C'est le grand concert, les foules en...

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Sur les toits du monde couverts de pierres d’étoiles, là où les astronautes de la falaise planétaire achèvent leurs incroyables courses ascendantes, le corps électrifié par les jardins rocailleux de l’altitude, le temps écrit ses journaux de nuages pour le plaisir des hommes et des femmes de la terre d’en bas. Làhaut, sur les tuiles lisses ou escarpées des roches brutes, enfermés dans leurs ateliers de toiles et de moteurs à pistons, les aviateurs de l’alchimie volante échafaudent de nouvelles machines planantes qui marieront leurs ossatures de bois aux lames du grand Pacifique céleste. Dabert cultive encore cet art enthousiaste des débuts de l’avionneur, et, à l’instar des fuselages à réactions, il préfère la légèreté inégalée de ces planeurs de tissus blancs qui gravirent les escaliers de l’air avec cette naïveté des enfants rêveurs. Blériot vient de rallier Saturne avec son monoplan à hélice en douze heures et quarantecinq minutes, et Pluton n’est déjà plus qu’une faribole. SaintExupéry, lui, se déclare confiant quant aux futurs vols mécaniques vers la galaxie d’Andromède, et ceci au grand dam des journalistes qui narguent l’extravagance de ce pilote dans leurs articles satyriques. Mais SaintExupéry rit de bon cœur en fumant des cigarettes mercuriennes. Les nouveaux avionneurs du cosmos, éditions Les Elles du Désir (disponible en télécommande psychique, code : jeleveux). C'est le grand concert, les foules en liesse s'amassent, les guitares dégagent, il neige des riffs. Noël sous le soleil de la nuit, dans un cyclone d'ombres illuminées comme en plein jour. La vie redevient un enchantement, on respire de nouveau l'air sucré du bonheur. Ici, dans un amphithéâtre à ciel ouvert sous les étoiles, Les Guns N' Roses envoient Sweet Child O' Mine. Plus loin, audessus de l'océan Pacifique, sur une estrade volante, OMD enflamme les esprits avec Enola Gay. Au sommet de l'Empire State Building balayé par les zéphyrs, SaintPreux joue Concerto pour une voix sur un piano de verre C'est la grande ouverture de l'Âge d'Or pour les siècles à venir, partout aux quatre coins du monde les musiciens recouvrent les plages du silence de sonorités étourdissantes. Les vagues musicales inondent les continents. La réalité redevient un jeu vidéo, on peut risquer sans compter, utiliser les codes pour tricher si les journées — les niveaux — se révèlent trop difficiles. Mais pour le plaisir et le principe, la règle veut que l'on réussisse avec la seule force de sa volonté. Ce qui revient à vivre en fait comme avant, amenant des questions philosophiques sur le sens de la vie. Mais bon, l'important est de poursuivre l'aventure, et puis des dizaines et des dizaines d'imprévus surgissent qui donnent du piquant et des émotions fortes. Comme le jeu Jumanji par exemple, pour ceux qui aiment les ambiances tropicales. Il y a aussi une multitude de variations sur l'espace pour ceux qui désirent crapahuter au cœur des galaxies. Sans compter un choix illimité de genres offerts. Je dois vous laisser, Claire Redfield m'attend dans Resident Evil, le temps d'éradiquer les monstres sanguibaires de la TVA et des impôts locaux, et on file se dorer sous le soleil de BoraBora.

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Page 1: C'est le grand concert, les foules en liesseekladata.com/ALHwc38pWj7G7fyONziKw3txRG4/AREKULTUR-N-6.pdfmarieront leurs ossatures de bois aux lames du grand Pacifique céleste. Dabert

Sur les toits du monde couverts de pierresd’étoiles, là où les astronautes de la falaiseplanétaire achèvent leurs incroyablescourses ascendantes, le corps électrifié parles jardins rocailleux de l’altitude, le tempsécrit ses journaux de nuages pour le plaisirdes hommes et des femmes de la terre d’enbas.

Là­haut, sur les tuiles lisses ou escarpéesdes roches brutes, enfermés dans leursateliers de toiles et de moteurs à pistons, lesaviateurs de l’alchimie volante échafaudentde nouvelles machines planantes quimarieront leurs ossatures de bois aux lamesdu grand Pacifique céleste.

Dabert cultive encore cet art enthousiastedes débuts de l’avionneur, et, à l’instar desfuselages à réactions, il préfère la légèretéinégalée de ces planeurs de tissus blancs quigravirent les escaliers de l’air avec cettenaïveté des enfants rêveurs.

Blériot vient de rallier Saturne avec sonmonoplan à hélice en douze heures etquarante­cinq minutes, et Pluton n’est déjàplus qu’une faribole.

Saint­Exupéry, lui, se déclare confiantquant aux futurs vols mécaniques vers lagalaxie d’Andromède, et ceci au grand damdes journalistes qui narguent l’extravagancede ce pilote dans leurs articles satyriques.Mais Saint­Exupéry rit de bon cœur enfumant des cigarettes mercuriennes.

Les nouveaux avionneurs du cosmos,éditions Les Elles du Désir (disponible entélécommande psychique, code : jeleveux).

C'est le grand concert, les foules en liesses'amassent, les guitares dégagent, il neige desriffs. Noël sous le soleil de la nuit, dans uncyclone d'ombres illuminées comme en pleinjour. La vie redevient un enchantement, onrespire de nouveau l'air sucré du bonheur.

Ici, dans un amphithéâtre à ciel ouvert sousles étoiles, Les Guns N' Roses envoient SweetChild O' Mine. Plus loin, au­dessus de l'océanPacifique, sur une estrade volante, OMDenflamme les esprits avec Enola Gay. Ausommet de l'Empire State Building balayé parles zéphyrs, Saint­Preux joue Concerto pourune voix sur un piano de verre

C'est la grande ouverture de l'Âge d'Or pourles siècles à venir, partout aux quatre coins dumonde les musiciens recouvrent les plages dusilence de sonorités étourdissantes. Lesvagues musicales inondent les continents.

La réalité redevient un jeu vidéo, on peutrisquer sans compter, utiliser les codes pourtricher si les journées — les niveaux — serévèlent trop difficiles. Mais pour le plaisir etle principe, la règle veut que l'on réussisseavec la seule force de sa volonté. Ce quirevient à vivre en fait comme avant, amenantdes questions philosophiques sur le sens de lavie.

Mais bon, l'important est de poursuivrel'aventure, et puis des dizaines et des dizainesd'imprévus surgissent qui donnent du piquantet des émotions fortes. Comme le jeu Jumanjipar exemple, pour ceux qui aiment lesambiances tropicales.

Il y a aussi une multitude de variations surl'espace pour ceux qui désirent crapahuter aucœur des galaxies. Sans compter un choixillimité de genres offerts.

Je dois vous laisser, Claire Redfieldm'attend dans Resident Evil, le tempsd'éradiquer les monstres sanguibaires de laTVA et des impôts locaux, et on file se dorersous le soleil de Bora­Bora.

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Aux antipodes, dans un caveau tapissé depourpre, j’avais retrouvé l’emplacement desjarres contenant l’huile élévatrice des cinqsens.

Après avoir déplacé les jarres en lesroulant sur leurs bases, et ôté chaquecouvercle noué de cordes pour déverser leurcontenu, je les renversai près d’un réseau derigoles gravées dans un dallage en pente.

De chacune des jarres coula un liquide demiel vers un bassin prévu pour cecérémonial ; le fond du bassin rectangulaireétait séparé en deux par une ligne à l’aspectcalleux.

Il existe des centaines et des centaines decaveaux de cette sorte, disséminés un peupartout. Muni d’une boussole, on peutdéterminer leur position en suivant toujoursle cinquième point cardinal que les marinsde l’éther nomment le N.O.S.E., et qui est lasynthèse des quatre premiers.

Pour situer le N.O.S.E., il faut partir duprincipe que les quatre premiers pointscardinaux ne désignent que des repèresabstraits ; ensuite toutes leurs combinaisonsintermédiaires, comme par exemple le nordouest ou le sud est, servent, elles aussi, àinventer des hypothèses de lieux, desgraduations qui suggèrent l’approche de cecinquième point cardinal.

Les caveaux se trouvent dans n'importequel vivant de n’importe quelle péninsule dugrand TOUT. Ou devrais­je parler decerveaux ?

Les galaxies neuronales, Albert vonStein, 1953.

Je traversai Paris avec Daniel Gélin. Unsoleil radieux illuminait les boulevards. Unenouvelle vie prenait son essor au milieu dusiècle, dans un souffle d’enthousiasme. Fairedu théâtre représentait le nec le plus ultrapour exprimer toutes les émotions de son âmeet de la vie. Les grands classiquesdramatiques servaient de tremplin pour lacomédie moderne. Le cinéma s’affichaitcomme un rêve ultime de gloire publique.

J’ai dansé le hip­hop au caveau duLorientais, à Saint­Germain­des­prés, dans lafureur rythmique du jazz et le brouillard descigarettes américaines. Le centre du mondegravitait autour d’Orphée et de la Javanaise.Tout devenait possible, il suffisait d’y croire etde foncer sans réfléchir.

C’était un été entre le rêve et la réalité,comme tous les étés où l’esprit s’enflamme àla recherche du pays des merveilles. La simpleidée miraculeuse et lumineuse de créer desœuvres nouvelles et inédites nous emportaitvers les cimes, avec la sensation d'être unique.Et cela nous convenait parfaitement.

Tout était dans l'ambiance agréablementsurvoltée et le plaisir de toutes les audacesartistiques et scientifiques, nous aurionsdécroché la lune ; et nous l'avons fait dans lesmoments de grande euphorie, aux sonsétourdissants des trombones, des trompetteset des clarinettes

Les choses devaient continuer ainsi, il nepouvait pas en être autrement, ce tempsaurait dû se prolonger une éternité. Mais onsavait que d'autres musiques viendraientprendre le relais, transformant la vie malgrénous, pour d'autres émotions. En attendant,nous ne pensions à rien d'autre, enivrés parl'instant présent.

Rendez­vous de juillet, Jacques Becker,1949.

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Jacques a quitté la métropole en 1968,laissant sa femme et ses trois enfants, pourdébarquer en Guyane Française, un lieu quil’appelait pour une autre vie sous un soleilplus fort. Lieutenant dans l’armée de l’air,pilote de Mirage, un chevalier du ciel commedans le feuilleton de l’époque, il avait choisi lavie civile qui s’accordait plus avec son espritde liberté. Parfois, une autre voie se dessine,la route jaune du Magicien d’Oz, et on laprend sans se poser de questions.

Il a enseigné les maths à Cayenne entredeux balades en forêt, dans cette immensesalle de concert végétale, où tous les crisd’animaux peuvent s’arrêter en même tempsdeux secondes, dans un silence magique,pour reprendre ensuite. Hasard ou télépathiecollective ? Il a rencontré bien des mystèresavec les sorciers voyants, les esprits de lanature, et Carlos Castaneda dont il a dévorétoute l’œuvre. Pour lui, nous avons déjà touten nous au départ, il suffit de le réveiller.

Il m’avait expliqué : quand on parle deporte dans la forêt, c’est un passage quipermet d’accéder à une autre partie des lieux.Un matin il dormait dans un hamacsuspendu, il se réveille, empoigne son fusilqui ne le quitte pas la nuit. Le hamac estsecoué. C’était un tapir qui se frottait le dos.Une autres fois, il a vu sortir de l’eau unmagnifique jaguar, qui est passé à quelquesmètres de lui sans lui prêter attention.

Il a cherché de l’or avec une petite machinequi filtrait l’eau, appelée une dragueuse­suceuse. Rien à voir avec les grandesentreprises qui détruisent le paysage endévastant les rives. La seule trouvailleimportante fut une pépite, qu’il a fait monteren collier. La richesse vraiment immortelleest bien spirituelle, c’est ce qui nous resteaprès la vie

Il disait : « La vie est un film, quand onen a fini un, on en commence une autre. »C'était bien le résumé de sa philosophie dela vie. Sur une carte de Noël datant du 15décembre 1977, il m’écrivait :

« Résorber ses conflits internes, c’estacquérir consciemment des pouvoirs. Alorson choisit sa réalité. L’espace­temps devientréellement une construction de notre esprit.On choisit le Maître de sa tête. Action ! »

L’Amérique du Sud m’a toujours faitpenser aux civilisations solaires, les Mayaset les Incas, le serpent à plumes, la Puertadel Sol, Machu Picchu, les tracés de Nazca,l’Eldorado, Tintin et le temple du soleil, leschantiers de Brasilia dans L’homme de Rio.Des ambiances qui me faisaient rêverd’aventures, de trésors retrouvés dans destemples perdus au fond des jungles.

Il voulait en faire le tour avec sa mototrial, passer par l’Argentine pour remonterjusqu’à Quito en Equateur Son pèlerinage deCompostelle à lui. Je ne sais pas s'il estparti, je reste souvent une année sansnouvelles, parfois deux. Il a une autre notiondu temps qui passe, sa vie se déroule dansune sorte d'éternité en dehors de l'espace etdu temps. Internet ne l'intéresse pas, ilvoyage avec d'autres moyens sans douteplus extraordinaires que les nôtres.

Les contes d’Amazonie, Jacques de SaintPierre, à paraître.

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A bientôt sur d’autres mondes, avecl’amitié des chercheurs et des artistes detoutes renommées, installés dans les nidsvoluptueux des jungles pacifiques, accoudésaux rampes de lancement des fusées decristal, accroupis dans le torrent des idées, àla cueillette de l’or hypnagogique de l’alphaet de l’oméga, les pieds marchant sur leslongues pistes découvertes des templesmédiumniques, le visage caressé par lapluies des hologrammes édéniques.

A bientôt au cœur des soleils irisés dedouceurs lumineuses, à l’orée sombre descrépuscules, quand les oiseaux migrateursallongent leurs vols vers les minuitsmagnétiques, sur le scintillement des plagesmurmurantes, dans le roulis soyeux desrotations célestes, aux berges des capitalesvénitiennes, par­delà les rêves les plusincroyablement mirifiques.

A bientôt sur la route des comètescascadeuses qui sillonnent l’espace de nossourires, sur le pont des navires voguantvers les deltas du rêve, planant dans lapoudrière tiède des aubes enrubannées degouttes de rosées pures, aux seuils desmétabolismes féeriques qui engendrent lesprintemps éternels.

A bientôt sous les tonnerres éclatants despluies transparentes, trempés par lesaverses de graines et de pollens poussés parles courants solaires du large sidéral vers leslointaines novas aux pulsations vivantes.

A bientôt pour le délire des baisersdonnés sur les lèvres des époux et desépouses stellaires, quand les brumess’éveillent à la lumière du jour infini, pour laclarté profonde des nuits diaphanes où lescorps s’aiment dans les alvéoles de lamatière délivrée de son contrat de rigidité.

Le principe repose sur une simple idée,disons sur une simple question : « Le hasardexiste­t­il ? » Et sur une simple réponse,enfin deux réponse : « Oui il existe » et « Nonil n’existe pas ».

C’est aussi un livre des frères Bogdanovqui expose magistralement toutes les facettesde la question. Avec au final une réponseidéale qui bouleverse toutes les phllosophiesuniverselles et l’univers lui­même.

Dans un premier temps, on pourraitpenser que le hasard existe, trop de chosesarrivent à l’improviste ; dans un deuxièmetemps, il est vrai que certaines choses sontprogrammées et ne peuvent relever duhasard.

Des écoles philosophiques et scientifiquesse battent, depuis le premier souffle humain,prônant l’une ou l’autre réponse. L’artiste lui­même donne son avis, le poète en fait desritournelles virevoltantes de réflexions desplus charmantes.

Mais alors, où est la vérité ? Le hasardexiste ou n'existe pas ? Je dirai qu'il s'agitplus de miser sur le Oui ou le Non, peut­êtremême les deux ; ce qui serait à mon avis lechoix le plus logique.

De toute façon l'univers continue sa valseaux temps infinis, notre monde avec, leschoses sont là. Une délicieuse boisson fraîcheen été sera toujours un moment d'intensesérénité ; et que l'été ou la boisson soient unhasard ou pas, cela n'a au fond aucuneimportance.