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87 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1 re ES-L – Livre du professeur Mettre en œuvre la question Le chapitre s’articule autour de huit études et de trois cours qui permettent de comprendre comment la Répu- blique se définit à travers près de quatre-vingt-dix ans de fonctionnement, et après plusieurs changements de constitutions. La double page d’ouverture (p. 222-223), représente une lithographie publiée en 1880. Elle rassemble de nom- breux symboles : une Marianne portant le bonnet phry- gien, le drapeau tricolore et la prise de la Bastille en 1789. Une analyse plus précise de l’image est proposée sur le site de l’Histoire par l’image (www.histoire-image.org). Après la démission de Mac Mahon de la présidence de la République et son remplacement par un vieux répu- blicain modéré, Jules Grévy (1807-1891), tous les leviers du pouvoir, appartiennent aux républicains. Une culture républicaine peut désormais se mettre en place. La double page Repères (p. 224-225), montre que le chapitre s’étend sur un temps long, presqu’un siècle. Il a donc fallu plus d’un siècle – si l’on excepte les brèves tentatives d’existence de la I re et de la II e République –, pour que le principe républicain devienne une culture politique acceptée par la majorité des Français. Les quatre images montrent des moments particuliers de l’histoire de cette même république : deux images symboliques du triomphe républicain encadrent deux moments plus com- pliqués et douloureux de cette histoire. En France, nous sommes bien en présence d’un processus d’acculturation républicaine. Le programme impose un saut chronolo- gique important entre la fin de l’affaire Dreyfus et la chute de la III e République ; c’est bien le principe républicain qui survit à la défaite qui sert de fil d’Ariane au chapitre. La double page Carte (p. 226-227) met en images le temps long de la République. Une représentation géogra- phique de la France, telle qu’elle était enseignée dans les années 1950, permet de montrer la finalité de l’enseigne- ment de l’histoire et de la géographie à cette époque : le rappel à la patrie est explicite. Les images et les données clés rappellent les moments forts de la construction de la République. Chapitre 9 Histoire, p. 222-253 La République, trois républiques La problématique générale du chapitre doit permettre d’appréhender sur le temps long la mise en place puis l’affirmation de la République en France. Pour cela, l’élève doit comprendre que le processus d’acculturation correspond à une construction lente, et que la culture répu- blicaine s’est également nourrie des moments de crises. Entre 15 et 20 heures peuvent être consacrées à ce chapitre qui est essentiel pour la bonne compréhension du programme de Terminale. Le manuel propose une série d’études et trois cours simples : le cours 1 est consacré à la mise en place de la culture républicaine à la fin du XIX e siècle ; le cours 2 montre comment l’idéal républicain est entretenu par la Résistance et le cours 3 insiste sur la modernisation des institutions après l’arrivée du général de Gaulle à la tête de la V e république. Des ressources numériques, facilement utilisables, jalonnent ce chapitre. Bibliographie Maurice Agulhon, La République, 1880-1995 : de Jules Ferry à François Mitterrand, Hachette, 1997. Laurent Douzou, La Résistance, une morale en action, coll. « Découvertes Gallimard », Éd. Gallimard, 2010. Vincent Duclert, La République imaginée, 1870-1914, coll. « Histoire de France », Belin, 2014. Jean-François Sirinelli, Dictionnaire historique de la vie politique française au II e siècle, coll. « Quadrige dicos poche », PUF, 2003. Ressources numériques liées au chapitre Document interactif • La chronologie de l’affaire Dreyfus, p. 230 www.lienmini.fr/magnard-hg1-003 Vidéos • Ceux du maquis, p. 236 www.lienmini.fr/magnard-hg1-041 • De Gaulle présente la constitution aux Français, p. 242 www.lienmini.fr/magnard-hg1-042 Schéma commenté • La République, trois républiques, p. 249 www.lienmini.fr/magnard-hg1-043 www.lienmini.fr/magnard-hg1-003

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87© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

◗ Mettre en œuvre la question➤➤ Le chapitre s’articule autour de huit études et de trois

cours qui permettent de comprendre comment la Répu-blique se définit à travers près de quatre-vingt-dix ans de fonctionnement, et après plusieurs changements de constitutions.

➤➤ La double page d’ouverture (p. 222-223), représente une lithographie publiée en 1880. Elle rassemble de nom-breux symboles : une Marianne portant le bonnet phry-gien, le drapeau tricolore et la prise de la Bastille en 1789. Une analyse plus précise de l’image est proposée sur le site de l’Histoire par l’image (www.histoire-image.org). Après la démission de Mac Mahon de la présidence de la République et son remplacement par un vieux répu-blicain modéré, Jules Grévy (1807-1891), tous les leviers du pouvoir, appartiennent aux républicains. Une culture républicaine peut désormais se mettre en place.

➤➤ La double page Repères (p. 224-225), montre que le chapitre s’étend sur un temps long, presqu’un siècle. Il a donc fallu plus d’un siècle – si l’on excepte les brèves

tentatives d’existence de la Ire et de la IIe République –, pour que le principe républicain devienne une culture politique acceptée par la majorité des Français. Les quatre images montrent des moments particuliers de l’histoire de cette même république : deux images symboliques du triomphe républicain encadrent deux moments plus com-pliqués et douloureux de cette histoire. En France, nous sommes bien en présence d’un processus d’acculturation républicaine. Le programme impose un saut chronolo-gique important entre la fin de l’affaire Dreyfus et la chute de la IIIe République ; c’est bien le principe républicain qui survit à la défaite qui sert de fil d’Ariane au chapitre.

➤➤ La double page Carte (p. 226-227) met en images le temps long de la République. Une représentation géogra-phique de la France, telle qu’elle était enseignée dans les années 1950, permet de montrer la finalité de l’enseigne-ment de l’histoire et de la géographie à cette époque : le rappel à la patrie est explicite. Les images et les données clés rappellent les moments forts de la construction de la République.

Chapitre 9➤➤Histoire, p. 222-253

La République, trois républiques

La problématique générale du chapitre doit permettre d’appréhender sur le temps long la mise en place puis l’affirmation de la République en France. Pour cela, l’élève doit comprendre que le processus d’acculturation correspond à une construction lente, et que la culture répu-blicaine s’est également nourrie des moments de crises. Entre 15 et 20 heures peuvent être consacrées à ce chapitre qui est essentiel pour la bonne compréhension du programme de Terminale. Le manuel propose une série d’études et trois cours simples : le cours 1 est consacré à la mise en place de la culture républicaine à la fin du xixe siècle ; le cours 2 montre comment l’idéal républicain est entretenu par la Résistance et le cours 3 insiste sur la modernisation des institutions après l’arrivée du général de Gaulle à la tête de la Ve république. Des ressources numériques, facilement utilisables, jalonnent ce chapitre.

Bibliographie

✔ Maurice Agulhon, La République, 1880-1995 : de Jules Ferry à François Mitterrand, Hachette, 1997. ✔ Laurent Douzou, La Résistance, une morale en action, coll. « Découvertes Gallimard », Éd. Gallimard, 2010. ✔ Vincent Duclert, La République imaginée, 1870-1914, coll. « Histoire de France », Belin, 2014. ✔ Jean-François Sirinelli, Dictionnaire historique de la vie politique française au iie siècle, coll. « Quadrige dicos poche », PUF, 2003.

Ressources numériques liées au chapitreDocument interactif• La chronologie de l’affaire Dreyfus, p. 230 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-003Vidéos• Ceux du maquis, p. 236 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-041• De Gaulle présente la constitution aux Français, p. 242 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-042Schéma commenté• La République, trois républiques, p. 249 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-043

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◗ Corrigés des questionnaires

Étude

Étude

Une École pour asseoir la République et ses valeurs ➤➤ p. 228-229

L’affaire Dreyfus (1894-1906) ➤➤ p. 230-231

Situer1. Les lois scolaires voulaient donner à tous les enfants, quels que soient leur milieu et leur condition, d’accéder à un socle commun d’instruction. Pour Jules Ferry, cela participait de la formation du citoyen, et donc de l’iden-tité nationale. De plus, les écoles devenant laïques, cela affaiblissait le contrôle de l’Église sur la population, notamment rurale. En trente ans, les effectifs des écoles publiques et laïques ont été multipliés par environ 1,5. À partir de 1911, les taux de réussite d’une classe d’âge au baccalauréat augmentent régulièrement, tout en restant sur des taux très faibles. Si les lois Ferry ont permis à beaucoup plus d’écoliers d’apprendre, en revanche seule l’élite peut envoyer ses enfants dans les classes supé-rieures.

Prélever des informations 2. Ces écoles étaient là pour que l’enseignement des valeurs de la République soit enseigné ; cela devait ren-forcer l’unité nationale. Si garçons et filles recevaient un enseignement, ils ne recevaient pas le même et pas sur le même lieu. La mixité n’existait pas, mais les écoles de filles jouxtaient la plupart du temps les écoles de gar-çons. Dans les milieux ruraux, il n’était pas rare de voir le bâtiment de la mairie encadré par deux ailes : d’un côté l’école des filles, de l’autre celle des garçons. Le port de la blouse était obligatoire, cet « uniforme » devait rendre les inégalités sociales moins criantes. Sur la photographie, on distingue bien les représentations des fondements républicains ; la carte de France est amputée de l’Alsace et de la Lorraine, « les Provinces Perdues » après la défaite lors de la guerre contre la Prusse en 1870. 3. On voit sur ce dessin que des représentants de la Répu-blique viennent décrocher les signes ostentatoires d’ap-partenance à une religion (ici le catholicisme). La croix est retirée du mur, des livres religieux (la Bible) sont saisis. On sent à travers cette image des tensions fortes. Une partie de la population n’est pas prête à cette laïcisation forcée. La République a parfois recours à la force publique pour contenir des populations en colère.4. Les « hussards noirs » de la République sont les insti-tuteurs formés par l’État après la loi du 9 août 1879 – la

loi Paul Bert redéfinit les Écoles normales fondées par Guizot en 1833. L’uniforme était noir, leur allure était mar-tiale, et pendant toute cette fin de xixe siècle, ils étaient les vrais promoteurs de la République et du savoir laïc. Le certificat d’études couronnait la scolarité des élèves les plus méritants (11 ans). À douze ans, une petite minorité accédait au lycée. Avec le « curé » et le maire, l’instituteur faisait partie des notables dans de nombreux villages. C’est Charles Péguy qui emploie ce terme pour la pre-mière fois dans L’Argent.

Synthétiser5. En rendant l’école obligatoire, en respectant un socle commun de connaissances, par l’intermédiaire d’agents de l’État formés dans des institutions de la République (les instituteurs deviennent des fonctionnaires), Jules Ferry avait fixé un cadre strict pour l’enseignement des valeurs fondamentales de la République et des savoirs fondamentaux. L’instituteur était celui qui devait faire res-pecter la règle – le maître. L’École, en permettant la réu-nion dans un même espace des forces vives de la nation – les élèves – devait être le lieu de transmission idéal d’une culture commune et républicaine. La proximité sociale et territoriale – les concours recrutaient au niveau départe-mental – permettait à ces instituteurs d’être très proches des enfants qu’ils encadraient.

Vers le BAC

Étude critique de documents Au début du xxe siècle, la plupart des enfants sont sco-larisés en France. L’enseignement est laïc, et la mixité est alors proscrite. Les lois Ferry donnent la possibilité à l’État de programmer un enseignement qui élève vers la citoyenneté. Comment l’école devient-elle le lieu privilé-gié de la diffusion des valeurs républicaines ?I. Les lois sur l’enseignement obligatoire et laïc per-mettent de scolariser de plus en plus de jeunes Français.II. L’école est un lieu fondamental pour l’apprentissage des valeurs républicaines.

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Le document permet de visualiser les principales étapes de l’affaire Dreyfus : de l’arrestation de Dreyfus, accusé d’espionnage, en 1894, à sa réhabilitation en 1906.

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Situer 1. L’affaire Dreyfus se déroule dans un contexte politique compliqué. La République est jeune, et des forces anta-gonistes s’affrontent. Après la défaite contre la Prusse, un fort sentiment national s’est imposé, la xénophobie et l’antisémitisme font partie de ce « renouveau » patrio-tique. C’est un moment également où l’anticléricalisme devient plus virulent : l’affaire Dreyfus cristallise tous ces phénomènes.

Prélever des informations2. Le message est simple : Dreyfus est un traître, et s’il a trahi c’est parce qu’il est juif. L’allusion à Judas qui trahit le Christ pour quelques pièces l’inscrit dans une histoire particulière. La République le punit et le chasse pour pré-server l’unité de la nation. 3. Zola interpelle successivement toutes les instances supérieures militaires, ainsi que les hommes politiques puisque ses accusations remontent jusqu’au ministère de la guerre. Il conteste également les résultats des « experts » qui ont rendu des conclusions mensongères. Zola n’ignore pas qu’il tombe sous le coup de la loi ; il veut être inculpé afin d’entrer de plain-pied dans le pro-cès. Dès lors il peut avoir accès aux différentes pièces du dossier. Il est jugé et condamné à 3 000 francs d’amende et à un an de prison ferme (peine maximale). La peine est confirmée le 18 juillet 1898 ; sur les conseils de son avo-cat, Zola s’exile le soir-même afin que sa condamnation ne puisse lui être signifiée « dans les formes juridiques ».Barrès est avant tout un républicain, même s’il est un des chefs de file des antidreyfusards. Pour lui, l’affaire Dreyfus n’est qu’un symptôme d’un problème infiniment plus grand : c’est l’unité même de la nation qui est en jeu, et si l’antisémitisme peut sauver la nation du grand « chambardement », alors il faut l’aider. Barrès évoque les arguments classiques qui mettent en avant le « péril juif ». Dans un contexte à la fois anticlérical et antisémite – le succès considérable du livre de Drumont La France juive

en (1886) l’atteste –, Barrès cherche à raviver la flamme des nationalistes catholiques.4. Même si la carrière militaire de Dreyfus est définitive-ment brisée, même si ensuite sa vie reste difficile (Louis-Vincent-Anthelme Grégori, tente de l’assassiner en 1908), sa réhabilitation est importante pour montrer que malgré les crises, le droit a fini par triompher. La République, malmenée en cette fin de xixe siècle, en sort in fine ren-forcée.

Synthétiser5. L’affaire Dreyfus est révélatrice des difficultés que ren-contre la culture républicaine en France à la fin du xixe siècle. Cela démontre que le processus d’acculturation républicaine n’est pas encore complètement abouti. L’affaire Dreyfus remobilise le camp antirépublicain, et montre la fragilité d’un régime en construction. Ainsi elle est une des crises les plus violentes qui auraient dû abattre la République, mais elle participe de manière indiscutable à sa consolidation.

Vers le BAC

CompositionDe 1894 à 1906, dans un contexte d’agitation politique et d’antisémitisme, une affaire menace la IIIe République. Alfred Dreyfus, un jeune officier juif, est accusé de trahi-son. Rapidement, cette affaire dépasse le cadre strict du procès militaire et devient une affaire d’État qui divise profondément l’opinion publique.Dans quelle mesure, l’affaire Dreyfus participe-t-elle de la consolidation de la IIIe République ?Nous expliquerons le déroulement du procès, puis com-ment à partir de l’intervention de Zola l’affaire Dreyfus menace le fragile équilibre politique, enfin nous montre-rons que l’acquittement de Dreyfus marque le triomphe des valeurs républicaines.

Cours 1 L’enracinement de la culture républicaine (fin xixe s.) ➤➤ p. 232-233

Doc. 1> Tout d’abord, on constate la séparation des pouvoirs : le pouvoir exécutif est composé d’un président de la Répu-blique et d’un conseil des ministres ; le pouvoir législatif est composé de deux chambres (bicamérisme). Ensuite, le système repose sur des élections libres, le suffrage univer-sel peut être direct (pour les députés) ou indirect (pour les sénateurs et le président de la République). Enfin, les deux pouvoirs peuvent intervenir l’un par rapport à l’autre : droit de dissolution de la chambre pour le président, contrôle du président du conseil par les deux chambres.

Doc. 2> Ce qui surprend dans ce tract antisémite, raciste et xénophobe, c’est bien entendu la violence des textes. Ce tract est populaire, la petite comptine en haut à gauche de l’affiche est écrite sur la mélodie de Gabriel Pierné ; Gai gai marions-les (1863). Mais c’est aussi le fait que ce tract n’est pas anonyme, qu’il est signé et qu’il sert quasiment de programme au candidat. Il sait qu’en affichant claire-

ment son antisémitisme, il rencontre une partie impor-tante des électeurs français : ceux qui sont séduits par les thèses antidreyfusardes. En 1889, d’après les données de Laurent de Boissieu (www.france-politique.fr), les républicains recueillent 52,4 % des suffrages (4 177 464), les conservateur 36,5 % (2  914  985), les révisionnistes (boulangistes) 8,9  % (709 223) et les socialistes 2,2 % (175 775).

Doc. 3> Cette fête est une commémoration d’une victoire révo-lutionnaire ; sont en même temps évoquées la fête de la république et l’école laïque. On convoque ici les révolu-tionnaires de 1789 et de 1792 qui ont lutté pour la liberté, et ont fondé la Ire République.

Doc. 4On peut analyser cette image très connue en montrant la présence des symboles républicains ; Marianne, dra-peau, urne… Notons également dans ce bureau de vote l’absence de femmes.

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Situer 1. Dès le début, l’État vichyste revendique clairement qu’il faut entraîner le pays dans une Révolution nationale, qui inscrirait le pays dans une Europe nouvelle, sous la conduite de l’Allemagne nazie. Lors de l’entrevue de Mon-toire, le 24 octobre 1940, Pétain scelle officiellement une politique de collaboration. En choisissant Pierre Laval – un admirateur inconditionnel de l’ordre allemand – comme président du Conseil, Pétain signifie son allégeance au IIIe Reich. Le premier statut des Juifs (3 octobre 1940) est antérieur à l’entrevue de Montoire ; le second statut (2 juin 1941) scelle le sort des Juifs et ancre la France dans une politique officiellement antisémite. La politique de la Relève annoncée par Pierre Laval en 1942, la milice (créée en janvier 1943, et la mise en place du STO (février 1943) sont autant de signes que l’État vichyste s’est engagé résolument dans la collaboration avec l’Allemagne.

Prélever des informations2.

« Valeurs » de Pierre Laval

Valeurs de la Résistance

AnticommunismeNationalisme« socialisme national »*

AntifascismePatriotisme républicainLiberté, démocratie

* Pierre Laval joue évidemment sur les mots, la référence au « National Socialisme » est ici très claire.Les deux conceptions de la République ne sont pas com-patibles, même si parfois elles peuvent se rejoindre sur la dimension patriotique. En revanche, il est évident que ce n’est pas de la même France dont il s’agit.3. Ce sont essentiellement les valeurs liées au patrio-tisme, à la liberté et à l’unité de la nation.4. Les résistants sont également d’origine étrangère. Ainsi, le groupe des FTP-MOI regroupe sous cette appella-tion des étrangers luttant contre l’occupant nazi. L’Affiche rouge, diffusée initialement par les nazis pour dénoncer le groupe Manouchian comme terroriste est devenue emblématique de cette résistance.5. Il s’agit d’une campagne publicitaire pour sensibiliser les Français d’Amérique du nord, mais aussi les Améri-

cains. En associant une Marianne guerrière (la Marseil-laise de Rude) et la statue de la liberté, Natacha Carlu fait référence à tous les combattants qui ont défendu la liberté : ceux de 1792 en France qui partaient se battre contre les armées prussiennes ; ceux également qui avant eux sont allés porter secours à la révolution américaine. Natacha Carlu en appelle à tous ces « soldats de la liberté » qui sont prêts à se lever pour sauver de la tyrannie nazie l’Europe occupée. Cette image de propagande tranche avec les images parfois rudimentaires des affiches que la résistance française produisait. Il est évident que les dangers – et les financements – n’étaient pas les mêmes en France occupée et aux États-Unis.

Synthétiser6. Une volonté de lutter par tous les moyens possibles contre l’asservissement et la privation de libertés, une volonté de ne pas abdiquer unissent les mouvements de résistance. Cette résistance acharnée, quelles que soient les orientations religieuse ou politique initiales, prend encore plus de sens après la création du CNR (1943). C’est bien un idéal républicain qu’il s’agit de défendre.

Vers le BAC

CompositionLorsque le général de Gaulle intervient le 18 juin à la BBC, bien peu de Français entendent le message. C’est par la diffusion de tracts et d’affiches que le message finit par être connu de tous. C’est également à travers des affiches comme celle de Natacha Carlu, que le message de la Résistance, et l’appel aux vertus républicaines peuvent se répandre, y compris auprès des Français qui résidaient à l’étranger. Les nazis avaient bien compris l’importance capitale que revêtaient les images dans la bataille de la propagande. Ainsi, pour opposer les Français entre eux, la propagande allemande s’est servie des images : l’Af-fiche rouge, placardée en 1944 dans de nombreuses villes française, était censée dénoncer l’existence de terroristes « étrangers » qui mettaient en danger la vie des Français. Le message s’est retourné contre l’occupant, jusqu’à devenir un symbole absolu de la Résistance.

Étude

Étude

La Résistance ravive l’idéal républicain ➤➤ p. 234-235

La République au maquis : le Vercors ➤➤ p. 236

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Quelques minutes de la vie d’un maquis dans l’Ain. Petit film de propagande réalisé pour faire connaître l’action des maquis.

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Situer un événement dans le temps court 1. En 1942, Laval lance le principe de la Relève qui se trans-forme en STO une année plus tard. La constitution d’un maquis relève d’un choix de refuser de collaborer, et de contester la politique suivie par Vichy. Avec la mise en place du STO, les effectifs augmentent : les réfractaires au service en Allemagne deviennent de fait hors-la-loi. Ils rejoignent alors ceux qui se sont déjà opposés à l’État français, et qui se sont regroupés et cachés dans les campagnes.La création et/ou la participation à un maquis procède d’une même logique, et il n’est pas étonnant que ce soient essentiellement des jeunes hommes – encadrés par d’anciens soldats – qui forment le gros des troupes. Les femmes ont participé activement aux réseaux de la Résistance, et y ont joué un rôle capital, notamment dans la transmission et la liaison. On en retrouve cependant moins dans les maquis, cela est sans doute dû aux condi-tions très rudes de la vie dans certains maquis de mon-

tagne, et à l’organisation quasi militaire de ces groupes de combats.

Décrire une situation historique2. Les valeurs de la République incarnées sont les valeurs de liberté, égalité, fraternité.3. Le maquis se constitue la plupart du temps dans des zones difficiles d’accès, en moyenne montagne par exemple. L’intérêt est évidemment défensif : il est plus facile à organiser et à dissimuler. Tous ont eu comme point commun d’exister et de prendre des risques contre un occupant particulièrement décidé. Certains – comme celui du Vercors – ont payé un tribut plus lourd à la défense de leur idéal.4. Les membres du maquis sont des hommes jeunes, encadrés par des officiers de l’armée. Ils se préparent à des actions de combats. Leur objectif est – au sein des Forces françaises de l’intérieur (FFI) – de défendre leur patrie, comme le font les FFL (Forces françaises libres).

Étude

Étude

Germaine Tillion : une femme en Résistance ➤➤ p. 237

Le CNR et la refondation républicaine ➤➤ p. 238-239

Mettre en récit une situation historique 1. En juin 1940, Germaine Tillion revient à Paris, et entre en contact avec le colonel Paul Hauet avec lequel elle orga-nise des premières actions de résistance. Elle retrouve ses amis du Musée de l’Homme (Yvonne Oddon, Paul Rivet, Anatole Lewitsky) et y fait la connaissance de Boris Vildé, tous engagés dans la Résistance. À la fin de 1940, elle donne les papiers de sa famille à une famille juive qui sera ainsi protégée jusqu’à la fin de la guerre. Dès 1941, après l’arrestation d’une partie de ses camarades, G. Tillion devient alors responsable de ce qui reste du réseau. Dénoncée en 1942, elle est arrêtée et détenue à la prison de la Santé, puis à Fresnes. Elle est ensuite dépor-tée à Ravensbrück (1943). Elle entreprend une recherche sur l’univers concentrationnaire où elle est plongée : « Comprendre permet d’agir… ». Le 23 avril 1945, elle est libérée de Ravensbrück, grâce à la Croix-Rouge suédoise. Des camps nazis, elle revient « par hasard et par colère » en ramenant un des premiers livres publiés sur la méca-nique concentrationnaire nazie, Ravensbrück (édité en 1946), mais aussi, une opérette, Le Verfügbar aux enfers…2. En 2014, François Hollande a décidé de faire entrer au Panthéon les cendres de quatre résistants, dont celles de Germaine Tillion. Cette cérémonie a eu lieu le 27 mai 2015.

Au-delà des honneurs, cette entrée au Panthéon ancre défi-nitivement la Résistance dans la mémoire officielle de la France. Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette, Jean Zay ont déjà été célébrés indivi-duellement ; mais cette « troïka » de la Résistance qui entre ensemble dans un lieu sacré de la République, renforce encore le sens de l’acte de résistance. Résister à l’oppres-sion est consubstantiel de la culture républicaine.

Cerner le sens d’un document3. Germaine Tillion s’adresse à la « Kommandantur » et indirectement aux autorités allemandes ; son objectif est de montrer qu’elle – et à travers elle la France – n’a pas peur de ce qu’il peut lui arriver. Avec humour, et de façon sarcastique, Germaine Tillion montre le côté dérisoire et vain de ce type d’arrestation. Elle se tient debout et elle reste responsable de son destin.4. Le ton en lui-même est ironique, quant aux accusations qui lui sont portées elles apparaissent farfelues. Elle les reprend une à une, et les commente de telle sorte qu’elles ne peuvent que prêter à sourire. La situation apparaîtrait presque comique, si elle n’était pas aussi grave. C’est un authentique acte de résistance car les risques encourus sont grands. Elle est d’ailleurs déportée à Ravensbrück quelque temps après.

Situer1. C’est véritablement à partir de 1943, sous la direction de Jean Moulin, que la Résistance s’est unifiée. Auparavant, l’entrée en guerre de l’URSS (1941) avait fait basculer offi-ciellement les communistes français de la clandestinité à la Résistance : cela avait eu comme conséquence indi-recte de structurer certains mouvements.

Prélever des informations2. Le bureau du CNR est composé de façon très straté-gique. Il est représentatif des mouvements de Résistance (8 membres), des partis politiques non compromis dans la collaboration (6 membres) et également des forces du monde du travail (2 membres) : chaque parti ou mouve-

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ment représentant une voix, la dix-septième étant appor-tée par le président Jean Moulin.3. Jean Moulin a été immédiatement confronté à des dif-ficultés de principes entre les différents représentants de la Résistance, puis aux hostilités de ces derniers vis-à-vis des partis politiques classiques et des syndicats. Enfin, Jean Moulin a dû faire en sorte que chaque formation soit traitée de manière équitable. Il a dû s’opposer fermement aux demandes répétées de la CGT et du PC d’avoir deux représentants au lieu d’un au CNR. 4. Le programme du CNR, très fortement influencé par les forces de gauche majoritaires, va bien au-delà de la victoire. Il prône bien entendu le retour à la démocratie et le retour des libertés fondamentales, mais insiste éga-lement sur la mise en place d’un système de garanties pour le peuple, dont les plus significatives sont le droit syndical et la naissance d’une véritable sécurité sociale.

Synthétiser5. Les documents révèlent que la structure du CNR était très démocratique (avec cependant une prépondérance des

forces de gauche). Ils révèlent également que leurs préoccu-pations allaient bien au-delà de la victoire, puisque le pro-gramme du CNR, aux préoccupations très sociales, devait servir de base à la reconstruction institutionnelle du pays.

Vers le BAC

Étude critique d’un document

Peu avant le débarquement allié en France (6 juin 1944), presqu’un an après la réunion du CNR sous la direction de Jean Moulin (27 mai 1943), le CNR présente un pro-gramme qui annonce le retour de la République après la victoire. Majoritairement composé de représentants de la gauche, ce programme est très social et montre que les représentants de la Résistance intérieure ont à l’esprit le moment de la reconstruction. Pour assurer la continuité républicaine et la mission dont ils se sentent investis, ils déclarent rester unis après la Libération.

Cours 2 Les combats de la Résistance et la refondation républicaine ➤➤ p. 240-241

Doc. 1> Cette image montre des hommes juifs – on ne distingue pas de femmes sur cette photographie – qui sont accom-pagnés dans des trains. C’est un policier français qui les conduit, il y a une sorte de tranquillité qui se dégage de cette scène qui indique que ces hommes semblent ne pas connaître leur destination. Ils partent pour un long voyage, avec tous leurs bagages. La présence policière est faible, ce qui laisse à supposer qu’il n’y a pas de troubles immé-diats à redouter. En mai 1941, la France collabore depuis près de sept mois avec l’Allemagne (entrevue de Mon-toire), mais la conférence de Wannsee (20 janvier 1942) n’a pas encore été réunie, et la « Solution finale » n’a pas encore été officialisée. Il s’agit donc sans doute de Juifs étrangers – arrêtés dans la zone occupée – qui partent dans un premier temps en direction des camps de concentration français (application de la loi sur le statut des Juifs d’oc-tobre 1940). Plus tard, l’État français, par l’intermédiaire des forces de l’ordre françaises, participe à l’arrestation et à la déportation des Juifs français.

Doc. 2> De Gaulle s’adresse à une assemblée, certes provisoire, mais qui représente la nation. Il se tient debout sous les symboles de la République : Marianne, les lettres RF et les trois couleurs de la France ; la croix de lorraine symboli-sant la France libre…

Doc. 3> La séparation des pouvoirs est respectée mais, l’élec-tion du président de la République par les deux chambres, ainsi que le contrôle strict du gouvernement par l’Assem-blée nationale, affaiblissent le pouvoir exécutif et fragi-lisent la République. Les partis politiques contrôlent la vie politique sous la IVe République, et les gouvernements sont défaits et renversés au gré des crises.

Doc. 4> De Gaulle s’oppose à l’idée que le pouvoir législatif « dirige » le pouvoir exécutif et notamment le président de la République. Pour de Gaulle, le président doit être véritablement responsable, et donc ne pas émaner des partis. La base électorale doit être élargie le plus possible. Le discours de Bayeux annonce clairement – dès 1946 – les institutions de la Ve République.

Étude Vers une nouvelle constitution, le 4 septembre 1958 ➤➤ p. 242-243

Utiliser la vidéo✔ Saisir l’adresse du lien indiqué sur la page

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Classique et connue, cette séquence est cependant très pratique pour montrer aux élèves la façon dont de Gaulle s’exprime en public ; et faire comprendre l’importance du personnage, à cette époque.

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93© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Situer1. Après le 13 mai 1958, et la manifestation des Européens d’Alger, le retour du général de Gaulle semble inéluctable. Ce dernier est prêt à servir à nouveau de recours. Confor-mément à la constitution, le président de la République René Coty appelle de Gaulle à la présidence du Conseil, en sachant que cela sonne le glas de la IVe République. En effet, de Gaulle accepte ces responsabilités nouvelles à condition que, conformément à ce qu’il a dit lors du dis-cours de Bayeux, la constitution soit modifiée. Le 3 juin, il est investi par l’Assemblée, le 4 il présente aux Français son projet de constitution.

Prélever des informations2. André Malraux fait référence au moment où de Gaulle incarne la figure de la France libre et de la Résistance. Au moment de l’appel du 18 juin, il est seulement accompa-gné d’une poignée de compagnons lorsqu’il appelle la nation à la résistance. Pour Malraux, c’est bien grâce à de Gaulle et à sa volonté de mettre en place un gouver-nement provisoire, que la République a pu traverser les épisodes de la défaite puis de l’occupation.3. Il y a un enthousiasme certain d’une partie des Fran-çais qui croient au retour de l’homme providentiel. La photographie montre deux jeunes gens, nés pendant ou juste avant la Seconde Guerre mondiale, qui placardent des affiches pour inciter au vote. Les jeunes femmes, électrices depuis peu, s’engagent fortement lors des moments électoraux.4. S’il y a une majorité qui semble suivre de Gaulle, il n’y a pas consensus, et les forces de gauche – le parti com-muniste notamment – s’opposent et manifestent contre ce qu’ils jugent être un coup de force. Ils craignent qu’un régime trop autoritaire ne se mette en place. Certains

intellectuels, comme le philosophe Jean-Paul Sartre, sont antigaullistes.

Synthétiser5. Cette nouvelle république doit apporter plus de démo-cratie aux Français. La vie politique doit être plus active car moins contrôlée par les grands partis. De Gaulle avait prévu que le président de la République ne serait qu’une marionnette entre les mains des grandes formations poli-tiques (discours de Bayeux). Il a vécu sa « traversée du désert » (1947-1958) difficilement, et souhaite que le pou-voir exécutif soit vraiment indépendant. De cette manière, la République est plus solide, plus stable et doit durer plus longtemps.

Vers le BAC

Étude critique de documentsI. Les références historiques de la Ve RépubliqueÉvoquer l’affirmation du pouvoir exécutif par rapport au pouvoir législatif (principales différences avec les deux républiques précédentes), qui la rend plus stable. L’ancrer dans l’histoire avec le rôle de De Gaulle dans la Seconde Guerre mondiale, son opposition à la constitution de la IVe République – discours de Bayeux –, et son retour dans un contexte de crise coloniale.II. Les critiques adressées à la nouvelle républiqueEssentiellement le fait que cette république a été faite presque sur mesure pour de Gaulle (Michel Debré). Expliquer comment elle fonctionne. Montrer également que certains y voient la mise en place d’un régime autori-taire, d’une monarchie selon Sartre, d’une dictature selon d’autres.

Étude Le statut présidentiel, « clef de voûte des institutions » ➤➤ p. 244-245

Situer1. En 1962, après l’attentat du Petit-Clamart, de Gaulle, convaincu qu’il faut donner plus de légitimité au pré-sident de la République, demande que l’élection prési-dentielle soit désormais soumise au suffrage universel direct. Conscient que cette proposition n’a pas l’aval des principaux partis politiques, il préfère en appeler au peuple en utilisant le référendum.

Prélever des informations2. Conformément à ce qu’il préconisait déjà en 1946 lors du discours de Bayeux, de Gaulle souhaite que les pou-voirs du président de la République soient renforcés : le président est le garant de la constitution, il préside aux grandes orientations. Il nomme le Premier ministre, et peut dissoudre l’Assemblée nationale. Il peut consulter direc-tement le peuple par référendum. Enfin, par l’article 16, il peut demander les pleins pouvoirs pour une durée limitée.3. De Gaulle demande par référendum la confiance du peuple. Mais il accompagne sa demande d’une condition inédite : en cas de désaccord, ou d’accord très relatif, il n’hésiterait pas à quitter ses fonctions. C’est cela qui a donné un arrière-goût de plébiscite à ce référendum.

4. La classe politique s’est majoritairement opposée au général lors de ce référendum. L’Assemblée a d’ailleurs renversé le gouvernement Pompidou. De Gaulle a réagi fermement, en dissolvant l’Assemblée, et en renommant le même Premier ministre. Certains lui reprochent de vou-loir établir une sorte de dictature, d’autres de fonctionner par coup d’État.

Synthétiser5. Le président de la République n’est plus soumis au contrôle des partis. La Ve République lui accorde des pouvoirs supérieurs aux autres constitutions. De plus, avec l’élection directe au suffrage universel (à partir de 1962), la légitimité du président est renforcée. C’est lui qui domine désormais la vie politique française.

Vers le BAC

Étude critique d’un documentLe 28 octobre 1962, de Gaulle demande par référendum de modifier le mode de scrutin de l’élection présidentielle. Par crainte que le suffrage universel direct ne donne une

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place trop importante au chef de l’exécutif, une partie de la classe politique et des Français tentent de s’opposer à ce projet. Le document compare le référendum à un plé-biscite, comme au temps de Louis-Napoléon Bonaparte.En quoi l’élection du président de la République au suf-frage universel direct renforce-t-elle le poids de l’exécutif ?

Nous étudierons dans un premier temps comment le suf-frage universel donne plus de légitimité au chef de l’exé-cutif puis nous verrons qu’il impose un débat d’idées au moment de l’élection.

Cours 3 1958-1962, une nouvelle République ➤➤ p. 246-247

Doc. 1> La Ve République donne un rôle plus important au pré-sident de la République ; on parle en général de régime semi-présidentiel. Les rapports entre le président de la République et l’Assemblée nationale sont précis : le pré-sident peut dissoudre l’Assemblée, alors que cette der-nière ne peut que remettre en cause sa politique en ren-versant, par une motion de censure, le gouvernement. Le président de la République a des liens directs avec le peuple : d’une part grâce au suffrage universel (direct après 1962), d’autre part, avec la possibilité que lui donne le référendum de le consulter directement. De Gaulle a souvent utilisé ce mode de consultation.

Doc. 2> De Gaulle pose en préalable que la modification du mode de scrutin n’est pas incontournable pour lui. L’his-toire a déjà tissé avec lui et la nation des liens qu’il juge indissolubles. En fait, il se préoccupe de ses successeurs qui n’auront pas la même légitimité que lui. Il veut à tout prix s’affranchir du contrôle des partis, et souhaite que le président puisse avoir un lien direct avec la nation au moment des élections : la dernière phrase du document l’exprime clairement.

Doc. 3> En jetant dans l’arène politique les différents candidats à la présidence, de Gaulle les force au débat politique. Ainsi, tous les sept ans, une campagne présidentielle doit permettre aux différentes tendances de s’exprimer. L’élection a lieu sur la base d’un scrutin uninominal à deux tours, les Français s’expriment en fonction de leurs convictions politiques. Ils votent en conscience pour un candidat qui a fixé un cap conforme aux idées qu’il défend. Dans la Ve République, le président préside et le Premier ministre gouverne. L’un définit une ligne géné-rale directrice, l’autre est chargé de la faire appliquer.

Doc. 4> En 1969, de Gaulle exerce son deuxième mandat. Il a été élu au suffrage universel en 1965. Les « bains de foule » sont devenus un passage obligé pour lui. On a ainsi l’im-pression que le peuple français le plébiscite. Cela dit, un an après mai 1968, la popularité politique de De Gaulle a baissé. Il est mis en minorité lors d’un référendum qui concernait la réforme du Sénat, il quitte la présidence et la vie politique.

Activité 1Chronologie à construire, avec par exemple : septembre 1958, 21 décembre 1958, 9 octobre 1962, 28 octobre 1962.

Activité 21. C’est une affiche qui marque le centenaire de la Répu-blique. La France est symbolisée par une Marianne en majesté au premier plan ; au second plan se conjuguent les éléments d’une France rurale en mutation (chemin de fer).2. Le personnage central de l’affiche est Marianne ; elle est représentée assise, arborant les symboles de la Répu-blique : bonnet phrygien, drapeau. Elle tient également dans sa main droite un rameau d’olivier. Elle n’est pas guerrière, mais elle inspire l’opulence et la sérénité.3. Deux jeunes enfants entourent Marianne ; ils sont sym-boles de fécondité.4. C’est une affiche de célébration du centenaire de la République. Dans un contexte d’industrialisation, la Répu-blique a apporté le calme et la prospérité.

5. En 1892, la culture républicaine n’est pas encore com-plètement affirmée. Si la République est en place, elle est également chahutée, et de nombreuses crises ont jalonné cette fin de xixe siècle. L’inscrire dans la lignée de la Ire République issue de la Révolution, c’est montrer que le principe républicain a été plus fort que les tentatives de restauration et le retour à l’empire.

Activité 31. De gauche à droite : IIIe République, IVe République, Ve République.

Vers le Bac Réviser ➤➤ p. 248-249

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2.

IIIe République IVe République Ve RépubliquePoints communs • Séparation des pouvoirs

• Bicamérisme• Suffrage universel

Différences • Élection du président de la Répu-blique par les deux chambres

• Élection du président de la Répu-blique par les deux chambres

• Élection du président de la Répu-blique au suffrage universel direct (après 1962)

• Président du Conseil contrôlé par la Chambre

• Président du Conseil investi par l’Assemblée (peut aussi le renverser)

• Le Premier ministre peut engager sa responsabilité, et le gouvernement peut être renversé par l’Assemblée nationale

• Suffrage universel : hommes de plus de 21 ans

• Suffrage universel : hommes et femmes de plus de 21 ans

• Suffrage universel : hommes et femmes de plus de 21 ans

Réaliser un schéma simple à partir d’un document

Étape 1 Établir une légende simple1. Président de la République = case rouge ; Chambre 1 + chambre 2 = cases orange ; Peuple = case bleue.En légende : pouvoir exécutif = partie rouge ; pouvoir législatif = partie orange.Suffrage universel direct relit peuple à président de la République ; suffrage universel indirect relit peuple à par-lement via collège d’électeurs.

Étape 2 Passer du schéma au texte2. La constitution de la IIIe République précise que les pouvoirs sont séparés. Le pouvoir exécutif est composé d’un gouvernement dirigé par un président du conseil. Nommé par le président de la République, qui a été élu pour 7 ans par une assemblée (Chambre des députés + Sénat). Les deux chambres sont élues au suffrage univer-sel (hommes de + de 21 ans) : suffrage universel direct pour les députés, suffrage universel indirect (grands élec-teurs) pour le Sénat. Les chambres contrôlent l’action du gouvernement, et le président peut dissoudre la chambre des députés avec l’accord du Sénat.

Étape 3 Relier les différentes données du schéma3. Le pouvoir exécutif est composé d’un président de la République et d’un conseil des ministres dirigé par un président du Conseil. Il est le garant de l’exécution des lois. Le pouvoir législatif est composé de deux chambres indépendantes (bicamérisme), il sert à « faire » les lois. Le peuple (hommes et femmes de plus de 21 ans) est la

base électorale du système, il peut s’exprimer grâce au suffrage universel.

Réaliser un schéma simpleVoir page suivante.

Mettre en relation les informations de deux documents de nature différente1.

Exécutif Législatif JudiciaireModèle Président +

gouvernementAssemblée (deux chambres)

Indépendant

IIIe République

Président + gouvernement (Président du Conseil prépon-dérant)

Chambre des députés + Sénat

Indépendant

IVe République

Président + gouvernement (Président du Conseil prépon-dérant)

Assemblée Nationale + Conseil de la République

Indépendant

Ve République

Président + gouvernement

Assemblée nationale + Sénat

Indépendant

Utiliser la schéma commenté✔ Saisir l’adresse du lien indiqué sur la page

pour accéder librement au schéma

Le schéma commenté propose une construction progressive et commentée du schéma de synthèse.

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Vers le Bac S’entraîner ➤➤ p. 250-251

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2. Le fonctionnement des trois dernières républiques françaises est très proche de celui du modèle. 3. C’est la Ve République qui se rapproche le plus du modèle. En effet, le rôle du président est prépondérant ; le Premier ministre applique (exécute) la politique initiée

par le chef de l’État – sous le contrôle du Parlement qui peut sanctionner cette politique (motion de censure).

Citoyens (hommes et femmes) majeurs

Chambre 1(prééminente),mandat limité

Chambre 2,mandat limité

Président,mandat limité

Chef degouvernement

+ ministres

PO

UV

OI

R

J

UD

IC

IA

IR

E

Corps électoral

Pouvoir exécutif

Pouvoir législatif

Suffrage universel direct

Suffrage universel indirect

Contrôle (vote)

Consulte le peuple

Navette parlementaire

Nomme

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➤ ✔➤Exemple de réponse rédigée

En 1940, la France est défaite par l’Allemagne. Le 17 juin, le maréchal Pétain appelle à cesser le combat. Le 22 octobre 1940, lors de l’entrevue de Montoire, Pétain et Hitler scellent une politique de collaboration. Cette dernière prend tout son sens à partir de 1942 – Pierre Laval est alors président du Conseil –, au moment où Vichy tente de mobiliser les forces vives de la nation pour faire entrer la France dans l’Europe nouvelle désirée par Hitler.

Comment la jeunesse se positionne-t-elle, de l’annonce de la Relève par Laval, à la fin de la Seconde Guerre mondiale ?

À partir de 1942, Pierre Laval organise la Relève – qui se transforme rapidement en Service du travail obligatoire (STO) –, et met en place la Milice dès 1943.L’extrait du discours de Pierre Laval date du 22 juin 1942, soit deux ans après l’annonce de l’armistice par Pétain, et un an après le début de l’opération Barbarossa qui entraîne l’entrée en guerre de l’URSS aux côtés des Alliés. À cette époque, les armées allemandes occupent quasiment toute l’Europe et l’Allemagne nazie demande aux pays qu’elle occupe un effort de guerre important. Pierre Laval annonce – sans le citer – le principe de la Relève. Un volontaire français qui part travailler en Allemagne doit permettre à des prisonniers français de revenir : « Ouvriers de France ! C’est pour la libération des prisonniers que vous allez travailler en Allemagne ! ». L’État vichyste veut prendre sa place dans cette Europe nouvelle, aux côtés de l’Allemagne nazie : « C’est pour permettre à la France de trouver sa place dans la nouvelle Europe que vous répondrez à mon appel ».Le document 2 est une photographie qui montre une arrestation de jeunes résistants par des miliciens – tout aussi jeunes. Bien que non datée, elle se situe forcément entre janvier 1943, date de la création de la Milice, et l’été 1944 date de l’élimination de la République du Vercors. L’intérêt du document réside dans le fait que tous les protagonistes sont français ; en effet, la Milice est certes un organe de propagande, mais aussi une force de maintien de l’ordre et de répression. Une des limites supposées de cette association de documents est de nous faire penser qu’il n’existait qu’une alternative pour la jeunesse à la politique de Vichy : soit elle collaborait, soit elle résistait.

En fait, la réalité a été plus complexe, et la jeunesse a eu plusieurs attitudes pendant cette période de l’occupation.Dans un premier temps, la jeunesse – comme le reste de la population française – a attendu de voir ce qu’il se passait. Peu de gens ont entendu l’appel du 18 juin, encore moins ont rejoint de Gaulle. Après l’attaque des Allemands contre les Soviétiques en juin 1941, les communistes français – dans la clandestinité depuis le début de la guerre – ont rejoint collectivement certains mouvements de résistance. Mais c’est l’annonce de la Relève, puis du STO, qui a poussé de nombreux jeunes de vingt ans (âge de la conscription) refusant de partir, dans la Résistance et surtout dans les maquis. C’est aussi pour cela que l’on trouve moins de femmes – elles se sont mobilisées autrement, notamment dans les réseaux et ont servis le plus souvent d’agents de liaison – dans les maquis. Face à cette jeunesse résistante, d’autres ont choisi de collaborer. Certains l’ont fait par conviction, d’autres par opportunisme, d’autres enfin par « hasard » - comme le héros de Lucien Lacombe. Parmi ces derniers, certains sont entrés, dans la LVF (Légion des volontaires français), d’autres sont devenus miliciens et ont livré une bataille sévère aux résistants. Mais une grande partie de cette jeunesse a tout simplement essayé de continuer à survivre comme elle pouvait, certains participant au marché noir, d’autres s’impliquant individuellement (en cachant des Juifs par exemple), d’autres encore en faisant les deux.

Ainsi, la jeunesse n’a pas eu un comportement univoque, ni dans le sens de la Résistance, ni dans celui de la collaboration. Et, il est difficile de séparer ces actions de celles de la population française dans son ensemble. La Libération fut un moment d’enthousiasme et de confusion, mais il a fallu vite réorganiser la France afin d’éviter des règlements de compte auxquels la jeunesse, comme les autres Français d’ailleurs, était prête à participer.

SUJET La jeunesse en France entre 1942 et 1945

Corrigé du sujet 13 p. 252ÉTUDE CRITIQUE DE DEUX DOCUMENTS

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98 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

◗ Mettre en œuvre la questionLe chapitre s’articule autour de quatre études et de deux cours qui soulignent la variété des défis que posent à la République les mutations sociales et religieuses et ana-lysent les réponses apportées par le régime.

➤➤ La double page d’ouverture (p. 254-255) présente la photographie d’une syndicaliste, militante communiste haranguant les salariés de l’usine Citroën en 1938. Le document évoque deux thèmes du chapitre : l’impact du Front populaire et l’affirmation des femmes dans le monde du travail et le mouvement syndical.

➤➤ La double page Repères (p. 256-257) propose trois chronologies parallèles pour les trois études.

➤➤ L’étude sur le Front populaire (p. 258-259) se demande dans quelle mesure le Front populaire a représenté un tournant dans les relations entre la République et le monde ouvrier. Les deux premiers documents resituent la victoire du Front populaire et les grèves qui l’ont suivie dans leur contexte. Le document 3 est un témoignage rétrospectif sur l’embellie de l’été 1936 qui conduit à lister les mesures prises par le gouvernement de Léon Blum, afin de montrer comment celles-ci ont permis d’améliorer la condition ouvrière. On pourra enfin expliquer pourquoi le Front populaire constitue un temps fort de la mémoire ouvrière. Le document 4 permet de mesurer l’ampleur du choc provoqué par les mesures gouvernementales à l’aune des oppositions virulentes qu’elles ont suscitées. Le document éclaire ainsi l’échec du Front populaire.

➤➤ L’étude sur la place des femmes en politique (p. 260-261) s’intéresse aux deux principaux volets du combat pour l’affirmation des femmes en politique : la conquête du droit de vote d’une part, l’accès des femmes aux res-ponsabilités politiques d’autre part. L’extrait du manifeste

sur la parité souligne la rupture que représente la notion de parité qui rompt avec l’universalisme républicain.

➤➤ L’étude sur le droit à l’avortement (p. 262-263) présente l’un des combats majeurs du mouvement féministe au cours des années soixante-dix. L’avortement symbolise également le renouvellement des combats féministes. Les documents proposés témoignent de l’importance de la loi Veil : le document 2 évoque ainsi le drame des avortements clandestins en 1970. Les deux derniers docu-ments désignent les acteurs du combat : les mouvements féministes d’une part, la ministre Simone Veil d’autre part. L’extrait du discours de S. Veil permet d’étudier l’argu-mentaire déployé par la ministre.

➤➤ L’étude sur la laïcité (p.  264-265) se focalise sur la question scolaire comme enjeu principal de la laïcité. Le premier document, en lien avec le chapitre précédent, rappelle le contexte dans lequel les lois Ferry ont été votées. Les autres documents interrogent la récurrence des débats sur la laïcité à l’école et montrent comment ceux-ci font évoluer la notion de laïcité.

➤➤ Le cours 1 (p. 266-267), consacré aux rapports entre la République et les religions, explique les principales étapes de la laïcisation de la société française ainsi que les évolutions qui traversent le modèle laïque. Les documents éclairent les circonstances du vote de la loi de séparation des Églises et de l’État. Le texte de Ferry explique l’hostilité des républicains envers l’Église. La photographie prise lors de l’inauguration d’une mosquée permet de montrer comment les évolutions du paysage religieux – ici l’augmentation du nombre de musulmans présents sur le territoire – conduisent l’État à soutenir la construction de lieux de culte.

➤➤ Le cours 2 (p. 268-269) étudie parallèlement l’évolu-tion de la question ouvrière et des combats féministes. Femmes et ouvriers sont ici comparés puisqu’il s’agit

Chapitre 10➤➤Histoire, p. 254-273

La République et les évolutions de la société française

Le chapitre porte sur la République et les évolutions de la société française et s’intègre au thème 5 du programme : les Français et la République. Le but du chapitre est de mettre en évi-dence la manière dont l’idée républicaine a su évoluer pour s’adapter aux évolutions sociales et culturelles. Pour cela, le programme suggère trois études.Les deux premières s’intéressent aux deux catégories en marge du projet républicain tel qu’il s’est constitué au tournant du siècle : les ouvriers et les femmes. S’agissant des ouvriers, le programme demande de focaliser l’étude sur le Front populaire qui constitue un tournant des relations entre la République et la classe ouvrière. En effet, les acquis sociaux de l’été 1936 permettent de rallier au régime un groupe qui lui était jusque-là hostile. L’étude sur les femmes analyse l’évolution de leur place dans la vie politique et le monde du travail, ainsi que le déplacement des combats féministes qui passent de la revendication du droit de vote à celle de la maîtrise de la fécondité. Enfin, pour rester dans le cadre du thème 5 et de ses problématiques, il s’agit bien ici de mesurer la contribution de la République à l’émancipation des femmes.La troisième étude s’intéresse aux rapports qu’entretient la République avec les religions. Après avoir étudié la fondation du modèle laïque dans les années 1880, il s’agit de suivre les évolutions de la laïcité face aux mutations du paysage religieux. La question scolaire est au cœur de l’étude puisque les premières lois laïques concernent l’école qui est de manière constante l’enjeu des luttes entre défenseurs et détracteurs de la laïcité.

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99© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

de deux catégories en marge du projet républicain. Le document 2 évoque les rapports conflictuels entre la République et les ouvriers au début du vingtième siècle pour mettre en perspective les mutations opérées par le Front populaire. En complément du chapitre consacré aux mutations de la population active, le document 4 souligne la persistance des discriminations envers les femmes dans le monde du travail. Enfin, le document 3 aborde l’une des mesures phares du Front populaire : la réduction de la durée hebdomadaire du travail. La confrontation de l’affiche cégétiste et du discours de Paul Reynaud met en évidence la vigueur des affrontements autour de la loi des Quarante heures.

➤➤ La double page Réviser (p. 270-271) met à disposition une série d’exercices permettant de faire le point sur la

laïcisation de la société française et d’identifier les prin-cipaux acteurs des combats féministes. L’exercice de lec-ture d’un document se focalise sur la loi des Quarante heures.

➤➤ La page S’entraîner (p. 272) propose un questionnaire et une méthodologie pour lire une caricature. Celle-ci rap-pelle d’une part les relations conflictuelles entre l’Église et la République, d’autre part l’hostilité d’une partie du mouvement ouvrier à la République.

➤➤ Le sujet Bac (p. 273) est consacré à l’étude critique de deux documents. Les documents choisis confrontent le regard porté sur l’expérience du Front populaire par le mouvement ouvrier et les chefs d’entreprise. Là encore, l’étude est l’occasion d’évoquer avec les élèves les limites du Front populaire.

Ressources numériques liées au chapitreDocument interactif• Simone Veil et le droit à l’avortement, p. 263 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-045Vidéo• Les grèves de juin 1936, p. 258 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-044Schéma commenté• La République et les évolutions de la société française, p. 271 ➝ www.lienmini.fr/magnard-hg1-046

www.lienmini.fr/magnard-hg1-105

Bibliographie

✔ Christine Bard, Les femmes dans la société française au vingtième siècle, coll. « U », Armand Colin, 2002.Synthèse dense écrite par une historienne spécialiste du mouvement féministe.

✔ Michel Margairaz, Danielle Tartakowsky, L’avenir nous appartient, Larousse, 2006.Écrit par deux spécialistes de la période, ce livre est illustré par de nombreux documents.

✔ Jean-Paul Scot, L’État chez lui, l’Église chez elle. Comprendre la loi de 1905, Seuil, 2006.Le livre explore de manière approfondie les débats qui ont conduit au vote de la loi de 1905 et de son contenu.

◗ Corrigés des questionnaires

Étude Le Front populaire et les ouvriers ➤➤ p. 258-259

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La vidéo est extraite d’un reportage réalisé par l’Union des syndicats ouvriers sur les grèves de 1936. Le document est intéressant pour décrire le contexte de la crise des années trente, caractériser le mouvement de grève et l’expli-quer. Ainsi, le reportage fait allusion à l’ampleur du mouvement puisqu’il énumère les secteurs concernés. Il évoque le caractère festif des occupations d’usine ainsi que le rôle des syndicats dans l’organisation du mouvement. Il est possible de l’utiliser en ouverture de la séquence sur le Front populaire.

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Identifier un acteur1. Le parti communiste s’exprime à la une de L’Humanité. Après la victoire de la coalition de Front populaire aux

élections législatives de mai 1936, il partage le pouvoir avec ses deux alliés : la SFIO et le parti radical. Il n’est pas représenté au gouvernement, mais il le soutient à la Chambre des députés.

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100 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Confronter des informations 2. La Une célèbre l’Accord Matignon conclu entre les repré-sentants de la CGT et les représentants patronaux sous l’égide du gouvernement, dans la nuit du 7 au 8 juin 1936 afin de mettre fin aux grèves avec occupation d’usines.3. Les mesures du Front populaire, qu’ils s’agissent des lois sociales ou des conventions collectives apportent un peu d’oxygène à la condition ouvrière. Tout d’abord, le pouvoir d’achat augmente suite aux hausses de salaires accordées par l’Accord Matignon et les conventions col-lectives. À Paris, les gains de pouvoir d’achat vont de 35 % à 70 %. Le Front populaire marque également l’avène-ment du temps libre et des loisirs. Non seulement, la loi des Quarante heures réduit la semaine de travail de 48 à 40 heures, mais les ouvriers bénéficient désormais de deux semaines de congés payés. Malgré tout, le départ en vacances reste un privilège. Beaucoup de familles se contentent de rester chez elles ou de partir dans la famille à la campagne. Enfin, le Front populaire rééqui-libre les rapports entre patrons et ouvriers. Avec l’Accord Matignon et les conventions collectives, le gouverne-ment s’engage dans la promotion du dialogue social. Les conditions de travail ne sont plus fixées unilatéralement par le patron, mais négociées entre les représentants patronaux et ouvriers. Un patron n’est plus libre de faire ce qu’il désire, mais doit se soumettre aux règles de la convention collective, notamment le salaire minimum ou le respect du droit syndical, deux acquis importants aux-quels le texte fait référence. 4. L’affiche accuse le Front populaire d’avoir entretenu l’agi-tation sociale qu’il s’agisse des grèves ou des émeutes. En effet, un climat d’affrontement perdure autour de l’ap-plication des conventions collectives. L’affiche fait ici réfé-rence à la fusillade de Clichy qui survient le 16 mars 1937. Ce jour-là une manifestation est organisée pour protester contre la réunion d’une ligue d’extrême droite. La police tire sur la foule, faisant six morts. L’affiche attaque égale-ment l’œuvre sociale du Front populaire. En dépit de la réduction hebdomadaire du temps de travail, le chômage demeure. Les patrons ayant répercuté les hausses de salaires sur les prix, la hausse du pouvoir d’achat de mai 1936 est grignotée. C’est la vie chère. Enfin, il est reproché au Front populaire d’avoir ruiné la France en creusant le déficit des finances publiques.

Synthétiser5. Malgré la croissance économique des années vingt, les conditions de vie des ouvriers s’améliorent très lente-ment. L’introduction du travail à la chaîne est synonyme de cadences accélérées. Avec le déclenchement de la crise des années trente, le chômage pèse sur les ouvriers. Le salaire des ouvriers diminue.

Après la victoire de la coalition unissant le Parti commu-niste, les socialistes (SFIO) et le Parti radical aux élec-tions de mai 1936, une vague de grèves avec occupation d’usines se propage dans l’ensemble du pays. Par ces grèves, les ouvriers expriment leur joie devant la victoire du Front populaire et veulent contraindre le patronat à accepter les réformes proposées par Léon Blum. Conclu pour mettre fin aux grèves, l’Accord Matignon signé par la CGT et les principaux représentants patronaux accorde des hausses de salaires immédiates, prévoit la générali-sation des délégués ouvriers ou encore des conventions collectives. Complétée par la loi sur la Semaine de Qua-rante heures ou encore les congés payés, l’œuvre du Front populaire améliore nettement la condition ouvrière. Non seulement, le pouvoir d’achat est augmenté, mais les ouvriers ont enfin accès au temps libre. Ils ne sont plus victimes de l’injustice ou de l’arbitraire patronal, mais ont des représentants qui les défendent. Les syndi-cats signent des conventions collectives qui établissent des salaires minima s’imposant aux patrons. Dans l’en-treprise, les délégués ouvriers élus par les salariés les défendent au quotidien. Ces mesures contrastent avec la modestie de la législation sociale en vigueur jusque-là. Elles contribuent donc à rallier les ouvriers à un régime qui les avait jusque-là marginalisés. Malgré ces acquis indéniables, l’œuvre du Front populaire est attaquée et critiquée. La droite lui reproche d’avoir ruiné la France et dénonce la persistance de l’agitation sociale. Celle-ci exprime la tension autour de l’application des mesures adoptées à l’été 1936, mais aussi la décep-tion d’une partie des ouvriers. Non seulement les hausses de prix grignotent l’augmentation du pouvoir d’achat, mais les patrons répugnent à appliquer les conventions collectives. De nombreux délégués ouvriers ou militants syndicaux sont renvoyés.

Vers le BAC

CompositionDans la France des années 1930, la crise économique frappe durement la classe ouvrière et met en évidence les faiblesses de la législation sociale d’un régime dont la base sociale repose avant tout sur les paysans et les classes moyennes. Pourtant, aujourd’hui, l’œuvre du Front populaire reste un temps fort de la mémoire ouvrière et une étape majeure de la constitution d’un modèle social français.Dans quelle mesure le Front populaire marque-t-il un tournant des relations entre le monde ouvrier et la République ?

Étude La place des femmes en politique ➤➤ p. 260-261

Situer un événement1. La mobilisation en faveur du suffrage féminin prend de l’ampleur dès le début du siècle et se poursuit pendant toute la période de l’entre-deux-guerres. À cette époque, la France accuse un net retard sur ses voisins européens dont beaucoup ont accordé le droit de vote aux femmes.

Les associations féministes font pression sur le pouvoir politique. À plusieurs reprises, la Chambre des députés adopte le suffrage féminin, mais à chaque fois, le vote est bloqué par le Sénat. 2. Les femmes obtiennent finalement le droit de vote par l’ordonnance du 21 avril 1944. Le programme du CNR n’y fait pas allusion, mais il s’agit ici pour de Gaulle de

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101© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

récompenser la part prise par les femmes dans les com-bats de la Résistance.

Prélever et hiérarchiser des informations3. Ces documents montrent que les femmes ont pu accé-der à des postes de sous-secrétaire d’État puis de ministre, voire de Premier ministre pour Édith Cresson. En 1974, pour la première fois, une femme se présente à l’élection présidentielle. En 2007, Ségolène Royal, candidate pour le Parti socialiste accède au second tour de l’élection présidentielle. Les documents soulignent également les limites de cette affirmation. L’accès à des responsabilités ministérielles précède l’affirmation des femmes à l’As-semblée. Ainsi, les femmes accèdent à des responsabi-lités politiques parce qu’elles y sont nommées par des hommes, non parce qu’elles ont réussi à se présenter et se faire élire. Ensuite, aux postes où elles sont nommées, les femmes prennent en charge des questions proches des domaines traditionnellement assignés aux femmes. 4. L’objectif est d’arriver à la parité c’est-à-dire à une représentation égale des femmes et des hommes. Le manifeste suggère deux dispositions importantes. Tout d’abord, le texte exige la mise en place d’une politique de discrimination positive passant notamment par l’im-position de quotas. Les partis politiques seraient obligés de présenter autant de femmes que d’hommes. Ensuite, le texte demande la fin du cumul des mandats qui permet à une seule personne d’exercer plusieurs responsabilités politiques. Les postes ainsi libérés pourraient être occu-pés par des femmes. Pour s’assurer du respect de ces mesures par les partis, le texte ne suggère pas explici-tement la mise en place de sanctions, mais propose des mesures incitatives, liant le financement des partis poli-tiques à leur respect de la parité.

Synthétiser 5. Au début du siècle et pendant toute la durée de l’entre-deux-guerres, les luttes sont focalisées sur la question du droit de vote des femmes. En effet, la classe politique semble réticente à adopter le suffrage féminin. La plupart des hommes politiques jugent les femmes trop faibles physiquement et intellectuellement pour s’investir dans la politique assimilée à un combat. En vertu de la devise républicaine, qui promet l’égalité des citoyens devant la

loi, les femmes se mobilisent, inspirées par l’exemple anglais des suffragettes. Des femmes comme Louise Weiss organisent ainsi des manifestations spectaculaires destinées à provoquer et sensibiliser. Sur le document 1, des femmes brûlent leurs chaînes en public. L’ordonnance du 21 avril 1944 donne aux femmes le droit de vote et d’éligibilité. Cet acquis important fait évoluer les luttes féministes. Les militantes ne se contentent plus de l’égalité juridique et théorique, elles exigent l’égalité dans les faits. Il ne s’agit plus seulement d’avoir le droit de vote, mais d’accéder à part égale avec les hommes aux responsabilités politiques. Le manifeste pour la parité montre que ce combat est porté par une série de femmes qui ont réussi en politique. Elles n’organisent pas de démonstration de force, mais écrivent un texte récla-mant une profonde transformation du système français inspiré là encore de l’étranger. En effet, le texte suggère entre autres la mise en place de quotas pour atteindre la parité aux élections. Il s’agit de favoriser les femmes pour mettre fin aux discriminations dont elles sont victimes.

Vers le BAC

CompositionEn quoi les femmes sont-elles parvenues à s’affirmer en politique ? I. Les combats pour le droit de vote des femmes

A. Les Françaises privées du droit de vote : les raisons d’un retard français

B. La mobilisation des suffragettes en faveur du droit de vote

C. L’ordonnance du 21 avril 1944II. L’affirmation des femmes en politique : des progrès lents (1944-2000)

A. Les femmes accèdent de manière croissante aux res-ponsabilités ministérielles

B. Mais restent minoritaires au sein des assemblées C. La persistance des préjugés misogynes

III. Les nouveaux combats à l’horizon des années 2000A. Le manifeste sur la parité : nouvelles revendicationsB. Le vote de la loi sur la parité et ses effets

Étude Le droit à l’avortement : un combat politique et féministe ➤➤ p. 262-263

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Le document comporte un extrait des actualités télévisées au moment du vote de la loi Veil. L’extrait est composé de deux parties : dans une première partie, le contenu de la loi est présenté. La deuxième partie est une interview de Simone Veil autour du texte. L’extrait peut remplacer ou compléter le document 4. D’abord, il présente le contenu du projet de loi et son contexte. Ensuite, Simone Veil expose les motifs qui la conduisent à présenter son projet. Surtout, le passage consacré au non remboursement par la Sécurité sociale montre la volonté de ne pas considérer l’avortement, qui doit rester un acte exceptionnel aux yeux du législateur, comme un acte médical banal. C’est là un des principaux points d’achoppement avec les féministes.

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102 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Caractériser une situation1. La question de l’avortement est une question cruciale pour les femmes des années soixante-dix. Les naissances multiples les enchaînent à leur statut d’épouse et de femme au foyer, freinant leur ascension professionnelle. En exigeant le droit à l’avortement, elles revendiquent une autonomie de décision. 2. La majorité des avortements sont clandestins car l’avortement est interdit par la loi. Beaucoup d’avorte-ments sont fait dans de mauvaises conditions d’hygiène, provoquant le décès de nombreuses femmes.

Confronter des points de vue3. Le mouvement féministe réclame le droit pour les femmes de décider elles-mêmes de leur maternité afin d’avoir des enfants quand elles le souhaitent. Elles reven-diquent donc le droit à l’avortement libre et gratuit, mais aussi à la contraception. Elles s’attaquent au « juge », au « pape ». En effet, l’Église est contre l’avortement. Quant au juge, il est chargé de faire appliquer la loi de 1920, condamnant les femmes qui ont eu recours à l’avor-tement. Enfin, le « fric » est mis en accusation puisque seules les femmes qui en ont les moyens peuvent avorter en clinique à l’étranger.4. Simone Veil veut mettre fin à une situation « de désordre et d’injustice ». L’autorité de l’État est bafouée, puisque de nombreuses personnes, notamment des médecins, violent la loi interdisant l’avortement et le font savoir. Mais il s’agit aussi de remédier à la détresse des femmes. L’interdiction de l’avortement conduit certaines, qui ne peuvent partir en clinique à l’étranger, à avorter clandestinement, au péril de leur vie. C’est à cette situa-tion d’injustice que la ministre de la Santé désire mettre fin. Il y a donc un certain décalage entre l’argumentation de Simone Veil et l’argumentaire militant. Ce décalage s’explique par le contexte dans lequel Simone Veil pro-nonce son discours. Elle doit convaincre une assemblée composée majoritairement d’hommes où la droite est majoritaire.

Synthétiser5. Dans les années 1970, l’avortement est interdit par la loi de 1920. Destinée à soutenir la natalité française après le désastre de la Première Guerre mondiale, la loi considère l’avortement comme un crime et punit les femmes qui avortent ainsi que ceux qui les aident. Dans ces condi-tions, certaines femmes partent à l’étranger se faire avorter à l’hôpital. Celles qui n’en ont pas les moyens recourent à l’avortement clandestin au péril de leur santé, et parfois de leur vie.La légalisation de l’avortement est une question cruciale pour les mouvements des années 1970. La maîtrise de la fécondité est l’une des conditions pour parvenir à l’éga-lité réelle entre les hommes et les femmes. D’une part, le droit des femmes à la libre disposition de leur corps est considéré comme une liberté fondamentale. D’autre part, les naissances multiples et les grossesses non dési-rées assignent les femmes à leur condition d’épouse et de mère.

La mobilisation des mouvements féministes, notamment du MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception) permet en 1975 le vote de la loi défendue par S. Veil en autorisant l’avortement. Celle-ci est toutefois loin de correspondre totalement aux attentes des mouvements féministes.

Vers le BAC

Étude critique d’un documentLe document proposé est un extrait d’un discours pro-noncé par Simone Veil devant l’Assemblée nationale à l’occasion du dépôt du projet de loi relatif à la légalisa-tion de l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Nom-mée au poste de ministre de la Santé par un président de centre-droit, l’ancienne magistrate affronte des députés hostiles ou peu concernés par l’interruption volontaire de grossesse. Au travers de l’argumentaire déployé par la ministre, il s’agira de s’interroger sur le sens des combats menés par les féministes au cours des années 1970 et sur leur traduction en politique. Simone Veil – comme l’ensemble des mouvements fémi-nistes qui se mobilisent alors autour de la question de l’avortement  – insiste sur la détresse des femmes qui désirent avorter. Elle rappelle qu’une femme qui ne peut avorter est rejetée « dans la solitude et l’angoisse d’un acte perpétré dans des conditions qui risquent de la lais-ser mutilée à jamais ». En effet, l’avortement étant inter-dit depuis la loi de 1920, une partie des femmes avortent clandestinement. Celles qui n’ont pas les moyens de partir à l’étranger ou de payer un médecin français ont recours à des « faiseuses d’anges » qui opèrent avec des moyens rudimentaires. Pratiqués dans des conditions déplorables, ces avortements entraînent mutilations et décès. En second lieu, Simone Veil insiste sur le fait que les avortements pratiqués clandestinement en France ou à l’étranger bafouent l’autorité de l’État. Selon elle, de nom-breuses personnes, notamment des médecins, violent la loi interdisant l’avortement et le font savoir. On peut ici penser au manifeste des 343. Par ce texte publié dans le Nouvel Observateur, 343 femmes célèbres ou ano-nymes revendiquent avoir avorté. Signalons toutefois que parmi les médecins, les défenseurs de l’avortement sont peu nombreux. Simone Veil exagère sans doute pour convaincre les députés de l’anarchie et du désordre résul-tant de l’interdiction. Il y a donc un certain décalage entre l’argumentation de Simone Veil et l’argumentaire militant que ne préoccupe pas l’autorité de l’État. De même, alors que les mouvements féministes demandent l’avortement « libre et gratuit » sans restriction, pour Simone Veil, l’avortement « doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue ». Ce décalage s’explique par le contexte dans lequel Simone Veil prononce son discours. Elle doit convaincre une assemblée composée majoritairement d’hommes où la droite est majoritaire.

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103© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Situer1. L’affiche fait allusion aux lois Ferry laïcisant l’enseigne-ment.2. L’école publique est présentée comme une institution qui pervertit les enfants. Entrés innocents, ils ressortent criminels.

Caractériser une évolution3. Michel Debré propose que l’État finance une partie de l’enseignement privé. En échange, l’école libre accepte un certain contrôle de l’État sur le contenu des enseigne-ments qu’elle délivre. Selon M.  Debré, l’hostilité entre l’État et l’Église n’est plus d’actualité. Il ne s’agit plus pour l’État de lutter contre la puissance de l’Église mais de coo-pérer avec elle. Ensuite, l’enseignement privé peut rece-voir des financements publics dans la mesure où il exerce une mission de service public : assurer l’éducation d’une partie des Français. Enfin, en contribuant à l’existence de l’enseignement privé, l’État garantit la liberté de pensée et de conscience qui est l’une des valeurs de la République. 4. La manifestation de 1994 s’élève contre la loi Falloux qui propose de déplafonner les subventions accordées par les communes aux écoles privées. Pour les défenseurs de l’école laïque, le projet débouchera sur une réduction des financements publics pour les écoles publiques, au détri-ment de la laïcité. La pancarte qui fait allusion au tableau de Delacroix « La liberté guidant le peuple » montre bien l’inscription de la manifestation dans l’héritage et le patri-moine républicain. 5. La question du port du voile dans les établissements scolaires est le nouveau défi posé à la laïcité à partir des années 1990. Des jeunes filles souhaitent porter le voile à l’intérieur des établissements scolaires qu’elles fré-quentent, estimant qu’il s’agit de leur droit. Selon elles, interdire le port du voile revient à les exclure de l’école publique et à leur refuser l’accès à l’éducation. La loi du 15 mars 2004 interdit le port de signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires. Selon la circulaire, le port d’un signe religieux est susceptible d’instaurer une distinction entre des élèves que la République et l’école considèrent comme égaux, indépendamment de leur reli-gion ou de leur origine. Outre qu’il risque d’importer dans les établissements scolaires les conflits religieux, le port de signes religieux contrevient aux notions d’égalité et de vivre ensemble qui fondent le projet républicain.

Synthèse6. En 1880, la République doit se défendre contre les catholiques qui accusent l’école publique de pervertir la jeunesse. Si les relations entre l’État et l’Église catholique s’améliorent par la suite, le débat rebondit ensuite autour de la question sensible du financement de l’école privée. La question du voile, et plus largement du port des signes religieux à l’école, marque une évolution importante. Les revendications émanent de jeunes filles qui désirent au nom de leur liberté de choix porter leur voile à l’école. La loi énonçant l’interdiction du port de signes religieux

ostentatoires dans les établissements scolaires est une rupture significative. L’obligation de laïcité concerne désormais les élèves.

Vers le BAC

Étude critique d’un documentEn 1989, l’exclusion de deux jeunes filles voilées de leur collège à Creil est le point de départ d’une longue polé-mique sur le port du voile dans les établissements sco-laires que vient partiellement clore le vote de la loi de 2004. Les deux documents fournis ici conduisent à s’in-terroger sur les ressorts de la polémique ainsi que sur la réponse apportée par la République. Il s’agit en effet d’un extrait de la circulaire prise en application de la loi de 2004 prohibant le port de signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires et d’une photographie de manifestants réclamant le droit de porter le voile à l’école. Les documents montrent les valeurs autour desquelles s’affrontent partisans et adversaires du port du voile. La photographie montre que les partisans du port du voile à l’école manifestent au nom de la liberté de choix. En les laissant libre de porter un signe religieux à l’école, la République ne ferait que respecter leur liberté de croire. Les manifestants ne revendiquent pas au nom des droits de leur communauté, mais soulignent l’inscription de leur démarche dans le projet et l’héritage républicain. Ainsi, la pancarte ne réclame pas le port du voile exclusivement, mais de tous les insignes religieux. Une autre pancarte « Ni soumise, ni aliénée » fait directement référence à la critique féministe. Les féministes refusent le port du voile à l’école en raison du fait qu’elles considèrent le voile comme un symbole de la soumission de la femme à l’homme. Et le voile n’aurait pas sa place dans une école qui fait la promotion de l’égalité. Les femmes qui mani-festent ici tiennent à souligner que le port du voile est un choix personnel, qui ne leur a pas été imposé par un homme. Encore une fois, il ne fait que manifester leur liberté.Face à ces revendications, la circulaire rappelle les prin-cipes de la laïcité mais aussi la spécificité des établis-sements scolaires. La loi de 2004 et la circulaire font de l’école un sanctuaire qui doit être protégé de toute « revendication communautaire ». C’est une rupture par rapport à la loi de 1905 qui tolérait par exemple la pré-sence d’aumôneries dans les lycées. La loi considère que si l’école n’est pas un lieu neutre, alors elle ne peut accomplir sereinement sa mission. Celle-ci est d’émanci-per les individus en leur apprenant à effectuer leur propre choix, en « confortant le libre-arbitre de chacun », mais aussi d’enseigner et de garantir l’égalité de tous les élèves quel que soit leur sexe. La loi considère ainsi qu’elle doit avant tout protéger les élèves qui se seraient vu imposer le port d’un foulard, avant d’autoriser celles qui l’auraient choisi à le porter en classe.

Étude La laïcité, un enjeu pour l’école ➤➤ p. 264-265

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104 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Doc. 2> Les radicaux promettent une meilleure répartition des richesses à travers l’établissement d’un impôt sur le revenu. Ils s’engagent à instaurer un régime de retraite. Le dessinateur accuse les radicaux de ne pas avoir tenu leurs promesses. Loin d’avoir réalisé leur programme électoral, les radicaux ont réprimé les grèves dans le sang.

Doc. 3> Selon la CGT, la semaine de Quarante heures crée des emplois et permet de diminuer le chômage. Elle remédie à la misère ouvrière engendrée par la crise. Pour le gou-vernement de centre-droit, les Quarante heures sont un frein à la reprise de la production. Or l’imminence d’un

conflit européen rend urgente la relance de la production d’armement. La réduction de la durée hebdomadaire de travail est donc accusée de désarmer la France.

Doc. 4> Les inégalités entre hommes et femmes s’observent d’abord sur le marché du travail. Les femmes sont moins bien payées que les hommes (27 % d’écart de revenu). Elles sont davantage victimes du chômage. Elles accèdent moins que les hommes à des postes à responsabilité. Ces inégalités sont en partie liées à l’importance des tâches domestiques effectuées par les femmes. Ainsi quatre femmes sur sept modifient leur activité professionnelle (arrêt ou mise à temps partiel) après l’arrivée d’un enfant contre un homme sur sept.

Cours 1

Cours 2

La République, les religions et la laïcité ➤➤ p. 266-267

Les femmes, les ouvriers et la République ➤➤ p. 268-269

Doc. 1> Prenant acte de la puissance du sentiment religieux parmi la population française, Jules Ferry conseille de faire preuve de tolérance. Il n’est donc pas question de mener une « guerre à outrance », mais de faire preuve de souplesse pour obtenir la paix.

Doc. 2> Ce sont les principes de séparation et de neutralité qui définissent désormais les relations entre l’État et les Églises. L’État ne reconnaît plus les religions comme un interlocuteur privilégié : elles sont donc renvoyées à la sphère privée. L’État ne finance plus aucun culte (à l’ex-ception des services d’aumônerie dans les lycées, les collèges, les hospices ou encore les prisons ou l’armée). L’État s’engage à garantir la liberté de conscience c’est-à-dire la liberté de religion, la liberté de penser et donc celle de croire ou de ne pas croire. Il ne favorise plus aucun culte (sous le régime du Concordat, le catholicisme était reconnu comme la religion de la majorité des Français). Enfin, l’État n’intervient plus dans l’organisation du culte.

Doc. 3> Une partie des catholiques réagit violemment à la loi de séparation des Églises et de l’État. La querelle des inventaires illustre la violence des oppositions. Puisque la loi prévoit la disparation des établissements publics du culte et la dévolution des biens de l’Église à des associa-tions cultuelles, il est nécessaire de faire l’inventaire des biens de l’Église. Des agents de l’État sont envoyés dans les Églises, ce qui est considéré comme une profanation par certains catholiques. Les affrontements avec la police font des blessés et deux morts. Le président du Conseil, Clemenceau et son ministre des Cultes, Briand font sus-pendre les inventaires.

Doc. 4> L’État soutient la construction de mosquées au nom du principe de la liberté de culte. En effet, pour pratiquer leur foi, les musulmans installés en France ont besoin de mosquées.

Activité 11. Le principe de séparation et le principe de neutralité sont deux principes fondateurs de la loi de 1905.2. Dans l’ordre : « tensions vives entre la religion catho-lique et l’État » puis « apaisement des relations entre l’État et l’Église » et « regain des tensions et des débats autour de la laïcité ». 3. Oui, la loi instaure la laïcité, un principe qui rompt avec le régime du concordat qui gouvernait jusqu’en 1905 les

relations entre l’Église et l’État. Contrairement au régime concordataire qui reconnaissait un statut particulier à la religion catholique, la loi de 1905 met à égalité l’ensemble des cultes pratiqués en France. La nouvelle loi met égale-ment fin à toute subvention publique du culte, et à toute intervention de l’État dans l’organisation du culte. Des voix plaident pour une réforme de la loi de 1905, toutefois très rares sont ceux qui remettent en question le principe de laïcité.

Vers le Bac Réviser ➤➤ p. 270-271

Page 19: Chapitre 9 La République, trois républiques · 88 agnard, 2015 istoire éographie 1 re S-L Livre du professeur Corrigés des questionnaires Étude Étude Une École pour asseoir

105© Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

Activité 2• Louise Weiss est à la tête des suffragettes qui mani-festent pour le droit de vote dans les années 1930.• Gilberte Brossolette s’engage dans la Résistance pen-dant la Seconde Guerre mondiale. Elle est élue députée puis sénatrice.• Simone Veil se bat politiquement pour faire passer la loi de 1975 autorisant l’IVG.

Activité 31. Les acteurs mentionnés sur l’affiche sont la SFIO et la CGT. La SFIO est un parti politique, la CGT est un syndi-cat. Au parlement, la SFIO demande des réformes pour améliorer le sort de la classe ouvrière. La CGT défend les intérêts des salariés face au patronat. 2. La loi des Quarante heures réduit la durée hebdoma-daire du travail de 48 à 40 heures. L’objectif est de créer

des emplois pour résorber le chômage. Elle a été mise en place par le gouvernement de Front populaire dirigé par Léon Blum. 3. D’après l’affiche, la loi des Quarante heures aboutit à l’inverse de ce que les partis et les syndicats de gauche avaient espéré. L’ouvrier est poussé vers un abîme sym-bolisant la faillite du pays. La loi des Quarante heures est accusée d’augmenter les coûts de production, ce qui aboutit à une augmentation des prix de vente. Celle-ci pénalise doublement la classe ouvrière. D’une part, la hausse des prix contribue à une baisse du pouvoir d’achat. D’autre part, elle entraîne une baisse des ventes qui pousse les patrons à licencier. 4. La loi des Quarante heures est remise en question à partir de 1938 par le gouvernement Daladier qui veut accélérer la production d’armes et autorise de manière croissante les entreprises à user des heures supplémen-taires.

Utiliser le schéma commenté✔ Saisir l’adresse du lien indiqué sur la page

pour accéder librement au schéma

Le schéma commenté reprend le schéma de synthèse des pages de révision et en propose une construction pro-gressive et commentée.

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Lire une caricatureÉtape 1 Identifier et situer le document 1. La caricature a été réalisée en 1904, dans un contexte de vives tensions entre l’Église catholique et la Répu-blique. La volonté de soustraire la formation des futurs citoyens au clergé a conduit au vote des lois Ferry qui ont permis de laïciser l’enseignement.2. Elle est extraite d’une revue socialiste et anarchiste. Ces deux idéologies rejettent le système capitaliste fondé sur la propriété privée. Les anarchistes se distinguent par leur refus de toute autorité. Enfin, ces deux idéologies prônent l’athéisme, considérant que la religion n’est qu’une entre-prise d’abrutissement des masses.

Étape 2 Décrire la caricature3. Les deux personnages tirent chacun l’oreille d’un petit garçon. Les deux femmes sont laides et effrayantes. Celle de droite, habillée en religieuse tout en laissant un cru-

cifix dépasser de sa poche, est vieille et semble revêche. L’autre a les yeux globuleux. Elle est grosse et vulgaire. Elle porte un bonnet phrygien orné d’une cocarde. La femme de gauche représente l’Église, et celle de droite la République.4. La caserne fait allusion au service militaire. La présence du bâtiment sous-entend que le seul destin promis aux jeunes Français est de servir de chair à canon.

Étape 3 Interpréter la caricature

5. La caricature renvoie dos à dos l’Église et la Répu-blique, deux forces d’oppression et d’endoctrinement (le slogan « choisis… tu es libre… » est ironique). 6. La caricature montre qu’une partie des Français rejette le régime républicain qu’elle identifie comme hostile aux intérêts de la classe ouvrière. Elle est peu sensible aux promesses d’émancipation du régime et considère la laï-cité comme un jeu de dupes.

Vers le Bac S’entraîner ➤➤ p. 272-273

Page 20: Chapitre 9 La République, trois républiques · 88 agnard, 2015 istoire éographie 1 re S-L Livre du professeur Corrigés des questionnaires Étude Étude Une École pour asseoir

106 © Magnard, 2015 – Histoire Géographie 1re ES-L – Livre du professeur

➤ ✔➤Exemple de réponse rédigée

Événement mythique qui a vu naître de nombreux acquis sociaux, le Front populaire est l’objet de mémoires contrastées. Le premier document est extrait d’une interview dans lequel un industriel, François Béghin, évoque ses souvenirs du Front populaire. L’interview est réalisée environ quarante ans après les faits. L’extrait proposé revient plus précisément sur les grèves qui ont suivi la victoire du Rassemblement populaire lors des législatives. Le deuxième document est la couverture du magazine communiste Regards datant de juillet 1937. La Une porte sur les congés payés. Ces deux documents offrent donc deux points de vue sur le Front populaire et les ruptures qu’il représente.

Les deux documents évoquent la brusque embellie permise par le Front populaire. Le pre-mier document souligne la modestie des salaires. Or l’Accord Matignon puis les conven-tions collectives permettent une hausse conséquente du pouvoir d’achat. Les deux docu-ments font allusion aux congés payés accordés par la loi du 20 juin 1936. La couverture du magazine communiste qui représente un enfant et sa mère souriant devant un lac insiste sur le bonheur des familles ouvrières qui peuvent pour la première fois de leur vie partir au grand air. L’essor du temps libre est aussi favorisé par le vote de la loi des Quarante heures à laquelle l’interview fait référence. Toutefois, la démocratisation des loisirs a des limites que les documents n’abordent pas. De fait, de nombreuses familles ne peuvent partir en vacances, malgré la mise en vente de billets de train à prix réduits. Elles se contentent de rester à leur domicile ou de partir à la campagne, dans leur famille.

Le patron déplore le durcissement des relations entre les chefs d’entreprise et leur salarié. Il évoque les grèves avec occupation de l’été 1936 qu’il présente comme un projet révo-lutionnaire (« c’était la révolution ! ») orchestré par les communistes. Il souligne que ses ouvriers ont été « mis en grève de l’extérieur » et se rappelle « qu’il y avait toujours 500 types […] qui chantaient l’Internationale ». Les propos du chef d’entreprise contredisent la vérité historique puisque l’on sait que le mouvement de grève fut largement spontané et qu’il n’y avait derrière aucune visée révolutionnaire. Le décalage entre les événements et l’interprétation qu’il en donne s’explique par son hostilité vis-à-vis des communistes ainsi que par une certaine réticence à reconnaître ses responsabilités dans le déclenchement des grèves. Il exprime aussi la violence du choc représenté par les grèves avec occupation. 1936 marque pour lui la fin d’une forme de paternalisme que rend impossible la montée en force des communistes. De fait, le mouvement gréviste de l’été 1936 est une contes-tation de l’arbitraire patronal. La mise en place de délégués ouvriers prévus par l’Accord Matignon permet aux salariés d’élire des représentants qui les défendent face au chef d’entreprise. En ce sens, 1936 c’est aussi la fin d’une autorité patronale sans partage.

Les deux documents témoignent à la fois de l’embellie du Front populaire et du trauma-tisme que celui-ci a laissé chez les employeurs. Ces deux visions ne correspondent pas tout à fait à ce que fut le Front populaire. Loin d’être une tentative de subversion orches-trée par les communistes, le Front populaire concrétise l’union de la gauche autour d’un programme de réformes destinées à améliorer la condition ouvrière. Cependant, tous les ouvriers n’ont pu en profiter.

SUJET Patrons et ouvriers pendant le Front populaire

Corrigé du sujet 14 p. 273ÉTUDE CRITIQUE DE DEUX DOCUMENTS