Bulletin Arrêts des - Cour de cassationCrim. 26 avril R 129 16-82.742 Exceptions proposées...

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Publication mensuelle Avril 2017 Bulletin des Arrêts Chambre criminelle 4

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Publication mensuelle

Avril2017

Bulletindes ArrêtsChambre criminelle

n° 4

Direction de l’information légale et administrative

Les éditions des Journaux officiels

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C O U R D E C A S S A T I O N

No 4

Avril 2017

Bulletin des arrêts

Chambre Criminelle

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Arrêtsetordonnances

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Jour mois

Déci-sion

Nu-méro

N° de pourvoi

A

ACCIDENT DE LA CIRCULATION :

Indemnisation ........... Victime ....................... Indemnité complémentaire  – Evaluation  – Déduction des prestations de sécurité so-ciale – Nécessité – Absence de la caisse aux débats – Portée ................................................. * Crim. 19 avril C 109 15-86.351

ACTION CIVILE :

Partie civile ................. Constitution ............... Constitution à l’instruction – Contestation – Contestation postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’information – Examen – Compé-tence  – Juridiction de jugement  – Excep-tion  – Cas  – Constitution postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’information ............. * Crim. 25 avril A 119 16-87.328

Préjudice ..................... Réparation .................. Réparation intégrale – Victime d’un accident de la circulation – Tiers responsable – Re-cours de la  victime  – Indemnité complé-mentaire  – Evaluation  – Déduction des prestations de sécurité sociale – Nécessité – Absence de la caisse aux débats – Portée ..... * Crim. 19 avril C 109 15-86.351

Rapport avec l’action publique .................. Appel des seules dis-

positions pénales .... Cour d’appel – Intervention pour la première fois en cause d’appel – Intervention d’une victime en qualité de partie civile – Receva-bilité (non) ........................................................ * Crim. 20 avril C 112 16-83.199

Recevabilité ................ Accident du travail ..... Constitution de partie civile – Loi forfaitaire – Caractère exclusif – Portée ............................. Crim. 25 avril C 118 (2) 15-85.890

APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE :

Procédure devant la cour ......................... Appel des seules dis-

positions pénales .... Intervention pour la première fois en cause d’appel  – Intervention d’une victime en qualité de partie civile – Recevabilité (non) * Crim. 20 avril C 112 16-83.199

INDEX ALPHABÉTIQUE

Les titres de références sont indiqués par un astérisque.

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– II – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

ATTEINTE A L’AUTORITE DE L’ETAT :

Atteinte à l’adminis-tration publique commise par des personnes exer-çant une fonction publique .................. Manquement au de-

voir de probité......... Détournement de fonds publics par une per-sonne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public – Eléments constitutifs  – Personne chargée d’une mission de service public – Directeur d’agence postale ............................................... Crim. 20 avril C 110 (1) 16-80.091

C

CASSATION :

Décisions suscep-tibles ........................ Juridictions de juge-

ment ........................ Cour d’assises  – Cour d’assises statuant en premier ressort – Arrêt incident – Condi-tions  – Arrêt non susceptible d’appel et mettant fin à la procédure .............................. Crim. 26 avril I 123 16-86.326

CHAMBRE DE L’INSTRUCTION :

Détention provisoire Détention subie par un accusé appelant d’une décision de cour d’assises ........... Délai raisonnable – Appréciation – Moment –

Date de dépôt de la  demande de mise en liberté (non) – Date à laquelle la chambre de l’instruction statue ...................................... Crim. 26 avril C 124 17-80.806

Nullités de l’instruc-tion .......................... Examen de la régula-

rité de la procédure Annulation d’actes :Commission rogatoire  – Objet  – Etablisse-

ment d’un procès-verbal récapitulatif re-prenant uniquement les éléments à charge . * Crim. 26 avril C 128 16-86.840

Procès-verbal dressé par un officier de police judiciaire – Faits objet de la mesure – Dé-clarations spontanées du gardé à vue – Re-cueil – Raison impérieuse – Défaut – Cas ... * Crim. 25 avril R 117 16-87.518

Saisies spéciales ......... Saisie portant sur cer-tains biens ou droits mobiliers incorpo-rels ........................... Saisie d’une somme d’argent versée sur un

compte bancaire – Action en restitution – Décision de non-restitution prise par le procureur de la République ou le procureur général – Recours – Recevabilité ................... * Crim. 25 avril C 120 16-83.154

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– III – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

CIRCULATION ROUTIERE :

Permis de conduire ... Annulation ................. Exécution – Point de départ – Détermination Crim. 26 avril C 125 16-84.539

CONFISCATION :

Instrument du délit ou chose produite par le délit ............... Contrat d’assurance-

vie ............................ Condamnation à des dommages-intérêts  – Cumul – Possibilité .......................................... * Crim. 19 avril C 108 (2) 16-80.718

Contrat souscrit par l’auteur d’un abus de faiblesse – Créance figurant sur le contrat – Droit de créance susceptible de restitution à la victime (non) ................................................ * Crim. 19 avril C 108 (1) 16-80.718

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME :

Article 6, § 1 ............... Détention provisoire .. Délai raisonnable  – Détention subie par un accusé appelant d’une décision de cour d’assises – Appréciation – Moment – Date de dépôt de la demande de mise en liberté (non) – Date à laquelle la chambre de l’ins-truction statue .................................................. * Crim. 26 avril C 124 17-80.806

Droit à un recours ef-fectif......................... Douanes  – Agent des douanes  – Pouvoirs  –

Droit de visite des navires dans les eaux ter-ritoriales et dans la zone contiguë – Visite d’un navire de plaisance – Lieu privé assi-milable à un domicile – Absence de recours juridictionnel – Compatibilité (non) ............ * Crim. 20 avril R 111 15-86.227

Impartialité ................ Equité – Procédure – Instruction – Commis-sion rogatoire – Objet – Etablissement d’un procès-verbal récapitulatif reprenant uni-quement les éléments à charge – Compati-bilité (non) ........................................................ * Crim. 26 avril C 128 16-86.840

COUR D’ASSISES :

Arrêts .......................... Arrêt incident ............. Cour d’assises statuant en premier ressort  – Pourvoi – Recevabilité – Conditions – Ar-rêt non susceptible d’appel et mettant fin à la procédure ...................................................... * Crim. 26 avril I 123 16-86.326

D

DETENTION PROVISOIRE :

Décision de prolon-gation ...................... Qualification diffé-

rente des faits en cours d’informa-tion .......................... Effet ........................................................................ Crim. 26 avril R 126 17-80.979

«  Crim. 26 avril R 127 17-81.316

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– IV – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

DETENTION PROVISOIRE (suite) :

Demande de mise en liberté ...................... Détention subie par

un accusé appelant d’une décision de cour d’assises ........... Appréciation – Moment – Date de dépôt de

la demande de mise en liberté (non) – Date à laquelle la chambre de l’instruction sta-tue ....................................................................... * Crim. 26 avril C 124 17-80.806

Juge des libertés et de la détention ............ Débat contradictoire .. Modalités  – Comparution  – Moyen de télé-

communication audiovisuelle  – Refus par la personne détenue  – Conditions  – Mo-ment – Information de la date de l’audience et du recours envisagé à ce procédé .............. Crim. 19 avril R 106 17-80.571

DOUANES :

Agent des douanes .... Pouvoirs ...................... Droit de visite des navires dans les eaux ter-ritoriales et dans la zone contiguë – Visite d’un navire de plaisance – Lieu privé assi-milable à un domicile – Exception d’incon-ventionnalité – Recevabilité – Portée ........... Crim. 20 avril R 111 15-86.227

DROITS DE LA DEFENSE :

Droit de ne pas contribuer à sa propre incrimina-tion .......................... Travail......................... Inspection du travail – Obstacle à l’accomplis-

sement des devoirs d’un inspecteur ou d’un contrôleur du travail  – Renseignements comportant des inexactitudes volontaires – Compatibilité .................................................... * Crim. 25 avril R 122 16-81.793

Détention provisoire Juge des libertés et de la détention ............. Débat contradictoire  – Modalités  – Com-

parution  – Moyen de télécommunication audiovisuelle – Refus par la personne déte-nue – Conditions – Moment – Information de la date de l’audience et du recours envi-sagé à ce procédé .............................................. * Crim. 19 avril R 106 17-80.571

Garde à vue ................ Droits de la personne gardée à vue ............ Respect  – Nécessité  – Faits objet de la  me-

sure – Déclarations spontanées du gardé à vue – Recueil – Procès-verbal dressé par un officier de police judiciaire – Raison impé-rieuse – Défaut – Principe – Portée .............. * Crim. 25 avril R 117 16-87.518

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– V – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

E

ESCROQUERIE :

Manœuvres fraudu-leuses ....................... Manœuvres accom-

plies pendant une période non visée dans la prévention .. Conditions  – Acceptation du prévenu d’être

jugé ..................................................................... * Crim. 20 avril C 114 16-81.452

G

GARDE A VUE :

Droits de la personne gardée à vue ........... Respect ........................ Nécessité – Faits objet de la mesure – Décla-

rations spontanées du gardé à vue  – Re-cueil – Procès-verbal dressé par un officier de police judiciaire – Raison impérieuse – Défaut – Principe – Portée ............................. Crim. 25 avril R 117 16-87.518

H

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES :

Faute ............................ Faute délibérée ........... Violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement – Obligation particulière de prudence ou de sécurité – Formation ren-forcée à la sécurité de salariés temporaires – Cas ...................................................................... Crim. 25 avril C 118 (1) 15-85.890

I

INSTRUCTION :

Avis de fin d’informa-tion .......................... Présentation de réqui-

sitions ou observa-tions complémen-taires ....................... Délais applicables  – Dépassement  – Obser-

vations  antérieures aux réquisitions du procureur de la  république  – Observa-tions  antérieures à l’ordonnance de clô-ture – Recevabilité – Observations du mis en examen – Conditions – Détermination .. * Crim. 20 avril R 113 14-84.562

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– VI – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

INSTRUCTION (suite) :

Commission roga-toire ......................... Objet ........................... Etablissement d’un procès-verbal récapitu-

latif reprenant uniquement les éléments à charge – Régularité (non) ............................... * Crim. 26 avril C 128 16-86.840

Détention provisoire Décision de prolonga-tion .......................... Qualification différente des faits en cours

d’information – Effet ....................................... * Crim. 26 avril R 126 17-80.979

«  * Crim. 26 avril R 127 17-81.316

Partie civile ................. Constitution ............... Contestation  – Contestation postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’information  – Examen  – Compétence  – Juridiction de jugement – Exception – Cas – Constitution postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’infor-mation ................................................................ Crim. 25 avril A 119 16-87.328

Pouvoirs du juge ........ Actes utiles à la mani-festation de la véri-té .............................. Régularité  – Conditions  – Instruction à

charge et à décharge – Défaut – Sanction .... Crim. 26 avril C 128 16-86.840

INTERVENTION :

Qualité pour interve-nir ............................ Partie civile ................. Cour d’appel – Appel des seules dispositions

pénales  – Intervention pour la première fois en cause d’appel – Intervention d’une victime en qualité de partie civile – Receva-bilité (non) ........................................................ Crim. 20 avril C 112 16-83.199

J

JUGE DES LIBERTES ET DE LA DETENTION :

Détention provisoire Débat contradictoire .. Modalités  – Comparution  – Moyen de télé-communication audiovisuelle  – Refus par la personne détenue  – Conditions  – Mo-ment – Information de la date de l’audience et du recours envisagé à ce procédé .............. * Crim. 19 avril R 106 17-80.571

JUGEMENTS ET ARRETS :

Motifs .......................... Peine prononcée par la juridiction cor-rectionnelle ............. Emprisonnement sans sursis – Mesure d’amé-

nagement  – Nature  – Juridiction de juge-ment – Détermination – Nécessité ............... * Crim. 20 avril C 110 (2) 16-80.091

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– VII – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

JURIDICTION DE PROXIMITE :

Exceptions .................. Exception de nullité ... Exceptions proposées oralement à l’au-dience  – Défaut de conclusions écrites  – Contrôle de la Cour de cassation – Possibi-lité (non) ............................................................ Crim. 26 avril R 129 16-82.742

Exceptions proposées oralement et reprises dans la décision attaquée  – Contrôle de la Cour de cassation – Possibilité .................. Crim. 26 avril C 130 15-85.909

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES :

Pouvoirs ...................... Etendue ....................... Irrecevabilité  – Avis de fin d’information  – Présentation de réquisitions ou observations complémentaires  – Délais applicables  – Dépassement  – Observations  antérieures aux réquisitions du procureur de la  répu-blique – Observations antérieures à l’ordon-nance de clôture – Observations du mis en examen – Arrêt – Enonciations démontrant une réponse du juge d’instruction – Cas – Sanction – Cassation (non) ............................ Crim. 20 avril R 113 14-84.562

Saisine ......................... Etendue ....................... Faits non visés dans la prévention  – Condi-tions – Acceptation du prévenu d’être jugé . Crim. 20 avril C 114 16-81.452

JURIDICTIONS DE L’APPLICATION DES PEINES :

Juge de l’application des peines ............... Ordonnances .............. Ordonnance relative aux obligations du

condamné  – Droit d’appel  – Titulaires  – Détermination .................................................. Crim. 26 avril I 131 16-83.650

«  Crim. 26 avril I 131 16-83.653

M

MISE EN DANGER DE LA PERSONNE :

Risques causés à au-trui ........................... Eléments constitutifs .. Violation délibérée d’une obligation particu-

lière de sécurité ou de prudence – Lien de causalité – Caractère certain – Réalisation du risque – Nécessité (non)............................ Crim. 19 avril R 107 16-80.695

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– VIII – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

P

PEINES :

Peines complémen-taires ........................ Confiscation ............... Instrument du délit ou chose produite par le

délit – Contrat d’assurance-vie :Condamnation à des dommages-intérêts  –

Cumul – Possibilité .......................................... Crim. 19 avril C 108 (2) 16-80.718

Contrat souscrit par l’auteur d’un abus de faiblesse – Créance figurant sur le contrat – Droit de créance susceptible de restitution à la victime (non) ................................................ Crim. 19 avril C 108 (1) 16-80.718

Peines correction-nelles ....................... Peines d’emprison-

nement sans sursis prononcées par la juridiction correc-tionnelle .................. Mesure d’aménagement  – Nature  – Juridic-

tion de jugement – Détermination – Néces-sité ...................................................................... Crim. 20 avril C 110 (2) 16-80.091

Prononcé .................... Emprisonnement sans sursis ....................... Motif  – Peine prononcée par la juridiction

correctionnelle – Mesure d’aménagement – Nature – Juridiction de jugement – Déter-mination – Nécessité ....................................... * Crim. 20 avril C 110 (2) 16-80.091

PROCES-VERBAL :

Nullité ......................... Procès-verbal dres-sé par un officier de police judiciaire ...... Faits objet de la mesure – Déclarations spon-

tanées du gardé à vue  – Recueil  – Raison impérieuse – Défaut – Cas ............................. * Crim. 25 avril R 117 16-87.518

R

RESPONSABILITE CIVILE :

Dommage ................... Réparation .................. Victime assurée sociale  – Prestations ver-sées par un organisme gérant un régime obligatoire de sécurité sociale – Décompte des prestations  – Communication au pré-sident – Défaut – Liquidation d’un poste de préjudice (non) ................................................. * Crim. 19 avril C 109 15-86.351

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– IX – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

RESPONSABILITE PENALE :

Causes d’irresponsa-bilité ou d’atténua-tion .......................... Ordre de la loi et com-

mandement de l’au-torité légitime ......... Autorité légitime – Définition – Administra-

teur judiciaire (non) ........................................ Crim. 20 avril R 115 16-80.808

Homicide et blessures involontaires .......... Faute ........................... Faute délibérée  – Violation d’une obligation

particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement – Obli-gation particulière de prudence ou de sécu-rité – Formation renforcée à la sécurité de salariés temporaires – Cas .............................. * Crim. 25 avril C 118 (1) 15-85.890

RESTITUTION :

Objets saisis ................ Action en restitution .. Décisions de non-restitution prise par le pro-cureur de la  République ou le procureur général  – Recours devant la chambre de l’instruction – Recevabilité............................. * Crim. 25 avril C 120 16-83.154

Demande formée par un prévenu non re-laxé – Refus – Condition ................................ * Crim. 20 avril C 116 16-81.679

S

SAISIES :

Restitution .................. Action en restitution .. Demande formée par un prévenu non re-laxé – Refus – Condition ................................ Crim. 20 avril C 116 16-81.679

Saisies spéciales ......... Saisie portant sur cer-tains biens ou droits mobiliers incorpo-rels ........................... Saisie d’une somme d’argent versée sur un

compte bancaire – Action en restitution – Décision de non-restitution prise par le procureur de la République ou le procureur général  – Recours devant la chambre de l’instruction – Recevabilité............................. Crim. 25 avril C 120 16-83.154

SECURITE SOCIALE :

Accident du travail .... Loi forfaitaire ............. Caractère exclusif  – Action de la  victime, salarié intérimaire, contre l’employeur, le dirigeant de l’entreprise utilisatrice ou leurs préposés – Recevabilité (non) ........................ * Crim. 25 avril C 118 (2) 15-85.890

Assurances sociales ... Tiers responsable ........ Recours de la  victime  – Indemnité complé-mentaire  – Evaluation  – Déduction des prestations de sécurité sociale. – Nécessité – Absence de la caisse aux débats – Portée ..... Crim. 19 avril C 109 15-86.351

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– X – Jour mois Décision Numéro No de

pourvoi

T

TERRORISME :

Actes de terrorisme ... Provocation et apolo-gie ............................ Apologie d’actes de terrorisme  – Eléments

constitutifs – Elément intentionnel – Incita-tion à porter sur des actes de terrorisme ou sur leurs auteurs un jugement favorable  – Cas ...................................................................... Crim. 25 avril C 121 16-83.331

TRAVAIL :

Hygiène et sécurité des travailleurs ....... Homicide et blessures

involontaires ........... Faute  – Faute délibérée  – Violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement – Obligation particulière de prudence ou de sécurité – Formation renforcée à la sécurité de salariés temporaires – Cas ......................... * Crim. 25 avril C 118 (1) 15-85.890

Responsabilité pénale . Dirigeant de la  personne morale  – Faute  – Faute délibérée  – Violation d’une obliga-tion particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement – Obli-gation particulière de prudence ou de sécu-rité – Formation renforcée à la sécurité de salariés temporaires – Cas .............................. * Crim. 25 avril C 118 (1) 15-85.890

Inspection du travail . Obstacle à l’accom-plissement des de-voirs d’un ins-pecteur ou d’un contrôleur du tra-vail .......................... Eléments constitutifs  – Elément matériel  –

Renseignements comportant des inexac-titudes volontaires  – Cas  – Informations dissimulées ou volontairement incom-plètes  – Droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination – Compatibilité .......... Crim. 25 avril R 122 16-81.793

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Arrêts de la Chambre criminelle

No 106

DETENTION PROVISOIREJuge des libertés et de la détention – Débat contra-

dictoire – Modalités – Comparution – Moyen de télécommunication audiovisuelle – Refus par la personne détenue – Conditions – Moment – Information de la date de l’audience et du re-cours envisagé à ce procédé

Lorsqu’elle est convoquée à un débat contradictoire en vue de son placement en détention provisoire ou de la prolongation de la détention provisoire, la personne mise en examen ne peut refuser l’utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle qu’au moment où elle est informée de la date de l’audience et du fait que le recours à ce procédé est envisagé.

19 avril 2017 No 17-80.571

LA COUR, Vu le mémoire produit ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces

de la procédure que Mme X... a été mise en examen le 14 janvier 2016 pour tentative de meurtre puis sup-plétivement, le 15 février 2016, pour meurtre aggravé ; que, par ordonnance en date du 27 décembre 2016, le juge des libertés et de la détention a prolongé sa détention provisoire pour une durée de six mois ; que Mme X... a relevé appel de cette décision ;

En cet état :Sur le premier moyen de cassation, pris de la vio-

lation des articles 706-71, 199 du code de procédure pénale, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a confirmé l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire de la demande-resse pour une durée de six mois ;

« aux motifs que Mme X..., qui avait demandé à com-paraître en application des dispositions de l’article 199, alinéa 4, du code de procédure pénale, a déclaré sur l’avis d’audience qui lui a été adressé le 2 janvier 2017 accep-ter que l’audience soit tenue en visio-conférence ; que, par lettre manuscrite datée du 5 janvier 2017 et adres-sée par télécopie au greffe de la cour le 9 janvier 2017,

elle a déclaré refuser la visio-conférence et a demandé à comparaître en personne ; que le surveillant de la mai-son d’arrêt a indiqué que l’intéressée refusait de se rendre en salle de visio-conférence, et elle a confirmé son refus de comparaître en visio-conférence par écrit adressé par télécopie du 12 janvier 2017 ;

« et aux motifs que par ailleurs, Mme X..., qui a déjà comparu en visio-conférence devant la chambre de l’instruction lors de l’audience du 22 septembre 2016, a expressément indiqué le 2 janvier 2017, lorsque l’avis de date d’audience lui a été notifié, qu’elle acceptait de comparaître en visio-conférence et a signé le formulaire ad hoc ; que les dispositions de l’article 706-71, alinéas 3 et 4, dans sa rédaction issue de la loi no 2016-731 du 3 juin 2016, précise que toute personne mise en examen peut refuser l’utilisation d’un moyen de télécommunica-tion audiovisuel "lorsqu’elle est informée de la date de l’audience et du fait que le recours à ce moyen est envi-sagé", mais plus postérieurement ; qu’en l’occurrence, Mme X..., dès lors qu’elle avait accepté "lorsqu’elle est informée de la date de l’audience et du fait que le recours à ce moyen est envisagé", le principe d’un recours à la visio-conférence n’est ainsi plus recevable à formuler une opposition à ce mode de comparution ; qu’en consé-quence, il n’y a pas lieu à renvoi à une audience ulté-rieure, l’appel devant être examiné ce jour en l’absence de l’intéressée, laquelle a finalement refusé de comparaître à l’audience de ce jour ;

« 1o) alors qu’en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande ; que même lorsqu’elle a, au moment de l’information de la date de l’audience, accepté de comparaître par visio-conférence, la personne détenue peut ensuite revenir sur cet accord et demander à comparaître personnellement à l’audience dès lors que cette demande n’est pas formulée tardivement ; qu’en retenant qu’il résulte des dispositions de l’article 706-71, alinéas 3 et 4, dans sa rédaction issue de la loi no 2016-731 du 3 juin 2016, que ce n’est que "lorsqu’elle est informée de la date de l’audience que la personne mise en examen peut refuser l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuel et qu’après avoir accepté le principe d’un recours à la visio-confé-rence, elle n’est plus recevable à formuler une opposition à ce mode de comparution à la cour d’appel a violé les dispositions des textes susvisés ;

« 2o) alors qu’en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande ;

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mation, n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 145-3 du code de procédure pénale » ;

Attendu que, pour confirmer l’ordonnance de pro-longation de la détention provisoire de Mme X... dont la durée excédait un an, l’arrêt, par motifs propres et adoptés, énonce que la poursuite de l’information est nécessaire compte tenu des investigations à réaliser, notamment des investigations techniques, telles l’ana-lyse du dossier médical et une reconstitution et que le délai d’achèvement de la procédure est de six mois ;

Attendu qu’en statuant ainsi, la chambre de l’instruc-tion a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;Et attendu que l’arrêt est régulier, tant en la forme

qu’au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;

REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Bellenger – Avocat général : M. Quintard – Avocats : SCP Bouzidi et Bouhanna

Sur les modalités du refus au recours aux moyens de télécommunication audiovisuelle pour le débat contradictoire de placement ou de prolongation de la détention provisoire, à rapprocher :Crim., 20 juin 2017, pourvoi no 17-82.306, Bull. crim.

2017, no ??? (rejet).

No 107

MISE EN DANGER DE LA PERSONNERisques causés à autrui – Eléments constitutifs –

Violation délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence – Lien de causalité – Caractère certain – Réalisation du risque – Né-cessité (non)

Justifie sa décision de condamnation d’une société pour mise en danger d’autrui la cour d’appel qui retient que celle-ci, intervenant sur un chantier où le risque d’inhalation de fibres d’amiante est identifié et connu, a violé délibérément les obligations particulières rela-tives à la protection contre les risques liés à l’inhalation de poussières d’amiante, tant à l’égard des salariés qu’à l’égard du public avoisinant, et que, alors que le risque de dommage auquel était exposé la victime doit être certain sans qu’il soit nécessaire que ce risque se soit réalisé de manière effective, en l’état des données de la science disponibles, le degré de probabilité de dével-opper un cancer du poumon ou un cancer de la plèvre dans les 30 à 40 ans de l’inhalation de poussières d’amiante est certain, sans qu’il n’y ait ni effet de seuil, en deçà duquel il n’existerait aucun risque ni traite-ment curatif efficace.

REJET des pourvois formés par M. Fabien X..., la société Vinci Construction Terrassement, contre l’arrêt de la cour d’appel de Bastia, chambre correc-tionnelle, en date du 6 janvier 2016, qui, notamment,

qu’ayant retenu que la demanderesse avait expressé-ment indiqué le 2 janvier 2017, lors de la notification de l’avis de date d’audience, qu’elle acceptait de compa-raître en visio-conférence et que, par lettre manuscrite datée du 5 janvier 2017 et adressée par télécopie au greffe de la cour le 9 janvier 2017, elle avait déclaré refuser la visio-conférence et avait demandé à comparaître en personne à l’audience du 12 janvier suivant, la chambre de l’instruction qui n’a nullement rechercher ni préci-ser d’où il ressortait que sa demande de comparution personnelle, formulée par lettre manuscrite du 5 jan-vier 2017 et adressée par télécopie au greffe de la cour le 9 janvier 2017 en vue de l’audience du 12 janvier sui-vant, était tardive ou encore que son transport paraissait devoir être évité en raison des risques graves de troubles à l’ordre public ou d’évasion, seules circonstances de nature à justifier qu’il n’ait pas été fait droit à sa demande de comparution personnelle à l’audience, n’a pas légalement justifié sa décision » ;

Attendu que pour dire n’y avoir lieu à renvoi à une audience ultérieure pour comparution personnelle physique de la personne mise en examen, l’arrêt énonce que Mme X... a indiqué, lorsqu’elle a reçu l’avis d’au-dience l’informant qu’un recours à la visio-conférence était envisagé, qu’elle acceptait ce moyen de communi-cation audiovisuelle, par un écrit signé, et qu’elle n’est plus recevable à formuler une opposition à ce mode de comparution ;

Attendu qu’en statuant ainsi, la chambre de l’instruc-tion a justifié sa décision ;

Qu’en effet, il résulte de l’article 706-71 du code de procédure pénale que lorsqu’il s’agit d’une audience où il doit être statué sur son placement en détention provisoire ou sur la prolongation de celle-ci, la per-sonne mise en examen ne peut refuser l’utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle qu’au moment où elle est informée de la date de l’audience et du fait que le recours à ce procédé est envisagé ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;Sur le second moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 137, 144, 145-3, 591 et 593 du code de procédure pénale défaut de motifs et manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a confirmé l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire de la demande-resse pour une durée de six mois ;

« aux motifs que la détention atteindra plus d’un an le 13 janvier 2017 et que le délai prévisible d’achèvement de la procédure peut être fixé à six mois ;

« alors que, lorsque la durée de la détention provi-soire excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant sa prolongation doivent comporter les indi-cations particulières qui justifient en l’espèce la poursuite de l’information et le délai prévisible d’achèvement de la procédure ; que, pour confirmer l’ordonnance de pro-longation de la détention provisoire de la demanderesse au-delà d’un an et pour une nouvelle durée de six mois, la chambre de l’instruction, qui se borne à relever que le délai prévisible d’achèvement de la procédure peut être fixé à six mois, sans nullement donner aucune indication particulière justifiant en l’espèce la poursuite de l’infor-

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mise en danger d’autrui en cas de défaillance dans la mise en œuvre de la protection du public et des salariés contre l’inhalation de poussières d’amiante produites par les tra-vaux entrepris sur le site ; que l’employeur est soumis, en application des dispositions des articles L. 4111-6, L. 4121-1 à L. 4121-5 du code du travail a une obligation générale de sécurité de résultat et doit tenir compte de l’évolution des connaissances scientifiques ; qu’il doit, notamment, prendre "les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique des travailleurs", par "la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés", et il doit "veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration de situations existantes", il doit, notamment, "éviter les risques qui ne peuvent être évités, les combattre à la source tenir compte de l’évolution de la technique" ; qu’au titre des dispositions particulières aux activités et interventions susceptibles de libérer des fibres d’amiante, les dispositions des articles R. 4412-139 à R. 4412-148 du code du travail applicables à la date des faits, prévoient, notamment, que l’employeur doit établir un mode opératoire précisant, notamment, (5° les équipe-ments de nature à assurer la protection et la décontami-nation des travailleurs et les moyens de protection des autres personnes qui se trouvent sur le lieu ou à proximité des travaux (R. 4412-141 ancien), et qu’un arrêté des ministres du travail et de l’agriculture précise, en tant que de besoin, les règles techniques à respecter (R. 4412-148 ancien) ; que l’article R. 4412-102 du code du travail, également applicable à la date du contrôle, pré-cise encore que "l’employeur détermine et met en œuvre les mesures nécessaires pour réduire la durée et le niveau d’exposition autant qu’il est techniquement possible, aussi longtemps que le risque d’exposition à l’inhalation des poussières d’amiante subsiste" ; que s’agissant du contrôle de la concentration en fibre d’amiante l’article R. 4724-14 du code du travail, dans sa version applicable à la date des faits, prévoit qu’un arrêté des ministres du travail et de l’agriculture détermine les organismes chargés des accrédi-tations, les conditions d’accréditation, les modalités de prélèvement, les méthodes et moyens à mettre en œuvre pour mesurer la concentration en fibres d’amiante ; que l’arrêté du 4 mai 2007 relatif à la mesure de la concentra-tion des fibres d’amiante sur les lieux de travail et aux conditions d’accréditation des laboratoires a ainsi été pris et publié le 16 mai 2007 ; qu’il prévoit notamment en son article 2 que l’accréditation est délivrée par le COFRAC ou tout organisme signataire de l’accord européen ; que, pour respecter les obligations communautaires issues de la directive 2009/148/CE tout en adaptant le dispositif de métrologie aux dispositions issues du décret 2012-639 du 4 mai 2012 relatif aux risques d’exposition à l’amiante, cet arrêté a été abrogé par l’arrêté du 14 août 2012, sauf en ce qui concerne l’article 2 susdit, dont l’entrée en vigueur a été différée au 1er juillet 2013 ; qu’enfin, le décret 2012-639 du 4 mai 2012, entré en vigueur le 1er juillet 2012, appli-cable aux opérations pour lesquelles le dossier de consul-tation relatif au marché a été publié à compter de cette date (cf article 5) codifié aux articles R. 4412-94 à R. 4412-143 nouveaux du code du travail, qui précise les modalités selon lesquelles la protection des travailleurs contre les risques d’exposition à l’amiante est assurée, notamment en ce qui concerne la détermination delà

pour mise en danger de la vie d’autrui, a condamné le premier à 5 000 euros d’amende, la seconde à 50 000 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils.

19 avril 2017 No 16-80.695

LA COUR,Joignant les pourvois en raison de la connexité ;Vu le mémoire commun aux demandeurs et le

mémoire en défense produits ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 111-3, 111-4 et 223-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la cour d’appel a déclaré la société Vinci construction terrassement et M. X... coupables du délit de mise en danger de la vie d’autrui ;

« aux motifs que l’article 223-1 du code pénal punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende "le fait d’exposer directement autrui à un risque immé-diat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règle-ment, l’article 121-3 du code pénal en fait une infraction non intentionnelle, l’exposition aux risques devant toute-fois procéder d’un acte volontaire, et donc de la violation consciente et délibérée de la norme imposée, si l’auteur de l’infraction est une personne morale, l’article 223-2 du code pénal renvoie aux articles 131-38 et 131-39 du même code, desquels il résulte que l’amende encourue est quintuplée (article 131-38), il suffit que le risque de dom-mage auquel était exposé la victime ait été certain et il n’est pas nécessaire que le risque se soit réalisé de manière effective pour que l’infraction puisse être retenue, l’expo-sition au risque anormal se suffisant à elle-même, quelles que puissent être les initiatives prises par l’agent dès lors qu’il y a bien la réunion entre eux des deux éléments sui-vants par un lien de causalité ; que l’exposition directe d’autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures graves et la violation délibérée d’une obligation particu-lière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ; qu’il n’est pas contesté et il n’est pas contes-table qu’en l’état des données de la science disponibles bien avant le temps de la prévention (cf notamment le rapport du 26 octobre 2005 de la mission d’information amiante créée par le Sénat qui fait état de 35 000 per-sonnes mortes d’une maladie de l’amiante en France entre 1965 et 1995, et du probable décès d’ici 2015 de 50 000 à 100 000 autres personnes), le degré de probabi-lité de développer un cancer du poumon ou un cancer de la plèvre dans les 30 à 40 ans de l’inhalation de pous-sières d’amiantes est certain, sans qu’il n’y ait ni effet de seuil en deçà duquel il n’existerait aucun risque, ni traite-ment curatif efficace ; qu’en l’espèce, le chantier de terras-sement litigieux présentait la particularité de porter des roches et des terres naturellement amiantifères, connues et identifiées avant l’acceptation du marché ; que le risque de mort ou de blessures graves lié à l’inhalation de fibres d’amiante est donc susceptible de constituer le délit de

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dence, cette situation générée par le coup de vent annoncé entre le vendredi 24 et le dimanche 26 août, étant restée en l’état jusqu’au mardi 28 août 2012, et complètement rétablie que le 30 août,

– le 31 août 2012, une partie du recouvrement des déblais de la piste supérieure a, à nouveau, été arrachée par suite d’un fort épisode venteux pourtant annoncé, aucune intervention de l’entreprise n’ayant été constatée pour réali-ser le confinement jusqu’au 12 septembre 2012 inclus,

– la pose les 13 et 14 septembre d’un filet vert sur le gril-lage au nord, près de la route des Oliviers, à l’ouest, près de la résidence Poséidon n’est pas de nature à confiner les fibres microscopiques d’amiante sur le lieu de travail, et ne ferme pas l’accès côté ouest â la résidence d’habi-tation Poséidon ; que de façon plus générale l’inspection du travail a établi qu’il n’existait pas de protection des abords immédiats nord et ouest du chantier, permettant de le séparer de son environnement immédiat (passage tant de piétons que de véhicules), que le grillage posé à sa demande après le 13 juillet 2012 laissait passer les pous-sières, et permettait la dissémination des fibres, qu’il en était de même de celui en plastique rajouté à partir du 13 septembre 2012, que des portions importantes de ter-rains rocheux mis à nu par l’action des travaux étaient laissées à découvert, que les engins de chantier n’étaient pas toujours nettoyés et comportaient des amalgames de terres et de fibres broyées favorisant, une fois secs, la dis-sémination de fibres, les manquements à ces obligations de protection collective ont notamment été rappelés à la société Vinci construction terrassement par courriers de l’inspection du travail des 25 septembre 2012, 7 mars et 6 juin 2013, iI résulte de l’ensemble de ces manquements une violation délibérée à la fois à l’obligation générale de sécurité qui pesait sur la société Vinci construction ter-rassement, et sur sa délégation, sur M. X..., mais aussi aux obligations particulières du décret 2006-761 du 30 juin 2006 relatif à la protection contre les risques liés à l’inhalation de poussières d’amiante, tant à l’égard de ses salariés qu’à l’égard du public avoisinant, au sens de l’article 223-1 du code pénal, en s’abstenant de mettre en place de façon complète et pérenne des équipements de protection collective techniquement possibles et efficaces recouvrement complet des déblais amiantifères, mise en place d’une clôture de confinement de nature à limiter la propagation des fibres d’amiante, nettoyage systématique des engins de terrassement, remplacement immédiat des géotextiles arrachés notamment par le vent, rampes d’ar-rosage sur toutes les zones du chantier, et remplacement immédiat en cas de défaillance, recueil des eaux contami-nées de ruissellement…) pour permettre la réduction des émissions de poussières d’amiante, ils ont directement et volontairement exposé les salariés et les riverains du site à un risque immédiat de mort du à leur inhalation ; que la société Vinci construction terrassement sera donc décla-rée coupable du délit de mise en danger d’autrui qui lui est reproché, M. X... délégataire de pouvoir pour la sur-veillance et le suivi du chantier en sera également déclaré coupable ; que le jugement sera de ce chef infirmé ;

« 1° alors que la mise en danger de la vie d’autrui sup-pose l’exposition à un risque immédiat de mort ou de bles-sures de nature à entraîner une infirmité permanente ; qu’en déclarant les prévenus coupables de ce chef, tout en

valeur limite d’exposition professionnelle, les conditions du contrôle du respect de cette valeur limite ainsi que les modalités de mesurage des empoussièrements, qui fixe les règles techniques, les moyens de prévention collective et les types d’équipements individuels nécessaires à la protection des travailleurs contre ces expositions, qui prévoit aussi un dispositif unique de certification des entreprises d’encap-sulage ou de retraite de matériaux contenant de l’amiante, n’est pas applicable aux faits de l’espèce, en considération de la date du chantier dont le dossier de consultation est antérieur au 1er juillet 2012, puisque le marché passé entre la société Mandevilla et la société Vinci construction terrassement a été signé le 21 mai 2012, avec une date de commencement des travaux fixée au 25 mai 2012 ; que toutefois, le décret 2006-76 du 30 juin 2006 relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l’inhala-tion de poussières d’amiante n’a toutefois pas été abrogé par le décret susdit. Il a vocation à recevoir application en l’espèce, puisqu’il continue à s’appliquer aux opérations pour lesquelles le dossier de consultation relatif au marché a été publié avant le 1er juillet 2012 ; que la sous-section trois relative aux opérations de bâtiment et de génie civil effectuées sur des terrains amiantifères prévoit, notam-ment, que le chef d’établissement établit un mode opéra-toire qui précise la nature de l’activité, le type et les quantités d’amiante véhiculés, le type de lieux où les tra-vaux sont effectués, le nombre de salariés concernés, les méthodes mises en œuvre, les caractéristiques des équipe-ments utilisés pour la protection et la décontamination, qui est soumis à l’avis du médecin du travail du CHST ou des délégués du personnel, et qui est transmis à l’inspec-teur du travail (R. 231-59-15 ancien) ; qu’il prévoit aussi qu’un arrêté des ministres chargés du travail et de l’agri-culture précise en tant que de besoin les règles techniques que doivent respecter les entreprises effectuant de type de travaux ; qu’il résulte donc de l’ensemble des textes appli-cables à la date des faits, qu’avant même la mise en œuvre de l’arrêté du 14 août 2012 et l’entrée en vigueur du décret 2012-639 du 4 mai 2012, l’entreprise intervenant sur un chantier où le risque d’inhalation de fibres d’amiantes est identifié et connu, est débitrice d’une obligation générale de sécurité de résultat, non seulement à l’égard de ses sala-riés mais aussi à l’égard de toute personne se trouvant à proximité du site, et d’une obligation générale d’adapta-tion à l’évolution des connaissances scientifiques ; qu’il se déduit du rapport de l’inspection du travail que ;

– le 21 août 2012, alors qu’une partie du site en vue de la construction des futurs immeubles a été excavé, cer-tains talus de la piste ne sont pas recouverts, le recouvre-ment au bas de la piste est incomplet laissant des déblais amiantifères à découvert, la stabilité du géotextile main-tenu par quelques pierres est superficielle, la pelle CAT 963C ayant servi à terrasser est empreinte d’un amal-game amiantifère et n’a pas été nettoyée depuis le 2 août, un simple grillage marque les limites du chantier, au nord à la route des Oliviers et à l’ouest la résidence Poséidon,

– le 27 août 2012, une partie du recouvrement des déblais de la piste supérieure a été arrachée par un fort épisode venteux, deux importants lambeaux de géotex-tile de plusieurs dizaines de mètres retombés en contrebas laissant à découvert les excavations amiantifères, il n’y a pas de rangée de sprinklers sur le côté du périmètre rési-

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mesurage de l’air en fibres d’amiante non conformes, la définition d’un mode opératoire relatif aux mesures de prévention et de protection insuffisant et constaté un mesurage supérieur à la limite autorisée de fibres d’amiante par litre d’air ; que la société Vinci Construc-tion Terrassement et M. X... ont été cités devant le tri-bunal correctionnel pour emploi de travailleurs à une activité comportant un risque d’exposition à des agents chimiques cancérogènes mutagènes ou toxiques pour la reproduction sans respect des règles de prévention et mise en danger de la vie d’autrui ; que le tribunal les a relaxés du chef de ce délit ; que les prévenus et le procu-reur de la République ont interjeté appel du jugement ;

Attendu que pour déclarer les prévenus coupables de mise en danger de la vie d’autrui, l’arrêt, après avoir rappelé qu’il résulte de l’ensemble des textes applicables à la date des faits qu’avant même la mise en œuvre de l’arrêté du 14 août 2012 et l’entrée en vigueur du décret n° 2012-639 du 4 mai 2012, l’entreprise, inter-venant sur un chantier où le risque d’inhalation de fibres d’amiantes est identifié et connu, était débitrice d’une obligation générale de sécurité de résultat, non seulement à l’égard de ses salariés mais aussi à l’égard de toute personne se trouvant à proximité du site, et d’une obligation générale d’adaptation à l’évolution des connaissances scientifiques, relève que la société Vinci Construction Terrassement et, sur sa délégation, M. X... ont violé délibérément l’obligation générale de sécurité qui pesait sur eux ainsi que les obligations particulières issues du décret n° 2006-761 du 30 juin 2006 relatif à la protection contre les risques liés à l’inhalation de pous-sières d’amiante, tant à l’égard des salariés qu’à l’égard du public avoisinant, par plusieurs manquements tels que l’absence de protection aux abords immédiats du chantier, l’installation de grillages permettant la dis-sémination des fibres, la présence de portions impor-tantes de terrains rocheux laissées à découvert ou le non-nettoyage des engins ; que les juges retiennent ensuite que, alors que le risque de dommage auquel était exposé la victime doit être certain sans qu’il soit nécessaire que ce risque se soit réalisé de manière effec-tive, en l’état des données de la science disponibles bien avant le temps de la prévention, le degré de probabilité de développer un cancer du poumon ou un cancer de la plèvre dans les 30 à 40 ans de l’inhalation de pous-sières d’amiante est certain, sans qu’il n’y ait ni effet de seuil en deçà duquel il n’existerait aucun risque ni traitement curatif efficace ; qu’ils en déduisent que le chantier de terrassement litigieux présentant la parti-cularité de porter des roches et des terres naturellement amiantifères, connues et identifiées avant l’acceptation du marché, la défaillance dans la mise en œuvre de la protection du public et des salariés contre l’inhala-tion de poussières d’amiante produites par les travaux entrepris sur le site entraînait un risque de mort ou de blessures graves lié à l’inhalation de fibres d’amiante ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs qui établissent l’exposition d’autrui à un risque de mort, de mutilation ou d’infirmité permanente, en relation directe et immédiate avec la violation manifestement délibérée des dispositions du code du travail, la cour d’appel a justifié sa décision ;

relevant que le degré de probabilité de développer un can-cer du poumon ou de la plèvre, serait-il certain, ne se réa-lisera que dans les 30 à 40 ans suivants l’inhalation des poussières d’amiante, un tel délai étant exclusif de l’immé-diateté requise par le texte pénal, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;

« 2° alors que la loi pénale est d’interprétation stricte ; qu’en déclarant les prévenus coupables de mise en danger d’autrui en relevant que le risque de développer un cancer, pour certain qu’il soit, ne se réalisera que 30 à 40 ans après l’exposition à l’amiante, lorsque le texte pénal exige que la victime soit exposée à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infir-mité permanente, la cour d’appel, qui a étendu le champ d’application du délit à l’hypothèse d’un risque différé dans le temps, non prévue par l’incrimination, a méconnu le principe d’interprétation strict de la loi pénale ;

« 3° alors qu’en outre, en relevant que le degré de probabilité de développer un cancer ne se réalisera que dans les 30 à 40 ans suivants l’inhalation des poussières d’amiante, tout en jugeant que les prévenus ont directe-ment et volontairement exposé les riverains du site à un risque immédiat de mort dû à leur inhalation, la cour d’appel s’est prononcée par des motifs contradictoires ;

« 4° alors qu’enfin, au sens de l’article 223-1 du code pénal, le risque s’entend d’un péril physique d’une par-ticulière gravité ; qu’il résulte des textes applicables à l’époque des faits que la valeur limite d’exposition profes-sionnelle était légalement fixée, en fonction des différentes zones exposées et des postes occupés par les salariés, à une certaine concentration en fibres d’amiante par litre d’air inhalé ; qu’il résulte des pièces de la procédure et des mentions mêmes de la décision attaquée que le taux de fibres d’amiante dans l’air était sur les zones concernées, sauf à l’occasion de deux relevés, très inférieur aux seuils légaux ; qu’ainsi, la cour d’appel ne pouvait, pour décla-rer les prévenus coupables, s’abstenir de répondre aux conclusions régulièrement déposées qui faisaient valoir que le respect du seuil autorisé excluait le risque entendu au sens très restrictif du texte pénal » ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’en 2012, la société Mandevilla, société de construction et de vente, a entrepris la réalisation d’un chantier situé quartier de l’Annonciade à Bastia ; que les travaux d’excavation du site et de construction étant susceptibles d’exposer les salariés et les riverains à l’inhalation de poussières d’amiante, une ordon-nance du juge des référés du 15 février 2012 a interdit le commencement des travaux jusqu’à l’autorisation de l’inspection du travail ; que, le 21 mai 2012, la société Mandevilla a passé un marché avec la société Vinci Construction Terrassement, dont M. Fabien X... était le directeur d’exploitation, pour le terrassement et la construction de trois immeubles ; que le chantier a commencé après la délivrance de l’autorisation de tra-vaux le 13 juillet 2012 ; que, par procès-verbaux des 21, 27, 31 août et 13 et 14 septembre, l’inspectrice du travail a relevé notamment le recouvrement insuffisant des déblais amiantifères, la présence d’une clôture de confinement ne permettant pas de limiter la propa-gation de fibres d’amiante, l’absence de nettoyage de la pelle de terrassement, la réalisation d’opérations de

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Antonio Y..., Mme Hakima X... a été poursuivie pour abus de faiblesse ; que le tribunal correctionnel a déclaré cette dernière coupable, l’a condamnée à dix mois d’emprisonnement avec sursis, a ordonné une mesure de confiscation et la restitution à la partie civile notam-ment d’une somme de 243 290,56 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ; que la prévenue et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;

En cet état :Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 223-15-2 du code pénal, des articles 590 à 593 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Mme X... coupable d’abus de faiblesse contre M. Y... et l’a condamnée de ce chef ;

« aux motifs que la particulière vulnérabilité de M. Y... est avérée suivant les termes de l’expertise psychiatrique ordonnée par le tribunal ; qu’il résulte en effet des conclu-sions de l’expertise que l’examen de l’intéressé a fait apparaître une personnalité de nature psychotique avec passivité, repli sur soi, pauvreté des investissements et activité hallucinatoire ; que le sujet étant très dépendant de ses parents (il a vécu chez eux jusqu’à l’âge de 39 ans), les décès successifs de ces derniers peu avant les faits de la cause, l’ont plongé dans un état dépressif et chronique alors qu’il connaît également des périodes d’appétence pour l’alcool ; que cet état de désarroi s’est accentué du fait de la séparation avec sa compagne ; que l’expert a conclu qu’il était particulièrement vulnérable, incapable de gérer ses biens et était en état de dépendance vis-àvis d’autrui ; que cette expertise confirme les termes de deux certifi-cats du docteur Sananes qui a souligné que son patient était traité pour des troubles de l’humeur importants, altérant ses capacités de gestion et le rendant sensible et suggestible par périodes et selon les circonstances affec-tives ; que l’expert désigné par le tribunal s’est également entretenu avec la compagne de M. Y... qui a confirmé le caractère passif, léthargique de celui avec qui elle a repris une vie commune ; que, s’agissant du caractère apparent ou connu de cette particulière vulnérabilité, elle est appa-rente selon l’expert, la compagne du plaignant et ses rares amis, qui ont confirmé que ses problèmes psychiatriques apparaissaient rapidement pour peu qu’on discute avec lui car il avait tendance à parler facilement de sa vie et de son argent et de considérer au bout de 10 minutes toute personne comme un ami et de faire abusivement confiance ; que dès lors, les déclarations de la prévenue, chez qui ont été retrouvés de nombreux documents du plaignant jusqu’à l’original de l’acte de succession de ses parents, selon lesquelles elle ne connaissait pas les troubles dont souffrait M. Y... qui lui avait paru parfaite-ment normal ne peuvent être tenues pour crédibles alors qu’il est constant qu’il a dépensé dans les premiers mois de sa relation avec elle la somme de 160 000 euros, alors que, toujours selon elle, il n’avait pas encore fait mention de son héritage mais était en arrêt prolongé de son travail de manutentionnaire chez Coca Cola, ce qui caractérise une prodigalité manifeste, établissant qu’il avait mani-festement arrêté son traitement régulateur de l’humeur, qu’elle a nécessairement appréhendée compte-tenu du montant des dépenses effectuées sur une aussi courte

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Harel-Duti-rou – Avocat général : M. Lemoine – Avocats : SCP Piwnica et Molinié, SCP Spinosi et Sureau

No 108

1o PEINESPeines complémentaires – Confiscation – Instru-

ment du délit ou chose produite par le délit – Contrat d’assurance-vie – Contrat souscrit par l’auteur d’un abus de faiblesse – Créance figu-rant sur le contrat – Droit de créance susceptible de restitution à la victime (non)

2o PEINESPeines complémentaires – Confiscation – Instru-

ment du délit ou chose produite par le délit – Contrat d’assurance-vie – Condamnation à des dommages-intérêts – Cumul – Possibilité

1o Ne méconnaît pas l’article 131-21 du code pénal la cour d’appel qui ordonne, à titre de peine complé-mentaire, la confiscation de la créance figurant sur un contrat d’assurance-vie souscrit par l’auteur d’un abus de faiblesse même si les primes d’assurance sont issues de sommes que la victime lui a remises, dès lors que le droit de créance, dont seul bénéficie le souscripteur en exécution du contrat, n’est pas susceptible de restitu-tion à la victime.

2o Une condamnation à des dommages-intérêts ne con-stitue pas une peine et peut par conséquent se cu-muler avec une mesure de confiscation d’un contrat d’assurance-vie souscrit par l’auteur d’un abus de fai-blesse au moyen de sommes remises par la victime, celle-ci pouvant le cas échéant demander, en applica-tion de l’article 706-164 du code de procédure pénale, à ce que la somme qui lui a été allouée à titre de dommag-es-intérêts soit prélevée sur les fonds ainsi confisqués.

CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI sur le pourvoi formé par Mme Hakima X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 2-9, en date du 14 janvier 2016, qui, pour abus de faiblesse, l’a condamnée à dix mois d’emprisonnement avec sursis, à cinq ans d’interdiction professionnelle, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils.

19 avril 2017 No 16-80.718

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de

procédure qu’à la suite de la plainte déposée par M. Luis

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qu’en résumé il apparaît que M. Y..., qui a été protégé par ses parents chez qui il vivait jusqu’à l’âge de 39 ans et qui était en arrêt prolongé de son travail de manutentionnaire pour dépression sévère, a perçu un héritage qui était seul de nature à lui permettre d’échapper à une situation qui allait rapidement devenir précaire ; qu’il a été conduit par la prévenue, qui a abusé de sa particulière vulnérabilité apparente, à dissiper plus des deux tiers de son héritage en se faisant remettre l’équivalent de 520 480 euros sous la forme d’un luxueux cabriolet Audi d’une valeur de près de 50 000 euros ainsi que deux chèques de 240 000 euros, l’un dont elle a placé le montant en assurance-vie, l’autre qu’elle a tenté d’encaisser au Maroc mais a été bloqué par l’opposition du plaignant, la seule remise du chèque établissant un acte gravement préjudiciable et, partant, caractérisant l’abus de faiblesse ;

« 1° alors que l’abus de faiblesse est un délit de com-mission, la seule imprudence ne pouvant pas être sanc-tionnée ; qu’en retenant que Mme X... aurait dû refuser le cadeau d’une voiture eu égard à son coût dans l’intérêt de la relation amoureuse qu’elle entretenait avec M. Y..., la cour d’appel n’a pas caractérisé l’abus de faiblesse, en violation des textes visés au moyen ;

« 2° alors que l’abus de faiblesse est un délit intention-nel et que la preuve de la connaissance par Mme X... de la vulnérabilité de M. Y... doit être démontrée ; qu’en retenant que le fait que M. Y... ait dépensé 160 000 euros les premiers mois de sa relation avec Mme X... avait pour conséquence qu’il ne pouvait pas lui paraître normal, tout en jugeant que les pièces du dossier ne permet-taient pas d’en connaître la destination ni de savoir qui procédait physiquement aux retraits, et en relevant que la perquisition chez Mme X... avait permis de retrouver les cadeaux effectués pour un montant de 10 000 euros, la cour d’appel n’a pas justifié de la connaissance par Mme X... de la vulnérabilité de M. Y... ;

« 3° alors que l’article 223-15-2 du code pénal exige la connaissance personnelle par l’auteur de l’abus de faiblesse, de la particulière vulnérabilité de la victime ; qu’ainsi, lorsque la connaissance est présumée en raison du caractère apparent de la vulnérabilité, il faut démon-trer qu’elle est évidente aux yeux de toute personne et non aux seuls regards d’un médecin ou d’un proche connais-sant la victime antérieurement à l’apparition des troubles psychiques ; que la cour d’appel a jugé que M. Y... avait fait des dépenses somptuaires pour lui-même et avait offert pour 10 000 euros de cadeaux à sa concubine, Mme X... sans que celle-ci, au début de leur relation, ait pu se rendre compte de sa vulnérabilité ; que la cour d’ap-pel a cependant estimé que Mme X... avait commis le délit d’abus de faiblesse en ne refusant pas le cadeau d’une voi-ture coûteuse puis en recueillant les chèques, sans s’expli-quer sur ce qui aurait rendu soudainement apparente la particulière vulnérabilité de son concubin aux yeux de Mme X... qui, ne l’ayant rencontré que postérieurement au décès de ses parents et à la séparation de sa compagne, ne pouvait pas savoir qu’il avait changé de comportement d’autant qu’il paraissait normal, selon l’appréciation de la cour d’appel elle-même, au début de leur relation ;

« 4° alors que l’auteur d’un abus de faiblesse doit avoir eu la volonté d’exploiter la situation pour obtenir de la victime qu’elle accomplisse un acte dont il connaît

période et qui ne pouvait que l’inquiéter quant à la pros-périté d’une relation qu’elle a déclaré vouloir entretenir dans la durée ; que l’article 223-15-2 du code pénal exige seulement un critère alternatif, apparente ou connue de la particulière vulnérabilité ; que, s’agissant du carac-tère gravement préjudiciable des faits auxquels il a été conduit, il est patent que son traitement était arrêté, l’ampleur des achats effectués y compris pour lui-même le démontrant ; que dès lors, il n’est pas possible de retenir à la charge de la prévenue l’ensemble des sommes qui ont été enregistrées au débit du compte du plaignant qui a dû abonder son compte ouvert en France à la Bred par deux fois de 80 000 euros en l’espace de trois mois à par-tir de son compte ouvert en Espagne ; que cette somme de 160 000 euros a été dépensée principalement sous forme de retraits en espèce, parfois jusqu’à 1 000 euros par jour comme en témoignent les copies des relevés bancaires, les pièces du dossier ne permettant pas d’en connaître la destination ni de savoir qui procédait physiquement aux retraits ; que sur cette somme, le plaignant a effec-tué des cadeaux d’articles de luxe et audiovisuels à la prévenue, qui sont attestés par le fruit de la perquisition, pour un montant d’environ 10 000 euros qui est certes intrinsèquement élevé mais ne peut être regardé comme gravement préjudiciable au regard des sommes dont dis-posait le plaignant et peuvent être regardés comme des cadeaux d’un homme amoureux alors qu’à ce stade de leur relation, la preuve de la connaissance de la parti-culière vulnérabilité du plaignant n’est pas rapportée ; qu’il sera observé que le plaignant avait déclaré tout au long de l’enquête ne pas vouloir que les objets saisis lui soient restitués y compris ceux dont la prévenue lui reconnaissait la propriété à savoir un ordinateur Mac Book air et un appareil photo Olympus ; qu’en revanche, le cadeau, selon les termes de la prévenue, d’un cabriolet Audi toutes options (49 480 euros TTC) apparaît mani-festement excessif, préjudiciable au plaignant, au regard de son montant, et la prévenue devait le refuser dans l’optique même de la relation qu’elle avait allégué vouloir installer dans la durée avec le plaignant ; que le plaignant a, pour sa part, indiqué que la prévenue avait particuliè-rement insisté pour se faire offrir ce véhicule, prétextant ne plus vouloir aller à pied dans le froid hivernal ; qu’il convient en outre de relever que ce véhicule, finalement remisé au Maroc, ce qui infirme les déclarations de la pré-venue sur le besoin qu’elle en avait à Paris, fut offert à la plaignante alors que, leur relation, chaste jusque-là selon les affirmations du plaignant, durait seulement depuis six mois ; que la prévenue reconnaît également que deux chèques lui ont été remis à titre de don d’un montant de 240 000 euros, ses explications sur la destination des chèques, l’achat d’un hammam dans la région d’Angers, étant démenties par un placement de 240 000 euros en assurance-vie dont elle est bénéficiaire, placement a priori peu mobilisable, la prévenue n’ayant donné aucune expli-cation crédible sur la destination du second chèque qui, selon elle, était destiné à un autre placement en assu-rance-vie chez AFER par M. Y..., alors qu’en définitive elle a eu ce chèque en sa possession et a tenté de l’encaisser au Maroc en alléguant devant la cour un motif de ven-geance après rupture, démontrant par les actions civiles qu’elle a intentées ensuite pour faire lever l’opposition faite par le plaignant, la fausseté de ses déclarations initiales ;

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heures sans être déclarée auprès de personnes âgées et parfois impotentes, la nature des faits pour lesquels elle est déclarée coupable commandant de recourir à une mesure de prévention à l’égard des tiers ; que la confis-cation de la créance de 243 290,56 euros figurant sur le contrat d’assurance-vie Predica Lionvie rouge, saisie par ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris en date du 26 avril 2012 est ordonnée, cette confis-cation permettant de garantir à la partie civile une aide éventuelle au recouvrement des dommages-intérêts qui lui sont dus ;

« 1° alors que le principe de légalité interdit de pro-noncer une peine non prévue par la loi ; que l’interdic-tion d’exercice professionnel ne peut être prononcé que si l’abus frauduleux de faiblesse a été commis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de cette activité profession-nelle ; qu’il est constant que Mme X... avait une relation amoureuse avec M. Y..., qui était son concubin et qu’en conséquence, elle n’aurait pas pu commettre l’abus de fai-blesse dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de son activité professionnelle ; qu’en prononçant cependant une telle sanction, la cour d’appel a violé les textes et principe visés au moyen ;

« 2° alors que la confiscation peut porter sur les biens qui sont l’objet ou le produit direct ou indirect de l’infraction, à l’exception des biens susceptibles de res-titution à la victime ; qu’en confisquant la somme de 243 290,56 euros figurant sur le contrat d’assurance-vie au nom de Mme X..., tout en condamnant cette dernière à restituer à la victime cette même somme placée sur ce même contrat, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen ;

« 3° alors que le principe de non-cumul des sanctions interdit de prononcer une sanction de confiscation au profit de l’Etat identique à la sanction de réparation au profit de la victime ; qu’en prononçant deux sanctions de même conséquence, même si elles ne sont pas de même nature, la cour d’appel a violé les textes et principe visés au moyen » ;

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu qu’en ordonnant, à titre de peine com-plémentaire, la confiscation de la créance de 243 290,56 euros figurant sur le contrat d’assurance-vie saisi par ordonnance du juge des libertés et de la détention notifiée à la prévenue, et en condam-nant par ailleurs cette dernière à verser à M. Y..., par-tie civile, une somme comprenant le montant de cette même créance en réparation de son préjudice matériel, la cour d’appel n’a méconnu aucun des textes ni prin-cipes visés au moyen, dès lors que d’une part, même si les primes d’assurance sont issues de sommes que la victime a été conduite à remettre à l’auteur de l’abus de faiblesse, souscripteur du contrat d’assurance-vie, le droit de créance dont, seul, bénéficie ce dernier en exécution du contrat, n’est pas susceptible de restitu-tion à la victime, d’autre part, les dommages-intérêts alloués à la partie civile ne constituent pas une peine et peuvent par conséquent se cumuler avec une mesure de confiscation d’un contrat d’assurance-vie, la partie civile pouvant le cas échéant demander, en application de l’article 706-164 du code de procédure pénale, que la

le caractère particulièrement préjudiciable ; que la cour d’appel a relevé que M. Y... était amoureux de Mme X... et qu’ils avaient engagé une relation qui se voulait durable puisque Mme X... a même suivi un traitement pour avoir un enfant et qu’elle attendu un enfant de M. Y... ; que la cour d’appel a cependant jugé que le placement de sommes sur une assurance-vie constituait un abus de faiblesse, de même que la remise d’un chèque au nom de Mme X... sans répondre au moyen de Mme X... démon-trant (preuves à l’appui) que le placement en assurance-vie avait été demandé par M. Y... dans le but d’échapper au paiement des impôts en Espagne et qu’elle n’avait tiré le chèque qu’après la fausse couche due aux violences subies, de sorte qu’elle n’avait pas eu l’intention d’exploi-ter la vulnérabilité de M. Y... lors de la remise de ces chèques, effectuée par ce dernier dans son intérêt propre ;

« 5° alors qu’en tout état de cause, l’abus de faiblesse ne peut être apprécié qu’au jour où l’acte obtenu de la vic-time a été réalisé ; que la cour d’appel a relevé la fréné-sie dépensière de M. Y... y compris pour lui-même ; que la cour d’appel ne s’est cependant pas interrogée sur les motivations de M. Y... au jour où il a fait cadeau d’une voiture à Mme X... et lui a fait des chèques pour un place-ment sur une assurance-vie, en dépit du moyen soulevé dans ses conclusions relatives à une vie en concubinage, un projet matrimonial et d’enfant (Mme X... ayant mal-heureusement fait une fausse couche) justifiant une mise en commun des ressources et au choix de place-ments permettant d’endiguer la dissipation de la fortune de M. Y... ; qu’en se fondant uniquement sur le résultat à l’issue de la rupture sur la fortune de M. Y..., la cour d’appel s’est placée à une date ultérieure aux actes repro-chés et s’est prononcée par des motifs inopérants » ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué et du jugement qu’il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuf-fisance ni contradiction, répondu aux chefs péremp-toires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous ses éléments, tant matériel qu’intentionnel, le délit d’abus de faiblesse dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D’où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-2, 132-21, 131-27, 131-28 et 223-15-3 du code pénal, des articles 591 à 593 du code de procé-dure pénale, de l’article 4 du Protocole n° 7 additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, des principes de légalité et de non bis in idem :

« en ce que l’arrêt attaqué a condamné Mme X... à une interdiction d’exercer pendant une durée de cinq ans des fonctions d’aide-soignante, auxiliaire de vie et aide-ménagère et à la peine de confiscation de la créance de 243 290,56 euros figurant sur le contrat d’assurance-vie, tout en la condamnant à payer à M. Y... cette même somme ;

« aux motifs que la cour ajoutera une peine complé-mentaire d’interdiction professionnelle dans les termes du dispositif, la prévenue ayant déclaré effectuer des

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toutes les prestations versées par les tiers payeurs sub-rogés, même si ces derniers n’exercent pas leur recours ou le limitent à une somme inférieure.

Encourt la censure, sur le pourvoi de l’assureur du tiers responsable, l’arrêt qui liquide le poste de préju-dice lié au déficit fonctionnel permanent sans se faire communiquer par l’organisme tiers payeur, appelé en déclaration de jugement commun, un état de ses dé-bours afin de vérifier, ainsi que la cour d’appel y était invitée par ledit assureur, si la victime n’avait pas perçu une rente d’invalidité devant s’imputer sur les pertes de revenus, sur l’incidence professionnelle et, en cas de reliquat, sur le déficit fonctionnel permanent.

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par La société Areas assurances, contre l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 9 octobre 2015, qui, dans la procédure suivie contre M. Cyril X... du chef notamment d’homicide invo-lontaire, a prononcé sur les intérêts civils.

19 avril 2017 No 15-86.351

LA COUR,Vu les mémoires produits en demande et en défense ;Sur la recevabilité du pourvoi :Attendu que, contrairement à ce que soutient la

défenderesse, le fait que le moyen ne critique qu’une partie des dispositions attaquées par le pourvoi n’a pas d’incidence sur sa recevabilité ;

Que le pourvoi est par conséquent recevable ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, 1382 du code civil, 31 de la loi du 5 juillet 1985, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a condamné M. X... à payer à Mme Nadine Y... une somme totale de 34 159,20 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du déficit fonc-tionnel temporaire partiel, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice sexuel ;

« aux motifs que sur les pertes de gains professionnels avant et après consolidation ; que les seuls justificatifs produits par Mme Y... consistent en une attestation de son employeur sur les pertes relatives au 13e mois et aux congés payés, et en divers décomptes d’indemnités jour-nalières ; que ceci est insuffisant pour établir la réalité et l’ampleur des pertes de revenus, et qu’il convient d’invi-ter Mme Y... à produire ses avis d’imposition des années 2009 à 2014 inclus, les débats étant réouverts à cette fin ; que, sur le déficit fonctionnel temporaire, que l’expert conclut à l’existence d’un déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % pendant un an, puis de 10 % jusqu’à la consolidation acquise le 3 mars 2012 ; que sur une base de 24,00 euros par jour pour un déficit fonctionnel tem-poraire total, il convient d’accorder à Mme Y... :

– déficit fonctionnel temporaire partiel 25 % pendant 365 jours 2 190,00 euros,

– déficit fonctionnel temporaire partiel 10 % pen-dant 504 jours 1 209,60 euros, soit une somme totale de

somme qui lui a été allouée à titre de dommages-inté-rêts soit prélevée sur les fonds ainsi confisqués ;

D’où il suit que les griefs ne sont pas encourus ;Mais sur le moyen, pris en sa première branche :Vu l’article 223-15-3 du code pénal ;Attendu qu’il résulte de ce texte que les personnes

coupables du délit d’abus de faiblesse encourent notam-ment la peine complémentaire d’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27 du code pénal, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, pour une durée de cinq ans au plus ;

Attendu que, pour condamner Mme X... notamment à la peine complémentaire d’interdiction d’exercer pendant une durée de cinq ans des fonctions d’aide soignante, auxiliaire de vie et aide ménagère, l’arrêt retient que la prévenue a indiqué effectuer des heures de travail sans être déclarée auprès de personnes âgées et parfois impotentes, la nature des faits pour lesquels elle est déclarée coupable commandant de recourir à une mesure de prévention à l’égard des tiers ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans démontrer que l’infraction aurait été commise dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice d’une telle activité professionnelle, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du 14 janvier 2016, en ses seules dispositions ayant condamné le demandeur à la peine complémentaire d’interdiction d’exercer pendant une durée de cinq ans des fonctions d’aide soignante, auxiliaire de vie et aide ménagère, toutes autres dispositions étant expressé-ment maintenues ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi.Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Guého –

Avocat général : Mme le Dimna – Avocats : SCP Monod, Colin et Stoclet

No 109

SECURITE SOCIALEAssurances sociales – Tiers responsable – Recours

de la victime – Indemnité complémentaire – Evaluation – Déduction des prestations de sé-curité sociale. – Nécessité – Absence de la caisse aux débats – Portée

Il résulte des articles 1382, devenu 1240, du code civil et 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985 que le préjudice ré-sultant d’une infraction doit être réparé, dans son in-tégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties et que pour la détermination de l’indemnité complémen-taire revenant à la victime en réparation de son préju-dice soumis à recours, doivent être prises en compte

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la victime, exerce ainsi d’abord son recours sur le poste de la perte de gains professionnels actuels, puis sur celui de la perte de gains professionnels futurs et enfin sur le défi-cit fonctionnel permanent ; et que, le préjudice doit être réparé sans perte ni profit pour aucune des parties ; qu’en condamnant toutefois la société Areas dommages à ver-ser à Mme Y... une somme de 14 759,60 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, sans rechercher, comme l’y invitait pourtant la société Aréas dommages, si Mme Y... n’avait pas perçu à ce titre des indemnités journalières et une rente invalidité versées par la cpam des Bouches-du-Rhône, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés » ;

Vu les articles 1382, devenu 1240, du code civil et 31 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble l’article 29 de ladite loi ;

Attendu qu’il résulte de ces textes que, d’une part, le préjudice résultant d’une infraction doit être réparé, dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties, d’autre part, pour la détermination de l’in-demnité complémentaire revenant à la victime en répa-ration de son préjudice soumis à recours, doivent être prises en compte toutes les prestations versées par les tiers payeurs subrogés, même si ces derniers n’exercent pas leur recours ou le limitent à une somme inférieure ;

Attendu que, statuant sur les conséquences domma-geables d’un accident de la circulation dont Sylvain Y... a été victime et dont M. Cyril X..., reconnu coupable d’homicide involontaire, a été déclaré tenu à répara-tion intégrale, l’arrêt attaqué sursoit à statuer sur les demandes de Mme Nadine Y... relatives aux pertes de gains professionnels actuels et futurs en l’invitant à produire ses avis d’imposition et condamne M. X... à lui verser une certaine somme au titre notamment du déficit fonctionnel permanent ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans se faire communiquer par la caisse primaire d’assurances mala-die, appelée en déclaration de jugement commun, un état de ses débours afin de vérifier notamment, ainsi qu’elle y était invitée par l’assureur du prévenu, si la caisse n’avait pas servi à Mme Y... une rente d’invalidité devant s’imputer sur les pertes de revenus, l’incidence profes-sionnelle et, en cas de reliquat, sur le déficit fonctionnel permanent, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 9 octobre 2015, mais en ses seules dispositions relatives au déficit fonctionnel permanent, toutes autres dispositions étant expressé-ment maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Guého – Avocat général : M. Lemoine – Avocats : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton

3 399,60 euros ; que sur les souffrances endurées, qu’il s’agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la vic-time du jour de l’accident à la date de consolidation ; que l’expert a évalué le préjudice de souffrances à trois sur une échelle de sept degrés ; que dans cet état, la somme de 6 000,00 euros paraît de nature à procurer une répa-ration satisfaisante ; que sur le déficit fonctionnel perma-nent, qu’il s’agit du préjudice résultant de la réduction définitive du potentiel physique, psycho-sensoriel, ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, normalement liées à l’atteinte séquel-laire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ; que l’expert considère qu’après consolidation, il subsiste un déficit physiologique au taux de 8 %, compte tenu de troubles dysthymiques modérés ; qu’en cet état, et compte tenu de l’âge de la victime (52 ans révolus à la date de la consolidation), il convient de fixer la valeur du point à 1 420,00 euros et d’accorder la somme de 14 759,60 euros ; que sur le préjudice sexuel, que l’ex-pert a noté un préjudice sexuel portant sur la libido et l’acte sexuel proprement dit, soit des troubles du désir et du plaisir, qu’en cet état, et pour tenir compte de l’âge de Mme Y..., une somme de 10 000,00 euros parait de nature à apporter une indemnisation satisfaisante ;

« 1° alors que le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce, poste par poste, sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge ; que les prestations versées par la sécurité sociale doivent donc être déduites poste par poste des indemnités auxquelles le responsable est tenu envers la victime pour réparer les atteintes à son intégrité physique ; que le tiers payeur, au titre du capital représentatif de la rente invalidité servie à la victime, exerce ainsi d’abord son recours sur le poste de la perte de gains professionnels actuels, puis sur celui de la perte de gains professionnels futurs et enfin sur le défi-cit fonctionnel permanent ; et que, le préjudice doit être réparé sans perte ni profit pour aucune des parties ; qu’en déboutant la société Areas dommages de sa demande de sursis à statuer sur le préjudice subi par Mme Y... au titre au titre du déficit fonctionnel permanent pour condamner le prévenu à verser à ce titre une somme de 14 759,60 euros, après avoir pourtant constaté, pour surseoir à statuer sur l’évaluation de la perte de gains professionnels actuels et futurs, que Mme Y... devait produire ses relevés d’impo-sition dès lors qu’elle n’avait produits que des décompte de versement d’indemnités journalières, ce dont il résul-tait que la CPAM des Bouches-du-Rhône avait versé des sommes pouvant être déduites de ce poste de préjudice, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés ;

« 2° alors que le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce, poste par poste, sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge ; que les prestations versées par la sécurité sociale doivent donc être déduites poste par poste des indemnités auxquelles le responsable est tenu envers la victime pour réparer les atteintes à son intégrité physique ; que le tiers payeur, au titre du capital représentatif de la rente invalidité servie à

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qui ordonne l’aménagement de la condamnation à une peine d’emprisonnement qu’elle prononce doit choisir la nature de la mesure d’aménagement tout en laissant au juge de l’application des peines le soin d’en définir les modalités d’exécution.

Doit en conséquence être cassé l’arrêt qui se borne à énoncer que la peine d’emprisonnement sans sursis prononcée à l’encontre du prévenu pourra faire l’objet d’un aménagement ab initio selon des modalités à définir en accord avec le juge d’application des peines.

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par M. Christophe X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Douai, 6e chambre, en date du 3 novembre 2015, qui, pour détournement de fonds par une personne char-gée d’une mission de service public, l’a condamné à trois ans d’emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve, à cinq ans d’interdiction de gérer, a ordonné des mesures de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils.

20 avril 2017 No 16-80.091

LA COUR,Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de

procédure que M. X..., directeur d’agence de la Banque Postale, a été poursuivi du chef de détournement d’une somme de 1 153 719 euros commis par une personne chargée d’une mission de service public ; que le tri-bunal l’a déclaré coupable de ce délit ; qu’il a interjeté appel du jugement ;

En cet état :Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 314-1 et 432-15 du code pénal, 7, 8 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motif, manque de base légale :

« en ce que la cour d’appel a rejeté l’exception de pres-cription soulevée par le prévenu et l’a condamné du chef de détournement de fonds privés par une personne char-gée d’une mission de service public pour des faits com-mis entre le 1er février 2002 et le 31 décembre 2008 ainsi qu’entre le 1er janvier 2009 et le 30 avril 2012, et a pro-noncé sur les intérêts civils ;

« aux motifs qu’il résulte de l’article 8 du code de pro-cédure pénale, qu’en matière de délit, la prescription de l’action publique est de trois années révolues ; qu’en matière de détournement de fonds publics, le point de départ de la prescription doit être fixé au jour où les actes frauduleux ont pu être constatés dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique ; que M. X... fait valoir qu’il n’a pas dissimulé ses détournements par des manœuvres quelconques et qu’il se contentait soit d’opérer des retraits d’un montant supérieur à celui auto-risé par ses clients, soit d’indiquer au client que le retrait envisagé était destiné à un placement nouveau ou à l’aug-mentation d’une somme déjà placée ; qu’il fait valoir par ailleurs que tous les comptes-titres et épargne font l’objet, au moins semestriellement, d’un envoi automatisé de rele-vés aux clients titulaires et que les comptes-chèques font

Sur l’obligation de déduire les prestations ver-sées par la caisse de sécurité sociale pour évaluer l’indemnité complémentaire due à la victime, dans le même sens que :Ass. plén., 31 octobre 1991, pourvoi n° 89-11.514, Bull.

crim. 1991, Ass. plén., n° 388 (2) (cassation) ;Crim., 26 janvier 1994, pourvoi n° 93-81.369, Bull.

crim. 1994, n° 39 (rejet).

Sur l’obligation, pour un organisme gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, lorsqu’il est absent aux débats, de communiquer au président de la juridiction saisie le décompte des prestations ver-sées à la victime et celles qu’il envisage de lui servir, à rapprocher :Crim., 9 septembre 2008, pourvoi n° 08-80.220, Bull.

crim. 2008, n° 182 (cassation), et les arrêts cités.

Sur les conditions de réparation, en tout ou en par-tie, du poste personnel de déficit fonctionnel perma-nent, par les rentes, allocations ou pensions servies par le tiers payeur, à rapprocher :Crim., 19 mai 2009, pourvoi n° 08-86.050, Bull. crim.

2009, n° 95 (cassation), et les arrêts cités.

No 110

1o ATTEINTE A L’AUTORITE DE L’ETATAtteinte à l’administration publique commise

par des personnes exerçant une fonction pub-lique – Manquement au devoir de probité – Dé-tournement de fonds publics par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public – Eléments con-stitutifs – Personne chargée d’une mission de service public – Directeur d’agence postale

2o PEINESPeines correctionnelles – Peines d’emprisonnement

sans sursis prononcées par la juridiction correc-tionnelle – Mesure d’aménagement – Nature – Juridiction de jugement – Détermination – Né-cessité

1o A la qualité de personne chargée d’une mission de ser-vice public, au sens de l’article 432-15 du code pénal, le directeur d’une agence de la Banque postale, qui à ce titre veille à l’accomplissement de la mission de service public d’accessibilité bancaire définie par la loi.

Justifie sa décision l’arrêt qui condamne, sur le fon-dement de ce texte, un directeur d’agence postale après avoir relevé qu’il avait détourné des fonds déposés dans l’agence, peu important que les détournements n’aient pas été commis à l’occasion de l’exécution de la mission d’accessibilité bancaire dont il était investi.

2o Il résulte des articles 132-19 du code pénal, 723-2 et 723-7-1 du code de procédure pénale que la juridiction

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sauf dissimulation, le jour où le titulaire du compte est destinataire du relevé dont l’envoi est prévu par la régle-mentation bancaire ; qu’en se prononçant par des motifs impropres à caractériser une dissimulation des opéra-tions litigieuses au sein des relevés bancaires dont les titu-laires des comptes concernés avaient été destinataires, la cour d’appel a méconnu les textes cités au moyen » ;

Attendu que, pour écarter la prescription de l’action publique, l’arrêt relève que les détournements opérés par M. X..., qui bénéficiait de la confiance totale des clients, ne sont apparus, dans des conditions permet-tant l’exercice de l’action publique, qu’après la plainte déposée à la suite d’une enquête interne, déclen-chée sur signalement du service Tracfin en raison des manœuvres déployées par le prévenu pour les dissimu-ler notamment par utilisation anonyme et clandestine des codes et identifiants des conseillers en clientèle à des heures de fermeture de l’agence et par l’envoi aux titulaires de comptes de relevés ne mentionnant pas les évasions de fonds ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations et dès lors qu’il résulte de l’article 4 de la loi du 27 février 2017 que l’entrée en vigueur des dispositions de cette loi relatives à la prescription des infractions occultes ne peut avoir pour effet de prescrire celles qui, au jour de cette entrée en vigueur, avaient valablement donné lieu à la mise en mouvement ou à l’exercice de l’action publique à une date à laquelle, en vertu des dispositions législatives alors applicables et conformément à leur interprétation jurisprudentielle, la prescription n’était pas acquise, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la vio-

lation des articles 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, L. 518-25 du code monétaire et financier, 111-4, 314-1 et 432-15 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motif et manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a condamné M. X... du chef de détournement de fonds privés par une personne char-gée d’une mission de service public et a prononcé sur les intérêts civils ;

« aux motifs que M. X... conteste avoir eu, au cours de la période des faits qui lui sont reprochés, la qualité de personne chargée d’une mission de service public au sens de l’article 432-15 du code pénal ; qu’il fait valoir qu’il était salarié de l’établissement bancaire La Banque Postale, société anonyme exerçant le métier de ban-quier comme n’importe quelle autre banque et que les fonds concernés n’étaient pas publics ; que par ailleurs, La Banque Postale n’exerçait pas de mission de service public, l’accessibilité bancaire étant une obligation géné-rale pesant sur toutes les banques et pas seulement sur La Banque Postale ; qu’il sollicite en conséquence la requalification des infractions de détournement de biens d’un dépôt public qui lui sont reprochées en abus de confiance ; que La Banque Postale et La Poste s’opposent à cette requalification des faits en faisant valoir qu’il res-sortait des pièces du prévenu et de l’enquête que ce der-nier était fonctionnaire employé par La Poste jusqu’à sa révocation ; que jusqu’au 1er mars 2010, La Poste était un

l’objet de relevés mensuels adressés au client ; qu’en consé-quence, les détournement ne pouvaient pas leur échapper à la lecture des relevés ou lors de la consultation en ligne de leurs comptes ; que, plus encore, La Banque Postale, de par son obligation de vérification des opérations effectuées par son agent, aurait dû elle-même découvrir les détour-nements effectués par ce dernier au vu de l’ampleur et de leur absence de dissimulation ; mais attendu qu’il résulte des propres déclarations du prévenu ainsi que celles de ses clients, qu’il usait de manœuvres pour dissimuler les détournements effectués au cours de la période visée aux yeux de ses clients et de la banque ; qu’ainsi, ses clients ont indiqué qu’ils ne recevaient pas le double des bordereaux de retraits qu’ils signaient à leur domicile et qu’ils ne lui réclamaient pas du fait de la confiance instaurée par ce dernier ; que certains ont signé des bordereaux en blanc ; que les signatures figurant sur les bordereaux de retraits n’étaient toujours pas conformes à celles des titulaires des comptes ponctionnés, ce qui a été reconnu par le prévenu lors de sa deuxième audition ; que ce dernier a lui-même indiqué qu’il communiquait à ses clients un état des comptes qui ne mentionnait pas les détournements effec-tués ou encore qu’il les prévenaient de la nécessité d’at-tendre un délai de quatre jours avant de voir apparaître le versement d’une somme sur l’un de leur compte ; qu’il avait reconnu également avoir agi à l’insu des conseil-lers-clientèles en utilisant leurs codes et identifiants à des périodes ou l’agence La Banque Postale était fermée (entre midi et 2 heures, le soir) ; qu’il se rendait également auprès d’autres agences de l’agglomération pour effectuer des ver-sements afin de ne pas attirer l’attention de la sienne ; que les enquêteurs avaient également relevé qu’il scin-dait les retraits d’espèces des comptes de ses clients avant de les verser sur son compte de manière à éviter d’attirer l’attention de sa hiérarchie ; que par ailleurs certains bor-dereaux de retraits ont été retrouvés à son domicile lors de la perquisition du 2 mai 2012 alors que d’autres ne l’ont jamais été ; qu’il y a lieu de souligner que certaines victimes (Mmes Y..., Z...) étaient très âgées (nées en 1921 et 1923) et que l’une d’entre elles (Mme A...) était atteinte de la maladie d’Alzheimer au moment des faits ; que ces éléments ne favorisant pas leur vigilance pour repérer les détournements commis sur leurs comptes ; qu’enfin, le système de cavalerie organisé par l’intéressé ne facilitait pas une vision claire de l’état des comptes concernés ; que les manœuvres de dissimulation ont consisté également à transférer certains clients de Bondues à Saint-André avec l’accord de ces derniers afin d’éviter la découverte de ses détournements ; que l’ensemble de ces éléments démontre que l’intéressé usait de manœuvres diverses pour dissimu-ler à ses clients les détournements qu’il commettait et ce, après les avoir mis en confiance ; que dans ces conditions, il apparaît que ces agissements frauduleux n’ont pu être découverts que par l’alerte de Tracfin relative à des mou-vements importants sur ses comptes personnels ; qu’il est vraisemblable que les outils utilisés par Tracfin mais éga-lement par le service dédié de La Poste pour repérer les éventuelles malversations de ses salariés se sont affinés au fil du temps pour devenir de plus en plus efficace ; qu’il y a lieu en conséquence de rejeter la prescription soulevée par le prévenu ;

« alors qu’en matière de détournement de fonds placées sur un compte bancaire, le délai de prescription court,

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définies par la législation applicable, toute filiale ayant le statut d’établissement de crédit, d’entreprise d’inves-tissement ou d’entreprise d’assurance et prend directe-ment ou indirectement toute participation dans de tels établissements ou entreprises ; qu’elle peut conclure avec ces établissements ou entreprises toute convention en vue d’offrir, en leur nom et pour leur compte et dans le respect des règles de concurrence, toute prestation concourant à la réalisation de leur objet, notamment toute prestation relative aux opérations prévues aux articles L. 311-1, L. 311-2, L. 321-1 et L. 321-2 ou à tous produits d’assu-rance ; que cette loi n’a pas non plus modifié le statut des personnels de La Poste et en conséquence de La Banque Postale, société anonyme à directoire et conseil de sur-veillance ayant le statut de banque et filiale à 100 % de La Poste ; qu’en l’espèce, M. X... a été embauché en 1982 par La Poste sous le statut de fonctionnaire de cette der-nière ; qu’il ressort des textes précités que son statut n’a pas été modifié au fil de l’évolution de son entreprise ni à la création de La Banque Postale ; qu’il a lui-même indiqué avoir été « révoqué » par son employeur et non « licencié » compte tenu des faits qui lui sont reprochés dans le cadre de la présente procédure ; qu’il ne lui appartenait pas dans sa fonction de directeur d’agence de La Banque Postale de gérer le portefeuille de ses clients, mais cette dernière consistait à encadrer des personnes qui y travaillaient et à gérer l’agence proprement dite en veillant au respect des missions de service public qui étaient confiées par la loi à La Banque Postale, et notamment, à celle de l’accessibilité bancaire ; qu’au vu de ces éléments, il y a lieu de considérer qu’il était une personne chargée d’une mission de service public dans le cadre de ses fonctions de directeur d’agence ; qu’au vu de ces éléments et quelle que soit la période de la prévention, il n’y a pas lieu de requalifier les faits qui lui sont reprochés en abus de confiance ; qu’en revanche, les faits commis au cours de la période du 1er février 2002 au 31 décembre 2008 ne peuvent être poursuivis que sous deux qualifications différentes (abus de confiance et détournements de fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public) ; qu’il y a lieu en consé-quence de le relaxer du chef d’abus de confiance ;

« 1° alors qu’au-delà de la mission d’accessibilité aux comptes bancaires, l’activité d’un directeur d’une agence de La Banque Postale consistant à assurer un service ban-caire auprès de ses clients ne constitue pas une mission de service public ; qu’en déduisant que le prévenu était une personne chargée d’une mission de service public de la seule circonstance qu’il exerçait des fonctions de direc-teur d’agence, parmi lesquelles figurait l’obligation de faire respecter le principe d’accessibilité aux comptes ban-caires, sans caractériser un lien entre les détournements reprochés et cette obligation, la cour d’appel a méconnu les textes précités ;

« 2° alors que l’appartenance d’un agent au statut par-ticulier de La Poste issu de l’article 29 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications n’induit pas l’exercice, par cet agent, d’une mission de service public ; qu’en déduisant de la seule circonstance que le prévenu avait été embauché en 1982 sous le statut de fonction-naire et avait conservé ce statut jusqu’à la date des faits

établissement public et qu’au-delà de cette date, il était le seul établissement bancaire reconnu comme ayant une mission d’accessibilité bancaire, soit une mission de ser-vice public ; qu’enfin, l’article 432-15 du code pénal vise aussi bien les fonds publics que les fonds privés ; que la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications a créé, à compter du 1er janvier 1991, deux personnes morales de droit public placées sous la tutelle du ministre des postes et des télécommunications qui ont pris res-pectivement les noms de La Poste et de France Télécom (article 1) ; que l’article 2 de cette loi indiquait que La Poste avait, notamment, pour objet d’offrir, dans le res-pect des règles de la concurrence, des prestations rela-tives aux moyens de paiement et de transfert de fonds, aux produits de placement et d’épargne, à la gestion des patrimoines, à des prêts d’épargne-logement et à tous produits d’assurance ; qu’elle devait gérer le service des chèques postaux et, pour le compte de l’Etat, la Caisse nationale d’épargne dans le respect des dispositions du code des caisses d’épargne ; que l’article 29 précisait que les personnels de La Poste et de France Télécom étaient régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obli-gations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 jan-vier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, qui comportait des disposi-tions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas suivants ; que l’ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010, a jouté un article 1-2 à la loi précitée qui précise que la personne morale de droit public La Poste est transformé à compter du 1er mars 2010 en une société anonyme dénommée La Poste ; que le capital de la société est détenu par l’Etat, actionnaire majoritaire, et par d’autres personnes morales de droit public, à l’exception de la part du capital pouvant être détenue au titre de l’actionnariat des personnels dans les conditions prévues par la pré-sente loi ; que la transformation ne pouvait avoir pour conséquence de remettre en cause le caractère de service public de La Poste ; que la même ordonnance a modifié l’article 2 de la loi de 1990 en indiquant que La Poste conserve sa mission de service public liée à l’accessibilité bancaire dans les conditions par ses articles L. 221-2 et L. 518-25-1 du code monétaire et financier ; qu’en outre, elle exerce à travers sa filiale La Banque Postale, des acti-vités dans le domaine bancaire et financier et des assu-rances dans les conditions prévues notamment au code monétaire et financier ; qu’en revanche, elle n’a pas modi-fié l’article 29 de la loi de 1990 relatif au personnel de La Poste qui demeure régie par des statuts particuliers pris en application de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligation des fonctionnaires et de la loi du 11 jan-vier 1984 relative à la fonction publique de l’Etat, la modification n’étant apportée qu’au personnel de France Télécom ; que La Banque Postale, filiale à 100 % de La Poste, est issue de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 qui a modifié l’article L. 518-25 du code monétaire et financier en disposant que dans les domaines bancaire, financier et des assurances, La Poste propose des pro-duits et services au plus grand nombre, notamment le Livret A ; qu’à cette fin, et sous réserve, le cas échéant, des activités qu’elle exerce directement en application des textes qui la régissent, elle crée, dans les conditions

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délai de quatre jours avant de voir apparaître le verse-ment d’une somme sur l’un de leur compte ; qu’il avait reconnu également avoir agi à l’insu des conseillers-clien-tèles en utilisant leurs codes et identifiants à des périodes ou l’agence La Banque Postale était fermée (entre midi et 2 heures, le soir) ; qu’il se rendait également auprès d’autres agences de l’agglomération pour effectuer des versements afin de ne pas attirer l’attention de la sienne ; que les enquêteurs avaient également relevé qu’il scin-dait les retraits d’espèces des comptes de ses clients avant de les verser sur son compte de manière à éviter d’attirer l’attention de sa hiérarchie ; que par ailleurs certains bor-dereaux de retraits ont été retrouvés à son domicile lors de la perquisition du 2 mai 2012 alors que d’autres ne l’ont jamais été ; qu’il y a lieu de souligner que certaines victimes (Mmes Y..., Z...) étaient très âgées (nées en 1921 et 1923) et que l’une d’entre elles (Mme A...) était atteinte de la maladie d’Alzheimer au moment des faits ; que ces éléments ne favorisant pas leur vigilance pour repérer les détournements commis sur leurs comptes ; qu’enfin, le système de cavalerie organisé par l’intéressé ne facilitait pas une vision claire de l’état des comptes concernés ; que les manœuvres de dissimulation ont consisté également à transférer certains clients de Bondues à Saint-André avec l’accord de ces derniers afin d’éviter la découverte de ses détournements ; que l’ensemble de ces éléments démontre que l’intéressé usait de manœuvres diverses pour dissimu-ler à ses clients les détournements qu’il commettait et ce, après les avoir mis en confiance ; que dans ces conditions, il apparaît que ces agissements frauduleux n’ont pu être découverts que par l’alerte de Tracfin relative à des mou-vements importants sur ses comptes personnels ; qu’il est vraisemblable que les outils utilisés par Tracfin mais éga-lement par le service dédié de La Poste pour repérer les éventuelles malversations de ses salariés se sont affinés au fil du temps pour devenir de plus en plus efficace ;

« alors d’une qu’en retenant que M. X... n’avait pas pour mission de gérer les portefeuilles des clients des agences de La Banque Postale qu’il dirigeait, qu’il avait usé de manœuvres pour dissimuler ses agissements et pour trom-per la vigilance de son employeur, que c’était à l’initiative de la banque, informée par Tracfin, que les faits avaient été découverts et traités, et qu’il était vraisemblable que les outils utilisés par Tracfin, mais également par le service dédié de la poste pour repérer les éventuelles malversa-tions de ses salariés, se sont affinés au fil du temps pour devenir de plus en plus efficaces, sans vérifier, ainsi qu’elle était invitée à le faire (conclusions d’appel de M. X..., page 6, dernier § et p . 7, § 7), si des contrôles avaient été effec-tués régulièrement sur la gestion des comptes des clients et sur les mouvements du compte de son agent, et si l’absence d’alerte ou l’absence de tels contrôles ne caractérisait pas, l’un ou l’autre, une négligence, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes précités » ;

Attendu que, pour exclure une faute de négligence de la Banque Postale, l’arrêt relève notamment que M. X... n’avait pas pour mission de gérer les comptes des clients, qu’il a masqué ses détournements par des manœuvres de dissimulation destinées à tromper la vigilance de son employeur, et que ses agissements frauduleux n’ont pu être découverts qu’ensuite de l’alerte donnée par le

visés par la prévention, la cour d’appel a méconnu les textes précités » ;

Attendu que pour reconnaître à M. X..., directeur d’une agence de la Banque Postale, la qualité de personne chargée d’une mission de service public, l’arrêt retient notamment qu’il a été embauché en qualité de fonction-naire, que son statut n’a pas été modifié lors de la création de la Banque Postale et qu’il était agent d’encadrement des personnes en poste au sein de l’agence qu’il gérait en veillant à l’accomplissement de la mission de service public d’accessibilité bancaire définie par la loi ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, d’où il résulte que M. X... était une personne chargée d’une mission de service public, la cour d’appel, qui n’avait pas à éta-blir que les détournements ont été commis à l’occasion de l’exécution de la mission d’accessibilité bancaire dont il était investi, a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 1382, 1383 du code civil, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motif, manque de base légale :

« en ce que la cour d’appel a condamné M. X... à ver-ser à La Banque Postale la somme de 1 153 719 euros en réparation d’un préjudice matériel, et celle de 7 000 euros en réparation d’un préjudice d’image ;

« aux motifs que M. X... sollicitait un partage de res-ponsabilité avec La Poste, cette dernière ayant concouru selon lui à son dommage en se montant négligente dans la vérification des comptes de son directeur d’agence ; que La Banque Postale s’y oppose en rappelant que M. X... a agi en dehors des fonctions qui lui étaient confiées, qu’il a pris soin de masquer ses agissements et qu’il en tiré un profit particulièrement important ; qu’il ressort des élé-ments de la procédure que M. X... n’avait pas pour mis-sion de gérer les portefeuilles des clients des agences de La Banque Postale qu’il dirigeait ; qu’il a par ailleurs usé de manœuvres de dissimulation de ses agissements pour tromper non seulement la vigilance de ses clients mais celle de son employeurs, ces manœuvres ayant été rappe-lées ci-dessus ; que c’est à l’initiative de La Poste informée par Tracfin que les faits ont été découverts et traités ; au vu de ces éléments, la négligence de La Banque Postale n’apparaît pas établie et qu’il n’y a pas lieu à partage de responsabilité ;

« et aux motifs que qu’il résulte des propres déclara-tions du prévenu ainsi que celles de ses clients, qu’il usait de manœuvres pour dissimuler les détournements effec-tués au cours de la période visée aux yeux de ses clients et de la banque ; qu’ainsi, ses clients ont indiqué qu’ils ne recevaient pas le double des bordereaux de retraits qu’ils signaient à leur domicile et qu’ils ne lui réclamaient pas du fait de la confiance instaurée par ce dernier ; que cer-tains ont signé des bordereaux en blanc ; que les signa-tures figurant sur les bordereaux de retraits n’étaient toujours pas conformes à celles des titulaires des comptes ponctionnés, ce qui a été reconnu par le prévenu lors de sa deuxième audition ; que ce dernier a lui-même indi-qué qu’il communiquait à ses clients un état des comptes qui ne mentionnait pas les détournements effectués ou encore qu’il les prévenaient de la nécessité d’attendre un

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préposé de l’une des filiales, la Banque Postale, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations et dès lors que la Banque Postale est une filiale à 100 % de la Poste, que ces deux personnes morales, quoique distinctes, sont en étroite communauté d’intérêts moral et patri-monial et partagent les mêmes services de gestion, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de

la violation des articles 132-19 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motifs et manque de base légale :

« en ce que, l’arrêt attaqué a condamné M. X... à un emprisonnement délictuel de trois ans assorti d’un sur-sis avec mise à l’épreuve pour une durée d’un an et a dit que la peine d’emprisonnement ferme fera l’objet d’un aménagement ab initio selon des modalités à définir en accord avec le juge d’application des peines près le tribu-nal de grande instance de Lille ;

« aux motifs qu’antérieurement à ces faits, M. X... n’a jamais été condamné ; qu’il indiquait à l’audience être divorcé, séparé de Mme Valérie B... et que ses enfants majeurs ne sont plus à charge ; qu’il a retrouvé un travail en qualité de technico-commercial, rémunéré à hauteur de 1 500 euros par mois ; qu’il a expliqué être en thé-rapie psychologique à la suite de ses agissements, et de leurs conséquences ; que les détournements opérés par M. X... ont été particulièrement importants au regard des montants indiqués dans la prévention et qu’ils ont duré pendant de longues années ; qu’il a profité en ce sens de la confiance aveugle que lui portaient les clients de la Banque Postale ainsi que pour certains de leur fai-blesse (âge, maladie) ; que son niveau de vie ne justifiait pas ses actes au regard du montant de son salaire au cours de cette période ; qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, une peine d’emprisonnement ferme apparaît la seule adé-quate en l’espèce, une peine alternative n’apparaissant pas suffisante pour sanctionner la gravité et l’ampleur de ses agissements ; que les peines principales (trois ans d’empri-sonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve com-portant l’obligation d’exercer une activité professionnelle et celle de réparer les dommages causés par l’infraction commise, et complémentaires (interdiction professionnelle pendant cinq ans et confiscation des scellés) prononcées par les premiers juges résultent en conséquence d’une juste application de la loi pénale ; qu’il convient de confirmer le jugement entrepris sur la peine ; qu’il convient d’ajou-ter qu’au regard de la situation professionnelle actuelle de l’intéressé, qu’elle peut faire l’objet d’un aménagement ab initio, lequel est souhaité par l’intéressé ;

« 1° alors qu’en matière correctionnelle, une peine d’em-prisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la person-nalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu’en se limitant à constater que la peine d’emprisonnement apparaît la seule adéquate, une peine alternative n’appa-raissant pas suffisante, sans caractériser sa nécessité au regard de la gravité de l’infraction et de la personnalité de l’auteur, la cour d’appel a violé les textes précités ;

service Tracfin en raison d’importants mouvements de fonds apparaissant sur ses comptes personnels ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs propres à exclure une faute de la partie civile de nature à limiter son droit à indemnisation, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 1382, 1383 du code civil, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motif, manque de base légale :

« en ce que la cour d’appel a déclaré recevable La Poste en sa constitution de partie civile et condamné M. X... à lui verser les sommes de 2 500 euros au titre d’un préju-dice lié à l’atteinte à son image, et de 1 000 euros au titre d’un préjudice lié à la désorganisation de ses services, outre la somme de 1 500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;

« aux motifs que La Poste fait valoir que les agissements de M. X... ont porté atteinte à son image par rapport à sa clientèle ainsi que par rapport à sa filiale La Banque Postale ; qu’elle indique par ailleurs que ses services ont été désorganisés à la suite des détournements commis par M. X... et mobilisés massivement pour évaluer l’ampleur et identifier les victimes ; qu’il résulte de ces éléments ainsi que de l’article 2 du code de procédure pénale que le préjudice de La Poste lié à son image et à la désorganisa-tion de ses services est directement en lien avec les infrac-tions commises par monsieur X... et ce d’autant plus que la clientèle de La Poste apparaît peu en mesure de distin-guer les deux entités juridiques distinctes, La Poste d’une part, et La Banque Postale d’autre part ;

« 1° alors que le préjudice d’image dont souffre la mai-son mère d’un groupe de sociétés à raison de l’infraction commise par le préposé d’une de ses filiales, et lié à l’im-possibilité pour la clientèle de distinguer les deux entités juridiques, résulte de la confusion ainsi entretenue entre ces sociétés et ne constitue pas la conséquence directe de cette infraction ; qu’en retenant qu’était directement en lien avec l’infraction le préjudice d’image souffert par La Poste à raison des détournements commis par le prévenu en sa qualité de préposé de La Banque Postale au préju-dice des clients de cette filiale, la cour d’appel a méconnu les textes cités au moyen ;

« 2° alors que la désorganisation que subit la maison mère d’un groupe de sociétés du fait des détournements commis par un agent d’une de ses filiales au préjudice des clients de cette filiale résulte de liens contractuels passés entre ces sociétés et mettant en place des services communs de gestion, et ne constitue pas la conséquence directe de l’infraction ; qu’en retenant qu’était directe-ment en lien avec l’infraction le préjudice lié à la désor-ganisation des services dont La Poste aurait souffert à la suite des détournements commis par le prévenu en qualité de préposé de La Banque Postale au préjudice de clients de cette filiale, la cour d’appel a méconnu les textes cités au moyen » ;

Attendu que pour indemniser la Poste d’un préjudice d’image et d’un dommage tenant à la désorganisation de ses services, mobilisés pour évaluer l’ampleur des détournements et en identifier les victimes, comme résultant directement des délits commis par M. X...,

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l’homme, la visite et le contrôle d’un navire de plai-sance, ainsi que la procédure subséquente, effectués en application des articles 62 et 63 du code des douanes, abrogés ultérieurement par décision du Conseil consti-tutionnel, en raison de l’absence de recours juridiction-nel effectif contre la décision prescrivant lesdites opéra-tions à bord d’un lieu privé assimilable à un domicile, le consentement des occupants du navire étant sans incidence sur cette nullité.

REJET du pourvoi formé par l’administration des douanes et droits indirects, partie poursuivante contre l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 15 septembre 2015, qui, dans la procédure suivie contre M. Bahaeddine X... des chefs d’importation sans déclaration de marchandise ni prohibée ni fortement taxée et manœuvres ayant pour but ou pour effet d’obtenir une exonération attachée à l’exportation, a rejeté ses demandes.

20 avril 2017 No 15-86.227

LA COUR,Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la viola-

tion des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 32, 63, 65, 323, 369, 412, 414, 423, 424, 425, 426, 430, 432 bis, 435, 436 et 438 du code des douanes, de la Convention de Montego Bay du 10 décembre 1982, des articles 385, 551, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt, infirmant le jugement entrepris, a dit non-conformes à l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, les articles 62 et 63 du code des douanes dans leur rédaction applicable au 3 septembre 2013, a déclaré, en conséquence, nuls la visite et le contrôle opérés en l’espèce à cette date par les agents des douanes et a dit nulle toute la procédure sub-séquente, y compris les citations ;

« aux motifs que dans sa version en vigueur à l’époque du contrôle survenu le 3 septembre 2013, l’article 62 du code des douanes disposait que les agents des douanes pouvaient visiter tout navire se trouvant dans la zone maritime du rayon des douanes et dans la zone définie à l’article 44 bis dans les conditions prévues à ce texte ; que l’article 63 du code des douanes applicable lors dudit contrôle disposait que les capitaines et commandants devaient recevoir agents des douanes, les accompa-gner et, s’ils le demandaient, faire ouvrir les écoutilles, les chambres et armoires de leur bâtiment, ainsi que les colis désignés pour la visite ; qu’en cas de refus, les agents pouvaient demander l’assistance d’un juge (ou, s’il n’y en avait pas sur le lieu, d’un officier municipal dudit lieu ou d’un officier de police judiciaire), qui était tenu de faire ouvrir les écoutilles, chambres, armoires et colis ; qu’il était dressé procès-verbal de cette ouverture et des constatations faites aux frais des capitaines ou com-mandants ; que par décision du 29 novembre 2013, le Conseil constitutionnel a abrogé les articles 62 et 63 du code des douanes, au visa de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, estimant que ces textes ne

« 2° alors que la peine d’emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permet, et sauf impossibilité matérielle, faire l’objet d’une mesure d’aménagement ; qu’en constatant qu’au regard de la situation professionnelle actuelle du prévenu, la peine d’emprisonnement peut faire l’objet d’un aménagement ab initio, sans prononcer cette mesure et en renvoyant la détermination de ses modalités au juge d’application des peines, la cour d’appel a méconnu les textes précités » ;

Vu l’article 132-19 du code pénal, ensemble les articles 723-2 et 723-7-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’il résulte de ces deux derniers textes que le juge du jugement, s’il doit renvoyer au juge de l’appli-cation des peines les modalités d’exécution de la semi-liberté, du placement à l’extérieur ou du placement sous surveillance électronique, doit, sur le fondement du premier et sauf s’il est dérogé au principe de l’aména-gement de la peine d’emprisonnement ferme inférieure ou égale à deux ans, fût-elle assortie d’un sursis partiel, qu’il ordonne, prononcer sur la nature même de cet aménagement ;

Attendu que l’arrêt énonce que la peine d’emprison-nement sans sursis prononcée à l’encontre du prévenu pourra faire l’objet d’un aménagement ab initio selon des modalités à définir en accord avec le juge d’applica-tion des peines ;

Mais attendu qu’en renvoyant au juge de l’application des peines le choix de la nature de la mesure d’aména-gement alors que ce choix lui incombait, la cour d’appel a méconnu le principe ci-dessus énoncé et les textes susvisés ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’ap-pel de Douai, en date du 3 novembre 2015, mais en ses seules dispositions concernant les peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’ap-pel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Zerbib – Avocat général : M. Wallon – Avocats : SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Thouin-Palat et Boucard

No 111

DOUANESAgent des douanes – Pouvoirs – Droit de visite

des navires dans les eaux territoriales et dans la zone contiguë – Visite d’un navire de plaisance – Lieu privé assimilable à un domicile – Exception d’inconventionnalité – Recevabilité – Portée

Justifie sa décision la cour d’appel qui accueille l’exception d’inconventionnalité et annule, sur le fondement de l’article 6 de la Convention européenne des droits de

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cédure que les procès-verbaux deux à quatre du 3 sep-tembre 2013 sont relatifs, d’une part, à une demande d’Assistance Administrative Mutuelle Internationale avec le Royaume-Uni en application de la Convention de Naples Il, en date du 18 décembre 1997, afin d’obtenir des renseignements sur la résidence de M. X..., et d’autre part, à l’exercice du droit de communication et de retenue de documents prévu par l’article 65 du code des douanes en vertu duquel des réquisitions ont été adressées au ser-vice de sécurité de la compagnie aérienne British Airways et au directeur de la compagnie aérienne MEA ; que le procès-verbal n° 13051D01425 du 9 décembre 2013 constitue un procès-verbal de synthèse et de notifica-tion d’infractions ; qu’en prononçant, en conséquence de la non-conformité des articles 62 et 63 du code des douanes à l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, la nullité de la visite et du contrôle opérés par les agents des douanes ainsi que de toute la procédure subséquente alors que les procès-verbaux deux à quatre du 3 septembre 2013 ne trouvaient pas leur sup-port nécessaire dans la visite et le contrôle opérés en appli-cation des articles 62 et 63 du code des douanes et que le procès-verbal n° 13051D01425 du 9 décembre 2013 ne concernait que pour partie les éléments relevés lors de la visite du navire, la cour d’appel a violé les textes sus-visés » ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 3 septembre 2013, les agents des douanes se sont rendus dans le vieux port de Cannes afin de contrôler le navire de plaisance Option B en vue de vérifier sa situation fiscale et douanière, sur le fondement de l’article 63 du code des douanes, dans sa rédaction applicable à l’époque des faits ; qu’ils ont, en présence de M. X..., résident européen établi à Londres, directeur de la société Option B Limiteed, domiciliée aux îles Caïmans, propriétaire du navire, visité celui-ci entre 15 heures et 16 h 15 et se sont fait remettre des photocopies de documents et factures par des membres de l’équipage ; qu’à l’issue de leur contrôle, M. X... et la société Option B Limited ont été cités devant le tri-bunal correctionnel pour importation sans déclara-tion de marchandise ni prohibée ni fortement taxée et manœuvres ayant pour but ou pour effet d’obtenir une exonération attachée à l’exportation ; que le tribunal a annulé les citations par jugement dont la direction régionale des douane a interjeté appel ;

Attendu que pour accueillir l’exception d’inconven-tionnalité et annuler la visite et le contrôle du navire ainsi que la procédure subséquente, l’arrêt énonce que, par décision du 29 novembre 2013, le Conseil constitutionnel a abrogé les articles 62 et 63 du code des douanes, au visa de l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme de 1789, estimant que ces textes ne prévoyaient ni voies de recours appropriées, ni garan-ties suffisantes permettant le contrôle de la mise en œuvre des mesures qui y étaient prévues ; que si le Conseil constitutionnel a différé les effets de cette abro-gation au 1er janvier 2015, les articles 62 et 63 du code des douanes doivent être lus au regard de l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme ; que la cour d’appel retient que l’article 63 n’instituait pas un recours juridictionnel effectif, en fait comme en

prévoyaient ni voies de recours appropriées, ni garanties suffisantes permettant le contrôle de la mise en œuvre des mesures qui y étaient prévues ; que s’il est exact que le Conseil constitutionnel a différé les effets de cette abro-gation au 1er janvier 2015, il demeure que les articles 62 et 63 du code des douanes, dans leur rédaction exami-née, doivent aussi être lus en fonction de l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, le juge étant tenu d’en contrôler la conventionalité ; que selon ce texte, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impar-tial, établi par à loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ; que ce texte, bien qu’afférent à la phase de jugement, implique que les personnes dont le navire de plaisance est visité par les agents des douanes aient accès au juge pour obtenir, à l’issue d’une procédure équitable, une décision sur la contestation qu’elles seraient suscep-tibles d’émettre ; que force est de constater que l’article 63 examiné n’instituait pas un tel recours juridictionnel effectif en fait comme en droit, de la régularité de la déci-sion prescrivant la visite dans un navire de plaisance -qui est un lieu privé assimilable à un domicile- et des mesures subséquentes ; que la simple assistance d’un juge, à la seule demande des douanes, ce magistrat pou-vant être suppléé par un officier municipal ou un officier de police judiciaire en cas de refus de visite du navire de plaisance par les personnes s’y trouvant à bord, ne vaut pas contrôle juridictionnel effectif dès lors que ce juge, qui ne disposait d’aucune marge d’appréciation, était tenu de "faire ouvrir les écoutilles, chambres, armoires et colis" ; que l’exception d’inconventionnalité des articles 62 et 63 du code des douanes, dans leur rédaction examinée, est donc accueillie, ces textes ne prévoyant pas un droit au recours juridictionnel effectif ; qu’il s’ensuit l’annulation de toute la procédure subséquente visite et au contrôle du navire de plaisance par les douaniers survenue le 3 septembre 2013, elle-même annulée puisque opérée au mépris de l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme ; que les citations en justice sont ainsi annulées pour ce motif sans qu’il soit besoin de pro-noncer sur les griefs élevés à leur sujet ;

« 1° alors qu’il appartient au prévenu de démontrer l’existence d’une atteinte à ses intérêts résultant de la vio-lation alléguée ; qu’en prononçant la nullité de la visite et du contrôle opérés par les agents des douanes ainsi que de tous les actes subséquents au motif que l’article 63 du code des douanes n’instituait pas un recours juridiction-nel effectif, en fait comme en droit, de la régularité de la décision prescrivant la visite dans un navire de plai-sance qui est un lieu privé assimilable à un domicile alors que le capitaine du navire ou les personnes à bord n’ayant pas refusé la visite du navire, ils ne pouvaient se faire un grief de ne pas avoir pu recourir contre une mesure à laquelle ils ne s’étaient pas opposés, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

« 2° alors qu’en toute hypothèse, en cas d’annulation d’actes de la procédure, les actes ultérieurs ne doivent être annulés que s’ils trouvent leur support nécessaire dans les actes viciés ; qu’il résulte du dossier de la pro-

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12 mars 2015, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de faux et usage, après annulation du juge-ment entrepris et évocation, a renvoyé la cause à une audience ultérieure ;

– contre l’arrêt de ladite cour d’appel, chambre cor-rectionnelle, en date du 24 mars 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de faux et usage de faux, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis, à cinq ans d’interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils.Joignant les pourvois en raison de la connexité ;Vu le mémoire produit ;I – Sur le pourvoi formé contre l’arrêt du

12 mars 2015 :Sur le second moyen de cassation, pris de la violation

des articles 2, 3, 391, 418 et suivants, 421, 423, 424, 425, 509, 512, 515 et suivants du code de procédure pénale, 593 du même code, de la règle du double degré de juri-diction, de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, défaut de motifs et manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué du 12 mars 2015 a ordonné l’annulation du jugement du tribunal correctionnel de Saint-Pierre en date du 15 mai 2014, dit y avoir lieu à évocation et renvoyé l’examen de l’affaire au 21 mai 2015 ;

« aux motifs qu’il n’est pas contesté qu’une erreur d’ho-raire d’audience de première instance s’est glissée dans la citation du plaignant M. Sébastien Y... qui, lors de son audition par les enquêteurs le 11 décembre 2012, avait expressément déposé plainte à l’encontre de l’Eurl X... ; que l’article 391 du code de procédure pénale dispose que "toute personne ayant porté plainte est avisée par le Parquet de la date de l’audience" ; que selon une juris-prudence constante, l’inobservation de cette prescription n’entraîne pas de nullité ; qu’en l’espèce, M. Sébastien Z... (sic), qui avait porté plainte au stade de l’enquête, a bien reçu une convocation pour l’audience correction-nelle dans le respect des dispositions de l’article 391 pré-cité, mais cette convocation portait mention d’un horaire d’audience erroné ; qu’en raison de l’interprétation res-trictive des textes de droit pénal, il appartient à la cour de dire si cette erreur a violé le principe du droit au pro-cès équitable de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que devant le premier juge, alors qu’il avait expressément émis le souhait, lors de son audition par un officier de police judiciaire, de déposer plainte et qu’il s’est pré-senté devant le tribunal correctionnel assisté d’un avocat choisi, M. Z... (sic) a été empêché de se constituer partie civile et de solliciter un éventuel dédommagement du préjudice qu’il estime avoir subi ; qu’en l’état de la procé-dure, il n’a plus la possibilité de se constituer pour la pre-mière fois partie civile devant la cour ; qu’ainsi, son droit à un procès équitable n’a pas été respecté ; qu’il convien-dra d’ordonner l’annulation du jugement querellé ; que l’article 520 du code de procédure pénale dispose que "si le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité, la cour évoque et statue sur le fond" ; que le principe du procès équitable est prescrit sous peine de nullité ; qu’il y

droit, de la régularité de la décision prescrivant la visite dans un navire de plaisance, qui est un lieu privé assi-milable à un domicile, et des mesures subséquentes et que la simple assistance d’un juge, à la seule demande des douanes, ce magistrat pouvant être suppléé par un officier municipal ou un officier de police judiciaire en cas de refus de visite du navire de plaisance par les personnes s’y trouvant à bord, ne vaut pas contrôle juridictionnel effectif dès lors que ce juge ne disposait d’aucune marge d’appréciation ; que les juges concluent que l’ensemble de la procédure subséquente doit être annulé ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que le consentement des intéressés aux opérations de visite est sans incidence sur une nullité dont la cause réside dans l’absence de recours contre le déroulement desdites opérations, la cour d’appel, qui a souverai-nement apprécié les conséquences de l’annulation de la visite, a justifié sa décision au regard de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ;

D’où il suit que le moyen sera écarté ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Chaubon – Avocat général : Mme Moracchini – Avocats : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton

No 112

INTERVENTIONQualité pour intervenir – Partie civile – Cour

d’appel – Appel des seules dispositions pénales – Intervention pour la première fois en cause d’appel – Intervention d’une victime en qualité de partie civile – Recevabilité (non)

Il résulte des articles 418, 419, 420-1 du code de procé-dure pénale que la règle du double degré de juridiction fait obstacle à ce que la partie civile, quelle que soit la raison pour laquelle elle n’a pas été partie au jugement de première instance, intervienne pour la première fois en cause d’appel.

Méconnaît ces dispositions la cour d’appel qui, saisie par le seul appel du ministère public des dispositions pénales d’un jugement, après avoir annulé celui-ci, motif pris de la violation du principe du procès équita-ble tenant à l’absence de la victime à l’audience en rai-son d’une mention erronée de l’avis qui lui a été adres-sé, déclare recevable la constitution de partie civile de celle-ci et renvoie à une audience ultérieure afin qu’il soit prononcé sur les intérêts civils.

20 avril 2017 No 16-83.199

LA COUR,CASSATION sur le pourvoi formé par M. Valère

X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, chambre correctionnelle, en date du

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a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;II – Sur le pourvoi formé contre l’arrêt du

24 mars 2016 :Attendu que l’annulation de l’arrêt du 24 mars 2016

doit être prononcée par voie de conséquence de l’annu-lation de l’arrêt du 12 mars 2015 ;

Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu d’examiner l’autre moyen proposé ;

I – Sur le pourvoi formé contre l’arrêt du 12 mars 2015 :

CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l’ar-rêt susvisé de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réu-nion ;

II – Sur le pourvoi formé contre l’arrêt du 24 mars 2016 :

CASSE ET ANNULE l’arrêt susvisé prononçant sur l’action publique et sur les intérêts civils ;

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement com-posée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Planchon – Avocat général : Mme Moracchini – Avocats : SCP Waquet, Farge et Hazan

No 113

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES

Pouvoirs – Etendue – Irrecevabilité – Avis de fin d’information – Présentation de réquisitions ou observations complémentaires – Délais applica-bles – Dépassement – Observations antérieures aux réquisitions du procureur de la république – Observations antérieures à l’ordonnance de clô-ture – Observations du mis en examen – Ar-rêt – Enonciations démontrant une réponse du juge d’instruction – Cas – Sanction – Cassation (non)

Sont recevables les observations de la personne mise en examen adressées au juge d’instruction au-delà du délai de trois mois de l’envoi de l’avis de fin d’information, ouvert aux parties par l’article 175, alinéa 3, du code de procédure pénale, mais avant les réquisitions du procureur de la République et l’ordonnance de clôture.

Si c’est à tort que de telles observations ont été dé-clarées irrecevables, l’arrêt n’encourt cependant pas la censure dès lors qu’il résulte de ses énonciations que le juge d’instruction a répondu aux articulations essen-tielles de ces observations.

aura lieu d’ordonner l’évocation de l’affaire et, pour une bonne administration de la justice et pour permettre aux parties de préparer leurs moyens et arguments, de ren-voyer l’examen du dossier à une date ultérieure ;

« 1° alors que la règle du double degré de juridiction ne permet pas, sauf dispositions contraires de la loi, à une partie qui se prétend lésée et qui ne s’est pas consti-tuée partie civile en première instance, de prendre cette qualité pour la première fois en cause d’appel ; qu’en pro-nonçant l’annulation du jugement auquel M. Y... n’était pas partie et dont il n’était en l’occurrence pas appelant, et en retenant pour ce faire sa qualité de partie civile, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et le principe du double degré de juridiction ;

« 2° alors que l’article 391 du code de procédure pénale, qui dispose que "toute personne ayant porté plainte est avisée par le Parquet de la date de l’audience", ne consti-tue pas une prescription dont l’inobservation entraîne une nullité ; qu’en ordonnant l’annulation du jugement en retenant que la convocation de M. Y... portait un horaire erroné et que son droit à un procès équitable n’a pas été respecté, la cour d’appel a violé les textes et prin-cipes susvisés ;

« 3° alors que l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant ; que seul le ministère public étant appelant, la cour d’appel ne pouvait prononcer d’office la nullité du jugement de première instance sur les observations de l’avocat de M. Y... qui, n’ayant pas eu la qualité de partie civile en première instance et n’étant pas appelant de cette décision, ne pouvait demander l’annulation du jugement, lors même que ce jugement était définitif à l’égard de M. Y... ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a méconnu les textes et principes susvisés » ;

Vu les articles 418, 419, 420-1 et 591 du code de pro-cédure pénale ;

Attendu que la règle du double degré de juridiction fait obstacle à ce que la partie civile, quelle que soit la raison pour laquelle elle n’a pas été partie au jugement de première instance, intervienne pour la première fois en cause d’appel ;

Attendu que M. X... a été convoqué par procès-ver-bal devant le tribunal correctionnel des chefs de faux et usage tandis qu’un avis à victime mentionnant un horaire erroné a été adressé à M. Sébastien Y..., qui se plaignait des agissements du prévenu ; que par juge-ment en date du 15 mai 2014, rendu en l’absence de M. Y... et statuant uniquement sur l’action publique, le demandeur a été déclaré coupable des faits susvisés et condamné à deux mois d’emprisonnement avec sursis ; que le ministère public a interjeté appel de cette déci-sion ;

Attendu que pour annuler le jugement entrepris et ordonner le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure afin, notamment, d’examiner la constitution de par-tie civile de M. Y..., l’arrêt énonce que l’empêchement pour ce dernier de se constituer partie civile en raison d’une erreur d’horaire figurant sur l’avis à victime à lui adressé, a porté atteinte au principe du procès équitable dont le respect est prescrit à peine de nullité ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, la cour d’appel

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M. Jacques AAAAA..., M. Philippe BBBBB..., M. Jean-Philippe CCCCC..., Mme Kim DDDDD..., M. Yvon EEEEE..., Mme Armel FFFFF..., M. Paul GGGGG..., M. Hubert HHHHH..., Mme Ghislaine IIIII..., Mme Laurence JJJJJ..., M. Jean-Pierre KKKKK..., Mme Valérie KKKKK..., M. Christophe LLLLL..., M. Patrick MMMMM..., Mme Anne NNNNN..., M. Dominique OOOOO..., M. Paul PPPPP..., Mme Françoise QQQQQ..., M. Maurice RRRRR..., M. Philippe SSSSS..., M. Didier TTTTT..., Mme Jac-queline UUUUU..., M. Robert VVVVV..., M. Alain WWWWW..., Mme Jeanine WWWWW..., M. Jacques XXXXXX..., M. Jean-Louis YYYYYY..., M. Frédé-ric ZZZZZZ..., La société Richard-Hugo, M. Jean-Philippe CCCCC..., M. Max AAAAAA..., La société MRH Conseil, M. Marc BBBBBB..., M. Jean-Philippe CCCCCC..., M. Mohammed SSSS..., Mme Catherine SSSS..., l’Association APPAC, M. Jean DDDDDD..., La socété Archenault, M. Richard EEEEEE..., M. Char-ley FFFFFF..., M. Paul GGGGGG..., M. Daniel HHHHHH..., Mme Monique IIIIII..., M. Pierre IIIIII..., M. Michel IIIIII..., M. Frédéric JJJJJJ..., Mme Evelyne LLLLLL..., M. Jacques MMMMMM..., M. Jacques NNNNNN..., M. Frédéric OOOOOO..., M. Jean PPPPPP..., M. Claude QQQQQQ..., M. Henri RRRRRR..., M. Franck SSSSSS..., Mme Marie Car-men SSSSSS..., M. Gabriel TTTTTT..., Mme Sophie UUUUUU..., M. Patrick VVVVVV..., Mme Michèle WWWWWW..., M. Bruno XXXXXXX..., M. Gaston YYYYYYY..., M. René ZZZZZZZ..., Mme Lucile Jean-nin ZZZZZZZ..., Mme Violette AAAAAAA..., M. Paul BBBBBBB..., M. Roland CCCCCCC..., M. Roger DDDDDDD..., Mme Ginette EEEEEEE..., Mme Paule FFFFFFF..., Mme Françoise GGGGGGG..., M. Maurice GGGGGGG..., Mme Régine HHHHHHH..., M. Fer-nand IIIIIII..., M. Jean-Claude JJJJJJJ..., M. Martial KKKKKKK..., Mme Françoise LLLLLLL..., M. Alain MMMMMMM..., Mme Odette NNNNNNN..., M. René OOOOOOO..., Mme Mina PPPPPPP..., M. Roger QQQQQQQ..., M. Joël RRRRRRR..., M. Patrice SSSSSSS..., M. Roger TTTTTTT..., M. André UUUUUUU..., M. Jean VVVVVVV..., M. Fabrice WWWWWWW..., M. Cyril WWWWWWW..., Mme Christine WWWWWWW..., M. Didier XXXXXXXX..., Mme Anne XXXXXXXX..., M. Roger YYYYYYYY..., M. Jean-Jacques ZZZZZZZZ..., Mme Frédérique AAAAAAAA..., M. Didier BBBBBBBB..., Mme Elisabeth BBBBBBBB..., M. Jean-Marie CCCCCCCC..., Mme Madeleine DDDDDDDD..., M. André EEEEEEEE..., M. Michel FFFFFFFF..., M. Roger GGGGGGGG..., M. Jean-Jacques HHHHHHHH..., M. Jacques IIIIIIII..., M. Gilbert JJJJJJJJ..., Mme Sylviane KKKKKKKK..., Mme Chan-tal LLLLLLLL..., M. Louis LLLLLLLL..., M. Robert MMMMMMMM..., M. Michel NNNNNNNN..., M. Patrick OOOOOOOO..., M. Mickaël PPPPPPPP..., M. Henri QQQQQQQQ..., M. Maurice RRRRRRRR..., M. Jean-Pierre SSSSSSSS..., Mme Fran-çoise TTTTTTTT..., M. Edmond UUUUUUUU..., Mme Françoise UUUUUUUU..., Mme Simone UUUUUUUU..., M. Daniel VVVVVVVV..., M. Didier WWWWWWWW..., M. Patrick XXXXXXXXX..., M. Jacques YYYYYYYYY..., M. Yves ZZZZZZZZZ...,

M. Antonio X..., M. José Y..., M. Aldo Z..., M. Chris-tian A..., M. François B..., M. Roland C..., M. Gil-bert D..., M. Robert E..., M. Gérard F..., M. Elie G..., M. Tony H..., M. Edgar I..., Mme Monique J..., Mme Yvonne K..., M. Loïc L..., M. Didier M..., M. Rabah N..., Mme Virginie O..., M. André P..., M. Jean-Luc Q..., Mme Berthe Q..., M. Claude R..., M. Guy S..., M. Jean T..., M. Eric U..., Mme Mauri-cette V..., M. Marius W..., Mme Fanny XX..., M. Pierre YY..., M. André ZZ..., Mme Mireille AA..., M. Daniel BB..., Mme Evelyne CC..., M. Roland DD..., Mme Monique EE..., M. Christian FF..., M. Philippe FF..., M. Christian GG..., M. René GG..., Mme Colette HH..., M. Serge II..., M. Alain JJ..., M. Patrick KK..., Mme Florence LL..., M. Maurice MM..., Mme Mar-celle NN..., M. Régis OO..., M. Jacques PP..., Mme Denise QQ..., Mme Isabelle RR..., M. Jacques SS..., M. Jacques TT..., Mme Joëlle UU..., M. Phi-lippe VV..., M. Bernard WW..., M. Alexandre XXX..., Mme Claudine XXX..., Mme Séverine XXX..., M. Gilbert YYY..., Mme Chantal ZZZ..., M. Alain AAA..., M. Jacques BBB..., M. Hubert CCC..., M. Jean-Pierre DDD..., M. Guy EEE..., Mme Martine FFF..., M. Antonio GGG..., Mme Michèle HHH..., M. Pierre III..., Mme Raymonde III..., Mme Pau-lette JJJ..., Mme Josette KKK..., Mme Jacqueline LLL..., M. Jacques MMM..., Mme Marcelle NNN..., M. Maurice NNN..., Mme Carine OOO..., M. Patrick PPP..., M. Michel QQQ..., M. Albert RRR..., M. Joël SSS..., M. Jean-Pierre TTT..., Mme Marcelle UUU..., M. Gérard VVV..., Mme Joséphine VVV..., Mme Mar-guerite WWW..., Mme Françoise XXXX..., M. Jean XXXX..., M. Jean-Louis YYYY..., M. Claude ZZZZ..., M. Gilles AAAA..., La société Soverev, Mme Françoise BBBB..., Mme Henriette CCCC..., M. Bruno DDDD..., M. Jacques EEEE..., M. Romain FFFF..., M. Gérard GGGG..., M. Lucien HHHH..., M. Jacques IIII..., M. Maurice JJJJ..., Mme Françoise KKKK..., M. Jean-Luc LLLL..., parties civiles, contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 5-12, en date du 19 mai 2014, qui a condamné, pour délit d’initié, le premier à 5 000 000 euros d’amende dont 2 500 000 euros avec sursis, le deuxième à 850 000 euros d’amende dont 425 000 euros avec sursis, a relaxé MM. Guillaume MMMM... et Jean-Marie NNNN... du chef de diffusion d’informations fausses ou trompeuses, MM. NNNN..., Hubert OOOO..., François PPPP... et Philippe QQQQ... du chef de manipulation de cours et M. MMMM... du chef de complicité de manipulation de cours, et a prononcé sur les intérêts civils.

20 avril 2017 No 14-84.562

LA COUR,REJET des pourvois formés par M. Edgard RRRR...,

M. Guillaume MMMM..., prévenus, M. Mohammed Karim SSSS..., Mme Catherine TTTT..., épouse SSSS..., M. Hervé UUUU..., M. Robert VVVV..., M. Marc WWWW..., Mme Annie XXXXX..., M. Philippe XXXXX..., M. Michel YYYYY..., M. Michel ZZZZZ...,

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comptant ou au moyen de prêts bancaires ou par la remise d’actions d’auto-contrôle ;

Attendu qu’à partir du mois de novembre 2001, M. MMMM... a partagé avec M. NNNN... ses inquié-tudes concernant l’analyse faite par les agences de nota-tion (Moody’s et Standard & Poors) sur la situation financière du groupe et le risque encouru d’une dégra-dation de la notation de celui-ci ; que suite aux négo-ciations engagées avec ces agences sur une stratégie de désendettement permettant le maintien de la note BBB, M. MMMM... leur envoyait le 13 décembre 2001 un courrier matérialisant l’engagement de Vivendi Uni-versal de consacrer la plus grande part de la cession de son exposition dans B Sky B au désendettement du groupe, de céder au cours du premier trimestre 2002, si le cours devait s’établir au-dessus de 60 euros, au moins 35 millions de titres d’auto-contrôle et, à défaut, d’émettre une obligation d’une durée de trois ans rem-boursable en actions ; que ce projet, présenté comme "envisagé", était soumis au comité exécutif et au conseil d’administration les 13 et 14 décembre 2001 ; que des contacts avec les banques sont intervenus à la mi-décembre 2001 ; que, par un communiqué du 7 jan-vier 2002, Vivendi Universal a annoncé la cession de 55 millions d’actions d’auto-contrôle, dont le produit était affecté à la réduction de la dette du groupe, sous la forme d’une prise ferme, par laquelle deux éta-blissements bancaires (Deutsche Bank et Goldman Sachs) se sont engagés à les vendre dans la fourchette convenue, entre 60 et 61 euros, se portant eux-mêmes acquéreurs si les conditions n’étaient pas remplies, sup-portant ainsi le risque du placement, mais en percevant une commission plus importante ; que, le 7 janvier au soir, un communiqué du groupe AOL Time Warner, ayant annoncé d’importantes dépréciations d’actifs, a entraîné la baisse des cours des titres du secteur media et communication ; que le placement des titres n’a alors pas bénéficié d’allocation suffisante et les établisse-ments bancaires ont pris l’option de rester "collés" avec l’intégralité des titres et les ont écoulés quelques mois plus tard à un prix entre 40 et 45 euros, subissant une perte très élevée ;

Attendu que, le 3 juillet 2002, le directeur général de la Commission des opérations de bourse a décidé l’ouverture d’une enquête sur l’information finan-cière délivrée par Vivendi Universal à compter du 1er décembre 2000, étendue, ensuite, au marché des titres Vivendi Universal (VU) et Vivendi environne-ment (VE) ;

Qu’il résulte de la décision de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers du 3 novembre 2004 que le 12 septembre 2003, suite au dépôt du rapport d’enquête, le rapporteur désigné par la Commission des opérations de bourse a noti-fié des griefs à la société VU et à MM. NNNN... et MMMM... sur le fondement des articles 1, 2, 3 et 4 du règlement n° 98-07 de la Commission des opéra-tions de bourse, relatifs à l’obligation d’information du public, et à MM. NNNN... et MMMM... sur le fon-dement des articles 1 et 2 du règlement n° 90-08 de la Commission des opérations de bourse, relatifs à la détention et à l’utilisation d’une information privilé-

Mme Yvonne AAAAAAAAA..., M. Jean BBBBBBBBB..., Mme Anne CCCCCCCCC..., Mme Chantal DDDDDDDDD..., M. Jean-Luc EEEEEEEEE..., M. Michel FFFFFFFFF..., M. Francis GGGGGGGGG...,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;I – Sur le pourvoi de M. MMMM... :Attendu qu’il résulte des pièces produites par la SCP

Piwnica et Molinié, avocat de M. MMMM..., que celui-ci se désiste du pourvoi formé par lui le 22 mai 2014 contre l’arrêt susvisé ;

Que le désistement est régulier en la forme ; qu’il n’y a pas lieu à statuer sur le pourvoi ;

II – Sur le pourvoi formé par M. Jean-Philippe HHHHHHHHH..., partie civile :

Attendu qu’aucun moyen n’est produit ;III – Sur les autres pourvois :Sur la recevabilité des pourvois des parties civiles

des 20 et 22 mai 2014, contestée dans le mémoire en défense déposé pour MM. PPPP... et OOOO... :

Attendu qu’il résulte des pièces de procédure que se trouve annexée aux déclarations des pourvois contestés, signées par un avocat, la liste de l’ensemble des demandeurs avec leur identité ;

Qu’ainsi, ces pourvois, qui ont été régulièrement for-més en application de l’article 576 du code de procé-dure pénale, sont recevables ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces

de procédure que la compagnie générale des eaux, créée en 1984, est devenue la société Vivendi en 1998, que M. Hubert OOOO... a intégré la société en 1989, devenant responsable de la trésorerie du groupe, puis M. François PPPP... en 1991 au poste d’auditeur interne et ensuite à un poste de gestion comptable et financière, M. Jean-Marie NNNN... en 1994 en tant que direc-teur général jusqu’au 27 juin 1996, date à laquelle il devient président-directeur général, et M. Guillaume MMMM... en 1997 en tant que directeur financier ; qu’à partir de 1999, le groupe Vivendi, suite à diffé-rentes acquisitions, associations et fusions, présente deux grands pôles d’activités, un pôle médias et com-munications et un pôle environnement, et devient la société anonyme Vivendi Universal après la conclusion d’un traité de fusion le 20 juin 2000 entre les sociétés Vivendi, Canal Plus et Seagram, cette dernière apparte-nant à la famille RRRR... ; que les titres de Vivendi Uni-versal ont été admis aux négociations sur le marché du CAC 40, le 11 décembre 2000 ; que son premier conseil d’administration a nommé M. Edgar RRRR... vice-président-directeur général disposant des pouvoirs de mandataire social et a désigné les membres du comité exécutif, composé notamment de MM. NNNN..., RRRR..., Licoys et MMMM... ; que M. OOOO... a eu les fonctions de responsable de la trésorerie du groupe au niveau mondial, la centralisation de la trésorerie ayant été décidée par le comité exécutif ; que M. PPPP..., opé-rateur de saisie, a eu les fonctions de trésorier adjoint auprès de M. MMMM... ; que, dans le courant de l’an-née 2001, la société Vivendi Universal a eu un vaste programme d’acquisitions d’autres sociétés, payées

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Universal dès le début de l’année 2002 de 55 millions de titres du bloc d’auto-contrôle détenu par la société, au prix de 60 euros, une telle information étant suscep-tible d’avoir une influence sur le cours du titre ;

Que M. RRRR... a été renvoyé devant le tribunal cor-rectionnel du chef du délit d’initié pour avoir, les 3 et 4 janvier 2002, procédé à la levée de ses stock options à hauteur de 570 000 actions en réalisant une très importante plus-value de 12 840 380 USD alors qu’il avait connaissance du fait, non communiqué au public, qu’une cession allait être opérée par Vivendi Universal dès le début 2002 portant sur un volume minimum de 35 millions de titres du bloc d’auto-contrôle détenu par la société, au prix de 60 euros, une telle information étant susceptible d’avoir une influence sur le cours du titre ;

Que MM. OOOO..., PPPP... et QQQQ... ont été ren-voyés devant le tribunal correctionnel du chef de mani-pulation de cours, délit identique à celui reproché à M. NNNN... ; qu’ils ont été définitivement relaxés à ce titre par le tribunal ;

Attendu que, sur les appels des parties civiles des dis-positions civiles à l’égard de l’ensemble des prévenus, de MM. MMMM... et NNNN... sur les dispositions pénales et civiles leur faisant grief et de M. RRRR... sur les seules dispositions pénales, le ministère public n’ayant pas interjeté appel, la cour d’appel a :

– rejeté l’exception de nullité de l’ordonnance de ren-voi soulevée par M. RRRR...,

– infirmé le jugement et relaxé MM. MMMM... et NNNN... du chef du délit de diffusion d’informa-tions fausses ou trompeuses retenu par le tribunal et M. NNNN... du chef de l’abus de biens sociaux relatif aux frais de procédure judiciaire engagée à la suite de la demande de mise à exécution de la convention de fin de contrat,

– confirmé le jugement ayant déclaré coupables MM. MMMM... et RRRR... du délit d’initié et M. NNNN... du chef de l’abus de biens sociaux portant sur les sommes et avantage prévus au titre du "termina-tion agreement" (convention de fin de contrat),

– sur l’action civile, a confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevables des constitutions de partie civile, débouté les autres parties civiles de leurs demandes fondées sur les délits d’initié, d’abus de biens sociaux et de manipulation de cours, et, infirmant le jugement, a débouté les parties civiles de leurs demandes fondées sur le délit d’informations fausses ou trompeuses,

– déclaré nulle la citation à civilement responsable délivrée à l’encontre de la société Vivendi Universal ;

En cet état :I – Sur les moyens de M. RRRR... :Sur le premier moyen de cassation, proposé pour

RRRR..., pris de la violation des articles 61-1 de la Constitution, 111-3 et 112-1 du code pénal, L. 465-1 du code monétaire et financier, 6 et 593 du code de pro-cédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de

giée, à raison de la cession de leurs actions VU les 21 et 27 décembre 2001, alors qu’ils pouvaient détenir certaines informations, inconnues du public, relatives, notamment, à l’absence de "cash flow" net positif de VU durant le second semestre 2001, au risque de perdre les disponibilités importantes constituées par la trésorerie de Cegetel, mise à disposition de VU aux termes d’une convention de compte-courant dont l’échéance était fixée fin décembre 2001, à l’état des négociations et des engagements de désendettement par vente d’actifs pris auprès des agences de notation ; que la commission des sanctions a écarté l’existence de toute information de nature privilégiée, a mis M. MMMM... hors de cause et a prononcé une sanction pécuniaire d’un million d’euros à l’encontre de M. NNNN... et de la société VU pour diffusion d’informations trompeuses sur la conso-lidation de la société Telco, les dettes, les cash flow et les perspectives d’avenir du groupe ;

Attendu que, par ordonnance du juge d’instruc-tion du 16 octobre 2009, M. NNNN... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs de diffusion d’informations fausses ou trompeuses sur les pers-pectives ou la situation de la société VU (sur le niveau d’endettement du groupe dans un communiqué de presse du 19 décembre 2000 et une interview du 11 décembre 2000, la fusion avec la société Seagram devant rendre la société nette de dettes, dette qui s’éle-vait à 15 milliards d’euros – sur la situation financière au regard du free cash flow dans un communiqué de presse du 25 septembre 2001, avec l’annonce d’un free cash flow net positif des activités médias et com-munication alors qu’il était négatif de 23,1 millions d’euros, – au regard de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001 lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 – et sur l’annulation de 33 millions d’actions d’auto-contrôle annoncée dans un communiqué de presse du 25 septembre 2001 et qui n’a jamais été mise en œuvre), de manipulation de cours en faisant acquérir par la société Deutsche Equities, pour le compte de la société VU, 21,7 millions de titres VU dans des conditions ayant induit les investisseurs en erreur, pendant la période d’annonce des résul-tats du groupe, au cours des trente dernières minutes des séances de bourse et concourant à la formation du cours et ayant pour but de faire monter le cours, et d’abus de biens sociaux dans le cadre de la convention de fin de contrat du 1er juillet 2002 ;

Que M. MMMM... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs de diffusion d’informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situa-tion de la société VU, de complicité de manipulation de cours commis notamment par M. NNNN..., et du délit d’initié, pour avoir le 21 décembre 2001 procédé à la réalisation de ses stock options par la levée de 149 335 options (15 239 au prix de 30,80 euros, le surplus au prix de 50,02 euros) en signant avec la société géné-rale bank & trust un contrat de vente à terme de ces actions au prix de 59,24 euros avec échéance au 27 sep-tembre 2002, lui assurant, quelle que soit l’évolution du cours du titre, une plus-value de 1,39 millions d’euros, alors qu’il avait connaissance du fait, non communiqué au public, qu’une cession allait être opérée par Vivendi

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dix jours ou un mois, dans le cas où le procureur de la République ne communique pas ses réquisitions dans le délai imparti (trois mois), commence à courir au jour où le procureur de la République communique ses réqui-sitions ; qu’en l’espèce, force est de constater que le pré-venu a adressé ses observations au magistrat instructeur plus de trois mois après l’envoi de l’avis de fin d’informa-tion à savoir le 12 novembre 2008, soit dix mois après ledit envoi ; que, de même lesdites observations ont pré-cédé de deux mois le réquisitoire définitif du procureur de la République intervenu le 16 janvier 2009 et ne peuvent, dès lors, entrer dans le champ d’application du délai supplémentaire de dix jours ou un mois, imparti au prévenu pour faire des observations sur le réquisitoire définitif qui leur a été communiqué ; que si, certes, dans la partie concernant M. RRRR..., et les autres prévenus d’ailleurs, l’ordonnance de renvoi ne fait aucune référence aux réquisitions de non-lieu du procureur de la Répu-blique, il convient de souligner que le préambule de ladite ordonnance, page 5, vise très précisément le réquisitoire de non-lieu du procureur de la République, ainsi que notamment la note aux fins de non-lieu, déposée par les avocats de M. RRRR... en ces termes :

– vu le réquisitoire de M. le procureur de la Répu-blique, en date du 16 janvier 2009 tendant à un non-lieu ;

– vu la note aux fins de non-lieu, déposée par Mes Kiejman et Marembert, avocats du mis en examen M. RRRR..., en date du 12 novembre 2008 déposée en notre cabinet le 13 novembre 2008 ;

que l’article 184 du code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2007, n’a pas instauré de visa à peine de nullité, ni d’obligation de répondre ponctuellement à tous les arguments du mis en examen ; que la cour observe en l’espèce que l’ordonnance a exposé les faits et répondu aux articulations essentielles reprises dans les observations du prévenu, ayant ainsi relevé les arguments développés par M. RRRR... notamment :

– qu’il n’était pas certain d’avoir participé au comité exécutif du 13 décembre ;

– que l’exercice de ses stocks options résultait d’un pro-jet antérieur à la période litigieuse ;

– qu’il avait quitté le 6 décembre l’ensemble de ses responsabilités exécutives au sein de VU et que c’était pour cette raison qu’il avait souhaité vendre un nombre limité d’actions en exerçant ses options avant l’annonce des résultats pour 2001, ce qu’il envisageait dès le 15 novembre 2001 ;

que, s’agissant du caractère de l’information décrit comme vague et imprécis par M. RRRR..., le magistrat instructeur y a répondu abondamment dans les déve-loppements concernant M. MMMM..., poursuivi pour des faits identiques, qu’ainsi dans les pages consacrées à M. RRRR... le magistrat instructeur écrit : "Comme pré-cédemment démontré s’agissant des opérations sur titres réalisées par M. MMMM..., cette information relative à la cession du bloc d’autocontrôle constituait une infor-mation précise et certaine…" ; que sera relevé que le magistrat instructeur, outre que dans son ordonnance il se réfère aux réquisitions de non-lieu du procureur de la République, avait souligné : "que la majorité des admi-

5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« alors que la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 14 décembre 2000, privera de base légale la condamnation prononcée par l’arrêt attaqué et entraînera l’annulation de ce dernier » ;

Attendu que, par arrêt du 8 juillet 2015, la Cour de cassation a dit n’y avoir lieu de renvoyer les ques-tions prioritaires de constitutionnalité relatives aux dispositions des articles L. 465-1 du code monétaire et financier, dans leur version applicable au 4 jan-vier 2002, L. 621-14 et L. 621-15 du même code, dans leur rédaction résultant de l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 et de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ;

Que le moyen pris de l’inconstitutionnalité de ces textes est dès lors sans objet ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de droits de l’homme et 513 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :

« en ce qu’il résulte des mentions de l’arrêt attaqué que le prévenu ou son avocat n’ont pas eu la parole en dernier dans les débats sur la transmission de la question prio-ritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier ;

« alors que le prévenu ou son avocat doit avoir la parole en dernier sur tout incident qui n’est pas joint au fond ; que le dépôt d’un mémoire distinct sollicitant la transmission à la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité constitue un incident qui n’est pas joint au fond ; que la cour d’appel a donc méconnu les textes et principe précités et s’est prononcée au terme d’une procédure irrégulière » ;

Attendu que le moyen ne critiquant pas une disposi-tion de l’arrêt attaqué est irrecevable ;

Sur le quatrième moyen de cassation, proposé pour M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, pré-liminaire, 175, 184, 385 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, viola-tion du principe de l’égalité des armes :

« en ce que l’arrêt attaqué a rejeté l’exception de nullité de l’ordonnance de renvoi et a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs que l’article 175 du code de procédure pénale autorise les parties à adresser au magistrat ins-tructeur, dans un délai de un mois ou trois mois, à compter de l’envoi de l’avis de fin d’information des observations écrites ; que ce même article prévoit pour les parties un délai supplémentaire de dix jours ou un mois, à l’issue du délai imparti au procureur de la République pour communiquer ses réquisitions écrites, pour adresser au magistrat instructeur des observations complémen-taires au vu des réquisitions qui leur ont été commu-niquées ; que la jurisprudence a estimé que ce délai de

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de renvoi régulière, la cour d’appel a méconnu les textes précités ;

« 4° alors qu’il résulte des termes clairs et précis de l’ordonnance de renvoi que celle-ci ne comporte aucune prise en compte des observations, déclarées irrecevables, présentées pour le compte de M. RRRR... et ne contient aucune réponse aux articulations de ces observations, liées notamment au caractère erroné de l’analyse au terme de laquelle la cession des actions d’autocontrôle aurait été une modalité de financement de l’acquisition de la société USA Network et à l’existence de circonstances excluant que M. RRRR... ait pu agir sur le fondement de l’information prétendument privilégiée ; qu’en retenant de cette ordonnance qu’elle répondait aux articulations essentielles des observations déposées pour le compte de M. RRRR..., la cour d’appel a tiré de cette décision des constatations directement contraires à son contenu et entaché sa décision d’une contradiction de motifs ;

« 5° alors qu’il appartient à la juridiction correction-nelle saisie par une ordonnance rendue sans que les parties aient pu présenter leurs observations dans les conditions prévues par l’article 175 du code de procédure pénale, ou non conforme aux dispositions de l’article 184 du même code, d’ordonner le renvoi de la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir le juge d’ins-truction aux fins de régularisation ; qu’en se bornant à constater que l’ordonnance de renvoi ne faisait pas grief au prévenu là où il lui appartenait d’annuler le jugement de première instance en tant qu’il n’avait pas ordonné le renvoi de la procédure au ministère public et, après évocation, d’ordonner elle-même un tel renvoi, la cour d’appel a violé les articles 175 et 184 précités, ensemble l’article 385 du code de procédure pénale ;

« 6° alors que la motivation de l’ordonnance de renvoi doit comprendre, outre les réponses aux articulations essentielles des observations des parties et des réquisi-tions du ministère public, l’indication des éléments à décharge comme à charge ; qu’en retenant que la moti-vation de l’ordonnance de renvoi satisfaisait cette exi-gence dès lors qu’elle répondait aux observations de M. RRRR... et qu’elle mentionnait que la majorité des administrateurs ne se souvenait pas si une discussion sur une cession d’actions d’autocontrôle avait eu lieu lors des séances du comité exécutif et du conseil d’admi-nistration des 13 et 14 décembre 2001 là où il résultait du dossier, comme le faisait valoir M. RRRR... que les éléments à décharge portés à la connaissance du juge d’instruction ne se limitaient pas aux déclarations pré-citées des administrateurs et concernaient également, notamment, un courriel adressé le 17 décembre 2001 par M. NNNN... aux administrateurs, dont les termes confir-maient que le financement de l’opération d’acquisition de la société USA Network était assuré par un échange d’actions, sans recours à une cession d’actions d’autocon-trôle sur le marché, un courriel adressé par M. RRRR... le 15 novembre 2001, dont les termes confirmaient qu’il ne s’était pas déterminé au regard de l’information pré-tendument privilégiée et s’était limité à exécuter un plan arrêté et engagé avant même d’avoir pu être en possession de cette information et un rapport des services d’enquête de la Commission des opérations de bourses concluant à l’absence de caractère privilégié de l’information liti-

nistrateurs ne se souvenaient d’aucune discussion sur la vente de l’auto-contrôle lors de la séance du conseil d’ad-ministration du 14 décembre 2001… que M. JJJJJJJJJ..., membre du comité exécutif de VU, a déclaré n’avoir aucun souvenir de l’exposé qui avait été fait sur le finan-cement de l’opération "Tiers One" lors du comité du 13 décembre 2013" ; qu’il ne peut être reproché à un magistrat instructeur qu’en dépit d’éléments à décharge, il ait opté pour le renvoi du prévenu devant le tribunal correctionnel ; qu’il apparaît dès lors que ladite ordon-nance qui, au demeurant ne fait pas grief au prévenu, n’a pas violé les dispositions des articles 175 et 184 du code de procédure pénale ; qu’en conséquence ce moyen tiré de la nullité de l’ordonnance de renvoi sera rejeté, et le juge-ment déféré confirmé sur ce point ;

« et aux motifs supposés adoptés du premier juge que il convient de remarquer qu’en l’espèce le réquisitoire définitif et l’ordonnance de renvoi reposent partiellement sur une motivation commune ; que le réquisitoire étant à décharge, il eût été difficile au juge d’instruction, dès lors qu’il estimait qu’il existait des charges suffisantes justifiant le renvoi du prévenu devant le tribunal correc-tionnel, de renchérir sur le réquisitoire pour rendre son ordonnance encore plus à décharge ; qu’il n’apparaît pas en conséquence, sous peine d’interdire au juge d’instruc-tion de renvoyer devant le tribunal tout mis en examen à l’égard duquel le ministère public a requis un non-lieu, et donc de porter atteinte à son indépendance, que l’ar-ticle 184 n’ait pas été respecté ;

« 1° alors que les parties demeurent recevables à pré-senter leurs observations sur les éléments à charge et à décharge après l’expiration du délai d’un ou trois mois prévu par le troisième alinéa de l’article 175 du code de procédure pénale ; qu’en écartant le moyen pris de l’irrégularité de l’ordonnance de renvoi en tant qu’elle a déclaré irrecevables les observations présentées pour le compte de M. RRRR... par la considération que ces obser-vations avaient été présentées après l’expiration du délai de trois mois précité, la cour d’appel a méconnu les textes précités ;

« 2° alors que les observations présentées après l’expi-ration du délai d’un ou trois mois prévu par le troi-sième alinéa de l’article 175 du code de procédure pénale demeurent recevables dès lors qu’elles ont été suivies de la communication des réquisitions du procureur de la République ; qu’en retenant le contraire, la cour d’ap-pel a méconnu les textes précités ;

« 3° alors que la Cour de cassation est en mesure de constater, par la seule analyse des pièces du dossier, que le juge d’instruction a refusé de tenir compte des obser-vations présentées par M. RRRR... et, en tout état de cause, que l’ordonnance n’a pas répondu aux articula-tions essentielles de ces observations, liées notamment au caractère erroné de l’analyse au terme de laquelle la ces-sion des actions d’autocontrôle aurait été une modalité de financement de l’acquisition de la société USA Network, et portée à ce titre à la connaissance des administrateurs, et à l’existence de circonstances excluant que l’intéressé ait pu agir sur le fondement de l’information prétendu-ment privilégiée, de sorte qu’en regardant l’ordonnance

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l’article 184 du code de procédure pénale, la cour d’ap-pel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être admis ;Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour

M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 et 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 15 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 111-3 et 112-1 du code pénal, L. 465-1, L. 614-1 et L. 615-1 du code monétaire et financier, 6 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale, violation des principes de préémi-nence du droit, de légalité, de nécessité des délits et des peines, d’égalité devant la loi pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« 1° alors que les principes de prééminence du droit, de légalité et de nécessité des délits et des peines s’opposent à ce qu’une personne soit pénalement condamnée sur le fondement d’une disposition contraire à la Constitution ; qu’il résulte des motifs de la décision du Conseil constitu-tionnel n° 2014-453 et 2015-462 QPC du 18 mars 2013 déclarant contraire à la Constitution l’article L. 465-1 du code monétaire et financier dans sa version résultant de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 l’inconstitution-nalité de ce même article dans sa rédaction applicable à la date des faits visés par la prévention, de sorte que la condamnation de M. RRRR... méconnaît les articles 7 de la Convention européenne des droits de l’homme et 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union euro-péenne, ensemble les principes de prééminence du droit, de légalité et de nécessité des délits et des peines ;

« 2° alors que les principes de prééminence du droit, de légalité et de nécessité des délits et des peines imposent que l’abrogation d’une disposition répressive produise ses effets et fasse obstacle aux poursuites dès la publica-tion de la loi ou de la décision qui en a arrêté le principe, peu important le report de la date à laquelle cette loi ou cette décision prend elle-même ses effets ; que l’action publique étant éteinte à l’égard de M. RRRR... par l’effet de l’abrogation de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier décidée en son principe par le Conseil constitu-tionnel dans sa décision n° 2014-453 et 2015-462 QPC du 18 mars 2013, publiée au journal officiel du 20 mars suivant, l’arrêt encourt l’annulation au regard des textes et principes précités ;

« 3° alors que le principe d’égalité devant la loi pénale et l’interdiction de toute discrimination dans la mise en œuvre du principe de légalité des délits et des peines s’opposent à ce qu’une personne soit condamnée sur le fondement d’une loi rendue inapplicable, par une déci-sion du Conseil constitutionnel, à des personnes pla-cées dans une situation similaire ; que n’ayant pu être mis hors de cause par la Commission des opérations de bourse ou la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers à la suite d’une décision de cette auto-rité de ne pas notifier de griefs aux auteurs d’opérations de marché se rapportant à l’information visée par la prévention, au regard d’un rapport d’enquête concluant

gieuse, la cour d’appel a violé l’article 184 du code de pro-cédure pénale » ;

Attendu que, pour rejeter le moyen tiré de la nullité de l’ordonnance de renvoi, la cour d’appel constate que le prévenu a adressé ses observations au juge d’instruc-tion plus de trois mois après l’envoi de l’avis de fin d’in-formation mais deux mois avant le réquisitoire définitif du procureur de la République et que ces observations ne peuvent dès lors entrer dans le champ d’applica-tion du délai supplémentaire de dix jours ou un mois imparti pour permettre de faire des observations sur le réquisitoire ;

Que les juges retiennent ensuite que si les développe-ments de l’ordonnance ne font pas référence aux réqui-sitions de non-lieu du procureur de la République, son préambule vise ce réquisitoire ainsi que la note aux fins de non-lieu déposée par M. RRRR..., que l’article 184 du code de procédure pénale n’a pas instauré de visa à peine de nullité ni d’obligation de répondre à tous les arguments du mis en examen, que l’ordonnance a exposé les faits et répondu aux articulations essen-tielles reprises dans les observations du prévenu ayant relevé les arguments de M. RRRR... concernant son incertitude quant à sa participation au comité exécu-tif du 13 décembre, le fait que l’exercice de ses stocks options résultait d’un projet antérieur et qu’il avait quitté le 6 décembre l’ensemble de ses responsabilités au sein de VU entraînant son souhait d’exercer partie de ses options et ce, dès le 15 novembre 2001, qu’il a été répondu sur le caractère vague et imprécis de l’infor-mation par un renvoi aux développements concernant M. MMMM..., que le juge d’instruction a souligné que la majorité des administrateurs ne se souvenaient pas d’une discussion sur la vente de l’auto-contrôle lors du conseil d’administration du 14 décembre 2001, qu’il ne peut être reproché au juge d’instruction qu’en dépit d’éléments à décharge, il ait opté pour le renvoi du prévenu devant le tribunal correctionnel et qu’ainsi l’ordonnance, qui ne fait pas grief au prévenu, n’a pas violé les dispositions des articles 175 et 184 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’en statuant ainsi, si c’est à tort que les observations de la personne mise en examen adressées au juge d’instruction ont été déclarées irrecevables, le dépassement du délai de trois mois ouvert aux parties par l’article 175, alinéa 3, du code de procédure pénale étant sans incidence sur la recevabilité de ces observa-tions déposées avant les réquisitions du procureur de la République et l’ordonnance de clôture, l’alinéa 6 du texte précité prévoyant seulement que le juge d’ins-truction peut rendre l’ordonnance de règlement sans attendre ces observations, l’arrêt n’encourt cependant pas la censure, dès lors qu’il résulte de ses énoncia-tions que le juge d’instruction a répondu aux articu-lations essentielles des observations de M. RRRR... et que l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correc-tionnel, dont les juges d’appel ont, sans insuffisance ni contradiction, constaté qu’elle précisait les éléments à charge et ceux à décharge, satisfait aux exigences de

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encourues en application de ces deux textes étaient de nature différente ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que ne se trouvent pas applicables à la date des faits de l’es-pèce, reprochés à MM. MMMM... et RRRR..., en décembre 2001 et janvier 2002, les dispositions décla-rées contraires à la Constitution par la décision du 18 mars 2015, mais celles de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001, modifié par l’or-donnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 conver-tissant en euros les sommes exprimées en francs, prévoyant des peines de deux ans d’emprisonnement et de 10 millions de francs, puis de 1,5 million d’euros, d’amende, et celles de l’article L. 621-15 du même code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000, modifié par l’ordonnance du 19 septembre 2000 précité, prévoyant une sanction pécuniaire de 10 millions de francs, puis de 1,5 millions d’euros ;

Attendu que le moyen qui revient à soutenir que les dispositions ayant fondé la déclaration de culpabilité sont contraires à la Constitution est inopérant ;

Qu’il s’ensuit que le moyen doit être écarté ;Sur le cinquième moyen de cassation, proposé pour

M. RRRR..., pris de la violation des articles 14, § 7, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 4 du septième protocole additionnel à cette Convention, L. 465-1, L. 621-14 et L. 621-15 du code monétaire et financier, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, viola-tion du principe ne bis in idem :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs, sur les opérations reprochées à M. MMMM..., que le 7 janvier 2002 Vivendi Universal a annoncé par communiqué de presse la cession de 55 millions d’actions autocontrôle en ces termes : "Vivendi Universal (…) a mandaté Deutsche Bank et Goldman Sachs pour placer sur le marché 55 millions de ses actions d’autocontrôle. Le placement s’est effectué sous la forme d’un "book bulding accéléré" à une fourchette de prix de 60 à 61 euros ; ce prix est identique au prix de revient moyen des actions d’autocontrôle. Il est supérieur de 3 à 4 euros au prix de revient des 65 millions de titres achetés sur le marché en 2001 (dont 35 millions achetées après le 11 septembre à un prix de revient de 48 euros). Le produit de la vente sera pour l’essentiel affecté à la réduction de la dette du groupe Vivendi Universal. Bien que les niveaux de cours actuels ne représentent pas la pleine valeur du titre, cette opération a été décidée aux fins d’optimiser dès le 1er janvier la structure du bilan du Groupe, et de supprimer le risque d’"overhang" (antici-pations de mises sur le marché d’un nombre important de titres) qui pouvait peser sur le titre du fait de l’existence d’un autocontrôle élevé" ; qu’il s’agissait d’une opération de cession sous la forme d’une prise ferme, les deux éta-blissements bancaires s’engageant à vendre les 55 millions

à l’absence de caractère privilégié de cette information, M. RRRR... se trouve dans une situation similaire à celle des personnes ayant bénéficié d’une mise hors de cause formelle par la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers, et dont les poursuites devant la juridiction correctionnelle ne peuvent être continuées en application de la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-453 et 2015-462 QPC du 18 mars 2015 décla-rant contraire à la Constitution l’article L. 465-1 du code monétaire et financier dans sa rédaction résultant de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 ; que la continua-tion de la procédure à son encontre méconnaît ainsi les textes et principes précités » ;

Attendu que par décision du 18 mars 2015, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution :

– l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, alors qu’étaient applicables aux mêmes faits les dispositions de l’article L. 621-15 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, en retenant que les sanctions encou-rues en application de ces deux textes n’étaient pas de nature différente en raison, notamment, de la très grande sévérité de la sanction financière prévue à l’ar-ticle L. 621-15, d’un montant de 10 millions d’euros, la rendant de même nature que les peines de deux ans d’emprisonnement et d’amende de 1,5 million d’euros prévues à l’article L. 465-1 précité,

– la dernière phrase de l’article L. 466-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010,

– au c) et au d) du paragraphe II de l’article L. 621-15 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, les mots "s’est livrée ou tenté de se livrer à une opération d’initié ou »,

– aux articles L. 621-15-1 et L. 621-16-1 du même code, dans leur rédaction issue de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, les mots "L. 465-1 et »,

– l’article L. 621-16 du même code ;Que l’abrogation des dispositions précitées de ces

textes a été reportée au 1er septembre 2016 par le Conseil constitutionnel qui a également prohibé pen-dant la période transitoire les doubles poursuites et les doubles condamnations pour des mêmes faits sur le fondement de ces textes ;

Attendu que, par décision du 14 janvier 2016, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les mots "s’est livrée ou a tenté de se livrer à une opération d’initié ou" figurant au c) et au d) du paragraphe II de l’article L. 621-15 du code moné-taire et financier, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, prévoyant une sanction financière de 1,5 million euros, alors qu’était applicable aux mêmes faits les dispositions de l’ar-ticle L. 465-1 du même code, dans sa rédaction résul-tant de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, prévoyant des peines de deux ans d’emprisonnement et de 1,5 million euros d’amende, en retenant que les sanctions

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écrivait dans un courriel à M. MMMM... qu’il y avait "urgence" à vendre un tel bloc ; que, dans la matinée du 7 décembre 2001, M. MMMM... s’inquiétant de la baisse de l’action BSKYB, dans un courrier à M. NNNN... écri-vait : "Nous n’avons qu’une solution et pas deux : vendre de l’autocontrôle entre 35 et 50 M de titres. Annoncer Tier one cash financé et revenir sur Sky après (…)" ; puis que, dans l’après-midi, il faisait le reproche au président de Vivendi Universal d’avoir averti les administrateurs du projet "Tier One" ce qui obligeait Vivendi Universal à retarder la cession du bloc d’autocontrôle : "il est vrai que plus on se rapproche de l’annonce de Tier One, et particu-lièrement après que tu aies prévenu tes administrateurs, plus il est délicat de faire un gros bought deal sur notre auto-contrôle (…)" ; que, dans sa réponse, M. NNNN... indiquait : "sur les 35 M de titres Vivendi Universal sur lesquels 60 euros représentent une plus-value "de poche" de 400 à défaut de les vendre maintenant nous ne pour-rons que les annuler et ils seront perdus à jamais" ; que, le 8 décembre, M. MMMM... évoquait le projet de cession de 35 millions d’actions d’autocontrôle en ces termes : "Pour Tier 1, nous couvrons le paiement par 1,5 milliard de $ sur B Sky B et pas plus que cela. Nous reste-rons avec 1 milliard de $ 0,75 % de classe A (…), les 2,1 à 3 milliards du bloc Vivendi Universal et le reste 3,5 à 4 milliards de Sky restent non gagés (…). Je suggère de toute façon que nous fassions les 35 millions de Vivendi Universal juste après l’annonce, seule façon pour justifier de ne pas les annuler" ; que, le 13 décembre 2001 était soumise au comité exécutif de Vivendi Universal une documentation, en langue anglaise, d’une quarantaine de pages sur l’acquisition d’USA Networks, l’un des docu-ments intitulés "inancing" (financement) mentionnait, selon sa traduction française :

« il est envisagé de vendre un bloc de 35 millions d’actions d’autocontrôle de VU acquises après le 11 sep-tembre à 47 euros (1,9 milliards de $ à 60 euros par action)" ; que, le 14 décembre 2001, le conseil d’adminis-tration se voyait soumettre le même document.

« Financing", concernant la même opération à la rédaction légèrement différente : "il pourrait être envi-sagé…" ; qu’au cours de ce conseil d’administration, auquel assistait M. MMMM..., sera évoquée la cession de l’autocontrôle par M. NNNN... en ces termes : "Cette lettre (lettre du 13 décembre 2001 de M. MMMM... à l’agence Standard & Poor’s) est totalement cohérente avec ce qui avait été dit au conseil c’est-à-dire la priorité du désendettement, l’éventualité d’une cession d’un bloc de titres d’autocontrôle avec deux conditions : une condi-tion de prix, 60 euros, et la condition d’un "bought deal" c’est-àdire d’une prise ferme par les banques et enfin si cette possibilité n’est pas réalisable, la mise en place d’une alternative sous la forme d’une émission au mois de mars d’une obligation remboursable en actions. Cette lettre est totalement en ligne avec ce qui avait été évoqué au conseil d’administration du 14 décembre 2001 (…). Je ne peux que répéter que l’éventualité d’une cession de titres d’autocontrôle a bien été évoquée lors de ce conseil comme l’un des moyens de désendetter le groupe à l’hori-zon de la première partie de l’année 2002, sans pouvoir être plus précis sur ce point (…). Le souci de transparence vis-à-vis du conseil m’a amené à évoquer une opération

de titres dans la fourchette de prix entre 60 et 61 euros, fixée par référence à une résolution de l’assemblée géné-rale de Vivendi Universal visant un cours plancher de 60 euros, et supportant donc le risque de placement, en contrepartie d’une commission plus importante ; que, le 7 janvier au soir, le placement des titres Vivendi Univer-sal ne bénéficiait pas d’allocation suffisante, les deux éta-blissements bancaires optaient pour rester "collés" avec l’intégralité des 55 millions de titres et les écoulaient sur le marché quelques mois plus tard à un prix sensiblement inférieur à 60 euros ;

qu’ainsi la Deutsche Bank indiquait avoir subi une perte de 380 millions d’euros lors du placement des titres Vivendi Universal et le représentant de cette banque ainsi que celui de Goldman Sachs expliquaient qu’il s’agissait pour eux de la plus grosse perte supportée par leur banque dans une opération de ce type ; que, le 21 décembre 2001, soit seulement seize jours avant la réalisation de la ces-sion de titres d’autocontrôle aux établissements ban-caires Deutsche Bank et Goldman Sachs, M. MMMM... exerçait 15 239 options à 30,91 euros, 67 048 options à 50,02 euros et deux fois 33 524 options à 50,02 euros, soit un total de 149 335 actions, pour un prix estimé de 7,178 millions d’euros et le même jour, et il signait un contrat de vente à terme de ces actions, à échéance au 27 septembre 2002 avec la Société générale gank & trust (SGBT) à Luxembourg, au prix de 59,546 euros l’action, soit pour un montant de 8,892 millions d’euros, lui per-mettant de s’assurer une plus-value de 1,668 million d’eu-ros quelle que soit l’évolution du cours de l’action Vivendi Universal ; que le projet de cession d’autocontrôle avait fait l’objet dès le mois de novembre 2001 de nombreux échanges internes au sein de Vivendi Universal, puis dès le 6 décembre 2001 avec les banques qui avaient été sol-licitées par la société pour faire des propositions de mon-tages relatifs à cette cession, et enfin avec les agences de notations afin de les rassurer sur la situation financière de Vivendi Universal à la suite des acquisitions USA Networks et Echostar ; que, sur les échanges internes à Vivendi Universal, dès novembre 2001, dans des cour-riels internes, avait été évoquée par MM. NNNN..., MMMM... et EEEEEEEEE..., l’opportunité de céder des titres d’autocontrôle, qu’ainsi le 26 novembre, M. EEEEEEEEE... indiquait à M. Guillaume MMMM..., concernant le projet USA Networks : "Concernant ce financement, nous avons deux types de sous-jacents pour le réaliser : soit des actions VE ou BSKYB, soit des actions Vivendi Universal. Dans ce dernier cas, en tant qu’insider [initié] sur la transaction Tier One, il est pro-bablement difficile de réaliser toute transaction en sous-jacent VU avant d’avoir annoncé au marché les termes de la transaction (…)" ; que, le même M. EEEEEEEEE..., dans un courriel du 7 décembre 2001, écrivait : "Nous détenons près de 107 millions d’actions d’autocontrôle, dont 21 millions adossées au SO [stock options] et 33 qu’il est prévu d’annuler. Il en reste donc encore plus de 50 millions à céder si nous le souhaitons ! Les vrais pro-blèmes sont en fait : 1) que nous sommes sur un "pic" de valeur de VU et qu’il est donc très difficile de construire un book important dans ces circonstances et 2) que nous sommes un peu insider [initiés] sur l’action et qu’il sera donc en conséquence difficile de la faire bénir par un avocat…" ; que, le 7 décembre 2001, M. NNNN...

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deal" au début de l’année ; – le faire le plus tôt possible, car je ne suis pas sûr que le marché ne "découvrira pas la barrière à 60 euros"" ; que, sur les engagements pris envers les agences de notation, courant novembre 2001, les agences de notation Moody’s et Standard & Poor’s avaient manifesté leur inquiétude sur la situation finan-cière du groupe ; que M. MMMM..., pour éviter une dégradation de la notation de Vivendi Universal s’était, par courriers confidentiels en date du 13 décembre 2001, engagé auprès de celles-ci à céder des actifs en ces termes : "Vous m’avez interrogé sur les perspectives de delevara-ging (désendettement) et le calendrier de cession d’actifs du groupe Vivendi Universal. Je vous confirme d’abord les propos que M. NNNN... vous avait tenus à l’issue de la fusion concernant la cession de notre exposition dans B Sky B, dont nous souhaitons consacrer la plus grande part au désendettement du groupe, afin de permettre de revenir vers des ratios de crédit centraux pour une société bénéficiant d’un rating BBB. Comme nous l’avons indiqué, le groupe dispose par ailleurs d’une réserve de titres d’autocontrôle non gagés (…) de 48 à 50 millions de titres. Des dispositions d’ordre technique ne nous permet-tant pas de nous engager à vendre ces titres en dessous d’un cours de 60 euros, avant l’assemblée générale d’avril, nous sommes prêts à nous engager sur le calendrier sui-vant de mobilisation de ces actifs ; – si le cours devait s’établir au-dessus de 60 euros, dans des conditions per-mettant de faire un "bought deal" (hors période de black-out) au-dessus de ce seuil, nous cèderions, entre janvier et mars, au moins 35 millions de titres ; – si ceci n’était pas possible, nous émettrions au mois de mars une manda-tory convertible d’une durée d’environ 3 ans sur un sous-jacent d’au moins 35 millions d’actions. Nous vendrions le solde après l’assemblée générale d’avril, et en tout état de cause avant l’été" ; qu’en réponse, Standard & Poor’s diffusait, le 17 décembre 2001, le communiqué suivant, relayé par l’agence Reuters : "l’endettement de Vivendi doit être réduit d’au moins 2 milliards d’euros pendant le premier trimestre 2002 par des cessions d’actifs et d’autres mesures tendant à la réduction de la dette, pour main-tenir sa notation, VU doit donc réduire sa dette signifi-cativement et rapidement (…) de manière à atteindre un ratio dette nette sur Ebitda inférieur à 3 à la fin de l’année 2002" ; que M. KKKKKKKKK..., analyste finan-cier chez Standard & Poor’s en charge d’une mission d’évaluation sur l’impact financier des acquisitions USA Networks et Echostar déclarait lors de son audition par les enquêteurs de la COB ; qu’outre que ses interlocuteurs chez Vivendi Universal étaient MM. EEEEEEEEE... et MMMM... que :

« (…) Nous avons travaillé sur quatre scénarios dis-tincts pour Vivendi Universal à l’époque. Un scénario intégrant uniquement l’acquisition d’Echostar. Un scéna-rio intégrant uniquement l’acquisition d’USA Networks ; Un scénario intégrant ces deux acquisitions. Enfin, un scénario intégrant ces deux acquisitions et une cession d’actions d’autocontrôle pour environ au minimum 2 mil-liards d’euros avant la fin du premier trimestre 2002. Nous avons conclu que l’acquisition d’USA Networks en parti-culier était positive pour Vivendi Universal puisqu’elle lui donnait accès à de fortes positions industrielles aux USA et à une structure financière solide (Ebitda d’environ 600 millions d’euros et cash flow libre d’environ 350 millions

de cession de titres d’autocontrôle qui n’était à cette date qu’une éventualité et, d’autre part, pour les raisons pré-cédemment évoquées, il n’y avait pas lieu à demander d’autorisation formelle du conseil d’administration pour réaliser cette vente. J’ajouterai enfin que dans mon sou-venir, l’éventualité de cette cession n’a provoqué aucune réaction négative ou interrogative de la part d’aucun des administrateurs présents autour de la table" ; que cette dernière observation est à mettre en parallèle avec les déclarations de M. IIIIIIIII..., ancien PDG de la société AXA, président de la Financière Agache Private Equity, membre du conseil d’administration de Vivendi Univer-sal, qui a indiqué "se souvenir que la phrase "il pourrait être envisagé la vente…" avait été présentée au conseil du 14 décembre et qu’elle n’avait rencontré qu’un silence approbateur des administrateurs, l’opération étant appa-rue normale. Aucun calendrier précis n’avait été donné" ; qu’à propos de la teneur des discussions intervenues au cours de ce conseil M. MMMM... a déclaré au magis-trat instructeur : "Je répète seulement qu’au conseil du 14 décembre, nous avons fait une présentation détail-lée de la stratégie de désendettement et des discussions avec les agences de rating… les agences avait une vision positive de l’opération USA Networks, moins positive de l’opération Echostar, et que si nous faisions les deux, il convenait pour ne pas être en permanence à la limite de notre rating de procéder à un désendettement com-plémentaire de l’ordre de 2 milliards d’euros. L’existence de cette mission confiée à Standards & Poor’s ainsi que ses conclusions ont été débattues, ont fait l’objet d’une information et d’un débat au conseil du 14 décembre (…) M. NNNN... a très clairement indiqué que l’une des options de procéder de façon simple à ce désendettement était d’effectuer, dans le courant des trois premiers mois de l’année un "bought deal" sur les actions d’autocontrôle, il a cité le chiffre de 35 millions d’actions ou plus, et il a indiqué que les résolutions de l’assemblée générale et les préoccupations de dilution de l’actionnaire ne nous per-mettaient pas d’envisager de le faire à moins de 60 euros. Il a aussi expliqué que si l’opportunité ne se présentait pas dans le courant du premier trimestre, une autre option aurait été d’émettre une ORA 5 (…). Il y a eu un débat sur ce sujet et les membres du conseil ont été rassurés sur le fait que M. NNNN... n’envisageait pas de vendre à n’importe quel prix, mais seulement à un cours supérieur au cours du jour du conseil et si les conditions de marchés étaient favorables" ; que M. EEEEEEEEE... dans un fax du 26 décembre 2001, adressé à M. MMMM..., et dont l’objet était.

« financement en cours" écrivait notamment : "4) l’absence de liquidité des marchés actions ne nous laisse pas d’autre option que de différer début janvier au plus tôt, la cession de notre bloc de 2Md’E" ; que, dans une note datée du 28 décembre 2001 M. MMMM... écrivait : "cession des titres d’autocontrôle : sur la stratégie, il faut comme le propose M. NNNN... ; – ne pas faire de moné-tisation en fin d’année, ces dispositifs comportent des rigidités. Ils ne sont utiles que pour convaincre le marché qu’on prendra le temps de vendre ce que tout le monde sait qu’on doit vendre. S’agissant des titres d’autocontrôle ils auraient l’effet d’alerter le marché et de créer un ove-rhang à 60 euros ; – placer le maximum de titres, si pos-sible 55 millions au moins 35 millions dans un "bought

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sur l’hypothèse d’une transaction portant sur 35 millions d’actions auto-détenues par Vivendi Universal (…) ; 4 janvier 2002 : – Tard dans la soirée, M. EEEEEEEEE... contacte M. LLLLLLLLL... par téléphone et suggère (…) que Goldman Sachs fasse une proposition pour une cession de bloc portant sur un maximum de 47 millions de titres auto-détenus par Vivendi Universal ; 5 janvier 2002 : – L’équipe de Goldman Sachs poursuit l’examen des modalités éventuelles de cession de blocs de différentes tailles entre 35 et 47 millions d’actions ; – (…) M. EEEEEEEEE... : informe Goldman Sachs que Vivendi Universal ne peut accepter un prix de vente inférieur à E 60 par action (…). Il demande à Goldman Sachs si elle est prêt à faire une proposition pour la ces-sion d’un bloc d’une taille pouvant aller jusqu’à 55 mil-lions d’actions auto-détenues par Vivendi Universal ; – M. LLLLLLLLL... appelle alors M. MMMM... pour lui exprimer sa crainte que le marché soit désagréable-ment surpris par une cession de bloc d’une taille aussi importante que 55 millions d’actions de Vivendi Uni-versal ; – Goldman Sachs poursuit l’étude en interne des prix et conditions envisageables pour une telle transac-tion portant sur un maximum de 55 millions d’actions (…) ; – L’équipe de Goldman Sachs pense à ce stade que la cession du bloc pourrait être reportée après une pro-chaine assemblée générale, au cours de laquelle le prix minimum de E 60 par action serait probablement modi-fié ; 6 janvier 2002 (dimanche) : – M. EEEEEEEEE... informe M. LLLLLLLLL... (…) qu’une autre banque d’affaires s’est proposée pour la cession du bloc des 55 mil-lions d’actions à E 60 par action (…) ; A environ 22:00 heures (heure de Paris), M. EEEEEEEEE... rappelle M. LLLLLLLLL... (…) pour l’informer que l’autre banque d’affaires (…) est la Deutsche Bank (…) ; les conditions définitives sont alors établies : - 55 millions d’actions auto-détenues par Vivendi Universal, la Deutsche Bank garantissant la vente de 60 % du bloc, et Goldman 40 % – prix garanti : E 60 par action – prix proposé aux inves-tisseurs : E60 – E61 par action – commission : E 0,50 par action (…) ; 7 janvier 2002 : – A environ 7:00 heures (heure de Paris), un contrat d’achat est signé par la Deutsche Bank, Goldman Sachs et Vivendi Universal au domicile de M. EEEEEEEEE..." ; que la Deutsche Bank Paris avait présenté à la COB la chronologie suivante : "Aux alentours de mi-décembre 2001, Vivendi Univer-sal a approché Deutsche Bank et, semble-t-il d’autres établissements financiers pour évoquer la possibilité de monétiser une partie de son auto-contrôle (environ 7 % de son capital). Une opération avant Noël n’étant en toutes hypothèses par faisable, il a été décidé de reporter cette étude au début de l’année 2002. Le 1er janvier 2002, Vivendi Universal et Deutsche Bank ont discuté de la possibilité du placement d’un bloc sur le marché, où Deutsche Bank se porterait acquéreur pour son propre compte des titres non souscrits par les investisseurs. Le 6 janvier 2002 l’"Equity Commitments Committee" de Deutsche Bank s’est réuni pour étudier la transaction (…). Ce même jour, Deutsche Bank a approuvé aux côtés de Goldman Sachs l’offre de 55 millions d’actions" (…)" ; que la Société générale avait également été sollicitée par Vivendi Universal pour ses opérations de placement de l’autocontrôle, comme le démontrent les documents saisis au siège de cette banque et évoquant une possible vente

d’euros). Néanmoins, l’impact financier était pénalisant pour le crédit de Vivendi Universal sauf à la condition que la société réalise effectivement au minimum 2 mil-liards d’euros de cession d’actifs avant la fin du premier trimestre 2002. En conséquence de quoi, nous avons indi-qué au management de Vivendi Universal que les notes auraient été dégradées dans les trois premiers scénarios, mais maintenues dans le 4e scénario. A ce moment-là, le management de Vivendi Universal s’est engagé à réa-liser cette cession d’autocontrôle dans les délais prévus (…)" ; que ce dernier a expliqué par ailleurs faisant référence au communiqué publié le 17 décembre 2001 par l’agence Standard & Poor’s portant sur ces deux acquisitions : "cette information [sur la cession du bloc de titres] était couverte par une clause de confidentia-lité, nous ne pouvions pas en faire état de façon explicite, nous avons donc parlé de cessions d’actifs" ; que, sur les contacts avec les banques, la banque Goldman Sachs, qui avait été pressentie aux fins de procéder à la cession du bloc d’auto-contrôle a remis aux enquêteurs de la COB une note relatant la chronologie des contacts préalables : "décembre 2001 : – discussions générales entre l’équipe de Goldman Sachs et Vivendi Universal concernant les dif-férents événements intervenus et les déclarations faites par Vivendi Universal qui ont conduit le marché à anti-ciper une cession d’actifs par Vivendi Universal (annonce d’un investissement et d’une alliance stratégique avec Echostar Communications Corporation, acquisition de USA Networks Inc., annonce faite par M. NNNN... de son intention de réduire substantiellement le ratio endet-tement net Ebitda de Vivendi Universal). – Estimant qu’une possibilité de cession de bloc pourrait se présen-ter, Goldman Sachs décide de s’y préparer en interne et commence à réfléchir aux questions à traiter dans le cadre d’une telle cession ; 21 décembre 2001 : Gold-man Sachs remet à M. MMMM..., un mémorandum intitulé "Monetisation of VU treasury shares and USAi warrants" qui expose des possibilités de financement : y figurent notamment, à titre indicatif et non contractuel, les modalités de cession d’un bloc de 35 millions d’actions auto-détenues par Vivendi Universal" ; que, dans ce mémorandum la banque proposait deux schémas alter-natifs de financement : la cession d’un bloc d’autocontrôle de 35 millions d’actions au prix minimum de 60 euros avant la fin mars 2002, comme exigé par les agences de notation ou l’émission d’une obligation remboursable en actions (ORA) ; qu’il était déconseillé de vendre les actions à une date trop proche de la publication des résul-tats pour 2001, attendue le 9 mars 2002, ou de vendre après la publication du chiffre d’affaires du 1er trimestre, attendue mi-février ; qu’était encore précisé dans cette note : "Nous considérons donc qu’il existe une fenêtre commençant la semaine du 7 janvier jusqu’au tout début février. La prochaine fenêtre commencerait juste après la publication des résultats annuels le 9 mars 2002. 2 janvier 2002 : – M. EEEEEEEEE... (…) contacte M. LLLLLLLLL... et M. MMMMMMMMM... par télé-phone et sollicite des avis et recommandations sur une cession éventuelle d’actions auto-détenues (…). Compte tenu de son expérience, Goldman Sachs estime que c’est le début d’un processus d’enchères. A la suite de cette conversation, Goldman Sachs commence à envisager en interne les modalités d’une cession de bloc en raisonnant

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d’un risque de "derating" (dégradation) de la note de Vivendi Universal par les agences de notation Stan-dard & Poor’s et Moody’s eu égard à la situation d’endet-tement de la société et en avait informé M. NNNN... par une note du 27 novembre 2001 dans laquelle il parlait de « la gravité du problème de rating » tout en précisant "nous sommes donc déjà à la limite (au-delà de la limite) du derating et devons dans le financement de nos acqui-sitions plutôt sur couvrir que jouer avec les chiffres", ce qui l’avait conduit le 13 décembre 2001 à s’engager par écrit auprès de ces deux agences en ces termes : "si le cours devait s’établir au-dessus de 60 euros, dans des conditions permettant de faire un bought au-dessus de ce seuil nous céderions entre janvier et mars au moins 33 millions de titres", engagement qui avait été exposé au conseil d’administration le lendemain dans les mêmes termes et dont l’exécution sera proposée auprès de trois banques dès le début du mois de décembre ; que, s’agis-sant de cet engagement M. MMMM... avait dans un courrier adressé à M. NNNN... pour lui souhaiter ses vœux écrit : "je t’avais dit que je te parlerai des consé-quences personnelles que je tire des séances pénibles et humiliantes que j’ai connues avec les agences de rating (…). J’ai pour la première fois senti passer le vent du bou-let de ce qu’à titre personnel je ne veux pas supporter : une dégradation qui aurait entraîné une crise de trésorerie… dans le cas d’espèce et pour passer ce cap, j’ai dû prendre des engagements avec ton accord pour nous "deleverager" (désendetter) et réduire l’exposition du groupe aux aléas des marchés internationaux" ; que cet engagement avait, dès lors, amené les agences de notation à publier un com-muniqué le 17 décembre 2001 annonçant que "l’endet-tement de Vivendi Universal doit être réduit d’au moins 2 milliards d’euros pendant le premier trimestre 2002 par des cessions d’actifs et d’autres mesures tendant à la réduction de la dette pour maintenir sa cotation" ; que le même jour Vivendi Universal avait annoncé la prise de participation dans la société USA Networks ;

qu’il convient de souligner que le 21 décembre 2001, jour où M. MMMM... va exercer ses stock-options, d’une part la société Goldman Sachs remettait à ce dernier un mémorandum dans lequel la banque proposait deux schémas alternatifs de finan-cement à savoir : "une cession de bloc d’autocontrôle de 35 millions d’actions au prix minimum de 60 euros avant la fin mars 2002, comme exigé par les agences de notation ou l’émission d’une obligation remboursable en actions (ORA). Il était déconseillé de vendre les actions à une date trop proche de la publication des résultats pour 2001, attendue le 9 mars 2002, et de vendre après la publication du chiffre d’affaires du 1er trimestre, atten-due mi-février » et, d’autre part, la Société générale éta-blissait une note évoquant l’achat par la banque de 33 millions d’actions VU pour 2 milliards d’euros au prix unitaire de 60 euros avec la mention "la période de notre engagement est du 7 janvier au 31 janvier 2002" ; que devant le magistrat instructeur M. MMMM... a déclaré "je suis parti le 28 décembre 2001 en laissant des instruc-tions de préparer une opération éventuelle si le marché se portait bien pour le début de l’année", ce qui démontre à l’évidence que dans son esprit cette opération pouvait être imminente ; que si, certes, cette opération présen-tait un aléa à savoir l’établissement du cours du titre

du bloc d’autocontrôle détenu par Vivendi Universal à savoir :

– une note internet du 6 décembre 2001 concernant un projet de cession de bloc d’actions "bloc trade Vivendi Universal" auquel cette banque projetait de participer pour 1 milliard d’euros (cession de 34 millions d’actions),

– une note du 13 décembre 2001 intitulée "Schémas envisageables pour la mobilisation de l’auto-détention" actualisée le 17,

– un mémo du 21 décembre 2001 ayant pour objet : VU – Modalités de mobilisation autocontrôle, mention-nant notamment : "Vente par VU d’environ 33 millions d’actions à 60 euros action, assortie d’une clause réso-lutoire. Période d’activation du 7 janvier au 31 jan-vier 2002. La vente aux banques est "confirmée" dès que le seuil est atteint sur une journée de bourse entre le 7 janvier 2002 et 31 janvier 2002 inclus…" ; qu’était pré-cisé dans un courrier adressé le 24 septembre 2002 par la Société générale à la COB, que dès le début du mois de décembre 2001, la société Vivendi Universal avait pris contact avec cette banque aux fins de lui confier la ces-sion d’un bloc d’actions d’autocontrôle à hauteur de 3 % du capital, bloc évalué à environ 2 milliards d’euros au prix du marché de l’époque qu’une première version de l’opération avait donné lieu à un premier dossier en date du 6 décembre 2001, puis l’opération avait été quelque peu modifiée, comme l’indiquaient les documents du 21 décembre ; que, le 4 janvier 2002, M. EEEEEEEEE... avait saisi M. Brenugat d’une demande formelle de réa-lisation de l’opération, à laquelle la banque n’avait pas donné suite compte tenu notamment du délai trop bref pour mettre en place un "book building" ; sur ce, que le délit d’initié intervient dans l’ordre lui-même et non dans la liquidation ; que l’exercice de ses stockoptions par le prévenu doit s’analyser en une vente d’actions, les-quelles ont été négociées sur un marché réglementé ; que, dès lors, ladite transaction entre dans les prévisions de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier ; qu’il convient de souligner que le cours du titre Vivendi Uni-versal avait atteint le prix de 60 euros (cours le plus haut de 61,05 euros) à trois reprises dans le courant du mois de novembre les 16, 19 et 20 et trois fois au début du mois de décembre (cours le plus haut de 61,90 euros) les 6, 7 et 10 décembre (avant que ne soit pris l’engagement par M. MMMM... le 13 décembre auprès des agences de notation de vendre l’autocontrôle à raison de l’opération Networks annoncée le 17 décembre 2002 par Vivendi Universal) ; qu’après cette date, le cours de bourse redes-cendra en dessous de la barre des 60 euros pour atteindre à nouveau le cours de 60,30 euros à la clôture de la jour-née du 21 décembre, le cours se maintenant au-dessus de 60 euros jusqu’au 7 janvier à l’ouverture des marchés, étant rappelé que les 25, 26, 31 décembre et 1er janvier la bourse était fermée à raison des fêtes, période qui n’était pas propice pour réaliser "un bought deal" ; que le lundi 7 janvier 2002 à la clôture du marché le cours de bourse était de 59,20 euros, qu’il ne cessera de chuter les jours et les semaines et les mois suivants, passant sous la barre des 50 euros le 4 février 2002 et sous la barre des 40 euros le 5 avril 2002 ; qu’il résulte de l’ensemble des éléments ci-dessus développés que dès la fin du mois de novembre 2001, M. MMMM... avait pris conscience

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et donc Vivendi Universal a vendu 55 millions d’actions à Goldman Sachs et Deutsche Bank, ce qui a eu un effet terrible sur le marché. Et sincèrement la société ne s’est jamais remise de cette manœuvre » ;

que devant la cour il a expliqué que cette réponse était à mettre en perspective avec le fait qu’avait été annoncé par M. NNNN... qu’en septembre 33 millions d’actions d’autocontrôle devaient être annulées au plus tard le 31 décembre, ce qui ne se réalisera pas, M. NNNN... ayant donné la préférence à leur vente ; qu’il apparaît ainsi au vu de ces explications que l’information sur la vente d’un bloc de 55 millions d’actions était d’autant plus privilégiée qu’elle impliquait nécessairement la renoncia-tion à l’annulation des 33 millions d’actions, renonciation qui n’avait pas été portée à la connaissance du public ; que devant les enquêteurs de la COB, M. MMMM... avait admis à propos des opérations de cession de blocs d’actions dans le cadre de prises fermes, réalisées par Vivendi Universal que dans quatre cas sur cinq, celles-ci n’avaient eu qu’un impact très limité et éphémère sur le cours, ceci ne s’étant cependant pas vérifié dans le cas du placement de Vivendi Environnement, car dans ce cas le marché s’était mis à craindre que Vivendi Universal ne vende à jet continu ; qu’il convient en outre de sou-ligner qu’à supposer exact, que dans la majorité des cas, une cession d’un bloc d’autocontrôle dans le cadre d’une prise ferme n’avait qu’un impact limité, M. MMMM... ne pouvait méconnaître le fait qu’un élément extérieur pouvait venir influer sur le marché entre le moment où l’opération de cession du bloc était décidé et celui où elle était réalisée sur le marché, lequel événement pourrait aggraver l’incidence de la cession dudit bloc ; que tel a été le cas en l’espèce, ladite cession ayant été concomitante à un "profit warning" de la société AOL annonçant 40 à 60 milliards d’euros de perte ; qu’ainsi pour éviter tout risque d’aléa supplémentaire susceptible d’influer sur le cours de bourse, il avait tout intérêt à vendre ses stock-options avant le déclenchement de l’opération ; qu’à ce titre M. MMMM... a déclaré « le placement des titres n’a pu se faire (suite à un retournement du marché) et par la suite, la détention de ces titres par des vendeurs identifiés a accru la pression d’offre sur ces titres » ; qu’il est indéniable que cette information était confidentielle, M. KKKKKKKKK..., qui avait été destinataire de cette information à raison du courrier du 13 décembre de M. MMMM..., faisant référence au communiqué publié le 17 décembre 2001 par l’agence Standard & Poor’s a déclaré aux enquêteurs de la COB : "cette information [sur la cession du bloc de titres] était couverte par une clause de confidentialité, nous ne pouvions pas en faire état de façon explicite, nous avons donc parlé de ces-sions d’actifs" ; que le caractère privilégié et confidentiel de cette information résulte des propres déclarations de M. RRRR... qui a expliqué que lorsqu’il avait appris le 7 janvier 2002 la vente du bloc de 55 millions d’actions il avait donné ordre de cesser immédiatement toute vente de ses propres options : "parce que je voulais éviter toute impression d’avoir fait quelque chose d’incorrect ou d’im-propre (…). Je savais que cela apparaitrait bizarre d’avoir vendu des options un jour de bourse avant l’annonce de cette opération de cession de bloc" ; que les opérations liti-gieuses reprochées au prévenu, passées sur le marché le 21 décembre 2001 sont bien intervenues entre le moment

Vivendi Universal à 60 euros, il est constant qu’au plus tard à la date du 13 décembre 2002 l’opération de cession d’actions d’autocontrôle, si elle n’était pas définitivement arrêtée quant à la date de réalisation à raison de cet aléa, et au nombre d’actions à céder, elle était arrêtée dans son principe à savoir que devaient être cédés au moins 35 millions de titres au prix minimum de 60 euros avant la fin du premier trimestre et ce à compter du mois de jan-vier dès qu’une opportunité du marché le permettrait (cours de bourse à 60 euros) ; que dès lors cette informa-tion était suffisamment claire et précise ; que si, certes, le prévenu soutient qu’il est de notoriété chez les profession-nels qu’une vente ferme d’un bloc d’autocontrôle (bought deal) n’affecte pas ou de manière minime et éphémère le cours de la valeur du titre, les professionnels entendus au cours de la procédure n’ont pas eu la même analyse qu’ainsi :

– Mme Laurence NNNNNNNNN..., travaillant au service "relations investisseurs" de Vivendi Universal, chargée d’expliquer la stratégie, les comptes et les perfor-mances opérationnelles des métiers du groupe Vivendi Universal aux investisseurs et aux analystes, a déclaré que lorsque Vivendi Universal avait informé le marché de la décision de céder un bloc de 55 millions de titres, son service avait senti le marché inquiet de cette vente, se demandant pourquoi le groupe avait besoin de ce cash ;

– M. LLLLLLLLL..., responsable de la banque Gold-man Sachs, adressait le 10 décembre 2001 un mail à M. EEEEEEEEE..., s’inquiétant de l’impact très négatif et durable qu’une telle vente de bloc pouvait avoir sur le titre Vivendi Universal ; que , le même M. LLLLLLLLL... ainsi qu’il résulte du descriptif des opérations produit par Goldman Sachs à la COB avait appelé le 5 jan-vier 2002 M. MMMM... pour lui exprimer sa crainte que le marché soit désagréablement surpris par une cession de bloc d’une taille aussi importante que 55 millions d’ac-tions Vivendi Universal ;

– M. PPPP... adressait le 4 février 2002 un mail à M. MMMM... à propos d’une instruction de M. NNNN... d’acheter jusqu’à 500 000 actions Vivendi Universal, avec pour objectif d’ajuster leur performance (de VU) avec celle du Stoxx Media, faisant état de ce que "la contre-performance d’aujourd’hui s’explique à nouveau par l’"overhang" consécutif à notre placement ainsi que par les craintes exprimées par le marché sur les pratiques comptables des grands groupes endettés » ;

– M. KKKKKKKKK... entendu par les enquêteurs sur l’incidence de l’information relative à la cession du bloc sur le cours du titre Vivendi Universal, si elle avait été rendue publique déclarait : "On aurait pu s’attendre à ce que cette cession provoque un abaissement important du cours de l’action, c’est ce qui s’est passé lors de l’annonce à compter du 7 janvier 2002 » ;

– M. RRRR... devant le tribunal arbitral à la suite de la question "quels sont les éléments tels que vous les com-prenez qui étaient véhiculés sur le marché et qui posaient des questions de crédibilité concernant M. NNNN...", répondait : "Cela a réellement commencé avec la vente des actions de Vivendi Universal à je crois Goldman Sachs et Deutsche Bank au début de l’année après que M. NNNN... ait déclaré que VU ne vendrait pas d’actions

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Universal et Seagram, d’échanger immédiatement ou de manière différée leurs actions Seagram contre des actions Vivendi Universal ; que des obligations remboursables en actions avaient été émises en ce sens et, ainsi, lorsqu’un dirigeant ou un salarié exerçait ses stock-options afin de vendre les actions correspondantes, il devait adresser à Merrill Lynch sa demande de levée, puis Vivendi Uni-versal livrait les actions après remboursement des obliga-tions remboursables en actions ; que les actions étaient vendues sur le marché américain des ADS par Merrill Lynch qui en versait le montant à Vivendi Univeral, laquelle versait au dirigeant ou au salarié la différence entre le prix de vente de l’action et le prix d’exercice de l’option ; que, le 3 janvier 2002, M. RRRR... transmettait l’ordre d’exercer 1 456 000 stock-options et de vendre les actions correspondantes au cours minimum de 57 dollars (soit 63,40 euros) ; qu’à l’avant dernier paragraphe du document de passage d’ordre, il déclarait : « j’affirme ne pas exercer d’options pendant les périodes ou je pourrais posséder ou être susceptible de posséder des informations non accessibles au public susceptibles d’avoir un impact sur le cours de l’action, informations obtenues dans le cadre de mes activités professionnelles et en tout cas au moins trente jours avant et un jour après la tenue des CA approuvant des états financiers de Vivendi Universal » ; que M. RRRR... exerçait ainsi :

- 96 000 stockoptions au prix de 35,90 dollars l’action, lesquelles lui avaient été consenties en mars 1992 et venant à échéance le 17 mars 2002 ;

- 160 000 stock-options consenties en mars 1993, au prix de 34,38 dollars et venant à échéance le 1er avril 2002 ;

- 314 000 stock-options consenties en janvier 1993, au prix de 33,83 dollars et venant à échéance le 1er sep-tembre 2003 ;

que, cependant, il ne parvenait à vendre que 570 000 actions le 4 janvier 2002 au prix de 56,86 dollars soit trois jours avant l’annonce de la cession du bloc d’auto-contrôle et renonçait à exercer le solde le 4 janvier 2002 ; qu’il réalisait une plus-value totale de 12,84 millions de dollars, soit compte tenu du cours du dollar au 4 jan-vier 2002 la somme de 9 583 7776 euros ; qu’à ce titre il expliquait encore devant la cour "quand j’ai parlé à un collègue new-yorkais le 3 janvier 2002, M. Doug OOOOOOOOO..., pour lui souhaiter la bonne année, il m’a indiqué que le cours de Vivendi Universal était très élevé, marchait très bien, ce commentaire qui était juste un commentaire libre de la part de Doug a déclenché en moi le souvenir que j’avais cette fenêtre du mois de jan-vier et j’ai pensé qu’à ce prix très élevé, ce serait le bon moment de mettre en route l’exercice de ces options. Donc j’ai appelé la personne qui s’occupait de cela pour moi à New York chez Vivendi Universal, M. Franck PPPPPPPPP... et je lui ai demandé d’organiser la vente des options 1992 1993 avec une limite, un prix plancher de 57 USD et comme je l’ai dit cela correspondait à 63,40 euros. Ceci était le prix le plus haut que le titre Vivendi avait atteint depuis de nombreux mois. Je m’at-tendais à ce que cela prenne un certain temps de revendre toutes ces options à un prix aussi élevé" ; que lors du comité exécutif du 13 décembre 2001, auquel M. RRRR... a vraisemblablement assisté ses initiales figurant sur

où il a été en possession de l’information privilégiée, à savoir au plus tard le 13 décembre 2001 et le moment où elle a été rendue publique le 7 janvier 2002 ; qu’il n’est pas contestable qu’elle a été obtenue à raison de ses fonctions de directeur financier de la société Vivendi Universal ; qu’il convient de souligner que M. MMMM... n’ignorait pas d’une part, que la cession de l’autocontrôle ne pou-vait se déclencher que lorsque le cours de l’action Vivendi Universal atteindrait le prix de 60 euros et, d’autre part, que les analystes financiers avaient accueilli favorable-ment le communiqué du 17 décembre 2001 annonçant la prise de participation dans USA Networks, information de nature à influer positivement sur le cours du titre ; que tel a été le cas en l’espèce, le cours du titre VU à l’ouver-ture du marché le 17 décembre 2001 étant à 54,35 et le cours de clôture à 57,35 euros (après le communiqué), cours qui ne cessera de monter à compter de cette date ; qu’il s’établira ainsi à 59 euros le 19 décembre, puis à 60,30 euros le 21 décembre (le cours le plus haut dans la journée de bourse s’étant établi à 60,45 euros) (jour où M. MMMM... exercera ses stocks options), cours qui sera continuellement au-dessus de 60 euros jusqu’au 7 jan-vier 2002 ; que, dès lors, M. MMMM..., fort de ces infor-mations, savait pertinemment à compter du 21 décembre que le déclenchement de l’opération serait imminent, si le cours se maintenait à 60 euros ; qu’il résulte en défi-nitive, ainsi que les premiers juges l’ont pertinemment relevé que M. MMMM..., qui était le maître d’œuvre de cette opération, était parfaitement à même d’appréhen-der, à la date du 21 décembre 2001, en terme de nombre d’actions (même si le chiffre est passé de 35 à 55 millions, ces chiffres représentaient une part significative du capi-tal de VU), de délai de réalisation et de prix de vente, les tenants et aboutissants de l’opération de cession d’un nombre important de titres d’autocontrôle de Vivendi Universal, opération confidentielle, jusqu’au jour de sa publication le 7 janvier 2002, et qui a été de nature à influer sur le cours de l’action ; que, quelles que soient les considérations fiscales qui ont pu concourir à la décision de M. MMMM... de lever ses options, celles-ci n’étaient pas à elles seules de nature à justifier un tel choix, ni de permettre à M. MMMM... de s’affranchir de l’obligation d’abstention qui s’imposait à lui au vu des informations privilégiées qu’il détenait dans le cadre de ses fonctions de directeur financier et directeur général adjoint de la société émettrice et de les utiliser pour réaliser une opération de cession sur ses titres VU qui lui a permis de dégager un gain conséquent ; que dès lors le délit visé à la prévention est caractérisé en tous ses éléments à l’égard de M. MMMM... ; qu’en conséquence le jugement déféré sera confirmé de ce chef ;

« et aux motifs que M. RRRR..., selon procès-verbal du conseil d’administration de Vivendi Universal, en date du 11 décembre 2000, a été nommé en qualité de vice-pré-sident-directeur général pour une durée de quatre ans, fonction dont il a démissionné le 6 décembre 2001 et dont il a été pris acte au cours du conseil d’adminis-tration du 14 décembre 2001 ; qu’il était également membre du conseil d’administration et vice-président du conseil d’administration, fonctions dont il a démis-sionné en novembre ou décembre 2003 ; que les action-naires de la société Seagram s’étaient vus proposer en décembre 2000 à l’occasion de la fusion entre Vivendi

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mais de quoi ? de la possibilité d’une cession au cours du premier trimestre 2002, il était au courant et en détail puisque cela avait été débattu au cours du conseil du 14 décembre 2001. De la décision définitive de procéder à cette opération et de la négociation des conditions, je n’ai aucune information qui me permette de penser qu’il a été au courant. (…) Avant le 14 décembre 2001 je ne me sou-viens pas de ce qu’ont pu être mes échanges avec M. RRRR... sur ce point. Je répète seulement qu’au conseil du 14 décembre, nous avons fait une présentation détail-lée de la stratégie de désendettement et des discussions avec les agences de rating. Les agences avaient une vision positive de l’opération USA Networks, moins positive de l’opération Echostar, et que si nous faisions les deux, il convenait pour ne pas être en permanence à la limite de notre rating de procéder à un désendettement complé-mentaire de l’ordre de 2 milliards d’euros. L’existence de cette mission confiée à Standard & Poor’s ainsi que ses conclusions ont été débattues, ont fait l’objet d’une infor-mation et d’un débat au conseil du 14 décembre (…) M. NNNN... a très clairement indiqué que l’une des options de procéder de façon simple à ce désendettement était d’effectuer, dans le courant des premiers mois de l’année, un "bought deal" sur les actions d’autocontrôle il a cité le chiffre de 35 millions d’actions ou plus, et il a indiqué que les résolutions de l’assemblée générale et les préoccupations de dilution de l’actionnaire ne nous per-mettaient pas d’envisager de le faire à moins de 60 euros. Il a aussi expliqué que si l’opportunité ne se présentait pas dans le courant du premier trimestre, une autre option aurait été d’émettre une ORA 5 (…). Il y a eu un débat sur ce sujet et les membres du conseil ont été rassurés sur le fait que M. NNNN... n’envisageait pas de vendre à n’importe quel prix, mais seulement à un cours supérieur au cours du jour du conseil et si les conditions de marché étaient favorables" ; et précisait encore : "M. RRRR... était dans le bureau voisin du mien à New York. Nous nous entendions très bien et j’appréciais beaucoup les réflexions et orientations qu’il me donnait. Je faisais donc attention à l’informer le plus possible des sujets financiers importants. Il n’était évidemment pas de son niveau de descendre dans le détail des contacts avec telle ou telle banque" ; que si, certes, le procès-verbal du conseil d’ad-ministration ne fait pas explicitement état de la vente de l’autocontrôle, y est indiqué : "M. NNNN... répond aux questions des administrateurs portant sur la structure, l’impact financier de l’opération, l’organisation future et le rôle des différents dirigeants, l’endettement de Vivendi Universal, l’intérêt stratégique à long terme de cette construction. Le conseil approuve à l’unanimité l’opéra-tion et donne tous pouvoirs à M. NNNN..., avec faculté de les subdéléguer, afin de finaliser et signer tout accord définitif relatif à cette opération, sur la base de la présen-tation au conseil" ; qu’il convient de souligner que le transparent intitulé "financing" distribué aux membres du comité de direction le 13 décembre et aux membres du conseil d’administration le 14 décembre, outre qu’il fai-sait état de la possibilité de la vente d’un bloc de 35 mil-lions d’actions de trésorerie, précisait également le mode de financement pour l’acquisition de USA Networks et Echostar, ce qui l’évidence démontre qu’il existait un lien entre ces acquisitions et la nécessité de vendre l’autocon-trôle, ainsi que les agences de notation l’avaient exigé ;

l’ordre du jour une documentation d’une quarantaine de pages en langue anglaise, sur l’acquisition d’USA Networks était remise aux participants, dont un docu-ment intitulé "financing" (financement) mentionnant selon une traduction française : "il est envisagé de vendre un bloc de 35 millions d’actions d’autocontrôle de VU acquises après le 11 septembre à 47 euros (1.9 milliard de dollars à 60 euros par action)" ; que, lors du conseil d’ad-ministration de Vivendi Universal du 14 décembre 2001 auquel il avait pris part, son nom figurant sur le procès-verbal du conseil d’administration et auquel il a reconnu avoir participé, était également remise aux administra-teurs une documentation sur l’opération USA Networks qui comportait le même document "financing" mais avec une mention légèrement différente de celle figurant sur la documentation présentée au comité exécutif de la veille : "il pourrait être envisagé de vendre…" ; que si, certes, une majorité d’administrateurs, plusieurs années après les faits, ne se souvient pas précisément des points abordés au cours du conseil d’administration du 14 décembre 2001 et plus particulièrement celui concer-nant la vente de l’autocontrôle, ce sujet a été incontesta-blement abordé au cours du conseil d’administration du 14 décembre 2001 qu’ainsi : – M. NNNN... devant le magistrat instructeur, faisant état de la lettre du 13 décembre 2001 adressée par M. MMMM... aux agences de notation (dont la teneur a été exposée ci-des-sus) a déclaré : "cette lettre est totalement cohérente avec ce qui avait été dit au conseil, c’est-à-dire la priorité du désendettement, l’éventualité d’une cession d’un bloc de titres d’autocontrôle avec deux conditions : une condition de prix, 60 euros et la condition d’un "bough deal" c’est-à-dire d’une prise ferme par les banques et enfin si cette possibilité n’était pas réalisable la mise en place d’une alternative sous la forme d’un émission au mois de mars d’une obligation remboursable en actions. Cette lettre est totalement en ligne avec ce qui avait été évoqué au conseil d’administration du 14 décembre 2001 (…). Je ne peux que répéter que l’éventualité d’une cession de titres d’au-tocontrôle a bien été évoquée lors de ce conseil comme l’un des moyens de désendetter le groupe à horizon de la première partie de l’année 2002, sans pouvoir être plus précis sur ce point (…). Le souci de transparence vis-à-vis du conseil m’a amené à évoquer une opération de cession de titres d’autocontrôle qui n’était à cette date qu’une éventualité et, d’autre part, pour les raisons précédem-ment évoquées, il n’y avait pas lieu à demander d’autori-sation formelle du conseil d’administration pour réaliser cette vente. J’ajouterai enfin que dans mon souvenir, l’éventualité de cette cession n’a provoqué aucune réac-tion négative ou interrogative de la part d’aucun des administrateurs présents autour de la table" ; que cette dernière observation est à mettre en parallèle avec les déclarations de M. IIIIIIIII..., ancien PDG de la société AXA, président de la Financière Agache Private Equity, membre du conseil d’administration de Vivendi Univer-sal, qui a indiqué "se souvenir que la phrase "il pourrait être envisagé la vente…" avait été présentée au conseil du 14 décembre et qu’elle n’avait rencontré qu’un silence approbateur des administrateurs, l’opération étant appa-rue normale. Aucun calendrier précis n’avait été donné" ; – que M. MMMM... devant le magistrat instructeur déclarait : "M. RRRR... répète qu’il n’était pas au courant,

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pice pour réaliser un "bought deal" ; que, le lundi 7 jan-vier 2002, à la clôture le cours de bourse était de 59,20 euros, qu’il ne cessera de chuter les jours, et les semaines et les mois suivants, passant sous la barre des 50 euros le 4 février 2002 et sous la barre des 40 euros le 5 avril 2002 ; que si, certes M. RRRR... avait fixé un cours plancher élevé à 57 dollars (soit près de 64 euros) il convient de souligner que ce dernier ne pouvait ignorer que les analystes financiers avaient accueilli favorable-ment le communiqué du 17 décembre 2001 annonçant l’acquisition USA Networks, information de nature à influer positivement sur le cours ; ce qui fut le cas en l’es-pèce, le cours d’ouverture du titre VU le 17 décembre au matin s’établissant à 54,35 euros et le cours de fermeture à 57,35 euros, cours qui ne cessera de monter les jours suivants jusqu’à l’ouverture des marchés le 7 janvier étant précisé que le cours de clôture du titre VU le 3 janvier était de 64,10 euros le cours le plus haut ayant été de 64,40 euros ; qu’il résulte de l’ensemble des éléments ci-dessus développés, que si certes, la possibilité de la vente de titres d’autocontrôle de Vivendi Universal sur le mar-ché ne faisait pas partie de la contrepartie payée par Vivendi Universal pour acquérir USA Networks, elle fai-sait partie de l’engagement pris par les dirigeants de Vivendi Universal auprès des agences de notation, qui avaient estimé que la cession d’un bloc d’actions impor-tant d’autocontrôle dans le premier trimestre 2002, com-binée aux acquisitions était la conditions nécessaire pour qu’elles ne dégradent pas la note de Vivendi Universal ; que M. RRRR..., même s’il avait abandonné ses respon-sabilités exécutives au sein de Vivendi Universal à comp-ter du 6 décembre 2001, était un administrateur particulièrement au fait de la situation et des perspec-tives du groupe, et un homme d’affaires avisé et l’un des plus gros actionnaires de la société Vivendi Universal ; qu’à supposer, ce qui parait peu crédible qu’il ait fait l’im-passe sur la lecture des documents qui lui avaient été remis, les 13 et 14 décembre, il ne peut valablement sou-tenir ne pas avoir entendu ou compris, lors du conseil d’administration les explications données tant par M. MMMM... que par M. NNNN... relatives à l’impé-rieuse nécessité, à raison des nouvelles acquisitions, de désendetter le groupe, lequel désendettement devait s’ef-fectuer en priorité par la cession d’un bloc d’autocontrôle d’au moins 35 millions d’actions dans le courant du pre-mier trimestre si les conditions du marché étaient favo-rables à savoir que le cours de bourse atteigne le prix plancher de 60 euros, tel qu’il avait été fixé lors de l’as-semblée générale des actionnaires d’avril 2001, rappelé au cours du conseil d’administration et matérialisé dans les documents qui lui avaient été remis, impérieuse néces-sité qui avait été rappelée dans le communiqué de « Stan-dard & Poor’s » le 17 décembre 2001 ; qu’il apparaît dès lors que ce dernier disposait à compter du 17 décembre 2001 au plus tard, d’une information claire et précise sur le volume du bloc à céder (35 millions au moins) sur les conditions de déclenchement de cette opé-ration avec un cours de bourse à 60 euros ; que, dès lors, M. RRRR..., en apprenant le 3 janvier 2002 ainsi qu’il le prétend, que le cours de l’action Vivendi Universal avait atteint depuis plusieurs jours le prix de 60 euros, ne pou-vait qu’en déduire que l’annonce de la cession du bloc d’autocontrôle était imminente, les fêtes de fin d’années

qu’à ce titre, sera rappelé la déclaration de M. KKKKKKKKK..., analyste financier de Stan-dard & Poor’s : "Nous avons travaillé sur quatre scéna-rios distincts pour Vivendi Universal à l’époque. Un scénario intégrant uniquement l’acquisition d’ECHOS-TAR. Un scénario intégrant uniquement l’acquisition d’USA Networks. Un scénario intégrant ces deux acquisi-tions. Enfin, un scénario intégrant ces deux acquisitions et une cession d’actions d’autocontrôle pour environ au minimum 2 milliards d’euros avant la fin du premier tri-mestre 2002. Nous avons conclu que l’acquisition d’USA Networks en particulier était positive pour Vivendi Uni-versal puisqu’elle lui donnait accès à de fortes positions industrielles aux USA et à une structure financière solide (Ebitda d’environ 600 millions d’euros et cash flow libre d’environ 350 millions d’euros). Néanmoins, l’impact financier était pénalisant pour le crédit de Vivendi Uni-versal sauf à la condition que la société réalise effective-ment au minimum 2 milliards d’euros de cession d’actifs avant la fin du premier trimestre 2002. En conséquence de quoi, nous avons indiqué au management de Vivendi Universal que les notes auraient été dégradées dans les 3 premiers scénarios, mais maintenues dans le 4e scénario. A ce moment-là, le management de Vivendi Universal s’est engagé à réaliser cette cession d’autocontrôle dans les délais prévus (…)" ; ainsi que la déclaration de M. Licoys directeur général de Vivendi Universal qui indiquait au magistrat instructeur : "je confirme que l’opération de cession de blocs évoquée les 13 et 14 décembre 2001 ne concernait pas directement le financement de l’opération USA Networks, mais s’inscrivait dans l’absolue nécessité de réduire l’endettement du groupe dès 2002. C’était en quelque sorte l’étape suivante après l’acquisition de USA Networks… pour amorcer une politique de désendette-ment pour le groupe, même s’il ne s’agissait pas d’autori-sation formelle parfaite, c’était une absolue nécessité au lendemain d’une acquisition fondamentale aux USA" ; que, le 17 décembre 2001, l’agence de notation Stan-dard & Poor’s diffusait le communiqué suivant, relayé par l’agence Reuters : "L’endettement de Vivendi doit être réduit d’au moins 2 milliards d’euros pendant le premier trimestre 2002 par des cessions d’actifs et d’autres mesures tendant à la réduction de la dette pour maintenir sa cota-tion. VU va donc réduire sa dette significativement et rapidement…" ; sur ce, que l’exercice de ses stock-options par le prévenu doit s’analyser en une vente d’actions, les-quelles ont été négociées sur un marché réglementé ; que, dès lors, ladite transaction entre dans les prévisions de l’article L. 465-1 du code monétaire et financier ; qu’il convient de souligner que le cours du titre Vivendi Uni-versal avait atteint le prix de 60 euros (cours le plus haut de 61,05 euros) à trois reprises dans le courant du mois de novembre les 16, 19 et 20 et à trois reprises au début du mois de décembre (cours le plus haut de 61,90 euros) les 6, 7 et 10 décembre (soit avant la réunion du conseil d’administration du 14 décembre) ; qu’après cette date (10 décembre) le cours de bourse redescendra en dessous de la barre des 60 euros pour atteindre à nouveau le cours de 60,30 euros à la clôture de la journée du 21 décembre, le cours se maintenant au-dessus de 60 euros jusqu’au 7 janvier à l’ouverture des marchés, étant rappelé que les 25, 26, 31 décembre et 1er janvier la bourse était fermée à raison des fêtes, période non pro-

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cession de bloc" ; que les opérations litigieuses reprochées au prévenu, passées sur le marché les 3 et 4 janvier 2002, sont bien intervenues entre le moment où il a été en pos-session de l’information privilégiée, à savoir au plus tard le 17 décembre 2001 (jour du communiqué de Stan-dard & Poor’s) et le moment où elle a été rendue publique le 7 janvier 2002 ; qu’il n’est pas contestable qu’elle a été obtenue à raison de ses fonctions d’administrateur de la société Vivendi Universal ; que si certes M. RRRR... avait démissionné de ses fonctions de directeur exécutif le 6 décembre 2001, il était demeuré administrateur et vice-président du conseil d’administration que dès lors le seul fait de sa démission desdites fonctions ne peut justifier une nécessité impérieuse pour lui de vendre ses stock-options pendant la période où il était initié et où pesait sur lui une obligation d’abstention ; qu’il est incontestable que ce dernier a entendu réaliser un profit matériel ; qu’en conséquence M. RRRR... s’est bien rendu coupable du délit d’initié visé à la prévention, mais à raison de sa qualité d’administrateur de la société Vivendi Universal et non pas à raison de sa qualité de vice-président exécu-tif de ladite société, comme indiqué par erreur dans l’or-donnance de renvoi ; que le jugement déféré sera confirmé sur la déclaration de culpabilité ;

« 1° alors que le principe selon lequel nul ne peut être poursuivi deux fois pour les mêmes faits s’applique pour tous faits identiques, quelle que soit leur qualification, pénale ou administrative, et s’oppose à ce qu’une juri-diction pénale prononce une condamnation du chef de délit d’initié pour des faits que la Commission des opé-rations de bourses a décidé de ne pas poursuivre au vu d’un rapport de ses services d’enquête concluant à l’ab-sence de caractère privilégiée de l’information visée par la prévention ; que M. RRRR... est prévenu pour avoir utilisé une information dont l’absence de caractère privi-légié a été constatée par les services d’enquête de la Com-mission des opérations de bourse dans un rapport qui a conduit cette autorité à écarter des poursuites exercées à l’encontre des dirigeants de la société Vivendi Universal – MM. NNNN... et MMMM... – les griefs qui auraient pu, à l’égard des intéressés, porter sur l’utilisation de cette information dans une opération de marché ; que l’auto-rité administrative indépendante ayant ainsi pris une décision, pour des motifs de droit, de ne pas poursuivre les faits désormais reprochés à M. RRRR..., la condam-nation prononcée à l’encontre de ce dernier par le juge répressif méconnaît le principe ne bis in idem et les textes précités ;

« 2° alors qu’une juridiction correctionnelle saisie de faits de délit d’initié statue après avoir demandé l’avis de l’Autorité des marchés financier ; que cet avis peut prendre la forme de la transmission du dossier de l’en-quête que les services de l’Autorité des marchés financiers ont réalisée ; qu’en omettant de viser ou de mentionner dans ses motifs le rapport d’enquête de la Commission des opérations de bourse du 4 septembre 2003 transmis par l’Autorité des marchés financiers, qui constatait l’ab-sence de caractère privilégié de l’information visée par la prévention, et dont les conclusions étaient expressément

peu propices pour une telle opération venant de se termi-ner ; qu’il ne pouvait ignorer qu’il s’agissait d’une infor-mation confidentielle, s’agissant de la vente envisagée de 35 millions d’actions d’autocontrôle pour une somme totale de 1,9 milliard de dollars (montant indiqué sur les transparents) ou d’environ 2 milliards d’euros (mon-tant annoncé au conseil d’administration) au prix de 60 euros l’action ; information qui fera d’ailleurs l’objet d’une annonce officielle de Vivendi Universal le 7 jan-vier 2002 qui la rendra ainsi publique ; que ce caractère confidentiel ainsi qu’il a été développé ci-dessus, sera rappelé par M. Deslonges lors de son audition par les ins-pecteurs de la COB : « "ette information (sur la cession du bloc de titres) était couverte par une clause de confi-dentialité, nous ne pouvions par en faire état de façon explicite, nous avons donc parlé de cessions d’actifs (com-muniqué du 17 décembre 2001)" ; que cette information était une information privilégiée puisque de nature à influer sur le cours de bourse de l’action à raison de sa nature ainsi que cela été exposé ci-dessus étant rappelé que M. RRRR... devant le tribunal arbitral à la suite de la question "quels sont les éléments tels que vous les com-prenez qui étaient véhiculés sur le marché et qui posaient des question de crédibilité concernant M. NNNN..." avait répondu : "Cela a réellement commencé avec la vente des actions de Vivendi Universal à je crois Goldman Sachs et Deutshe Bank au début de l’année après que M. NNNN... ait déclaré que Vivendi Universal ne vendrait pas d’ac-tions et donc Vivendi Universal a vendu 55 millions d’ac-tions à Goldman Sachs et Deutsche Bank, ce qui a eu un effet terrible sur le marché. Et sincèrement, la société ne s’est jamais remise de cette manœuvre" ; que devant la cour, il a expliqué que cette réponse était à mettre en perspective avec le fait qu’avait été annoncé qu’en sep-tembre 33 millions d’actions d’autocontrôle devaient être annulées au plus tard le 31 décembre ce qui ne se réalisera pas, M. NNNN... ayant donné la préférence à leur vente ; qu’il apparaît ainsi au vu de ces explications que l’information qu’il détenait sur la vente d’un bloc de 35 millions d’actions au moins était d’autant plus privilé-giée qu’elle impliquait nécessairement la renonciation à l’annulation des 33 millions d’actions, information qui n’avait pas été portée à la connaissance du public ; que le caractère privilégié de cette information résulte des propres déclarations de M. RRRR... qui a expliqué : "J’étais très surpris d’avoir appris que cette transaction avait eu lieu, parce que je ne m’y attendais pas du tout et lorsque M. PPPPPPPPP... m’a lu quelque chose provenant d’une dépêche ou d’un journal sur cette cession de bloc, je lui ait dit que je ne savais pas du tout que cette transac-tion avait eu lieu et je lui ait dit d’arrêter immédiatement toute vente de mes propres options" ; qu’à la question sui-vante du juge d’instruction : "pour quelles raisons don-nez-vous à ce moment-là pour instruction à M. PPPPPPPPP... de cesser immédiatement la vente de vos propres options sur le titre Vivendi Universal ?" M. RRRR... a répondu : "parce que je voulais éviter toute impression d’avoir fait quelque chose d’incorrect ou d’im-propre », précisant à la question suivante sur une crainte qu’il aurait eue d’être suspecté d’être initié en cas de pour-suite de ses opérations de vente de titres "je savais que cela apparaîtrait bizarre d’avoir vendu des options un jour de bourse avant l’annonce de cette opération de

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financier, dans sa version issue de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 en vigueur à l’époque des faits, seul le montant de l’amende ayant été converti de francs en euros à compter du 1er janvier 2002 ;

Attendu qu’en statuant ainsi, et dès lors que l’ar-ticle L. 465-1 précité est rédigé en des termes suffisam-ment clairs et précis pour permettre son interprétation, qui entre dans l’office du juge, sans risque d’arbitraire, notamment en ce qui concerne la nature et l’objet des informations privilégiées utilisées par les auteurs du délit pour réaliser des opérations telles que visées par le texte, la cour d’appel a bien fondé sa décision au regard du principe de la légalité des délits et des peines et des dispositions conventionnelles invoquées ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Sur le septième moyen de cassation, proposé pour

M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989, 1er de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, 112-1 du code pénal, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, L. 465-1 du code monétaire et financier, préliminaire et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs, identiques à ceux cités au cinquième moyen de cassation ;

« 1° alors qu’une information relative à un événe-ment n’est précise que si cet événement s’est produit ou si l’on peut raisonnablement penser qu’il se produira ; que, lorsqu’une telle information est accompagnée d’une autre information indiquant qu’une condition préalable est toutefois requise pour que cet événement se produise, elle ne peut être regardée comme précise que si l’on peut raisonnablement penser que cette condition elle-même se réalisera ; qu’en retenant que l’information était pré-cise "à compter du 17 décembre [2001] au plus tard" en tant qu’elle mentionnait la réalisation future de la ces-sion au prix de 60 euros des actions d’autocontrôle sans rechercher, ainsi qu’il lui était demandé si cette informa-tion permettait raisonnablement de penser qu’un accord avec une banque allait être conclu et permettre la réali-sation de la condition fixée pour cette opération, à savoir une cession dans le cadre d’une prise ferme dès le début de l’année 2002, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 2° alors subsidiairement qu’une information men-tionnant un projet d’opération sur le marché n’est pré-cise que si ce projet présente des chances raisonnables d’aboutir ; qu’en se limitant à constater à propos de M. MMMM... que le projet de cession des actions d’auto-contrôle au prix de 60 euros avant la fin du premier tri-mestre de l’année 2002 était arrêté en son principe sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si l’état des discus-sions avec les banques permettait de regarder le projet prétendument arrêté dans son principe comme présen-

reprises par M. RRRR..., la cour d’appel a violé les textes précités » ;

Sur le cinquième moyen de M. RRRR..., pris en sa première branche :

Attendu que le délit d’initié, pour lequel M. RRRR... a été poursuivi et condamné par la juridiction pénale, n’a pas fait l’objet d’une notification de grief par le rappor-teur de la Commission des opérations de bourse dans son courrier du 12 septembre 2003, ni a fortiori d’une décision de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers de ce chef ;

D’où il suit que le grief, qui invoque le principe ne bis in idem, doit être écarté ;

Sur le cinquième moyen de M. RRRR..., pris en sa seconde branche :

Attendu que le requérant ne saurait se faire un grief de l’absence de visa ou de mention dans l’arrêt attaqué de l’avis donné par la Commission des opérations de bourse par la transmission de son rapport d’enquête du 4 septembre 2003, en application de l’article L. 466-1 du code monétaire et financier alors en vigueur, ce texte ne prévoyant que l’obligation de demander cet avis lequel au demeurant ne lie pas la juridiction pénale sai-sie de poursuites sur le fondement de l’article L. 465-1 du code précité ;

Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;Sur le sixième moyen de cassation, proposé pour

M. RRRR..., pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union euro-péenne, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, L. 465-1 du code monétaire et financier, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de la légalité des délits et des peines :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs, identiques à ceux cités au cinquième moyen de cassation ;

« alors qu’il résulte du principe de légalité des délits et des peines qu’une infraction doit être clairement définie par la loi, condition qui ne se trouve remplie que si l’in-dividu peut savoir, à partir du libellé de la clause perti-nente et, au besoin à l’aide de son interprétation par les tribunaux, quels actes et omissions engagent sa respon-sabilité pénale ; qu’à la date des 3 et 4 janvier 2002 visée par la prévention, le délit d’initié n’était pas clairement défini par la loi, faute de définition précise de la notion d’information privilégiée et des éléments constitutifs de l’infraction, que l’interprétation de ce texte par les juri-dictions judiciaires ne permettait pas de pallier ; que, par suite, et quelles que soient les précisions résultant de textes entrés en vigueur postérieurement à la date des-dits faits, et rétroactivement applicables à ces derniers, la cour d’appel a fait application d’une disposition ne répon-dant pas aux exigences de clarté et de prévisibilité et a méconnu les textes précités » ;

Attendu que, pour déclarer M. RRRR... cou-pable du délit d’initié, l’arrêt prononce par appli-cation de l’article L. 465-1 du code monétaire et

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minée au regard des effets constatés postérieurement à cette diffusion, méconnaissant ainsi l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 5° alors qu’en se bornant à se référer à diffé-rentes analyses portant sur les effets de la cession finale-ment réalisée sans mentionner celle du rapport d’enquête établi par les services d’inspection de la Commission des opérations de bourse qui concluait précisément à l’impossibilité de conclure, au regard des éléments dispo-nibles avant la diffusion publique de l’information, sur les effets possibles d’une telle diffusion à raison de la prise ferme par des banques dans la mesure où cette modalité excluait tout effet négatif sur le marché, et de l’analyse de ces banques qui, ayant accepté l’opération, n’envisa-geaient elles-mêmes aucune baisse du cours, la cour d’ap-pel n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 6° alors qu’en déduisant du courriel adressé à M. EEEEEEEEE... par M. LLLLLLLLL..., responsable de la banque Goldman Sachs, le 10 décembre 2001, que ce dernier avait montré une inquiétude sur l’impact très négatif et durable d’une vente du bloc d’autocontrôle là où il résulte des termes clairs et précis de ce courriel qu’il ne concernait en rien une cession du bloc d’actions d’autocontrôle mais portait sur une toute autre opération financière, relative à la monétisation des actions BSkyB, la cour d’appel a tiré d’une pièce du dossier des consta-tations directement contraires à son contenu et a ainsi entaché sa décision d’une contradiction de motifs ;

« 7° alors que la condition tenant à ce que l’informa-tion permette d’émettre une conclusion quant à un effet possible de l’événement qu’elle mentionne sur le cours de l’instrument financier concerné doit être appréciée au regard de l’événement dont il est constaté qu’il s’est pro-duit ou que l’on peut raisonnablement penser qu’il se pro-duira ; qu’en retenant que l’information confidentielle permettait de conclure que le cours de l’action allait être affecté dans la mesure où la vente de 55 millions d’actions d’autocontrôle était de nature à susciter, par son volume, une inquiétude des opérateurs en tant qu’elle impliquait la renonciation des dirigeants du groupe Vivendi Uni-versal à l’annulation des actions d’autocontrôle, là même où elle constatait que l’information était précise en tant qu’elle portait sur un projet de céder 35 millions d’actions d’autocontrôle au moins, la cour d’appel a apprécié la condition précitée au regard d’un événement – la cession pour un volume de 55 millions d’actions – différent de celui mentionné dans l’information regardée comme pré-cise et a ainsi méconnu l’article L. 465-1 du code moné-taire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 8° alors qu’une information ne présente un carac-tère précis que si elle mentionne un événement qui s’est produit ou dont on peut raisonnablement penser qu’il se produira et dont il est possible de tirer une conclusion sur son effet possible sur le cours de l’instrument finan-cier concerné ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt que M. RRRR... aurait disposé au plus tard

tant des chances raisonnables d’aboutir, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 3° alors que la précision de l’information doit s’ap-précier de manière objective, excluant tout arbitraire, et en fonction du seul contenu de cette information ; qu’en retenant, pour écarter le moyen pris de ce que l’informa-tion délivrée au prévenu mentionnant qu’allait être opé-rée au début de l’année 2002 une cession de 35 millions au moins d’actions d’autocontrôle était imprécise dans la mesure où cette opération était alors présentée comme une simple éventualité et que manquaient à l’intéressé les informations essentielles qu’étaient l’engagement pris par les dirigeants de la société auprès des agences de notation de procéder à une telle opération ainsi que l’urgence et l’ardente nécessité de réaliser cette opération pour désendetter le groupe, qu’en tant qu’administrateur particulièrement au fait de la situation et de la pers-pective du groupe et homme d’affaires avisé, le prévenu avait nécessairement "entendu ou compris" les explica-tions relatives à l’impérieuse nécessité de désendetter le groupe, laquelle avait été confirmée par le communiqué de l’agence Standard & Poors du 17 décembre 2001, la cour d’appel a apprécié le point de savoir si l’on pouvait raisonnablement penser que la cession allait être réalisée en fonction des compétences particulières du prévenu, et non du seul contenu de cette information, et apprécié de manière subjective, et non objective, le caractère précis de l’information ; qu’elle a ainsi violé l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 4° alors qu’une information ne présente un carac-tère précis que s’il est possible d’émettre une conclusion quant à l’effet possible de l’ensemble de circonstances ou de l’événement qu’elle mentionne sur le cours de l’instru-ment financier concerné ; que cette condition doit être appréciée au regard des conclusions qu’aurait pu émettre un investisseur raisonnable en fonction de l’ensemble des informations disponibles avant que cette information ne soit rendue publique (ex ante), et non au regard des effets de cette information constatés postérieurement à cette publication (ex post) ; qu’en retenant qu’il était possible de conclure que l’information relative à une cession d’ac-tions d’autocontrôle pouvait avoir un effet sur le cours des actions du groupe Vivendi Universal en tenant compte d’analyses émanant de professionnels intervenus dans l’opération qui, soit se réfèrent aux effets de l’information constatés postérieurement à la diffusion de l’information – la réaction des investisseurs le jour de la publication de l’information, soit ne mentionnent pas l’effet induit par l’information complémentaire selon laquelle l’opération devait avoir lieu dans le cadre d’une prise ferme par une banque, qui était précisément invoquée par la défense comme un obstacle à la formulation de la moindre conclusion et qui avait déterminé les services d’enquête de la Commission des opérations de bourse à conclure à l’absence de caractère privilégié de l’information, la cour d’appel ne s’est pas référée à ce qu’auraient été les conclusions d’un investisseur raisonnable, n’a pas pris en compte l’ensemble des informations disponibles avant la diffusion de l’information confidentielle et s’est déter-

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du code monétaire et financier, préliminaire et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs, identiques à ceux cités au cinquième moyen de cassation ;

« 1° alors qu’une information n’est de nature à influer sur le cours de la valeur que si un investisseur raison-nable est susceptible de l’utiliser en tant que faisant par-tie des fondements de ses décisions d’investissement ; que cette condition doit être appréciée par référence à la conduite qu’aurait adoptée un investisseur raisonnable ; qu’en se référant à l’analyse des professionnels intervenus dans l’opération, et non à la conduite qu’aurait adoptée un investisseur raisonnable, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-1 du code monétaire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 2° alors qu’une information n’est de nature à influer sur le cours de la valeur que si un investisseur raison-nable est susceptible de l’utiliser en tant que faisant partie des fondements de ses décisions d’investissement ; que la question de savoir si un investisseur raisonnable est sus-ceptible, au moment de prendre une décision d’investis-sement, de tenir compte d’une information donnée doit être appréciée sur la base de l’ensemble des informations dont cet investisseur disposait avant que cette informa-tion ne soit rendue publique (ex ante), et non au regard de ses effets constatés postérieurement à sa diffusion au public (ex post) ; qu’en retenant que l’information était de nature à influer sur le cours en tenant compte d’analyses qui, soit se réfèrent aux effets de l’information constatés postérieurement à la diffusion de l’information – la réaction des investisseurs le jour de la publication de l’information, soit ne mentionnent pas l’effet induit par l’information complémentaire selon laquelle l’opéra-tion devait avoir lieu dans le cadre d’une prise ferme par une banque (préc., analyses de M. LLLLLLLLL... et de M. KKKKKKKKK...), qui était précisément invoquée par la défense comme un obstacle à une influence sur le cours et qui avait déterminé les services d’enquête de la Com-mission des opérations de bourse à conclure à l’absence de caractère privilégié de l’information, la cour d’appel n’a pas pris en compte l’ensemble des informations dispo-nibles avant la diffusion de l’information confidentielle et s’est déterminée au regard des effets constatés posté-rieurement à cette diffusion, méconnaissant ainsi l’ar-ticle L. 465-1 du code monétaire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parle-ment européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 3° alors qu’en se bornant à se référer à diffé-rentes analyses portant sur les effets de la cession finale-ment réalisée sans mentionner celle du rapport d’enquête établi par le service de l’inspection de la Commission des opérations de bourses qui concluait précisément à l’ab-sence d’éléments disponibles avant la diffusion publique de l’information annonçant une baisse du cours à raison

le 17 décembre 2001 d’une information relative à une cession de 35 millions de titres au moins et que le pro-jet d’élever le volume de cession à 55 millions de titres n’a été communiqué à la banque Goldman Sachs que le 4 janvier 2002 au soir, soit dix-huit jours plus tard, par les dirigeants de la société parmi lesquels le prévenu ne figurait pas ; que, dès lors, ayant retenu qu’il était pos-sible de conclure que la cession des actions d’autocontrôle allait avoir un effet sur le cours de l’instrument financier dans la mesure où une cession à hauteur de 55 millions de titres avait suscité des craintes de la part des inves-tisseurs et que ce volume de cession induisait la renon-ciation, par les dirigeants de la société, à l’annulation des actions d’autocontrôle initialement projetée, la cour d’appel ne pouvait tenir l’information pour précise sans constater qu’il pouvait être raisonnablement envisagé, au regard de l’information selon laquelle une cession allait être réalisée sur un volume de 35 millions de titres "au minimum", que la cession allait finalement porter sur un volume de 55 millions de titres ; qu’en omettant de pro-céder à cette constatation nécessaire à la caractérisation du caractère précis de l’information, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-1 du code monétaire et finan-cier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 jan-vier 2003 ;

« 9° alors qu’en retenant que l’information était pri-vilégiée dans la mesure où elle impliquait l’informa-tion, non communiquée au public, d’une renonciation à l’annulation des actions d’autocontrôle, la cour d’appel a caractérisé le délit au regard d’une information prétendu-ment privilégiée qui n’est pas celle visée par la prévention, a ainsi excédé les termes de sa saisine et violé l’article 384 du code de procédure pénale ;

« 10° alors qu’en retenant que l’information relative à une cession d’actions d’autocontrôle était privilégiée dans la mesure où elle impliquait la renonciation à l’annula-tion de 33 millions des actions d’autocontrôle sans déter-miner en quoi la vente de 35 millions "au moins" de ces actions, et non celle de 55 millions finalement réalisée, emportait renonciation à cette annulation ni déduire, le cas échéant, de l’impossibilité de se prononcer sur ce point à raison de l’imprécision des termes "au moins" que l’information litigieuse était elle-même imprécise ni rechercher, ainsi qu’il lui était demandé si la circonstance que les banques avaient placé auprès de leurs clients, sans difficulté au prix prévu, 38,7 des 55 millions d’actions qu’elles avaient elles-mêmes acquises dans le cadre de la prise ferme ne confirmait pas, a posteriori, que la ces-sion pour le montant prétendument porté à la connais-sance de M. RRRR... ne permettait pas de conclure à une renonciation à l’annulation des 33 millions d’actions et, plus largement, à un effet possible sur le cours de l’action, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision » ;

Sur le huitième moyen de cassation, proposé pour M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989, 1er de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, 112-1 du code pénal, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1978, L. 465-1

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des résultats catastrophiques de la société AOL, ce dont il résultait que l’information litigieuse n’avait joué qu’un rôle marginal dans l’évolution du cours, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 8° alors que la condition tenant à ce que l’informa-tion soit de nature à influer sur le cours de l’instrument financier concerné doit être appréciée au regard de l’évé-nement mentionné dans cette information et dont il a été déduit que cette information était précise ; qu’en retenant que l’information confidentielle était de nature à influer le cours de l’instrument financier concerné dans la mesure où la vente de 55 millions d’actions d’autocontrôle était de nature à susciter, par son volume, une inquiétude des opérateurs en tant qu’elle impliquait notamment la renonciation des dirigeants du groupe Vivendi à l’annu-lation des actions d’autocontrôle, là même où elle consta-tait que l’information était précise en tant qu’elle portait sur un projet de céder 35 millions d’actions d’autocon-trôle au moins, la cour d’appel a apprécié la condition précitée au regard d’un événement – la cession pour un volume de 55 millions d’actions – différent de celui au regard duquel l’information a été regardée comme pré-cise, et a ainsi méconnu l’article L. 465-1 du code moné-taire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 9° alors qu’une information n’est de nature à influer sur le cours de la valeur que si un investisseur raison-nable est susceptible de l’utiliser en tant que faisant partie des fondements de ses décisions d’investissement ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt que M. RRRR... aurait disposé au plus tard le 17 décembre 2001 d’une information relative à une cession de 35 millions de titres au moins et que le projet d’élever le volume de cession à 55 millions de titres n’a été communiqué à la banque Goldman Sachs que le 4 février 2002 au soir, soit dix-huit jours plus tard, par les dirigeants de la société parmi lesquels le prévenu ne figurait pas ; que, dès lors, ayant retenu que l’information était de nature à avoir un effet sur le cours de l’instrument financier dans la mesure où une cession à hauteur de 55 millions de titres avait suscité des craintes de la part des investisseurs et que ce volume de cession induisait la renonciation, par les diri-geants de la société, à l’annulation des actions d’auto-contrôle initialement projetée, la cour d’appel ne pouvait tenir l’information pour privilégiée sans constater qu’il pouvait être raisonnablement envisagé, au regard de l’information selon laquelle une cession allait être réa-lisée sur un volume de 35 millions de titres "au moins", que la cession allait finalement porter sur un volume de 55 millions de titres ; qu’en omettant de procéder à cette constatation nécessaire à la caractérisation du carac-tère sensible de l’information visée par la prévention, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-1 du code moné-taire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 10° alors qu’en retenant que l’information était de nature à influer sur le cours dans la mesure où elle impli-quait l’information, non communiquée au public, d’une

de la prise ferme par des banques, dans la mesure où cette modalité excluait tout effet négatif sur le marché, et de l’analyse de ces banques qui, ayant accepté l’opération, n’envisageaient elles-mêmes aucune baisse du cours, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 4° alors qu’en déduisant du courriel adressé à M. EEEEEEEEE... par M. LLLLLLLLL..., responsable de la banque Goldman Sachs, le 10 décembre 2001 que ce dernier avait montré une inquiétude sur l’impact très négatif et durable d’une vente du bloc d’autocontrôle là où il résulte des termes clairs et précis de ce courriel qu’il ne concernait en rien une cession du bloc d’actions d’autocontrôle mais portait sur une toute autre opération financière, relative à la monétisation des actions BSkyB, la cour d’appel a tiré d’une pièce du dossier des consta-tations directement contraires à son contenu et a ainsi entaché sa décision d’une contradiction de motifs ;

« 5° alors qu’une information ne présente un caractère privilégiée que si l’événement ou l’ensemble de circons-tances qu’elle mentionne est par lui-même de nature à avoir une influence sensible sur le cours de l’instrument financier concerné ; qu’en retenant que l’information liti-gieuse présentait un caractère privilégié nonobstant son influence limitée dès lors que cette dernière pouvait être accentuée par la survenance d’un événement extérieur, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-1 du code moné-taire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

« 6° alors qu’une information n’est de nature à influer sur le cours de la valeur que si un investisseur raison-nable est susceptible de l’utiliser en tant que faisant partie des fondements de ses décisions d’investissement et sur la base d’informations dont il dispose avant que ladite information n’ait été rendue publique ; qu’en rete-nant que cette condition pouvait être remplie même en cas d’incidence limitée sur le cours de l’instrument finan-cier dès lors qu’un élément extérieur, comme l’avait été la publication des résultats de la société AOL, pouvait venir influer le marché et rendre sensible la baisse provoquée, sans constater que cette publication et son incidence pos-sible figuraient elles aussi parmi les données dont pouvait disposer un investisseur raisonnable, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-1 du code monétaire et finan-cier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 jan-vier 2003 ;

« 7° alors qu’à supposer que les informations posté-rieures à la publication de l’information puissent être prises en considération pour déterminer si cette même information était de nature à influer sur le cours de l’instrument financier concerné, cette condition ne peut être remplie que si la publication de cette information a été déterminante de l’évolution du cours ; qu’en s’abste-nant de répondre au moyen pris de ce que 38,7 millions d’actions d’autocontrôle, soit 70 % du volume prévu, avaient été placées par les banques le premier jour et que la baisse alors en cours, d’une ampleur limitée jusqu’au 11 janvier 2002, avait affecté plusieurs titres financiers et trouvait ainsi sa cause dans l’annonce, le même jour,

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été destinataire de l’information visée par la prévention, relative à une cession d’actions d’autocontrôle qui allait être opérée dès le début de l’année 2002 ;

« 2° alors qu’en retenant que les explications données au conseil d’administration du 14 décembre 2001 par MM. MMMM... et NNNN... permettaient à M. RRRR... de savoir que la cession d’actions d’autocontrôle, présen-tée comme une éventualité dans les documents commu-niqués, allait être opérée dès le début de l’année 2002 là où il résulte des déclarations de M. NNNN... reproduites dans l’arrêt que ce dernier avait évoqué la cession d’ac-tions comme une éventualité et comme l’un des moyens de désendetter le groupe et de celles de M. MMMM... que M. NNNN... avait indiqué que cette cession était "l’une des options de procéder de façon simple au désendette-ment" et que "si l’opportunité ne se présentait pas dans le courant du premier trimestre, une autre option aurait été d’émettre une OR 5" sans la moindre indication, dans l’une et l’autre de ces déclarations, d’une urgence de pro-céder à ce désendettement et de l’imminence de l’opéra-tion, la cour d’appel a déduit des pièces du dossier des constatations directement contraires à leur contenu et a ainsi entaché sa décision d’une contradiction de motifs ;

« 3° alors qu’en se bornant à se référer aux déclara-tions faites au cours de l’instruction préparatoire par MM. NNNN... et MMMM..., et à en déduire que les intéressés avaient informé le conseil d’administration de la nécessité impérieuse de procéder au désendettement du groupe en priorité par la cession des actions d’auto-contrôle sans procéder à la moindre référence, ne serait-ce pour les écarter, aux pièces du dossier de la procédure ou produites par M. RRRR... sur lesquelles ce dernier appuyait son argumentation, notamment la déclaration de M. Lescure attestant qu’aucune difficulté de tréso-rerie n’avait été évoquée au conseil d’administration et qu’il avait été lui-même surpris par l’annonce, le 7 jan-vier 2002, de l’opération de cession d’actions d’autocon-trôle, les déclarations d’autres administrateurs indiquant ne pas se souvenir d’une discussion sur un projet de ces-sion d’actions d’autocontrôle ou confirmant que les enga-gements à l’égard des agences de notation n’avaient pas été portés à leur connaissance, la délibération du conseil d’administration du 24 avril 2002 attestant, à l’una-nimité, que M. RRRR... n’avait pas eu connaissance de l’intention de la société de vendre les actions d’autocon-trôle ou, enfin, le courriel adressé le 7 janvier 2002 aux administrateurs par M. NNNN... qui présentait la ces-sion d’actions d’autocontrôle sans la moindre référence à une discussion ayant eu lieu devant le conseil d’adminis-tration, et au regard desquelles M. RRRR... faisait valoir que les membres du conseil d’administration ne s’étaient vus présenter la cession des actions d’autocontrôle qu’à titre de simple éventualité sans que la nécessité du pro-jet, comme son urgence et l’imminence de l’opération n’aient été portées à leur connaissance, la cour d’appel a méconnu les articles 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ;

« 4° alors qu’en retenant qu’au 3 janvier 2002 M. RRRR... ne pouvait que déduire de la circonstance que le cours de l’action se situait à 60 euros l’immi-nence de l’opération de cession d’actions d’autocontrôle sans répondre au moyen pris de ce qu’à cette date l’in-

renonciation à l’annulation des actions d’autocontrôle, la cour d’appel a caractérisé le délit au regard d’une infor-mation prétendument privilégiée qui n’est pas celle visée par la prévention, a ainsi excédé les termes de sa saisine et violé l’article 384 du code de procédure pénale ;

« 11° alors subsidiairement encore qu’en retenant que l’information relative à une cession d’actions d’autocon-trôle était de nature à influer sur le cours de l’action dans la mesure où elle impliquait la renonciation à l’annula-tion de 33 millions des actions d’autocontrôle sans déter-miner en quoi la vente de 35 millions "au moins" de ces actions, et non celle de 55 millions finalement réalisée, emportait renonciation à cette annulation ni déduire, le cas échéant, de l’impossibilité de se prononcer sur ce point à raison de l’imprécision des termes « au moins » que l’information litigieuse elle-même était imprécise ni rechercher, ainsi qu’il lui était demandé si la circons-tance que les banques avaient placé sans difficulté au prix prévu 38,7 des 55 millions d’actions qu’elles avaient elles-mêmes acquises dans le cadre de la prise ferme ne confir-mait pas, a posteriori, que la cession pour le montant prétendument porté à la connaissance de M. RRRR... n’était pas de nature à influer sur le cours de l’action, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision » ;

Sur le neuvième moyen de cassation, proposé pour M. RRRR..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989, 1er de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1978, L. 465-1 du code monétaire et financier, préliminaire et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs, identiques à ceux cités au cinquième moyen de cassation ;

« 1° alors qu’ayant constaté que les dirigeants de la société, parmi lesquels ne figurait pas M. RRRR..., considéraient dans leurs échanges antérieurs à la séance du conseil d’administration du 14 décembre 2001 l’opé-ration de cession d’actions d’autocontrôle sur le marché comme urgente et que cette même opération faisait partie de l’engagement qu’ils avaient pris à l’égard des agences de notation, la cour d’appel ne pouvait, pour retenir que M. RRRR... avait reçu l’information selon laquelle cette cession d’actions allait être opérée dès le début de l’année 2002, se borner à constater que les explications données au conseil d’administration du 14 décembre 2001 par MM. MMMM... et NNNN... portaient sur l’impérieuse nécessité de désendetter le groupe à raison des nouvelles acquisitions, lequel désendettement devait s’effectuer en priorité par la cession d’un bloc d’autocontrôle d’au moins 35 millions d’actions sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si ces explications avaient également porté sur l’engagement précité auprès des agences de notation ainsi que sur l’urgence d’un tel désendettement et l’im-minence de l’opération ; qu’en omettant d’effectuer une telle recherche, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa décision quant au point de savoir si le prévenu avait

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mis de tripler sa plus-value ; qu’en définitive ce n’est pas un gain qu’il a réalisé mais une perte ; que, dès lors, son profit correspond non pas à 12 millions de dollars mais au mieux à 2 millions de dollars, et en fait à une perte de 13 millions de dollars ; qu’il n’a pas agi dans la précipi-tation dans la réalisation de son ordre, ayant demandé à M. Franck PPPPPPPPP... le 4 janvier (soit la veille de l’annonce de la cession du bloc puisque la bourse est fer-mée le week-end du 5 et 6 janvier) de l’exécuter tranquil-lement en plusieurs jours ; qu’il a fait preuve d’une totale transparence puisqu’il a déclaré à la SEC son opération, laquelle a immédiatement rendu publique l’information ; que tout son comportement démontre qu’il n’a jamais eu l’intention de profiter d’une position privilégiée pour réaliser une opération au détriment de la communauté des actionnaires et du public ne s’était jamais désintéressé du sort de Vivendi Universal notamment au moment de la crise de juin 2002 ; qu’ainsi au cours de la chute du cours du titre Vivendi Universal au premier semestre 2002, il a gardé toutes ses participations ;

« aux motifs, encore, que les opérations litigieuses reprochées au prévenu, passées sur le marché les 3 et 4 janvier 2002, sont bien intervenues entre le moment où il a été en possession de l’information privilégiée, à savoir au plus tard le 17 décembre 2001 (jour du com-muniqué de Standard & Poor’s) et le moment où elle a été rendue publique le 7 janvier 2002 ; qu’il n’est pas contestable qu’elle a été obtenue à raison de ses fonctions d’administrateur de la société Vivendi Universal ; que si certes M. RRRR... avait démissionné de ses fonctions de directeur exécutif le 6 décembre 2001, il était demeuré administrateur et vice-président du conseil d’administra-tion que dès lors le seul fait de sa démission desdites fonc-tions ne peut justifier une nécessité impérieuse pour lui de vendre ses stock-options pendant la période où il était initié et où pesait sur lui une obligation d’abstention ; qu’il est incontestable que ce dernier a entendu réaliser un profit matériel ; qu’en conséquence M. RRRR... s’est bien rendu coupable du délit d’initié visé à la prévention, mais à raison de sa qualité d’administrateur de la société Vivendi Universal et non pas à raison de sa qualité de vice-président exécutif de ladite société, comme indiqué par erreur dans l’ordonnance de renvoi ;

« et aux motifs, à les supposer adoptés du premier juge que sur l’élément intentionnel, il convient de rap-peler que M. RRRR..., entendu par le juge d’instruction le 28 juin 2007, a déclaré, en datant cette réaction du 7 janvier 2002 : "j’étais très surpris d’avoir appris que cette transaction avait lieu, parce que je m’y attendais pas du tout et lorsque M. PPPPPPPPP... m’a lu quelque chose provenant d’une dépêche ou d’un journal sur cette cession de bloc, je lui ai dit que je ne savais pas du tout que cette transaction avait eu lieu et je lui ai dit d’arrê-ter immédiatement toute vente de mes propres options" ; qu’à la question suivante le juge d’instruction "pour quelles raisons donnez vous à ce moment pour instruc-tion à M. PPPPPPPPP... de cesser immédiatement la vente de vos propres options sur le titre Vivendi Univer-sal ?", M. RRRR... a répondu : "parce que je voulais éviter toute impression d’avoir fait quelque chose d’incorrect ou d’impropre", précisant à la question suivante sur une crainte qu’il aurait eu d’être suspecté d’être initié en cas de

téressé était resté dans l’ignorance des discussions avec les banques et de la possibilité d’obtenir de ces dernières l’accord pour une prise ferme, la cour d’appel n’a pas léga-lement motivé sa décision ;

« 5° alors qu’en retenant que l’information dont M. RRRR... aurait été détenteur le 17 décembre 2001 au plus tard, mentionnant une cession de 35 millions d’ac-tions "au moins", était précise et de nature à influer le cours de l’instrument financier concerné dans la mesure où l’annonce le 7 janvier 2002 d’une cession portant sur 55 millions d’actions d’autocontrôle avait suscité une crainte quant aux besoins de trésorerie du groupe Vivendi Universal et avait été interprétée comme la renonciation à l’annulation des actions d’autocontrôle, sans constater que l’information mentionnant un passage de 35 à 55 millions d’actions d’autocontrôle ou permettant d’envisa-ger ce dernier, à supposer qu’elle existait alors, avait été transmise à M. RRRR... entre le 17 décembre 2001 et la date de réalisation de l’opération de marché litigieuse, la cour d’appel a violé l’article L. 465-1 du code moné-taire et financier, ensemble les articles 1er de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 » ;

Sur le dixième moyen de cassation, proposé pour M. RRRR..., pris de la violation des articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 48 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2 de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989, 2 de la directive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, 111-2, 111-3, 112-1, 121-1 et 121-3 du code pénal, 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, L. 465-1 du code monétaire et financier, préliminaire et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de la présomption d’innocence :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. RRRR... cou-pable de délit d’initié et l’a condamné à une amende de 5 000 000 d’euros assortie d’un sursis à hauteur de 2 500 000 euros ;

« aux motifs que sur les opérations reprochées à M. RRRR... : […] dans ses conclusions tendant à sa relaxe M. RRRR... fait valoir : […] qu’il avait ainsi fait part, le 15 novembre 2001 de son intention d’exercer cer-taines options en fonction de sa décision de rester chez Vivendi Universal ou d’en partir ; qu’il ne disposait que d’une fenêtre étroite en janvier 2002 ; que la prétendue information privilégiée n’a eu aucune influence sur son projet, laquelle aurait dû alors le conduire soit à exercer d’avantage de stockoptions, or il n’en a exercé que 25 % et à avancer son projet ce qui lui aurait permis de gagner plus de ce qu’il a effectivement gagné, car il n’aurait pas interrompu la vente ; qu’il aurait pu aussi agir après que le public eut pris connaissance de cette information privilégiée, ce qui lui aurait permis de faire un gain sup-plémentaire en vendant la totalité de ses stock-options ; que, s’il a interrompu l’ordre le 7 janvier, c’est à raison de préoccupations d’ordre purement moral qu’il a fait pri-mer sur son intérêt personnel qui aurait dû le pousser à poursuivre l’exécution de son ordre, ce qui lui aurait per-

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contrairement à l’évolution future des cours telle qu’elle découlait de cette information ; qu’en subordonnant le renversement de la présomption d’utilisation indue de l’information prétendument privilégiée à l’existence d’une impérieuse nécessité et en s’interdisant de la sorte de répondre au moyen pris de ce qu’en fixant un prix de cession plancher à 63,40 euros, le prévenu avait adopté un comportement contraire à l’évolution à la baisse qu’aurait, selon l’arrêt attaqué, induite l’information litigieuse, la cour d’appel a violé les articles L. 465-1 du code monétaire et financier, 6 de la Convention euro-péenne des droits de l’homme, 48 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et 2 de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, ensemble le principe de la présomption d’innocence ;

« 4° alors qu’en excluant la preuve de l’absence d’uti-lisation, en connaissance de cause, de l’information prétendument privilégiée par la constatation que le pré-venu avait recherché un profit personnel, la cour d’appel a confondu un simple mobile avec l’élément intention-nel de l’infraction et, en tout état de cause, a exclu cette preuve contraire en exigeant la démonstration d’un fait justificatif tiré de la poursuite d’un intérêt autre que per-sonnel ; qu’elle a de la sorte violé les articles L. 465-1 du code monétaire et financier, 6 de la Convention euro-péenne des droits de l’homme, 48 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et 2 de la directive 89/592 du Conseil du 13 novembre 1989 et de la direc-tive 2003/6 CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, ensemble le principe de la présomption d’innocence ;

« 5° alors que la volonté de réaliser un profit matériel n’est de nature à exclure, ni la preuve que cette opération avait un autre fondement que l’information privilégiée, ni celle que l’utilisation de cette information ne présen-tait, en tout état de cause, pas le caractère indu que la directive 2003/6 et l’article L. 465-1 du code monétaire et financier visent à proscrire au nom de l’intégrité des marchés financiers et de la confiance des investisseurs ; qu’en se déterminant au regard de cette circonstance ino-pérante et en s’interdisant ainsi de répondre aux moyens par lesquels le prévenu faisait valoir que l’opération de marché ne trouvait pas son fondement dans l’informa-tion prétendument privilégiée et, en tout état de cause, que cette opération allait à rebours de l’évolution des cours qu’elle aurait, selon les juges du fond, permis d’anti-ciper, la cour d’appel n’a pas légalement motivé sa déci-sion ;

« 6° alors qu’en se référant à la seule circonstance que le prévenu avait recherché un profit personnel en réali-sant l’opération de marché litigieuse, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’utilisation, en connaissance de cause, de l’information privilégiée et n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 7° alors qu’en se bornant, par motifs supposés adop-tés, à relever la conscience, chez le prévenu, du caractère critiquable de ses levées d’options, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’utilisation, en connaissance de cause, de

poursuite de ses opérations de vente de titres ; "je savais que cela apparaîtrait bizarre d’avoir vendu des options un jour de bourse avant l’annonce de cette opération de cession de bloc" ; que ce "repentir" (la renonciation par M. RRRR... à exercer le solde de ses options étant datée par le réquisitoire et l’ordonnance de renvoi, sur la base d’un courrier de Vivendi Universal, du 4 janvier 2002) n’avait pas lieu d’être si le prévenu avait conscience du caractère non critiquable de ses levées d’options ;

« 1° alors qu’il résulte des dispositions de l’ar-ticle L. 465-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable à la date des faits visés par la pré-vention, que le délit d’initié suppose la preuve que la per-sonne détentrice d’une information privilégiée a utilisé en connaissance de cause cette information pour réaliser une opération de marché ; qu’en retenant que le délit était constitué dans la seule mesure où l’opération de marché avait été réalisée au cours d’une période pendant laquelle le prévenu, détenteur d’une information privilégiée, était tenu à une obligation d’abstention sans que l’intéressé soit en mesure de justifier cette opération par une néces-sité impérieuse, la cour d’appel n’a pas caractérisé les élé-ments constitutifs du délit et, à l’inverse, a mis en œuvre une présomption de responsabilité contraire aux disposi-tions alors applicables, violant ainsi les articles 121-1 et 121-3 du code pénal, ensemble l’article L.465-1 du code monétaire et financier ;

« 2° alors que, si l’utilisation, en connaissance de cause, d’une information privilégiée lors de la réalisation d’une opération de marché peut légalement se déduire de la réalisation, par le détenteur d’une information privilégiée, d’une opération de marché se rapportant à cette information, cette présomption ne vaut que jusqu’à preuve contraire et peut être renversée par la démonstra-tion que cette opération a été réalisée sur un autre fon-dement que l’information privilégiée ; qu’en exigeant du prévenu qu’il apporte la preuve d’un motif d’une impé-rieuse nécessité et en s’interdisant de la sorte de répondre au moyen pris de ce qu’à le supposer détenteur de l’in-formation prétendument privilégiée, l’intéressé n’avait pas agi sur le fondement de cette information dès lors que l’opération de marché avait été réalisée en exécution d’un projet arrêté le 15 novembre 2001, soit antérieure-ment à la détention supposée de l’information, que ce projet n’avait subi aucune modification entretemps et que sa date de réalisation avait été déterminée par des contraintes étrangères au contenu de l’information liti-gieuse, la cour d’appel a violé les articles L. 465-1 du code monétaire et financier, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et 48 de la Charte des droits fonda-mentaux de l’Union européenne, ensemble le principe de la présomption d’innocence ;

« 3° alors que la présomption d’une utilisation en connaissance de cause d’une information privilégiée lors de la réalisation par une personne initiée d’une opération de marché peut être renversée par la preuve que cette utilisation ne revêt pas le caractère indu que la directive 2003/6 et l’article L. 465-1 du code monétaire et finan-cier visent à proscrire au nom de l’intégrité des marchés financiers et de la confiance des investisseurs ; que ne réalise aucune utilisation indue de l’information privilé-giée celui qui, en connaissance de cette information, agit

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du groupe, un homme d’affaires avisé et l’un des plus gros actionnaires de VU, qu’il ne peut soutenir ne pas avoir entendu ou compris, lors du conseil d’adminis-tration du 14 décembre 2001, les explications données par MM. NNNN... et MMMM... relatives à l’impé-rieuse nécessité, à raison des nouvelles acquisitions, de désendetter le groupe en priorité par la cession d’un bloc d’auto-contrôle d’au moins 35 millions d’actions au cours du premier trimestre 2002 au prix plancher de 60 euros ;

Que les juges énoncent également que M. RRRR... disposait ainsi au plus tard le 17 décembre 2001, d’une information claire et précise sur le volume du bloc à céder et les conditions de déclenchement de l’opéra-tion, qu’en apprenant le 3 janvier 2002 que le cours de l’action avait atteint pendant plusieurs jours le cours de 60 euros, il ne pouvait qu’en déduire que l’annonce de la cession du bloc d’auto-contrôle était imminente, qu’il ne pouvait ignorer le caractère confidentiel de l’information qui fera l’objet d’une annonce officielle le 7 janvier 2002, que cette information était de nature à influer sur le cours de bourse de l’action, que, selon les déclarations de M. RRRR..., la vente des 55 millions d’actions, alors que M. NNNN... avait annoncé qu’il ne vendrait pas d’actions et qu’il en annulerait 33 millions au plus tard le 31 décembre, a eu un effet terrible sur le marché, que l’information était ainsi d’autant plus privilégiée qu’elle impliquait la renonciation à l’annula-tion des 33 millions d’actions, information non connue du public, que M. RRRR... a indiqué lui-même avoir renoncé, en apprenant la réalisation de l’opération, à la vente de ses propres options pour "éviter toute impres-sion d’avoir fait quelque chose d’incorrect » ;

Que les juges concluent que les cessions reprochées au prévenu, passées sur le marché les 3 et 4 janvier 2002, sont intervenues entre le moment où il a détenu l’infor-mation privilégiée, au plus tard le 17 décembre 2001, en raison de ses fonctions d’administrateur de la société VU, et le jour où celle-ci a été rendue publique le 7 jan-vier 2002, que le seul fait de sa démission de ses fonc-tions de directeur exécutif, le 6 décembre 2001, ne peut justifier une nécessité impérieuse pour lui de vendre ses stocks options pendant cette période où pesait sur lui une obligation d’abstention, qu’il est incontestable qu’il recherchait un profit matériel et qu’il s’est ainsi bien rendu coupable du délit d’initié visé à la prévention ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations et dès lors que les motifs de l’arrêt, qui répondent aux arguments péremptoires des conclusions déposées par le prévenu, permettent de retenir que, d’une part, lesdites infor-mations étaient précises, confidentielles, et de nature à influer sur le cours de la valeur du titre même si le sens de cette influence potentielle était indéterminé, d’autre part, le prévenu avait une connaissance suffisante de l’information le plaçant dans une situation rompant l’égalité avec les investisseurs non initiés et lui permet-tant de se déterminer à réaliser l’opération reprochée et n’a pu, en apportant la preuve contraire, justifier ne pas avoir utilisé l’information privilégiée qu’il détenait pour décider de cette opération, la cour d’appel, qui n’a

l’information privilégiée lors des opérations de marchés litigieuses, et n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 8° alors que l’élément moral de l’infraction s’apprécie au temps de l’action ; qu’en se fondant, par motifs sup-posés adoptés, sur la circonstance que M. RRRR... aurait eu conscience du caractère privilégié de l’information lorsque, le 7 janvier 2002, il avait appris l’opération de cession des actions d’autocontrôle, pour caractériser l’élé-ment intentionnel du délit aux dates des 3 et 4 janvier précédent, la cour d’appel a violé les article 121-3 du code pénal et L. 465-1 du code monétaire et financier ;

« 9° alors qu’en se bornant, par motifs supposés adop-tés, à constater que la date à laquelle M. RRRR... avait ordonné de mettre fin à l’exercice de ses stock-options était mentionnée comme étant le 4 janvier 2002 par le réquisitoire et l’ordonnance de renvoi, sans se pronon-cer directement sur ce point ni constater que la preuve d’une renonciation à la poursuite de l’opération dès cette date était rapportée, cependant que M. RRRR... produisait et analysait devant elle les déclarations de M. PPPPPPPPP... excluant l’hypothèse d’un contrordre avant le 7 janvier, là où les déclarations du prévenu à laquelle elle se référait faisaient elles-même état d’un ordre donné à cette dernière date, soit après l’annonce publique de la cession des actions d’autocontrôle, la cour d’appel a méconnu le principe de la présomption d’inno-cence et les articles préliminaire du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et, à tout le moins, n’a pas légalement motivé sa décision ;

« 10° alors qu’en déduisant des déclarations de M. RRRR... indiquant, dans des termes clairs et précis, que c’est lorsqu’il avait appris, avec surprise, le 7 jan-vier 2002 la cession des actions d’autocontrôle qu’il avait craint que l’on puisse lui reprocher l’utilisation, les 3 et 4 janvier précédant, d’une information privilégiée que ce dernier avait eu conscience, dès ces dernières dates, d’uti-liser cette information, la cour d’appel a déduit desdites déclarations une constatation directement contraire à leur contenu et a entaché sa décision d’une contradiction de motifs » ;

Les moyens étant réunis ;Attendu que, pour déclarer M. RRRR... coupable du

délit d’initié, la cour d’appel retient que le cours du titre VU a atteint 60 euros les 16, 19 et 20 novembre 2001 ainsi que les 6, 7 et 10 décembre, puis le 21 décembre jusqu’au 7 janvier 2002 à l’ouverture des marchés, s’éta-blissant à 64,10 euros le 3 janvier 2002, qu’ensuite le cours du titre ne cessera de chuter, passant en dessous de 50 euros le 4 février 2002 puis en dessous de 40 euros le 5 avril 2002, que si M. RRRR... avait fixé un cours plancher élevé pour la réalisation de ses stocks option, à 57 dollars, soit près de 64 euros, c’est qu’il ne pouvait en effet ignorer l’accueil favorable fait à l’annonce d’acqui-sition de la société USA Networks le 17 décembre 2001, que la possibilité de la vente de titres d’auto-contrôle de VU sur le marché faisait partie de l’engagement pris auprès des agences de notation pour éviter la dégra-dation de la note de la société, que si l’intéressé avait abandonné ses responsabilités exécutives au sein de cette dernière à compter du 6 décembre 2001, il était un administrateur au fait de la situation et des perspectives

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milliards en normes françaises incluant Seagram, laquelle n’a jamais été dissimulée ; que de même l’endet-tement de Vivendi Environnement était parfaitement connu ainsi que celui du groupe ; que le tribunal ne pou-vait valablement prétendre qu’il aurait fait l’impasse sur la dette de Vivendi Environnement si le journaliste ne le lui avait pas rappelé lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000 ; que tous les articles de presse de l’époque mentionnaient le montant de la dette de Vivendi Environnement, notamment : un article de "La Tribune" du 3 octobre 2000, qui précisait que "la dette proforma de Vivendi atteignait au 30 juin 14,5 milliards d’euros, dont 13,3 milliards d’euros pour Vivendi Environnement" ; un article des "Echos" du 30 novembre 2000 spécifiquement consacré à la dette de Vivendi Environnement ; que, pour l’endettement de Seagram, nul ne pouvait l’ignorer puisque Vivendi en faisait clairement état dans le com-muniqué litigieux du 19 décembre qui indiquait "la dette nette de Seagram s’élève à 6,4 milliards de dollars au 30 septembre 2000" ; qu’il avait exposé dans le même interview au journal "les Echos" du 11 décembre 2000 que le prix de cession de l’activité vins et spiritueux devait effacer la dette nette de Seagram, soit "6,5 milliards de dollars pro forma en juin dernier" ; que, surabondam-ment, l’information prétendument omise figurait aussi de manière parfaitement explicite dans les comptes du groupe, diffusés en avril 2001, et dont la sincérité n’a pas été mise en doute ; qu’il ne peut lui être fait grief d’avoir concentré sa communication sur le chiffre de la dette nette proforma de Vivendi Communication, dès lors qu’il a très clairement précisé le périmètre de cet endettement dans les deux communiqués et que l’objet du communi-qué du 19 décembre 2000 était précisément défini "ces-sion de l’activité de vins et spiritueux de Seagram à Diageo et Pernod Ricard" ; que cette communication s’inscrivait dans le prolongement du communiqué du 12 octobre et la présentation aux analystes des 12 et 13 octobre qui évoquaient une dette nette proforma pour l’activité communication de 1,2 milliard d’euros ; que la cession de l’activité vins et spiritueux s’étant négociée à un prix supérieur de 1,3 milliard d’euros au prix initiale-ment estimé, il y avait lieu d’informer les investisseurs de cette évolution et du fait que l’excédent du prix payé annulait ainsi totalement la dette nette de l’activité communication après prise en compte de la cession de la branche vins et spiritueux ; que le recours à la notion de dette pro forma n’est pas un choix de la part de Vivendi, mais une obligation qui lui est faite par les règles comptables et par le règlement général de l’AMF ; que les chiffres pro forma étaient donc parfaitement cohérents avec les comptes arrêtés par la société, certifiés par les commissaires aux comptes et qui prenaient soin de préci-ser : "L’endettement financier net n’est pas directement comparable entre les exercices 2000 et 1999. En effet il ne prend pas en compte au 31 décembre 2000, d’une part l’effet de la cession de l’activité vins et spiritueux (7,9 mil-liards d’euros) et, d’autre part, l’effet de la conversion pour 1,1 milliard d’euros des titres de participation à taux de conversion variable (ACES) qui finiraient dans l’endettement de Seagram, Après prise en compte de ces opérations, l’endettement financier net du groupe sera ramené à 16,5 milliards d’euros dont 13,1 milliards pour l’activité Environnement" ; que la COB lui reprochait

pas dépassé sa saisine, a justifié sa décision, sans porter atteinte aux dispositions conventionnelles invoquées ;

Qu’ainsi, les moyens ne sont pas fondés ;II – Sur les moyens des parties civiles :Sur le premier moyen de cassation, proposé pour

M. UUUU... et autres, parties civiles, représentés par Me Le Prado, pris de la violation des articles L. 465-2 du code monétaire et financier, 121-4, 121-5 du code pénal, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procé-dure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit d’informations fausses ou trompeuses pour agir sur le cours des titres négociés concernant l’interview de M. NNNN... du 11 décembre 2000 – le communiqué de presse du 19 décembre 2000 sur la dette – le communi-qué de presse du 25 septembre 2001 relatif à l’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôle – le communiqué de presse du 25 septembre 2001 relatif au cashflow – la déclaration de M. NNNN... lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 ;

« aux motifs que, sur le communiqué de presse du 19 décembre 2000 et l’interview de M. NNNN... au jour-nal Les Echos le 11 décembre 2000, il est reproché à M. NNNN..., en sa qualité de président-directeur général de la SA Vivendi Universal, et à M. MMMM... en sa qualité de directeur général adjoint et de directeur finan-cier de cette société, d’avoir répandu dans le public par des voies et moyens quelconques des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé, en l’espèce la SA Vivendi Universal en don-nant au public des informations fausses ou trompeuses sur le niveau de l’endettement du groupe Vivendi Univer-sal, en annonçant lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram (communiqué de presse du 19 décembre 2000 et interview dans le journal "Les Echos" du 11 décembre 2000) "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera donc net de dettes pour ses activités communications" (…) alors que l’endettement de Vivendi-Médias et communication s’éle-vait à 12 milliards d’euros en normes comptables fran-çaises au 1er janvier 2001 et, qu’au surplus, l’endettement de Vivendi Environnement s’élevait à 15 milliards d’euros au 1er janvier 2001, soit à cette date, un montant total de la dette du groupe s’élevant à 27 milliards d’euros ; que M. NNNN... soutient à l’appui de ses conclusions de relaxe que l’information prétendument omise a pourtant bien été diffusée au public tant dans les communications litigieuses que dans les autres communications contem-poraines, et que le marché était parfaitement informé sur le niveau d’endettement global en normes françaises du groupes Vivendi Universal, à savoir ; que s’il est incontes-table que le chiffre proforma de l’endettement net de Vivendi Univesral Communication, anticipé à 0 en décembre, s’est finalement élevé à 3,4 milliards d’euros pour l’exercice 2000, cet écart était dû à des facteurs qui ne pouvaient être connus par M. NNNN... avant mars 2001, ce que le jugement, à l’instar des magistrats instructeurs ont parfaitement reconnu ; qu’en ajoutant à cet écart de 3 milliards la dette nette de Seagram (environ 9 milliards d’euros), est reconstituée la dette nette de 12

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l’inverse le cours de bourse a augmenté de près de 9 % dans les jours qui ont suivi, le 17 avril 2001, jour de la dif-fusion à l’AMF du document de référence qui contenait le montant exact de l’ensemble de la dette du groupe ; qu’il serait pour le moins curieux qu’un cours de bourse baisse sur une nouvelle "artificiellement positive" fausse ou trompeuse et monte lorsque la prétendue "vraie" infor-mation, donc par définition "négative" est diffusée ; qu’il s’en déduit que non seulement l’information n’était pas de nature à agir sur les cours, mais en outre que les par-ties civiles, n’ont pu subir aucun préjudice du fait de cette information sur la dette ; que, liminairement, M. MMMM... fait valoir à l’appui de ses conclusions de relaxe que ses fonctions étaient celles d’un directeur financier classique et que n’entrait pas dans ses attribu-tion la communication financière, pour laquelle deux directions chez Vivendi Universal intervenaient ; que son rôle en matière d’information financière était, d’une part, de signer la lettre d’affirmation des comptes et, d’autre part, de fournir dans les ateliers et par les trans-parents les explications nécessaires au marché par le conduit des analystes, son rôle étant important dans la rédaction des communiqués sur les comptes (absents de la prévention), même si la trame était rédigée par M. NNNN... ; que les autres communiqués, notamment ceux portant sur des opérations ou les prévisions étaient en revanche rédigés par la direction de la communica-tion, et dont la décision finale était prise par M. NNNN... ; qu’ainsi il avait rarement l’initiative de la rédaction des communiqués, mais n’était en tout état de cause jamais celui qui donnait "l’imprimatur", la vali-dation finale et la décision de diffuser lui échappant ; que la communication était le domaine du président ; qu’il fait également valoir que l’inexactitude visée par la pré-vention, s’agissant du communiqué du 19 décembre, n’existe pas au motif que ce communiqué faisait état d’une dette "pro forma", laquelle avait été évaluée début octobre pour la branche média et communication à 1,2 milliard et, que depuis cette date, elle n’avait pas été réé-valuée ; que ce n’est que plus tard que des informations étaient remontées à la direction financière en provenance de Seagram et avaient fait apparaître des éléments incon-nus au 19 décembre 2000 ; que dans une note rédigée le 1er février 2001, (adressée à M. NNNN...) au vu des tra-vaux de ses services, il avait indiqué que le montant de la dette pro-forma (en tenant compte de la cession de la branche vins et spiritueux) s’élevait à 1 milliard d’eu-ros, ladite note reflétant la connaissance inexacte qu’avait le groupe de son endettement à cette date, connaissance qui était évolutive et malheureusement incomplète puisque le processus de consolidation fera finalement apparaître une dette nette de 3,38 milliards d’euros à la clôture des comptes en mars 2001 ; qu’ainsi au cours du mois de févier 2001, la direction de Vivendi Univesal s’était aperçue que des éléments dont elle n’avait pas eu connaissance venaient affecter le montant de la dette ; que le décalage dans la remontée de l’information s’expli-quait en effet par le caractère extrêmement récent de la constitution du groupe, le regroupement de Vivendi, Canal+ et Seagram s’étant opéré que le 14 décembre 2000 et il n’avait par définition pas autorité sur la direction financière de Seagram auparavant ; qu’ainsi dès qu’il a été informé, il a intégré les éléments portés à sa connais-

l’écart inexact entre un chiffre de dette annoncé nul et une "dette réelle de 3,5 milliards d’euros", estimant, par ailleurs, de façon erronée qu’il avait imputé sur la dette le produit anticipé de la cession des titres BskyB, alors que la poursuite pénale lui reproche un écart trompeur entre le chiffre de 0 et un endettement effectif de 27 milliards d’euros ; qu’il a été établi, et d’ailleurs plus contesté, y compris par le jugement déféré que jamais n’avait été imputé pour le calcul de la dette le montant de la ces-sion anticipée de BskyB, au 31 décembre 2000 ; que les premiers juges, dans leur raisonnement l’ont condamné pour ce simple écart de prévision, à savoir 3,4 milliards alors qu’il n’a pas été mis en examen de ce chef, mais pour un écart de 27 milliards ; que le caractère faux ou trompeur d’une information s’apprécie au jour de sa dif-fusion ; que la dette de Vivendi Universal était parfaite-ment connue du public, de très nombreux articles de presse en faisant état, notamment un article des Echos du 9 octobre 2000 qui, évoquant les doutes qui subsistent chez les actionnaires, indiquait "la solidité financière de Vivendi Universal n ’est pas en péril. Son endettement net est presque intégralement logé dans Vivendi Environ-nement et ne dépassera pas 12 à 13 milliards d’euros. La future vente des spiritueux de Seagram, au prix anticipé de 7 milliards de dollars environ absorbera la majeure partie du pôle communication" ; que, surtout, tous les actionnaires de Vivendi Universal ont été informés par la mise à disposition d’un prospectus qui avait servi de sup-port à l’assemblée générale extraordinaire, laquelle avait approuvé la fusion à une majorité écrasante de 90 % ; que la lecture de ce document, de 300 pages, évoque l’en-dettement du groupe à 134 reprises, à savoir la ligne de dette de Seagram, à hauteur de 5,37 millions de dollars et l’endettement financier net du groupe au 30 juin 2000 à savoir 21,6 milliards, ce qui permet de constater, qu’à la date du 5 décembre soit quelque jours avant les deux communiqués, prétendument incomplets, les action-naires étaient parfaitement informés de la dette de Vivendi Universal, et qu’il est parfaitement absurde de prétendre que ces mêmes actionnaires auraient pu croire que la dette de plus de 21 milliards aurait disparu quelques jours plus tard ; que cette cette information était par ailleurs disponible à l’ensemble du public, puisqu’elle figurait sur les sites de l’AMP, de Vivendi et Canal + ; que les premiers juges ont procédé par affirmations sans aucune tentative de démonstration en indiquant "que le glissement de la dette à 3,4 milliards n’étaient pas fatale-ment imprévisible à la date de la communication criti-quée" ; qu’or, il n’est pas contesté, que ces éléments sont dus à un retard dans la perception du produit de cession des titres "AOL", l’évolution de la parité euro/dollar et son effet sur la valeur de la dette, les effets d’une grève aux U.S.A. et une augmentation soudaine du besoin en fonds de roulement de Seagram, autant d’éléments par-faitement imprévisibles au jour des communiqués ; qu’enfin le communiqué n’établit pas en quoi l’informa-tion prétendument défaillante aurait été de nature à agir sur le cours ; qu’il est établi que le jour de l’annonce liti-gieuse du 11 25 décembre 2000, le cours a baissé de 1,6 % et également au cours des jours entourant la diffusion de ces deux informations, ce qui exclut qu’elles aient permis un maintien artificiel du cours de l’action, ou a fortiori qu’elles aient eu un effet à la hausse sur le cours ; qu’à

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précisait : "Sur une base pro forma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera donc net de dettes pour ses activi-tés communications, tout en disposant pour les deux années qui viennent tant d’un cashflow libre supé-rieur à 2 milliards d’euros que de la capacité de réaliser certains actifs comme la participation dans BSkyB" ; qu’en revanche, le 12 octobre 2000, Vivendi Universal, commentant la situation et les perspectives de la société à naître Vivendi Universal, née du rapprochement des trois entités Seagram, Vivendi et Canal+, avait publié un com-muniqué indiquant : "La dette de VU sera très limitée, Vivendi Communication présentant -une dette pro forma de 1,2 milliard d’euros et la cession en cours des Vins et Spiritueux devant compenser la dette nette de Seagram" ; que, lors du conseil d’administration du 9 mars 2001, M. MMMM... procédait à une présentation détaillée des comptes 2000 et des objectifs pour l’année 2001, en ces termes : "endettement net était de 25 milliards d’euros à la fin de l’année. Après la cession des vins et spiritueux et la conversion des "Aces" de Seagram, la dette de base pro forma doit être ramenée à 16,5 milliards d’euros (se répartissant en 13,1 milliards d’euros pour vivendi Envi-ronnement et 3,4 milliards d’euros pour Vivendi Univer-sal) ; que le même jour, lors de l’annonce des résultats annuels aux analystes et aux investisseurs financiers, était fait état d’une dette de Vivendi Environ-nement de 13,126 milliards d’euros et de la branche médias et communication, après vente des vins et spiri-tueux de Seagram, à hauteur de 3,338 milliards d’euros conforme à celle annoncée par M. MMMM... lors du conseil d’administration ; que, dans un tableau (en langue anglaise), porté à la connaissance des investis-seurs sur le site internet de Vivendi Universal, le glisse-ment de la dette à 3,4 milliards d’euros à fin 2000 était décrit comme « légèrement supérieur" aux prévisions et expliqué en ces termes par M. MMMM... dans une note adressée à la commission des sanctions : un retard dans la perception du produit de cession de titres AOL pour un montant de 800 millions d’euros, un effet de forte saison-nalité générant une augmentation du besoin en fonds de roulement de Seagram de 500 millions d’euros, l’actuali-sation au regard du marché de la dette Seagram notam-ment en raison d’une variation du taux de change euro/dollar pour un montant de 800 millions d’euros ; que M. MMMM... lors de l’assemblée générale du 24 avril 2001 annonçait « le bilan de votre société est très solide avec une dette du pôle communication, après ces-sion des spiritueux qui est limitée à 3, 4 milliards d’euros ; que ce chiffre était également conforme aux chiffres men-tionnés dans le document de référence pour l’exercice 2000, enregistré auprès de la COB le 17 avril 2001 qui faisait état d’un endettement net consolidé de 25,5 mil-liards d’euros au 31 décembre 2000, dont il était indiqué en note qu’il "ne prend pas en compte (…), d’une part, l’effet de la cession de l’activité Vins et Spiritueux (7,9 milliards d’euros) et, d’autre part, l’effet de la conversion pour 1, 1 milliard d’euros des titres de participation à taux de conversion variable ("ACES") qui figuraient dans l’endettement de Seagram. Après prise en compte de ces éléments, l’endettement financier net du groupe sera ramené à 16,5 milliards d’euros, dont 13,1 milliards pour l ’activité Environnement" ; qu’il est constant que M. MMMM... qui remplissait les fonctions de directeur

sance dans le calcul de la dette et en a informé le conseil d’administration le 9 mars 2001, ainsi que les analystes lors de la présentation des comptes en mars 2001, comme cela ressort de leurs rapports ; que les parties civiles font valoir que la commission des sanctions de l’AMF, puis la cour d’appel ont estimé que le communiqué du 19 décembre qui avançait une dette minorée, voire nulle, en contradiction avec les chiffres réels et qui n’a du reste pas été rectifiée alors qu’elle aurait encore pu l’être le 1er février 2001 était trompeuse ; que la démarche de M. NNNN..., qui visait à intégrer dans les résultats comptables du groupe, des opérations de cession qui n’étaient pas encore finalisées, telle que l’activité spiri-tueux de Seagram, et qui permettait de réduire la dette à zéro, contribuait à induire en erreur les investisseurs et les actionnaires sur l’état de santé du groupe ; que de plus en évoquant des chiffres pro forma, procédé légalement autorisé, M. NNNN... ne se mettait pas à la portée des petits actionnaires, qui ne pouvaient maîtriser l’intégra-lité des subtilités comptables ; que, si la communication du 11 décembre 2001 n’était pas de nature à tromper un investisseur professionnel, elle était de toute évidence propre à tromper les particuliers sur les perspectives de Vivendi Universal, notamment quant à la situation d’en-dettement du groupe et la prise en compte de la dette de Vivendi Environnement par les agences de notations pour l’évaluation du risque Vivendi Universal ; que M. NNNN..., dans un interview du 11 décembre 2000, dans le journal Les Echos, interrogé sur la cession prévue de la branche Vins et spiritueux de la société Seagram à la suite de la fusion Vivendi-Seagram-Canal +, décla-rait : "les propositions seront déposées cette semaine. Le conseil sera en état de choisir le candidat à la fin du mois de décembre, pour que l’opération soit définitivement conclue an courant du premier semestre 2001. Nous choisirons le meilleur prix net d’impôts afin d’effacer la dette nette de Seagram, soit 6,5 milliards de dollars pro forma en juin dernier. Une fois la cession des vins et spiri-tueux réalisée, Vivendi Vivendi Universal aura une dette nette pro forma de 1,2 milliard d’euros, pour un capital de 57 milliards. Mais le groupe compte 1,7 milliard d’eu-ros d’obligations convertibles à 92 euros, dont on peut légitimement penser qu’elles seront toutes converties. Le groupe sera donc vraiment net de dettes au 1er janvier prochain, et disposera, dans les deux ans, d’une marge de manœuvre financière complémentaire de 10 milliards d’euros, grâce à ses cashflow libres et la vente d’actifs, dont notre participation dans BSKYB" ; qu’à la question suivante d’un journaliste : "Vivendi Environnement pré-sente pourtant une dette de quelque 80 milliards de francs…", M. NNNN... répondait ; "Sur le plan comp-table, c ’est vrai que Vivendi Environnement est inté-gré an groupe, mais sur le plan de la gestion, notre filiale est cotée de façon autonome, ce qui lui permet d’utiliser son cashflow pour son développement, comme pour cou-vrir sa dette. Il n’y a pas de confusion possible entre les métiers" ; que 19 décembre 2000, Vivendi Universal publiait un communiqué pour annoncer la cession des vins et spiritueux de la société Seagram à Diageo et Per-nod Ricard pour 8,15 milliards de dollars "sous réserve des autorisations réglementaires des autorités améri-caines", le produit net après impôt de la cession devant s’élever à 7,7 milliards de dollars ; que ce communiqué

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l’intention de tromper le public sur la dette de la branche Média et communication de Vivendi Universal ; qu’en effet, il n’apparaît pas indubitablement établi que les diri-geants de Vivendi Universal aient connu avant le mois de mars 2001 les différents éléments expliquant le glisse-ment de la dette de la branche Média et communications de Vivendi Universal à 3,4 milliards d’euros ; qu’ainsi dans un courrier manuscrit adressé le 29 novembre 2000 par M. MMMM... à M. John Lucziki (directeur du bud-get et de la consolidation), le premier interrogeait le second en ces termes : "puis-je avoir votre analyse de l’augmentation de la dette nette de Seagram de 6t6 à 7,4 ? Ou en serons-nous à la fin de l’année ? Quelle est l’incidence de la saisonnalité ?" ; ce qui démontre que M. MMMM... rencontrait des difficultés pour établir le montant exact de la dette, laquelle résultait selon ses déclarations aux inspecteurs de la COB :

– d’un retard dans la perception du prix de cession des titres AOL, pour un montant de 880 millions d’euros ;

– d’un effet de saisonnalité du besoin en fonds de rou-lement de Seagram pour un montant de 500 millions d’euros ;

– de l’actualisation de la dette de Seagram en raison d’une variation du taux de change euro/dollar pour un montant de 800 millions d’euros ;

que l’explication de ces écarts donnée par M. MMMM..., liée au défaut de communication entre la trésorerie de Seagram et les comptables de Vivendi Uni-versal alors que la "fusion" (officialisée le 5 décembre) ne datait que de quelques jours, paraît pertinente ; que sera souligné que le communiqué du 12 octobre 2000 qui commentait la situation et les perspectives de la société Vivendi Universal, à naître, à la suite de la fusion, et qui annonçait que la dette pro forma de Vivendi Com-munication sera de 1,2 milliard au 1er janvier 2001, la cession en cours des vins et spiritueux étant sous-évaluée à cette époque, n’a pas été considéré comme mensonger par le magistrat instructeur ; qu’il apparaît ainsi que le communiqué du 19 décembre, s’inscrivait dans le prolon-gement de celui du mois d’octobre, lequel tendait à pré-ciser que la cession de l’activité vins et spiritueux s’étant négociée à un prix supérieur de 1,3 milliard d’euros au prix initialement estimé, la branche communication de Vivendi Universal sera nette de dette au 1er janvier 2001 ; qu’en conséquence, au vu de l’ensemble de ces constata-tions, l’élément intentionnel du délit visé à la prévention n’est pas établi à l’égard de M. NNNN... qui sera relaxé ; que le jugement déféré étant infirmé de ces chefs ;

« aux motifs que, sur le communiqué de presse sur les cashflows du 25 septembre 2001 ; qu’il est reproché à MM. NNNN... et MMMM... d’avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant, lors de la présentation des résultats du premier semestre 2001, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités médias et com-munication, alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 millions d’euros comme l’information en avait été donnée aux membres du comité des comptes le 18 sep-tembre 2001 et à ceux du comité exécutif du 26 sep-tembre 2001 ; que Vivendi Universal a indiqué dans un

financier et directeur général adjoint, ne détenait aucun mandat social ; que le conseil d’administration ne l’avait ni désigné, ni investi de pouvoirs particuliers, n’étant pas lui-même administrateur de Vivendi Universal, au nom de laquelle les communiqués étaient diffusés ; qu’il est tout aussi constant qu’il n’était pas personnellement l’au-teur de la communication financière du 19 décembre 2000 dont la rédaction définitive avait été arrêtée par M. NNNN... ; que dès lors le délit de fausse information ne peut lui être reproché au titre de ce com-muniqué ; qu’en conséquence le jugement déféré sera infirmé de ce chef ; que, s’agissant de l’interview au jour-nal "les Echos", du 11 décembre 2000 la cour adoptera les motifs pertinents des premiers juges, qui ont constaté qu’il ne pouvait être considéré comme coauteur d’un communiqué verbal, dont son auteur M. NNNN... dispo-sait de sa liberté de parole ; que, dès lors, les faits ne sont pas caractérisés à son encontre et aucune faute civile en relation avec ces faits ne peut en conséquence lui être imputée ; que si, certes, lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000, M. NNNN... n’a pas spontanément fait état de la dette de Vivendi Environnement, celle-ci a cependant était très clairement rappelée par le journa-liste - 80 milliards de francs – et admise par M. NNNN... qui avait précisé "sur le plan comptable c’est vrai que Vivendi Environnement est intégré au groupe, quand bien même il ait relativisé son impact en expliquant "notre filiale est cotée de façon autonome ce qui lui per-met d ’utiliser son cashflow pour son développement, comme pour couvrir sa dette" ; que, au demeurant, la dette de Vivendi Environnement était connue du public pour avoir fait l’objet d’une part, d’articles de presse dont l’un du 3 octobre 2000, du journal "La Tribune" qui pré-cisait "la dette pro forma de Vivendi atteignait au 30 juin 14,5 milliards d’euros dont 13,3 milliards d’euros pour Vivendi Environnement" et de deux autres articles du journal "Les Echos" du 20 novembre 2000 qui étaient spécifiquement consacrés à la dette de Vivendi Environ-nement intitulés ("la dette n’inquiète plus les investis-seurs") et, d’autre part, pour avoir été évoquée abondamment dans le prospectus mis à dispositions du public et des actionnaires de Vivendi Universal, quelques jours avant l’assemblée générale extraordinaire du 5 décembre 2000, qui avait approuvé la fusion à 90 %, lequel document détaillait la dette de Seagram à hauteur de 5,37 milliards et l’endettement financier net du groupe au 30 juin 2000, à hauteur de 21,6 milliards d’euros ; qu’ils ne pouvaient dès lors se méprendre sur le montant de la dette du groupe qui ne pouvait, compte tenu de son importance, avoir été résorbée en six mois ; que si, certes, dans le communiqué du 19 décembre 2000, dont l’objet était d’annoncer la cession de la branche vins et spiri-tueux de Seagram pour la somme de 8,15 milliards euros, Vivendi Universal pour ses activités communication était présentée, en tenant compte du produit de cette cession (7,7 milliards d’euros) comme nette de dette sur une base pro forma au 1er janvier 2001, alors qu’en réalité la dette de la branche média sera de 3 338 000 euros au 31 décembre 2000, ainsi qu’elle sera annoncée au conseil d’administration et aux investisseurs et analystes finan-ciers le 9 mars 2001, les éléments de la procédure ne per-mettent pas d’affirmer qu’à l’époque de la diffusion dudit communiqué, la direction de Vivendi Universal ait eu

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les transparents présentés au conseil d’administration de Vivendi Uni versal, à la presse et aux analystes financiers mentionnaient bien le chiffre de – 0,02 milliard d’euros ; que, dès lors, le communiqué n’était pas trompeur ; qu’en conséquence, aucune faute civile en relation avec les faits reprochés n’est établie à l’égard des deux prévenus ;

« aux motifs que, sur la diffusion d’informations fausses du fait de l’annonce de l’annulation de trente-trois millions d’actions d’autocontrôle par un communiqué du 25 septembre 2001 : qu’il est reproché à MM. NNNN... et MMMM... d’avoir annoncé au public par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que Vivendi Universal va annuler 33 millions d’actions supplémen-taires, portant à 5 % de son capital les annulations réali-sées depuis fin juin 2001, alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé notamment lors du commu-niqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la nonexécution de cette décision d’annulation de titres ; que M. NNNN... soulève une exception de prescription de l’action publique au motif qu’aucun acte interruptif de prescription ne serait intervenu concernant ces faits depuis le 25 septembre 2001 ; que M. NNNN... a été mis en examen pour ces faits le 16 mai 2007 au vu des réqui-sitoires introductif du 29 octobre 2002 et supplétifs des 13 octobre 2003 (visant la révélation de la COB du 12 septembre 2003 sur la base de son rapport du 4 sep-tembre 2003, et demandant au juge d’instruire sur les communications publiques des dirigeants du groupe Vivendi Universal en 2000, 2001 et 2002) et 30 juin 2005 ; que l’interruption de prescription à l’égard d’une infrac-tion produit un effet interruptif à l’égard des infractions connexes ; qu’en l’espèce, il sera exposé dans les dévelop-pements ci-dessous que les opérations d’acquisition d’USA Networks et d’Echostar, de cession des 55 millions d’actions d’autocontrôlé le 7 janvier 2002 et de renoncia-tion à l’annulation du projet d’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôlé sont liées par une lien évident de connexité, la renonciation à l’annulation conditionnant la faisabilité des autres opérations ; que les investigations des services de police et du juge d’instruction, interrup-tives de prescription, ayant par la suite été diligentées en ce qui concerne ces opérations postérieurement au réqui-sitoire du 13 octobre 2003, la prescription n’était pas acquise à la date de la mise en examen de M. NNNN... ; que les prévenus font valoir à l’appui de leurs conclusions de relaxe que l’annonce faite le 25 septembre 2001 n’était pas mensongère, comme l’ont d’ailleurs admis le magis-trat instructeur et les premiers juges ; que, dans ces condi-tions les éléments constitutifs du délit font défaut, dès lors qu’au jour de la publication litigieuse, les dirigeants avaient réellement l’intention de procéder à l’opéra-tion annoncée, à savoir l’annulation des 33 millions d’ac-tions ; que le fait pour les dirigeants d’avoir modifié leur opinion, située au 9 décembre 2001, soit près de trois mois après la communication critiquée, est hors de la préven-tion ; que la non réalisation d’une prévision, ne peut rétrospectivement la vicier ; que, dès lors, le concept déve-loppé par les premiers juges de rétroactivité du caractère trompeur d’un communiqué n’existe pas en droit positif ; qu’en tout état de cause, la société avait bien informé le marché, à l’occasion des différentes présentations orales et écrites, de cette opération d’acquisition (USA

communiqué de presse du 25 septembre 2001 : "le cash-flow dégagé par les activités Médias et communication a pour la première fois couvert 100 % des dépenses en capi-tal consacrées aux immobilisations corporelles. Au cours du premier semestre 2001, le cashflow disponible a été de plus de 500 millions d’euros (environnement exclu) (…) Pour la première fois également, le cashflow est positif, même après prise en compte des frais financiers, impôts et frais de restructuration ; que, dans le même temps, des transparents (en langue anglaise) ont été présentés au conseil d’administration de Vivendi Universal, à la presse et aux analystes financiers, lesquels indiquaient (traduc-tion en français) : "Le free cashflow est à l’équilibre après intérêts, charges de restructuration et impôts payés, tout en mentionnant le chiffre de 0,02 milliard d’euros" ; que, de même, le procès-verbal du comité des comptes du 18 septembre 2001 mentionnait : "le PCF PACle premier semestre s’établit à E-23 m après intérêts, impôts payés et charges de restructuration, proche du breakeven (…)" ; que MM. NNNN... et MMMM... ont reconnu l’inexacti-tude de l’annonce d’un cashflow net "positif " de l’activité Média et communications ; que M. NNNN... a soutenu qu’il s’agissait d’une erreur de traduction entre la ver-sion anglaise et française du communiqué, expliquant : "la traduction en français était confiée à un prestataire de services extérieur et il a pu arriver que je n’aie pas l’occa-sion ou le temps de lire cette traduction extérieure avant publication" ; que M. MMMM... a également invoqué une erreur de traduction dont il a contesté la caractère significatif, indiquant que les projets de communiqués de presse étaient rédigés en anglais et que, s’agissant des cashflows négatifs, qui étaient passés d’un milliard en 2000 à 20 millions au premier semestre 2001, il était alors approprié d’utiliser la notion de "breakeven" qui signifie "rentrer dans ses frais" ou "à l’équilibre" ; qu’il a encore expliqué qu’au regard de la nette amélioration de cet indicateur entre 2000 et 2001, passé d’un milliard d’euros à - 23 millions d’euros au 30 juin 2001, le groupe avait à bon droit considéré pouvoir annoncer qu’il était par-venu "à l’équilibre" et qu’il n’était pas faux de dire qu’ils avaient atteint le "point mort" ; que le terme de "breake-ven" avait été également utilisé dans les transparents remis aux administrateurs et aux analystes financiers, le 25 septembre 2001, qui mentionnaient le chiffre de – 0,02 milliards d’euros (- 23 millions d’euros), et employé lors de la conférence téléphonique de M. MMMM... avec les analystes à cette même date ; que le communiqué de presse du 25 septembre 2001, faisait uniquement réfé-rence au "cashflow dégagé par les activités Médias et communication" et excluait nettement de son périmètre la branche environnement du groupe ; qu’il ne saurait être tenu compte dans la caractérisation de l’infraction de l’absence de prise en compte dans les chiffres présen-tés du cashflow négatif de la branche environnement ; qu’aux termes de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier susmentionné, l’information fausse doit être de nature à agir sur les cours ; qu’en l’espèce, il n’appa-raît pas établi, dès lors que ce chiffre se situait dans le cadre d’une amélioration sensible de cet indicateur entre 2000 et 2001, qu’une inexactitude portant sur 23 mil-lions d’euros ait été de nature à avoir une influence sur les cours ; que si, certes, le communiqué de presse aurait dû indiquer « légèrement négatif " et non pas "à l’équilibre",

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Vivendi Universal de ses propres actions, à la suite notamment des attentats du 11 septembre ; qu’il appa-raît ainsi que durant la période, du 17 septembre au 2 octobre 2001, Vivendi Universal avait acquis 21 753 069 d’actions à hauteur d’un montant total de 1 016 501 895 euros ; qu’elle avait poursuivi ses achats de titres au 4e trimestre, sur un rythme certes moins élevé à partir du 11 octobre, jusqu’à atteindre 105,7 millions de titres auto-détenus au 31 décembre 2000 ; qu’ainsi selon un tableau remis à l’AMP, le groupe Vivendi Universal déte-nait 83,9 millions d’actions d’autocontrôle et d’ADS au 25 septembre 2001 ; que, sur les tableaux d’opérations d’achats/ventes de titres d’autocontrôlé, de septembre et octobre 2001, la direction de la trésorerie de Vivendi Universal avait porté la mention, à côté des achats réali-sés à partir du 17 septembre et jusqu’au 31 octobre, "achat de titres destinés à être annulés" ; que, si Vivendi Universal avait, les 25 septembre et 14 novembre 2001 effectivement procédé à des annulations d’actions pour une quantité limitée, respectivement de 3,1 millions et de 1,4 million de titres, elle n’était pas allée au-delà ; qu’au contraire, la société avait annoncé, le 7 janvier 2002, par un nouveau communiqué de presse, la cession d’un bloc de 55 millions d’actions à Deutsche Bank et Goldman Sachs dans une fourchette de prix de 60 à 61 euros ; que, dans ce communiqué, Vivendi Universal expliquait que le produit de la vente des titres serait, pour l’essentiel, affecté à la réduction de la dette du groupe et que l’auto-contrôlé après cette cession s’établirait entre 1,5 % et 2,5 % du capital, "compte tenu des 37 millions de titres qui seront échangés avec Liberty Media dans le cadre de l’opération USA Networks" ; que, en effet, les dirigeants de Vivendi Universal en étaient progressivement venus à abandonner le projet d’annulation à raison d’une part, de l’acquisition des actifs divertissements de la société USA Networks, pour environ 10,3 milliards de dollars – 7 milliards devant être financés sous forme d’actions USA Networks déjà détenues, 1,65 milliard devant être payé à Liberty Média sous forme de cession de 32 mil-lions d’actions d’autocontrôlé de VU et 1,62 milliard de dollars devant être acquitté en espèces – de l’alliance avec le groupe américain Echostar Communications dans lequel Vivendi Universal devait investir 1,5 milliard de dollars en capital, opérations ayant fait l’objet de commu-niqués de presse les 11 et 17 décembre pour la première et le 14 décembre pour la seconde et, d’autre part, des enga-gements pris auprès des agences de notation de procéder rapidement au désendettement du groupe, ainsi que cela ressort de plusieurs échanges internes au groupe à savoir :

– le 26 novembre 2001, M. EEEEEEEEE..., dans un courrier à M. MMMM... indiquait à celui-ci, concer-nant le projet "Tier One" [USA Networks] : "Concernant ce financement, nous avons deux types de sous-jacents pour le réaliser soit des actions VE on BSKY B, soit des actions VU, dans ce dernier cas, en tant qu’insider [ini-tié] sur la transaction Tier One, il est probablement diffi-cile de réaliser toute transaction en sous-jacent VU avant d’avoir annoncé au marché les termes de la transaction (…) » ;

– le 7 décembre 2001, M. EEEEEEEEE... écrivait à M. MMMM... : "Nous détenons près de 107 millions d’actions d’autocontrôlé, dont 21 millions adossées aux

Networks), annoncée le 17 décembre, que le financement de celle-ci devait se faire par l’attribution des actions dont l’annulation avait été initialement envisagée ; qu’à ce titre devra être noté que la société Vivendi avait expressément mis en ligne, à compter du 17 décembre 2001, sur son site internet, les détails de cette acquisition, et notamment les caractéristiques de son financement et ses incidences pour la société à savoir : "Consolidating EBITDA (…) And additionnal free cash flow (…) Without creating new VU (except for 32 mm swapped to Liberty instead of being cancelled by year end" (à l’exception de 32 millions de titres remise n échange à Liberty au lieu d’être annulés à la fin de l’année) ; que ce qui est qualifié "d’annulation de l’annulation", n’est en réalité qu’une substitution de cette annulation par un projet encore plus favorable pour l’actionnaire, à savoir l’utilisation de ces titres en paie-ment d’une acquisition ; qu’enfin il n’est pas démontré que le communiqué en cause aurait pu être de nature à agir sur le cours de bourse ; que les parties civiles font valoir que cette annonce, comme les rachats massifs de titres, étaient de nature à soutenir le cours du titre Vivendi Universal et à le tirer à la hausse ; que d’ailleurs le communiqué faisait état du caractère relutif de l’opéra-tion ; que la mise en ligne, le lendemain du communiqué du 17 décembre 2001, des informations relatives à l’an-nulation de l’annulation ne saurait en aucun cas être considérées comme une information claire à destination du public, le mode de communication choisi, avec un décalage dans le temps de quelques heures en plus, n’of-frant bien évidemment aucune garantie de diffusion sin-cère de l’information auprès des actionnaires ; que prétendre que les informations sibyllines diffusées par le communiqué du 17 décembre 2001 et susceptibles de n’être comprises et entendue que par certains analystes financiers constituent une information diffusée de bonne foi est une parfaite démonstration de la mauvaise foi des prévenus dans le cadre d’opérations réalisées loin de toute transparence ; que, le 25 septembre 2001, Vivendi Uni-versal annonçait, par communiqué de presse, que son conseil d’administration avait autorisé l’annulation de 33 millions d’actions représentant 3 % du capital du groupe ; que ce communiqué précisait que, compte tenu du carac-tère attractif du niveau de cours atteint par l’action Vivendi Universal, la société avait décidé "d’utiliser la faculté qui lui a été donnée par l’assemblée générale de racheter sur le marché environ 33 millions de ses propres actions. Ces titres, qui ont été ou seront rachetés, seront annulés. Compte tenu de l’opération similaire réa-lisée le 28 juin dernier, 5 % du capital auront été ainsi annulés. Une telle opération est créatrice de valeur pour l’actionnaire, étant relative dans des proportions équivalentes tant au niveau de l’excédent brut d’exploita-tion par action, que du bénéfice par action et de la valeur d’actif net par action" ; qu’à l’issue de celle opération, l’autocontrôle de Vivendi Universal s’établira à 5 % du capital" ; que l’assemblée générale des actionnaires avait autorisé, le 24 avril 2001, le conseil d’administration à procéder à de telles annulations de titres, dans la limite de 10 % du capital ; lequel conseil, le 25 septembre 2001, avait approuvé une telle annulation, sous la condition que la réduction du capital social en résultant soit enre-gistrée avant le 31 décembre 2001 ; que cette annonce était intervenue en pleine période d’achats massifs par

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milliards de dollars pour Liberty Média sous forme d’ac-tions d’autocontrôle de Vivendi : 1,62 milliard en cash : Création de valeur pour les actionnaires de Vivendi Uni-versal : Cette opération se traduit par une création signi-ficative de valeur pour les actionnaires » ;

que, contrairement aux allégations de M. NNNN..., il est constant que le communiqué de presse du 17 décembre 2001, s’il annonçait l’opération USA Networks et son mode de financement à savoir : 70,3 milliards de dollars, 7 milliards devant être financés sous forme d’actions USA Networks déjà détenues, 1,65 milliard devant être payé à Liberty Média sous forme de cession de 32 millions d’actions d’autocontrôle de VU et 1,62 milliard de dollars devant être acquitté en espèces … celui-ci ne faisait aucunement allusion au fait que ces 32 millions d’actions résulterait de l’abandon de l’annu-lation des 33 millions d’actions objet du communiqué litigieux du 25 septembre 2001 ; que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier réprime le fait de répandre dans le public, en toute connaissance de cause, des infor-mations fausses ou trompeuses, qu’il s’agit d’un délit de commission et non d’abstention qui est constitué le jour du communiqué ; que, s’agissant d’un délit instantané c’est donc au jour de sa commission que le caractère faux ou trompeur doit s’apprécier ; que, selon les termes de l’ordonnance de renvoi, est reproché à M. NNNN... le communiqué de presse du 25 septembre 2001 annon-çant l’annulation de 33 millions d’actions d’autocon-trôle, laquelle information serait devenue mensongère le 17 décembre 2001 pour ne pas avoir annoncé à cette date dans le communiqué de presse du 17 décembre 2001, relatif à l’opération USA Networks, la renonciation à cette annulation ; qu’il est avéré que l’annonce du 25 sep-tembre 2001, qui intervenait en pleine période de rachats massifs par Vivendi Universal de ses propres actions à la suite des attentats du 11 septembre, en vue de réguler le cours de l’action, n’était pas mensongère car correspon-dant à cette époque à l’intention de ses dirigeants ; que l’explication de M. NNNN..., selon laquelle Vivendi Uni-versal n’ ayant aucun projet de transactions nécessitant le paiement en titres, ni besoin de couvertures de stocks options, le conseil d’administration avait décidé l’annu-lation de 33 millions d’actions d’autocontrôle paraît cré-dible ; que, d’ailleurs il résulte de l’ensemble des échanges de mails ci-dessus évoqués, que le projet d’annulation des 33 millions de titres était toujours d’actualité au 7 décembre 2001 (mail de M. EEEEEEEEE...) ; que, si le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rec-tifier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, le code monétaire et financier ne réprime pas le fait de s’abstenir de réactualiser une information vraie qui par la suite devient inexacte ; que la préven-tion, visant uniquement comme faux ou trompeur le communiqué du 25 septembre 2001, à défaut d’avoir visé, comme trompeur, le communiqué de presse du 17 décembre 2001 qui était lacunaire et incomplet "en annonçant l’opération USA Networks nécessitant la remise à Liberty Média de 32 millions d’actions VU, sans préciser que cela entraînerait la renonciation à l’annula-tion" (laquelle précision avait toutefois était mise sur le site internet de Vivendi Universal, le 18 décembre, mais uniquement en langue anglaise), n’est dès lors pas carac-térisée à l’égard des prévenus, le communiqué du 25 sep-

SO [stock-options] et 33 qu’il est prévu d’annuler. II en reste donc encore plus de 50 millions à céder si nous le souhaitons ! Les vrais problèmes sont en fait : 1) que nous sommes sur un "pic" de valeur de VU et qu’il est donc très difficile de construire un book important dans ces circonstances et 2) que nous sommes un peu insider [initiés] sur l’action et qu’il sera donc en consé-quence difficile de la faire bénir par un avocat…." ; que le 10 décembre 2001, M. Pierre-Henry Galan, adjoint au directeur de la trésorerie, envoyait un mail, notamment à M. EEEEEEEEE..., en ces termes : "Ci-joint tableau sur achat d’actions VU en novembre. Les tableaux de sep-tembre et octobre ont été modifiés (répartition entre achats de titres destinés à être annulés et achats de titres pour régul du cours) pour que le total des titres destinés à être annulés soit exactement égal 33 millions (achat du 11 septembre an 29 octobre) » ;

– toutefois, le 8 décembre 2001, M. MMMM... évo-quait dans un courriel adressé à M. NNNN... le projet de cession de 35 millions d’actions d’auto contrôle en ces termes : "Pour Tier I, nous couvrons le paiement par 1,5 milliard de dollars sur B SKYB et pas plus que cela. Nous resterons avec 1 milliard de dollars +0,75 % de classe A (…), les 2,1 à 3 milliards du bloc Vivendi Universal et le reste 3,5 à 4 milliards de sky restent non gagés (…). Je suggère de toute façon que nous fassions les 35 millions de Vivendi Universal après l’annonce, seule façon pour justifier de ne pas les annuler » ;

que, dans un mémorandum confidentiel, adressé le 12 décembre à MM. Guy KKKKKKKKK... et Chris-tian Rauch, analystes financiers en charge de la nota-tion de Vivendi Universal, respectivement chez Standard & Poor’s et Moody’s, M. MMMM... confirmait que pour financer ces nouveaux investissements Vivendi Universal avait l’intention d’annoncer que son conseil d’administration avait décidé de renoncer à annuler 33 millions d’actions avant la fin de l’année et qu’elle ven-drait de telles actions dans les semaines à venir, en ces termes : "Vivendi a l’intention d’annoncer rapidement une transaction avec Echosfar Communications et une restructuration de la participation de Vivendi dans USA Networks (USA). Pour financer ces nouvelles transac-tions, VU, dans le cadre d’un crédit neutre :

– a déjà cédé 9,3 % de Vivendi Environnement pour un montant de 1,2 milliard d’euros ;

– a l’intention d’annoncer simultanément à la transac-tion, que son conseil a décidé de ne pas annuler à la fin de l’année les 33 millions d’actions qui ont été rachetées sur le marché en septembre/octobre 2001 pour un prix moyen de 47 euros et qui étaient sur le point d’être annu-lées (…) ;

– pour arriver à un allégement supplémentaire, dans les semaines ou parallèlement ou pendant le déroulement des transactions par le biais d’une opération portant sur deux marchés vente d’un bloc d’actions de trésorerie (d’autocontrôle) de VU ; QUE le 17 décembre 2001, dans un communiqué de presse Vivendi Universal annon-çait la conclusion de l’opération "USA Networks" et les modalités de son financement en ces termes : "Prix :envi-ron 10,3 milliards de dollars pour une opération asso-ciant titres et cash-Financement : 7 milliards de dollars sous forme d’actions USAI, déjà détenues par VU : 1, 65

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gression des cashflow, ceux-ci présentant un solde "total des flux de trésorerie" dans le tableau des flux consoli-dés de plus de 229 millions d’euros au 30 juin 2002 contre un solde négatif de moins 955 millions d’euros au 30 juin 2001 ; qu’enfin il n’est pas démontré en quoi l’in-formation prétendument trompeuse aurait été de nature à avoir un effet sur le cours de bourse ; que les parties civiles font valoir qu’à aucun moment n’a été évoqué le cashflow négatif ; que l’essentiel du cashflow provenait de la participation dans Cégétel (à hauteur de 1,5 milliard d’euros) détenue à 34 % seulement par Vivendi Univer-sal, et n’était pas appréhendable compte tenu des accords avec les actionnaires de cette société, information qui a été constamment dissimulée au public ; qu’une confusion était délibérément entretenue par M. NNNN..., entre cashflow opérationnel (positif mais ne pouvant contraire-ment à ses affirmation, permettre de servir un dividende ou de diminuer la dette, dès lors que doivent d’abord être retranchées de ce solde les charges telles qu’intérêts et impôts) et le cashflow net (solde comptable disponible pour le remboursement du principal de la dette et le paie-ment d’un dividende, négatif en l’espèce) ; qu’il est évident qu’il ne suffit pas de constater que le cours de bourse ait baissé après la diffusion des informations en cause pour conclure que cette information n’était pas de nature à agir positivement sur le cours, l’information en cause ayant pu en l’espèce contribuer seulement à limiter la baisse ; qu’elle a pu également être légitimement (mais de manière erronée) jugée par l’investisseur comme devant favoriser une hausse future ; qu’à l’occasion de l’assemblée générale de Vivendi Universal du 24 avril 2002, statuant sur les comptes clos au 31 décembre 2001, M. NNNN... avait annoncé concernant les résultats du premier tri-mestre 2002 : "En ce qui concerne le cash sur lequel il n’est pas question de normes comptables – c’est l’argent qui sort et l’argent qui rentre, les résultats du premier trimestre montrent un saut énorme, avec 1,4 milliard d’euros de cashflow opérationnel. C’est deux fois et demie plus de cashflow opérationnel que l’an dernier sur le pre-mier trimestre. Et l’essentiel de cette avance sur notre plan de marche provient des métiers que nous contrôlons à 100 % et doit pouvoir servir demain, non seulement aux dividendes, mais également au remboursement de la dette. Notre dette, qui était de 19,1 milliards d’euros au 31 décembre 2001, est de 17,1 milliards d’euros au 31 mars 2002 – soit 2 milliards de moins en trois mois. Nous sommes en avance au niveau de notre chiffre d’af-faires. On a fait au premier trimestre 300 millions d’eu-ros de mieux, en chiffre d’affaires, que ce que l’on pensait. Au niveau de l’excédent brut d’exploration on a fait 160 millions d’euros de mieux que notre plan de marche. Au niveau du résultat d’exploitation nous enregistrons 260 millions de mieux. Au niveau du cashflow opérationnel dégagé par nos métiers nous enregistrons 900 millions de mieux que notre budget (…) Même si on ne renou-vellera pas forcément des performances de même niveau chaque trimestre, ces résultats ne sont pas le fruit du hasard (…)" ; qu’il est constant que pour l’année 2001, le "free cashflow net" était négatif en normes américaines à hauteur de 134,2 millions et légèrement positif en normes françaises de 8,8 millions d’euros, ainsi que cela résulte des documents remis au magistrat instructeur puis à la cour par la défense de M. NNNN... ; qu’il est indubitable

tembre 2001, à cette époque correspondant à l’intention des dirigeants de Vivendi Universal ; qu’étant rappelé en outre s’agissant de M. MMMM... qu’il n’était pas le man-dataire de l’émetteur, ni le rédacteur du communiqué, ni celui qui l’avait validait et donnait Tordre de le diffuser ; qu’en conséquence il conviendra de prononcer la relaxe de M. NNNN... et M. MMMM... et d’infirmer le juge-ment déféré de ce chef ;

« aux motifs que, sur les déclarations, de M. NNNN..., lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 ; qu’il est reproché à M. NNNN... d’avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant lors de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001 durant l’assemblée générale du 24 avril 2002, un free cashflow opérationnel de 1,4 mil-liard d’euros présenté comme "pouvant servir demain non seulement au dividende mais également au rem-boursement de la dette" sans aucune information sur le cashflow net qui était en réalité négatif, une telle com-munication sur les données opérationnelles ayant donné l’illusion d’une richesse disponible pour le groupe alors que les données nettes, après prise en compte des frais financiers, des frais de restructuration et de l’impôt étaient négatives ; que M. NNNN..., à l’appui de ses conclusions de relaxe fait valoir, que l’information criti-quée faisait référence sans aucune ambiguïté au cashflow du premier trimestre 2002 ; qu’il est certain que ce chiffre s’était considérablement amélioré dès le premier semestre 2002, puisque le rapport d’activité de Vivendi Universal publié après son départ, faisait état d’une progression des cashflow, présentant un solde "total des flux de trésorerie" dans le tableau des flux consolidés de plus 299 millions d’euros au 30 juin 2002, contre un solde négatif de - 955 millions au 30 juin 2001 ; qu’ainsi les considérations selon lesquelles le "free cashflow" n’avait aucune chance de s’améliorer sont inexactes ; qu’en tout état de cause la cour devra constater que sa déclaration était rigoureuse-ment exacte et ne pouvait être trompeuse, dans la mesure où :

– un dividende de 1 milliard d’euros a bien été payé courant 2003, au titre de l’exercice 2002, par son succes-seur ;

– la dette a bien été remboursée, Vivendi n’ayant pas fait défaut ;

– ce dividende et le remboursement de la dette ayant nécessairement été payés par les cashflows opérationnels de Vivendi ;

que les premiers juges ont fait une grave erreur d’ap-préciation puisque la prévision de cash-flow net pour 2002 était très positive (chiffre de 1,4 milliard) ; qu’ainsi le document présenté au comité d’audit de Vivendi Uni-versal le 23 avril 2002 et qui servait de fondement aux chiffres évoqués par lui au cours de l’assemblée générale du 24 avril 2002 faisait état pour l’activité média d’une prévision de cashflow net de 1,4 milliard pour l’année 2002 ; que contrairement aux affirmations de l’ordon-nance de renvoi, il est certain que le cashflow net de Vivendi Universal s’était considérablement amélioré, dès le premier semestre 2002, puisque le rapport d’activité de Vivendi Universal pour le premier semestre 2002, publié après le départ de M. NNNN..., faisait état d’une pro-

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conques, des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur ou de ses titres admis aux négociations sur un marché réglementé au sens de l’article L. 421-1 du code monétaire finan-cier ; que les juges ont le devoir de requalifier les faits dont ils sont saisis ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publi-quement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram que, suite à cette fusion, « sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications » ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débou-ter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, que si, certes, il n’avait pas fait état spontanément de la dette Vivendi Environnement lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000, celle-ci avait été rappelée par un journaliste puis admise par M. NNNN... qui en avait ensuite relativisé l’impact, la cour d’appel qui a ainsi constaté que M. NNNN... avait, à tout le moins, tenté de dissimuler l’existence de cette dette et par conséquent tenté de répandre une information boursière trompeuse, aurait dû requalifier les faits de la prévention en tenta-tive ; qu’en ne procédant pas à cette requalification, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés ;

« 2° alors que le caractère faux ou trompeur d’une information boursière s’apprécie à la date de sa diffu-sion ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publiquement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Sea-gram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter l’en-semble des parties civiles de leurs demandes, que des articles de presse et un prospectus mis à la distribution du public faisaient état de l’existence d’une dette proforma de Vivendi au 30 juin 2000 de sorte que les actionnaires ne pouvaient se méprendre sur le montant de la dette du groupe qui ne pouvait, compte tenu de son importance, avoir été résorbée en six mois, quand seule comptait la question de savoir si, à la date de la diffusion dudit com-muniqué, soit le 11 décembre 2000, le fait d’avoir indiqué qu’au 1er janvier 2001 le groupe Vivendi Universal serait net de dettes pour ses activités communications était mensonger, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 3° alors que le délit de diffusion d’information bour-sière fausse ou trompeuse ne suppose la preuve d’aucun dol spécial ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publiquement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Sea-gram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, que les éléments de la procédure ne permettaient pas d’affirmer qu’à l’époque de la diffusion du communiqué du 19 décembre 2002, la direction de Vivendi Universal ait eu l’intention de trom-per le public sur la dette de la branche Média et commu-nication de Vivendi Universal, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

que M. NNNN... dans ce communiqué faisait des obser-vations sur les résultats pour le premier trimestre 2002 ; que les déclarations de M. NNNN... s’appuyaient sur des documents présentés au comité d’audit, le 23 avril 2002, qui mentionnaient effectivement une prévision de "cash from opération net of capex" pour l’année 2002 de mil-liard d’euros pour le groupe ; qu’il s’agissait bien de pré-visions portant sur le cashflow après impôts, intérêts, charges et investissements qui pourra être utilisé pour rembourser la dette et verser un dividende ; que le pro-cès-verbal du comité des comptes du 23 avril 2002 faisait état au chapitre "Prévision de free cashflow 2002-2004" : "Les prévisions de free cashflow opérationnel 2002 pour-raient être revues à la hausse de 1 milliard d’euros, (…) Après impôts, coûts de financement, restructuration et avant distribution de dividende, le cashflow disponible est estimé à 1,3 milliard d’euros pour 2002" ; que le pro-cès-verbal du conseil d’administration du 24 avril 2002 au chapitre : "Résultats du premier trimestre 2002 et point sur la stratégie" relatait : "M. NNNN..., indique que la société a enregistré une forte croissance de son chiffre d’affaires, de son Ebitda, de son résultat d’exploi-tation et de son free cashflow pour le premier trimestre 2002, clos le 31 mars 2002 : – en excluant les actifs de Vivendi Universal Publishing (VUP) dont la cession a été décidée, le chiffre d’affaires s’établit à 6,8 milliards d’euros, l’EBITDA à 1,1 milliard d’euros et le résultat d’exploitation à 408 millions d’euros ; – si on tient compte des actifs VUP à céder le chiffre d’affaires s’établit à 7,1 milliards d’euros, l’EBITDA à 1,2 milliard d’euros et le résultat d’exploitation à 436 millions d’euros, le free cash-flow opérationnel est de 0,9 million d’euros environ supé-rieur à ce qu’il était l’an passé" ; qu’en outre le rapport d’activité de Vivendi Universal, pour le premier semestre 2002, rédigé après le départ de M. NNNN... ; que faisait état d’une progression des cashflows, ceux-ci présentant un solde dans les résultats consolidés de + 299 millions d’euros au 30 juin contre un solde négatif de 955 millions d’euros au 30 juin 2001 ; qu’il apparaît à la lecture de ces divers documents, que les résultats de Vivendi Universal s’étaient effectivement améliorés pour la période du pre-mier trimestre 2002, sa trésorerie étant devenue positive et avait ainsi permis de réduire pour partie sa dette celle-ci passant de 19,1 milliards au 31 décembre 2001 à 17,1 milliards d’euros au 31 mars 2002 ; qu’il apparaît dès lors que les déclarations de M. NNNN... qui portaient sur le premier trimestre 2002 n’étaient pas fausses, étant relevé que ce dernier avait pris la précaution de préciser : "Au niveau du cashflow opérationnel dégagé par nos métiers nous enregistrons 900 millions de mieux que noire bud-get (…) Même si on ne renouvellera pas forcément des performances de même niveau chaque trimestre, ces résultats ne sont pas le fruit du hasard (…)", perfor-mances qui effectivement ne se renouvelleront pas dans de telles proportions pour le second trimestre 2002, mais qui resteront cependant positives ; qu’au vu de l’ensemble de ces constatations, n’est pas caractérisé en ses éléments matériels et intentionnel le délit tel que visé à la préven-tion à l’égard du prévenu ; qu’en conséquence le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;

« 1° alors que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier incrimine le fait de répandre ou de tenter de répandre, dans le public par des voies et moyens quel-

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aux membres du comité des comptes et quelques jours après à ceux du comité exécutif du groupe Vivendi Uni-versal, n’établissait qu’elle était de nature à agir sur les cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code monétaire et finan-cier ;

« 7° alors que les juridictions correctionnelles doivent statuer sur l’ensemble des faits dont elles sont saisies par l’ordonnance de renvoi ; qu’aux termes de l’ordon-nance du 16 octobre 2009, MM. NNNN... et MMMM... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour avoir annoncé, "par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que "Vivendi Universal va annu-ler 33 millions d’actions supplémentaires, portant à 5 % de son capital les annulations réalisées depuis fin juin [2001]", alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé, notamment lors du communiqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la non-exécution de cette décision d’annulation de titres" ; qu’en énonçant, pour relaxer MM. NNNN... et MMMM... de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, que la prévention visait uniquement comme faux ou trompeur le communiqué du 25 septembre 2001 et non celui du 17 décembre 2001 dont elle a reconnu le caractère lacu-naire et incomplet, quand les prévenus étaient poursuivis pour ne pas avoir informé le public lors du communiqué de presse du 17 décembre 2001 de l’absence d’annulation des titres litigieux, la cour d’appel a méconnu l’étendue de sa saisine en violation de l’article 388 du code de procé-dure pénale ;

« 8° alors que se rend coupable du délit de diffusion d’information fausse ou trompeuse l’émetteur qui s’abs-tient de rectifier une information exacte lors de sa dif-fusion qui devient par la suite inexacte ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que MM. NNNN... et MMMM... ont été poursuivis pour avoir annoncé, "par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que "Vivendi Universal va annuler 33 millions d’actions supplémen-taires, portant à 5 % de son capital les annulations réa-lisées depuis fin juin [2001]", alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé, notamment lors du communiqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la non-exécution de cette décision d’annulation de titres" ; qu’en énonçant, pour relaxer les prévenus de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, que si le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rectifier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, le code monétaire et financier ne réprime pas le fait de s’abstenir de réactualiser une information vraie qui par la suite devient inexacte, la cour d’appel a méconnu les dispositions de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 9° alors qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant lors de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001 durant l’assemblée générale du 24 avril 2002, un free cashflow opérationnel de 1,4 mil-liard d’euros présenté comme pouvant "servir demain

« 4° alors que le délit de diffusion d’information bour-sière fausse ou trompeuse est constitué dès lors que l’au-teur d’un communiqué public a conscience du caractère faux ou trompeur de l’information qu’il diffuse ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publiquement lors d’un communi-qué du 11 décembre 2000 tenu à l’occasion de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er jan-vier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, qu’il n’était pas indubitablement établi que les dirigeants de Vivendi Universal aient connu avant le mois de mars 2001 les différents éléments expliquant le glissement de la dette de la branche Média et communication de Vivendi Uni-versal à 3,4 millions d’euros, quand seule comptait la question de savoir si ces dirigeants connaissaient l’exis-tence même de cette dette lors de la diffusion du com-muniqué du 11 décembre 2000, la cour d’appel a violé l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 5° alors que le délit de diffusion d’information bour-sière fausse ou trompeuse est constitué par la diffusion d’une information fausse ou imprécise de nature à agir sur les cours ; que l’appréciation de l’impact potentiel sur le cours d’une information doit se faire objectivement, eu égard à sa nature et non au montant des sommes sur lesquelles elle porte ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que MM. NNNN... et MMMM... ont été poursuivis pour avoir, lors de la présentation des résultats du groupe Vivendi Universal au premier semestre 2001, annoncé, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités média et communica-tion alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 millions d’euros comme l’information en avait été donnée aux membres du comité des comptes le 18 septembre 2001 et à ceux du comité exécutif le 26 septembre 2001 ; qu’en énonçant, pour relaxer les prévenus de ces chefs et débou-ter les parties civiles de leurs demandes, de ce chef, qu’il n’apparaissait pas établi qu’une inexactitude portant sur 23 millions d’euros ait été de nature à avoir une influence sur les cours dès lors que ce chiffre se situait dans le cadre d’une amélioration sensible de cet indicateur entre 2000 et 2001, sans rechercher si, eu égard à sa nature, une information erronée sur l’existence même d’un free cash-flow net positif n’était pas de nature à agir sur les cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 6° alors qu’en relaxant MM. NNNN... et MMMM... pour avoir, lors de la présentation des résultats du groupe Vivendi Universal au premier semestre 2001, annoncé, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités média et communica-tion alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 mil-lions d’euros, et en déboutant les parties civiles de leurs demandes sur ce fondement, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que cette information, donnée de manière erronée aux actionnaires du groupe Vivendi, avait été donnée de manière exacte quelques jours avant

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de Vivendi Environnement s’élevait à 15 milliards d’euros au 1er janvier 2001, soit à cette date, un montant total de la dette du groupe s’élevant à 27 milliards d’euros ; que M. NNNN... soutient à l’appui de ses conclusions de relaxe que l’information prétendument omise a pourtant bien été diffusée au public tant dans les communications litigieuses que dans les autres communications contem-poraines, et que le marché était parfaitement informé sur le niveau d’endettement global en normes françaises du groupes Vivendi Universal, à savoir ; que s’il est incontes-table que le chiffre proforma de l’endettement net de Vivendi Univesral Communication, anticipé à 0 en décembre, s’est finalement élevé à 3,4 milliards d’euros pour l’exercice 2000, cet écart était dû à des facteurs qui ne pouvaient être connus par M. NNNN... avant mars 2001, ce que le jugement, à l’instar des magistrats instructeurs ont parfaitement reconnu ; qu’en ajoutant à cet écart de 3 milliards la dette nette de Seagram (environ 9 milliards d’euros), est reconstituée la dette nette de 12 milliards en normes françaises incluant Seagram, laquelle n’a jamais été dissimulée ; que de même l’endet-tement de Vivendi Environnement était parfaitement connu ainsi que celui du groupe ; que le tribunal ne pou-vait valablement prétendre qu’il aurait fait l’impasse sur la dette de Vivendi Environnement si le journaliste ne le lui avait pas rappelé lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000 ; que tous les articles de presse de l’époque mentionnaient le montant de la dette de Vivendi Environnement, notamment : un article de "La Tribune" du 3 octobre 2000, qui précisait que "la dette proforma de Vivendi atteignait au 30 juin 14,5 milliards d’euros, dont 13,3 milliards d’euros pour Vivendi Environnement" ; un article des "Echos" du 30 novembre 2000 spécifiquement consacré à la dette de Vivendi Environnement ; que, pour l’endettement de Seagram, nul ne pouvait l’ignorer puisque Vivendi en faisait clairement état dans le com-muniqué litigieux du 19 décembre qui indiquait "la dette nette de Seagram s’élève à 6,4 milliards de dollars au 30 septembre 2000" ; qu’il avait exposé dans le même interview au journal "les Echos" du 11 décembre 2000 que le prix de cession de l’activité vins et spiritueux devait effacer la dette nette de Seagram, soit "6,5 milliards de dollars pro forma en juin dernier" ; que, surabondam-ment, l’information prétendument omise figurait aussi de manière parfaitement explicite dans les comptes du groupe, diffusés en avril 2001, et dont la sincérité n’a pas été mise en doute ; qu’il ne peut lui être fait grief d’avoir concentré sa communication sur le chiffre de la dette nette proforma de Vivendi Communication, dès lors qu’il a très clairement précisé le périmètre de cet endettement dans les deux communiqués et que l’objet du communi-qué du 19 décembre 2000 était précisément défini "ces-sion de l’activité de vins et spiritueux de Seagram à Diageo et Pernod Ricard" ; que cette communication s’inscrivait dans le prolongement du communiqué du 12 octobre et la présentation aux analystes des 12 et 13 octobre qui évoquaient une dette nette proforma pour l’activité communication de 1,2 milliard d’euros ; que la cession de l’activité vins et spiritueux s’étant négociée à un prix supérieur de 1,3 milliard d’euros au prix initiale-ment estimé, il y avait lieu d’informer les investisseurs de cette évolution et du fait que l’excédent du prix payé annulait ainsi totalement la dette nette de l’activité

non seulement au dividende mais également au rem-boursement de la dette" sans aucune information sur le cashflow net qui était en réalité négatif, une telle commu-nication sur les données opérationnelles ayant donné l’il-lusion d’une richesse disponible pour le groupe alors que les données nettes, après prise en compte des frais finan-ciers, des frais de restructuration et de l’impôt étaient négatives ; qu’il résulte encore de l’arrêt attaqué que, pour l’exercice 2001, soit au 1er janvier 2002, le cashflow net était négatif en normes américaines à hauteur de 134,2 millions et légèrement positif en normes françaises à hau-teur de 8,8 millions d’euros ; qu’en retenant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, qu’il résultait de certains documents que les prévisions de cashflow net pour l’exercice 2002 à 2004 étaient de 1,4 milliard d’euros et que le cashflow net avait effectivement progressé au premier semestre 2002, sans rechercher si, à la date du communiqué litigieux, le fait d’annoncer l’existence d’un free cashflow opérationnel de 1,4 milliard d’euros n’était pas mensonger et de nature à influer sur le cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code moné-taire et financier » ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. et Mme SSSS..., pris de la violation des articles L. 465-2 du code monétaire et financier, 121-4, 121-5 du code pénal, préliminaire, 388, 591, 593 du code de procédure pénale, 1382 du code civil, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit d’informations fausses ou trompeuses pour agir sur le cours des titres négociés concernant l’interview de M. NNNN... du 11 décembre 2000 – le communiqué de presse du 19 décembre 2000 sur la dette – le communi-qué de presse du 25 septembre 2001 relatif à l’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôle – le communiqué de presse du 25 septembre 2001 relatif au cashflow – la déclaration de M. NNNN... lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 ;

« aux motifs que, sur le communiqué de presse du 19 décembre 2000 et l’interview de M. NNNN... au jour-nal Les Echos le 11 décembre 2000, il est reproché à M. NNNN..., en sa qualité de président-directeur général de la SA Vivendi Universal, et à M. MMMM... en sa qualité de directeur général adjoint et de directeur finan-cier de cette société, d’avoir répandu dans le public par des voies et moyens quelconques des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé, en l’espèce la SA Vivendi Universal en don-nant au public des informations fausses ou trompeuses sur le niveau de l’endettement du groupe Vivendi Univer-sal, en annonçant lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram (communiqué de presse du 19 décembre 2000 et interview dans le journal "Les Echos" du 11 décembre 2000) "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera donc net de dettes pour ses activités communications" (…) alors que l’endettement de Vivendi-Médias et communication s’éle-vait à 12 milliards d’euros en normes comptables fran-çaises au 1er janvier 2001 et, qu’au surplus, l’endettement

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les premiers juges ont procédé par affirmations sans aucune tentative de démonstration en indiquant "que le glissement de la dette à 3,4 milliards n’étaient pas fatale-ment imprévisible à la date de la communication criti-quée" ; qu’or, il n’est pas contesté, que ces éléments sont dus à un retard dans la perception du produit de cession des titres "AOL", l’évolution de la parité euro/dollar et son effet sur la valeur de la dette, les effets d’une grève aux USA et une augmentation soudaine du besoin en fonds de roulement de Seagram, autant d’éléments par-faitement imprévisibles au jour des communiqués ; qu’enfin le communiqué n’établit pas en quoi l’informa-tion prétendument défaillante aurait été de nature à agir sur le cours ; qu’il est établi que le jour de l’annonce liti-gieuse du 11 décembre 2000, le cours a baissé de 1,6 % et également au cours des jours entourant la diffusion de ces deux informations, ce qui exclut qu’elles aient permis un maintien artificiel du cours de l’action, ou a fortiori qu’elles aient eu un effet à la hausse sur le cours ; qu’à l’inverse le cours de bourse a augmenté de près de 9 % dans les jours qui ont suivi, le 17 avril 2001, jour de la dif-fusion à l’AMF du document de référence qui contenait le montant exact de l’ensemble de la dette du groupe ; qu’il serait pour le moins curieux qu’un cours de bourse baisse sur une nouvelle "artificiellement positive" fausse ou trompeuse et monte lorsque la prétendue "vraie" infor-mation, donc par définition "négative" est diffusée ; qu’il s’en déduit que non seulement l’information n’était pas de nature à agir sur les cours, mais en outre que les par-ties civiles, n’ont pu subir aucun préjudice du fait de cette information sur la dette ; que, liminairement, M. MMMM... fait valoir à l’appui de ses conclusions de relaxe que ses fonctions étaient celles d’un directeur financier classique et que n’entrait pas dans ses attribu-tion la communication financière, pour laquelle deux directions chez Vivendi Universal intervenaient ; que son rôle en matière d’information financière était, d’une part, de signer la lettre d’affirmation des comptes et, d’autre part, de fournir dans les ateliers et par les trans-parents les explications nécessaires au marché par le conduit des analystes, son rôle étant important dans la rédaction des communiqués sur les comptes (absents de la prévention), même si la trame était rédigée par M. NNNN... ; que les autres communiqués, notamment ceux portant sur des opérations ou les prévisions étaient en revanche rédigés par la direction de la communica-tion, et dont la décision finale était prise par M. NNNN... ; qu’ainsi il avait rarement l’initiative de la rédaction des communiqués, mais n’était en tout état de cause jamais celui qui donnait "l’imprimatur", la vali-dation finale et la décision de diffuser lui échappant ; que la communication était le domaine du président ; qu’il fait également valoir que l’inexactitude visée par la pré-vention, s’agissant du communiqué du 19 décembre, n’existe pas au motif que ce communiqué faisait état d’une dette "pro forma", laquelle avait été évaluée début octobre pour la branche média et communication à 1,2 milliard et, que depuis cette date, elle n’avait pas été réé-valuée ; que ce n’est que plus tard que des informations étaient remontées à la direction financière en provenance de Seagram et avaient fait apparaître des éléments incon-nus au 19 décembre 2000 ; que dans une note rédigée le 1er février 2001, (adressée à M. NNNN...) au vu des tra-

communication après prise en compte de la cession de la branche vins et spiritueux ; que le recours à la notion de dette pro forma n’est pas un choix de la part de Vivendi, mais une obligation qui lui est faite par les règles comptables et par le règlement général de l’AMF ; que les chiffres pro forma étaient donc parfaitement cohérents avec les comptes arrêtés par la société, certifiés par les commissaires aux comptes et qui prenaient soin de préci-ser : "L’endettement financier net n’est pas directement comparable entre les exercices 2000 et 1999. En effet il ne prend pas en compte au 31 décembre 2000, d’une part l’effet de la cession de l’activité vins et spiritueux (7,9 mil-liards d’euros) et, d’autre part, l’effet de la conversion pour 1,1 milliard d’euros des titres de participation à taux de conversion variable (ACES) qui finiraient dans l’endettement de Seagram, Après prise en compte de ces opérations, l’endettement financier net du groupe sera ramené à 16,5 milliards d’euros dont 13,1 milliards pour l’activité Environnement" ; que la COB lui reprochait l’écart inexact entre un chiffre de dette annoncé nul et une "dette réelle de 3,5 milliards d’euros", estimant, par ailleurs, de façon erronée qu’il avait imputé sur la dette le produit anticipé de la cession des titres BskyB, alors que la poursuite pénale lui reproche un écart trompeur entre le chiffre de 0 et un endettement effectif de 27 milliards d’euros ; qu’il a été établi, et d’ailleurs plus contesté, y compris par le jugement déféré que jamais n’avait été imputé pour le calcul de la dette le montant de la ces-sion anticipée de BskyB, au 31 décembre 2000 ; que les premiers juges, dans leur raisonnement l’ont condamné pour ce simple écart de prévision, à savoir 3,4 milliards alors qu’il n’a pas été mis en examen de ce chef, mais pour un écart de 27 milliards ; que le caractère faux ou trompeur d’une information s’apprécie au jour de sa dif-fusion ; que la dette de Vivendi Universal était parfaite-ment connue du public, de très nombreux articles de presse en faisant état, notamment un article des Echos du 9 octobre 2000 qui, évoquant les doutes qui subsistent chez les actionnaires, indiquait "la solidité financière de Vivendi Universal n ’est pas en péril. Son endettement net est presque intégralement logé dans Vivendi Environ-nement et ne dépassera pas 12 à 13 milliards d’euros. La future vente des spiritueux de Seagram, au prix anticipé de 7 milliards de dollars environ absorbera la majeure partie du pôle communication" ; que, surtout, tous les actionnaires de Vivendi Universal ont été informés par la mise à disposition d’un prospectus qui avait servi de sup-port à l’assemblée générale extraordinaire, laquelle avait approuvé la fusion à une majorité écrasante de 90 % ; que la lecture de ce document, de 300 pages, évoque l’en-dettement du groupe à 134 reprises, à savoir la ligne de dette de Seagram, à hauteur de 5,37 millions de dollars et l’endettement financier net du groupe au 30 juin 2000 à savoir 21,6 milliards, ce qui permet de constater, qu’à la date du 5 décembre soit quelque jours avant les deux communiqués, prétendument incomplets, les action-naires étaient parfaitement informés de la dette de Vivendi Universal, et qu’il est parfaitement absurde de prétendre que ces mêmes actionnaires auraient pu croire que la dette de plus de 21 milliards aurait disparu quelques jours plus tard ; que cette cette information était par ailleurs disponible à l’ensemble du public, puisqu’elle figurait sur les sites de l’AMP, de Vivendi et Canal + ; que

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prochain, et disposera, dans les deux ans, d’une marge de manœuvre financière complémentaire de 10 milliards d’euros, grâce à ses cashflow libres et la vente d’actifs, dont notre participation dans BSKYB" ; qu’à la question suivante d’un journaliste : "Vivendi Environnement pré-sente pourtant une dette de quelque 80 milliards de francs…", M. NNNN... répondait ; "Sur le plan comp-table, c ’est vrai que Vivendi Environnement est inté-gré an groupe, mais sur le plan de la gestion, notre filiale est cotée de façon autonome, ce qui lui permet d’utiliser son cashflow pour son développement, comme pour cou-vrir sa dette. Il n’y a pas de confusion possible entre les métiers" ; que 19 décembre 2000, Vivendi Universal publiait un communiqué pour annoncer la cession des vins et spiritueux de la société Seagram à Diageo et Per-nod Ricard pour 8,15 milliards de dollars "sous réserve des autorisations réglementaires des autorités améri-caines", le produit net après impôt de la cession devant s’élever à 7,7 milliards de dollars ; que ce communiqué précisait : "Sur une base pro forma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera donc net de dettes pour ses activi-tés communications, tout en disposant pour les deux années qui viennent tant d’un cashflow libre supé-rieur à 2 milliards d’euros que de la capacité de réaliser certains actifs comme la participation dans BSkyB" ; qu’en revanche, le 12 octobre 2000, Vivendi Universal, commentant la situation et les perspectives de la société à naître Vivendi Universal, née du rapprochement des trois entités Seagram, Vivendi et Canal+, avait publié un com-muniqué indiquant : "La dette de VU sera très limitée, Vivendi Communication présentant -une dette pro forma de 1,2 milliard d’euros et la cession en cours des Vins et Spiritueux devant compenser la dette nette de Seagram" ; que, lors du conseil d’administration du 9 mars 2001, M. MMMM... procédait à une présentation détaillée des comptes 2000 et des objectifs pour l’année 2001, en ces termes : "endettement net était de 25 milliards d’euros à la fin de l’année. Après la cession des vins et spiritueux et la conversion des "Aces" de Seagram, la dette de base pro forma doit être ramenée à 16,5 milliards d’euros (se répartissant en 13,1 milliards d’euros pour vivendi Envi-ronnement et 3,4 milliards d’euros pour Vivendi Univer-sal) ; que le même jour, lors de l’annonce des résultats annuels aux analystes et aux investisseurs financiers, était fait état d’une dette de Vivendi Environ-nement de 13,126 milliards d’euros et de la branche médias et communication, après vente des vins et spiri-tueux de Seagram, à hauteur de 3,338 milliards d’euros conforme à celle annoncée par M. MMMM... lors du conseil d’administration ; que, dans un tableau (en langue anglaise), porté à la connaissance des investis-seurs sur le site internet de Vivendi Universal, le glisse-ment de la dette à 3,4 milliards d’euros à fin 2000 était décrit comme "légèrement supérieur" aux prévisions et expliqué en ces termes par M. MMMM... dans une note adressée à la commission des sanctions : un retard dans la perception du produit de cession de titres AOL pour un montant de 800 millions d’euros, un effet de forte saison-nalité générant une augmentation du besoin en fonds de roulement de Seagram de 500 millions d’euros, l’actuali-sation au regard du marché de la dette Seagram notam-ment en raison d’une variation du taux de change euro/dollar pour un montant de 800 millions d’euros ; que

vaux de ses services, il avait indiqué que le montant de la dette pro-forma (en tenant compte de la cession de la branche vins et spiritueux) s’élevait à 1 milliard d’eu-ros, ladite note reflétant la connaissance inexacte qu’avait le groupe de son endettement à cette date, connaissance qui était évolutive et malheureusement incomplète puisque le processus de consolidation fera finalement apparaître une dette nette de 3,38 milliards d’euros à la clôture des comptes en mars 2001 ; qu’ainsi au cours du mois de févier 2001, la direction de Vivendi Univesal s’était aperçue que des éléments dont elle n’avait pas eu connaissance venaient affecter le montant de la dette ; que le décalage dans la remontée de l’information s’expli-quait en effet par le caractère extrêmement récent de la constitution du groupe, le regroupement de Vivendi, Canal+ et Seagram s’étant opéré que le 14 décembre 2000 et il n’avait par définition pas autorité sur la direction financière de Seagram auparavant ; qu’ainsi dès qu’il a été informé, il a intégré les éléments portés à sa connais-sance dans le calcul de la dette et en a informé le conseil d’administration le 9 mars 2001, ainsi que les analystes lors de la présentation des comptes en mars 2001, comme cela ressort de leurs rapports ; que les parties civiles font valoir que la commission des sanctions de l’AMF, puis la cour d’appel ont estimé que le communiqué du 19 décembre qui avançait une dette minorée, voire nulle, en contradiction avec les chiffres réels et qui n’a du reste pas été rectifiée alors qu’elle aurait encore pu l’être le 1er février 2001 était trompeuse ; que la démarche de M. NNNN..., qui visait à intégrer dans les résultats comptables du groupe, des opérations de cession qui n’étaient pas encore finalisées, telle que l’activité spiri-tueux de Seagram, et qui permettait de réduire la dette à zéro, contribuait à induire en erreur les investisseurs et les actionnaires sur l’état de santé du groupe ; que de plus en évoquant des chiffres pro forma, procédé légalement autorisé, M. NNNN... ne se mettait pas à la portée des petits actionnaires, qui ne pouvaient maîtriser l’intégra-lité des subtilités comptables ; que, si la communication du 11 décembre 2001 n’était pas de nature à tromper un investisseur professionnel, elle était de toute évidence propre à tromper les particuliers sur les perspectives de Vivendi Universal, notamment quant à la situation d’en-dettement du groupe et la prise en compte de la dette de Vivendi Environnement par les agences de notations pour l’évaluation du risque Vivendi Universal ; que M. NNNN..., dans un interview du 11 décembre 2000, dans le journal Les Echos, interrogé sur la cession prévue de la branche Vins et spiritueux de la société Seagram à la suite de la fusion Vivendi-Seagram-Canal +, décla-rait : "les propositions seront déposées cette semaine. Le conseil sera en état de choisir le candidat à la fin du mois de décembre, pour que l’opération soit définitivement conclue an courant du premier semestre 2001. Nous choisirons le meilleur prix net d’impôts afin d’effacer la dette nette de Seagram, soit 6,5 milliards de dollars pro forma en juin dernier. Une fois la cession des vins et spiri-tueux réalisée, Vivendi Vivendi Universal aura une dette nette pro forma de 1,2 milliard d’euros, pour un capital de 57 milliards. Mais le groupe compte 1,7 milliard d’eu-ros d’obligations convertibles à 92 euros, dont on peut légitimement penser qu’elles seront toutes converties. Le groupe sera donc vraiment net de dettes au 1er janvier

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lequel document détaillait la dette de Seagram à hauteur de 5,37 milliards et l’endettement financier net du groupe au 30 juin 2000, à hauteur de 21,6 milliards d’euros ; qu’ils ne pouvaient dès lors se méprendre sur le montant de la dette du groupe qui ne pouvait, compte tenu de son importance, avoir été résorbée en six mois ; que si, certes, dans le communiqué du 19 décembre2000, dont l’objet était d’annoncer la cession de la branche vins et spiri-tueux de Seagram pour la somme de 8,15 milliards euros, Vivendi Universal pour ses activités communication était présentée, en tenant compte du produit de cette cession (7,7 milliards d’euros) comme nette de dette sur une base pro forma au 1er janvier 2001, alors qu’en réalité la dette de la branche média sera de 3 338 000 euros au 31 décembre 2000, ainsi qu’elle sera annoncée au conseil d’administration et aux investisseurs et analystes finan-ciers le 9 mars 2001, les éléments de la procédure ne per-mettent pas d’affirmer qu’à l’époque de la diffusion dudit communiqué, la direction de Vivendi Universal ait eu l’intention de tromper le public sur la dette de la branche Média et communication de Vivendi Universal ; qu’en effet, il n’apparaît pas indubitablement établi que les diri-geants de Vivendi Universal aient connu avant le mois de mars 2001 les différents éléments expliquant le glisse-ment de la dette de la branche Média et communications de Vivendi Universal à 3,4 milliards d’euros ; qu’ainsi dans un courrier manuscrit adressé le 29 novembre 2000 par M. MMMM... à M. John Lucziki (directeur du bud-get et de la consolidation), le premier interrogeait le second en ces termes : "puis-je avoir votre analyse de l’augmentation de la dette nette de Seagram de 6t6 à 7,4 ? Ou en serons-nous à la fin de l’année ? Quelle est l’incidence de la saisonnalité ?" ; ce qui démontre que M. MMMM... rencontrait des difficultés pour établir le montant exact de la dette, laquelle résultait selon ses déclarations aux inspecteurs de la COB :

– d’un retard dans la perception du prix de cession des titres AOL, pour un montant de 880 millions d’euros ;

– d’un effet de saisonnalité du besoin en fonds de rou-lement de Seagram pour un montant de 500 millions d’euros ;

– de l’actualisation de la dette de Seagram en raison d’une variation du taux de change euro/dollar pour un montant de 800 millions d’euros ;

que l’explication de ces écarts donnée par M. MMMM..., liée au défaut de communication entre la trésorerie de Seagram et les comptables de Vivendi Uni-versal alors que la "fusion" (officialisée le 5 décembre) ne datait que de quelques jours, paraît pertinente ; que sera souligné que le communiqué du 12 octobre 2000 qui commentait la situation et les perspectives de la société Vivendi Universal, à naître, à la suite de la fusion, et qui annonçait que la dette pro forma de Vivendi Com-munication sera de 1,2 milliard au 1er janvier 2001, la cession en cours des vins et spiritueux étant sous-évaluée à cette époque, n’a pas été considéré comme mensonger par le magistrat instructeur ; qu’il apparaît ainsi que le communiqué du 19 décembre, s’inscrivait dans le prolon-gement de celui du mois d’octobre, lequel tendait à pré-ciser que la cession de l’activité vins et spiritueux s’étant négociée à un prix supérieur de 1,3 milliard d’euros au prix initialement estimé, la branche communication de

M. MMMM... lors de l’assemblée générale du 24 avril 2001 annonçait "le bilan de votre société est très solide avec une dette du pôle communication, après ces-sion des spiritueux qui est limitée à 3, 4 milliards d’euros ; que ce chiffre était également conforme aux chiffres men-tionnés dans le document de référence pour l’exercice 2000, enregistré auprès de la COB le 17 avril 2001 qui faisait état d’un endettement net consolidé de 25,5 mil-liards d’euros au 31 décembre 2000, dont il était indiqué en note qu’il "ne prend pas en compte (…), d’une part, l’effet de la cession de l’activité Vins et Spiritueux (7,9 milliards d’euros) et, d’autre part, l’effet de la conversion pour 1, 1 milliard d’euros des titres de participation à taux de conversion variable ("ACES") qui figuraient dans l’endettement de Seagram. Après prise en compte de ces éléments, l’endettement financier net du groupe sera ramené à 16,5 milliards d’euros, dont 13,1 milliards pour l’activité Environnement" ; qu’il est constant que M. MMMM... qui remplissait les fonctions de directeur financier et directeur général adjoint, ne détenait aucun mandat social ; que le conseil d’administration ne l’avait ni désigné, ni investi de pouvoirs particuliers, n’étant pas lui-même administrateur de Vivendi Universal, au nom de laquelle les communiqués étaient diffusés ; qu’il est tout aussi constant qu’il n’était pas personnellement l’au-teur de la communication financière du 19 décembre 2000 dont la rédaction définitive avait été arrêtée par M. NNNN... ; que dès lors le délit de fausse information ne peut lui être reproché au titre de ce communiqué ; qu’en conséquence le jugement déféré sera infirmé de ce chef ; que, s’agissant de l’interview au journal « les Echos », du 11 décembre 2000 la cour adoptera les motifs pertinents des premiers juges, qui ont constaté qu’il ne pouvait être considéré comme coauteur d’un communi-qué verbal, dont son auteur M. NNNN... disposait de sa liberté de parole ; que, dès lors, les faits ne sont pas carac-térisés à son encontre et aucune faute civile en relation avec ces faits ne peut en conséquence lui être imputée ; que si, certes, lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000, M. NNNN... n’a pas spontanément fait état de la dette de Vivendi Environnement, celle-ci a cependant était très clairement rappelée par le journa-liste - 80 milliards de francs – et admise par M. NNNN... qui avait précisé "sur le plan comptable c’est vrai que Vivendi Environnement est intégré au groupe, quand bien même il ait relativisé son impact en expliquant "notre filiale est cotée de façon autonome ce qui lui per-met d ’utiliser son cashflow pour son développement, comme pour couvrir sa dette" ; que, au demeurant, la dette de Vivendi Environnement était connue du public pour avoir fait l’objet d’une part, d’articles de presse dont l’un du 3 octobre 2000, du journal "La Tribune" qui pré-cisait "la dette pro forma de Vivendi atteignait au 30 juin 14,5 milliards d’euros dont 13,3 milliards d’euros pour Vivendi Environnement" et de deux autres articles du journal "Les Echos" du 20 novembre 2000 qui étaient spécifiquement consacrés à la dette de Vivendi Environ-nement intitulés ("la dette n’inquiète plus les investis-seurs") et, d’autre part, pour avoir été évoquée abondamment dans le prospectus mis à dispositions du public et des actionnaires de Vivendi Universal, quelques jours avant l’assemblée générale extraordinaire du 5 décembre 2000, qui avait approuvé la fusion à 90 %,

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tembre 2001, qui mentionnaient le chiffre de – 0,02 milliards d’euros (- 23 millions d’euros), et employé lors de la conférence téléphonique de M. MMMM... avec les analystes à cette même date ; que le communiqué de presse du 25 septembre 2001, faisait uniquement réfé-rence au "cashflow dégagé par les activités Médias et communication" et excluait nettement de son périmètre la branche environnement du groupe ; qu’il ne saurait être tenu compte dans la caractérisation de l’infraction de l’absence de prise en compte dans les chiffres présen-tés du cashflow négatif de la branche environnement ; qu’aux termes de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier susmentionné, l’information fausse doit être de nature à agir sur les cours ; qu’en l’espèce, il n’appa-raît pas établi, dès lors que ce chiffre se situait dans le cadre d’une amélioration sensible de cet indicateur entre 2000 et 2001, qu’une inexactitude portant sur 23 mil-lions d’euros ait été de nature à avoir une influence sur les cours ; que si, certes, le communiqué de presse aurait dû indiquer "légèrement négatif " et non pas "à l’équilibre", les transparents présentés au conseil d’administration de Vivendi Uni versal, à la presse et aux analystes financiers mentionnaient bien le chiffre de – 0,02 milliard d’euros ; que, dès lors, le communiqué n’était pas trompeur ; qu’en conséquence, aucune faute civile en relation avec les faits reprochés n’est établie à l’égard des deux prévenus ;

« aux motifs que, sur la diffusion d’informations fausses du fait de l’annonce de l’annulation de trente-trois millions d’actions d’autocontrôle par un communiqué du 25 septembre 2001 : qu’il est reproché à MM. NNNN... et MMMM... d’avoir annoncé au public par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que Vivendi Universal va annuler 33 millions d’actions supplémen-taires, portant à 5 % de son capital les annulations réali-sées depuis fin juin 2001, alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé notamment lors du commu-niqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la nonexécution de cette décision d’annulation de titres ; que M. NNNN... soulève une exception de prescription de l’action publique au motif qu’aucun acte interruptif de prescription ne serait intervenu concernant ces faits depuis le 25 septembre 2001 ; que M. NNNN... a été mis en examen pour ces faits le 16 mai 2007 au vu des réqui-sitoires introductif du 29 octobre 2002 et supplétifs des 13 octobre 2003 (visant la révélation de la COB du 12 septembre 2003 sur la base de son rapport du 4 sep-tembre 2003, et demandant au juge d’instruire sur les communications publiques des dirigeants du groupe Vivendi Universal en 2000, 2001 et 2002) et 30 juin 2005 ; que l’interruption de prescription à l’égard d’une infrac-tion produit un effet interruptif à l’égard des infractions connexes ; qu’en l’espèce, il sera exposé dans les dévelop-pements ci-dessous que les opérations d’acquisition d’USA Networks et d’Echostar, de cession des 55 millions d’actions d’autocontrôlé le 7 janvier 2002 et de renoncia-tion à l’annulation du projet d’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôlé sont liées par une lien évident de connexité, la renonciation à l’annulation conditionnant la faisabilité des autres opérations ; que les investigations des services de police et du juge d’instruction, interrup-tives de prescription, ayant par la suite été diligentées en ce qui concerne ces opérations postérieurement au réqui-

Vivendi Universal sera nette de dette au 1er janvier 2001 ; qu’en conséquence, au vu de l’ensemble de ces constata-tions, l’élément intentionnel du délit visé à la prévention n’est pas établi à l’égard de M. NNNN... qui sera relaxé ; que le jugement déféré étant infirmé de ces chefs ;

« aux motifs que, sur le communiqué de presse sur les cashflows du 25 septembre 2001 ; qu’il est reproché à MM. NNNN... et MMMM... d’avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant, lors de la présentation des résultats du premier semestre 2001, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités médias et com-munication, alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 millions d’euros comme l’information en avait été donnée aux membres du comité des comptes le 18 sep-tembre 2001 et à ceux du comité exécutif du 26 sep-tembre 2001 ; que Vivendi Universal a indiqué dans un communiqué de presse du 25 septembre 2001 : "le cash-flow dégagé par les activités Médias et communication a pour la première fois couvert 100 % des dépenses en capi-tal consacrées aux immobilisations corporelles. Au cours du premier semestre 2001, le cashflow disponible a été de plus de 500 millions d’euros (environnement exclu) (…) Pour la première fois également, le cashflow est positif, même après prise en compte des frais financiers, impôts et frais de restructuration ; que, dans le même temps, des transparents (en langue anglaise) ont été présentés au conseil d’administration de Vivendi Universal, à la presse et aux analystes financiers, lesquels indiquaient (traduction en français) : "Le free cashflow est à l’équi-libre après intérêts, charges de restructuration et impôts payés, tout en mentionnant le chiffre de 0,02 milliard d’euros" ; que, de même, le procès-verbal du comité des comptes du 18 septembre 2001 mentionnait : "le PCF des opérations sur le premier semestre s’établit à E-23 m après intérêts, impôts payés et charges de restructura-tion, proche du breakeven (…)" ; que MM. NNNN... et MMMM... ont reconnu l’inexactitude de l’annonce d’un cashflow net "positif " de l’activité Média et communica-tions ; que M. NNNN... a soutenu qu’il s’agissait d’une erreur de traduction entre la version anglaise et française du communiqué, expliquant : "la traduction en fran-çais était confiée à un prestataire de services extérieur et il a pu arriver que je n’aie pas l’occasion ou le temps de lire cette traduction extérieure avant publication" ; que M. MMMM... a également invoqué une erreur de tra-duction dont il a contesté la caractère significatif, indi-quant que les projets de communiqués de presse étaient rédigés en anglais et que, s’agissant des cashflows néga-tifs, qui étaient passés d’un milliard en 2000 à 20 mil-lions au premier semestre 2001, il était alors approprié d’utiliser la notion de "breakeven" qui signifie "rentrer dans ses frais" ou "à l’équilibre" ; qu’il a encore expliqué qu’au regard de la nette amélioration de cet indicateur entre 2000 et 2001, passé d’un milliard d’euros à - 23 millions d’euros au 30 juin 2001, le groupe avait à bon droit considéré pouvoir annoncer qu’il était parvenu "à l’équilibre" et qu’il n’était pas faux de dire qu’ils avaient atteint le "point mort" ; que le terme de "breakeven" avait été également utilisé dans les transparents remis aux administrateurs et aux analystes financiers, le 25 sep-

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Vivendi Universal, la société avait décidé "d’utiliser la faculté qui lui a été donnée par l’assemblée générale de racheter sur le marché environ 33 millions de ses propres actions. Ces titres, qui ont été ou seront rachetés, seront annulés. Compte tenu de l’opération similaire réa-lisée le 28 juin dernier, 5 % du capital auront été ainsi annulés. Une telle opération est créatrice de valeur pour l’actionnaire, étant relative dans des proportions équivalentes tant au niveau de l’excédent brut d’exploita-tion par action, que du bénéfice par action et de la valeur d’actif net par action" ; qu’à l’issue de celle opération, l’autocontrôle de Vivendi Universal s’établira à 5 % du capital" ; que l’assemblée générale des actionnaires avait autorisé, le 24 avril 2001, le conseil d’administration à procéder à de telles annulations de titres, dans la limite de 10 % du capital ; lequel conseil, le 25 septembre 2001, avait approuvé une telle annulation, sous la condition que la réduction du capital social en résultant soit enre-gistrée avant le 31 décembre 2001 ; que cette annonce était intervenue en pleine période d’achats massifs par Vivendi Universal de ses propres actions, à la suite notamment des attentats du 11 septembre ; qu’il appa-raît ainsi que durant la période, du 17 septembre au 2 octobre 2001, Vivendi Universal avait acquis 21 753 069 d’actions à hauteur d’un montant total de 1 016 501 895 euros ; qu’elle avait poursuivi ses achats de titres au 4e trimestre, sur un rythme certes moins élevé à partir du 11 octobre, jusqu’à atteindre 105,7 millions de titres auto-détenus au 31 décembre 2000 ; qu’ainsi selon un tableau remis à l’AMP, le groupe Vivendi Universal déte-nait 83,9 millions d’actions d’autocontrôle et d’ADS au 25 septembre 2001 ; que, sur les tableaux d’opérations d’achats/ventes de titres d’autocontrôlé, de septembre et octobre 2001, la direction de la trésorerie de Vivendi Universal avait porté la mention, à côté des achats réali-sés à partir du 17 septembre et jusqu’au 31 octobre, "achat de titres destinés à être annulés" ; que, si Vivendi Universal avait, les 25 septembre et 14 novembre 2001 effectivement procédé à des annulations d’actions pour une quantité limitée, respectivement de 3,1 millions et de 1,4 million de titres, elle n’était pas allée au-delà ; qu’au contraire, la société avait annoncé, le 7 janvier 2002, par un nouveau communiqué de presse, la cession d’un bloc de 55 millions d’actions à Deutsche Bank et Goldman Sachs dans une fourchette de prix de 60 à 61 euros ; que, dans ce communiqué, Vivendi Universal expliquait que le produit de la vente des titres serait, pour l’essentiel, affecté à la réduction de la dette du groupe et que l’auto-contrôlé après cette cession s’établirait entre 1,5 % et 2,5 % du capital, "compte tenu des 37 millions de titres qui seront échangés avec Liberty Media dans le cadre de l’opération USA Networks" ; que, en effet, les dirigeants de Vivendi Universal en étaient progressivement venus à abandonner le projet d’annulation à raison d’une part, de l’acquisition des actifs divertissements de la société USA Networks, pour environ 10,3 milliards de dollars – 7 milliards devant être financés sous forme d’actions USA Networks déjà détenues, 1,65 milliard devant être payé à Liberty Média sous forme de cession de 32 mil-lions d’actions d’autocontrôlé de VU et 1,62 milliard de dollars devant être acquitté en espèces – de l’alliance avec le groupe américain Echostar Communications dans lequel Vivendi Universal devait investir 1,5 milliard de

sitoire du 13 octobre 2003, la prescription n’était pas acquise à la date de la mise en examen de M. NNNN... ; que les prévenus font valoir à l’appui de leurs conclusions de relaxe que l’annonce faite le 25 septembre 2001 n’était pas mensongère, comme l’ont d’ailleurs admis le magis-trat instructeur et les premiers juges ; que, dans ces condi-tions les éléments constitutifs du délit font défaut, dès lors qu’au jour de la publication litigieuse, les dirigeants avaient réellement l’intention de procéder à l’opéra-tion annoncée, à savoir l’annulation des 33 millions d’ac-tions ; que le fait pour les dirigeants d’avoir modifié leur opinion, située au 9 décembre 2001, soit près de trois mois après la communication critiquée, est hors de la préven-tion ; que la non réalisation d’une prévision, ne peut rétrospectivement la vicier ; que, dès lors, le concept déve-loppé par les premiers juges de rétroactivité du caractère trompeur d’un communiqué n’existe pas en droit positif ; qu’en tout état de cause, la société avait bien informé le marché, à l’occasion des différentes présentations orales et écrites, de cette opération d’acquisition (USA Networks), annoncée le 17 décembre, que le financement de celle-ci devait se faire par l’attribution des actions dont l’annulation avait été initialement envisagée ; qu’à ce titre devra être noté que la société Vivendi avait expressément mis en ligne, à compter du 17 décembre 2001, sur son site internet, les détails de cette acquisition, et notamment les caractéristiques de son financement et ses incidences pour la société à savoir : "Consolidating Ebitda (…) And additionnal free cash flow (…) Without creating new VU (except for 32 mm swapped to Liberty instead of being cancelled by year end" (à l’exception de 32 millions de titres remise n échange à Liberty au lieu d’être annulés à la fin de l’année) ; que ce qui est qualifié "d’annulation de l’annulation", n’est en réalité qu’une substitution de cette annulation par un projet encore plus favorable pour l’actionnaire, à savoir l’utilisation de ces titres en paie-ment d’une acquisition ; qu’enfin il n’est pas démontré que le communiqué en cause aurait pu être de nature à agir sur le cours de bourse ; que les parties civiles font valoir que cette annonce, comme les rachats massifs de titres, étaient de nature à soutenir le cours du titre Vivendi Universal et à le tirer à la hausse ; que d’ailleurs le communiqué faisait état du caractère relutif de l’opéra-tion ; que la mise en ligne, le lendemain du communiqué du 17 décembre 2001, des informations relatives à l’an-nulation de l’annulation ne saurait en aucun cas être considérées comme une information claire à destination du public, le mode de communication choisi, avec un décalage dans le temps de quelques heures en plus, n’of-frant bien évidemment aucune garantie de diffusion sin-cère de l’information auprès des actionnaires ; que prétendre que les informations sibyllines diffusées par le communiqué du 17 décembre 2001 et susceptibles de n’être comprises et entendue que par certains analystes financiers constituent une information diffusée de bonne foi est une parfaite démonstration de la mauvaise foi des prévenus dans le cadre d’opérations réalisées loin de toute transparence ; que, le 25 septembre 2001, Vivendi Uni-versal annonçait, par communiqué de presse, que son conseil d’administration avait autorisé l’annulation de 33 millions d’actions représentant 3 % du capital du groupe ; que ce communiqué précisait que, compte tenu du carac-tère attractif du niveau de cours atteint par l’action

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Networks (USA). Pour financer ces nouvelles transac-tions, VU, dans le cadre d’un crédit neutre :

– a déjà cédé 9,3 % de Vivendi Environnement pour un montant de 1,2 milliard d’euros ;

– a l’intention d’annoncer simultanément à la transac-tion, que son conseil a décidé de ne pas annuler à la fin de l’année les 33 millions d’actions qui ont été rachetées sur le marché en septembre/octobre 2001 pour un prix moyen de 47 euros et qui étaient sur le point d’être annu-lées (…) ;

– pour arriver à un allégement supplémentaire, dans les semaines ou parallèlement ou pendant le déroulement des transactions par le biais d’une opération portant sur deux marchés vente d’un bloc d’actions de trésorerie (d’autocontrôle) de VU ; QUE le 17 décembre 2001, dans un communiqué de presse Vivendi Universal annon-çait la conclusion de l’opération "USA Networks" et les modalités de son financement en ces termes : "Prix :envi-ron 10,3 milliards de dollars pour une opération asso-ciant titres et cash-Financement : 7 milliards de dollars sous forme d’actions USAI, déjà détenues par VU : 1, 65 milliards de dollars pour Liberty Média sous forme d’ac-tions d’autocontrôle de Vivendi : 1,62 milliard en cash : Création de valeur pour les actionnaires de Vivendi Uni-versal : Cette opération se traduit par une création signi-ficative de valeur pour les actionnaires » ;

que, contrairement aux allégations de M. NNNN..., il est constant que le communiqué de presse du 17 décembre 2001, s’il annonçait l’opération USA Networks et son mode de financement à savoir : 70,3 milliards de dollars, 7 milliards devant être financés sous forme d’actions USA Networks déjà détenues, 1,65 milliard devant être payé à Liberty Média sous forme de cession de 32 millions d’actions d’autocontrôle de VU et 1,62 milliard de dollars devant être acquitté en espèces … celui-ci ne faisait aucunement allusion au fait que ces 32 millions d’actions résulterait de l’abandon de l’annu-lation des 33 millions d’actions objet du communiqué litigieux du 25 septembre 2001 ; que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier réprime le fait de répandre dans le public, en toute connaissance de cause, des infor-mations fausses ou trompeuses, qu’il s’agit d’un délit de commission et non d’abstention qui est constitué le jour du communiqué ; que, s’agissant d’un délit instantané c’est donc au jour de sa commission que le caractère faux ou trompeur doit s’apprécier ; que, selon les termes de l’ordonnance de renvoi, est reproché à M. NNNN... le communiqué de presse du 25 septembre 2001 annon-çant l’annulation de 33 millions d’actions d’autocon-trôle, laquelle information serait devenue mensongère le 17 décembre 2001 pour ne pas avoir annoncé à cette date dans le communiqué de presse du 17 décembre 2001, relatif à l’opération USA Networks, la renonciation à cette annulation ; qu’il est avéré que l’annonce du 25 sep-tembre 2001, qui intervenait en pleine période de rachats massifs par Vivendi Universal de ses propres actions à la suite des attentats du 11 septembre, en vue de réguler le cours de l’action, n’était pas mensongère car correspon-dant à cette époque à l’intention de ses dirigeants ; que l’explication de M. NNNN..., selon laquelle Vivendi Uni-versal n’ ayant aucun projet de transactions nécessitant le paiement en titres, ni besoin de couvertures de stocks

dollars en capital, opérations ayant fait l’objet de commu-niqués de presse les 11 et 17 décembre pour la première et le 14 décembre pour la seconde et, d’autre part, des enga-gements pris auprès des agences de notation de procéder rapidement au désendettement du groupe, ainsi que cela ressort de plusieurs échanges internes au groupe à savoir :

– le 26 novembre 2001, M. EEEEEEEEE..., dans un courrier à M. MMMM... indiquait à celui-ci, concer-nant le projet "Tier One" [USA Networks] : "Concernant ce financement, nous avons deux types de sous-jacents pour le réaliser soit des actions VE on BSKY B, soit des actions VU, dans ce dernier cas, en tant qu’insider [ini-tié] sur la transaction Tier One, il est probablement diffi-cile de réaliser toute transaction en sous-jacent VU avant d’avoir annoncé au marché les termes de la transaction (…) » ;

– le 7 décembre 2001, M. EEEEEEEEE... écrivait à M. MMMM... : "Nous détenons près de 107 millions d’actions d’autocontrôlé, dont 21 millions adossées aux SO [stock-options] et 33 qu’il est prévu d’annuler. II en reste donc encore plus de 50 millions à céder si nous le souhaitons ! Les vrais problèmes sont en fait : 1) que nous sommes sur un "pic" de valeur de VU et qu’il est donc très difficile de construire un book important dans ces cir-constances et 2) que nous sommes un peu insider [initiés] sur l’action et qu’il sera donc en conséquence difficile de la faire bénir par un avocat…" ; que le 10 décembre 2001, M. Pierre-Henry QQQQQQQQQ..., adjoint au direc-teur de la trésorerie, envoyait un mail, notamment à M. EEEEEEEEE..., en ces termes : "Ci-joint tableau sur achat d’actions VU en novembre. Les tableaux de sep-tembre et octobre ont été modifiés (répartition entre achats de titres destinés à être annulés et achats de titres pour régul du cours) pour que le total des titres destinés à être annulés soit exactement égal 33 millions (achat du 11 septembre an 29 octobre) » ;

– toutefois, le 8 décembre 2001, M. MMMM... évo-quait dans un courriel adressé à M. NNNN... le projet de cession de 35 millions d’actions d’auto contrôle en ces termes : "Pour Tier I, nous couvrons le paiement par 1,5 milliard de dollars sur B SKYB et pas plus que cela. Nous resterons avec 1 milliard de dollars +0,75 % de classe A (…), les 2,1 à 3 milliards du bloc Vivendi Universal et le reste 3,5 à 4 milliards de sky restent non gagés (…). Je suggère de toute façon que nous fassions les 35 millions de Vivendi Universal après l’annonce, seule façon pour justifier de ne pas les annuler » ;

que, dans un mémorandum confidentiel, adressé le 12 décembre à MM. Guy KKKKKKKKK... et Chris-tian RRRRRRRRR..., analystes financiers en charge de la notation de Vivendi Universal, respectivement chez Standard & Poor’s et Moody’s, M. MMMM... confirmait que pour financer ces nouveaux investissements Vivendi Universal avait l’intention d’annoncer que son conseil d’administration avait décidé de renoncer à annuler 33 millions d’actions avant la fin de l’année et qu’elle ven-drait de telles actions dans les semaines à venir, en ces termes : "Vivendi a l’intention d’annoncer rapidement une transaction avec Echosfar Communications et une restructuration de la participation de Vivendi dans USA

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ment exacte et ne pouvait être trompeuse, dans la mesure où :

– un dividende de 1 milliard d’euros a bien été payé courant 2003, au titre de l’exercice 2002, par son succes-seur ;

– la dette a bien été remboursée, Vivendi n’ayant pas fait défaut ;

– ce dividende et le remboursement de la dette ayant nécessairement été payés par les cashflows opérationnels de Vivendi ;

que les premiers juges ont fait une grave erreur d’ap-préciation puisque la prévision de cash-flow net pour 2002 était très positive (chiffre de 1,4 milliard) ; qu’ainsi le document présenté au comité d’audit de Vivendi Uni-versal le 23 avril 2002 et qui servait de fondement aux chiffres évoqués par lui au cours de l’assemblée générale du 24 avril 2002 faisait état pour l’activité média d’une prévision de cashflow net de 1,4 milliard pour l’année 2002 ; que contrairement aux affirmations de l’ordon-nance de renvoi, il est certain que le cashflow net de Vivendi Universal s’était considérablement amélioré, dès le premier semestre 2002, puisque le rapport d’activité de Vivendi Universal pour le premier semestre 2002, publié après le départ de M. NNNN..., faisait état d’une pro-gression des cashflow, ceux-ci présentant un solde « total des flux de trésorerie » dans le tableau des flux conso-lidés de plus de 229 millions d’euros au 30 juin 2002 contre un solde négatif de moins 955 millions d’euros au 30 juin 2001 ; qu’enfin il n’est pas démontré en quoi l’in-formation prétendument trompeuse aurait été de nature à avoir un effet sur le cours de bourse ; que les parties civiles font valoir qu’à aucun moment n’a été évoqué le cashflow négatif ; que l’essentiel du cashflow provenait de la participation dans Cégétel (à hauteur de 1,5 milliard d’euros) détenue à 34 % seulement par Vivendi Univer-sal, et n’était pas appréhendable compte tenu des accords avec les actionnaires de cette société, information qui a été constamment dissimulée au public ; qu’une confusion était délibérément entretenue par M. NNNN..., entre cashflow opérationnel (positif mais ne pouvant contraire-ment à ses affirmation, permettre de servir un dividende ou de diminuer la dette, dès lors que doivent d’abord être retranchées de ce solde les charges telles qu’intérêts et impôts) et le cashflow net (solde comptable disponible pour le remboursement du principal de la dette et le paie-ment d’un dividende, négatif en l’espèce) ; qu’il est évident qu’il ne suffit pas de constater que le cours de bourse ait baissé après la diffusion des informations en cause pour conclure que cette information n’était pas de nature à agir positivement sur le cours, l’information en cause ayant pu en l’espèce contribuer seulement à limiter la baisse ; qu’elle a pu également être légitimement (mais de manière erronée) jugée par l’investisseur comme devant favoriser une hausse future ; qu’à l’occasion de l’assemblée générale de Vivendi Universal du 24 avril 2002, statuant sur les comptes clos au 31 décembre 2001, M. NNNN... avait annoncé concernant les résultats du premier tri-mestre 2002 : "En ce qui concerne le cash sur lequel il n’est pas question de normes comptables – c’est l’argent qui sort et l’argent qui rentre, les résultats du premier trimestre montrent un saut énorme, avec 1,4 milliard d’euros de cashflow opérationnel. C’est deux fois et demie

options, le conseil d’administration avait décidé l’annu-lation de 33 millions d’actions d’autocontrôle paraît cré-dible ; que, d’ailleurs il résulte de l’ensemble des échanges de mails ci-dessus évoqués, que le projet d’annulation des 33 millions de titres était toujours d’actualité au 7 décembre 2001 (mail de M. EEEEEEEEE...) ; que, si le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rec-tifier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, le code monétaire et financier ne réprime pas le fait de s’abstenir de réactualiser une information vraie qui par la suite devient inexacte ; que la préven-tion, visant uniquement comme faux ou trompeur le communiqué du 25 septembre 2001, à défaut d’avoir visé, comme trompeur, le communiqué de presse du 17 décembre 2001 qui était lacunaire et incomplet "en annonçant l’opération USA Networks nécessitant la remise à Liberty Média de 32 millions d’actions VU, sans préciser que cela entraînerait la renonciation à l’annula-tion" (laquelle précision avait toutefois était mise sur le site internet de Vivendi Universal, le 18 décembre, mais uniquement en langue anglaise), n’est dès lors pas carac-térisée à l’égard des prévenus, le communiqué du 25 sep-tembre 2001, à cette époque correspondant à l’intention des dirigeants de Vivendi Universal ; qu’étant rappelé en outre s’agissant de M. MMMM... qu’il n’était pas le man-dataire de l’émetteur, ni le rédacteur du communiqué, ni celui qui l’avait validait et donnait Tordre de le diffuser ; qu’en conséquence il conviendra de prononcer la relaxe de M. NNNN... et M. MMMM... et d’infirmer le juge-ment déféré de ce chef ;

« aux motifs que, sur les déclarations, de M. NNNN..., lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 ; qu’il est reproché à M. NNNN... d’avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant lors de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001 durant l’assemblée générale du 24 avril 2002, un free cashflow opérationnel de 1,4 mil-liard d’euros présenté comme "pouvant servir demain non seulement au dividende mais également au rem-boursement de la dette" sans aucune information sur le cashflow net qui était en réalité négatif, une telle com-munication sur les données opérationnelles ayant donné l’illusion d’une richesse disponible pour le groupe alors que les données nettes, après prise en compte des frais financiers, des frais de restructuration et de l’impôt étaient négatives ; que M. NNNN..., à l’appui de ses conclusions de relaxe fait valoir, que l’information criti-quée faisait référence sans aucune ambiguïté au cashflow du premier trimestre 2002 ; qu’il est certain que ce chiffre s’était considérablement amélioré dès le premier semestre 2002, puisque le rapport d’activité de Vivendi Universal publié après son départ, faisait état d’une progression des cashflow, présentant un solde "total des flux de trésorerie" dans le tableau des flux consolidés de plus 299 millions d’euros au 30 juin 2002, contre un solde négatif de - 955 millions au 30 juin 2001 ; qu’ainsi les considérations selon lesquelles le "free cashflow" n’avait aucune chance de s’améliorer sont inexactes ; qu’en tout état de cause la cour devra constater que sa déclaration était rigoureuse-

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qu’il apparaît à la lecture de ces divers documents, que les résultats de Vivendi Universal s’étaient effectivement améliorés pour la période du premier trimestre 2002, sa trésorerie étant devenue positive et avait ainsi permis de réduire pour partie sa dette celle-ci passant de 19,1 mil-liards au 31 décembre 2001 à 17,1 milliards d’euros au 31 mars 2002 ; qu’il apparaît dès lors que les déclarations de M. NNNN... qui portaient sur le premier trimestre 2002 n’étaient pas fausses, étant relevé que ce dernier avait pris la précaution de préciser : "Au niveau du cash-flow opérationnel dégagé par nos métiers nous enregis-trons 900 millions de mieux que noire budget (…) Même si on ne renouvellera pas forcément des performances de même niveau chaque trimestre, ces résultats ne sont pas le fruit du hasard (…)", performances qui effectivement ne se renouvelleront pas dans de telles proportions pour le second trimestre 2002, mais qui resteront cependant positives ; qu’au vu de l’ensemble de ces constatations, n’est pas caractérisé en ses éléments matériels et inten-tionnel le délit tel que visé à la prévention à l’égard du prévenu ; qu’en conséquence le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;

« 1° alors que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier incrimine le fait de répandre ou de tenter de répandre, dans le public par des voies et moyens quel-conques, des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur ou de ses titres admis aux négociations sur un marché réglementé au sens de l’article L. 421-1 du code monétaire finan-cier ; que les juges ont le devoir de requalifier les faits dont ils sont saisis ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publi-quement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débou-ter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, que si, certes, il n’avait pas fait état spontanément de la dette Vivendi Environnement lors de la conférence de presse du 11 décembre 2000, celle-ci avait été rappelée par un journaliste puis admise par M. NNNN... qui en avait ensuite relativisé l’impact, la cour d’appel qui a ainsi constaté que M. NNNN... avait, à tout le moins, tenté de dissimuler l’existence de cette dette et par conséquent tenté de répandre une information boursière trompeuse, aurait dû requalifier les faits de la prévention en tenta-tive ; qu’en ne procédant pas à cette requalification, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés ;

« 2° alors que le caractère faux ou trompeur d’une information boursière s’apprécie à la date de sa diffu-sion ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publiquement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Sea-gram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter l’en-semble des parties civiles de leurs demandes, que des articles de presse et un prospectus mis à la distribution du public faisaient état de l’existence d’une dette proforma de Vivendi au 30 juin 2000 de sorte que les actionnaires

plus de cashflow opérationnel que l’an dernier sur le pre-mier trimestre. Et l’essentiel de cette avance sur notre plan de marche provient des métiers que nous contrôlons à 100 % et doit pouvoir servir demain, non seulement aux dividendes, mais également au remboursement de la dette. Notre dette, qui était de 19,1 milliards d’euros au 31 décembre 2001, est de 17,1 milliards d’euros au 31 mars 2002 – soit 2 milliards de moins en trois mois. Nous sommes en avance au niveau de notre chiffre d’af-faires. On a fait au premier trimestre 300 millions d’eu-ros de mieux, en chiffre d’affaires, que ce que l’on pensait. Au niveau de l’excédent brut d’exploration on a fait 160 millions d’euros de mieux que notre plan de marche. Au niveau du résultat d’exploitation nous enregistrons 260 millions de mieux. Au niveau du cashflow opérationnel dégagé par nos métiers nous enregistrons 900 millions de mieux que notre budget (…) Même si on ne renou-vellera pas forcément des performances de même niveau chaque trimestre, ces résultats ne sont pas le fruit du hasard (…)" ; qu’il est constant que pour l’année 2001, le "free cashflow net" était négatif en normes américaines à hauteur de 134,2 millions et légèrement positif en normes françaises de 8,8 millions d’euros, ainsi que cela résulte des documents remis au magistrat instructeur puis à la cour par la défense de M. NNNN... ; qu’il est indubitable que M. NNNN... dans ce communiqué faisait des obser-vations sur les résultats pour le premier trimestre 2002 ; que les déclarations de M. NNNN... s’appuyaient sur des documents présentés au comité d’audit, le 23 avril 2002, qui mentionnaient effectivement une prévision de "cash from opération net of capex" pour l’année 2002 de mil-liard d’euros pour le groupe ; qu’il s’agissait bien de pré-visions portant sur le cashflow après impôts, intérêts, charges et investissements qui pourra être utilisé pour rembourser la dette et verser un dividende ; que le pro-cès-verbal du comité des comptes du 23 avril 2002 faisait état au chapitre "Prévision de free cashflow 2002-2004" : "Les prévisions de free cashflow opérationnel 2002 pour-raient être revues à la hausse de 1 milliard d’euros, (…) Après impôts, coûts de financement, restructuration et avant distribution de dividende, le cashflow disponible est estimé à 1,3 milliard d’euros pour 2002" ; que le pro-cès-verbal du conseil d’administration du 24 avril 2002 au chapitre : "Résultats du premier trimestre 2002 et point sur la stratégie" relatait : "M. NNNN..., indique que la société a enregistré une forte croissance de son chiffre d’affaires, de son Ebitda, de son résultat d’exploitation et de son free cashflow pour le premier trimestre 2002, clos le 31 mars 2002 : – en excluant les actifs de Vivendi Uni-versal Publishing (VUP) dont la cession a été décidée, le chiffre d’affaires s’établit à 6,8 milliards d’euros, l’Ebitda à 1,1 milliard d’euros et le résultat d’exploitation à 408 millions d’euros ; – si on tient compte des actifs VUP à céder le chiffre d’affaires s’établit à 7,1 milliards d’euros, l’Ebitda à 1,2 milliard d’euros et le résultat d’exploitation à 436 millions d’euros, le free cashflow opérationnel est de 0,9 million d’euros environ supérieur à ce qu’il était l’an passé" ; qu’en outre le rapport d’activité de Vivendi Universal, pour le premier semestre 2002, rédigé après le départ de M. NNNN... ; que faisait état d’une progression des cashflows, ceux-ci présentant un solde dans les résul-tats consolidés de + 299 millions d’euros au 30 juin contre un solde négatif de 955 millions d’euros au 30 juin 2001 ;

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d’euros comme l’information en avait été donnée aux membres du comité des comptes le 18 septembre 2001 et à ceux du comité exécutif le 26 septembre 2001 ; qu’en énonçant, pour relaxer les prévenus de ces chefs et débou-ter les parties civiles de leurs demandes, de ce chef, qu’il n’apparaissait pas établi qu’une inexactitude portant sur 23 millions d’euros ait été de nature à avoir une influence sur les cours dès lors que ce chiffre se situait dans le cadre d’une amélioration sensible de cet indicateur entre 2000 et 2001, sans rechercher si, eu égard à sa nature, une information erronée sur l’existence même d’un free cash-flow net positif n’était pas de nature à agir sur les cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 6° alors qu’en relaxant MM. NNNN... et MMMM... pour avoir, lors de la présentation des résultats du groupe Vivendi Universal au premier semestre 2001, annoncé, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités média et communica-tion alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 mil-lions d’euros, et en déboutant les parties civiles de leurs demandes sur ce fondement, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que cette information, donnée de manière erronée aux actionnaires du groupe Vivendi, avait été donnée de manière exacte quelques jours avant aux membres du comité des comptes et quelques jours après à ceux du comité exécutif du groupe Vivendi Uni-versal, n’établissait qu’elle était de nature à agir sur les cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code monétaire et finan-cier ;

« 7° alors que les juridictions correctionnelles doivent statuer sur l’ensemble des faits dont elles sont saisies par l’ordonnance de renvoi ; qu’aux termes de l’ordon-nance du 16 octobre 2009, MM. NNNN... et MMMM... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour avoir annoncé, "par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que "Vivendi Universal va annu-ler 33 millions d’actions supplémentaires, portant à 5 % de son capital les annulations réalisées depuis fin juin [2001]", alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé, notamment lors du communiqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la non-exécution de cette décision d’annulation de titres" ; qu’en énonçant, pour relaxer MM. NNNN... et MMMM... de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, que la prévention visait uniquement comme faux ou trompeur le communiqué du 25 septembre 2001 et non celui du 17 décembre 2001 dont elle a reconnu le caractère lacu-naire et incomplet, quand les prévenus étaient poursuivis pour ne pas avoir informé le public lors du communiqué de presse du 17 décembre 2001 de l’absence d’annulation des titres litigieux, la cour d’appel a méconnu l’étendue de sa saisine en violation de l’article 388 du code de procé-dure pénale ;

« 8° alors que se rend coupable du délit de diffusion d’information fausse ou trompeuse l’émetteur qui s’abs-tient de rectifier une information exacte lors de sa dif-fusion qui devient par la suite inexacte ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que MM. NNNN... et MMMM... ont

ne pouvaient se méprendre sur le montant de la dette du groupe qui ne pouvait, compte tenu de son importance, avoir été résorbée en six mois, quand seule comptait la question de savoir si, à la date de la diffusion dudit com-muniqué, soit le 11 décembre 2000, le fait d’avoir indiqué qu’au 1er janvier 2001 le groupe Vivendi Universal serait net de dettes pour ses activités communications était mensonger, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 3° alors que le délit de diffusion d’information boursière fausse ou trompeuse ne suppose la preuve d’aucun dol spécial ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publi-quement lors de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er janvier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débou-ter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, que les éléments de la procédure ne permettaient pas d’affirmer qu’à l’époque de la diffusion du communiqué du 19 décembre 2002, la direction de Vivendi Univer-sal ait eu l’intention de tromper le public sur la dette de la branche Média et communication de Vivendi Univer-sal, la cour d’appel a méconnu l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 4° alors que le délit de diffusion d’information bour-sière fausse ou trompeuse est constitué dès lors que l’au-teur d’un communiqué public a conscience du caractère faux ou trompeur de l’information qu’il diffuse ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir annoncé publiquement lors d’un communi-qué du 11 décembre 2000 tenu à l’occasion de la fusion de la société Vivendi avec la société Seagram que, suite à cette fusion, "sur une base proforma au 1er jan-vier 2001, Vivendi Universal sera net de dettes pour ses activités communications" ; qu’en énonçant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes, qu’il n’était pas indubitablement établi que les dirigeants de Vivendi Universal aient connu avant le mois de mars 2001 les différents éléments expliquant le glissement de la dette de la branche Média et communication de Vivendi Uni-versal à 3,4 millions d’euros, quand seule comptait la question de savoir si ces dirigeants connaissaient l’exis-tence même de cette dette lors de la diffusion du com-muniqué du 11 décembre 2000, la cour d’appel a violé l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 5° alors que le délit de diffusion d’information bour-sière fausse ou trompeuse est constitué par la diffusion d’une information fausse ou imprécise de nature à agir sur les cours ; que l’appréciation de l’impact potentiel sur le cours d’une information doit se faire objectivement, eu égard à sa nature et non au montant des sommes sur lesquelles elle porte ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que MM. NNNN... et MMMM... ont été poursuivis pour avoir, lors de la présentation des résultats du groupe Vivendi Universal au premier semestre 2001, annoncé, par communiqué de presse du 25 septembre 2001, un free cashflow net positif des activités média et communica-tion alors qu’en réalité le free cashflow net de la branche média et communication était négatif de 23,1 millions

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qu’il était en réalité négatif, que s’agissant de l’annonce de l’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôle par communiqué du 25 septembre 2001, le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rectifier toute infor-mation devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, ce que les prévenus avaient manifestement omis de faire en s’abstenant d’informer le public de la renonciation à l’an-nulation desdites actions d’autocontrôle, ce dont il ressor-tait l’existence de fautes civiles imputables aux dirigeants poursuivis, peu important que l’élément intentionnel du délit n’ait pu être caractérisé, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations » ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour l’as-sociation des petits porteurs actifs (APPAC) et autres parties civiles, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2 et 497 du code de procédure pénale, L. 465-2 du code monétaire et financier, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme et premier du Protocole additionnel de ladite Conven-tion :

« en ce que les parties civiles ont été déboutées de leurs demandes présentées en réparation du préjudice subi du fait du délit d’informations fausses ou trompeuses pour agir sur le cours des titres négociés de la société Vivendi Universal ;

« aux motifs que si, certes, dans le communiqué du 19 décembre 2000, dont l’objet était d’annoncer la ces-sion de la branche vins et spiritueux de Seagram pour la somme de 8,15 millions d’euros, Vivendi Universal pour ses activités communication était présentée, en tenant compte du produit de cette cession (7,7 milliards d’euros) comme nette de dette sur une base pro forma au 1er jan-vier 2001, tandis qu’en réalité la dette de la branche média sera de 3 338 000 euros au 31 décembre 2000, ainsi qu’elle sera annoncée au conseil d’administration et aux investisseurs et analystes financiers le 9 mars 2001, les éléments de la procédure ne permettent pas d’affirmer qu’à l’époque de la diffusion dudit communiqué, la direc-tion de Vivendi Universal ait eu l’intention de tromper le public sur la dette de la branche média et communi-cation de Vivendi Universal ; (…) qu’aux termes de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier, l’infor-mation fausse doit être de nature à agir sur les cours ; qu’il n’apparaît pas établi, dès lors que ce chiffre se situait dans le cadre d’une amélioration sensible de cet indica-teur entre 2000 et 2001 qu’une inexactitude portant sur 23 millions ait été de nature à avoir une influence sur les cours ; que si, certes, le communiqué de presse aurait dû indiquer "légèrement négatif " et non pas "à l’équilibre", les transparents présentés au conseil d’administration de Vivendi Universal, à la presse et aux analystes financiers mentionnaient bien le chiffre de – 0,02 milliard d’euros ; que, dès lors, le communiqué n’était pas trompeur ; qu’en conséquence, aucune faute civile en relation avec les faits reprochés n’est établie à l’égard des deux prévenus ; (…) que, si le règlement AMF impose à l’émetteur de recti-fier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, le code monétaire et financier ne réprime pas le fait de s’abstenir de réactualiser une information vraie qui par la suite devient inexacte ; (…) que compte tenu de la relaxe à intervenir à l’égard de MM. NNNN... et MMMM... au titre du délit d’informations fausses

été poursuivis pour avoir annoncé, "par communiqué de presse en date du 25 septembre 2001, que "Vivendi Universal va annuler 33 millions d’actions supplémen-taires, portant à 5 % de son capital les annulations réa-lisées depuis fin juin [2001]", alors que cette annulation de titres n’a jamais été mise en œuvre ultérieurement et que le public n’a pas été informé, notamment lors du communiqué de presse en date du 17 décembre 2001, de la non-exécution de cette décision d’annulation de titres" ; qu’en énonçant, pour relaxer les prévenus de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, que si le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rectifier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, le code monétaire et financier ne réprime pas le fait de s’abstenir de réactualiser une information vraie qui par la suite devient inexacte, la cour d’appel a méconnu les dispositions de l’article L. 465-2 du code monétaire et financier ;

« 9° alors qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. NNNN... était poursuivi pour avoir donné au public des informations fausses ou trompeuses sur la situation financière du groupe Vivendi Universal en annonçant lors de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001 durant l’assemblée générale du 24 avril 2002, un free cashflow opérationnel de 1,4 mil-liard d’euros présenté comme pouvant "servir demain non seulement au dividende mais également au rem-boursement de la dette" sans aucune information sur le cashflow net qui était en réalité négatif, une telle commu-nication sur les données opérationnelles ayant donné l’il-lusion d’une richesse disponible pour le groupe alors que les données nettes, après prise en compte des frais finan-ciers, des frais de restructuration et de l’impôt étaient négatives ; qu’il résulte encore de l’arrêt attaqué que, pour l’exercice 2001, soit au 1er janvier 2002, le cashflow net était négatif en normes américaines à hauteur de 134,2 millions et légèrement positif en normes françaises à hau-teur de 8,8 millions d’euros ; qu’en retenant, pour relaxer M. NNNN... de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, qu’il résultait de certains documents que les prévisions de cashflow net pour l’exercice 2002 à 2004 étaient de 1,4 milliard d’euros et que le cashflow net avait effectivement progressé au premier semestre 2002, sans rechercher si, à la date du communiqué litigieux, le fait d’annoncer l’existence d’un free cashflow opérationnel de 1,4 milliard d’euros n’était pas mensonger et de nature à influer sur le cours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 465-2 du code moné-taire et financier ;

« 10° alors que le dommage dont la partie civile peut obtenir réparation de la personne relaxée résulte de la faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; qu’en affirmant qu’aucune faute civile n’était établie à l’encontre de MM. NNNN... et MMMM... et des autres prévenus au titre d’informa-tions fausses ou trompeuses, tout en relevant que, dans le communiqué de presse du 19 décembre 2000, il était fait une présentation erronée de l’endettement de la branche médias du groupe Vivendi Universal, que dans le com-muniqué de presse du 25 septembre 2001 MM. NNNN... et MMMM... avaient fait état d’un cash-flow positif dégagé par les activités médias et communication tandis

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tant invitée, si les décisions administratives de l’Autorité des marchés financiers devenues définitives et condam-nant les prévenus à raison des faits identiques de diffu-sion d’informations fausses et trompeuses, confirmées par arrêt de la Cour de cassation du 19 décembre 2006, étaient de nature à établir l’existence de fautes civiles imputables à MM. NNNN... et MMMM..., la cour d’ap-pel a privé sa décision de base légale ;

« 3° alors que, celui qui acquiert ou conserve des titres émis par voie d’offre au public au vu d’informa-tions inexactes, imprécises ou trompeuses sur la situa-tion de la société émettrice perd une chance d’investir ses capitaux dans un autre placement ou de renoncer à celui déjà réalisé ; qu’en se bornant à affirmer que les parties civiles n’avaient pas rapporté la preuve de l’exis-tence d’un lien de causalité entre la faute commise par chacun des prévenus en relation avec les faits qui leur étaient reprochés à la prévention et le préjudice allégué, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si une telle démonstration ressortait nécessairement du fait que les parties civiles avaient été incitées à investir dans la société Vivendi Universal par les informations diffu-sées "par voie de presse par M. NNNN..., qui a sur-com-muniqué en des termes non conformes à la réalité, sans frein apporté par M. MMMM..., responsable de l’infor-mation… et encouragées par les prévenus eux-mêmes du fait de leurs manœuvres trompeuses d’acquisitions mas-sives des propres titres, annonce d’annulation d’actions non démentie volontairement", de sorte que ces informa-tions inexactes étaient en lien direct avec leur perte d’une chance de mieux arbitrer leurs investissements, la cour d’appel a privé sa décision de base légale » ;

Les moyens étant réunis ;Attendu que M. NNNN... a été poursuivi pour quatre

faits de diffusion d’informations fausses ou trompeuses, lors du communiqué de presse du 19 décembre 2000 et de l’interview au journal Les Echos du 11 décembre 2000 concernant le niveau d’endettement du groupe, lors du communiqué de presse du 25 sep-tembre 2001 concernant le montant du free cash flow net des activités médias et communication, lors d’un communiqué de presse du même jour concernant l’an-nulation de 33 millions d’actions d’auto-contrôle jamais réalisée et lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002 concernant la présentation des comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2001 ; que M. MMMM... a été poursuivi pour les trois premiers de ces faits ; que le tribunal a relaxé M. NNNN... pour le deuxième de ces faits et l’a condamné pour le surplus ; que le tribunal a relaxé M. MMMM... pour une partie du premier de ces faits, soit concernant l’interview du 11 décembre 2000, et pour le deuxième de ces faits, le condamnant pour le surplus ;

Attendu que, pour infirmer le jugement et relaxer M. NNNN... des faits relatifs au communiqué de presse du 19 décembre 2000 et à l’interview du 11 décembre 2000 et débouter les parties civiles de leurs demandes à son égard, la cour d’appel énonce que lors de la confé-rence de presse du 11 décembre 2000, la dette de Vivendi Environnement, rappelée par un journaliste, a été admise par M. NNNN..., qui n’en avait pas fait état et qui en a relativisé l’impact, que cette dette était

et trompeuses s’agissant du communiqué de presse du 25 septembre 2001 sur l’annulation des 33 millions d’ac-tions, du communiqué de presse du 19 décembre 2000 sur la dette, et à l’égard de M. NNNN... s’agissant de l’interview de M. NNNN... du 11 décembre 2000 dans le journal les Echos, de la déclaration de M. NNNN... lors de l’assemblée général du 24 avril 2002, l’ensemble des parties civiles sera débouté de ses demandes ; (…) qu’elles seront également déboutées de leurs demandes au titre du délit d’informations fausses ou trompeuses s’agissant, d’une part, de l’interview de M. NNNN... du 11 décembre 2001 dans le journal les Echos, aucune faute civile n’ayant été établie à l’égard de M. MMMM... et à plus forte raison à l’égard de l’ensemble des autres prévenus et, d’autre part, du communiqué de presse du 25 septembre 2001 relatif au free cash flow, aucune faute n’ayant été établie à l’égard de MM. NNNN... et MMMM... et à plus forte raison à l’égard des autres pré-venus ; qu’à ce titre, la cour relève que les parties civiles représentées par MM. Canoy et Lavisse ont sollicité la condamnation solidaire de l’ensemble des prévenus au paiement en principal d’une somme en réparation de leur préjudice financier sans rapporter le moindre com-mencement de preuve de l’existence d’un lien de causa-lité entre la faute commise par chacun d’eux en relation avec les faits qui leurs sont personnellement reprochés à la prévention et le préjudice global allégué ; qu’ainsi sera notamment rappelé qu’il était reproché à MM. PPPP..., OOOO... et QQQQ... uniquement le délit de manipu-lation de cours commis entre le 17 octobre 2001 et le 2 octobre 2002 et à M. RRRR... un délit d’initié commis les 3 et 4 janvier 2002 ;

« 1° alors que le dommage dont la partie civile peut obtenir réparation de la personne relaxée résulte de la faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite ; qu’en affirmant qu’aucune faute civile n’était établie à l’encontre de MM. NNNN... et MMMM... et des autres prévenus au titre d’informa-tions fausses et trompeuses, tout en relevant que, dans le communiqué de presse du 19 décembre 2000, il était fait une présentation erronée de l’endettement de la branche médias du groupe Vivendi Universal (arrêt, p. 83 § 1), que dans le communiqué de presse du 25 septembre 2001 MM. NNNN... et MMMM... avaient fait état d’un cash flow positif dégagé par les activités médias et communi-cation tandis qu’il était en réalité négatif, que s’agissant de l’annonce de l’annulation de 33 millions d’actions d’autocontrôle par communiqué du 25 septembre 2001, le règlement AMF impose à l’émetteur l’obligation de rectifier toute information devenue inexacte lorsqu’il en a connaissance, ce que les prévenus avaient manifes-tement omis de faire en s’abstenant d’informer le public de la renonciation à l’annulation desdites actions d’auto-contrôle, ce dont il ressortait l’existence de fautes civiles imputables aux dirigeants poursuivis, peu important que l’élément intentionnel du délit n’ait pu être caractérisé, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

« 2° alors qu’en affirmant qu’aucune faute civile n’était établie à l’encontre de MM. NNNN... et MMMM... et des autres prévenus au titre d’informations fausses et trompeuses, sans rechercher, comme elle y était pour-

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explications de M. NNNN... à ce titre paraissant cré-dibles, que si le règlement AMF impose la rectification de toute information devenue inexacte, le code moné-taire et financier ne réprime pas l’absence de réactua-lisation d’une telle information, que la prévention ne visait comme trompeur que le communiqué du 25 sep-tembre 2001 et non celui du 17 décembre 2001, et que, concernant M. MMMM..., celui-ci n’était pas le manda-taire de l’émetteur, ni le rédacteur du communiqué, ni celui qui validait et donnait l’ordre de le diffuser ;

Attendu que, pour infirmer le jugement et relaxer M. NNNN... des faits de diffusion d’informations fausses ou trompeuses concernant ses déclarations lors de l’assemblée générale du 24 avril 2002, la prévention lui reprochant d’avoir annoncé, lors de la présentation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2001, un free cash flow opérationnel de 1,4 milliard d’euros pouvant servir au dividende et au remboursement de la dette sans information sur le cash flow net négatif, donnant ainsi l’illusion d’une richesse disponible, la cour d’appel énonce qu’il est constant que pour l’an-née 2001, le free cash flow net était négatif en normes américaines et légèrement positif en normes françaises selon les documents remis, que, dans ce communiqué, M. NNNN... faisait des observations sur les résultats du premier trimestre 2002, s’appuyant sur des documents présentés au comité d’audit le 23 avril 2002, men-tionnant une prévision du "cash from operation net of capex" pour 2002 de 1,418 milliard d’euros pour la branche médias et communication et de 1,062 milliard d’euros pour le groupe concernant un cash flow net utilisable pour la dette et les dividendes, que ces pré-visions sont confirmées par le procès-verbal du comité des comptes du 23 avril 2002, qu’après le départ de M. NNNN..., une progression des cash flow a été enre-gistrée, la trésorerie est devenue positive, la dette a pu être réduite, qu’ainsi, les déclarations de M. NNNN... n’étaient pas fausses et les éléments matériels et inten-tionnel du délit ne sont pas caractérisés ;

Sur les premiers moyens proposés pour M. UUUU... et autres et pour les époux SSSS..., pris en leur première branche :

Attendu que les demandeurs ne sauraient faire grief à l’arrêt de ne pas avoir requalifié les premiers faits repro-chés à M. NNNN... en tentative du délit poursuivi, cette qualification n’étant pas prévue par les textes appli-cables à l’époque des faits en cause (en décembre 2000) ;

Sur le premier moyen proposé pour M. UUUU... et autres, pris en ses deuxième à neuvième branches, sur le premier moyen proposé pour les époux SSSS... en ses deuxième à dixième branches et sur le premier moyen proposé pour l’APPAC et autres :

Attendu qu’en l’état des énonciations reprises ci-des-sus, la cour d’appel, par des motifs exempts d’insuffi-sance comme de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, le principe de l’autorité de la chose jugée ne trouvant pas à s’appliquer en l’espèce, a estimé, pour les relaxes qu’elle prononce, sans méconnaître sa saisine, que la preuve des faits reprochés n’était pas rapportée à la charge des prévenus, et pour les faits objet des relaxes définitives du tribunal, qu’aucune faute civile à l’origine des pré-

connue du public pour avoir fait l’objet d’articles de presse en octobre et novembre 2000 et pour avoir été évoquée dans le prospectus mis à disposition du public quelques jours avant l’assemblée générale extraor-dinaire du 5 décembre 2000 détaillant la dette au 30 juin 2000 à hauteur de 21,6 milliards d’euros qui ne pouvait avoir été résorbée en six mois, que dans le com-muniqué du 19 décembre 2000 annonçant la cession de la branche vins et spiritueux de Seagram, la société VU, pour ses activités communication, était présentée nette de dette alors que la dette sera de 3 338 000 euros au 31 décembre 2000 comme cela sera annoncé au conseil d’administration du 9 mars 2001, que cepen-dant l’intention de la direction de tromper le public n’est pas démontrée, n’étant pas établi que les dirigeants aient connu avant mars 2001 les éléments expliquant le glissement de la dette comme le fait apparaître un courrier de M. MMMM... du 29 novembre 2000 s’in-terrogeant sur le montant de la dette de Seagram alors que la fusion ne datait que de quelques jours, que ce communiqué du 19 décembre s’inscrivait dans le pro-longement de celui du mois d’octobre qui n’a pas été considéré comme mensonger, et que l’élément inten-tionnel n’est ainsi pas établi ;

Attendu que, pour dire qu’aucune faute civile en rela-tion avec les faits reprochés, concernant le communi-qué de presse sur les cash flow du 25 septembre 2001, n’était établie à l’égard des deux prévenus, la cour d’appel énonce que ce communiqué ne faisait nette-ment référence qu’au cash flow dégagé par les activités médias et communication, que l’information fausse doit être de nature à agir sur les cours, que si l’annonce aurait dû indiquer un cash flow légèrement négatif et non pas à l’équilibre, les transparents présentés, pen-dant le communiqué, mentionnaient bien un chiffre de "- 0,2 milliards d’euros" et ce chiffre constituait une amélioration sensible de l’indicateur, qui était négatif à hauteur d’un milliard en 2000, qu’une inexactitude portant sur 23 millions d’euros ne paraît pas avoir été de nature à influer sur les cours et que le communiqué n’est ainsi pas trompeur ;

Attendu que, pour infirmer le jugement et relaxer les deux prévenus des faits de diffusion d’informations fausses concernant l’annonce de l’annulation de 33 millions d’actions d’auto-contrôle par le communiqué du 25 septembre 2001 et débouter les parties civiles de leurs demandes à leur égard, la cour d’appel énonce que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier réprime un délit de commission et non d’abstention, que, s’agissant d’un délit instantané, c’est au jour du communiqué que le caractère faux ou trompeur doit s’apprécier, qu’il est reproché à M. NNNN... le com-muniqué de presse du 25 septembre 2001 annonçant l’annulation de 33 millions d’actions d’auto-contrôle, information devenue mensongère, le communiqué du 17 décembre 2001, relatif à l’opération USA Networks et son financement, n’ayant pas informé le public de la renonciation à cette annulation, que l’annonce du 25 septembre 2001, pendant le rachat par VU de ses propres actions en vue de réguler le marché suite aux attentats du 11 septembre, correspondait alors à l’in-tention des dirigeants et n’était pas mensongère, les

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tion de cours alors qu’il était directeur général adjoint et directeur financier du groupe Vivendi Universal :

– en s’abstenant volontairement de donner instruction à MM. Hubert OOOO... et François PPPP..., ses subor-donnés, de cesser les opérations qu’ils conduisaient dans le rachat par la SA Vivendi Universal de ses propres titres, alors qu’ayant personnellement sollicité la COB le 17 septembre 2001, il lui avait été indiqué par M. Hubert VVVVVVVVV..., son correspondant, qu’en l’absence d’information publique donnée au marché sur les résul-tats, même non audités, de Vivendi Environnement, le groupe Vivendi Universal devait, dans les quinze jours précédant la publication, s’abstenir d’intervenir sur son propre titre selon les dispositions du règlement COB n° 90-04 rappelées par le communiqué publié par la COB le 12septembre 2001 ;

– en signant un courrier en date du 26 septembre 2001, établi au nom de la société Vivendi Universal et adressé à la Deutsche bank, courrier préalablement rédigé par les services de la Deutsche Bank qui en avait sollicité la signature par un responsable de la société Vivendi Uni-versal, dans lequel il affirmait que les achats des titres Vivendi Universal effectués du 17 au 25 septembre 2001, pour le compte de la société Vivendi Universal par la société Deutsche Equities SA, avaient été réalisés dans le strict respect de la réglementation applicable, un tel courrier déterminant la société Deutsche Equities SA à poursuivre l’exécution des ordres de rachats qui lui ont été transmis jusqu’au 2 octobre 2001 par MM. PPPP... et OOOO... ;

que les parties civiles sollicitent l’infirmation du juge-ment déféré faisant valoir que les acquisitions de titre Vivendi Universal ont induit les investisseurs en erreur en ce qu’elles créaient une animation irrégulière sur ce titre et alimentaient une hausse artificielle du cours de celui-ci ; que M. WWWWWWWWW... fait valoir que les investigations ont démontré que l’ordre avait été donné « de maintenir quelques minutes, pendant la conférence de presse de M. NNNN..., le cours au-dessus de 50 euros", et que le groupe avait mené illégalement ses acquisitions juste avant et pendant l’annonce des résultats du groupe ; qu’en connaissance de cause ils ont entravé le fonctionne-ment régulier du marché, ne pouvant ignorer que leurs manœuvres permettraient une hausse exceptionnelle du cours des titres Vivendi Universal ; que, à la suite des attentats du 11 septembre perpétrés contre le World Trade Center les sociétés cotées en bourse qui avaient subi une chute immédiate et importante du cours de la valeur de leurs actions, prenaient attache avec les Autorités de régulation en vue de procéder au rachat de leurs propres titres, considéré comme favorable aux actionnaires et positif pour le marché dans son ensemble, dans le cadre d’un marché fortement baissier ; qu’en ce domaine les règles posées par les autorités de régulation américaine et françaises s’articulaient autour de deux points :

– l’abstention de toute intervention pendant les quinze jours précédant l’annonce des résultats annuels ou semestriels, le non-respect de cette règle visant à prévenir tout soupçon d’utilisation par un émetteur d’une infor-

judices invoqués n’était démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, et a ainsi justifié sa décision déboutant les parties civiles de leurs préten-tions ;

D’où il suit que les moyens, nouveaux et mélangés de fait et comme tel irrecevables en la sixième branche des premiers moyens proposés pour M. UUUU... et autres et pour les époux SSSS..., ne sont pas fondés ;

Sur les deuxièmes moyens de cassation, proposés pour M. UUUU... et autres, parties civiles, représen-tés par Me Le Prado et pour M. et Mme SSSS..., pris de la violation des articles 483, 591, 593 du code de pro-cédure pénale et 465-2 du code monétaire et financier, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit de manipulation de cours ;

« aux motifs que, sur les faits de manipulation de cours ; qu’il est reproché à MM. NNNN... en sa qua-lité de président-directeur général de la SA Vivendi Universal, Hubert Gaétan OOOO... en sa qualité de responsable de la trésorerie du groupe Vivendi Uni-versal, François PPPP... en sa qualité trésorier adjoint de la société Vivendi Universal, Philippe QQQQ... en sa qualité de président de la société Deutsche Equi-ties S.A., d’avoir exercé par personne interposée une manœuvre ayant pour objet d’entraver le fonctionne-ment régulier d’un marché d’instruments financiers en induisant autrui en erreur en l’espèce en faisant procé-der, par la société Vivendi Universal, durant la période du 17 septembre 2001 au 2 octobre 2001, à l’acquisition de 21 753 069 titres Vivendi Universal, à hauteur d’un montant total de 1 016 501 895 euros : alors que les achats du titre Vivendi Universal effectués entre les 17 et 25 septembre 2001 ont été réalisés avant et pendant l’annonce, effectuée par la société Vivendi Universal, le 25 septembre de ces résultats, période pendant laquelle la société Vivendi Universal devait s’abstenir d’interve-nir sur ses propres titres du fait de l’interdiction posée par l’article 8 du règlement n° 90-04 rappelée et précisée par un communiqué émis par la COB en date du 12sep-tembre 2001 ; alors que les acquisitions de titres Vivendi Universal effectuées les 17, 18, 21 et 25 septembre 2001 ainsi que le 2 octobre 2001 ont représenté plus de 25 % de la moyenne des négociations sur ce titre sur les trois jours précédents ; alors que ces acquisitions ont concouru à la formation du cours du titre Vivendi Universal, pour avoir notamment été effectuées, à hauteur d’un volume de 7 983 856 titres (soit 36,68 % du volume total acquis), durant les trente dernières minutes de chaque séance de bourse, dont 3 505 224 titres acquis lors du fixing (soit 44 % des achats réalisés durant les 30 dernières minutes) ; et alors que les acquisitions réalisées le 25 septembre vers 15 heures avaient pour seul objet de faire monter le cours du titre Vivendi Universal à 50 euros durant la confé-rence de presse de présentation des résultats du premier semestre donnée par le président de cette société ; que ces acquisitions de titres Vivendi Universal ayant induit les investisseurs en erreur, en ce qu’elles créaient une ani-mation irrégulière sur ce titre et alimentaient une hausse artificielle du cours de celui-ci ; que M. MMMM... est poursuivi en qualité de complice de ce délit de manipula-

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BskyB allait se matérialiser, donnait son accord sur le mandat, qui serait exécuté par la filiale de Deutsche Bank AG, la société Deutsche Equities en la personne du président du directoire M. Philippe QQQQ... ; que, le même jour, M. Dominique EEEEEEEEE... demandait à M. François PPPP..., opérateur de trésorerie, et à M. Hubert OOOO... responsable de la trésorerie du groupe au niveau mondial, de commencer à exécuter le programme de rachat dans l’après-midi ; qu’en raison du déblocage tardif du prêt, les titres étaient acquis par Deutsche Bank d’ordre et pour compte de Vivendi Uni-versal et détenus par cette banque jusqu’au paiement, le contrat de crédit relais n’ayant été signé que le 26 sep-tembre 2001 ; que, le 3 octobre 2001, était signée l’opéra-tion de monétisation BSKYB et sur les 4 milliards d’euros que devait dégager cette opération, Deutsche Bank préle-vait 1,5 milliard d’euros ; que, dans la mesure où la posi-tion de la COB était moins radicale que celle de la SEC, M. NNNN... avait chargé M. MMMM... de s’assurer auprès de l’autorité de régulation que "les éléments d’in-formation financière (…) publiés sur les activités médias du groupe fin juillet 2001, éléments qui étaient seuls directeurs quant à la détermination de la valeur du titre (résultats opérationnels par branche d’activités), sans constituer une publication de comptes, répondaient à la préoccupation et à l’exigence de la COB manifestée par son communiqué du 12 septembre" ; qu’ainsi le 17 sep-tembre 2001, M. MMMM... s’entretenait téléphonique-ment avec M. Hubert VVVVVVVVV..., adjoint au chef de service des opérations et de l’information financière à la COB, le directeur général, M. Gérard Rameix étant indisponible ; que M. VVVVVVVVV... relatait son entretien avec M. MMMM... en ces termes : "M. MMMM... lui avait précisé qu’il considérait le titre Vivendi Universal sous valorisé dans le marché et qu’il voulait vérifier que la société Vivendi Universal pouvait mettre en œuvre son programme de rachat d’actions ; qu’il lui avait répondu en relisant le communiqué COB du 12 septembre, laquelle interprétait de manière plus douce son règlement à l’exception de la règle d’abstention d’intervenir dans les quinze jours qui précèdent la publi-cation de résultats à laquelle il ne pouvait être dérogé qu’à la condition que la société anticipe sur cette publica-tion par la communication de résultats provisoires ; que M. MMMM... lui avait rétorqué que Vivendi Universal avait déjà publié ses résultats le 23 juillet 2001 ; que se souvenant que ces résultats du 23 juillet ne concer-naient que la branche média il avait interrogé M. MMMM... sur la date de publication de la branche environnement qui lui avait répondu qu’elle intervien-drait la semaine suivante et, qu’en tout état de cause, le cours de Vivendi Universal était essentiellement dépen-dant de la partie média ; que ce dernier lui avait alors précisé qu’à ce moment Vivendi Universal avait déjà effectué des rachats ; que surpris par cette information, il lui avait indiqué ne pas être compétent pour accorder des dérogations au règlement 90-04, qui de toute façon n’en prévoyait pas et qu’il en ferait part à son directeur géné-ral, et il lui avait confirmé son interprétation du règle-ment sur le fait qu’on ne pouvait pas considérer à ce jour que le groupe Vivendi Universal avait complètement publié ses résultats, comme cela lui avait déjà été signifié par courrier et, que l’ayant mis devant ses responsabilités,

mation privilégiée relative à ces résultats en cours d’éta-blissement ;

– la limitation des volumes cédés ou achetés à 25 % des échanges quotidiens des trois derniers jours de bourse, non intervention en ouverture, en clôture ou au fixage ; ces règles visant à prévenir le risque de manipulation de cours ;

que l’autorité de régulation boursière américaine, la SEC, les 14, 21 et 28 septembre 2001, suspendait l’appli-cation de sa réglementation et prenait des mesures excep-tionnelles en autorisant les firmes américaines à racheter sans contrainte leurs propres titres, sa priorité ayant été de sauver le marché en évitant son effondrement ; qu’en revanche la COB adoptait une position plus nuancée dans un communiqué en date du 12 septembre 2001, aux termes duquel elle maintenait les règles en vigueur, tout en précisant : "les sociétés (…) qui souhaitent intervenir sur le marché de leur titre dans le cadre de leur pro-gramme de rachat d’actions doivent, par communi-qué, anticiper cette publication [des comptes]. Dans le cas où ces comptes n’auraient pas encore été arrêtés par le conseil d’administration ou le directoire, ils doivent être présentés comme provisoires" ; que, dans ce contexte, consécutif aux attentats du 11 septembre 2001, M. NNNN... en accord avec M. MMMM... prenait la décision, entre le 12 et le 15 septembre, de procéder au rachat de titres Vivendi Universal, à l’ouverture des mar-chés américains le 17 septembre, mesure visant, selon ses déclarations à réguler le cour du titre Vivendi Universal qui avait perdu presque 20 % de sa valeur sur le marché parisien et à protéger les actionnaires ; que Vivendi Uni-versal, au moment de la prise de cette décision, n’avait publié le 23 juillet 2001 que les résultats concernant la branche Médias et communication, les résultats de Vivendi Environnement n’intervenant que le 25 sep-tembre 2001 ; que cette décision s’inscrivait dans un pro-gramme général de rachat de ses propres titres par la société Vivendi Universal sur une période de dix-huit mois à compter du 11 décembre 2000, date d’admis-sion des titres Vivendi Universal aux négociations sur le marché réglementé, programme visé par la COB le 27 octobre 2000 et approuvé par l’assemblée générale mixte en date du 21 septembre 2000, dans la limite de 10 % du capital ; que ce programme prévoyant que de tels rachats de titres ne pourraient être effectués qu’au regard des objectifs suivants : acquisitions d’actions en vue d’opérations de croissance externe par échange de titres, couverture des stock-options, régularisation de cours et annulation de titres ; que M. MMMM... ayant délégué à M. Dominique EEEEEEEEE... la charge de trouver le financement du rachat de titres, celuici proposait le 16 septembre 2001 à M. Hubert UUUUUUUUU..., res-ponsable de l’activité primaire "actions" du groupe Deutsche Bank, de mener l’opération de rachat de titres pour le compte de Vivendi Universal, pour un montant de 1,7 milliard d’euros à préfinancer sur les fonds qui seraient levés quelques semaines plus tard à l’occasion de la vente des titres BSKYB, ceci impliquant la mise en place d’un crédit relais qui ne sera débloqué par la banque que le 26 septembre 2001 ; que, le 17 septembre, M. Hubert UUUUUUUUU..., convaincu de l’obtention rapide du crédit-relais, dans la mesure où l’opération

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verture et à la clôture et ce, avant la publication de leurs résultats ; que, dans les jours suivants, notamment les 24 et 25 septembre, d’autres mails ou conversations télépho-niques de M. Philippe QQQQ... à destination du déonto-logue et de la direction de la Deutsche Bank en la personne de M. Jacques-Henri ZZZZZZZZZZ..., confir-maient ces irrégularités ; qu’ainsi le 24 septembre 2001, M. Philippe QQQQ... adressait : à 13 heures 33, un cour-rier électronique à MM. François AAAAAAAAAA..., Jacques-Henri ZZZZZZZZZZ..., Hubert UUUUUUUUU..., François XXXXXXXXXX... et Fran-çoise Malrieu pour obtenir leur aval sur l’envoi à Vivendi Universal d’un modèle de lettre déchargeant la Deutsche Bank de tout risque pénal, à leur retourner signée avec les mentions suivantes : "nous avons bien noté que vous étiez pleinement informés de l’ensemble des éléments juri-diques et réglementaires et en particulier que vous consi-dérez vous situer dans un cadre de légitimité des interventions des émetteurs sur leurs propres titres » ;

– à 15 h 35 un e-mail à M. François PPPP... en ces termes : "J"ai reçu votre instruction de passer la limite d’achat à 50 euros contre 47 précédemment à 15 heures 30. Nous avons acheté 85 200 titres à 46,99 » ;

– à 15 h 42, aux hauts responsables de la Deutsche Bank un e-mail : "j’avais essayé de freiner les ardeurs de nos chers amis et clients en achetant moins de 2 % du volume traité sur VU. Malheureusement M. NNNN... a appelé ses équipes pour remonter fa limite d’intervention et maintenir l’objectif de 25 % du volume » ;

qu’à la suite de l’ordre de M. PPPP... de passer à la limite d’achat de 50 euros, M. Philippe QQQQ..., à comp-ter de 17 h 23’ 52", soit pendant la période du fixing pas-sait des ordres à 50 euros, par tranche de 100 000 titres, qui étaient exécutés au cours de 49,89 euros ; que, s’agis-sant de la journée du 25 septembre 2001, le cours d’ou-verture était de 47,4 euros, le volume total/jour étant de 13 265 268 titres ; que Vivendi Universal, le jour de la communication de ses résultats, soit le 25 septembre, à 15 h 16 procédait à des achats en bourse à hauteur de 3 675 101 titres, soit 27,70 % du montant total des tran-sactions du jour, alors qu’en raison de la règle des 25 %, Vivendi Universal aurait dû limiter ses interventions à 2 130 466 titres ; que Vivendi Universal était intervenue à l’ouverture à hauteur de 30 000 titres au prix d’ouver-ture du marché et dans la dernière demi-heure de la séance de bourse au prix de 49 euros ; que le conseil d’administration de Vivendi Universal s’était tenu de 10 heures à 13 h 30 ; qu’à 15 heures, M. NNNN... tenait une conférence de presse qui s’adressait aux journalistes éco-nomiques et financiers ; qu’à 17 h 30, il s’adressait aux analystes financiers et ce, jusqu’à 19 heures 30/20 heures ; qu’après la publication des résultats de Vivendi Universal par une dépêche AFP à 15 h 16, le cours passait de 47,40 euros à 15 h 16’43" à 50 euros à 15 h 24’03", à 50,35 euros à 15 h 24’27" et à 50,4 euros à 15 h 24’32" ; qu’il apparaissait ainsi qu’entre 15 h 15 et 15 h 40 Vivendi Universal avait procédé à l’achat de 1 1000 222 titres (soit 8,29 % des transactions réalisées dans la jour-née) et le cours avait progressé de 4 % durant cette période ; que, dès lors, comme le cours limite d’interven-tion fixé à 50 euros, la veille, était dépassé atteignant 50,35 euros à 15 h 24’27" (source Euronex), M. Philippe

il lui avait indiqué qu’il fallait qu’il prenne contact avec Vivendi Environnement pour anticiper sur la publication de leur résultats avant de poursuivre leurs achats ; que le contenu de cet entretien était relaté par M. MMMM..., dans une note datée du 19 septembre, dans laquelle il indiquait « qu’il avait pris contact avec la COB et que son interlocuteur s’était limité à lui rappeler le contenu du communiqué de la COB du 12 septembre 2001 et que la publication des comptes faite par Vivendi Universal le 23 juillet 2001, n’incluant pas ceux de Vivendi Environ-nement, ne pouvait satisfaire aux exigences exprimées du dit communiqué" ; qu’il ressortait ainsi de cette note qu’aucune autorisation ni approbation n’avait été donnée par la COB quant au rachat par Vivendi Universal de ses propres actions pendant la période du 12 septembre au 25 septembre, date de la publication des comptes de Vivendi Environnement ; que, pour cette opération de rachats M. NNNN... contactait directement M. Hubert OOOO... ou, en son absence, M. François PPPP..., habi-tuellement quelques minutes avant ou après le début de la séance de bourse, et, en fonction de leurs commen-taires sur le marché, sur le secteur des médias et sur l’évo-lution du titre Vivendi Universal, leur donnait des instructions précises quant au volume et au prix des achats à effectuer et leur durée de réalisation ; qu’il les rappelait régulièrement dans la journée pour faire le point et leur donner de nouvelles instructions d’achat dans un délai qu’il fixait et ce, jusqu’à la fin de la séance de bourse, en fonction de l’évolution du marché et des comportements spéculatifs ; que MM. NNNN... et MMMM... étaient informés chaque jour, par le biais d’une feuille de bourse établie par le service de la trésore-rie, des cours d’ouverture et de clôture, du cours moyen des transactions effectuées, du cours le plus haut et le plus bas constaté durant la séance de bourse, des volumes d’achats et de vente des titres détenus par Vivendi Uni-versal, données qui étaient retransmises à la COB, Vivendi Universal ayant ainsi acquis 21 753 069 de ses propres actions pour un montant de 1 016 501 895 euros ; qu’il s’agissait d’ordres d’achats classiques soit des ordres « soignants », transmis immédiatement à M. QQQQ... par MM. OOOO... ou PPPP... ; que M. QQQQ... rendait compte journellement des modalités précises d’exécution des opérations effectuées pour le compte de Vivendi Uni-versal, non seulement à l’émetteur, c’est-à-dire Vivendi Universal mais aussi à sa hiérarchie au sein de la Deutsche Bank, en l’espèce M. François XXXXXXXXXX..., responsable des actions européennes, M. Phil YYYYYYYYYY..., responsable de la partie tra-ding Europe, M. Hubert UUUUUUUUU... responsable d’une subdivision du corporate niveau mondial et M. Jean-Jacques ZZZZZZZZZZ..., président de Deutsche Bank ; que, dans un premier temps, soit le 18 septembre, M. QQQQ... alertait oralement MM. PPPP... et OOOO..., ainsi que ses supérieurs d’irrégularités com-mises par Vivendi Universal dans la passation des ordres ; que, le 21 septembre 2001, M. Philippe QQQQ... alertait par e-mails MM. François PPPP..., Hubert OOOO..., ses supérieurs et le déontologue de Deutsche Equities, M. François AAAAAAAAAA... des irrégulari-tés commises par Vivendi Universal dans la passation de ses ordres à savoir : intervention à hauteur de plus de 25 % du volume des trois derniers jours, à la fois à l’ou-

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peut-être en, mettre 100 000, je sais pas ? – François PPPP... : 100 000 cachés pour, euh ! Oui, on, on peut en mettre 100 000 autres, limités 49, comme ça, ça permet de" – Philippe QQQQ... indiquant à Jean Michel BBBBBBBBBB... d’en mettre 100 000 de plus, et conve-nant avec François PPPP... de rester en ligne ; à 17 h 24’43", Philippe QQQQ... informait François PPPP... de l’achat de 100 000 titres à 48,90 euros ; – à 7 h 24’58", il l’informait de l’achat de 100 000 titres à 49,90 euros" ; que, parallèlement, M. Philippe QQQQ... contactait sa hiérarchie par courriels ou téléphone à savoir : – à 16 h 29 par courriel adressé à M. ZZZZZZZZZZ... pour solli-citer des instructions en ces termes : "Désolé de vous déranger encore une fois avec cette histoire, mais depuis mon dernier mail le comportement de Vivendi Universal ne s’est pas amélioré, il a même empiré. J’ai envoyé ma lettre hier (que vous voudrez bien trouver ci-joint) par e-mail et par la poste en accord avec la déontologie de Paris. (Ils ont en fait, refusé d’ouvrir l’e-mail), qui souli-gnait, très poliment leurs obligations. Aujourd’hui cinq minutes avant la publication de leur bilan (ils ont publié leur bilan à 15 h 30 heure de Paris, juste avant l’ouver-ture de New-York). Ils m’ont demandé de maintenir le prix des actions au-dessus de 50 euros. Vous savez je ne suis pas facilement troublé si un client agit à la limite de la légalité, mais dans ce cas, cela me semble définitive-ment illégal. Je veux une instruction claire de votre part : dois-je continuer à accepter leurs ordres ou non ? Et qui va appeler VU pour leur expliquer notre position ?" ; que, à 16 h 34 par courriel adressé à M. Hubert UUUUUUUUU..., Mme Malrieu et M. ZZZZZZZZZZ... il rappelait : "je crois que VU peut vraiment avoir des problèmes sur le Buyback. J’aimerais que l’on en parle ensemble" ; que, dans l’après-midi du 25 septembre 2001, lors d’une conversation téléphonique enregistrée sur la ligne de M. QQQQ..., celui-ci expliquait à M. Hubert UUUUUUUUU..., haut responsable de la Deutsche Bank en charge de la relation avec le client Vivendi Uni-versal : "(…) j’ai vu les écrans, mais surtout je les ai vus intervenir en même temps, si tu veux, donc, euh, ça c’est pas possible … J’ai vu les écrans, mais lis ton mail, lis ton mail, moi, je veux pas aller en prison, donc, euh, je veux votre accord sur ce que je suis en train de faire avec eux, écrit oui, oui, mais, si tu veux (là, moi je tiens plus, ils font n’importe quoi, enfin ils font ce qu’ils veulent, mais en tout cas, ils font des choses qui sont totalement illé-gales, et je ne suis pas le genre de mec à penser que, enfin je n’ai pas l’habitude de m’effrayer, hein, d’accord ; oui, là je te dis, j’interviens plus si j’ai pas de confort, et puis qu’on me dise oui tu peux continuer à acheter, donc là je continue ce soir, parce que ce n ’est pas à moi de dire à (Polelin) OOOO... ou EEEEEEEEE... ou NNNN... ; euh je suis désolé, euh ce que vous faites est illégal et je ne veux pas le faire, mais, euh, ok, ok, et voilà, et tu le fais quand tu veux, ok, ciao" ; qu’il apparaissait par ailleurs que le courriel "de confort" rédigé par la Deutsche Bank et qui devait être signé par Vivendi Universal, avait été, dans un premier temps, transmis par courriel, le 24 sep-tembre 2001, par M. QQQQ... à la société Vivendi Uni-versal qui avait refusé de l’ouvrir ; que, à 16 h 35, M. Philippe QQQQ... avisait par téléphone M. Jacques-Henri ZZZZZZZZZZ... des nouvelles irrégularités com-mises par Vivendi Universal et sollicitait ses instructions ;

QQQQ... prenait attache à 15 heures 28’35" avec M. François PPPP... afin de savoir si le cours limite (50 euros) devait être remonté eu égard aux nombreuses demandes, en ces termes : "M. François PPPP... : oui, Allo ? – Philippe QQQQ... Après (…) Qu’on ait essayé donc, euh, qu’on ait tenu les 50(…) E y a pas mal d’offres – F. PPPP..., d’accord – Ph. QQQQ... est-ce que vous sou-haitez toujours qu’on tienne les 50 ou…., – F. PPPP..., Ben, si on pouvait essayer, ou de maintenir là un certain temps, – Ph. QQQQ..., un certain temps (peut être) pen-dant 10 minutes, voilà…, F. PPPP..., oui voilà, c’est ça, oui, oui… – Philippe QQQQ..., d’accord – François PPPP..., Sachant qu’on peut éventuellement dépasser 25 %, euh, euh, comme hier, ou avant, ou certains jours on avait pas fait nos, nos 25 – Philippe QQQQ..., D’ac-cord, donc on y va tous, parce que j’avais pas mal de papiers qui revenaient, je … – François PPPP..., d’accord – Philippe QQQQ..., Ok, au revoir" ; que M. Philippe QQQQ... après cette communication téléphonique qui prenait fin à 15 heures 29’36", donnait comme instruc-tions à M. Jean-Michel BBBBBBBBBB... de passer des ordres par tranche de cent mille titres avec comme prix maximum 50 euros, pendant environ 10 minutes puis de relâcher la pression ; qu’il apparaissait qu’après cette communication téléphonique étaient acquis par Vivendi Universal entre 15 h 30’03" et 15 heures 40’46", 731 174 titres à des prix commençant à 49,60 euros pour monter au plus haut à 50,20 euros à 15 h 39’28" pour redes-cendre à 50 euros à 15 h 40’46" ; que, s’agissant de la der-nière demi-heure avant la clôture, les investigations ont établi que de 17 heures 00’23" à 17 h 31’05’’, heure de la clôture, selon l’horodatage de la Deutsche Bank, Vivendi Universal avait acheté 970 204 titres ; que les pièces de la procédure (scellé Deutsche Bank et cote 9) font apparaître qu’entre 17 h 22’01" et le closing à 17 h 31’05", soit en un peu plus de 9 minutes, juste avant la clôture, étaient intervenus huit ordres d’achats portant au total sur 900 000 titres, à des cours démarrant à 48,49 euros pour la première opération pour monter jusqu’à 49,5 euros pour l’ordre 925012844, exécutés à hauteur de 675 101 titres, soit 5,09 % du volume journa-lier de transactions sur le titre, à des prix commençant à 48,39 euros pour la première opération pour monter à 49 euros à partir de 17 h 24’35" jusqu’au closing, 49 euros étant le cours atteint à la clôture ; que cette partie des opérations est à mettre en relation avec les conversations suivantes entre M. Philippe QQQQ... et M. François PPPP... : "- à 17 h 23’21", Philippe QQQQ...: Allo, oui, François [PPPP...], oui, alors, on a réussi à faire coter 49, mais, malheureusement, ça a coté 48,58 (à la seconde près) – François PPPP... ; Ah, oui, juste derrière, oui… – mais une question de chance, euh, au moment où l’on passe dans la machine. Voilà, alors, qu’est-ce que vous voulez qu’on essaye de… – puis après une discussion sur le nombre de titres acquis : – Philippe QQQQ... : bein, on va, on va essayer de, de, rejoindre (inaudible) 49, euh, on peut mettre des tranches de 100 000 à successivement limité 49, puis on va voir comment le marché réagit – François PPPP... : OK – à la suite de quoi Philippe QQQQ... donne instruction à Jean Michel (BBBBBBBBBB...) de mettre 100 000 de plus, Jean Michel lui demandant : - 300 en tout ? – Philippe QQQQ... : 300, d’accord ! Voilà, on est à 49, faudrait

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que la cellule de surveillance des marchés relevant de l’inspection de la Commission des opérations de bourse, qui avait procédé à l’examen des rachats d’actions effec-tués par Vivendi Universal entre le 9 septembre et le 25 septembre avait constaté que Vivendi Universal, dans le cadre du rachat de ses titres n’avait pas observé sur la période du 17 septembre au 25 septembre 2001 la période d’abstention d’intervention sur ses propres titres au cours des quinze jours précédant l’annonce de ses résultats semestriels, ayant acheté 17 222 000 titres pendant cette période, que la société n’avait pas suivi la recommanda-tion delà Commission des opérations de bourse du 12 septembre 2001 qui préconisait aux sociétés voulant soutenir leurs cours en cette période sensible d’anticiper leur date de publication de résultats, quitte à préciser qu’ils n’étaient que provisoires et, enfin, que les 17, 18 et 25 septembre, Vivendi Universal avait dépassé le volume qui aurait été autorisé en l’absence de période sensible (25 % de la moyenne des volumes des trois précé-dents jours de bourse) ; qu’ainsi les 17, 19, 20, 21 et 25 septembre 2001, Vivendi Universal, qui était passée par Deutsche Equities pour effectuer ses opérations de rachats d’actions, était intervenue forcément lors des "fixing" de clôture ; qu’au terme de cette analyse, la COB concluait qu’il est donc clair que lors du rachat par Vivendi Universal de ses propres titres, au mois de sep-tembre 2001, un certain nombre d’irrégularités ont été commises : "non-respect de la période, d’abstention : il s’agit d’une interdiction stricte (article 8 du règlement 90-04). Les arguments présentés par les dirigeants de Vivendi lors de la réunion du 18 octobre 2001 ne sont pas recevables. En effet, même si la société a effectivement communiqué l’Ebitda de sa branche média le 23 juil-let 2001, aucun élément sur le résultat semestriel n’était, disponible à cette date ; non légitimité a priori des inter-ventions ; trois caractéristiques des rachats par Vivendi de son titre ne rentrent pas dans les critères de légitimité. Il s’agit de l’utilisation de deux intermédiaires au cours de la journée du 14 septembre 2001, des interventions mas-sives au fixing de clôture, contribuant ainsi à la forma-tion du cours, et du dépassement important de la règle des 25 % relative aux volumes d’interventions. Les diri-geants de la société n’ont pas donné de justification sur les deux derniers points si ce n’est le fait que la SEC avait quant à elle levé toutes les contraintes d’interventions. Le SOIF a eu une explication concernant l’intention de deux intermédiaires au cours de la même journée du 14 sep-tembre 2001 : l’un a traité un bloc et l’autre est intervenu au fil de l’eau. Cette justification n’entre pas dans le seul cas où un émetteur peut utiliser deux intermédiaires pour racheter ses titres qui est celui où un des deux inter-médiaires intentent sur l’action et l’autre sur l’option" ; que, dès lors, que le département surveillance de la COB saisissait le 17 octobre 2001 le directeur général d’une note bilan critiquant le comportement de VU et propo-sant le lancement d’une enquête à fins de sanction ; que le directeur général de la COB, M. Michel CCCCCCCCCC..., par courrier en date du 26 octobre 2001, adressé à M. NNNN..., après avoir rap-pelé les manquements relevés par la cellule de surveil-lance des marchés, l’avisait de sa décision de ne pas ouvrir d’enquête en vue d’une possible sanction adminis-trative en ces termes : "Certes le caractère tout à fait

qu’à la suite de ces nouvelles irrégularités, M. Jacques-Henri ZZZZZZZZZZ... réunissait dans son bureau MM. Philippe QQQQ... et François AAAAAAAAAA... et ils décidaient de faire signer par les dirigeants de Vivendi Universal un courrier aux termes duquel ceux-ci déclareraient que les opérations menées avaient reçu l’aval de la COB ; que M. AAAAAAAAAA... demandait à M. Jacques Henri ZZZZZZZZZZ... d’appeler person-nellement M. NNNN... ou M. MMMM... afin d’obtenir ce courrier sans délai ; que ce qu’il faisait instantanément se voyant, selon ses dires, confirmer oralement par M. MMMM... « que toutes ces opérations avaient été portées à la connaissance de la COB et qu’il était prêt à lui confirmer tout cela par écrit, ce qu’il lui demandait" ; que, cependant, M. AAAAAAAAAA..., adressait un mail à M. QQQQ... à 18 heures 47, en copie à M. ZZZZZZZZZZ... intitulé "Risques légaux et réputa-tion liés aux rachats des actions VU", dans lequel il recensait les irrégularités commises par Vivendi Univer-sal lors de l’exécution de ses achats de titres et faisait état du risque pénal de manipulations de cours, non seule-ment pour l’émetteur Vivendi Universal mais également pour l’intermédiaire Deutsche Equities SA Qu’en conclu-sion de son analyse il indiquait : "Au vu de la nature du risque pour la réputation légale, voire même pénale, je vous presse de ne plus accepter d’ordres de Vivendi Uni-versal de racheter ses propres actions" ; qu’il apparaissait, qu’en dépit des demandes présentées par les responsables de la Deutsche bank, que le courrier envoyé à Vivendi Universal pour signature et transmission officielle au nom et pour le compte de Vivendi Universal ne sera pas immédiatement envoyé, ce retard de transmission provo-quant de vives inquiétudes au sein de cette banque dont témoignaient les courriels transmis durant cette période par M. QQQQ... : mail du 26 septembre 2001 à 18 h 17 adressé à M. UUUUUUUUU... : "la COB a lancé une enquête sur VU pour la journée du 10 septembre et les journées du 17, 18, 19 et 20 septembre. II est donc urgentissime d’obtenir la lettre signée de VU aujourd’hui ; mail du 26 septembre à 18 h 18 adressé à M. XXXXXXXXXX... : Objet : enquête de la COB/Vivendi Universal : Les emmerdes commencent ; deux mails du 1er octobre adressés à M. AAAAAAAAAA... à 9 h 59 "" toujours rien reçu de VU" ; à 15 h 29 "des nou-velles de VU" ; mail du 1er octobre à 18 heures 45 adressé à M. UUUUUUUUU... avec copie à M. AAAAAAAAAA... "Nous n’arrivons pas à avoir EEEEEEEEE... au sujet de la lettre de Vivendi Universal. Phase help !" ; mail du 2 octobre 2001 à 20 h 19 adressé à MM. UUUUUUUUU... et AAAAAAAAAA... : "J’ai bien reçu par fax la lettre de décharge de Vivendi Universal signée par M. MMMM.... L’original nous parviendra plus tard, M. MMMM... étant à New York ; mail du 2 octobre à 20 heures 27 adressé à M. UUUUUUUUU... : "on ne va pas en prison, … Ça vaut un déjeuner" ; que, cependant, à raison de la publication des comptes de Vivendi Universal et du courrier du 26 septembre, par lequel M. MMMM... informait la Deutsche Bank de l’ac-cord de la COB sur les modalités de mise en œuvre du rachat des actions, les opérations de rachats reprenaient le 26 septembre 2001 jusqu’au 2 octobre avec l’aval de la hiérarchie londonienne de M. François AAAAAAAAAA... ; que, sur les relations avec la COB ;

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"tirer" le cours du titre Vivendi pour atteindre les 50 euros, et ce sur les instructions transmises par M. PPPP... ; que, selon lui, le titre VU n’était pas plus monté que les autres titres du CAC 40 dans la période de rebond, indiquant que le titre AOL Time Warner, princi-pal concurrent de VU, avait connu une performance quasiment similaire à celle de VU ; qu’il en déduisait que les interventions de Vivendi Univeral durant cette période du 17 septembre au 12 octobre 2001 ne déstabili-saient pas le marché, ni ne l’entravaient dans l’établisse-ment des cours ; qu’enfin il faisait valoir que les achats auraient pu être réalisés à New York et ce, sans com-mettre la moindre infraction, la SEC ayant levé toutes ses contraintes ; que ces achats auraient eu exactement le même impact : "les actions VU cotées à New York sont des, actions d’arbitrage, c’est-à-dire des titres cotés par l’intermédiaire de banques qui font le marché ; qu’elles sont sollicitées par les acheteurs et fixent le prix des titres par référence à celui du marché parisien ; que, si l’on achète beaucoup de titres à New York, la conséquence sera que le cours du titre montera aussi à Paris ; qu’il y a un effet des vases communicants entre les deux marchés ; que tout mouvement à New York est reproduit à Paris ; que, s’il y avait des écarts, des arbitragistes en profite-raient pour s’engouffrer dans la brèche" ; que devant la cour il fait valoir que la Deutsche Bank, en sa qualité de prestataire, mandaté par Vivendi Universal sa cliente, pour mettre en œuvre son programme de rachats d’ac-tions, avait une obligation d’information du client sur les risques éventuels, et d’informer, en cas de doutes sur la réglementation, le déontologue afin que celui-ci soit à même, en toute indépendance de décider ce qu’il y a lieu de faire, obligation qu’il a respectée, en informant, d’une part, ses interlocuteurs chez Vivendi Universal et, d’autre part, en interne le déontologue de la banque et sa hié-rarchie, du non-respect des règles de présomptions de légitimité et de l’intervention de Vivendi Universal avant la publication de ses résultats ; que s’il a eu des propos outranciers "moi je ne veux pas aller en prison" c’était pour se faire entendre ; qu’à cet égard M. AAAAAAAAAA..., déontologue, ne lui avait donné l’ordre de cesser d’exécuter tout achat que le 25 septembre à 18 h 47 avant de lever l’interdiction dès le lendemain matin, à la suite de la réception du courrier de Vivendi Universal ; qu’à aucun moment il n’a imaginé qu’une manipulation de cours était possible ; qu’en tout état de cause aucune atteinte à l’intégrité des marchés n’a été commise lors de cette opération de rachat ; que, d’ailleurs l’AMP, à deux reprises, a donné son avis sur la nature de l’intervention de Vivendi Universal sur le marché, excluant une quelconque atteinte à l’intégrité des mar-chés ; que le marché n’a pas été trompé par ces rachats qui ont été rendus publics par M. NNNN... lui-même le 25 septembre ; qu’en dépit de l’arrêt de l’intervention de Vivendi Universal sur ses propres titres par l’intermé-diaire de son intervention, le cours du titre Vivendi Uni-versal a continué à augmenter (de plus de 20 % passant d’environ 50 euros à 62 euros) jusqu’au début du mois de janvier 2002, soit pendant trois mois consécutifs ; qu’ainsi même sans son intervention le cours du titre a poursuivi sa hausse naturelle, ce qui démontre bien l’ab-sence d’entrave au marché et l’absence d’artificialité du cours pendant la période précédente, objet de la préven-

exceptionnel de la période concernée qui fait suite aux attentats du World center justifiait une interprétation souple de certaines dispositions", et d’autre part que "les services de la Commission avaient d’ailleurs, avec mon accord, indiqué à plusieurs interlocuteurs de la place que les prescriptions de légitimité posées par le règlement 98-03 n’entraînaient pas, a contrario, automatiquement l’illégitimité d’autres opérations de rachat dès lors que l’émetteur, particulièrement dans des conditions de mar-ché spécifiques, pouvait justifier qu’elles n’avaient pas eu pour objet d’entraver le fonctionnement régulier du mar-ché » ni « d’induire autrui en erreur (…). En parfaite connaissance des mesures exceptionnelles prises par notre homologue américain dans un contexte juridique et poli-tique différent" il avait été décidé à Paris : d’adopter une lecture appropriée à la situation des présomptions de légi-timité, d’autoriser les émetteurs à opérer des rachats dans les quinze jours précédant la publication de leurs comptes semestriels, à condition de faire précéder cette interven-tion d’une communication anticipant, sur les points essentiels, la présentation de leurs résultats ; qu’en réponse au courrier du 26 octobre 2001, M. NNNN..., par courrier en date du 29 novembre 2001, remerciait le président de la COB de "ne pas sanctionner (leurs) dépas-sements par rapport aux règles de la place de Paris" et déclarait avoir, comme lui, "ressenti la nécessité d’opérer de manière exceptionnellement vigoureuse à la régulari-sation de notre cours dans cette phase de très forte volati-lité des marchés" ; qu’il insistait également sur la nécessité pour Vivendi Universal de ne pas être désavantagée face à ses concurrents américains qui avaient été autorisés par la SEC à intervenir sans contrainte sur leurs propres titres ; que, le 6 juin 2005, l’AMF transmettait un rapport d’enquête, daté du 22 novembre 2004, au procureur de la République de Paris portant sur le rachat de ses propres titres par la société Vivendi Universal, sur la période allant du 1er septembre au 31 décembre 2001, étendue au 30 avril 2002 ; que, dans ce rapport était relevé que la période du 11 au 25 septembre 2001 était "couverte" par la lettre du 26 octobre 2001 du président de la COB ; que l’AMF concluait que "même en tenant compte de la posi-tion prise par la Commission des opérations de bourse à la suite des attentats du 11 septembre 2001, telle que pré-cisée dans son communiqué de presse du 12 sep-tembre 2001, il apparaît que Vivendi Universal, durant l’ensemble de la période du 26 septembre 2001 au 30 avril 2002, n’a pas respecté les critères de légitimité des interventions sur son propre titre" ; que la commission spécialisée du collège de l’AMF décidait cependant à la majorité de ses membres, lors de sa séance du 3 mai 2005, de ne pas notifier de griefs à la société Vivendi Universal et, en conséquence, de ne pas transmettre le rapport d’en-quête à la Commission des sanctions ; que lors de sa confrontation avec MM. PPPP... et OOOO..., Philippe QQQQ... a confirmé qu’il avait effectivement reçu des objectifs de cours précis à atteindre pour la seule journée du 25 septembre 2001, indiquant que pour les autres journées durant la période du 17 septembre au 2 octobre 2001, les ordres qui lui avaient été transmis par MM. PPPP... ou OOOO... étaient des ordres d’achat clas-siques, soit des ordres soignants ; que, s’agissant du 25 septembre il avait reconnu, avant de revenir sur cet aveu devant les premiers juges, avoir eu l’instruction de

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25 septembre il n’était pas présent étant occupé par le déménagement des services de la trésorerie dans un autre immeuble ; qu’il n’a jamais eu la conscience de participer à une manipulation de cours ; que, d’ailleurs, M. NNNN... lors d’une confrontation a déclaré "MM. PPPP... et OOOO... sont parfaitement fondés à déclarer avoir agi sur la base de mes instructions et se sont montrés des collaborateurs professionnels en tout point durant cette période" ; qu’il n’a dès lors commis aucun fait fautif susceptible d’avoir causé un quelconque préjudice aux parties civiles, qui d’ailleurs dans leurs conclusions n’invoquent pas le moindre comportement fautif à son égard et pouvant avoir un lien de causalité avec leur prétendu préjudice ; que, dans ces conditions elles ne peuvent solliciter une condamnation "in solidum" avec tous les autres prévenus qui ont été renvoyés, sous des préventions différentes, les faits qui lui sont reprochés étant radicalement différents, distincts et ne présentant aucune connexité ; que M. NNNN... assumait l’entière responsabilité de cette procédure de rachat, ses collabora-teurs ayant exécuté professionnellement et de bonne foi ses instructions ; qu’il soutenait "n’avoir jamais donné d’instructions autres que sous forme d’un cours limite d’achat dans le cadre de la régularisation de cours" ; que les irrégularités constatées, telles les interventions au fixing et la règle des 25 %, se rapportaient à des présomp-tions de légitimité dont le dépassement entraînait le ren-versement de la charge de la preuve sur la légitimité des interventions, que les événements du 11 septembre pou-vaient légitimer ; que, s’agissant de la régie d’abstention en période de publication des comptes, M. NNNN... sou-tenait qu’il avait été conforté par l’entretien de M. MMMM... avec la COB, qui n’avait pas formellement émis d’opposition aux interventions, et ce confirmé par le président M. Michel CCCCCCCCCC... ; que, revenant sur les journées des 24 et 25 septembre, il soulignait, d’une part, les incohérences des déclarations de MM. François PPPP..., d’Hubert OOOO... et de Philippe QQQQ..., d’autre part, les erreurs d’analyse de ces jour-nées, résultant du document rédigé par M. François AAAAAAAAAA..., en date du 3 octobre 2001, et saisi lors de la perquisition dans les locaux de Deutsche Bank, qui alléguait un risque pénal de manipulation de cours, position que ce dernier modérait dans un courrier, en date du 16 avril 2004, adressé à M. Michel CCCCCCCCCC... ; qu’ainsi à partir de l’analyse des dif-férents échanges entre MM. Philippe QQQQ... et Fran-çois PPPP... et du journal des transactions fourni par Euronext, l’avocat de M. NNNN... démontrait devant les premiers juges que "VU n’avait pas provoqué de hausse du titre et que le passage de 48 à 50 euros était préalable à l’ordre incriminé résultant, de la conversation entre MM. Philippe QQQQ... et François PPPP..." ; que c’était le 24 et non le 25 septembre 2001 que M. François PPPP... avait donné ordre à M. Philippe QQQQ... de passer la limite d’achat à 50 euros, ladite position étant confirmée par un mail envoyé à 15 h 35 à M. François PPPP... : "J’ai bien reçu votre instructions de passer la limite d’achat à 50 euros contre 47 euros précédemment. A 15 h 30 nous avions acheté 85 200 titres à 46,99" ; que, selon M. NNNN..., il s’agissait de porter le cours maximum d’acquisition du titre à 50 euros et non de chercher à atteindre le cours de 50 euros, étant précisé que la confé-

tion ; que, lors de la journée du 25 septembre, le CAC 40 a progressé dans des proportions similaires à celles du titre Vivendi Universal, son cours étant à l’ouverture de 3,796, soit – 2 % par rapport au cours de clôture de la veille, et à la clôture du 25 septembre, il était de 3,903 soit + 1 % ; que le cours du CAC 40 ayant ainsi progressé de 3 % ce jour-là, comme le titre Vivendi Universal ; qu’à l’ouverture de la séance du 26 septembre 2001, la baisse du cours de l’action Vivendi Universal était de – 0,20 % alors que celui du CAC 40 était de – 0,53 %, ce qui démontre que si l’intégrité du marché avait été atteinte par une action de manipulation de cours, l’action Vivendi Universal aurait dû nécessairement baisser dans une pro-portion largement supérieure à la baisse de l’indice CAC 40 à l’ouverture de la séance du 26 septembre 2001 ; qu’au surplus les parties civiles ne démontrent aucun lieu de causalité entre les préjudices allégués et son comporte-ment, lesquelles se reposent sur une prétendue connexité entre les différents chefs de prévention, étant relevé que les parties civiles représentées par Me Lavisse n’évoquent même pas la question de la prétendue manipulation de cours dans leurs conclusions ; que MM. François PPPP... et Hubert OOOO... ont indiqué au cours de l’instruction, avant de revenir sur leurs déclarations à l’audience devant les premiers juges, avoir respecté les instructions de M. NNNN... en terme de cours ou de variation de cours à atteindre, ainsi que les introductions des ordres d’achat dans le carnet d’ordres dans les cinq minutes pré-cédant le fixing de clôture de façon à atteindre le niveau ou la variation de cours fixé comme objectif ; que, selon M. Hubert OOOO..., M. NNNN... ne leur demandait pas formellement de manipuler le cours, mais de le rendre le plus élevé possible au fixing de clôture, mention-nant en permanence qu’un cours élevé dissuadait les Hedge Funds de vendre, car ces fonds achètent quand le cours s’élève et vendent quand le cours baisse ; que, devant la cour M. François PPPP..., outre qu’il reprend partie des arguments soulevés par M. QQQQ... pour sou-tenir que la matérialité du délit de manipulation de cours n’est pas établie, soutient principalement qu’il est impos-sible de lui prêter la moindre intention délictueuse, dès lors qu’il avait été assuré par sa hiérarchie de la légitimité desdites opérations, M. NNNN... lui ayant indiqué en son temps que la COB légitimait ces opérations ; qu’il n’avait fait en sa qualité d’opérateur de trésorerie, à savoir de simple exécutant, que respecter les instructions qui lui avaient été données par son président ; qu’à titre subsi-diaire il fait valoir que les demandes des parties civiles sont infondées ; qu’il n’est pas sérieux de prétendre que les prévenus seraient "tous parfaitement coauteurs de l’en-semble des infractions visées à la prévention" ; qu’ainsi les parties civiles défendues par Me Lavisse n’allèguent même pas l’existence d’un lien de causalité entre leur prétendu préjudice et la prétendue faute qu’il aurait pu com-mettre ; que M. OOOO... devant la cour fait valoir qu’il avait reçu instruction de procéder à l’achat des actions faisant l’objet de la présente procédure ; qu’il n’a pris aucune part à la décision de rachat des actions, et que le service de la trésorerie dont il avait la charge n’avait fait qu’exécuter les décisions prises par la direction générale ; qu’il n’avait aucun pouvoir pour refuser d’exécuter les ordres de M. NNNN... en les transmettant, quand il les recevait, à M. QQQQ... ; qu’il est au surplus établi que le

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qu’un contact téléphonique avait été pris avec la COB, et que son interlocuteur s’était limité à rappeler le contenu du communiqué de la COB du 12 septembre 2001 et avait ajouté que la publication des comptes faite par vivendi Universal le 23 juillet 2001, qui n’incluait pas ceux de Vivendi Environnemnet, ne pouvait satisfaire aux exigences exprimées dans le communiqué du 12 sep-tembre 2001 ; qu’il reconnaissait avoir signé le courrier du 26 septembre 2001 dont la teneur lui paraissait exacte, tout en ignorant sa pré-rédaction par la Deusche Bank ; qu’il avait imaginé que la Deusche Bank deman-dait ce courrier car Vivendi Universal faisait des choses qui "n’étaient pas habituelles", à savoir achats au-delà du seuil de 25 % et en période d’abstention ; que, devant la cour M. MMMM... fait valoir que l’on ne peut en tout état de cause considérer comme fautif le fait pour un pré-posé, fut-il d’un grade élevé, de ne pas ordonner à ses col-laborateurs d’ignorer les ordres directement reçus par ceux-ci du président-directeur général, ce qui serait méconnaître et le bon sens, et la réalité du caractère hié-rarchisé de la société ; que doit être noté que l’exécution du programme de rachat était délégué par l’assemblée générale au conseil d’administration, dont c’est un pou-voir propre, et par ce dernier au président-directeur géné-ral ; que la nature de la "lettre de confort", exclut tout acte de complicité, celle-ci n’étant pas susceptible de déterminer la Deutsche Bank à exécuter des ordres, que pour des raisons commerciales elle avait en tout état de cause décidé de transmettre, la preuve en étant adminis-trée par le fait qu’elle avait exécuté le programme avant même que d’être destinataire de ladite lettre ; qu’il fait encore valoir que nulle part dans la procédure il est fait mention de son intervention dans la transmission des ordres lors de la journée du 25 septembre et de sa pré-sence aux côtés de M. NNNN... ; qu’enfin il n’est pas justi-fié par les parties civiles qu’elles auraient opéré sur les actions Vivendi Universal dans la période de la préten-due manipulation de cours (soit d’une part entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001 et, d’autre, part le 25 septembre pendant dix minutes environ vers 15 h 30) ; que le lien de causalité est nul puisque le programme de rachat avait été annoncé par l’émetteur et que les acqué-reurs ayant acheté durant ladite période savaient donc à quoi s’en tenir lorsqu’ils prenaient la décision d’acheter ; que l’incidence éventuelle des achats a été éphémère ; que l’article L. 465-2 du code monétaire et financier réprime "le fait pour toute personne d’exercer on de tenter d’exer-cer, directement ou par personne interposée, une manœuvre ayant pour objet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché d’instruments financiers en indui-sant autrui en erreur" ; que le délit suppose un élément matériel qui se caractérise par la réalisation d’une manœuvre dont la finalité est d’entraver le fonctionne-ment normal d’un marché d’instruments financiers, et dont l’objectif est d’induire autrui en erreur, exigence des-tinée à ne pas sanctionner pénalement les auteurs de pra-tiques contribuant au bon fonctionnement du marché et à la protection des épargnants, comme par exemple les pratiques de stabilisation des cours pour mettre fin à des fluctuations excessives ; que le délit suppose enfin la conscience pour les auteurs de la manœuvre de perturber le fonctionnement normal du marché ; que le règlement de la COB N° 90-04 relatif à l’établissement des cours

rence de presse à cette heure précise, était loin d’être ache-vée (achèvement aux alentours de 17 heures) ; que, dès lors, contrairement aux griefs formulés dans la mise en examen, la montée du cours du titre à 50 euros n’était pas liée à l’ordre passé à 15 h 28’35", puisque le cours de 50 euros avait été atteint à 15 h 24’03" et celui de 50,40 euros, cours le plus haut de la journée de bourse avait été atteint à 15 heures 24’32" ; qu’ainsi le cours le plus haut de la journée boursière avait été atteint avant l’appel de M. Philippe QQQQ... à 15 heures 28’35" ; que, s’agissant des transactions effectuées lors du fixing du 25 septembre, il estimait que M. PPPP... avait agi de manière professionnelle en suivant ce fixing de manière instantanée à l’intérieur de la limite d’achat qui lui avait été donnée, sans qu’à aucun moment un objectif de cours à 50 euros n’ait été évoqué par M. PPPP... lors de la conversation enregistrée ; que M. NNNN... attribuait la hausse du cours au fait que les comptes semestriels pré-sentés ce jour-là étaient en ligne avec les prévisions du marché et avec ce qui avait été annoncé au préalable par VU : "le cours de 50 euros ayant été atteint avant les achats en cause, ces derniers n’ont produit aucune varia-tion du titre" ; qu’il soulignait que "tenir un objectif de cours de 10 minutes à l’inférieur d’une conférence de presse, alors que par ailleurs la conférence la plus impor-tante était celle des analystes qui peuvent passer un ordre immédiatement après la conférence voire même pendant celle-ci, alors que les journalistes ne publient leurs écrits que le lendemain au plus tôt, n ’a aucun sens » ; que, devant la cour M. NNNN... fait valoir que les premiers juges ont d’ailleurs jugé "parfaitement légitime" "la démarche de régularisation de cours" menée par Vivendi Universal, ajoutant que "les présomptions de légitimité ne sont que des présomptions et non des interdictions" ; qu’il est parfaitement absurde de considérer qu’un pro-gramme de rachat d’actions ostensiblement destiné à soutenir le cours de l’action et donnant lieu par nature à une publicité importante – auprès du marché, des action-naires et de l’AMF puisse tromper qui que ce soit, ou avoir pour objet d’induire quiconque en erreur ; que ce programme au lendemain du 11 septembre avait au contraire pour objet de lutter contre les risques de mani-pulations de cours pratiqués par les fonds d’investisse-ments spéculatifs américains ; que l’évolution du cours du titre Vivendi Universal a été parallèle avec celle d’autres sociétés cotées en bourse, évoluant dans la même sphère d’activité ; qu’il est impossible d’établir une relation cau-sale certaine entre les ordres de bourse litigieux et l’évolu-tion haussière du titre sur la période ; qu’enfin après le 2 octobre 2001, date de cessation du rachat de ses actions par Vivendi, le cours du titre ne s’est absolument pas effondré, mais au contraire a poursuivi sa hausse, démontrant ainsi l’absence de toute entrave au maintien artificiel de la valeur de l’action ; que M. MMMM... sou-tenait qu’il ne se souvenait pas d’objectifs en termes de cours à atteindre, mais plutôt d’objectifs de régularisation de cours, c’est-à-dire d’amortissement des baisses ou de réduction d’écart par rapport à des concurrents en cas d’attaqué par des Hedge Funds ; que suite à l’entretien téléphonique qu’il avait eu le 17 septembre 2001 avec M. Hubert VVVVVVVVV..., il avait établi une note en date du 19 septembre 2001, soit donc deux jours après le début des opérations de rachat, par laquelle il indiquait

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l’après 11 septembre 2001, ayant entraîné de fortes per-turbations boursières, l’opération de rachat de ses propres actions par Vivendi Universal en vue de régulariser le cours du titre était parfaitement légitime dans la limite, toutefois, qu’elle affecte dans des proportions normales le jeu de l’offre et de la demande sur le marché ; qu’il est établi par le journal des transactions fourni par Euronext que c’est le 24 septembre à 15 heures 53’ que M. François PPPP... donnait ordre à M. Philippe QQQQ... de passer à la limite d’achat à 50 euros lequel commençait à passer ses ordres à ce cours pendant la période du fixing ; que, toutefois, le cours d’ouverture du 25 septembre s’établis-sait à 47,40 euros ; qu’il est également établi que la mon-tée du cours du titre à 50 euros lors de la journée de bourse du 25 septembre n’était pas liée à l’ordre passé à 15 heures 28"35" à la suite de l’appel de M. Philippe QQQQ..., le cours de 50 euros ayant été atteint à 15 h 25’03" et celui de 50,40 euros, le plus haut de la journée à 15 heures 24’32" ; que, dès lors, le fait pour M. François PPPP... d’avoir donné ordre à M. Philippe QQQQ... à 15 h 28’35" de maintenir le cours de ses achats à 50 euros pendant une dizaine de minutes, ne peut constituer à lui seul la preuve d’une manipulation en vue "de faire mon-ter le cours à 50 euros" – ainsi qu’il est indiqué dans la prévention – puisqu’il avait déjà été atteint et dépassé au cours de 50,40 euros ; qu’il convient également de consta-ter qu’aucun retournement de tendance ne s’était produit entre le fixing de clôture du 25 septembre et le fixing d’ou-verture du 26 septembre, le cours de clôturé du 25 sep-tembre s’établissait à 49 euros, et le cours d’ouverture du 26 septembre à 48,90 ; ce qui tend à démontrer que l’im-pact des ordres passés par M. QQQQ... au cours de 49 euros pendant le fixing de clôture a été neutre ou minime ; qu’enfin sera relevé que pendant la période liti-gieuse, et plus particulièrement pendant la journée du 25 septembre, le cours du titre Vivendi Universal, avait progressé dans les mêmes proportions que le cours du CAC 40 ou des autres sociétés évoluant dans la même sphère d’activité ; que, de même à l’issue de la période de rachat, soit le 3 octobre 2001, le cours du titre Vivendi Universal n’a cessé de progresser pour atteindre au début du mois de janvier le cours de 62 euros ; qu’il n’est pas contestable que l’opération de rachat par Vivendi Univer-sal n’a pas été dissimulée ni au public, M. NNNN... l’ayant annoncée lors d’un communiqué de presse du 25 septembre, ni aux autorités de marché, l’ensemble des opérations d’achats leur étant à la fin de chaque jour de bourse communiqué ; que le président de l’AMF, M. Rameix, dans une note adressée au procureur de la République, en date du 6 avril 2004, rappelait : "le marché n’a pas été trompé par ces rachats qui ont été ren-dus publics, M. NNNN... ayant lui-même insisté, le 25 septembre 2001, sur la relation qu’entraînerait l’annu-lation de 3 % du capital qu’il venait de racheter. Vivendi Universal n ’a pas exploité l’information privilégiée sur ses propres résultats puisque ceux-ci étaient large-ment anticipés par le marché, qui, sur la base de l’opti-misme communicatif M. NNNN... tendait plutôt, à les surestimer. Plusieurs des règles non respectées par Vivendi Universal ne constituent pas des interdictions légales ni même réglementaires, mais plutôt de fortes recommandations dont, il n’était pas aberrant de s’éloi-gner en période exceptionnelle. Si c’était abusif pour

pose comme principe que l’établissement des cours doit résulter de la libre confrontation des ordres d’achat et de vente, que les ordres transmis sur le marché ne doivent pas avoir pour objet d’entraver l’établissement du prix ni d’induire en erreur et qu’ils doivent correspondre aux objectifs visés par la personne qui en est à l’initiative ; que, dans un chapitre II du règlement sont énoncées des dispositions réglementant l’intervention des sociétés sur leurs propres titres ("rachats d’actions") lorsque ces titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé et que les sociétés interviennent dans le cadre des articles 217-2 et 217-10 de la loi du 24 juillet 1966 (deve-nus les articles 225-209 et 225-217 du code de com-merce) ; que l’article 7 du règlement édicté des cas de présomptions de légitimité des interventions des sociétés sur leurs propres actions ; que leurs interventions sont présumées légitimes, lorsqu’elles obéissent notamment aux conditions ci-après énumérées : – elles sont effectuées par un seul intermédiaire par séance de bourse ou, depuis la publication du règlement n° 2000-06, lorsque l’émet-teur utilise des produits dérivés, par deux intermédiaires à condition qu’il assure une coordination adéquate entre ces deux prestataires – Et pour les titres cotés en continu, elles obéissent notamment aux conditions suivantes – elles ne concourent pas à la formation du cours ni avant l’ouverture de la séance, ni à l’ouverture ou à la première cotation du titre, ni à la reprise des cotations suivant une suspension, ni dans la dernière demi-heure de la séance de bourse ou au fixing de clôture : – elles représentent un volume maximal de 25 % de la moyenne des négocia-tions quotidiennes constatées sur une période de réfé-rence précédant l’intervention de trois jours de bourse pour les valeurs admises au service de règlement différé (et de quinze jours de bourse pour les valeurs négociées au comptant) ; que l’article 8 exige que "sans préjudice du règlement n° 90-08 [relatif au manquement d’initié], un émetteur de titres doit s’abstenir d’intervenir sur ses propres titres : – pendant une période de quinze jours précédant la date à laquelle ses comptes consolidés, ou à défaut ses comptes annuels, sont rendus publics ; – pen-dant la période comprise entre la date à laquelle l’émet-teur a connaissance d’une information qui, si elle était rendue publique, pourrait avoir une influence significa-tive sur le cours des titres de l’émetteur et la date à laquelle cette information est rendue publique" ; qu’il est constant qu’en l’espèce les présomptions de légitimité et la période d’abstention n’ont pas été respectées lors des achats visés à la prévention ; que, toutefois, compte tenu du contexte très particulier de l’après 11 septembre, le non-respect de la période d’abstention pouvait être admissible, d’autant que la société Vivendi Universal avait publié partie de ses résultats le 23 juillet 2001, s’agissant de sa branche médias et communication ; que les présomptions de légitimité ne sont que des présomp-tions et non des interdictions ; que ces présomptions dis-pensent une société qui en respecte les termes d’avoir à faire la preuve de son bon droit ; que, dans le cas contraire elle a la charge de la preuve de ce que l’esprit de la loi a été respecté ; que le non-respect de ces présomptions peut être un indice du délit de manipulation de cours, qui suppose la démonstration de l’existence de manœuvres ayant entravé le cours de l’action en induisant autrui en erreur ; qu’il n’est pas contestable qu’en raison du contexte de

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tuaient une manœuvre ayant eu pour objet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché d’instruments financiers en induisant autrui en erreur et ayant eu pour effet de soutenir abusivement une hausse artificielle du cours du titre Vivendi Universal", la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé l’article 465-2 du code monétaire et financier ;

« 2° alors qu’il appartient aux juges correctionnels d’ordonner les mesures d’information qu’ils estiment nécessaires à la manifestation de la vérité ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que, pour relaxer les prévenus du chef de manipulation de cours à raison d’ordres de rachat passés par la société Deutsche Equities pour le compte de Vivendi Universal sur ses titres entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001, la cour d’appel a retenu qu’il n’exis-tait aucune preuve formelle de l’entrave au fonctionne-ment régulier du marché causé par lesdites manœuvres dès lors qu’aucune démarche de comparaison de l’impact des ordres passés à la demande de Vivendi Universal par Deutsche Bank Equities par rapport à l’ensemble des ordres passés par l’ensemble des opérateurs n’avait été effectuée tant par la COB, qu’au cours de l’instruc-tion, analyse rendue à ce jour impossible, lesdites don-nées n’existant certainement plus ; qu’en statuant ainsi, par des motifs hypothétiques, et sans ordonner un supplé-ment d’information pour déterminer si les données néces-saires à cette comparaison existaient encore et si ladite comparaison, dont elle a reconnu le caractère nécessaire à la solution du litige, ne permettrait pas d’apporter la preuve formelle de l’impact des manœuvres reprochées au prévenus sur le fonctionnement régulier du marché, la cour d’appel a violé les articles 483 du code de procédure pénale et 465-2 du code monétaire et financier » ;

Les moyens étant réunis ;Attendu que MM. NNNN..., OOOO..., PPPP... et

QQQQ... poursuivis du chef de manipulation de cours et M. MMMM... du chef de complicité de ce délit ont été relaxés définitivement par le tribunal correctionnel ;

Attendu que, pour retenir qu’aucune faute civile n’est établie à l’égard des prévenus à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, la cour d’appel énonce que le règlement de la Commission des opérations de bourse relatif à l’établissement des cours édicte, dans son article 7, des cas de présomptions de légitimité des interventions des sociétés sur leurs propres actions et fixe des périodes où un émetteur doit s’abstenir d’inter-venir sur ses titres, qu’en l’espèce, les présomptions de légitimité et la période d’abstention n’ont pas été res-pectées lors des achats visés à la prévention, qu’en rai-son du contexte de l’après 11 septembre, ayant entraîné de fortes perturbations boursières, le non-respect de la période d’abstention pour une opération de rachat en vue de régulariser le cours du titre était admissible, la société ayant en outre publié partie de ses résultats le 23 juillet 2001 pour la branche médias et communi-cation, que les présomptions de légitimité ne sont pas des interdictions, que leur non-respect est un indice de manipulation de cours qui suppose la démonstration de l’existence de manœuvres ayant entravé le cours de l’action en induisant autrui en erreur, qu’il est établi, par l’examen du journal des transactions, que la montée du cours du titre à 50 euros le 25 septembre n’était pas

Vivendi Universal de prétendre avoir respecté le commu-niqué de la COB du 12 septembre, il n’en reste pas moins que l’entreprise avait donné au marché certains éléments, certes partiels, mais essentiels à ses résultatsé" ; que la commission spécialisée du collègue de l’AMF décidait à la majorité de ses membres, lors de sa séance du 3 mai 2005, de ne pas notifier de griefs à la société Vivendi Universal et de ne pas transmettre le rapport de l’AMF à la commis-sion des sanctions ; qu’en l’état de ces constatations preuve formelle n’est pas rapportée que les opérations de rachats de ses titres par Vivendi Universal, entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001 constituent une manœuvre ayant eu pour objet d’entraver le fonctionne-ment régulier d’un marché d’instruments financiers en induisant autrui en erreur et ayant eu pour effet de sou-tenir abusivement une hausse artificielle du cours du titre Vivendi Universal, étant au surplus relevé qu’ aucune démarche de comparaison de l’impact des ordres passés à la demande de Vivendi Universal par Deutsche Bank Equities par rapport à l’ensemble des ordres passés par l’ensemble des opérateurs n’a été effectuée tant par la COB, qu’au cours de l’instruction, analyse rendue à ce jour impossible, les dites données n’existant certaine-ment plus ; qu’en conséquence, à défaut de preuve d’une manipulation de cours, aucune faute civile n’est établie à l’égard des prévenus ;

« 1° alors que le délit de manipulation de cours est constitué dès lors qu’une personne exerce ou tente d’exercer, directement ou par personne interposée, une manœuvre ayant pour objet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché réglementé ou d’un système multi-latéral de négociation en induisant autrui en erreur ; que l’article 7 du règlement de la COB n° 90-04 relatif à l’éta-blissement des cours pose comme principe que l’établisse-ment des cours doit résulter de la libre confrontation des ordres d’achat et de vente, que les ordres transmis sur le marché ne doivent pas avoir pour objet d’entraver l’éta-blissement du prix ni d’induire en erreur et qu’ils doivent correspondre aux objectifs visés par la personne qui en est à l’initiative ; que, dans un chapitre II du règlement précité sont énoncées des dispositions réglementant l’in-tervention des sociétés sur leurs propres titres lorsque ces titres sont admis aux négociations sur un marché régle-menté et que les sociétés interviennent dans le cadre des articles 225-209 et 225-217 du code de commerce ; que l’article 771 de ce règlement édicte des cas de présomp-tions de légitimité des interventions des sociétés sur leurs propres actions ; que le non-respect par une société de ces cas de présomption de légitimité met à sa charge la preuve de ce que les manœuvres qu’elle a réalisées n’ont pas eu pour effet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché réglementé ou d’un système multilaté-ral de négociation en induisant autrui en erreur ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que les opérations réalisées par la société Vivendi Universal sur ses propres titres durant la période de prévention n’ont pas respecté les présomp-tions de légitimité précitées et que ce non-respect mettait à sa charge la preuve de ce que l’esprit de la loi avait été respectée ; qu’en retenant néanmoins, pour relaxer les prévenus du chef de manipulation de cours et débouter les parties civiles de leurs demandes de ce chef, que "la preuve formelle n’était pas rapportée que les opérations de rachats de ses titres par Vivendi Universal (…) consti-

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naires de la société Vivendi Universal n’avaient pas éprouvé un préjudice du fait de cette infraction consistant en la perte d’une chance d’effectuer de meilleurs investis-sements s’ils avaient eu connaissance des informations privilégiées utilisées par les prévenus, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes sus-visés ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour M. et Mme SSSS..., pris de la violation des articles 2, 3, 591, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit d’initié ;

« aux motifs qu’il n’apparaît pas que le délit d’initié commis par M. MMMM... et M. RRRR..., qui ont mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négative-ment sur le cours du titre, lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait d’ailleurs cessé de monter ; que les parties civiles seront dès lors déboutées de leurs demandes au titre de ce délit ; que, dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

« 1° alors que le délit d’initié peut causer un préjudice direct et personnel aux actionnaires ; que les actionnaires d’une société dont les dirigeants se rendent coupables de délit d’initié sont fondés à réclamer l’indemnisation d’un préjudice résultant de la perte de chance de mieux investir si les informations utilisées par les prévenus leur avaient été communiquées ; qu’en énonçant, pour débou-ter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes à raison du délit d’initié commis par MM. MMMM... et RRRR..., qu’il n’apparaissait pas que ce délit ait influé négativement sur le cours du titre, lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait d’ailleurs cessé de monter, sans rechercher si les action-naires de la société Vivendi Universal n’avaient pas éprouvé un préjudice du fait de cette infraction consistant en la perte d’une chance d’effectuer de meilleurs investis-sements s’ils avaient eu connaissance des informations privilégiées utilisées par les prévenus, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes sus-visés ;

« 2° alors que le délit d’initié est susceptible de causer un préjudice personnel et direct aux actionnaires, sans qu’il soit nécessaire d’établir un seuil de sensibilité à par-tir duquel les opérations sur les titres sont de nature à influer sur le cours de l’action ; qu’en déboutant les par-ties civiles de leurs demandes d’indemnisation au motif qu’il n’apparaissait pas que le délit d’initié commis par les prévenus, qui avaient « mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négativement sur le cours du titre, la cour d’appel s’est prononcée en considération d’un seuil de sensibilité à atteindre, ajoutant ainsi une condi-tion que la loi ne prévoit pas » ;

Sur le second moyen de cassation, proposé pour l’as-sociation des petits porteurs actifs (APPAC) et autres, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2 et 497 du code de procédure pénale, L. 465-1 du code monétaire et financier, 6 § 1, de la Convention euro-

liée à l’ordre passé puisqu’antérieure à celui-ci, qu’au-cun retournement de tendance n’a été constaté et que l’impact des ordres passés pendant le fixing de clôture a été neutre ou minime, qu’il peut être relevé que pen-dant la période litigieuse, le cours du titre a progressé dans les mêmes proportions que le cours du CAC 40 ou le cours des titres des autres sociétés de même activité, qu’ensuite le cours du titre n’a cessé de monter jusqu’au début du mois de janvier, que l’opération de rachat n’a pas été dissimulée mais annoncée par communiqué de presse, que la commission spécialisée du collège de l’AMF a décidé de ne pas notifier de griefs à la société VU lors de sa séance du 3 mai 2005 ;

Que la cour d’appel conclut qu’en conséquence, n’est pas rapportée la preuve formelle que les opérations de rachat litigieuses constituent une manœuvre ayant eu pour objet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché en induisant autrui en erreur et ayant eu pour effet de soutenir abusivement une hausse artificielle du cours du titre VU, étant au surplus relevé qu’aucune démarche de comparaison de l’impact des ordres pas-sés par rapport à l’ensemble des ordres des opérateurs n’a été effectuée, analyse à ce jour impossible et qu’à défaut de preuve d’une manipulation de cours, aucune faute civile n’est établie à l’égard des prévenus ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’ap-pel, sans inverser la charge de la preuve, a justifié sa décision ;

Que, dès lors, les moyens, inopérants en leur seconde branche en ce qu’ils critiquent un motif surabondant concernant l’influence de l’opération en cause sur le cours du titre, ne sauraient être accueillis ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour M. UUUU... et autres, parties civiles, représentés par Me Le Prado, pris de la violation des articles 2, 3, 591, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit d’initié ;

« aux motifs qu’il n’apparaît pas que le délit d’initié commis par M. MMMM... et M. RRRR..., qui ont mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négative-ment sur le cours du titre, lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait d’ailleurs cessé de monter ; que les parties civiles seront dès lors déboutées de leurs demandes au titre de ce délit ; que, dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

« alors que le délit d’initié peut causer un préjudice direct et personnel aux actionnaires ; que les actionnaires d’une société dont les dirigeants se rendent coupables de délit d’initié sont fondés à réclamer l’indemnisation d’un préjudice résultant de la perte de chance de mieux investir si les informations utilisées par les prévenus leur avaient été communiquées ; qu’en énonçant, pour débou-ter l’ensemble des parties civiles de leurs demandes à raison du délit d’initié commis par MM. MMMM... et RRRR..., qu’il n’apparaissait pas que ce délit ait influé négativement sur le cours du titre, lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait d’ailleurs cessé de monter, sans rechercher si les action-

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des mentions contradictoires ; qu’il résulte du dispositif de l’arrêt attaqué qu’après avoir confirmé le jugement déféré en ce qu’il a débouté l’ensemble des parties civiles de leurs demandes sur le fondement du délit d’initié, sur celui du délit d’abus de biens sociaux et sur celui du délit de manipulation de cours, la cour d’appel a, pour le sur-plus, "infirm(é) et confirm(é)" le jugement déféré ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu l’article 593 du code de procédure pénale » ;

Les moyens étant réunis ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt que sur l’action civile

fondée sur le délit d’informations fausses ou trom-peuses, la cour d’appel a, à la fois, infirmé et confirmé le jugement déféré, le confirmant en ce qu’il a débouté les parties civiles au regard d’une partie des faits poursuivis et l’infirmant en ce qu’il a alloué des dommages-inté-rêts sur le fondement des autres faits visés à la préven-tion pour lesquels la cour d’appel a infirmé le jugement sur l’action publique en relaxant les prévenus ;

Que, dès lors, les moyens manquent en fait ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs :I – Sur le pourvoi de M. MMMM... :Lui DONNE ACTE de son désistement ;DIT n’y avoir lieu à statuer sur ce pourvoi ;II – Sur les autres pourvois :Les REJETTE.Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme de la

Lance – Avocat général : M. Bonnet – Avocats : Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Piwnica et Molinié, SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Spinosi et Sureau

No 114

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES

Saisine – Etendue – Faits non visés dans la préven-tion – Conditions – Acceptation du prévenu d’être jugé

Selon l’article 388 du code de procédure pénale, les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n’accepte expressément d’être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention.

Méconnaît ce principe l’arrêt qui, pour déclarer le prévenu coupable d’escroquerie, retient des manœuvres frauduleuses accomplies pendant une période non vi-sée par la prévention, sans constater que le prévenu a accepté d’être jugé sur ces faits.

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par M. Emmanuel X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 5-12, en date du 16 février 2016, qui, pour escroquerie et tentative d’escroquerie, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sur-

péenne des droits de l’homme et premier du Protocole additionnel de ladite Convention :

« en ce que les parties civiles ont été déboutées de leurs demandes présentées en réparation du préjudice subi du fait du délit d’initié ;

« aux motifs qu’il n’apparaît pas que le délit d’initié commis par MM. MMMM... et RRRR..., qui ont mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négative-ment sur le cours du titre, lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait cessé de monter ; que les parties civiles seront dès lors déboutées de leurs demandes au titre de ce délit ;

« 1° alors que le délit d’initié est susceptible de causer un préjudice personnel direct aux actionnaires, sans qu’il soit nécessaire d’établir un seuil de sensibilité à partir duquel les opérations sur les titres sont de nature à influer sur le cours de l’action ; qu’en déboutant les parties civiles de leurs demandes d’indemnisation, au motif qu’il n’ap-paraissait pas que le délit d’initié commis par les préve-nus, qui avaient "mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négativement sur le cours du titre", la cour d’appel s’est prononcée en considération d’un seuil de sensibilité à atteindre, ajoutant ainsi une condition que la loi ne prévoit pas ;

« 2° alors qu’en déboutant les parties civiles de leurs demandes d’indemnisation, au motif qu’il n’apparaissait pas que le délit d’initié commis par les prévenus ait influé négativement sur le cours du titre, "lequel titre pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 n’avait pas cessé de monter", sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 30, § 9), si les "actions lancées sur le marché par MM. MMMM... et RRRR... avaient eu une influence sur les cours et avaient conduit à une baisse continue" de ceux-ci postérieurement à la période de ces-sion massive des titres sur le marché dans les semaines qui ont suivi le 4 janvier 2002, la cour d’appel a privé sa décision de base légale » ;

Les moyens étant réunis ;Attendu que, pour débouter les parties civiles de

leurs demandes d’indemnisation sur le fondement du délit d’initié, la cour d’appel énonce qu’il n’appa-raît pas que ce délit commis par MM. MMMM..., le 21 décembre 2001, et RRRR..., les 3 et 4 janvier 2002, qui ont mis sur le marché un nombre limité d’actions, ait influé négativement sur le cours du titre, lequel n’a d’ailleurs pas cessé de monter pendant la période du 21 décembre 2001 au 4 janvier 2002 ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs, dépourvus d’in-suffisance, répondant aux articulations essentielles des conclusions déposées devant elle et qui n’instaure aucune condition non prévue par la loi, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;Sur les quatrièmes moyens de cassation, proposés

pour M. UUUU... et autres, parties civiles, représen-tés par Me Le Prado et pour M. et Mme SSSS..., pris de la violation de l’article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a infirmé et confirmé le juge-ment déféré pour le surplus ;

« alors que sont nuls les arrêts dont le dispositif contient

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sociétés permettant au dispensateur de la formation d’être directement payé par l’Opcaim ;

– une facture de JF consulting d’un montant de 9 328,80 euros en date du 29 décembre 2009 ;

– trois attestations de fin de stage censées avoir été signées par les stagiaires à Paris le 28 décembre 2009, documents sur lesquels figurent également les cachets de JF consulting et de Logicréa ; que, quant à Mme B..., s’il ressort du dossier et des débats qu’elle était effectivement gérante de la société JF consulting depuis le 8 mars 2010, il s’avère que les fonds ont été versés par l’Adefim à l’aide de deux chèques de banque datés du 8 janvier 2010, soit à une période antérieure à sa gérance, qui était assurée, à cette époque, par M. Frédéric Jaspart ; que, par ailleurs, il ne ressort ni du dossier ni des débats d’éléments sus-ceptibles d’établir une quelconque intervention, à quelque titre que ce soit, dans la réalisation des manœuvres frau-duleuses, remontant à novembre et décembre 2009 ;

« alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n’accepte expressément d’être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention ; que M. X... a été cité devant le tri-bunal correctionnel pour des faits d’escroquerie commis courant janvier 2010 à février 2011 ; que, pour déclarer le prévu coupable d’escroquerie, la cour d’appel a retenu la réalisation de manœuvres frauduleuses remontant à novembre et décembre 2009 ; qu’en statuant ainsi, sans qu’il résulte des mentions de l’arrêt ou des pièces de pro-cédure que le prévenu ait accepté d’être jugé pour des faits commis antérieurement au mois de janvier 2010, la cour d’appel a excédé les limites de sa saisine » ;

Vu l’article 388 du code de procédure pénale ;Attendu que les juges ne peuvent statuer que sur les

faits dont ils sont saisis à moins que le prévenu n’ac-cepte expressément d’être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de procédure que M. X..., gérant de la société JF Consulting, a été cité devant le tribunal correctionnel sous la prévention d’escroquerie pour avoir, à Paris, courant janvier 2010 à février 2011, trompé les associations Opcaim et Adefim en sollicitant auprès de ces organismes, en sa qualité de gérant de fait et animateur des sociétés JF Consulting et Paradis Formation, le financement de formations continues de salariés de la société Logicrea, notamment MM. Jean-Luc Z..., Marc Y... et Gérard Y..., en transmettant mensongèrement ces demandes au nom de la société Logicrea, et de les avoir ainsi déterminées à la remise de 9 328,80 euros au profit de la société JF Consulting, qui était supposée organiser ces formations fictives ; que reconnu coupable d’escroquerie par le tribunal, il a interjeté appel ;

Attendu que, pour confirmer le jugement le décla-rant coupable d’escroquerie, l’arrêt retient, notamment, par motifs propres et adoptés, qu’ont été annexées à la demande préalable, datée du 23 novembre 2009, une fausse convention par laquelle l’employeur des trois salariés permettait le paiement direct de la société JF Consulting par l’association dispensatrice de fonds, une fausse facture établie par la société JF Consulting

sis, 2 000 euros d’amende, deux ans d’interdiction de gérer et a prononcé sur les intérêts civils.

20 avril 2017 No 16-81.452

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 313-1 du code pénal, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré le prévenu cou-pable des faits d’escroquerie qui lui sont reprochés, l’a condamné à une peine d’emprisonnement de six mois avec sursis, à une peine d’amende de 2 000 euros et à une peine complémentaire d’interdiction de gérer pour une durée de deux ans et a prononcé sur les intérêts civils ;

« aux motifs propres que, c’est par des motifs perti-nents qu’elle fait siens et par une juste appréciation des faits et circonstances particulières de la cause, exacte-ment rapportés dans la décision attaquée, que les pre-miers juges ont à bon droit retenu M. X... dans les liens de la prévention, étant précisé (…), concernant l’infrac-tion d’escroquerie, que MM. Gérard Y..., Marc Y... et Jean-Luc Z... ont tous trois déclaré ne pas avoir suivi de stage sur le logiciel Autodesk ; que cela n’a pas empêché le prévenu d’envoyer à l’Adefim une facture de JF consul-ting et de faire encaisser par cette société la somme de 9 328,80 euros ; qu’il est vrai que M. X... affirme que la formation Autodesk a eu lieu et a produit une lettre de M. Jean-Morel A... en ce sens ; que cependant, en pre-mier lieu, rien n’explique que MM. Gérard Y..., Marc Y... et Jean-Luc Z... déclarent que ces formations n’ont pas eu lieu si elles l’avaient eu ; qu’en second lieu, l’attesta-tion déposée par M. A... est particulièrement lapidaire ; qu’elle n’est pas datée ; qu’elle ne mentionne pas qu’elle est destinée à être produite en justice ; qu’en réalité, elle n’est pas probante ;

« et aux motifs adoptés qu’il est reproché aux deux pré-venus, à Mme B... "en sa qualité de gérante de droit rému-nérée de la société JF consulting depuis le 8 mars 2010" et à M. X... "en sa qualité de gérant de fait et anima-teur des sociétés JF consulting et Paradis formation" l’obtention frauduleuse de fonds pour un montant de 9 328,80 euros ; qu’il est établi, et admis par M. X..., que ce montant a été versé à la société JF consulting par l’Adfim par deux chèques de banque en date du 8 jan-vier 2010 et que ce paiement est censé correspondre à une formation qu’auraient suivie MM. Gérard Y..., Marc Y... et Jean-Luc Z..., salariés de la société Logicréa, entre les 14 et 28 décembre 2009, formation dispensée par JF consulting ; qu’il est enfin établi, par les pièces figurant au dossier, qu’après la demande préalable de participation au financement d’une action de formation professionnelle faite au nom de la société Logicréa le 23 novembre 2009, ont été également transmises à l’Adefim :

– une convention de paiement de frais pédagogiques censée avoir été conclue le 23 novembre 2009 entre Logi-créa et JF consulting et comportant les cachets des deux

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sonnement avec sursis et à cinq ans d’interdiction de gérer, et a prononcé sur les intérêts civils.

20 avril 2017 No 16-80.808

LA COUR,Vu les mémoires en demande, en défense et les obser-

vations complémentaires produits ;Sur le premier moyen de cassation :Sur le troisième moyen de cassation :Vu l’article 567-1-1 du code de procédure pénale ;Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être

admis ;Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la vio-

lation des articles 122-4 et 314-5 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de détournement d’objets gagés ;

« aux motifs propres que M. X... n’a jusqu’à ce jour remis en cause, ni la régularité des garanties prises par les banques créancières de la SAS X..., ni une éventuelle négligence de celles-ci, les contestations de nature civiles, n’ayant au demeurant donné lieu à aucune action en justice et dont les moyens ne sont pas précisés, évoquées devant la présente cour ne pouvant faire rétroactivement disparaître un délit commis de 2008 à 2010 ; que la réa-lité de détournements de stocks warrantés, ultérieure-ment confirmée par expertises ordonnées dans le cadre de la procédure collective, a dès décembre 2010 été constatée par l’administration des douanes sur la base des décla-rations récapitulatives mensuelles (DRM) souscrites par M. X... lui-même ; que Me Cabooter, administrateur judiciaire de la SAS X..., a certes considéré qu’en appli-cation de l’article L. 622-8 du code de commerce, la vente de stocks de champagnes warrantés pouvait intervenir sans autorisation du juge commissaire à charge de consi-gner à la Caisse des dépôts et consignations la quote-part du prix correspondant aux créances garanties ; que la vente de stocks warrantés a cependant débuté antérieure-ment à l’ouverture du redressement judiciaire de la SAS X..., cette dernière n’ayant en tout état de cause jamais respecté son obligation de consignation en ne reversant à la Caisse des dépôts et consignations que 337 000 euros sur, au minimum, 569 475 euros, soit une insuffisance de 232 475 euros ;

« et aux motifs adoptés que le délit de détournement de gages, également reproché à M. X..., est constitué ; qu’en effet, il résulte du PV n° 33 (receveur régional des douanes) qu’en mars 2010, la société X... SAS disposait d’un stock total de 2 894,24 hl, alors que le stock war-ranté était de 3 307,75 hl, soit un manque de 609,75 hl ; que, par ailleurs, Mme Y..., adjointe de direction au sein de la société X... SAS, indique que M. X... n’adressait jamais au service des douanes des déclarations mensuelles fiables, ce qui démontre l’élément intentionnel de ce der-nier ; qu’en conséquence, les arguments de M. X..., rela-tifs à l’autorisation de vendre du champagne warranté donnée par l’administrateur judiciaire de sa société, n’est pas recevable, le constat du manque étant bien antérieur

de frais de formation de 9 328,80 euros et des attesta-tions de fin de stage mensongères ;

Que les juges ajoutent que ces fausses pièces datées de novembre à décembre 2009 et leur transmission aux associations dispensatrices de fonds sont constitutives des manœuvres frauduleuses qui ont été déterminantes de la remise de la somme de 9 328,80 euros ;

Mais attendu qu’en retenant des manœuvres qui auraient été réalisées dans une période non visée par la prévention et sans constater que le prévenu avait accepté d’être jugé sur des faits d’escroquerie commis au moyen de ces manœuvres, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité du chef d’escroquerie, aux peines et à l’action civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’ap-pel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Zerbib – Avocat général : M. Wallon – Avocats : Me Haas

Dans le même sens que :

Crim., 19 avril 2005, pourvoi n° 04-83.879, Bull. crim. 2005, n° 135 (1) (cassation).

No 115

RESPONSABILITE PENALE

Causes d’irresponsabilité ou d’atténuation – Ordre de la loi et commandement de l’autorité légi-time – Autorité légitime – Définition – Admin-istrateur judiciaire (non)

L’administrateur judiciaire, qui ne dispose pas d’un pou-voir de décision au nom de la puissance publique, ne constitue pas une autorité légitime au sens de l’article 122-4 du code pénal.

N’encourt pas la censure l’arrêt qui déclare le prév-enu, dirigeant d’une société en redressement judiciaire, coupable de détournement d’objet gagé pour avoir ven-du, avec l’autorisation de l’administrateur judiciaire, des marchandises appartenant à ladite société et qui avaient été données en gage.

REJET du pourvoi formé par M. Michel X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Reims, chambre cor-rectionnelle, en date du 7 janvier 2016, qui, pour détournement d’objet gagé, banqueroute et abus de biens sociaux, l’a condamné à quatre mois d’empri-

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No 116

SAISIESRestitution – Action en restitution – Demande

formée par un prévenu non relaxé – Refus – Condition

Selon l’article 41-4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, la restitution des objets placés sous main de justice, dont la propriété n’est pas sérieusement contestée, doit être ordonnée lorsqu’elle n’est pas de na-ture à créer un danger pour les personnes ou les biens et qu’aucune disposition particulière ne prévoit la de-struction desdits objets.

Méconnaît ces dispositions la cour d’appel qui, pour rejeter une requête en restitution d’une somme d’argent, se borne à relever qu’il n’est pas établi que cette somme soit la propriété du requérant, entre les mains duquel elle a été saisie, sans constater que cette somme était revendiquée par un tiers ou que sa resti-tution présentait un danger pour les personnes ou les biens.

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Youcef X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 5-13, en date du 18 février 2016, qui a rejeté sa requête en restitution d’objet placé sous main de justice.

20 avril 2017 No 16-81.679

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la viola-

tion des articles 41-4 du code de procédure pénale, 464 et 465 du code des douanes, L. 152-4 du code moné-taire et financier, Premier du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la cour d’appel a confirmé le jugement ayant rejeté la requête en contestation de refus de restitu-tion d’objets placés sous main de justice ;

« aux motifs que la cour considère que c’est par des motifs pertinents qu’elle fait siens que les premiers juges ont à bon droit rejeté la requête en contestation de refus de restitution d’objets placés sous main de justice, en l’espèce les sommes de 945 197 euros et de 11 600 dollars améri-cains, présentée par M. Youcef X... ; que contrairement à ce qu’affirme le conseil du requérant, aucune présomption de propriété ne saurait découler de la procédure douanière à l’issue de laquelle il a été condamné, non pas comme le pro-priétaire mais comme le détenteur de sommes non décla-rées en douanes, des sommes dont il a constamment dit qu’il n’en était pas le propriétaire et qu’elles ne lui avaient été remises que pour les passer en Turquie ; qu’au demeu-rant, le propriétaire des fonds reste à déterminer ; qu’après avoir été successivement présenté comme étant M. Ahmed Y... gendre du requérant, puis un transitaire turc dénommé Arjane, en ce confirmé par un courrier, produit devant

à cette autorisation ; que M. X... sera déclaré coupable de l’ensemble des faits reprochés, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une expertise comme sollicitée par le conseil de M. X..., les éléments de la procédure étant suffisants à établir les éléments constitutifs des infractions ;

« 1° alors que, devant les juges du fond, M. X... fai-sait valoir que Me Cabooter, désigné en qualité d’admi-nistrateur de la société X... par jugement d’ouverture du 2 mars 2010, l’avait autorisé à vendre des bouteilles warrantées tout en consignant le produit de ces ventes à la caisse des dépôts et consignations ; qu’en retenant, pour déclarer M. X... coupable de détournement de gage commis entre le 1er janvier 2008 et le 25 mars 2010, que "la vente de stocks warrantés a débuté antérieurement à l’ouverture du redressement judiciaire", motif impropre à fonder la condamnation de M. X... pour la période postérieure à l’autorisation donnée par l’administrateur judiciaire, la cour d’appel a n’a pas légalement justifié sa décision ;

« 2° alors qu’en statuant ainsi, sans rechercher à quelle date l’administrateur judiciaire avait autorisé la cession de stocks warrantés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen » ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., président-directeur général de la holding SA X... financière, qui a pour filiales la SA X... diffusion et la SAS X..., laquelle exerce l’activité de négoce de vins de champagne et a été placée en redres-sement judiciaire le 2 mars 2010, puis en liquidation judiciaire le 25 janvier 2011, a fait l’objet d’une convo-cation par procès-verbal devant le tribunal correction-nel notamment du chef de détournement d’objets gagés pour avoir, entre le 1er janvier 2008 et le 25 mars 2010, et avec l’autorisation de l’administrateur judiciaire désigné dans le cadre de la procédure collective, vendu 609,75 hectolitres de vins de champagne qui avaient été donnés en gage à divers établissements bancaires pour garantir les prêts consentis par ceux-ci à la SAS X... ;

Attendu que, pour déclarer M. X... coupable du délit de détournement d’objets gagés, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors qu’un administrateur judiciaire, qui ne dispose pas d’un pouvoir de décision au nom de la puissance publique, ne constitue pas une autorité légitime au sens de l’article 122-4 du code pénal, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Planchon – Avocat général : Mme Moracchini – Avocats : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Delaporote et Briard, SCP Ortscheidt, SCP de Chaisemartin et Courjon

Sur la qualité de personnes chargées d’une mission de service public des administrateurs judiciaires, à rapprocher :Crim., 26 septembre 2001, pourvoi n° 01-84.565, Bull.

crim. 2001, n° 193 (2) (rejet).

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nière de 317 904 euros du chef de transfert non déclaré de sommes, titres ou valeurs d’au moins 10 000 euros réalisé vers ou en provenance d’une autre Etat sans l’intermédiaire d’un établissement autorisé à effectuer des opérations de banque, et à l’encontre duquel aucune infraction n’a été retenue, devait rapporter la preuve de son droit de propriété sur les fonds litigieux dont il a été reconnu qu’il en avait la détention lors de son entrée en France, la cour d’appel a violé les textes susvisés » ;

Vu l’article 41-4 du code de procédure pénale ;Attendu que, selon ce texte, dans sa rédaction anté-

rieure à la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, la restitution des objets placés sous main de justice et dont la pro-priété n’est pas sérieusement contestée, doit être ordon-née lorsqu’elle n’est pas de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens et qu’aucune disposition par-ticulière ne prévoit la destruction desdits objets ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et du jugement qu’il confirme que M. X..., après condamnation défini-tive par le tribunal correctionnel pour transfert de capi-taux sans déclaration, a présenté une requête auprès du procureur de la République afin d’obtenir que soit ordonnée à son profit la restitution d’une somme d’argent qui avait été saisie par les services des douanes et dont la confiscation n’avait pas été prononcée par les juges ; qu’un refus lui a été opposé ; que le tribunal cor-rectionnel a rejeté sa requête contestant cette décision ;

Attendu que, pour confirmer le rejet de la requête en restitution, l’arrêt retient que l’origine des fonds demeure indéterminée ; qu’aucune présomption de propriété ne saurait découler de la procédure douanière à l’issue de laquelle M. X... a été condamné non pas comme le propriétaire mais comme le détenteur de sommes non déclarées en douanes, sommes dont il a constamment dit qu’il n’était pas le propriétaire et qu’elles ne lui avaient été remises que pour les passer en Turquie ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, sans relever que les sommes saisies, qui n’étaient pas confisquées, étaient revendiquées par un tiers ou que leur restitution pré-sentait un danger pour les personnes ou les biens, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs :CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions,

l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du 18 février 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’ap-pel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Chauchis – Avocat général : M. Wallon – Avocats : SCP Bouzidi et Bouhanna

Sur les conditions de refus d’une demande en res-titution réalisée par un prévenu non relaxé, dans le même sens que :Crim., 22 mai 1997, pourvoi n° 96-82.080, Bull. crim.

1997, n° 201 (cassation partielle) ;Crim., 5 décembre 2001, pourvoi n° 01-80.315, Bull.

crim. 2001, n° 254 (cassation).

la cour, courrier adressé aux douanes françaises par une société TASSILA sise à Alger, il s’agirait aujourd’hui de trois commerçants selon une déclaration sur l’honneur en date du 4 janvier 2016, dont la forme et le fond inter-rogent, par laquelle M. X... déclare que les fonds lui ont été confiés par trois commerçants, au nombre desquels figure M. Y..., étant rappelé que ce dernier a déclaré qu’il n’avait confié à M. X... qu’une somme de 3 000 euros ;

« et aux motifs adoptés qu’au jour de l’audience, le conseil de M. X... explique au tribunal que les fonds trans-férés par son citent lors de leur saisie le 20 mai 2009, pro-viennent de différents commerçants travaillant à Alger, et qu’ils sont le fruit d’un travail légal mis en commun dans le but de faire des achats en Turquie ; que les justificatifs ver-sés aux débats ne peuvent éclairer le tribunal sur cette pro-venance, ceux ci n’étant constitués que des listes de chiffres et de documents écrits en langue turque non traduits en langue française ; qu’il ressort des débats en chambre du conseil, qu’a ce jour, l’origine des fonds n’est donc toujours pas démontrée ; que le requérant par le biais de son conseil présente une troisième version des faits, qui ne corrobore en rien celle donnée aux autorités douanières auxquelles il expliquait que les fonds lui avaient été remis par son gendre, ni celle exprimée à Alger où il disait qu’un certain Arjane, ressortissant turc, lui avait donné l’argent dans l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ; qu’en tout état de cause, le requérant, par sa nouvelle version, ne se pré-sente pas comme le propriétaire des fonds litigieux ; que sa demande est donc mal fondée et sa requête en contes-tation de refus de restitution sera rejetée conformément à l’article 41-4 du code de procédure pénale ;

« 1° alors que les juges du fond ont relevé que le demandeur était porteur des fonds confisqués, qu’il a été condamné à une amende douanière prélevée sur les fonds saisis ; qu’en refusant cependant de lui restituer les fonds dont il était porteur, par le motif inopérant qu’il n’établis-sait pas en être le propriétaire, lequel reste indéterminé, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

« 2° alors que les juges du fond ont relevé que le demandeur était porteur des fonds confisqués, qu’il a été condamné à une amende douanière prélevée sur les fonds saisis ; qu’en refusant cependant de lui restituer les fonds dont il était porteur par le motif qu’il n’éta-blissait pas en être le propriétaire, sans préciser d’où il ressortait que le détenteur des fonds, ayant fait l’objet d’une condamnation au paiement d’une amende doua-nière de 317 904 euros du chef de transfert non déclaré de sommes, titres ou valeurs d’au moins 10 000 euros réalisé, vers ou en provenance d’une autre Etat sans l’intermédiaire d’un établissement autorisé à effectuer des opérations de banque, devait rapporter la preuve de son droit de propriété sur les fonds litigieux dont il a été reconnu qu’il en avait la détention lors de son entrée en France, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

« 3° alors que les juges du fond ont relevé que le demandeur était porteur des fonds confisqués, qu’il a été condamné à une amende douanière prélevée sur les fonds saisis ; qu’en refusant cependant de lui restituer les fonds dont il était porteur par le motif qu’il n’éta-blissait pas en être le propriétaire, sans préciser d’où il ressortait que le détenteur des fonds, ayant fait l’objet d’une condamnation au paiement d’une amende doua-

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que, mis en examen des chefs susvisés le 20 sep-tembre 2015, M. X... a déposé, le 17 décembre 2015, une requête en annulation de pièces de la procédure, visant notamment le procès-verbal de mention ;

Attendu que, pour faire droit à cette requête et annu-ler ledit procès-verbal, l’arrêt énonce que le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination et de garder le silence est au cœur de la notion de procès équitable ; que la personne gardée à vue, avisée de son droit au silence et de son droit à être assistée d’un avocat lors de ses audi-tions et ayant demandé une telle assistance, ne peut être entendue qu’en présence de son conseil dans les condi-tions de l’article 63-4-2 du code de procédure pénale, sauf à y avoir renoncé de façon non équivoque ; que les juges ajoutent qu’en matière criminelle, une telle renonciation ne peut intervenir, sauf circonstances exceptionnelles, qu’au cours d’une audition faisant l’objet d’un enregis-trement audiovisuel en application de l’article 64-1 du même code, et que toutes les déclarations faites par la personne gardée à vue hors procès-verbal sont de nature à porter atteinte à ses intérêts et notamment à son droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination ; qu’ils en déduisent que, M. X... ayant demandé à être assisté d’un avocat dès le début de la procédure, avocat qui lui a conseillé de se taire, sa renonciation à ces droits est équi-voque, pour avoir été faite hors procès-verbal d’audition, alors qu’il se trouvait seul avec les enquêteurs dans un véhicule, et qu’aucune circonstance exceptionnelle n’em-pêchait qu’elle fût recueillie dans les locaux des services de police et dans les conditions de l’article 64-1 précité ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi et dès lors qu’au-cune raison impérieuse tenant aux circonstances de l’espèce n’autorisait les enquêteurs à recueillir les décla-rations spontanées faites par la personne gardée à vue sur les faits, sans procéder à une audition dans le res-pect des règles légales l’autorisant à garder le silence et à être assistée par un avocat, la chambre de l’instruc-tion a fait l’exacte application des textes visés au moyen, lequel doit, en conséquence, être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Bonnal – Avo-cat général : M. Salomon

No 118

1o HOMICIDE ET BLESSURES INVOLON-TAIRES

Faute – Faute délibérée – Violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement – Obligation particu-lière de prudence ou de sécurité – Formation ren-forcée à la sécurité de salariés temporaires – Cas

2o ACTION CIVILERecevabilité – Accident du travail – Constitution

de partie civile – Loi forfaitaire – Caractère ex-clusif – Portée

No 117

GARDE A VUEDroits de la personne gardée à vue – Respect – Né-

cessité – Faits objet de la mesure – Déclarations spontanées du gardé à vue – Recueil – Procès-verbal dressé par un officier de police judici-aire – Raison impérieuse – Défaut – Principe – Portée

Lorsqu’une personne a été placée en garde à vue, les officiers de police judiciaire ne peuvent, hors raison impérieuse tenant aux circonstances de l’espèce, recueillir ses déclara-tions spontanées, sur les seuls faits objet de cette mesure, que dans le respect des règles légales autorisant l’intéressée à garder le silence et à être assistée par un avocat.

Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui, pour annuler un procès-verbal mentionnant de telles déclarations faites aux enquêteurs par une personne gardée à vue au cours d’un transport dans un véhi-cule, relève qu’aucune circonstance exceptionnelle n’empêchait qu’elles fussent recueillies dans les locaux des services de police et dans les conditions prévues par l’article 64-1 du code de procédure pénale.

REJET du pourvoi formé par le procureur général près la cour d’appel de Paris, contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de ladite cour, 6e section, en date du 6 décembre 2016, qui, dans l’information sui-vie contre M. Hocine X... des chefs de tentative de meurtre, violences aggravées et infractions à la légis-lation sur les armes, a prononcé sur une demande d’annulation de pièces de la procédure.

25 avril 2017 No 16-87.518

LA COUR,Vu l’ordonnance du président de la chambre crimi-

nelle, en date du 8 février 2017, prescrivant l’examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 63-1, 63-3-1 et 63-4-2 du code de procé-dure pénale :

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a été interpellé sur la voie publique une arme à la main, et dans le même temps accusé par des témoins d’avoir tiré sur M. Dodou Y... ; que, placé en garde à vue le 18 septembre 2015 à 3h 50 et régulièrement avisé de ses droits, il a demandé à être assisté d’un avocat commis d’office, y compris au cours de ses auditions et confrontations ; qu’il s’est entretenu avec l’avocat désigné le même jour à 9 h 36 ; qu’à 11 h 20, avant sa première audition, les enquêteurs qui le ramenaient au service après une perquisition ont dressé procès-verbal de mention des déclarations qu’il leur avait spontanément faites, leur expliquant dans quelles circonstances il était entré en possession de l’arme et avait tiré sans le vouloir et sans viser M. Y... ;

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mier degré ont retenu la société dans les liens de la pré-vention et, sur l’action civile, l’ont déclarée responsable du préjudice subi par M. X..., qu’ils ont cependant débouté de sa demande de dommages-intérêts comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que la société Satisfo, le ministère public et M. X... ont relevé appel de la décision ;

En cet état :Sur le moyen unique de cassation, pris de la viola-

tion des articles 111-3, 111-4, 121-2, 121-3, 222-20 et 222-21 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la cour d’appel a confirmé le jugement et déclaré la société Satisfo coupable de blessures involon-taires ;

« aux motifs que, lors des débats, et sur interpellation du conseiller rapporteur, l’avocat de la société Satisfo a admis l’erreur matérielle qui résultait dans le visa de la citation de l’article L. 4152-2 du code du travail au lieu de l’article L. 4154-2, et auquel renvoyait nécessaire-ment l’article 4142-2 du code du travail aussi visé par le ministère public ; que, pour conclure à sa relaxe des fins de la poursuite, la société Satisfo affirme en premier lieu, que les articles du code du travail visés au soutien des poursuites ne prescrivent pas de dispositions spéciales en matière de santé et de sécurité du travail susceptibles de lui être reprochées dans l’accident de travail dont M. X... a été la victime ; que, cependant, cette condition de ’spé-cialité’ ne s’évince pas des dispositions des articles 220-6 et 121-3, alinéa 4, du code pénal aux termes desquels, au cas où les personnes physiques qui n’ont pas causé direc-tement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obliga-tion particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gra-vité qu’elles ne pouvaient ignorer ; qu’à la suite de l’ar-ticle L. 4142-2 du code du travail, il est institué, au titre des formations et mesures d’adaptation particulières, le bénéfice d’une formation renforcée à la sécurité, dans les conditions prévues à l’article L. 4154-2 pour les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée et les salariés temporaires affectés à des postes de travail pré-sentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité ; que cette obligation particulière est étendue aux stagiaires par l’article L. 4154-2 du code du travail et est complétée de l’obligation d’un accueil et d’une infor-mation adaptés dans l’entreprise et enfin, de l’obligation pour l’employeur d’établir la liste de ces postes de travail, après avis du médecin du travail et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe ; que le moyen doit en conséquence être purement et simplement rejeté ; qu’en deuxième lieu, et ainsi que l’a conclu la société Satisfo, que le ministère public n’a pas établi la preuve contraire aux constatations du rapport établi par la société Quali consult selon lesquelles la presse plieuse sur laquelle la victime est intervenue était en bon état de fonctionne-ment, à l’exception du protecteur fixe latéral, et tandis

1o Constitue la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi, au sens de l’article 222-20 du code pénal, le non-respect des dispo-sitions de l’article L. 4142-2 du code du travail, prescri-vant de faire bénéficier les salariés temporaires, affectés à des postes de travail présentant des risques particuli-ers pour leur santé ou leur sécurité, d’une formation renforcée à la sécurité.

2o Aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne pouvant, en dehors des cas prévus par l’article L. 451-1 du code de la sécurité so-ciale, être exercée conformément au droit commun par la victime contre l’employeur ou ses préposés, la jurid-iction répressive, dans le cas d’un accident subi par un travailleur intérimaire au sein de l’entreprise utilisa-trice, n’est pas compétente pour statuer sur la responsa-bilité civile de cette dernière.

Encourt dès lors la cassation, par voie de retranche-ment, l’arrêt qui, après avoir condamné du chef de bles-sures involontaires une société ayant employé un tra-vailleur intérimaire, victime d’un accident du travail, confirme, sur les intérêts civils, la disposition du juge-ment déclarant l’intéressée responsable du préjudice subi par ce salarié.

CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI sur le pourvoi formé par la société Satisfo (Société d’assistance technique industrielle de la France Ouest) contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, 9e chambre, en date du 18 septembre 2015, qui, pour blessures involontaires, l’a condamnée à 32 000 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils.

25 avril 2017 No 15-85.890

LA COUR,Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du juge-

ment qu’il confirme partiellement et du procès-verbal de l’inspection du travail, base de la poursuite, que M. Jonathan X..., étudiant âgé de 19 ans, a été embau-ché par une société d’intérim qui l’a mis à la disposi-tion de la société Satisfo, exploitant une entreprise de métallurgie, pour occuper un emploi de manuten-tionnaire en atelier, du 4 au 20 juillet 2007 ; qu’ayant été affecté, le 18 juillet 2007, au poste de métallurgiste pour le pliage de pièces métalliques, au moyen d’une presse, M. X... a été victime d’un écrasement de la main gauche, lui occasionnant une incapacité totale de tra-vail de trente-cinq jours ; qu’à la suite de cet accident, la société Satisfo a été poursuivie devant le tribunal correctionnel du chef de blessures involontaires sui-vies d’une incapacité n’excédant pas trois mois, par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règle-ment, notamment pour avoir confié une tâche com-plexe à un employé intérimaire, sans le faire bénéficier au préalable d’une formation pratique et appropriée à la sécurité des salariés temporaires ; que les juges du pre-

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le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer, lorsque l’article 220-20 du code pénal fondant la prévention, qui ne renvoie pas à l’article 121-3 du code pénal, ne réprime que la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité, la cour d’appel, qui a recherché une faute caractérisée n’entrant pas dans les prévisions du texte, a méconnu le principe d’interprétation stricte de la loi pénale ;

« 2° alors que la faute délibérée n’est établie que si les juges du fond caractérisent l’obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement et le caractère délibéré du manquement ; qu’en se bor-nant à relever que la société prévenue n’a pas rapporté la preuve d’avoir accompli son obligation de formation, sans établir la violation intentionnelle et délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité, la cour d’appel n’a pas mis justifié sa décision ;

« 3° alors que les articles L. 4121-1, L. 4121-2, L. 4141-2 et L. 4152-2 du code du travail ne contiennent aucune obligation particulière de prudence ou de sécu-rité, mais uniquement des grands principes de for-mation ; qu’ainsi, la cour d’appel ne pouvait, sans méconnaître l’article 222-20 du code pénal, déclarer la société demanderesse coupable de blessures involontaires ayant entraîné une ITT inférieure ou égale à trois mois par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement » ;

Attendu que, pour confirmer le jugement sur la décla-ration de culpabilité et l’action civile, l’arrêt prononce par les motifs propres repris au moyen ; que, par motifs réputés adoptés, les juges ajoutent que le caractère manifestement délibéré de la violation, par la société Satisfo, de son obligation spéciale de formation résulte de ce que la jeune victime a été postée sur une machine dangereuse pendant plusieurs heures, alors qu’elle était dépourvue de toute qualification et avait d’ailleurs été embauchée en qualité de simple manutentionnaire, et que, d’une manière générale, aucune procédure n’était prévue pour former les salariés intérimaires dans l’en-treprise, par souci de rentabilité ;

Attendu qu’en l’état de l’ensemble de ces énoncia-tions, abstraction faite de la référence, inopérante, à l’article 121-3, alinéa 4, du code pénal, critiquée à la première branche du moyen, et dès lors que le non-respect des prescriptions de l’article L. 4142-2 du code du travail, imposant de faire bénéficier les salariés tem-poraires, affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, d’une formation renforcée à cette sécurité, constitue la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi, au sens de l’article 222-20 du code pénal, la cour d’appel a justifié sa décision au regard de ce texte ;

D’où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses deux premières branches, ne saurait être accueilli ;

qu’il n’est pas davantage établi qu’une défection de cette machine a pu être à l’origine de l’accident, il convient d’écarter ce motif des poursuites ; qu’en troisième lieu pour conclure à la preuve de l’effectivité de la formation de M. X..., la société Satisfo se prévaut du témoignage de M. Y... rapporté ci-dessus et des informations communi-quées à M. X... sur le fonctionnement de la presse ainsi que la vérification préalable de sa bonne compréhension des taches à exécuter ; que cependant, les termes super-ficiels de ce témoignage ne sont pas de nature à suppléer la preuve de l’obligation de la formation renforcée due à M. X..., alors qu’aucune fiche de suivi de la procédure d’accueil n’a été signée par le salarié et l’employeur, qu’il n’a pas été établi de document décrivant la formation dispensée, signé du salarié et de l’employeur, et qu’aucun test d’évaluation complété par le salarié attestant de sa bonne compréhension de la formation renforcée à la sécurité n’a été non plus été défini ; qu’il est établi, d’une part, que M. X..., jeune étudiant, entré dans l’entreprise depuis moins de quinze jours, sans aucune expérience dans les métiers de la métallurgie, n’était pas formé à la mise en œuvre de la machine dangereuse que constitue la presse plieuse dédiée au travail à froid des métaux, à chargement ou déchargement manuel et dont les élé-ments mobiles de travail pouvaient avoir une course supérieure à 6 millimètres et une vitesse supérieure à 30 millimètres par seconde, et qu’alors, d’autre part, qu’il est aussi constant, que M. X... a été assujetti aux mêmes cadences de travail que les autres ouvriers et que l’acci-dent est survenu en fin de matinée, après plus de quatre heures d’intervention, la preuve est acquise que le défaut de formation de la victime est à l’origine de l’accident de travail ; que, par ailleurs, et nonobstant les liens de droit ou la relation économique existant entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice, il peut être déduit des déclarations des salariés recueillies lors de l’enquête la preuve suffisante que M. Z..., directeur tech-nique, disposait des moyens pour assurer sa délégation de pouvoir en matière de santé et de sécurité des salariés en sorte que les manquements relevés ci-dessus doivent lui être imputés, et tandis que la preuve est établie que M. Z... a contribué à créer la situation ayant permis la réalisa-tion du dommage et n’a pas pris les mesures permettant de l’éviter, ceci, par la violation de façon manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, au sens de l’article 121-3, alinéa 4, du code pénal, il s’en suit que la responsabilité pénale de la société Satisfo est engagée en raison de son représentant ; que par ces motifs, le juge-ment soit confirmé de ce chef ;

« 1° alors que la loi pénale est d’interprétation stricte ; qu’en déclarant la société Satisfo coupable de blessures involontaires ayant entraîné une ITT inférieure ou égale à trois mois aux motifs qu’aucune condition de spécialité ne s’évince des dispositions des articles 220-6 et 121-3, alinéa 4, du code pénal aux termes desquelles, au cas où les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont res-ponsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation parti-culière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou

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No 119

INSTRUCTION

Partie civile – Constitution – Contestation – Con-testation postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’information – Examen – Compétence – Ju-ridiction de jugement – Exception – Cas – Con-stitution postérieure à l’envoi de l’avis de fin d’information

Il résulte de la combinaison du premier alinéa de l’article 87 du code de procédure pénale, aux termes duquel une constitution de partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l’instruction, et du quat-rième alinéa de ce texte, ajouté par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, d’application immédiate, selon lequel la recevabilité d’une constitution de partie civile ne peut plus être contestée devant le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction postérieurement à l’envoi de l’avis de fin d’information, que la prohibition ainsi édictée ne s’applique qu’aux constitutions de partie civ-ile intervenues avant ce terme.

Encourt la cassation l’ordonnance du président de la chambre de l’instruction qui, pour dire n’y avoir lieu à saisir la chambre de l’instruction d’une ordon-nance du juge d’instruction déclarant irrecevable une constitution de partie civile intervenue postérieure-ment à l’envoi de l’avis de fin d’information, énonce qu’en application du dernier alinéa de l’article 87 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 3 juin 2016, la contestation d’une constitu-tion de partie civile formée après l’envoi de l’avis de fin d’information prévu à l’article 175 dudit code ne peut être examinée, en cas d’appel, par la chambre de l’instruction.

ANNULATION sur le pourvoi formé par la société UBS France, contre l’ordonnance du président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, en date du 24 octobre 2016, qui, dans I’infor-mation suivie contre elle des chefs de complicité de démarchage bancaire ou financier illicite et compli-cité de blanchiment aggravé, a dit n’y avoir lieu de saisir la chambre de l’instruction de son appel de l’or-donnance du juge d’instruction déclarant irrecevable sa constitution de partie civile.

25 avril 2017 No 16-87.328

LA COUR,Vu l’ordonnance du président de la chambre crimi-

nelle, en date du 30 janvier 2017, prescrivant l’examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 6 de la Convention européenne des droits

Mais sur le moyen relevé d’office, pris de la violation de l’article L. 451-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu ledit article ;Attendu qu’en dehors des exceptions prévues par ce

texte d’ordre public, qui n’incluent pas les accidents de travail subis par les salariés intérimaires, aucune action en réparation des conséquences dommageables de tels accidents ne peut être exercée conformément au droit commun, par la victime contre l’entreprise utilisatrice ou ses préposés ;

Attendu qu’après avoir énoncé qu’il résulte des articles L. 451-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale que seul le tribunal des affaires de sécurité sociale est compétent pour connaître de l’action indem-nitaire de la victime d’un accident du travail, l’arrêt confirme le jugement, qui, tout en déboutant M. X... de sa demande indemnitaire, avait préalablement déclaré la société Satisfo responsable de son préjudice ;

Mais attendu qu’en confirmant ainsi une disposition statuant sur le principe même de la responsabilité civile de l’employeur, la cour d’appel a méconnu le texte sus-visé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles, en date du 18 septembre 2015, en ce qu’il confirme la dispo-sition du jugement déclarant la société Satisfo res-ponsable du préjudice subi par M. X..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi.Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Talabar-

don – Avocat général : Mme Caby – Avocats : SCP Rous-seau et Tapie, SCP Spinosi et Sureau

Sur le no 1 :

Sur la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement en vue d’assurer la sécurité des travail-leurs, à rapprocher :

Crim., 25 juin 2013, pourvoi n° 12-81.820, Bull. crim. 2013, n° 159 (cassation partielle) ;

Crim., 24 juin 2014, pourvoi n° 13-81.302, Bull. crim. 2014, n° 162 (cassation).

Sur le no 2 :

Dans le même sens que :

Crim., 2 octobre 2012, pourvoi n° 11-85.032 , Bull. crim. 2012, n° 206 (3) (rejet), et l’arrêt cité.

Sur l’irrecevabilité de l’action de la victime d’un accident du travail contre l’employeur ou ses pré-posés, sur le fondement du droit commun, à rap-procher :

Crim., 13 septembre 2005, pourvoi n° 04-85.736, Bull. crim. 2005, n° 224 (cassation par voie de retranche-ment sans renvoi).

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elles ne peuvent produire des effets restreignant les droits des parties attachés à un acte rendu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle ; qu’en faisant appli-cation de l’alinéa 4 de l’article 87 du code de procédure pénale pour considérer que toute contestation liée à la recevabilité de la constitution de partie civile postérieure à l’avis de fin d’information était irrecevable, lorsque cet acte a été délivré près de quatre mois avant la publica-tion de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, le président de la chambre de l’instruction a violé le texte précité et enta-ché sa décision d’excès de pouvoir » ;

Vu l’article 87 du code de procédure pénale ;Attendu qu’aux termes du premier alinéa de ce texte,

une constitution de partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l’instruction ; que, selon le qua-trième alinéa de ce texte, ajouté par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, d’application immédiate, la recevabi-lité d’une constitution de partie civile ne peut plus être contestée devant le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction postérieurement à l’envoi de l’avis de fin d’information ; qu’il résulte de la combinaison de ces alinéas que la prohibition ainsi édictée ne s’applique qu’aux constitutions de partie civile intervenues avant ce terme ;

Attendu qu’il résulte de l’ordonnance attaquée et des pièces de la procédure qu’au cours d’une information judiciaire ouverte des chefs de démarchage bancaire ou financier illicite et blanchiment aggravé, à la suite de dénonciations et d’une enquête relatives à l’exis-tence d’un système d’évasion fiscale entre UBS France et UBS Suisse, supposant des opérations transfronta-lières, réalisées grâce au démarchage de clients français par la banque sur le territoire national et suivies par UBS France à l’aide d’un outil manuel dénommé "car-net du lait", qui n’apparaissait pas dans la comptabilité officielle de la banque, ont été mis en examen, notam-ment, la société UBS France des chefs susénoncés, ainsi que M. Patrick X..., son directeur commercial de 2004 à début 2010, membre du directoire, des chefs de com-plicité de démarchage bancaire ou financier illicite et de complicité de blanchiment ; que le magistrat instruc-teur a délivré, le 19 février 2016, l’avis de fin d’informa-tion ;

Attendu que par lettre du 20 juillet 2016, la société UBS France s’est constituée partie civile à l’encontre de M. X... pour les faits de complicité de démarchage illicite et complicité de blanchiment dont il s’était reconnu coupable par un courrier du 24 juin 2016, pré-cisant qu’elle réservait sa position sur la demande de M. X... de recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité au résultat des actes d’instruction complémentaires qu’elle sollicitait par demande séparée ; que le ministère public ayant contesté la recevabilité de cette constitution, le juge d’instruction l’a déclarée irrecevable ; que la société UBS France a relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour dire n’y avoir lieu à saisir la chambre de l’instruction, l’ordonnance énonce qu’en application du dernier alinéa de l’article 87 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 3 juin 2016 précitée, la contestation d’une constitution de partie civile formée après l’envoi de l’avis de fin d’in-

de l’homme, 112-2 du code pénal, préliminaire, 87, 186, alinéas 2 et 6, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que le président de la chambre de l’instruction a dit n’y avoir lieu à saisir la chambre de l’instruction ;

« aux motifs que l’avis de fin d’information a été envoyé aux parties le 19 février 2016 (D 23 85) ; que par lettre du 20 juillet 2016 l’avocat de la société UBS France a déclaré se constituer partie civile en application de l’article 87 du code de procédure pénale à l’encontre de M. Patrick X... "à raison de faits de complicité de démar-chage illicite et de blanchiment de démarche illicite dont il s’est reconnu coupable par courrier du 24 juin 2016" ; que par l’ordonnance appelée datée du 26 juillet 2016, le juge d’instruction a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la société UBS France SA ; que l’article 87 du code de procédure pénale dispose que : "la constitution de partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l’instruction. Elle peut être contestée par le procureur de la République ou par une partie. En cas de contesta-tion, ou s’il déclare irrecevable la constitution de partie civile, le juge d’instruction statue, après communication du dossier au ministère public, par ordonnance motivée dont l’intéressé peut interjeter appel. Si la contestation d’une constitution de partie civile est formée après l’envoi de l’avis de fin d’information prévu à l’article 175, elle ne peut être examinée ni par le juge d’instruction, ni, en cas d’appel, par la chambre de l’instruction, sans préjudice de son examen, en cas de renvoi, par la juridiction de juge-ment" ; qu’en conséquence qu’il n’y a pas lieu de saisir la chambre de l’instruction dudit appel ;

« 1° alors que, en application de l’article 186, alinéa 6, du code de procédure pénale, le président de la chambre de l’instruction n’est autorisé à filtrer que les ordonnances qui n’entrent pas dans le champ des alinéas 1 à 3 de cet article, les appels formés hors délai ou devenus sans objet ; qu’aux termes de l’article 186, alinéa 2, du code de procédure pénale, la partie civile peut interjeter appel des ordonnances faisant grief à ses intérêts civils ; que tel est le cas d’une ordonnance déclarant sa constitution de par-tie civile irrecevable ; qu’en rendant une ordonnance d’ir-recevabilité de l’appel formé par la société UBS France à l’encontre d’une telle décision, le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs ;

« 2° alors qu’en tout état de cause, en vertu de l’ar-ticle 87, alinéa 1er, la constitution de partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l’instruction, la victime disposant toujours du droit de faire appel d’un ordonnance d’irrecevabilité rendue par le juge d’instruc-tion ; que l’alinéa 4 du même article, ajouté par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, ne fait obstacle qu’à l’exa-men des contestations de constitutions de partie civile à ce stade de la procédure, le terme de "contestation" ren-voyant exclusivement aux critiques émanant des autres parties à l’information ; qu’en se fondant sur ce dernier texte pour refuser de saisir la chambre de l’instruction et priver ainsi la société UBS France de son droit d’appel à l’encontre de l’ordonnance d’irrecevabilité délivrée par le juge d’instruction, le président de cette juridiction a, de nouveau, excédé ses pouvoirs ;

« 3° alors qu’à titre subsidiaire, si les lois fixant les formes de la procédure sont d’application immédiate en vertu de l’article 112-2 du code de procédure pénale,

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déclaré irrecevable sa demande de restitution d’objets saisis.

25 avril 2017 No 16-83.154

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l’homme, 1er du Protocole additionnel à cette convention, préliminaire, 41-4, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la chambre de l’instruction a déclaré irre-cevable la requête de M. X... tendant à la restitution du solde de son compte bancaire ;

« aux motifs que la décision de fin de non recevoir du procureur de la République en réponse à la requête de M. X... constatant que le solde (actuellement évalué à 90 341,45 euros) est devenu propriété de l’Etat ne peut que s’analyser en une décision d’irrecevabilité ; qu’au terme de l’article 41-4, alinéa 2, du code de procédure pénale : "la décision de non-restitution prise pour l’un de ces motifs ou pour tout autre motif, même d’office, par le procureur de la République ou le procureur général peut être déférée par l’intéressé à la chambre de l’instruction dans le délai d’un mois suivant sa notification, par décla-ration du greffe du tribunal ou de la cour ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception" ; qu’il en résulte que la saisine de la chambre de l’instruction n’est recevable que lorsqu’a été prise une décision de non-restitution ; qu’en l’espèce s’agissant d’une décision d’irre-cevabilité, la requête est irrecevable ;

« 1° alors qu’aux termes de l’article 41-4 du code de procédure pénale, toute décision de non-restitution d’un bien rendue par le procureur de la République peut être contestée devant la chambre de l’instruction, et ce quels que soient ses motifs ; qu’en déclarant irrecevable la contestation par le demandeur d’une décision du pro-cureur de la République refusant la restitution du solde de son compte bancaire, constatant que ce dernier était désormais la propriété de l’Etat au motif de l’écoulement d’un délai supérieur à six mois depuis l’ordonnance de non-lieu, la chambre de l’instruction a violé la loi et méconnu son office ;

« 2° alors que le mécanisme de prescription acquisitive de propriété au profit de l’Etat qui concerne les biens sai-sis à l’occasion de procédures pénales mais non restitués, qui repose sur le seul écoulement du temps, doit pouvoir faire l’objet d’un recours utile de la part du propriétaire du bien concerné ; qu’en refusant d’examiner le recours du demandeur contre une telle décision, la chambre de l’instruction a méconnu le droit au recours effectif et le droit de propriété du demandeur » ;

Vu l’article 41-4 du code de procédure pénale ;Attendu qu’il résulte de ce texte que toute décision

de non-restitution d’un objet placé sous main de jus-tice, prise par le procureur de la République ou le pro-cureur général dans les conditions prévues au premier alinéa, peut être déférée à la chambre de l’instruction par la personne intéressée, que le refus ou l’irrecevabi-

formation prévu à l’article 175 dudit code ne peut être examinée, en cas d’appel, par la chambre de l’instruc-tion, sans préjudice de son examen, en cas de renvoi, par la juridiction de jugement ;

Mais attendu qu’un prononçant ainsi, alors que l’ordonnance du juge d’instruction avait déclaré irre-cevable la constitution de partie civile intervenue pos-térieurement à l’envoi de l’avis de fin d’information, de sorte que cette décision était susceptible d’appel en application de l’article 87, alinéa 3, du code de procé-dure pénale, le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs ;

D’où il suit que l’annulation est encourue ;Par ces motifs :

Annule l’ordonnance n° 6418 du président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, en date du 24 octobre 2016.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Parlos – Avocat général : M. Salomon – Avocats : SCP Spinosi et Sureau

No 120

SAISIESSaisies spéciales – Saisie portant sur certains biens

ou droits mobiliers incorporels – Saisie d’une somme d’argent versée sur un compte ban-caire – Action en restitution – Décision de non-restitution prise par le procureur de la Répub-lique ou le procureur général – Recours devant la chambre de l’instruction – Recevabilité

Il résulte de l’article 41-4 du code de procédure pénale que toute décision de non-restitution d’un objet placé sous main de justice, prise par le procureur de la République ou le procureur général dans les conditions prévues au premier alinéa de ce texte, peut être déférée à la cham-bre de l’instruction par la personne intéressée, que le refus ou l’irrecevabilité opposée à la demande soit fon-dé sur l’un des motifs mentionnés au deuxième alinéa ou sur la circonstance que l’objet réclamé est devenu la propriété de l’Etat par suite de l’expiration du délai de six mois fixé au troisième alinéa.

Encourt dès lors la censure l’arrêt qui déclare irrecev-able la requête déférant à une chambre de l’instruction la décision du procureur de la République disant n’y avoir lieu à restitution du solde d’un compte bancaire saisi au cours d’une information judiciaire, au mo-tif que ce refus ne peut s’analyser qu’en une décision d’irrecevabilité, tenant à la tardiveté de la demande, et non en une décision de non-restitution, au sens du deuxième alinéa de l’article 41-4 du code de procédure pénale.

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Bruno X..., contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles, en date du 17 mars 2016, qui a

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d’inciter publiquement à porter sur ces infractions ou leurs auteurs un jugement favorable.

Encourt la cassation l’arrêt qui, pour renvoyer un prévenu des fins de la poursuite de ce chef, énonce que, si, lors d’un rassemblement en hommage aux victimes des attentats ayant frappé la France entre les 7 et 9 jan-vier 2015, il a arboré une pancarte sur laquelle il avait inscrit "je suis Charlie" d’un côté et "je suis Kouachi" de l’autre, ce qui était une référence indéniable à des personnes impliquées dans les attentats terroristes visés par cette manifestation, l’intéressé n’a pas eu la volonté de les légitimer ou d’en faire l’apologie, alors qu’il résu-lte de ces constatations que le prévenu, par son com-portement lors d’un rassemblement public, a manifesté une égale considération pour des victimes d’actes de terrorisme et l’un de leurs auteurs à qui il s’identifiait, ce qui caractérise le délit d’apologie d’actes de terror-isme.

CASSATION et désignation de juridiction sur le pour-voi formé par le procureur général près la cour d’ap-pel de Poitiers, contre l’arrêt de ladite cour d’appel, chambre correctionnelle, en date du 10 mars 2016, qui a renvoyé M. Thierry X... des fins de la poursuite du chef d’apologie d’actes de terrorisme.

25 avril 2017 No 16-83.331

LA COUR,Vu les mémoires produits en demande et en défense ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 121-3 et 421-2-5 du code pénal :Vu l’article 421-2-5 du code pénal ;Attendu que le délit d’apologie d’actes de terrorisme,

prévu et réprimé par l’article susvisé, consiste dans le fait d’inciter publiquement à porter sur ces infractions ou leurs auteurs un jugement favorable ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’aux Sables-d’Olonne, le 11 janvier 2015, lors d’un rassemblement en hommage aux victimes des attentats ayant frappé la France entre les 7 et 9 jan-vier 2015, M. X... a exhibé une pancarte sur laquelle il était écrit, d’un côté, "je suis humain – je suis Charlie", et de l’autre, "je suis la vie", avec la représentation d’un cœur, et "je suis Kouachi" ; que poursuivi du chef d’apo-logie d’actes de terrorisme, il a été déclaré coupable par le tribunal correctionnel ; qu’il a relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour le renvoyer des fins de la pour-suite, l’arrêt énonce que, s’il est constant et reconnu par le prévenu que, lors de ce rassemblement, il a arboré une pancarte sur laquelle il avait inscrit "je suis Charlie" d’un côté et "je suis Kouachi" de l’autre, ce qui était une référence indéniable aux frères Kouachi impliqués dans les attentats terroristes visés par cette manifestation, et montré successivement aux personnes qui lui faisaient face l’inscription "je suis Charlie" puis "je suis Kouachi", le fait que le prévenu se fût présenté, à son initiative, au commissariat de police pour expliquer ce qu’il avait fait lors du rassemblement républicain, affirmer,

lité opposée à la demande soit fondé sur l’un des motifs mentionnés au deuxième alinéa ou sur la circonstance que l’objet réclamé est devenu la propriété de l’Etat par suite de l’expiration du délai de six mois fixé au troi-sième alinéa ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’à la suite d’une ordonnance de non-lieu ayant clôturé, le 4 novembre 2011, une information judiciaire dans laquelle il était mis en examen, M. X... a demandé au procureur de la République, le 27 jan-vier 2015, la restitution du solde d’un compte bancaire ayant fait l’objet d’une saisie, sur le sort de laquelle le magistrat instructeur avait omis de statuer ; que le pro-cureur de la République a dit n’y avoir lieu à restitution de ce solde, au motif qu’en l’absence de demande for-mée dans le délai de six mois à compter de la signifi-cation de l’ordonnance de clôture de l’information, les fonds étaient devenus la propriété de l’Etat ; que M. X... a déféré cette décision à la chambre de l’instruction ;

Attendu que l’arrêt déclare la requête irrecevable au motif que l’acte entrepris ne peut s’analyser qu’en une décision d’irrecevabilité, tenant à la tardiveté de la demande, et non en une décision de non-restitution, au sens du deuxième alinéa de l’article 41-4 du code de procédure pénale ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles, en date du 17 mars 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles autre-ment composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Talabar-don – Avocat général : Mme Caby – Avocats : SCP Spi-nosi et Sureau

Sur les conditions de l’action en restitution d’une somme d’argent versée sur un compte bancaire, à rapprocher :Crim., 19 février 2014, pourvoi n° 13-81.159, Bull.

crim. 2014, n° 68 (rejet).

No 121

TERRORISMEActes de terrorisme – Provocation et apologie –

Apologie d’actes de terrorisme – Eléments con-stitutifs – Elément intentionnel – Incitation à porter sur des actes de terrorisme ou sur leurs auteurs un jugement favorable – Cas

Le délit d’apologie d’actes de terrorisme, prévu et réprimé par l’article 421-2-5 du code pénal, consiste dans le fait

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REJET des pourvois formés par M. Patrice X..., Mme Sandrine Y..., épouse X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 18 février 2016, qui, pour travail dissimulé et obstacle à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrôleur du travail, a condamné, le premier, à 2 000 euros d’amende, la seconde, à 1 500 euros d’amende.

25 avril 2017 No 16-81.793

LA COUR,Joignant les pourvois en raison de la connexité ;Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pro-

cès-verbaux de l’inspection du travail, base de la pour-suite, que M. Patrice X... et Mme Sandrine Y..., épouse X..., ont été poursuivis des chefs de travail dissimulé et d’obstacle à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrôleur du travail pour avoir, d’une part, mentionné sur les bulletins de paie de salariés de la société Ama-rys, à l’enseigne "le Régent", exerçant une activité de restauration à Royan et dont ils ont assuré la gestion, un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli du 1er au 31 juillet 2013, d’autre part, pour avoir adressé à ces agents de contrôle du 2 août 2012 au 11 janvier 2013, des décomptes de la durée du travail des salariés ne correspondant pas à la réalité des heures effectuées ; que le tribunal a relaxé les prévenus ; que le ministère public a relevé appel de cette décision ;

En cet état :Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 398-3, 453, 486, 512, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce qu’il ressort des mentions de l’arrêt attaqué que :

« composition de la cour, lors des débats :– présidente : Mme Claire Quintallet ;– conseillers : Mme Rita Marquis, M. Bertrand Mit-

sounda ;la présidente et les conseillers sus-désignés en ayant

délibéré conformément à la loi ;– ministère public : M. Thierry Phelippeau,– greffier : Mme Stéphanie Manequin, l’arrêt a été lu à

l’audience par Mme Claire Quintallet » ;« et que :« à l’audience publique du 14 janvier 2016 :– Mme le conseiller Claire Quintallet a vérifié l’identité

des prévenus, les a informés de leur droit au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux ques-tions qui leur sont posées ou de se taire, et a fait le rap-port de l’affaire ;

– les prévenus ont été interrogés ;– la direction régionale des entreprises, de la concur-

rence, de la consommation, du travail, de l’emploi, en la personne de M. Jean-Marc Z..., a été entendue ;

– le ministère public a été entendu en ses réquisitions ;

ensuite, qu’il ne s’agissait en aucun cas d’un acte d’apo-logie du terrorisme et prendre la défense de l’humoriste controversé Dieudonné, tend à démontrer que M. X... fonctionne depuis quelque temps dans une logique aty-pique, mais humaniste ; que les juges relèvent que cela a pu le conduire à un comportement décalé, dans le but de rapprocher des personnes autour d’un débat sur les attentats terroristes, sans aucune volonté de légitimer ceux-ci ou d’en faire l’apologie ; que la cour d’appel ajoute qu’en l’absence d’élément intentionnel de l’in-fraction poursuivie, il convient de relaxer le prévenu ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’il résulte de ses propres constatations que le prévenu, par son comportement lors d’un rassemblement public, a manifesté une égale considération pour des victimes d’actes de terrorisme et l’un de leurs auteurs à qui il s’identifiait, ce qui caractérise le délit d’apologie d’actes de terrorisme, la cour d’appel a méconnu l’article sus-visé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Poitiers, en date du 10 mars 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, confor-mément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’ap-pel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Parlos – Avocat général : M. Lagauche – Avocats : Me Brouchot

No 122

TRAVAILInspection du travail – Obstacle à

l’accomplissement des devoirs d’un inspecteur ou d’un contrôleur du travail – Eléments con-stitutifs – Elément matériel – Renseignements comportant des inexactitudes volontaires – Cas – Informations dissimulées ou volontaire-ment incomplètes – Droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination – Compatibilité

Justifie sa décision la cour d’appel qui, pour déclarer les gérants d’une entreprise de restauration coupables d’obstacle aux fonctions de contrôleur du travail, relève que des informations ont été dissimulées ou ont vo-lontairement été fournies de manière incomplète à la suite d’un contrôle de l’inspection du travail, dès lors que constituent ce délit, sans porter atteinte au droit à ne pas s’auto-incriminer de l’employeur, d’une part, le défaut, par ce dernier, de présentation des documents permettant de vérifier le temps de travail effectif des salariés au sein de l’entreprise, dont la tenue, prévue par la loi, répond à l’objectif d’intérêt général de pro-tection des salariés, d’autre part, son abstention de fournir les informations qui lui sont demandées en cas de mentions insuffisantes ou irrégulières dans les docu-ments présentés.

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complémentaires effectivement réalisées pour les sala-riés à temps partiel, les planning n’étant que la repro-duction des horaires mentionnés au contrat de travail ; que les explications de M. X... données à l’inspectrice du travail selon lesquelles "ces heures étaient récupérées dans la même semaine et que donc elles n’avaient pas à figurer sur les plannings" ne sont pas recevables, cette situation étant invérifiable lors d’un contrôle et de sur-croît mathématiquement impossible pour les salariés recrutés avec un nombre d’heures réduit ; que, s’agissant par exemple de la situation de Mme Valérie A... contrô-lée alors qu’elle effectuait le nettoyage des machines à glaces italiennes, son contrat prévoyait une durée heb-domadaire de 4 heures de travail et cette salariée a elle-même indiqué à l’inspectrice qu’elle travaillait entre 2 et 3 heures par jour, soit a minima 10 heures de travail sur une semaine et non 4 et donc un quota de 6 heures complémentaires lesquelles ne peuvent être récupérées et doivent être rémunérées ; qu’en toutes hypothèses, il lui serait mathématiquement impossible de récupérer chaque fin de semaine un nombre d’heures de travail qui dépasse la durée prévue au contrat ; que M. Patrice B... en contrat à durée déterminée de 6 heures par mois, a précisé qu’il effectuait le nettoyage de la terrasse deux heures par semaine, ce qui dépasse là encore la durée du travail prévu au contrat et ce d’autant que sa collègue a précisé qu’il était le veilleur de nuit ; que les époux X... soutiennent que l’infraction de base, à savoir la mécon-naissance des règles relatives au décompte de la durée du travail n’a jamais été poursuivie et qu’elle est désormais prescrite et que le procès-verbal de l’inspection du travail ne comprend pas en annexe les pièces communiquées par leur soin le 31 août 2012 de sorte que la cour n’est pas en mesure de vérifier les affirmations de l’inspection du travail ; que toutefois, il résulte suffisamment de men-tions figurant au procès-verbal de l’inspection du travail qui fait foi jusqu’à preuve contraire qu’aucune informa-tion sur les horaires effectivement réalisés par les salariés n’a été communiquée à l’inspection du travail malgré ses demandes entre le contrôle effectué le 2 août 2012 et la rédaction du procès-verbal le 11 janvier 2013 ; que le délit d’obstacle aux fonctions doit en conséquence être retenu sur cette période de prévention, à l’encontre de M. X... et de Mme Y... en leur qualité d’employeurs, les agents chargés du contrôle de l’établissement n’ayant pas été en mesure, au vu des informations partielles trans-mises de vérifier l’existence d’heures supplémentaires et la véracité de la prise des repos obligatoires de l’en-semble des salariés travaillant pour l’entreprise au jour du contrôle ; que les époux X... ne peuvent prétendre que l’inspection du travail ayant omis de faire figurer en annexe de leur procès-verbal les documents par eux communiqués (bulletins de salaire et décomptes), la cour ne serait pas en mesure de vérifier la véracité des affir-mations mentionnées alors qu’il n’appartient pas à la cour d’effectuer ce travail de comparaison, les mentions figurant sur le procès-verbal faisant foi jusqu’à ce que la preuve contraire soit rapportée et eux-mêmes ne com-muniquant au soutien de leur défense aucune pièce de nature à remettre en cause les mentions y figurant ; que le jugement sera infirmé en ce qu’il a relaxé les prévenus de ce délit qui était sans rapport avec les faits constatés en août 2013 contrairement à l’analyse effectuée par le tri-

– Me Brossy Patrice a déposé et développé oralement des conclusions en faveur des prévenus ;

– les prévenus ont eu la parole en dernier ;– puis l’affaire a été mise en délibéré au 18 février 2016,

les parties ayant été averties par la présidente de ce ren-voi » ;

« alors que le greffier et le ministère public faisant par-tie intégrante de la juridiction, l’arrêt attaqué doit expres-sément constater leur présence à toutes les audiences, y compris celle où est prononcé la décision, sous peine de nullité ; qu’il ne ressort pas de l’arrêt attaqué la preuve de la présence du greffier et du ministère public à l’audience où a été prononcé la décision ; que dès lors, la procédure est entachée de nullité » ;

Attendu que l’arrêt attaqué constate la présence du représentant du ministère public et celle du greffier, ainsi que l’audition du premier, à l’audience des débats, sans préciser que ceux-ci assistaient également à sa lec-ture ;

Qu’en cet état, le grief allégué n’est pas fondé ;Qu’en effet, d’une part, si les articles 32, 486 et 510

du code de procédure pénale exigent que le ministère public, partie nécessaire au procès pénal, soit présent à chaque audience des juridictions de jugement, il résulte de l’article 592 du même code qu’à l’instar des magis-trats composant la juridiction, il est présumé avoir assisté à toutes les audiences de la cause, dès lors qu’il a été entendu en ses réquisitions à celle des débats, et que la nullité de la décision n’est encourue qu’à défaut de cette audition selon l’alinéa 2 de ce texte, l’absence de mention de la présence du ministère public au pro-noncé à la minute de l’arrêt n’important pas ;

Que, d’autre part, il se déduit des mentions de l’arrêt attaqué que le greffier ayant assisté les magistrats de la cour d’appel au cours de l’audience était également présent lors du prononcé de la décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la vio-

lation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 8112-1, L. 8112-2, L. 8112-3, L. 8113-1, L. 8113-3, L. 8113-5 et L. 8114-1, du code du travail, l’article préliminaire, les articles 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X... et Mme San-drine Y..., épouse X..., coupable d’obstacle à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrôleur du travail et en répression les a respectivement condamné à une amende de 2 000 euros et 1 500 euros ;

« aux motifs que ce délit est constitué, dès lors que les renseignements donnés lors d’un contrôle à l’inspecteur du travail sur le personnel de l’entreprise comportent volontairement des inexactitudes, ou étant incomplets les renseignements donnés ne permettent pas à l’inspec-teur ou au contrôleur du travail de vérifier si les heures effectivement travaillées sont conformes aux heures men-tionnées sur le bulletin de paie ; qu’à la suite du contrôle effectué le 2 août 2012, les plannings communiqués par l’employeur n’ont pas permis aux contrôleurs du travail de noter la réalité des heures supplémentaires réalisées par chacun des salariés à temps complet ni les heures

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à la suite d’un contrôle de l’inspection du travail, même en l’absence de toute infraction constatée, la dissimula-tion d’informations par l’employeur ayant précisément pour effet d’en empêcher le constat ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a fait l’exacte application des dispositions de l’article L. 8114-1 du code du travail réprimant le délit d’obstacle à l’accomplissement des devoirs d’un contrô-leur du travail, ainsi que des textes légaux et conven-tionnel visés au moyen ;

Qu’en effet, constituent un obstacle à l’exercice des fonctions de l’inspecteur du travail, sans porter atteinte au droit à ne pas s’auto-incriminer de l’employeur, d’une part, le défaut, par ce dernier, de représentation des documents permettant de vérifier le temps de tra-vail effectif des salariés au sein de l’entreprise, dont la tenue, prévue par la loi, répond à l’objectif d’intérêt général de protection des salariés, d’autre part, en cas de mentions insuffisantes ou irrégulières dans les docu-ments présentés, son abstention de fournir les informa-tions qui lui sont demandées ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Sur le troisième moyen de cassation, pris de la vio-

lation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5, L. 8221-6, L. 8224-1, L. 8224-3 et L. 8224-4 du code du travail, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X... et Mme Y..., épouse X..., coupable du délit de travail dissimulé et en répression les a respectivement condamné à une amende de 2 000 euros et 1 500 euros ;

« aux motifs qu’il résulte des dispositions de l’ar-ticle L. 8221-5 du code du travail qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1 – soit de se soustraire intentionnellement à l’accom-plissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2 – soit de se soustraire intentionnellement à l’accom-plissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de men-tionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en applica-tion du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3 – soit de se soustraire intentionnellement aux décla-rations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’adminis-tration fiscale en vertu des dispositions légales ; à la suite d’un contrôle inopiné réalisé le 24 juillet 2013, l’inspec-tion du travail a constaté que toutes les heures travaillées figurant sur un décompte affiché derrière le bar et recopié par l’inspectrice du travail le 24 juillet 2013 concernant 17 des salariés de l’entreprise n’avaient pas été reprises sur les feuilles des décomptes journaliers présentées comme le décompte officiel de l’entreprise ; que la différence entre ces deux documents était de 503h35 sur la période comprise entre le 1er et le 23 juillet 2013, et ces heures de travail ne figuraient pas non plus sur les bulletins de paie communi-

bunal correctionnel, et, Mme Y... et M. X... seront déclarés coupables de ce chef de prévention, le délit d’obstacle aux fonctions des inspecteurs et contrôleurs du travail étant caractérisé dès que des informations sont dissimulées ou sont volontairement incomplètes à la suite d’un contrôle même en l’absence de toute infraction constatée, la dissi-mulation d’informations par l’employeur ayant précisé-ment pour effet d’en empêcher le constat ;

« 1° alors que le délit d’obstacle à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrôleur du travail est caractérisé en cas de refus de communiquer, malgré les demandes réitérées de l’inspecteur ou du contrôleur du travail, des documents qui doivent être tenus à leur disposition ; qu’en l’espèce, les prévenus ont fourni aux agents en charge du contrôle les bulletins de salaire et les planning des employés ; qu’en les déclarant néanmoins coupables du délit d’obstacle à l’exercice des fonctions d’un inspec-teur ou contrôleur du travail, en relevant que les plan-nings communiqués par l’employeur n’ont pas permis aux contrôleurs du travail de noter la réalité des heures supplémentaires réalisées par chacun des salariés à temps complet ni les heures complémentaires effectivement réa-lisées pour les salariés à temps partiel ou encore que les explications données à l’inspectrice du travail ne sont pas recevables, mais sans constater l’absence de communica-tion délibérée des documents qui doivent être tenus à la disposition des agents de contrôle, la cour d’appel a violé les textes et principes susvisés ;

« 2° alors que tout prévenu bénéficie des droits consa-crés par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, notamment le droit au silence et celui de ne pas s’auto-incriminer ; que ces droits excluent la possibi-lité pour les inspecteurs ou contrôleurs du travail d’obtenir des éléments de preuve par la contrainte ou les pressions au mépris de la volonté de la personne contrôlée ; qu’en l’espèce, en déclarant les prévenus coupables du délit d’obs-tacle à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrô-leur du travail pour n’avoir pas fourni les éléments ayant permis de les poursuivre du chef de travail dissimulé, la cour d’appel a violé les textes et principes susvisés » ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables du délit d’obstacle aux fonctions de contrôleur du tra-vail, l’arrêt retient que les documents communiqués à la suite du contrôle effectué le 2 août 2012 par l’inspec-teur du travail n’ont permis à ce dernier de connaître la réalité, ni des heures supplémentaires réalisées par chacun des salariés à temps complet, ni des heures complémentaires effectuées par les salariés employés à temps partiel ; que les juges ajoutent que les explica-tions fournies par les prévenus, excipant d’une récupé-ration, dans la semaine, des heures supplémentaires ou complémentaires accomplies, ne sont pas recevables, à défaut de vérification possible de cette situation lors d’un contrôle et de compatibilité avec l’activité des salariés n’effectuant qu’un horaire de travail réduit ; que la cour d’appel énonce qu’aucune information sur les horaires effectivement réalisés par les salariés n’a été communiquée à l’inspection du travail malgré ses demandes entre le contrôle précité et le 11 janvier 2013, date du procès-verbal relevant cette infraction ; qu’elle en déduit que des informations ont été dissimulées ou ont volontairement été fournies de manière incomplète

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décompte de la durée du travail des repos compensateurs acquis et de leur prise effective ; ainsi M. X... et Mme Y..., son épouse, en leur qualité d’employeurs étaient tenus de décompter la durée du travail de leurs salariés en notant ou en leur faisant noter sur des feuilles prévues à cet effet, chaque jour, les heures de début et de fin de la période de travail, y compris précisant les heures supplémentaires ou complémentaires pour les salariés à temps partiel ; que M. X... a soutenu que les planning étaient affichés au mur dans les vestiaires et qu’il y avait de feuilles vierges à des-tination des salariés pour qu’ils remplissent eux-mêmes leurs horaires ; que concernant les feuilles d’heures affi-chées derrière le bar, il a précisé que ces feuilles étaient remplies par le barman uniquement pour contrôler les feuilles remplies par les salariés ; que toutefois, il n’ap-porte pas la preuve, ni par témoins, ni par écrit, ou par tout autre moyen de ce que le décompte communiqué par son responsable de cuisine le jour du contrôle serait un document erroné et ce d’autant qu’il ne conteste pas que le décompte figurant derrière le bar avait bien pour objectif de contrôler les horaires de ses salariés, et notam-ment de vérifier leurs horaires d’arrivée et de départ ; que, du tableau récapitulatif établi par l’inspection du tra-vail il résulte que les pauses figuraient également sur ce décompte contrairement à ce qui est soutenu en défense, et les repos se déduisent de l’absence de mentions d’horaires d’arrivée et de départ à une date donnée pour un sala-rié donné ; que, contrairement à ce que soutient M. X..., aucun des salariés présents le jour des deux contrôles n’a mentionné que les décomptes étaient dans les vestiaires alors que chaque salarié est tenu de le remplir chaque jour travaillé ; qu’il résulte en outre du procès-verbal que ce sont les salariés présents dans l’établissement qui ont remis à l’inspection du travail les documents tenus derrière le bar, lorsque les décomptes horaires ont été demandés, ce qui signifie que pour eux aussi le document accroché derrière le bar avait valeur de décompte officiel ; que l’ins-pection du travail mentionne en outre avoir rencontré plusieurs salariés fin octobre 2013 lesquels ont confirmé, sous couvert d’anonymat que toutes les heures de travail ne figuraient pas sur le bulletin de paie et que les horaires mentionnés sur le planning recopié par l’inspection du travail correspondaient à la réalité du travail effectué ; que, si effectivement les salariés n’ont pas été entendus nominativement dans la procédure et que les déclara-tions sous couvert d’anonymat ne sont pas, à elles seules probantes, il y a lieu de constater que là encore le procès-verbal fait foi jusqu’à preuve contraire, et que les époux X... ne communiquent eux-mêmes aucun témoignage de salariés ou aucun document de nature à écarter pure-ment et simplement les informations communiquées par une administration publique ; qu’ainsi, le jugement qui a relaxé les prévenus doit être infirmé et M. Patrice X... et Mme Sandrine Y... déclarés coupables du délit de travail dissimulé, puisqu’il apparaît qu’en moins d’un mois ce sont plus de 500 heures de travail qui n’ont pas été décla-rées et rémunérées concernant 17 salariés de l’entreprise, certains salariés pouvant travailler jusqu’à 20 heures par semaine alors que leurs contrats ne prévoyaient que 4 heures hebdomadaires ;

« 1° alors que pour déclarer les prévenus coupables de travail dissimulé, la cour d’appel s’est uniquement fondée sur un document informel tenu par un des salariés et des

qués après le contrôle ; qu’en application de la législation du travail, les heures de travail doivent être décomptées à la semaine civile ; que les heures dépassant la durée prévue au contrat de travail en fin de semaine sont soit des heures complémentaires, (pour les salariés dont le contrat est à temps partiel, soit d’une durée inférieure à 35h par semaine ou 151,67h par mois) soit des heures supplémentaires (pour les salariés à temps complet) ; que le code du travail prévoit que les heures complémentaires doivent obligatoirement être rémunérées puisqu’elles ne peuvent pas être récupérées ; que les heures supplémen-taires peuvent être rémunérées ou récupérées ; que les heures complémentaires et les heures complémentaires effectivement accomplies doivent figurer sur les décomptes de la durée du travail ; qu’il a été soutenu par les prévenus tant devant le tribunal correctionnel que devant la cour que le décompte du 24 juillet 2013 utilisé par l’inspection du travail pour effectuer le comparatif était un document officieux établi par le barman, lequel ne pouvait être pris en compte par l’inspection du travail, puisque notamment il ne prenait pas en compte les pauses repas et les repos, mais se contentait de mentionner les heures d’arrivée et de départ des salariés ; que les prévenus ont également sou-tenu que ce document n’avait pas été conservé par leurs soins, eux-mêmes n’ayant été entendus par l’inspection du travail qu’au cours du mois de septembre 2013 et qu’ils n’étaient donc pas en mesure de s’expliquer sur ce docu-ment ; que des pièces produites en annexe du procès-ver-bal de l’inspection du travail, il résulte que M. X... a été convoqué par lettre recommandée datée du 5 août 2013 et reçue le 8 août 2013, pour le 3 septembre 2013 afin de répondre des deux contrôles réalisés les 24 juillet et 1er août 2013 ; qu’il lui était donc parfaitement possible de conserver ce décompte, communiqué à l’inspectrice du travail par un salarié, recopié par celle-ci le jour du contrôle et laissé à la disposition de l’employeur, et ce d’autant que son comptable pouvait en avoir besoin en cas de contestation éventuelle sur le paiement des heures complémentaires ou des heures supplémentaires ; que les mentions du procès-verbal de l’inspection du travail font foi jusqu’à preuve contraire ; qu’il est mentionné que le décompte accroché derrière le bar et faisant office de planning pour une partie seulement des salariés a été remis à l’inspectrice par M. Pascal C..., le responsable cuisine comme étant le seul décompte existant au jour du contrôle ; que ce document présenté à l’inspectrice du travail a été recopié par ses soins et laissé à la disposition de l’entreprise, de sorte que M. X... ne peut sérieusement prétendre ne pas pouvoir le comparer avec les différents décomptes signés par les salariés qu’il a lui-même pro-duits ultérieurement et qui ne sont que la reproduction des heures figurant aux contrats de travail, comme lors du contrôle réalisé en août 2012, et ce malgré les rappels de la législation sur l’obligation de tenir des décomptes conformes au travail effectif réalisé ; ce décompte reste, en toutes hypothèses, partiel puisqu’il ne concerne que 17 des 37 salariés de l’entreprise alors qu’il résulte des disposi-tions des articles L. 3171-1 et L. 3171-2 du code du travail que l’employeur doit afficher les heures auxquelles com-mence et finit le travail ainsi d’ailleurs que les heures et la durée du repos, lorsque les horaires ne sont pas les mêmes pour tous les salariés ; que l’employeur doit en outre éta-blir pour chacun des salariés les documents nécessaires au

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Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE les pourvois.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Ricard – Avo-cat général : M. Lagauche – Avocats : SCP Marlange et de La Burgade

Sur la caractérisation du délit d’obstacle aux fonc-tions de contrôleur du travail, à rapprocher :Crim., 15 mars 2016, pourvoi n° 14-87.989, Bull. crim.

2016, n° 82 (1) (rejet), et les arrêts cités.

No 123

CASSATIONDécisions susceptibles – Juridictions de juge-

ment – Cour d’assises – Cour d’assises statuant en premier ressort – Arrêt incident – Condi-tions – Arrêt non susceptible d’appel et mettant fin à la procédure

Les arrêts incidents par lesquels la cour d’assises, statu-ant en premier ressort, règle un incident contentieux ne peuvent faire l’objet d’un recours.

Seul peut être formé un pourvoi contre un arrêt, non susceptible d’appel, par lequel la cour d’assises de prem-ière instance met fin à la procédure, dans le cas où son examen fait apparaître un risque d’excès de pouvoir.

IRRECEVABILITE des pourvois formés par M. Kévin X..., M. Heindy Y..., M. Sofian Z..., contre l’arrêt de la cour d’assises des Bouches-du-Rhône en date du 19 septembre 2016, qui, dans la procédure suivie contre eux des chefs de vol avec arme et arrestation, enlèvement et détention de personnes suivies d’une libération avant le septième jour, a prononcé sur une demande d’annulation de pièces de la procédure et ordonné le renvoi de la procédure à une autre session.

26 avril 2017 No 16-86.326

LA COUR,Vu l’ordonnance du président de la chambre crimi-

nelle, en date du 6 Janvier 2017, constatant l’examen immédiat du pourvoi ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;Sur la recevabilité des pourvois ;Attendu que par arrêt incident, la cour d’assises des

Bouches-du-Rhône, statuant en premier ressort, a prononcé sur une requête en annulation de pièces de la procédure et ordonné le renvoi de l’affaire à une ses-sion ultérieure :

Attendu que les pourvois formés contre cet arrêt sont irrecevables ;

Qu’en effet, en application de l’article 316 du code de procédure pénale, les arrêts incidents par lesquels la

témoignages anonymes ; qu’en se fondant sur ces seuls élé-ments pour en déduire que les heures de travail inscrites sur les bulletins de salaires de plusieurs salariés ne corres-pondraient pas aux heures réellement effectuées, malgré le démenti des prévenus et l’absence de confirmation par des témoignages non anonymes, l’arrêt attaqué a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

« 2° alors que l’infraction de travail dissimulé prévue par l’article L. 8221-5 du code du travail n’est constituée que s’il est établi que l’employeur a, de manière inten-tionnelle, mentionné sur le bulletin de salaire un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu’en déclarant M. X... et Mme Y..., épouse X..., co-gérants de la brasserie "le Régent" coupables du délit de dissimu-lation d’emploi salarié, sans constater l’élément inten-tionnel de l’infraction pour chacun des prévenus, la cour d’appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés » ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables du délit de travail dissimulé par la mention sur les bul-letins de paie d’un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, l’arrêt énonce qu’à la suite d’un contrôle réalisé le 24 juillet 2013, l’inspection du travail a constaté, sur la base d’un document remis par un salarié, que les heures travaillées par dix-sept des trente-sept employés de l’entreprise n’avaient pas été reprises sur les documents présentés par les prévenus comme décomptant les heures de travail effectuées, de sorte qu’un nombre d’heures travaillées supé-rieur à cinq cents heures n’avait pas été enregistré ; que les juges ajoutent que les prévenus étaient tenus de décompter la durée du travail de leurs salariés en notant ou en leur faisant noter les heures de début et de fin de période de travail, y compris en précisant les heures supplémentaires ou complémentaires ; qu’ils relèvent qu’aux termes du procès-verbal de l’inspection du travail, faisant foi jusqu’à preuve contraire, plusieurs salariés ont confirmé, sous couvert d’anonymat, que les heures de travail accomplies ne figuraient pas sur leur bulletin de paie et que les horaires mentionnés sur le document remis lors du contrôle correspondaient à la réalité du travail effectué ; que la cour d’appel en déduit que les éléments constitutifs du délit de travail dissi-mulé ont été caractérisés dès lors qu’en une période inférieure à un mois plus de cinq cents heures de travail n’ont pas été déclarées, précisant que certains salariés ont travaillé jusqu’à vingt heures par semaine, alors que leurs contrats n’avaient prévu que quatre heures de tra-vail hebdomadaires ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’ap-pel, qui n’était pas tenue de suivre les prévenus dans le détail de leur argumentation, a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, et caractérisé en tous ses éléments, tant matériel qu’inten-tionnel, le délit de travail dissimulé par minoration du nombre d’heures de travail réellement accomplies ;

D’où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

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Qu’il est, dès lors, irrecevable ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 6, § 1, et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’article préliminaire, 137 à 148-4 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

« en ce que l’arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de M. X... ;

« aux motifs que, sur le délai raisonnable de la durée de la détention provisoire, M. X..., placé sous mandat de dépôt le 19 mai 2008, a été condamné par arrêt la cour d’assises de Seine-Maritime du 22 novembre 2013 à la réclusion criminelle à perpétuité ; qu’il a interjeté appel ; que, par arrêt du 26 février 2014, la Cour de cas-sation a désigné la cour d’assises de l’Eure pour statuer en appel ; qu’il a présenté une demande de mise en liberté le 30 décembre 2015 dans l’attente de sa comparution devant la juridiction d’appel ; qu’au moment de cette demande de mise en liberté la date de sa comparution devant la cour d’assises de l’Eure n’était pas encore fixée ; qu’à ce jour, cet appel est toujours pendant devant la cour d’assises d’appel de l’Eure ; qu’au moment de cette demande de mise en liberté, il s’était écoulé un délai de sept ans, sept mois et onze jours depuis son placement en détention provisoire et un délai de deux ans et huit jours depuis la décision de la cour d’assises de la Seine-Mari-time ; qu’il s’était écoulé un délai de un an, dix mois et quatre jours depuis la désignation de la cour d’assises d’appel par la Cour de cassation ; qu’il appartient à la chambre de l’instruction de dire si, au moment de la demande de mise en liberté du 30 décembre 2015, la durée de la détention provisoire excédait le délai raison-nable prévu par l’article 6, § 1, de la Convention euro-péenne des droits de l’homme ; qu’à cet égard, la cour retient les circonstances de fait suivantes :

– la complexité de l’affaire, eu égard au très nombreux crimes et délits reprochés à l’accusé, aux nombreux plai-gnants ou parties civiles, circonstances qui ont nécessité de très nombreuses investigations : expertises médico-légales, auditions des plaignants, expertises des plai-gnants, interrogatoires de l’accusé, confrontations entre l’accusé et les plaignants, auditions de témoins, expertises de l’accusé ;

– la mise en perspective de la durée de la détention pro-visoire par rapport à l’importance de la peine encourue par l’accusé, la réclusion criminelle à perpétuité, peine déjà prononcée par la cour d’assises de Seine-Maritime ;

– il résulte de la fiche pénale de l’accusé transmise par l’établissement pénitentiaire que depuis le placement en détention provisoire de M. X... le 19 mai 2008, plusieurs peines privatives de liberté prononcées à son encontre ont été mises à exécution, ce qui a eu pour conséquence de suspendre les effets du mandat de dépôt délivré le 19 mai 2008 ;

– à partir du 12 novembre 2008, réclusion crimi-nelle à perpétuité prononcée le 22 novembre 1973 par la cour d’assises de l’Eure suite à la décision du tribunal d’application des peines d’Evreux du 10 novembre 2008 de révoquer totalement la libération conditionnelle du 16 novembre 2001, décision confirmée par la chambre d’application des peines de la cour d’appel de Versailles

cour d’assises, statuant en premier ressort, règle un inci-dent contentieux ne peuvent faire l’objet d’un recours ;

Que seul peut être formé un pourvoi contre un arrêt, non susceptible d’appel, par lequel la cour d’assises met fin à la procédure, dans le cas où son examen fait appa-raître un risque d’excès de pouvoir relevant du contrôle de la Cour de cassation ;

Par ces motifs :DECLARE les pourvois IRRECEVABLES.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Stephan – Avocat général : M. Mondon – Avocats : SCP Boré et Salve de Bruneton

Sur la recevabilité du pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’assise réglant un incident contentieux, non susceptible d’appel, lorsqu’il met fin à la pro-cédure et que son examen fait apparaître un risque d’excès de pouvoir, à rapprocher :Crim., 10 juin 2009, pourvoi n° 09-81.902, Bull. crim.

2009, n° 119 (1) (cassation).

No 124

CHAMBRE DE L’INSTRUCTIONDétention provisoire – Détention subie par

un accusé appelant d’une décision de cour d’assises – Délai raisonnable – Appréciation – Moment – Date de dépôt de la demande de mise en liberté (non) – Date à laquelle la chambre de l’instruction statue

En application de l’article 6, § 1, de la Convention euro-péenne des droits de l’homme, la durée de la détention provisoire ne doit pas excéder un délai raisonnable.

Saisie d’une demande de mise en liberté, la chambre de l’instruction doit apprécier le caractère raisonnable du délai à la date à laquelle elle statue et non à celle du dépôt de ladite demande.

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Jean-Marie X..., contre l’arrêt de la chambre de l’ins-truction de la cour d’appel de Caen, en date du 10 janvier 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 8 novembre 2016, n° 16-85.016), dans la pro-cédure suivie contre lui des chefs de viol aggravé en récidive, viol en récidive, agression sexuelle aggravée, corruption de mineur, homicide involontaire, séques-tration, violences aggravées, provocation à usage de stupéfiants, a rejeté sa demande de mise en liberté.

26 avril 2017 No 17-80.806

LA COUR,Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;Sur la recevabilité du mémoire personnel :Attendu que ce mémoire, qui n’offre à juger aucun

moyen de droit, ne satisfait pas aux prescriptions de l’article 590 du code de procédure pénale ;

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de telle sorte que, par crainte de représailles, certains témoins ont au départ refusé de déposer par écrit ou que certains plaignants n’ont dénoncé les faits que tardivement, le risque que l’accusé exerce des pressions sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille est avéré ; que les nombreuses condamnations figurant au casier judiciaire de M. X..., en particulier pour des faits d’atteintes à l’inté-grité des personnes, les décisions de révocation des mesures de libération conditionnelle dont il avait bénéficié après une première condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité le 22 novembre 1973, les conclusions de l’expert psychiatre qui décrit la personnalité pathologique de type narcissique de l’accusé qui peut présenter une dangerosité criminologique, sont autant d’éléments qui permettent de caractériser un risque de renouvellement de l’infrac-tion ; que dans ces conditions, le maintien en détention est l’unique moyen d’éviter une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille et de prévenir le renouvellement de l’infraction, objectifs qui ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance électro-nique, mesures de sûreté qui ne suffisent pas à assurer la contrainte nécessaire à leur réalisation ; qu’il convient en conséquence de rejeter la demande de mise en liberté pré-sentée par M. X... le 30 décembre 2015 ;

« 1° alors qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. X... a été placé en détention provisoire le 19 mai 2008 et qu’il a interjeté appel de l’arrêt de la cour d’assises de la Seine-Maritime du 22 novembre 2013 ; qu’ayant constaté qu’il était ainsi détenu depuis plus de huit ans et demi, la chambre de l’instruction ne pouvait affirmer que la durée de l’incarcération n’excédait pas le délai raisonnable ;

« 2° alors qu’en toute hypothèse, il appartenait à la chambre de l’instruction d’apprécier le délai raison-nable au jour où elle statuait, le 10 janvier 2017, et non, comme elle l’a fait, au jour de la demande de mise en liberté du 30 décembre 2015 ;

« 3° alors qu’en s’abstenant de caractériser les dili-gences particulières ou les circonstances insurmontables de nature à justifier, au regard de l’exigence conven-tionnelle du délai raisonnable, la durée de la détention provisoire de M. X... entre la décision de première ins-tance et sa comparution devant la juridiction d’appel, la chambre de l’instruction, qui a au contraire constaté que l’appel de l’arrêt de la cour d’assises du 22 novembre 2013 était "toujours pendant" et que "les autorités judiciaires n’avaient pas fait le choix d’audiencer cette affaire en priorité devant la cour d’assises de l’Eure" désignée pour statuer en appel, et s’est fondée sur des considérations ino-pérantes relatives à la complexité de l’affaire, à l’impor-tance de la peine encourue et aux autres condamnations infligées à M. X..., n’a pas légalement justifié sa décision ;

« 4° alors qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. X... invoquait l’atteinte à son droit à la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et faisait valoir qu’il était âgé de 70 ans et avait une fille née en 1993, dont il était privé depuis plus de 8 ans ; qu’en se bornant à écarter ce moyen en affirmant que la détention provisoire est nécessaire pour éviter toute pression sur les témoins, sur les plaignants ou sur leur famille, et pour éviter de nouveaux passages à l’acte criminels ou délictuels, sans apprécier concrète-

le 27 janvier 2009, le pourvoi ayant été déclaré non admis par un arrêt de la Cour de cassation, en date du 28 octobre 2009 ;

– à partir du 15 avril 2009, peine de deux mois d’em-prisonnement prononcée le 15 avril 2009 par le tribunal correctionnel de Rouen ;

– à partir du 16 avril 2009, peine de six mois prononcée le 25 mars 2009 par la cour d’appel de Rouen ; qu’il s’ensuit que M. X..., au moment de sa demande de mise en liberté du 30 décembre 2015, exécutait la peine de réclusion cri-minelle à perpétuité prononcée le 22 novembre 1973 par la cour d’assises de l’Eure, sans que la détention provisoire ne courre plus ; que cette circonstance explique que les autorités judiciaires compétentes n’aient pas fait le choix d’audiencer cette affaire en priorité devant la cour d’assises de l’Eure ; que la cour considère qu’en raison de toutes ces circonstances particulières, la durée de la détention pro-visoire de M. X... au moment de sa demande de mise en liberté du 30 décembre 2015 n’excédait pas le délai raison-nable prévu par l’article susvisé ; que sur le respect du droit à la vie privée et familiale, l’avocat de M. X... soutient que la détention provisoire de son client, âgé de 70 ans, père d’une fille née en 1993, injustement privée de lui depuis plus de 8 ans, porte une atteinte disproportionnée au droit à une vie familiale normale, méconnaissant ainsi les dis-positions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ; que l’ingérence de l’autorité publique dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et fami-liale que constitue la détention provisoire est prévue par la loi ; qu’elle est nécessaire pour assurer la tenue d’un procès devant la cour d’assises d’appel en dehors de toute pression sur les témoins, sur les plaignants ou sur leur famille et également pour éviter de nouveaux passages à l’acte crimi-nels ou délictuels eu égard aux précédentes condamnations prononcées à l’encontre de l’accusé pour des faits d’atteintes à l’intégrité de la personne et aux conclusions de l’expert psychiatre ; que sur la présomption d’innocence, ce prin-cipe proclamé par l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, par l’article 11-1 de la Déclaration universelle des droits de l’homme éla-borée en 1948, par l’article 6, § 2, de la Convention euro-péenne des droits de l’homme et par l’article préliminaire du code de procédure pénale, est à l’origine de l’affirmation que la charge de la preuve appartient à l’accusation, mais ne fait pas obstacle à la mise en œuvre de mesures coerci-tives à l’encontre d’une personne contre laquelle il existe des charges suffisantes laissant présumer qu’elle a commis les faits qui lui sont reprochés, si ces mesures coercitives sont rendues nécessaires au vu des critères prévues par la loi, en l’occurrence l’article 144 du code de procédure pénale ; qu’il existe des charges suffisantes contre M. X... laissant présumer qu’il a commis les faits qui lui sont reprochés, charges exposées dans l’arrêt de mise en accusation du 20 septembre 2012 et dans l’arrêt pénal de la cour d’as-sises de la Seine-Maritime du 22 novembre 2013 ; que la mesure coercitive qu’est la détention provisoire est néces-saire pour les motifs qui vont être développés ci-dessous ; que sur les critères de maintien en détention provisoire, eu égard aux condamnations figurant au casier judiciaire de M. X..., en particulier pour des faits de violences, aux déclarations de nombreuses personnes le décrivant comme un homme violent, comme un homme inspirant la peur

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341

L’exécution d’une mesure d’annulation du permis de con-duire ne prend effet qu’à compter du jour de la notifi-cation de la mesure par l’agent de l’autorité chargé de l’exécution.

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Charles-Oli-vier X..., contre l’arrêt de la cour d’appel de Nancy, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 2016, qui, pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique et conduite d’un véhicule malgré annulation du permis de conduire, l’a condamné à cinq mois d’emprisonne-ment avec sursis assorti d’une obligation d’accomplir un travail d’intérêt général et deux mois de suspen-sion du permis de conduire.

26 avril 2017 No 16-84.539

LA COUR,Vu le mémoire personnel produit ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles L. 224-16 et L. 224-17 du code de la route :Vu l’article L. 224-16 du code de la route ;Attendu qu’il résulte de ce texte que l’exécution

d’une mesure d’annulation du permis de conduire ne prend effet qu’à compter du jour de la notification de la mesure par l’agent de l’autorité chargé de l’exécution ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par jugement contradictoire du 17 octobre 2013, le tribunal correctionnel d’Epinal a prononcé l’annulation du permis de conduire de M. X..., avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant un jour ; que poursuivi pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique et conduite malgré annulation de son permis de conduire com-mises le 11 novembre 2013, M. X... a été relaxé de ce dernier chef et condamné pour le premier à trois mois d’emprisonnement avec sursis et obligation d’accomplir un travail d’intérêt général et deux mois de suspension du permis de conduire par jugement du 6 juin 2014 ; que M. X... et le ministère public ont interjeté appel de ce jugement ;

Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de conduite malgré annulation de son permis de conduire, l’arrêt énonce que la décision d’annulation du permis de conduire est de nature contradictoire et a, en conséquence, acquis un caractère exécutoire le 27 octobre 2013 ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’ap-pel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Nancy, en date du 7 juin 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, confor-mément à la loi ;

ment l’atteinte à la vie privée et familiale ni effectuer, sous cet angle, un examen de proportionnalité, la chambre de l’instruction a privé sa décision de base légale » ;

Vu les articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, la durée de la détention provisoire ne doit pas excéder un délai raisonnable, lequel doit être apprécié à la date à laquelle la juridiction statue ;

Attendu que, selon le second, tout arrêt de la chambre de l’instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations des mémoires des parties ; que l’insuffisance ou la contra-diction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., placé sous mandat de dépôt le 19 mai 2008, a, par ordonnance du juge d’instruction du 16 mai 2012, été mis en accusation des chefs susvi-sés ; qu’il a été condamné le 22 novembre 2013 par la cour d’assises de la Seine-Maritime à la réclusion cri-minelle à perpétuité ; que, par arrêt du 26 février 2014, la Cour de cassation a désigné la cour d’assises de l’Eure pour statuer en appel ; que M. X... a présenté le 30 décembre 2015 une demande de mise en liberté dans l’attente de sa comparution devant la juridiction d’appel ; que les deux arrêts rejetant cette demande, en date du 26 février 2016 et du 11 juillet 2016, ont été cas-sés par la chambre criminelle ;

Attendu que, pour dire que la détention provisoire n’excède pas un délai raisonnable et rejeter la demande de mise en liberté, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen, en retenant notamment qu’il convient de statuer au moment de la demande de mise en liberté du 30 décembre 2015 ;

Mais attendu qu’en se situant, pour apprécier le caractère raisonnable du délai, à la date du dépôt de la demande et non pas à la date à laquelle elle statuait, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Caen, en date du 10 janvier 2017, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Caen, autrement com-posée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil, qui statuera dans le plus bref délai.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Raybaud – Avocat général : M. Salomon – Avocats : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

No 125

CIRCULATION ROUTIEREPermis de conduire – Annulation – Exécution –

Point de départ – Détermination

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342

cours de l’instruction, que la qualification criminelle ne peut être retenue, le juge d’instruction peut, après avoir communiqué le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions, soit saisir par ordonnance moti-vée le juge des libertés et de la détention aux fins du maintien en détention provisoire de la personne mise en examen, soit prescrire sa mise en liberté assortie ou non du contrôle judiciaire" ; que l’article 174-1 du code de procédure pénale dispose par ailleurs : "Lorsque la chambre de l’instruction annule une mise en examen pour violation des dispositions de l’article 80-1, la per-sonne est considérée comme témoin assisté à compter de son interrogatoire de première comparution et pour l’ensemble de ses interrogatoires ultérieurs, jusqu’à l’is-sue de l’information, sous réserve des dispositions des articles 113-6 et 113-8" ; que l’article 113-5 du code de procédure pénale dispose enfin : "Le témoin assisté ne peut être placé sous contrôle judiciaire, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou en détention provisoire, ni faire l’objet d’une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation" ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que M. X... bénéficiait, à compter du 18 janvier 2017, du statut de témoin assisté pour les faits retenus par le magistrat instructeur sous la qualification criminelle au moment de sa mise en examen, et restait mis en examen pour les autres faits, tous de nature cor-rectionnelle ; qu’or, l’article 146 n’est par définition appli-cable qu’à une hypothèse de correctionnalisation de faits criminels, ce qui implique nécessairement une mise en examen préalable, qui en l’espèce faisait défaut ; qu’il en découle que l’article n’était pas applicable à la situation de M. X... ; que, sur le régime de la détention de M. X... : il résulte des développements qui précèdent que M. X... a été placé en détention provisoire à l’issue d’une unique et initiale mise en examen pour une tentative de crime et divers délits, de sorte que, comme le montre l’examen de l’ensemble des pièces de procédure établies à cette occasion, et spécialement l’ordonnance de placement en détention provisoire et le mandat de dépôt, la détention provisoire avait, à la lumière des critères de l’article 144 du code de procédure pénale, pour fondement autant le crime que les délits pour lesquels l’intéressé venait d’être mis en examen ; qu’ainsi, après la décision de la chambre de l’instruction annulant la mise en examen du seul chef criminel, le titre de détention initial demeurait en prin-cipe valable en était, du fait de cette décision, de plein droit soumis aux règles de la détention provisoire en matière correctionnelle, l’annulation partielle de la mise en examen étant en toute hypothèse sans conséquences sur la validité des actes établis antérieurement, sauf pour le magistrat saisi à considérer que la situation de l’intéressé devait être revue au regard des critères des articles 144 et suivants du code de procédure pénale ; que sur la détention provisoire de M. X... : saisi d’une contes-tation sur la régularité de la détention de Marc Marie X..., qui dénonce une détention arbitraire, il appartient à la chambre de l’instruction d’en vérifier le bien-fondé ; que sur la durée de la détention provisoire M. X... a été mis en examen pour des délits punis d’une peine d’empri-

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’ap-pel de Nancy, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : Mme Carbon-aro – Avocat général : M. Gaillardot

Sur la détermination du point de départ des mesures de suspension, d’annulation et d’interdiction de solliciter la délivrance d’un nou-veau permis de conduire, à rapprocher :Crim., 28 novembre 2012, pourvoi n° 12-82.183, Bull.

crim. 2012, n° 263 (cassation), et les arrêts cités.

No 126

DETENTION PROVISOIREDécision de prolongation – Qualification diffé-

rente des faits en cours d’information – Effet

Dans le cas où la mise en examen pour des faits de nature criminelle et des faits relevant d’une quali-fication correctionnelle a été annulée en ce qui concerne les faits criminels, le titre de détention demeure valable, cette détention provisoire se trou-vant alors soumise, à compter du jour où la décision d’annulation est devenue définitive, aux règles qui découlent de la qualification des faits prévues aux articles 145-1 et 145-3 du code de procédure pénale, compte tenu de la durée de détention déjà écoulée depuis qu’elle a été ordonnée.

REJET du pourvoi formé par M. Marc Marie X..., contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bastia, en date du 25 janvier 2017, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs d’association de malfaiteurs, détention et transport de substances ou produits incendiaires ou explo-sifs en bande organisée, infractions à la législation sur les armes, détention d’arme malgré interdiction et recel, l’a maintenu en détention provisoire après infirmation de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention l’ayant mis en liberté.

26 avril 2017 No 17-80.979

LA COUR,Vu le mémoire et les observations complémentaires

produits ;Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, 80-1, 80-1-1, 113-5, 137, 144, 145-1, 146, 174-1, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la chambre de l’instruction a dit n’y avoir lieu à lever la détention provisoire de M. X... et à le remettre en liberté ;

« aux motifs que sur l’application de l’article 146 du code de procédure pénale : l’article 146 du code de pro-cédure pénale dispose notamment : "S’il apparaît, au

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des nécessités de l’instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle peut être astreinte à une ou plusieurs obli-gations du contrôle judiciaire ou faire l’objet d’une assi-gnation à résidence avec placement sous surveillance électronique et, si de telles mesures sont insuffisantes, la personne mise en examen peut être placée en déten-tion provisoire ; qu’il résulte en effet de l’article 144 du code de procédure pénale que la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s’il est démon-tré, au regard des éléments précis et circonstanciés de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de par-venir à l’un ou plusieurs des objectifs définis par ce texte et que ceux-ci ne pourraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d’assigna-tion à résidence avec surveillance électronique ; que les risques ci-dessus décrits ne pourraient être écartés par aucune des obligations, si contraignantes soient-elles, auxquelles l’intéressé pourrait être astreint dans le cadre d’un placement sous contrôle judiciaire, qui procède par essence d’un contrôle a posteriori ; qu’il en va de même en matière d’assignation à résidence avec surveillance électronique, une telle mesure ne permet-tant pas, notamment, de prévenir suffisamment les risques de pression sur les témoins ou de concertation frauduleuse ; qu’à la lumière des explications ci-des-sus et au regard des éléments précis et circonstanciés qui résultent de la procédure, exposés précédemment, la détention provisoire de M. X... constitue l’unique moyen de :

– conserver les preuves et indices nécessaires à la mani-festation de la vérité et prévenir toute concertation entre l’intéressé et les coauteurs ou complices,

– prévenir le renouvellement de l’infraction,– garantir le maintien de la personne à la disposition

de la justice, la détention provisoire de M. X... est donc régulière et justifiée en droit et en fait ;

« 1° alors que l’annulation de la mise en examen d’une personne pour absence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation à des faits cri-minels entraîne nécessairement la nullité du mandat de dépôt criminel dont elle faisait l’objet ; qu’en l’espèce, M. X... a été mis en examen pour des faits délictuels ainsi que du chef de tentative de meurtre en bande organisée et a été placé sous mandat de dépôt criminel le 28 mai 2016 ; que par un arrêt du 18 janvier 2017, la chambre de l’instruction a annulé sa mise en examen de ce dernier chef ; qu’en affirmant que le titre de détention initial demeurait valable malgré cette annulation, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision ;

« 2° alors que, lorsque la chambre de l’instruc-tion annule une mise en examen pour violation des dispositions de l’article 80-1, la personne est considérée comme témoin assisté, au regard de cette infraction, à compter de son interrogatoire de première comparu-tion ; qu’en matière correctionnelle, la détention pro-visoire ne peut excéder quatre mois, faute de décision de prolongation intervenue dans ce délai ; qu’en énon-çant que M. X..., placé en détention provisoire depuis le 28 mai 2016, n’était pas détenu arbitrairement le 18 jan-vier 2017, lorsque sa détention, qui n’avait pas été pro-

sonnement de dix ans, pour les plus graves ; que l’inté-ressé a été condamné :

– le 14 mars 1986 à dix ans de réclusion criminelle pour complicité d’assassinat ,

– le 16 mars 2004 à un an et deux mois d’emprison-nement dont dix mois avec sursis pour acquisition sans autorisation d’arme ou de munition par une personne déjà condamnée,

– le 10 septembre 2014 à quatre ans d’emprison-nement pour extorsion par violence, menace ou contrainte et vol aggravé ; que le régime de détention qui lui est applicable relève donc des articles 145-1, ali-néa 2, et, le cas échéant, 145-3 du code de procédure pénale, à savoir que la période de détention est de quatre mois renouvelable deux fois ; que M. X... ayant été placé en détention provisoire le 28 mai 2016, il n’était en détention arbitraire, de ce point de vue, ni le 18 janvier 2017, ni ce jour, à charge pour le magistrat instructeur, le cas échéant, de saisir le juge des libertés et de la détention en vue d’une seconde prolongation avant le 26 janvier 2017, le cas échéant ; que sur les indices graves ou concordants M. X... a été interpellé en flagrant délit : les constatations des enquêteurs sur sa tenue vestimentaire, la nature des objets transportés dans le véhicule, la nature des objets saisis au domicile de l’intéressé constituent autant d’éléments objectifs qui sont des indices graves ou concordants rendant plau-sible la participation de M. X..., comme auteur ou com-plice, à tout ou partie des faits pour lesquels il a été mis en examen ; que, sur les nécessités de l’information, si M. X... peut légitimement user de son droit au silence, la nécessité d’identifier les personnes auxquelles il a eu à faire dans les temps qui ont précédé son interpellation ou qu’il devait rencontrer plus tard demeure une prio-rité ; qu’il apparaît par ailleurs que les observations des policiers qui l’ont repéré ainsi que les constatations des officiers de police judiciaire imposent de considérer comme très probable l’existence d’autres complices ou coauteurs, qui restent à identifier ; qu’en l’état, le risque de concertation en vue de faire obstacle à la manifes-tation de la vérité, eu égard, en outre, aux éléments de personnalité, est donc avéré ; que sur la mesure de sûreté M. X... a été incarcéré au centre pénitencier de Borgo du 25 octobre 2012 au 26 septembre 2015 pour des faits d’extorsion par violence, menace et vol aggravé ; qu’il a bénéficié de permissions de sortir du 16 mai 2015 au 18 mai 2015, le 17 juillet 2015 au 19 juillet 2015 ; que le 27 juillet 2015 il a été placé sous surveillance électronique jusqu’au 26 septembre 2015 ; que l’interpellation de l’intéressé dans les circonstances décrites ci-dessus, quelques mois seulement après sa sortie de prison, en l’état des condamnations figurant au casier judiciaire, impose de considérer le risque de réitération comme réel ; qu’il apparaît en outre que, de son propre aveu, M. X... avait adopté un rythme de vie qui, pour n’être pas totalement clandestin, pro-cédait d’une volonté de se dissimuler, sans disposer de réel domicile ou d’une activité quelconque ; que dans ces conditions, les garanties de représentation de l’intéressé restent insuffisantes ; que, sur la déten-tion provisoire, toute personne mise en examen, pré-sumée innocente, doit rester libre. Toutefois, en raison

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344

règles qui découlent de la qualification des faits pré-vues aux articles 145-1 et 145-3 du code de procédure pénale, compte tenu de la durée de détention déjà écoulée depuis qu’elle a été ordonnée ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Béghin – Avo-cat général : M. Salomon – Avocats : SCP Spinosi et Sureau

Sur le régime de la détention provisoire en cas de changement de qualification des faits au cours d’une information, à rapprocher :Crim., 9 janvier 1997, pourvoi n° 96-85.211, Bull. crim.

1997, n° 8 (1) (rejet), et les arrêts cités ;Crim., 26 avril 2017, pourvoi n° 17-81.316, Bull. crim.

2017, n° 126 (rejet).

No 127

DETENTION PROVISOIREDécision de prolongation – Qualification diffé-

rente des faits en cours d’information – Effet

Dans le cas où la mise en examen pour des faits de na-ture criminelle et des faits relevant d’une qualification correctionnelle a été annulée en ce qui concerne les faits criminels, le titre de détention demeure valable, cette détention provisoire se trouvant alors soumise, à compter du jour où la décision d’annulation est dev-enue définitive, aux règles qui découlent de la qualifi-cation des faits prévues aux articles 145-1 et 145-3 du code de procédure pénale, compte tenu de la durée de détention déjà écoulée depuis qu’elle a été ordonnée.

REJET du pourvoi formé par M. Marc Marie X..., contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bastia, en date du 10 février 2017, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs d’association de malfaiteurs, détention et transport de substances ou produits incendiaires ou explosifs en bande organisée, infractions à la législation sur les armes, détention d’arme malgré interdiction et recel, a confirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.

26 avril 2017 No 17-81.316

LA COUR,Vu le mémoire et les observations complémentaires

produits ;Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de

la procédure que, lors du contrôle d’un véhicule, dont le conducteur, M. X..., portait, sous une casquette, une cagoule remontée sur le front, les services de police ont constaté que ce véhicule, volé et faussement immatri-

longée, avait excédé quatre mois à cette date, la cour d’appel a méconnu les principes susvisés » ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, lors du contrôle d’un véhicule, dont le conducteur, M. X..., portait, sous une casquette, une cagoule remontée sur le front, les services de police ont constaté que ce véhicule, volé et faussement immatri-culé, contenait un engin incendiaire artisanal, un bidon d’essence, deux bouteilles de type white-spirit, un fusil comportant une cartouche chambrée et approvisionné de sept autres munitions ; qu’après une enquête et l’ou-verture d’une information judiciaire, l’intéressé a été mis en examen pour des faits retenus sous une quali-fication criminelle, ainsi que des chefs susénoncés, et placé en détention le 28 mai 2016 ; que par arrêt en date du 18 janvier 2017, la chambre de l’instruction a annulé la mise en examen de l’intéressé pour les faits retenus sous une qualification criminelle aux motifs qu’il n’existait pas, au moment de la mise en examen, d’indices graves ou concordants rendant plausible sa participation, comme auteur ou complice, à tout ou partie de ces faits ; que, le même jour, le juge d’ins-truction a saisi le juge des libertés et de la détention en application de l’article 146 du code de procédure pénale aux fins du maintien de la personne mise en examen en détention provisoire ; que le juge des libertés et de la détention a dit n’y avoir lieu à maintenir la détention provisoire par ordonnance en date du 19 janvier 2017, portée à la connaissance du ministère public à 17 h 05 ; que, le même jour, à la même heure, le procu-reur de la République a relevé appel de cette décision et saisi d’un référé-détention le premier président de la cour d’appel, qui a ordonné la suspension des effets de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention et le maintien en détention jusqu’à ce que la chambre de l’instruction statue sur l’appel du ministère public ;

Attendu que, pour infirmer l’ordonnance entreprise et maintenir la détention provisoire de la personne mise en examen, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu que, si c’est à tort que les juges énoncent que le demandeur doit être considéré comme témoin assisté, au regard des faits objet de la mise en exa-men annulée, à compter de l’arrêt d’annulation et non de l’interrogatoire de première comparution, l’arrêt n’encourt pas pour autant la censure dès lors que la durée maximum de la détention provisoire encourue au regard des délits, punis de dix ans d’emprisonne-ment, pour lesquels le demandeur restait mis en exa-men n’avait pas été dépassée à la date à laquelle l’arrêt d’annulation partielle de la mise en examen était devenu définitif, et que la détention provisoire n’avait pas à être prolongée, en l’espèce, avant le 28 jan-vier 2017 ;

Qu’en effet, dans le cas où la mise en examen pour des faits recevant une qualification criminelle et des faits relevant d’une qualification correctionnelle, pour laquelle la personne concernée peut être placée en détention provisoire, a été annulée pour les faits criminels, le titre de détention demeure valable et la détention se trouve soumise, à compter du jour où la décision d’annulation est devenue définitive, aux

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que les avocats de la personne mise en examen ont bien été convoqués le 18 janvier 2017 pour l’audience de pro-longation du 26 janvier 2017 devant le juge des libertés et de la détention, soit dans un délai conforme aux exi-gences de la loi ; qu’enfin, aucune disposition n’imposait au juge des libertés et de la détention d’attendre l’arrêt de la chambre de l’instruction pour statuer sur la demande de prolongation de détention provisoire du juge d’ins-truction ; que les moyens tirés de l’irrégularité de la pro-cédure ne sont donc pas fondés ;

« 1° alors que ne figure au dossier de la procédure qu’une seule ordonnance de saisine du juge des libertés de la détention, rendue par le juge d’instruction le 18 jan-vier 2017 ; qu’en affirmant, pour dire que le juge des libertés et de la détention, qui avait déjà statué au visa de cette ordonnance de saisine le 19 janvier 2017, avait régulièrement prolongé la détention provisoire du mis en examen par l’ordonnance entreprise du 26 janvier 2017, que "deux ordonnances de saisine distinctes ont bien été établies par le magistrat instructeur dans des conditions exemptes de la moindre équivoque", la chambre de l’ins-truction a affirmé un fait en contradiction avec les pièces de la procédure ;

« 2° alors qu’en matière de détention provisoire, hors le cas prévu par le deuxième alinéa de l’article 137-4 du code de procédure pénale, le juge des libertés et de la détention ne statue valablement que s’il a été saisi par une ordon-nance motivée du juge d’instruction ; qu’en l’espèce, saisi par une ordonnance du juge d’instruction du 18 jan-vier 2017, le juge des libertés et de la détention a rejeté la demande de maintien en détention provisoire de M. X... par une ordonnance du 19 janvier 2017 ; que, sur appel interjeté par le procureur de la République, la cour d’appel a infirmé l’ordonnance déférée par un arrêt du 25 jan-vier 2017, lequel a été frappé d’un pourvoi en cassation actuellement pendant ; que, sans être de nouveau saisi par le juge d’instruction, le juge des libertés et de la détention a, au visa de la même ordonnance de saisine du 18 jan-vier 2017, prolongé la détention provisoire du demandeur pour une durée de quatre mois par une ordonnance du 26 janvier 2017 ; qu’en refusant d’annuler cette ordon-nance, lorsque le juge des libertés et de la détention avait déjà épuisé sa saisine, la chambre de l’instruction a violé l’article 137-1 du code de procédure pénale » ;

Attendu que le 18 janvier 2017, le magistrat instruc-teur a saisi, par deux ordonnances distinctes, le juge des libertés et de la détention d’une demande de maintien en détention de M. X... sur le fondement de l’article 146 du code de procédure pénale et d’une demande de pro-longation de la détention provisoire sur le fondement de l’article 145-1 dudit code ;

D’où il suit que le moyen manque en fait ;Sur le second moyen de cassation, pris de la violation

des articles 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, 80-1, 80-1-1, 113-5, 137, 144, 145-1, 146, 174-1, 591, 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la chambre de l’instruction a confirmé l’or-donnance de prolongation de la détention provisoire de M. X... ;

« aux motifs que sur la situation de M. X... au regard des règles en matière de détention provisoire : par son

culé, contenait un engin incendiaire artisanal, un bidon d’essence, deux bouteilles de type white-spirit, un fusil comportant une cartouche chambrée et approvisionné de sept autres munitions ; qu’après une enquête et l’ou-verture d’une information judiciaire, l’intéressé a été mis en examen pour des faits retenus sous une quali-fication criminelle, ainsi que des chefs susénoncés, et placé en détention le 28 mai 2016 ; que par arrêt en date du 18 janvier 2017, la chambre de l’instruction a annulé la mise en examen de l’intéressé pour les faits retenus sous une qualification criminelle aux motifs qu’il n’existait pas, au moment de la première comparu-tion, d’indices graves ou concordants rendant plausible sa participation, comme auteur ou complice, à tout ou partie de ces faits ; que, le même jour, le juge d’ins-truction a saisi le juge des libertés et de la détention en application de l’article 146 du code de procédure pénale aux fins du maintien de la personne mise en examen en détention provisoire ; que le juge des liber-tés et de la détention a dit n’y avoir lieu à maintenir la détention provisoire par ordonnance en date du 19 jan-vier 2017, portée à la connaissance du ministère public à 17 h 05 ; que, le même jour, à la même heure, le pro-cureur de la République a relevé appel de cette décision et saisi d’un référé-détention le premier président de la cour d’appel, qui a ordonné la suspension des effets de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention et le maintien en détention jusqu’à ce que la chambre de l’instruction statue sur l’appel du ministère public ; que, le 18 janvier 2017, à 18 h 50, le juge des libertés et de la détention a convoqué l’avocat de la personne mise en examen à un débat contradictoire prévu le 26 janvier suivant en vue de l’éventuelle prolongation de la déten-tion provisoire de M. X... ; qu’à l’issue de ce débat, le juge des libertés et de la détention a prolongé la déten-tion provisoire de l’intéressé à compter du 28 jan-vier 2017 ; que M. X... a relevé appel de cette décision ;

En cet état :Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, 137, 137-1, 144, 145-1, 591 et 593 du code de procédure pénale :

« en ce que la chambre de l’instruction a dit n’y avoir lieu à nullité de l’ordonnance de prolongation de la déten-tion provisoire entreprise et l’a confirmée ;

« aux motifs que sur la régularité de la saisine du juge des libertés et de la détention ; qu’il apparaît que le 18 janvier 2017, le magistrat instructeur a saisi le juge des libertés et de la détention, d’une part, afin qu’il se prononce au visa de l’article 146 du code de procédure pénale sur le maintien en détention de l’intéressé, d’autre part, en vue de la prolongation de la détention provisoire du mis en cause à l’issue d’une période globale de presque huit mois de détention provisoire ; que deux ordonnances de saisine distinctes ont bien été établies par le magistrat instructeur dans des conditions exemptes de la moindre équivoque et, dans des conditions tout aussi claires, le juge des libertés et de la détention, dans son ordonnance du 19 janvier 2017, n’a répondu qu’à la saisine au visa de l’article 146 du code de procédure pénale, sans statuer sur l’éventuelle prolongation de détention provisoire, objet de la décision contestée ; qu’il apparaît par ailleurs

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en détention provisoire le 28 mai 2016 ; que l’intéressé a été condamné,

– le 14 mars 1986 à dix ans de réclusion criminelle pour complicité d’assassinat,

– le 16 mars 2004 à un an et deux mois d’emprison-nement dont dix mois avec sursis pour acquisition sans autorisation d’arme ou de munition par une personne déjà condamnée,

– le 10 septembre 2014 à quatre ans d’emprisonne-ment pour extorsion par violence menace ou contrainte et vol aggravé le régime de détention qui lui est applicable relève donc des articles 145-1, alinéa 2, et, le cas échéant, 145-3 du code de procédure pénale, à savoir que la période de détention provisoire est de quatre mois renou-velable deux fois. sur les indices graves ou concordants ; que M. X... a été interpellé en flagrant délit : les consta-tations des enquêteurs sur sa tenue vestimentaire, la nature des objets transportés dans le véhicule, la nature des objets saisis au domicile de l’intéressé constituent autant d’éléments objectifs qui sont des indices graves et concordants rendant plausible la participation de M. X..., comme auteur ou complice, à tout ou partie des faits pour lesquels il a été mis en examen.. sur les nécessi-tés de l’information si M. X... peut légitimement user de son droit au silence, la nécessité d’identifier les personnes auxquelles il a eu à faire dans les temps qui ont précédé son interpellation ou qu’il devait rencontrer plus tard demeure une priorité ; qu’il apparaît par ailleurs que les observations des policiers qui l’ont repéré ainsi que les constations des officier de police judiciaire imposent de considérer comme très probable l’existence d’autres com-plices ou coauteurs, qui restent à identifier ; qu’en l’état, le risque de concertation en vue de faire obstacle à la mani-festation de la vérité, eu égard, en outre, aux éléments de personnalité, est donc avéré.. sur la mesure de sûreté M. X... a été incarcéré au centre pénitentiaire de Borgo du 25 octobre 2012 au 26 septembre 2015 pour les faits de extorsion avec violence, menace et vol aggravé ; qu’il a bénéficié de permissions de sortir du 16 mai 2015 au 18 mai 2015, le 17 juillet 2015 au 19 juillet 2015 ; que le 27 juillet 2015, il a été placé sous surveillance électro-nique jusqu’au 26 septembre 2015 ; que l’interpellation de l’intéressé dans les circonstances décrites ci-dessus, quelques mois seulement après sa sortie de prison, en l’état des condamnations figurant au casier judiciaire, impose de considérer le risque de réitération comme réel. Il apparaît en outre que, de son propre aveu, M. X... avait adopté un rythme de vie qui, pour n’être pas totalement clandestin, procédait d’une volonté de se dissimuler, sans disposer de réel domicile ou d’une activité quelconque ; que dans ces conditions, les garanties de représenta-tion de l’intéressé restent insuffisantes.. sur la détention provisoire toute personne mise en examen, présumée innocente, doit rester libre ; que toutefois, en raison des nécessités de l’instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle peut être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire ou faire l’objet d’une assignation à résidence avec placement sous surveillance électronique et, si de telles mesures sont insuffisantes, la personne mise en examen peut être placée en détention provisoire ; qu’il résulte en effet de l’article 144 du code de procédure pénale que la détention provisoire ne peut être ordonnée

arrêt du 25 janvier 2017, dont le dispositif est repro-duit ci-dessus, la chambre de l’instruction a notamment considéré :« sur l’application de l’article 146 du code de procédure pénale : l’article 146 du code de procédure pénale dispose notamment : S’il apparaît, au cours de l’instruction, que la qualification criminelle ne peut être retenue, le juge d’instruction peut, après avoir commu-niqué le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions, soit saisir par ordonnance motivée le juge des libertés et de la détention aux fins du maintien en détention provisoire de la personne mise en examen, soit prescrire sa mise en liberté assortie ou non du contrôle judiciaire ; que l’article 174-1 du code de procédure pénale dispose par ailleurs ; que lorsque la chambre de l’instruction annule une mise en examen pour violation des dispositions de l’article 80-1, la personne est considé-rée comme témoin assisté à compter de son interrogatoire de première comparution et pour l’ensemble de ses inter-rogatoires ultérieurs, jusqu’à l’issue de l’information, sous réserve des dispositions des articles 113-6 et 113-8 ; que l’article 113-5 du code de procédure pénale dis-pose enfin ; que le témoin assisté ne peut être placé sous contrôle judiciaire, sous assignation à résidence avec sur-veillance électronique ou en détention provisoire, ni faire l’objet d’une ordonnance de renvoi ou de mise en accusa-tion ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que M. X... bénéficiait, à compter du 18 janvier 2017, du statut de témoin assisté pour les faits retenus par le magistrat instructeur sous la qualification criminelle au moment de sa mise en examen, et restait mis en exa-men pour les autres faits, tous de nature correctionnelle ; qu’or, l’article 146 n’est par définition applicable qu’à une hypothèse de correctionnalisation de faits criminels, ce qui implique nécessairement une mise en examen pré-alable, qui en l’espèce faisait défaut. Il en découle que l’article n’était pas applicable à la situation de M. X.... sur le régime de la détention de M. X... ; qu’il résulte des développements qui précèdent que M. X... a été placé en détention provisoire à l’issue d’une unique et initiale mise en examen pour une tentative de crime et divers délits, de sorte que, comme le montre l’examen de l’ensemble des pièces de procédure établies à cette occasion, et spéciale-ment l’ordonnance de placement en détention provisoire et le mandat de dépôt, la détention provisoire avait, à la lumière des critères de l’article 144 du code de procédure pénale, pour fondement autant le crime que les délits pour lesquels l’intéressé venait d’être mis en examen ; qu’ainsi, après la décision de la chambre de l’instruc-tion annulant la mise en examen du seul chef criminel, le titre de détention initial demeurait en principe valable en était, du fait de cette décision, de plein droit soumis aux règles de la détention provisoire en matière correction-nelle, l’annulation partielle de la mise en examen étant en toute hypothèse sans conséquences sur la validité des actes établis antérieurement, sauf pour le magistrat saisi à considérer que la situation de l’intéressé devait être revue au regard des critères des articles 144 et suivants du code de procédure pénale" cette analyse est toujours d’actualité. (…).

– sur la prolongation de la détention provisoire ; que sur la durée de la détention provisoire M. X... a été mis en examen pour des délits punis d’une peine d’emprison-nement de dix ans, pour les plus graves ; qu’il a été placé

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tion ; qu’en l’espèce, après l’annulation partielle de sa mise en examen par un arrêt du 18 janvier 2017, M. X... demeurait mis en examen exclusivement pour des faits de nature correctionnelle ; qu’en confirmant l’ordon-nance du 26 janvier 2017 ayant prolongé la détention provisoire du demandeur, lorsque celle-ci était interve-nue près de huit mois après son placement en détention provisoire le 28 mai 2016, la chambre de l’instruction a violé les articles 113-5, 145-1 et 174-1 du code de procé-dure pénale » ;

Attendu que, pour confirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant la déten-tion provisoire de M. X..., après avoir rappelé que, par une précédente décision, la chambre de l’instruc-tion avait considéré que l’article 146 du code de pro-cédure pénale n’était pas applicable à la situation de l’intéressé, qui, à compter de l’annulation par ladite chambre de la mise en examen du seul chef crimi-nel, bénéficiait du statut de témoin assisté pour les faits criminels, l’arrêt retient qu’après cette décision d’annulation, le titre de détention initial demeurait en principe valable, cette annulation partielle de la mise en examen étant sans conséquence sur la validité des actes établis antérieurement, sauf pour le magistrat saisi à considérer que la situation de l’intéressé devait être revue au regard des critères des articles 144 et suivants du code de procédure pénale ; que les juges relèvent que le régime de détention applicable est celui des articles 145-1, alinéa 2, et, le cas échéant, 145-3 du code de procédure pénale, la période de détention provisoire étant de quatre mois renouvelable deux fois ;

Attendu que, si c’est à tort que les juges énoncent que le demandeur doit être considéré comme témoin assisté, au regard des faits objet de la mise en exa-men annulée, à compter de l’arrêt d’annulation et non de l’interrogatoire de première comparution, l’arrêt n’encourt pas pour autant la censure dès lors que la détention du demandeur, toujours mis en examen des chefs de délits pour lesquels il encourait une peine de dix ans d’emprisonnement, pouvait être prolongée dans les conditions prévues par les articles 145-1 et 145-3 du code de procédure pénale ;

Qu’en effet, dans le cas où la mise en examen pour des faits recevant une qualification criminelle et des faits relevant d’une qualification correctionnelle, pour laquelle la personne concernée peut être placée en détention provisoire, a été annulée pour les faits criminels, le titre de détention demeure valable et la détention se trouve soumise, à compter du jour où la décision d’annulation est devenue définitive, aux règles qui découlent de la qualification des faits prévues aux articles 145-1 et 145-3 du code de procédure pénale, compte tenu de la durée de détention déjà écoulée depuis qu’elle a été ordonnée ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Parlos – Avo-cat général : M. Cuny – Avocats : SCP Spinosi et Su-reau

ou prolongée que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objec-tifs définis par ce texte et que ceux-ci ne pourraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique ; que les risques ci-dessus décrits ne pourraient être écar-tés par aucune obligations, si contraignante soient-elles, auxquelles l’intéressé pourrait être astreint dans le cadre d’un placement sous contrôle judiciaire, qui procède par essence d’un contrôle a postériori ; qu’il en va de même en matière d’assignation à résidence avec surveillance électronique, une telle mesure ne permettant pas, notam-ment, de prévenir suffisamment les risques de pression sur les témoins ou de concertation frauduleuse ; qu’à la lumière des explications ci-dessus et au regard des élé-ments précis et circonstanciés qui résultent de la procé-dure, exposés précédemment, la détention provisoire de M. X... constitue l’unique moyen de :

– conserver les preuves et indices matériels nécessaires à la manifestation de la vérité et prévenir toute concerta-tion entre l’intéressé et les coauteurs ou complices.

– prévenir le renouvellement de l’infraction.– garantir le maintien de la personne à la disposition

de la justice dans son ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention, le magistrat instructeur fait état d’investigations encore en cours, que ce soit sur commis-sion rogatoire ou en termes d’expertises ; qu’il apparaît en outre que la teneur des explications de M. X... imposent un surcroît de vérifications, destinées à identifier les autres personnes ayant pris part au projet criminel et, à tout le moins, celles qui ont apporté ou devaient appor-ter, s’il n’avait été appréhendé, assistance au mis en cause, comme il l’admet lui-même ; que même si l’intéressé a été interpellé depuis huit mois, il apparaît que ces recherches sont toujours d’actualité compte tenu de la gravité des faits et de l’impérieuse nécessité de prévenir tout passage à l’acte ou nouveau projet criminel ; qu’il en ressort que le délai prévisible d’achèvement peut être fixé à quatre mois en l’état du dossier ; que l’ordonnance sera confirmée ;

« 1° alors que lorsqu’une personne a été mise en exa-men pour des faits correctionnels et criminels, l’annu-lation de sa mise en examen pour les faits criminels entraîne nécessairement la nullité du mandat de dépôt criminel dont elle faisait l’objet ; qu’en l’espèce, M. X... a été mis en examen pour des faits délictuels ainsi que du chef de tentative de meurtre en bande organisée et a été placé sous mandat de dépôt criminel le 28 mai 2016 ; que par un arrêt du 18 janvier 2017, la chambre de l’ins-truction a annulé sa mise en examen de ce dernier chef ; qu’en affirmant que le titre de détention initial demeu-rait valable malgré cette annulation, la chambre de l’ins-truction a méconnu les dispositions des articles 113-5 et 174-1 du code de procédure pénale ;

« 2° alors qu’en matière correctionnelle, la détention provisoire ne peut excéder quatre mois, en l’absence de décision de prolongation intervenue dans ce délai ; que lorsque la chambre de l’instruction annule une mise en examen pour violation des dispositions de l’article 80-1 du code de procédure pénale, la personne est considérée comme témoin assisté, au regard de l’infraction en cause, à compter de son interrogatoire de première comparu-

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du service des douanes les textes applicables et les éven-tuels éléments de jurisprudence, aux pièces cotées D 168 à D 196, et en limitant la cancellation ordonnée aux cotes D 154, D 155 et D 164 de la phrase commençant par "textes applicables" et se terminant par "jurisprudence", et a dit n’y avoir lieu à annulation pour le surplus ;

« aux motifs qu’il est rappelé dans l’article 81 du code de procédure pénale que le juge d’instruction "instruit à charge et à décharge" ; qu’en l’espèce, le magistrat ins-tructeur a, dans la commission rogatoire critiquée, chargé les officiers de police judiciaire "d’établir un procès-ver-bal d’investigations récapitulatif précisant les éléments à charge pour chaque infraction, et pour chacun des deux mis en cause, en indiquant à chaque fois les pièces de pro-cédure visées" ; qu’or à la lecture attentive de cette mission dont la rédaction ne peut qu’être qualifiée de maladroite, il convient de relever que le magistrat n’a pas sollicité la recherche des seuls éléments à charge comme le sou-tiennent les requérants mais la rédaction d’un document récapitulatif précisant, c’est-à-dire faisant apparaître clai-rement, les éléments à charge, que son souci évident dans un dossier déjà ancien, était de clarifier les choses ; que, de plus, l’exécution de la commission rogatoire montre que le principe de l’impartialité a été respecté puisque les enquêteurs ne se sont pas contentés des seuls éléments à charge et ont intégré synthétiquement les réponses appor-tées par les mis en examen lors de leurs auditions et ont noté ce qui pouvait être retenu comme ce qui ne pouvait pas l’être contre chacun des mis en examen ; qu’ils ont présenté ce document sous forme de tableau facilitant la compréhension des faits, permettant en conséquence aux mis en examen d’y apporter des éléments de défense ; que rien ne permet de dire que le juge a manqué à son devoir d’impartialité en demandant un document de syn-thèse précis sur les charges facilitant leur discussion par la suite et ce d’autant que la réalisation de la commission rogatoire satisfait à l’obligation d’instruire à charge et à décharge ; qu’aucune nullité tirée de ce second moyen n’est donc encourue ;

« 1° alors que le juge d’instruction procède, confor-mément à la loi, à tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité ; qu’il instruit à charge et à décharge ; qu’une commission rogatoire donnée afin d’établir un procès-verbal d’investigation récapitulatif précisant uniquement les éléments à charge pour chaque infraction méconnaît la règle précitée ; qu’en refusant d’annuler la commission rogatoire litigieuse, comportant un tel libellé, et les actes pris en exécution de celle-ci, au motif que la rédaction de la mission donnée ne pouvait qu’être qualifiée de maladroite, le juge d’instruc-tion ayant entendu viser un document récapitulatif fai-sant apparaître clairement les éléments à charge, quand rien dans l’acte critiqué, qui ne disait mot des éléments à décharge, ne permettait d’attribuer son libellé à une mala-dresse rédactionnelle, la chambre de l’instruction, qui a méconnu la portée des termes de la commission rogatoire, n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;

« 2° alors qu’en refusant d’annuler la commission roga-toire litigieuse et les actes pris en exécution de celle-ci au motif que la rédaction de la mission donnée ne pouvait qu’être qualifiée de maladroite, tout en justifiant, par ail-

Sur le régime de la détention provisoire en cas de changement de qualification des faits au cours d’une information, à rapprocher :Crim., 9 janvier 1997, pourvoi n° 96-85.211, Bull. crim.

1997, n° 8 (1) (rejet), et les arrêts cités ;Crim., 26 avril 2017, pourvoi n° 17-80.979, Bull. crim.

2017, n° 126 (rejet).

No 128

INSTRUCTIONPouvoirs du juge – Actes utiles à la manifestation

de la vérité – Régularité – Conditions – Instruc-tion à charge et à décharge – Défaut – Sanction

Le juge d’instruction doit effectuer tous les actes qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité en veillant à l’équilibre des droits des parties et au caractère équita-ble de la procédure, et en instruisant, de façon impar-tiale, à charge et à décharge.

Encourt en conséquence la nullité une commission rogatoire ne visant qu’à établir les seuls éléments à charge des infractions poursuivies.

CASSATION sur les pourvois formés par Mme Chris-telle X..., épouse Y..., M. Vincent Y..., contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, en date du 21 octobre 2016, qui, dans l’infor-mation suivie contre eux des chefs d’exécution d’un travail dissimulé, vente ou mise en vente d’appareil, dispositif ou produit destiné à déceler ou perturber les instruments de constatation des infractions rou-tières, importation non déclarée de marchandises prohibées et infractions à la législation sur les armes, a prononcé sur une requête en nullité d’actes de pro-cédure.

26 avril 2017 No 16-86.840

LA COUR,Joignant les pourvois en raison de la connexité ;Vu l’ordonnance, en date du 30 janvier 2017, du pré-

sident de la chambre criminelle prescrivant l’examen immédiat des pourvois ;

Vu le mémoire produit commun aux demandeurs et les observations complémentaires ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, préliminaire, 81, 151, 152, 173, 206, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, du principe d’impartialité, du principe de l’égalité des armes, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir négatif :

« en ce que l’arrêt attaqué a prononcé une nullité seulement partielle de la commission rogatoire du 13 août 2012 et des actes pris en exécution de celle-ci, en limitant l’annulation à la partie de la mission sollicitant

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épouse, tous deux mis en examen, les 26 novembre et 8 décembre 2009, des chefs d’exécution d’un travail dis-simulé, vente ou mise en vente d’appareil, dispositif ou produit destiné à déceler ou perturber les instruments de constatation des infractions routières, importation non déclarée de marchandises prohibées et infractions à la législation sur les armes ; que le juge d’instruction a délivré, le 23 août 2012, une commission rogatoire aux services de gendarmerie aux fins "d’établir un procès-verbal d’investigations récapitulatif précisant les élé-ments à charge pour chaque infraction, et pour chacun des deux mis en cause, en indiquant à chaque fois les pièces de procédure visées" ; que les mis en examen ont demandé, au retour de l’exécution de la commission rogatoire, son annulation en ce qu’elle n’impliquait que l’accomplissement d’investigations effectuées à charge ;

Attendu que pour rejeter partiellement la demande de nullité, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que la commission rogatoire délivrée par le juge d’instruc-tion ne visait qu’à établir les seuls éléments à charge des infractions poursuivies, la chambre de l’instruction a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu d’examiner le

premier moyen de cassation proposé :CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions,

l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, en date du 21 octobre 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, autre-ment composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Moreau – Avocat général : M. Bonnet – Avocats : SCP Waquet, Farge et Hazan

No 129

JURIDICTION DE PROXIMITEExceptions – Exception de nullité – Exceptions

proposées oralement à l’audience – Défaut de conclusions écrites – Contrôle de la Cour de cassation – Possibilité (non)

Les exceptions de nullité peuvent être soulevées orale-ment à l’audience de la juridiction de proximité, et le juge est tenu d’y répondre. Toutefois, le jugement qui n’y répond pas n’encourt pas la censure dès lors que la Cour de cassation ne pourrait exercer son contrôle sur les réponses apportées en l’absence de conclusions écrites.

REJET du pourvoi formé par M. Frédéric X..., contre le jugement de la juridiction de proximité de Saint-Germain-en-Laye, en date du 25 mars 2016, qui,

leurs, le libellé particulier de la mission par le souci de faciliter la discussion des charges par la suite, conférant ainsi au libellé de la mission un caractère intentionnel, exclusif de toute maladresse, la chambre de l’instruction, qui s’est contredite, n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;

« 3° alors que ni le souci de "clarifier les choses" ni celui de faciliter la discussion des charges ne justifient une dérogation à la règle d’ordre public selon laquelle le juge d’instruction instruit à charge et à décharge ; qu’en déci-dant le contraire, la chambre de l’instruction a méconnu les textes et principes susvisés ;

« 4° alors que la régularité d’un acte d’instruction s’apprécie à la date à laquelle il a été pris ; que la viola-tion par un acte de procédure de la règle selon laquelle le juge d’instruction instruit à charge et à décharge ne peut être réparée par la manière dont cet acte est exécuté pos-térieurement à son édiction ; qu’en écartant la nullité de la commission rogatoire du 23 août 2012 au motif inopé-rant que la réalisation de cette commission satisfaisait à l’obligation d’instruire à charge et à décharge, la chambre de l’instruction a méconnu les textes et principes susvisés ;

« 5° alors qu’en toute hypothèse, le tableau synthétique (cotes D 209 à D 211) dont la chambre de l’instruction a déduit que l’exécution de la commission rogatoire avait satisfait à l’obligation d’instruire à charge et à décharge, est introduit par la mention "poursuivant l’enquête en cours, nous procédons à la recherche des éléments à charge pour chaque infraction et pour chacun des deux mis en cause", et se borne, pour l’essentiel, à répertorier les éléments à charge ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la chambre de l’instruction a méconnu la portée des pièces de la procédure, en violation des textes et principes susvisés ;

« 6° alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; que l’exigence d’impartialité est méconnue dès lors que sont rapportés des éléments pouvant, même en apparence, faire peser un doute raisonnable, objectivement justifié, sur l’impar-tialité du juge ; que la commission rogatoire donnée afin d’établir un procès-verbal d’investigation récapitulatif précisant uniquement les éléments à charge à l’égard des mis en examen porte atteinte au principe d’impartia-lité et aux intérêts des mis en examen, dans l’hypothèse même où le magistrat instructeur aurait seulement eu l’intention de clarifier les choses ou de faciliter la discus-sion des charges ; qu’en décidant le contraire, la chambre de l’instruction a méconnu les textes et principes susvi-sés » ;

Vu l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, ensemble les articles préliminaire et 81 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’il résulte de ces textes que le juge d’ins-truction doit effectuer tous les actes qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité en veillant à l’équilibre des droits des parties et au caractère équitable de la procé-dure et en instruisant, de façon impartiale, à charge et à décharge ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu’une information a été ouverte contre M. Vincent Y... et Mme Christelle X..., son

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tion de proximité a violé les textes et principes visés au moyen ;

« 2° alors qu’en retenant qu’elle n’était pas valablement saisie des conclusions de nullité orales et qu’elle n’était pas en mesure d’y répondre tout en les examinant pour les écarter, la juridiction de proximité s’est contredite, vio-lant ainsi les textes susvisés ;

« 3° alors que les jugements en dernier ressort sont déclarés nuls s’ils ne contiennent pas de motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne permettent pas à la Cour de cassation d’exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ; qu’en se bornant à énoncer que "la référence [erronée] de la catégorie du permis de conduire et la mauvaise date de délivrance de celui-ci sont des erreurs purement matérielles n’affectant en rien la régularité du procès-verbal", sans préciser les raisons pour lesquelles ces irrégularités ne relèveraient que de simples erreurs matérielles, la juridiction de proxi-mité n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle ;

« 4° alors qu’en retenant que "le prévenu ne saurait se faire grief d’une prétendue imprécision quant au lieu où à été constatée l’infraction alors qu’il est indiqué "échangeur de la grille de Maintenon" quand cette simple indication n’est pas de nature à identifier précisément le lieu où la prétendue infraction aurait été commise, la juridiction de proximité a méconnu les textes visés au moyen » ;

Attendu qu’il résulte du jugement et des pièces de procédure que l’avocat de M. X..., lequel était poursuivi pour avoir franchi un feu rouge fixe au volant de son véhicule automobile, a indiqué, avant toute défense au fond, vouloir soulever oralement des exceptions de nullité de la procédure ; qu’invité par le président de la juridiction à déposer des conclusions écrites par application des dispositions de l’article 459 du code de procédure pénale, celui-ci a soutenu, par ses seules observations orales, les exceptions de nullité du procès-verbal de constatation de l’infraction, tenant au relevé des indications concernant le permis de conduire du prévenu portées au procès-verbal et à l’imprécision du lieu des faits ;

Attendu qu’en l’absence de conclusions régulière-ment déposées et visées par le président et le greffier, la juridiction de proximité, tout en estimant qu’elle n’était pas valablement saisie des exceptions de nullité, y a répondu par les motifs reproduits au moyen ;

Attendu que, si c’est à tort que la juridiction de proximité s’est estimée non valablement saisie de ces exceptions, les articles 385 et 522, alinéa 4, du code de procédure pénale n’exigeant pas que les exceptions de nullité soient soutenues par écrit, son jugement n’en-court cependant pas la censure dès lors qu’en raison de l’absence de conclusions écrites, la Cour de cassa-tion n’est pas en mesure d’exercer son contrôle sur les réponses apportées par la juridiction :

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;Sur le second moyen de cassation, pris de la violation

des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, R. 412- 30 du code de la route, 591 et 593

pour inobservation de l’arrêt imposé par un feu de signalisation, l’a condamné à 135 euros d’amende.

26 avril 2017 No 16-82.742

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, préliminaire, 429, 459, 535, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, défaut de motifs :

« en ce que l’arrêt attaqué a constaté que la juridiction de proximité n’était pas régulièrement saisie de conclu-sions de nullité déposées "au début du procès" et n’était ainsi pas en mesure d’y répondre ;

« aux motifs que l’avocat du prévenu a été entendue sur ses observations sur les conclusions de nullité "in limine litis" développées oralement à l’audience (…) ; que, sur les conclusions de nullité orales, l’avocate du prévenu, passant outre aux observations du président de l’audience sur la nécessité de conclusions écrites réguliè-rement déposées, s’est présentée à la barre, en prétendant s’en tenir "au début du procès" à des conclusions pure-ment orales sans support écrit tendant à voir reconnaître deux irrégularités du procès verbal entraînant sa nullité ; mais que la juridiction de proximité n’est ainsi pas vala-blement saisie, en l’absence de conclusions visées par le président et le greffier, ce dernier mentionnant ce dépôt aux notes d’audience, comme il est prescrit à l’article 429 du code de procédure pénale, et n’est pas en mesure de répondre à des conclusions purement orales ; que le défaut de conclusions écrites ne permet pas aux juridic-tions devant lesquelles un recours est formé, d’exercer leur contrôle ; qu’en tout état de cause, la référence de la catégorie du permis de conduire et la mauvaise date de délivrance de celui-ci sont des erreurs purement maté-rielles n’affectant en rien la régularité du procès-verbal ; que le prévenu ne saurait se faire grief d’une prétendue imprécision quant au lieu où a été constatée l’infraction, alors qu’il est indiqué "échangeur de la grille de Mainte-non" ; que la force probante du procès-verbal régulière-ment dressé n’ayant pas été détruite par le prévenu dans les termes prévus par l’article 537 du code de procédure pénale, il convient de retenir la responsabilité pénale pour les faits qui ont été régulièrement constatés (…) ;

« 1° alors que, selon le principe de l’oralité des débats en matière pénale, et notamment devant la juridiction de proximité, les parties peuvent présenter oralement tant des exceptions que leur défense au fond ; qu’en retenant qu’elle n’était pas régulièrement saisie des conclusions de nullité du procès-verbal présentées oralement par l’avocat de M. X... et qu’elle n’était ainsi pas en mesure d’y répondre motifs pris qu’elle ne pouvait être valable-ment saisie que par des conclusions écrites visées par le président et le greffier et que "le défaut de conclusions écrites ne permets pas aux juridictions devant lesquelles un recours est formé, d’exercer leur contrôle", la juridic-

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CASSATION et désignation de juridiction sur le pour-voi formé par M. Etienne X..., contre le jugement de la juridiction de proximité d’Annecy, en date du 8 septembre 2015, qui, pour infraction à la régle-mentation sur le stationnement des véhicules, l’a condamné à 30 euros d’amende.

26 avril 2017 No 15-85.909

LA COUR,Vu le mémoire personnel produit ;Sur le premier moyen de cassation, pris de la viola-

tion de l’article 593 du code de procédure pénale :Vu ledit article ;Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter

les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure qu’un procès-verbal a été établi pour stationnement gênant du véhicule Toyota imma-triculé [...], sur une voie publique spécialement dési-gnée par l’arrêté municipal 2014-470 du 4 mars 2014, contravention constatée à Annecy, avenue de Brogny, le 4 août 2014, à 10 heures 36 ; que, cité devant la juri-diction de proximité, et régulièrement représenté à l’audience par son père, M. X... a fait valoir, d’une part, que cet arrêté municipal édictait illicitement une interdiction générale de stationner non conforme aux dispositions de l’article R. 417-10 du code de la route, d’autre part, que cette interdiction ne faisait l’objet, à la date d’établissement du procès-verbal, d’aucune signa-lisation par panneau ou marquage au sol ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable, le jugement énonce, notamment, que, selon l’article 25 de l’arrêté municipal du 4 mars 2014, les véhicules stationnés en dehors des emplacements payants maté-rialisés sur la chaussée sont considérés en stationne-ment gênant et qu’en stationnant son véhicule sur un emplacement non matérialisé au sol, le prévenu, qui ne rapporte pas la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal de contravention régulièrement établi, a bien commis les faits lui étant reprochés ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans répondre aux exceptions d’illégalité et d’inopposabi-lité de l’arrêté municipal précité proposées oralement pour le prévenu, avant toute défense au fond, et reprises explicitement dans le jugement, la juridiction de proxi-mité n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu d’examiner les

autres moyens de cassation proposés :CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le

jugement de la juridiction de proximité d’Annecy, en

du code de procédure pénale, manque de base légale, défaut de motifs :

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable des faits reprochés et l’a condamné à une amende contra-ventionnelle de 135 euros à titre de peine principale pour inobservation, par conducteur de véhicule, de l’arrêt imposé par un feu rouge ;

« aux motifs qu’il résulte des débats de l’audience et des pièces versées à la procédure que M. X... a bien com-mis les faits qui lui sont reprochés ; qu’il convient de l’en déclarer coupable et d’entrer en voie de condamnation à son encontre ;

« alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que pour déclarer M. X... coupable d’inobservation de l’arrêt imposé par un feu rouge, la juridiction de proximité s’est bornée à énon-cer qu’"il résulte des débats de l’audience et des pièces ver-sées à la procédure que M. X... Frédéric a bien commis les faits qui lui sont reprochés" ; qu’en se prononçant ainsi, la juridiction de proximité n’a pas justifié sa décision » ;

Attendu que les énonciations du jugement attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la juridiction de proximité a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé, en tous ses éléments, l’in-fraction dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D’où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que le jugement est régulier en la forme ;REJETTE le pourvoi.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Moreau – Avo-cat général : M. Gaillardot – Avocats : SCP Hémery et Thomas-Raquin

Sur le contrôle exercé par la Cour de cassation sur les exceptions de nullité soulevées devant la juridic-tion de proximité, à rapprocher :Crim., 26 avril 2017, pourvoi n° 15-85.909, Bull. crim.

2017, n° 129 (cassation).

No 130

JURIDICTION DE PROXIMITEExceptions – Exception de nullité – Exceptions

proposées oralement et reprises dans la décision attaquée – Contrôle de la Cour de cassation – Possibilité

Encourt la cassation le jugement d’une juridiction de proximité qui omet de répondre aux exceptions de nul-lité qui, bien que proposées oralement par la défense, sont explicitement reprises dans la décision attaquée, ce qui met la Cour de cassation en mesure d’en connaî-tre la teneur exacte et de vérifier qu’il y a été répondu, comme l’imposent les articles 385 et 522 du code de procédure pénale.

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352

tions fiscales, accessoirement à l’action publique, il se déduit des termes de l’article 712-11 du code de pro-cédure pénale qu’en matière d’application des peines, le droit d’appel d’une ordonnance du juge de l’application des peines relative aux obligations du condamné n’est ouvert qu’à ce dernier et au ministère public ;

Qu’en conséquence, l’appel de l’administration des douanes était irrecevable ; qu’il s’en suit que son pour-voi l’est également ;

Par ces motifs :DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé par

l’administration des douanes.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Moreau – Avo-cat général : M. Mondon – Avocats : SCP Boré et Salve de Bruneton

ARRÊT N° 2

IRRECEVABILITE du pourvoi formé par l’adminis-tration des douanes et des droits indirects, partie poursuivante, contre l’ordonnance n° 21 du président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel de Besançon, en date du 1er mars 2016, qui a déclaré sans objet son appel contre l’ordon-nance du juge de l’application des peines du tribu-nal de grande instance de Montbéliard, en date du 16 novembre 2015, portant mainlevée d’une obliga-tion particulière de M. Sébastien X... dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve.

26 avril 2017 No 16-83.653

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur la recevabilité du pourvoi :Sur le moyen relevé d’office pris de l’article 712-11

du code de procédure pénale, ensemble l’article 343 du code des douanes :

Attendu que si l’article 343, alinéa 2, du code des douanes permet à l’administration des douanes d’exer-cer à titre principal l’action pour l’application des sanc-tions fiscales, accessoirement à l’action publique, il se déduit des termes de l’article 712-11 du code de pro-cédure pénale qu’en matière d’application des peines, le droit d’appel d’une ordonnance du juge de l’application des peines relative aux obligations du condamné n’est ouvert qu’à ce dernier et au ministère public ;

Qu’en conséquence, l’appel de l’administration des douanes était irrecevable ; qu’il s’en suit que son pour-voi l’est également ;

Par ces motifs :DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé par

l’administration des douanes.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Moreau – Av-ocat général : M. Mondon – Avocats : SCP Boré et Salve de Bruneton

Dans le même sens que :Crim., 26 avril 2017, pourvoi n° 16-83.650, Bull. crim

2017, n° 130 (irrecevabilité).

date du 8 septembre 2015, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Chambéry, à ce désigné par délibéra-tion spéciale prise en la chambre du conseil.

Président : M. Guérin – Rapporteur : M. Laurent – Avocat général : M. Bonnet

Sur le contrôle exercé par la Cour de cassation sur les exceptions de nullité soulevées devant la juridic-tion de proximité, à rapprocher :Crim., 26 avril 2017, pourvoi n° 16-82.742, Bull. crim.

2017, n° 128 (rejet).

No 131

JURIDICTIONS DE L’APPLICATION DES PEINES

Juge de l’application des peines – Ordonnances – Ordonnance relative aux obligations du con-damné – Droit d’appel – Titulaires – Détermi-nation

Le droit d’appel contre une ordonnance du juge de l’application des peines relative aux obligations du condamné n’est ouvert qu’à ce dernier et au ministère public.

Est en conséquence irrecevable l’appel de l’administration des douanes formé contre cette ordon-nance (arrêt n° 1, pourvoi n° 16-83.650, arrêt n° 2, pourvoi n° 16-83.653).

ARRÊT N° 1

IRRECEVABILITE du pourvoi formé par l’adminis-tration des douanes et droits indirects, partie pour-suivante, contre l’ordonnance n° 22 du président de la chambre de l’application des peines de Besançon, en date du 1er mars 2016, qui a déclaré sans objet son appel contre l’ordonnance du juge de l’application des peines du tribunal de grande instance de Montbé-liard, en date du 16 novembre 2015, portant mainle-vée d’une obligation particulière de M. Raphaël X... dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve.

26 avril 2017 No 16-83.650

LA COUR,Vu le mémoire produit ;Sur la recevabilité du pourvoi :Sur le moyen relevé d’office pris de l’article 712-11

du code de procédure pénale, ensemble l’article 343 du code des douanes :

Attendu que si l’article 343, alinéa 2, du code des douanes permet à l’administration des douanes d’exer-cer à titre principal l’action pour l’application des sanc-

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129180040-000518 – Imprimerie de la Direction de l’information légale et administrative, 26, rue Desaix, 75727 Paris Cedex 15N o D’ISSN : 0298-7538No de CPPAP : 0503 B 05249

Le directeur de la publication : Le président de chambre à la Cour de cassation, directeur du service de documentation, d’ études et du rapport : Bruno PIREYRE Reproduction sans autorisation interdite – Copyright Service de documentation et d’ étudesLe bulletin d’information peut être consulté sur le site internet de la Cour de cassation :

http://www.courdecassation.fr

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Avril2017

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