CHAPITRE 7 : ENTREPRISES, STRUCTURES ECONOMIQUES...

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CHAPITRE 4 : ENTREPRISES, STRUCTURES ECONOMIQUES ET SYNDICALISME (XIX EME -XX EME SIECLES) à voir : théorie des parties prenantes (stakeholders) in Repères Orientations bibliographiques 1) A lire : Alberto T. et P.Combemale, Comprendre l'entreprise. Théorie, gestion, relations sociales, Nathan, CIRCA. 2) A utiliser : D.Colle (coord.), Un Monde d’entreprises, Major-PUF. « L'Entreprise. Fin de siècle, nouveaux défis ? », Problèmes Economiques, N°2.591- 2.592, 18-25 novembre 1998. J.Gadrey, L'économie des services, La Découverte, Repères, 1992. Perrez, Y (1999), « La Théorie des coûts de transaction comme une théorie des organisations », Ecoflash, n°136, mars 1999. P.Verley, Entreprises et entrepreneurs du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, Hachette Supérieur, ‘carré histoire’. Varian Hal R., Introduction à la microéconomie, De Boeck Université, Prémisses. I. L'ENTREPRISE DANS LA THEORIE ECONOMIQUE 1) LE CHOIX DU PRODUCTEUR EN CONCURRENCE PARFAITE a) Fonctions de production et productivité b) Isoquantes et taux marginal de substitution technique (TMST) c) Choix de la combinaison productive et demande de facteurs de production : la minimisation du coût d) Les fonctions de coût e) Maximisation du profit et fonction d'offre La maximisation du profit - préambule : est-ce le bon objectif (points de vue empirique et normatif) ? - opposition « Business of business is business » (Friedman) contre partisans de la responsabilité sociale de l’entreprise 1

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CHAPITRE 4 : ENTREPRISES, STRUCTURES ECONOMIQUES ET SYNDICALISME (XIXEME-XXEME SIECLES)à voir   : théorie des parties prenantes (stakeholders) in Repères

Orientations bibliographiques1) A lire :

Alberto T. et P.Combemale, Comprendre l'entreprise. Théorie, gestion, relations sociales, Nathan, CIRCA.2) A utiliser :

D.Colle (coord.), Un Monde d’entreprises, Major-PUF.« L'Entreprise. Fin de siècle, nouveaux défis ? », Problèmes Economiques, N°2.591-2.592,

18-25 novembre 1998.J.Gadrey, L'économie des services, La Découverte, Repères, 1992.Perrez, Y (1999), « La Théorie des coûts de transaction comme une théorie des

organisations », Ecoflash, n°136, mars 1999.P.Verley, Entreprises et entrepreneurs du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, Hachette

Supérieur, ‘carré histoire’.Varian Hal R., Introduction à la microéconomie, De Boeck Université, Prémisses.

I. L'ENTREPRISE DANS LA THEORIE ECONOMIQUE

1) LE CHOIX DU PRODUCTEUR EN CONCURRENCE PARFAITE

a) Fonctions de production et productivité

b) Isoquantes et taux marginal de substitution technique (TMST)

c) Choix de la combinaison productive et demande de facteurs de production : la minimisation du coût

d) Les fonctions de coût

e) Maximisation du profit et fonction d'offre

La maximisation du profit

- préambule : est-ce le bon objectif (points de vue empirique et normatif) ?- opposition « Business of business is business » (Friedman) contre partisans de la responsabilité sociale de l’entreprise (objectifs sociaux et environnementaux en plus de la recherche de bénéfices).- la maximisation de la taille (managers)- la simple contrainte de rentabilité (approche évolutionniste)

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La prise en comptes des coûts fixes (à court terme) et de la libre-entrée (à long terme)

Analyse graphique

La fonction d'offre de l'entreprise

2) LE CHOIX DU PRODUCTEUR EN CONCURRENCE IMPARFAITE

a) Introduction

b) Le comportement du monopoleur

La courbe de demande

Recette totale, recette moyenne et recette marginale

L'équilibre d'un marché en situation de monopole

c) Surplus du consommateur, surplus du producteur et inefficience du monopole

- 1ère source d’inefficacité :- le pouvoir de marché du monopoleur : l’absence de concurrence lui permet de fixer des prix élevés (supérieurs au coût marginal)⇒ perte de surplus collectif (triangle d’Harberger (1954)

- Autres sources d’inefficacité : - celles qui sont dues au fait que l’absence de concurrence n’oblige pas à minimiser les coûts ⇒ possibilité de dépenses inefficaces collectivement.- la X-inefficacité (Leibenstein (1966))-recherche de rentes de situation (Tullock (1967), Posner (1975)

- question : à combien s’élève la perte de surplus collectif due aux positions de monopole dans la réalité   ?

- Harberger (1954) : faible : 0.1% du PNB aux Etats-Unis en 1954- autrement dit, les résultats empiriques d’Harberger, conduisent à minimiser la portée de son triangle : le fait que la concentration aux Etats-Unis amène certains marchés vers des structures oligopolistiques, implique une perte globale de bien-être collectif relativement faible.

- les études suivantes tendent à réévaluer à la hausse la perte de surplus collectif : perte estimée entre 1% et 7% du PIB.

A retenir   : triangle d’Harberger (1954). X-inefficacité (Leibenstein (1966). Recherche de rente de situation (Tullock (1967), Posner (1975)).

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d) Cas particuliers de monopoles et rôle de l'Etat

Le monopole discriminant

Monopole réglementé, tarification au coût marginal et optima de second rang

- dans le cas de rendements d’échelle croissants (monopole naturel), la réglementation du monopole (lequel peut éventuellement être un monopole public) se justifie du fait de l’inefficience du marché (perte sèche, triangle d’Harberger),- la tarification au coût marginal (l’Etat oblige le monopole à pratiquer un prix égal au coût marginal, c'est-à-dire un prix qui serait celui qui s’établirait ‘naturellement’ si le marché était en concurrence parfaite) permet de maximiser le surplus collectif.- cependant, du fait des rendements croissants, un prix égal au coût marginal est synonyme de pertes pour le monopoleur (le coût moyen étant décroissant, le coût marginal est inférieur au coût moyen).- une tarification au coût moyen peut alors être préférée : elle garantit que le monopole soit rentable tout en conduisant à un surplus collectif supérieur à celui qui serait obtenu si l’Etat laissait faire le monopole. On parle dans ce cas d’optimum de second rang.

Monopole réglementé et asymétries d'information

- il est raisonnable de supposer l’existence d’une asymétrie d’information concernant les coûts de production du monopoleur : celui-ci connaît mieux ses coûts de production que l’Etat.- dans ce cas, le monopoleur peut avoir intérêt à réaliser des dépenses improductives de façon à augmenter ses coûts et, ainsi, obtenir de l’Etat qu’il fixe un prix de vente élevé.

- ces dépenses improductives peuvent être, par exemple, des dépenses somptuaires (voyages « d’affaires »…).

- nous sommes dans un cas typique d’aléa moral survenant dans une relation Principal (l’Etat) – Agent (le monopoleur).- L’Etat (le principal) doit alors recherche un système d’incitations permettant de limiter cet aléa moral, donc d’inciter le monopoleur à agir dans un sens conforme aux objectifs de l’Etat.- Une tarification incitative classique dans ce cas est la tarification par « price cap » :

- l’Etat n’impose plus au monopoleur de fixer, à chaque instant, son prix au niveau du coût moyen (tarification dite par « cost plus »),- mais, il impose au monopoleur de diminuer ses prix de vente au rythme correspondant aux gains de productivité observables dans le secteur auquel appartient le monopole.- si le monopoleur réalise des gains de productivité supérieurs à la moyenne observée, alors il dégage un (sur-)profit.

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- Le monopoleur est donc incité à être efficace. Et, l’Etat obtient la modération des prix qu’il cherche à obtenir.

- sur sa mise en œuvre effective et ses résultats : voir rapport de l’OCDE 2009 « Examens de l’OCDE de la réforme de la réglementation »

L'argument de la théorie des marchés contestables

- l’argument de Baumol visait à l’origine la défense du monopole d’ATT (monopole dans le secteur téléphonique) qui fut en fait démantelé à la suite du procès de 1982 engagé par des concurrents potentiels (notamment MCI).- Rq : l’origine d’ATT remonte à la fin du XIXè : Graham Bell dépose le brevet du téléphone en 1876. Sa compagnie devient ATT en 1899. Bien que le secteur restât concurrentiel, l’Etat favorisa en fait le monopole d’ATT, lui assignant une mission de service public (avec réglementation des prix par ‘cost plus’ = une réglementation dont on connaît les limites et à laquelle on préfère le ‘price-cap’)- Rq : ATT a été racheté en 2004 par SBC

e) La concurrence monopolistique

- bonnes explications dans le Guerrien (aussi pour Bertrand…)- différenciation des produits :

- horizontale : = différenciation des produits en variété (ex : deux autos avec des qualités similaires, des prix similaires mais des marques différentes).- But : profiter de la rente que l’on peut obtenir sur des consommateurs attachés à une variété en particulier.- ex : jusqu’à la fin des années 1980, les consommateurs préféraient clairement acheter leur matériel informatique aux trois leaders du marché (IBM, Apple, Compaq), plutôt qu’à d’autres constructeurs (Dell…)

- verticale : = différenciation des produits en gamme (ex : deux autos d’une même marque mais avec des qualités différentes, des prix différents)- ex : entre deux IBM, les consommateurs préfèrent, ceteris paribus, le plus puissant.

- problème de distinction entre différenciation verticale et différenciation horizontale : La préférence pour une marque est-elle la conséquence, par ex, d’un investissement publicitaire réussi (horizontale) où reflète-t-elle une différence de qualité (verticale) ?

f) Les oligopoles

Le duopole de Cournot et le duopole de Stackelberg

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La concurrence par les prix : le duopole de Bertrand

La collusion

Le dilemme de l’entente

Voir ..\..\La Réunion Formation Continue\docs\LaReunionIUFM_2007_Micro.ppt- dilemme du prisonnier :

- coopèrent maximisent le profit joint (profit d’un monopole). - Mais, individuellement, elles ont intérêt à briser l’entente.- Donc les cartels semblent a priori fondamentalement instables (Stigler (1964) : les firmes vont chercher à tromper dans le secret ⇒ entente brisée.- conséquence : elles obtiennent un profit compris entre celui de la concurrence parfaite (c'est-à-dire nul) et celui de l’entente.

Selon le type de marché, les solutions non coopératives = Cournot, Stackelberg ou de Bertrand.

- exemple (cadre à la Bertrand) :- Deux firmes 1 et 2 cherchent leurs prix de vente, p1 et p2, qui maximisent leurs profits.- coûts unitaires de production : identiques pour les deux firmes, égaux à 2 €- fonction de demande (quantités demandées x1 et x2) :

x1=-p1+10 et x2=0 si p1<p2,x1=x2=(-p+10)/2 si p1=p2=px1=0et x2=-p2+10 si p1>p2.

- hypothèse sur les stratégies disponibles :- stratégie coopérative : fixer le prix à 4 - stratégie non coopérative : à fixer le prix à 31.

- Profits obtenus en fonction des stratégies :Firme 2

p2=4 p2=3

Firme 1

p1=4

(6,6) (0,7)

p1=3

(7,0)

(3.5,3.5)

Jeu n°5   : Le dilemme de l’entente - solution (équilibre du jeu) = la solution non coopérative.

1 Dans un duopole de Bertrand, les firmes ont en réalité une infinité de stratégies (fixer un prix de vente pouvant aller de zéro à l’infini) et l’équilibre correspond à un prix de vente égal au coût unitaire de production, c'est-à-dire à un profit nul. Nous simplifions ici pour la clarté de l’exposé.

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- La solution du jeu répété- Hypothèse sur les termes du contrat : « chaque firme fixe le prix égal à 4 et continue ainsi tant qu’aucune firme ne dévie. Si une firme fixe un prix égal à 3, alors l’entente est définitivement rompue. ».

- Stratégie non coopérative ⇒ Valeur actuelle du profit =7+3,5 . 1+a

a .

- Stratégie coopérative ⇒ Valeur actuelle du profit = ∑t=0

∞ 6(1+a)t

=6 . 1+aa où

a est le taux d’actualisation⇒ La coopération apparaît donc comme la stratégie gagnante pour un taux d’actualisation suffisamment faible (a<0,55)2.

Ainsi, l’analyse de l’entente vue comme un jeu se déroulant sur le long terme permet de comprendre pourquoi ces ententes peuvent durer plus longtemps qu’on ne le pense habituellement en imaginant des firmes prêtes à tromper les autres pour tenter de s’accaparer le marché.

L’exemple du cartel de l’acier en France (1999-2004)

- Entreprises concernées : 11 entreprises du secteur sidérurgique (poutrelles métalliques, tubes, laminés, ronds à béton…), la plus grosse = Arcelor-Mittal.

- Début : mai 1999. Fin : mai 2004 (début des perquisitions)- Mise en place d’un système organisant le partage et garantissant la

stabilité de l’entente :o Entente sur les prix, avec définition précise des barèmes (taux de

remise maximum)o Entente sur le partage des clients, avec classification selon le

potentiel de chacun.o Entente sur les marchés, avec répartition entre les membres du

cartel.o Une activité syndicale pour couverture (rôle de la FFDM, Fédération

Française de la Distribution des Métaux).o Des réunions organisées aux niveaux local, régional et national,

avec des responsables respectifs.o Des sanctions prévues en cas de violation du cartel.

- Au total, 70 à 90% du volume des ventes dans le secteur passaient par le cartel.

- Sanction décidée par l’Autorité de la Concurrence en décembre 2008 : 575 mil € (Nouveau record après les 534 mil contre les opérateurs de

2 Remarquons que si le nombre de firmes est n, alors la valeur actuelle du profit de la

stratégie coopérative est 12n

. 1+aa . La stratégie coopérative est alors préférable à la

stratégie non coopérative lorsque, pour un taux d’actualisation donné, n est faible.6

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téléphonie mobile en 2005). Mais ramené à 72 mil par la cours d’appel de Paris en janvier 2010.

Les ententes durent-elles dans la réalité ? (Levenstein and Suslow (2006))

- article = article du JEL faisant la synthèse de plusieurs études empiriques sur le sujet.- en moyenne les cartels durent 5 ans. Mais, grande disparité : la grande majorité d’entre eux durent moins d’un an et, au contraire, nbreux sont ceux qui durent des décennies.- à noter :

- dans certains cas, les ententes ne durent pas longtemps en moyenne mais cependant de plus en plus longtemps quand elles se répètent. - ex : dans le cuivre, on observe une première entente (au niveau international) en 1888 qui dure 2 ans, une deuxième en 1918 qui dure 4 ans…, une cinquième en 1968 qui dure 19 ans.- ceci confirme l’idée de Green et Porter (1984) : la guerre des prix n’est pas toujours à interpréter comme une rupture de l’entente mais comme une punition ayant pour but de renforcer la prochaine entente.

- causes fréquentes d’échec :- entrée concurrents sur le marché. (cas OPEP)- problème de gestion des accords (renégociations) face à des changements de l’environnement économique (innovations, développement)

- conséquences sur les prix : les prix ne sont pas ceux prédits par la théorie : certes, les prix augmentent après la formation d’un cartel mais c’est très rare qu’ils soient tels qu’ils maximisent le profit joint.- Rq : difficulté de distinguer entente et concurrence : cas de la coopétition. Notion apparue dans les années 1990 et désignant des rapports de coopération (mise en commun de moyens techniques, partenariat de R&D, échanges d'information…) entre des entreprises en compétition (concurrence).

- L’exemple PSA-Mitsubishi   : Après avoir engagé une coopération en 2005 (pour la production d’un 4x4 de loisir) pour le marché européen, PSA et Mitsubishi lancent en 2008 en Russie une coentreprise permettant la création d’une usine de production près de Moscou. Elle produira des véhicules pour les trois marques (Peugeot, Citroën, Mitsubishi). En 2009, un nouveau projet de coopération est lancé concernant cette fois-ci la production de voitures hybrides.

3) L’OUVERTURE DE LA ‘BOITE NOIRE’ : L’ORGANISATION ET LES FRONTIERES DE LA FIRME

a) Pourquoi le (sur-)profit n’est pas nul malgré la concurrence

- rappel : en concurrence parfaite, la libre-entrée sur le marché élimine les possibilités de (sur-)profit. Le profit est donc nul, c'est-à-dire que les recettes

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permettent juste de rémunérer les facteurs de production (capital, travail) aux prix d’équilibre sur les marchés des facteurs.- ce résultat peut paraître non-conforme à la réalité dans la mesure où certaines entreprises semblent pouvoir dégager des profits allant au-delà de la rémunération ‘normale’ des facteurs de production.- deux explications à l’existence de ces (sur-)profit peuvent être avancées :

- les imperfections de la concurrence, notamment les rentes de monopoles et, parmi elles, celles qui sont liées à l’innovation.- le contexte d’incertitude qui peut justifier le rôle particulier de l’entrepreneur.

L'entrepreneur-innovateur et la rente (temporaire) d’innovation

A retenir : J.A. Schumpeter (1883-1950), Théorie de l'évolution économique (1912), Business cycles (1939).

L'entrepreneur "preneur d'incertitude"

- Rappel : distinction chez Knight (1921) entre risque et incertitude.- C'est cette ‘vraie incertitude’ qui va justifier le profit de l'entrepreneur : ce dernier accepte une "prise d'incertitude"  reposant sur un jugement purement personnel  et ses conséquences :

« When (...) the managerial function comes to require the exercice of jugement involving liability to error, and when in consequence the assumption of responsability for the correctness of his opinions becomes a condition prerequisite to getting the other members of the group to submit to the manager's direction, the nature of the function is revolutionized ; the manager becomes an entrepreneur. He may, and typically will, to be sure, continue to perform the old mechanical routine functions and to receive the oldwages ; but in addition he makes responsible decision, and his income will normally contain in addition to wages a pure differential element designated as "profit" by the economic theorist. This profit is simply the difference between the market price of the productive agencies he employs, the amount which the competition of other entrepreneurs forces him to guarantee to them as a condition of securing their services, and the amount which he finally realizes from the disposition of the product which under his direction they turn out. » (Knight (1921, pp.276-277)).

- Il est intéressant de noter la nature de la justification du profit donnée par Knight (1921). Contrairement à la rémunération du travail et du capital, cette justification ne réside pas dans une contribution physique  directe ou indirecte  au produit, la valeur de ce dernier étant connue de manière certaine ou "pseudo-certaine" (cas de l'incertitude mesurable). Mais, elle réside dans le fait que l'entrepreneur engage sa responsabilité puisqu'il garantit aux autres membres de l'entreprise, la valeur du produit telle qu'il l'a estimée dans un contexte de vraie incertitude.

A retenir : F. Knight, Risk, Uncertainty and Profit (1921).

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b) Pourquoi substituer l’organisation au marché ?

L'économie des coûts de transaction de Coase et Williamson

Pourquoi la firme, en tant qu’organisation hiérarchique, existe-t-elle ?- La théorie standard peut a priori expliquer la taille optimale de la firme en fonction de l’importance des économies d’échelle.- cependant, Coase (1937), souligne que l’explication trouve ses limites dans le fait que les économies d’échelle peuvent être exploitées à l’extérieur comme à l’intérieur des limites légales de la firme.

Coase (Prix Nobel 1991) en introduisant la notion de coûts de transaction va permettre de poser les bases d’une véritable théorie de la firme, laquelle ne sera alors plus réduite à une boite noire.Définition   : Les coûts de transaction sont l’ensemble des coûts qui sous-tendent tout échange. Chez Coase, il s’agit essentiellement de coûts d’information.Williamson (1971, 1975,1985) (Prix Nobel 2009 avec Elinor Ostrom) (Williamson, Markets and Hierarchies, 1975) va compléter l’analyse de Coase en permettant de mieux comprendre et aussi de mieux mesurer ces coûts de transaction et, ainsi, de mieux déterminer pourquoi l’organisation hiérarchique peut être une institution plus efficace que le marché.

- Levêque (Repères sur Eco de la Réglementation, p.18) : définition = coûts de fonctionnement d’un mécanisme de coordination.- synthèse études empiriques sur la théorie des coûts de transaction : Shelanski et Klein (1995)- sur la comparaison entre Théorie des coûts de transactions et Théorie des contrats incomplets voir Farès et Saussier (2002) : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_2002_num_16_3_1518

La frontière entre la firme et le marché est déterminée :- d’une part par le coût du conflit dans la relation marchande.- d’autre part par la possibilité d’abuser l’autorité dans la hiérarchie.

L’organisation hiérarchique est un moyen efficace de résoudre les conflits : l’autorité décide, tranche là où le marché peut conduire à des marchandages coûteux et éventuellement sans issue (désaccord).Cependant, l’organisation hiérarchique connaît également des sources d’inefficacité. Elle engendre tout d’abord des coûts d’administration. Toutefois, selon Williamson, ces coûts permettent assez mal de comprendre les limites à l’étendue de l’organisation parce que nombre de routines administratives restent identiques quelles que soient les limites de la firme. Selon lui, la source d’inefficacité principale réside dans le fait que les subordonnés peuvent abuser l’autorité et capter à leur profit une partie du surplus de la firme (The Economic Institutions of Capitalism, 1985).L’essentiel, pour comprendre pourquoi l’organisation hiérarchique peut être amenée, pour des raisons d’efficacité, à se substituer au marché, est donc la valeur du conflit. Elle dépend de deux choses principales :

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1) La possibilité et le coût des contrats accompagnant l’échange marchand. Si des contrats peu onéreux peuvent être élaborés, l’organisation hiérarchique n’est pas la solution efficace.2) Le coût des désaccords. Lui-même dépend de la facilité de trouver un autre offreur (ou un autre demandeur) du bien ou du service concerné. Si la relation entre l’offreur et le demandeur est complexe et spécifique, s’ils sont donc dans une relation de dépendance mutuelle, alors l’organisation hiérarchique s’impose.

Evidence empirique   : l’hypothèse des coûts de transaction pour étudier la limite entre le marché et l’organisation a reçu de nombreuses confirmations empiriques. Comme le résument Lafontaine and Slade (2007 in JEL), « il n’y a presque qu’aucun résultat statistiquement significatif qui contredise les prédictions de la théorie des coûts de transaction. »Politique de la concurrenceA noter une implication de la théorie des coûts de transaction.Si la concentration (en particulier l’intégration verticale) ne nait pas d’un comportement de prédation, mais d’un gain d’efficacité issu de la substitution de l’organisation au marché, il n’est pas souhaitable qu’une législation antitrust s’y oppose.

A retenir : R.H. Coase (1937), coûts de transaction comme coûts de coordination, Williamson (1975): Markets and Hierarchies. Williamson (1985): The Economic Institutions of Capitalism, courant néo-institutionnaliste, complexité de l'environnement et facteurs humains (opportunisme) comme source des coûts de transaction, actifs spécifiques, applications (intégration verticale, firmes multinationales), Arrow (1974).

La théorie des droits de propriété et des contrats incomplets

Un cadre théorique standard- homo oeconomicus et information incomplète- contre rationalité limitée et opportunisme dans un contexte d’incertitude radicale chez Williamson.

La théorie des droits de propriété et l’article d’Alchian et Demsetz   (1972) La théorie des droits de propriété cherche à montrer comment les droits de propriété agissent sur le comportement des agents économiques et influencent l’efficience des systèmes économiques. Selon Coriat et Weinstein (2009, p.6), la théorie des droits de propriété est « au centre de l’approche néoclassique des institutions, et elle en est sans doute un des points les plus forts. » Son champ d’application couvre l’ensemble des organisations et institutions3.Un bon système de droits de propriété est celui qui :

3 En particulier, l’analyse de la croissance de Douglas North met largement l’accent sur l’importance de la spécification des droits de propriété et ses effets sur les incitations pour comprendre pourquoi certains pays peuvent être plus efficaces que d’autres et, ainsi, connaître une accumulation de richesses plus rapide.

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- Permet de profiter des avantages de la spécialisation et du fait que les agents ne détiennent pas les mêmes informations.

- Assure un système d’incitations efficace.Concernant la firme, celle-ci est définie par un ensemble de contrats qui spécifient la structure des droits de propriété.Une première application de la théorie des droits de propriété à l’étude de la firme est celle d’Alchian et Demsetz   (1972). Dans cet article fondateur, les auteurs cherchent à montrer que l’entreprise capitaliste classique est la forme d’organisation la plus efficace lorsque :

- la technologie impose le recours au travail en équipe (la production exige une coopération)

- il est impossible de déterminer la productivité marginale de chacun, autrement dit la contribution de chacun à la création de valeur.

Contrairement à l’entreprise publique ou à la firme autogérée, la firme ‘classique’ (organisation dans laquelle un dirigeant engage, renvoie et dirige des travailleurs percevant un salaire fixe) constitue un système d’incitations efficace :

- elle évite (du moins limite) le problème du ‘tire au flanc’.- Le dirigeant est propriétaire de l’entreprise ce qui lui donne autorité et contrôle.- Les salariés reçoivent un salaire fixe et le dirigeant sélectionne les employés les plus efficaces ; les moins efficaces sont renvoyés et remplacés par d’autres.- La rémunération du dirigeant prend la forme de bénéfices, qui sanctionnent notamment sa capacité à sélectionner et encadrer efficacement les salariés.

Droits de contrôle résiduel, Bénéfices résiduels et Contrats incompletsLe concept de droit de propriété est complexe, même lorsque la propriété porte sur des actifs physiques simples.Des éclairages importants ont été apportés par Grossman and Hart   (1986) dont les travaux ont participé à la naissance de la théorie des droits de propriété et des contrats incomplets telle qu’elle existe aujourd'hui.En quoi consistent les droits associés à la propriété d’une entreprise par exemple ?

Droits associés à la propriété d’une

entreprise

Limites

Embaucher et licencier des employés

Droit du travail : discrimination à l’embauche, règles relatives aux licenciements

Déterminer la quantité produite, les prix

Droit de la concurrence (ventes à perte…), Réglementation de certains marchés (quotas de production)

Prélever les bénéfices, céder des actifs

Droit fiscal

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…etc.

L’analyse économique des droits de propriété interprète par conséquent la propriété d’un actif comme un droit de contrôle résiduel, c'est-à-dire le droit de prendre des décisions sur l’utilisation de l’actif si celles-ci ne sont pas explicitement préétablies par la loi ou réservées à autrui par contrat.Dans le même ordre d’idée, ce qui est appelé bénéfice résiduel caractérise tout ce qui reste après avoir collecté l’ensemble des revenus et réglé l'ensemble des dépenses, des dettes et autres obligations contractuelles. Autrement dit, il s’agit des bénéfices ‘imprévus’.Droits de contrôle résiduel et bénéfice résiduel sont des notions intimement liées à celle de contrats incomplets.Un contrat complet est un contrat précisant :

- ce que chacune des parties doit accomplir, quelles que soient les situations rencontrées, dans un futur illimité.

- Les modalités de répartition du revenu réalisé entre les parties.Lorsque des contrats complets peuvent être conclus, le contrôle résiduel n’a pas de sens et les bénéfices résiduels sont nuls : tout est en effet prévu dans les contrats (les droits et obligations de chacun ainsi que la part du revenu qui revient à chacun). Dans ce cas, si les parties sont capables d’élaborer et de comprendre les termes du contrat, la coordination ne génère pas de conflits post-contractuels.Cependant,

- des contrats complets existent rarement dans la réalité. - lorsque des événements non prévus par le contrat surviennent, se posent la question

- de savoir qui doit faire quoi- ainsi que celle concernant l’affectation des conséquences financières de ces événements.

- Des conflits post-contractuels sont donc susceptibles de se produire :- relations de l’entreprise avec ses clients (conditions générales de vente par exemple),- relations entre managers et actionnaires (exigences des managers à l’égard de profits supplémentaires réalisés par la firme),- conflits entre les salariés et les dirigeants (concernant le partage de la valeur créée, concernant le partage des responsabilités face à un échec…).

Qui détient le contrôle résiduel   ? Qui doit le détenir   ? La spécification des droits de contrôle résiduels et de l’affectation des bénéfices résiduels est essentielle à la fois :

- pour éviter les coûts de renégociation inévitables dans un contexte de contrats incomplets- et pour garantir l’existence d’un système d’incitations efficace.

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- Nous sommes au cœur de la théorie des droits de propriété qui est une théorie de l’allocation efficace des droits de propriété.

La solution efficace généralement préconisée par la théorie des droits de propriété est de garantir que :

celui à qui est accordé le droit de contrôle résiduel soit également celui à qui revient le bénéfice résiduel.

Dans le cas particulier étudié par Alchian et Demsetz (1972), c’est effectivement ce qui était suggéré : le dirigeant a le droit de contrôle résiduel et les bénéfices résiduels lui reviennent. Il est donc incité à maximiser la valeur totale créée par la firme puisque qu’il s’appropriera tout revenu marginal.Dans la réalité, il est souvent difficile de déterminer qui détient le contrôle résiduel, donc de savoir si la distribution des bénéfices résiduels est bien en adéquation avec ce contrôle.Cas d’une entreprise : actionnaires ? dirigeants ? employés ?

A retenir : définition des contrats incomplets, Alchian et Demsetz (1972), Grossman and Hart (1986), droit de contrôle résiduel, bénéfice résiduel.

Le problème du hold-up

Holmström and Roberts (1998) : « [T]he most influential work during the last two decades on why firms exist, and what determines their boundaries, has been centered on what has come to be known as the ‘hold-up problem’. »Représentation simplifiée sous forme de dilemme du prisonnier Deux firmes s’associent pour un projet qui nécessite pour chacune d’elle de réaliser un investissement. L’actif acquis par chaque firme n’a aucune valeur en dehors de l’utilisation commune qui en est faite (les actifs acquis par les deux firmes sont dits cospécialisés). Le coût de l’investissement est le même pour les deux firmes. Le retour (brut) sur investissement doit normalement être partagé à 50-50 par les deux firmes mais il n’existe pas de contrat garantissant que chaque firme ne tente pas de modifier le partage des gains tirés de cet arrangement. On suppose au contraire que chaque firme a la possibilité d’engager certains frais après la réalisation de l’investissement afin de tenter de s’accaparer la totalité du retour sur investissement (stratégie ‘déloyale’). Si les firmes engagent toutes les deux de tels frais (si elles sont toutes les deux déloyales), alors le retour sur investissement est partagé à 50-50.Synthèse des données du problème

Coût total des investissements [1] 4

Soit pour chaque firme [2]= [1]/2 2

Retour brut sur investissement [3] 8

Soit par firme, pour un partage égal [4]= [3]/2 4

Résultat par firme pour un partage égal [5]= [4]- [2] 2

Montant par firme des frais de tentative d’accaparement [6] 313

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Résultat par firme si les 2 firmes tentent l’accaparement [7]= [5]- [6] -1

Résultat pour la firme qui a tenté seule l’accaparement [8]= [3]- [2]- [6]

3

Résultat pour la firme, seule à ne pas avoir tenté l’accaparement [9]= -[2]

-2

Firme A

Déloyale

Loyale

Firme B Déloyale

-1,-1 -2,3

Loyale 3,-2 2,2

La solution du jeu par élimination des stratégies strictement dominées est (Déloyale,Déloyale). Toutefois, ce problème de décision se distingue de celui du dilemme du prisonnier car les firmes peuvent anticiper qu’elles seront confrontées à ce problème si elles s’associent. S’il n’y a aucune règle, aucun contrat permettant de se prémunir contre les comportements opportunistes, l’association des deux firmes n’aura pas lieu.Les paiements associés à la solution du ‘vrai’ jeu (qu’il faudrait donc formuler différemment) est donc (0,0). Alors que l'investissement aurait pu être rentable, il n’est donc pas réalisé.L’idée du hold-up apparaît chez Williamson (1975). Klein, Crawford and Alchian (1978) est le premier article à avoir introduit explicitement le problème du hold-up.Ils donnent l’exemple, dans l’industrie automobile, de la relation entre General Motors et la société Fisher Body qui produisait des carrosseries automobiles. Avec l’évolution des technologies et le passage de la carrosserie en bois à la carrosserie métallique, General Motors a envisagé de construire une nouvelle usine d’assemblage. GM a demandé à Fisher de construire une nouvelle usine de carrosserie à côté de sa nouvelle usine d’assemblage, les carrosseries allant directement de la ligne de production de l’usine Fisher à l’usine GM. Fisher a refusé de réaliser l’investissement demandé, probablement par crainte que la nouvelle usine de carrosserie, exclusivement conçue pour répondre aux besoins de GM, ne soit totalement assujettie à la demande GM. Le problème a finalement été résolu par une intégration verticale : General Motors a acheté Fisher Body.

- voir l’histoire de cet exemple, qui s’avère être plutôt une fable, dans un article de Peter Klein sur le blog « Organizations and Markets » : http://organizationsandmarkets.com/2006/09/12/coase-and-the-myth-of-fisher-body/

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Un exemple plus récent est donné par Bunnell et Brate (2000) (voir Hart et Holmström (2009)) au travers du rachat de StrataCom par Cisco en 1996. Cisco spécialisé à l’origine dans les routeurs est devenu le leader de l’industrie des réseaux dans les années 1990, notamment en s’appuyant sur une stratégie de ‘serial acquéreur’ de start-up (73 acquisitions entre 1993 et 2000). StrataCom a émergé et est devenu le leader dans la fourniture d’une nouvelle technologie de transmission (l’ATM : Mode de Transfert Asynchrone) permettant le transport d’une grande variété d’informations, incluant la voix, les données, la vidéo. Cisco avait sa propre technologie (IOS) non compatible avec l’ATM. Il n’était pas impossible que l’attrait pour l’ATM puisse remettre en cause la volonté de Cisco de dominer le secteur des infrastructures de réseaux.Actifs spécifiques et cospécialisésLes actifs sont dits spécifiques à un usage précis si les services qu’ils fournissent n’ont de valeur que pour ce seul usage.Le degré de spécificité d’un actif est défini comme la fraction de sa valeur qui serait perdue si son usage majeur cessait.Quand deux actifs sont hautement spécifiques à un même usage, la maximisation de la valeur exige l’exploitation commune de ces deux actifs. Ces deux actifs sont alors appelés cospécialisés.Exemple : Soient deux entreprises, l’une est une société de chemins de fer, l’une est une usine ayant besoin d’un moyen de transport pour acheminer ses matières premières et/ou écouler sa production. Plusieurs contextes envisageables :1er contexte : l’usine a recours aux voies ferrées de la société de chemins de fer, au même titre que d’autres utilisateurs (transport de voyageurs par exemple). Le degré de spécificité de l’actif est alors faible voire nul.2e contexte : l’usine a recours à une voie ferrée construite par la société de chemins de fer uniquement pour les besoins de cette usine. Il existe cependant pour l’usine une alternative au transport ferroviaire, par exemple par la route. La voie ferrée est donc un actif spécifique. Cette alternative suppose sans doute des investissements supplémentaires de la part de l’usine et n’est peut-être pas le mode de transport le plus efficace mais ces informations sont difficilement accessible pour la société de chemin de fer. La menace d’un abandon du recours à la voie ferrée par l’usine est donc crédible.3e contexte : l’usine a recours à une voie ferrée construite par la société de chemins de fer uniquement pour les besoins de cette usine. Mais, il n’existe pas de moyen de transport alternatif. Les actifs de la société de chemin de fer et de l’usine deviennent cospécialisés.

Contexte Degré de spécificité des actifs

Pouvoir de négociation

Problème du hold-up

Organisation efficace

Plusieurs utilisateurs de la voie ferrée

Actifs non spécifiques

Partagé entre utilisateurs et société de chemins de fer

Probabilité faible d’un hold-up

Marché

Usine seule utilisatrice,

Voie ferrée = Supérieur pour l’usine,

Probabilité forte que

Achat de la voie ferrée

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alternative par la route

actif spécifique inférieur pour la société de chemins de fer

l’usine tente un hold-up

par l’usine (intégration verticale)Contrat de location de longue durée (bail) avec prix indexé.

Usine seule utilisatrice, pas d’alternative par la route

Voie ferrée et actifs de l’usine sont cospécialisés

Inférieur pour l’usine, supérieur pour la société de chemins de fer

Probabilité forte que la société de chemins de fer tente un hold-up

La solution aux problèmes de hold-up est-elle toujours la propriété   ? L’intégration verticale c'est-à-dire la propriété uniqueLe transfert de la propriété à l’utilisateur est la solution qui semble la sûre du point de vue du risque d’opportunisme.C’est la réponse que tendent à donner tant la théorie des coûts de transaction que la théorie des droits de propriété et des contrats incomplets. Plus précisément, la théorie des droits de propriété et des contrats incomplets considère que l’efficacité d’une transaction est garantie lorsque les droits de propriété sont alloués à l’individu dont l’investissement est le plus utile à la relation.Toutefois, l’intégration verticale a aussi ses limites en termes d’efficacité de la coordination, y compris en relation avec l’incitation à investir.De plus, il existe des formes de contrats qui, sans avoir à prévoir toutesLes formes contractuelles permettant de se prémunir contre l’opportunismeUn exemple : le contrat de longue durée.Lorsque les différentes situations environnant la transaction peuvent être prévues (transactions relativement simples), les contrats de longue durée (bail de longue durée, prix indexés) peuvent constituer une alternative efficace à la propriété.Plus généralement, Maskin et Tirole (1999) ont donné plusieurs exemples de mécanismes qui peuvent être inclus au contrat et qui poussent les parties à coopérer (voir Hart and Moore (2007, p.183)). Par exemple, dans le cas où la société de chemin de fer est en position pour tenter un hold-up, on peut supposer que le fait de pratiquer des tarifs abusifs peut être observé par un tiers (un juge). Le contrat peut stipuler les conditions dans lesquelles l’usine peut recourir au jugement d’un tiers susceptible de conduire à une amende pour la société de chemins de fer.

A retenir : Klein, Crawford and Alchian (1978), l’exemple GM-Fisher body.

Les relations internes à la firme : la théorie de l’agence et des incitations

La relation d’agence représente la relation entre un individu (appelé principal) qui délègue une partie de son pouvoir de décision à un autre individu (appelé agent). Elle est au cœur de l’étude des contrats et ses domaines d’applications sont très nombreux. Son application à l’entreprise se concentre essentiellement sur les

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relations internes à la firme. C’est le cas de l’article fondateur de Jensen et Meckling (1976) ainsi que de nombreux articles qui ont suivis. L’attention n’est donc plus centrée sur les rapports entre l’entreprise et son environnement, et en particulier sur la question des frontières entre firme et marché, comme dans la théorie des coûts de transaction ou la théorie des droits de propriété et des contrats incomplets. C’est pourquoi Gibbons (2005, p.206) souligne que l’on peut considérer la théorie des incitations (« sous sa forme la plus simple ») comme une « théorie accidentelle de la firme ».Pour Coriat et Wenstien (2009, p.7), la théorie des incitations et de l’agence représente cependant, « le coeur la vision de l’entreprise proposée par la pensée néoclassique actuelle. ». La raison tient, selon ces auteurs, notamment au fait que, dans la tradition initiée par Coase, l’organisation hiérarchique (la firme) s’impose comme mode d’organisation efficace contre un marché rendu relativement inefficace par la présence de coûts de transaction. En revanche, la théorie des incitations et de l’agence ne part pas d’une constatation d’échec du marché. Son point de départ, et son objet, est la formalisation des relations entre des individus optimisateurs aux intérêts différents et la détermination des contrats incitatifs optimaux dans des situations diverses marquées par des asymétries d’information. Nous avons donc bien affaire à une démarche traditionnelle dans un cadre néo-classique. Cette posture théorique permet de comprendre pourquoi, chez Jensen et Meckling (1976), les firmes, et plus généralement les organisations, sont présentées comme des « fictions légales qui servent comme noeud (nexus) pour un ensemble de relations contractuelles entre des individus ».Ainsi, la firme n’a pas d’existence réelle (fiction légale). En introduisant de la lumière dans la boite noire, la théorie des incitations et de l’agence fait de la firme une structure fictive, aux contours insignifiants (les frontières de la firme n’est pas une question à laquelle la théorie des incitations et de l’agence s’intéresse). Ce sont les individus (et non la firme) qui concluent des contrats. Ces individus sont les détenteurs de leurs propres actifs (physiques et humains), le concept de propriété de la firme est « non pertinent. » (Fama (1980) cité par Coriat et Wenstein (2009, p.8))L’aléa moralRappelons que les asymétries d’information peuvent concerner :

- les caractéristiques du bien ou du service échangé- l’action d’un des individus participant à un contrat.

Les conséquences associées à ces asymétries sont respectivement :- la sélection adverse (Akerlof (1972)).- l’aléa moral (Arrow (1963)).

La théorie de l’agence s’intéresse essentiellement aux problèmes d’aléa moral. En effet, elle étudie les modalités des contrats garantissant l’efficacité d’une relation entre un principal et un agent. Le principal délègue une partie de son pouvoir de décision à l’agent, ce dernier étant dans une situation d’asymétrie favorable puisqu’il a possibilité de cacher au principal certaines de ses actions. Nous somme donc dans une situation favorisant l’opportunisme post-contractuel.L’introduction de la notion d’aléa moral par Arrow (1963) s’est faite dans le domaine de l’assurance maladie. Le champ des assurances en général a permis ensuite d’exploiter davantage cette notion, aujourd'hui appliquée à de

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nombreuses questions économiques qu’il s’agisse de relations de marché (assureur-assuré) ou de relations dans des organisations.La source d’inefficacité en présence d’aléa moral réside dans le fait qu’elle risque d’aboutir à un échec de la relation entre le principal et l’agent lorsque le contrat ne permet pas au principal de se prémunir contre des actions de l’agent qui nuiraient au bien-être du principal :

- diminution de l’autoprotection contre un risque dans le cas de l’assurance (aléa moral ex ante, c'est-à-dire avant la réalisation de l’événement déclenchant une dépense pour le principal)

- surconsommation de biens et de services fournis par le principal après réalisation de l’événement objet de l’assurance (aléa moral ex post) ; cas du malade.

- Problème du tire-au-flanc dans le cas de la relation employeur-employé.- Relation emprunteur-prêteur, l’emprunteur modifiant son comportement

après conclusion d’un contrat de prêt dans un sens augmentant son risque de défaut.

Le Principal-actionnaire et l’Agent-manager« Who is the boss, and whose interests come first? » (Chew and Jensen (1995))Les premières observations du phénomène   :

- Veblen- Berle et Means (1932)

Berle et Means (1932) ont remarqué que le fait de distribuer les actions à une multitude d’actionnaires créait une séparation entre la propriété et le contrôle. Aucun actionnaire ne disposant d’un pouvoir de contrôle sur les dirigeants, ils ne peuvent pas vérifier que ces derniers gèrent l’entreprise au mieux des intérêts des propriétaires.L’analyse du phénomène au sein de la la théorie de l’agence« Le problème n’est pas que les dirigeants soient paresseux ou ne travaillent pas assez. » (Milgrom et Roberts (1992, p.241)) !Le problème est qu’ils dépensent leur énergie à poursuivre leurs propres objectifs, lesquels ne coïncident pas nécessairement avec ceux des actionnaires :

- investissement des bénéfices dans des projets peu rentables mais accroissant le pouvoir des managers.

- De connivence avec les membres des conseils d’administration, ils s’octroient des salaires exorbitants et engagent des dépenses somptuaires.

- Peuvent faire échouer des opérations de rachat qui seraient rentables mais qui affaibliraient leur pouvoir.

Le Principal-Actionnaire doit donc chercher à introduire des incitations pour que les dirigeants et membres du conseil d’administration prennent des décisions allant dans le sens des intérêts des actionnaires.Les prises de contrôle hostiles comme arme contre l’aléa moral des dirigeantsSous-titre   : la théorie de l’agence représente-t-elle la voix des marchés financiers   ? Une prise de contrôle hostile peut être définie comme l’acquisition d’un nombre suffisant d’actions pour exercer un certain contrôle dans l’entreprise, et ce en

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dépit de l’opposition du conseil d’administration et des dirigeants de cette entreprise.Ceux qui lancent une OPA hostile sont prêts à payer l’entreprise visée à un prix plus élevé que le prix du marché (cours de l’action). Une interprétation est qu’ils considèrent que l’entreprise pourrait avoir une valeur plus importante si elle était dirigée différemment. Les prises de contrôle peuvent ainsi témoigner soit de l’incompétence des dirigeants, soit de l’existence d’un aléa moral, la différence entre le prix de marché et le prix de vente représentant ce que les actionnaires perdent du fait d’une mauvaise gestion, tandis que le prix de vente reflète la valeur de la firme une fois le changement opéré.Jensen (1988a) remarque par exemple qu’entre 1977 et 1986 (aux Etats-Unis ?) les actionnaires qui ont vendu leurs actions durant une OPA ont réalisé des plus-values représentant un montant total de 346 mds de $ (en $-1986). Plus généralement, le même auteur (voir Jensen (1988b)) donne les résultats empiriques suivants (lesquels semblent encore être valables aujourd'hui, y compris pour les opérations de prise de contrôle observées en Europe) :- Les actionnaires de l’entreprise cible enregistrent des gains significatifs : le cours des actions augmente d'environ 30 % dans le cas d'une offre publique d’achat et de 20 % dans le cas d'une fusion (ces augmentations sont fonction du cours de l'action avant l'annonce de l'OPA).Les actionnaires des entreprises présentant l'offre n'enregistrent que des gains limités dans le cas d'une OPA réussie (environ 4 %), et aucun gain en moyenne dans le cas d'une fusion.« The mergers, acquisitions, LBOs, and other leveraged restructurings of the 1980s constituted an assault on entrenched authority that was long overdue. » (Chew and Jensen (1995))Il est clair que cette interprétation (la menace du rachat comme pression forçant les managers à être plus efficaces) n’est pas la seule :

- Les prédateurs peuvent avoir surestimé la valeur de l’entreprise (et leur capacité à mieux gérer l’entreprise).

- S’il y a effectivement sous-estimation de la valeur (potentielle) de l’entreprise par le marché, ce n’est peut-être pas parce que l’entreprise est mal gérée mais parce que l’évaluation faite par le marché est erronée.

- Les prédateurs peuvent s’être servis de l’argent des autres pour accroître leur propre empire. Notons que dans le cas de fonds d’investissement, une autre relation d’agence s’instaure entre ceux qui confient leurs capitaux au fonds d’investissement et le manager du fonds (qui devient alors l’Agent dans cette relation).

- Les prédateurs peuvent réaliser des dividendes et des plus-values, non pas en améliorant l’efficacité du management de l’entreprise mais brisants des engagements initiaux implicites. Cette interprétation a été introduite par Shleifer et Summers (1988) (voir Cohen (2006, p.36)). Selon eux, en effet, lorsqu’un raider prend le contrôle d’une entreprise, il ne fait rien d’autre qu’exproprier les partenaires de la firme (les stakeholders) au profit des actionnaires (les shareholders). Cohen (2006) donne l’exemple suivant. Lorsqu’un individu débute sa carrière dans une entreprise, la promesse (parfois implicite, souvent verbale mais jamais écrite) d’une progression dans la hiérarchie, ou du moins de gagner plus en vieillissant, constitue un contrat implicite contribuant à une plus grande efficacité du salarié et assurant une certaine fidélité du salarié à l’entreprise (théorie du salaire d’efficience (Shapiro and Stiglitz (1984)). Ces contrats implicites créent

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une ‘économie de partenariat’ garantissant une efficacité sur le long terme. Néanmoins, dans une logique financière court-termiste, ces contrats implicites peuvent constituer un coût affaiblissant la rentabilité financière. Cohen (2006, p.37) résume alors le propos ainsi : la révolution financière des années 1980, et ses conséquences en termes de gouvernance des entreprises, « a créé de la valeur en annulant nombre d’engagements implicites. En licenciant les vieux salariés, en ne renouvelant pas les contrats avec les sous-traitants, en exigeant en bref des ‘managers’ qu’ils trahissent leurs engagements passés avec les autres ‘partenaires’ de la firme, ceux qu’on appelle les ‘stakeholders’. ».

Une réponse des dirigeants aux menaces d’OPA : les droits de souscription d’actions. (qualifiées de pilules empoisonnées par Milgrom et Roberts (1992).Le Principal-employeur et l’Agent-employéMilgrom et Roberts (1992, p.239) citent Taylor : « Il n’est pas rare qu’un ouvrier compétent découvre, en peu de temps, comment travailler moins tout en donnant l’impression à son employeur qu’il travaille beaucoup. »La théorie de l’agence traite la relation employeur-employé dans les termes d’une recherche d’un contrat incitatif garantissant que l’agent-employé poursuive les intérêts du principal-employeur et non ses propres intérêts. Là encore, c’est l’asymétrie d’information qui nécessite le recours à des mécanismes incitatifs puisque si la productivité de l’employé (déterminée par ses caractéristiques propres : intelligence, habileté, effort…) était parfaitement observable, la théorie néo-classique standard pourrait s’appliquer : le salaire serait fixé en fonction des caractéristiques de l’employé. Ces caractéristiques n’étant que partiellement observables, un mécanisme incitatif apparaît nécessaire. Ce mécanisme va faire dépendre le salaire, d’une manière ou d’une autre, des résultats du travail fourni.Cependant, l’effort de l’employé n’est pas le seul facteur expliquant ses résultats. En effet, une partie de ces résultats ne relève pas de la responsabilité de l’employé mais de facteurs extérieurs : demande de la clientèle, comportement des concurrents, qualité du management ( !)… Le contrat optimal devra permettre d’équilibrer l’incitation et un certain niveau de protection contre les risques indépendants de la volonté de l’employé, ces risques devant être partagés entre les membres de l’entreprise.

A retenir : Jensen et Meckling (1976), asymétrie d’information, principal-agent, aléa moral, recherche de contrats incitatifs.

II. L'ENTREPRISE CAPITALISTE, LA CONCENTRATION ET LA MUTATION DE L'APPAREIL PRODUCTIF (XIXème - XXème siècles)L’essentiel de ce qui suit est tiré, pour le XIXe siècle, de l’ouvrage de Verley, Entreprises et entrepreneurs.

1) DU ‘PATRON’ A L’’ENTREPRENEUR’ A L’AGE PRE-INDUSTRIEL

A retenir : Les quatres éléments pour pouvoir parler d’entreprise, la manufacture drapière des Poupart de Neuflize à Sedan (G.Gayot)

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2) L’ENTREPRISE DE LA REVOLUTION INDUSTRIELLE (1780-1870)

(a) Industrialisation et entreprise

La coexistence des formes nouvelles et anciennes d’entreprises

Les éléments moteurs du changement : progrès technique et coût relatif du travail

(b) Une taille modeste

A retenir : Les exceptions dans l’industrie cotonnière (Dollfus-Mieg et Cie en Alsace, Lowell dans le Massachusetts), la Compagnie d’Anzin et le Creusot.

(c) La figure de l’entrepreneur et les dynasties

Le mythe du « self made man »

A retenir : étude de F.Crouzet (1985), une exception Richard Cobden, famille Krupp.

Les dynasties et leurs stratégies de « pérennisation »

A retenir : La loi des trois générations (les Marshall, Pouyer Quertier et La Foudre), les différentes stratégies matrimoniales, la dynastie des Motte-Bossut.

(d) Les formes juridiques des entreprises

A retenir : Code du commerce (1807), société en nom collectif, commandite simple, commandite par actions, la Société Anonyme (loi de 1867).

3) LES « GRANDES ENTREPRISES » MODERNES A PARTIR DE LA FIN DU XIXE SIECLE

(a) Les formes multiples de concentration ou d’entente

A retenir : Croissance interne, intégration verticale, concentration horizontale, absorption, fusion, ententes, cartels, R.Hilferding (« capitalisme financier »), E.H.Chamberlin (1933), Interstate Commerce Commission Act (1887), Sherman Antitrust Act (1890).

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(b) Des causes multiples de développement de la grande entreprise

A retenir : Elargissement et instabilité des marchés, hausse des coûts fixes, accès au marché financier, montée des « managers ».

(c) Quelques spécificités nationales

Le ‘modèle américain’

Les grands trust début XXe- United States Steel Corporation

- créé en 1901- intégrant les acieries Carnegie

- General Electric : fondée en 1892 par Edison- Westinghouse Electric- Standard Oil (1870)

Singer- 1851 : dépôt de brevet pour la première machine à coudre à usage domestique par Isaac Merrit Singer- la généralisation de la machine à coudre va rendre possible la suprématie du prêt-à-porter au détriment du sur-mesure

A retenir : Duke et American Tobacco Company (1890), Singer (une des premières multinationales).

Les autres pays industriels

Grande-BretagneJ&P Coats

- origine : début du XIXe, frères James et Peter Coats, filature du coton, ville de Paisley en Ecosse- développement dans le monde entre 1830 et 1890 (Etats-Unis, Brésil, Chine, Inde) pour contourner les barrières douanières- 1896 : fusion avec Clark, un concurrent de Paisley ⇒ naissance de J&P Coats ; emploie 50000 personnes dans le monde, 1 des premières compagnies internationales, une des cinq premières sociétés cotées à la bourse de Londres.

Allemagne- Krupp- Siemens- AEG

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- en 1883, l’ingénieur Emil Rathenau achète la licence allemande pour les brevets de lampes Edison et crée la Compagnie Allemande Edison à Berlin.- les travaux d’électrification de l’Allemagne sont entrepris en 1885- l’entreprise est rebaptisée AEG (Société Electrique Générale) en 1887- AEG se lance dans les appareils ménagers à partir de 1889, dans les machines à percer mobiles en 1895…

A retenir : Konzern, holding.

4) LES EVOLUTIONS DE L'ORGANISATION INTERNE DE L'ENTREPRISE AU XXEME SIECLE

(a) De l'ère des managers au retour de l’actionnaire

- La mise en évidence de la révolution managériale :Veblen Thorstein, The Instinct of Workmanship and the State of the Industrial Arts (1914)

- complexification des processus productifs et processus de rationalisation de la société ⇒ révolution technocratique : perte de pouvoir de la classe des affaires (capitalistes) au profit des ingénieurs.

Berle Adolf et Means Gardiner, L’entreprise moderne et la propriété privée (1932)

- l’ouvrage porte spécifiquement sur l’entreprise et non sur la société dans son ensemble.- étude de l’organisation des 200 plus grandes entreprises US.- introduction de l’expression « Révolution managériale »- développement des sociétés par actions, dispersion de la propriété ⇒ séparation de la propriété et du contrôle de l’entreprise.- le pouvoir de décision passe des actionnaires aux managers.

Burnham J., L’ère des organisateurs , traduction française de The Managerial Revolution (1941) :

- on se dirige vers la « société directoriale » où la propriété privée individuelle ne joue plus un rôle économique déterminant (donc les actionnaires non plus) mais c’est la relation avec les instruments de production (relation maîtrisée par les « organisateurs ») qui détermine la domination sociale, le pouvoir et le privilège dans la société.- les organisateurs n’ont pas le pouvoir seulement dans les grandes entreprises mais aussi au sein de l’administration, des syndicats… Ils marquent une bureaucratisation de la société⇒ influence de Burnham sur le roman de Georges Orwell,

1984

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Schumpeter, Capitalisme, Socialisme et démocratie , 1942  : regrette la disparition de l’entrepreneur, remplacé par le manager.Galbraith, Le Nouvel Etat industriel , 1967

- là aussi, il s’agit de décrire la forme particulière que prend le capitalisme pendant les trente glorieuses.

- l’ouvrage est donc complémentaire de L’Ere de l’opulence (1958), ouvrage dans lequel est introduite la notion de filière inversée

- la notion spécifiquement consacrée à l’organisation de l’entreprise = la technostructure.

- Chandler, La Main visible des managers (1977) - autres ouvrages : Stratégies et structures de l’entreprise (1972), Scale and Scope (1990)- « capitalisme managérial »

- Aujourd’hui, la relation entre les actionnaires et les managers est devenue plus complexe. 4 types d’actionnaires peuvent être distingués, du plus au moins impliqués dans la gestion de l’entreprise :

1) le passif, type fonds de pension ou assureur, riche et distant 2) l'actif, plus impliqué3) l'activiste, agitateur professionnel4) le capital-investisseur : fonds d’investissement de type private equity (notamment fonds de LBO) ou business angel (investisseur privé)

- Les actions des fonds d’investissement court termistes (hedge funds) :- Ces fonds peuvent favoriser une convergence des intérêts des managers et des leurs grâce au système des stock-options. - Au contraire, certains fonds cherchent à faire pression à la baisse sur tous les coûts, notamment les rémunérations des dirigeants. Ex de Knight Vincke Asset Management au sein d’HSBC : les asymétries d’information auraient permis de faire voter au conseil d’administration un système d’intéressement très favorable aux dirigeants.

A retenir : Organisation, A.A. Berle et G.C. Means (1932), révolution managériale, J.K. Galbraith, Le nouvel Etat industriel, (1967), technostructure, A.D. Chandler, La main visible des managers, (1977), dynasties, corporate governance.

(b) L'organisation du travail et de la production

L'organisation scientifique du travail (OST) et la production en série

A retenir : F.W. Taylor, division verticale et horizontale du travail, "travail en miettes" (G. Friedmann), H. Fayol (hierarchie fonctionnelle), H. Ford, travail à la chaîne, convoyeur, five dollars a day.

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Les critiques psychosociologiques de l'OST

A retenir : Ecole des Relations Humaines (ERH), E. Mayo et F.G. Roethlisberger, Hawthorne, Western Electric (1927), F. Herzberg, enrichissement et élargissement des tâches, post-taylorisme.

Innovation technologique et variété de la demande. Les solutions face à l'impératif de flexibilité

- Caractéristiques de la nouvelle organisation du travail- les objectifs de l’organisation du travail à l’heure d’Internet sont : « l’adaptabilité à la demande, la réactivité, la qualité et surtout l’optimisation du processus productif, notamment à travers l’utilisation de toutes les compétences humaines. Ces objectifs se traduisent par une polyvalence accrue des salariés et une délégation de responsabilité aux niveaux hiérarchiques inférieurs. » (Philippe Askenazy, La Croissance moderne, 2001), cité par D.Cohen.- ‘juste à temps’ et ‘sur mesure’- Le taylorisme repose sur une logique ‘top-down’, une logique de flux poussé où les contraintes de la production s’imposent à la clientèle. Cette organisation du travail est donc bien adaptée à une production en série de produits standardisés, symbolisée par les propos de Ford selon lesquels, les clients pouvaient choisir la couleur qu’ils souhaitaient, à condition qu’elle soit noire.Au contraire, l’organisation du travail actuelle repose sur une logique de flux tiré par la demande. Une caractéristique résumée par la formule de Benjamin Coriat : « penser à l’envers ».

- La firme J (Japonaise, toyotisme) plus efficace que la firme A (Américaine, fordisme) dans le contexte d’incertitude lié aux évolutions de la demande (nouvelles aspirations des consommateurs)

- Masahiko Aoki- AOKI Masahiko [1990a], Toward an Economic Model of the Japanese Firm, Journal of Economic Litterature, 28 (1), pp. , trad partielle dans Problèmes Economiques [1991],n°2225, pp. 1-14.- cadre : rationalité limitée, information imparfaite- firme A (ou H selon les auteurs) : coordination centralisée (verticale, hiérarchique) et incitations décentralisées (rémunérations individuelles)- firme J : coordination décentralisée (autonomie, liberté d’initiative) et incitations centralisées (la rémunération concerne l’équipe constituée au moment de l’embauche et dont les membres progressent ensemble dans l’entreprise, éventuellement tout au long de la vie).

A retenir : « Penser à l’envers » (Coriat), Le toyotisme de T. Ohno, les cercles de qualité d'Ishikawa, flux tiré (Kanban), et flux tendu (zéro stock, zéro panne, zéro délai, zéro défaut, zéro papier), cohésion

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sociale, culture d'entreprise), néo-taylorisme.

5) LES MUTATIONS DE L'APPAREIL PRODUCTIF AU XXème SIECLE

(a) Définitions

A retenir : Appareil productif, tissu productif, système productif, mésoéconomie, économie industrielle, secteur, branche.

(b) Petites et moyennes entreprises (PME) et grandes entreprises (GE)

Définitions et caractéristiques

Handicaps des PME et atouts des GE

A retenir : PME créatrices d'emplois et innovantes, la flexiblité des PME, désavantages des PME dans l'accès aux sources de financement (difficulté d'accès aux marchés financiers, coût du crédit bancaire), importance des défaillance de PME, pouvoir de marché et coûts unitaires réduits des GE.

Les groupes

A retenir : Groupe, société mère, holding, filiale, participation, participations croisées, liaisons circulaires.

(c) Spécialisation souple et réseaux

L'analyse de Piore et Sabel

A retenir : M.J. Piore et C.F. Sabel, Les Chemins de la prospérité, (1984), le deuxième clivage industriel, réhabilitation de la production artisanale, spécialisation souple, l'exemple du district textile de Prato.

Les réseaux

(d) La concentration des entreprises

Définitions et mesure

Les deux indices de concentration les plus courants sont :- la somme des parts de marché (ou de la valeur ajoutée) du secteur détenues par les plus grandes entreprises (4 ou 8) du secteur.

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- L’indice de Herfindhal-Hirschman (IHH) qui est égal à la somme des carrés des parts de marché. L’IHH est donc compris entre 0 et 10000 (cas du monopole)

La Federal Trade Commission, qui gère la politique de la concurrence aux Etats-Unis estime qu’un IHH inférieur à 1000 correspond à une concentration faible et qu’un IHH supérieur à 1800 correspond à une concentration forte.

Les caractéristiques spécifiques des différents secteurs (structure des coûts de production, comportement de la demande) conduisent à une forte disparité, entre des secteurs faiblement concentrés comme l’habillement et le cuir et des secteurs fortement concentrés comme l’automobile ou la construction navale, aéronautique et ferroviaire.

A retenir : Concentration, croissance interne, croissance externe (fusion, absorption, rachat partiel d'actif, prises de participation), mesure de la concentration, concentration technique, concentration économique, concentration financière, intégration verticale, filière, concentration horizontale, diversification, conglomérat industriel, holding financier, indice de Herfindhal-Hirschman.

Evolution

Coutinet & Sagot-Duvauroux (2003) distinguent 5 vagues historiques de fusions et acquisitions. On peut en ajouter une 6ème.

1)   1883-1904 aux Etats-Unis : concentrations horizontales visant l’acquisition d’un pouvoir de monopole.En 1904, 318 entreprises contrôlent 40% des actifs industriels.La récession de 1904 et l’application du Sherman Act marquent un temps d’arrêt.2)   1916-1929   : nouvelle période de F&A renforçant la structure oligopolistique des marchés américains.La crise de 1929 stoppe le processus.3)   30 glorieuses 4)   Années 1980 jusqu’au krach de 1987   : multiplication d’opérations hostiles, reventes fréquentes des entreprises acquises « par appartement ».5)   Années 1990 jusqu’à l’éclatement de la bulle Internet   : toutes les régions du monde sont concernées, de très nombreux secteurs (TIC notamment où les économies d’échelle sont importantes du fait des coûts fixes liés au développement des nouvelles technologies), les opérations hostiles sont moins nombreuses.6)   Années 2000 jusqu’à la crise des subprimes .

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Effets de la concentration

Des effets incertains au niveau de l’entreprise

- Des effets a priori bénéfiques pour les entreprises qui se concentrent : économies d’échelle, exploitation des synergies (réduction de personnel)… Mais il existe aussi des risques. Les F&A représentent de véritables défis d’un point de vue organisationnel et technique (difficulté de la gestion des doublons…) et peuvent se heurter aux différences de culture d’entreprise.Exemple d’échec : la fusion Alcatel-Lucent en 2006 (avec chute de 60% du cours du titre en moins de deux ans, démission de l’exécutif en 2008…).Ainsi que le montre Mueller (Mueller (1997), Gugler et alii (2003)), les travaux empiriques conduisent finalement à une conclusion assez négative quant à l’accroissement des profits permis par les F&A. Lorsque les profits augmentent, c’est souvent du fait d’une augmentation des prix (donc d’un pouvoir de marché accru) plus que par une plus grande efficacité de l’ensemble issu de l’opération de concentration.

Internalisation ou externalisation ?

- Les limites de la grande taille peuvent à externaliser certaines activités. Selon le degré de dépendance juridique et financière des unités qui produisent les activités externalisées, cette externalisation peut conduire à une déconcentration. Il faut toutefois souligner que la dépendance économique peut être forte même lorsque la dépendance juridique et financière est forte : cas des entreprises sous-traitantes dont les débouchés dépendent d’une seule entreprise (équipementiers automobiles).- L’externalisation connaît aussi ses limites. Elle s’est fortement développée à partir de la fin des années 1970, d’abord dans l’industrie puis également dans les services (centrales d’assistance téléphonique pour Dell = externalisation + délocalisation). Néanmoins nombreuses sont les entreprises ayant révisé leur stratégie et internalisé des activités qui avaient été précédemment externalisées.

- Juillet 2009 : Boieng rachète l’usine de l’un de ses sous-traitants, Vought Aircraft (production et assemblage de pièces et d’éléments de fuselage), suite à d’importants retards dans la production de son futur Dreamliner 787. Il s’agit d’un changement de stratégie pour une entreprise qui externalise jusqu’à 90% de la fabrication des structures de ses appareils.Rq : Airbus a lui-même externalisé près de 50% des aérostructures de son futur long courrier A350 XWB.

Effets au niveau collectifs : la question de l’efficacité et celle de la répartition du surplus

- Des effets bénéfiques au niveau collectif (entreprises, consommateurs, salariés) ?

- question d’efficacité collective   : La concentration nuit-elle à la concurrence ? (« La concentration industrielle est-elle un obstacle à la concurrence ? » (ESCP-EAP 2006))

- indice de Lerner : l'indice Lerner (L) est calculé comme suit : L = (prix - coût marginal)/prix. Dans un marché parfaitement concurrentiel, L=0 puisque le prix est égal au coût marginal. Dans un marché monopolistique, on peut démontrer que L=1/e, où e est l'élasticité de la demande dans le marché. Sur

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un marché à la Cournot L=1/(e×n) où n est le nombre d’entreprises (ayant des parts de marché égales). Rq : cet indice peut être approximé par le taux de marge.

- => balance entre abaissement de la courbe de coût due aux économies d’échelle et perte de surplus collectif dû à la baisse de la concurrence.

- question de répartition   : qui perd ? qui gagne ?

(e) L'internationalisation des entreprises

Aspects historiques

- Début de l’internationalisation des firmes dans les années 1870- L’Allemand Bayer s’installe aux Etats-Unis en 1865- Singer, la première vraie multinationale, construit sa première usine en Europe (Ecosse) en 1867.

- Une première vague d’opérations à l’étranger a lieu dans les années 1890.- Deuxième vague après la Seconde Guerre mondiale

- Dans les années 1950, les entreprises américaines se développent à l’étranger par intégration verticale pour assurer la sécurité de leurs approvisionnements (matières premières…).- Puis, dans les années 1960, l’Europe devient un vaste marché (après la reconstruction) cible des entreprises américaines qui installent des filiales relais proche de la demande locale.

- Dans les années 1970, ce sont les conditions plus ou moins avantageuses de la production qui guident prioritairement l’implantation étrangère (passage de firmes internationales à des firmes multinationales).- Les années 1980 marquent le début de la firme globale, dont les critères d’implantation restent les mêmes mais avec une recherche de flexibilité (plus forte autonomie des filiales).- Une accélération du processus dans les années 1990 : rôle des fonds d’investissement, notamment asiatiques

Causes et processus

Facteurs de l’internationalisation1)   Facteurs institutionnels   : attitude des autorités nationales et des organisations internationales à l’égard du commerce international et des mouvements internationaux de facteurs de production.Concernant les échanges de marchandises, à part la période protectionniste de l’Entre-deux Guerres, le libre-échangisme a eu tendance à se développer depuis le début du XIXème siècle (Rainelli (1999)). Les progrès se sont cependant accélérés après la Deuxième Guerre mondiale,

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avec la mise en place d’institutions régionales ou internationales favorisant le développement du commerce international.Concernant les mouvements de capitaux, la période entamée à la fin des années 1970 est sans doute exceptionnelle. La dérèglementation a en effet permis un développement particulièrement rapide des IDE et des échanges financiers (globalisation financière).Enfin, concernant les migrations de main d'œuvre et les échanges de technologie et de connaissance, on note également un changement récent des politiques nationales :

- D’une part, les politiques migratoires des pays développés, longtemps guidées par les évolutions des besoins en matière de main d'œuvre non qualifiées, évoluent aujourd'hui vers des politiques visant à attirer la main d'œuvre qualifiée.

- D’autre part, les pays développés ont longtemps cherché à limiter le transfert de technologie (de connaissance). Rappelons l’interdiction d’exporter des machines en Angleterre (abolie en 1843 par le gouvernement Robert Peel, peu de temps avant l’abolition de la loi sur le blé, en vigueur entre 1815 et 1846) Depuis les années 1980, l’attitude change, en partie parce que la multinationalisation des firmes fait que les flux de connaissances échappent au contrôle des autorités. La tendance est plus au développement de pratiques coopératives au niveau international.2)   Facteurs techniques   : le développement des moyens de transport et de communication.Il s’agit d’une tendance de long terme mais dont l’accélération est très marquée depuis les années 1950 (aviation, commerce maritime avec les supertankers…)

Processus   : 1) Développement des exportations2) Implantation d’activités de production à l’étranger3) Délocalisation d’activités stratégiques

-paradigme OLI de Dunning (1977)

Mondialisation et formes régionales de capitalisme

- La diversité des structures et institutions a-t-elle tendance à disparaître avec la mondialisation ?

- le cas du capitalisme rhénan :- part des capitaux étrangers dans les entreprises du DAX : moins de 10% au milieu des années 1990, plus du tiers à la fin des années 1990, plus de 50% en 2007.

- Notamment : environ 80% en 2007 pour Deutsche Börse, Adidas ou le laboratoire Bayer.- Un tournant : la suppression de la taxation sur les plus-values de cession en 1999. Un facteur-clé de l’arrivée d’investisseurs étrangers (notamment des fonds d’investissement et de pensions).

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- Les entreprises globales existent-elles ?- Carlos Ghosn à la tête de Renault depuis 2005 : d’origine libanaise, né au Brésil, a vécu au Brésil, au Liban puis en France à partir de 17 ans (polytechnique). rq  : « La réalité de notre marque est la perception que nos clients en ont ».- Indra Nooyi (née à Madras, études en Inde) à la tête de PepsiCo (N°2 mondial des boissons derrière Coca Cola) à partir de 2007.

(f) L’Etat et les grandes entreprises : favoriser la concurrence ?

La Préservation de la concurrence

Etats-Unis1890 : Sherman Act. Concerne la lutte contre les ententes illicites (restreignant les échanges et le commerce) et les monopoles ou tentatives de monopolisation (abus de position dominante)1914 : Clayton Act. Vise à remédier aux insuffisances du Sherman Act. Les pratiques suivantes, lorsqu’elles amènent à restreindre la concurrence, sont condamnées : discrimination par les prix, les ventes exclusives et les ventes liées, les concentrations, le fait pour toute personne de diriger plusieurs entreprises concurrentes.1950 : Celler-Kefauver Act. Donne le droit aux autorités américaines d’interdire toute fusion qui conduirait à trop de concentration. Conséquence : les fusions américaines deviennent essentiellement conglomérales.Au-delà des évolutions de la législation, on considère que la politique de la concurrence américaine a été relativement souple jusqu’à l’après seconde guerre mondiale, qu’elle s’est durcie pendant les trente glorieuses puis de nouveau assouplie à partir du milieu des années 1970 (sous la pression de l’école de Chicago) et surtout sous l’ère Reagan.Commission européenneLa préservation de la concurrence relève de sa compétence dès lors que la concurrence au sein du Marché Unique, et pas seulement au niveau national, est en jeu. 2008   : Instauration de la procédure de transaction : les entreprises qui reconnaissent les faits se voient appliquer des sanctions réduites (de 10%), ces réductions pouvant s’ajouter à celles obtenues du fait de la collaboration à l’enquête (procédure de clémence).France   : Autorité de la Concurrence 1986 : Création du Conseil de la Concurrence, il est issu de plusieurs évolutions de l’institution initiale appelée Commission technique des ententes, créée en 1953. 2001   : Une augmentation des sanctions a été permise notamment par la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques (NRE) de 2001 : elle a relevé le plafond maximum des sanctions de 5% du chiffre d’affaire national à 10% du chiffre d’affaire mondial.Instauration la procédure de clémence (collaboration à l’enquête).2009 : Le Conseil de la Concurrence devient une Autorité de la Concurrence en 2009.

2001-2004(Moyenne annuelle)

2005 2006 2007

64 mil € 754 mil € 128 mil € 221 mil €

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Etat et grandes entreprises dans la compétition internationale

Des enjeux économiques, sociaux et politiques

- motivations :- fondements économiques théoriques :

- rendements croissants : dans les secteurs générant des économies d’échelle, il faut favoriser dans grands groupes nationaux- externalités : spillovers technologiques (diffusion de l’innovation) : il faut favoriser les grandes entreprises, grands investisseurs en R&D, dont l'économie dans son ensemble bénéficie

- enjeux sociaux et politiques : délocalisations, emplois, souveraineté nationale

- deux attitudes : une attitude défensive (sauver, préserver avec aides de l’Etat), une attitude offensive (champions)

- soutenir les entreprises du pays dans leur conquête de marchés extérieurs : subventionner, forcer l’ouverture des frontières…- attirer les FMN dans son pays plutôt que de les voir partir dans un autre : souvent le cas des pays émergents et des pays ex-socialistes (ex : République Tchèque)- éviter que l'économie soit contrôlée par des entreprises étrangères ou ‘apatrides’

La tradition interventionniste en France : colbertisme, champions nationaux et patriotisme économique

- Le colbertisme : Saint-Gobain : verre, créée en 1655 par Colbert pour limiter la dépendance de la France par rapport aux glaces vénitiennes, devient une SA en 1830, fusion avec Pont-A-Mousson (spécialisée dans les canalisations, créée milieu XIXè) en 1970 encouragée par Pompidou, privatisée en 1986- Politique des champions nationaux en France dans les années 1960 : A partir des années 1960, époque où l’ouverture internationale de la France s’affirme (traité de Rome, 1957), l’intervention publique se recentre autour de deux lignes directrices :

  «   la politique des grands projets industriels et technologiques   »  : dispositif de promotion des innovations technologiques dans les secteurs liés à la défense nationale (nucléaire, aéronautique et espace, électronique et informatique (plan calcul de 1966),...) ou à la sécurité d’approvisionnement (pétrole, acier, uranium, ...). Cette politique prend appui tantôt sur de grands laboratoires de recherche publics (CEA, CNES, CNRS, ...), tantôt sur des entreprises nationalisées ou privées, dotées à cet effet de crédits et de prêts ou de commandes publiques en provenance des différents ministères concernés.

  L’accompagnement (par des mesures financières et fiscales) du mouvement de concentration d’entreprises suscité par la concurrence internationale (Thomson-Brandt dans l’électronique-domestique en 1966, Peugeot-Citroën dans la construction automobile en 1976) et son application à l’industrie nationalisée (regroupement du pétrole d’Etat : Elf-Aquitaine en 1967, ...).Participant à l’émergence de grandes entreprises, ces deux versants de l’action de l’Etat sont désignés par l’expression de "Politique des champions nationaux".- patriotisme économique (thème d’actualité en 2006)

- Rumeurs d’OPA de PepsiCo sur Danone (été 2005) 32

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=> ‘amendement Danone’ (déc 2005), dans le cadre de la loi de sécurité financière de 2003, concernant le projet de loi sur les OPA : dans 11 secteurs jugés sensibles (dont la défense et les casinos), oblige l’éventuel acquéreur à solliciter une autorisation auprès de l’AMF lorsqu’il y a lieu de penser qu’il prépare une OPA (mouvements sur le titre)=> possibilité d’émettre des bons de souscription d’action (renchérissant ainsi le coût de l’OPA pour l’éventuel acquéreur) (opposition de Bruxelles ?: non)- Une loi de 2007 fixe de plus un seuil de participation étrangère maximal de 20% dans les secteurs des médias et des télécoms (autre loi qui est aux limites de la réglementation européenne)

- OPA hostile de Mittal Steel sur Arcelor (2006)- Mittal Steel : groupe indo-néerlandais- Arcelor : né de la fusion en 2001 de trois groupes espagnols, luxembourgeois et français (Usinor)

- Usinor : créé en 1948 (prend la suite des différentes forges), nationalisé en 1981, fusion en 1986 avec Sacilor (nationalisé aussi 1981, origine famille Wendel fin XVIIIè), privatisation en 1995.

- opposition du gvt luxembourgeois (principal actionnaire d’Arcelor avec 5,6%) : participation considérée comme stratégique.- thierry Breton (ministre économie) s’est dit « préoccupé » : Arcelor emploie 94000 personnes dont un grand nombre en France.- rq : Arcelor annonce fusion (mai 2006) avec le russe Severstal- finalement, la fusion Arcelor-Mittal Steel a lieu en juillet 2006.

- Projet de fusion GDF-Suez pour contrer la menace d’OPA de l’italien Enel sur Suez (2006). Fusion finalisée en 2008.- le rapport Marini (2007) s’appuyant sur une étude Ernst & Young, souligne la place honorable de l’Europe, et en particulier de Paris, en termes de localisation des sièges sociaux parmi les 2000 plus grandes entreprises mondiales. Il remarque néanmoins la vulnérabilité de 24 grandes entreprises française qui seraient des proies faciles pour des OPA hostiles.

Le patriotisme économique n’est pas une spécificité française

L’idée d’un intérêt commun entre le pays et ses grandes entreprises dans le contexte de la compétition internationale traverse le temps et l’espace. Elle s’inscrit notamment dans les stratégies de conquête des pays leaders : en Grande-Bretagne au XIXème ou aux Etats-Unis au XXème siècle, symbolisée par la phrase célèbre de Charles Wilson4 (ancien PDG de General Motors) en 1953 : « Ce qui est bon pour l’Amérique est bon pour GM, et vice versa ! » (Rq : faillite de GM en juin 2009 = déclin des Etats-Unis ?). On la trouve également dans les stratégies de conquête des pays émergents, parfois accompagnée d’une volonté de revanche à l’égard des pays dominants (Tigres et Dragons).

4 La citation (erronée) souvent retenue est : « Ce qui est bon pour GM est bon pour le pays »

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L’attitude défensive est également présente dans la plupart des pays à certaines périodes. Les mesures limitant les prises de contrôle étrangères en dehors de France : peu compatibles avec le contexte libéral des années 1980-1990, elles sont néanmoins apparues dès la fin des années 1980 aux E-U et à partir de la fin des années 1990 un peu partout ailleurs.- L’amendement Exxon-Florio de 1988 : Le président des Etats-Unis peut mettre en échec une tentative de contrôle d’une entreprise américaine par une entreprise étrangère si cette prise de contrôle peut menacer la sécurité nationale.

La notion de sécurité nationale n’est pas définie de manière précise et peut donc faire l’objet d’une interprétation très large. L’amendement a été voté à une période où le Japon développait une politique commerciale très agressive à l’égard des Etats-Unis. L’organe chargé d’examiner les tentatives de prises de contrôle est le Cfius (Committee on Foreign Investments in the United States), créé en 1989. Il a par exemple mis en échec la tentative de prise de contrôle d’Unocal (compagnies pétrolière californienne fondée en 1890) par le pétrolier chinois CNOOC, Unocal revenant finalement à l’Américain Chevron Texaco. Le pouvoir de contrôle du Cfius a été renforcé en 2007 dans les domaines des télécommunications, de l’énergie, des transports et de la santé.

- Le Japon, pays traditionnellement très interventionniste dans ce domaine, a par exemple empêché en 2007 l’offre hostile du fonds d’investissement américain Steel Partner sur le fabricant japonais de condiments Bulldog Sauce. Qualifié d’ « acquéreur abusif », le fonds est considéré comme ayant comme objectif prioritaire « d'empocher des profits par des transactions financières et, éventuellement, par la cession des actifs de la société. ».- la Chine a mis en place en 2007 une loi prévoyant notamment la possibilité d’une enquête de sécurité nationale lors de projets d’acquisition d’entreprises chinoises par des groupes étrangers.- L’Italie et l’affaire Alitalia.- bientôt la Commission européenne ?! (golden share européenne : mécanisme qui donnerait aux autorités européennes une voix prépondérante dans les entreprises concernées)

6) LA TERTIARISATION DE L'ECONOMIE

(a) D'une secondarisation aisée à une tertiarisation complexe

A retenir : Colin Clark, J.Fourastié, Marchand et Thélot, Deux Siècle de Travail en France, rôle de la productivité et de la demande, thèse du déversement d'A.Sauvy, question des gains de productivité dans les services.

(b) Vers une société post-industrielle (c’est-à-dire désindustrialisée) ?

- oui- évolution de la structure de la population active et de la valeur ajoutée.- En valeur, la production industrielle voit sa place diminuer. Non seulement parce que la structure de la production et de la consommation

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se modifient mais aussi parce que les produits industriels deviennent moins coûteux à produire.- L’industrie elle-même se tertiairise : la place des phases de conception et de commercialisation augmente au détriment des phases de fabrication.- En Europe, seule l’Allemagne semble faire exception face à cette désindustrialisation : part de l’industrie dans le PIB = 30% (2005’s)

- non- Frontière floue entre secondaire et tertiaire : externalisation-internalisation, tertiarisation du secondaire mais aussi secondarisation du tertiaire (voir la thèse de Gershuny).- Le monde des objets n’a pas disparu : « Ils continuent de croître en ‘volume’, aux mêmes rythmes qu’avant. Les objets sont aussi encombrants que par le passé. Il faut continuer de les déplacer, de les réparer. » (Daniel Cohen, Trois Leçons sur la société post-industrielle, 2006)

A retenir : Tertiaire traditionnel et secteur quaternaire, modèle de Baumol, D.Bell, thèses post-industrielles et thèses néo-industrielles, externalisation des services, Gershuny (1978) (l'économie de self-service).

(c) Les conséquences de la tertiarisation

- Les conséquences sur la DIT- Les pays émergents ne sont plus seulement les ‘ateliers’ de l’économie mondiale. Ils prennent également part aujourd’hui aux phases de conception (R&D) des produits industriels, donc dans des secteurs à forte valeur ajoutée.

- Précisons que l’industrie porte 85% des dépenses de R&D et 80% des exportations.

- Les conséquences sur les conditions de vie en général et de travail en particulier

- Jean Fourastié voyait en 1949, la tertiarisation comme Le Grand Espoir du XXe siècle : l’homme serait enfin libéré du travail de la terre et de la matière.- Daniel Bell, The Coming of the Post-Industrial Society (1973) en assimilant société post-industrielle et société de la connaissance, portait le même jugement optimiste sur l’avenir de la société.- La réalité est moins rose :

- d’une part, les contraintes physiques imposées par la production des objets ne disparaissent pas. Philippe Askenazy, Les Désordres du travail, souligne la hausse régulière du nombre de salariés qui souffrent de douleurs physiques et se plaignent de déplacer des objets lourds (cité par Cohen) ; il souligne également la hausse des accidents du travail.- d’autre part, les souffrances psychologiques tendent à augmenter. Selon l’OCDE, entre le milieu des années 1990 et le début des

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années 2000, parmi les bénéficiaires d’allocations d’incapacité, la part des maladies mentales est passée de 17 à 28%.La pression psychologique d’une autorité sans visage que crée la logique d’une production où les contraintes sont imposées par le client et non par les dirigeant, la multiplication des responsabilités imposées à des membres de l’entreprise n’ayant pas de postes de responsables...etc., conduit à une augmentation du stress, hier réservé aux seuls dirigeants.L’illustration extrême est donnée par les suicides au travail en France chez Renault par exemple : entre octobre 2006 et février 2007, trois cas au Technocentre de Guyancourt. En cause notamment, la surcharge de travail. Travailler plus, pour vivre moins ?

III. DE LA NAISSANCE A LA CRISE DU SYNDICALISME

1) LA NAISSANCE DES SYNDICATS AU XIXème SIECLE

(a) Introduction

A retenir : Syndicats réformistes / syndicats révolutionnaires, syndicats de métier / syndicats d'industrie.

(b) Les syndicats en France

- Comité des Forges : ancêtre de l’UIMM (Union des Industries et Métiers de la Métallurgie)- Naissance du parti communiste en France (appelé Section Française de l’Internationale Communiste jusqu’à la Libération) en 1920 : issu de la scission de la SFIO.

A retenir : Loi Le Chapelier (1791), suppression du délit de coalition (1864), loi Waldeck-Rousseau (1884), première bourse du travail à Paris (1886), création de la CGT (1895), la Charte d'Amiens (1906), PCF/SFIO.

(c) Les syndicats à l'étranger

En Angleterre

1769 : loi qualifiant de felony (serious crime), passible de la peine de mort, la destruction de machines et des bâtiments les contenant.

A retenir : Les lois répressives de 1800, le 1er Trade Union Congress (TUC) en 1868, loi supprimant le délit de grève (1875), création du Parti travailliste (1906), Trade disputes Act de 1906, Trade Union Act de 1913.

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En Allemagne

A retenir : Création du SPD à Gotha en 1875, choix du réformisme, syndicats chrétiens, création de l'ADGB en 1892.

Aux Etats-Unis

A retenir : Prédominance des syndicats de métiers, création de l'AFL (1886).

2) MONTEE, STRUCTURATION-INSTITUTIONNALISATION ET CRISE DU SYNDICALISME AU XXème SIECLE

(a) Les syndicats dans les PDEM jusqu’à la fin des années 1970

La tendance au recul du poids des syndicats dans l'entre-deux-guerres

A retenir : Scission de la CGT / CGTU (1921), création de la CFTC (1919), création de la CGPF (1919), échec de nombreuses grèves (1920 en France et en Italie, 1921 et 1926 en Angleterre), rôle de la Grande Crise, remontée à la fin des années 1930 en France (montée du Front populaire, réunification de la CGT en 1936) et aux Etats-Unis (NIRA et loi de Wagner, scission AFL / CIO en 1936).

Institutionnalisation et montée des syndicats pendant les Trente glorieuses

A retenir : Coopération des trade unions avec les gouvernements travaillistes en Angleterre, taux de syndicalisation ne dépassant pas 25% aux Etats-Unis (loi Taft-Hartley de 1947), DGB (1949) et loi sur la cogestion (1951) en RFA, création de la CGC (1945), de la FEN (1945), de la FNSEA (1946), scission de la CGT / CGT-FO (1948), création de la CFDT (1964), accords de Grenelle en France.

(b) La crise du syndicalisme à partir de la fin des années 1970

Les manifestations de la crise

A retenir : Chute des taux de syndicalisation, abstentions et montée des listes non syndicales aux élections professionnelle, développement des coordinations.

Eléments d'explication

A retenir : Rôle indirect du chômage, tertiairisation de l'économie, développement des emplois atypiques, montée de

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l'individualisme (analyse de Mancur Olson, La Logique de l'action collective (1966)), l'inertie des syndicats.

Effets et limites de la crise

- Selon une loi de 1950, révisée en 1966, cinq organisations syndicales disposent une présomption irréfragable : elles n’ont pas à faire la preuve de leur représentativité. Il s’agit de la CGT, FO, la CFTC, la CFDT et la CGC.Cette présomption irréfragable est amenée à disparaître en 2013 selon la loi sur la représentativité syndicale de 2008 : le ‘haut conseil sur le dialogue social’ (créé par la loi) a pour vocation à faire des propositions sur la liste des syndicats représentatifs.- Loi sur la représentativité syndicale en France (2008)

- dans l’entreprise, les syndicats représentatifs sont ceux ayant obtenus au moins 10% des voix au premier tour dans les élections au "comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou à défaut des délégués du personnel". Les syndicats pouvant se présenter au premier tour sont les 5 confédérations bénéficiant de la présomption irréfragable et les syndicats constitués "depuis au moins deux ans couvrant le champ professionnel et géographique de l'entreprise concernée".- dans la branche, les syndicats représentatifs sont ceux ayant obtenu au moins 8% des voix dans les élections des entreprises de la branche.- au niveau interprofessionnel, les syndicats représentatifs sont ceux ayant obtenu au moins 8% des voix au niveau national.

A retenir : Syndicat en tant que mouvement social et en tant qu'agence sociale (P. Rosanvallon, La Question syndicale (1988)), syndicat comme vecteur d'information (R. Freeman et J. Medoff, What do Unions do   ?  (1984)).

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