Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du...

8
Ce travail résume un rapport remis à la Société du Grand Paris et un document de travail scientifique présenté dans de nombreuses universités et conférences (Haas School à Berkeley, London School of Economics, UB-UEB, Université de Lausanne entre autres et au Conseil Scientifique du Grand Paris). Etienne Wasmer est codirecteur du LIEPP et professeur d'économie à Sciences Po. [email protected] Comment citer cette publication : G. Chapelle, E. Wasmer, P-H. Bono, Impact du Grand Paris Express sur le marché du travail et le marché du logement, LIEPP Policy Brief, n°35, 2017-12-20. Gauillaume Chapelle est chercheur post-doctoral à l'Institut d'Economie de Barcelone et chercheur affilié au LIEPP. [email protected] Pierre-Henri Bono est chercheur au LIEPP et chef de projet. Il travaille sur l'analyse des données spatiales et l'évaluation des politiques de logement. [email protected] *Les opinions émises dans ce policy brief sont propres aux auteurs et n’engagent aucunement les différentes institutions auxquelles ils sont affiliés. Les auteurs adhèrent à la charte de déontologie du LIEPP disponible en ligne. La recherche qui sous-tend ce policy brief a bénéficié d’un financement de la Société du Grand Paris. Les auteurs n'ont pas déclaré de conflit d'intérêt potentiel. Pierre- Henri Bono et Guillaume Chapelle ont été rémunérés sur ce projet comme salariés.

Transcript of Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du...

Page 1: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Ce travail résume un rapport remis à la Société du Grand Paris et un document de travail scientifique présenté dansde nombreuses universités et conférences (Haas School à Berkeley, London School of Economics, UB-UEB,Université de Lausanne entre autres et au Conseil Scientifique du Grand Paris).

Etienne Wasmer estcodirecteur du LIEPP etprofesseur d'économie à

Sciences Po.

[email protected]

Comment citer cette publication :G. Chapelle, E. Wasmer, P-H. Bono, Impact du Grand Paris Express sur le marché du travail etle marché du logement, LIEPP Policy Brief, n°35, 2017-12-20.

Gauillaume Chapelleest chercheur post-doctoral à

l'Institut d'Economie deBarcelone et chercheur

affilié au LIEPP.

[email protected]

Pierre-Henri Bonoest chercheur au LIEPP et

chef de projet. Il travaille surl'analyse des données

spatiales et l'évaluation despolitiques de logement.

[email protected]

*Les opinions émises dansce policy brief sont propres aux

auteurs et n’engagent aucunementles différentes institutions

auxquelles ils sont affiliés.Les auteurs adhèrent à la charte de

déontologie du LIEPP disponibleen ligne. La recherche qui sous-tend

ce policy brief a bénéficié d’unfinancement de la Société du GrandParis. Les auteurs n'ont pas déclaréde conflit d'intérêt potentiel. Pierre-Henri Bono et Guillaume Chapelle

ont été rémunérés sur ce projetcomme salariés.

Page 2: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Le projet du Grand Paris Express (GPE) estune extension significative de l’infrastructure. Elleconstitue un « choc » d’offre de taille importante surles temps de transports dans l’agglomération. LaSociété du Grand Paris qui en charge de la mise enœuvre du métro estime que les usagers gagnerontenviron 3 % de coûts de transports généralisés quiincluent les gains de temps, de pénibilité et les coûtsfinanciers directs. Pour comprendre les implicationsd’un tel projet transformationnel, il a été demandéaux équipes du LIEPP de produire une évaluationde l’impact du GPE sur le marché du travail et surcelui du logement de manière intégrée. Cette étudecomplète l’analyse empirique de l’impact du GPEsur les investissements directs étrangers (Bono etalii. 2017).

Une évaluation macroéconomique pose desquestions nouvelles en terme de modélisation. Enrégion parisienne, les marchés du travail sont sujets àfrictions et un cadre naturel d’analyse est lamodélisation des marchés dits d’appariement. Parailleurs, la dimension spatiale de l’agglomérationnécessite un modèle de logement qui soit à la foislocalisé spatialement, permettant de rendre comptedes rentes foncières, et segmenté, pour rendrecompte des régulations en région parisienne. Pourconcilier ces différents aspects, un modèled’économie urbaine nouveau a été développé. Ilpermet de répondre de manière qualitative etquantitative à la problématique du rôle desinfrastructures de transports dans les marchés dutravail et du logement. Après avoir brièvementprésenté les caractéristiques du modèle, nousprésentons les principaux résultats après unecalibration du modèle sur l’agglomération parisienneet la simulation du choc de transport.

Il apparait qu’une amélioration du réseau detransport réduit le gradient de rente foncière. Cepremier effet permet, si la population est maintenuefixe par manque de développement d’une offrefoncière supplémentaire, de réduire le taux dechômage d’équilibre en diminuant les coûts deproduction des entreprises liés au foncier. Laréduction du taux de chômage reste toutefois trèslimitée tout comme le nombre d’emplois créés souscette hypothèse. Ceci est peu surprenant, dans lamesure où l’on peut difficilement attendre qu’uneinfrastructure de transport réduise très fortement letaux de chômage structurel d’une agglomération. Leniveau du chômage dépend en priorité de nombreux

paramètres propres au marché du travail et ladimension du transport n’en est pas la principale.

En revanche, si la population peut croître, lesgains de temps de transports conduisent à uneréduction de la pression des ménages surl’immobilier du centre de l’agglomération : celaaugmente l’attractivité globale de la ville. Desemplois sont créés de manière proportionnelle à laréduction du temps de transport. Les effets sont del’ordre de 160 000 emplois, et assez stables àdifférents scénarii de modélisation des paramètresstructurels de l’économie ainsi modélisée. Leparamètre clé ici est la façon dont l’agglomérationpeut s’étendre autour des nouvelles lignes et lalibération du foncier.

Le modèle développé n’est pas un modèleprédictif à proprement parler, il représente plutôtune maquette de l’économie parisienne, qui permetl’analyse des effets de loyers sur les salaires et lademande d’emploi dans un contexte spatial et dansdes scénarii alternatifs de politiques publiquesd’accompagnement du projet. Il permet aussi, aprèscalibration avec des données riches, de donner uneidée des ordres de grandeur des effets attendus. Il estconstruit de façon à permettre l’intégration dedifférents blocs (frictions d’appariement desemplois, négociation des salaires, rente foncière,externalités de production) dans un cadre flexible.Le modèle repose sur trois idées principales : uneaire urbaine monocentrique, des marchés de l’emploiet du logement frictionnels et un marché dulogement dual avec une partie administrée, nonsoumise aux forces de marché.

L’hypothèse de monocentricité retenue sous-entend que l’agglomération parisienne s’organiseautour de la commune de Paris qui concentre lamajorité des emplois. Le modèle s’inscrit dans latradition de rente foncière ricardienne des modèlesurbains monocentriques, adaptés aux agglomérationsmodernes développés dans les années 60 par desauteurs comme Alonzo, Muth et Mill [1]. Toutcomme les modèles séminaux, il se caractérise parun certain nombre de gradients entre le centre del’aire urbaine (le CBD pour « Central BusinessDistrict ») et sa périphérie. Dans notre cas le centrede la métropole est représenté par l’emplacement dela mairie du premier arrondissement. Les deux cartesthématiques ci-dessous confirment le caractèremonocentrique de l’agglomération avec des densitésd’emplois et de population très élevées au centre etqui diminuent en fonction de la distance à celui-ci.

[1] Alonso, W. (1964). "Location and land use. Toward a general theoryof land rent"; Muth, R. F. (1969) Cities and Housing. Univ. ofChicago Press; Mills, E. S. (1967). "An aggregative model ofresource allocation in a metropolitan area." The AmericanEconomic Review 57(2): 197-210.

Encadré.Le projet du Grand Paris Express

Le projet du Grand Paris Express comprend 68nouvelles gares et 200 kilomètres de voiessupplémentaires, dont 90 % en souterrain. Le coûtattendu est de 25,5 milliards d’euros pour une duréede travaux de 25 ans environ.

Page 3: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Cette deuxième hypothèse fondamentale denotre modèle suppose que le processusd’appariement urbain entre les entreprises et lestravailleurs est coûteux. Les agents économiquessont alternativement employés et demandeursd’emploi, avec des transitions gouvernées par unprocessus de création d’emploi et de destructiond’emploi dit d’appariement qui a été adapté audébut des années 2000 au cadre urbain. Les rentesd’enchères des individus dépendent donc de lalocalisation dans l’espace et du statut dans le marchédu travail.

L’allocation du foncier n’est pas uniquementgouvernée par des mécanismes de marché. Il peutexister un important secteur aux loyers administrésà l’instar du logement social. Notre approche demodélisation innove par rapport à la littératureexistante en ce qu’elle est conçue pour décrire unmarché du logement explicitement dual,représentant plus précisément l’agglomérationparisienne que les modèles urbains existants. Ainsinous prenons en compte la coexistence d’un marchédit « libre », où les prix du logement et les loyerss’ajustent à l’offre et à la demande, et d’un marchédit « contrôlé », où les loyers sont contraints. Lemarché contrôlé regroupe le parc social ainsi qu’unepartie du parc locatif privé dont les loyers sontrégulés et ne peuvent pas s’ajuster. Le parc librecomprend lui les constructions nouvelles, l’achat-vente dans l’ancien et enfin le renouvellement desbaux locatifs privés lorsque l’encadrement du loyern’est pas contraignant.

Notons que théoriquement, un marché del’immobilier sans régulations conduit à uneallocation des travailleurs dans l’espace francilien quiest à la fois inégalitaire (les personnes avec les plusgrandes capacités productives pourront vivre dansles quartiers les plus chers et les plus proches des

lieux de production) et efficace au sens du premierrang (les personnes désirant payer le plus pour serapprocher le pourront, et celles n’ayant pasd’intérêt particulier pour être dans les zones tenduess’éloigneront). C’est le propre des marchés : ilsépuisent les opportunités d’échange mais peuventcréer des inégalités. L’inégalité spatiale peut êtredynamiquement inefficace du fait de la création dezones à faible emploi, à l’origine d’externalitésnégatives importantes (voir notamment Le ghettofrançais d’Éric Maurin (2004), ou le récent rapportdu LIEPP de Nina Guyon (2017)). Le sous-jacentde l’analyse est que la coexistence d’un secteur libreet d’un secteur contrôlé permet de réconcilierl’efficacité économique et la cohésion territoriale.

De fait, dans notre modélisation, le secteurlibre permet de loger, à prix élevé, les actifstravaillant au centre de l’agglomération, et le secteurcontrôlé loge à la fois des personnes employées etau chômage, ce qui est un équilibre de mixité socialequi n’existe pas dans la plupart des modèles urbainshabituels où le mécanisme d’allocation par la rented’enchère conduit à un équilibre parfaitementdiscriminant.

L’arbitrage classique entre cohésion socialed’une part et efficacité économique d’autre partn’est pas indépassable : le rôle des transports publicsest précisément de desserrer cette contrainte afind’acheminer plus vite les personnes vers les emploistout en permettant de conserver une partie du parcde logement à des prix déconnectés de ceux dumarché.

Une étape de calibration permet ensuite dequantifier les implications du modèle. Cette étapeconsiste à collecter et analyser un vaste ensemble dedonnées de diverses sources, en nous appuyantquand c’était nécessaire sur des méthodes decollecte novatrices issues d’internet et permettant demesurer la rente foncière à un niveau de granularitéplus fin que ce qui est habituellement disponibledans les enquêtes. Une fois ces données collectées,nous pouvons reproduire une maquette fiable del’agglomération parisienne. Nous présentons dans

Figure 1. Densité de population (à gauche) et densité d'emplois (à droite)

Page 4: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

ce qui suit certains des paramètres clés du modèleurbain parisien et la façon dont les données sourcesont été collectées.

Le premier paramètre clé est la décroissancedu coût du logement en fonction de la distance aucentre, dans le secteur libre comme dans le secteurcontrôlé. Si ce dernier est dans le modèle un simpleparamètre imposé de manière exogène aux agents, legradient dans le secteur libre est lui le résultat d’unéquilibre. Ces paramètres sont calculés à partir desdonnées de loyers et de prix issues des BasesBIENS, des annonces immobilières et des côtesCallon, ainsi que de la base de loyers de Chapelle etEyméoud (2017) [2] constituée à partir des donnéesde loyers en ligne. Pour le scénario central, le loyerau centre de l’agglomération dans le secteur libre est3,5 fois celui de la périphérie de l’agglomération,alors que dans le secteur contrôlé, ce ratio n’est quede 1,11, ce qui correspond à un écrasement dugradient de loyers fixés administrativement dans lesecteur social ou à des revalorisations annuellescontenues dans le secteur locatif privé aprèsquelques années d’ancienneté du bail.

Le deuxième paramètre est le coût descharges foncières des entreprises relativement à leurproductivité. Notre méthode consiste à comparer lasurface occupée par les personnes dans le secteurrésidentiel (environ 33 mètres carrés en Île-de-France selon les données de l’enquête logement del’INSEE) avec la surface occupée par salarié dans lesentreprises (environ 20 mètres carrés pour les

bureaux, surfaces communes comprises). Ainsi, lecoût payé par les salariés résidant au centre estmultiplié par un facteur 20/33 = 0,61 pour lesentreprises. Les autres agrégats macroéconomiques(chômage, emploi, population, durée de la recherched’emploi) proviennent de données de l’INSEE et detraitement par la DARES.

Une fois ces paramètres clés du modèleidentifiés, nous avons dans un second tempseffectué un grand nombre de simulations du modèleafin de le paramétrer de manière à reproduire lesprincipales caractéristiques de l’agglomérationparisienne et de tester des alternatives dans le choixdes paramètres clés. Une fois cette maquetteobtenue et stabilisée, nous avons mesuré l’impact duGrand Paris Express sur les marchés de l’emploi etdu logement de manière intégrée.

Il était intéressant pour les décideurs debénéficier d’une équation unique liant l’emploi et lelogement. Le modèle mis en oeuvre permet une telledémarche en proposant deux horizons temporels :un horizon de court terme où la population del’agglomération ne répond pas au choc du GPE, etun horizon de long terme où la population de la villepeut s’ajuster en réponse au GPE. Grâce à de petitschocs sur les salaires et les loyers, nous sommes enmesure d’identifier la contribution de chaque facteuren équilibre partiel. Notre fonction de demanded’emploi de court terme (à population constante)montre qu’une baisse de 1 % des coûts du foncierconduit à une augmentation de 0,06 % du nombred’emplois. Par ailleurs, cet effet direct est complétépar un effet indirect, car les salaires sont égalementaffectés par le coût du foncier. Par ailleurs, le modèleprédit qu’une baisse de 1 % du coût du foncierdiminue les salaires dans le secteur libre de 0,04 %,mais augmente de 0,02 % les salaires des personnesrésidant dans le secteur contrôlé. Il existe donc unsecond effet net positif via la modération salariale.

[2] Chapelle, G. and Eyméoud, J.-B. (2017). The Cost of agglomerationand the housing supply elasticity : The extensive and intensivemargin housing supply elasticities. Sciences Po mimeo.

Page 5: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Figure 2. Mécanismes liant infrastructuresde transport et marché de l’emploi

A long terme le nombre d’emplois dépendégalement de la population. L’équation est :

On trouve un effet positif de la productiviténette des personnes logées dans le secteur libre avecune élasticité de 0,718, et un effet légèrement plusfaible mais positif de la productivité nette despersonnes logées dans le secteur contrôlé. Enfin,l’emploi réagit à la population de façon presqueproportionnelle : une augmentation de 1 % de lapopulation se traduit par une augmentation dunombre d’emplois de 1,079 %.

Nous séparons notre analyse entre effets decourt terme, c’est-à-dire en gardant la populationactive constante et effet de long terme avec unepossibilité d’ajustement de la population. En effet,les effets attendus d’une amélioration desinfrastructures de transport varient en fonction del’horizon temporel. Nous proposons dans la Figure2 une représentation schématique des mécanismessous-jacents de notre modèle de l’impact d’un chocde transport sur les marchés du logement et del’emploi pour les deux horizons. La chaine causalemise en œuvre suppose que l’amélioration desinfrastructures de transport a un impact sur lemarché du logement en diminuant la pente dugradient de la rente foncière qui à son tour impactede manière différente le marché du travail enfonction de l’ajustement de la population.

En réduisant les coûts de transport, le Grand ParisExpress réduirait la rente de localisation desménages résidant près du centre-ville. Ainsi, pour ungain de 3 % en termes de coûts de transport danstoute la périphérie, les loyers au centre diminueraientd’environ 1,7 % et la pente entre le centre-ville et lapériphérie passerait de -0,0466 à -0,0451. Legradient de rente foncière en périphérie ne seraitquant à lui que marginalement affecté.

L’impact le plus notable d’une amélioration desinfrastructures de transport en ville fermée, c’est-à-dire à court terme, réside dans l’augmentation dubien-être de la population due à la baisse de la rentefoncière et la diminution du temps de transportmoyen au sein de l’agglomération. Une amélioration

de 3 % des infrastructures de transport se traduitainsi par une augmentation significative de l’utilitépour l’ensemble des agents. Cependant, il peut êtreamplifié par l’existence d’externalitésd’agglomération, mais également modéré par laconsommation endogène d’espace. Une élasticité desubstitution relativement faible entre espace et le biencomposite peut amener les ménages en place àpartiellement absorber les gains liés auxinfrastructures de transport en augmentant leurconsommation d’espace.

En ville fermée, une diminution de 3 % des coûts detransport pourrait générer une baisse du chômagede 0,005 point de pourcentage ce qui se traduiraitpar la création d’environ 2 800 emplois grâce à unediminution de la rente foncière documentéeprécédemment et l’augmentation subséquente de laproductivité de l’agglomération.

Une amélioration des infrastructures detransport génère une amélioration du bien-être ausein d’une agglomération. Une telle amélioration desaménités publiques entraine un regain d’attractivitéde la ville en attirant de nouveaux ménagescontribuant à la croissance de la population active etde l’emploi. Dans cette section, nous levonsl’hypothèse de population fixe afin d’évaluer les effetspotentiels de long terme du Grand Paris Express.

À long terme, le loyer au centre-ville retrouve sonniveau initial, mais le profil de rente foncière semodifie pour permettre à la ville de s’étendre au-delà de ses limites initiales. Ces prédictions sontconformes aux études empiriques de Duranton etTurner (2012)[3].

log (Nombre d'emplois créés) =-0,0223×log (coût foncier) +0,718×log (Productivité nette dessalaires des personnes logées dans le secteur libre) +0,462×log(Productivité nette des salaires des personnes logées dans le secteurcontrôlé) + 1,079×log(Population)

[3] Duranton, Gilles and Turner, Matthew, (2012), Urban Growthand Transportation, Review of Economic Studies, 79, issue 4,p. 1407-1440.

Page 6: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Nous notons que l’amélioration des infrastructuresde transport procure un avantage comparatif àl’agglomération touchée, améliorant son attractivitéet générant une croissance de sa population active.L’augmentation de la taille critique de la ville setraduit par une augmentation du nombre d’employéset par une création significative d’emplois. Ainsi,pour une augmentation de 3 % de l’efficacité destransports au sein de l’agglomération, les simulationsprédisent une augmentation d’environ 3,1 % de lapopulation active soit environ 168 000 emplois créés.Cet effet semble linéaire par rapport à l’améliorationdes infrastructures.

Certains mécanismes non modélisés peuventégalement intervenir. Nous discutons ici deux aspectsque des études postérieures pourraient quantifier.

Le premier mécanisme concerne lesdynamiques de transition dans le temps. L’impactpotentiel du Grand Paris Express dépend fortementde l’horizon temporel. Or pour le moment, lamodélisation en économie urbaine, principalementbasée sur des modèles d’équilibre, est encore peuoutillée pour décrire les processus transitoires entrecourt terme et long terme. Un prolongement de laprésente étude tenterait de modéliser ces dynamiquesde transition afin d’estimer la temporalité des effetsen fonction du niveau d’élasticité extensive de l’offrede logements.

Un deuxième champ d’analyse complémentaireconcerne la modélisation des comportements de

prospection d’emploi des demandeurs d’emploi. Lesmécanismes de ségrégation sociale poussant à laconcentration de chômage de longue durée dans lapériphérie de l’agglomération (spatial mismatch)peuvent être atténués par les nouvellesinfrastructures.

Une remarque finale porte sur l’articulationavec l’étude du LIEPP portant sur l’effet desinfrastructures de transport sur les investissementsdirects étrangers (FDI) et leur effet en emploi. Leseffets en emploi trouvés dans notre étude semblentmoins élevés que ceux directement induits par lesprojets FDI, compte tenu de leurs proportionsrespectives dans l’emploi total. L’effet en emploi desFDI serait ainsi nettement plus élastique que l’effeten emploi sur toute l’agglomération. Cela suggèreque les décisions de localisation des emplois FDIdépendent beaucoup du dynamisme desinfrastructures tel qu’il est perçu par les décideurs.Cette question reste à approfondir et suggère denouvelles pistes de recherche.

Alonso, William, (1964), "Location and land use. Toward ageneral theory of land rent", Harvard University Press.

Chapelle, Guillaume and Eyméoud, Jean-Benoît, (2017), TheCost of agglomeration and the housing supply elasticity :The extensive and intensive margin housing supplyelasticities. Sciences Po mimeo.

Duranton, Gilles and Turner, Matthew, (2012), Urban Growthand Transportation, Review of Economic Studies, 79, issue4, p. 1407-1440.

Guyon, Nina, (2017), Étude des effets de la rénovation urbainesur l’évolution du bâti et du peuplement dans les quartiersciblés entre 2004 et 2013, LIEPP Report, février.

Maurin, Éric, (2004), Le ghetto français. Enquête sur leséparatisme social. Paris, éditions du Seuil, coll. « LaRépublique des idées ».

Mills, Edwin S. (1967), "An aggregative model of resourceallocation in a metropolitan area." The American EconomicReview 57(2): 197-210.

Muth, Richard F. (1969), Cities and Housing. The Spatial Patternof Urban Residential Land Use. University of ChicagoPress.

La réduction des coûts de transport augmente lesloyers dans la périphérie lorsque la population dela zone urbaine s'ajuste parfaitement grâce à lacréation de nouveaux logements. Cela crée ausside nouveaux emplois, environ 160 000 pour uneréduction de 3 % des coûts de transport, unnombre qui est approximativement linéaire dans laréduction des coûts de déplacement.

Page 7: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Martial FOUCAULT, Sylvain BROUARD, "Préférences budgétaires des citoyens: résultats d'uneexpérience en ligne" LIEPP Policy Brief n°34, décembre 2017

Julia CAGE, "Qui possède les médias?" LIEPP Policy Brief n°33, décembre 2017

Sylvain BROUARD, "Les effets de la loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales et desmandats parlementaires sur le renouvellement du personnel politique" LIEPP Policy Brief, n°32,novembre 2017

Elvire GUILLAUD, Michaël ZEMMOUR, "Les quatre leviers de la redistribution" LIEPP Policy Brief,n°31, juillet 2017

Marius BRULHART, Céline CARRERE, Frédéric ROBERT-NICOUD, "Le commerce internationalbénéficie-t-il aux zones frontalières ?" LIEPP Policy Brief n°30, juin 2017

Nina GUYON, "Quels effets de la rénovation urbaine sur les quartiers ciblés ?" LIEPP Policy Brief, n°29,février 2017

Florence FAUCHER, Laurie BOUSSAGUET, "Mobiliser des symboles pour répondre au terrorisme",LIEPP Policy Brief, n°28, novembre 2016

Clément CARBONNIER, Gwenaële ROT, Clément MALGOUYRES, "Evaluer les impacts du créditd’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE)", LIEPP Policy Brief, n°27, septembre 2016

Jeanne LAZARUS, Yohann MORIVAL, "Redéfinir les frontières du surendettement : Quel problème pourquel public?", LIEPP Policy Brief, n°26, septembre 2016

María José ÁLVAREZ RIVADULLA, "Limits and Possibilities of Mixing Policies: Lessons from and forLatin American cities", LIEPP Policy Brief, n°25, May 2016

Page 8: Ce travail résume un rapport remis à la Société du …/2441/10vv4atk6886c97u6e...Le projet du Grand Paris Express (GPE) est une extension significative de l’infrastructure. Elle

Si vous voulez recevoir les prochainséchos du LIEPP et rester informésde nos activités, merci d'envoyer uncourriel à : [email protected]

Directeurs de publication :Bruno Palier

Maquette :Juliette SebanAndreana Khristova

Sciences Po - LIEPP27 rue Saint Guillaume75007 Paris - France+33(0)1.45.49.83.61

© LIEPP 2017