CHAMPIONNATS DU MONDE -...

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SUISSE 86 CHAMPIONNATS DU MONDE MASCULIN QUELQUES ENSEIGNEMENTS PAR D. CONSTANTINI Traditionnellement, à l'issue d'une compétition planétaire, les exégè- tes se penchent sur l'analyse du jeu produit, en soulignent les pérenni- tés, en relèvent les évolutions. Le handball en tant que vecteur d'édu- cation n'a nul besoin d'un nouveau prosélyte. Le technicien fédéral n'a pas à s'exprimer péremptoirement sur la manière de concevoir l'utili- sation de cette activité à des fins éducatives. Mon propos serait plu- tôt de faire partager au lecteur une réflexion non exhaustive sur cer- tains éléments du jeu observés lors du dernier Mondial (mars 86, en Suisse). Ces remarques débou- chent sur de prudentes interroga- tions quant à la façon d'aborder ces aspects du handball au plan didac- tique. Il s'agira donc successive- ment d'impressions sur : - le tir ; - la relation duelle attaquant-défen- seur ; - la déformation tactique en dé- fense. LE TIR Constat : on ne tire pas plus fort, mais on tire plus vite. Cette observation exprime bien que l'augmentation de la puissance s'obtient par une amélioration du paramètre « vi- tesse ». Le temps de manipulation ou temps de latence entre la réception de balle et la phase ultime du lancer tend à se réduire de plus en plus, potentielle- ment. Sans déroger aux règles fondamentales des lancers concernant l'utilisation des appuis : prise d'avance, rythme, nombre, orientation, le gain de temps s'explique par la capacité à accélérer de plus en plus le mouvement du bras. La réduction du nombre d'appuis pour déclencher un tir, la diminution de l'amplitude de l'armé ne sont pas les seules explications de cette amélioration. Causes • Augmentation de la laxité articulaire La prise d'avance du coude par rapport au segment poignet porteur du ballon est d'autant plus grande que la souplesse de l'articulation scapulaire le permet. L'am- plitude de l'avance du coude, obtenue par un travail conséquent d'ouverture bras/tronc dans tous les plans, place donc idéalement le poignet pour obtenir une accélération maximale du ballon. La projection du coude vers l'avant, tout en conservant un retard du poignet produit cet effet en lanière de fouet des plus efficaces. L'armé global dépend essentiellement de la qualité de cet enchaînement d'action. Un chemin de lancement ample, par- couru sans rupture est important, mais la vitesse finale dépend essentiellement du jeu coude-poignet. • Poussée finale des doigts Ils sont le dernier segment à entrer en action. Leur capacité à agir, en fouettant le ballon, donne l'impulsion finale et apporte la dernière accélération à l'engin propulsé. Cette puissance digitale s'ob- tient par un travail approprié en agissant sur des masses additionnelles sensible- ment plus lourdes que le ballon (800 g à 2 kg). Les doigts acquièrent ainsi une tonicité plus grande et permettent une meilleure réaction. Ce sont également le poignet et les doigts qui donneront l'orientation finale de la trajectoire et les éventuelles rotations, pouvant produire des effets au sol. • Dissociation impulsion-lancer La course d'élan, l'impulsion dans le tir en suspension, les derniers pas dans le tir en appui, ont toujours la même forme, les mêmes exigences, cependant le bras se libère peu à peu de l'enchaînement des appuis ou de l'impulsion. Pour une même impulsion avec recherche d'une éléva- tion maximale avec une orientation idéale dans l'espace, on devra pouvoir tirer très tôt (tir anticipé) ou très tard (tir retardé). Le synchronisme impulsion- lancer n'est plus aussi systématique ren- dant beaucoup plus difficiles les informa- tions prises par les défenseurs. Perspectives pédagogiques A partir de l'observation faite sur les tirs, il conviendra de rechercher essentielle- ment une parfaite tenue du ballon et un lancer « naturel » dans l'apprentissage du tir. Favoriser la tenue du ballon Ce geste du haut niveau ne se conçoit qu'avec une parfaite tenue du ballon permettant aux différents éléments de la chaîne du lancer de jouer successive- ment sans rupture de rythme et d'envisa- ger également une avancée importante du coude. N'oublions pas que le joueur d'élite, doté d'un empan suffisant pour une manipulation aisée du ballon (de 56 cm de circonférence) utilise en plus de la résine sur le bout des doigts pour améliorer encore sa relation kinesthési- que avec le ballon or, nos élèves sont souvent contraints de se débrouiller avec des ballons bien trop gros et donc ina- daptés à leurs possibilités de manipula- tion. Cette grosse balle dénature leurs PHOTOS : KEYSTONE - PRESS AG ZURICH 36 DOSSIER F.F.H.B Revue EP.S n°203 Janvier-Février 1987 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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SUISSE 86

CHAMPIONNATS DU MONDE

MASCULIN

QUELQUES ENSEIGNEMENTS PAR D. CONSTANTINI

Traditionnellement, à l'issue d'une compétition planétaire, les exégè-tes se penchent sur l'analyse du jeu produit, en soulignent les pérenni­tés, en relèvent les évolutions. Le handball en tant que vecteur d'édu­cation n'a nul besoin d'un nouveau prosélyte. Le technicien fédéral n'a pas à s'exprimer péremptoirement sur la manière de concevoir l'utili­sation de cette activité à des fins éducatives. Mon propos serait plu­tôt de faire partager au lecteur une réflexion non exhaustive sur cer­tains éléments du jeu observés lors du dernier Mondial (mars 86, en Suisse). Ces remarques débou­chent sur de prudentes interroga­tions quant à la façon d'aborder ces aspects du handball au plan didac­tique. Il s'agira donc successive­ment d'impressions sur : - le tir ; - la relation duelle attaquant-défen­seur ; - la déformation tactique en dé­fense.

LE TIR

Constat : on ne tire pas plus fort, mais on

tire plus vite. Cette observation exprime bien que l'augmentation de la puissance s'obtient par une amélioration du paramètre « vi­tesse ». Le temps de manipulation ou temps de latence entre la réception de balle et la phase ultime du lancer tend à se réduire de plus en plus, potentielle­ment. Sans déroger aux règles fondamentales des lancers concernant l'utilisation des appuis : prise d'avance, rythme, nombre, orientation, le gain de temps s'explique par la capacité à accélérer de plus en plus le mouvement du bras. La réduction du nombre d'appuis pour déclencher un tir, la diminution de l'amplitude de l'armé ne sont pas les seules explications de cette amélioration.

Causes

• Augmentation de la laxité articulaire La prise d'avance du coude par rapport au segment poignet porteur du ballon est d'autant plus grande que la souplesse de l'articulation scapulaire le permet. L'am­plitude de l'avance du coude, obtenue par un travail conséquent d'ouverture bras/tronc dans tous les plans, place donc idéalement le poignet pour obtenir une accélération maximale du ballon. La projection du coude vers l'avant, tout en conservant un retard du poignet produit cet effet en lanière de fouet des plus efficaces. L'armé global dépend essentiellement de la qualité de cet enchaînement d'action. Un chemin de lancement ample, par­couru sans rupture est important, mais la vitesse finale dépend essentiellement du jeu coude-poignet.

• Poussée finale des doigts Ils sont le dernier segment à entrer en action. Leur capacité à agir, en fouettant le ballon, donne l'impulsion finale et apporte la dernière accélération à l'engin propulsé. Cette puissance digitale s'ob­tient par un travail approprié en agissant sur des masses additionnelles sensible­ment plus lourdes que le ballon (800 g à 2 kg). Les doigts acquièrent ainsi une tonicité plus grande et permettent une meilleure réaction. Ce sont également le poignet et les doigts qui donneront l'orientation finale de la trajectoire et les éventuelles rotations, pouvant produire des effets au sol. • Dissociation impulsion-lancer La course d'élan, l'impulsion dans le tir en suspension, les derniers pas dans le tir en appui, ont toujours la même forme, les mêmes exigences, cependant le bras se libère peu à peu de l'enchaînement des appuis ou de l'impulsion. Pour une même impulsion avec recherche d'une éléva­tion maximale avec une orientation idéale dans l'espace, on devra pouvoir tirer très tôt (tir anticipé) ou très tard (tir retardé). Le synchronisme impulsion-

lancer n'est plus aussi systématique ren­dant beaucoup plus difficiles les informa­tions prises par les défenseurs.

Perspectives pédagogiques A partir de l'observation faite sur les tirs, il conviendra de rechercher essentielle­ment une parfaite tenue du ballon et un lancer « naturel » dans l'apprentissage du tir.

Favoriser la tenue du ballon Ce geste du haut niveau ne se conçoit qu'avec une parfaite tenue du ballon permettant aux différents éléments de la chaîne du lancer de jouer successive­ment sans rupture de rythme et d'envisa­ger également une avancée importante du coude. N'oublions pas que le joueur d'élite, doté d'un empan suffisant pour une manipulation aisée du ballon (de 56 cm de circonférence) utilise en plus de la résine sur le bout des doigts pour améliorer encore sa relation kinesthési-que avec le ballon or, nos élèves sont souvent contraints de se débrouiller avec des ballons bien trop gros et donc ina­daptés à leurs possibilités de manipula­tion. Cette grosse balle dénature leurs

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relations et aliène les possibilités réelles de lancer selon le modèle envisagé pré­cédemment. Il est donc, nécessaire de se doter d'un matériel adapté (1). • Obtenir un lancer naturel et dynami­que Au plan articulaire, il faudra sacrifier très tôt à une gymnastique tendant à libérer cette articulation pour le jeu le plus grand possible. La meilleure position d'armé dépend également de la morphologie de chacun ; il faut donc laisser l'enfant libre de la découverte de son geste. L'objectif sera d'obtenir un lancer « naturel » aussi dynamique qu'un lancer de caillou avec la même spontanéité et les mêmes pos­sibilités de surprise pour l'adversaire.

LA RELATION DUELLE ATTAQUANT/DEFENSEUR

Constat : l'équilibre des chances

La tendance nouvelle de l'arbitrage, vi­sant à sanctionner également les fautes de l'attaquant, a rééquilibré le rapport de force entre le porteur de balle et son défenseur. Auparavant, on voyait : d'un côté, des défenseurs assez systémati­quement portés vers l'irrégularité (sur­tout des ceinturages), car la conservation du ballon par l'attaquant était peu vulné­rable ; de l'autre, des attaquants multi­pliant des tentatives individuelles de dé­bordement se soldant soit par une réus­site, soit dans le pire des cas par l'obten­tion d'un jet franc. Désormais, par la pénalisation de la no­tion de « passage forcé », non explicite­ment citée dans le code, mais couram­ment employée, l'attaquant court le ris­que de perdre la balle s'il prend appui sur le défenseur qu'il essaie de manœuvrer. Les défenses étagées, harcelantes, pla­cent de plus en plus l'attaquant en situa­tion de jouer en débordement direct en raison de la difficulté à faire circuler la balle. Cette recherche de la solution indi­viduelle constitue une prise de risque indispensable mais, à présent, aléatoire car elle peut conduire à une faute de l'attaquant. Cette volonté réhabilite le duel atta­quant/défenseur dans le sens de l'équili­bre des chances. La seule conduite du défenseur n'est plus systématiquement irrégulière puisque le respect du règle­ment peut lui permettre de récupérer le ballon. De même, l'attaquant doit désor­mais contrôler son engagement car il ne conservera pas le ballon à n'importe quel prix. Le duel - entre le porteur de balle es­sayant de manœuvrer, dans un espace donné, avec des contraintes techniques (nombre d'appuis autorisés) et, un ad­versaire direct dont l'objectif sera de faire barrage avec le corps au déplace­ment de l'attaquant tout en perturbant ses possibilités de tir, passe, dribble -apparaît comme un affrontement équili­bré dans le hand actuel.

(1) Les efforts de la F.F.H.B dans la présentation d un matériel adapté à l'enfant de 8/9 ans. pour l'opération Prim-Hand. mériteront une analyse objective au plan des résultats techni­ques obtenus.

Perspectives pédagogiques

Les répercussions de ce constat sont fondamentales pour la compréhension du handball moderne. La stratégie consistera à : • Donner d'abord des « armes » à l'atta­quant pour réussir : qualité des appuis, tenue du ballon, gamme de tir, etc... • Renforcer le potentiel du défenseur pour obtenir de nouveau une situation d'équilibre, et ainsi de suite. L'enfant apprendra d'abord à contrôler des tenta­tives de débordement par dribble de

contournement, puis il apprendra à réagir aux feintes dans un espace plus restreint pour enfin s'opposer aux techniques modernes crochet, passage de bras... Parallèlement aux intentions collectives de défense, l'expression individuelle dans la relation avec l'adversaire doit être valorisée très tôt dans l'esprit des sports de combat, mais dans le respect des règles du handball. Complémentaire de la notion de « jouer avec », cet aspect individuel renforcera le sens de la res­ponsabilité et cette notion d'affronte­ment direct composante intégrale de ce jeu, jouer aussi contre.

LA DEFORMATION TACTIQUE EN DEFENSE

Par déformation tactique en défense, j'entends la capacité pour une équipe de transformer en cours de partie ses inten­tions tactiques collectives pour mieux s'adapter à l'adversaire, pour le surpren­dre ou le perturber.

Constat : la maîtrise de plusieurs systè­

mes défensifs Ce mondial 86 a couronné la Yougoslavie.

Cette remarquable équipe s'est imposée grâce à son potentiel joueurs, mais aussi a la possibilité qu'elle a de pouvoir, à dessein, changer d'organisation défen­sive. Les champions du monde ont al­terné avec brio, souvent au cours des mêmes matches, des défenses hautes agressives et des organisations alignées, regroupées sur les six mètres. Jusqu'à présent, l'efficacité de la protection de son but résidait en la maîtrise d'un sys­tème performant et caractéristique : dé­fense de zone 3 - 2 - 1 de la Yougoslavie, championne olympique 72, défense ali­gnée de l'URSS en 76, etc.

Les organisations défensives caricatu­rées, très hautes ou très tassées, ont des effets radicaux et pervers. N'en posséder qu'une résume le sort du match à réussir ou perdre. En posséder deux ou plus, permet de jouer sur la stratégie, voir l'alternance. Toutes les équipes de haut niveau maîtrisent plusieurs sytèmes of­fensifs, bien peu peuvent jouer de même au plan des défenses : • Les organisations hautes ou étagées gèrent la circulation du ballon, perturbant les tireurs de loin, mais libèrent des espaces dedans pour les pivots et les ailiers. • Les défenses tassées sont imperméa­bles de près, secteur central et côtés, elles permettent une circulation de balle au centre et laissent beaucoup de champ aux tireurs de loin qu'elles se proposent d'attendre et de contrer. Le modèle yougoslave se propose donc d'alterner les problèmes posés à l'atta­que adverse en essayant d'anticiper sur le moment où la solution est trouvée.

Projet de défense

• Favoriser les défenses étagées L'éducateur a admis, depuis longtemps, que l'utilisation systématique d'une dé­fense regroupée devant son but ne pré­sentait que peu d'intérêt dans le sens de l'évolution de la dialectique attaque-dé­fense car le problème ainsi posé ne connaît que deux solutions : le tir à dis­tance, difficile dans certaines conditions (cf. les causes du tir) et la contre-attaque (essentielle). On propose donc, désormais, dans un souci de dynamisation du jeu, des défen­ses étagées soucieuses surtout de récu­pérer le ballon car c'est l'attaque qui semble motiver l'enfant (cf. perspectives pédagogiques : relation duelle atta­quant/défenseur). S'il ne m'appartient pas de m'inscrire en faux contre cette démarche, je voudrais faire remarquer qu'il ne faut pas trop longtemps proposer une défense qui fa­vorise l'attaque ; or, parfois, cette dé­fense agressive haute n'est mise en place que pour permettre non pas aux défen­seurs de récupérer vite le ballon, mais aux attaquants de trouver des solutions plus facilement. Cela correspond à déna­turer l'activité.

Ma proposition se voudrait la suivante : « Je défends haut, agressif sur le porteur de balle dès la perte, centré sur les trajec-

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toires proches. Par contre loin de l'action qui a provoqué la perte du ballon, je me replie pour voir l'ensemble de la situation et protéger l'axe central qui mène à mon but, tout en prenant des informations sur le placement de mes partenaires ».

L'intention de récupérer la balle doit s'accompagner de la notion de replace­ment par rapport au ballon et au but à défendre. Quand l'attaquant trouve des

solutions de débordement individuel, il importe de s'aligner à deux, voire à trois pour mieux y faire face. • Développer la continuité dans l'action L'important est de rechercher, dès l'ini­tiation le sens de la continuité dans l'ac­t ion. Cela s'obtient en attaque par le respect de principes simples d'organisa­tion autour du porteur (appuis et sou­tiens) et de relations entre ces rôles : donner devant et s'engager, donner der­rière et soutenir. Dans le domaine défen-sif, il faut parvenir aux mêmes enchaîne­ments : harceler, dissuader, soutenir, se replacer, etc. L'enfant doit demeurer constamment en prise avec l'action, sans rupture dans son comportement.

CONCLUSION

Notre préoccupation est donc de voir le sujet s'initiant confronté le plus tôt pos­sible aux ambitions du haut niveau : ges-tualité riche autorisée par un matériel adapté et des préparations adéquates, réhabilitation du duel porteur-défenseur et enfin enchaînement des tâches dé­bouchant sur une continuité d'action.

Daniel Costantini, Entraîneur de l'Equipe

de France Masculine

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CODE DE JEU ARBITI PAR G. PAOLINI

La logique des contacts physiques entre le joueur et son adversaire et, surtout, les problèmes que pose la gestion arbitrale de ces relations sont liés à plusieurs facteurs : le premier, assez subjectif, appelé communément « l'esprit du jeu » (souvent différent selon les latitu­des) et deux autres beaucoup plus probants : - la cible : sa forme, sa dimension, sa situation ; - les droits du porteur de balle. Après une étude comparative, non exhaustive, de quatre autres sports collectifs - volley-ball, basket-ball, rugby et football - pour nous aider à la compréhension de cette logique, nous définirons la spécificité du handball et proposerons quelques éléments de réflexion.

ETUDE COMPARATIVE

Le volley-ball

La relation joueur-adversaire ne présente, dans ce sport, aucun problème particulier pour ce qui concerne les contacts physi­ques. Le défenseur ne peut, pour empêcher le ballon d'atteindre la cible représentée par la totalité de la surface de son propre camp, qu'agir sur le ballon lui-même.

Basket-ball

En basket-ball, les deux équipes pouvant agir sur l'ensemble de l'aire de jeu, les contacts physiques deviennent donc possi­bles. Toutefois, « l'inventeur », le pasteur américain James Naismith, a tenu, dans l'élaboration des règles, à lutter contre les excès de violence du sport-roi des Etats-Unis : le football américain, pour en faire un jeu d'adresse et de grande maîtrise. La cible, quant à elle, est constituée par un cercle élevé, placé horizontalement et à peine plus grand que le ballon. L'adresse est reine et un joueur légèrement bousculé perd toute chance de réussir son lancer au panier. D'autre part, le porteur du ballon n'a le droit qu'à un seul pas en le tenant et ne peut continuer à le conserver qu'en le fai­sant rebondir au sol. Il paraît donc néces­saire de protéger le porteur du ballon au maximum et d'interdire d'agir sur le corps de l'adversaire. La sanction est d'ailleurs relativement sévère car le joueur fautif quitte définitivement le terrain à la cin­quième infraction.

Il semble toutefois que pour ce qui est du basket profess ionnel amér ica in , les contacts soient beaucoup moins sanction­nés (loi de l'avantage... recherche du spec­tacle).

Rugby

A l'opposé, ce jeu a été codifié et s'est développé au milieu du 19e siècle, à l'apo­gée des conquêtes coloniales, pour tenter de viriliser une aristocratie britannique, aspect fort utile en pareille occurence. La cible proposée est une surface d'environ 1 000 m 2 , au bout du champ de jeu, sur toute la largeur de celui-ci ; l'attaquant doit apla­tir le ballon dans cette « terre promise ». En outre, l'attaquant porteur du ballon peut se déplacer sans limite aucune et il a, de plus, le droit de percuter le défenseur, de le repousser (raffût). Pour équilibrer ce rap­port de force, le défenseur, quant à lui, peut agir sur le corps de l'attaquant en le pous­sant, le ceinturant, en le faisant chuter (placage). Par contre, les actions sur les adversaires non porteurs du ballon sont prohibées. Enfin, seules les agressions bru­tales et caractérisées sont passibles d'ex­clusion.

Football

Les mains ne pouvant être utilisées, le ballon n'est jamais appréhendé ; le porteur de balle (dribbleur) ne peut que le guider des pieds, de la tête, du torse et les vraies occasions d'atteindre la cible sont relati­vement rares. Cette cible est, de surcroît protégée par un gardien, ce qui augmente la difficulté d'ex­pédier le ballon dans le but. Le défenseur est donc tenu d'agir prioritairement sur le ballon, et si par exemple la charge épaule contre épaule est admise, elle ne se conçoit que dans la recherche de l'appropriation ou la conservation du ballon. Une action inten­tionnelle sur le corps de l'adversaire est sanctionnée disciplinairement : carton jaune... ou rouge en cas de brutalité mani­feste.

38 DOSSIER F F.H.B

Le défenseur peut agir sur le corps de l'attaquant.

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