Comment améliorer l’évaluation de l’activité en soins palliatifs dans un Centre Régional de...

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ÉTUDE ORIGINALE Médecine palliative 237 N° 5 – Octobre 2005 Med Pal 2005; 4: 237-244 © Masson, Paris, 2005, Tous droits réservés Comment améliorer l’évaluation de l’activité en soins palliatifs dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer à l’arrivée de la T2A ? Étude au Centre Paul Strauss de Strasbourg Jean-Michel Frasie (photo), Médecin du Service d’Information Médicale de l’UGECAM d’Alsace, Illkirch. Véronique Frasie, Médecin responsable de l’Équipe Mobile de Soins d’Accompagnement, Centre Paul Strauss, Strasbourg. Serge Theobald, Médecin du Service d’Épidémiologie et de Biostatistiques, Centre Paul Strauss, Strasbourg. Summary How to improve care at the regional anti-cancer with the new regulatory cost schedule? The cost of palliative care is largely underestimated in the cur- rent French health care fund cost schedule (PMSI). With the new schedule (T2A) it is primordial for health care providers to op- timize the different care practices which determine their finan- cial resources. The present study confirms the serious underes- timation of the cost of palliative care and presents a multiple- criteria analysis tool, the UDSMA grid, for better quantifying palliative care activities. This tool is proposed to improve use and fix limits. Key-words: palliative care, cost schedule, PMSI, activity audit. Résumé L’activité en soins palliatifs est notoirement sous-évaluée par le PMSI. Or, avec l’arrivée de la tarification à l’activité (T2A), la valorisation optimale des différentes activités de soins devient primordiale dans un établissement de santé car elle conditionne directement son financement. Cette étude confirme l’importante sous-évaluation de l’activité en soins palliatifs par le PMSI et présente un outil d’analyse multicritères, la grille UDSMA, qui permet de mieux quantifier cette activité. Elle en propose une amélioration et fixe ses limites d’utilisation. Mots clés : soins palliatifs, PMSI, évaluation d’activité. Introduction L’organisation de soins lourds ayant un impact en terme de coûts (utilisation de médicaments onéreux, inter- vention d’une équipe pluriprofessionnelle, prolongation des durées de séjour, évaluation continue de l’évolution de la maladie, des symptômes, des complications des traite- ments, adaptation à l’angoisse de la personne soignée, des proches et des professionnels…) concerne une majorité de patients pour lesquels le projet de soins est palliatif. La valorisation de l’activité en soins palliatifs est donc pri- mordiale, en particulier dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer. L’évaluation et l’analyse de l’activité des établisse- ments de santé publics et privés sont réalisées par le PMSI, introduit par la loi du 31 juillet 1991. Cette analyse est fondée sur le recueil systématique et le traitement auto- matisé d’une information médico-administrative minimale et standardisée, contenue dans le Résumé de Sortie Stan- dardisé (RSS). Les données collectées font ensuite l’objet d’un classement en un nombre volontairement limité de groupes de séjours (les Groupes Homogènes de Malades, GHM) présentant une similitude médicale et un coût voi- sin. Or, comme aux États-Unis, cette classification des sé- jours hospitaliers (adaptation de la classification améri- caine des Diagnosis Related Groups, DRGs), conçue initialement comme outil d’analyse de l’activité, est utili- sée progressivement depuis le 1 er janvier 2004 pour procé- der au paiement forfaitaire de ces séjours hospitaliers. Ce système de tarification à l’activité (dénommé T2A) est amené à remplacer les deux systèmes de financement qui existaient pour les structures de soins publiques (dotation globale) et privées (tarification à la journée et forfait lié aux actes réalisés). Avec ce nouveau système, l’activité en soins palliatifs est censée être mieux identifiée avec la création d’un Groupe Homogène de Malades (GHM) spécifique aux soins palliatifs, et mieux financée grâce à deux tarifs ou Groupes Frasie JM, Frasie V, Theobald S. Comment améliorer l’évaluation de l’activité en soins palliatifs dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer à l’arrivée de la T2A ? Étude au Centre Paul Strauss de Strasbourg. Med Pal 2005; 4: 237-244. Adresse pour la correspondance : Jean-Michel Frasie, UGECAM d’Alsace, 10 b, avenue Baumann, BP 70104, 67403 Illkirch Cedex. e-mail : [email protected]

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Médecine palliative

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N° 5 – Octobre 2005

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Comment améliorer l’évaluation de l’activité en soins palliatifs dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer à l’arrivée de la T2A ? Étude au Centre Paul Strauss de Strasbourg

Jean-Michel Frasie (photo), Médecin du Service d’Information Médicale de l’UGECAM d’Alsace, Illkirch.

Véronique Frasie, Médecin responsable de l’Équipe Mobile de Soins d’Accompagnement, Centre Paul Strauss, Strasbourg.

Serge Theobald, Médecin du Service d’Épidémiologie et de Biostatistiques, Centre Paul Strauss, Strasbourg.

Summary

How to improve care at the regional anti-cancer with the new regulatory cost schedule?

The cost of palliative care is largely underestimated in the cur-rent French health care fund cost schedule (PMSI). With the new schedule (T2A) it is primordial for health care providers to op-timize the different care practices which determine their finan-cial resources. The present study confirms the serious underes-timation of the cost of palliative care and presents a multiple-criteria analysis tool, the UDSMA grid, for better quantifying palliative care activities. This tool is proposed to improve use and fix limits.

Key-words:

palliative care, cost schedule, PMSI, activity audit.

Résumé

L’activité en soins palliatifs est notoirement sous-évaluée par le PMSI. Or, avec l’arrivée de la tarification à l’activité (T2A), la valorisation optimale des différentes activités de soins devient primordiale dans un établissement de santé car elle conditionne directement son financement. Cette étude confirme l’importante sous-évaluation de l’activité en soins palliatifs par le PMSI et présente un outil d’analyse multicritères, la grille UDSMA, qui permet de mieux quantifier cette activité. Elle en propose une amélioration et fixe ses limites d’utilisation.

Mots clés :

soins palliatifs, PMSI, évaluation d’activité.

Introduction

L’organisation de soins lourds ayant un impact enterme de coûts (utilisation de médicaments onéreux, inter-vention d’une équipe pluriprofessionnelle, prolongationdes durées de séjour, évaluation continue de l’évolution dela maladie, des symptômes, des complications des traite-ments, adaptation à l’angoisse de la personne soignée, desproches et des professionnels…) concerne une majorité depatients pour lesquels le projet de soins est palliatif. Lavalorisation de l’activité en soins palliatifs est donc pri-mordiale, en particulier dans un Centre Régional de LutteContre le Cancer.

L’évaluation et l’analyse de l’activité des établisse-ments de santé publics et privés sont réalisées par le PMSI,introduit par la loi du 31 juillet 1991. Cette analyse estfondée sur le recueil systématique et le traitement auto-matisé d’une information médico-administrative minimaleet standardisée, contenue dans le Résumé de Sortie Stan-

dardisé (RSS). Les données collectées font ensuite l’objetd’un classement en un nombre volontairement limité degroupes de séjours (les Groupes Homogènes de Malades,GHM) présentant une similitude médicale et un coût voi-sin. Or, comme aux États-Unis, cette classification des sé-jours hospitaliers (adaptation de la classification améri-caine des

Diagnosis Related Groups

, DRGs), conçueinitialement comme outil d’analyse de l’activité, est utili-sée progressivement depuis le 1

er

janvier 2004 pour procé-der au paiement forfaitaire de ces séjours hospitaliers. Cesystème de tarification à l’activité (dénommé T2A) estamené à remplacer les deux systèmes de financement quiexistaient pour les structures de soins publiques (dotationglobale) et privées (tarification à la journée et forfait liéaux actes réalisés).

Avec ce nouveau système, l’activité en soins palliatifsest censée être mieux identifiée avec la création d’unGroupe Homogène de Malades (GHM) spécifique aux soinspalliatifs, et mieux financée grâce à deux tarifs ou Groupes

Frasie JM, Frasie V, Theobald S. Comment améliorer l’évaluation de l’activité en

soins palliatifs dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer à l’arrivée de

la T2A ? Étude au Centre Paul Strauss de Strasbourg. Med Pal 2005; 4: 237-244.

Adresse pour la correspondance :

Jean-Michel Frasie, UGECAM d’Alsace, 10 b, avenue Baumann, BP 70104, 67403

Illkirch Cedex.

e-mail : [email protected]

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Homogènes de Séjour (GHS) différents selon l’existenceou non de structures spécialisées en soins palliatifs au seinde l’établissement. L’activité des Équipes Mobiles de SoinsPalliatifs sera budgétisée à part, dans le cadre des Missionsd’Intérêt Général et des Aides à la Contractualisation (MI-GAC).

Dans ce contexte, il faut constater que l’activité ensoins palliatifs est notoirement sous-évaluée par le PMSI.

En 1999, deux études ont été réa-lisées en Côte d’Or [1] et à la Pi-tié-Salpêtrière [2] pour quantifierun jour donné les patients rele-vant de soins palliatifs. À la Pitié-Salpêtrière, les « patients atteintsde maladie évolutive mettant enjeu le pronostic vital, en phaseavancée ou terminale », étaient13 %. Dans les hôpitaux de Côted’Or, les « patients souffrant de

maladies graves, chroniques et évolutives » étaient 31 %(14,5 % encore en traitement curatif, 6,7 % en traitementsymptomatique sans pronostic vital réservé à moins de3 mois et 9,7 % avec un pronostic vital réservé à moinsde 3 mois quel que soit le traitement). Daniel d’Hérouvilleen concluait que le chiffre des patients véritablement ensoins palliatifs dans ce type de structures devait se situerentre 13 et 16 % [3]. Or, la base nationale PMSI (dispo-nible sur le site www.atih.sante.fr) fait état en 1999 pourle court-séjour de 0,09 % de séjours (ou RSA) ayant unDiagnostic Principal Z515 de soins palliatifs (0,19 % en2001), et pour le moyen-séjour de 2,2 % de journées ap-partenant à la CMC 20 « soins palliatifs » (3 % en 2002).

L’objectif de cette étude est d’évaluer l’activité en soinspalliatifs au Centre Paul Strauss par l’utilisation d’unegrille d’analyse multicritères en faisant l’hypothèse quecette activité est sous-évaluée par le PMSI.

Matériel et méthode

Il s’agit d’une étude rétrospective qui s’appuie surl’analyse des dossiers des personnes hospitalisées au Cen-tre Paul Strauss durant le premier semestre 2003 dont lesséjours dépassent 8 jours en médecine et 17 jours en chi-rurgie (délais à partir desquels la codification PMSI Z515valorise l’activité palliative si elle est le diagnostic prin-cipal), mais aussi les séjours clôturés par le décès de lapersonne.

L’outil de recueil de données multicritères utilisé pourrepérer l’activité en soins palliatifs durant ces séjours estune adaptation de la grille UDSMA de l’Union Départe-mentale des Sociétés Mutualistes de l’Aveyron développée

au début des années 1990 par le docteur Thierry Marmetdans le cadre d’une expérience de soins palliatifs en HAD.Celui-ci s’était inspiré des critères d’admission dansl’Unité de Soins Palliatifs de l’Institut Mutualiste Mont-souris. Cette grille a été utilisée en 2000 pour une enquête— un jour donné — destinée à connaître la populationpouvant relever des soins palliatifs au sein d’une région(ARH de Champagne-Ardenne, soins palliatifs, cahier deplanification sanitaire, 2000). Elle a servi aussi pour fon-der les critères d’inclusion dans des réseaux de soins pal-liatifs en Midi-Pyrénées et dans les Hautes-Pyrénées.

Elle consiste à recueillir trois catégories d’informa-tions :

1. Informations sur les diagnostics médicaux :• maladie cancéreuse évoluée : plus de projet curatif ;• pathologie aiguë potentiellement mortelle non

curable ou multiple : hémorragies, AVC intercurrents, per-turbations biologiques ou métaboliques vitales, anémie ouaplasie, septicémie ou choc septique, occlusions, désordreshydro-électrolytiques) ;

• insuffisance fonctionnelle sévère et non curable :pulmonaire, cardiaque, hépatique, rénale…

2. Informations sur les besoins et les symptômes rele-vant de soins :

• douleurs persistantes nécessitant le recours auxantalgiques majeurs ;

• symptômes majeurs nécessitant des soins et unethérapeutique adaptée et/ou ne pouvant être contrôlés quepar prothèse (trachéotomie, urétérostomie, gastrosto-mie…) ;

• déchéance corporelle : plaies importantes nécrosées,escarres multiples, cachexie, incontinence totale.

3. Informations sur l’organisation pluriprofessionnellede la prise en charge :

• Souffrance psychologique majeure du patient et/oude la famille en rapport avec le pronostic (travail de deuil)et/ou demande d’euthanasie ;

• Situation amenant un questionnement éthique :prise de décision difficile, conduite thérapeutique lors durefus de soins, maintien en vie, douleur et souffrance ;

• Perte d’autonomie importante et durable : incapa-cité à accomplir les gestes de la vie quotidienne.

Du point de vue méthodologique, les étapes succes-sives du travail ont été les suivantes :

– déterminer les informations à recueillir pour répondreaux items et sur quels supports du dossier patient les trou-ver

(tableau I)

;– établir une grille pour recueillir ces données qui

pourrait servir ultérieurement de guide pour les cliniciens

(tableau II)

;– recueillir les données et classer les séjours (la pré-

sence d’au moins un des items de chaque catégorie d’in-formations classe le séjour en soins palliatifs) ;

L’outil de recueil de données multicritères est une adaptation de la grille UDSMA.

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Jean-Michel Frasie

et al.

Tableau I : Informations à recueillir et documents à consulter pour répondre aux items.Table I: Information to collect and documents to consult to respond to the grid items.

Items à renseigner Informations à rechercher Documents à consulter

1. Diagnostics médicaux

Maladie cancéreuse évoluée Cancer avec évolution loco-régionaleCancer avec évolution métastatique

Observation médicaleCourriers

Pathologie aiguë HémorragiesAVC intercurrentsPerturbations biologiques ou métaboliques vitalesAnémie ou aplasieSepticémie ou choc septiqueOcclusionsDésordres hydro-électrolytiques

Idem

Insuffisance fonctionnelle Insuffisance pulmonaire, cardiaque, hépatique, rénale…

Idem

2. Besoins et symptômes relevant de soins

Douleurs persistantes Prescription d’opioides Feuille de températureObservation médicaleFeuille de transmissions cibléesFiches de traitement

Symptômes majeurs Oxygénothérapie pour dyspnéeAspiration digestive pour occlusionSNG ou NP pour aphagiePerfusion pour vomissements ou autre symptômePonction d’asciteSUD ou pyélostomie pour anurieNeuroleptiques pour agitationMise en place de prothèse (trachéotomie, urétérostomie, gastrostomie…)

Feuille de températureObservation médicaleFeuille de transmissions ciblées

Déchéance corporelle Plaies importantes nécroséesEscarres multiplesCachexieIncontinence totale

Observation médicaleFeuille de transmissions ciblées

3. Organisation pluriprofessionnelle de la prise en charge

Souffrance psychologique Travail de deuilDemande d’euthanasie

Observation médicaleFeuille de transmissions ciblées

Questionnement éthique Prise de décision difficileConduite thérapeutique lors du refus de soinsMaintien en vieDouleur et souffrance

Observation médicaleFeuille de transmissions ciblées

Perte d’autonomie Stade OMS 4Toilette complète et/ou au lit+ Aide totale à l’alimentation+ Latéralisation de confort

au moins 3 jours sur 7au moins une semaine

Observation médicale-courrierFeuille hebdomadaire de soins d’entretien de la vie

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Tableau II : Grille pour recueillir les données.Table II: Data collection chart.

Items à renseigner Informations à rechercher

Maladie cancéreuse évoluée ? Cancer avec évolution loco-régionaleCancer avec évolution métastatique

OUI/NON

Pathologie aiguë potentiellement mortelle, non curable ou multiple ?

Hémorragies, AVC intercurrentsPerturbations biologiques ou métaboliques vitalesAnémie ou aplasieSepticémie ou choc septiqueOcclusionsDésordres hydro-électrolytiques

OUI/NON

Insuffisance fonctionnelle sévère et non curable ? Insuffisance pulmonaire, cardiaque, hépatique, rénale… OUI/NON

1. Diagnostics médicaux (répondre OUI si vous avez répondu au moins une fois OUI ci-dessus)

OUI/NON

Douleurs persistantes ? Prescription d’opioides OUI/NON

Symptômes majeurs nécessitant des soins ? Oxygénothérapie pour dyspnéeAspiration digestive pour occlusionSNG ou NP pour aphagiePerfusion pour vomissements ou autre symptômePonction d’asciteSUD ou pyélostomie pour anurieNeuroleptiques pour agitationMise en place de prothèse (trachéotomie, urétérostomie, gastrostomie…)

OUI/NON

Déchéance corporelle ? Plaies importantes nécroséesEscarres multiplesCachexieIncontinence totale

OUI/NON

2. Besoins et symptômes majeurs (répondre OUI si vous avez répondu au moins une fois OUI ci-dessus)

OUI/NON

Souffrance psychologique majeure ? Travail de deuilDemande d’euthanasie

OUI/NON

Questionnement éthique ? Prise de décision difficileConduite thérapeutique lors du refus de soinsMaintien en vieDouleur et souffrance

OUI/NON

Perte d’autonomie importante et durable ? Stade OMS 4Toilette complète et/ou au lit+ Aide totale à l’alimentation+ Latéralisation de confort

au moins 3 jours sur 7au moins une semaine

OUI/NON

3. Organisation pluriprofessionnelle de la prise en charge

(répondre OUI si vous avez répondu au moins une fois OUI ci-dessus)

OUI/NON

Consigne de codage : si la réponse aux 3 items est OUI, alors le séjour est présumé relever de soins palliatifs et doit donc être codé Z515 en Diagnostic Principal.

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et al.

– comparer ce classement à celui obtenu avec la co-dification PMSI Z 515 en DP effectuée par les Technicien-nes de l’Information Médicale au DIM (qui suivent les re-commandations édictées par la FNCLCC [4]).

Outre les données de la grille, d’autres informations ontété recueillies :

– la durée de séjour dans l’établissement ;– le mode de sortie « décès » ;– la date du décès éventuel ;– l’intervention éventuelle de l’EMSP du CPS ;– l’intervention éventuelle des autres professionnels

de santé transversaux (kinésithérapeute, diététicienne,assistante sociale, psychologue, psychiatre) ;

– la réalisation éventuelle d’un traitement spécifiqueanti-cancéreux (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) ;

– la formalisation éventuelle du projet de soins (pal-liatif ou curatif) dans le dossier.

Toutes les informations ont été extraites des dossiersdes patients par le Docteur Jean-Michel Frasie.

Résultats

L’étude a concerné 177 séjours du premier semestre2003 dépassant 8 jours (17 en chirurgie) correspondant à140 patients différents, 157 en médecine (correspondant à122 patients), 14 en chirurgie (correspondant à 12 pa-tients), 2 en réanimation (correspondant à 2 patients),auxquels s’ajoutent 4 séjours de moins de 8 jours (corres-pondant à 4 patients) se terminant par le décès du patient.

L’étude a été réalisée sur 175 séjours, le dossier d’unpatient dont 2 séjours étaient concernés n’ayant pu êtreanalysé.

Le codage PMSI réalisé par les Techniciennes de l’In-formation Médicale de l’établissement a classé 50 séjours(soit 28 %) en soins palliatifs (codés Z515 en DiagnosticPrincipal). L’utilisation de l’outil présenté a permis d’iden-tifier 94 séjours (soit 53,7 %) en soins palliatifs (dénommésséjours SP+)

(tableau III)

.Six séjours codés Z515 ne remplissaient pas les trois

critères de SP : ils concernaient des patients tous atteints

de maladies cancéreuses évoluées et symptomatiques, maischez lesquels la perte d’autonomie ne pouvait être mise enévidence.

Cinquante séjours SP+ avaient un DP différent deZ515 : 23 étaient motivés par une autre pathologie noncancéreuse, 17 étaient motivés par un symptôme

(tableau IV)

.Le recueil des informations autres que les données de

la grille a donné les résultats suivants :– la distribution des durées de séjour dans l’établisse-

ment montre que les séjours de plus de 30 jours sont 34 %SP- et 65 % SP+

(tableau V)

;– le mode de sortie « décès » a concerné une majorité

des séjours SP+

(tableau VI)

;– les décès survenant dans le mois qui suit l’admission

surviennent également majoritairement au cours ou à lasuite des séjours SP+

(tableau VII)

;– l’intervention de l’Équipe Mobile de Soins Palliatifs

de l’établissement (EMSP) est signalée dans un quart desséjours et dans un tiers des séjours SP+

(tableau VIII)

;– l’intervention des autres professionnels de santé

transversaux est signalée dans les proportions données au

tableau IX

, ce qui correspond à une moyenne de 0,54 pro-fessionnel de santé transversal intervenant par séjour SP-et 0,89 par séjour SP+.

– la réalisation d’un traitement spécifique anti-cancé-reux (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) a concerné

Tableau III : Type de séjour en fonction du Diagnostic Principal.Table III: Type of stay by Principal Diagnosis.

DPZ515 Autre DP Total

Séjours SP+ 44 50 94

Séjours SP- 6 75 81

Total des séjours 50 125 175

Tableau IV : Diagnostic Principal des séjours SP+ non codésZ515.Table IV: Principal diagnosis for SP+ stays not coded Z515.

Code du DP Chapitre CIM Nombre

A Maladies infectieuses 2

C Tumeurs malignes 7

D Autres tumeurs et maladies du sang 1

G Maladies du système nerveux 7

I Maladies de l’appareil circulatoire 1

J Maladies de l’appareil respiratoire 10

K Maladies de l’appareil digestif 1

L Maladies de la peau 1

R Symptômes 17

Z Facteurs influençant sur l’état de santé 3

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46 % des séjours, 50 % des séjours SP- et 41 % des séjoursSP+

(tableau X)

;– la formalisation du projet de soins (palliatifs ou

curatifs) dans le dossier n’a été retrouvée que pour environun tiers des séjours (alors que la quasi-totalité des patientsconcernés avait fait l’objet de décision en Comité de Con-

certation Pluridisciplinaire lors de la prise en charge ini-tiale de leur maladie cancéreuse)

(tableau XI)

.

Discussion

L’objectif de cette étude était d’évaluer l’utilisationd’une grille d’analyse multicritères pour mesurer l’activitéen soins palliatifs au Centre Paul Strauss. La grille est facileà appliquer à condition que les dossiers des patients soient

Tableau V : Distribution des durées de séjour dans l’établissement en fonction du type de séjour.Table V: Distribution of duration of hospital stay by type of stay.

Durée de séjour séjour SP- % SP- séjour SP+ % SP+ Total des séjours

< ou égale à 8 jours* 0 0 % 4 100 % 4

9 à 14 jours 25 51 % 24 49 % 49

15 à 29 jours 34 53 % 30 47 % 64

30 à 59 jours 13 34 % 25 66 % 38

60 à 89 jours 3 50 % 3 50 % 6

> à 90 jours 0 0 % 2 100 % 2

* Seuls sont concernés dans l’étude les séjours se terminant par le décès.

Tableau VI : Mode de sortie « décès » en fonction du typede séjour.Table VI: Discharge coded “death” by type of stay.

séjour SP- séjour SP+ Total des séjours

11/81 (14 %) 56/94 (60 %) 67/175 (38 %)

Tableau VII : Décès survenant dans le mois en fonction dutype de séjour.*Table VII: Death occurring within the month by type of stay.

séjour SP- séjour SP+ Total des séjours

9/39 (23 %) 44/76 (58 %) 53/116 (45 %)

Tableau VIII : Intervention de l’EMSP en fonction du typede séjour.Table VIII: Intervention of palliative care team by type of stay.

séjour SP- séjour SP+ Total des séjours

EMSP- 67 (83 %) 62 (66 %) 129 (74 %)

EMSP+ 14 (17 %) 32 (34 %) 46 (26 %)

Tableau IX : Intervention des autres professionnels de santétransversaux en fonction du type de séjour.Table IX: Intervention of other health care professionals by type of

stay.

séjour SP- séjour SP+

Diététicienne 6/81 (7 %) 3/94 (3 %)

Kinésithérapeute 16/81 (19 %) 31/94 (33 %)

Assistante sociale 4/81 (5 %) 7/94 (7 %)

Psychologue 4/81 (5 %) 6/94 (6 %)

Psychiatre 0/81 (0 %) 5/94 (5 %)

Tableau X : Réalisation d’un traitement spécifique anti-cancéreux en fonction du type de séjour.Table X: Specific anti-cancer treatment by type of stay.

séjour SP- séjour SP+ Total des séjours

41/81 (50 %) 40/94 (41 %) 81/175 (46 %)

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et al.

organisés, classés et renseignés car son remplissage néces-site la recherche de plusieurs informations précises. Le mé-decin DIM, extérieur à la structure, qui l’a utilisé, a dû réa-liser préalablement une analyse du contenu du dossier. Lesinformations à rechercher pour répondre aux critères de lagrille sont suffisamment objectives pour éviter les biais liésà leur interprétation, mises à part celles concernant uneéventuelle souffrance psychologique ou un questionnementéthique rarement formalisées dans les dossiers.

Si les informations pour répondre aux critères 1 et 2(patients atteints de maladies cancéreuses évoluées etsymptomatiques) sont généralement présentes, la perted’autonomie est beaucoup plus difficile à retrouver. Cetterecherche était essentiellement basée sur les feuilles heb-domadaires de soins d’entretien de vie du dossier infirmier,l’observation médicale ne précisant le stade OMS que dans15 % des cas. Les 6 séjours codés Z515 qui n’avaient pasles trois critères de SP et pour lesquels la perte d’autonomiene pouvait être mise en évidence correspondent probable-ment à un défaut de signalement dans le dossier du pa-tient.

L’hypothèse d’une sous-évaluation de cette activité ensoins palliatifs par le PMSI est également confirmée. Lechiffre de séjours de soins palliatifs que nous avons obtenuavec notre grille (94/175, soit 53,7 %) est pratiquement ledouble de celui codé initialement (50/175, soit 28 %). Il estcohérent avec la part que représentent en particulier lesirradiations palliatives dans l’activité d’un service de ra-diothérapie de CRLCC qui va de 30 à 50 % [5].

Malgré une information en 2000 sur l’utilisation ducode Z515 en Diagnostic Principal (et non plus en diagnos-tic associé) pour les situations de soins palliatifs [6] et unemodification du mode de calcul de la valorisation enpoints ISA en 2001 qui renforce cette incitation [7], lerepérage de l’activité soins palliatifs par le PMSI continueà poser problème [8].

Selon la méthodologie de recueil des informations duPMSI, le médecin prenant en charge le patient devrait re-cueillir et hiérarchiser les pathologies ou situations qu’il aprises en charge pendant le séjour, le Service ou Départe-ment d’Information Médicale (DIM) codant les diagnosticsposés. Or, ce médecin a tendance à désigner une pathologieou un symptôme comme Diagnostic Principal plutôt qu’unesituation palliative qu’il considère comme une image déva-

lorisante de son activité (parmi les 50 séjours SP+ quiavaient un DP différent de Z515, 23 étaient motivés parune autre pathologie non cancéreuse, 17 étaient motivéspar un symptôme). C’est le DIM qui en général utilise lecode Z515, en suivant ou non des recommandationscomme celles édictées par la FNCLCC [4]. Or, les techni-ciennes chargées du codage éprouvent des difficultés pouridentifier les séjours en soins palliatifs en raison de l’ab-sence d’informations explicites dans les dossiers.

La difficulté d’évaluation de l’activité de soins pallia-tifs au sein d’un établissement de santé repose en partiesur l’absence de définition précise de celle-ci [9]. Il fautdéjà pouvoir différencier les patients en phase palliativedes patients recevant des soins palliatifs, et les patients enphase palliative des patients en phase terminale [10]. Ence qui concerne la prise en charge palliative, le diction-naire du cancer de la FNCLCC distingue les traitementsanti-cancéreux (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie)qui peuvent être palliatifs et les soins palliatifs proprementdits qui sont des traitements non cancérologiques destinésà soulager le malade de symptômes pénibles [11]. Ces der-niers sont souvent assimilés aux soins de la phase termi-nale. Pour désigner les traitements symptomatiques toutau long de la maladie, des médecins de CRLCC ontd’ailleurs introduit un nouveau terme, les soins de support[12].

Notre travail montre qu’aucun critère simple et uniquene permet d’identifier facilement les séjours qui ont unefinalité palliative :

– ni l’intervention d’une équipe spécialisée (typeEMSP) ;

– ni l’intervention d’une équipe interdisciplinaire re-groupant les professionnels transversaux ;

– ni l’arrêt des traitements spécifiques.La formalisation du projet de soins était trop rare pour

être discriminante. Les séjours « extrêmes » concernentplus souvent les soins palliatifs mais représentent uneinfime partie de l’ensemble des séjours. Le mode de sortie« décès » et le décès rapide dans le mois sont évidemmentplus fréquents dans les séjours de soins palliatifs, maissont plutôt des marqueurs de la phase terminale.

Déjà, dans son bulletin N

°

3 de décembre 1999, lecentre de documentation de l’association François-XavierBagnoud soulignait l’importance de la validation « d’unedéfinition mosaïque » des soins palliatifs qui regarderait àla fois « des critères d’inclusion, le type de population con-cernée, le type de soins prodigués, les objectifs de soin, lesmoyens et les structures mis en œuvre ». Cette propositionde définition qui contiendrait donc cinq éléments auraitpour conséquence le fait qu’un élément isolé ne suffiraitpas pour parler de soins palliatifs.

En 2000, la mission PMSI, à l’initiative de la SFAP,proposait une définition des soins palliatifs qui soit adap-

Tableau XI : Formalisation du projet de soins en fonctiondu type de séjour.Table XI: Formalization of the health care project by type of stay.

séjour SP- séjour SP+ Total des séjours

26/81 (32 %) 36/94 (38 %) 62/175 (35 %)

Médecine palliative

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N° 5 – Octobre 2005

Comment améliorer l’évaluation de l’activité en soins palliatifs dans un Centre Régional de Lutte Contre le Cancer à l’arrivée de la T2A ? Étude au Centre Paul Strauss de Strasbourg

É T U D E O R I G I N A L E

tée au PMSI. Complétant celle donnée par l’article 1er dela loi du 9 juin 1999

1

(qui fixe le type de soins prodiguéset les moyens mis en œuvre), elle précisait le type de po-pulation concernée

:

« les personnes malades dont l’étatrequiert des soins palliatifs sont les personnes atteintes demaladie grave, évolutive, mettant en jeu le pronostic vital,en phase avancée ou terminale (…) » [13].

La grille que nous avons utilisée pour définir un séjourde soins palliatifs comporte trois éléments : le type de po-pulation concerné, le type de soins prodigués et les moyensmis en œuvre (organisation pluriprofessionnelle). Manquel’élément primordial qui est le projet de soins du patient.Nous n’avons malheureusement pas pu l’évaluer, ce rensei-gnement manquant dans 65 % des dossiers examinés.

Conclusion

Cette étude confirme la sous-évaluation de l’activitéen soins palliatifs par le PMSI.

Elle présente un outil qui permet de repérer l’activitéen soins palliatifs de l’ensemble des équipes hospitalières(et pas seulement des équipes spécialisées) de façon plusobjective, en se basant sur des critères multiples (le typede population concernée, le type de soins prodigués et lesmoyens mis en œuvre).

Les auteurs proposent d’améliorer cet outil en ajoutantun quatrième critère qui est le projet de prise en chargedu patient. Le facteur limitant est l’absence fréquente decette information dans le dossier du patient.

Les auteurs insistent sur le fait que la validité de cetype d’outil repose sur un recueil d’informations fiables etexhaustives, et donc sur la qualité du dossier du patient.

Références

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In

8

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1. Définition des soins palliatifs selon l’article 1er de la loi du 9 juin 1999 :« Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipeinterdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur,à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personnemalade et à soutenir son entourage ».