bulletin Nr. 1/2013

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bulletin Le magazine de la Fédération des Églises protestantes de Suisse Nº 1 / 2013 sek · feps 6 La révision de la Constitution Quo vadis, ecclesia ? 16 À propos d’œcuménisme Points de vue de l’abbé Martin Werlen et de Gottfried Locher 20 Option Vie Du danger d’être un embryon 36 Alliance pour le dimanche libre Le dimanche – un enjeu de spiritualité mondaine ?

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Quo vadis, ecclesia?

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bulletinsek · feps Le magazine de la Fédération des Églises protestantes de Suisse

Nº 1/2013

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Fédération des Églises protestantes de Suisse FEPS Sulgenauweg 26 CH-3000 Berne 23Téléphone +41 (0)31 370 25 25

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– Lisez, écoutez et regardez votre Fédération des Églises dans le bulletin en ligne ! www.feps.ch

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6 –La révision de la Constitution

Quo vadis, ecclesia ?16 – À propos d’œcuménisme

Points de vue de l’abbé Martin Werlen et de Gottfried Locher

20 – Option Vie

Du danger d’être un embryon

36 – Alliance pour le dimanche libre

Le dimanche – un enjeu de spiritualité mondaine ?

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– Éditorial

Quo vadis, ecclesia ?Les Actes de Pierre ne sont pas parvenus à entrer dans le canon

biblique. Ils se contentent d’exister parmi les textes dissimulés, les écrits apocryphes. C’est peu flatteur, et néanmoins un bon exemple du fait que quelque chose de grand peut naître de ce qui est dissimulé. Quo vadis par exemple, la question toute simple « Où vas-tu ? » dans les Actes de Pierre, parvenue à la gloire du monde au plus tard grâce au film avec Peter Ustinov.

Où vas-tu, Église ? Cette phrase se dissimule derrière la révision de la Constitution, un grand projet de la Fédération des Églises. Dans un an, ce sera à l’Assemblée des délégués, porte-parole des deux millions de protestants en Suisse, de décider. Tout restera-t-il à l’identique ? La Fé-dération des Églises est-elle communion, la communauté Église, l’Église d’une communion ecclésiale ? Trois personnalités développent ce thème dans ce numéro. Gabriel Bader de Neuchâtel, Dölf Weder de Saint-Gall et Gottfried Locher de la Fédération des Églises. Unité ? Questions incon-fortables ? Identités diffuses ? Lisez vous-même dès la page 8.

Où vas-tu, Église ? Que signifie pour toi l’unité, quand tu regardes par-delà le bout de ton nez ? Cinq cents ans après la Réforme, beaucoup de choses sont dissimulées, se contentent d’exister, sont peu flatteuses. Quelque chose de grand peut-il encore naître ici ? « La disponibilité à l’œcuménisme est plus grande que je ne l’aurais supposé », dit à ce sujet notre invité, l’abbé Martin Werlen, dans son article en page 18.

Où travailles-tu, Église ? Certes, vous connaissez votre présidente de Conseil d’Église, votre président de Conseil synodal. Mais connais-sez-vous son bureau, sa table de travail ? La place de travail révèle bien des choses – à vous de les découvrir dès la page 50.

Je vous souhaite bonne lecture.

Philippe WoodtliDirecteur du Secrétariat

Image de couverture : Photomontage de l’éditeur

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– bulletin Nº 1/2013

Au sommaire de cette édition – Quo vadis, ecclesia ?

Gottfried Locher, Gabriel Bader et Dölf Weder Révision de la Constitution 6 – À propos d’œcuménismePoints de vue de l’abbé Martin Werlen et de Gottfried Locher 16

– Option VieDu danger d’être un embryon 20 – Enfants placésUn sombre chapitre de l’Histoire suisse récente 24

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– Ne pas abandonner les personnesL’initiative fédérale « Financer l’avortement est une affaire privée » 26

– Un événement marquant pour l’œcuménismeLa Concorde de Leuen-berg fête ses 40 ans 29

– La protection des persécutésRéférendum contre les « mesures urgentes » relatives à la loi sur l’asile 30

Formation/ Enseignement

Prises de position sur des sujets de politique sociale

Formation continue

Stratégie

Collaborations au niveau européen

Recherche, domaine

scientifique

Forum d’échange

Plates-formes d’informationDiaconie

– Un nouvel agencementQui mandate et qui remplit telles tâches dans le domaine de la diaconie ? 34

– Alliance pour le dimanche libreLe dimanche – un enjeu de spiritualité mondaine ? 36

– Jubilé de la RéformeRester en mouvement 40

– Questions théologiquesfonda mentales à propos del’environnement et du climatMy home is in heaven ? or on earth ? 42

– bulletin Nº 1/2013Les Églises de la Fédération 45

– Hôte de l’Assemblée des délégués 2013 L’Église évangélique réformée du Canton de Glaris 46– Aussi variés que nos Églises le sont … Qui travaille ici ? 50

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6 bulletin Nº 1/2013

– Quo vadis, ecclesia ?

Une Fédération des Églises protestantes de Suisse ? Une Communion des Églises protestantes suisses ? Une Église protestante suisse ?

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Où vas-tu, Église ? Cette phrase figure à l’arrière-plan de la révision de la Constitution, un grand projet de la Fédération des Églises. Dans un an, ce sera à l’Assemblée des délégués, porte-parole des deux millions de protestants environ en Suisse, de décider. Tout restera-t-il à l’identique ? La Fédération des Églises est-elle communion, la communion Église, l’Église communion ecclésiale ? Trois personnalités développent ce thème dans ce numéro. Gabriel Bader de Neuchâtel, Dölf Weder de Saint-Gall et Gottfried Locher de la Fédération des Églises. Unité ? Questions inconfortables ? Dispersions d’identité ? Lisez vous-même.

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8 bulletin Nº 1/2013Quo vadis, ecclesia ?

L’unité dans la diversité: voilà qui convainc immédiatement et rencontre un large assen-timent. Mais le diable est dans les détails: comment exactement se comporte l’uni-

té proclamée face à la diversité ? Les Églises évangé-liques-réformées en Suisse sont maintenant confrontées à ce défi. Elles ont nettement renforcé leur coopération ces dernières années. Elles sont désormais près de re-nouveler également les bases formelles de leur commu-nion ecclésiale. Cela se fait par exemple dans le cadre de la révision de la Constitution de la Fédération des Églises protestantes de Suisse. Il importe maintenant de donner vie à la formule « L’unité dans la diversité » dans le quotidien de la vie des Églises.

Diversité La diversité on le sait ne pose pas problème à la

Suisse réformée. La diversité est un fait: petites Églises, grandes Églises, Églises pluriséculaires et Églises ré-centes, Églises majoritaires et Églises minoritaires, Églises proches de l’État et Églises indépendantes de l’État, Églises multitudinistes et Églises libres, Églises à caractère urbain et Églises à caractère campagnard. À quoi s’ajoute la diversité des langues, français, alle-mand, italien et rhéto-romanche ; et des langues dif-férentes signifient des cultures différentes. Enfin il y a les caractéristiques confessionnelles: calvinisme ge-nevois et zwinglianisme zurichois, et dans l’intervalle des Églises à l’identité combinée, plus les paroisses lu-thériennes intégrées, sans oublier l’Église méthodiste avec son épiscopat. Toutes font partie du protestantisme suisse. La diversité y est naturelle.

Unité ?L’unité y est moins naturelle. L’ecclésiologie réfor-

mée définit en premier lieu l’unité comme la commu-nauté spirituelle dans et à travers la foi commune. Les

questions structurelles n’occupent pas le premier plan, et l’unité visible, par exemple par-delà les frontières cantonales, n’est pas un souci premier de la doctrine ecclésiale réformée. La recherche de communion institutionnelle est-elle même vraiment « réformée » ? Demander davantage d’unité visible, c’est donc devoir répondre à deux questions: Pourquoi ? Et quelle unité précisément ?

L’unité dans la diversitéD’abord la première question: Quelle unité ? Le

Conseil de la Fédération des Églises travaille actuelle-ment à diverses propositions sur ce sujet. C’est un tra-vail exigeant. Il faut tenir compte de conditions cadres théologiques, juridiques, culturelles et œcuméniques. Les études sociologiques de ces dernières années, ré-alités inconfortables, doivent elles aussi être prises au sérieux. La Suisse se trouve au cœur de profonds chan-gements sociétaux. Et les Églises font face à un avenir incertain. Cela a une influence sur la manière dont elles organisent leur communauté. De nouvelles possibilités de proclamation de l’Évangile naissent d’une présence ecclésiale commune. C’est sur de telles opportunités que s’oriente le Conseil dans le travail sur le projet de Constitution. La tâche de proclamation de l’Évangile constitue le critère de structures évangéliques pour la communion ecclésiale. Cette année déjà, le Conseil mettra en consultation son projet. Quel que soit l’aspect concret que revêtira cette proposition, l’unité dans la di-versité est la conviction qui est à sa base.

Trois raisons …Les Églises réformées sont, plus que d’autres fa-

milles confessionnelles, craintives à l’égard d’une com-munauté obligatoire. Elles redoutent la perte d’autonomie et même la limitation de la liberté de croyance. Pourquoi donc davantage d’unité ?

– Gottfried Locher, président du Conseil

Pourquoi l’unité ?

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Moins d’êtres humains, mais davantage de communauté

D’abord parce que les Églises suisses diminuent. Elles se réduisent nettement, et se réduiront proba-blement encore plus durant des années. Il y a un de-mi-siècle, plus de la moitié des êtres humains en Suisse étaient réformés, aujourd’hui il s’agit encore d’un cin-quième de la population. La seule modification de la sta-tistique des âges implique d’autres réductions. Certes, il existe des différences régionales, la diminution du nombre de membres n’est pas uniforme, mais la ten-dance générale en Suisse est claire. La nier, c’est faire l’autruche. Les structures actuelles sont l’héritage d’un autre temps, et elles risquent de devenir une charge. Si le protestantisme suisse ne veut pas mettre en danger son ministère de proclamation de l’Évangile, il lui faut liguer ses forces. Clarifica-tions théologiques, liturgiques ou éthiques, parcours de formation au ministère pastoral et à la diaconie, plans d’études, documents scolaires, livres de cantiques, agendas des cultes, mais aussi normes de plani-fication financière, de direction du personnel ou d’administration des biens immobiliers. Tout cela coûte de l’argent, trop d’argent, dans des structures qui ne prennent pas en compte le nombre réduit des membres. Mais il est plus urgent encore que les Églises réformées développent une identité commune. Des Églises can-tonales de petite taille dépendent aujourd’hui déjà de leur appartenance à un tout plus grand, qui leur donne visibilité et poids. Les Églises plus grandes dépendent moins de la communauté ecclésiale – pour l’instant. Mais elles aussi pourraient bénéficier d’un profil protes-tant fort, national. Des réformés moins nombreux ont

besoin de davantage de communauté réformée. Il faut agir tant que la liberté d’action est encore possible.

Pas de profil ecclésial sans opinion publique nationale

Deuxième raison: le paysage médiatique a changé. Les médias nationaux ou linguistiques, télévision, radio et presse, influencent l’opinion publique. Que les Églises réformées soient présentes dans l’opinion publique, et de quelle manière, dépend de leur présence profilée dans les plus importants médias nationaux. Il ne suffit pas pour cela de faire un travail médiatique commun, il faut une unité réelle. La demande des médias est presque toujours: « Que dit l’Église réformée ? » – au singulier, notons-le.

Quelle que soit la diversité, c’est la question de l’élément commun, de ce qui unit, qui constitue le profil. Déclarer que la diversité est pré-cisément le profil ne résout pas le problème, car le public attend de l’Église des positions et non pas uniquement des relativisations. Ou « l’Église réformée » a à dire quelque chose de compréhensible et qui l’engage, ou elle ne sera plus interrogée. Cela ne vaut pas seule-ment pour les médias, mais aussi

pour la politique et les autorités fédérales. Quelle Église élève ici la voix protestante ?

Le progrès œcuménique grâce à l’unité protestanteEt finalement une troisième raison: l’unité chré-

tienne a besoin de l’unité protestante. Des progrès œcuméniques, durables et obligatoires, ne naissent que lorsque les familles confessionnelles impliquées pos-sèdent une présence unie. Tout ne doit pas se faire au ni-veau mondial, mais le niveau cantonal serait insuffisant

– « Les Églises réfor-mées sont plus que d’autres familles confes-sionnelles craintives à l’égard d’une commu-nauté obligatoire. »

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10 bulletin Nº 1/2013Quo vadis, ecclesia ? – Gottfried Locher

pour des accords avec la plupart des confessions. Dans la difficile situation œcuménique actuelle, une Église canto-nale ne suscite plus de percée œcuménique en faisant ca-valier seul. Les structures de collaboration intercantonale sont utiles, mais ne suffisent pas. Ce qui compte, c’est la communauté réelle, intérieure, théologique. Les Églises protestantes doivent elles aussi pouvoir s’accorder sur des déclarations communes dans les questions de foi, sinon elles ne trouveront plus de partenaires œcuméniques. Qui tient à l’unité de la chrétienté devrait donc s’engager d’abord pour l’unité évangélique-réformée. L’uniformité n’est pas exigée, mais des échelons reconnaissables d’une position commune sont indispensables.

… et une tâcheMoins de baptisés, de nouveaux paysages média-

tiques et davantage d’œcuménisme: trois raisons en fa-veur de davantage d’unité protestante. Si importantes que soient ces raisons, une chose doit rester claire: ce sont là des raisons temporelles et secondaires. Biblique et prioritaire par contre est la reconnaissance que l’Évan-gile sera plus crédible, si parmi ceux qui en témoignent l’unité règne. Le Christ dit: « … moi en eux comme toi en moi, pour qu’ils parviennent à l’unité parfaite et qu’ainsi le monde puisse connaître que c’est toi qui m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. » (Jn 17, 23).

L’Église a reçu de son Seigneur la tâche de l’unité in-térieure. Cela vaut aussi pour les Églises suisses, lorsque dans le cadre d’une révision de la Constitution elles ré-fléchissent à leur unité. Non pas parce que la collabora-tion économise de l’argent ; non pas parce que les médias veulent des têtes, non pas parce que des Églises de petite taille ont ensemble plus de poids que chacune séparé-ment, non ce n’est pas à cause de cela. Mais bien parce que manifestement, le fait que l’Évangile soit annoncé dans l’unité ou séparément joue un rôle. Le Christ ap-pelle l’Église à l’unité, non pour l’affirmation institution-

nelle de l’Église, mais bien « … afin que le monde croie ». L’uniformité n’est pas nécessaire pour cela, mais l’unité si. L’unité dans la diversité précisément.

Chère lectrice, cher lecteur, quelle Église réformée, quelle Église évangélique en Suisse souhaitez-vous ? C’est maintenant le bon moment d’y réfléchir et d’en discuter ensemble. La Fédération des Églises renouvelle sa Consti-tution. Il ne s’agit pas uniquement de structures et de finances. Mais, bien plus encore, de donner à la foi un langage qui soit compris aujourd’hui. Et à l’Évangile une voix qui soit entendue aujourd’hui. Une nouvelle Consti-tution pour la Suisse protestante: il en va de notre crédi-bilité. <

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«Et comment va l’Église protestante, en Suisse ? » me demande un homologue espagnol, lors d’une rencontre euro-péenne de responsables d’Églises. Je

me surprends à bredouiller. Le même sentiment m’avait envahi lorsque, dans d’autres contextes, une question si-milaire m’était posée par un responsable d’Église tcha-dien ou encore par le président de l’Église protestante du Vietnam. Euh … Comment dire ? M’en sortirai-je en évitant le classique : « Vous savez, en Suisse, il y a 26 Églises différentes … » ? – formule souvent entendue lors des présentations internationales. Incompréhensible, peu convaincante, inapte à prodiguer un message prospec-tif sur la situation de nos Églises. Les regards espagnol, tchadien, vietnamien, français, allemand m’obligent à un certain recul. Qui sommes-nous pour nous permettre, dans un si petit pays, un tel déploiement de structures et une si grande difficulté à rendre compte de notre vision ? J’aurais souhaité répondre : « Voilà, ce que l’Église suisse envisage, voilà ce qu’elle offre, voilà ce qu’elle veut, voilà comment elle se présente». Qui sommes-nous ?

Les aléas de l’histoire et l’autodéterminationL’histoire des cantons suisses et autre guerre du

Sonderbund, l’instauration des régimes républicains et ses conséquences s’agissant des liens avec l’État, le fédé-ralisme helvétique et les compétences cantonales accor-dées sur le plan de l’organisation religieuse, plus encore : les traditions réformées diverses expliquent, pour celui qui veut essayer de comprendre, la complexité de notre héritage. Les explications ne légitiment cependant pas l’absence d’un projet ecclésial qui dépasserait des fron-tières à ce point microscopiques que nos homologues étrangers peinent à les percevoir en regard de l’ampleur des défis auxquels ils sont confrontés. Car il faut oser le dire : la fragmentation de notre identité protestante suisse représente un luxe qui témoigne du confort dans lequel

nous sommes installés – toujours en regard de la situa-tion de la quasi-totalité des Églises dans d’autres pays. Là où les pasteurs ne sont pas certains de boucler leurs fins de mois, voire n’ont aucune assurance sur leur retraite, là où la minorisation religieuse ou confessionnelle en-traîne des injustices flagrantes, là où la liberté d’opinion est menacée, là où les conflits ethniques impliquent les Églises dans des processus de réconciliation, là où la faim ou autres fléaux menacent la vie humaine, les Églises sont conduites par d’autres priorités.

J’aime rappeler à ceux qui, dans mon Église neu-châteloise, seraient tentés de se plaindre des pressions fi-nancières auxquelles nous sommes confrontés que nous restons – à quelques rares exceptions près – l’Église la plus riche du monde. Ni la pression financière, ni l’héritage historique ne sauraient légitimer une éventuelle difficulté à formuler notre vision. Celle-ci relève de la priorité que nous voudrons bien définir.

Ces propos critiques sur l’éclatement de notre image protestante suisse ne font qu’enfoncer des portes ouvertes. Je l’espère. Faute de quoi, cela signifierait que l’analyse des sociologues sur la fragilité de notre com-munication commune ou encore la difficulté de l’opinion publique à nous reconnaître, au sens propre, ne seraient pas intégrées.

La Communion des Églises protestantes de Suisse

Dans le cadre des réflexions liées à la révision de la Constitution de la FEPS, j’ai participé, avec un plaisir immense, à un groupe de travail chargé de donner des impulsions théologiques au processus. Le groupe s’est longuement penché sur la question d’une ecclésialité na-tionale du protestantisme. Le groupe y défend l’idée gé-nérale que l’Église est toujours comprise dans ces trois dimensions : une dimension locale (en principe, la pa-roisse), une dimension synodale (souvent, en Suisse, liée

– Gabriel Bader, président du Conseil synodal de l’Église réformée évangélique du canton de Neuchâtel

La question qui dérange

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12 bulletin Nº 1/2013Quo vadis, ecclesia ? – Gabriel Bader

aux cantons) et une dimension plus large qui correspond à une forme de communion d’Églises, au sein de laquelle les Églises synodales s’entendent pour réaliser des pro-jets. Au sens de ce groupe de travail, la FEPS pourrait être reconnue comme « Communion des Églises protestantes de Suisse » et bénéficier ainsi d’une légitimité ecclésiale. L’on pourrait alors parler d’une Église suisse. Encore fau-dra-t-il définir ce qui réalise cette communion : s’agit-il d’une gouvernance d’Église, d’une coordination opéra-tionnelle ou encore d’accords à trouver sur des options ecclésiologiques fondamentales ?

À titre personnel, je ne me satisfais de cette impul-sion que dans la mesure où elle continue d’interroger la multisynodalité de notre Église suisse. Car, à mes yeux et idéalement, l’Église réformée ne repose pas sur trois dimensions ; elle est bidimensionnelle : presbyté-ro-synodale. L’exercice de l’autorité s’y exerce au niveau local (paroisse) et au niveau global (synodal). Toute autre forme de communion avec des Églises protestantes, chrétiennes est nécessaire et renforcera, c’est vrai, sa légitimité mais il me paraît diffi-cile d’intégrer une « Communion des Églises » dans des processus décision-nels contraignants. Cette limite n’est pas sans conséquence sur l’idée d’une Église suisse. Je ne peux m’empêcher de continuer de rêver à un Synode suisse qui aurait la compétence de définir une mission pour les paroisses de la Suisse, éventuellement regroupées en régions.

Du rêve à l’urgenceLes Églises de Suisse mesurent les conséquences

de la sécularisation et d’une laïcisation grandissante des pouvoirs publics. Certes, les effets sont divers dans les

cantons mais les indices et analyses sont assez nombreux pour ne pas en nier la portée. Les Églises sont conduites à se repositionner. Autrefois garantes d’une tradition pro-testante à préserver, les Églises doivent aujourd’hui pro-filer plus précisément la plus-value qu’elles entendent ap-porter, au milieu d’acteurs de la société qui jouent parfois la concurrence. En d’autres termes, les Églises doivent démontrer la pertinence de leur offre, leur capacité à ré-pondre à des besoins correctement identifiés et leur rapi-dité à réagir de manière adéquate. Les Églises cantonales s’emploient, çà et là, à affûter leur communication, à pré-ciser leurs publics-cibles au travers d’études de marché et à imaginer des stratégies novatrices.

« Çà et là », c’est bien le problème. L’ampleur du défi peut-elle encore tolérer le luxe d’une telle disparité ? Non. Et ma-nifestement nous ne mesurons pas encore cette urgence. Les Églises de Suisse romande discutent de la possibilité d’un corporate identity commun qui pourrait s’élargir à l’ensemble des Églises réformées de Suisse. La question de la marque ne saurait cependant être résolue sans une vraie interpellation quant à la nécessité pour les Églises de Suisse d’affronter ensemble, sous une identité forte, les défis liés au repositionnement auquel l’environ-

nement changeant nous oblige.

Dessiner l’Église de demainJe ne suis pas sûr de pouvoir affirmer, sans l’ex-

clure, que la FEPS devrait devenir « Église suisse ». Elle jouera cependant un rôle primordial dans cette question. La proposition d’une reconnaissance de la FEPS comme

– « Les Églises de Suisse mesurent les conséquences de la sécularisation et d’une laïcisation grandissante des pouvoirs publics. »

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« Communion des Églises » constitue une voie moyenne intelligente. La révision de la Constitution de la FEPS n’aura de sens que si elle interroge les frontières que nous continuons de faire vivre, sous prétexte de contraintes souvent externes. C’est bien là le premier signe du né-cessaire repositionnement : l’Église suisse sera le résultat d’une autodétermination des Églises. Les acteurs poli-tiques, économiques, culturels peuvent soutenir ou pas les Églises dans leur vision. Jamais, tout bien intention-nés qu’ils soient, ils ne se substitueront à elles dans leur tâche de clarifier leur mission. S’il fallait dessiner l’Église de demain, quant à moi, je commencerais par élire un Synode suisse et imaginerais une consécration suisse au ministère de l’Église. Ensuite, je discuterais des consé-quences institutionnelles, politiques, économiques. Je l’admets : j’ai toujours aimé … dessiner. <

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14 bulletin Nº 1/2013

Notre diversité n’est pas seulement l’expres-sion d’une richesse de foi salutaire, mais reflète souvent aussi une certaine désorien-tation. Tel est l’avis de Dölf Weder, président

du Conseil d’Église de Saint-Gall.La diversité n’est pas un défaut mais bien au contraire

une caractéristique essentielle des Églises protestantes. Lors de l’édition 2006 de la Journée internationale des Églises du lac de Constance intitulée « Chez soi dans la diversité », le prédicateur de la cérémonie officielle l’a sou-ligné en ces termes : « Celui qui laisse à l’Esprit de Dieu assez d’espace pour qu’il puisse agir doit s’attendre à de la diversité. Car cet Esprit ne se nourrit pas de monotonie, d’uniformité, mais s’exprime dans la polyphonie. »

En effet, la Bible abonde déjà de témoignages qui se com-plètent mutuellement, se côtoient et parfois même se contredisent. Les réponses à l’appel de Dieu, les manières de vivre sa foi sont aus-si différentes que le sont les êtres humains.

La Réforme a établi le critère du « sola scriptura » (« l’Écriture seule »). De nouvelles traductions de la Bible ont permis le dévelop-pement du jugement personnel, préfigurant ainsi la responsabilisation de l’individu qui deviendra un thème central des Lumières et finalement de la démocratisation.

La diversité est la conséquence naturelle de la conception biblique et protestante de la foi.

L’uniformité est encouragée mais ne représente pas une voie protestante

La responsabilité personnelle nouvellement acquise a entraîné une confessionnalisation et un éclatement de

la famille protestante. En Suisse, ce phénomène a dé-bouché sur la formation d’une grande variété d’Églises nationales et d’Églises libres dont les orientations théo-logiques et les pratiques diversifiées sont parfois sources de controverses. Cette situation ne contribue pas forcé-ment à la crédibilité de notre témoignage, et complique en outre le dialogue œcuménique.

Notre monde des médias n’aime pas les positions différenciées. Il veut des points de vue brefs, carrés, fa-ciles à classer dans des schémas de pensée polarisés. Uni-formes et reconnaissables, voilà comment nous devrions être. Pour les Églises nationales et leur diversité, cela pose un véritable problème. Sans compter qu’il s’agit d’une de-mande fondamentalement inadaptée à l’être humain, fait

de nuances et de contradictions, et au riche éventail des approches person-nelles de la foi.

L’appel à l’uniformisation et à l’uniformité trouve aussi des parti-sans au sein de nos Églises. Mais di-versité et uniformité sont des notions contradictoires. Faut-il donc sacrifier la diversité biblique et protestante au profit d’un « conformité protestante » impliquant la définition de frontières et une démarcation par rapport à ceux qui sont « en dehors » ?

Il existe une autre voie: celle de l’unité dans la diver-sité. Car diversité et unité ne s’opposent pas. Jésus a prié pour cette voie, Paul l’a représentée.

Unité de croyants – « … afin que tous soient un … »

L’unité des croyants était une préoccupation ma-jeure pour Jésus et les premières communautés. Et ceci plus encore lorsque ces dernières s’étendirent dans tout l’espace méditerranéen avec ses nombreuses traditions

– « La diversité est la conséquence naturelle de la conception biblique et protestante de la foi. »

– Pasteur Dölf Weder, président du Conseil d’Église de Saint-Gall

Les Églises souffrent d’une diffusion identitaire

Quo vadis, ecclesia ?

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culturelles et religieuses. Paul invoque un corps du Christ. Il ne critique pas la diversité et les différences des membres de ce corps. Il ne plaide pas pour l’uniformi-té – mais pour l’unité et l’utilisation des différents cha-rismes au service de l’édification de la communauté.

Durant toute l’histoire de l’Église du XXe siècle, l’« unité dans la diversité » et la prière de Jésus « … afin que tous soient un … » ont constitué la vision la plus im-portante et aussi la plus rassembleuse de la famille pro-testante dans le monde entier. C’est également la voie que nous, Églises suisses, devrons suivre de façon beaucoup plus résolue ces prochaines années.

L’unité « d’en haut » ou « d’en bas » ?L’uniformité peut être imposée d’en haut ou tentée

d’être atteinte par des décisions démocratiques. Mais l’unité, elle, est impossible sans le cœur de l’être humain. Si les individus ne ressentent pas d’unité, n’éprouvent ou ne sentent naître aucun sentiment d’appartenance, on aura beau adopter des formules consensuelles, des confessions et des textes liturgiques depuis « en haut ». Même théologiquement fondés, ils auront peu de chances de créer une unité nouvelle. L’unité prend naissance lorsque quelque chose se passe à la base. Il faut qu’« en bas » aussi du nouveau se mette en mouvement, devienne perceptible et induise un changement et un renforcement de l’orientation commune.

Cela ne signifie pas pour autant que le niveau d’« en haut » soit condamné à l’inaction. L’exigence de l’unité dans la diversité requiert une interaction entre les deux directions de mouvements.

Le nouveau rôle de leadership de la FEPSNous devons confier une nouvelle mission à la

FEPS. À l’avenir, la Fédération des Églises doit assumer une fonction de leadership pour encourager l’orientation commune sur la voie de l’identité et de l’unité protestante.

Pour cela, la FEPS n’a pas besoin de beaucoup de nou-velles compétences décisionnelles. Il ne s’agit pas de créer un nouveau « Synode suisse » qui prendrait des décisions depuis « en haut » et essaierait de les imposer « en bas ».

La mission de la FEPS est d’initier, de conduire et de nourrir des processus d’orientation à l’échelle suisse. Ces processus doivent être dynamiques, interactifs et partici-patifs. Ce qui implique aussi la formulation de messages et d’idées programmatiques clairs, et l’élaboration d’un matériel adapté à la base afin d’éviter que l’on construise des châteaux en Espagne. Ces démarches doivent tenir compte des réalités concrètes et des perspectives d’ave-nir de nos Églises cantonales, de nos paroisses et de leurs membres, ce qui n’est possible qu’avec leur engagement et leur participation.

La question centrale de la foiBeaucoup déplorent notre manque de « profil ».

Personnellement, je trouve ce diagnostic trop superfi-ciel. Notre problème est plus profondément enfoui: nous souffrons d’une diffusion identitaire. Notre diversité n’est pas seulement l’expression d’une richesse de foi salutaire, mais reflète souvent aussi une certaine désorientation, l’absence d’une identité et d’une orientation claires.

Qui sommes-nous ? Que défendons-nous ? Quelle est notre mission ? Que voulons-nous atteindre ? Nous devons engager une nouvelle réflexion commune sur ces questions. Nous devons oser parler distinctement et clai-rement de la foi. Pour cela nous avons besoin les uns des autres, nous avons besoin d’un discours ouvert et vivant, nous avons besoin d’une orientation commune, nous avons besoin d’une FEPS renforcée.

Il en va de deux éléments étroitement liés. Pour re-prendre le programme de l’Église saint-galloise: il s’agit de développer une Église « proche de Dieu – proche des personnes » et ce que cela implique aujourd’hui – dans l’unité et la diversité. <

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16 bulletin Nº 1/2013

L’œcuménisme catholique-protestant officiel traverse la phase la plus difficile qu’elle ait connue depuis les débuts du mouvement. Ces deux grandes Églises ne se caractérisent pas

seulement par leur « diversité » ; elles sont contradic-toires et non réconciliées. L’œcuménisme est en crise.

L’ancien chef de la section Œcuménisme du Va-tican, Walter Kasper, résumait ainsi la situation : « Les obstacles théologiques, mais surtout ecclésiologiques semblent insurmontables actuellement. Alors que dans de nombreuses paroisses, la collaboration œcuménique va de soi, les objectifs communs manquent au niveau des directions des Églises. » Si ce ne sont pas les signes d’une crise ! Non seulement le consen-sus fait défaut sur les questions essentielles, mais encore l’accord manque aussi sur les objectifs. De part et d’autre, nous ne sommes pas du même avis à propos des tenants et des aboutissants de l’œcuménisme institutionnel, si éprouvant, si coûteux et si com-pliqué. Nous sommes là au cœur du drame : l’œcuménisme de l’Église occidentale n’a pas d’ob-jectif commun.

Pendant trop longtemps, personne n’a remis en question le mot magique d’« œcuménisme ». Pendant trop longtemps, personne n’a pris soin de cette herméneutique œcuménique légèrement teintée de rose. Le titre de la déclaration « Dominus Iesus », publiée sous la direction de Joseph Ratzinger alors cardinal, annon-çait d’emblée la couleur : « Sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Église ». L’Église au sin-

gulier, bien entendu, et en se référant et en s’identifiant explicitement à l’Église catholique romaine. D’autres déclarations de la curie ont suivi sur le même ton : il n’y a qu’une seule Église et elle est catholique romaine. Les Églises évangéliques ne sont pas des Églises, ou du moins « pas des Églises au sens intrinsèque », explique le Vatican. Faut-il en déduire qu’elles sont des Églises au sens extrinsèque (peu importe la nature de cette obscure différenciation) ?

L’objectif ne change pas, mais nous cherchons un nouveau chemin

Le temps est venu d’opérer un changement de perspective au sein de l’œcuménisme. L’œcuménisme ne prospérera pas si on continue de se contenter de faire semblant. Par con-séquent, concentrons nos forces sur les domaines où un progrès est possi-ble dès aujourd’hui, là où la réconci-liation et la soudure ont une chance. Concentrons-nous sur l’œcuménisme protestant. Faut-il pour autant aban-donner l’œcuménisme avec nos sœurs et frères catholiques ? Non, bien sûr. Nous avons besoin les uns des autres. Nous apprenons les uns des autres : dans la liturgie, dans la foi, dans notre identité ecclésiale. Nos racines sont les mêmes. Une foi commune nous réunit

dans une Église commune. L’objectif ne change pas. Mais cherchons un nouveau chemin.

« Évangélique œcuménique » : voilà le change-ment de perspective, voilà notre engagement. Accor-dons une place centrale à l’unité évangélique, dès au-jourd’hui. Pourquoi « évangélique œcuménique » ?

– À propos d’œcuménisme

Gottfried LocherLancement d’un débat engagé sur l’œcuménisme : extrait du message du président du Conseil, Gottfried Locher, adressé à l’Assemblée d’automne des délégués de la Fédération des Églises protestantes de Suisse, qui s’est tenue en novembre 2012 à Berne.

– « Le temps est venu d’opérer un change-ment de perspective au sein de l’œcumé-nisme. L’œcuménisme ne prospérera pas si on continue de se contenter de faire semblant. »

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Parce qu’un œcuménisme de cette nature a des chances réelles d’aboutir. Le possible est à portée de main. Les Églises issues de la Réforme partagent une même conception de l’Église, de la fonction, de la sainte cène, si ce n’est dans les détails, du moins fondamentalement. Les différences ne sont pas source de dissidence, mais de stimulation. Chaque communauté y trouve des idées pour son propre développement, et ce sont des idées pra-ticables.

La Suisse est le pays d’origine de la Réforme. La Suisse est au calvinisme et à la tradition réformée ce que l’Allemagne est au luthéranisme : le pays d’origine. Nous sommes peut-être insuffisamment conscients de ce rôle, en toute bonne modestie confédérale. Un anniversaire de la Réforme approche et nous avons la responsabilité d’un jubilé fêté de manière crédible, dont le rayonnement dépasse les frontières nationales. Nous puisons force et soutien dans la communauté familiale.

La Fédération des Églises protestantes de Suisse est elle aussi œcuménique. Son avenir dépend de la volonté d’unité, de la volonté de rapprochement effective de ses Églises membres. L’œcuménisme a besoin de cet engage-ment. L’unité ne vient pas toute seule. Nous sommes dif-férents : Églises grandes et petites, Églises majoritaires et minoritaires, Églises proches de l’État ou autonomes. Nous aussi sommes appelés à l’unité et à la réconcilia-tion. Un changement de perspective est nécessaire à cette démarche.

Un œcuménisme réaliste et immédiatNous aurons la force nécessaire pour parvenir à

unir les chrétiens si nous commençons par unir les com-munautés évangéliques. Nous avons la force de devenir l’Église ensemble, l’Église évangélique suisse. Une Église faite de plusieurs Églises : rester l’Église, localement, et devenir l’Église, ensemble. L’œcuménisme possible au-

jourd’hui, c’est celui-là. C’est un œcuménisme actuel et réaliste.

Imaginez un ruisseau de montagne. Il parcourt allègrement la pente. Puis, des enfants construisent un barrage, en jetant des pierres dans le ruisseau, les plus grosses et les plus lourdes possibles. Que se passe-t-il ? L’eau s’accumule devant le barrage. Elle ne passe plus. Toutefois, l’eau est dynamique, elle est en mouvement. Elle ne s’arrête pas devant l’obstacle, elle le contourne, passe ailleurs, cherche un nouveau chemin, et finit par aller plus loin. <

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Lire l’Évangile implique de ne jamais trouver la paix. La provocation est permanente, à moins de ne plus laisser ces paroles toucher notre cœur. À titre d’exemple, citons une parole de

Jésus : « Je ne prie pas seulement pour eux, je prie aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi : que tous soient un comme toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi, qu’ils soient en nous eux aussi, afin que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jean 17,20 -21). Le deuxième Concile du Vatican, dans son décret sur l’œcuménisme, relève un défi : « Promouvoir la restauration de l’unité entre tous les chrétiens est l’un des objectifs principaux du saint Concile œcuménique de Vatican II. ( … ) Il est certain qu’une telle division s’oppose ouvertement à la volonté du Christ. Elle est pour le monde un objet de scandale et elle fait obstacle à la plus sainte des causes : la prédication de l’Évangile à toute créature. »

La situation des Églises de notre pays devrait nous apparaître comme un signe clair « d’en haut », nous mon-trant que nous ne pouvons plus nous permettre les divi-sions existantes, pas même un jour de plus. Car pour une grande partie des personnes baptisées, leur appartenance à l’Église ne signifie plus grand-chose. Ces personnes baptisées forment d’ailleurs la majorité des 20 pour cent de la population qui déclare n’appartenir à aucune com-munauté religieuse.

Ne devrions-nous pas, en tant que baptisés, être ef-frayés par ces termes et ces chiffres ? Ne devrions-nous pas procéder à une démarche œcuménique à l’intérieur de l’Église réformée, comme le suggère le pasteur Gott-fried Locher, président de la Fédération des Églises pro-testantes de Suisse ? Du côté de l’Église catholique-ro-maine, j’ai entamé une démarche comparable, décrite dans l’opuscule « Découvrir ensemble la braise sous la cendre » et publiée à l’occasion de l’Année de la Foi. Je pro-pose dans ce texte une campagne œcuménique interne à

l’Église catholique. Actuellement, la polarisation entre conservateurs et progressistes est si prononcée qu’un dialogue n’est plus guère possible. Si, en tant qu’Église, nous restons bloqués par ces polarisations, nous empê-chons les personnes de découvrir la braise qui est source de vie et qui ne demande qu’à brûler, aujourd’hui encore. L’œcuménisme entre confessions serait alors superflu.

Un tel œcuménisme, pris au sens d’un mouvement qui agit à l’interne, n’a pas pour but de définir ce que les autres doivent faire différemment, mais de mettre en évidence comment nous pouvons vivre notre voca-tion de manière plus fidèle aujourd’hui. Car – et j’en suis convaincu – le plus grand obstacle à l’œcuménisme est la préservation des cendres, alors que l’apport le plus pré-cieux est la recherche sincère de braises. Indépendam-ment de notre confession, notre tâche n’est pas d’entre-tenir les cendres, ce qui reviendrait à un acte d’infidélité, mais d’être en quête des braises de la foi et de passer plus loin le feu, représenté par Jésus-Christ lui-même. « C’est un feu que je suis venu apporter sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! » (Luc 12,49)

C’est ce feu que je veux attiser avec mon texte. Les nombreux échos me rendent confiant, tel ce message : « Savoir que nous sommes en route « ensemble » pour (re)découvrir la braise est pour moi source de courage et d’espoir. » L’effet du texte dépasse d’ailleurs les frontières confessionnelles. Un pasteur réformé m’a écrit : « Au-jourd’hui, ce sont toutes les confessions qui ont pour mis-sion prioritaire de découvrir la braise sous les cendres. Avec votre précieux témoignage, vous me l’avez rappelé une nouvelle fois. »

Le président de la Fédération des Églises n’a pas voix au chapitre

En bref : au sein de l’Église, ce n’est pas le pape qui commande, pas plus que les évêques, le président de la

– À propos d’œcuménisme

Abbé Martin Werlen« Par le baptême, nous appartenons au Christ. Ce n’est pas le plus petit dénominateur commun, mais la plus large base possible. » Martin Werlen,abbé du couvent d’Einsiedeln, nous livre sa contribution d’invité.

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FEPS, le président du Conseil de l’Église ou « la base ». Aux commandes, il y a – Dieu merci – Jésus-Christ lui-même. Et notre tâche à tous, c’est de nous unir pour écouter cette voix. En notre qualité de baptisés, nous sommes appelés à être à son écoute et à l’obéir. Une telle attitude est la contri-bution la plus précieuse au mouvement œcuménique. Une telle attitude est aussi le seul moyen de surmonter l’œcuménisme actuel, qui accepte tout naturellement de se contenter du plus petit dénominateur commun, qui cherche le compromis, qui agit à l’encontre de sa propre Église, voire qui exprime l’indifférence. Notre tâche est aussi de nous éloigner d’une attitude non chrétienne qui vise à maintenir des systèmes et qui propose à celles et à ceux qui pensent différemment de changer de confession.

Par l’acte du baptême, nous sommes à Jésus-Christ. Le bap-tême n’est pas le plus petit déno-minateur commun, mais la plus large base possible, à savoir notre vocation commune de corps du Christ. La célébration du baptême dans l’esprit œcumé-nique devrait être de nature à rendre superflue la question de la reconnaissance réciproque de ce sacrement : il devrait se dérouler selon la formule trinitaire, par immersion ou effusion et par la confession de foi qui nous unit par-delà les frontières confessionnelles.

Découvrir la braise sous la cendre, quelle que soit la confession, est un chemin que nous pouvons parcourir uniquement en nous unissant. Personnellement, l’œcu-ménisme à l’intérieur du catholicisme m’a toujours mené au-delà des frontières confessionnelles, comme l’ont mon-tré diverses rencontres que j’ai faites au cours des récentes années. Je pense par exemple à l’amitié qui me lie au pasteur Gottfried Locher, l’actuel président de la Fédération des

Églises protestantes de Suisse. En 2006, c’est lui qui a don-né les conférences lors de la retraite de notre communauté monacale. Un cercle d’entretiens en est résulté, réunissant, en plus de M. Locher et de moi-même, Kurt Koch, alors évêque de Bâle et actuellement cardinal, ainsi que l’ancien président du Conseil de l’Église réformée zurichoise Ruedi Reich et le théologien catholique chrétien Urs von Arx.

Découvrir ensemble la braise sous la cendre. La ren-contre de Jésus-Christ nous donnera la force d’aborder les questions qui se posent à nous. La disposition à pratiquer un tel œcuménisme est plus grande que je ne le pensais. Depuis quelques années, une Église libre entretient des

contacts intenses avec notre monastère. Après notre plus récente rencontre, j’ai reçu le message suivant : « Vous avez – sans exagération – fait grande impression sur nous tous, notamment aussi sur notre ami allemand adhérent d’une Église libre ; sur le chemin du re-tour, il nous a dit, tout enthousiasmé, qu’il n’aurait jamais imaginé chose pa-reille, mais qu’il avait été saisi, et qu’il

« aime l’Église catholique ». Voilà un joli tas de cendres qui a été balayé. »

À l’époque de la Réforme, le couvent d’Einsiedeln baignait dans pratiquement tous les problèmes que ren-contrait l’Église. Ulrich Zwingli, le futur réformateur, était ainsi prêtre à Einsiedeln. Je suis heureux si le couvent d’Einsiedeln peut contribuer à ce que l’actuelle Année de la Foi puisse avoir un rayonnement qui dépasse les fron-tières confessionnelles. Ce n’est qu’à condition d’unir nos efforts que nous parviendrons à découvrir la braise sous la cendre. Que le feu de notre foi soit avivé. L’objectif de la Réforme ne sera atteint que lorsqu’une fidélité renforcée au sein de chacune des confessions mènera à l’unité visible qui revient à Jésus-Christ. <

– « La disposition à pratiquer un tel œcumé-nisme est plus grande que je ne le pensais. »

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Le sociologue Niklas Luhmann a illustré la dif-férence entre les dangers et les risques à l’aide d’un exemple simple. Il fut un temps où les hommes vivaient constamment sous la me-

nace d’être surpris par la pluie. Depuis qu’il existe des parapluies, le danger est écarté, mais au prix du risque d’oublier le parapluie à la maison ou dans le bus et de subir à ce moment précis une forte averse. Dans une vie à risque, il faut sans cesse prendre des décisions. Si le mauvais pronostic se réalise, il en tient en règle générale à soi-même. Les dangers relèvent du destin, les risques doivent être assumés.

Le calcul des risques et de leur gestion nécessite des informations. Cela va de soi. Mais la croissance du savoir

suscite un nouveau problème : plus il y a d’informations, plus les décisions à prendre deviennent risquées. Les in-formations ne sont jamais exhaustives, elles doivent être interprétées correctement et il faut une norme pour tra-duire des informations en jugement. Sinon, les informa-tions manœuvrent ceux qui pensent pouvoir manœuvrer avec leur aide les évolutions et les situations.

Les différentes manières de manipuler les hommes selon les informations qu’ils possèdent ne se révèlent pas uniquement dans la publicité, mais également, et de façon beaucoup plus étendue, dans le diagnostic médi-cal. Certes, les spécialistes soulignent sans cesse qu’une méthode de diagnostic ne livre que les informations qui sont à la base d’une décision. De fait, dans le cas de cer-

– Option Vie

Du danger d’être un embryonLa médecine moderne maîtrise de mieux en mieux le risque de tomber malade et de mourir de maladies, de handicaps ou de blessures graves. Chez nous, la vie n’est plus guère en danger. Par contre, elle est devenue sensiblement plus risquée.

PAr FrANk MAThWiG

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Naître ou ne pas naître ? Chance ou malchance ? Ou quand l’enfant devient le facteur risque à même d’être contrôlé.

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taines informations, le jugement est déjà anticipé. Uni-quement de cette façon s’explique le fait, par exemple, que plus de 90 % des grossesses avec un test positif à la trisomie 21 sont interrompues.

Le « Praenatest » introduit en été 2012 et permet-tant un diagnostic trisomie 21 a déclenché une discus-sion qui bat encore son plein. Et voilà que déjà le produit suivant – à peine remarqué par le public – est lancé sur le marché. Le test « PrenDia » surpasse, selon les dires de son fabricant suisse, toutes les techniques de diagnostic connues. Le test PrenDia reconnaît par exemple, en plus des trisomies 21, 13 et 18, le syndrome du Cri du Chat et le syndrome de Wolf-Hirschhorn, tous deux attribués à une anomalie chromosomique rare. À en croire le site web de l’entreprise, ce n’est que le début d’une nouvelle ère de diagnostic prénatal.

Une chose est sûre : la grossesse devient de plus en plus un danger existentiel pour l’embryon, non pas en raison de la grossesse elle-même, mais parce que les nouvelles tech-nologies de diagnostic assujettissent de plus en plus des mères et des pa-rents à des décisions conflictuelles à prendre. La dure réalité pour les per-sonnes concernées est, depuis long-temps, absente de la pensée biotech-nologique. En effet, même si une femme ou un couple refuse les examens avant la naissance, ils ne sont pas pour autant libérés du poids de la responsabilité quant à leur décision. En fin de compte, ils ont décidé eux-mêmes de ne rien décider.

La grossesse – une option qui peut être choisie ou rejetée

La controverse sur les nouveaux tests sanguins éclate du fait de leur simplicité et de leur absence to-tale de risque pour la mère et l’enfant. C’est pourquoi ils peuvent être effectués sans crainte et rien ne s’oppose à ce qu’ils soient appliqués d’office dans le cadre du dia-gnostic prénatal. Le Praenatest quant à lui est conseillé aux femmes dès 35 ans. Or, une caisse maladie a d’ores et déjà annoncé vouloir participer aux coûts des tests sanguins sans limite d’âge. Certes, la médecine et l’en-treprise de biotechnologie mettent l’accent sur la néces-sité d’un accompagnement. Mais il n’est pas clair si cet

accompagnement a réellement lieu ni en quoi il consiste. La consultation en génétique médicale qu’ils évoquent offre certes de l’aide, mais n’apporte aucune réponse à la question comment la mère ou les parents peuvent ou veulent gérer la situation décisionnelle. Pour eux, le défi ne consiste pas en un résultat de test quelconque, mais au fait qu’en se soumettant à cet examen, ils sont immanquablement confrontés à une telle situation déci-sionnelle. Au moment où la prise de sang est faite en vue du test, la lourde décision est déjà tombée : la décision de vouloir décider. Au cours de son développement, la grossesse est ainsi encore une fois une option qui peut être choisie ou rejetée.

Par conséquent, le besoin de conseil n’apparaît pas à l’instant où le résultat est sur la table. Il surgit plutôt au moment de la question qui précède, à savoir si le résultat du test pourrait influencer la relation de la mère ou des parents à l’enfant. Dans la pratique, le soutien dans cette phase est minimal, soit parce que le diagnostic prénatal est ef-fectué d’office (« c’est l’usage »), soit parce que les examens chez la mère sont recommandés tout naturelle-ment (« pour votre propre sécuri-té »). Après un résultat positif dans

le cadre des méthodes d’examen traditionnelles, dans plus de 9 cas sur 10, la grossesse est interrompue. Cette relation de cause à effet laisse supposer que la décision fondamentale ne tombe pas au moment même du résul-tat positif du test, mais qu’elle entre en ligne de compte dès l’instant où l’examen est accepté – du moins comme possibilité. Cela fait sens. Car aucune femme enceinte ne se soumettrait au test juste pour accroître son savoir. Lors de la décision en faveur d’un diagnostic prénatal concernant un handicap, une maladie ou une lésion du fœtus impossibles à soigner, il s’agit dans la plupart des cas d’exclure le risque de la naissance d’un tel enfant.

Une évolution insidieuseLa décision pour ou contre une interruption de

grossesse ne doit pas être réduite trop vite à une ques-tion morale, car les problèmes structurels médicaux et sociaux seraient ainsi rejetés sur les mères ou les parents touchés. Lorsqu’un examen qui requiert une décision si

– « Après un résultat positif dans le cadre des méthodes d’examen traditionnelles, dans plus de 9 cas sur 10, la grossesse est interrompue. »

Option Vie

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lourde de conséquences est recommandé par la méde-cine ou pratiqué d’office, il serait incohérent de clouer les mères ou les parents au pilori moral, alors qu’ils se comportent en conformité avec ces recommandations ou ces normes. Tout comme il n’est pas possible de dé-duire automatiquement de la décision d’interrompre une grossesse un manque de considération à l’égard de personnes atteintes du syndrome de Down. Le théo-logien en morale Dietmar Mieth souligne avec raison qu’en cas de conflit, la mère ou les parents ne jugent pas l’enfant mais eux-mêmes et leur aptitude à vivre avec un tel enfant. Mais de telles décisions « individuelles » ont des effets sur la société : elles modifient la conscience gé-nérale. Le changement n’est pas visible comme une marche qui nous fait trébucher, mais comme une rampe de plus en plus fré-quentée dont les balises marquent la compréhension que la société a d’elle-même.

Le bonheur d’être né Notre manière de réfléchir

et de nous interroger est un signe indubitable du changement des évidences. Il appartient à la mère et aux parents responsables de permettre à la médecine d’accom-pagner la grossesse. Les grossesses, surtout les grossesses à risque, recèlent des risques de santé pour la mère et mettent le souhait d’avoir un enfant en bonne santé à rude épreuve. Les dangers auxquels les êtres sont expo-sés durant la grossesse en attendant leur naissance sont systématiquement tus. Les rôles sont clairement défi-nis : la mère ou les parents acceptent certains risques en concevant un enfant. L’enfant à naître est le facteur risque à même d’être contrôlé. Cette répartition des rôles est mise en question par l’interrogation suivante : au fond, quels sont les risques qu’encourt l’être non né, si son existence ou sa non-existence dépend entièrement du résultat d’un diagnostic médical ou d’une décision de sa mère ou de ses parents ? Qui est ou qu’est-ce qu’un enfant non né dans une telle optique à risque ?

Si ce sont uniquement la grossesse avancée ou la naissance qui font d’un facteur à risque une personne à protéger des risques, le fait d’être « humain » est sys-tématiquement détaché de son « état en devenir ». C’est

une sorte d’économie de la natalité. Seul compte le ré-sultat. Être né est le résultat de cette heureuse condition de ne pas avoir été diagnostiqué comme risque de gros-sesse. Qui est présenté comme risque a la malchance de devenir une victime des stratégies visant à éliminer les risques.

Nous ne nous attardons guère sur cette relation de cause à effet, parce que nous discutons uniquement comme « étant nés » et parce que nous sommes certains de ne pas devoir nous justifier auprès d’un être non né. Il n’en va pas ici d’un problème moral ou d’une question de sauvegarde de la vie. Ce qui est en jeu, c’est bien plus la compréhension de l’être humain même, lorsque son

existence dépend du fait d’avoir sur-vécu sans dommage à la phase où il est considéré comme facteur potentiel à risque. Alors le don de la vie devient un choix arbitraire (selon ce que la médecine offre comme tests), la gros-sesse une option et la dignité humaine un produit (de la décision des autres). Alors la loterie de la nature devient l’arbitraire de l’homme.

Le philosophe allemand G.W. F. Hegel déjà a mis le doigt sur la diffé-rence décisive. La nature ne connaît aucune justice. Ce qui est né est né. En revanche, en tant que conséquence

d’une décision, être né ou être empêché de naître devient une question de justice. Nous pouvons renoncer si faci-lement à la question de savoir quelle justice nous devons aux êtres non nés (puisque nous nous arrogeons le droit de décider de leur vie) uniquement parce que nous avons eu la chance d’être nés. <

– « Qui est présenté comme risque a la malchance de devenir une victime des stratégies visant à éliminer les risques. »

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Les spécialistes estiment à plus de 100 000 le nombre d’enfants et d’adolescents placés du-rant cette période dans toute la Suisse. Dans leur nouveau lieu de vie, les enfants concernés

étaient souvent considérés comme des membres fa-miliaux de seconde classe et servaient surtout comme main-d’œuvre sur le domaine. Pendant longtemps, la nécessité de ce système de placement des enfants a été justifiée par des contraintes économiques et ne fut ja-mais remise en question.

Débuts d’une mise à jourCe n’est que ces dernières années que la pratique

des autorités de l’époque fut examinée d’un œil critique et que le grand public prit conscience des conditions de vie des enfants placés. Les travaux scientifiques, les ac-tivités d’organisations concernées et la création cultu-relle (comme par exemple le film « Der Verdingbub » et le documentaire « Lisa et Yvonne ») ont permis au grand public de découvrir le fait que beaucoup d’enfants pla-cés ont dû passer leur enfance et leur jeunesse dans des conditions dures et pénibles. Un grand nombre d’entre eux ne souffraient pas seulement de l’éloignement de leur foyer, mais subissaient souvent l’exploitation et

l’abus. Lorsqu’on commença à savoir que les autorités de surveillance ou les personnes responsables n’inter-venaient pas lors d’abus et n’accordaient pas aux en-fants le soutien nécessaire ou tout simplement évitaient consciemment d’en prendre acte, des voix se sont fait entendre pour réclamer une mise à jour politique de la pratique du placement d’enfants.

Commémoration nationale du 11 avril 2013Divers parlements cantonaux se sont d’ores et

déjà préoccupés de ce sujet qui jouit actuellement d’une grande priorité sur le plan suisse. Sous la houlette de l’Office fédéral de la justice au sein du Département de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, les auto-rités politiques se sont réunies avec les organisations concernées et d’autres acteurs directement ou indirec-tement impliqués – associations de foyers, institutions ecclésiales, Union suisse des paysans et autres – en vue d’organiser une commémoration qui aura lieu le jeudi 11 avril 2013 à Berne. Cette commémoration a pour objectif d’accorder publiquement et au niveau national un espace au vécu et aux expériences des anciens enfants placés, de reconnaître les injustices subies par la faute des autorités et de demander pardon aux personnes concernées.

– Enfants placés

Un sombre chapitre de l’Histoire suisse récenteEntre 1800 et 1960, il était de coutume, chez nous, que les autorités locales placent les enfants issus de milieux pauvres – comme les orphelins et les enfants de parents divorcés ainsi que les enfants de familles nombreuses – dans des foyers ou dans des familles, le plus souvent paysannes.

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Participation des Églises À côté des autorités étatiques et de diverses ins-

titutions, le personnel de l’Église et des organisations proches des Églises était également partie prenante dans la pratique du placement des enfants. Premièrement, les pasteurs de village étaient chargés par les autorités locales responsables des pauvres de surveiller les place-ments. Deuxièmement, dans le cadre du « mouvement des bonnes mœurs », des associations réformées s’enga-geaient à trouver des foyers aux enfants nés hors mariage. Troisièmement, beaucoup de foyers d’éducation étaient placés sous patronage réformé.

Il est incontestable que des manquements eurent lieu dans le cadre de cet engagement des représentants de l’Église ou proches de l’Église et que la dignité des en-fants confiés à leurs bons soins fut massivement blessée.

Le fait que la FEPS prenne part, ensemble avec les représentants des deux autres Églises nationales, à la pré-paration et à la réalisation de cette commémoration ex-prime son souhait de reconnaître les manquements des personnes d’Église et des institutions proches de l’Église qui étaient impliquées dans le placement des enfants et d’apporter sa contribution au souvenir de ce sombre cha-pitre de l’histoire récente de la Suisse.

Démarches ultérieuresToutes les personnes et institutions impliquées ont

souligné que la commémoration du 11 avril ne constitue pas une conclusion, mais bien le début d’un processus long et approfondi de réflexion sur l’affaire du placement des enfants. D’autres démarches, comme la création d’une table ronde, des mandats de recherche pour la mise à jour ainsi que l’accès aux archives locales seront étu-diées. La FEPS participera à ces discussions. <

« Prévention sani-taire » sur le seuil de la porte : des milliers de personnes vivant en Suisse aujourd’hui sont d’anciens enfants placés.

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La prise en charge des frais médicaux d’une inter-ruption de grossesse par l’assurance de base fai-sait partie intégrante de la solution dite des dé-lais que le peuple suisse avait acceptée en 2002.

Depuis, le législateur octroie à chaque femme enceinte le droit d’avorter dans les douze premières semaines de grossesse sans encourir de punition. À condition d’en faire une demande écrite suite à une consultation médi-cale. Dès la 13e semaine, l’interruption de grossesse est admise « si un avis médical démontre qu’elle est néces-saire pour écarter le danger d’une atteinte grave à l’in-tégrité physique ou un état de détresse profonde de la femme enceinte ».

Les réponses politiques : de nouveaux problèmes sociaux

Le Conseil fédéral recommande le rejet de l’initia-tive. L’économie de quelque huit millions de francs que l’assurance de base pourrait réaliser annuellement ne se justifierait pas « en regard des conséquences juridiques,

sociales et de santé pour les femmes ». Il faudrait notam-ment s’attendre à une recrudescence des avortements il-légaux qui mettent en danger la santé des femmes, ce qui chargerait à nouveau les caisses-maladie. La Com-mission de sécurité sociale et de la santé du Conseil na-tional partage visiblement cette estimation, car selon elle, l’initiative « entraînerait des conséquences néfastes pour la santé et la société ».

– Ne pas abandonner les personnes en situation de détresse

L’initiative fédérale « Financer l’avortement est une affaire privée »L’initiative fédérale « Financer l’avortement est une affaire privée », sur laquelle le peuple suisse devra probablement se prononcer au cours de cette année, entend radier les coûts de l’interruption de grossesse de l’assurance de base.

PAr ChriSTiNA TUOr-kUrTh

Objectifs qui selon les initiateurs pourraient être atteints :

> abaisser le taux d’avortements > alléger l’assurance de base des caisses-

maladie > éviter aux citoyennes et aux citoyens suisses

de cofinancer une intervention qui est contraire à leurs convictions.

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En plus de ces arguments, la Commission fédérale des questions féminines (CFQF) rappelle les acquis de la solution des délais. Depuis son introduction, le nombre des interruptions volontaires de grossesse (IVG) n’a pas augmenté en Suisse. La solution des délais a donc fait ses preuves. La CFQF critique les consé-quences discriminatoires de l’ini-tiative pour les femmes. Certaines femmes n’auraient pas les moyens de bénéficier d’un avortement sûr du point de vue médical. En outre, les hommes seraient déliés de leur responsabilité financière. On as-sisterait à une « désolidarisation avec les femmes en âge de pro-créer » qui, en raison d’une gros-sesse non désirée, décident d’avorter en dernier ressort. Quant au troisième argument du comité d’initiative, ce-lui du conflit de conscience, la CFQF estime qu’il est dan-

gereux de soumettre au « critère de la morale» certaines prestations de l’assurance-maladie solidaire. Elle craint pour ainsi dire un raz-de-marée qui aurait pour consé-quence de mettre en question à l’avenir d’autres « com-

portements à risques pour la santé » comme le tabagisme ou l’obésité.

Églises : protection de la vie et de la situation de la femme

Au sein des Églises, l’intention première de l’initiative est approuvée. Les Églises soutiennent sans restric-tion la préoccupation du comité d’ini-tiative de baisser le nombre d’avorte-ments. Même si par, rapport à d’autres pays européens, le taux d’IVG est très bas en Suisse, les quelque 11 000 avor-

tements annuels représentent un chiffre de dimension inquiétante. En revanche, la proposition d’endiguer à l’avenir les avortements au moyen du financement privé

– « Ce ne sont pas des sanctions qui pourront empêcher les interruptions de grossesse, mais des perspectives de vie. »

Le Conseil fédéral recommande le rejet de l’initiative : les économies ne se justifient pas en regard des conséquences légales, sociales et de santé.

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suscite le scepticisme. Dans sa prise de position, la Fédé-ration des Églises protestantes souligne le fait que dans le cas de l’avortement, il s’agit aussi de la vie de la femme en-ceinte. Ce qui met toute la société au défi : « Si une socié-té veut que les femmes mettent leurs enfants au monde, elle doit s’organiser de manière que les femmes ne consi-dèrent pas leur situation de vie comme une situation de détresse en raison d’une grossesse ». Les avortements ne doivent pas être considérés comme une affaire privée de l’individu. Dans une société qui maintient l’interdiction de tuer, l’avortement reste d’un intérêt public particulier. C’est pourquoi la privatisation du financement des IVG n’est pas le moyen approprié.

Si la FEPS refuse de reconnaître l’avortement comme une affaire privée, la Conférence des évêques suisses, quant à elle, considère le moyen du financement privé comme « insuffisant ». Pour endiguer les interrup-tions de grossesse, il faudrait plutôt un changement de perspective dans la société, un « tournant ». En tant qu’or-gane, les évêques ne donnent aucune recommandation de vote, ils font état de la décision personnelle de chacune et de chacun en son âme et conscience.

Les initiatrices et les initiateurs, issus partielle-ment du PDC, du PEV et de l’UDF se montrent déçus de la position des Églises. Il leur manque une voix plus claire contre les avortements et une plus grande prise en compte des commandements de Dieu. La dissidence doit sûrement se situer ailleurs.

La difficulté : une « grave situation de détresse morale »

Les données statistiques montrent que la détresse sociale est de loin la raison la plus fréquente de l’avorte-ment. C’est justement le motif contre lequel s’élèvent les initiatrices et les initiateurs et pour lequel ils souhaitent radier le financement par la caisse-maladie obligatoire. Le législateur, par sa formulation selon laquelle un avor-tement n’est pas punissable dans la mesure où « une grave situation de détresse morale » pouvait être prise en consi-dération, a laissé un espace qui englobe dans la respon-sabilité les médecins aussi bien que les femmes enceintes, leur partenaire et leur famille. Simultanément, il a recon-nu qu’il s’agissait, lors de la décision d’avorter, d’un juge-ment subjectif d’une situation de vie. Les initiatrices et les initiateurs voient ici menacée la liberté de conscience des citoyennes et des citoyens. La FEPS défend la position que cela équivaut à une surcharge de vouloir porter de l’exté-

rieur un jugement définitif sur la situation de vie d’une personne. Elle estime d’autant plus important de prendre en compte cette situation de vie.

La FEPS : pas de sanctions, mais des perspectives de vie

La Fédération des Églises protestantes de Suisse est convaincue que les interruptions de grossesse peuvent être évitées et des voies être trouvées pour libérer les femmes de la situation où elles se voient contraintes de devoir se séparer de la vie naissante. Elle plaide en faveur d’un plus grand nombre de structures institutionnelles et sociales en Suisse à même de favoriser les mères et les pères seuls ainsi que les familles sur le plan profes-sionnel et économique. Elle plaide également en faveur d’équipements et d’espaces publics qui encouragent et soutiennent la vie avec les enfants. Les avortements ne doivent pas être évités à l’aide de sanctions, mais au tra-vers de perspectives de vie. <

Compléments d ’ information

Interview en vidéo : trois questions à l ’ auteur, Christina Tuor-Kurth, directrice de l ’ Institut de théologie et d ’ éthique https://vimeo.com/61799791

Fédération des Églises protestantes de Suisse

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L’avortement n’est pas une affaire privéePosition de la Fédération des Églises protestantes de Suisse FEPS sur l ’ initiative populaire fédérale « Financer l ’ avortement est une affaire privée »

La Fédération des Églises protestantes de Suisse

a publié une prise de position sur l’initiative

« Financer l’avortement est une affaire privée ».

Elle peut être téléchargée à l’adresse www.feps.ch.

Ne pas abandonner les personnes en situation de détresse

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– Un événement marquant pour l’œcuménisme

La Concorde de Leuenberg fête ses 40 ans

Ce que Luther et Zwingli n’ont pas réussi et ce qui demeura comme une dispute incom-préhensible entre frères et sœurs durant 450 ans a finalement été atteint avec la signature

de la Concorde de Leuenberg le 16 mars 1973 au Centre de rencontres Leuenberg au-dessus de Hölstein (BL) : la Communion ecclésiale entre les Églises de la Réforma-tion en Europe. Qu’est-ce qui a rendu possible la commu-nion ecclésiale entre réformés, luthériens, Églises unies et méthodistes, laquelle se concrétise dans la communion de la chaire, de l’autel et de la prédication par la parole et l’action ?

La Concorde de Leuenberg s’en tient à la conception réformatrice selon laquelle l’accord dans la prédication fi-dèle de l’Évangile et l’administration fidèle des sacrements suffit à l’unité vraie de l’Église. La compréhension com-mune de l’Évangile se révèle dans la conviction « que l’ex-clusive médiation salvatrice de Jésus-Christ est le centre de l’Écriture et que l’annonce de la justification, en tant qu’annonce de la libre grâce de Dieu, est la norme de toute prédication de l’Église » (Concorde de Leuenberg, article 12). Sur la base de la compréhension commune de l’Évan-gile, la communion ecclésiale réalisée par la Concorde de Leuenberg peut vivre l’unité de l’Église comme « unité dans la différence réconciliée ». Le consensus fondamental dans la compréhension de l’Évangile permet la réconcilia-tion des différences confessionnelles. Dans la Concorde, cela commence par le fait qu’elle formule un consen-sus dans le domaine des différences doctrinales existant jusque-là (doctrine de la sainte cène et de la prédestina-tion). Durant les quarante dernières années, la commu-nion ecclésiale de Leuenberg a encore approfondi son uni-té en poursuivant le travail théologique. C’est ainsi que,

par exemple, lors de la 7e assemblée plénière en automne 2012 à Florence, deux documents sur la compréhension du ministère et de l’Écriture ont été approuvés. Depuis la 5e

assemblée plénière en 2001 à Belfast se profilait aussi de plus en plus la volonté commune des Églises évangéliques en Europe d’éclairer les événements politiques de l’espace de vie Europe à la lumière de l’Évangile et de faire en-tendre au grand public les voix protestantes sur les ques-tions essentielles de façon homogène. Cet approfondis-sement de la communion ecclésiale dans la foi et l’action fut souligné en 2003 par le changement de dénomination de la Communion ecclésiale de Leuenberg en « Commu-nion des Églises protestantes en Europe » (CEPE). Les 106 Églises rassemblées dans la CEPE ne se contentent pour-tant pas du statu quo. C’est ainsi que l’assemblée plénière à Florence lança une discussion doctrinale sur le thème « communion ecclésiale » où l’on s’interrogerait sur la si-gnification des différences en suspens, sur plus d’engage-ment et sur l’intensification de la communion.

Être membre de la CEPE est essentiel aux yeux des Églises protestantes de Suisse. Cela leur permet d’être en communion transfrontalière. Dans le cadre de l’année jubilaire, la Fédération des Églises protestantes de Suisse prévoit une session du 29 novembre au 1er décembre 2013 à Leuenberg, en collaboration avec l’Église évangélique réformée du canton de Bâle-Campagne, la Faculté de théologie de l’Université de Bâle, le Centre de rencontres Leuenberg ainsi que la Formation et la formation conti-nue des pasteurs. À côté du regard rétrospectif et pros-pectif, les deux derniers documents de la CEPE sur la compréhension du ministère et de l’Écriture seront au centre de la rencontre. En août, le Conseil de la CEPE tiendra sa deuxième séance officielle à Leuenberg. <

Être membre de la Communion des Églises protestantes en Europe est essentiel aux yeux des Églises protestantes de Suisse.

PAr MArTiN hirzEL

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– La protection des persécutés dans l’arène politique

Référendum contre les mesures urgentes relatives à la loi sur l’asile

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il n’y a pas de doute : depuis des années, le thème de l’asile fait l’objet de discussions controversées. Considérée de manière objective, la situation de départ se révèle en revanche assez simple. La protection des persécutés est une obligation internationale. Pour la Suisse se pose alors la question de savoir quelle contribution elle peut apporter à la protection des persécutés. Mais les mesures urgentes dans la loi sur l’asile détournent l’attention de cette question centrale. Elles impliquent même une restriction du droit d’asile.

PAr SiMON röThLiSBErGEr

Ces dernières décennies, la Fédération des Églises protestantes de Suisse s’est exprimée de manière continue et conséquente sur les questions de l’asile. Il en fut ainsi par exemple

lors des déclarations annuelles pour le Dimanche des ré-fugiés ou dans la prise de position œcuménique de 1985 « Du côté des réfugiés ». En 2006, la FEPS se prononça en faveur du référendum. Ce faisant, elle prit publiquement position contre les restrictions du droit d’asile. De même, la FEPS participa au processus de consultation en 2009

dans lequel étaient mis en discussion les points princi-paux concernant la révision actuelle sur le droit d’asile.

La Fédération des Églises protestantes ne s’exprime pas seulement au nom de ses convictions fondamentales concernant la dignité humaine et les droits humains en matière d’asile, mais aussi en vertu de ses engagements concrets. Elle joue par exemple un rôle important dans la coordination des services œcuméniques d’accompa-gnement spirituel dans les centres d’enregistrement et de procédure.

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32 bulletin Nº 1/2013La protection des persécutés dans l’arène politique

Cet engagement en faveur des requérants d’asile se reflète également dans les objectifs de la législature 2011 – 2014 de la FEPS : « Elle s’emploie à faire en sorte que les réfugiés puissent continuer de trouver en Suisse une protection sans réserve contre les persécutions ». (Objec-tif de législature 6)

La notion de réfugié remise en question ?Le 29 septembre 2012, « les mesures urgentes de la

loi sur l’asile » sont entrées en vigueur. C’est contre ces changements que le référendum a été lancé.

La loi sur l’asile dit désormais : « Ne sont pas des réfugiés les personnes qui, au mo-tif qu’elles ont refusé de servir ou déserté, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l’être. Les dispositions de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés sont réservées.

Actuellement déjà, personne n’obtient l’asile pour motif de refus de servir ou de désertion. L’octroi de l’asile doit être mis en relation avec des motifs de persécution probants en matière d’asile. Le changement effectué est ainsi de nature symbolique, afin de rendre la Suisse moins attractive pour les personnes refusant de servir ou les déserteurs.

Certes, les personnes refusant de servir et les dé-serteurs qui pourraient subir dans leur pays d’origine des traitements inhumains ne seraient toujours pas re-foulés et de ce fait trouveraient à l’avenir également asile en Suisse. Pourtant, un « accueil provisoire » et la non-re-connaissance du statut de réfugié qui lui est lié consti-tuent une restriction de la protection. Cette protection n’est pas à bien plaire, elle doit être respectée sur la base d’obligations internationales comme l’interdiction de re-foulement dans la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention de Genève sur les réfugiés.

Dans sa prise de position, la FEPS souligne que le statut juridique de l’accueil provisoire a tendance à em-pêcher l’intégration des personnes concernées. On sait que, sur le marché du travail, les personnes à statut de sé-jour incertain ont nettement moins de chances que celles qui ont droit à un séjour durable.

Suppression de la procédure d’asile via les ambassades

Dorénavant, seule une personne « … qui se trouve à la frontière suisse ou sur le territoire suisse » peut dépo-ser une demande d’asile. La possibilité de présenter une demande d’asile au travers d’une représentation suisse à l’étranger est suspendue.

Jusqu’à présent, la procédure d’asile via les ambas-sades permettait aux personnes en recherche de protec-tion de déposer une demande d’asile sans avoir recours à un passeur et ainsi entrer illégalement en Suisse. Avec la suppression de la procédure via les ambassades, ne pour-

ront présenter une demande d’asile que les réfugiés qui ont les moyens de fi-nancer le voyage et qui surmontent ef-fectivement les obstacles sur le chemin conduisant en Suisse. Les frontières extérieures de l’UE sont fortement gardées, ce qui rend plus difficiles les possibilités d’entrée. Des milliers de réfugiés n’atteignent jamais l’Europe, entre autres parce qu’ils se noient en traversant la mer Méditerranée.

La Suisse a accepté l’accord de Dublin. Elle n’est donc compétente que pour les demandeurs d’asile qui n’ont pas séjourné un certain temps dans un autre pays signataire ou qui

n’y ont pas déjà déposé une demande d’asile.C’est pourquoi la procédure d’asile via les ambas-

sades peut aussi être considérée comme une compensa-tion étant donné que la Suisse, sur la base des règlements de compétence de Dublin, sera concernée par moins de demandeurs d’asile et que, de toute façon, les possibilités d’atteindre la Suisse (protection frontalière) et d’y dépo-ser une demande sont réduites.

Pour la Suisse, la procédure d’asile via les ambas-sades est aussi un moyen efficient et peu coûteux de pro-téger les réfugiés. Les requérants d’asile ne sont intro-duits en Suisse qu’après un premier examen positif. Ce qui signifie qu’ils sont nombreux à rester dans les régions de crise et ne doivent donc pas être hébergés en Suisse, entretenus ou, le cas échéant, être reconduits dans leur pays d’origine.

En outre, la procédure d’asile via les ambassades – en référence à l’argumentation du bureau de liaison du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en

– « Le 29 septembre 2012, ‹ les mesures urgentes de la loi sur l’asile › sont entrées en vigueur. C’est contre ces changements que le référendum a été lancé. »

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Suisse et au Lichtenstein – est un signe de solidarité dans la protection des réfugiés avec des pays se situant dans des régions de crise d’où proviennent 80 % des réfugiés.

Phases de testDans la loi sur l’asile, les procédures d’asile sont

prévues dans le cadre de phases de test. Le Conseil fédé-ral règle les phases de test par une ordonnance. En consé-quence, les compétences sont transférées du législatif à l’exécutif.

La Fédération des Églises protestantes reconnaît que les phases de test sont susceptibles d’avoir un effet positif sur le développement ultérieur du système d’asile. En plus des questions de principe touchant à la politique démocratique et à l’État de droit, la FEPS exprime des réserves sur la diminution de 30 à 10 jours du délai de recours accordé aux requérants d’asile. La protection ju-ridique des requérants d’asile devrait être sensiblement renforcée. Ce qui rendraient nécessaires la garantie de l’accès aux conseils juridiques et un soutien financier supplémentaire par la Confédération aux services de consultation juridique largement financés par les Églises et les œuvres d’entraide ecclésiales.

Hébergement Les requérants d’asile qui « menacent la sécurité et

l’ordre publics ou qui, par leur comportement, portent sensiblement atteinte au fonctionnement des centres d’enregistrement et de procédure » devront à l’avenir pouvoir être hébergés dans des centres spécifiques.

La FEPS comprend le besoin d’assurer la sécurité et l’ordre, mais considère d’un œil critique la création de tels centres. Des questions se posent sur les critères qui déterminent le transfert dans un tel centre ou la durée du séjour.

Sur la base des expériences des Églises avec les ser-vices œcuméniques d’accompagnement spirituel, la FEPS souligne depuis des années la nécessité de créer davan-tage de possibilités d’occupations dans les centres d’enre-gistrement et de procédure. La modification de la loi sur l’asile en vue de soutenir financièrement les programmes d’occupation est, de ce point de vue, une innovation po-sitive.

ConclusionSur la base des réflexions présentées, la Fédération

des Églises protestantes de Suisse rejette les modifications urgentes de la loi sur l’asile. En lieu et place, il faudrait assurer une procédure d’asile équitable pour les êtres en fuite ou chassés. Il s’agit de prendre notre responsabilité et de protéger effectivement et dignement les personnes qui ont besoin de protection. <

Compléments d ’ information

Interview en vidéo : trois questions à l ’ auteur, Simon Röthlisberger,

chargé des questions de migration https://vimeo.com/61799792

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34 bulletin Nº 1/2013

Le manque de clarté dans l’agencement des acti-vités diaconales a incité plusieurs organisations diaconales à entreprendre des démarches de ré-organisation au plan national. La conséquence :

une confusion plus grande encore. Même des personnes actives de longue date dans le domaine de la diaconie ont perdu la vue d’ensemble et ne savent plus qui rem-plit quelles tâches selon quel mandat. Cette situation a conduit quelques Églises cantonales à interrompre les ré-formes en cours. La FEPS a été chargée de mettre au point des « Mesures pour améliorer le regroupement, la coordi-nation et le pilotage » de la diaconie en Suisse, en se fon-dant sur les résultats d’une future analyse de la situation.

Traitement de la motion par la FEPS : le rapport d’analyse

Le Conseil de la FEPS a créé un groupe de pilotage composé de membres de conseils synodaux et de conseils d’Église ainsi que de spécialistes et dirigé par Regula Kummer, membre du Conseil. Ce groupe a été chargé de mettre en œuvre les revendications contenues dans la motion.

Dans une première phase, qui durait jusqu’à la fin de l’année dernière, le conseiller scientifique chargé de diriger le projet par la FEPS, le pasteur Simon Hofstet-ter, ainsi que le groupe de pilotage ont élaboré un rapport d’analyse détaillé. Ce rapport décrypte et décrit en dé-

tail le paysage diaconal suisse ; il recourait à trois instru-ments.

Une enquête nationale : la diaconie pratiquée au plan local

Pour commencer, le groupe de pilotage s’est fait une idée de la situation générale de la diaconie en Suisse en lançant une enquête électronique intitulée « Enquête sur la diaconie » auprès des institutions et des particuliers ac-tifs dans le domaine de la diaconie en Suisse, en s’alliant au projet « diakonie.ch » de la Conférence des Églises de Suisse alémanique KIKO.

Les résultats de cette enquête se basent sur les ré-ponses de pas moins de 470 personnes (correspond à un retour d’environ 30 %). Ils donnent non seulement une vue d’ensemble détaillée des multiples acteurs diaconaux mais mettent aussi en évidence les modalités d’échange entre paroisses et entre œuvres ecclésiales, les modalités de collaboration avec les organisations partenaires des secteurs social et sanitaire ainsi que les modalités d’enga-gement dans la politique sociale.

Une analyse du modèle d’organisation : « Qui fait quoi et comment » ?

Le rapport du groupe de pilotage identifie une ving-taine d’acteurs sur la scène diaconale, actifs au niveau na-tional ou dans une région linguistique. Il s’agit d’œuvres

– Pour un nouvel agencement de la diaconie

Qui mandate et qui remplit telles tâches dans le domaine de la diaconie ?En 2010, la diaconie suisse a connu des bouleversements riches de conséquences : la Fédération suisse de diaconie a été dissoute et la formation de diacre proposée par le Diakonenhaus Greifensee a été supprimée. Ces bouleversements ont peu à peu mis en évidence le contexte dans lequel agissent les associations diaconales subsis-tantes ainsi que leurs structures de formation et leurs œuvres.

PAr SiMON hOFSTETTEr

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diaconales ecclésiales, d’œuvres d’entraide, d’institutions de formation diaconale en Suisse alémanique et de for-mation de diacres en Suisse romande, d’acteurs organisés dans des groupements de type associatif ainsi que d’ac-teurs tiers tels que la Conférence de diaconie de la FEPS ou la Conférence de diaconie de la Suisse alémanique.

La direction de ces 20 institutions nécessite une importante main-d’œuvre : on recense pas moins de 55 personnes dans des fonctions dirigeantes ; une centaine d’autres occupent des postes de délégués. Au total, les ac-tivités de ces acteurs représentent un volume annuel de 41 millions de francs suisses, la plus grande part étant représentée par l’Entraide protestante suisse EPER et les Centres sociaux protestants. La contribution des Églises cantonales représente un peu moins de 10 pour cent de ce chiffre.

Examen des tâches : Quelles sont les tâches nécessaires ? Lesquelles ne le sont pas/plus ?

L’examen des tâches a permis au groupe de pilotage de faire l’inventaire des domaines d’activités des quelque 20 acteurs diaconaux recensés, ainsi que celui des do-maines d’activités désormais prioritaires et secondaires.

Cet examen révèle que les spécialistes de la diaconie déplorent l’absence d’organe traitant des questions stra-tégiques relatives à la diaconie, notamment la question du positionnement du travail diaconal à l’intérieur de

l’Église, celle du positionnement de la diaco-nie dans un État-providence, ainsi que celle

de la coopération entre Églises et œuvres. Par ailleurs, ces spécialistes estiment que la publi-

cation de prises de position sur des sujets de poli-tique sociale considérés sous l’angle de la diaconie

constitue une tâche prioritaire.

Ce qui reste à faire : modèles et mesures pour un nouvel agencement de la scène diaconale

Les résultats qui figurent dans le rapport d’analyse serviront de base au groupe de pilotage pour la deuxième étape de son travail, à savoir la mise au point de « Me-sures pour améliorer le regroupement, la coordination et le pilotage » dans le domaine de la diaconie. Au cours de l’année, le groupe de pilotage entamera les travaux pour mettre au point des propositions de modèles qui soient au service d’une diaconie plus compacte, plus efficace et plus transparente. L’Assemblée des délégués sera appelée à voter sur ces propositions en novembre 2013. <

Compléments d ’ information

Interview en vidéo : trois questions à l ’ auteur, Simon Hofstetter,

collaborateur scientifique « Droit et Société » https://vimeo.com/61799790

Pour télécharger le rapport d’analyse complet : www.kirchenbund.ch/fr/diaconie-rapport

Comment se présente la diaconie en Suisse aujourd’hui ? Et demain ? Certainement plus compacte, plus efficace et plus transparente.

Formation/ Enseignement

Prises de position sur des sujets de politique sociale

Formation continue

Stratégie

Collaborations au niveau européen

Recherche, domaine

scientifique

Forum d’échange

Plates-formes d’informationDiaconie

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36 bulletin Nº 1/2013

La loi en question ne recouvre pas, il est vrai, toutes les branches d’activité (mais seulement l’industrie, l’artisanat et le commerce) et elle admet des dérogations motivées. Certaines

exemptions, importantes, ont été ajoutées ces dernières années, notamment le commerce situé dans les aéroports et les gares à forte fréquentation et un nombre annuel de quatre dimanches pour lesquels les cantons peuvent au-toriser l’ouverture des magasins.

Depuis les années 80 déjà, le repos dominical est sous pression ; actuellement, plusieurs initiatives et mo-tions visant la libéralisation des heures de travail et des

heures d’ouverture des magasins ont suscité ou suscitent encore de vifs débats. Parmi les défenseurs du repos do-minical figurent les syndicats et les Églises. Le 26 avril 2012 ils ont constitué ensemble l’Alliance suisse pour le dimanche libre. Des organisations protestantes, comme par exemple l’Église méthodiste (membre de la FEPS) et les Femmes protestantes, y adhèrent. Est-ce à dire que les Églises mènent le même combat, en la matière, que les syndicats ?

Pas tout à fait, c’est évident – malgré un bon nombre de convictions et de préoccupations communes : le lien social auquel une journée libre commune contribue, la

– Alliance pour le dimanche libre

Le dimanche – un enjeu de spiritualité mondaine ?En Suisse, le repos dominical est reconnu légalement. Ce n’est pas le cas de tous les pays européens. L’article 18 al. 1 de la loi sur le travail stipule en effet que « du samedi à 23 heures au dimanche à 23 heures, il est interdit d’occuper des travailleurs. »

PAr OTTO SChäFEr

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compatibilité des engagements familiaux et profession-nels, les risques de pressions hiérarchiques ou confor-mistes que peuvent subir des travailleuses et des travail-leurs acceptant de travailler le dimanche « de leur plein gré ». Pour les Églises, cependant, ces préoccupations d’ordre social s’appuient sur la dimension spirituelle du dimanche. Celle-ci dépasse la simple légitimation historique du sabbat dans les Écritures saintes, puis du dimanche dans l’histoire du christianisme. Elle dépasse aussi – en l’incluant, bien sûr – la fréquentation du culte ou de la messe le dimanche matin.

Une absence de valeur concrète qui fait la valeur du dimanche

Les Églises vont plus loin. Elles estiment qu’un rythme régulier, périodique, de tension et de détente, de mouvement et de repos, d’ef-fort et de recueillement, est es-sentiel pour le bien-être spirituel de toutes et de tous – et non seu-lement des chrétiens. Au milieu du « donnant-donnant » de nos vies, le dimanche représente la matérialisation temporelle com-mune de la gratuité. Le rythme commun, concordant, rend la gratuité visible et palpable. Dans le document « Protégeons notre dimanche, resserrons les liens de notre communauté » de 2005, adopté par toutes les Églises membres de la Communau-té de travail des Églises chrétiennes en Suisse (CTEC), on lit déjà : « Le dimanche se soustrait à toute justifica-tion simpliste. En soi, il n’apporte rien à l’économie et à la prévoyance matérielle. C’est peut-être justement cette absence de valeur concrète, cette inaptitude comptable qui fait la valeur du dimanche. Il n’existe pas dans un but particulier. Il existe par lui-même. Tout simplement. »

Le dimanche marque une limite dans nos exis-tences conditionnées par la nature, l’histoire, le travail et le capital. Le dimanche – comme le sabbat, comme le vendredi des musulmans (dont le caractère de jour de repos est beaucoup moins affirmé cependant) – n’obéit à aucun rythme naturel, contrairement à la journée, au mois et à l’année solaire. De ce fait, le dimanche renvoie à une liberté qui nous vient d’ailleurs. Il ouvre une brèche dans l’épaisseur du monde. Cette expérience est com-

mune aux juifs, aux chrétiens et aux musulmans malgré tout ce qui sépare les trois religions. C’est pour cela sans doute qu’au niveau européen, dans le cadre de la Euro-pean Sunday Alliance à laquelle participe la FEPS, on n’observe pas d’hostilité de la part des autres religions du Livre à l’égard de la défense du dimanche (L’intérêt prag-matique des commerçants de religions minoritaires y est sans doute pour quelque chose aussi).

Le problème n’est pas le dimanche (de préférence au samedi ou au vendredi) mais l’homogénéisation des jours de la semaine et la perte progressive d’un jour hebdoma-daire mis à part.

Le calendrier révolutionnaire avait aboli le di-manche en remplaçant la semaine de sept jours par la décade – rythme naturel qui se compte sur les doigts des deux mains. L’évolution actuelle, largement déterminée

par un libéralisme économique exa-cerbé, n’implique aucune abolition formelle : en multipliant les options in-dividuelles, elle tend à la dispersion du repos commun dans l’activité inces-sante désormais diluée par des repos individuels. Ce processus est déjà très avancé dans plusieurs pays européens, notamment la Grande-Bretagne.

La dimension spirituelle du dimanche s’étend à la société tout entière

La disparition du dimanche éli-minerait du temps hebdomadaire la provocation d’un au-delà du monde présent. Or, c’est cette provocation-là qui détermine le dynamisme des civilisations marquées du sceau des religions du Livre. Le calendrier musulman superpose à l’année calendaire habituelle, solaire, l’an-née sainte, strictement lunaire, composée de 12 mois à 30 jours. Le calendrier religieux de 360 jours se décale donc lentement de l’année des saisons naturelles (365/366 jours). Au fil des années, la période du jeûne, le ramadan, traverse toutes les saisons. Le temps consacré à Dieu n’est pas le temps conditionné par la nature. Cette affirmation centrale vaut aussi pour le sabbat et le dimanche (sans que l’on force l’analogie par ailleurs).

L’adhésion ou non à la foi relève de la liberté re-ligieuse de chacune ou de chacun. Personne n’est contraint de conférer au dimanche la signification spi-rituelle chrétienne qui le fonde (et qui entretient elle-

– « La disparition du dimanche éliminerait du temps hebdo ma -daire la provocation d’un au-delà du monde présent. »

Alliance pour le dimanche libre

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même un rapport complexe avec le sabbat juif). Tout le monde est concerné, cependant, par le rappel périodique de la possibilité même d’une transcendance, d’une liber-té venant d’ailleurs. Le dimanche est humanisant. Il est un élément de spiritualité non seulement religieuse mais aussi mondaine : il manifeste un monde non clos et qui ne se réduit pas aux déterminismes de la nature, de l’his-toire, du travail et du capital. Le dimanche permet de se retrouver soi-même. « Toutes occupations cessantes, voici que tout devient calme autour de l’homme et en lui : dans la tranquillité retrouvée, il arrive pour la pre-mière fois que, de sujet, il devienne un objet pour soi. L’antique ‹ Connais-toi toi-même › peut prendre ici toute sa place et tout son sens. » (Karl Barth) C’est pourquoi non seulement la dimension sociale mais aussi la dimen-sion spirituelle du dimanche s’étend au-delà des Églises à la société tout entière. <

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40 bulletin Nº 1/2013

Les deux Églises célèbrent bientôt les 500 ans de la Réformation. Margot Kässmann est am-bassadrice de l’Année Luther 2017, les réfor-més suisses préparent également une année

jubilaire pour 2019. La question se posait de voir dans quelle mesure les concepts de ce qui se fêtera dans quatre et six ans se distinguent et si on arrivait à souligner ce qui nous relie au-delà des frontières géographiques et confessionnelles.

« Nous n’allons pas célébrer un jubilé triomphal de la séparation », déclara d’emblée Margot Kässmann. Elle mit l’accent sur l’impact de la Ré-formation lancée par Martin Luther au-delà de l’Église luthérienne : le mouvement a profondément trans-formé l’ensemble de la société et a même agi au sein de l’Église catho-lique. C’est pourquoi le jubilé de la Réformation comporte toujours une dimension œcuménique.

Celle qui fut évêque luthérienne mit en évidence l’histoire de l’impact réformateur et son héritage historique en insistant notamment sur l’exégèse historico-critique de la Bible. La responsabilité histo-rique de l’Église évangélique comporte deux éléments : d’une part, se distancier des déclarations probléma-tiques de Luther sur le judaïsme, par exemple. D’autre part, Margot Kässmann espère pouvoir souligner « le côté tendre, consolant », peu connu, du réformateur à la parole puissante. En tant que père spirituel capable d’empathie, il n’a jamais opposé la vie quotidienne des gens à la vie ecclésiale.

Gottfried Locher, président de la Fédération des Églises protestantes de Suisse, commença son discours en citant une date, la date « allemande » de l’année 1517. Il en fit un contrepoint, parce qu’il ne songeait pas au cé-lèbre affichage par Martin Luther des thèses à la porte de l’église de Wittenberg. En lieu et place, Gottfried Locher esquissa le portrait d’un jeune ecclésiastique qui prêchait en 1517 dans un village isolé : Huldrych Zwingli. Impli-citement, Gottfried Locher mettait ainsi en parallèle l’histoire ecclésiale commune à toutes les confessions. Il ne décrivait pas Zwingli, le réformateur de Zurich, mais

Zwingli, le jeune prêtre au cou-vent d’Einsiedeln qui dénonçait publiquement l’état déplorable de l’Église. Gottfried Locher partait des conditions spirituelles de la naissance du mouvement réforma-teur qui avait son origine « dans le silence » du détachement monas-tique : ses thèses, Luther les a aussi « développées dans la prière ».

Margot Kässmann et Gottfried Locher ne se sont pas arrêtés à l’histoire. Pendant qu’elle faisait ressortir le rôle actuel de l’Église en politique et dans la société, lui s’interrogeait sur le fondement spirituel qui est le préa-lable à tout engagement public de l’Église. Les deux jubi-lés de la Réformation n’entendent pas porter uniquement un regard en arrière, mais être une force pour l’avenir et encourager à « être Église d’Évangile », comme le dit le président de la FEPS.

Ayant conscience que la Réformation est issue et provient toujours encore du silence – « à l’écoute de la

– Jubilé de la Réforme

Rester en mouvement

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Margot kässmann, ancienne présidente de l’Église évangélique en Allemagne (EkD), était en novembre l’hôte du Synode de l’Église nationale zurichoise en compagnie du président du Conseil de la Fédération des Églises protestantes de Suisse.

– « Nous n’allons pas célébrer un jubilé triomphal de la séparation. »

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Parole qui est Dieu lui-même » (Jean 1,1) – Gottfried Lo-cher développa les thèses suivantes : « la Réformation met en mouvement avec l’Évangile » et « la Réformation re-cherche la communion ». Une nouvelle fois, les conclu-sions des deux hôtes se rejoignaient, malgré la rhétorique différente et l’argumentation diverse.

Alors que Margot Kässmann interprétait l’impact social de la Réformation comme un devoir de l’Église de s’immiscer dans le discours politique et de jouer parfois un rôle inconfortable, Gottfried Locher soulignait dans une même intention la tâche d’être à l’écoute de l’Évan-gile : « nous croyons en celui qui démasque les structures de pouvoir du monde. Nous croyons en celui qui ne fait pas de compromis, là où il en va de la défense de ceux qui ont besoin de protection. » Il renforçait ainsi le postulat de Margot Kässmann qu’il est nécessaire de maintenir une saine distance entre l’Église et l’État, car l’Église doit avoir la force et le courage de résister aux tensions avec les autorités séculières, par exemple en matière d’asile.

Transformer la société en bienEn regard de ces points de convergence qui s’éta-

blirent par détours, la troisième remarque de Gottfried Locher était logique : « la Réformation recherche la com-munion ». Il est vrai que les réformateurs avaient parfois beaucoup de difficultés à se mettre d’accord sur des ques-tions théologiques. Margot Kässmann émit la critique que « les réformateurs se sont fortement définis par la sé-paration, ce qui était une erreur ». Mais simultanément, Gottfried Locher renvoyait au « réseau réformé euro-péen » d’Heinrich Bullinger comme modèle historique et porteur d’avenir tout à la fois.

Sans se répondre mutuellement de manière expli-cite, Margot Kässmann et Gottfried Locher ont dessiné le portrait d’une communion d’Églises réformées qui connaissent leurs différences et les dépassent en étant Église ensemble : en reprenant conscience du fait que, malgré leurs structures institutionnalisées, elles font es-sentiellement partie d’un mouvement qui doit constam-ment se réformer. Le mouvement supporte les différences tant qu’il se réfère à un fondement commun qui résiste. Ou dans les termes de Gottfried Locher : « nous sommes ensemble l’Église. Les zwingliens avec les calvinistes. Les luthériens avec les réformés. Et, si Dieu le veut, un jour aussi les protestants avec les catholiques. »

Malgré la pression à laquelle les soumet leur société sécularisée, les Églises évangéliques en Allemagne et en Suisse ne vont pas célébrer un jubilé de la séparation pour fortifier leur propre identité. Au contraire, elles veulent se prendre la liberté, en tant qu’Église consciente d’elle-même, de s’immiscer de manière offensive dans le dis-cours social. Et de transformer la société en bien. Comme elles-mêmes. <

Felix Reich, rédacteur en chef de reformiert.zuerich www.reformiert.info

Margot Kässmann, am-bassadrice du Conseil de l’EKD pour le Jubilé de la Réforme et Gottfried Locher en conférence de presse à Zurich

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– Questions théologiques fondamentales à propos de l’environnement et du climat

My home is in heaven ? or on earth ?Depuis quelques années, on accorde davantage d’importance à la religion et à la spiritualité dans le domaine de la coopération au développement. Cet intérêt accru ne diminue en rien le poids des aspects économiques, sociaux et politiques ; mais avec l’encadrement religieux et spirituel des objectifs et des projets de développement, la démarche ne se limite plus à eux seuls.

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Cette prise de conscience signifie par exemple que les projets à vocation écologique et de lutte contre le réchauffement climatique entrepris dans le Sud doivent aussi être

considérés sous l’angle de leur dimension religieuse et spirituelle, le respect de cette dimension constituant une condition de réussite déterminante. Il faut donc se poser les questions suivantes : comment les retombées du changement climatique aux plans local et régional sont-elles perçues par les partenaires locaux d’un point de vue religieux ? Quels sont les facteurs spirituels qui renforcent ou qui freinent l’engagement continu et fiable de tous les partenaires du projet ? L’identité théologique des œuvres d’entraide des Églises et des missions, ainsi que leur motivation spécifique et leur légitimation in-térieure et extérieure constituent d’autres facteurs clés pour l’aboutissement de ces projets. Il importe donc que les Églises confèrent un ancrage théologique à des no-tions de base telles que la justice climatique, tout comme aux projets de lutte contre le réchauffement climatique qui vont dans ce sens. Il importe également que la société pluraliste intègre la réflexion chrétienne et théologique

sur le développement ; il s’agit d’un critère de succès qui dépend évidemment du contexte, mais qui est souvent déterminant. Dans les contextes où la foi chrétienne constitue visiblement une force créative, l’autoréflexion de cette foi est indispensable ; la modestie, voire l’abné-gation serait déplacée dans un tel contexte.

Des questions théologiques fondamentalesDes questions théologiques passionnantes sous-

tendent la notion de justice climatique et les projets cli-matiques. Comment peut-on exprimer les louanges et la gratitude pour le don de la Création sans qu’elles ne se doublent d’aveuglement pour les causes de l’usage destructeur que nous faisons de la Création ? La théolo-gienne allemande Dorothee Sölle n’a eu de cesse d’attirer l’attention sur cette contradiction. Comment définir la relation entre l’expérience animiste de la présence divine dans la nature et la foi chrétienne dans l’esprit divin qui se manifeste dans la Création ? À titre d’exemples, citons les débats lancés par la théologienne coréenne Chung Hyun Kyung. Puis, plus fondamentalement, quelle est la nature du lien entre l’ici et l’au-delà ?

PAr OTTO SChäFEr

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« My home is in heaven »La lauréate kényane du prix Nobel de la paix Wan-

gari Maathai (1940 – 2011) a explicitement mentionné l’ancrage spirituel de sa lutte exemplaire pour le maintien et la reconstitution des forêts (Green Belt Movement). La spiritualité qu’elle préconise transcende les frontières entre les différentes traditions religieuses et joue un rôle de médiatrice entre ces traditions. Wangari Maathai n’a jamais renié son éducation chrétienne et elle n’a jamais cessé d’analyser son rapport à cette religion. Elle estime que la spiritualité chrétienne telle qu’elle l’a elle-même vécue a une tendance fâcheuse à dénigrer l’existence terrestre par rapport à l’existence céleste, dans l’au-delà. Cette tendance provoque une attitude résignée par rap-port à la destruction des bases terrestres de la vie, comme si ce processus ne concernait pas vraiment les croyants.

« My home is in heaven, I am just travelling through this world » : Wangari Maathai cite ce cantique très répandu, en Afrique surtout, pour remettre en question une piété chrétienne qui voit dans la plantation d’arbres un acte libérateur trop unilatéral et qui ne parvient pas à reconnaître de motivation chrétienne dans le Green Belt Movement.

En fin de compte, c’est à notre interprétation de la résurrection, de la rédemption et de la sanctification que nous nous voyons confrontés ici, à une interprétation où la communication des notions de l’ici et de l’au-delà n’est pas claire. Les chrétiennes et les chrétiens du Nord sont majoritairement – et peut-être aussi unilaté-ralement – marqués par le fait que la communauté avec le Ressuscité et l’attente du royaume de Dieu déterminent, confirment et modifient aussi notre vie dans le présent et l’ici. Les chrétiennes et les chrétiens du Sud, par contre, se voient souvent comme des pèlerins en chemin vers la patrie céleste, alliant cette attente à l’amour du prochain vécu concrètement, mais sans le souci de conserver une création qui est par définition éphémère. On sent bien ici l’influence des mouvements du Réveil du XIXe siècle sur les théologies missionnaires ; par ailleurs, la nature des consolations n’est pas la même dans des conditions de vie aussi radicalement différentes.

Un chantier essentiel de la théologie du développe-ment s’ouvre ici : quelles sont les matériaux utiles ? Par exemple la conviction que le Sauveur est également le

Créateur, et inversement. C’est aussi le cas du champ de tension fructueux, déjà contenu dans les traditions bi-bliques, entre la nouvelle Création promise et la conser-vation de la Création actuelle, ou encore des sacrements du baptême et de la cène, autant de signes qui manifestent efficacement la présence du royaume de Dieu dans les élé-ments matériels tels que l’eau et dans les éléments trans-formés tels que le pain et le vin. L’« homme nouveau » agit dans l’ancien, le Christ est présent dans Adam ; le Christ ressuscité vit déjà, sous une forme occultée, dans la vie actuelle et présente ; le royaume de Dieu agit aujourd’hui comme le levain de la Terre.

« In heaven and on earth »Par analogie, la Création terrestre est une parabole

de la Création céleste et sa dignité découle de son aptitu-de à servir de parabole pour ce qui vient et pour ce qui est

céleste. Une Église qui baptise de pe-tits enfants et de jeunes adultes et qui ne s’intéresse pas à la manière dont la nouvelle vie qui leur a été ainsi don-née a un effet conservateur et salutaire dans la vie actuelle, dans la présente vie terrestre, fait preuve de cynisme. Une Église qui célèbre la cène et qui ne s’intéresse pas à la manière dont les dons de la Terre peuvent être conser-

vés et multipliés par le partage, fait elle aussi preuve de cynisme. Le lien avec le monde dans l’ici et le présent existe et il est nécessaire ; les Évangiles ne mentionnent pas seulement l’institution de la sainte cène, mais aussi la multiplication des pains ; ils mentionnent non seule-ment le pain et le vin, mais aussi, dans cette société de pêcheurs, la qualité rassasiante du pain et du poisson ; ils ne mentionnent pas seulement le repas, mais aussi le lave-ment des pieds, pour mettre en évidence la manifestation de fraternité vécue (Jean 13).

Ce Dieu, qui pense non seulement à l’âme des humains, mais aussi à leurs pieds, comment ne pas l’imaginer aussi en défenseur de la Création terrestre, afin que nous ne soyons pas délivrés d’elle, mais en elle et avec elle ? <

– « My home is in heaven, I am just travelling through this world. »

Questions théologiques fondamentales à propos de l’environnement et du climat

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– bulletin Nº 1/2013

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Président du Conseil d’Église et pasteur, Ulrich Knoepfel, ici avec Sony, son compagnon à quatre pattes.

– Hôte de l’Assemblée des délégués 2013

L’Église évangélique réformée du Canton de Glaris

Fridolin. L’irlande. Landolf et Urso, un squelette. L’Allemagne et la captation d’héritage. La trame d’un roman policier ou d’un article de presse à sensation sur l’appartenance de la Suisse à l’UE ? Non. Le Pays de Glaris.

TExTE ThOMAS FLüGGE / PhOTOS GiON PFANDEr

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Fridolin, né Irlandais, était croyant et a vécu il y a quinze siècles. Messager de la foi de son mé-tier, il s’est mis en route pour Glaris. La légen-de rapporte qu’il a reçu en don d’Urso mou-

rant une grande partie du Pays de Glaris. D’où l’entrée en scène du frère d’Urso, Landolf. Une contestation d’héritage s’ensuit. Fridolin, non sans habileté, appel-le à l’aide dans son tombeau Urso, mort entre-temps. Urso se rend devant le tribunal, mais il est déjà tombé en décomposition. Landolf en est tellement effrayé qu’il fait don de sa propre part du Pays de Glaris au messager irlandais de la foi Fridolin. Fin de la légende. La der-nière demeure ultérieure d’Urso est inconnue, Fridolin quant à lui passe depuis lors pour le saint patron de la captation d’héritage.

Et cet héritier irlandais est à ce jour le seul être hu-main à figurer sur des armoiries cantonales en Suisse. Autre particularité : Fridolin porte une bible à la main. C’est à son influence sans doute que l’on doit la première église construite à Glaris, au VIe siècle. On ne sait si Fridolin, en route depuis l’Irlande, a séjourné au cloître de Säckingen en Allemagne ; quoi qu’il en soit, le Pays de

Boutique Didi à Elm. ElisabethRhyner et Katharina Gamper-Rhynerprésentent les traditionnels foulards de Glaris.

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Glaris a été soumis à ce cloître quelques siècles seulement plus tard.

« À l’amman, au Conseil et à la paroisse du Pays de Glaris », Zwingli a dédicacé en 1523 son ouvrage sur la Ré-forme. Cela eut de l’effet – jusqu’en 1530, la majorité des Glaronaises et des Glaronais étaient réformés. Mais ils ne l’étaient donc pas tous. Des solutions adéquates ont dû être trouvées. Elles l’ont été par exemple avec l’utilisation commune de l’église de Glaris par la paroisse réformée et la paroisse catholique romaine. Cela a duré quelques années, jusqu’en 1964, jusqu’à la consécration de l’église catholique Saint-Fridolin. Là se clôt un cycle.

Et aujourd’hui ? Il y a encore quelque 35 % de réfor-més dans le canton, ce qui correspond à bien 11 000 per-sonnes, réparties sur treize paroisses. Le Conseil d’Église de sept membres est présidé par Ulrich Knoepfel, lui-même pasteur à Obstalden.

Sous le titre « L’Église glaronaise réunit les géné-rations », les réformés ont lancé un projet de réforme de l’Église cantonale, qui doit se conclure exactement avant les célébrations, dès 2017, du Jubilé de la Réforme. Église quotidienne, Église célébrante, Église culturelle et Église apprenante, c’est ce que veut être l’Église glaronaise qui réunit les générations. Un « espace de vie et d’hospitalité avec de nombreux accès ».

C’est un espace de travail et d’hospitalité qu’of-friront les réformés glaronais cet été déjà. À la mi-juin, l’Assemblée des délégués de la Fédération des Églises se réunira à Filzbach, à l’invitation de l’Église évangélique réformée du Canton de Glaris. <

En haut et au milieu : l’Église d’Obstalden, dont Ulrich Knoepfel est pasteur. En bas : centre sportif de Filzbach.

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– Aussi variés que nos Églises le sont …

Qui travaille ici ?Les membres de l’Église réformée travaillent volontiers, dit-on. Saurez-vous deviner qui travaille où ? Nous vous invitons à trouver à qui appartiennent les bureaux ci-dessous. Solution à la page 54

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Vous trouverez les photos des présidents et des présidentes dans leur bureau sous www.feps.ch

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Fédération des Églises protestantes de Suisse FEPS CH-3000 Berne 23Téléphone +41 (0)31 370 25 [email protected], www.feps.ch

Tirage : 4700 allemand, 1700 français

Rédaction : Thomas Flügge, Nicole Freimüller-HoffmannGraphisme/Layout : Meier Media Design, Zurich

Traduction : André Carruzzo, Eliane Gerber, Irène Minder, Christine Sutter Correction : Monique LopinatImpression : Roth Druck AG, Uetendorf

Fédération des Églises protestantes de Suisse

La Fédération des Églises protestantes de Suisse FEPS rassemble en Suisse 24 Églises protestantes cantonales, l ’ Église méthodiste et l ’ Église évangélique libre de Genève. Ainsi, la FEPS représente deux millions de protestantes et de protestants. Elle prend position sur des thèmes politiques, économiques et sur des ques-tions de foi et elle est, entre autres, l ’ interlocutrice du Conseil fédéral.

La FEPS s ’ exprime dans ses propres publications sur des sujets théologiques et éthiques actuels. Elle met à disposition des publications d ’ actualité au sujet de la cène, du baptême, de la globalisation, de la recherche sur l ’ être humain, de l ’ assistance au décès, des droits de l ’ homme, des Églises de migrants. Ces différents documents peuvent être téléchargés et com-mandés sur le site www.feps.ch

Sur le plan religieux, elle représente ses Églises membres auprès de la Communion mondiale d ’ Églises réformées CMER, de la Communion d ’ Églises protes-tantes en Europe CEPE, de la Conférence des Églises européennes KEK et du Conseil œcuménique des Églises COE. En Suisse et à l ’ étranger, la FEPS entre-tient des relations avec les Églises partenaires, avec les communautés israélites et musulmanes, avec la Confé-rence des évêques, ainsi qu ’ avec les œuvres d ’ entraide et les organisations missionnaires.

Solution des pages 50 à 53

A8 Michel MüllerEvangelisch reformierte Landeskirche des Kantons ZürichB6 Wilfried BührerEvangelische Landes kirche des Kantons ThurgauC4 Dieter kolthoffEvangelisch-Reformierte Landes kirche UriD12 Tobias E. Ulbrich Chiesa evangelica riformata nel TicinoE10 Monika hirt BehlerReformierte Kirche Kanton ZugF1 Andreas zellerReformierte Kirchen Bern- Jura-SolothurnG11 Verena EnzlerEvangelisch-Reformierte Kirche Kanton Solothurnh5 Therese Meierhofer-LaufferVerband der evangelisch-reformierten Kirchgemeinden des Kantons Obwaldeni3 Ulrich knoepfelEvangelisch-Refor mierte Landeskirche des Kantons GlarusJ9 Lukas kundertReformierte Kirche Basel-Stadtk7 Gabriel Bader Église réformée évangélique du canton de NeuchâtelL2 Esther GaillardÉglise Évangélique Réformée du canton de Vaud

M21 Patrick StreiffEvangelisch-methodistische Kirche in der SchweizN17 Martin StingelinReformierte Kirche BasellandO16 Felix MeyerEvangelisch-reformierte Kantonalkirche Schwyz P15 Dölf WederEvangelisch-reformierte Kirche des Kantons St. GallenQ13 Beat AbegglenEvangelisch-reformierte Kirche des Wallisr22 Christoph Weber-BergReformierte Landeskirche AargauS14 David A. WeissReformierte Kirche Kanton Luzern T18 Frieder TramerEvangelisch-reformierte Kirche Kanton Schaffhausen U20 Andreas ThönyEvangelische Landeskirche GraubündenV24 Pierre-Philippe BlaserEvangelisch-reformierte Kirche des Kantons FreiburgW19 Charlotte kufferÉglise Protestante de Genèvex23 kurt kägiEvangelisch-Reformierte Landeskirche beider Appenzell Y25 Wolfgang GaedeEvangelisch-Reformierte Kirche Nidwalden

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bulletinsek · feps Le magazine de la Fédération des Églises protestantes de Suisse

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Fédération des Églises protestantes de Suisse FEPS Sulgenauweg 26 CH-3000 Berne 23Téléphone +41 (0)31 370 25 25

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– Lisez, écoutez et regardez votre Fédération des Églises dans le bulletin en ligne ! www.feps.ch

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6 –La révision de la Constitution

Quo vadis, ecclesia ?16 – À propos d’œcuménisme

Points de vue de l’abbé Martin Werlen et de Gottfried Locher

20 – Option Vie

Du danger d’être un embryon

36 – Alliance pour le dimanche libre

Le dimanche – un enjeu de spiritualité mondaine ?