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CAROL MARINELLI À la merci de son patron

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CAROL MARINELLI

À la mercide son patron

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À la merci de son patron

CAROL MARINELLI

Traduction française deJULIETTE BOUCHERY

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HARPERCOLLINS FRANCE83-85, boulevard Vincent-Auriol, 75646 PARIS CEDEX 13Service Lectrices — Tél. : 01 45 82 47 47

www.harlequin.fr

ISBN 978-2-2803-7924-3 — ISSN 0993-4448

Titre original :THE SHEIKH’S BABY SCANDAL

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Collection : Azur

© 2016, Carol Marinelli.© 2018, HarperCollins France pour la traduction française.

Ce livre est publié avec l’autorisation de HARLEQUIN BOOKS S.A.

Tous droits réservés, y compris le droit de reproduction de tout ou partie de l’ouvrage, sous quelque forme que ce soit.Toute représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.

Cette œuvre est une œuvre de fiction. Les noms propres, les personnages, les lieux, les intrigues, sont soit le fruit de l’imagination de l’auteur, soit utilisés dans le cadre d’une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou décédées, des entreprises, des événements ou des lieux, serait une pure coïncidence.

Le visuel de couverture est reproduit avec l’autorisation de :

HARLEQUIN BOOKS S.A.

Tous droits réservés.

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1.

« Je vais te dire de qui tu as besoin. Felicia Hamilton ! »Le prince héritier cheikh Kedah de Zazinie s’était toujours

arrangé pour n’avoir besoin de personne, mais cet après-midi-là les paroles de son ami lui revenaient en mémoire, comme une solution à son problème. Retranché dans son luxueux bureau de Londres et roulant son rarissime diamant sphérique entre ses doigts, il songea que cette fois il ne pourrait pas faire l’économie d’un appui. Il achevait en effet la lecture d’un article potentiellement explosif.

On frappa à la porte. Son adjointe apparut, son visage tendu. Venait-elle de lire l’article, elle aussi ? Responsable du bureau de Londres, Anu était sa compatriote, et travaillait pour lui depuis des années. Si elle avait vu ce torchon, elle saisirait très bien le danger.

— Mlle Hamilton est là pour son entretien, dit-elle en pinçant les lèvres.

— Faites-la entrer.— Elle a demandé quelques instants pour se rafraîchir.Ce visage outré… Malgré sa préoccupation, il faillit sourire.

Tout membre du personnel susceptible d’être à son contact devait passer un entretien préliminaire avec Anu. Elle avait donc rencontré Felicia la veille, et estimé que celle-ci n’avait aucune des qualités nécessaires pour décrocher un entretien avec le patron. Trop d’assurance, aucune expérience, cela ne fonctionnerait jamais ! Le planning de Kedah était très dense et l’activité du bureau devait se dérouler autour de lui, en toute fluidité et discrétion, sans qu’il soit jamais dérangé.

Anu ne voyait pas du tout Felicia Hamilton dans ce rôle.

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Elle l’avait dit à Kedah la veille, mais il lui avait tout de même ordonné de la rappeler. Il avait même dégagé un rendez-vous pour elle dès l’après-midi suivant.

— Kedah, je ne pense vraiment pas qu’elle soit une assistante possible pour vous, osa-t-elle glisser.

— Inquiétude entendue et notée. Vous voudrez bien me prévenir quand Mlle Hamilton décidera qu’elle est prête ?

Comme la porte se refermait derrière Anu, Kedah rangea son diamant dans la poche intérieure de son veston et se concentra de nouveau sur l’article. Le texte était en anglais, bien sûr : personne dans son pays n’aurait osé publier un texte pareil. Pas encore, en tout cas.

Être ou ne pas Être prince, telle est la question…

Sous ce titre accrocheur, on voyait une photo de lui, très élégant, avec un sourire arrogant. Le premier paragraphe évoquait la mort récente de son grand-père et suggérait que maintenant que son père Omar était roi, certaines questions épineuses devaient être soulevées. Le second passait rapi-dement sur l’éducation britannique qu’il avait reçue, puis se focalisait sur son style de vie mondain et sa réputation de séducteur. Il soulignait qu’à trente ans Kedah ne manifestait aucune intention de se caser.

Ensuite, il était longuement question de son jeune frère Mohammed, de sa femme Kumu et de leurs deux petits garçons. Mohammed avait été élevé en Zazinie et l’article insinuait qu’il ferait un prince héritier, puis un roi plus approprié que son aîné. Au moins sur le plan de la stabilité ! En conclusion, le texte glissait que nombre des Anciens du royaume manœuvraient pour que le Conseil de la Succession soit convoqué. On ne pouvait pas entretenir un flou pareil, il fallait prendre une décision !

En toute fin du texte s’affichait une photo d’Omar et Mohammed. Tel père, tel fils, disait la légende assassine à l’égard de Kedah. Car, s’il n’avait rien en commun avec son père Mohammed et Omar étaient absolument identiques, en dehors de leur différence d’âge. Même visage, même expression, même style guindé traditionnel !

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La tradition, quelle plaie ! En trois décennies en tant que prince héritier, Omar n’avait porté qu’une seule réforme : une amélioration du système éducatif du pays. Kedah n’était jamais parvenu à lui faire accepter un seul de ses projets. Il était un architecte extrêmement compétent, mais toutes ses propositions étaient écartées, ses suggestions refusées d’emblée ou vidées de leur sens par la suite. Lui qui espérait voir du changement, maintenant que son père était à la tête du pays, s’était déjà confronté à la pénible réalité. Sa toute dernière proposition, concernant un fabuleux hôtel et centre commercial sur le front de mer, venait d’être refusée à son tour. Le roi Omar s’était borné à lui faire remarquer que le nouveau bâtiment aurait vue sur la plage privée du palais. Kedah s’entendait encore protester :

« — Il existe des solutions ! Si vous acceptiez simplement…— Ma décision est prise, avait coupé le roi. J’en ai

longuement discuté avec les Anciens…— Et aussi avec Mohammed, avait répliqué Kedah. Il paraît

qu’il est très éloquent quand il s’agit de critiquer mes plans.— J’écoute tous les avis.— Vous devriez écouter le mien en premier lieu. Mohammed

n’est pas prince héritier.— Mohammed est le prince qui vit au pays.— Je vous l’ai dit et redit : je refuse de vivre en Zazinie,

tant que ma parole n’aura aucun poids ici. »D’un geste brusque, Kedah éteignit son ordinateur, et

l’article offensant disparut. En le découvrant plus tôt dans la journée, il avait appelé Vadia, son assistante en Zazinie, et elle lui avait garanti qu’il serait rapidement retiré du site. Mais ce n’était pas le plus important.

Clairement, le moment de la confrontation approchait. Avant même la mort de leur grand-père, Mohammed avait décidé que le rôle de prince héritier lui revenait, et la plupart des Anciens étaient de son avis. Comme le révélait l’article, ils réclamaient la convocation du Conseil de la Succession.

Le roi aurait le dernier mot, bien entendu… Mais plutôt que de déclarer tout net qu’il ne souhaitait pas que son fils aîné lui succède, Omar semblait vouloir pousser Kedah à se

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retirer de lui-même. Et cela, il n’en était pas question. Kedah en était donc à élaborer sa stratégie.

Il comptait parmi ses amis beaucoup d’hommes riches et influents, et aussi quelques personnages peu recommandables. Matteo Di Siona avait un pied dans les deux camps, et une réputation de fêtard quasi égale à la sienne. Deux semaines plus tôt, à New York, Kedah avait mentionné qu’il entrait dans une zone de turbulences et qu’il lui fallait quelqu’un de solide pour gérer la situation. Sans entrer dans les détails, bien entendu. Matteo s’était renseigné discrètement et lui avait présenté Felicia Hamilton comme le remède à ses soucis.

Kedah regarda sa montre. En temps normal, une postu-lante arrivant en retard pour un entretien ne franchirait pas la porte de son bureau. Que faisait-elle ?

Elle lisait, tout simplement. Felicia n’avait pas eu l’inten-tion de faire attendre le cheikh Kedah, mais un prestigieux gala plongeait tout le West End de Londres dans un vaste embouteillage. Coincée dans son taxi, elle en avait profité pour continuer ses recherches. L’heure tournant, elle s’était décidée à achever le chemin à pied, mais sa tablette lui proposait un article très intéressant. Une fois arrivée aux bureaux de son futur client, elle avait pris quelques minutes supplémentaires pour le parcourir.

Elle comprenait mieux, maintenant, pourquoi on l’avait rappelée après l’entretien désastreux de la veille ! Bizarrement, la dame chargée de l’entretien avait semblé croire qu’elle postulait pour un job véritable ; au bout d’une vingtaine de minutes assez pénibles, il était devenu évident que Felicia ne conviendrait pas, et les deux femmes s’étaient séparées.

Ce matin, coup de téléphone ; amusée, Felicia avait appris qu’elle était invitée à rencontrer le patron en personne. Le cheikh ne cherchait pas une assistante ordinaire, c’était évident ! Il s’intéressait à son talent particulier, qui était de gérer les gros problèmes d’image… et maintenant, elle savait pourquoi.

Le prince héritier Kedah de Zazinie luttait pour garder

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son trône. S’il voulait redorer sa réputation, il faudrait sortir la grosse artillerie. Grand séducteur, fêtard invétéré, ses escapades étaient déjà entrées dans la légende. Aujourd’hui, le prince des people risquait de tomber de haut.

Dans quelques instants, cet homme si arrogant lui avouerait tous ses petits soucis. Sereine et confiante, elle affirmerait qu’elle pourrait les régler. Elle était très douée pour ce travail : elle le faisait depuis toujours.

Elle avait appris à sourire aux caméras avant même de savoir marcher, alors qu’elle passait des journées entières dans le salon familial près de sa mère, l’épouse trop patiente, en compagnie de chargés de relations publiques qui cherchaient à gérer les liaisons multiples de son père et les gros titres sordides qui en résultaient. Les scandales avaient même entaché sa scolarité : elle se revoyait dans le bureau du principal avec ses parents, sachant que les caméras seraient braquées sur eux à la sortie, pendant qu’on lui dictait l’attitude à adopter quand ils retourneraient, en famille, à leur voiture.

« Felicia, ton sourire !Susannah, tenez la main de votre mari en marchant et

n’oubliez pas de rire, quand il chuchotera à votre oreille. »Elle avait obéi, sa mère aussi. Celle-ci avait fait absolu-

ment tout ce qu’on lui demandait, mais en fin de compte, cela n’avait servi à rien. Quand Felicia avait eu quatorze ans, son père les avait plaquées toutes les deux, préférant à son épouse un modèle plus récent.

La bataille rangée du divorce avait tout emporté, son cher internat (personne ne payait plus ses frais de scolarité), ses amies, son poney adoré. Sa mère s’était effondrée, Felicia avait donc dû se montrer forte. Elles avaient loué une petite maison en attendant que leur situation financière se clarifie, et Felicia s’était inscrite au lycée local, où elle n’était pas parvenue à se faire une place. Son vieux rêve de devenir vétérinaire était passé en pertes et profits, elle avait arrêté ses études à l’âge de seize ans et pris un job pour payer le loyer.

Elle se redressa en balayant d’un geste ces mauvais souve-nirs. Aujourd’hui, elle était une experte recherchée, beaucoup de gens riches et célèbres convoitaient son talent particulier.

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Elle avait acheté une maison à sa mère et un appartement pour elle. Des amis lui demandaient parfois comment elle pouvait défendre des types pareils, mais la réponse était simple : elle faisait ce qu’elle avait appris à faire. Avec cette seule différence que maintenant on la payait. On la payait même très cher !

Elle se donna un coup de peigne, raviva son gloss et passa un soupçon de mascara pour mettre en valeur ses yeux verts. Quand elle reparut, Anu la pria poliment de s’asseoir. L’article allait sans doute bientôt disparaître du site ; elle profita de ce que le cheikh Kedah la faisait patienter à son tour (c’était de bonne guerre !) pour faire une capture d’écran.

Pour établir une relation de travail fructueuse avec ses clients, le plus urgent était de leur faire comprendre qu’ils devaient mettre leur ego de côté. Elle serait aux commandes de l’opération, pas eux. Il fallait aussi établir d’emblée qu’ils n’étaient pas des copains et ne seraient jamais amants. Cela, la réputation de ses clients exigeait qu’elle le précise tout de suite. Quand le cheikh la ferait entrer, elle serait très cordiale. Elle l’écouterait avec attention pendant qu’il lui expliquait la situation, puis elle lui dirait ce qu’il devait faire pour s’en sortir. Les ficelles étaient toujours à peu près les mêmes. Au fond, elle méprisait ses clients.

— Il vaudrait mieux ranger votre téléphone, suggéra délicatement Anu.

Felicia allait refuser poliment quand une voix masculine, très grave, à l’accent marqué, le fit à sa place.

— Je suis sûr que Mlle Hamilton se tient simplement au courant de l’actualité…

Elle s’était imaginé cet instant, bien déterminée à ne pas se laisser déstabiliser par un facteur aussi anodin que le physique de son client. Un physique stupéfiant, au point qu’elle avait examiné de nombreuses photos pour s’immuniser… Hélas, aucune photo ne l’avait préparée au choc que lui causa la vue de l’homme qui se tenait à présent devant elle.

Il portait un costume sombre à la coupe exquise… mais elle se fichait de sa tenue ! Ce qui lui coupait le souffle, ce n’était ni la somptueuse couleur caramel de sa peau, mise

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en valeur par sa chemise blanche, ni sa chevelure noire et brillante  ; ni ses pommettes sculptées par Michel-Ange en personne, ni ses lèvres pleines. Non, elle était prise au piège de ses yeux. Des yeux noirs semés de paillettes d’or. Un regard profond, concentré sur elle. Un regard franc et étonnamment calme.

En excellente professionnelle, elle ne laissa rien paraître de la secousse qu’elle venait d’encaisser et se leva posément.

— Par ici, l’invita-t-il.Elle choisit bien son moment, et lui décocha son sourire.

Le sourire qui coupait les jambes des hommes, le sourire apparemment sincère qui ne vacillait jamais, pas même quand les journalistes les plus agressifs lui brandissaient leurs micros au visage ou zoomaient leurs objectifs sur elle.

— Je suis désolée d’arriver si tard, dit-elle gentiment. La circulation était épouvantable.

Elle dit cela si simplement que Kedah faillit lui pardonner. Elle n’était pas du tout celle qu’il s’attendait à recevoir ! Il avait supposé, puisqu’elle était invitée à un second entretien d’embauche, qu’elle opterait pour une présentation ultra-compétente, un tailleur strict — or, elle portait une jolie robe écrue. Une robe qui mettait en valeur une silhouette fine, une poitrine impudente, des jambes de sportive. Stupéfait, Kedah laissa son regard plonger plus bas pour découvrir… des sandales à lanières à talons très haut ! Elle ne ressem-blait en rien à la femme d’affaires qu’il pensait rencontrer. Jolie, délicate, et si douce et souriante qu’il fut certain que Matteo s’était trompé du tout au tout. Felicia Hamilton était bien la dernière personne sur qui il pourrait s’appuyer ! En revanche, elle était exactement le type de femme, douce et soumise, qu’il désirait.

Ses cheveux longs, savamment dégradés, encadraient un visage en forme de cœur ; quand elle passa devant lui, un parfum léger et fleuri lui monta au visage. Il referma la porte, l’invita à s’asseoir  ; elle obéit, en posant sagement son sac près d’elle.

Felicia guettait la suite avec intérêt. Le prince semblait serein, mais cela ne voulait rien dire. Parfois, ses futurs clients

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attendaient qu’ils se retrouvent seuls pour s’effondrer. « Pour l’amour du ciel, vous devez m’aider ! Il ne faut pas que ça se sache ! », se lamentaient-ils alors.

Mais Kedah, loin de sangloter, lui proposa calmement un verre.

— Non, merci.— Vous êtes sûre ?— Tout à fait. J’ai déjeuné tard.Et les soucis de Kedah lui tiendraient lieu de dessert !Il reprit place derrière son bureau  ; elle attendit ses

révélations.— Vous m’avez été recommandée chaleureusement, dit-il.— Merci.— C’est « Mlle Hamilton », ou « Felicia » ?— Felicia, décida-t-elle. Et comment dois-je m’adresser

à vous ?— Appelez-moi Kedah.Elle approuva de la tête et ils entamèrent un entretien de

routine. Il lui expliqua qu’il était architecte, ce qu’elle savait déjà, bien entendu.

— Les premiers temps, je vendais mes projets, mais maintenant, quand je construis un hôtel, je le garde. Je me suis constitué un joli parc hôtelier.

Cela aussi, elle le savait. Quand allait-il en venir aux faits ?— Ils sont disséminés dans le monde entier, j’ai donc

beaucoup de salariés…Elle hocha la tête avec gravité en se demandant s’il comptait

perdre encore beaucoup de temps avec des détails.— Vous avez beaucoup d’expérience du secteur hôtelier ?

demanda-t-il.Elle fronça les sourcils, perplexe. Elle s’était préparée

à entendre une confession. Elle maîtrisait à la perfection l’attitude à avoir pendant qu’un client déversait le récit fleuve de ses erreurs passées, mais Kedah… semblait réellement conduire un entretien d’embauche.

— Pas vraiment, répondit-elle. Mais je suis descendue dans une foule d’hôtels !

C’était vrai. Si Kedah s’était renseigné sur elle, il devait

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savoir qu’elle ne travaillait que quelques semaines par an. Entre ces périodes, elle s’offrait souvent des vacances mémo-rables. Il ne daigna même pas sourire de sa petite plaisanterie.

— Je pense qu’Anu a dû vous expliquer que le poste exige des déplacements fréquents et prolongés. Si vous travaillez pour moi, les heures seront longues ; attendez-vous à des journées de dix-huit heures. En voyage, vous travaillerez aussi les week-ends. Vous avez d’autres engagements ?

— Uniquement ceux de mon employeur du moment.Cela aussi, c’était la vérité. Quelle que soit la crise qu’il

affrontait, elle serait disponible à 100 % pour la résoudre.— Parfait, dit-il en hochant la tête, approbateur. Quand

pourriez-vous commencer ?— Dès que le contrat sera signé, fit-elle avec un sourire.

Je suppose qu’Anu vous a transmis mes conditions ?— Effectivement. Et sur le plan personnel ?— Ce n’est pas une question qui doit vous inquiéter.— Je ne veux pas entendre que votre petit ami est contrarié

parce que vous avez manqué son anniversaire, ou qu’il vous faut un congé parce que votre belle-mère se fait opérer. Le facteur humain ? Zéro.

Elle éclata de rire et, pour une fois, avec sincérité. Elle avait rencontré si peu de franchise dans sa vie ! Bien, le moment approchait ; cette façade si maîtrisée allait forcément se fendiller, et Kedah lui avouerait un dérapage royal, il lui demanderait de faire disparaître un scandale… Mais contre toute attente il continua à parler d’hôtels, de conceptions architecturales et de Hussain, un designer graphique à qui il faisait souvent appel. Elle ravala un bâillement.

— … Excellent, un véritable artiste. Le plus étonnant, c’est que mon père et lui ont fait leurs études ensemble. Nous avons beaucoup collaboré, surtout dans les Émirats. Tenez, laissez-moi vous montrer quelques exemples de mon travail, ainsi que quelques-uns des hôtels que je dois visiter dans les semaines à venir.

Il tamisait les lumières. Un instant, elle se demanda si elle aurait droit à une projection privée du gros problème du cheikh Kedah. Une vidéo torride, le prince héritier ligoté

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et bâillonné, flagellé ? Elle aurait peut-être dû accepter un verre, en fin de compte !

Kedah vit la pointe de sa langue balayer ses lèvres ado-rables. Jusqu’ici, elle l’écoutait avec concentration, bien droite sur sa chaise, mais une fois dans la pénombre, ses épaules s’affaissèrent. Il sourit sous cape. Tout au long d’une présentation de quarante minutes de ses hôtels de luxe, elle lutta pour ne pas trahir son ennui.

— Vous avez des questions ? fit-il, amusé, en rallumant.Mais non ! Felicia voulait juste qu’il passe aux choses

sérieuses !— Pas à ce stade, répondit-elle poliment.— Il doit bien y avoir des points que vous souhaiteriez

aborder, l’invita-t-il en reprenant place derrière son bureau. Vous vous êtes certainement préparée pour cet entretien ? Vous avez fait des recherches sur moi ?

— Bien sûr.— En quoi consiste, à votre avis, le rôle que vous auriez

à jouer ? demanda-t-il en se penchant sur son dossier de candidature.

Il était peut-être timide ? Non, sûrement pas, pas lui. Mais il avait peut-être besoin qu’elle aborde la question la première ? Elle décida de mettre les pieds dans le plat.

— Je dirais, d’après mes recherches, que j’aurais à gérer une agence de rencontres qui n’aurait qu’un seul homme dans son catalogue.

Elle guetta sa réaction ; il se contenta de lever les yeux de son CV et de poser sur elle un regard neutre.

— Je le ferais bien entendu avec davantage de discrétion que mes prédécesseurs, enchaîna-t-elle.

— Discrétion ? répéta-t-il.— Vous figurez souvent en première page des journaux.— Ce n’est pas la faute de mes employés.— Eh bien, ils devraient contrôler ce que l’on dit sur vous.

Si une femme est contrariée…— En ce qui concerne ma vie sexuelle, vous auriez

simplement à gérer les réservations et la brochure.— La brochure ?

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Il ne s’expliqua pas, mais reprit :— Vous n’aurez pas à contrôler ce qui se dit de moi ou à

présenter des excuses à ma place. Croyez-moi, je n’ai aucun problème avec les gros titres. Je leur suis même reconnaissant : grâce à eux, si une femme attend davantage de moi qu’une nuit de sexe, éventuellement deux, c’est son problème. Elle ne pourra pas dire qu’elle n’a pas été avertie.

Non, il n’était pas timide, décida Felicia.— J’exige tout de même une totale discrétion de la part de

mon équipe, précisa-t-il. Vous devriez naturellement signer un accord de confidentialité.

— J’ai dit à Anu hier que je ne le ferais pas.Kedah leva de nouveau les yeux de son dossier.— Personne ne recruterait une assistante sans accord de

confidentialité.— Si vous consultez mes références, vous verrez que si.Elle lui sourit comme si la question n’avait aucune impor-

tance et conclut d’un ton léger :— Soit vous me faites confiance, soit vous ne me faites

pas confiance.— Je ne vous fais pas confiance, répliqua-t-il aussitôt. Ne le

prenez pas personnellement : je ne fais confiance à personne.— Parfait. Moi non plus.Kedah voyait de plus en plus clairement que la délicatesse

de cette femme n’était qu’apparente. S’il avait douté qu’elle puisse assurer le job, il venait de changer d’avis. Prudent, il ne comptait pas lui exposer sa situation tout de suite, mais il était bien décidé à la prendre dans son équipe.

— Nous ne pouvons pas aller plus loin, si vous ne signez pas, dit-il.

— Dans ce cas, nous ne pouvons pas aller plus loin.Elle se penchait déjà pour prendre son sac. Il ne l’en

empêcha pas.— Merci de m’avoir fait perdre mon temps, ajouta-t-elle

en décochant de nouveau son fabuleux sourire.Il nota que ses yeux ne souriaient pas. Des yeux vert

émeraude, éblouissants mais glacés comme le reflet d’une

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forêt dans un lac. Il la suivit du regard, amusé, tandis qu’elle esquissait une sortie dédaigneuse.

— Rasseyez-vous, Felicia.Il y avait tant d’autorité dans sa voix qu’elle s’arrêta net.

Pourtant, Felicia n’avait pas pour habitude de se laisser dicter sa conduite, et le cheikh n’avait pas même haussé le ton ! Il avait parlé calmement, presque avec lassitude, mais ses paroles s’étaient répercutées en elle, faisant courir un long frisson le long de son dos. Elle les sentait encore vibrer quand il précisa :

— Je n’en ai pas encore terminé avec vous.

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CAROL MARINELLI

À la mercide son patronD’une main tremblante, Felicia signe le contrat qui la liera

désormais au prince Kedah, un cheikh à la réputation

scandaleuse. Pour combien de temps ? Un jour ? un mois ?

une année ? Elle l’ignore. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle

est à présent son assistante, et qu’elle aura fort à faire :

non seulement son nouveau patron doit faire arrêter ses

ennemis, qui menacent de lui ravir le trône, mais encore

il doit se choisir une épouse – la future reine de Zazinie.

Une rivale que Felicia aura bien du mal à supporter, elle

dont le coeur s’affole chaque fois qu’elle se trouve en

présence de Kedah…

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