le meilleurparti des multiples outils de communicationdisponibles, sans sortir des clous. |Par Chloé Devis

ENTREPRISE

A lors que l’officine est en quêtede solutions adaptées aux né-cessités économiques et auxévolutions des comportements

d’achat, investir dans la communication àdistance avec ses patients peut lui apporterune vraie valeur ajoutée », estime TonyJagu, dirigeant du cabinet Alizé Conseil.« Il ne s’agit pas de remplacer, mais de pro-longer la relation au comptoir, tout en ren-voyant une image de modernité grâce à unusage maîtrisé des outils existants ». Jé-rôme Lapray, directeur marketing dePharmagest, rappelle que l’usage destechnologies concernées s’est large-ment démocratisé, en particulier vial’essor des solutions mobiles, toutestranches d’âges confondues : « le tauxd’équipement global de la population est su-périeur à 70 % et ne cesse de grimper chezles jeunes seniors ». Et d’ajouter que « siles pharmaciens tardent à utiliser mails,SMS et réseaux sociaux dans un contexteprofessionnel, c’est parfois la demande deleurs clients qui sert de déclic ».

Créer des conditionsfavorables« La démarche doit faire l’objet d’une vraieréflexion managériale », indique Tony Jagu.« Avant toute chose, le pharmacien doit êtreconvaincu de l’intérêt qu’elle présente ».Maisc’est aussi l’équipe qui doit être mobilisée.« Le titulaire a tout intérêt à déléguer lestâches liées à l’usage de ces outils auprès decollaborateurs compétents », préconise leconsultant. L’équipe aura aussi à « mettreen condition » les clients susceptibles deleur confier leurs coordonnées person-nelles, avec un argumentaire rôdé aucomptoir. « Mettez en avant l’intérêt des in- t

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formations que vous serez en mesure de four-nir à vos patients, prenez des engagements…et tenez-les : il faut que cette relation à distances’inscrive dans un rituel », insiste Tony Jagu.Blandine Girot, titulaire de la pharmacieBayen à Paris, a pour sa part décidé dejouer la carte « connectée » jusqu’aubout : elle met à disposition de ses pa-tients, au comptoir, des cartes de visitede la pharmacie avec un QR Code ren-voyant à son site.

Mails, SMS, réseauxsociaux : à chaque outilses usages• Devant la multitude d’outils, lesquelsutiliser ? Les SMS peuvent permettre deprévenir les clients de l’arrivée de leurscommandes. Mais Blandine Girot préfères’en tenir au téléphone « pour éviter laconfusion avec une démarche commerciale,les gens étant suffisamment sollicités à ce ti-tre ». Un impératif : « écrire des messagescourts et simples », explique BénédicteKarpov. Et pour minimiser le risque deparaître indésirable, il est préférable d’en-voyer ce type de messages entre 9h et20h. • Le courrier électronique peut permettrel’envoi régulier de newsletters à viséeinformative, mais en aucun cas promo-tionnelle. Mais lorsque la pharmacie dis-pose d’un site, marchand ou non, c’estaussi un canal d’échanges personnalisés :« je reçois des questions sur les médicaments,les pathologies, et je fais du conseil de lamême manière qu’au comptoir, via uneconnexion sécurisée », explique BlandineGirod. Une tâche à laquelle elle consacre« environ une demie-heure par semaine ».Dans tous les cas, il faut soigner la forme :« évitez un ton trop abrupt, éventuellementen prenant conseil auprès de spécialistes ouen vous inspirant de la communication deslaboratoires », conseille Tony Jagu.• Quant aux réseaux sociaux, leur effi-cacité repose précisément sur la facilitéà partager les contenus et à susciter del’interaction. « Une page sur un réseau socialcomme Facebook permet de communiquersur les aspects différenciants de l’officine : leconseil, l’ambiance au sein de l’officine… »,énumère Clément Pellerin, formateur enréseaux sociaux. « C’est aussi un bon moyen

de créer le lien et d’obtenir de manière passivedes retours sous forme de like et de témoi-gnages positifs sur l’officine », renchérit Mi-chel Kervella, de l’agence web Itek-pharma. Les pharmaciens applaudissent.« Ma page Facebook ne me fait pas gagnerd’argent, mais elle génère des retours et en-tretient un capital sympathie autour de l’of-ficine. », témoigne Jessica Weizman, titu-laire de la pharmacie homonyme à Paris.Le professionalisme doit rester la règleà tous les niveaux. « Trop souvent les petitesentreprises délaissent leur page ou compteTwitter alors que des internautes y attendentdes réponses à leurs questions », constateainsi Clément Pellerin. Du côté de l’Ordre,on précise que le support peut être utilisé« pour la communication d’informations desanté publique »,mais qu’il n’est pas ques-tion que le pharmacien y exprime « desopinions personnelles, qui pourraient être in-terprétées comme des avis officiels ».

Approfondir la relationclient avec des aplicationsmobilesLes éditeurs de logiciels pour l’officineproposent désormais des outils baséssur les technologies mobiles, et qui vont

dans le sens d’un accompagnement ren-forcé des patients. Créée par Winpharma,l’application winPharmacie.com, quifonctionne sur iPhone et Internet, permetau client d’avoir accès à son dossier dansl’officine et de gagner du temps : « dansle cas d’une demande de renouvellement, au-cune saisie n’est nécessaire. Le ticket de promisapparaît sous la forme d’un code-barre, surle téléphone du client, qui se lit directement àla douchette lors de la délivrance. Le phar-macien peut également utiliser l’outil pourtransmettre des informations pratiques. »Mypharmaciemobile est une applicationgratuite, pour le pharmacien commepour le patient, lancée par Pharmagesten 2010. Elle peut être connectée au lo-giciel de gestion de la société ou à un PCde l’officine, via un logiciel spécifique,et permet au client d’accéder à un an-nuaire des pharmacies avec des fichesde renseignements (horaires, spéciali-tés…) mises à jour par les officines elles-mêmes. L’utilisateur a par ailleurs la pos-sibilité d’envoyer une photo de sonordonnance à son pharmacien pour lapréparation de sa commande, de se fairerappeler ses prises de médicaments parune alerte sur son smartphone, et deconfirmer l’acte en retour. §

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Les règles déontologiques à respecter

« La communication à distance entrepatients et professionnels de lapharmacie peut avoir un intérêt »,confirme Jean-Marc Gagnaire,pharmacien et président du Conseilrégional de l’ordre d’Auvergne, « àcondition qu’elle soit encadrée entermes de protection des donnéespersonnelles ». Ainsi, « sur lesréseaux sociaux, tout échange dedonnées de santé est à proscrire, ycompris via les messageriesprivées », souligne-t-il. « Pour le reste,c’est au pharmacien d’apprécierchaque situation et d’estimer s’il estopportun de répondre à tellesollicitation ou d’encourager soninterlocuteur à venir à l’officine. »

Attention : « mails, mais surtout SMS,voire messages téléphoniquesadressés personnellement à unpatient, sont toujours susceptiblesd’être consultés par une autrepersonne que le destinataire : dansce cas, en fonction de leurformulation, il peut y avoir violationdu secret médical ». Dans le cadred’informations promotionnellescommuniquées à un large groupe depersonnes (inscrites à une newsletterou sur un réseau social par exemple),la règle reste de procéder avec « tactet mesure », comme le prévoit leCode de déontologie, et bienentendu de s’abstenir de toutepublicité autour des médicaments.