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Chapitre Revêtement cutané © 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés PLAN DU CHAPITRE Généralités 76 Réalisation de la biopsie cutanée 76 Méthode de conservation de la biopsie 77 Inclusion, coupe et colorations 78 Immunofluorescence et immunohistochimie 78 Interprétation des principaux signes histologiques 79 11 Biopsie cutanée

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Chapitre

Revêtement cutané© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

PLAN DU CHAPITREGénéralités 76

Réalisation de la biopsie cutanée 76

Méthode de conservation de la biopsie 77

Inclusion, coupe et colorations 78

Immunofluorescence et immunohistochimie 78

Interprétation des principaux signes histologiques 79

11Biopsie cutanée

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II. Techniques d'exploration

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Généralités

Renseignements cliniquesIl convient de remplir la feuille de demande destinée au pathologiste, indispensable pour une bonne corrélation anatomoclinique.

Elle doit impérativement comporter les renseignements suivants :● nom, âge et sexe du patient, ethnie ;● service et médecin demandeur, numéro de téléphone (indispensable) ; application préalable éventuelle de crème EMLA® ;● description clinique  : stade évolutif des lésions, aspect, topographie ;● traitements reçus : locaux, systémiques ;● lésion prélevée  : aspect clinique, âge, siège (car l'aspect histologique normal varie en fonction de la topographie) ;● hypothèses diagnostiques.

AnesthésieAprès désinfection locale (éviter la Bétadine® et préférer un antiseptique incolore), une anesthésie locale est réalisée par injection hypodermique d'une solution de lidocaïne à 0,5, 1 ou 2 % (Xylocaïne®) (figure 11.1), associée le plus souvent

à de l'adrénaline (permettant une vasoconstriction et donc minimisant le saignement local) sauf dans les zones ana-tomiques à vascularisation terminale (doigts, orteils, nez, verge).

Chez les enfants ou dans certaines zones où l'anesthé-sie est particulièrement douloureuse, on peut appliquer préalablement un mélange de lidocaïne-prilocaïne (crème EMLA®), mais il faut absolument mentionner son utilisation au pathologiste du fait de possibles modifications histolo-giques provoquées.

Réalisation de la biopsie cutanée

Elle peut être réalisée au punch biopsique ou au bistouri.

Choix du site de biopsie● Pathologie inflammatoire non bulleuse  : choisir une lésion récente et non remaniée (par de la nécrose ou une surinfection).● Pathologie bulleuse : biopsier à cheval sur la peau saine et la peau décollée pour l'étude en histologie standard et en immunofluorescence.● Pathologie tumorale : biopsier en zone lésionnelle.

Biopsie au punch (ou trépan ou emporte-pièce)Le punch biopsique est un instrument jetable comportant une lame cylindrique coupante de 2 à 8 mm de diamètre. Il est enfoncé dans la peau en faisant un mouvement de rota-tion, jusqu'à pénétration complète de la partie coupante afin de prélever de l'hypoderme (figures 11.2, 11.3 et 11.4).

La biopsie cutanée est un acte simple qui est réalisé sous anesthésie locale au lit du patient. Avant la réalisation d'une biopsie cutanée, il faut se poser deux questions :� L'indication du geste est-elle pertinente ? (Aurai-je une réponse à la question que je me pose ?)� Quelle lésion biopsier ?

Figure 11.1

Anesthésie locale (injection hypodermique d'une solution de lidocaïne).

Figure 11.2

Biopsie au punch.

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L'extraction du punch est un moment délicat et plu-sieurs problèmes peuvent se poser :● la carotte cutanée reste attachée à la peau : dans ce cas, il suffit de soulever délicatement la carotte avec une pince sans griffe (afin de ne pas écraser le prélèvement) et de cou-per au ciseau la carotte en passant dans l'hypoderme ;● la carotte cutanée reste intégralement dans le punch  : dans ce cas, il faut l'extraire avec une pince sans griffe.

Hormis en pathologie pédiatrique ou sur le visage, il faut dans la mesure du possible réaliser une biopsie avec un punch de bon diamètre permettant d'examiner l'architec-ture de la lésion biopsiée (idéalement 4 mm pour l'histolo-gie standard et 3 mm pour une congélation).

La réalisation d'un point de suture est souvent nécessaire.

Biopsie au bistouriCette technique est préférable pour l'étude des lésions hypodermiques. Elle trouve également de bonnes indica-tions en pathologie tumorale afin d'examiner un plus grand échantillon.

Un fragment cutané en forme de quartier d'orange est prélevé (figure 11.5).

Plusieurs points de suture sont en général nécessaires.

Artefacts liés au geste biopsiquePlusieurs artefacts secondaires au geste peuvent gêner l'in-terprétation morphologique de la biopsie. Ils peuvent être facilement évités :● écrasement de la biopsie par la pince réalisant une fausse impression de densification du derme ou une image pseudo-kystique ;● trou lié à l'utilisation d'une aiguille pour extirper la carotte biopsique du punch ;● décollement à la jonction dermoépidermique en bor-dure de biopsie.

Méthode de conservation de la biopsie

Utilisation d'un fixateurLe but de la fixation est la préservation des tissus pour l'analyse morphologique, dite « histologie standard ». Le choix du fixateur dépend de l'étude à laquelle la biopsie est destinée :

Figure 11.3

Exemple de kit pour une biopsie au punch.

ÉPIDERME

DERME

HYPODERME

Figure 11.4

Réalisation d'une carotte cutanée.

Figure 11.5

Bistouri à lame et prélèvement en quartier d'orange : exemple d'un prélèvement au bistouri d'une vésicule dans une suspicion de maladie bulleuse auto-immune.

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● le fixateur le plus communément utilisé est le formol à 10 %. Il permet une étude morphologique correcte et, grâce à la préservation des acides nucléiques, il autorise la réalisa-tion de tous les immunomarquages accessibles sur coupes incluses en paraffine. Il faut immerger la biopsie dans envi-ron 10 à 20 fois son volume de formol et vérifier qu'elle ne soit pas collée à la paroi du flacon ou au bouchon. Le temps de fixation d'un punch biopsique est d'environ 12 heures ;● le formol acétique, ou AFA, permet une analyse mor-phologique de qualité supérieure au formol et la réalisation d'immunomarquages, mais il existe un risque de surfixation et son coût est supérieur ;● le glutaraldéhyde est utilisé pour étude en microscopie électronique. La biopsie cutanée doit immédiatement être acheminée au laboratoire en raison du risque de surfixa-tion ayant pour conséquence une étude ultrastructurale de mauvaise qualité ;● le liquide de Bouin permettait une analyse morpholo-gique de qualité, mais est de moins en moins utilisé, car il empêche la biologie moléculaire.

Réalisation d'une congélationLa congélation d'une biopsie cutanée doit se faire immédia-tement après le prélèvement.

Classiquement, le prélèvement est déposé sur une com-presse imbibée de sérum physiologique glissée dans un petit tube, puis amené au laboratoire en urgence où il sera immédiatement congelé puis techniqué.

L'intérêt de la congélation est triple :● réalisation d'études en immunofluorescence directe ;● réalisation de techniques de biologie moléculaire (pathologie tumorale) ;● stockage (tumorothèque).

Si l'on ne dispose pas d'azote liquide (prélèvement en ville ou aux horaires de fermeture du laboratoire), on peut immerger la biopsie dans le liquide de Michel. Ce milieu doit être conservé à + 4  °C et permet un acheminement au laboratoire à température ambiante sous quelques jours.

Inclusion, coupe et colorations

Inclusion en paraffine et coupeAprès fixation, le prélèvement est déshydraté puis inclus en paraffine dans un moule en plastique (cassette). Cette cassette est ensuite fixée dans un microtome et des coupes

de 3–4 μm d'épaisseur sont réalisées. Le ruban de paraffine ainsi réalisé est déposé sur une lame.

ColorationsLa coloration la plus communément réalisée est l'HE (hématéine-éosine) ou l'HES (hématéine-éosine-safran). Les noyaux sont colorés en bleu-violet, les cytoplasmes en rose, le tissu conjonctif en rouge rosé (HE) ou jaune orangé (HES).

Des colorations spéciales peuvent être réalisées :● recherche de germes  : Ziehl (BAAR), PAS et Grocott (champignons), Gram (germes) ;● visualisation de structures ou de cellules : orcéine (fibres élastiques), Giemsa et bleu de toluidine (mastocytes) ;● mise en évidence de dépôts  : Fontana (mélanine), bleu alcian (mucine), rouge Congo (substance amyloïde), von Kossa (calcium), Perls (hémosidérine).

Immunofluorescence et immunohistochimie

Étude en immunofluorescenceLes indications classiques sont le diagnostic des dermatoses bulleuses et, à un moindre degré, du lupus érythémateux et de certaines vascularites.

À partir des prélèvements congelés, des coupes de 4-5 μm sont réalisées au cryostat.

Des anticorps polyclonaux anti-Ig humaines (IgG, IgA, IgM, C3) sont déposés afin de détecter les anticorps pré-sents dans la biopsie cutanée.

La lame est examinée au microscope à fluorescence.

Étude en immunohistochimie sur coupes déparaffinéesLes progrès techniques récents permettent aujourd'hui de détecter des antigènes cellulaires grâce à des anticorps spécifiques conjugués à une enzyme. Plusieurs méthodes sont disponibles (méthode immunoperoxydase en trois couches, méthode peroxydase-antiperoxydase, méthode phosphatase-antiphosphatase alcaline).

De nombreux anticorps sont commercialisés, appor-tant une aide considérable en pathologie tumorale (lym-phomes, carcinomes, sarcomes, etc.).

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11. Biopsie cutanée

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Interprétation des principaux signes histologiques

Le médecin qui examine le prélèvement dicte un compte-rendu anatomopathologique destiné au médecin deman-deur, qui a une valeur médico-légale.

Il comporte les données d'identité du patient et reprend les éléments cliniques énoncés dans la feuille de demande.

Il précise la nature du prélèvement (punch, autre, etc.), l'existence d'artefacts éventuels.

Il décrit les lésions observées, détaille les éventuelles techniques complémentaires réalisées.

Enfin, il établit une conclusion, qui peut être très tran-chée si l'aspect est typique, ou plus nuancée si l'aspect est moins typique. Il soulève alors des hypothèses diagnos-tiques. Une confrontation en réunion anatomoclinique peut être nécessaire pour avancer dans le diagnostic ou en cas de discordance.

Ainsi, le clinicien et le pathologiste établissent une colla-boration étroite. Le premier doit partager avec le second le maximum de renseignements cliniques et ses hypothèses, et le pathologiste doit également faire part des difficultés techniques rencontrées et de ses doutes diagnostiques éventuels.

Un échange riche permet dans la grande majorité des cas d'aboutir à un diagnostic.

Terminologie

La connaissance du vocabulaire utilisé par le derma-topathologiste est indispensable à l'interprétation du compte-rendu.

Lésions épidermiques ( figure  11.6 ) � Acanthose   : épaississement de tout ou partie (crêtes)

de l'épiderme. � Acantholyse   : perte de cohésion des kératinocytes

par rupture des desmosomes, aboutissant à la consti-tution de fentes ou de bulles intraépidermiques.

� Atrophie   : amincissement global de l'épiderme par diminution du nombre de couches cellulaires.

� Épidermotropisme   : migration de cellules tumorales dans l'épiderme.

� Exocytose   : migration de cellules inflammatoires dans l'épiderme.

� Hypergranulose   : épaississement de la couche granuleuse.

� Hyperkératose   : épaississement de la couche cornée.

� Nécrose kératinocytaire   : mort cellulaire avec aspect d'apoptose ou de vacuolisation.

� Papillomatose   : accentuation du dessin des papilles et des crêtes interpapillaires.

� Parakératose   : persistance de structures nucléaires dans les cornéocytes.

� Pustule   : conséquence d'une spongiose avec poly-nucléaires neutrophiles ou éosinophiles ; peut être uniloculaire (une cavité) ou multiloculaire (plusieurs cavités).

� Spongiose   : œdème intercellulaire. � Vésicule   : cavité formée par la confluence de zones

spongiotiques.

Lésions dermoépidermiques La méthode des modèles ( patterns ) permet d'interpréter les lésions épidermiques. On distingue plusieurs patterns( figure  11.7 ). � Modèle psoriasiforme   : allongement parallèle et

régulier des papilles dermiques, dont le toit est aminci ; inflammation surtout dans les papilles avec exocytose en regard. Exemple  : psoriasis.

� Modèle spongiotique   : œdème des papilles avec inflammation du derme superficiel et exocytose. Exemple  : eczéma, dermite séborrhéique, etc.

� Modèle lichénoïde   : appelé également « dermite d'interface ». Vacuolisation et/ou nécrose des kéra-tinocytes basaux, infiltrat sous-épidermique avec exocytose basale, aspect basal « grignoté ». Exemple  : lichen plan, toxidermies lichénoïdes, GVH, lupus…

� Modèle de la bulle sous-épidermique   : décolle-ment de la jonction dermoépidermique avec infiltrat inflammatoire dont la nature oriente parfois vers un diagnostic. Exemple  : dermatoses bulleuses auto-immunes (pemphigoïde bulleuse), toxidermie bul-leuse, etc.

Lésions dermiques � Atrophie dermique   : diminution d'épaisseur du

derme et raréfaction des fibres de collagène. � Élastolyse   : disparition des fibres élastiques. � Élastose (dite sénile)  : modifications du collagène

liées à l'action des UV. � Incontinence pigmentaire   : présence de méla-

nine dans le derme superficiel (libre ou dans des mélanophages).

� Infiltrats cellulaires   : présence de cellules inflamma-toires ou tumorales dans le derme.

� Œdème dermique   : pâleur du derme secondaire à la présence de liquide interstitiel.

� Nécrobiose   : altération des fibres de collagène deve-nant éosinophiles et amorphes.

� Sclérose dermique   : épaississement des fibres de col-lagène pouvant prendre un aspect hyalin.

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Acanthose et

papillomatose

Épiderme

normal

Atrophie

Spongiose/

V é sicule/

Pustule

Figure 11.6

Lésions épidermiques.

Lésions hypodermiques ( figure  11.8 ) � Adiponécrose   : nécrose des adipocytes conduisant à

des images de membranes et kystes. � Atrophie hypodermique . � Lipophagie   : résorption graisseuse par des histiocytes -

macrophages conduisant à leur aspect spumeux.

� Inflammation de l'hypoderme  : – panniculites lobulaires (ou panniculite vraie)  :

inflammation primitive des lobules adipeux ; – hypodermites septales   : inflammation localisée

aux septums ; – hypodermites mixtes   : inflammation lobulaire et

septale.

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A B

C D

Figure 11.7

Lésions élémentaires dermoépidermiques : diagnostic par la méthode des « modèles ».A. Modèle psoriasiforme. B. Modèle bulleux. C. Modèle spongiotique. D. Modèle lichénien.

Panniculite Hypodermite septale Hypodermite mixte

Figure 11.8

Hypodermites.

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Fiche de synthèse

La biopsie cutanée consiste en un prélèvement partiel d'une lésion. Comme tout examen complémentaire, l'indication doit être pertinente (pourquoi une biopsie ? qu'en attend-on ? et quelle est la question posée ?). Il faut savoir choisir le type de lésion à biopsier et adapter les modalités de la biopsie (biopsie au punch ou au bistouri à lame, milieu de transport) au type de lésion, à sa localisation et à la patho-logie suspectée.

Les renseignements cliniques sont essentiels La biopsie doit être accompagnée d'un bon destiné au patho-logiste , avec les renseignements nécessaires pour la corrélation anatomoclinique. Outre les renseignements de base (nom, âge et sexe), il faut en quelques lignes préciser le type de la lésion prélevée, son siège et sa durée d'évolution, éventuellement —  si cela est pertinent  — les traitements reçus et donner sa ou ses hypothèses diagnostiques. Si plusieurs biopsies sont réalisées, il faut les numéroter et préciser leur siège ou le type de lésion.

Anesthésie Après désinfection locale type chlorhexidine, l'anesthésie locale est réalisée par injection hypodermique d'une solu-tion de lidocaïne à 1 ou 2  % (Xylocaïne®) associée le plus souvent à de l'adrénaline (la vasoconstriction minimisant le saignement local). Il n'y a pas de contre-indication for-melle à l'utilisation d'adrénaline dans les zones anatomiques à vascularisation terminale (doigts, orteils, nez, verge) sauf sur des terrains vasculaires particuliers. On peut appliquer préalablement un mélange de lidocaïne-prilocaïne en patch ou crème pour rendre l'anesthésie moins désagréable, mais il faut alors le mentionner sur le bon, car cela peut induire des modifications histologiques.

Réalisation de la biopsie cutanée On utilise un punch ou un bistouri selon le type de lésion et la question posée. Une biopsie au punch dans une localisation « facile » (tronc, zone proximale des membres) peut être effec-tuée dans une pièce d'examen ou au lit du patient, avec des gants à usage unique. Pour une biopsie au bistouri à lame ou dans une zone plus difficile (visage, muqueuses…) avec risque de saignement, il est préférable de la réaliser dans une pièce d'intervention dédiée avec accès possible à une électrocoagula-tion et d'utiliser des gants stériles.

Choix du site de biopsie Il est préférable de choisir une lésion récente et non rema-niée par le grattage, des topiques, etc. Dans la quasi-totalité des cas, la biopsie est réalisée en zone lésionnelle. Pour les dermatoses bulleuses auto-immunes, on prélève le plus sou-vent une « petite bulle » au bistouri à lame pour l'histologie et une biopsie en peau péribulleuse au punch pour l'immu-nofluorescence. Si le patient a des lésions de même type sur des zones proximales ou distales d'un membre, il vaut mieux choisir la zone proximale.

Biopsie au punch (ou trépan ou emporte-pièce) Le punch biopsique est un instrument jetable comportant une lame cylindrique coupante de 2 à 8  mm de diamètre. Ce sont surtout les diamètres de 3 ou 4  mm qui sont utilisés. Il est enfoncé dans la peau en faisant un léger mouvement de rotation (quart de tour) jusqu'à pénétration complète de la partie coupante afin de prélever de l'hypoderme. Après retrait du punch, la carotte est prélevée avec une pince sans griffe (afin de ne pas écraser le prélèvement) et est coupée au ciseau en passant à la partie inférieure.

Biopsie au bistouri Un fragment cutané en forme de quartier d'orange est prélevé. Cette technique est indispensable pour l'étude des lésions hypodermiques et pour certaines pathologies tumorales comme les lymphomes cutanés non épidermotropes, afin de permettre au pathologiste d'analyser l'architecture de la lésion. Le prélèvement d'une vésicule peut aussi être réalisé ainsi dans les dermatoses bulleuses pour l'analyse optique.

Suture Elle est réalisée soit avec des fils non résorbables soit avec des fils résorbables pour les muqueuses. Le nombre de points dépend de la taille de la biopsie. L'ablation des fils non résorbables se fait après un délai variant de 5 à 15  jours selon la localisation.

Prescription des soins post-biopsie Il faut expliquer les soins très simples au patient  : désinfection simple à la chlorhexidine ou nettoyage au sérum physiologique et pansement sec en protection. Les douches sont possibles, il faut simplement refaire le pansement après. Prévoir des conseils de mobilisation prudente lorsqu'une biopsie au bistouri a été réalisée pour éviter la désunion.

Quel milieu de transport pour la biopsie ?

Utilisation d'un fixateur Le fixateur permet de préserver les tissus pour l'analyse mor-phologique (histologie standard). Le fixateur le plus utilisé est le formol à 10  % . Il permet une étude morphologique correcte et, grâce à la préservation des acides nucléiques, il autorise la réa-lisation de tous les immunomarquages accessibles sur coupes incluses en paraffine. Il peut aussi permettre certaines analyses moléculaires simples (par exemple, analyse de clonalité en PCR), même si cela n'est pas idéal. La biopsie est immergée dans le formol en vérifiant qu'elle n'est pas collée à la paroi du flacon ou au bouchon. Le temps de fixation minimal est d'environ 12  heures. En pratique, une telle biopsie peut aussi attendre un week-end si pas d'envoi immé-diat au laboratoire. Le glutaraldéhyde est utilisé pour la microscopie électronique. La biopsie cutanée doit alors immédiatement être acheminée au laboratoire en raison du risque de surfixation ayant pour conséquence une étude ultrastructurale de mauvaise qualité. ▲

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Congélation La biopsie est déposée sur une compresse imbibée de sérum phy-siologique glissée dans un petit tube, puis acheminée au labora-toire en urgence où elle sera immédiatement congelée. Elle permet les études en immunofluorescence directe et les techniques de biologie moléculaire. S'il n'est pas possible de réaliser une congé-lation, le liquide de Michel peut être utilisé pour l'immunofluores-cence et la solution RNAlater® pour la biologie moléculaire. Ces milieux sont conservés à + 4  °C et permettent un acheminement au laboratoire à température ambiante au mieux sous cinq jours.

Pour en savoir plus

Colorations L'HES (hématéine-éosine-safran) est le plus souvent utilisée, colorant les noyaux en bleu-violet, les cytoplasmes en rose, le tissu conjonctif en jaune orangé. Des colorations spéciales peuvent être utilisées  :• pour des agents infectieux  : Ziehl (BAAR), PAS et Grocott (champignons), Gram (bactéries) ; • pour des structures ou des cellules  : orcéine (fibres élas-tiques), Giemsa et bleu de toluidine (mastocytes) ; • pour des dépôts  : Fontana (mélanine), bleu alcian (mucine), rouge Congo (substance amyloïde), von Kossa (calcium), Perls (hémosidérine).

Immunofluorescence (IF) et immunohistochimie (IHC) • L'IF est utilisée pour le diagnostic des dermatoses bulleuses, du lupus érythémateux ou de certaines vascularites. Elle utilise des anticorps polyclonaux anti-Ig humaines (IgG, IgA, IgM, C3)

afin de détecter les anticorps présents dans la biopsie. La lame est examinée au microscope à fluorescence. • L'IHC permet de détecter des antigènes cellulaires grâce à des anticorps spécifiques conjugués à une enzyme selon plusieurs méthodes (immunoperoxydase en trois couches, peroxydase-antiperoxydase, phospha-tase-antiphosphatase alcaline). De nombreux anticorps sont commercialisés, apportant une aide considérable en pathologie tumorale.

Interprétation des principaux signes histologiques Le pathologiste dicte un compte-rendu destiné au méde-cin demandeur, qui a une valeur médico-légale. Il précise la nature du prélèvement et l'existence d'artefacts éven-tuels. Il décrit les lésions observées, détaille les éventuelles techniques complémentaires réalisées. Sa conclusion peut être tranchée si l'aspect est typique, ou plus nuancée si l'aspect est moins typique. Il soulève alors des hypothèses diagnostiques. Le clinicien et le pathologiste doivent établir une collaboration étroite. Le premier donne le maximum de renseignements cli-niques et ses hypothèses, et le pathologiste fait part des diffi-cultés techniques rencontrées et de ses doutes diagnostiques éventuels. Il ne faut surtout pas hésiter à poursuivre le dialogue au-delà du compte-rendu en cas de discordance ou d'incer-titude diagnostique et cet échange riche (« la confrontation anatomoclinique ») permet dans la grande majorité des cas d'aboutir à un diagnostic.

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