Colocalisation Euromed - p 18-19 - LA TRIBUNE n°70

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!"#"$%# LA TRIBUNE - VENDREDI 6 DÉCEMBRE 2013 - N O 70 - WWW.LATRIBUNE.FR 18 I À Paris comme à Marseille, à Rabat comme à Beyrouth ou encore à Tunis et Istanbul, de col- loques en confé- rences, Jean-Louis Guigou et Radhi Meddeb s’emploient depuis des années à promouvoir le concept de colocalisation en Euro-Méditerra- née. Tant pour le délégué général que pour le président de l’Institut de prospective économique du monde méditerranéen (Ipemed, Paris), la co- localisation est une idée simple, qui s’articule en quatre volets : abandon- ner l’approche obsolète qui consiste à considérer les entreprises du Sud comme de simples sous-traitants; les faire monter en gamme en parta- geant les savoir-faire et la chaîne de valeur entre entreprises partenaires du Nord et celles du Sud; (re)devenir compétitif ensemble sur le marché mondial et y (re)conquérir des parts de marché. Avec en toile de fond, la création d’emplois, au nord comme au sud de la Méditerranée… UNE IDÉE VALIDÉE PAR L’ÉPREUVE DU RÉEL Trop beau pour être vrai? En véri- té, cette idée bénéficie déjà d’une « preuve de concept » vieille de cin- quante ans! Ce sont les Japonais qui, les premiers, dès les années 1960, ont amorcé la colocalisation avec la Corée du Sud, Taïwan, Hong Kong et Singa- pour. Cette coopération, en vingt ans, a abouti au décollage économique des quatre « dragons asiatiques ». En Europe, la colocalisation est une pratique banale des entrepreneurs allemands avec les pays d’Europe centrale et orientale (Peco). C’est notamment le cas des grands groupes automobiles : ils font produire l’es- sentiel de leurs grosses berlines à moindre coût dans les Peco, avant de les réimporter chez eux, puis de les réexporter estampillées du label made in Germany, en maximisant leurs marges. Ainsi l’Allemagne réim- porte-t-elle jusqu’à 46% de la valeur ajoutée des biens d’équipement pro- duits dans son « hinterland », selon une étude de l’Ipemed. Mais, si l’Allemagne a développé massivement cette stratégie depuis la chute du mur de Berlin en 1989, et plus encore depuis l’élargissement est-européen de 2004, en France aus- si certaines entreprises ont engagé cette démarche. C’est le cas de Safran, qui a créé une première coentreprise avec Royal Air Maroc en l’an 2000, pour œuvrer dans la maintenance des moteurs d’avions. Dans son sillage, d’autres grandes entreprises et sous- traitants du secteur ont suivi. Aujourd’hui, « une centaine d’entre- prises de l’aéronautique sont installées au Maroc. Elles réalisent un chire d’af- faires annuel d’1 milliard d’euros et ont généré près de 9000 emplois. Le Maroc est devenu un acteur dans la chaîne mondiale de production de cette indus- trie », relevait lors d’une table ronde, samedi 30 novembre à Paris, Chakib Benmoussa, ambassadeur du Maroc en France. Autre exemple, plus récent, celui du site Renault de Tanger. Opération- nel depuis février 2012, destiné à répondre à la demande locale et in- ternationale – surtout africaine – de modèles d’entrée de gamme, il de- vrait produire 340000 voitures par an dès 2014. Avec 5000 emplois directs actuels et 30000 indirects attendus, c’est la plus grande usine d’Afrique, qui contribue en bonne part au suc- cès de la zone franche industrielle de Melloussa, à 30 km du port de Tan- ger Med. À la demande des autorités marocaines, un Institut de formation des métiers de l’industrie automo- bile, géré par Renault Tanger, a aussi été créé sur place, afin de contribuer à la montée en gamme des ressources humaines locales. Cette question de la formation peut d’ailleurs être considérée comme un marqueur de l’évolution du concept de colocalisation vers celui de copro- duction. On notera enfin que le site Renault de Tanger est à la fois « zéro carbone » et « zéro rejet liquide indus- triel », ce qui lui a valu de remporter le Prix 2011 de la production des « Sus- tainable Energy Europe Awards » or- ganisés par l’Union européenne. Une expertise qui pourra être exportée, voire réimportée… en France. UN DISCOURS POLITIQUE SANS COUAC Si la colocalisation est donc déjà une réalité, c’est en revanche le consen- sus nouveau qui émerge à son sujet entre politiques, universitaires et entrepreneurs qui retient aujourd’hui l’attention. François Hollande, en vi- site d’État au Maroc en avril dernier, évoque à maintes reprises la « coloca- lisation industrielle ». Devant le Parlement marocain, il déclare : « La France sera au rendez- vous de ces réalisations [de dévelop- pement du Maroc, ndlr]. Nous allons le faire avec une idée nouvelle que nous portons ensemble, la colocalisation in- dustrielle. Ce qui peut s’énoncer ainsi : ce qui est bon pour le Maroc sera bon pour la France. Les activités créées au Maroc seront bonnes pour l’emploi en France… » Propos réarmés, en substance, lors de ses visites o- cielles en Algérie (décembre 2012), et en Tunisie ( juillet 2013). Il y a un an presque jour pour jour, le 6 décembre 2012, lors du colloque annuel EMCC (Euro-Mediterranean Competitiveness Council, également organisateur, avec l’Ipemed, du col- loque parisien du 5 décembre 2013, dédié à la colocalisation, et dont La Tribune est partenaire), le mi- nistre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, avait déclaré son enthousiasme pour le concept de « coproduction ». Il avait précisé qu’avec Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur, ils cherchaient ensemble des « filières pour organiser le gagnant-gagnant en Méditerranée » (lire encadré). Quelques jours plus tard, le 12 dé- cembre 2012, le Premier ministre, Jean-Marc Aryrault, à son tour en voyage ociel au Maroc, n’était pas en reste, armant à Casablanca devant un parterre d’entrepreneurs qu’« une colocalisation industrielle, si elle résulte d’une analyse fine de la valeur ajoutée sur toute la chaîne de production et les avantages compétitifs de chaque site, peut être bénéfique et soutenir l’activité des deux côtés de la Méditerranée ». Mais du côté des politiques, c’est sans doute la présidente de la com- mission des Aaires étrangères de l’Assemblée nationale qui pose le mieux le débat. Élisabeth Guigou développe volontiers un plaidoyer argumenté et explicite : « La coloca- !"# %&'&%(')#(*)&+#, -&./'" 0(0+(+*10(0+(+* 2&34 '5634&2" "* '( 78.)*"44(+8" Politiques, chefs d’entreprise, universitaires… ils sont de plus en plus nombreux à considérer que la colocalisation entre les deux rives de la Méditerranée est l’une des voies d’avenir pour retrouver la compétitivité et créer des emplois, au Nord comme au Sud. Pas si utopique ! La preuve. Sur le parking du port marocain de Tanger Med, des voitures produites par le nouveau site Renault Tanger – plus grande usine d’Afrique – prêtes à être embarquées pour l’export. © FADEL SENNA/AFP IDÉES !"#$%& ()*+,- RÉDACTEUR EN CHEF ÉDITION AUTEUR DU BLOG « EUROMED » SUR LATRIBUNE.FR © E.M. @alfredmignot « Néo-industrialiser » la France « Notre mission, c’est de favoriser l’écosystème permettant à des entreprises des deux rives de mieux se connaître, et si possible de s’allier », relève Bruno Bonnell, le célèbre cofondateur d’Infogrames, nommé par la ministre du Commerce extérieur fédérateur de la filière télécoms et numérique « Mieux communiquer ». « C’est aussi ainsi, ajoute-t-il, que nous réussirons à “néo-industrialiser” la France. » L’effet d’émulation Cofondateur de Finances & Conseil Méditerranée, le consultant marseillais Christian Apothéloz s’en est rendu compte lors d’un récent séjour en Algérie : « Prévu pour novembre 2014, le démarrage de l’usine Renault d’Oran a un grand effet d’émulation. Les entrepreneurs locaux se mobilisent déjà, car ils veulent être à la hauteur de cette opportunité de devenir des fournisseurs de l’automobiliste français. » Les milliards de l’avenir La colocalisation ne saurait se développer sans les financements nécessaires. Selon la BEI, les besoins des pays sud-méditerranéens pour les dix prochaines années s’élèvent à 250 milliards d’euros : 100 pour l’énergie, 110 pour l’urbanisme, 20 pour la logistique. Plus 20 milliards de soutien aux entreprises, dont on espère la création des… 50 millions d’emplois nécessaires à la région, d’ici à 2020.

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  • !"#"$%#LA TRIBUNE - VENDREDI 6 DCEMBRE 2013 - NO 70 - WWW.LATRIBUNE.FR

    18 I

    Paris comme Marseille, Rabat comme Beyrouth ou encore Tunis et Istanbul, de col-loques en conf-rences, Jean-Louis Guigou et Radhi

    Meddeb semploient depuis des annes promouvoir le concept de colocalisation en Euro-Mditerra-ne. Tant pour le dlgu gnral que pour le prsident de lInstitut de prospective conomique du monde mditerranen (Ipemed, Paris), la co-localisation est une ide simple, qui sarticule en quatre volets : abandon-ner lapproche obsolte qui consiste considrer les entreprises du Sud comme de simples sous-traitants!; les faire monter en gamme en parta-geant les savoir-faire et la chane de valeur entre entreprises partenaires du Nord et celles du Sud!; (re)devenir comptitif ensemble sur le march mondial et y (re)conqurir des parts de march. Avec en toile de fond, la cration demplois, au nord comme au sud de la Mditerrane

    UNE IDE VALIDE PAR LPREUVE DU RELTrop beau pour tre vrai!? En vri-t, cette ide bnficie dj dune preuve de concept vieille de cin-quanteans!! Ce sont les Japonais qui, les premiers, ds les annes 1960, ont amorc la colocalisation avec la Core du Sud, Tawan, Hong Kong et Singa-pour. Cette coopration, en vingtans, a abouti au dcollage conomique des quatre dragons asiatiques .

    En Europe, la colocalisation est une pratique banale des entrepreneurs allemands avec les pays dEurope centrale et orientale (Peco). Cest notamment le cas des grands groupes automobiles : ils font produire les-sentiel de leurs grosses berlines moindre cot dans les Peco, avant de les rimporter chez eux, puis de les rexporter estampilles du label made in Germany, en maximisant leurs marges. Ainsi lAllemagne rim-porte-t-elle jusqu 46!% de la valeur ajoute des biens dquipement pro-duits dans son hinterland , selon une tude de lIpemed.Mais, si lAllemagne a dvelopp massivement cette stratgie depuis la chute du mur de Berlin en 1989, et plus encore depuis llargissement est-europen de 2004, en France aus-si certaines entreprises ont engag cette dmarche. Cest le cas de Safran, qui a cr une premire coentreprise avec Royal Air Maroc en lan 2000, pour uvrer dans la maintenance des moteurs davions. Dans son sillage, dautres grandes entreprises et sous-traitants du secteur ont suivi. Aujourdhui, une centaine dentre-prises de laronautique sont installes au Maroc. Elles ralisent un chiffre daf-faires annuel d1milliard deuros et ont gnr prs de 9#000emplois. Le Maroc est devenu un acteur dans la chane mondiale de production de cette indus-trie , relevait lors dune table ronde, samedi 30 novembre Paris, Chakib Benmoussa, ambassadeur du Maroc en France.Autre exemple, plus rcent, celui du site Renault de Tanger. Opration-nel depuis fvrier 2012, destin rpondre la demande locale et in-ternationale surtout africaine de modles dentre de gamme, il de-vrait produire 340!000voitures par an

    ds 2014. Avec 5!000emplois directs actuels et 30!000 indirects attendus, cest la plus grande usine dAfrique, qui contribue en bonne part au suc-cs de la zone franche industrielle de Melloussa, 30 km du port de Tan-ger Med. la demande des autorits marocaines, un Institut de formation des mtiers de lindustrie automo-bile, gr par Renault Tanger, a aussi t cr sur place, afin de contribuer la monte en gamme des ressources humaines locales.Cette question de la formation peut dailleurs tre considre comme un marqueur de lvolution du concept de colocalisation vers celui de copro-duction. On notera enfin que le site Renault de Tanger est la fois zro carbone et zro rejet liquide indus-triel , ce qui lui a valu de remporter le Prix 2011 de la production des Sus-tainable Energy Europe Awards or-ganiss par lUnion europenne. Une expertise qui pourra tre exporte, voire rimporte en France.

    UN DISCOURS POLITIQUE SANS COUACSi la colocalisation est donc dj une ralit, cest en revanche le consen-sus nouveau qui merge son sujet entre politiques, universitaires et entrepreneurs qui retient aujourdhui lattention. Franois Hollande, en vi-site dtat au Maroc en avril dernier, voque maintes reprises la coloca-lisation industrielle .Devant le Parlement marocain, il dclare : La France sera au rendez-vous de ces ralisations [de dvelop-pement du Maroc, ndlr]. Nous allons

    le faire avec une ide nouvelle que nous portons ensemble, la colocalisation in-dustrielle. Ce qui peut snoncer ainsi : ce qui est bon pour le Maroc sera bon pour la France. Les activits cres au Maroc seront bonnes pour lemploi en France Propos raffirms, en substance, lors de ses visites offi-cielles en Algrie (dcembre 2012), et en Tunisie ( juillet 2013).Il y a un an presque jour pour jour, le 6 dcembre 2012, lors du colloque annuel EMCC (Euro-Mediterranean Competitiveness Council, galement organisateur, avec lIpemed, du col-loque parisien du 5 dcembre 2013, ddi la colocalisation, et dont La Tribune est partenaire), le mi-nistre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, avait dclar son enthousiasme pour le concept de coproduction . Il avait prcis quavec Nicole Bricq, ministre du Commerce extrieur, ils cherchaient ensemble des filires pour organiser le gagnant-gagnant en Mditerrane (lire encadr).Quelques jours plus tard, le 12 d-cembre 2012, le Premier ministre, Jean-Marc Aryrault, son tour en voyage officiel au Maroc, ntait pas en reste, affirmant Casablanca devant un parterre dentrepreneurs qu une colocalisation industrielle, si elle rsulte dune analyse fine de la valeur ajoute sur toute la chane de production et les avantages comptitifs de chaque site, peut tre bnfique et soutenir lactivit des deux cts de la Mditerrane .Mais du ct des politiques, cest sans doute la prsidente de la com-mission des Affaires trangres de lAssemble nationale qui pose le mieux le dbat. lisabeth Guigou dveloppe volontiers un plaidoyer argument et explicite : La coloca-

    !"#$%&'&%(')#(*)&+#,$-&./'"$0(0+(+*10(0+(+*$2&34$'5634&2"$"*$'($78.)*"44(+8"Politiques, chefs dentreprise, universitaires ils sont de plus en plus nombreux considrer que la colocalisation entre les deux rives de la Mditerrane est lune des voies davenir pour retrouver la comptitivit et crer des emplois, au Nord comme au Sud. Pas si utopique ! La preuve.

    Sur le parking du port marocain de Tanger Med, des voitures produites par le nouveau site Renault Tanger plus grande usine dAfrique prtes tre embarques pour lexport. FADEL SENNA/AFP

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    No-industrialiser la France Notre mission, cest de favoriser lcosystme permettant des entreprises des deux rives de mieux se connatre, et si possible de sallier , relve Bruno Bonnell, le clbre cofondateur dInfogrames, nomm par la ministre du Commerce extrieur fdrateur de la filire tlcoms et numrique Mieux communiquer . Cest aussi ainsi, ajoute-t-il, que nous russirons no-industrialiser la France.

    Leffet dmulationCofondateur de Finances & Conseil Mditerrane, le consultant marseillais Christian Apothloz sen est rendu compte lors dun rcent sjour en Algrie : Prvu pour novembre 2014, le dmarrage de lusine Renault dOran a un grand effet dmulation. Les entrepreneurs locaux se mobilisent dj, car ils veulent tre la hauteur de cette opportunit de devenir des fournisseurs de lautomobiliste franais.

    Les milliards de lavenirLa colocalisation ne saurait se dvelopper sans les financements ncessaires. Selon la BEI, les besoins des pays sud-mditerranens pour les dix prochaines annes slvent 250 milliards deuros : 100 pour lnergie, 110 pour lurbanisme, 20 pour la logistique. Plus 20 milliards de soutien aux entreprises, dont on espre la cration des 50 millions demplois ncessaires la rgion, dici 2020.

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    lisation industrielle se veut un modle dchanges quitable, o les entreprises des pays industrialiss dlguent des squences de production de biens inter-mdiaires des pays en dveloppement. Pour ces derniers, cela cre de lemploi pour des ingnieurs et des techniciens. Les entreprises du Nord gardent quant elles les fonctions de conception et dassemblage et baissent substantielle-ment leurs cots de production Cest un concept porteur fond sur la coop-ration gagnant-gagnant entre le Nord et le Sud. Cest un modle davenir, car il garantit le dveloppement. Une analyse positive que Michel Vauzelle, dput et prsident de la Rgion Provence-Alpes-Cte dAzur et militant de longue date pour le partenariat renforc avec le Sud , partage et expose lui aussi dans son rapport sur La Mditerrane des projets , remis Franois Hollande le 9 octobre dernier.Avant mme cependant que nmerge ce collectif de la parole politique, ce sont les chefs dentreprise et cono-mistes membres ou proches de lIpe-med et de lEMCC qui, les premiers, avaient affirm leur conviction. Ainsi, en dcembre 2010, lors de la confrence de lancement de lEM-CC, qui avait runi une centaine de chefs dentreprise Paris, Grard Mestrallet, PDG de GDF-Suez et prsident de lEMCC, avait lanc : Lavenir de lEurope, cest la Mditer-rane. Et lavenir des pays du Sud passe par un ancrage lEurope Notre am-bition est de travailler une meilleure rpartition de la valeur ajoute entre les rives de la Mditerrane.

    Xavier Beulin, prsident de Sofipro-tol et de la FNSEA, qui milite depuis longtemps pour une coopration eu-romed consolide , voudrait aller de lavant plus vite et plus concr-tement : Face la pousse dmogra-phique et aux besoins agroalimentaires, il est clair que nous avons un intrt commun dvelopper nos complmen-tarits. Je crois quon ne peut plus se contenter de faire du commerce, nous devons laborer des projets fdrateurs. Par exemple, crer un label mditerra-nen pour certains produits, et dve-lopper une politique dexportation, no-tamment vers lAsie. Je crois aussi quil aurait t utile que lEurope sengage dans un processus damorage dune PAC Euromed, en tendant laccord avec le Maroc dautres pays du Sud. Et dvelopper avec eux une politique sins-pirant des processus de pr-adhsion qui ont t mis en uvre avec les Peco.

    VERS UNE AMBITION PARTAGE ?Du concret, cest ce que rclame galement El Mouhoub Mouhoud, professeur dconomie Paris Dau-phine : Il nous faut sortir du schma de la mise en concurrence froce des sous-traitants. Nous devons produire des modules complets au Sud, et les assembler au Nord. Avec des contrats de sous-traitance long terme, et des stratgies de production et de formation concertes.

    Peut-tre plus ambitieux, lco-nomiste algrien Abderrahmane Mebtoul, professeur et consultant international, considre quant lui que les colocalisations peuvent tre le champ de mise en uvre de toutes les ides innovantes au niveau du bas-sin mditerranen . Mais, plus ra-liste, il tient aussi souligner qu il serait suicidaire pour chaque pays du Maghreb de faire cavalier seul. Lint-gration conomique rgionale est une ncessit historique, estime-t-il. Sans inclusion euromditerranenne, le Maghreb serait bien davantage ballott par les vents des marchs, avec le risque dune marginalisation croissante .Radhi Meddeb, le prsident tuni-sien de lIpemed, conomiste et chef dentreprise, ne dit pas autre chose : Dans un monde o la concurrence mondiale sexacerbe, lEurope et les pays du Sud sont confronts au dfi de leur marginalisation. Le renouveau de la rgion passe par un New Deal qui fonde de nouvelles relations faites de plus de solidarit, de plus de proximit et de plus de complmentarits. Si telle est la vision partage, la rgion en a les moyens. Il faudrait quelle sen donne lambition. Une ambition qui pourrait trou-ver une expression forte ds les 16 et 17 dcembre prochains, lors de la runion Alger du comit inter-gouvernemental franco-algrien et lannonce, par les Premiers ministres respectifs, dun important accord de coopration conomique. Un docu-ment-cadre o, selon le ministre franais du Redressement productif, il sera question de trs gros projets de coproduction industrielle.Q

    Vingt partenariats de lAlliance numrique franco-tunisienne ont t signs le 23 octobre dernier au sige dUbifrance, en prsence de Nicole Bricq, ministre du Commerce extrieur, et de Mongi Marzoug ( sa gauche), ministre tunisien des TIC.

    ENSEMBLE, A MARCHE MIEUXLa France a le savoir-faire mais manque dingnieurs et de techniciens informatiques. La Tunisie en forme 12 000 par an Lobjet de lalliance numrique franco-tunisienne, cest dunir nos capacits et nos efforts pour aller ensemble la conqute des appels doffres en Afrique, mais aussi partout dans le monde On ne saurait tre plus clair que Nicole Bricq, la ministre du Commerce extrieur, qui sexprimait ainsi en prsence de Mongi Marzoug, ministre tunisien des TIC, loccasion de la premire rencontre de lAlliance, le 23 octobre dernier, au sige dUbifrance.De fait, depuis que la structure a t acte en juillet dernier, loccasion de la visite officielle de Franois Hollande en Tunisie, une vingtaine de binmes dentreprises ont dj vu le jour. Plusieurs taient prsentes ce jour-l pour tmoigner de leur succs. Lexemple le plus marquant est celui du prcurseur Cassiopae, diteur franais de logiciels, alli la SSII tunisienne Oxia. Cre il y a trois ans, leur socit commune a remport de nombreux appels doffres en gypte, en Algrie, au Maroc, au Sngal et en Arabie saoudite. En Tunisie, plus de 50 personnes ont t recrutes (sur un total actuel de 250). En France, Cassiopae, qui bnficie dun rseau de plus de 300 experts et partenaires, a multipli par quatre ses effectifs. Le cas de Vermeg, diteur tunisien de logiciels financiers, est lui aussi intressant, car il reprsente un exemple de colocalisation du Sud vers le Nord : la socit a cr une filiale qui compte 50 collaborateurs en France, et va nouer un partenariat avec BSB France (logiciels financiers) pour sattaquer au march europen. La russite rcente du tandem dingnierie numrique constitu entre loprateur franais Adetef et le Centre (tunisien) dtudes et de recherches pour les tlcommunications (CERT) mrite aussi dtre salue. Ensemble, ils ont remport en octobre dernier le lot Numrique du contrat EuropeAid qui donnera lieu des requtes dexpertise par la Commission europenne.Q A.M.

    PLUS SUR LATRIBUNE.frLes colocalisations et les enjeux euromditerra-nens figurent parmi les centres dintrt de La Tribune, comme la montr La Tribune Hebdo n 56, date du 12 juillet 2013. Intitul Lavenir est au Sud , ce numro est entirement consa-cr ces thmatiques. Nos lecteurs abonns peuvent aujourdhui encore en tlcharger la version lectronique intgrale sur latribune.fr. Ils y retrouveront aussi le blog Euromed .

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    www.latribune.fr

    lisabeth Guigou La colocalisation industrielle est un modle davenir.

    PAGE 30La prsidente de la commission des A"aires trangres de lAssemble nationale sengage pour lEuromed.

    Le dtroit de Gibraltar, au soleil levant, vu dAfrique.

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    EUROPE / MDITERRANELAVENIR EST AU SUDEntre rvolutions arabes au Sud et crise conomique au Nord, lavenir parat sombre pour le Bassin mditerranen. Pourtant, les atouts de la rgion sont innombrables. nergie, eau, villes nouvelles, infrastructures, tour dhorizon en douze projets davenir, pour redonner espoir dans lEuromditerrane. PAGES 4 6

    Faisons le rve dune Mditerrane intgre.

    ERIK ORSENNA

    Spcial

    T 2013

    TERRITOIRESMARSEILLE, UNE CAPITALE EN QUTE DE COHRENCE PAGES 14-15

    TRANSPORTS ISTANBUL, LE PLUS GRAND AROPORT DU MONDE PAGE 22

    INFRASTRUCTURESTANGER MED, LE PORT QUI DYNAMISE LE MAROC PAGE 18