Citoyennete democratique dans l'enseignement au Togo

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Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation Edition 2008 EVALUATION DE L'EFFICACITE DE L'ÉDUCATION À LA CITOYENNETÉ DÉMOCRATIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE AU TOGO Chercheurs 1.Tété Enyon Guemadji-Gbedemah, Doctorant en sociologie 2.Amen Kokou Xolali Adzoyi, Doctorant en sciences de l'éducation 3.Maguilouwè Lombo, Maîtrise en anthropologie 4.Koffi Dédégnon Emidé, Doctorant en histoire contemporaine Parrain Yaovi Akakpo, Maître de conférences en Philosophie TOGO Recherche financée par le Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE) avec le soutien du projet Centre d’Excellence Régionale UEMOA et du Ministère des Affaires Etrangères des Pays Bas ROCARE / ERNWACA • Tel: (223) 20 21 16 12, Fax: (223) 20 21 21 15 • BP E 1854, Bamako, MALI Bénin • Burkina Faso • Cameroun • Centrafrique• Côte d’Ivoire • Gambie • Ghana • Guinée • Mali • Mauritanie • Niger • Nigeria • Sénégal • Sierra Leone • Togo www.rocare.org

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Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation

Edition 2008

EVALUATION DE L'EFFICACITE DE L'ÉDUCATION À LA CITOYENNETÉ DÉMOCRATIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT

SECONDAIRE AU TOGO

Chercheurs 1.Tété Enyon Guemadji-Gbedemah, Doctorant en sociologie 2.Amen Kokou Xolali Adzoyi, Doctorant en sciences de l'éducation 3.Maguilouwè Lombo, Maîtrise en anthropologie 4.Koffi Dédégnon Emidé, Doctorant en histoire contemporaine Parrain Yaovi Akakpo, Maître de conférences en Philosophie

TOGO

Recherche financée par le

Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE)

avec le soutien du projet Centre d’Excellence Régionale UEMOA et du Ministère des Affaires Etrangères des Pays Bas

ROCARE / ERNWACA • Tel: (223) 20 21 16 12, Fax: (223) 20 21 21 15 • BP E 1854, Bamako, MALI Bénin • Burkina Faso • Cameroun • Centrafrique• Côte d’Ivoire • Gambie • Ghana • Guinée • Mali • Mauritanie • Niger • Nigeria •

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Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal informés, ils deviennent des sujets. Alfred Sauvy

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Sommaire exécutif

La formation de citoyens a toujours été une préoccupation du système éducatif togolais. Les différentes réformes curriculaires intègrent cette préoccupation. Ainsi dans un passé récent les questions de citoyenneté faisaient-elles l'objet de trois matières distinctes : la leçon de morale, l'éducation civique et politique, et la prévention routière. Les nouveaux programmes en ont fait un seul objet d'enseignement: l’éducation civique et morale en abrégé ECM.

Toutefois, force est de reconnaître que les actes d'incivilités, les dégradations de biens collectifs et de l'environnement et les phénomènes de violence à l'intérieur comme à l'extérieur de l'école sont toujours légion. En même temps qu'ils invitent à s'interroger sur l'efficacité réelle du système éducatif à promouvoir la paix sociale et à prévenir toute détérioration de la cohésion nationale, ils questionnent les programmes d'éducation à la citoyenneté qui sont implémentés dans les écoles.

L’objectif général de la présente étude est d’évaluer l’efficacité qualitative interne de l’éducation à la citoyenneté dans l’enseignement secondaire au Togo ; l'efficacité qualitative interne étant entendu comme le rapport des objectifs visés aux moyens mis en œuvre réellement. Cette étude s’est déroulée de juin à décembre 2008 et a permis d’enquêter dans un échantillon d’établissements secondaires du Togo et d’interviewer des autorités de l’Éducation nationale.

Il en découle que la politique scolaire confère à l’école le rôle d’éducation civique des élèves et qu’il existe des curricula en ce sens. Cependant, dans la réalité, ces curricula ne sont pas rigoureusement déployés et l'ethos scolaire n’offre pas les gages d’une culture démocratique. D’où la conclusion d’une inefficacité qualitative interne de l'enseignement secondaire au Togo dans la mise en œuvre de l'éducation à la citoyenneté démocratique.

Attendre d'un tel système éducatif qu'il forme des citoyens responsables et actifs ne serait qu'un leurre dans la mesure où il se destine plus à l'acquisition de connaissances qu'au développement d'une pensée critique, à la construction d'attitudes et de valeurs appropriées, et à la participation active. Des réformes sont nécessaires tant au niveau macro que micro pour redresser cette situation.

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Sigles, abréviations et acronymes utilisés

BAC 1 Baccalauréat première partie

BAC 2 Baccalauréat deuxième partie

BEP Brevet d’Etudes Professionnelles

BEPC Brevet d’Etudes du Premier Cycle

CEA Collège d’Enseignement Agricole

CEAA Collège d’Enseignement Artistique et Artisanal

CEG Collège d’Enseignement Général

CEPD Certificat d’Etudes du Premier Degré

DFC Direction de la Formation Civique

ECD Education à la Citoyenneté Démocratique

ECM Education Civique et Morale ou EDUCIMO

EDUCIPO Education Civique et Politique

ENAM Ecole Nationale des Auxiliaires Médicaux

ENFS Ecole Nationale de Formation Sociale

ENSF Ecole Nationale des Sages-femmes d’Etat

FNUAP Fonds des Nations Unies pour la Population. (actuel UNFPA)

UNESCO Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture

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Introduction

La notion d'éducation à la citoyenneté démocratique (ECD) est définie par l'Organisation des Nations Unies pour l'Éducation, la Science et la Culture (UNESCO) comme « un ensemble de pratiques et d’activités destinées à mieux préparer les jeunes et les adultes à participer activement à la vie démocratique en assumant leurs responsabilités et en exerçant leurs droits au sein de la société ». Elle constitue un apprentissage en termes de connaissances, de valeurs à transmettre, de pratiques et de comportements, décliné à tous les niveaux de la scolarité et s’appuie également sur des dispositifs et des actions éducatives qui permettent la connaissance de l’environnement et la formation aux règles de la vie en société.

Au Togo, l'éducation à la citoyenneté1 a toujours été une des missions fondamentales assignées à l'école. Lorsque Akuété Zankli Lawson créait vers 1842 la première école togolaise de conception européenne à Petit-Popo (Aného)2. Plus tard, en 1975, la réforme de l'enseignement soulignait cette mission en ces termes : « L'école doit former des individus sains, équilibrés et épanouis dans toutes les dimensions. Elle doit permettre la formation de l'esprit critique, base de toute culture moderne »3. En outre, les programmes scolaires intègrent cette mission. Ainsi, dans un passé récent, les questions de citoyenneté faisaient-elles l'objet de trois matières distinctes : la leçon de morale, l'éducation civique et politique, et la prévention routière. Les nouveaux programmes4 en ont fait un seul objet d'enseignement – l'éducation civique et morale en abrégé ECM5.

Toutefois, force est de reconnaître que les actes d'incivilités, les dégradations de biens collectifs et de l'environnement, les phénomènes de violence dans le cadre scolaire et aussi, à l'extérieur de l'école, sont toujours légion. Les troubles sociopolitiques et les violences ayant émaillé le processus de démocratisation au Togo en sont une illustration patente. En même temps qu'ils invitent à s'interroger sur l'efficacité réelle du système éducatif à promouvoir la paix sociale et à prévenir toute détérioration de la cohésion nationale, ils questionnent les programmes d'éducation à la citoyenneté qui sont implémentés dans les écoles.

Quelle place l'éducation à la citoyenneté occupe-t-elle dans les politiques et les curricula au Togo ? Les principes de citoyenneté démocratique président-ils à la gestion et au développement de l'école togolaise ? Enfin, ses principes sont-ils reflétés au travers du climat et de la culture scolaires ? Autant de questions autour desquelles s'articule cette étude qui ambitionne d'aboutir à des propositions visant à améliorer la qualité et la pertinence du système éducatif togolais en général, et, de sa composante éducation à la citoyenneté démocratique, en particulier.

I. Revue sélective de la littérature

L'éducation à la citoyenneté fait référence à « l'éducation scolaire qui vise à doter les jeunes de la capacité de contribuer au développement et au bien-être de la société dans laquelle ils vivent en tant que citoyens responsables et actifs »6. Notion relativement nouvelle, elle est venue suppléer

1 Dans ce document, nous prenons pour synonymes les termes d'« éducation à la citoyenneté » et d'« éducation à la

citoyenneté démocratique ». 2 M'Gboouna K. (2002). La politique scolaire au Togo : Evolution et principaux acteurs. Lomé : NEA. 3 Ministère de l'Education Nationale (1975). La réforme de l'enseignement au Togo (forme abrégée). Lomé : MEN,

multigraphié, 37 p. 4 Ministère de l'Education Nationale et de la Recherche (1997). Programme d'éducation civique et morale pour les

enseignements des premier, deuxième et troisième degrés. Lomé : Presses de l'UB. 5 On rencontre parfois l'acronyme EDUCIMO par analogie à EDUCIPO, l'ancienne matière. 6 EURYDICE (2005), L'éducation à la citoyenneté à l'école en Europe, Bruxelles : Eurydice.

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celle (ancienne) d'instruction civique ou de civisme. Quoiqu'il en soit, les préoccupations à l'origine de l'émergence de ces notions sont les mêmes, il s'agit d'inculquer à l'individu les normes et les valeurs de son groupe social (ou national) d'appartenance, bref de le socialiser. Dans quel cadre doit-on éduquer à la citoyenneté ? A l'école, répond Sarr :

Si la démocratie, signifie le pouvoir au peuple, elle ne l'est réellement que si l'école a le rôle de diffuser la culture pour préparer les citoyens à être plus conscients que ceux d'aujourd'hui. Une école n'est vraiment démocratique que si elle a au moins une longueur d'avance sur la société moyenne, si elle est capable de présenter aux élèves ce qu'il y a de mieux dans la société contemporaine et de les préparer aux changements possibles ; donc elle est à la fois un conservatoire pour les cultures qu'elle diffuse mais aussi un laboratoire d'expérimentation des progrès de la démocratie. L'école peut jouer un rôle dans l'éducation à la citoyenneté en mettant un dispositif d'ensemble pour assurer un mieux vivre ensemble (...)7.

Dans le même ordre d'idée, Hénaire soutient que « le processus éducatif exerce bien une influence sur la socialisation civique et politique des élèves, et le rôle de l'école dans la formation de la personnalité politique peut avoir une importance pratique »8. Alors que dans la littérature, un consensus se dégage sur la nécessité d'éduquer à la citoyenneté dans le cadre de l'école, Monjo s'interroge sur « la validité et la solidité [de ce] consensus assez large ». L'éducation à la citoyenneté est instrumentalisée, dit-il, en ce sens qu'elle a pour vocation de lutter contre les effets antisystémiques (incivilités, violences, ...) de l'échec scolaire, loin de la portée civilisationnelle de l'éducation civique d'autrefois9. Constat partagé par l'Association des parents d'élèves de Vaud qui souligne qu'« un des objectifs à long terme d'une éducation à la citoyenneté serait de ne plus se focaliser sur des cas d'urgence pour les problèmes d'incivilité ou de violence par exemple (qui proviennent aussi du fonctionnement du système actuel). Ceci, parce qu'un travail de fond de l'ordre de la socialisation débouche aussi sur l'apprentissage de valeurs communes »10. Ces réflexions posent deux questions fondamentales.

D'une part, celle des contenus à transmettre en matière d'éducation à la citoyenneté. Autrement dit, que faut-il enseigner pour susciter l'adhésion de l'individu aux valeurs nationales et sa participation à la vie publique ?

Jusqu'à il y a peu de temps, il s'agissait d'inscrire au programme d'études des cours d'"instruction civique", puis d'éducation civique. Les disciplines liées à cette formation étaient généralement limitées à l'histoire et à la géographie en France par exemple, ou bien à ce que les Américains désignent par l'expression social studies. Ces cours ont longtemps porté presque uniquement sur le domaine institutionnel c'est-à-dire qu'ils étaient centrés sur la connaissance des institutions politiques et administratives ainsi que de leur fonctionnement, des lois et des constitutions nationales11.

Etant donné que l'éducation à la citoyenneté vise plus qu'une simple connaissance de la société, comme nous l'avons dit plus haut, il s'est avéré nécessaire d'aller au-delà des contenus sur les institutions pour couvrir un champ beaucoup plus large de savoirs, d'attitudes et de comportements à acquérir. En somme, une approche holistique du projet d'éducation à la 7 Sarr S. (2000). L'Afrique, un défi pour l'éducation à la paix, Conférence de Lomé, [En ligne] http://www.eip-

cifedhop.org/eipafrique/senegal/lome2000.html. Consulté le 23 janvier 2008. 8 Hénaire J. (1998), « Education à la citoyenneté et réforme scolaire : contexte, principes et voies d'application », Vie

pédagogique, n°109, novembre-décembre. [En ligne] http://portail-eip.org/textes/viepedahen.html#I%20Pr%E9sentation Consulté le 10 mars 2008.

9 Monjo R. (2003), L'école et la question de l'éducation à la citoyenneté, Conférence au Brésil, [En ligne] http://recherche.univ-montp3.fr/cerfee/article.php3?id_article=331. Consulté le 23 janvier 2008.

10 Association vaudoise des parents d'élèves (2005), « Education à la citoyenneté », [En ligne] http://www.ape-vaud.ch/article.php3?id_article=66. Consulté le 29 janvier 2008.

11 Hénaire J. (1998), ibid.

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citoyenneté que doit prendre en compte l'enseignement dans sa mise en œuvre, et dont les grands axes sont la culture de la paix, la démocratie, les droits humains et le développement humain durable.

D'autre part, l'objectif poursuivi étant de transcender « la formation des individus » pour une « formation de citoyens responsables », il se pose enfin la question des méthodes et procédures d'enseignement/apprentissage à adopter pour atteindre les résultats escomptés. En d'autres termes, quelle est l'approche didactique et méthodologique appropriée ? En l'espèce, les praticiens sont partagés sur cette question. Certains préconisent que l'éducation à la citoyenneté doit transparaître dans l'ensemble du curriculum et des pratiques scolaires ; on parle dans ce cas d'approches globales et systémiques. D'autres, partisans d'une conception moins extensive de l'éducation à la citoyenneté, veulent qu'elle soit circonscrite à un programme d'études particulier. Ancrage disciplinaire ou transversalité ? Enfin, un troisième courant juge les deux approches, précédentes, complémentaires et les combine sous le vocable de modèle intégrateur ou global understanding.

(Il) a la particularité de placer l'éducation à la citoyenneté sous la responsabilité de tous les enseignants ; la contribution spécialisée la plus importante revient toutefois aux professeurs d'histoire, de sciences sociales, de sciences politiques et d'économie. À l'intérieur du modèle transversal, l'accent tombe sur la coopération des enseignants de différentes matières12.

Quels que soient les contenus et la méthode employée, restera la question centrale de la capacité du système éducatif à générer les produits attendus c’est-à-dire des citoyens responsables. « Cela implique un transfert de pouvoir du personnel aux élèves, en ce qui concerne aussi bien les décisions sur le mode de gestion de l'établissement que le contenu et les formes de l'apprentissage »13. Un tel système éducatif existe-t-il au Togo ? Et singulièrement, sa composante d'éducation à la citoyenneté est-elle aussi efficace pour parvenir à ses fins ?

II. Objectifs de l'étude

2.1 Objectif général

Cette recherche a pour objectif d'évaluer l'efficacité interne qualitative de l'éducation à la citoyenneté telle que mise en œuvre dans l'enseignement secondaire au Togo. L'efficacité qualitative interne s'entend ici, au sens que lui donnent Sall et de Ketele, comme un rapport entre les entrées en termes d'acquis de départ et les sorties en termes d'objectifs pédagogiques maîtrisés14. Concrètement, il s’agit de confronter les objectifs visés par l'éducation à la citoyenneté au Togo aux moyens mis en œuvre dans l'enseignement secondaire.

2.2 Objectifs opérationnels

De manière spécifique, il s'agit :

• d'identifier les politiques scolaires et les curricula en vigueur en matière d'éducation à la citoyenneté démocratique au Togo ;

12 Idem 13 C. Harber (1997). L'efficacité des écoles, l'éducation pour la démocratie et la non-violence. Paris : UNESCO, p. 2. 14 N. Sall et J.-M. De Ketele (1997), « Evaluation du rendement des systèmes éducatifs : apports des concepts

d'efficacité, d'efficience et d'équité », Mesure et évaluation en éducation, Vol. 19, n°3, p. 124.

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• d'analyser les méthodes d'enseignement et d'apprentissage de la citoyenneté à la lumière des recommandations officielles ;

• de vérifier l'application des principes de citoyenneté démocratique dans la vie quotidienne des collèges et lycées ;

• de proposer des recommandations pour améliorer la qualité et la pertinence de l'ECD au Togo.

III. Contexte de l'étude : l'enseignement secondaire au Togo

En raison de l'étendue du système éducatif, et pour des raisons de contraintes temporelles et budgétaires, nous avons limité notre champ d'étude à l'enseignement secondaire. Ce choix s'explique aussi en partie par le fait que les élèves entrent dans ce niveau d'enseignement à 11 ans révolus et n'en ressortent qu'après avoir atteint la majorité légale (18 ans)15.

Depuis la réforme de 1975, l'enseignement secondaire au Togo est organisé en deux niveaux : le premier et le second cycles.

3.1 Le premier cycle

L'élève commence le premier cycle après l'obtention du Certificat d'Etudes du Premier Degré (CEPD) sanctionnant six années d'études au premier degré. Si son parcours s'est déroulé sans anicroche, il devait avoir 11 ans révolus. Le premier cycle est lui-même subdivisé en deux niveaux :

• le cycle d'observation : classes de sixième et de cinquième. Ces deux classes ne sont présentes que dans les Collèges d'enseignement général (C.E.G.). Les Collèges d'enseignement technique (C.E.T.), les Collèges d'enseignement agricole (C.E.A.) ainsi que les Collèges d'enseignement artistique et artisanal (C.E.A.A.) dont la création prévue par la réforme, n'existent pas dans la réalité.

• le cycle d'orientation : classes de quatrième et de troisième des C.E.G. Cet enseignement débouche sur la préparation du Brevet d'Etudes du Premier Cycle (B.E.P.C.). L'entrée en classe de seconde de l'enseignement général est subordonnée à la réussite au B.E.P.C. Quant à l'enseignement technique, un concours d'entrée est institué et permet de sélectionner les meilleurs élèves. On peut supposer que ce concours a surtout pour but de limiter les effectifs puisque jusqu'à une époque récente le Togo ne disposait que de deux lycées d'enseignement technique publics. Mais quoiqu'il en soit, nous dirons que l'organisation de ce concours est en contradiction flagrante avec la réforme de 1975.

3.2 Le second cycle

Le second cycle comprend les lycées d'enseignement général, les lycées d'enseignement technique et des écoles spécialisées. Les élèves y entrent à l'âge de 15 ans pour une période de trois ans.

15 L'ordonnance 79-040 du 30 octobre 1979 fixe à 18 ans l'âge de la majorité civique et politique. (Journal Officiel de

la République Togolaise, 14 décembre 1979, p. 2).

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Les lycées d'enseignement général et technique comportent trois classes : la seconde, la première et la terminale. L'élève passe à la fin de deux années d'études, le baccalauréat première partie (BAC 1), s'il s'agit de l'enseignement général, ou le brevet d'études professionnelles (B.E.P.) lorsqu’il s’agit de enseignement technique. A la fin de la troisième année, il passe le baccalauréat deuxième partie (BAC 2) qui permet d'accéder à l'enseignement supérieur (université ou école supérieure).

Les écoles spécialisées telles que l'Ecole Nationale des Auxiliaires Médicaux (ENAM), l'Ecole Nationale des Sages-femmes d'Etat (ENSF), l'Ecole Nationale de Formation Sociale (ENFS) accueillent elles aussi les titulaires du BEPC.

En résumé, un élève brillant, c'est-à-dire, qui n'a redoublé aucune classe durant son parcours scolaire, achèverait l'enseignement secondaire à l'âge de 18 ans, l'âge de la majorité légale au Togo. L'enseignement secondaire est en cela pour nous un bon point d'ancrage pour observer le processus de formation des citoyens de demain, ceux qui seront appelés à participer au débat public, à élire les responsables politiques (président de la république, parlementaires, élus locaux…).

IV. Méthodologie

4.1 Méthodes et techniques de recherche

Cette étude a recouru exclusivement à la méthode qualitative ; notre objectif étant de comprendre en profondeur la composante ECD dans l'enseignement secondaire au Togo. Elle a consisté en des entretiens individuels et en des entretiens de groupe avec différents acteurs du système scolaire que sont les élèves, les enseignants, les responsables d'établissement et les autorités de tutelle. Des guides d'entretien et de discussion ont été élaborés pour recueillir les données16.

Il aurait été intéressant dans le cadre de cette étude d'interroger les parents d'élèves. Cependant, pour des raisons d'ordre calendaire, nous avons sciemment renoncé à organiser des entretiens formels avec ceux-ci. Nous nous sommes donc contentés des avis des enseignants et des personnes-ressources qui, en tout état de cause, sont ou ont été des parents d'élèves.

4.2 Sites de l'étude

En vue d'une meilleure qualification des résultats, les sites de l'étude ont été déterminés de sorte à être représentatifs de la diversité de l'enseignement secondaire au Togo. A cet effet, les recherches ont été effectuées dans les établissements scolaires d'enseignement général et technique, publics et privés, tant laïcs que confessionnels.

Ces recherches se sont déroulées principalement à Lomé, la capitale du Togo, où neuf établissements scolaires ont été couverts à raison de trois CEG, trois lycées d'enseignement général et trois lycées d'enseignement technique. Trois autres établissements scolaires situés dans les villes de l'intérieur (Notsè, Kpalimé et Atakpamé) ont également fait objet de la présente étude.

En plus du travail de terrain qui s'est déroulé dans les établissements scolaires, des entretiens ont eu lieu avec des autorités de l'éducation nationale notamment les directeurs départementaux du

16 Cf.annexes

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premier et du second cycle, les inspecteurs des enseignements ainsi que certaines personnes ressources.

4.3 Déroulement du travail de terrain

L'enquête sur les différents sites de l'étude s'est déroulée du 15 septembre au 1er décembre 2008. Elle a été précédée d'une enquête exploratoire et d'un pré-test des instruments de collecte des données au mois d'août 2008.

La principale difficulté rencontrée est liée à l'indisponibilité de nos interlocuteurs, due au report de la rentrée scolaire. Ce qui a d'ailleurs perturbé la programmation initiale et a nécessité des ajustements.

4.4 Traitement et analyse des données

Les données recueillies lors des entretiens ont été organisées dans un premier temps en fonction des variables de l'étude. Elles ont fait ensuite l'objet d'une analyse manuelle selon la démarche de Chantal Deschamps (1993)17 en quatre étapes à savoir : 1) tirer le sens général de l'ensemble de la description ; 2) reconnaître les unités de signification qui émergent de la description ; 3) développer le contenu des unités de signification de manière à approfondir le sens qui est contenu dans le matériel ; et 4) réaliser la synthèse de tous les développements des unités de signification, dans le respect du phénomène considéré, et décrire la structure typique du phénomène.

Comme grille d'analyse, nous nous sommes servis de l 'evaluative framework18 de l'UNESCO qui énonce une série de variables pour évaluer l'éducation à la citoyenneté à savoir : le curriculum, l'enseignement et l'apprentissage, la culture et le climat scolaires, la gestion et le développement.

V. Brève histoire de l'éducation à la citoyenneté au Togo

Avant d'en venir aux résultats de cette étude, nous allons rapidement reconstruire le passé de la formation civique au Togo. Ce détour n'a d’autre ambition que de pourvoir une lisibilité historique à la thématique. Elle s’organise en deux étapes chronologiques : les pratiques visant la formation citoyenne pour une intégration effective de l’individu dans les sociétés traditionnelles dans le Togo précolonial d'une part et d'autre part, la politique en matière d’instruction civique du colonisateur allemand et français.

5.1 L'éducation à la citoyenneté dans le Togo précolonial

Le souci de former le véritable citoyen n'a pas échappé aux structures éducatives des sociétés traditionnelles qui occupaient la bande de terre qui allait à partir de 1884 devenir le Togo. Les différentes communautés que le colonisateur allemand a rencontrées avaient chacune mis en place des méthodes qui, selon ses valeurs propres et les réalités socioéconomiques du milieu, assumaient non seulement la transmission du savoir-faire mais aussi favorisaient le changement de comportements de l’individu dans le strict respect de l'ordre. L’individu pouvait dès lors contribuer au développement harmonieux de la cité tout entière. Par souci d'efficacité, seules deux aires

17 In ROCARE, MTT West, ADEA (2006). Extraits de guides pour la recherche qualitative. Bamako : ROCARE, p.

25. 18 En annexes et à l'adresse URL : http://portal.unesco.org/education/en/files/42082/11266913485table1.pdf/table1.pdf

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culturelles seront appréciées dans le cadre de la présente recherche.

Chez les peuples d'origine « ajatado » du sud-Togo, les différents réseaux d'éducation étaient la famille, les classes d’âges ou les groupes de pairs et les sociétés initiatiques. En ce qui concerne la formation à l'acquisition des valeurs morales et citoyennes de la communauté, la famille était toujours le lieu indiqué : le père, le tuteur ou l'oncle maternel pour le garçon tandis que la mère, la tutrice ou la tante paternelle s’occupaient des filles. L'occasion de festivités ou de cérémonies complétait cette formation de la femme et de l’homme. Le respect de la hiérarchie fondé sur l’âge et la détention de certaines connaissances ésotériques, l'obéissance aux règles établies depuis des générations quant à certaines pratiques telles que le mariage, les funérailles etc., la connaissance des noms des familles alliées constituaient entre autres les éléments de formation.

Dans l'aire culturelle kabiyè-tem, le « têto » est l'espace où se moule l’individu qui doit mériter son rang et son statut de citoyen. Il existait une véritable unité sociopolitique où les membres des cités kabiyé-tem se sentaient solidaires. Cette solidarité résultait essentiellement des rites initiatiques qui faisaient du garçon successivement un « Evalo », un « Sankayou », un « Esakpa », un « Kondona », un « Ekoulou » et enfin un « Soso ». L’octroi de la citoyenneté est donc sujet au respect des initiations qui, elles, sont fonction de l’âge. En pays Kabiyé, on pouvait même priver l’enterrement dans le cimetière de citoyens à celui qui s’est délibérément soustrait des rites initiatiques.

L'initiation visait aussi à cultiver la solidarité entre les jeunes gens de la même génération et entre ces derniers et leurs aînés. Cette solidarité, qui assurait la cohésion du groupe, se manifestait entre autres dans l’organisation du travail (construction des habitations, grands débroussaillages…) , dans les alliances matrimoniales etc19.

La formation de la jeune fille n’a pas échappé aux structures éducationnelles aussi bien au Sud qu’au Nord : les filles subissaient le « Akpéma » en pays kabiyè alors qu’en pays Adangbé on célébrait l’initiation des « Adifo ». Dans les deux cas on visait la sauvegarde de la virginité avant le mariage et la préparation au rôle de future mère.

5.2 Les actes des colonisateurs en matière d'éducation à la citoyenneté

Sous l’administration coloniale allemande (1884-1914), l’essentiel du travail d’éducation a été l’œuvre des missions chrétiennes. En effet, durant les trente ans d’occupation, le colonisateur n’a construit que trois écoles primaires20. En tout état de cause l’administration coloniale allemande soit par l'école publique soit par l'école confessionnelle ne visait qu'à former des « demi-lettrés », des « agents subalternes » voire des « sous-pasteurs »21.

Le programme mettait particulièrement l’accent sur l’enseignement de la langue allemande. Outre les matières académiques, on insistait également sur l’instruction civique et l’éducation à l’ordre, à la discipline, à l’obéissance envers l’autorité : la formation et l’éducation suivies dans les écoles officielles avaient pour objectif de fournir au gouvernement allemand des employés compétents et dévoués22.

19 Assima-Kpatcha E. (2005), « L’éducation sous domination coloniale », Gayibor N.L. (ss.dir.), Histoire des Togolais,

de 1884 à 1960, Vol.II, Tome II, Presses de l’UB, Lomé, 2005, p. 103. 20 Il s’agit de l’école d’Aného de 1891, de celle de Lomé de 1902 et de Sokodé de 1912. Cf. Gayibor N.L. (ss.dir.),

op.cit., p.119, 120 21 Peter Sebald (2005), « L’organisation administrative du Togo allemand », Gayibor N.L. (ss.dir.), Histoire des

Togolais, de 1884 à 1960, Vol.II, Tome I, Lomé : Presses de l’UB, p.68, 69. 22 Assima-Kpatcha, op.cit, p. 120.

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L’éducation à la citoyenneté se résumait donc à la connaissance de la langue allemande, de l’hymne prussien, de la cartographie du Reich bismarckien, à la soumission au « one for Kaiser ».

A la faveur de la Grande guerre, le Togo échut à l'administration coloniale française (1914-1960). Au niveau idéologique, rien ne change, l'objectif premier du colonisateur étant bien entendu l’exploitation du colonisé. D’ailleurs, « entre le colonisateur et colonisé (sic), il n'y a de place que pour la corvée, l'intimidation, la pression, la police, l'impôt, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la muflerie, des élites décérébrées, des masses avilies »23.

En matière de civisme, les différentes administrations françaises qui se sont succédées au Togo de 1919 à 1960, avaient rivalisé d’ardeur prioritairement pour ôter de l'âme des Togolais le souvenir des Allemands, faisant croire à l'occasion que leur arrivée devait assurer le développement et l'épanouissement de l'indigène24 du Togo.

Le colonisateur français a initié un programme d’éducation qui visait avant tout à « franciser » le jeune togolais. L'enseignement comportait le français, les sciences naturelles appliquées à l’hygiène et à l’agriculture, le calcul, le dessin, la morale25 . L'objectif du colonisateur étant de former à moindre coût une main-d'œuvre locale pour suppléer au manque de personnel nécessaire à la réalisation des grandes installations coloniales, la priorité n'était pas à l'éducation à la citoyenneté26.

Bernard Dadié, ancien élève de l'Ecole William Ponty le confirme dans son autobiographie Climbié. « A Ponty, aucune de ces questions n'était au programme. Ces noms étaient inconnus. Philosophie, sociologie, instruction civique27 ? Hors programme. On lui avait seulement donné un enseignement primaire plus élevé en vue de le préparer à la carrière administrative »28. Il n'est pas exclu que dans certains pays l'instruction civique ait été dispensée avant l'indépendance. Indubitablement, le programme serait le même qu'en métropole ou ne s'en éloignerait pas.

L'instruction civique consiste à fournir une information, grâce à une description simple et schématique des institutions et de l'organisation de l'Etat dans lequel tout enfant est appelé à grandir, à travailler et à vivre. Ceci doit être précis, présenter les faits, la structure de la cité : commune, département, région, parlement, gouvernement, sans jamais entrer dans aucune sorte de jugement de valeur. C'est la description d'une situation et l'on a, dans le cadre d'une instruction civique, aucun commentaire à ajouter ; seuls des exemples ou des illustrations seront fournis, pour une meilleure compréhension29.

En somme, l'une des conséquences de l’éducation à la citoyenneté durant la période coloniale c’est d'avoir « sans l’avoir vraiment voulu » formé une élite togolaise qui a joué un rôle décisif dans la lutte pour l’indépendance. C'est cette élite qui de 1960 à nos jours continue selon les différentes étapes politiques, de se pencher sur les questions de l’éducation à la citoyenneté.

Une histoire de l’éducation civique et morale au Togo est elle possible ? Certes, elle n'est 23 Doumbi Fakoly, La Colonisation, l’autre crime contre l’humanité : le cas de la France coloniale, Paris : Menaibuc,

p 57. 24 Le terme « indigène » est employé dans la littérature coloniale française pour désigner les habitants du Togo. 25 Assima-Kpatcha, op. cit., p. 135. 26 Samba Gadjigo (1990), Ecole blanche, Afrique noire : l'école coloniale dans le roman d'Afrique noire francophone.

Paris : L'Harmattan. p. 106. 27 Souligné par nous. 28 Bernard Dadié (1953). Climbié. Paris : Seghers. p. 24. 29 F. Muhimpundu (2002 : 106) cité par Mamadou Bella Baldé (2008), Démocratie et éducation à la citoyenneté en

Afrique. Paris : L'Harmattan, p.178.

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cependant pas aisée. Les sources d’informations ne sont pas évidentes pour le chercheur. Il a fallu glaner ici et là des bribes de données pour constituer ce travail dont la trame est plus chronologique sinon descriptive que thématique occultant une analyse rigoureuse des faits. En tout état de cause, cet aperçu historique a permis de rendre compte des valeurs citoyennes telles qu'elles étaient perçues et inculquées aux jeunes gens à l'époque précoloniale à travers les rites initiatiques ancestrales, et l'œuvre des colonisateurs en matière de formation à la citoyenneté.

VI. Education à la citoyenneté dans les programmes d'études au secondaire

La notion de citoyenneté est très peu usitée au Togo dans les sources officielles. On lui préfère deux autres déclinaisons : « éducation civique et morale » et « formation civique ». L'éducation civique et morale est cet enseignement qui est dispensé à l'école et qui a pour finalité de développer chez l'élève le sens de l'intérêt général, le respect de la loi et l'amour de la patrie. En dehors du cadre scolaire, l'éducation civique et morale prend le nom de formation civique et est mise en œuvre par la Direction de la Formation Civique. Quels sens revêtent ces deux termes ? Comment fonctionnent les institutions chargées de leur mise en œuvre ? Et comment structurent-ils la politique éducative du Togo ?

6.1 Education civique et formation civique

6.1.1 Education civique

L'éducation civique et morale comme nous l'avons dit plus haut est un enseignement dispensé à l'école. Dans le Togo indépendant, les questions de citoyenneté étaient présentes dans le curriculum de l'enseignement primaire à travers deux matières : l'instruction civique et la morale. A l'héritage éducatif colonial a succédé un programme d'éducation civique et politique qui ne faisait pas moins la part belle au parti unique30. A ceci s'ajoute les cours de morale et de prévention routière.

Il faudrait attendre le mouvement de démocratisation pour assister à nouveau à une réforme du programme d'éducation civique. Cette nouvelle réforme a été soutenue par l'élaboration de curricula destiné aux trois premiers degrés d'enseignement du Togo. Il s'agissait donc d'une révolution, en ce sens que pour la première fois l'enseignement du civisme au secondaire était envisagé explicitement. Autre particularité de cette réforme, elle adjoignait le cours de morale à celui d'éducation civique, ce qui donnait naissance à un nouvel intitulé : l'éducation civique et morale.

L'Education Civique et Morale suppose la compréhension des règles de la vie démocratique et de leurs fondements, la connaissance des institutions et de leurs racines historiques, la réflexion sur les conditions et les moyens de respect de l'homme et de ses droits dans le monde d'aujourd'hui : respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tolérance, solidarité et justice, refus du racisme, du tribalisme et du régionalisme, volonté de vivre ensemble. Elle met les élèves en mesure de répondre à leur propre exigence de liberté et de justice et de faire face de manière responsable aux problèmes et aux défis de notre temps31.

30 Jean Adama Nyame, Yao Nuakey (2001). Togo. In John Aglo, Réforme des systèmes éducatifs et réformes

curriculaires : situation dans les Etats africains au sud du Sahara : Rapport final du séminaire-atelier, Libreville Gabon, 23-28 octobre 2000. Genève : BIE, p. 72.

31 Ministère de l'éducation nationale et de la recherche (1997). op. cit., p. 5.

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6.1.2 Formation civique

Par opposition à l'éducation civique, la formation civique s'entend de toute activité d'éducation citoyenne des masses et qui ne se déroule pas dans un cadre scolaire. Cette composante de l'éducation citoyenne est pilotée par la Direction de la Formation Civique (DFC). La DFC est chargée de la mise en œuvre de la politique de formation civique définie par le gouvernement et élabore les programmes de formation civique avec le concours des ministères intéressés et des institutions nationales et internationales.

Créée officiellement en 2001, elle n'est devenue opérationnelle qu'en 2005 au sortir de la présidentielle marquée par des violences ayant entraîné au moins 500 morts et près de 40.000 réfugiés selon un rapport de l'Organisation des Nations Unies32.

Ainsi sa mise en place peut-elle être interprétée comme une mesure visant à éradiquer par l'éducation les violences et autres atteintes aux droits de l'homme que le Togo a connues depuis le début du processus démocratique en 1990. Cependant, ses actions demeurent encore très limitées dans le temps et dans l'espace. A ce jour, sa plus grande intervention remonte aux législatives de 2007 quand elle a organisé une campagne de sensibilisation pour un scrutin apaisé, avec l'appui de bailleurs de fonds étrangers.

En outre, elle est associée à la formation de nouvelles recrues dans l'administration publique et anime des conférences occasionnelles ou à la demande. Enfin, elle soutenait la réalisation d'un magazine d'information civique en langue française que la télévision nationale diffusait de façon hebdomadaire jusqu'à une époque récente. Du reste, cette Direction n'est pas encore parvenue à la hauteur des attentes placées en elle faute de moyens pour implémenter le plan national d'action de la formation civique.

A l'origine, cette direction était placée sous la tutelle du Ministère de la Communication et élevée au rang de portefeuille ministériel. Cependant, depuis le remaniement ministériel du 15 septembre 2008, ce portefeuille a été rétrocédé au Ministère des Droits de l'Homme et de la Consolidation de la Démocratie.

6.2 Politiques scolaires en éducation à la citoyenneté

Pour une éducation à la citoyenneté efficace, l'Etat doit se doter d'une politique éducative en la matière et se donner les moyens d'atteindre ses objectifs. En effet, dans les années 1990, le Togo, à l'instar d'autres pays africains, a organisé une consultation sur l'éducation dénommée « Etats généraux de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique ». Il est ressorti de ces assises l'exigence et l'urgence d'ajuster le système éducatif. Ainsi a été définie en 1993 une « Politique nationale du secteur de l'éducation et de la formation » qui visait surtout à améliorer l'efficacité interne et externe du système éducatif.

Il faut relever aussi l'existence d'une politique éducative au Togo qui confère à l'école le rôle de la formation de citoyens responsables. Cette politique ne fait pas l'objet d'une publication séparée mais elle est implicite dans le curriculum d'éducation civique élaboré dans les années 1990, sous l'impulsion de l'Ambassade des Etats-Unis au Togo.

32 Haut Commissariat aux Droits de l'Homme (2005), Rapport de la mission d'établissement des faits chargée de faire

la lumière sur les violences et les allégations de violations de droits de l'homme survenues avant, pendant et après l'élection présidentielle du 24 avril 2005, multigr., 49 p.

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L'école a pour mission d'instruire et d'éduquer le jeune afin de l'amener à prendre part à la vie politique, économique, sociale et culturelle de son pays. Malheureusement, on constate que généralement le volet « éducation » est souvent négligée.

En introduisant l'Education Civique et Morale comme discipline à part entière dans l'enseignement au Togo, il s'agit essentiellement de combler cette lacune et de favoriser la consolidation d'un Etat de droit garant des libertés, de la paix et de la justice. Il s'agit de cultiver dans l'esprit des jeunes le sentiment d'appartenir à une même nation, de vouloir y vivre ensemble, et de vouloir la défendre33.

La participation à la vie du pays, le développement du sentiment d'appartenance, le vivre-ensemble et la défense de la nation sont entre autres les éléments sur lesquels cette politique met l'accent. A ceci, il faut ajouter le développement d'un esprit critique énoncé dans la réforme de l'enseignement de 1975 comme une des missions de l'école moderne, et d'autres valeurs énoncées dans les nouveaux curricula34 comme la parenté responsable, la préservation de l'environnement et le développement durable.

VII. Enseignement et apprentissage de la citoyenneté au secondaire

Les théoriciens et praticiens de l'éducation ne s'accordent pas sur la façon d'éduquer à la citoyenneté. Trois courants existent à ce sujet. Le premier préconise que les notions de citoyenneté soient abordées de façon transversale par un certain nombre de disciplines. Le deuxième courant propose quant à lui que l'éducation à la citoyenneté fasse l'objet d'une discipline distincte. Autrement dit, qu'il existe un moment prévu dans l'emploi du temps des élèves et qui soit consacré à l'enseignement et à l'apprentissage des valeurs et des principes citoyens. Enfin, un troisième propose la combinaison des deux premières approches. Dans ce cas-ci, l'éducation à la citoyenneté est abordée par différentes disciplines avec une responsabilité accrue pour l'une d'entre elles. Dans cette partie, nous nous intéressons à la démarche adoptée dans l'enseignement secondaire au Togo. Autrement dit, quel statut l'ECD a-t-elle dans le programme officiel ? Et quelles sont les pratiques informelles d'ECD en cours ?

7.1 Approches de l'ECD dans l'enseignement secondaire

Au premier cycle, la pédagogie envisagée pour l'Education civique et morale se fonde sur trois approches : enseignement distinct, intégré ou occasionnel. Le chargé du cours pourra en plus du cours distinct faire un enseignement intégré ou occasionnel, selon le cas. En revanche au second cycle, l'ECM est une matière séparée. Ceci suppose que le système éducatif a fait un choix spécifique selon les niveaux. Cependant, l'enquête de terrain révèle des disparités dans l’enseignement de cette discipline.

En effet, l'enseignement de l'ECM n'est pas effectif dans tous les établissements que nous avons visités durant notre recherche. Les établissements privés confessionnels et tous les établissements d'enseignement technique ne dispensent pas encore les cours d'ECM et n'envisagent pas les introduire dans leurs emplois du temps scolaires. Toutefois, les questions de citoyenneté ne sont pas moins présentes dans ces établissements.

33 Ministère de l'éducation nationale et de la recherche (1997), op. cit., p. 4. 34 Ministère de l'éducation nationale et de la recherche (2000). Programme d'éducation en matière d'environnement, de

population et de santé de la reproduction pour le développement humain durable. Lomé : FNUAP-TOGO, 178 p.

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7.1.1 Temps alloué

C'est aux professeurs d'histoire-géographie que revient la charge d'enseigner l'ECM dans les établissements où elle figure dans l'emploi du temps et ils disposent pour ce faire d'une heure par semaine. De l'avis de tous les professeurs rencontrés, ils n'ont jamais pu consacrer exclusivement cette heure à l'ECM en raison de la densité du programme d'histoire-géographie dont ils ont aussi la charge.

C’est vrai qu’une heure est affectée à l'ECM, mais beaucoup de professeurs utilisent cette heure pour dispenser les cours d’histoire et géographie. Quand on accuse du retard dans le programme, on préfère sacrifier cette heure d'ECM pour autre chose. L’année passée en classe de Terminale, je n’ai fait l'ECM qu’au premier trimestre. [P1, professeur d'histoire-géographie et d'ECM35]

Nos charges sont colossales, nous dispensons plusieurs matières dont chacune est affectée d’un programme lourd ; malgré le peu de temps dont nous disposons, on nous ajoute l’ECM. Nous faisons de notre mieux pour donner le maximum de cours dans cette matière mais faute de temps nous privilégions les autres disciplines qui elles sont obligatoires à l’examen. [P7, professeur d'ECM]

En revanche dans certains établissements où l'ECM n'est pas enseignée, les questions de citoyenneté peuvent s'inviter de manière fortuite.

Aucune matière n’aborde clairement les notions de citoyenneté. Elles font l’objet d’une parenthèse dans certains cours ; en histoire-géographie par exemple lorsqu'on aborde le sous-développement, la démocratie et les droits de l’homme, et en anglais lorsqu’on étudie le peuple américain. [E1, lycéen]

Ailleurs, l'enseignement du civisme est suggéré par l'administration à certains enseignants ; bien évidemment, ils n'y sont pas contraints.

Nous n'enseignons pas directement l'Éducation civique et morale. Il a été demandé aux professeurs d’histoire-géographie de faire une ouverture sur ces questions de civisme. Surtout que les élèves ne sont pas évalués en fin de formation dans cette matière. [P2, directeur des études]

L'ECM n'est pas une matière isolée dans le programme des lycées techniques. On a demandé aux professeurs de français et de certaines matières d'intégrer les notions de civisme dans leur cours. Malheureusement, le programme est si vaste que les enseignants privilégient leurs matières principales. [P3, inspectrice de l'éducation]

Dans certains établissements confessionnels, l'emploi du temps prévoit une heure par semaine consacrée à des échanges entre les professeurs titulaires et leur classe. Ce programme dénommé « vie de relation » ou « étude des faits sociaux et moraux », selon les cas, est une opportunité offerte aux élèves pour discuter du fonctionnement de l'école, des activités périscolaires, des questions de discipline, etc.

En résumé, le programme officiel au secondaire recommande l'ancrage disciplinaire de l'ECD tandis que sur le terrain la réalité est au modèle intégrateur. Plus largement, le caractère aléatoire de l'enseignement de la citoyenneté rend difficile voire impossible l'estimation du volume horaire annuel à lui alloué dans l'enseignement secondaire au Togo.

7.1.2 Méthodes et procédures d'enseignement et d'apprentissage

Que l'on soit au deuxième ou au troisième degré, les principales méthodes d'enseignement de 35 Nous avons délibérément choisi de protéger l'identité de nos enquêtés en anonymant leurs verbatim.

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l'ECM préconisées sont actives et participatives.

Elles consistent à faire acquérir aux élèves de nouvelles connaissances et valeurs par la pratique. L'enseignant crée des situations et activités qui traduisent dans les faits, gestes et propos les principes démocratiques notamment ceux de liberté et de justice. Les élèves interagissent entre eux, et parfois avec l'enseignant, et font des exercices de simulations, des jeux de rôle, etc. Le rôle de l'enseignant dans l'application des méthodes actives et participatives est plus celui d'éducateur-facilitateur que celui d'enseignant36.

A ceci s'ajoutent les méthodes de la découverte préconisées à titre complémentaire au deuxième degré.

En voici un exemple de démarche : après une brève de discussion de certains thèmes, les élèves se constituent en petits groupes pour mener des enquêtes dans leur milieu de vie afin d'approfondir leurs connaissances ; ou bien des projets de recherche peuvent aussi se formuler et se réaliser dans le but de découvrir de nouvelles connaissances, pratiques et valeurs dans leurs milieux et dans les ouvrages. Enfin des études de cas peuvent être menées dans le cadre des méthodes de la découverte qui s'appuient sur des projets de groupe dont la réalisation exigent (sic) respect mutuel et coopération, lesquelles vertus figurent parmi les vertus de la culture démocratique37.

Sur le terrain, aucune de ces méthodes n'est utilisée. L'ECM est enseignée comme les autres disciplines scolaires. En l'absence de la documentation proposée par le programme, le cours d'ECM se résume à l'exploitation d'un livret de questions-réponses élaboré par un groupe d'enseignants38.

J'utilise un fascicule et ça permet de gagner du temps. Il y a des textes, les élèves le lisent et j'explique. Il y a beaucoup de points de discussion dans le programme. Mais il y a aussi des sujets qui suscitent des débats dans les classes comme les questions de genre. [P1, professeur d'ECM]

6.1.3 Evaluation et suivi

En ce qui concerne l'évaluation, le programme officiel indique qu'elle est obligatoire et doit emprunter les formes prédictive, formative et sommative. Elle doit aussi être externe, ce qui consiste en une observation des élèves à l'école et en-dehors de l'école.

Habituellement pour évaluer les élèves, les enseignants organisent des interrogations écrites et vérifient ce que ceux-ci ont pu retenir des cours. A l'examen l'évaluation est la même ; elle prend la forme d’un contrôle des connaissances et exige de l’élève la restitution par écrit de ce qu’il a appris en classe durant l’année.

Les élèves s’intéressent bien à l'ECM. Une fois, je les ai évalués dans cette matière et ils ont bien travaillé. Quand j'ai vu les copies, j’étais émerveillé. Une bonne motivation des élèves consisterait à introduire cette matière dans tous les examens. [P1, professeur d'ECM]

En effet, l'ECM n'est pas évaluée systématiquement en classe ; au BEPC et au baccalauréat première partie, elle a le statut de matière facultative, mais au baccalauréat deuxième partie, elle est totalement absente.

En marge de ces évaluations formelles, l’enseignant procède au suivi des élèves. En effet, 36 Ministère de l'éducation et de la recherche (1997), op.cit., p.23-24. 37 Idem. 38 Il s'agit du Groupe de Recherche et de Publication de Documents Pédagogiques (GRPDP) connu sous le nom du

groupe de Buckner – un enseignant retraité. Le GRPDP élabore des documents didactiques souvent des sujets et leurs corrigés.

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l’éducation civique et morale étant avant tout une matière qui cible le comportement de l’élève, l’enseignant vérifie souvent si les élèves mettent en pratique les valeurs morales et citoyennes qu’il leur enseigne en classe. Il vérifie comment ils réagissent face aux problèmes d’ordre moral, observe leurs sens de civisme dans diverses situations ; il note tout cela et réagit en donnant des conseils à ceux qui se comportent mal et en encourageant ceux qui adoptent des comportements exemplaires. Ce suivi n'est malheureusement qu'informel et n'aboutit pas à l'attribution d’une note de conduite. Les évaluations étant donc limitées aux interrogations écrites et à l’examen, les élèves ne font pas assez d’effort pour mettre en pratique ce qu’on leur enseigne ; ils se contentent d’apprendre les cours et de les restituer par écrit lors des contrôles, c’est ce qui explique le peu d’impact de ces cours sur leurs comportements.

L'une des grandes questions qui se posent aujourd'hui est comment évaluer l'ECM... L'ECM est obligatoire. Si on n'évalue pas obligatoirement, c'est qu'on n’est pas sûr que cet enseignement atteigne tous les élèves. C'est une question d'équité ! [P4, inspecteur de l'éducation]

Introduits dans l’enseignement pour faire des élèves des citoyens responsables, les cours d’éducation civique et morale ne font malheureusement pas l'objet d’une évaluation efficace ; celle-ci se limite aux contrôles de connaissances faits en classe et à l’examen et exclut la prise en compte du comportement de l’élève que l’on cherche pourtant à forger.

VIII. Culture et climat scolaires

Selon Janosz et al., « le climat scolaire renvoie principalement, d'après nous, aux valeurs, aux attitudes et aux sentiments dominants dans le milieu. Il donne une indication générale du ton et de l'atmosphère qui règnent dans les rapports sociaux, de la valeur accordée aux individus, à la mission éducative de l’école et à l’institution comme milieu de vie »39.

La culture et le climat scolaires encore désigné sous le vocable d'ethos est un bon repère pour apprécier l'intégration ou non des normes de citoyenneté démocratique dans l'univers scolaire. Nous analyserons, dans un premier temps, la perception entretenue par la communauté scolaire sur le quotidien de l'école ; dans un deuxième temps, nous nous intéresserons aux institutions chargées d'y maintenir l'ordre et d'y gérer les conflits.

8.1 Les relations entre les élèves et les responsables : entre courtoisie et tension

Elles sont généralement bonnes et conviviales et sont caractérisées par un respect mutuel. Toutefois ces relations ne sont pas toujours exemptes de problèmes, elles connaissent parfois des tensions dues aux écarts de conduite des autorités, des enseignants ou des élèves.

S'agissant des autorités, il arrive que certaines d’entre elles abusent de leur pouvoir en portant la main sur les élèves, en les menaçant ou en leur adressant des propos déplacés. Dans l’un des établissements où nous avons mené nos enquêtes, il nous a été signalé le comportement quelque peu agressif du directeur qui parfois n’hésite pas à proférer des insultes ou à gifler les élèves pour peu que ceux-ci soient en retard, bavardent en classe ou ne se présentent pas au mât pour la montée des couleurs nationales.

Notre directeur a parfois des sautes d’humeur, il nous tape ou nous insulte à la moindre erreur ; nous ne comprenons pas pourquoi il faut tenir l’élève par le col ou le gifler juste parce qu’il ne s’est pas présenté au mât ou parce qu’à la fin de la récréation il traîne les pas avant d’entrer en classe. [E2, collégien]

39 Janosz M. et al. (1998), L'environnement socio-éducatif à l'école secondaire, Revue Canadienne de Psycho-

éducation, Vol 27, No 2, 1998, p. 292.

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Par rapport aux enseignants, les relations sont également bonnes mais un peu plus tendues que celles qui existent entres les élèves et les autorités. Appelés à se côtoyer tous les jours de classe, les élèves et les enseignants entretiennent des relations courtoises mais quelques fois entachées de tensions. En effet certains enseignants loin d’être des modèles se montrent sévères au point de constituer de véritables épouvantails pour les élèves. A la moindre culpabilité de l'élève (question posée mal répondue, bavardage, devoir de maison non fait ou mal fait…), ils s’emportent insultent ce dernier ou le punissent.

D’autres enseignants lorsqu’ils font leurs cours, refusent pratiquement de répondre aux questions ou de tenir compte des doléances des élèves ; ce qui frustre ces derniers et crée une atmosphère assez tendue pendant le cours. A ce propos certains élèves nous ont confié :

La plupart de nos enseignants sont courtois et attentionnés, mais certains n’ont aucun égard pour nous ; ils ne prennent pas en compte nos préoccupations et font le cours à leurs rythmes. Pour peu que l’un d’entre nous commette une erreur, ils s’énervent et le punissent sévèrement.[E3, collégien]

En ce qui concerne les élèves, ils sont en majorité respectueux mais comme dans tout groupe, il y en a qui provoquent parfois des tensions et adoptent des comportements violents, ce qui crée un sentiment d’insécurité chez les autres élèves, les enseignants et l'administration.

Dans le contexte décrit ci-dessus, la vie quotidienne de l'école ne peut pas relever de l'approximation ; elle doit s'organiser autour de certaines normes ou règles qui doivent conditionner le comportement de tous les membres de la communauté scolaire.

8.2. Le règlement intérieur

Le cadre règlementaire qui régit la vie quotidienne de l'école est dénommé « règlement intérieur » ou « règlement scolaire ». Il est censé définir les droits et les devoirs des différents acteurs scolaires. Mais dans la réalité, le règlement intérieur comporte plus de devoirs que de droits et s'applique plus aux élèves qu'aux responsables scolaires.

Le Précis de législation et d'administration scolaires au Togo justifie l'élaboration d'un règlement scolaire en ces termes :

La vie en groupe n'est possible que si chacun des membres comprend et accepte la nécessité de faire des concessions, de se soumettre à certaines règles, à des contraintes ou prescriptions. C'est le condensé de ces prescriptions qui constitue à l'école le règlement scolaire, une espèce de code qui rappelle chacun à l'ordre établi, une sorte de garde-fou qui arrête les débordements intempestifs. Ainsi le règlement organise la vie de la communauté scolaire, contribue à maintenir l'ordre et la discipline sans lesquels il est absolument illusoire de s'attendre à un quelconque résultat sérieux40.

Ce même document fournit un canevas de rédaction d'un règlement scolaire en cinq points : 1) conditions d'inscription, 2) tenue et équipement, 3) discipline et domaine de l'école, 4) en classe et 5) responsabilités. Comme tout canevas, il ne s'impose pas. Il ne s'agit que d'un guide pour orienter les rédacteurs.

40 Ministère de l'Enseignement des premier et deuxième degrés (1983), Précis de législation et d'administration

scolaires, Lomé : NEA & Fernand Nathan, p. 11.

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8.2.1 La rédaction du règlement intérieur

D'une façon générale, et on peut prendre le risque de l'avancer, dans tous les établissements scolaires du Togo, le règlement intérieur est entièrement rédigé par l'administration (directeur, censeur, surveillant) assistée de quelques enseignants. Les élèves ne sont pas associés à cette rédaction. Même si dans certains cas, il est signalé que certaines révisions de ce règlement s'inspirent des critiques et des suggestions de ceux-ci.

Durant les vacances, une commission siège et actualise le règlement intérieur selon les failles constatées au cours de l’année scolaire. A la rentrée, le règlement intérieur est porté à la connaissance des élèves. En retour, ces derniers attirent notre attention sur certaines lacunes ou exagérations. De manière générale, chacun tire la couverture de son côté. [P12, proviseur]

Cette situation pose donc la question du respect d'un règlement en lequel la majorité des élèves ne se reconnaissent pas. Au sein des administrations scolaires, on est unanime pour dénier aux élèves le droit de participer à la rédaction du règlement intérieur.

Les élèves ne sont pas impliqués dans l’élaboration du règlement intérieur. On ne peut pas les associer. Nous avons des objectifs à atteindre et il nous revient de définir les meilleurs moyens pour les atteindre. [P6, proviseur de lycée]

Pour les élèves, ce n'est pas l'existence d'un règlement à l'école qui leur pose problème. Mais plutôt certaines clauses qu'ils jugent trop arbitraires. Quoiqu'il en soit que la rédaction du règlement soit l'œuvre d'un groupe ou de toute la communauté scolaire, le plus important est que les membres de la collectivité pour laquelle il est élaboré en fassent leur affaire et en respectent les clauses41. D'où la nécessité de le vulgariser et de s'assurer de sa bonne compréhension par tous.

8.2.2 La connaissance du règlement intérieur

Les administrations scolaires attachent du prix à la connaissance du règlement intérieur par les élèves. Pour ce faire, plusieurs formules sont employées. D'abord, l'affichage qui consiste à placarder dans les salles de classe une copie du règlement pour que celui-ci soit à portée de vue des élèves. Ensuite, la diffusion orale qui intervient à la rentrée. Le règlement est lu sous le mât lors du rassemblement ou en classe par le professeur titulaire. Cette diffusion orale se fait aussi occasionnellement lors de la survenue d'un cas d'indiscipline. Enfin, dans les établissements confessionnels et dans certains établissements privés laïcs le règlement intérieur est aussi diffusé en version papier.

Chaque année, un carnet de correspondance contenant le règlement intérieur est distribué aux élèves ; et s’il le faut, nous nous déplaçons dans les classes pour faire connaître davantage le règlement et répondre aux questions des élèves. [P6, proviseur de lycée]

8.3 Les institutions disciplinaires

L'institution d'un règlement a pour but de maintenir l'ordre et la discipline dans le périmètre scolaire. Néanmoins elle ne saurait par elle-même permettre d'atteindre ce but. Ce qui justifie la mise en place de certaines institutions que nous qualifierons ici de disciplinaires. On en distingue deux : la surveillance et le Conseil de discipline.

41 Idem.

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8.3.1 Le surveillant de l'école

Tous les établissements d'enseignement secondaire sont dotés d'au moins un surveillant – également appelé préfet de discipline. Personnage haut en couleurs par sa rigueur et sa sévérité – parfois poussé à l'extrême – il veille à l'application du règlement intérieur et administre des punitions aux élèves en cas de fautes constatées par lui ou signalées par un enseignant, un membre de l'administration et même un parent.

Dans un passé récent, le surveillant était la figure tutélaire du règlement intérieur. De ce fait, il était craint voire redouté par les élèves parce qu'il ne ménageait pas le bâton ou la chicote. Depuis la réactivation d'un arrêté ministériel interdisant les châtiments corporels à l'école, son autorité et sa marge de manœuvre en matière de sanction disciplinaire se sont amenuisées : ses ordres sont discutés et font parfois l'objet de négociation. Selon qu'il est relativement jeune ou adulte, le surveillant est perçu comme un grand-frère ou un père et traité comme tel, non sans courtoisie.

Il y a toujours des têtus, des récalcitrants. A ceux-là, nous donnons de petites punitions d'une heure. Ils balaient l’établissement ou sont contraints à s’asseoir à même le sol. [P8, surveillant général de lycée]

Aujourd'hui, les surveillants ne sanctionnent plus que des fautes légères comme le retard, l'absentéisme, le bavardage en classe... Quant aux autres fautes dites graves, ils se réfèrent à un niveau supérieur.

8.3.2 Le Conseil de discipline

Le Conseil de discipline est une instance suprême qui ne se réunit que de façon extraordinaire pour statuer sur les cas d'indiscipline graves, notamment ceux qui dépassent la compétence du surveillant. Il détermine la sanction à appliquer qui peut aller de l'exclusion temporaire à l'exclusion définitive.

Cette institution est composée des trois personnages principaux de l'administration (proviseur, censeur et surveillant) qui en assument respectivement la présidence, la vice-présidence et le secrétariat général. Elle comprend aussi un à deux représentants de l'Association des Parents d’Elèves, les professeurs concernés dont le titulaire de classe, et les délégués des élèves.

Les affaires portées devant elle sont généralement des actes de vol, de violences, d'intimidation, de tricheries ou de fraudes, et parfois la récidive de fautes légères. Lorsqu'il se réunit le Conseil de discipline auditionne les parties prenantes de l'affaire soumise à son jugement et délibère souverainement. Le récit des faits et la décision finale prise par le Conseil sont consignés par écrit et transmis à l'inspection de tutelle et à la direction de l'enseignement.

Parfois il peut arriver que le problème dépasse le Conseil de discipline dans ce cas, l'administration fait appel aux services compétents.

Un élève ayant sérieusement frappé une de ses camarades a refusé de se soumettre à la décision du Conseil de discipline qui a décidé de le punir et lui faire payer les produits pharmaceutiques prescrits par le médecin à celle qu’il a blessée. Alertée, la police est venue l'appréhender dans l'enceinte de l’établissement. Selon le directeur, ces cas de violence extrême sont rares mais lorsqu’ils se produisent, il fait tout son possible pour résoudre le problème à son niveau, parfois avec l’aide du Conseil de discipline ; ce n'est qu'au cas où le problème persiste qu’il fait appel aux services compétents.

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Tout compte fait, dans ces établissements les procédures de résolution des conflits sont tributaires de l’importance du conflit ; s'il s'agit d'un menu problème, l'affaire se règle entre élèves au niveau de la classe, ou s'il le faut avec l’intervention du professeur titulaire ou du surveillant. Si le problème est grave, il est porté à la connaissance du directeur qui, soit tranche seul l'affaire, soit convoque le Conseil de discipline pour une décision collégiale. De par sa composition et son fonctionnement, le Conseil de discipline est l'une des institutions les plus démocratiques de l'école. Mais ses prérogatives ne suffisent pas pour structurer le champ d'action éventuel de la communauté scolaire par analogie à l'heureuse formule foucaldienne.

IX. Gestion et développement de l'école

L'éducation à la citoyenneté est synonyme d'une participation active des élèves à la construction de la vie quotidienne de l'école. Généralement, cette participation se réalise à travers des organes formels. Les élèves sont-ils associés à la gestion et au développement de leurs écoles ?

9.1 Les Comités d'élèves

Dans l'enseignement secondaire, il existe au niveau de chaque classe un Comité d'élèves composé du major, du sous-major, d'un secrétaire et parfois d'un ou deux conseillers ; et à l’échelle de l’établissement, il y a un major général, un major général adjoint et un secrétaire.

9.1.1 La formation du Comité d'élèves

Un comité d'élèves provisoire dont les membres sont nommés par le professeur titulaire ou l'administration, est formé en début d'année. Ce comité provisoire a pour mission de gérer les affaires courantes jusqu'à la tenue d'une élection. Les comités de classes sont élus au suffrage universel direct tandis que les comités généraux sont élus au suffrage universel indirect par deux représentants des comités de classes.

Il y a un temps pour soumettre sa candidature et les élèves ont le temps de battre campagne. Puis, ils votent ; chaque année, l'élection du comité est un moment fantastique dans notre établissement. [P9, surveillant de lycée]

Si dans tel établissement tous les élèves sont éligibles, dans tel autre, l'administration examine les candidatures et écarte les « pagailleurs »42. Toujours est-il que la formation des comités constitue un moment d'apprentissage démocratique en ce qu'il offre la possibilité aux élèves de jouer le rôle d'électeurs et de candidats à un scrutin.

9.1.2 Les attributions des Comités

Les membres du Comité d'élèves représentent leurs camarades auprès des enseignants et de l'administration scolaire, et vice versa. Très peu associés à la gestion de l'école, ils ne jouent souvent que le rôle de porte-parole dans les deux sens, sans pouvoir décisionnel.

Il y a certains problèmes que les enfants ne comprennent pas facilement. On explique la situation d’abord au Comité de l’école qui à son tour l’explique aux élèves. L’année dernière, c’était la méthode utilisée quand les élèves ont voulu nous contraindre à repousser la date des examens. [P2, directeur des études]

42 Terme courant employé dans l'enseignement au Togo pour désigner les élèves turbulents ou taquins.

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Le Comité des élèves a aussi pour rôle de veiller à l'ordre dans les classes aux heures d'étude (heures libres). Hormis ces rôles, les membres du comité des élèves sont des élèves à part entière. Ils ont les mêmes devoirs que leurs camarades.

Par ailleurs, il est formellement interdit au Comité des élèves de se mêler des questions d'ordre pédagogique. Pour toute revendication en ce sens, ils doivent s'adresser à leur professeur titulaire, seul habilité à intervenir directement auprès des enseignants concernés et auprès de la direction des études. Et c'est justement cette limitation de pouvoir du Comité des élèves qui est remise en cause dans la totalité des établissements visités durant cette étude.

Si un professeur ne fait pas bien le cours et si on le lui dit, il s'énerve ou ne prend pas en compte ce qu'on dit. Nous ne pouvons pas le dire au proviseur parce qu'il ne nous permet pas de nous exprimer librement. Nous pensons que c'est une injustice. [E4, lycéen]

9.2 Les autres arrangements institutionnels formels dans les écoles secondaires

Les écoles secondaires disposent aussi d'autres arrangements institutionnels formels que nous présentons brièvement dans le tableau ci-après.

Dénomination Composition Missions Périodicité (ordinaire)

Conseil des professeurs Administration et professeurs

Statuer sur le rendement des élèves et sur d'autres questions pédagogiques

En début d'année et à la fin de chaque trimestre ou semestre

Conseil de classe Professeur titulaire et élèves

Élire le Comité de classe et aborde des questions cruciales touchant aux élèves

Occasionnelle

Association des parents d'élèves43

Parents ou tuteurs d'élèves Directeur d'école (conseiller de droit)

• Contribuer au développement de l'éducation en prenant des initiatives pour la réalisation des objectifs du gouvernements ;

• S'informer sur tout ce qui concerne l'organisation et la vie de l'école ;

• Veiller aux intérêts matériels et moraux de l'école ;

• Étudier et aider à réaliser les œuvres péri et postscolaires ;

• Favoriser l'interaction entre l'école et son milieu.

Deux fois par an

Comité de gestion des ressources des établissements scolaires44

Parents d'élèves, directeur d'école, représentant des

• Acquérir et gérer les fournitures scolaires ;

• Réceptionner et gérer les manuels scolaires ;

Une fois par trimestre

43 Ministère des enseignements primaire secondaire et de l'alphabétisation (2008), Arrêté n°138/MEPSA/CAB/SG

réglementant l'organisation et le fonctionnement des associations des parents d'élèves dans les établissements scolaires, Lomé, 26 novembre, multigr. 4p.

44 Ministère des enseignements primaire secondaire et de l'alphabétisation (2008), Arrêté n°139/MEPSA/CAB/SG portant organisation et fonctionnement des comités de gestion des ressources des établissements scolaires, Lomé, 26

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enseignants, représentant de la communauté locale

• Gérer les subventions allouées à l'établissement ;

• Examiner et approuver le budget de fonctionnement de l'établissement ;

• Contrôler les dépenses effectuées par le chef d'établissement ;

• Examiner et approuver les comptes de fin d'exercice.

De tout ce qui précède, il faut en déduire que le Conseil de classe est le seul arrangement institutionnel formel qui comporte des élèves. Vu que ses compétences s'organisent dans le cadre strict de la classe et vise d'ailleurs à résoudre des problèmes ; il faut en déduire qu'en tant que tel, ce Conseil n'a aucune emprise directe sur la gestion et le développement de l'école. Ce qui nous conduit à nous intéresser aux processus de prise de décisions concernant le présent et l'avenir de l'école.

9.3 Les procédures décisionnelles à l'école

L'organigramme des collèges et des lycées peut se présenter comme suit : à la tête se trouve le proviseur (ou le directeur) qui a sous ses ordres le censeur (directeur des études), le personnel administratif (composé de l’économe, des secrétaires et des surveillants) ; ensuite nous avons les enseignants et les parents d’élèves et enfin viennent les élèves. Habituellement, les procédures de prise de décisions varient selon le problème qui se présente ; lorsqu’il s’agit d’un menu problème (problème d’hygiène, de propreté de la classe…), les élèves peuvent prendre des décisions et régler le problème entre eux, lorsque le problème est relatif à la discipline (par exemple un élève qui perturbe un cours), l’enseignant peut décider de le punir lui-même ou l’envoyer aux surveillants qui se chargeront de le punir. Lorsque le cas d’indiscipline est grave (par exemple un élève qui agresse ou lève la main sur un professeur), le problème est immédiatement porté à la connaissance du directeur qui peut unilatéralement prendre une décision ou réunir le Conseil de discipline qui décidera de la punition à infliger à l’élève.

En ce qui concerne le fonctionnement de l’établissement, le directeur prend unilatéralement certaines décisions ; il décide par exemple tout seul (en vertu de l’autorité qui lui est conférée) de la sanction à prendre en cas de non assiduité ou de négligence de ses subordonnés. Il fait appliquer certaines mesures disciplinaires, impose sa méthode de travail, sa gestion des infrastructures de l’établissement… Outre ces prises de décisions unilatérales, le directeur réunit souvent le personnel administratif, les enseignants ou les parents d’élèves pour prendre des décisions face à des problèmes comme le mauvais rendement des élèves, les difficultés financières de l’établissement, les cas graves d’indiscipline… . Dans tous les cas, le processus de prise de décisions suit l'ordre hiérarchique et dépend du problème qui se pose. Autre constante, les décisions relatives à la formation (comme l’introduction ou la suppression de certaines matières) sont prises sans qu'on ne consulte les élèves.

9.4 Les responsabilités partagées et les collaborations éventuelles

Dans les établissements qui ont fait objet de notre étude, la gestion des affaires scolaires ne

novembre, multigr. 4p.

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concerne pas que le directeur, elle implique tous les acteurs. Sur le plan administratif, le directeur ou le proviseur est le premier responsable, il se charge du recrutement des élèves, contrôle l'assiduité et le sérieux au travail des enseignants, intervient dans les cas graves d'indiscipline et supervise l'entretien et la bonne gestion des infrastructures de l'établissement. Dans l'exécution de ces tâches, il se fait aider par ses plus proches collaborateurs (les secrétaires, l'économe et les surveillants), les enseignants, les parents d'élèves et les élèves.

Concernant la formation des élèves, la tâche revient principalement aux enseignants. Ces derniers sont appelés à dispenser aux élèves les cours dont ils ont la charge et à veiller à ce que les objectifs pédagogiques de chaque séquence de cours soient atteints. Dans cette tâche ils sont contrôlés par le directeur qui veille à ce qu’ils finissent les programmes avant la fin de l’année, et supervisés par les inspecteurs qui leur apportent leurs concours pour une meilleure formation des élèves.

Par rapport à la discipline, les surveillants sont appelés à jouer les premiers rôles ; c'est ainsi qu'ils veillent au respect du règlement intérieur et règlent les litiges entre les élèves. Habituellement lorsqu’un élève est passible de punition, ce sont eux qui se chargent de le punir. Si la faute commise par l'élève est grave, le surveillant soit saisit le directeur qui règle le problème, soit convoque les parents de l’élève pour une prise de décision concertée.

Pour des prises de décisions relatives aux activités culturelles et sportives, les élèves sont invités à faire partie du comité d’organisation et surtout à faire des propositions.

Pour ce qui concerne les activités de semaine culturelle, nous confions toute l’organisation aux élèves, nous leur demandons de nous proposer un calendrier détaillé des activités que nous étudions, et dès que nous l’approuvons, les activités démarrent. [P5, directeur de CEG]

Les acteurs susmentionnés jouent chacun un rôle bien déterminé ; ceci permet de résoudre plus facilement les problèmes qui se posent à chacun d'entre eux et de maintenir une stabilité dans le fonctionnement de l’établissement. De tout ce qui précède, nous dirons que la participation des élèves aux prises de décisions est mi-figue mi-raisin ; car si pour des prises de décisions relatives aux activités culturelles et sportives ils sont fortement impliqués, pour celles relatives à leur formation c'est-à-dire celles pédagogiques, on ne les associe guère, ils sont tout simplement écartés.

X. Synthèse des résultats

Au terme de cette étude, il faut noter que la formation de citoyens responsables a toujours été une préoccupation au Togo. Que ce soit dans les sociétés traditionnelles que dans les écoles coloniales ou postcoloniales, une attention est accordée aux produits de l'école du point de vue de leur rôle futur dans la société. Cette étude qui s'est intéressée aux actions de formation citoyenne mises en œuvre l'enseignement secondaire au Togo a permis de mettre en évidence quelques faits majeurs.

10.1 Une politique volontariste d'éducation à la citoyenneté démocratique

Au Togo, il existe une volonté politique quant à l’introduction de l’ECM à l’école. Le Président Eyadéma n'est-il pas allé lui-même distribuer des manuels de droits de l'homme aux élèves du Lycée de Tokoin ? [P10, fonctionnaire du MEPS]

La déclaration reprise ci-dessus illustre le contexte de la mise en œuvre de l'éducation à la

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citoyenneté au Togo. En effet, des indépendances à nos jours, les gouvernements successifs se sont intéressés à la formation civique des populations et à leur éducation dans le cadre scolaire, quels que soient les objectifs sous-jacents. Un intérêt qui s'est traduit par la création d'un portefeuille ministériel de la formation civique et, plus tôt, la réalisation d'un manuel d'éducation civique et politique dans les années 1980 et l'élaboration de curriculum d'éducation civique et morale pour les trois degrés d'enseignement dans les années 1990 – même si l'impulsion de cette dernière action est venue de l'extérieur.

Au fil du temps, les curricula d'éducation ont connu des innovations nécessaires. Les tout derniers témoignent d'une maîtrise de tous les aspects de la question de l'éducation à la citoyenneté par ses concepteurs. Ces curricula ne se bornent pas à énumérer des savoirs, des valeurs et des compétences à transmettre mais ils indiquent aussi les moyens à mettre en œuvre en fonction des objectifs poursuivis. Preuve s'il en était besoin d'un réel engagement des différents acteurs concernés.

10.2 Une pratique en demi-teinte de l'éducation à la citoyenneté

Jusqu'à présent, l'ECM n'est pas enseignée dans tous les établissements scolaires en dépit des instructions officielles. Là où elle est enseignée, les heures allouées ne lui sont toujours pas consacrées. Par ailleurs, l'évaluation des apprenants reste informelle à l'école et facultative aux examens alors qu'elle est supposée être obligatoire à tous les niveaux.

En définitive, il s'est instauré une pratique en demi-teinte de l'éducation à la citoyenneté qui ne saurait avoir la prétention d'atteindre les objectifs initiaux. Lesquels objectifs se trouvent sacrifiés sur l'autel d'une politique éducative dépourvue des moyens de ses ambitions. Ces moyens manquants ont pour noms : matériels didactiques, ressources humaines, et pourquoi pas financières.

10.3 Autoritarisme paternaliste comme ethos

Le climat scolaire participe de l'éducation à la citoyenneté. Ce qui suppose que c'est dans l'enceinte scolaire que l'élève sera amené à mettre en pratique les principes démocratiques enseignés lors du cours d'éducation civique. Seulement, force est de reconnaître que les établissements d'enseignement secondaire au Togo ne s'offrent pas comme lieu d'expérimentation de la citoyenneté démocratique. Hormis le conseil de discipline et le fameux comité des élèves, aucune autre institution n'autorise la participation des élèves et n'offre à ceux-ci la possibilité de s'exercer à la liberté d'expression et d'opinion. Même, le règlement intérieur présenté par certains responsables comme la « loi fondamentale » de l'école est rédigé sans la participation des élèves.

A la lumière de la théorie de Likert45, nous sommes là en présence d'un climat organisationnel de type 2 c'est-à-dire un système d'autoritarisme paternaliste caractérisé par une confiance condescendante des responsables à l'égard des subordonnés. La plupart du temps, ce sont les responsables qui s'occupent de prendre toutes les décisions mais consultent quelquefois les subordonnés sur une base individuelle. Le processus de contrôle est toujours centralisé au sommet mais il est parfois délégué aux niveaux intermédiaires et supérieurs. Sous ce type de climat, les subordonnés ont souvent l'impression de travailler dans un environnement stable et structuré.

45 Likert R. (1947) cité par L. Brunet (2001), op. cit.

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10.4 Gestion et développement centralisés

Différents arrangements institutionnels et différents acteurs se partagent la tâche de gestion de l'école. Mais il y a lieu de remarquer la prééminence de l'administration incarnée par le directeur (s'il s'agit d'un collège), ou par le proviseur (s’il s’agit d’un lycée). Le Comité des élèves, mis en place dans les classes et dans tout l'établissement pour être le répondant de la masse, est réduit à la gestion des questions de discipline et d'ordre. L'administration garde la haute main sur le fonctionnement de l'école et délègue les tâches.

Nos observations à ce niveau attestent de la centralisation du pouvoir dans les collèges et lycées et corroborent ce qui a été dit plus haut sur le climat scolaire. De toute évidence, les responsables scolaires et parfois les élèves eux-mêmes accordent trop d'importance à la discipline au point que les questions essentielles de gestion et de développement soient occultées. Ce qui a motivé le commentaire suivant d'un délégué de classe.

Il est temps que les élèves prennent le pouvoir à l’école, le pouvoir de décider. [E6, lycéen]

XI. Analyse des causes de la négligence de l’ECM au Togo

11.1 Les causes politiques

L’histoire récente du Togo marquée par le monolithisme politique entretenu par l’hégémonie du parti unique RPT n’a pas créé un environnement favorable à l’émergence d’une culture démocratique même si les pouvoirs politiques ont toujours prononcé des discours évoquant leur volonté d’inculquer des valeurs démocratiques aux jeunes depuis le cours primaire à travers les cours d’ECM. D’ailleurs, il faut rappeler que les cours d’ECM ont été, jusqu’aux soulèvements populaires des années 1990, dispensés dans un climat d’embrigadement et d’endoctrinement qui a servi les ambitions du pouvoir en place qui, pour continuer à avoir une mainmise sur tout l’appareil de l’État ne tolérait aucune contestation ou ne souffrait d’aucun débat contradictoire puisqu’il fallait « toujours regarder dans la même direction », celle « du guide éclairé », celle « du timonier national ». Telle était la volonté du parti au pouvoir qui, à tous les échelons de l’administration et surtout du système éducatif, veillait et contrôlait les contenus éducatifs surtout ce qui est relatif à l’ECM. La conséquence de tout cela est la faible lisibilité du concept de citoyenneté démocratique dans la population jeune et adulte.

Même si le cours de l’ECM se dispensait, la liberté d’expression qui est supposée l’accompagner était toujours inexistante. Les enseignants risquaient leurs postes ou des affectations punitives s’ils ne restaient pas dans les limites du culte de la personnalité ou dans les idéaux du parti unique. L’étouffement et tout son cortège d’assassinats politiques, de violence et d’arrestation des leaders des mouvements d’opposition dont furent l’objet toutes les tentatives visant à instaurer le multipartisme, ont le plus souvent eu raison des réelles manifestations démocratiques. Ainsi le climat de peur instauré par le parti unique n’a pas favorisé la culture de la citoyenneté démocratique; il a plutôt sapé tout ce qui est entrepris sur le plan éducatif et appelle à des réflexions sur la volonté réelle des gouvernants à promouvoir l’éducation à la citoyenneté démocratique. Les séquelles de cette période dictatoriale sont encore vivaces dans la conscience collective. Que se cachait donc derrière les discours ?

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11.2 Les causes socioculturelles

Sur le plan social, les réflexions peuvent entre autres porter sur la poussée démographique qui met toujours à rude épreuve la scolarisation effective de la population jeune. En effet, la population du Togo se caractérise par son dynamisme démographique, avec un taux d'accroissement naturel de 2,7 % par an, et sa grande jeunesse scolarisable (43 % des Togolais ont moins de 15 ans). Face à cette situation, les infrastructures éducatives du pays se sont souvent avérées insuffisantes pour accueillir et mettre les apprenants dans des conditions adéquates.

Au niveau culturel, la mentalité des adultes est marquée d’une part, par les valeurs de la gérontocratie où seuls les aînés ont toujours raison et où aucune place n’est accordée aux enfants et aux jeunes ; et d’autre part, par l’autoritarisme de l’éducation héritée de la période coloniale. Il est dès lors évident que ce contexte ne constitue pas un cadre propice à l’épanouissement de la culture démocratique et citoyenne. Les jeunes apprenants pour la plupart ne trouvent donc pas de répondants dans leurs familles pour exprimer et vivre les acquis de l’ECM. Les parents, les aînés et même les enseignants n’ont pas encore suffisamment intégré le concept de citoyenneté démocratique pour échanger avec leurs enfants et leurs élèves à propos de certaines questions y afférentes.

La compréhension même du contenu notionnel du concept de citoyenneté démocratique et de ses pratiques n’est pas encore effective au sein de la grande majorité de la population togolaise. Ceci est dû d’une part à la situation d’analphabétisme d’une frange importante de la population et d’autre part, au caractère récent de l’introduction véritable du débat démocratique dans le pays.

11.3 Les causes économiques

Les gouvernants togolais ont toujours affiché la volonté de l’institution d’une discipline chargée d’inculquer des valeurs démocratiques et citoyennes aux jeunes apprenants du secondaire ; mais cette volonté ne s’est pas toujours accompagnée d’une mobilisation financière et matérielle pouvant assurer la délivrance efficace des cours d’ECM. L’état de paupérisation du pays en est pour une bonne part.

En effet, la détérioration des termes de l’échange pour les matières premières et les conditions draconiennes des programmes d’ajustement structurel sans cesse imposées par les bailleurs de fonds (FMI et Banque Mondiale) ont limité les efforts des gouvernants à offrir un accompagnement financier et matériel au système éducatif togolais. Ne faisant pas partie des priorités des ministères en charge de l’éducation, les cours d’ECM sont donc les parents pauvres des financements en faveur desdits départements. L’État ne pouvait donc pas former des enseignants spécialement pour les cours d’ECM et par ricochet, allouer des heures conséquentes à cette matière.

XII. Limites de l'étude

A la fin de cette étude, nous nous empressons d'attirer l'attention du lecteur sur notre préoccupation de départ qui n'est pas d'évaluer les produits de l'enseignement pour en tirer des conclusions sur l'efficacité ou non des écoles secondaires. Il s'est plutôt agi d'explorer le « fonctionnement réel » de ces écoles du point de vue des pratiques visant à inculquer une éducation civique aux élèves, pour les mettre en relation avec les objectifs énoncés dans les curricula et accessoirement dans les discours officiels ou officieux, pour en dégager les conclusions qui s'imposent.

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Que le lecteur ne soit donc pas surpris de ne pas trouver dans ce document des développements sur le lien entre l'instruction reçue à l'école et les comportements des jeunes. Toute chose intéressante qui pourrait faire l'objet d'une recherche ultérieure.

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Conclusion et recommandations

Finalement, on retient qu'il existe une inadéquation entre les objectifs de départ et les moyens déployés sur les plans humain, matériel et pédagogique. En effet, la politique scolaire affirme clairement le rôle de l'école dans la formation des citoyens responsables et les programmes en vigueur comportent une discipline dédiée à l'éducation à la citoyenneté dont la finalité est de « développer chez l'élève le sens de l'intérêt général, le respect de la loi, l'amour de la Patrie (sic) »46. Ces programmes d'études mettent l'accent sur la nécessité pour l'enseignant de cette discipline d'adopter un style d'enseignement permissif soutenu par l'exemplification dans la classe, au sein de l'établissement scolaire, dans les centres d'apprentissage, en famille, au service, dans la rue, dans les réunions publiques, bref, dans tous les actes de la vie quotidienne47. Cependant, on note une insuffisance et parfois même une absence de ressources humaines, pédagogiques et didactiques dédiées à l'ECM dans les écoles. Cette situation, aggravée par un manque d'information des administrations scolaires sur la conduite de l'ECM, induit dans la pratique une distorsion générale ou partielle entre les principes de citoyenneté démocratique, d'une part, et d'autre part, le climat et la culture scolaires, la gestion et le développement de l'école. On peut dès lors conclure à l’échec de l'enseignement secondaire au Togo dans la mise en œuvre de l'éducation à la citoyenneté démocratique. Attendre d'un tel système éducatif qu'il forme des citoyens responsables et actifs ne serait qu'un leurre dans la mesure où l'enseignement secondaire togolais, comme nous venons de l'analyser, se destine plus à l'acquisition de connaissances qu'au développement d'une pensée critique, à la construction d'attitudes et de valeurs appropriées et à la participation active48.

Une constante que mettent en lumière les résultats de cette étude et qui pourrait servir à la construction d'un modèle exploratoire, est la disciplinarisation de l'école. En d'autres termes une focalisation voire une fixation des acteurs de l'école sur la discipline. Il se dégage l'impression que la vocation actuelle de l'école consiste à éduquer ou à instruire l'individu en le disciplinant. Sinon comment comprendre que le règlement intérieur ainsi que tous les arrangements institutionnels formels qui existent au sein des écoles fondent leur raison d'être sur la discipline ? Comment comprendre l'abondance de punitions dans les écoles ? Plusieurs explications pourraient être fournies à ce phénomène. Mais quelque soit l’explication fournie, cette situation témoigne encore de la difficulté du système éducatif à éduquer à la citoyenneté démocratique.

De ces conclusions, nous pouvons émettre quelques recommandations à l'endroit des acteurs du système éducatif togolais.

D'abord, nous suggérons au Ministère des Enseignement Primaire et Secondaire et de l'Alphabétisation et au Ministère de l'Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, de veiller à la généralisation de l'enseignement de l'ECM dans toutes les écoles du Togo. Cette généralisation doit s'accompagner de certaines mesures comme l'aménagement des curricula existants notamment ceux d'histoire et géographie et de français, de sorte à permettre aux enseignants de les faire coexister avec une autre matière sans qu'ils ne soient tentés de privilégier l'une sur l'autre. En outre, il faudrait revoir le volume horaire des enseignements actuels pour éviter de surcharger les élèves, et faire de l’ECM une matière obligatoire aux différents examens nationaux (BEPC, BEP, BAC 1 et BAC 2).

46 Ministère de l'Education Nationale et de la Recherche (1997), op. cit., p. 5. 47 Idem, p. 4. 48 Alejandro Tiana (2002), « L'éducation pour apprendre à vivre ensemble : les jeunes sont-ils préparés ? »,

Perspectives, N°121, Vol. XXXII, n°1, mars, p. 40 (39-51) et Eurydice (2005), L'éducation à la citoyenneté à l'école en Europe, Bruxelles : Eurydice, p. 11.

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A l’endroit de l’Institut National des Sciences de l’Education et des Ecoles Normales Supérieures, chargés de la formation des professeurs du secondaire, nous recommandons d’inclure dans leurs enseignements les contenus et exigences de l'ECM. Ceci permettra aux professeurs de français et d’histoire et géographie de dispenser ce cours qui ne relève pas toujours de leurs compétences initiales, sans qu'on ait besoin de former spécifiquement des professeurs d’ECM.

D’une manière générale, nous proposons que soit ré-instituée la notation de la conduite. Concrètement, il s’agira de demander à tout le corps professoral, assisté de l’administration de donner une note générale à la classe et une note individuelle aux élèves en fin de trimestre pour apprécier le comportement de ceux-ci. Ce qui serait un bon système d’évaluation du savoir-faire et du savoir-être des élèves en matière de citoyenneté ; l’évaluation des connaissances étant toujours dévolue au professeur chargé de la matière.

Enfin, nous recommandons aux responsables scolaires de créer un climat et une culture scolaires propices à l’éducation à la citoyenneté en faisant participer les élèves et les enseignants à la gestion et au développement de l’école. Ceci suppose la responsabilisation des élèves en matière de gestion et la mise en place d’organes consultatifs ou décisionnels comprenant tous les acteurs de l’école. Les élèves ne sont pas dupes, ils sauront distinguer les changements de façade des vrais.

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ANNEXES

Annexe I Guide d'entretien dans les collèges et lycées

Annexe II Guide d'entretien avec les autorités

Annexe III Guide de focus-group avec les élèves

Annexe IV Evaluative framework (UNESCO)

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ANNEXE I : GUIDE D'ENTRETIEN DANS LES COLLÈGES ET L YCÉES

1. Votre école a-t-elle un règlement intérieur ?

2. Ce règlement intérieur est-il connu des élèves ?

3. Par quel moyen et à quelles occasions les élèves ont-ils connaissance du règlement intérieur ?

(Demander une description)

4. L'éducation civique et morale est-elle au programme dans votre établissement ?

5. S'agit-il d'un cours obligatoire ou optionnel ?

6. Combien d'heures par semaine ou par mois ce cours est-il dispensé ? (Vérifiez à partir de l'emploi

du temps hebdomadaire des élèves et auprès des élèves)

7. Y a-t-il des devoirs, des compositions et des examens en éducation civique et morale ?

8. Comment le cours d'éducation civique et morale est-il dispensé ? Quelle approche

d'enseignement mettez-vous en œuvre ? (approche traditionnelle ou pédagogie active, demander

une description)

9. Quelle relation les élèves entretiennent-ils avec les responsables scolaires et les enseignants ? En

tant qu'autorité, êtes-vous craint ou respecté ?

10. (Pour les responsables et enseignants) Y a-t-il une communication entre vous et vos élèves ? A

quelles occasions ? Comment cela se fait-il ? (Demander un commentaire)

11. (Pour les élèves) Y a-t-il une communication entre les responsables scolaires et vous ? A quelles

occasions ? Comment cela se fait-il ? (Demander un commentaire)

12. Vous souvenez-vous d'un cas d'indiscipline dans votre école cette année ou l'année écoulée ?

Qu'est-il arrivé ?

13. Comment avez-vous résolu ce problème ?

14. Les élèves ont-ils participé à la résolution de ce problème ? (Demander un commentaire)

15. Y a-t-il des cas de bagarres, de violences, d'intimidation dans votre école ?

16. Quelles sont les sanctions prévues ?

17. Comment ces sanctions sont-elles prises, décidées et suivies ? (Demander un commentaire)

18. Les élèves sont-ils membres du Conseil de l'école ?

19. Les élèves participent-ils à la vie de l'école ? Ont-ils des responsabilités spécifiques ? Si oui,

lesquelles ?

20. A votre avis que faire pour améliorer l'enseignement de l'éducation civique et morale ?

21. Avez-vous des propositions pour que l'école fonctionne bien sur le plan de la citoyenneté

démocratique ?

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ANNEXE II : GUIDE D'ENTRETIEN AUTORITÉS

1. Renseignements généraux Enquêteur : Date : Organisation : N° d'ordre : Fonction de l'enquêté : 2. Thèmes

1. Existe-t-il un concept national de « citoyenneté démocratique » ? Si oui quel sens revêt-il dans les sources législatives et les définitions officielles ?

2. Quelles sont les principales caractéristiques de la politique éducative concernant le rôle du système scolaire dans le développement d’une « citoyenneté » telle que définie dans les sources officielles ?

3. De quelle manière la question de la citoyenneté est-elle explicitement traitée dans les programmes d’enseignement ?

4. Quelles approches sont suggérées dans ce domaine ?

5. Cette matière est-elle obligatoire ou optionnelle ?

6. Quels sont les objectifs et le contenu de l’éducation à la citoyenneté tels que spécifiés et expliqués dans le curriculum ?

7. Le programme d’enseignement se concentre-t-il sur les principes d’une participation active des élèves à la vie en société ainsi que sur leur conception de l’appartenance à une communauté et celle du partage des valeurs ?

8. Y-a-t-il des objectifs cibles spécifiés pour les différents types de compétences que les élèves devraient acquérir dans le cadre de l’éducation à la citoyenneté ?

9. Dans quelle mesure l’organisation de l’école et sa « culture » visent à contribuer au développement de la citoyenneté parmi les élèves ?

10. Comment les écoles impliquent-elles les élèves dans la démarche de contribuer à un environnement d’apprentissage sûr, démocratique et respectueux ? Par exemple, les élèves sont-ils impliqués dans les organes consultatifs et décisionnels au sein ou en dehors de leur école ?

11. Quels sont les arrangements formels ou informels permettant aux parents de s’impliquer dans l’élaboration d’un environnement d’apprentissage sûr, démocratique et respectueux à l’école ?

12. De quelle manière les écoles s’ouvrent-elles à la société ?

13. Plus particulièrement, se fixent-elles des objectifs qui permettent aux élèves de s’impliquer dans la communauté locale, de renforcer leur sens d’appartenance à cette communauté et de partager ses valeurs ?

14. Existe-t-il une évaluation spécifique des élèves ? Autrement dit, les acquis, les progrès et les

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compétences des élèves sont-ils mesurés dans ce domaine ?

15. Les écoles sont-elles évaluées par rapport à la mise en œuvre du curriculum ou la mise en place de mesures favorisant le développement de la citoyenneté ?

16. Quelles sont les exigences que doivent remplir ceux qui enseignent et promeuvent la théorie et la pratique de la citoyenneté ?

17. De quelle manière ces exigences se reflètent-elles dans la formation des enseignants (initiale et continue) ?

18. Des dispositions existent-elles pour fournir un soutien aux enseignants de l’éducation à la citoyenneté, tel que l’aide de personnel de soutien, des conseillers spécialisés, des guides ou manuels d’enseignement spécifiques ?

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ANNEXE III : GUIDE FOCUS GROUP ÉLÈVES

1. Renseignements généraux Enquêteur : Classe : Date : Type d'établissement : 1 Public 2 Privé Laïc 3 Confessionnel N° d'ordre : Niveau d'étude : Secondaire 2. Thèmes

Citoyenneté démocratique dans les programmes d'étude et dans l'enseignement 1.1. Quelles sont les matières qui traitent des questions de droits de l'homme, de civisme, de démocratie, de population, des institutions ? 1.2. Quel est le volume horaire moyen consacré à cette (ces) matière(s) par semaine ? 1.3. Quels sont les sujets généraux qui sont abordés ? Pouvez-vous citer quelques-uns ? 1.4. Quels sont les sujets en relation avec la citoyenneté que vous aimeriez voir figurer dans cette (ces) matières ?

Citoyenneté démocratique dans la culture et le climat scolaires 2.1. Selon vous, l'école togolaise est-elle démocratique ? 2.2. Pouvez-vous justifier votre réponse ? 2.3. Qu'est-ce qui dans le climat et la culture scolaires vous semble en contradiction avec les principes démocratiques ? Pouvez-vous justifier votre réponse ? 2.4. Connaissez-vous le règlement intérieur de votre école ? 2.5. Que dit le règlement intérieur de votre école sur la citoyenneté (discipline, relation avec les camarades et les enseignants...) ? 2.6. Le règlement intérieur de votre école intègre-t-il les principes de la citoyenneté démocratique ?

Citoyenneté dans la gestion et le développement

3.1. Les élèves participent-ils à la gestion de l'école ? 3.2. Avez-vous des représentants (délégués) auprès de l'administration ? 3.3. Quel est leur rôle ? 3.4. Quel devrait être leur rôle ?

Niveau de satisfaction et propositions

4.1. Êtes-vous satisfaits de la façon dont les questions de citoyenneté sont enseignées ou vécues dans votre école ? 4.2. A votre avis, que faire pour améliorer les rapports entre les enseignants et les élèves ? 4.3. Que faire pour améliorer les rapports entre les élèves et leur entourage (parents, voisins du quartier, environnement, autorités etc.) 4.4. Avez-vous d'autres propositions pour que l'école fonctionne bien sur le plan de la citoyenneté démocratique ?

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ANNEXE IV : EVALUATIVE FRAMEWORK

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Tables des matièresSommaire exécutif............................................................................................................................... 4 Sigles, abréviations et acronymes utilisés ........................................................................................... 5 Introduction ......................................................................................................................................... 6 I. Revue sélective de la littérature ....................................................................................................... 6 II. Objectifs de l'étude.......................................................................................................................... 8

2.1 Objectif général ............................................................................................................................. 8 2.2 Objectifs opérationnels.................................................................................................................. 8

III. Contexte de l'étude : l'enseignement secondaire au Togo.............................................................. 9 3.1 Le premier cycle ............................................................................................................................ 9 3.2 Le second cycle ............................................................................................................................. 9

IV. Méthodologie ............................................................................................................................... 10 4.1 Méthodes et techniques de recherche .......................................................................................... 10 4.2 Sites de l'étude ............................................................................................................................. 10 4.3 Déroulement du travail de terrain.................................................................................................11 4.4 Traitement et analyse des données................................................................................................11

V. Brève histoire de l'éducation à la citoyenneté au Togo ..................................................................11 5.1 L'éducation à la citoyenneté dans le Togo précolonial .................................................................11 5.2 Les actes des colonisateurs en matière d'éducation à la citoyenneté........................................... 12

VI. Education à la citoyenneté dans les programmes d'études au secondaire ................................... 14 6.1 Education civique et formation civique....................................................................................... 14

6.1.1 Education civique ..................................................................................................................... 14 6.1.2 Formation civique..................................................................................................................... 14

6.2 Politiques scolaires en éducation à la citoyenneté....................................................................... 15 VII. Enseignement et apprentissage de la citoyenneté au secondaire ............................................... 16

7.1 Approches de l'ECD dans l'enseignement secondaire ................................................................. 16 7.1.1 Temps alloué............................................................................................................................. 16 7.1.2 Méthodes et procédures d'enseignement et d'apprentissage..................................................... 17 6.1.3 Evaluation et suivi .................................................................................................................... 18

VIII. Culture et climat scolaires ........................................................................................................ 19 8.1 Les relations entre les élèves et les responsables : entre courtoisie et tension ............................ 19 8.2. Le règlement intérieur ................................................................................................................ 20

8.2.1 La rédaction du règlement intérieur.......................................................................................... 20 8.2.2 La connaissance du règlement intérieur ................................................................................... 21

8.3 Les institutions disciplinaires ...................................................................................................... 21 8.3.1 Le surveillant de l'école ............................................................................................................ 21 8.3.2 Le Conseil de discipline ........................................................................................................... 22

IX. Gestion et développement de l'école ........................................................................................... 22 9.1 Les Comités d'élèves ................................................................................................................... 23

9.1.1 La formation du Comité d'élèves.............................................................................................. 23 9.1.2 Les attributions des Comités..................................................................................................... 23

9.2 Les autres arrangements institutionnels formels dans les écoles secondaires ............................. 24 9.3 Les procédures décisionnelles à l'école ....................................................................................... 25 9.4 Les responsabilités partagées et les collaborations éventuelles................................................... 25

X. Synthèse des résultats ................................................................................................................... 26 10.1 Une politique volontariste d'éducation à la citoyenneté démocratique ..................................... 26 10.2 Une pratique en demi-teinte de l'éducation à la citoyenneté ..................................................... 27 10.3 Autoritarisme paternaliste comme ethos ................................................................................... 27 10.4 Gestion et développement centralisés........................................................................................ 27

XI. Analyse des causes de la négligence de l’ECM au Togo............................................................. 28 11.1 Les causes politiques ................................................................................................................. 28 11.2 Les causes socioculturelles ........................................................................................................ 28

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11.3 Les causes économiques ............................................................................................................ 29 XII. Limites de l'étude ....................................................................................................................... 29 Conclusion et recommandations........................................................................................................ 30 Bibliographie ..................................................................................................................................... 32 ANNEXES ........................................................................................................................................ 35 ANNEXE I : GUIDE D'ENTRETIEN DANS LES COLLÈGES ET LYCÉES ............................... 36 ANNEXE II : GUIDE D'ENTRETIEN AUTORITÉS...................................................................... 37 ANNEXE III : GUIDE FOCUS GROUP ÉLÈVES.......................................................................... 39 ANNEXE IV : EVALUATIVE FRAMEWORK............................................................................... 40