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1 \Chapitre 5 - LA NEIGE 5.1 Modèles d’estimation des précipitations solides 5.1.1 Modèles d’estimation aux stations 5.1.2 Modèles d’estimation de la distribution spatiale 5.2 Estimation de l’évolution du couvert nival 5.2.1 Estimation sur stations 5.2.2 Estimation à l’échelle du bassin versant 5.3 Modèles spatio-temporels de diverses caractéristiques du couvert nival 5.3.1 Processus physiques à l’origine des variations 5.3.2 Epaisseur, équivalent en eau et densité du couvert 5.3.3 Albédo du couvert 5.3.4 Caractérisation thermique du couvert 5.3.5 Eau liquide dans le stock de neige 5.4 Modèles d’estimation de la fonte de neige 5.4.1 Bilan énergétique du stock de neige 5.4.2 Méthode des degrés-jours 5.5 Exemples de modèles de fonte de neige 5.5.1 Modèle de fonte de neige basé sur le bilan énergétique 5.5.2 Modèle de fonte de neige basé sur la méthode des degrés-jours Bibliographie Dans plusieurs pays, la température descend en-dessous du point de congélation (0°C) et s'y maintient de quelques jours à plusieurs mois. La précipitation tombe alors sous forme de neige et s'accumule au sol. Ce n'est que lors d'une période subséquente de dégel, en hiver ou au printemps, que la neige fond, libérant rapidement un volume d'eau souvent considérable, susceptible de produire des crues et des inondations importantes. Le pourcentage de la précipitation annuelle tombant sous forme de neige en un lieu donné varie selon la latitude et l'altitude, passant de zéro à presque 100%. Au Québec, ce pourcentage varie de 20%, dans la région de Montréal (45°N), à plus de 55% dans le Nord (62°N). Dans plusieurs parties du monde, l'écoulement annuel provient dans une proportion importante de la fonte de la neige, L'accumulation de la neige au sol et sur les structures revêt par ailleurs une importance considérable dans nombre d'activités humaines, comme la localisation et le dessin des routes, la construction des édifices, les transports, les sports d'hiver, l'agriculture, pour ne nommer que celles-1à. La construction d'ouvrages de régularisation des débits en rivière et de réservoirs servant à la production hydroélectrique doit aussi tenir compte des apports saisonniers provenant de la fonte de la neige.

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\Chapitre 5 - LA NEIGE

5.1 Modèles d’estimation des précipitations solides

5.1.1 Modèles d’estimation aux stations

5.1.2 Modèles d’estimation de la distribution spatiale

5.2 Estimation de l’évolution du couvert nival

5.2.1 Estimation sur stations

5.2.2 Estimation à l’échelle du bassin versant

5.3 Modèles spatio-temporels de diverses caractéristiques du couvert nival

5.3.1 Processus physiques à l’origine des variations

5.3.2 Epaisseur, équivalent en eau et densité du couvert

5.3.3 Albédo du couvert

5.3.4 Caractérisation thermique du couvert

5.3.5 Eau liquide dans le stock de neige

5.4 Modèles d’estimation de la fonte de neige

5.4.1 Bilan énergétique du stock de neige

5.4.2 Méthode des degrés-jours

5.5 Exemples de modèles de fonte de neige

5.5.1 Modèle de fonte de neige basé sur le bilan énergétique

5.5.2 Modèle de fonte de neige basé sur la méthode des degrés-jours

Bibliographie

Dans plusieurs pays, la température descend en-dessous du point de congélation (0°C)

et s'y maintient de quelques jours à plusieurs mois. La précipitation tombe alors sous forme de

neige et s'accumule au sol. Ce n'est que lors d'une période subséquente de dégel, en hiver ou

au printemps, que la neige fond, libérant rapidement un volume d'eau souvent considérable,

susceptible de produire des crues et des inondations importantes.

Le pourcentage de la précipitation annuelle tombant sous forme de neige en un lieu

donné varie selon la latitude et l'altitude, passant de zéro à presque 100%. Au Québec, ce

pourcentage varie de 20%, dans la région de Montréal (45°N), à plus de 55% dans le Nord

(62°N). Dans plusieurs parties du monde, l'écoulement annuel provient dans une proportion

importante de la fonte de la neige,

L'accumulation de la neige au sol et sur les structures revêt par ailleurs une importance

considérable dans nombre d'activités humaines, comme la localisation et le dessin des routes,

la construction des édifices, les transports, les sports d'hiver, l'agriculture, pour ne nommer

que celles-1à. La construction d'ouvrages de régularisation des débits en rivière et de

réservoirs servant à la production hydroélectrique doit aussi tenir compte des apports

saisonniers provenant de la fonte de la neige.

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Enfin, l'estimation de l'épaisseur de neige sur un bassin versant et la connaissance du

processus de fonte du couvert nival sont essentielles à la préparation de prévisions

d'écoulements pour la régularisation des rivières et la protection contre les inondations. La

détermination des crues maximales probables dues à la fonte de la neige requiert aussi l'étude

de la neige.

5.1 Modèles d'estimation des précipitations solides

5.1.1 Modèles d'estimation aux stations

Selon les appareils choisis pour le réseau d'observation, ce sont les hauteurs de neige

laissées au sol par chaque chute de neige qui sont mesurées ou leur équivalent en eau, c'est-à-

dire la hauteur d'eau équivalente que 1'on obtiendrait en faisant fondre cette neige.

• Estimation des hauteurs de neige

Bon nombre d'applications requièrent la connaissance de l'épaisseur des chutes de

neige. C'est particulièrement vrai pour les transports, la voirie et les sports d'hiver. Au Canada

on se sert d'une table à neige pour effectuer ces mesures. Il s'agit essentiellement d'une

planchette de 30 cm de côté et de 2,5 cm d'épaisseur, au centre de laquelle est fixée une tige

de fer de 30 cm de hauteur. Après chaque mesure consécutive à une chute de neige, la

planchette est enfoncée dans la neige de manière à ce que sa surface supérieure soit au même

niveau que la surface de la neige qui l'entoure, Il ne reste plus alors qu'à mesurer l'épaisseur

de la chute de neige suivante en enfonçant une règle dans la neige jusqu'à la planchette.

Comme pour beaucoup d'autres mesures environnementales, 1e choix du site est très

important pour assurer la représentativité des mesures. De plus, il serait souhaitable, afin de

diminuer les erreurs d'estimation, de pouvoir disposer de plusieurs tables à neige au même site,

le vent pouvant affecter grandement la distribution spatiale de la neige au sol en un site donné.

En pratique, il n'y a pas, en effet, de site idéal [Goodison et McKay, 1978].

• Estimation de l'équivalent en eau

Comme dans le cas des précipitations liquides, il n'existe pas de capteur standard

reconnu et utilisé dans tous les pays, pour la mesure de l'équivalent en eau des précipitations

solides. Plusieurs types différents d'appareils peuvent même être utilisés dans un même pays.

Le vent joue, par ailleurs, un rôle important en ce qui a trait à l'efficacité d'un capteur, ou si

l'on veut, à la précision de la mesure par rapport à la "valeur vraie". Comme le montre la

figure 5.1, les capteurs ont généralement tendance à sous-estimer la valeur vraie de

l'équivalent en eau. Ainsi, avec un vent de 5 m sec-1, un capteur « Fisher and Porter » doté

d’un écran Alter ne mesure plus que 40% de ce qu'il aurait mesuré avec un vent nul. Un

capteur MSC équipé d'un écran Nipher a, au contraire, une très bonne réponse. Il est donc

nécessaire, si un site permettant de réduire considérablement l'effet du vent ne peut être choisi,

de corriger les mesures obtenues à l'aide d'un capteur particulier afin d'obtenir la "valeur-

vraie" de la chute de neige.

Avant de développer ou d'utiliser un modèle d'évolution et de fonte du couvert nival, il

importe donc d'être conscient des méthodes de mesure, du type de capteur utilisé avec ou sans

écran et de la représentativité du site. Ce n'est qu'avec ces connaissances que l'on peut juger

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de façon rationnelle de la précision des données et décider si les mesures doivent être

corrigées préalablement à leur utilisation dans une analyse spatiale ou des simulations

hydrologiques [Goodison, 1981].

• Conversion de l'épaisseur d'une chute de neige en équivalent en eau

Aux stations où l'on mesure l'épaisseur hn des chutes de neige et l'équivalent en eau En

correspondant, il est possible de déterminer une troisième variable caractéristique d'une chute

de neige, sa densité ρ :

En = ρi Hn (5.1)

Si En et hn sont exprimés dans les mêmes unités de hauteur, mm ou cm, la densité pi

correspondante peut s' exprimer alors de façon relative comme étant le rapport entre

l'équivalent en eau et l'épaisseur correspondante d'une chute de neige, On peut aussi exprimer

la densité en kg m-3. Un grand nombre de mesures prises à travers le monde indique qu'en

moyenne, la neige fraîche a une densité de 0,1 ou de l00 kg m-3. L'erreur engendrée sur une

base saisonnière en considérant une telle densité est généralement faible, mais il n'en est pas

de même au niveau de chutes de neige individuelles, la densité pouvant varier de moins de

0,05 à plus de 0,20 en fonction de diverses variables météorologiques, particulièrement la

température et le vent. La figure 5.2 présente les courbes obtenues par divers auteurs. Il est

important de rappeler que ces courbes représentent des valeurs moyennes autour desquelles il

existe une certaine dispersion des points expérimentaux.

• Estimation de la forme de précipitation

De plus en plus de capteurs étant installés à des sites éloignés d'où les mesures sont

transmises en temps réel par satellite, il importe de savoir si la précipitation est tombée sous

forme solide ou liquide. Cette connaissance est particulièrement importante dans le cadre de

prévisions hydrologiques en temps réel. Considérer comme neige une précipitation qui est

effectivement tombée sous forme de pluie, conduit à ne pas prévoir une crue qui peut s'avérer

importante, selon la quantité de pluie tombée. Inversement, on peut prévoir une crue

importante, alors que la précipitation est entièrement tombée sous forme de neige, n'affectant

pas les débits dans l'immédiat.

Si l'on connait la température de l'air au moment de la précipitation, on peut

déterminer la forme de précipitation en comparant la température observée à un seuil de

température défini expérimentalement et ordinairement près de 0°C. Toute précipitation se

produisant à une température supérieure à ce seuil peut être considérée comme liquide. Dans

le cas contraire, elle est solide. La température de l'air au niveau de l'abri météorologique n'est

cependant pas le seul facteur en cause, de sorte qu'il existe une certaine distribution des

événements de part et d'autre du seuil.

A certains stations, il peut arriver que seules les températures maximales Tx et

minimales Tn de l'air soient disponibles pour déterminer la forme de précipitation. Différents

schémas de décision ont été proposés [U.S. Corps of Engineers, 1956; Bergstöm, 1975;

Anderson, 1973; Martinec et al, 1983] mais aucun n'est infaillible. A titre d'exemple, Leaf et

Brink [1973] considèrent que la précipitation P tombe sous forme de neige si Tn < 0°C ou si

Tx < 1,67°C. C'est la pluie si Tn > 1,67°C et un mélange de pluie et de neige si 0°C < Tn <

1,67°C et Tx >1,67°C. Le pourcentage de neige est alors donné par :

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𝑃𝑛 = 𝑃 (1 −𝑇𝑥 − 1,67

𝑇𝑥 − 𝑇𝑛) (5.2)

Le choix du schéma approprié devrait toutefois se faire à partir d'une étude particulière

des données disponibles pour le bassin étudié.

5.1.2 Modèles d'estimation de la distribution spatiale

La distribution spatiale des précipitations solides et leur valeur moyenne sur un bassin

donné peuvent être obtenues à l'aide des modèles d'interpolation des hauteurs précipitées entre

les points de mesure déjà décrits en 3.2.1. Compte tenu des conditions météorologiques à

l'origine des précipitations solides, ces dernières présentent une variation spatiale plus

continue que les précipitations liquides, ce qui facilite l'application de méthodes

d'interpolation. En termes statistiques, ceci s'exprime par des distances de décorrélation

beaucoup plus grandes que celles correspondant aux pluies d'été. Par ail1eurs, comme on 1'a

vu en 5.1.1 la représentativité des mesures aux stations peut s'avérer très faible, s'il est

impossible de trouver un site approprié.

De plus, le problème posé par la détermination de la forme de la précipitation aux

stations se transpose au niveau de l'interpolation. Il peut pleuvoir dans le bas du bassin et

neiger dans le haut, au cours du même événement de précipitation. Ainsi, si les mesures prises

aux stations sont interpolées afin de déterminer la variation des précipitations sur un bassin

versant selon un réseau de mailles carrées, par exemple, il est nécessaire de réaliser en même

temps une interpolation des températures observées aux stations, couplée à un ajustement des

températures interpolées selon les altitudes des mailles considérées [Morin et_al., 1981] et des

stations utilisées.

5.2 Estimation de l'évolution du couvert nival

Dès le début de son accumulation au so1, la neige commence un processus de

transformation qui ne se terminera qu'avec sa disparition. La couche de neige laissée au sol

par la dernière tempête peut d'abord être redistribuée par le vent, particulièrement dans les

parties d'un bassin ouvertes à tout vent. En même temps, par son propre poids, l'action du vent

et les apports énergétiques, la neige se tasse, sa densité augmente et se structure change.

5.2.1 Estimation aux stations

A une station nivométrique donnée, l'évolution du couvert nival est suivie grâce à un

échantillonnage systématique dans l'espace et dans le temps. L'échantillonnage se fait dans

l'espace, c'est-a-dire que des "carottes", permettant de déterminer l'épaisseur, l'équivalent en

eau et la densité moyens du couvert à la station, sont prélevées régulièrement en 10 points, le

long d'une ligne dont la longueur totale est de 300 mètres. Le parcours doit être choisi de

façon à être le plus représentatif possible du type d'occupation du sol (forêt, prairie, ,,.) pour

lequel on veut suivre l'évolution du couvert nival, Des parcours plus courts comportant moins

de points sont aussi utilisés.

Quant à la variation du couvert nival dans le temps, elle est suivie en prenant des

relevés nivométriques selon les intervalles de temps d'une semaine à un mois. On observe

d'abord une période d'accumulation (figure 5.3) au cours de laquelle l'épaisseur et la densité

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du couvert augmentent, suivie d'une période plus courte de fonte conduisant à la disparition

complète du couvert nival. Le couvert atteint souvent à ce moment des densités relatives

supérieures à 10%.

Dans les meilleures conditions de mesure des précipitations et du couvert nival, ces

données sont compatibles et assurent la qualité des données nécessaires à un modèle

hydrologique [Goodison, 1981]. Cependant, ce n'est pas toujours le cas, et tant les mesures de

précipitation que les relevés nivométriques doivent être analysés afin de déceler les anomalies

possibles dues à des erreurs de mesure ou à un manque de représentativité systématique ou

occasionnel [Fortin et al.; 1 983].

Outre les relevés nivométniques effectués par échantillonnage, des mesures effectuées

à l'aide de nivomètres radioactifs [Chow, 1961; Obled et Rossé, 1977] permettent d'obtenir

l'équivalent en eau du stock de neige en un point, La mesure est basée sur l'absorption par le

couvert nival du rayonnement gamma provenant d'une source radioactive. La source est alors

enterrée immédiatement sous le couvert et le capteur est placé au-dessus de ce dernier.

Un type de nivomètre légèrement différent permet d'établir des profils de l'équivalent

en eau du couvert de neige [Gosselin, 1971]. Dans ce cas, la source et le capteur se déplacent

simultanément sur la verticale à l'aide d'un système approprié. Les mesures obtenues à l'aide

de ces appareils sont précises (moins de 5%), mais ponctuelles et coûteuses, sans compter les

problèmes de protection environnementale causés par la présence d'une source radioactive.

5.2.2 Estimation à l'échelle du bassin versant

Pondération des relevés nivométriques

Si la valeur moyenne de l'épaisseur, de l'équivalent en eau ou de la densité du couvert

nival sur un bassin est désirée les méthodes d'interpolation décrites au chapitre 3 ne peuvent

s'appliquer, puisqu'elles supposent des variations continues du couvert nival. Les différentes

types d'occupation du territoire provoquent par ailleurs des discontinuités aux limites dues à

leur action différentielle sur le mûrissement et la fonte du couvert. Goodison [19811 suggère

par conséquent d'estimer d'abord les pourcentages de la surface totale d'un bassin donné

correspondant à chaque classe d'occupation du territoire et d'affecter des poids correspondants

à ces pourcentages à des relevés nivométriques pris en des sites représentatifs de chacune de

ces classes, de façon à obtenir la valeur moyenne pondérée du couvert nival pour le bassin

considéré. La précision obtenue varie selon la représentativité effective des classes et des sites

d'échantillonnage choisis.

Observations par avion

La caractéristique du couvert nival la plus communément obtenue par avion est sa

répartition spatiale sur un bassin donné, fournie à l’aide d’observations visuelles ou

photographiques. En haute montagne, la connaissance de l'altitude de la limite inférieure du

couvert nival couplé à une carte topographique permet de tracer rapidement les contours du

couvert, celui-ci étant très tributaire de l'altitude. Ni l'épaisseur, ni l'équivalent en eau du stock

ne sont alors déterminés, mais uniquement la présence ou l'absence de neige, Ce

renseignement est néanmoins très important puisqu'il permet de connaître quelle proportion

du bassin contribue à la fonte. Cette information est utilisée dans les modèles soit en

conservant toute l'information sur la distribution spatia1e du stock de neige [Fortin et al.,

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1983] soit en ne retenant que 1e pourcentage du bassin encore couvert de neige [U.S. Army,

1972; Martinec et al., 1983].

Lorsque les bassins sont très peu accidentés, comme dans le Mid-West américain et

les prairies canadiennes, il est aussi possible de déterminer l'équivalent en eau du couvert de

neige en utilisant le rayonnement gamma d'origine naturelle. Les mesures sont effectuées à

bord d'avions volant à très basse altitude, soit environ mètres au dessus du sol. Un réseau de

300 lignes de vol, longues de 15 à 20 km et larges de 300 m chacune a même été établi dans

le Mid-West américain par le National Weather Service et permet d'obtenir l'équivalent en eau

du couvert nival sur une base opérationnelle [Carroll et Jones, 1982 ; Carroll et Larson, 1981].

L'équivalent en eau du couvert est obtenu à partir de son effet atténuateur sur le rayonnement

naturel mesuré au même endroit avant la première chute de neige [Carroll et Vadnais, 1980].

Les mêmes auteurs discutent aussi des erreurs associées à ces mesures. Ils considèrent que

cette technique permet d'estimer l'équivalent en eau du couvert avec une précision meilleure

que 1 cm.

Observations par satellite

Depuis la mise sur orbites polaires ou géostationnaires de nombreux satellites

météorologiques (NOAA, TIROS, GOES, METEOSAT, NIMBUS, … ) et des satellites de la

série LANDSAT, l'observation du couvert nival sur une base routinière est devenue une

réalité.

Ainsi, la répartition spatiale du couvert nival peut actuellement (en 1984) être

cartographiée avec une résolution variant de 80 m (LANDSAT) à 1 ou quelques kilomètres

(NOAA, GOES, MERTEOSAT) par des capteurs opérant dans le visible, grâce à la différence

marquée d'albédo entre la neige et les surfaces sans neige [Bowleye et al., 1981 ; Lillesand et

al., 1982; Tarpley et al., 1980]. En 1984, cette résolution a été portée à 30 m (LANDSAT 5)

puis à 10 m (SPOT) en 1985. Les principaux facteurs qui peuvent affecter la précision des

estimés, sont les nuages, les forêts, les roches nues et les ombres projetées par les montagnes.

Des précisions supplémentaires sur le couvert nival peuvent être apportées par

l'utilisation d'autres bandes spectrales. Ainsi, lorsqu'elles sont comparées aux images de la

même scène prises dans le visible, les images provenant de capteurs fonctionnant dans le

proche infrarouge (0,8 à 1,3 μm) permettent de distinguer les nuages de la neige et de

déterminer les parties d'un bassin ou la neige est sèche et froide et celles où elle est mûre, le

mûrissement du couvert étant accompagné d'une baisse d'albédo [Bowley et al., 1981].

Il est aussi possible, en tenant compte des effets de l'atmosphère d'estimer la

température de surface de la neige et ce grâce à des capteurs dans l'infrarouge thermique (10,5

à 12,0 μm) [Bowley, 1981].

Dans le visible et l'infrarouge il n'est généralement pas possible de déterminer d' autres

caractéristiques du couvert nival que celles qui sont énoncées plus haut. Des relations

quantitatives approximatives entre des images du stock de neige prises dans le visible et

l'épaisseur du couvert sont toutefois rapportées par McGinnis et al. [1975] et Lillesand et al.

[1981].

L'équivalent en eau du couvert, donnée très importante en hydrologie, ne peut être

déterminée que par des capteurs opérant dans les micro-ondes et dont la résolution spatiale est

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beaucoup plus faible que celle des capteurs dans le visible ou l'infrarouge [Bowley et a1.,

1981; Rango et al., 1979; Rango, 1980]. Cette résolution est en effet de l'ordre de 20 à 30 km.

Il est prévu d'améliorer cette résolution par la mise su orbite de radars météorologiques.

En résumé, de toutes les caractéristiques du couvert nival potentiellement accessibles à

des mesures par télédétection, seule sa répartition spatiale et dans un certaine mesure sa

température de surface sont estimées sur une base opérationnelle. Par ailleurs, selon Warren

[1982] qui présente une revue des propriétés optiques de la neige, la détection sans ambiguïté

des caractéristiques individuelles du stock de neige par satellite nécessite l’acquisition

simultanée de données dans plusieurs longueurs d'ondes. Il rejoint en cela la tendance actuel

le qui vise à diminuer l'incertitude reliée à l'identification exacte d'une surface donnée grâce à

sa signature spectrale en augmentant le nombre d'informations spectrales spatiales ou

temporelles.

5.3 Modè1es de variation temporelle et spatia1e de diverses caractéristiques du couvert

nival

5.3.1 Processus physiques à l'origine des variations

Comme le sol sous-jacent, le couvert nival est un milieu auquel il est en principe

possib1e d'appliquer la théorie complexe des écoulements de masse et de 1a diffusion de la

chaleur en milieu poreux. Toutefois, ce milieu est particulièrement complexe puisqu’il se

modifie au cours du temps. Au début de la saison hivernale, des cristaux délicats à des

températures inférieures au point de congélation composent une structure légère de faible

densité et sèche. Au cours de l'hiver, cette structure se transforme graduellement : elle devient

plus rigide, plus dense, granulaire et peut contenir éventuellement de l'eau sous forme liquide

Pendant ce temps, la température du couvert varie en fonction des gains et des pertes

d'énergie.

D'après le U.S. Corps of Engineers [1960], ces changements sont dus à plusieurs

processus physiques dont :

(1) les échanges de chaleur à la surface de la neige,

(2) la percolation d'eau de fonte ou de pluie dans le couvert nival,

(3) la pression interne due au poids de la neige,

(4) le vent,

(5) les variations de température et de tension de vapeur à l'intérieur du couvert et

(6) les échanges de chaleur à l'interface sol-neige.

Développer un modèle capable de simuler la transformation spatio-temporelle du

couvert nival dans tous ses détails serait très complexe, aussi les modèles présentés dans la

littérature sont généralement semi-empiriques. Ils permettent plutôt d'estimer la variation

spatio-temporelle approximative de certaines des variables caractérisant le couvert. Par

ailleurs, la quantité et la précision de données physiographiques, météorologiques et

hydrologiques qui seraient nécessaires pour que les modèles les plus complexes fournissent

des simulations bien supérieures à celles de modèles plus simples, limitent considérablement

l'utilisation de tels modèles. Divers éléments de modèles semi-empiriques seront d'abord

présentés dans les sections 5.3 et 5.4. L'intégration de ces éléments dans des modèles

complets de fonte de neige suivra à la section 5.5.

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5.3.2 Epaisseur, équivalent en eau et densité du couvert

Au cours de la saison hivernale, des chutes de neige successives, parfois entrecoupées

de pluie ou de verglas, s'accumulent au sol, formant un couvert stratifié dont les couches ont

des densités différentes, les plus denses étant les plus anciennes. Il est possible d'estimer la

densité moyenne ρ (t) du couvert au temps t à l'aide de l'équation 5.1, si l'on connaît son

équivalent en eau En (t) et son épaisseur hn (t). Ces deux quantités n'étant généralement

mesurées ni au pas de temps désiré ni avec un réseau suffisamment dense, on peut modéliser

la variation de En (t) et hn (t) tout en contrôlant périodiquement les valeurs estimées à partir

des données disponibles. L'équivalent en eau En (t) du couvert peut être obtenu en suivant

l'évolution du bilan de masse du couvert nival :

𝐸𝑛(𝑇) = 𝐸𝑛(0) + ∫ (𝑃 − 𝐷 − 𝐸)𝑡

0

𝑑𝑡 (5.3)

En (0) est l'équivalent en eau du couvert nival au début de la période considérée

(normalement nulle au début de la saison hivernale ;

P, D et E sont respectivement les précipitations solides ou liquides, le drainage d'eau

de fonte ou de pluie hors du couvert et l'évaporation cumulée entre le temps 0 et le temps t.

Quant à l’épaisseur hn (t) du couvert nival au même temps t, elle augmente avec les

précipitations P de densité initiale ρi et décroît en fonction du drainage D, de l'évaporation E

et du tassement du couvert. D'après les mesures effectuées par le U.S. Corps of Engineers

[1956l le taux de tassement du couvert nival est fonction de la différence entre la densité ρ (t)

du couvert en un temps donné et la densité maximale ρxqui peut être généralement observée.

Cette densité oscillerait entre 15 et 60 % d'après la même source. En se basant sur cette

hypothèse et en définissant une constante k de tassement en fonction du temps, Riley et al.,

[1972] ont développé une équation permettant de suivre la variation de l'épaisseur de neige.

Ils expriment le tassement en fonction de l'épaisseur de neige [hn (t-1) - En (t -1)] / ρx ] de

densité ρ (t - 1) encore sujette au tassement parce que le couvert n'a pas encore atteint la

densité maximale ρx. Cette équation apparaît ici sous une forme légèrement modifiée pour ten

ir compte de la fonte et de l'évaporation :

ℎ𝑛(𝑡) = ℎ𝑛(𝑡 − 1) + ∫𝜌

𝜌𝑖

𝑡

𝑡−1

𝑑𝑡 − ∫(𝐷 + 𝐸)

𝜌(𝑡 − 1)

𝑡

𝑡−1

𝑑𝑡 − 𝑘 [ℎ𝑛(𝑡 − 1) −𝐸𝑛(𝑡 − 1)

𝜌𝑥] (5.4)

Un exemple de modélisation de l'épaisseur du couvert nival à l'aide de l'équation 5.4

dans le cas où la fonte et l'évaporation sont nulles (équation de Riley et al., [1972]) est

présentée à la figure 5.4. La valeur de k est égale à 0,1.

5.3.3 Albédo du couvert

Une fraction très importante du rayonnement solaire incident est réfléchie à la surface

de la neige. C'est ce qu'on appelle l'albédo "a" d'une surface, c'est-à-dire le rapport entre

l'énergie réfléchie et l'énergie incidente. O'Neill et Gray [19721 considèrent l'albédo comme

un paramètre extrêmement important. Selon eux, il est probable que le succès d'une approche

basée sur le bilan énergétique d'un couvert de neige pour estimer la fonte de neige sur un

bassin va dépendre, dans une large mesure, de la précision avec laquelle l'albédo pourra être

évalué. Variable en fonction de la longueur d'onde (figure 5.5), l 'albédo l'est aussi dans le

temps (figure 5.6) et l'espace (figure 5.7) en fonction de l'âge de la neige, de son contenu en

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eau, de son épaisseur, de la grosseur de ses grains et de son degré de contamination par des

matières étrangères et de 1'angle d'incidence du rayonnement solaire.

L'intérêt de recourir à des mesures par satellite dans le visible et l'infrarouge, couplées

à un modèle d'évolution spatiale et / ou temporelle de l'albédo apparait évident. Effectivement,

un modèle de variation spectrale de l'albédo [Wiscombe et Warren, 1980 ; Warren et

Wiscombe, 1980] démontre que l'albédo dans le visible est sensible à l'équivalent en eau du

couvert et à la contamination par les aérosols, alors que l'albédo dans le proche-infrarouge est

sensible à la grosseur des grains et relativement insensible aux autres variables. Notant qu'il

est donc potentiellement possible d'estimer l'équivalent en eau du couvert et la grosseur des

grains à partir des données radiométriques acquises par satellite, Dozier et al., [1981]

considèrent que ces résultats demeureront ambigus puisqu'une épaisseur finie des effets

similaires à la contamination par aérosols.

Différents modèles visant à estimer la variation de l'albédo en fonction du temps, de la

densité ou de la grosseur des grains ont été proposés dans la littérature. Riley et al. [1972]

proposent un modèle de variation de l'albédo "a" en fonction du temps t, dans le cas du

rayonnement de courte longueur d'onde :

𝐴(𝑡) = 𝐶(1 − 𝑒−𝐵𝑡) (5.5)

Selon eux leur modèle est applicable pour des albédos compris entre 0,8 pour la neige

fraiche et 0,4 pour la neige fondante en fin de saison. Les constantes C et B. prennent

respectivement des valeurs de 0,4 et 0,2 en période de fonte. Plus tôt dans la saison, la

constante doit être plus faible, se1on la figure 5.6a. Cependant la loi de décroissance

exponentielle est plus approximative. De plus, les mesures rapportées par O'Neill et Grey

[1972], présentées à la figure 5.6b pour un couvert de neige dans les prairies canadiennes,

montrent que la variation de l'albédo ne suit pas nécessairement une loi exponentielle, de sorte

qu'une décision judicieuse doit être prise avant d'extrapoler une relation albédo-temps

déterminée pour une certaine région physiographique (les montagnes dans le cas des courbes

du U.S. Corps of Engineers) à une autre région dont la physiographie est très différente.

Une relation entre l'albédo et la densité de la neige est présentée par Anderson [1972]

à la figure 5.8. Il s'agit encore une fois d'albédo dans les courtes longueurs d'ondes. L’auteur

ne propose toutefois pas de relation mathématique. Warren [1982] et Dozier et al. [1981]

considèrent qu'en fait la relation entre l'albédo et la densité pourrait être en réalité une relation

entre l'albédo et la grosseur des grains, puisque la densité augmente généralement avec la

grosseur des grains.

5.3.4 Caractéristiques thermiques du couvert

Pour que le manteau nival fonde, il faut que sa température s'élève d'abord jusqu'à 0°C.

Ce n'est qu'à ce moment que tout apport énergétique supplémentaire pourra servir à la fusion

du stock de neige. Ce transfert vers l'intérieur du stock de neige de la chaleur absorbée dans la

couche superficielle peut se faire par conduction dans le réseau de grains et de ponts de glace,

conduction dans les espaces d'air et les pores, convection et radiation dans les pores

(probablement négligeable) et par la diffusion de la vapeur d'eau à travers les espaces vides

[Mellor, 1977]. En outre, ce transfert peut s'opérer par percolation à travers le stock, de l'eau

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liquide provenant de la pluie ou de la fonte de la neige en surface [Raudkivi, 1979 ]. Tant la

quantité de chaleur requise pour réchauffer et fondre le stock que le taux de diffusion de cette

chaleur, dépendent de la chaleur spécifique Cn de la neige, de sa conductivité thermique

effective Ke et de sa diffusivité thermique effective αe. Par ailleurs, en raison de 1a faible

conductivité thermique du manteau nival, l'effet d'une augmentation de la température à sa

surface diminue très rapidement avec la profondeur, de sorte que l'eau de fonte ou de pluie

peut regeler dans les couches inférieures demeurées sous le point de congélation, réchauffant

ces couches grâce à l'énergie libérée par le changement de phase. Ces processus influencent la

conductivité et la diffusivité de la neige et modifient en particulier sa structure, sa porosité et

son contenu en eau. Mais, en plus d'avoir des propriétés physiques et thermiques qui changent

continuellement avec les conditions météorologiques, la neige est une substance cristalline

anisotropique. Il s'en suit que les calculs théoriques décrivant l'écoulement de la chaleur dans

cette substance sont beaucoup plus compliqués que ceux qui sont requis pour des solides

isotropiques dont les propriétés ne changent pas.

C'est la raison pour laquelle la conductivité thermique de la neige est généralement

considérée comme une conductivité effective Ke, représentant tous les processus de transfert

de chaleur [Mellor, 1977]. La variation de cette conductivité effective en fonction de la

densité a été étudiée par plusieurs auteurs (figure 5.9). De Guervain [1972] explique que,

puisque la densité ne définit pas complètement la structure de la neige, une certaine

distribution (de l'ordre de ± 50 %) des mesures de conductivité pour des densités identiques

n'est pas surprenante. Le tableau 5.1 contient les valeurs moyennes de la conductivité

thermique en fonction de la densité de la neige d'après le U.S. Corps of Engineers [1956 ].

Les valeurs qui y sont présentées sont compatibles avec celles de la figure 5.9. Divers auteurs

ont proposé des relations empiriques entre la conductivité thermique effective Ke et la densité

de la neige. A titre d'exemple, Mellor [1961] suggère :

𝐾𝑒 = 𝑎 𝜌2 (5.6)

Quant à la diffusivité effective αe, elle est liée à la conductivité effective Ke par

l'équation suivante :

𝛼𝑒 =𝐾𝑒

𝜌 𝐶𝑛 (5.7)

où ρ est la densité de la neige et Cn sa chaleur spécifique.

En ne retenant que la conduction dans les solides et la diffusion de la vapeur d'eau, qui

peut représenter jusqu'à 30% des échanges de chaleur selon De Quervain [1972], l'équation de

la diffusion verticale de la chaleur dans un vaste champ de neige peut s'écrire [Yen, 1967] :

𝜌𝐶𝑛

𝜕𝑇

𝜕𝑡+ 𝐿𝑛

𝜕𝐶𝑒

𝜕𝑡=

𝜕𝑘

𝜕𝑧

𝜕𝑇

𝜕𝑧+ 𝑘

𝜕2𝑇

𝜕𝑧2+ 𝐷𝑒𝐿𝑛

𝜕2𝐶𝑒

𝜕𝑧2 (5.8)

Ce est la concentration de la vapeur d’eau

De le coefficient de diffusion de la vapeur d’eau

k la conductivité thermique de la neige (strictement la conduction pour les

solides)

Ln la chaleur de sublimation

T la température de la neige

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D'après Obled et Rossé [1977], dans le cas de la neige fraîche (ρ = 1000 kg m-3) la

diffusivité thermique effective (incluant tous les phénomènes) est trois fois plus élevée que

lorsque la diffusion de vapeur est absente. Par ailleurs, pour de la "vieille" neige (ρ = 450 kg

m-3), l'influence de la vapeur diminue et la conductivité thermique est relativement constante

sur la verticale. Le phénomène est alors, en pratique, réduit au phénomène classique de la

conduction de la chaleur dans les solides. L'équation 5.8 se réduit alors à l'équation bien

connue de Fourier :

𝜕𝑇

𝜕𝑡= 𝛼𝑒

𝜕2𝑇

𝜕𝑧2 (5.9)

En pratique, αe s'obtient de Ke par l'équation 5.7.

Des solutions analytiques ou numériques (en prenant des pas de temps et d'espace

permettant d'assurer la stabilité de la solution) de l'équation 5.9 en fonction de conditions

initiales variées sont présentées dans la plupart des livres portant sur la chaleur, par exemple

Carslaw et Jaeger [1959] et Crank [1961]. Ainsi, dans le cas particulier où le stock de neige

est initialement à une température constante Ti (= 0°C) et qu'à partir du temps t = 0 sa

température de surface passe de Ti à Ts et est par la suite maintenue constante à Ts, l'équation

5.9 peut avoir comme solution :

𝑇(𝑧, 𝑡) − 𝑇𝑠

𝑇𝑖−𝑇𝑠= 𝑒𝑟𝑓 [

𝑧

2/𝛼𝑒𝑡] (5.10)

ou erf est la fonction d'erreur définie par :

𝑒𝑟𝑓(𝑥) =𝑧

√𝜋∫ 𝑒−𝑢2

𝑥

0

𝑑𝑢 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑥 =𝑧

2√𝛼𝑒𝑡 (5.11)

Le flux de chaleur H à la profondeur z dans la neige est alors :

𝐻(𝑒) = −𝐾𝑒

𝜕𝑇

𝜕𝑧= 𝐾𝑒

𝑇𝑠

√𝜋𝛼𝑒𝑡 𝑒

−𝑧2

(4𝛼𝑒𝑡) (5.12)

et à la surface (z = 0) :

𝐻(0) = 𝐾𝑒𝑇𝑠

√𝜋𝛼𝑒𝑡=

𝐾𝑒

𝐾𝑒𝜌𝐶𝑛

𝜋𝑡

(5.13)

La quantité de chaleur perdue par unité de surface est alors :

𝑄 = ∫ 𝐻(0)𝑑𝑡𝑡

0

=2𝐾𝑒𝑇𝑠

√𝜋𝛼𝑒

√𝑡 =2𝑇𝑠

√𝜋√𝐾𝑒𝜌𝐶𝑛𝑡 (5.14)

Enfin, il est intéressant de présenter sous forme graphique l'évolution du profil

théorique d'un stock de neige calculé selon l'équation 5.10 pour les conditions initiales

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énoncées plus haut (figure 5.10). Dans le cas présent, la température de surface est

soudainement refroidie à -10 °C et conservée à cette température, alors que ρ=130 kg m-3,

Ke=0,0837 J °C-1 m-1 s-1 et Cn= 2,0934 kJ kg-1 °C-1. Il est facile de constater que la

pénétration du froid se fait lentement, de sorte que la zone dans laquelle les températures sont

sous le point de congélation est confinée aux couches superficielles. La profondeur maximale

affectée par un cycle diurne est en effet d'environ 200 à 250 mm. Pour des épaisseurs

suffisamment grandes, le stock de neige peut donc être considéré comme un milieu semi-

infini, en ce qui a trait à la solution de l'équation 5.9.

L'effet de la chaleur du sol peut être traité de la même façon. Toutefois, si le couvert

nival est trop mince, les effets combinés du réchauffement ou du refroidissement en surface et

au sol doivent être considérés. Le milieu n'est plus semi-infini.

La chaleur nécessaire QdC par unité de surface pour que le profil initial de température

du stock de neige devienne isotherme à 0°C peut s'appeler le "déficit calorifique" du stock de

neige. Elle est définie par l'équation suivante :

𝑄𝑑𝐶 = − ∫ 𝜌𝐶𝑛𝑇𝑑𝑧ℎ𝑛

0

(5.15)

ρ, Cn et T sont des fonctions de z et hn est l'épaisseur du stock de neige.

A l'approche du printemps, les caractéristiques physiques et thermiques du stock de

neige tendent à devenir plus uniformes sur la verticale, de sorte que l'utilisation de valeurs

moyennes de ρ, Cn et T, plutôt que de valeurs variant avec z, peut permettre d'estimer le

déficit calorifique avec une approximation satisfaisante :

𝑄𝑑𝐶 = 𝜌𝐶𝑛ℎ𝑛𝑇 (5.16)

T est le déficit de température du stock ou de la couche de neige par rapport à 0°C.

Le déficit calorifique peut aussi être exprimé en fonction de l'épaisseur d'eau

équivalente à 0°C qui, en regelant dans la neige, remonterait la température du stock à 0°C,

grâce à l'énergie libérée par le changement de phase (chaleur de fusion) :

𝑄𝑑𝐶 = 𝐿𝑓𝜌𝑤𝐸𝑑𝐶 (5.17)

Lf est la chaleur de fusion de l’eau (335 kJ kg-1)

Ρw la densité de l’eau à 0°C

EdC l’équivalent en eau du déficit en eau du stock de neige.

Des équations 5.16 et 5.17, on obtient :

𝐸𝑑𝐶 =𝜌𝐶𝑛𝑇ℎ𝑛

𝐿𝑓𝜌𝑤 (5.18)

Par ailleurs, connaissant les valeurs de Lf et Cn, il est possible de réécrire l'équation

5.18 plus simplement avec une légère approximation :

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𝐸𝑑𝐶 ≈ 6,25 ∗ 10−3 (𝜌

𝜌𝑤) 𝑇 ℎ𝑛 (5.19)

L'équation 5.18, ou son expression approximative 5.19, peut aussi être utilisée afin de

connaître le temps pendant lequel une pluie tombant avec une intensité de i mm hr-1 devrait se

poursuivre pour ramener le stock de neige à 0°C, si elle a elle-même une température de 0°C,

lorsqu'elle atteint la surface. Ce temps t (en heures) est :

𝑡 = 6,25 ∗ 10−3 𝜌

𝜌𝑤𝑇

ℎ𝑛

𝑖 (5.20)

Enfin, la quantité Qdt de chaleur nécessaire pour fondre une certaine quantité de neige

n'est pas nécessairement égale à celle qui serait requise pour fondre une même quantité de

glace à 0°C. Le rapport entre ces deux quantités est appelé la "qualité thermique" θ du stock

de neige. Elle peut être reliée au "déficit calorifique" du stock, en sachant que le "déficit

calorifique total" Qdt, c'est-à-dire la quantité totale nécessaire pour réchauffer et ensuite

fondre le stock, est égal à :

𝑄𝑑𝑡 = 𝜌ℎ𝑛𝐿𝑓𝑛 + 𝑄𝑑𝑐 (5.21)

Lfn est la chaleur de fusion de la neige.

Comme la chaleur nécessaire pour produire Edc mm d'eau de fonte à partir de la glace

pure à 0°C est ρw EdC Lf (Lf étant la chaleur de fusion de la glace) et que EdC = (ρ/ρw) Hn, on

peut écrire :

𝜃 =𝑄𝑑𝑡

𝜌𝑤𝐸𝑑𝐶𝐿𝑓=

𝐿𝑓𝑛

𝐿𝑓+

𝐶𝑛𝑇

𝐿𝑓 (5.22)

Pour un stock de neige sec sous le point de congélation, Lfn = Lf et θ > 1. Par ailleurs,

pour un stock de neige mûr, c'est-à-dire un stock de neige qui ne peut retenir p1us d'eau

1iquide qu'il n'en retient (condition équiva1ente à 1a capacité au champ des sols), Lfn < Lf et

T = 0, de sorte que θ < 1. La qualité thermique d'un stock de neige mûr est typiquement

d'environ 0,95 à 0,97, signifiant que la neige est un mélange de 97 % de glace (qui doit être

fondue) et de 3 à 5 % d'eau libre.

5.3.5 Eau liquide dans le stock de neige

Lorsque sa température a atteint 0°C et qu'il n'y a plus de déficit calorifique, le couvert

nival peut contenir de l'eau liquide sous l'une des formes suivantes [Eagleson, 1970] :

- Eau hygroscopique : film mince d'eau absorbée sur les cristaux de neige, qui ne peut

apparaître comme ruissellement tant que les cristaux ne sont pas fondus ;

- Eau dans les capillaires : eau retenue dans les pores du stock de neige par les forces

de tension superficielles, qui ne peut apparaître comme ruissellement que lorsque les

capillaires augmentent de diamètre ou que la neige fond ;

- Eau gravitaire : eau qui se draine dans le stock de neige sous l'action de la gravité.

Avant qu'un écoulement puisse se faire hors du couvert nival, il est nécessaire que sa

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capacité de rétention (analogue à la capacité au champ) soit satisfaite. Cette capacité de

rétention est la quantité maximale Wx d'eau hygroscopique et capillaire que le stock peut

retenir contre la gravité. La différence entre la capacité de rétention Wx et l'eau retenue W à

un moment donné dans le stock, détermine le déficit Wd en eau de rétention, c'est-à-dire la

quantité d'eau qui peut encore être ajoutée au stock, avant que ce dernier ait atteint Wx et qu’il

y ait drainage :

𝑊𝑥 = 𝑊 + 𝑊𝑑 (5.23)

La capacité de rétention Wx dépend de l'état de métamorphose du stock de neige.

Relativement peu de mesures de cette variable existent et les auteurs, d'après de Quervain

[1972], suggèrent des valeurs fort différentes, allant de quelques pour cents à plus de 55 % de

l'équivalent en eau total En du stock de neige. Il semble que les valeurs élevées doivent être

réservées pour les stocks très poreux d'hiver ou pour les couches de neige sursaturées au-

dessus d'une couche de glace, en période de fonte intensive. Dans la neige de printemps, la

densité variant entre 350 et 550 kg m-3, les valeurs mesurées seraient davantage de l'ordre de 2

à 6 % de En.

En un temps donné, la perte apparente Wp d'eau de fonte ou de pluie nécessaire pour

compléter le mûrissement du stock de neige et donc le rendre prêt à produire un écoulement,

est donc la somme du déficit calorifique, exprimé en hauteur d'eau équivalente En, et du

déficit en eau de rétention Wd à combler :

𝑊𝑝 = 𝐸𝑑𝑐 + 𝑊𝑑 (5.24)

Edc est déterminée par l'équation 5.18 ou l'équation 5,19 ;

Wd ≤ Wx

5.4 Modèles d'estimation de la fonte de neige

5.4.1 Bilan énergétique du stock de neige

La quantité d'énergie disponible au cours d'un intervalle de temps Δt, pour diminuer

ou éliminer le déficit calorifique du stock de neige ou le fondre, peut être obtenue en

effectuant le bilan de tous les processus énergétiques affectant ce dernier pendant cet

intervalle de temps. On peut écrire :

∑ 𝑄 = 𝑄𝑟𝑠 + 𝑄𝑟1 + 𝑄𝑒 + 𝑄𝑠 + 𝑄𝑝 + 𝑄𝑛 = 0 (5.25)

Qrs = rayonnement solaire de courte longueur d'onde absorbé par le stock ;

Qrl = rayonnement net dans l'infrarouge thermique à l'interface neige - air ;

Qe = gain ou perte de chaleur par sublimation, condensation ou évaporation à

l'interface neige - air ;

Qc = transfert convectif de chaleur sensible à l'interface neige - air ;

Qs = transfert de chaleur sensible par conduction à l'interface neige - sol ;

Gp = advection de chaleur ou de froid par les précipitations ;

Gn = énergie disponible pour réchauffer ou fondre la neige.

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Dans l'équation 5.25, chaque processus prend un signe positif ou négatif, selon qu'il

fournit ou retire de l'énergie au stock de neige. Lorsque Qn est plus élevée que Qdc le déficit

calorifique du stock de neige, une partie, Qf, de l'énergie disponible au cours de l'intervalle de

temps Δt va servir à faire fondre le stock:

𝑄𝑓 = 𝑄𝑛 − 𝑄𝑑𝑐 (5.26)

La lame d'eau de fonte, Ef, correspondante peut alors être évaluée à l'aide d'une

équation similaire à l'équation 5.17, en remplaçant Qdc et Edc par Qf et Ef.

Estimation du bilan radiatif Qrs + Qrl

Il serait possible d'estimer le bilan radiatif d'un bassin à l'aide d'un réseau de

bilanmètres et/ou de mesures par satellite, en tenant compte des remarques formulées en 5.2.2.

D'autres méthodes seront toutefois suggérées ici. Le rayonnement solaire absorbé Qrs peut être

obtenu par l'équation classique :

𝑄𝑟𝑠 = (1 − 𝐴)𝑅𝑔 (5.27)

A est l'albédo de la neige pour le rayonnement solaire ;

Rg est le rayonnement solaire global incident à la surface de la terre.

La valeur de Grs estimée par l'équation 5.27 est valable pour les parties du bassin sans

forêt. De plus, cette valeur devrait être modulée en fonction de l'orientation et de la pente de

la surface, si une résolution spatiale fine était nécessaire. Par ailleurs, une certaine épaisseur

est nécessaire pour absorber le rayonnement solaire incident. Obled et Rossé [1977] notent

que, d'après les valeurs présentées par le U.S. Corps of Engineers [1956], 80% de ce

rayonnement est absorbé par les premiers 7 ou 8 cm du stock, alors que selon O'Neill et Gray

[1971] il suffirait d'environ 2 cm de neige pour obtenir le même résultat (figure 5.11). Ces

derniers notent de plus que, si le stock de neige n'est pas suffisamment épais, un certain

pourcentage de l'énergie solaire incidente à la surface du stock de neige peut être transférée au

sol sous-jacent. Il peut alors s'ensuivre des erreurs significatives au niveau de l'estimation de

la fonte de la neige, particulièrement dans la phase finale de la fonte, au moment où le stock

est discontinu.

Quant au bilan en rayonnement infrarouge, d'après Leaf et Brink [1973], il peut être

estimé, dans les parties d'un bassin non couvertes de forêt par :

𝑄𝑟𝑙𝑖= 𝜎(𝛼𝜀𝑎𝑇𝑎

4 − 𝜀𝑁𝑇𝑆𝑁4 ) (5.28)

σ = constante de Stefan-Boltzan (5,67 10-8 W m-2 K-4) ;

α = constante tenant compte de la couverture nuageuse (de 0,75 pour un ciel

clair à 1 pour un ciel nuageux) ;

εa et εN = émissivités de l'atmosphère et de la neige respectivement ;

Ta et TSN = températures de l'air et de la surface de la neige respectivement (K)

Une équation similaire permet d'estimer le bilan du rayonnement thermique en forêt :

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𝑄𝑟𝑙𝑖= 𝜎(𝜀𝐹𝑇𝐹

4 − 𝜀𝑁𝑇𝑆𝑁4 ) (5.29)

EF = émissivité du couvert forestier ;

TF = température du couvert forestier (K),

Si le bilan radiatif est désiré sur une partie de bassin comprenant à la fois des surfaces

boisées de densité variable et des surfaces non boisées, il est préférable d'intégrer les

équations 5.27 à 5.29 :

𝑄𝑟𝑠+𝑟 = [(1 − 𝐴)𝑅𝑔 + 𝜎(𝛼𝜀𝑎𝑇𝑎4 − 𝜀𝑁𝑇𝑁

4)](1 − 𝐹) + 𝜎(𝜀𝐹𝑇𝐹5 − 𝜀𝑁𝑇𝑆𝑁

4 )𝐹 (5.30)

Le facteur F est appelé le couvert forestier effectif. Il représente la fraction du bassin

protégée du rayonnement solaire direct par le couvert forestier. D'après Anderson [1968], F

devrait correspondre approximativement au pourcentage de forêt sur un bassin ou une surface

donnée, multiplié par la densité moyenne du couvert.

Estimation de la sublimation, de la condensation ou de l'évaporation Qe

Les changements de phases reliés au transfert de vapeur d'eau de l'air à la neige ou de

la neige à l'air varient en fonction des conditions prévalant à la surface de la neige, selon

Anderson [1968]. Si la neige fond, de l'évaporation ou de la condensation se produit à sa

surface, suivant la direction du gradient de tension de vapeur. Par ailleurs, si la neige ne fond

pas, le changement de phase se fait de l'état solide à l'état gazeux (sublimation) ou vice-versa.

Au cours des périodes de fonte, la chaleur latente de vaporisation ou de condensation doit

donc être utilisée dans les calculs de transfert d'énergie, alors qu'en période froide c'est la

chaleur latente de sublimation qui doit être appliquée. Les échanges de vapeur sont par contre

généralement très faibles en période froide ou très froide et peuvent être négligés à toutes fins

utiles.

Le transfert d'humidité entre la surface de la neige et l'air se fait par un mécanisme

d'échange turbulent dont la direction dépend du gradient de vapeur d'eau. Lorsque la tension

de vapeur dans l'air est plus élevée que celle à la surface, il y a transfert d'humidité de l'air à la

neige, accompagné par la libération de chaleur latente. Lorsque le gradient est inversé, le

transfert d'humidité et de chaleur est aussi inversé. Il est utile de rappeler ici que la tension de

vapeur saturante es maximale à la surface de la neige est d'environ 6,11 mb, lorsque la surface

de la neige est à 0°C. Il ne pourra donc y avoir évaporation que si la tension de vapeur dans

l'air εa est inférieure à 6,11 mb. Ce mécanisme d'échange turbulent entre la surface et l'air peut

s'exprimer selon une approche aérodynamique [Prowse et Owens, 1982] par :

𝑄𝑒 = 𝜌𝑎𝐿𝑉𝐷1 (0,622

𝑃𝑎) (𝑒𝑎 − 𝑒𝑠) (5.31)

Qe = évaporation (W m-2) ;

Pa = densité de l'air (kg m-3) ;

Lv = chaleur latente de vaporisation de l'eau (J kg-1) ;

Dl = coefficient d'échange turbulent pour la chaleur latente (m s-1) ;

Pa = pression atmosphérique près de la surface du sol (mb) ;

ea et es = tension de vapeur de l'eau dans l'air et à la surface de la neige (mb).

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Au cours de la période de fonte, la température de l'air est généralement plus grande

que 0°C, température à laquelle se maintient approximativement la surface de la neige. En

conséquence, les conditions atmosphériques au-dessus de la neige sont généralement stables

ou près de la neutralité. Des profils log-linéaires de vent, de température et d'humidité sont

applicables dans cette fourchette de stabilité et l'on peut écrire :

𝐷1 =𝑘2𝑢

𝑙𝑛(𝑍/𝑍0)2 (5.32)

k = constante de von Karman, généralement estimée à 0,4 ;

u = vitesse du vent (m s-1) à la hauteur Z(h) ;

Z0 = paramètre de rugosité (m) ;

L'intégration des équations 5.31 et 5.32 permet d'estimer Qe en W m-2. Les

nombreuses études sur les transferts turbulents dans la basse atmosphère fournissent d'autres

formulations de D1 permettant de mieux tenir compte des variations de stabilité de cette

dernière, si besoin est [Sellers, 1969; Moore, 1983; Webb, 1970]. Le tableau 5.2 présente, par

ailleurs, les valeurs du paramètre Z0 pour un couvert de neige, telles que déterminées par

divers auteurs.

Etant donné qu'il existe habituellement une corrélation entre la vitesse du vent et la

différence de tension de vapeur (ea – es), l'utilisation de valeurs journalières moyennes de vent

et de tension de vapeur risque de conduire à une sous-évaluation de Qe. Il est préférable de

calculer Qe séparément pour le jour et la nuit ou de faire appel à un pas de temps encore plus

court, selon les données disponibles.

Le coefficient d'échange turbulent D1 peut aussi être déterminé expérimentalement à

l'aide de valeurs journalières d'évaporation et de tension de vapeur. On observe alors une

relation pratiquement linéaire entre D1 et u :

𝐷1 = 𝑎 + 𝑏𝑢 (5.33)

a et b sont des constantes.

Ce type de relation doit être transposé avec prudence d'un site à un autre, une certaine

dispersion existant dans les valeurs proposées dans la littérature. Dans le cas de la neige,

l'Organisation météorologique mondiale [OMM, 1966] a déjà suggéré une équation

développée par Kuzmin en URSS :

𝐸 = (0,18 + 0,098 𝑢10)(𝑒𝑠 − 𝑒2) (5.34)

E = évaporation de la neige (mm jr-1) ;

u10 = vitesse moyenne journalière du vent à 10 m (m s-1) ;

es = tension de vapeur saturante à la surface de la neige (mb) ;

e2 = tension de vapeur dans l'air à une hauteur de 2 m (mb) .

Estimation du transfert convectif de chaleur sensible à l'interface neige-air, Qc

Le transfert de chaleur sensible de l'air à la neige ou vice-versa se fait par un

mécanisme d'échange turbulent comme pour la chaleur latente. Sa direction est par contre

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contrôlée par la direction du gradient de température entre la surface de la neige et l'air au-

dessus. Si une approche aérodynamique est aussi retenue pour estimer le transfert de chaleur

sensible, une équation similaire à l'équation 5.31 peut être écrite [Prowse et Owens, 1982] :

𝑄𝑐 = 𝜌𝑎𝐶𝑝𝐷𝑐(𝑇𝑎 − 𝑇𝑠) (5.35)

Qc = chaleur sensible (W m-2) ;

Cp = chaleur spécifique de l'air à pression constante (J kg-1 K-1) ;

Ta = température de l'air (K) ;

Ts = température de surface de 1a neige (K) ;

Dc = coefficient d'échange turbulent pour 1a chaleur sensible (m s-1).

En émettant les mêmes hypothèses que pour la chaleur latente et à l'intérieur de la

précision des mesures, Dc = Dl, de sorte que Dc peut être aussi estimé à l'aide de l'équation

5.32. Avec cette valeur de Dc, l'équation 5.35 peut donc servir pour évaluer Qc.

Alternativement, si Q1 est évaluée par une autre méthode, il est possible d'évaluer Qc à

l'aide du rapport de Bowen (éq. 4.16), pourvu que les valeurs ea, Ta, es e t Ts soient connues.

D'après Gray et O'Neill [1973] la contribution de la chaleur sensible au bilan

énergétique est relativement faible en hiver, lorsque le couvert de neige couvre toute une

région. Toutefois, l'apport de chaleur sensible au bilan énergétique d'un couvert de neige

augmenterait sensiblement par rapport à l'apport du bilan radiatif, lorsque le couvert devient

discontinu. De grandes quantités de chaleur seraient alors importées des zones libres de neige,

Estimation du transfert de chaleur sensible, Qs, par conduction à l'interface neige-sol

La plupart des auteurs [Anderson, 1968; Eagleson, 1970; Hartsveit, 1981; Norum et al.,

1973; Prowse et Owens, 1982; Obled et Rossé, 1977] s'entendent pour considérer que le

transfert de chaleur à l'interface neige-sol est très faible et peut généralement être négligé par

rapport aux autres termes du bilan. Il est toute fois possible de l'estimer à partir de l'équation

suivante :

𝑄𝑠 = 𝑘𝑠

𝑑𝑇

𝑑𝑍𝛥𝑡 (5.36)

Qs = transfert de chaleur sensible (J m-2)

ks = conductivité thermique du sol (J m-1 s-1 °C-1)

dT / dZ = gradient de température dans le sol (°C m-1)

Δt = intervalle de temps considéré (s)

La conductivité thermique du sol varie en fonction du type de sol considéré et surtout

de l'humidité du sol. Elle est de l'ordre de 1 J m-1 s-1 °C-1 [Clark, 1966]. Si un intervalle de

temps d'une journée est considéré, les gradients thermiques dans le sol étant relativement

faibles sous un couvert de neige, le transfert de chaleur sensible est d'environ 250 kJ m-2.

Sachant qu'il faut 335 kJ m-2 de chaleur de fusion pour produire l mm d'eau de fonte. Cette

quantité d'énergie correspond à 0,75 mm de fonte par jour, provoquée à l'interface sol-neige.

Les valeurs citées dans la littérature sont de cet ordre [Anderson, 1968; U.S. Corps of

Engineers, 1960 ; Obled et Rossé, 1977].

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Estimation de l'advection de chaleur ou de froid par les précipitations, Qp

Les précipitations peuvent se produire sous forme de pluie ou de neige. Dans le

premier cas, la température des gouttes d'eau est habituellement plus élevée que celle de la

surface de la neige. L'apport de chaleur correspondant au refroidissement de l'eau de pluie

jusqu'à 0°C peut être déterminé par l'expression suivante :

𝑄𝑝 = 𝑃𝑤𝐶𝑤𝜌𝑤𝑇𝑤 (5.37)

Qp = transfert de chaleur dû à la précipitation liquide (J m-2) ;

Pw = hauteur de la précipitation liquide (m) ;

Cw = chaleur spécifique de la précipitation liquide (J kg-1 °C-1) ;

ρw = densité de la précipitation liquide (kg m-3) ;

Tw = température de la précipitation liquide (°C).

L'humidité relative de la basse atmosphère étant habituellement près de 100 % au

cours des épisodes de pluie au dessus de la neige, la température des précipitations est

considérée égale à celle du thermomètre humide, à celle du point de rosée ou tout simplement

à celle du thermomètre sec, selon les auteurs [Anderson, 1968; Eagleson, 1970; Obled et

Rossé, 1977]. Selon le déficit calorifique antérieur du stock de neige, une proportion plus ou

moins grande de l'eau de pluie peut en outre être gelée, libérant alors non seulement la

quantité d'énergie estimée par l'équation 5.37, mais aussi celle Q’p provenant du gel d'une

partie ou de la totalité de la précipitation :

𝑄𝑝′ = 𝑃𝑤

′ 𝜌𝑤𝐿𝑓 (5.38)

P’w = hauteur de précipitation liquide qui subit le gel P’w < Pw (m) ;

Lf = chaleur de fusion de l'eau (J kg-1).

Il s'ensuit que toute pluie appréciable va combler le déficit calorifique du stock de

neige et, éventuellement la capacité de rétention Wx de cette neige.

Dans le cas d'une chute de neige, une expression similaire à l'équation 5.37 sert à

déterminer le déficit calorifique de cette neige par rapport à 0°C :

𝑄𝑝′′ = 𝑃𝑛𝐶𝑛𝜌𝑛𝑇𝑛 (5.39)

Dans l'équation 5.39, les symboles ont la même signification qu'à l'équation 5.37, mais

s'appliquent à la neige plutôt qu'à la pluie. Un réarrangement du profil thermique du couvert

de neige est, par ailleurs, provoqué par l'addition de cette nouvelle couche de neige.

5.4.2 Méthode des degrés-jours

L'approche permettant de suivre l'évolution du stock de neige et d'estimer sa fonte à

l'aide du bilan énergétique fait appel à des observations de variables météorologiques qui ne

sont pas disponibles sur tous les bassins versants, tout au moins avec la densité spatiale

requise. Comme par ailleurs, la température de l'air l'est habituellement, cette variable a

souvent été utilisée comme un indice de la fonte de la neige. D'après le U.S. Corps of

Engineers [1960], la température de l'air n'est toutefois que l'un des multiples facteurs

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affectant la fonte de neige. Certains de ces facteurs, tels que l'albédo de la neige, le vent,

l'humidité de l'air, ne sont pas directement reliés à la température de l'air. Par ailleurs, la

température de l'air est un meilleur indice de la fonte de neige en forêt qu'en zone dégagée.

Cette variable n'est par conséquent reliée à la fonte de neige que d'une façon générale. Son

utilité pour l'estimation de la fonte de neige varie donc en fonction du couvert forestier, des

conditions météorologiques, de l'albédo de la neige, de la saison et d'autres facteurs variés.

Considérant que pour des besoins de prévisions hydrologiques, une méthode simple

d'estimation de la fonte de neige est habituellement adéquate, si l'on considère la précision

globale possible dans la préparation d'une prévision, le U.S. Corps of Engineers a toute fois

établi des relations entre la fonte nivale et la température de l'air. La forme générale de ces

équations est la suivante :

𝐸𝑓 = 𝐹 (𝑇𝑎 − 𝑇𝑏) (5.40)

Ef = lame d'eau provenant de 1a fonte de 1a neige (mm) ;

F = facteur de proportionnalité (mm °C-1) ;

Ta = température de l'air (°C) ;

Tb = seuil de température au-dessus duquel il y a fonte (°C).

La méthode des degrés-jours tire son nom de l'écart (Ta - Tb). On appelle en effet

degré-jour, la quantité de chaleur correspondant à chaque augmentation de la température d'un

degré au-dessus du seuil considéré, lorsque le pas de temps est d'une journée. L'écart (Ta - Tb)

détermine donc le nombre de degrés-jours disponible pour la fonte, au cours d'une journée

donnée.

Selon que la température moyenne journalière (Tm) ou la température maximale

journalière de l'air (Tx) est utilisée, l'équation 5. 40 devient :

a) pour les zones dégagées :

𝐸𝑓 = 2,74 (𝑇𝑚 − (−4,44)) (5.41𝑎)

ou

𝐸𝑓 = 1,83(𝑇𝑥 − (−2,77)) (5.41𝑏

b) pour les zones forestières :

𝐸𝑓 = 2,29(𝑇𝑚 − 0) (5.41𝑐)

ou

𝐸𝑓 = 1,83(𝑇𝑥 − 5,55) (5.41𝑑)

Ces relations sont applicables uniquement si 1,11 < Tm <18,89 ou 6,67 < Tx < 24,44

d’après la même source. En pratique, F et Tb peuvent être considérées comme des valeurs

initiales à optimiser pour chaque bassin étudié. Le facteur F, en particulier, subit une variation

saisonnière qu’il est préférable de considérer. Pour ce faire, Martinec [1982] suggère une

relation empirique entre F et la densité de la neige ρn :

𝐹 = 1,1 𝜌𝑛

𝜌𝑤 (5.42)

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Dans l’équation 5.42, F est en cm °C-1 j-1, ρw est la densité de l’eau exprimée dans les

mêmes unités que ρn. En 1960, le même auteur avait suggéré une relation un peu plus

élaborée que l’équation 5.42 de manière à tenir compte du vent :

𝐹 = 1,1 𝑉 + 𝑥

𝑉0 + 𝑥 𝜌𝑛

𝜌𝑤 (5.43)

ou

V = Vitesse du vent (m s-1) ;

V0 = Vitesse du vent pour laquelle l’équation 5.42 est valide (m s-1) ;

x = Coefficient représentant l’effet d’autres facteurs que la température et le vent sur

la fonte de neige (0,4 m s-1).

Toujours d’après Martinec [1960], le facteur F varierait d’environ 0,37 cm °C-1 j-1 en

début de la saison de fonte à 0,74 cm °C-1 j-1 à la fin de cette dernière.

Considérant par ailleurs que le facteur F est une fonction de la pente et de l’aspect

d’une surface sonnée, Riley et al. [1972] proposent une autre expression permettant de faire

augmenter F à mesure que la saison progresse :

𝐹 = 𝐵𝑡𝑣

𝑅𝐼𝑠

𝑅𝐼ℎ

(1 − 𝐴) (5.44)

B = Constante de proportionnalité (1,8 cm °C-1 j-1) ;

Tv = Coefficient de transmission de la végétation 𝑡𝑣 = 𝑒−4𝐶𝑣 avec Cv = couvert effectif

ou pondéré ;

RIs = Indice de rayonnement sur une surface et d’orientation donnée :

Rih = Indice de rayonnement sur une surface horizontale à la même latitude que sur le

bassin étudié :

A = Albédo de la surface.

D'autres méthodes pourraient aussi être utilisées afin d'estimer le facteur F [Morin et

al., 1981; U.S. Army, 1972].

Hartsveit [1981] considère par ailleurs que de meilleurs résultats seront obtenus si

différents facteurs de fonte sont utilisés pour les jours avec et sans précipitation. Riley et al.

[1972] suggèrent sensiblement la même chose, mais plutôt que de faire varier F, ils ajoutent la

fonte due aux degrés-jours à celle due à la pluie.

Si enfin la méthode des degrés-jours est appliquée par bandes d'altitude afin de tenir

compte de la diminution de la température avec l'altitude, les résultats devraient être meilleurs

[Martinec, 1982]. Il en est de même si l'on fait appel à la variabilité spatiale et temporelle du

couvert de neige [Brown et al., 1980; Martinec, 1982]. En effet, pour une lame de fonte

donnée, plus la surface de bassin encore couverte de neige sera grande, plus le débit sera

important, si les conditions antécédentes sont les mêmes.

5.5 Exemples de modèles de fonte de neige

Chacun des éléments du processus d'évolution et de fonte de neige présenté dans les

sections précédentes peut être intégré ou non à un modèle de font e de neige. Sa prise en

compte dans un modèle particulier dépendra des données que l'auteur s'attend à trouver sur les

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bassins sur lesquels il désire appliquer son modèle. Sa façon de concevoir les processus et par

conséquents on évaluation de l'importance relative de chacun de ces éléments dans la

conception finale du modèle, sera par ailleurs bien souvent déterminante. C'est avec cette

pensée que doivent être analysés les deux exemples proposés dans cette section. Obled et

Rossé [1977], qui pouvaient disposer d'un bassin très bien équipé, ont repris les travaux de

Charbonneau [1971] et présenté un modèle de fonte de neige basé sur le bilan énergétique. Le

modèle de fonte de neige intégré au modèle CEQUEAU [Girard et al., 1972; Morin et al.,

1981] a par ailleurs été conçu de façon à être appliqué au plus grand nombre de bassins

possible. Il est basé sur la méthode des degrés-jours.

5.5.1 Modèle de fonte de neige basé sur le bilan énergétique

Obled et Rossé [1977] considèrent le stock de neige comme un système clos, pour

lequel les échanges de chaleur n'apparaissent qu'à l'interface air-neige. Pour eux, le taux de

fonte à l'interface sol-neige est constant et faible, comparé aux autres termes d'échange de

chaleur.

La figure 5.12 présente un ordinogramme de la partie de leur modèle portant sur le

bilan énergétique du stock de neige. On peut y voir que, pour le cas simple où le stock est

isotherme à 0°C (déficit calorifique nul) au début du pas de temps considéré (ils utilisent un

pas de temps de trois heures), il est possible qu'il y ait soit une fonte en surface soit un début

de regel, dépendant du bilan énergétique. Dans le cas d'un regel, le profil de température est

alors déterminé à l'aide de la fonction erreur.

Lorsqu'il y a un déficit calorifique, toutefois, la situation est plus complexe. Ainsi,

dans le cas d'un apport de chaleur à l'interface air-neige, apport qui élève 1a température de

surface Ts à 0°C, cette chaleur est transférée au stock grâce à la fonte en surface, suivie d'un

regel de l'eau de fonte à l'intérieur du stock. Le transfert de chaleur par conduction est alors

considéré négligeable. Obled et Rossé [1977] expliquent que ceci est confirmé par

l'expérience, puisque de l'eau liquide peut fréquemment être vue à la surface, même avec un

fort gradient de température dans le stock. Toutefois, lorsque Ts s'élève mais demeure

inférieure à 0°C, le transfert de chaleur se fait par conduction.

Si, par ailleurs, il y a de la pluie, l'eau de pluie transfère sa chaleur à la couche

supérieure du stock de neige et se refroidit jusqu'à 0°C. Elle percole dans la neige et regèle à

l'intérieur du stock, réduisant ainsi le déficit calorifique de ce dernier en libérant sa chaleur de

fusion.

C'est par un processus itératif qu'est déterminée la température de surface Ts qui

satisfait l'équation du bilan énergétique. Au départ, le stock est supposé isotherme à TM plutôt

qu'à 0°C, ce qui, d'après Obled et Rossé [1977] accélère la convergence, de sorte qu'ils

n'allouent que trois ou quatre itérations pour déterminer Ts.

Dans la figure 5.13, des simulations de la fonte de neige avec ce modèle basé sur le

bilan d'énergie, sont comparées aux lames de fonte mesurées par un lysimètre situé en terrain

découvert. Des simulations de la fonte de neige en forêt ont aussi été réalisées et sont

présentées à la figure 5.14. Elles sont aussi comparées aux lames mesurées par lysimètre.

Obled et Rossé [1977] précisent que des ajustements ont été faits aux variables pour tenir

compte du couvert forestier dense, au second site de simulation. On constate que les

écoulements sont plus faibles au site forestier qu'au site à découvert et que le modèle permet

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de simuler adéquatement la fonte de neige à chacun des deux sites.

5.5.2 Modèle de fonte de neige basé sur la méthode des degrés-jours

Le modèle hydrologique CEQUEAU [Girard et al., 1972; Morin et al., 1981] est un

modèle à mailles carrées permettant de considérer un bassin comme un ensemble de n

carreaux entiers sur lesquels sont modélisés les différents processus de formation des

écoulements.

Chaque précipitation solide sur un carreau entier est estimée par interpolation des

précipitations mesurées aux stations, en tenant compte des remarques formulées en 5.1.2.

Comme l'indique la figure 5.15, cette précipitation solide est ajoutée aux stocks de neige de

chaque carreau, avant que ne débute la fonte, au jour i.

Quant aux équations de base utilisées, elles sont inspirées de celles du U.S. Corps of

Engineers [1956]. La fonte potentielle, c'est-à-dire la fonte qui se produirait pour un stock de

neige complètement mûr, est d'abord estimée. Suivent l'estimation d'indices de la température

moyenne et du mûrissement du stock de neige. Ces indices ont pour but de tenir compte du

déficit calorifique et du mûrissement progressif du stock de neige au cours de l'hiver. Par

ailleurs, si la température du stock de neige n'a pas encore atteint le seuil de fonte fixé, la

précipitation liquide éventuelle peut être absorbée en tout ou en partie, suivant l'importance

du déficit calorifique. La fonte réelle est alors estimée en modifiant la fonte potentielle en

fonction du mûrissement du stock. Il s'ensuit le drainage de l'eau de fonte et de pluie

excédentaire hors du stock de neige.

En pratique, le modèle simule séparément l'évolution et la fonte de la neige pour deux

zones distinctes de chaque carreau entier, l'une étant complètement recouverte de forêt et

l'autre complètement déboisée. La lame de fonte provenant de chaque carreau entier est

déterminée par addition pondérée des lames produites en forêt et en zone déboisée, en

fonction de leurs superficies respectives.

Un exemple de simulation des crues de printemps sur un bassin de 629 km2, situé dans

le sud du Québec est présenté à la figure 5.16. On peut constater que les crues sont bien

simulées. Le modèle CEQUEAU se prêtant facilement à des comparaisons avec la

télédétection, à cause de sa structure matricielle, l'ajustement des paramètres a été complété

en comparant une carte de l'équivalent en eau de la neige au sol en forêt et en terrain déboisé

produite par le modèle à une image du bassin obtenue par le satellite LANDSAT le 20 avril

1974 (figure 5.17). On peut constater que les carreaux sur lesquels la neige est présente en

forêt et en terrain déboisé correspondent aux zones plus claires sur l'image LANDSAT et que

les carreaux libres de neige correspondent pour leur part à des zones plus foncées.

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